Les fonctions opérationnelles terrestres - Le Centre de Doctrine d ...

Alors que les fonctions opérationnelles et les
réservoirs de forces se mettaient progressivement
en place, il fut décidé de professionnaliser l’armée
de terre, ce qui eut pour conséquence immédiate de
réduire le nombre de ses unités. Cette diminution de
format fut réalisée dans le cadre du Livre blanc, en tenant
compte des enseignements tirés des engagements plus
ou moins récents. Cependant, elle fut relativement
homothétique au regard des équilibres capacitaires en
vigueur dans les années 90. Au bilan, si le périmètre des
armes avait été considérablement réduit, le poids relatif
de chacune d’elles au sein de l’armée de terre avait
finalement peu évolué.
Les principaux moteurs du changement
Du fait de la diversité de la nature des engagements
et de leur caractère difficilement prédictible dans
le temps, la parfaite adéquation “effets à
obtenir/organisations disponibles” ne sera certainement
jamais atteinte. En revanche, les écarts constatés
sur les différents taux de projection traduisent bien un
déséquilibre entre fonctions, que nous ne savons
aujourd’hui corriger que par des mesures structurelles
visant à répondre aux besoins opérationnels. Ce constat
et ces ajustements nécessaires ne concernent pas que la
France : les Etats-Unis, impliqués dans une longue
guerre, mais aussi le Royaume-Uni, l’Allemagne et bien
d’autres pays ont engagé un processus d’adaptation de
leurs forces terrestres.
Ces évolutions font suite à la rupture stratégique issue
de la fin de la guerre froide. Les conflits dans lesquels
nous intervenons aujourd’hui sont de moins en moins
souvent interétatiques, ou lorsqu’ils le sont, les combats
symétriques classiques sont de courte durée (le conflit
irakien en est un parfait exemple). Ceci a des
conséquences majeures sur la constitution de nos
forces car elles doivent être capables, dans un premier
temps, de mener un combat très violent sur une période
relativement courte, en vue de “gagner la bataille 3”,
puis dans un deuxième temps, être en mesure de
“conduire à la paix” dans la durée, face à un adversaire
le plus souvent asymétrique. Cette dichotomie génère
un besoin en capacités militaires très contrasté sur les
plans qualitatifs et quantitatifs, en fonction de la phase
dans laquelle se trouve le conflit (intervention,
stabilisation ou normalisation).
Par ailleurs, la résolution de crise dépasse aujourd’hui
la seule action militaire (interarmées ou non ;
DOCTRINE NUMÉRO SPÉCIAL 10 MAI 2008
Cet héritage peu détaché du contexte de la guerre froide
est encore assumé dans notre modèle d’armée actuel
alors que nos engagements ont profondément évolué. Le
futur Livre blanc sur la défense et la sécurité en cours de
rédaction fixera bientôt le nouveau cadre dans lequel
nous devrons nous inscrire. Il n’est cependant pas trop
tôt pour mener une réflexion sur l’adaptation des forces
terrestres. Pour s’en convaincre, il suffit de prendre en
considération les taux de projections des unités de la FAT
ou de la FLT. On constate que certaines armes ou
fonctions opérationnelles subissent un taux d’activité
opérationnelle très élevé tandis que d’autres sont plus
rarement employées dans leur cœur de métier, voire
rarement projetées.
multinationale ou non) et les forces terrestres doivent
désormais collaborer avec des organismes civils (autres
ministères, ONG...) pour atteindre l’effet final (politique)
recherché. Les différents retours d’expérience nous
montrent que nos forces sont culturellement et
structurellement adaptées pour “gagner la bataille”. Il
est maintenant impératif qu’elles prennent mieux en
considération les évolutions qui leur permettront de
“conduire à la paix” dans de bonnes conditions.
Enfin, la société française évolue. Si elle soutient les
actions extérieures, elle ressent également une menace
à la fois globale et diffuse sur le territoire national, qui
génère une attente légitime vis-à-vis des forces
terrestres. L’armée de terre ayant parfaitement identifié
ce besoin et la nécessité de prendre en compte le
caractère dual de son engagement au service du pays
(missions intérieures - opérations extérieures), elle
devrait logiquement y répondre par la préparation d’une
évolution de ses capacités et de leur description.
1 TTA 901 - Forces terrestres en opérations - avril 1999.
2 Division emploi-organisation du CDEF.
3 FT 01 - Gagner la bataille, conduire à la paix.