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Les PRIMITIVES : Prehistoric songs (87-92) (CD, Mythos Prod<br />
Records)<br />
Je me souviens des Primitives lors d'un concert à Auxerre. C'était dans un<br />
bar du centre-ville il y a pas loin de 15 ans de çà, mais ce concert m'avait<br />
pourtant salement marqué. Primo parce que ce groupe donnait dans un<br />
rock'n'roll bon teint qui se baladait quelque part entre les early Dogs et les<br />
Flamin' Groovies, entre un power-rock énergique et un punk'n'roll hargneux<br />
et revigorant. Secundo parce qu'il dénotait d'un sens de l'à-propos absolument<br />
sidérant, attaquant son set par une reprise des Stones parce que c'est ce<br />
qui passait dans la sono à ce moment-là, ou calant une cover du "Roadrunner"<br />
de Bo Diddley en plein milieu parce que là aussi la sono reprenait, de manière<br />
involontaire, la bande-son d'un cartoon de Bip-bip et le Coyote. Merde, la<br />
classe quoi ! Le groupe n'aura pourtant sorti officiellement qu'un seul disque,<br />
un single (avec le fantabuleux "Adult sickness", un truc à mettre d'office sur<br />
vos cassettes de survie), plus 2 titres sur des compils, et un flexi à la<br />
diffusion ultra-confidentielle (et ça doit être un putain d'euphémisme). Pas<br />
grand-chose donc, et hélas ! de quoi soulever un paquet de regrets (dans<br />
mon cas au moins). Grâces donc soient rendues au label de Lisieux Mythos<br />
Prod pour nous permettre aujourd'hui de profiter de quelques titres<br />
supplémentaires (tous ceux évoqués plus haut sont bien sûr présents ici),<br />
à savoir des démos de 88 et 92 (mais avec un son qui tendrait à prouver<br />
que ces titres furent mis en boîte avec l'espoir de les faire paraître un jour)<br />
et une reprise du "Surfin' bird" des Trashmen capturée live au Jimmy de<br />
Bordeaux en 91. Certes on n'a là "que" 13 titres, mais c'est toujours mieux<br />
que les 5 "officiels" que je possédais jusqu'à présent. L'ensemble confirme<br />
que ce groupe savait faire tourner son power-rock'n'roll aussi efficacement<br />
que les petites mains de la Formule 1 leurs belles mécaniques de précision.<br />
Un rock'n'roll ciselé dans le matériau le plus pur, aux mélodies accrocheuses<br />
et rentre-dedans. Prehistoric songs peut-être, mais alors l'âge du fer plutôt<br />
que l'âge de pierre.<br />
HORACE PINKER : Texas One Ten (CD, Thick Records/Southern<br />
Records)<br />
On peut être punk et n'en pas moins aimer sa maman. Ce huitième album<br />
d'Horace Pinker en est un parfait exemple, puisqu'il s'agit d'un hommage long<br />
play à la mère du batteur, décédée en 2002. Comme l'explique Bryan Jones,<br />
sa mère, non seulement l'a toujours soutenu dans sa volonté de faire de la<br />
musique, mais fut également la fan numéro un du groupe de son fils. C'est<br />
donc peu après son décès qu'Horace Pinker commence l'enregistrement de<br />
ce disque... dont la conception durera finalement plus de 2 ans. Un album<br />
fortement introspectif vous vous en doutez puisque quasiment chaque<br />
chanson a été écrite en pensant à feue madame Jones, et à quelques<br />
épisodes de sa vie. Exercice facilité (si je puis dire) par le fait qu'elle<br />
considérait également les autres membres du groupe comme des fils<br />
adoptifs. Certes on n'est pas obligé de savoir tout çà pour apprécier cet<br />
album, au demeurant dans la droite lignée de ses prédécesseurs, à base<br />
de punk, d'emo, voire de légères teintes noisy, mais dès lors qu'on se penche<br />
sur chacun des titres on prend conscience de la manière toute particulière<br />
avec laquelle il a été conçu. On sait depuis longtemps que la musique (comme<br />
toutes les formes d'art d'ailleurs) peut se révéler être une efficace thérapie,<br />
on en a là une nouvelle preuve. Pour le coup on oublie pendant un moment<br />
que le Texas est l'état de ce bâtard de Bush et l'on se souvient que, comme<br />
partout ailleurs, peuvent aussi y vivre des gens attachants, même (et<br />
surtout) beaucoup plus anonymes.<br />
EPOXIES : Stop the future (CD, Fat Wreck Chords)<br />
Il en va du rock'n'roll comme du reste, tout n'est qu'un éternel recommencement,<br />
une histoire de cycles, de flux et de reflux, d'apogées et de déclins, de hauts<br />
et de bas. Et comme aujourd'hui tout a tendance à s'accélérer, il n'est guère<br />
surprenant de réentendre des choses qu'on avait découvertes il n'y a pas<br />
si longtemps. Prenez les Epoxies par exemple, voilà un groupe qui nous<br />
ressert une soupe déjà concoctée par des Devo, des B52's, des Blondie<br />
ou des Rezillos, à savoir une pop-new wave acidulée et adolescente propre<br />
à faire fondre les plus endurcis d'entre nous, propice à la drague en soirée<br />
estudiantine, apte à désinhiber les plus coincés et les plus réservés. Parce<br />
qu'il y a ça de bien avec les "revivals" c'est que, si c'est bien fait et bien<br />
assimilé, ça permet d'éradiquer les mauvais penchants de l'original. Comme<br />
on peut décemment supposer que les Epoxies ont grandi avec le punk mélo<br />
californien en guise de musique de chevet (ils sont de Portland, Oregon, juste<br />
au nord de San Francisco) ils ont donc abordé les quelques modèles cités<br />
plus haut avec ces références postérieures pour élaborer leur pop-new<br />
wave plutôt punky, et donc taper dans une énergie sucrée du meilleur effet.<br />
Cet album se révèle jouissif au possible, roboratif, frais, sautillant et<br />
hautement énergétique (songez qu'ils arrivent même à rendre une chanson<br />
de Scorpions, en l'occurence "Robot man", sympathique et écoutable,<br />
balèze non ?). Entre clichés sci-fi de série B et pop ludique les Epoxies nous<br />
sortent le grand jeu d'un futur gai et coloré, d'un quotidien en plastique et<br />
latex, d'une histoire en 3D et second degré (façon "Spy kids" de Robert<br />
Rodriguez). N'aime bien moi.<br />
Pdf downloaded from http://www.thepdfportal.com/fanzine61_22362.pdf<br />
LOST DISCIPLES : Killer seducer (CD, Ravenstone Records - 32 rue<br />
Lannouron - 29200 Brest)<br />
Y a des signes qui ne trompent pas. Pour ma part, dès que je trouve dans<br />
ma boîte aux lettres une enveloppe expédiée par Ravenstone je me délecte<br />
déjà des quelques bons moments à venir, à écouter un nouveau Lost<br />
Disciples. Avant même de décacheter la chose, avant même d'enfourner le<br />
truc dans le lecteur, avant même que le zinzin n'ait balancé le premier accord,<br />
je sais déjà que ces mecs-là vont me réconcilier avec le rock'n'roll (parce<br />
que oui, j'avoue, y a des fois où le rock'n'roll, ou ce que d'aucuns prétendent<br />
être du rock'n'roll, me fout salement les boules, mais bon on ne va pas refaire<br />
le monde ici, y aura toujours les vrais, les purs, les durs, et y aura toujours<br />
les ersatz, les poseurs, les branleurs, dans le rock'n'roll comme ailleurs, fin<br />
de la digression). Ouais Lost Disciples font désormais partie de ces gangs<br />
dont je sais pertinemment qu'ils ont signé un pacte de sang (ça tombe bien<br />
la pochette du petit dernier est rouge du même tonneau) avec les pires<br />
démons des neuf enfers pour que ceux-ci leur donnent la force (côté obscur<br />
donc) de balancer ces riffs acérés et incisifs, ces accords brûlants et<br />
fiévreux, ces mélodies vicieuses et libidineuses, ces rythmiques reptiliennes<br />
et hypnotiques (références non usurpées pour eux qui disent se situer<br />
quelque part aux côtés de l'iguane Iggy Pop et du cuir noir du Lizard King<br />
Jim Morrison). Lost Disciples sont les serviteurs d'un chaos qui rameuterait<br />
autour de lui les derniers espaces de liberté créatrice, sans aucune espèce<br />
de considération pour la fatuité, la vacuité et l'inocuité. "Night shadows",<br />
"Rock'n'roll Frankenstein", "Desolation highway", "Wonderland losers",<br />
"Murder dances", "Dancing with the banshees", Lost Disciples nous<br />
proposent la bande-son de nos mythes urbains modernes, de nos<br />
cauchemars post-victoriens, de nos errances intimes, de nos rêves<br />
d'héroïsme désincarné. On rêverait d'entendre les crachats sonores de<br />
Lost Disciples sur les images d'outre-monde d'un David Lynch. Pour enfin<br />
faire un jour un vrai film rock.<br />
STARFIGHTER : Orion (CD, Kinky Star Records - Vlasmarkt 9 - 9000<br />
Gent - Belgique)<br />
Après avoir été le projet solitaire de Tim Brown, après avoir été un trio sur<br />
"Make a sex noise" l'album précédent, Starfighter est aujourd'hui un quatuor<br />
grâce à l'adjonction d'un second guitariste (Sebastian Omerson, par ailleurs<br />
également gratteux chez les voisins de label Dr Pepper Family). Non pas que<br />
ça change fondamentalement quoi que ce soit à la musique de Starfighter,<br />
sinon quelques parties de guitares un peu plus intenses qu'avant, puisque<br />
l'essentiel de la musique du groupe sort de l'imagination de Tim Brown. Qui<br />
consiste en diverses déclinaisons pop et rock. De la légèreté primesautière<br />
d'un "# 1 today" au puissant "Pretend and lie" le spectre musical visité par<br />
Starfighter est aussi vaste que les étendues sidérales induites par le nom<br />
du groupe comme par le titre de l'album. Parfois tendues, parfois<br />
baguenaudières, parfois intenses, les mélodies ciselées par Tim Brown et<br />
sa bande s'accrochent à votre inconscient aussi solidement que de la<br />
poussière d'étoile dans le sillage d'une comète. C'est bien foutu, calibré pour<br />
vous toucher au plus profond de vous-même, et aussi précis qu'un calcul<br />
de trajectoire pour navette spatiale. Sponsorisé par la NASA ?<br />
The SOVIETTES : LP III (CD, Fat Wreck Chords)<br />
Ne vous fiez pas à l'apparent j'm'en foutisme de ce groupe (nommer ses trois<br />
premiers albums LP I, LP II, LP III n'est certes guère original), les Soviettes<br />
n'en dégagent pas moins un punk-rock enjoué et eminemment dansant (on<br />
peut penser aux Briefs ou à nos Neurotic Swingers). En un véritable feu<br />
d'artifice les 14 titres de ce troisième opus claquent dans tous les coins, vous<br />
arrosant d'accords roboratifs et lysergiques, vous ensevelissant sous des<br />
kilotonnes de refrains accrocheurs et rentre-dedans, vous gratifiant de<br />
quelques-unes des meilleures punk-songs entendues depuis longtemps. Et<br />
je ne dis pas çà parce que le groupe est composé aux 3/4 de gisquettes<br />
toutes plus affriolantes les unes que les autres (de toute façon il est toujours<br />
plus agréable de regarder 3 jeunes et charmantes demoiselles que 3<br />
gratteux barbus et tatoués jusqu'aux dents, non ?), un argument auquel ma<br />
faiblesse naturelle m'a toujours fait succomber, mais bel et bien parce que<br />
tout ce petit monde dégage une aura de fraîcheur et de fébrilité apte à<br />
décoincer le plus hermétique freak de cette foutue planète. Je vous mets<br />
au défi de ne pas taper du pied à l'écoute de n'importe quel titre de ce disque,<br />
de ne pas chanter à tue-tête ces mélodies jouissives et régénératrices, de<br />
ne pas fondre devant tant de facilité et d'énergie (ou alors c'est que vous<br />
n'êtes pas humain, j'entends par là humain normalement constitué). De plus,<br />
non contents de nous exciter comme des puces avec ces tubes en<br />
puissance, les 4 musiciens des Soviettes n'ont rien trouvé de mieux que de<br />
chanter tous les 4, pour mieux renforcer le pouvoir évocateur de ce punkpop<br />
confondant d'aisance (certaines parties du chant féminin n'étant pas<br />
sans rappeler cette autre énervée de Texas Terri). Y en a qui ont tous les<br />
talents, c'en est désespérant.