TRUMPET ORGAN - Naxos Music Library
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imprégnées de cultures différentes: tandis que<br />
Messiaen était surtout fasciné par la rythmique<br />
incroyablement multiforme de la musique indienne,<br />
Takemitsu cherchait à transmettre une philosophie<br />
d’Extrême-Orient ainsi que les réalisations occidentales<br />
avant-gardistes. La composition « Paths » (1994),<br />
consacrée à la mémoire de Witold Lutoslawski, évoque,<br />
grâce à l’alternance d’un son ouvert/bouché de<br />
la trompette, un long dialogue imaginaire entre un<br />
argumentant réel contemporain et un répondant<br />
semblant surgir de quelque sphère lointaine.<br />
Quant à l’orgue, celle-ci intervient également dans<br />
cette réalisation par l’intermédiaire de deux soli : «<br />
Evocation II» de Thierry Escaich et Passacaille de<br />
Dimitri Chostakovitch y révèlent des acoustiques et<br />
des sentiments extrêmes. L’“Evocation II“ (1996) ressemble<br />
à un jaillissement éblouissant d’énergies :<br />
une pédale inférieure palpitant presque continuellement,<br />
écho du trépignement de danses rituelles, établit<br />
le fond sonore pulsatile ; celui-ci met en lumière<br />
un kaléidoscope composé d’une antiphonie grégorienne,<br />
d’une phrase rythmiquement accentuée, et<br />
d’une mélodie du psautier des Huguenots genevois ;<br />
toutes semblent se poursuivre, tourbillonnant autour<br />
d’un courant d’aspiration surpuissant, s’élançant par<br />
deux fois « vers la lumière céleste» (Escaich).<br />
La résonance de la passacaille de Chostakovitch<br />
n’est pas moins intense que celle de l’ « Evocation »,<br />
mais au lieu de fendre les cieux, elle entrouvre des<br />
gouffres. Le principe de la forme d’une passacaille<br />
est de combiner une ligne de basse immuablement<br />
répétitive avec des contrechants toujours nouveaux,<br />
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littéralement prisonniers de la basse, tels des détenus<br />
ligotés à une chaine. L’incessant retour de la<br />
même forme évoque le sentiment de l’inexorable,<br />
voire l’inévitable dont Chostakovitch tire profit.<br />
Chaque fois qu’il recourt à la forme de la passacaille,<br />
sa musique annonce des tragédies et des calamités<br />
inexprimables ou concrètes : il en est ainsi de la<br />
passacaille de l’opéra «Lady Macbeth de Mzensk »<br />
(1934) – où l’amplification d’une énergie oppressante<br />
va complètement s’affaisser à la fin. La passacaille<br />
retentit dans l’opéra comme un interlude entre le<br />
quatrième et le cinquième tableau. Katherina, l’héroïne<br />
tragique de l’oeuvre, a tué le beau père qui la<br />
tyrannise et s’apprête à passer la nuit avec son<br />
amant Sergej. L’orgue, élément ecclésiastique,<br />
accompagne ainsi deux pêchés mortels. Pour reproduire<br />
ce concept dans les salles d’opéras, ne disposant<br />
généralement d’aucun instrument semblable à<br />
l’orgue, Chostakovitch transcrira la passacaille pour<br />
orchestre. Par rapport aux deux soli excessifs de l’orgue,<br />
l’association orgue et trompette se déroule plus<br />
sereinement. « Semaine Sainte à Cuzco » (1962)<br />
d’Henri Tomasi est inspirée des célébrations de la<br />
semaine sainte de Cuzco, pour lesquelles la ville<br />
péruvienne est réputée. Le début et la fin enserrent<br />
des sons de fanfare, des harmonies polytonales<br />
accusées et un choral imaginaire (à la pédale d’orgue)<br />
; cependant, la paisible section centrale dispense<br />
une ferveur sacrée grâce aux clausules (semblables<br />
aux psalmodies des prières) et grâce à l’invocation<br />
divine de la trompette, animée de pentatoniques<br />
et à l’apogée de sa vibration emphatique.