67-Intercalaire page témoignages - Centre Musiflore
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TEMOIGNAGES DES HABITANTS<br />
u Achard Adrien<br />
u Achard Marcel<br />
u Dufour Julia<br />
u Jullian Louise et Léon<br />
u Patonnier Charles et Florence<br />
u Vincent Emma<br />
u Les rédacteurs du Bulletin<br />
Municipal<br />
<strong>67</strong>
Grive litorne :<br />
Gros oiseau. Tête grise, dos<br />
marron, croupion gris clair,<br />
queue pratiquement noire.<br />
Dessous des ailes blanc. Cri :<br />
tia tia ou kia kia.<br />
Grive draine :<br />
Gros oiseau. Grise de la tête au<br />
croupion. Dessous des ailes<br />
blanc.<br />
68<br />
La vie à Crupies autour des années 30<br />
Témoignage de Marcel Achard<br />
Dans les années 30, Crupies avait environ 40 maisons habitées et<br />
une seule résidence secondaire à la Combe, maison Marcel.<br />
Vingt-cinq fermes vivaient du revenu du travail de la terre. Chaque<br />
ferme possédait entre 5 et 10 hectares de terre travaillable. Les gens<br />
cultivaient des céréales pour leur consommation, du fourrage pour<br />
nourrir les animaux, un potager, élevaient une basse cour. Chaque<br />
ferme possédait 15 à 20 chèvres et une trentaine de brebis en<br />
moyenne. Il y avait très peu de chevaux et pas de vaches jusqu’en 1950.<br />
Madame Barnier (arrière grand-mère de Guy Patonnier) et ses chèvres. Souvent,<br />
les enfants étaient “loués” pour garder chèvres ou brebis dès l’âge de 7 ans.<br />
Les labours se faisaient<br />
avec 2 bœufs de travail,<br />
mais certains les avaient à<br />
2, une semaine chacun.<br />
Les revenus n’étaient<br />
pas importants, mais<br />
les habitants vivaient de<br />
leurs récoltes, de leur<br />
jardinage, de leurs fruits<br />
et des cochons.<br />
Ils en tuaient au moins<br />
un dans chaque<br />
maison. C’était l’époque de la race des cochons noirs de Bourdeaux, très<br />
gros, avec de longues oreilles et qui produisaient beaucoup de lard.<br />
Ceux-ci ont duré jusqu’à l’arrivée de la race anglaise “ large white ”, donc<br />
blancs, peu avant 1940. Les porcelets se vendaient aux foires de<br />
Bourdeaux ou à domicile. Chaque ferme avait deux ou trois truies<br />
reproductrices. Au 31 décembre 1923, le nombre de porcs dans<br />
l’arrondissement de Die est de 14 3<strong>67</strong>.<br />
Les gens de Crupies vendaient des cerneaux de noix, des œufs, des lapins,<br />
des pintades, des dindes pour Noël... Les femmes fabricaient des tommes de<br />
chèvre et du picodon. Chaque semaine passaient 2 ou 3 coquetiers (1) qui<br />
achetaient ces produits et en échange vendaient de l’épicerie.<br />
Four à pain traditionnel (chauffage au bois). Toutes les maisons avaient le leur. A<br />
l’automne, les poires récoltées étaient séchées au four après la cuisson du pain.<br />
L’hiver, on les ressortait pour en faire des tartes; pour cela, il fallait les faire tremper<br />
d’abord tellement elles étaient “dures”. On les appelait d’ailleurs des “carnes”.<br />
Au croisement de la route de Vesc,<br />
Philidor Liautard et sa femme tenaient un<br />
café-épicerie-tabac dans une maison<br />
construite en 1900. Auparavant, le<br />
commerce se tenait dans la petite rue du<br />
village où il y avait la boîte aux lettres. Ils<br />
vendaient aussi de l’essence par bidons de<br />
cinq litres pour les quelques voitures et<br />
motos qu’il y avait. Juste avant 1939, la<br />
commune comptait seulement 3 voitures qui<br />
étaient des 5 CV Peugeot et une<br />
camionnette qui se trouvait au moulin.<br />
La cabine téléphonique a été installée en<br />
novembre 1926 chez Philidor Liautard<br />
également. Celui-ci a été maire de<br />
Crupies de 1908 à 1936 et a participé à la<br />
création des Mutuelles Agricoles (dont il<br />
fut président) ainsi qu’à la Mutuelle<br />
Incendie en 1912 et à la Mutuelle<br />
Accidents en 1924.<br />
A part l’agriculture, il<br />
y avait à Crupies un<br />
moulin à farine en<br />
face de l’école. Le<br />
meunier achetait le<br />
blé et donnait en<br />
échange de la farine<br />
et du son car tout le<br />
monde à peu près<br />
fabriquait son pain :<br />
il y avait un four à<br />
pain dans chaque<br />
maison.<br />
Victor Liautard et la 5 CV Peugeot<br />
de son fils Emile (dit Milet) en 1956<br />
(1) Marchands ambulants qui achetaient les produits de la ferme (oeufs, volailles, lapins, peaux de lapins , chevreaux).
En Novembre 1936, l’électricité a été installée sur la commune par la<br />
société Mascar et Allez. C’est Albert Achard, le nouveau maire qui a<br />
mis en marche le transformateur bâti au milieu du hameau du Moulin.<br />
On avait d’ailleurs dû couper l’arbre de la liberté, un peuplier , pour<br />
construire ce transformateur, démoli en 1990 et remplacé par un<br />
autre situé en bordure du Roubion.<br />
Il y avait également un menuisier, Séverin Plèche, qui faisait<br />
également la tournée de facteur auxiliaire sur les Tonils, à pied bien<br />
sûr, tout ça pour faire vivre sa nombreuse famille.<br />
Bien que réalisant de petits revenus, les familles arrivaient à vivre,<br />
car elles ne dépensaient pas beaucoup. Les hommes faisaient des<br />
journées de prestations sur les chemins communaux pour payer une<br />
partie des impôts fonciers. Les achats de vêtements avaient lieu aux<br />
foires de Bourdeaux, une fois par mois, ou à Crest, à la Saint Pierre<br />
en juin, ou à la Saint Ferréol en septembre. Des marchands<br />
ambulants passaient ainsi que des colporteurs vaudois avec leurs<br />
baluchons. Ils proposaient des petits objets, peignes, chaussettes,<br />
casquettes... et livres religieux protestants bien sûr, dans un pays qui<br />
l’était presque à 100%.<br />
Dans chaque maison, il y avait trois générations qui vivaient<br />
ensemble, chacun avait son travail défini : les anciens faisaient le<br />
bois, l’entretien, les grands mères la cuisine. Il y avait aussi la lessive<br />
à faire trois fois par an environ. Cela se faisait dans un grand baquet<br />
(appelé “ bujaïro ” en patois) installé sur un chevalet à trois pieds. Au<br />
fond de celui-ci, on mettait de la cendre de bois enveloppée d’un<br />
vieux drap de lit. Ensuite, on posait dessus le linge sale sur lequel on<br />
vidait de temps en temps de l’eau bouillante ou “ lissiou ” qu’on<br />
remettait à réchauffer, cela pendant une journée au moins. Puis il y<br />
avait le rinçage à l’eau froide au lavoir en le tapant à genoux sur une<br />
grande pierre plate avec le battoir appelé “ picho ” en patois.<br />
Les jeunes femmes s’occupaient de leurs enfants, souvent nombreux et<br />
participaient au ramassage des récoltes avec leurs maris qui travaillaient<br />
la terre. Les enfants allaient à l’école qui existait depuis 1840.<br />
Scène de battage : sur le gerbier, les hommes jettent les gerbes<br />
dans l’avaloir. Au premier plan, le tracteur entraînant la courroie<br />
actionnant la batteuse.<br />
Tracteur à roues métalliques tirant une moissonneuse-lieuse.<br />
Faucheuse attelée à un tracteur à pneumatiques.<br />
Plus au sud, foins, blés ou raisins sont mûrs bien avant ceux de Crupies. Pour<br />
gagner de l’argent liquide, certains hommes louaient leurs services jusqu’en<br />
Camargue et “remontaient” au pays, au fur et à mesure où les récoltes mûrissaient.<br />
Grive mauvis (tourdre):<br />
La plus petite des quatre<br />
grives. Sourcils blancs.<br />
“Grivelures” du ventre<br />
plus ou moins alignées en<br />
stries verticales. Dessous<br />
des ailes orangé (couleur<br />
orange sanguine).<br />
Grive musicienne:<br />
Assez petite. N’a pas de<br />
sourcils blancs. Taches du<br />
ventre non disposées selon des<br />
lignes bien tracées. Dessous<br />
des ailes orange pâle.<br />
69
Pie :<br />
Corvidé. Plumage bicolore :<br />
blanc et noir à reflets bleuâtres.<br />
Nourriture : 40% de végétaux,<br />
60% d’insectes, de rongeurs et<br />
de passereaux malades, blessés<br />
ou morts.<br />
Corneille noire :<br />
Corvidé. Plumage noir de suie.<br />
Bec massif. Extrémité de la<br />
queue très droite. Envergure :<br />
95 cm. Omnivore. Vit en groupe.<br />
Le couple reste uni pour la vie.<br />
Peut vivre 70 ans.<br />
70<br />
Les paysans s’entraidaient<br />
pour beaucoup de<br />
choses; moissons que l’on<br />
coupait à la faux d’abord,<br />
puis avec l’aide des<br />
faucheuses vers 1910, et<br />
enfin des moissonneuses<br />
lieuses vers 1920. Il n’y en<br />
avait que trois dans la<br />
commune. Le battage<br />
avec les voisins donnait<br />
lieu à une fête. On y<br />
mangeait bien et on buvait<br />
également le vin produit au<br />
pays par des plants<br />
américains : Clinton,<br />
Couder, Seybel, qui<br />
avaient remplacé les<br />
Vendange du Clinton.<br />
plants français tués par le<br />
phylloxéra vers 1880.<br />
A la veillée, l’hiver avait<br />
lieu le triage des noix. On<br />
vendait les cerneaux et<br />
avec les débris, on faisait<br />
l’huile de noix au moulin<br />
des Tonils. En juin, c’était<br />
la cueillette du tilleul.<br />
Tous ces produits étaient vendus au coquetier.<br />
Comme distraction, les familles se réunissaient à la veillée et<br />
faisaient un bon réveillon avec saucisson, jambon et picodon et<br />
mangeaient parfois l’omelette aux truffes car on en avait dans les<br />
bois aux alentours. Il y avait aussi la fête du cochon où on allait<br />
manger les boudins et la fricassée.<br />
Les hommes allaient à la chasse pour tuer lièvres, lapins, perdreaux,<br />
grives. Ah ! la célèbre rôtie de grives ! Le sanglier n’est apparu en<br />
très petites quantités qu’à partir de la fin de la Grande Guerre. Les<br />
chevreuils ne sont arrivés que vers 1980.<br />
Dans la commune vivaient aussi<br />
un cantonnier-garde champêtre et<br />
deux facteurs qui travaillaient<br />
chacun une petite ferme. Certains<br />
faisaient aussi les maçons car à<br />
cette époque, les premières<br />
réparations des vieilles fermes<br />
commençaient à se faire.<br />
Quelques personnes âgées<br />
vivaient seules, comme elles<br />
pouvaient, car il n’y avait pas de<br />
retraites.<br />
La Société Mutualiste (Mutuelle<br />
des Pompiers fondée en 1884)<br />
avait été créée à Bourdeaux pour<br />
venir en aide aux malades et pour<br />
payer le médecin. Elle existe toujours, avec beaucoup d’adhérents.<br />
Au début tout le monde travaillait “ à bras ”, puis les premières<br />
machines sont arrivées. Les jeunes partaient ailleurs pour les<br />
saisons des vendanges, de l’olive ou dans le midi pour récolter le<br />
blé, avant les moissons d’ici plus tardives.<br />
Neuf hommes de Crupies furent tués pendant la guerre de<br />
1914/1918. Peu à peu, la population a diminué, les jeunes sont<br />
partis en ville ou ailleurs. Actuellement, il ne reste plus que huit<br />
exploitations agricoles, mais il y a vingt résidences secondaires. Les<br />
maisons ont été réparées, il y a même eu huit constructions neuves<br />
en moins de dix ans.<br />
La vogue annuelle se tenait aux beaux jours, le premier dimanche<br />
d’août, et elle existe toujours. A cette occasion se déroulait un bal<br />
avec orchestre, des jeux de boules (à la longue, la pétanque<br />
n’existait pas), un buffet, une buvette.<br />
Les jeunes n’avaient pas de moyens de locomotion pour aller très loin.<br />
Par conséquent beaucoup de mariages se déroulaient entre jeunes de la<br />
commune ou avec ceux des communes proches. Des contacts avaient<br />
cependant lieu avec la vallée de la Drôme protestante.
Au début des années 30,<br />
l’autobus Bourdeaux/<br />
Nyons/Crest faisait l’aller<br />
retour tous les jours.<br />
Le goudronnage des<br />
routes départementales<br />
Bourdeaux/Bouvières et<br />
Crupies/Vesc eut lieu en<br />
1937/1938. Après 1958,<br />
ce fut le tour des<br />
chemins communaux.<br />
Marcel Achard et sa Juva 4 en 1960.<br />
Ce qui s’est passé à Crupies<br />
durant la période 1938-1945<br />
Témoignage de Marcel Achard<br />
C’est dans cette période qu’en France, une ligne de démarcation<br />
limitait une zone occupée et une zone dite libre.<br />
Ici, nous étions en zone libre, mais nous étions tout de même<br />
occupés par des Italiens. Avec leurs chapeaux à plumes ; ils étaient<br />
bien !<br />
Ici, à Crupies dès 1938 nous avons eu des militaires. A cette date, le<br />
centre de recrutement de Montélimar recherchait des hommes<br />
auxiliaires pour être mobilisés sur des postes de guet, situés dans les<br />
montagnes.<br />
A Crupies, il se situait au “Béranger” (au dessus de l’école) .Une<br />
dizaine de militaires étaient là et essayaient de signaler et d’identifier<br />
tous les avions qui passaient ; ils devaient signaler tout le trafic<br />
aérien à Montélimar. Dans la région, il y avait d’autres postes de<br />
guet : La Bégude de Mazenc, La Bâtie Roland, Dieulefit, St Nazaire<br />
le Désert. Ils barraient la Drôme pour voir le passage entre le N et le<br />
S Drôme.<br />
Dix hommes volontaires d’ici firent une période d’information fin 1938,<br />
de 2 ou 3 jours. Après la déclaration de guerre en septembre 1939, ils<br />
furent remplacés par des plus jeunes de la région et mobilisés jusqu'à<br />
l’armistice de 1940. Des<br />
artilleurs de la classe 1939<br />
venus les remplacer pour<br />
un service de 3 ans<br />
obligatoires, construisirent<br />
une cabane d’observation.<br />
Ils logeaient dans la<br />
maison un peu plus bas<br />
puis chez Mme Dufour.<br />
En 1942, ils ont été<br />
démobilisés après leur 3<br />
ans de service<br />
obligatoire. Ensuite, il y eut les chantiers de jeunesse (jeunes<br />
employés pour des corvées : bois ou aménagements pour une<br />
période de 7 mois). A leur place, des aviateurs sont venus. C’étaient<br />
des engagés sous les ordres de Alexis Santini (alors sergent chef ;<br />
celui- ci fit ensuite l’école d’officier et devint commandant de la base<br />
du Bourget du Lac. Il s’est marié avec la seule femme devenue<br />
Général de France : Valérie Andrée. Elle est marraine du maquis de<br />
Félines sur Rimandoule).<br />
De cette équipe de soldats de l’armée de<br />
l’air, il est resté :<br />
• Julien Monin qui épousa Marguerite<br />
Liotard ; (elle habite au croisement) ; après<br />
sa carrière de commandant, il a passé sa<br />
retraite ici et il est décédé à Crupies il y a<br />
deux ans.<br />
• Lucien Thomasset, toujours à Crupies,<br />
actuellement à la retraite, qui a fait un<br />
travail de domestique de ferme chez le<br />
beau frère de Marcel Achard, Jean-Louis<br />
Armand.<br />
Poste d’observation aérienne. A sa démolition, les parpaings furent<br />
utilisés pour la construction du mur d’enceinte du cimetière communal.<br />
Lucien Thomasset<br />
Grand corbeau :<br />
Corvidé. Envergure 120 cm. Cri :<br />
cro - cro rauque. Peut vivre 80<br />
ans et plus. Omnivore.<br />
Corbeau freux :<br />
Corvidé. Plumage noir à reflets<br />
métalliques. Cuisses<br />
emplumées. Avec l’âge, la face<br />
devient blanchâtre. Bec plus<br />
long et plus mince que celui de<br />
la corneille. Vit en colonies.<br />
Omnivore.<br />
71
Chouette effraie :<br />
Face en forme de coeur. Yeux<br />
noirs. Dessous blanc pur à roux<br />
selon les individus. Envergure :<br />
90 cm. Long cri tremblé :<br />
crûûûûû.<br />
Chouette hulotte :<br />
Yeux noirs. Plumage gris ou roux<br />
selon les individus. Envergure :<br />
1m. Cri très puissant : kou - witt.<br />
Chant commençant par hou tout<br />
seul et se terminant par une suite<br />
de hou hou hou chevrotants.<br />
72<br />
Ici, on avait pas mal de maquisards qu’il fallait loger et nourrir.<br />
Certains logeaient dans la Chapelle St Jean ou dans les greniers à<br />
foin ou chez les gens. La cuisine se faisait au village de Crupies à<br />
côté de la maison de Pierrot ; il y avait une chaudière. On portait<br />
ensuite le ravitaillement dans les “ coins ” là-haut à travers la<br />
montagne vers la Vialle et ailleurs. Dans la vallée de la Drôme,<br />
beaucoup de maquis étaient installés sur les villages de Beaufort, la<br />
vallée de la Gervanne, Espenel. Ils ont été bombardés et détruits.<br />
Les allemands y sont venus et ont déporté beaucoup de monde.<br />
Parallèlement se passaient tous les problèmes du Vercors. Les<br />
maquisards de Vassieux attendaient les américains mais les<br />
premiers qui sont venus furent les planeurs allemands qui<br />
massacrèrent la population civile et de nombreux maquisards. Un<br />
homme est revenu à pied de là-haut, épuisé ; il avait traversé toute<br />
la montagne; il était parent de l’institutrice d’alors.<br />
Ici, il y avait des français pour la Résistance et des français contre.<br />
Certains, dits les “ collabo ” allaient chercher les maquisards pour les<br />
livrer à l’ennemi.<br />
Les miliciens cherchaient aussi les postes émetteurs. Un poste avait<br />
été détecté à Comps chez Abel Achard. Il était caché dans un<br />
souterrain derrière la maison. En juillet 1944, ils entourèrent la<br />
maison. Des gars étaient juste sur le poste mais ils ne l’ont pas<br />
trouvé ; cependant, les gens ont été déportés à Fort–Montluc à Lyon.<br />
Deux ou trois mois plus tard, Abel Achard est revenu mais Monsieur<br />
Morin est décédé en déportation.<br />
A Dieulefit, des Juifs habitaient dans la même maison que Marcel<br />
Achard à l’époque où il avait l’âge du cours complémentaire.<br />
Mademoiselle Barnier, toute jeune secrétaire de mairie faisait de<br />
fausses cartes d’identité pour les Juifs et les maquisards. Pour<br />
services rendus aux juifs, elle a été distinguée par le Gouvernement<br />
israélien en recevant la médaille des Justes.<br />
A Crupies, il y eut 5 crupians faits prisonniers en juin 1940 : Albert<br />
Achard (père), Albert Plèche du Moulinet, André Gougne<br />
(cantonnier), Charles Achard (engagé à 18 ans) et Léonce Dop, tous<br />
à présent décédés. Albert Achard fut libéré en 1941 car il avait eu la<br />
chance d’être né le 23 décembre 1899 ; Monsieur Dop restaurateur, fut<br />
également libéré car travaillant à la Croix Rouge, il fut considéré comme<br />
non militaire. Albert Achard était militaire en Alsace.<br />
Il partit avec les canons vers Paris, pourchassé par les Allemands mais<br />
arrivé à Nantes comme il<br />
Chantier de jeunesse au Muy, dans le Var. Gilbert Laurie,<br />
debout, est deuxième en partant de la gauche.<br />
il y revient pour des commémorations. Il y est bien reçu.<br />
n’y avait plus de port, il<br />
fut alors fait prisonnier.<br />
Comps était un centre<br />
de parachutage. Du<br />
matériel était parachuté<br />
pour les hommes du<br />
maquis. Le 1 er régiment<br />
de tirailleurs a également<br />
été parachuté au<br />
moment où les<br />
allemands débarquaient<br />
en Provence.<br />
Monsieur Poniatowski<br />
(ancien ministre) a été<br />
parachuté à Comps et<br />
Juin 1940 : Il y a eu des réfugiés en nombre. Les gens fuyaient<br />
comme ils pouvaient : en charrette, à vélo, à pied... Beaucoup sont<br />
venus ici à Crupies. Chez Albert Achard, ce furent des gens des<br />
Vosges. Plus tard, ils sont remontés en zone occupée.<br />
En 1942, une petite fille est venue avec sa mère pour avoir un poulet car en<br />
ville, ils n’avaient plus rien à manger. La petite est restée un certain temps à<br />
Crupies ; en 1943, elle a fait sa communion avec les protestants. Agée de 70<br />
ans, elle est revenue l’an passé avec sa fille ; elle habite Montpellier.<br />
Il y avait beaucoup de trafic entre les gens de Montélimar, Dieulefit,<br />
et ceux de la campagne. Ils échangeaient de l’alimentation contre<br />
des produits finis tels que des chaussures... Il y eut même un curé<br />
qui vint garder les moutons pour pouvoir trouver de quoi s’alimenter.<br />
Un jour , il y eut un bombardement par pièce d’artillerie sur rail<br />
stationnée à Montélimar ; ils tiraient vers ici. De la cime, les gens ont<br />
vu des obus de 400 tomber sur Comps, Orcinas, mais n’ont attrapé<br />
personne sauf une râteleuse qui fut broyée, vers Bézaudun.
6 juin 1944 : débarquement de<br />
Normandie<br />
Les militaires, dont Santini, partirent au<br />
maquis au col de Montjoux ce maquis<br />
existait depuis 1943, commandé par le<br />
lieutenant Narbonne. Au moment du<br />
débarquement de Provence, le 15 août,<br />
ils partirent dans la vallée du Rhône. Ils<br />
allaient arrêter les Allemands sur la N7<br />
au-dessus de Montélimar. Là, a eu lieu<br />
une fameuse bataille. (Une rencontre a<br />
lieu chaque année en juillet pour la<br />
commémorer).<br />
Les jeunes qui avaient quitté les<br />
chantiers de jeunesse, étaient mobilisés<br />
au Muy dans le Var.<br />
Gilbert Laurie aux chantiers de jeunesse<br />
en tenue de sortie - 1942.<br />
En mai 1943, ils s’échappèrent de là-bas de peur d’être envoyés en<br />
Allemagne. Certains allaient les chercher. Le beau frère de Marcel<br />
Achard (Raymond, père de Denis et Alain), s’est fait porter malade :<br />
une soi-disant jaunisse ; il en a profité pour s’enfuir. Il y avait aussi<br />
Gilbert Laurie (ancien maire de<br />
Crupies) et René Achard<br />
maintenant décédé. Ils n’étaient pas<br />
revenus chez eux bien sûr. Les<br />
gendarmes vinrent voir le maire<br />
(père de Marcel Achard) pour<br />
demander où était un tel ou un tel et<br />
alors le maire répondit : “En tant<br />
que maire , je devrais vous le dire,<br />
mais en tant qu’homme, bien que je<br />
sache, je ne le dirai pas.” Les<br />
fuyards couchaient dans les<br />
granges de fermes éloignées dans<br />
la montagne. Cela a duré jusqu’en<br />
juin 1944 c’est à dire environ<br />
pendant un an.<br />
Carte individuelle d’alimentation et tickets de rationnement.<br />
Ils rejoignirent les combattants FFI (Forces Françaises de l’Intérieur)<br />
dans la vallée de l’Eygues, région de Nyons - Sainte-Jalle au 15 août<br />
1944 .<br />
30 juin 1944 : bombardement de Saou ; il y eut beaucoup de morts.<br />
De chez Santini, des bombardiers en piqué ont été vus, ils ont détruit<br />
tout le village.<br />
20 juillet 1944 : mitraillage à Crupies par deux avions allemands. Un<br />
camion était stationné contre la maison de Madame Monin au<br />
croisement de la route du centre avec celle de Bouvières. Les avions<br />
ont mitraillé de partout mais sans toucher le camion. On retrouve<br />
encore des balles dans les murs des maisons (voir chez Lucette),<br />
dans les champs. Les gens du camion s’étaient cachés sous le petit<br />
canal qui descend. Personne n’a été blessé, ni attrapé.<br />
21 juillet 1944 : des planeurs sont passés, traînés par des avions<br />
qui venaient de la base d’Orange et qui devaient atterrir à Vassieux<br />
pour faire tout ce qui s’est passé là-bas (destruction et morts). Deux<br />
planeurs ont cassé leur câble et ont du atterrir sur la Paillette-<br />
Montjoux. Les maquisards ont fait prisonniers les pilotes sans leur<br />
faire de mal.<br />
Chouette chevêche :<br />
Petite comme un merle. Air<br />
hargneux à cause des sourcils<br />
froncés. Cri très sonore : wi - you.<br />
Chant : coui répété<br />
Aigle royal :<br />
A besoin d’un très vaste<br />
territoire. Tournoie à haute<br />
altitude. Envergure : 220 cm.<br />
73
Hibou grand duc :<br />
A quasiment disparu. Grands<br />
yeux orangé vif. A des aigrettes<br />
ou “oreilles”. Envergure : 170<br />
cm. Cri : hoû - ho sourd, répété<br />
jusqu’à une centaine de fois à<br />
la tombée de la nuit.<br />
Hibou moyen duc :<br />
Longues “oreilles”, yeux jaunes,<br />
plumage très rayé. Nourriture :<br />
essentiellement des souris.<br />
Envergure : 90 cm. Chant :<br />
hou - hou, peu sonore, répété à<br />
intervalles réguliers.<br />
74<br />
Un jour, courant 1944, des officiers allemands sont passés au poste<br />
de guet (quand Santini était encore là) pour surveiller les guetteurs<br />
et un officier allemand a dit à son chauffeur de side-car : “Tu sais, on<br />
est mieux ici qu’à Stalingrad !”<br />
En juin-juillet 1944, les FTPF (Francs Tireurs Partisans Français) et<br />
l’Armée Secrète étaient en position dans le tunnel pour barrer la<br />
route si nécessaire ; mais les allemands ne sont allés que jusqu'à<br />
Saou en montant par la vallée de la Drôme. Là-bas, ils ont fait<br />
beaucoup de dégâts. Il y a eu des maisons incendiées, des gens<br />
déportés...<br />
22 août 1944 : passage des premiers convois américains venant de<br />
la route des Alpes.<br />
Après l’Armistice du 8 juin 1945, dans toutes les communes, a été<br />
organisée une fête des prisonniers pour leur retour. La recette leur avait<br />
été partagée. A Crupies, cette fête comprenait un petit théâtre (revue<br />
locale faite par les jeunes) et ensuite un bal avec l’orchestre et la fanfare<br />
de Bourdeaux dirigée par Daniel Teyssaire, père de Renée Teyssaire.<br />
Dans les années qui ont suivi, beaucoup de mariages ont été<br />
célébrés et les enfants qui en sont nés ont à présent plus de 50<br />
ans ! ....<br />
L’inflation pendant et après la guerre<br />
Pendant la dernière guerre mondiale l’inflation fut galopante. Pour<br />
preuve, la progression des indemnités du secrétaire de maire et de<br />
la gérante du téléphone, de 1939 à 1953.<br />
* “ en raison de surplus de travail administratif occasionné par les statistiques, les cartes d’alimentation, les<br />
demandes de toute nature ”.<br />
1 “ son travail demande environ 3 heures et demi à 4 heures par jour, la population étant de 118 habitants ”.<br />
D’après le registre des délibérations du Conseil Municipal<br />
Patois ou Occitan ?<br />
Lou patois, dingu lo, parlo plus ! Le patois plus personne ne le<br />
parle !<br />
“ L’occitan, c’est la langue de tous les pays d’Oc, née du latin comme le<br />
français, l’italien, l’espagnol... Vers le 9 ème siècle après Jésus-Christ. ”<br />
“ L’occitan, c’est la langue de tous les pays d’Oc, mais elle est parlée<br />
sous une forme dialectale, c’est à dire suivant des variantes dans la<br />
prononciation et dans le vocabulaire . ”<br />
“ Le provençal est la variété d’occitan parlée en Provence, le languedocien<br />
en Languedoc, le Vivarais-Aupenc dans notre région. ”<br />
Mais à l’intérieur de ces formes dialectales, existent également des<br />
différences de prononciation. Est-ce cela le patois ?<br />
“ Grande langue de culture au Moyen-Age, c’est celle de la 1 ère poésie<br />
moderne, celle des troubadours. La langue occitane a été supplantée<br />
administrativement et socialement par le français” (1539 : Edit de Villers-<br />
Cotterets), “ mais elle est demeurée longtemps la langue du peuple ”.<br />
Du chiot au gros chien ou du simplet à l’abruti, un vocabulaire très expressif ! ! !<br />
“ chinou, chi, china, chinassa, chinassouria (chiens et dérivés)<br />
“ cayouné, cayou, cayouna (cochons et dérivés)<br />
“ bazu, bédigas, tarnagas, tacouria, tabélia ” (un peu dérangé, bêta,<br />
tête en l’air, plus que niais, l’idiot complet).<br />
Personne à notre connaissance, ne se souvient d’avoir subi des<br />
vexations de la part des enseignants à l’école. Est-ce parce que le patois<br />
s’est moins enraciné à cause du (ou grâce au) protestantisme ?<br />
On lisait la bible, en français ; on parle donc français dans notre région à<br />
grande majorité protestante. D’ailleurs, dans certaines familles<br />
protestantes, on ne parle pas patois depuis plusieurs générations.
Le patois, une langue verte.<br />
Un empeigne :quelque chose qui colle au dessous du soulier ; c’est à<br />
dire un em… en parlant de quelqu’un.<br />
Un curo féniéro : animal qui mange tout, un gros dépensier.<br />
Ei un vrai bastoun de jarinié : c’est un vrai perchoir de poulailler,<br />
(traduction littérale : c’est un vrai bâton de poulailler plein de m....)<br />
Un parler peu féministe.<br />
Uno cardelino : une femme autoritaire.<br />
Uno cambadieuse : (une gambadeuse) une femme légère, et son<br />
équivalent masculin : lou couratiaïre : le coureur de jupons.<br />
Un bouffo-fio : une femme restant au foyer.<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 6 - mars-avril 1985.<br />
La fée électricité<br />
“ La commune était toute installée et on devait inaugurer. Il y avait<br />
l’ingénieur de Bourdeaux : Schuzley. Tout le monde attendait ce moment.<br />
On m’avait dit : “ A telle heure vous serez au transformateur. Vous<br />
prendrez la manette et vous l’abaisserez. ”A l’heure dite, dans toute la<br />
région, ça s’est éclairé. Les gens disaient, et nous les premiers: "Mais,<br />
c’est qu’on voit les toiles d’araignées, maintenant ! ! ! ”.<br />
Au début, on avait une lampe dans la cuisine et dans les chambres.<br />
On en a mis treize par la suite.<br />
On ne connaissait pas certaines expressions employées par ceux qui<br />
posaient les installations : par exemple, on se demandait ce qu’était un va<br />
et vient ”.<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 10 - décembre 1986. Albert Achard, maire en<br />
1936.<br />
“ Autrefois, on s’éclairait à la lampe au pétrole. On y voyait moins<br />
clair, mais ça ne dérangeait pas. On avait l’habitude.<br />
C’est l’électricité qui a sans doute apporté le plus de confort. A Borne, on<br />
n’avait que des lampes à pétrole et des lampions.<br />
Les plus âgés brûlaient de l’huile de noix ; une mèche qui trempait dans<br />
un lampion, près de la cheminée. Mais moi je ne l’ai pas vu faire. ”<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 10 - décembre 1986 - Florence et Charles Patonnier - février 1982<br />
“ L’électricité ? C’est l’année où on s’est marié en novembre 36.<br />
Quand on s’est fiancé, ce sont les Girard de Bourdeaux qui faisaient<br />
l’installation électrique.<br />
On a mis le courant la veille de notre mariage le 25.<br />
Avant, on utilisait une lanterne. On attendait que l’un ait fini de<br />
donner aux bêtes dans une écurie pour continuer ailleurs. Ce n’était<br />
pas le rêve. Si on n’avait pas d’électricité maintenant on serait<br />
perdu”.<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 10 - décembre 1986. Louise et Léon Jullian, mars<br />
1982.<br />
“ Avant qu’on ait l’électricité, quand on arrivait, il fallait chercher les allumettes,<br />
la lampe à pétrole ou les lampions. On montait ou on descendait la mèche<br />
pour avoir plus ou moins de lumière. Bien sûr, ça fumait un peu.<br />
On a fait installer une quinzaine de points lumineux. Dans les<br />
chambres, on mettait des ampoules de 15 bougies pour dépenser<br />
moins. Les ampoules duraient moins que maintenant.<br />
Dans les étables ou les greniers à foin, les fils étaient entourés d’une<br />
sorte de tissu dans des tuaux.<br />
On n’avait pas de matériels qui fonctionnaient à l’électricité, sauf une<br />
bouilloire qu’on utilise encore pour le café. On a quand même<br />
changé la résistance ! ! ! ”.<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 10 - décembre 1986. Emma Vincent, novembre<br />
1986.<br />
“ C’était en 1936 ; je me souviens bien : c’était l’année de la<br />
naissance de mon fils ! C’est pour cela qu’on avait été les premiers à<br />
qui on l’avait installée.On mettait un abat-jour, vert par dessus, blanc<br />
par dessous, ce qui augmentait la luminosité.<br />
Avez-vous remarqué que les poteaux électriques sont marqués 1936 ?.<br />
On a pu avoir la radio vers 1938 . L’électricité, ça a apporté beaucoup de<br />
bien-être.<br />
Bulletin municipal de Crupies N° 10 - décembre 1986. Julia Dufour, novembre 1986.<br />
Hibou petit duc :<br />
Nourriture : surtout sauterelles<br />
et papillons. Envergure : 50 cm.<br />
Chant : tiou répétitif et régulier.<br />
Buse variable :<br />
Espèce migratrice. Pieds peu<br />
robustes, serres courtes. Ne peut<br />
chasser que de petits animaux.<br />
Les années où les souris<br />
abondent, elle pond plus d’oeufs<br />
et élève plus de petits que les<br />
années où il y en a peu.<br />
Envergure : 130 cm. Protégée.<br />
Cri aigu, miaulé.<br />
75
Coucou :<br />
Par ses rayures et sa couleur<br />
grise, le coucou ressemble à<br />
l’épervier. Par sa forme, longue<br />
queue, ailes en faux, il ressemble<br />
au faucon crécerelle. Mais il n’a<br />
pas le bec crochu. En vol, il garde<br />
la tête haute alors que les rapaces<br />
volent le plus souvent la tête<br />
baissée pour observer le sol.<br />
Faucon crécerelle :<br />
Petit rapace. Reconnaissable à<br />
son vol battu face au vent ou<br />
sur place : on dit qu’il fait le<br />
“Saint-Esprit”. Envergure : 75<br />
cm.<br />
76<br />
La tuade du cochon<br />
-“ Dis, Honorine, il faudrait tuer le cochon. La lune va être bonne (1). Il<br />
ne doit pas être loin des 200 kg ”.<br />
-“ Il faut le dire à Gustou pour qu’il vienne le saigner et nous aider à<br />
boudiner. Tu iras chercher la bachasse (2) . Moi, j’irai ramasser des<br />
sautournes (3) pour faire les boudins ”.<br />
Cinq heures du matin : Nestor allume la chaudière (4). L’eau doit<br />
bouillir quand le tueur arrivera.<br />
Sept heures : Gustou arrive en même temps que deux ou trois<br />
voisins qui sont venus prêter main forte pour tenir le ministre (5) .<br />
D’un doigt expert, il va tâter la chaudière pour savoir si l’eau est à<br />
point, puis prépare tout le matériel pour la mise à mort.<br />
Il entre alors dans l’écurie où, à l’aide d’une corde il mouraille (6) le<br />
cochon. La bête amenée près de la bachasse est basculée dessus.<br />
Une fois l’animal complètement immobilisé, chacun tenant<br />
fermement l’une de ses pattes, Gustou enfonce d’un geste sûr le<br />
couteau dans la gorge du cochon. Attention de ne pas couper la<br />
courgnole (7) ! ! !<br />
Le sang qui jaillit est recueilli dans une bassine où il est remué en<br />
permanence pour éviter sa coagulation. La saignée terminée, on<br />
enlève les étoupes en filtrant le liquide.<br />
Ensuite, la pesée : on laisse choir le cochon mort sur une petite<br />
échelle que l’on installe sur la bascule. La maîtresse de maison bien<br />
sûr assiste à la pesée. Pensez donc ! Elle est concernée au plus<br />
haut point car c’est elle qui a apasturé (8) la bête.<br />
Ensuite on installe l’animal dans la bachasse, bien en long ,les<br />
pattes dégagées. Le saigneur prépare l’eau, la coupe (9) , et la verse<br />
sur le corps tout entier de la bête. Puis à l’aide de racloirs, de<br />
sonnailles et de chaînes, il racle tout le corps de la bête.<br />
Tout en maintenant la tête du cochon avec un crochet, l hisse la bête sur<br />
une claie (10) que l’on met en travers de la bachasse. Et là, on béjuscle (11)<br />
les derniers poils réticents de l’animal et à l’aide d’un seau d’eau froide,<br />
on l’arrose pour lui rendre la couenne d’un blanc immaculé.<br />
Puis on va boire la goutte. C’est la tradition !<br />
Ensuite le tueur commence à débiter la bête. Première chose : il<br />
détache les jambons et les épaules. Puis il ouvre complètement<br />
l’animal à l’aide de couteaux et d’une petite hache. Il en extrait les<br />
boyaux qui sont posés sur une corbeille avant d’être nettoyés,<br />
dégraissés, coupés en longueurs égales, lavés à l’eau tiède, tournés<br />
et retournés afin de ne laisser plus aucune impureté. Enfin, ils seront<br />
lavés et rincés une dernière fois dans une solution salée et<br />
vinaigrée.<br />
Les boudins : pour faire les boudins, il faut 18 ingrédients différents :<br />
le sang bien sûr, des sautournes, des blettes, des épinards, du chou,<br />
du thym , du persil, de l’oignon, du sel, du poivre, des épices, de la<br />
crème fraîche, des œufs battus, du rhum, de l’eau de fleur d’oranger,<br />
du madère, un peu de farine,… sans oublier les petits lardons (12) ! ! !<br />
Quand les boyaux sont remplis, les femmes mettent les boudins à cuire<br />
dans la chaudière. Les hommes ne sont pas admis près du feu ! ! !<br />
Puis elles préparent la pantène (13) sur le fond de laquelle elles<br />
déposent un peu de jolie paille. Au bout de 20mn, les boudins cuits<br />
sont retirés de la chaudière fumante et installés circulairement sur<br />
ladite pantène. N’oublions pas de les goûter au passage.<br />
Quand toutes ces opérations sont terminées il est midi et c’est la<br />
pause autour d’une table copieusement garnie avec boudins, jailles<br />
(14) et fricassée.<br />
Pendant ce temps, la viande fraîchement débitée a été mise à<br />
refroidir dans une pièce froide et le lard sur le saloir en attendant<br />
d’être salé dans les jours prochains, ceci afin de permettre sa<br />
conservation.
viande que l’on passe ensuite dans la machine à saucisses pour la<br />
transformer en viande hachée.<br />
Cette viande hachée est salée et poivrée selon des proportions bien<br />
déterminées. Certains y ajoutent un peu de vin de Côtes du Rhône<br />
(15) pour rendre la chair à saucisses plus colorée.<br />
Les pâtés eux sont mis en boîtes ou en bocaux avant d’être stérilisés<br />
le lendemain. Les caillettes, mélange de viande et d’herbes sont<br />
conditionnées sous forme de boulettes enveloppées dans la ratelle (16) et<br />
mises à cuire au four.<br />
Le lendemain, on va pendre (17) les saucisses, saler les os et les<br />
jambons, faire cuire les pâtés, faire fondre la graisse pour en faire<br />
des gratelons (18) et du saindoux.<br />
Voici, succinctement raconté, comment se déroule la tuade du<br />
cochon.<br />
Cette tradition se perd dans les campagnes et il se tue chaque année<br />
de moins en moins de cochons à cause de la désertification de nos<br />
campagnes et des …supermarchés ! ! !<br />
Bulletin Municipal n°13 , février 1988<br />
Lexique<br />
(1).Une lune pour les mâles, une lune pour les femelles.<br />
(2). Grand bassin en bois dans lequel est ébouillanté le cochon.<br />
(3). Herbes sauvages que l’on trouve dans les vieilles luzernières et utilisées entre autre dans la<br />
fabrication du boudin.<br />
(4). Vieux récipient en fonte qui servait autrefois à faire cuire la nourriture des cochons et des<br />
chiens.<br />
(5). Dénomination bourgeoise du cochon.<br />
(6). Passer une corde entre la mâchoire et le groin du cochon pour éviter qu’il ouvre la bouche.<br />
(7). Couper la courgnole, se dit quand le saigneur manque son coup.<br />
(8). Donner la nourriture.<br />
(9). L’eau bouillante est additionnée d’eau froide pour éviter de trop brûler la couenne du porc.<br />
(10). Sorte d’échelle courte et large que l’on en travers de la bachasse pour dépecer le cochon.<br />
(11). Brûler à la lampe à gaz les derniers poils rebelles.<br />
(12). Diminutif de lard. Petits bouts de graisse ou de saindoux que l’on coupe très finement. Se dit<br />
également du petit dernier de la famille.<br />
(13). Sorte de corbeille ciculaire, très plate que les anciens utilisaient pour faire sécher leurs<br />
fromages, accrochée à un arbre.<br />
(14). Petits morceaux de viande saignants qui se situent autour de la tête et des jambons et que<br />
l’on mange lors du premier repas “ cochon ”.<br />
(15). Issu de vignes à hausser.<br />
(16). Autre nom de la rate. Fine enveloppe entourant l’estomac du cochon.<br />
(17). Mettre à sécher, pendues au plafond.<br />
(18). Fabrication locale ressemblant aux rillettes.<br />
L’alimentation<br />
Autrefois, fin du XIXe, début du XXe siècles, les menus de fête<br />
étaient copieux. Il n’était pas rare de trouver plusieurs viandes<br />
(abats, ragoût, rôti) au même menu.<br />
Certains repas de fête pouvaient durer plusieurs jours...<br />
Pensez donc : quand on se déplace à pied ou en jardinière, pour une<br />
vogue ou un mariage on prend son temps ! ! ! Alors, imaginez celui<br />
que passait la “ bourgeoise ” aidée de ses filles et souvent de<br />
voisines pour faire manger plusieurs jours de suite de 20 à 30<br />
personnes ! ! !<br />
Qu’est-ce qu’on mange ?<br />
Et tous les jours ?<br />
Par contre, les menus de tous les jours sont plus modestes et peu<br />
variés. On ne mange pas de viande quotidiennement.<br />
La nourriture de base, semblable dans tous les ménages provient de<br />
la production familiale (potager, basse-cour...) et dépend des<br />
saisons. On se nourrit donc de ce que l’on récolte.<br />
On mange de la soupe tous les jours. Et elle est presque toujours à<br />
base de pommes de terre, lard et légumes de saison. On en fait<br />
même avec des sautournes (chicorée sauvage). Mais le dimanche,<br />
jamais de soupe de pommes de terre, mais soupe de pâtes ou de<br />
crouzets, dans le bouillon de poule.<br />
Epervier :<br />
Plumage blanchâtre barré de<br />
brun. Pattes longues et fines. Vol<br />
plané entrecoupé de quelques<br />
battements rapides. Envergure<br />
70 cm. Protégé.<br />
Milan noir :<br />
Plumage brun, tête grise.<br />
Queue fourchue. Tournoie haut<br />
dans le ciel. Migrateur.<br />
Envergure : 150 cm. Protégé.<br />
77
Avoine stérile<br />
Brachypode penné<br />
78<br />
Le pain<br />
Base de l’alimentation, il est cuit dans le four que possède chaque<br />
maison. Quelle maman n’a pas dit un jour : “ manjo toun pan, si volei<br />
un can paou dé saucisso ” (Mange ton pain si tu veux encore un peu<br />
de saucisson)..<br />
Qu’est-ce qu’on boit ?<br />
Même après le phylloxéra (1872), tout le monde possède encore sa<br />
petite vigne (plants américains : cébel, bacco, couderc, clinton... . On<br />
cultive même des ceps isolés, par ci, par là. Certains récoltent<br />
jusqu’à 20 hectolitres de vin par an.<br />
Quand l’alambic passait, on faisait faire de l’eau de vie de marc :<br />
prunelle, arquebuse...<br />
Selon les saisons :<br />
(1) Pas de sanglier : le premier tué dans la région, le fut vers 1914, par Arnaud, du quartier de Cristol à<br />
Bourdeaux.<br />
Bulletin municipal N° 8 - mars 1986.<br />
An 2000, plus qu’un seul chevrier<br />
à Crupies : Denis Achard<br />
Propos recueillis par Jean-Louis Buffet en février 2000.<br />
Denis, tu es le seul chevrier de Crupies. Peux-tu donner une<br />
explication à cet état de fait ?<br />
Oui c’est vrai, je suis le dernier et c’est dommage. Si on remonte<br />
seulement 10 ans en arrière, presque toutes les exploitations<br />
agricoles de la commune élevaient des chèvres, à part Mireille<br />
Laurie qui avait un élevage hors-sol de poulets fermiers, Paul Plèche<br />
un troupeau de brebis et Philippe Jouve qui élève toujours des veaux<br />
sous la mère.<br />
Il y avait les Patonnier aux Valentins, Andrée Jullian à Chabannes,<br />
Marcel et Paula Achard aux Bessons, Jean et Marinette Dufour aux<br />
Granges, Serge et Denise Vincent aux Granges également, Jean<br />
Louis Armand à Luzerne et Laurence Bompard à la Leva.<br />
Depuis, certains ont pris leur retraite et leurs successeurs n’ont pas<br />
repris l’élevage, mais le coup de grâce, ça a été la mise aux normes<br />
de l’atelier de fabrication des tommes. Tous ont hésité à investir un<br />
minimum de 150 000F pour cela.<br />
En quoi consiste cette mise aux normes ?<br />
C’est le principe de l’atelier marche en avant, ce qui veut dire qu’un<br />
produit, quel qu’il soit, ne doit pas revenir en arrière, ne doit pas faire<br />
demi-tour. Dans le bâtiment que j’ai construit il y a un parcours, des<br />
étapes qu’on doit respecter depuis la traite jusqu’à la vente : la<br />
laiterie comprend donc une salle de traite, un espace de réception<br />
du lait, une salle de fabrication du fromage : caillage, moulage,<br />
égouttage, une plonge avec produits spéciaux (lactonet qui est une<br />
lessive classique et lactocid pour éliminer le calcaire de l’eau et la<br />
pierre du lait, c’est-à-dire les résidus déposés sur les bords et dans<br />
les trous des faisselles), une salle de stockage des fromages.<br />
Il ne faut pas oublier l’entrée du bâtiment, un sas dans lequel je dois<br />
me changer obligatoirement, enfiler blouse et sabots de chirurgien et<br />
coiffer la toque.
Ivraie vivace ou Ray-grass<br />
Paturin des prés<br />
80<br />
Pour le blé, cela me facilite grandement la tâche pour préparer le<br />
dossier PAC (Politique Agricole Commune) pour l’obtention de<br />
subventions<br />
Pour les luzernes et les prairies naturelles, je note le nombre de<br />
ballots des première, deuxième et troisième coupes, le poids total et<br />
je vois immédiatement si ce sera suffisant ou non pour passer l’hiver<br />
(un ballot rond pèse environ 210 kg) .<br />
Est-ce qu’une exploitation comme la tienne est viable en l’an<br />
2000 ?<br />
Elle serait viable si les produits étaient payés à juste prix. Il faut<br />
savoir que nous sommes tout le temps en train d’investir, fromagerie,<br />
presse à balle ronde, hangar, ... outils indispensables sur mon<br />
exploitation. Indispensables car il est de plus en plus difficile de<br />
trouver quelqu’un pour ramasser les ballots. Grâce à ce matériel, je<br />
peux le faire tout seul et en un minimum de temps. En plus si la pluie<br />
Troupeau de chèvres de Denis Achard.<br />
menace, plus besoin de dresser les ballots du fait de leur forme<br />
cylindrique, une petite pluie n’altère pas la qualité du fourrage.C’est<br />
le côté positif de cette presse, mais elle a un inconvénient : le<br />
stockage des balles demande beaucoup de place ; d’où la<br />
construction prochaine d’un nouveau hangar.<br />
Tout ce matériel et ces investissements représentent beaucoup<br />
d’argent car le prix du matériel, lui, ne baisse pas, ne reste pas<br />
stable. Au contraire, il ne cesse d’augmenter.<br />
Conclusion : Tout l’argent gagné sur l’exploitation est utilisé pour<br />
ces investissements. Heureusement que ma femme travaille hors<br />
exploitation, pour pallier aux autres besoins familiaux.<br />
Je vais donc essayer de monter mon troupeau de chèvres, à 60<br />
mères en production, ce qui augmentera mon chiffre d’affaire et<br />
épongera mieux mes investissements.
Amanite tue-mouches, fausse<br />
oronge :<br />
Chapeau rouge à verrues blanches.<br />
Lamelles blanches. Pied blanc avec<br />
anneau et volve. TRÈS TOXIQUE.<br />
L’oronge vraie (comestible) a un<br />
chapeau jaune orangé, des lamelles<br />
et un pied jaune clair.<br />
Amanite panthère :<br />
Petit chapeau allant du gris jaune<br />
au brun couvert de petites verrues<br />
très blanches. Lamelles blanches.<br />
Pied blanc avec anneau et volve.<br />
TRES TOXIQUE. Toutes les<br />
autres amanites sont soit très<br />
toxiques soit mortelles.<br />
86<br />
A soixante quatorze ans, s'amorce<br />
une cessation progressive<br />
d'activité; Ricou est mis en "c.p.a"<br />
dirions-nous en utilisant le<br />
vocabulaire administratif actuel.<br />
Toutefois, nul ne peut l'empêcher<br />
de mener quotidiennement le<br />
troupeau aux herbages, et seule la<br />
perforation d'un ulcère éloignera,<br />
pour un temps seulement, le<br />
berger des traces de ses ovins. S'il<br />
souffrit bien évidemment de cet<br />
accroc, les soins prodigués et la<br />
présence d'un personnel<br />
hospitalier, sans aucun doute, très<br />
affectueux à son égard,<br />
évacuèrent une partie de l'aigreur<br />
accumulée au fil des années.<br />
Ricou, le peu bavard, fut à la fin de<br />
sa vie beaucoup plus enclin à<br />
s'appro-cher, à lier conversation, à raconter, à partager un savoir faire et<br />
des connaissances hors du commun. Sa mémoire était tout simplement<br />
phénoménale, et beaucoup partagèrent d'agréables moments auprès de<br />
lui, à la recherche d'informations vécues.<br />
Aucun mètre carré de Crupies ne lui était inconnu et, l'automne venu,<br />
chacun savait pertinemment que le plus beau lièvre de la commune<br />
tomberait tôt ou tard sous les plombs de Ricou. Car s'il possédait son<br />
permis de conduire et ne l'utilisait pas, son permis de chasse fut<br />
renouvelé plus de soixante fois dans sa vie.<br />
C'était un personnage attachant, intact moralement, ayant toujours vécu<br />
à l'abri des excès de toute sorte.<br />
Denis avait remarqué que tous les amis qui possédaient un border-coolie<br />
en étaient satisfaits. Il rentra un jour à la maison accompagné de Yanki<br />
persuadé du plaisir qu'il allait apporter à son oncle. Il n'en fut rien! Ricou<br />
accepta, avec beaucoup de réticence, ce chien qu'il n'avait pas choisi.<br />
Pourtant, il dut bien constater que l'animal était exceptionnel et le berger<br />
oublia vite ses réactions premières. Désormais, ils ne se quittèrent<br />
plus.<br />
La journée de l'accident : le 5 septembre 1996<br />
Comme tous les jours, Ricou partait garder le troupeau dans la<br />
montagne.<br />
D'habitude, tout le monde l'attendait pour manger car il descendait<br />
faire boire les chèvres et les moutons. En fin de matinée, Marthe, la<br />
mère de Denis s'aperçut que Yanki avait parqué les moutons et les<br />
chèvres. En ne voyant pas revenir Ricou, elle commença à<br />
s'inquiéter et prévint son fils. Denis monta dans son véhicule tout<br />
terrain et partit dans la montagne. Sur le chemin, il rencontra Yanki<br />
qui le mena jusqu'à son maître cruellement blessé. Denis confia<br />
Ricou au chien et partit alerter les pompiers. Sur place ils<br />
constatèrent que Ricou était intransportable et qu'il fallait le conduire<br />
à l'hôpital par hélicoptère. Le chien ne voulait en aucun cas quitter<br />
son maître et seule une ruse permit de l'éloigner.<br />
Le voisin de Ricou récupéra la<br />
veste et le bâton du vieux<br />
berger. Le chien sentant<br />
l'odeur de son maître, accepta<br />
de retourner à la maison.<br />
Pendant cinq jours, le chien<br />
resta couché auprès de cette<br />
veste et de ce bâton.<br />
Après cinq jours de souffrances,<br />
Ricou meurt d'un<br />
enfonce-ment de la cage<br />
thoracique. Le chien<br />
désespéré ne quitte plus le<br />
bâton. Plusieurs jours plus<br />
tard, Denis remarque un<br />
manque d'assurance chez ce<br />
chien d'habitude si exceptionnel.<br />
Il butte très régulièrement<br />
dans les obstacles. Denis<br />
consulte son vétérinaire : le diagnostic tombe brutalement ; le chien est<br />
en train de devenir aveugle. La cause de cette cécité ? La mort du maître<br />
sans aucun doute !<br />
Classe de "Jacques Borrel"<br />
Séjour au <strong>Centre</strong> <strong>Musiflore</strong> de mai 1998