Boxoffice Pro n°460 – 17 janvier 2024
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EXPLOITATION<br />
UNE RECOMMANDATION DU MÉDIATEUR DU CINÉMA SUR LES<br />
AVANT-PREMIÈRES<br />
De plus en plus incontournable pour promouvoir les films et les salles, la pratique des<br />
avant-premières doit toutefois respecter le droit de la concurrence, rappelle le Médiateur<br />
pour sa première recommandation de l’année… et la première depuis septembre 2021.<br />
Avec un nombre de sorties chaque semaine « de plus en<br />
plus élevé », le Médiateur du cinéma constate tout d’abord<br />
combien l’organisation de projections en avant-première<br />
est devenue incontournable pour valoriser un film et<br />
« tester la réaction du public afin d’orienter son positionnement<br />
futur ». Outil de promo pour le distributeur comme<br />
pour l’exploitant qui valorise sa salle, l’avant-première<br />
est aussi vécue par le public comme une expérience<br />
positive « d’autant plus importante dans le contexte de la<br />
vive concurrence avec les plateformes ». Reste que certains<br />
cas observés ces dernières années <strong>–</strong> formats premium,<br />
exclusivité donnée à certains exploitants ou à un festival,<br />
projections le week-end… <strong>–</strong> ont conduit le Médiateur<br />
à rédiger sa recommandation, après concertation avec<br />
les professionnels. De façon générale, il rappelle que la<br />
pratique des avant-premières, « si elle est plébiscitée à la<br />
fois par les professionnels et le public, doit intervenir dans<br />
le respect du droit de la concurrence, préserver une<br />
équité de traitement et éviter de nuire à une exploitation<br />
commerciale du film dans la concurrence ».<br />
Sa recommandation s'articule en neufs points : dans le<br />
cas d’avant-premières exclusives liées à une technologie<br />
ou une salle particulière, il convient de respecter un<br />
principe d’équité pour éviter « une nouvelle forme de<br />
discrimination entre cinémas sur la base de leurs équipements<br />
technologiques, lorsque les performances sont comparables<br />
et adaptées à la nature du film ». Idem s’il s'agit de<br />
promouvoir certains formats premium ou un circuit<br />
par rapport à un autre.<br />
Les avant-premières exclusives liées à un opérateur ne<br />
doivent pas aboutir à un éventuel « abus de position<br />
dominante », tandis qu’un festival programmant une<br />
avant-première doit tenir compte des exploitants établis<br />
dans sa zone. Quant à la gratuité d’une avant-première,<br />
elle « doit être étudiée au cas par cas ».<br />
L’organisation massive et systématique d’avant-premières,<br />
sans accompagnement spécifique et le week-end, « est<br />
susceptible de créer les mêmes effets perturbateurs du marché<br />
que les sorties anticipées », notamment dans les monoécrans,<br />
compte tenu des déprogrammations qu’elle suscite<br />
<strong>–</strong> déprogrammation qui ne peut se faire sans l’accord<br />
préalable du ou des distributeurs concernés. De façon<br />
générale, les avant-premières « ne devraient pas occuper les<br />
séances du week-end, hormis, pour les seuls films destinés<br />
au jeune public, celles du dimanche matin ».<br />
Dans le cas d’avant-premières ayant lieu dans un lieu<br />
autre qu’une salle de cinéma et/ou à l’initiative d’une<br />
collectivité, celle-ci ne peut privilégier un exploitant au<br />
détriment d’un autre, « d’autant plus si le film a été tourné<br />
localement, ce qui implique un accès à la billetterie de tous<br />
les cinémas de la zone qui sont demandeurs ».<br />
Enfin, l’organisation d’une avant-première dans un<br />
établissement n’équivaut pas systématiquement à un<br />
engagement de programmation du film dans ce lieu.<br />
Cécile Vargoz<br />
LE CNC PRÉCISE SES PISTES SUR LA RÉFORME ART ET ESSAI<br />
Convié aux Rencontres Recherche et Découverte du GNCR au Méliès de Montreuil (9 et<br />
10 <strong>janvier</strong>), le Centre a fait un point sur les discussions autour de l’un des dossiers<br />
brûlants du secteur, évoquant également les engagements de programmation.<br />
©GNCR<br />
l’on soit à Paris, Argenton-sur-Creuse ou Figeac. Nous ne<br />
sommes pas tous égaux face au public, aux bassins de population,<br />
et il faut aussi se questionner sur les commissions<br />
régionales et leur organisation. » Le CNC s’est d’ailleurs<br />
penché sur une évolution du fonctionnement desdites<br />
commissions, et prévoit toujours de faire valider la réforme<br />
art et essai lors de son conseil d’administration de la fin<br />
mars. « Elle n’aura pas d’impact sur le classement <strong>2024</strong>, a<br />
rassuré Corentin Bichet, chef de service de l’exploitation<br />
du CNC. Mais il est important que les salles s’emparent du<br />
nouveau classement pour le prendre en compte dans<br />
leur programmation. »<br />
« Nous commençons à avoir des lignes directrices suite aux<br />
nombreuses concertations », a lancé Catherine Verliac.<br />
Concernant les deux préconisations du rapport Lasserre<br />
sur cette réforme <strong>–</strong> valoriser la sélectivité et pondérer les<br />
séances “art et essai” en fonction du potentiel commercial<br />
des films <strong>–</strong>, la directrice adjointe du cinéma du CNC a<br />
indiqué que tous les professionnels étaient favorables à<br />
une pondération. Soit l’application d’un coefficient<br />
multiplicateur plus petit pour les séances des titres sortant<br />
plus de 400 copies, afin de réduire l’impact sur l’aide<br />
perçue par la salle et, à l’inverse, plus grand pour les<br />
séances des films “fragiles” (moins de 80 copies), dont<br />
ceux Recherche et Découverte. « Nous avons mis en place<br />
un modèle pour tester les seuils et démarré les simulations »,<br />
a précisé Catherine Verliac, notant par ailleurs que, pour<br />
Échange entre Catherine Verliac et<br />
Corentin Bichet du CNC, Séverine Rocaboy<br />
de l'Acrif, Gautier Labrusse et Jérôme<br />
Brodier du GNCR, lors des rencontres<br />
Recherche et Découverte,<br />
éviter que des distributeurs adaptent leur plan de sortie<br />
en fonction de ces seuils, ces derniers pourraient ne pas<br />
être fixes et dépendre de l’ensemble des plans de sorties<br />
de films. « Ce mécanisme permettra de ne pas exclure les<br />
salles classées, puisque les seuils d’entrée dans le classement<br />
resteront les mêmes, mais de répartir l’enveloppe différemment.<br />
»<br />
Réagissant depuis la salle, Guillaume Bachy a réitéré sa<br />
réticence sur ce type de pondération : « Le calcul ne peut<br />
pas se baser sur le nombre de copies en sortie nationale, donc<br />
sur la volonté du distributeur. » Le président de l’Afcae a<br />
également rappelé l’importance de prendre en compte<br />
la territorialité dans le classement : « Le travail sur Anatomie<br />
d’une chute ou un film Recherche n’est pas le même que<br />
Dans le reste des échanges, Catherine Verliac a également<br />
mentionné les engagements de programmation, soulignant<br />
que le Centre disposait désormais de l’outil juridique<br />
pour les faire appliquer. « Nous avons commencé un premier<br />
tour de concertations avec les professionnels pour redéfinir<br />
les lignes directrices, donc la situation va avancer dans les<br />
semaines à venir. »<br />
Cet échange avec le CNC s’inscrivait donc comme l’un<br />
des temps forts de ces Rencontres organisées par le<br />
Groupement national des cinémas de recherche (GNCR),<br />
en partenariat avec l’Association des cinémas de recherche<br />
d'Île-de-France (Acrif). Cette deuxième édition était une<br />
nouvelle fois hébergée par le Méliès de Montreuil et a<br />
permis, outre la projection de six films en avant-première,<br />
aux participants d’assister à une discussion avec le cinéaste<br />
Albert Serra et à un portrait de salle consacré au Studio<br />
43 de Dunkerque.<br />
Tanguy Colon<br />
26 N°460 / <strong>17</strong> <strong>janvier</strong> <strong>2024</strong>