La PREO dans le processus de planification opérationnelle

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Réflexions
La PREO dans le processus
de planification opérationnelle
Le saviez-vous ? (3)
A propos d’états-majors
et de forces
Evitons les confusions (?)
de vocabulaire…
Un état-major (avec un tiret 1 ) est
donc un ensemble de personnel,
essentiellement des officiers, des
sous-officiers et militaires du rang,
formés aux tâches d’EM, mais
aussi d’équipements, mis à la
disposition d’un chef, normalement
un officier général (OG) 2 , pour lui
permettre de commander une
force, une grande unité ou une
formation de niveau inférieur. Cet
organisme, de taille variable selon
les responsabilités exercées par le
général, est placé sous les ordres
d’un chef d’état-major (CEM),
officier général ou supérieur,
appelé traditionnellement le "chef".
L’EM forme le cœur du poste de
commandement du "commandant"
(le terme de chef fait cependant
"plus français"), qui comprend en
plus l’EM particulier de cet officier
général (OG), des détachements
spécialisés ou de liaison, une unité
de quartier général (UQG) pour
le soutien et des moyens
d’information et de
communications, sans parler
des véhicules, des armes et
des équipements normaux d’une
unité militaire.
1 L’insigne de l’Ecole d’état-major ne comporte pas
ce tiret, sans doute oublié par le fabricant…
2 Même si l’on parle aussi, par extension, d’EM ou
de PC de régiment ou de groupement tactique.
p. suivante
Histoire militaire est émaillée
L’ d’exemples de batailles perdues
car les chefs ou leurs états-majors
avaient sous-estimé l’ennemi ou mal
apprécié le terrain. S’il faut, comme le
disait Raymond Aron, "rendre au passé
l’incertitude de l’avenir ", l’étude de ces
batailles et des raisons pour lesquelles
elles ont été perdues a permis et permet
encore1 de forger des instruments et procédures
analytiques de nature à circonscrire
le risque.
La préparation renseignement de
l’espace opérationnel (PREO) fait partie
de ces procédés destinés à éviter,
autant que possible, que le pont
d’Arnhem soit finalement trop loin, que
les Ardennes soient considérées infranchissables
pour un ennemi blindé
mécanisé ou plus globalement à éviter
Dien Bien Phu 2 .
Cet outil, appelé aussi Intelligence
Preparation of the Battlespace (IPB)
chez nos alliés, doit s’imposer comme
un préalable indispensable à
tout processus de planification,
quel que soit le niveau de l’état-major
considéré, le temps accordé à l’exercice,
et malgré la tentation de monter
une manœuvre per se sans accor-
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
Le PC de la division développe, comme tous les états-majors opérationnels, une fonction
planification importante.
Le renseignement n’y échappe pas, qui apporte sa pierre à l’édifice de la MEDO (méthode
d’élaboration d’une décision opérationnelle) ou de l’OPP (Operational Planning Process).
La démarche de la PREO (Préparation renseignement de l’espace opérationnel) s’y inscrit
par l’analyse des traits de l’espace opérationnel et la constitution d’un référentiel commun
à tous. Le terme renseignement du sigle PREO est ici réducteur car il s’agit bien d’un travail
de tout l’état-major et non pas simplement du B2.
der à l’analyse de l’adversaire l’importance
qu’elle mérite.
La PREO se compose successivement
d’une analyse du terrain, d’une analyse
de l’environnement opérationnel et d’une
analyse de l’ennemi (au sens large).
Ces étapes débouchent sur une synthèse
des actions adverses possibles
dans le cadre espace temps considéré.
La PREO sert donc tout d’abord, par
ordre d’importance, à déterminer et
décrire les modes d’action de l’ennemi,
d’abord initialement puis en réaction
à notre action. Contrairement à
une idée répandue, la PREO est faite
par différents contributeurs (B2, B3,
B9, OLAir pour un EMF) et pas seulement
par le B2 3 . Ce travail, impliquant
plusieurs expertises (terrain, renseignement,
CIMIC…) permet d’avoir une représentation
opérationnelle commune et
précise du milieu d’engagement.
1 Notamment par la procédure du RETEX.
2 Parmi les causes de la défaite, l’échec
du renseignement s’est imposé, en particulier
l’éloignement géographique obérant le soutien
aérien, la météo (saison des pluies), et une
mauvaise appréciation de la capacité du
Vietminh à acheminer son artillerie autour
de la cuvette.

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 21
HÉRACLÈS N°16
La PREO permet ensuite de définir les
zones dans lesquelles les moyens de
renseignement doivent faire effort pour
déterminer la manœuvre ennemie. La
bataille de l’information se joue
notamment dans la pertinence de la
manœuvre renseignement laquelle
requiert un travail de planification qui
débouche sur le plan de renseignement
et de recherche (collection plan), qui
oriente l’utilisation des capteurs.
Enfin, elle permet d’initier et de contribuer
au processus de ciblage (targetting)
qui se conduit au niveau du corps
d’armée et se décline au niveau division.
Il importe que le B5, qui rythme le déroulement
du processus de planification,
laisse au groupe de PREO, dirigé par le
B2, le temps nécessaire pour élaborer
cette représentation opérationnelle commune
du terrain et de l’ennemi. La
confrontation ultérieure entre les modes
d’actions amis et les modes d’actions
ennemis n’en sera que plus révélatrice
et plus fouillée.
Précisons que la PREO s’applique aussi
à la maîtrise de la violence, même
si elle doit subir quelques adaptations.
En effet, il faut prendre en compte le
caractère parfois peu rationnel des belligérants
et de leurs actions ainsi que la
multiplicité des acteurs.
La PREO, cœur du métier du B2, est
donc un élément important du processus
de planification d’un étatmajor,
un travail en commun qui ne doit
pas être négligé et qui devrait d’ailleurs
être enseigné de façon plus approfondie
et systématique dans les cursus d’enseignement
militaire.
Lieutenant-colonel Jacques RINAUDO
EMF3 / B2
3 SOP G2.03.00 Intelligence Preparation
of the Battlespace ,CRR-Fr, 24 juin 2005
Le combat en zone urbaine des grandes unités
L’entraînement aux affrontements en zone urbaine (ZUB) a été placé dans les premières
priorités de la préparation opérationnelle des niveaux 5 puis 4. Peut-on évacuer tout à fait
la perspective du haut et sur laquelle il faudra se pencher et réfléchir en doctrine : la ville,
un objectif de brigade ou de division ?
"
Au bilan, la ville s’impose comme
l’espace emblématique à la fois de la
complexification du métier de militaire
et de sa dualité : la ville exige de repenser
les conditions de l’efficacité des
armées." Ces mots prononcés lors du
colloque du 5 octobre 20051 , mettent
en évidence la nécessité pour le soldat
de se conformer à un processus d’acculturation
s’il veut prétendre intervenir
dans ce type de milieu. Celui-ci place
plus que jamais le sens qu’on donne à
nos actions, au point de rencontre de
l’efficience du soldat et de l’éthique
humaniste guidant son action. Ce principe
s’impose aujourd’hui à tous les
acteurs impliqués dans une action en
ZUB, de la conception à la plus simple
exécution.
(p. suivante)
1 Ce colloque, qui était ouvert à la société civile, avait
pour thème " Armées : faire campagne en ville ". Ces
mots sont tirés du discours prononcé par le général
Desportes, commandant le CDEF.
Le saviez-vous ? (3)
Cette appellation de UQG vient
du "quartier général", ancienne
dénomination d’un PC, réintroduite
dans les forces françaises depuis
quelques années par le biais des
opérations extérieures, notamment
celles de l’OTAN. Il fallait bien
traduire Headquarters…
Le terme de force, peu usité
jusqu’aux années 90 du 20 e siècle
(on parlait plutôt des forces), est
devenu à la mode depuis, toujours
sous l’influence otanienne 3 ,
et il désigne un groupement,
normalement temporaire ou semi -
permanent, d’unités, national ou
multinational. Il existe cependant
une Force d’action terrestre(FAT)
et une Force logistique terrestre
(FLT), permanentes, elles. Les
marins et surtout les aviateurs,
qui ont toujours été séduits par
les modèles anglo-saxons, nous
avaient précédé dans ce domaine.
3 Même si nous avons eu une Force de réaction
rapide (FAR).
recueil des
abréviations
CDEF
PREO : Préparation renseignement
de l’espace opérationnel
RAPFOR : Rapport de forces
ROE : Rules of Engagement
SCIPIO : Simulation de combat
interarmes pour la préparation
interactive des opérations
SIR : Système d’information
régimentaire
SSTO : Sam Shorad Tactical Order

22
Réflexions
activités
>>DREX
Mise en ligne
de la GED RETEX
La gestion électronique de la
documentation RETEX (GED
RETEX) est désormais l’outil
principal d’analyse de la fonction
"retour d’expérience"
au sein de l’armée de terre. Elle
constitue également un base de
données permettant l’échange
d’informations numérisées entre
les membres du réseau RETEX :
documents sources (rapports de
fin de mission, présentations…),
faits constatés, enseignements
tirés, synthèses,
recommandations, décisions de
commandement
et suivi des mesures prises.
Elle inclut enfin un forum, afin
de faciliter les échanges
(suggestions, demandes…)
et de permettre une meilleure
réactivité en matière de RETEX.
Cette GED est désormais
accessible à plus de 80 abonnés
du réseau RETEX à partir du
portail "Retour d’expérience"
du site INTRATERRE du CDEF.
D’ores et déjà, elle met à leur
disposition plus de 700
documents "sources", plus de
1 500 "faits", presque 300
enseignements validés par
le général COMDEF, ainsi qu’une
trentaine de documents
de synthèse.
Cet outil convivial et simple
d’utilisation, développé sous
Lotus Note ® par la DSRO, a
déjà été retenu par l’EMA pour
servir de support à la future base
de données RETEX interarmées.
p. suivante
L’approche conceptuelle des engagements
des forces terrestres en
ZUB fait déjà l’objet d’une littérature
fournie et enrichissante. Il est donc
proposé ici une perspective sur la
prise en compte de cette question
par un PC de division. Ce niveau de
commandement dispose de tous les
moyens de relayer sur le terrain le
message politique justifiant l’emploi
de la force. Il est donc par nature le
premier à devoir se questionner sur
ce qui va conditionner le succès de
l’action en ZUB sur le terrain.
Que sait-on aujourd’hui de cette
aptitude ?
L’efficacité d’un PC en terme de
management de l’épisode combat
en ZUB" est conditionné par sa
capacité d’intégration, de coordination
et de la permanente maîtrise
du contexte.
Cette idée repose sur la prise en
compte des principes et des difficultés,
liés à un engagement en zone
urbaine.
La part belle à la PREO
La zone urbaine crée, on le sait, les
conditions d’interactions très instables,
complexes et d’une grande
diversité entre le milieu et le soldat.
Ceci nous a amené à considérer
qu’il faut préparer loin en amont et
de façon suffisamment détaillée
l’action.
Il apparaît surtout indispensable d’avoir
une approche multidisciplinaire
de l’engagement. Ceci consiste à
regrouper tous les éléments propres
à prévoir ces interactions et à en
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
évaluer la réactivité. Le rôle de la
PREO prend dans ce cas une importance
particulière au moins sur le
plan du nombre, de la diversité et de
la qualité des acteurs, civils et militaires,
à impliquer.
Autre élément de choix à intégrer
dans les principes du combat en ZUB
: la notion de décentralisation et son
corollaire, l’autonomie dans l’action.
Ce dernier point touche deux préoccupations
récurrentes pour l’armée
de terre française. Il s’agit à la
fois de la circulation permanente de
l’information et de la suffisance logistique
des échelons de combat. Toute
une partie de l’action du PC va donc
consister à créer les conditions de la
continuité de l’action. Il convient d’ajouter
à cela les problèmes posés
par la "three block war 3 ". En effet,
on peut facilement imaginer un GTIA
"consommé" par trois actions successives
sur trois espaces différents,
une aide humanitaire au profit de
personnes déplacées, une interposition
violente, de type maintien de la
paix entre deux factions, et un combat
de moyenne intensité mais
excessivement dangereux. Et ceci,
en gardant en permanence la maîtrise
de la force et de l’information.
2 Cette préparation offre la possibilité d’intégrer
très loin en amont, les dimensions civiles, culturelles
et politiques de l’engagement.
La partie militaire vient ensuite se placer en
regard de ces éléments contextuels.
3 Cette formule (traduite en français lors du
colloque du 5 octobre par les termes "guerre
des trois quartiers") vient des enseignements
tirés de l’opération Iraqi Freedom, en particulier
dans le domaine des combats en ZUB
par le général C.C. Krulak de l’USMC.

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 23
HÉRACLÈS N°16
C’est toute la question de la complexité
du concept de réversibilité
qui se pose. Il n’est pas un simple
changement de posture mais bien un
changement de portage intellectuel,
psychologique et émotionnel. En terme
de prospective, il pose aussi la
question de la création temporaire
de modules de combat ou d’intervention,
spécialisés et dédiés à
chaque type de bloc.
C’est ainsi qu’après le temps de préparation
va venir celui de l’action proprement
dite. Elle va exiger du PC
une organisation particulière. Il s’agira
de veiller à rester présent sur le
champ de bataille des actions indirectes
et d’influence. Cette préoccupation
nous est dictée par le
caractère même des villes, véritables
centres décisionnels. Ces actions
semblent les seules capables de renforcer
l’ascendant psychologique
qu’on aura peut-être dû gagner ponctuellement
par le feu. La question de
la réactivité du PC prend ici toute sa
place et doit guider chaque instant
de l’action et de la réflexion qui y
conduit. Il s’agit en fait de la capacité
permanente à raisonner les problèmes
spécifiques qu’induira
l’action armée en ZUB.
Un difficile défi…
La zone urbaine – est-il encore
besoin de s’en convaincre ? - restera
le domaine privilégié des affrontements
asymétriques. Cette idée est
à elle seule un défi en terme de
réflexion pour et vers l’action militaire.
Elle conduit à la question de la
rééducation de systèmes construits
pour des engagements essentiellement
symétriques. Le choix du milieu
n’est pas sans conséquence, on l’imagine
bien, sur les exigences en
matière de capacité à manager ce
type de situation pour un PC.
On peut identifier trois difficultés
majeures dans la gestion de ce défi :
- Face à la capacité à analyser, raisonner
et solutionner un problème
en zone urbaine par le PC, répond
celle des échelons subordonnés à
s’absorber dans la mission qu’on
leur assigne. En d’autres termes,
considérons que les subordonnés
se sont donnés les moyens matériels,
humains et intellectuels d’un
engagement favorable. Il s’agit
alors pour le PC de donner des
éléments compréhensibles, et
des ordres clairs et exécutables
à des exécutants qui n’auront pas,
par nature la même perception de la
complexité de la situation.
- La versatilité des situations, combinée
à leurs caractères volatile et opaque,
impose de conserver en permanence
une capacité à prévoir et à gérer l’imprévu
! Il en découle un phénomène
qui reste une épreuve pour tout système
: la gestion de la rétroaction.
Chaque événement nouveau propre à
offrir un gain sur toute ou partie de l’opération
induira une mise à l’épreuve
du plan en cours. Il s’agira alors d’évaluer
l’influence de cet événement
sur la réussite ou l’échec de la mission.
Nous comprenons bien ici le rôle
du B5 en terme de génération de plan
de manœuvre et surtout le travail
coopératif qui y sous-tend. Ceci est
particulièrement essentiel en ZUB.
activités
>>DREX/RETEX
Nul doute que les utilisateurs
pourront se l’approprier rapidement
afin de l’alimenter, la faire vivre et
optimiser les échanges en matière
de RETEX. Elle contribue donc
directement à dynamiser une
fonction "retour d’expérience" qui
apparaît cruciale pour une armée
d’emploi.
La simplicité d’utilisation de la GED
RETEX ne demande pas une
formation particulière, néanmoins la
DREX se propose de fournir, à leur
demande, une aide aux utilisateurs
qui le souhaiteraient.
Contact :
M. Mario-Libouban, Cellule Base
de données de la DREX
(dawi.mario-libouban@cdef.terre.
defense.gouv.fr).
Lieutenant-colonel Randal ZBIENEN
Chef du bureau RETEX
Le saviez-vous ? (4)
A propos d’états-majors
et de forces
Evitons les confusions (?)
de vocabulaire (suite) …
L’Etat-major de force (EMF),
ensemble de moyens de
commandement "haut-le-pied" 1 ,
ne disposant pas d’unités en
permanence hormis son unité de
quartier général, est placé sous
les ordres d’un officier général,
"commandant de l’EMF
(COMEMF)", qui dispose lui-même
d’un chef d’état-major, responsable
de l’EM comme son nom
l’indique…
1 Comme on dit dans les chemins de fer pour les
locomotives prêtes au cas où une autre serait
indisponible….
p. suivante

24
Réflexions
Le saviez-vous ? (4)
… Cet officier général, devenu
commandant de la force
opérationnelle, la commandera
avec l‘aide de son état-major
(pas l’EMF, l’EM de la force),
un EM ne commandant rien,
c’est bien (?) connu.
Pourtant, combien de fois
entend-on "l‘EM - surtout l’EMAT
- a décidé que …", alors que
c’est le général commandant
la force, la grande unité ou la
région qui a décidé, pas l’EM
ou le CEM. Pourtant, il y a bien
un CEM qui commande… l’armée
de terre, le CEMAT.
Le "commandant suprême" 2
de l’armée de terre s’appelle
depuis longtemps le "chef d’étatmajor
de … 3 " dans les nations
démocratiques. A une époque,
il était aussi le commandant
en chef désigné pour le temps
de guerre.
Bref, le CEM est le "chef", mais
rarement le chef, pour ne pas
dire le commandant tout court
ou le "commandeur", terme
emprunté aux Anglo-saxons 4
et adopté comme tant d’autres
vocables par toute l’armée
française.
2 Sous l’autorité du ministre bien sûr.
3 Mais général inspecteur dans l’armée
allemande.
4 Vient de "Commander".
CDEF
On peut aussi aisément comprendre
toute l’importance du "war gaming"
dont l’objectif sera moins de vérifier la
validité des MA 4 mais plus de déterminer
les zones de faiblesse ou les
champs de force ennemis. A cela, il
conviendra de ne pas omettre la naturelle
inertie de l’ensemble du système
qui devra nécessairement se focaliser
sur la compréhension des tenants et
des aboutissants de l’événement nouveau.
- Enfin, la dernière difficulté consistera
à rendre le PC intelligent. La question
de la circulation des informations et de
la plus juste gestion des expertises
devra en plus intégrer la coopération
avec des éléments exogènes, vraisemblablement
disséminés dans l’ensemble
du PC. On comprend
aisément quelle place vient prendre la
culture et les facultés de discernement,
de jugement et d’imagination
dans le fonctionnement d’un système
PC. La constitution d’un ou plusieurs
"effects work groups", ou de cellules
de conduite de fonctions opérationnelles
nouvelles, ainsi que d’un "tactical
operation cell" par exemple, sont
autant de possibilités d’organisation.
Mais l’effort sera bien porté sur l’aptitude
à comprendre l’autre dans sa
façon d’être, de penser et d’agir.
Tout ce propos pourrait se résumer à
une seule assertion : face à la spécificité
d’un engagement en zone urbaine,
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
l’action d’un PC de division sera
fonction de trois aptitudes à maîtriser
dans un milieu particulièrement
complexe et compartimenté :
- comprendre,
- rendre compréhensible ce qui ne l’est
pas naturellement par un simple coup
d’œil,
- se rendre apte à comprendre en permanence.
Ce processus d’acculturation commence
bien avant l’engagement par la formation
des cadres d’état-major à la
complexité du contexte "ZUB". Cette
approche exige de nous que nous
osions aller travailler sur des registres
d’engagement nouveaux tels
que les approches et atteintes indirectes,
la manœuvre psychologique
et autres modes opératoires visant à
déstabiliser plus que détruire l’agresseur
et préparer simultanément la normalisation.
En somme, il s’agira
d’utiliser la violence et l’agression sous
une forme nouvelle à inventer sans
doute en ZUB.
CBA LEBRAT
EMF3 /DPRO/B3 AGESTER
4 Modes d’action amis.
5 Cet autre sera différent selon le bloc dans
lequel agira la force.

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 25
HÉRACLÈS N°16
Les EMF et l’amphibie
Autre format d’engagement, le cadre amphibie, s’il ne mobilise pas un effectif important de
personnels de l’armée de terre, nécessite un entraînement particulier et une veille en
matière de formation pour les EMF.
Le contrat opérationnel amphibie
fixé par l’EMA aux forces armées
pour la période 2006-2009 prévoit
deux hypothèses : un engagement
national autonome ou la participation
à une opération multinationale.
Après avoir rapidement décrit les
aspects principaux de ce contrat, cet
article apportera un éclairage sur l’insertion
des EMF dans ce dispositif.
Un rappel utile
Avant toute étude des implications du
contrat, il est nécessaire de rappeler
la définition de l’opération amphibie car
elle est essentielle pour en comprendre
l’organisation du commandement. Il
s’agit d’une opération conduite à partir
de la mer, mettant en œuvre des
forces interarmées, exécutée sur
une côte hostile ou potentiellement
hostile.
Les termes "conduite à partir de la
mer" sont clairs : le commandement
est assuré par la marine nationale du
début à la fin de l’opération amphibie 1 ,
par l’intermédiaire d’un PC de niveau
2, le CATF (Command Amphibious
Task Force), qui se voit attribuer les prérogatives
d’un Component Command
dans sa zone d’action spécifique, l’AOA
(Amphibious Objective Area).
A noter également qu’une opération
amphibie, puisqu’elle se déroule dans
un environnement hostile, se différencie
d’un transport opérationnel (action
à partir de moyens navals militaires
sur une côte non hostile) et d’un
transport maritime (recours à des
moyens civils).
La force embarquée
La force terrestre, appelée force de
réaction embarquée (FRE, dont la
vocation est de débarquer), est commandée
par un CLF (Command
Landing Force), PC de niveau 3 subordonné
au CATF. Elle est constituée
de groupements tactiques, interarmes
et aéromobile, et dans certains
cas d’un groupement de soutien
logistique. La composition et l’articulation
de ces groupements sont déterminées
par la nature de l’opération
amphibie.
Le volume de la force embarquée
conditionne le nombre de bâtiments
amphibies ainsi que la structure de
commandement. L’hypothèse basse
est le GA1 2 , un seul bâtiment amphibie
ayant à son bord une force terrestre
du niveau SGTIA ou SGAM ;
dans ce cas, la structure de commandement
est réduite à un CATG
(Command Amphibious Task Group)
et un CLG (Command Landing
Group). L’hypothèse haute est
actuellement un GA3, qui peut acheminer
sur un théâtre une FRE de 1
050 hommes (1 400 quand le GA4
sera réalisé).
(p. suivante)
1 Ou la fin de la phase amphibie d’une opération
de grande envergure.
2 Le chiffre qui suit " GA " désigne le nombre de
bâtiments amphibies qui composent le groupe.
Le nombre et la nature des autres bâtiments
ne relèvent pas du contrat amphibie mais du
contrat de la marine nationale.
activités
>>DREX/3A
JOINT SWORD 2006
L’exercice multinational JOINT
SWORD 2006 organisé par
le 1 er (GE/NL) corps s’est déroulé
sur le camp de Wildflecken (RFA),
du 19 avril au 1 er mai. Pour la
première fois, un état-major de
division français complet était
engagé sous l’autorité d’un corps
de l’OTAN. En effet, outre la
division française, le 1 er (GE/NL)
corps actionnait une division
norvégienne et la division
aéromobile allemande. Par
ailleurs, il convient de souligner
l’excellente qualité de l’animation
de l’environnement civilo-militaire
produite par le corps.
Placée dans cet environnement
nouveau et réaliste, la 1 re brigade
logistique a armé un PC de
groupement de soutien terre
(GST) pour soutenir la division
française et les éléments
organiques du corps engagés
également dans les zones de
deux autres divisions.
Les deux PC de division et de
GST ont été analysés chacun par
une équipe "3A" en regard de la
doctrine, y compris celle en cours
d’étude relative à la stabilisation,
en s’appuyant sur des mémentos
désormais bien adaptés au
besoin.
L’état-major de la division,
constitué autour de l’EMF 4,
a accompli une remarquable
prestation dans ce cadre
multinational, innovant dans
l’organisation du PC pour bien
prendre en compte les actions en
stabilisation qui constituaient
l’essentiel de l’exercice.
p. suivante

26
Réflexions
activités
>>DREX/3A
Travaillant en priorité sur les
"effets", il a recherché et
pratiquement trouvé un équilibre
harmonieux entre le "Tactical
effects centre" (TEC) et le
"Tactical operations centre"
(TOC). Il a également prouvé
sa capacité d’adaptation et de
réversibilité, notamment dans
la préparation et la conduite
d’actions de coercition en fin
d’exercice.
L’état-major du GST, caractérisé
par son professionnalisme,
a fait preuve de réalisme et
d’adaptabilité. Le soutien des
éléments organiques du corps
est réalisé sans difficulté en
appliquant les principes
généraux de coordination du
soutien d’une force
multinationale. Cet exercice
a permis d’identifier et de
résoudre certaines contraintes
liées à la multinationalité,
comme la prise en compte
d’unités alliées sous TACON
ou l’exploitation des ordres du
1 er (GE/NL) corps) diffusés en
anglais. Au bilan, cet exercice
a confirmé la validité de
l’organisation du PC de GST
qui peut s’adapter aux
différentes postures liées au
concept "Three Block War".
Enfin, l’organisation de toute
la participation française à
JOINT SWORD, réalisée par
l’EMF 4, s’est traduite par une
véritable projection à un millier
de kilomètres des garnisons.
p. suivante
Les termes du contrat
Dans le cadre d’un engagement national
autonome, le groupe amphibie doit
pouvoir réaliser sous faible menace
une opération autonome dont la
phase terrestre, avant éventuel renforcement,
n’excède pas 10 jours.
Les termes du contrat diffèrent selon
le GA considéré : le GA1 doit appareiller
en 5 jours et pouvoir mener à
terre une action sur une profondeur
maximale de 30 kilomètres ; le GA3
appareille en 20 jours et doit être
capable de mener une action terrestre
de 100 kilomètres de profondeur au
maximum.
Dans le cadre d’un engagement au
sein d’une coalition, la composante
française doit pouvoir prendre part à
une opération amphibie multinationale,
soit comme nation-cadre en intégrant
des alliés au sein du CATF et du
CLF, soit sous commandement non
national et c’est aux Français d’être
capables de s’agréger à un CATF et
un CLF multinationaux. Dans le premier
cas (nation-cadre) la France
pourra engager jusqu’à un GA3, dans
le deuxième cas la contribution française
sera au plus un GA2.
La participation des EMF
De par les expertises détenues et le
niveau d’engagement habituel de
leurs cellules, les EMF sont en toute
logique abonnés au PC de niveau
2 3 , le CATF. Il s’agit d’une structure
gigogne articulée en un noyau permanent
renforcé sur ordre par du personnel
des trois armées, répartis en
deux cercles qui permettent sa montée
en puissance. Le premier cercle
compte 7 postes terre, tous armés
par un EMF ; 5 d’entre eux doivent
être en mesure de rejoindre le CATF
en 5 jours. Parmi eux, un poste crucial
pour la composante terrestre : le colonel
adjoint terre du commandant de
l’opération. La contribution terre au
deuxième cercle est de 13 cadres,
dont 9 venant d’un EMF.
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
Chaque année, un état-major de
force est désigné référent amphibie
; à ce titre il participe aux exercices du
CATF et aux alertes amphibies, nationales
ou NRF.
Tous les EMF sont donc impliqués à
tour de rôle, selon leur cycle opérationnel,
et doivent tous disposer à leur
tour des mêmes capacités d’intégration,
ou les mutualiser au besoin.
La prise d’alerte NRF/OTAN
(Maritime) par la marine nationale et
dans les capacités amphibies a donc
aussi des implications en terme de
posture et d’entraînement pour l’EMF
référent.
La problématique
pour les EMF
Le cadre multinational ne pose pas de
problème d’adaptation aux EMF.
L’insertion dans un état-major embarqué
nécessite en revanche une préparation
spécifique. Les exercices
organisés au CEPC de Mailly au profit
du CATF faciliteront certainement la
cohésion interarmées mais prépareront
plus difficilement les terriens à la
vie à bord et à ses contraintes ; ces
CPX devront être complétés par une
phase embarquée.
Pour cela, il devrait être possible de
tirer profit des exercices amphibies
nationaux, même si leur format ne justifie
pas en principe la mise sur pied
du CATF. En matière d’entraînement
amphibie, la décision a été prise de
ne pas créer d’exercice supplémentaire
mais d’ajouter des objectifs
nationaux aux exercices
multinationaux. Dans le même
esprit, il pourrait être envisagé d’ajouter
un objectif de niveau 2 aux exercices
de niveau 3.
3 Le CLF est armé par les BIA formées aux opérations
amphibies : la 6e BLB et la 9e BLBMa.

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 27
HÉRACLÈS N°16
Si cette option n’est pas réalisable,
une ou deux journées d’instruction à
Toulon pourraient être mises sur pied
au profit des terriens. Afin de tenir
compte des contraintes budgétaires
ou techniques du moment, il ne sera
pas indispensable de quitter le quai,
même si seul un tour au large peut
faire prendre conscience des difficultés
à rester performants dans les
situations … houleuses.
La formation amphibie se décline en
trois stages de qualification aux
opérations amphibies (SQOA), correspondant
schématiquement aux
niveaux UE, régiment, état-major :
SQOA1 exécution, SQOA2 mise en
œuvre, SQOA3 conception.
S’agissant des EMF, le SQOA2 est
nécessaire pour les officiers du premier
cercle (SQOA3 pour le colonel
adjoint terre).
Cette formation s’inscrit dans la préparation
opérationnelle des EMF,
participant à la montée en puissance
d’une ressource formée. L’année de
référence est mobilisatrice car il faut
jouer sur la mobilité du personnel
pour mettre en formation avant A-1
les officiers qui armeront le premier
cercle en année A de référence
amphibie. Il est de ce fait essentiel
d’accorder au référent amphibie de
l’année A la priorité pour les stages
de formation de l’année A-1.
La constitution d’une ressource formée
stable est, on le voit, délicate,
d’autant que celle-ci est soumise au
rythme de son état-major dans le
cadre du cycle d’activités et de projection.
Dans ce contexte, pour être en
mesure d’honorer le contrat amphibie,
les EMF doivent composer et
sans doute à terme mutualiser
leurs effectifs formés. Un effort de
formation, qui allègerait la contrainte,
pourrait être consenti afin que
chaque EMF dispose à terme d’une
ressource plus nombreuse.
En synthèse…
La contribution terre à la conduite
d’une opération amphibie repose sur
deux piliers : la qualification et la
disponibilité du personnel. Les
cadres des EMF formés amphibie
sont une ressource comptée et la
contrainte de disponibilité est lourde
au regard du cycle d’activités de leur
état-major.
Il reste donc à participer à l’effort que
doit fournir la FAT pour s’inscrire
effectivement et à parité avec la
marine nationale dans ce dispositif
interarmées. Il appartient aux EMF
de préparer l’année amphibie,
notamment en identifiant suffisamment
tôt les officiers qui armeront les
postes terre du premier cercle et en
les inscrivant en formation. Pour donner
à ces états-majors les moyens
d’honorer correctement leur contrat
amphibie, un effort de formation
(augmentation du nombre de places
offertes aux EMF) et d’entraînement
(participation des EMF à des exercices
de niveau 3) doit être consenti.
Lieutenant-colonel LEVAUDEL
Chef bureau études EMF3
activités
>> DREX/3A
POSEÏDON
L’exercice interarmées POSEÏDON,
qui s’est déroulé au CEPC, du
18 au 23 mai 2006, a permis à
la 9 e BLBMa d’entraîner son PC
"Command landing force" (CLF)
dans le cadre d’une opération
amphibie et de le mettre en
situation en vue de sa
participation à l’exercice
multinational BRILLIANT MIDAS
en octobre prochain.
Les rapports d’analyse après
action des prestations de
ces trois états-majors sont
disponibles sur le site intraterre
du CDEF.
Colonel Serge BILLIERES
Chef du bureau 3A
Le saviez-vous ? (5)
A propos d’états-majors
et de forces
L’influence française en
matière d’état-major
Apparu dans le vocabulaire militaire
français en 1676, le terme "étatmajor"
désignait à l’origine une liste
d’officiers supérieurs susceptibles
d’assurer des tâches administratives
dans l’armée permanente de Louis
XIV, en temps de paix comme en
campagne. L’adoption du système
divisionnaire, avec l’apparition du
véritable combat interarmes,
dans les décennies précédant
la Révolution, allait entraîner des
besoins nouveaux de coordination
dans la conduite de ce combat IA
et orienter maints officiers "d’étatmajor"
vers des missions nouvelles.
p. suivante

28
Réflexions
Les armes non létales : une réponse logique
au nouvel environnement sécuritaire ?
Le saviez-vous ? (5)
Ces officiers, instruits sur les
techniques d’EM à partir de 1766,
formeront plus tard les états-majors
des armées de la République et de
l’Empire. Le futur maréchal Berthier,
CEM du général Bonaparte en
Italie, puis de la Grande armée,
est le plus connu d’entre eux. Son
"document sur le service de l’étatmajor
général de l’Armée des
Alpes" de 1796 et le "manuel
général des services d’état-major"
de Thiébault paru en 1813, qu’il a
largement inspiré, seront largement
connus et imités dans beaucoup
d’armées européennes.
Mais en fait, après une période
marquée par la prééminence
prussienne, surtout après la guerre
franco-allemande de 1870-71,
l’influence française jouera
pleinement à partir de la 1 re guerre
mondiale avec l’adoption du
système d’EM français par l’armée
américaine, même si celle-ci
s’est inspirée aussi du système
britannique. Depuis 1916, les étatsmajors
des corps français
comprenaient les 4 bureaux
traditionnels (B1- Effectifs, B2-
Renseignement, B3- Opérations,
B4- Ravitaillement-transports).
Les Américains y rajoutèrent un
5 e bureau chargé de l’instruction et
de l’entraînement, nécessaire dans
une armée qui montait en puissance
avant son engagement en 1918.
Cette organisation perdurera dans
l’armée américaine, puis s’imposera
dans l’OTAN et nous reviendra
quelques décennies plus tard,
alors que nous avions abandonné
la numérotation traditionnelle des
bureaux pour des appellations
moins prononçables (B.RENS,
B.OPS, B. LOG, …).
CDEF
Confrontée de plus en plus souvent
aux situations conflictuelles face à
des foules menaçantes ou des adversaires
belliqueux souhaitant en découdre,
l’armée de terre vient de se voir
autoriser "de façon dérogatoire et
temporaire" 1 l’utilisation d’armes et
de munitions à létalité réduite, palliant
ainsi le déficit constaté par les terriens
en mission de maintien de la paix
sur les théâtres d’opérations.
Le concept d’arme non létale, apparu
maintenant depuis quelques années,
permet grâce à la technique, de combattre
sans donner la mort. Ainsi présenté
comme un progrès, ce type
d’arme non létale (ou peu) en maintien
de l’ordre semble atteindre le but
recherché, à savoir : la neutralisation
d’un adversaire dans un contexte de
violence. Pour autant, il convient d’être
clair dans la définition de ce type
d’armes car on parle maintenant
d’arme non létale (ANL) et d’arme à
létalité réduite (ALR). En effet, après
quelques expériences on s’est aperçu
que ce concept "non létal" pouvait
quand même tuer…
Après avoir différencié le genre non
létal et " un peu " létal, examiné le point
de situation au sein de l’armée de terre
dans ce domaine, quelques réflexions
seront présentées ci-après.
Quelques précisions sur les
qualificatifs " non létal " et
" létalité réduite "
Les ANL semblent pouvoir agir sur un
spectre très étendu visant des personnes
mais également des matériels
voire des installations. Sans
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
Parmi les actions des forces terrestres dans leur engagement en opérations, un certain
nombre relèvent du contrôle de foule pour lequel, progressivement et là où c’est
nécessaire, savoir-faire et outils se mettent en place.
vouloir lister tous les exemples d’ANL
on peut brièvement évoquer les colles
et glus, les filets, les pistolets électriques
(taser 2 ), les grenades éblouissantes
ou d’aveuglement, les gaz non
mortels, les sons de forte intensité, pulsés
atténués, infrasons, polysons,
micro-ondes de forte puissance considérés
comme des incapacitants. Pour
les ANL anti-matériel cela va du brouillage,
aux virus ou vers informatiques en
passant par les lasers d’opacification.
Enfin, il semble évident d’évoquer également
d’autres armes non létales de
type anti-économie agissant sur l’agriculture,
la météorologie, les opérations
d’influence 3 .
Ainsi ce bref aperçu non exhaustif et qui
comporte encore bien des domaines
inexplorés répond aux préoccupations
humanitaires de l’opinion publique.
Pour autant, certaines de ces armes
dites non létales pourraient bien entraîner
par effet indirect la mort ou tout au
moins des grandes souffrances ce qui
ne semble plus tout à fait "humanitaire".
Néanmoins, l’étendue du spectre ANL
et leur usage ont permis de classifier, ou
plutôt de repréciser, une catégorie
d’ANL en ALR, c'est-à-dire armement à
létalité réduite. Ces ALR 4 seraient
essentiellement utilisés dans le cadre
de la maîtrise des émeutes ou d’attroupements
dangereux.
1 Décision N°871/DEF/EMAT/BSA/CBT DEB
du 9 décembre 2005.
2 NDLR : pistolet électrique paralysant fabriqué
aux Etats-Unis.
3 Contrôle de l’esprit et de la modification du
comportement.
4 Ou LTL (US) Less Than Lethal, moins que létal.

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 29
HÉRACLÈS N°16
Ainsi multiplicateur de l’efficacité des
armements traditionnels que l’on n’utilisera
pas en première approche, les ALR
permettent en cas de crise de maintenir
la violence au niveau le plus bas possible
en évitant de tuer mais en provoquant
(éventuellement par blessure) une
action significative sur des émeutiers bien
choisis 4 .
Des points sont encore
à élucider et des progrès
restent encore à faire…
Cette première capacité graduée, offerte
au militaire de l’armée de terre, nécessite
explications et bien évidemment entraînement,
cela devra être réaffirmé et poursuivi
dans les MCO 5 , surtout celles des
unités à possible vocation CRC 6 . Par
contre, espérons qu’avec le temps le
matériel "temporaire" mis à disposition
des soldats évoluera, en s’ouvrant aux
techniques novatrices et certainement
déjà disponibles, mais aussi en adoptant
une catégorie spécifique d’armement
bien différenciée par sa forme et sa couleur
pour bien signifier à l’opposant le
niveau de réplique auquel il s’expose.
En effet, un Famas ou un fusil équipé de
balles en gomme reste une arme (de
guerre réelle) s’il n’est pas visiblement
différent. Enfin, d’autres possibilités, toujours
dans ce cadre politiquement correct,
devrait voir le jour pour compléter la
panoplie de nos combattants (armes
électriques, acoustiques 7 ,…)
Par contre s’il est admis que les ALR ne
tuent "presque pas", il convient toujours
de les considérer comme de l’armement
militaire avec un concept d’emploi
bien précisé. Ce type d’arme, en
effet, ne s’utilise pas comme les armes
létales et il devient également nécessaire
de se préparer à "l’engagement sur le territoire
national au titre de la sécurité
générale et du service public".
Pour terminer ce constat, et cela semble
poser un réel problème, toute nouvelle
arme nous amène à nous interroger sur
le respect des conventions internationales.
Il devient urgent de sortir les armes
non ou peu létales de la zone grise en
élargissant éventuellement le champ
d’application des conventions existantes
ou en adoptant d’autres plus spécifiques.
Quid de l’éthique ?
Quelques réflexions…
Enfin se pose davantage aujourd’hui qu’hier,
la question de l’éthique.
Intervenant le plus souvent sur des théâtres
dits stabilisés, le rôle des forces terrestres
n’est plus de vaincre mais de
séparer à moindre frais des factions rivales
et cela au sein même des populations
civiles. Population qui d’ailleurs demeure
le plus souvent partie prenante de ces
rivalités. Ainsi donc, le recours aux armes
à létalité réduite offre au commandement
des options variées permettant de mettre
hors de combat des éléments hostiles
noyés dans des civils, libérer des otages,
maîtriser des émeutes,…
Pour autant ce choix d’ "options variées"
doit correspondre à un bon usage de la
force et l’on peut donc se féliciter de
n’avoir retenu pour l’instant que
quelques dispositifs pour l’armée de terre.
Ainsi avec un apprentissage adapté,
il reviendra au chef d’admettre le
recours soit à ce type d’armes "soft" soit
à des dispositifs plus énergiques en restant
toujours en cohérence avec la mission
reçue et selon le principe du
moindre mal. Avec ces équipements
on pourrait rapidement voir se profiler
aux yeux d’une majorité d’autorités
militaires et politiques une
réponse appropriée au nouvel environnement
sécuritaire.
(p. suivante)
4 Une action de force entraîne presque automatiquement
des pertes ou des blessés.
5 MCO: Mise en condition opérationnelle.
6 CRC: Crowd and Riot Control, contrôle de foule.
7 Déjà utilisée avec des sirènes de char.
activités
>>DREX
Recherche
L’article 17.2 un cadre
juridique adapté à
l’emploi de la force en
opération extérieure
"N’est pas pénalement
responsable le militaire qui,
dans le respect des règles
du droit international et dans
le cadre d’une opération se
déroulant à l’extérieur du
territoire français, exerce des
mesures de coercition ou fait
usage de la force armée, ou en
donne l’ordre, lorsque cela est
nécessaire à l’accomplissement
de sa mission."
L'article 17.2 du nouveau statut
général des militaires (SGM)
aménage et "constitue une
extension considérable de la
protection pénale des militaires,
indispensable aux nouvelles
tâches qu’ils exercent dans le
monde" 1 . L’article 17.2 permet
désormais, au travers des
règles d’engagement, l'emploi
de la force létale lorsque cela
est rendu nécessaire à
l’accomplissement de la (sa)
mission, pour défendre des
biens, (par exemple un bien
culturel ou cultuel) ;
p. suivante
1 Déclaration du ministre de la Défense lors de
la séance du 14 décembre 2004 à
l’Assemblée nationale.

30
Réflexions
activités
>>DREX
Recherche
assurer la protection de la force,
contre une intrusion dans une
zone militaire d’accès restreint
ou toute autre zone clairement
définie, mener un raid blindé
ou une action offensive ; afin
d’assurer sa liberté d’action et
de mouvement. Cependant dans
tous les cas, l’emploi de la force
répond toujours à l’usage de la
force minimale pour permettre
le respect des principes de
nécessité, de proportionnalité et
de discrimination 2 . L’usage des
armes à létalité réduite trouve,
dans ce nouveau cadre juridique
de l’emploi de la force, toute
sa portée, dans la mesure
où elle rend possible une
graduation de la riposte.
Cet article 17.2 permet donc
une application pleine et entière
par les troupes françaises des
ROE autorisant l'usage de la
force minimale dans le cadre
d’une action offensive ou
défensive.
p. suivante
2 La nécessité militaire est un principe, en
vertu duquel un belligérant exerce le droit de
prendre toutes mesures qui seraient
nécessaires pour conduire à bien une
opération.
Le principe de "discrimination" implique
que les attaques doivent être dirigées
exclusivement contre des combattants -
individuels ou en groupe - et contre des
objectifs ou installations militaires.
Le principe de proportionnalité commande
de s’abstenir de lancer des opérations
militaires qui sont grossièrement
disproportionnées par rapport à l’objectif
militaire visé, c’est-à-dire qui ont plus d’effets
généralement négatifs que d’utilité militaire.
Cf Article 57 Protocole I, additionnel aux
conventions de Genève.
Mais n’oublions pas que, pour le
moment, les réflexions et les études
sont toujours en cours et cette soi-disant
réponse mérite une évaluation
sérieuse, multifactorielle et plus approfondie.
Cette évaluation ne pourra se
faire qu’à travers un débat pluridisciplinaire
bénéficiant d’une information
complète et rigoureuse, naturellement
fondée sur le principe de précaution.
C’est ce débat bien sûr ouvert, pas seulement
aux militaires d’ailleurs, qui permettra
de dégager un consensus pour
apporter des solutions à la course aux
armements de ce type qui ne pourront
de toutes façons pas résoudre les futurs
problèmes de sécurité.
Avertissement du CDEF
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
En conclusion, si l’adoption des ALR
constitue un progrès annoncé en apparence
simple et évident pour les forces
terrestres, il conviendrait de nuancer
leur possibilité d’utilisation et prendre
en compte les circonstances, marquées
ou non par la violence, en
considérant également les buts à
atteindre et le degré d’efficacité
recherché.
Colonel RICHET
Chef B3
EMF3 /DPRO
Dans l’article ci-dessus sont évoqués au sujet des ANL ou des ALR le "maintien
de l’ordre" et "l’engagement sur le territoire national au titre de la sécurité
générale et du service public". Or, il convient de bien séparer le "contrôle de
foule", mené sur un théâtre d’opération extérieur dans un cadre particulier, du
"maintien de l’ordre", mission exceptionnelle effectuée sur le territoire
national, dans un cadre légal très strict (engagement des forces de 3 e catégorie
aux ordres des autorités civiles). L’emploi des moyens serait alors du ressort de
ces seules autorités.
Vos réactions aux informations parues dans Héraclès
sont les bienvenues
C.D.E.F.
Centre de Doctrine d’Emploi des Forces
BP 53 - 00445 ARMÉES
Tél. : 01 44 42 35 91 ou 01 44 42 48 93
PNIA : 821 753 35 91 ou 821 753 48 93
Fax : 01 44 42 52 17 ou 821 753 52 17
Mel : heracles@cdef.terre.defense.gouv.fr
Web : www.cdef.terre.defense.gouv.fr

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 31
HÉRACLÈS N°16
Usage de la force en OPEX :
la nouvelle donne
Un numéro spécial d’Héraclès a été consacré à ce sujet en février, illustré par les retours
d’expérience de nos différents théâtres. L’article ci-dessous analyse l’importante
modification du statut des militaires sur ce point, jugée très positivement.
La loi du 24 mars 2005 portant
réforme du statut général des
militaires, vient modifier de manière
importante le cadre juridique
national de l’usage de la force en
OPEX, notamment dans son article
17-2, que le ministre de la Défense
a qualifié "d’extension considérable
de la protection pénale des militaires,
indispensable aux nouvelles
tâches qu’ils exercent dans le monde".
Le statut de 1972 n’avait en
effet pas pris en compte le contexte
des situations opérationnelles d’aujourd’hui.
L’inadaptation
de l’ancien statut
au contexte opérationnel
L’adoption du nouveau statut général
des militaires et surtout de l’art.
17-2 tire sa source d’une problématique
juridique que l’accroissement
progressif de l’engagement de nos
forces en opérations n’a fait que
mettre en valeur.
L’inexistence d’un état juridique
de crise extérieure
Il n’y avait pas de droit spécifique
applicable aux crises extérieures et
à l’engagement de nos forces dans
celles-ci.
En effet, en dehors du territoire, il
n’existait que deux cadres juridiques
: la guerre et la paix. Les
engagements extérieurs n’étant pas
considérés comme des opérations
de guerre, qui bénéficient d’une procédure
pénale dérogatoire au droit
commun (cf article 35 de la constitution
de la V e République du 4 octobre
1958), s’inscrivaient dans un
régime juridique déjà existant : le
droit pénal national du temps de
paix.
L’incompatibilité entre les normes
nationales et internationales
Quand les forces armées s’engagent
à l’extérieur du territoire national,
elles le font dans le strict
respect du droit international.
Dans ce cadre, l’emploi de la force
prévu dans les règles d’engagement
du théâtre était certes licite, mais se
heurtait à l’impossibilité pour les
militaires de l’invoquer.
En effet, le droit national primait sur
le mandat international en raison de
la non - introduction en droit national
de celui-ci par une ratification et une
publication.
(p. suivante)
activités
>>DREX
Recherche
Cependant, en aucun cas,
l’application de l’article 17.2
ne se substitue pas à l’emploi
de la force éventuellement
létale dans le cadre de la
"légitime défense" qui est un
droit naturel à tout individu,
quelle que soit la situation 3 .
Ce sont deux cadres juridiques
distincts de l’emploi de la force.
Cet article 17.2 crée en
définitive une nouvelle cause
d’irresponsabilité pénale dans
le cadre de la loi, mais
n’affecte en rien le principe
de l’application du droit pénal
en opération extérieure.
Il ne constitue pas une
exonération de responsabilité
pénale absolue pour l’ensemble
des actes accomplis en
opération extérieure.
Lieutenant-colonel Jérôme CARIO
chef du Bureau recherche
3 La légitime défense est prévue dans le code
pénal français, article 122.5.

32
Réflexions
activités
>>DREX
Recherche
A paraître bientôt
dans les Cahiers de
la recherche doctrinale
"L’emploi des forces
terrestres dans les
missions de stabilisation
en Algérie"
par Mlle Adèle LEGUEN
L’expérience française en
Algérie nous montre qu’il faut
redécouvrir certains modes
d’action que nous avons
connus et appliqués par
le passé. Il ne s’agit pas
seulement de gagner des
batailles, mais d’asseoir
un environnement sécurisé
seul susceptible d’assurer
la conquête des cœurs et
des esprits.
En s’interrogeant ainsi sur la
façon dont les forces peuvent
participer activement au retour
de la stabilité du pays, cette
étude sur "L’emploi des forces
terrestres dans les missions
de stabilisation en Algérie"
s’intéresse essentiellement
au volet tactique, dont le
renseignement est la fonction
opérationnelle principale.
p. suivante
Ainsi, aussi légitime était-il, l’usage
de la force par les forces armées
françaises dans une OPEX en vertu
d’un mandat délivré par le conseil
de sécurité des Nations unies, se
voyait entravé par les règles juridiques
nationales.
Il y avait donc distorsion entre les
normes nationales et l’application
des normes internationales.
Conséquences juridiques et
pratiques de cette inadaptation
C’est donc le droit pénal national du
temps de paix, notamment les
règles relatives à la légitime défense,
à l’état de nécessité et au commandement
de l’autorité légitime,
qui encadrait l’usage de la force en
OPEX.
Cette application des règles pénales
nationales aux OPEX était
inadaptée car elles n’ont pas été
conçues pour l’action des militaires
sur un théâtre d’opération.
En effet, le droit pénal repose sur le
sacro-saint principe d’individualisation
des peines alors que l’action
des forces armées s’inscrit dans un
cadre collectif.
Si dans certains cas ces règles ont
pu suffire, elles se sont révélées
inadaptées à nombre de circonstances
opérationnelles où les
besoins de la mission exigeaient un
emploi de la force supérieur à celui
édicté dans le code pénal, comme
les y autorisent généralement les
règles d’engagement.
De ce cadre juridique incohérent
découlaient des conséquences
pratiques néfastes, sources de difficultés
en OPEX.
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
Conséquences pratiques
néfastes de cette inadaptation
L’application stricte des dispositions
du droit pénal national faisait courir
un risque à la réussite de la mission,
voire même de mettre en jeu la
sécurité du personnel projeté, car
dès lors que les militaires n’étaient
pas placés en situation de légitime
défense, ils n’étaient pas fondés à
employer la force, en particulier la
force létale.
D’un autre côté, s’ils employaient
tous les moyens mis à leur disposition
pour mener à bien la mission
confiée ils risquaient de dépasser le
cadre autorisé par la loi nationale et
mettre ainsi en jeu leur responsabilité
pénale (donneurs d’ordres comme
exécutants !).
Cette situation d’incertitude juridique
a donc amené une réflexion et l’élaboration
d’un cadre de dispositions
juridiques clairement définies sur l’usage
de la force en OPEX.
La solution apportée par
l’article 17-2 du nouveau
statut général des militaires
C’est ainsi par la loi du 24 mars
2005 portant révision du statut
général des militaires que les dispositions
nécessaires ont été adoptées,
notamment avec la mise en
place de l’article 17-2 dont voici le
texte intégral :
" N’est pas pénalement responsable
le militaire qui, dans le respect des
règles du droit international et
dans le cadre d'une opération militaire
se déroulant à l'extérieur du
territoire français, exerce des

Réflexions
JUILLET-AOÛT 2006 33
HÉRACLÈS N°16
mesures de coercition ou fait usage
de la force armée, ou en donne
l’ordre, lorsque cela est
nécessaire à l'accomplissement
de sa mission."
Ce dernier est une disposition à
caractère pénal qui ajoute aux
motifs d’exonération déjà existants
(légitime défense, …) une cause
d’irresponsabilité pénale applicable
aux seuls militaires qui utilisent
- ou qui donnent l’ordre !d’utiliser
la force en OPEX, c’està-dire
pendant un engagement
occasionnel ou temporaire des forces
armées hors du territoire national.
Cela ne saurait donc s’appliquer
aux missions intérieures (MISSINT)
de type VIGIPIRATE où le droit
pénal reste en vigueur.
Outre la qualité de militaire et le lieu
de l’action, la recevabilité de l’article
17-2 est soumise à plusieurs conditions
:
• Condition de nécessité : Pour être
légal, l’usage de la force doit avoir
été rendu obligatoire et s’inscrire
dans l’accomplissement de la mission
confiée au militaire. Le fondement
de l'absence de responsabilité
pénale réside dans le motif de l'emploi
de la force - l'accomplissement
de la mission -, et non plus dans
l'existence d'une agression répondant
aux critères stricts de l'article
122-5 du Code pénal relatif à la
légitime défense.
• Condition de proportionnalité : Une
exigence de proportionnalité
découle de la condition de nécessité
mentionnée dans l’article 17-2.
En toutes circonstances, l'emploi
de la force doit être strictement
proportionné à la gravité de la
menace ou de l'entrave ou à l'objectif
opérationnel à atteindre.
• Respect du droit international :
Selon ce principe, les modalités de
l'usage de la force devront être
conformes au droit international,
qui se définit comme le droit constitué
des conventions internationales
ratifiées par la France, de la
coutume internationale, des principes
généraux du droit international
et des actes des organisations
internationales, qui créent des obligations
juridiques dans les conditions
prévues par le traité
constitutif de celles-ci.
Le respect du droit international
s'imposait déjà aux militaires français.
Cette condition de légalité
internationale ne crée donc aucune
obligation nouvelle et ne modifie
en rien le cadre d'action des
militaires français en opération
extérieure.
Conséquences de
ce nouveau cadre juridique
L'article 17-2 du statut général des
militaires permet d'élargir les conditions
d’usage de la force par les
militaires dans le cadre de l'accomplissement
de leur mission.
C’est indubitablement l’avancée la
plus marquée du nouveau statut.
(p. suivante)
activités
>>DREX
Recherche
A paraître bientôt
dans les Cahiers de
la recherche doctrinale
"Dans un contexte
historique tourmenté,
un processus de
stabilisation inachevé
La France en Bosnie :
1992-1996"
par le Lieutenant ROLLET
Bureau Recherche
Si cette étude n’a pas
l’ambition de livrer une
analyse détaillée et
exhaustive de l’intervention
militaire française en Bosnie
depuis 1992, elle analyse
le contexte politico-historique,
sans laquelle il était difficile
de comprendre
l’environnement dans lequel
les forces armées évoluaient.
Aussi, le but de cette étude
fut prioritairement de mettre
en exergue les raisons de la
présence militaire française et
ensuite, dans une perspective
de retour d’expérience,
de souligner les éléments
marquants survenus d’abord
lors de la phase onusienne
de l’opération puis sous
commandement OTAN à l’issue
de la signature des accords
de Dayton en 1995.

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Réflexions
activités
>>DREX
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Fiche de lecture
Général (2S) Loup Francart,
Le Livre gris sur la sécurité et
la défense
Le titre du dernier livre
du général Francart est un
clin d’œil au concept de "zone
grise" et aux réflexions en cours
sur les changements intervenus
depuis le Livre Blanc sur la
Défense de 1994. Il s’ouvre
sur un portrait très rapide des
évolutions du contexte
stratégique, avec le
renforcement de l’Islamisme,
la montée de nouvelles
puissances (comme la Chine et
l’Inde), puis il passe à une
description des menaces et des
risques. L’auteur consacre une
bonne part de sa réflexion à
une typologie des menaces
asymétriques qu’il classe en
"systèmes de prédation"
(les organisations criminelles
transnationales, la piraterie…),
"systèmes de revendication"(terroristes
ou groupes
armés irréguliers qui cherchent
à promouvoir une revendication
spécifique, comme les Tigres
Tamouls) et "systèmes de
subversion" (organisations
terroristes qui refusent toute
négociation et cherchent à
renverser l’ordre politique
existant).
p. suivante
Ainsi, dès lors que les conditions de
recevabilité de l’article 17-2 seront
réunies, l'usage de la force minimale
sera notamment possible dans
les situations suivantes :
- en réponse à une intention hostile
envers la force,
- en réponse à un acte hostile
envers la force,
- pour la protection des biens
nécessaires à la mission ou dont
la protection même constitue la
mission,
- pour faire cesser toute entrave à
la liberté de mouvement de la force
ou de personnes ou organismes
désignés,
- pour faire cesser toute entrave à
l'accomplissement de la mission.
La mise en place de ce nouveau cadre
juridique va permettre une pleine
application des règles d’engagement
éditées pour un théâtre d’opération.
Les dispositions légales
nationales ne seront plus une entrave
mais un fondement interne de l’usage
de la force en opération.
Néanmoins, l'article 17-2 du statut
général des militaires ne mentionne
pas les règles d'engagement et est
donc sans conséquence sur la
valeur juridique de ce moyen formalisé
de transmission de consignes.
En droit, les règles d’engagement
constituent des ordres du commandement
impossibles à invoquer
devant un tribunal.
Aussi, l'article 17-2 n'affecte pas les
autres causes d'exonération de la
responsabilité pénale qui demeurent
applicables au personnel militaire en
toutes circonstances. En particulier, la
HÉRACLÈS N°16
JUILLET-AOÛT 2006
légitime défense et le commandement
de l'autorité légitime demeurent
des causes d'exonération de la
responsabilité pénale valides en opération
extérieure.
Enfin, l'article 17-2 n'affecte pas le
principe de l'application du droit pénal
en opération extérieure, c’est-à-dire à
l'extérieur du territoire national.
L'article 17-2 ne constitue donc pas
une exonération de responsabilité
pénale absolue. Ce n’est pas un permis
de tuer ! Il crée une cause d’irresponsabilité
pénale au bénéfice
des militaires utilisant la force dans
l’accomplissement de leur mission et,
donc, conformément aux consignes
reçues. Elle n'a pas pour objet d'établir
une immunité pénale pour l'ensemble
des actes accomplis sur un
théâtre d'opération extérieure.
L’article 17-2 du nouveau statut général
des militaires constitue une avancée
essentielle dans le domaine de
la protection des militaires contre
des poursuites pénales intervenues
dans le cadre d'opérations
extérieures.
Il convient maintenant de mesurer
son efficacité en vertu de l’utilisation
qui en sera faite par le juge.
Une chose est sûre cependant, cet
article, à lui seul, aura permis de faire
disparaître l’insécurité juridique
et les incertitudes qui pesaient sur
nos forces armées quand celles-ci
se retrouvaient projetées en opération
hors du territoire national.
Lieutenant (TA) Cédric FRAGATA
Officier droit international
EMF3 / DPRO-B9