Intégrale Federico Fellini - Cinémathèque suisse

Une journée avec Alain Cavalier
éVéNEMENTS 5
Il est dur pour un cinéaste d’être surpris. Véritablement surpris. Oser la forme qui vit malgré son auteur, qui produit
du sens hors de sa volonté, qui lui donne à voir, à lui aussi.
Les jeunes réalisateurs jouent souvent les étonnés, font les naïfs et attendent qu’on leur confirme bien qu’ils sont
originaux, différents, en rupture. Voir géniaux. Dans le meilleur des cas, ce n’est que l’expression du besoin d’être
admis autour de la table, dans le pire, c’est l’envie d’être reconnu.
Mais être surpris, c’est une autre affaire.
Chez Alain Cavalier, cela est venu avec le temps. Comme si les années avaient poli l’homme, en avaient déridé la
pratique cinématographique, l’avait rendu lisse à tout préjugé formel ou sémantique, laissant le champ libre à la surprise,
à l’étonnement véritable. Non pas que La Chamade ou Le Combat dans l’île eussent été de mauvais films, mais
leur capacité à étonner, à détonner sont très volontaristes. Peut-être parce que l’époque était à la trouvaille, au coup
d’éclat et que le jeune Cavalier devait jouer des coudes pour avoir voix au chapitre. Et dire le «je» qui caractérise le
cinéma d’auteur francophone. Cette première personne du singulier a fait place à la troisième alors qu’Alain Cavalier
rejoignait le rang des spectateurs, invitant le filmeur à prendre sa place. J’ai l’impression que cette conjugaison de
son cinéma sur les trente dernières années le laisse aujourd’hui sans voix, mais pas sans image, face à ce qu’est un
film. Est-ce un récit? La vie en mieux? Un acte de résistance? J’aime imaginer qu’Alain Cavalier n’a pas de réponse,
qu’il attend son prochain long métrage afin d’en savoir encore moins et de se surprendre à voir ce que son filmeur
de double va produire comme motif.
Il est dur pour un cinéaste de devenir Alain Cavalier.
Lionel Baier, responsable de l’Unité de Cinéma à l’Ecal
En collaboration avec la Cinémathèque suisse, Alain Cavalier donne une masterclass le vendredi 6 mai de 9h à 13h,
à l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL), 5 avenue du Temple, Renens (entrée libre).
Vendredi 6 mai à 9h à l’ECAL
Alain Cavalier sur le tournage de René (2001)