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Mésogée N°64-2008 / 65-2009 - Muséum d'histoire naturelle de ...

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<strong>de</strong> la « classe XII - Icosandrie », dans laquelle Linné plaçait les sorbiers et les alisiers.<br />

L'absence d'une indication pouvant correspondre à S. legrei n'a donc aucune<br />

signification, S. aria et S. aucuparia, certainement présents sur les hauteur <strong>de</strong> Lure à cette<br />

époque, n'étant pas davantage mentionnés dans cet inventaire partiel.<br />

La première indication sur le massif <strong>de</strong> Lure d'un Sorbus n'appartenant pas aux espèces<br />

les plus fréquentes a été publié par Ludovic Legré en décembre 1892, dans ses Additions<br />

à la flore <strong>de</strong> Provence. Dans une liste floristique, Legré mentionne «Sorbus scandica Fries,<br />

Basses-Alpes : Montagne <strong>de</strong> Lure», sans autre commentaire. A cette époque, ce binôme<br />

était habituellement utilisé par les botanistes français pour désigner l'arbre que nos<br />

flores actuelles nomment alisier <strong>de</strong> Mougeot (Sorbus mougeotii Soy. Will. & Godr.), espèce<br />

montagnar<strong>de</strong> présente du nord <strong>de</strong> l'Espagne jusqu'au sud-ouest <strong>de</strong> l'Allemagne. L'alisier<br />

<strong>de</strong> Mougeot, déjà connu <strong>de</strong>s grands massifs montagneux français, était alors confondu<br />

avec une espèce scandinave, l'alisier <strong>de</strong> Suè<strong>de</strong> (Sorbus intermedia (Ehrh.) Pers. = Sorbus<br />

scandica). La brève mention <strong>de</strong> Legré n'a donc pas attiré l'attention <strong>de</strong>s botanistes.<br />

Récemment, les auteurs <strong>de</strong> Flora Iberica ont fait le choix d'inclure S. mougeotii dans S.<br />

intermedia, du fait d'une certaine ressemblance morphologique entre les <strong>de</strong>ux taxons<br />

(Aedo et al, 1993). Ce choix n'est pas étayé par les étu<strong>de</strong>s cytologiques, celles-ci<br />

montrant <strong>de</strong>s différences significatives entre les génomes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux espèces (Nelson-<br />

Jones et al., 2002). Il n'a d'ailleurs pas été adopté par tous en Espagne (Oria <strong>de</strong> Rueda<br />

Salgueiro, 2006). Il nous semble donc préférable <strong>de</strong> continuer à considérer S. mougeotii<br />

comme une espèce distincte <strong>de</strong> S. intermedia.<br />

Quelques précisions sur l'observation <strong>de</strong> Legré sont données dans les herborisations <strong>de</strong><br />

Legré (1915). On retrouve mention <strong>de</strong> S. scandica les 24 et 31 juillet 1892, sur <strong>de</strong>s<br />

itinéraires allant <strong>de</strong> Sisteron à Valbelle en passant par le chemin du Pas <strong>de</strong> Jean Richaud<br />

et le 6 juin 1892 «<strong>de</strong> Cruis à Peipin par la Combe <strong>de</strong> la Sapié et la crête.»<br />

Les indications <strong>de</strong> Legré seront reprises sous le nom <strong>de</strong> S. aria subsp. scandica par<br />

Laurent (1937). Manifestement, ce <strong>de</strong>rnier veut désigner ainsi l'alisier <strong>de</strong> Mougeot, dont<br />

la morphologie est beaucoup plus proche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> S. aria, puisqu'il estime que ce<br />

taxon a été confondu avec S. aria dans les parties élevées <strong>de</strong>s Alpes. Le catalogue <strong>de</strong><br />

Laurent contient cependant une indication précieuse. Il mentionne en effet une<br />

localisation précise, le Pas-<strong>de</strong>-Jean-Richaud, d'après les herborisations et l'herbier <strong>de</strong><br />

Legré. Puisque les herborisations indiquent seulement <strong>de</strong>s itinéraires, la source <strong>de</strong> cette<br />

localisation ne peut se trouver que dans l'herbier <strong>de</strong> Legré. Nous y reviendrons. Plus<br />

tard, lors <strong>de</strong>s premières versions <strong>de</strong> l'inventaire, en cours <strong>de</strong> réalisation, <strong>de</strong> la flore <strong>de</strong>s<br />

Alpes-<strong>de</strong>-Haute-Provence, les données <strong>de</strong> Legré ont été initialement enregistrées sous<br />

le nom <strong>de</strong> S. mougeotii.<br />

- Publications sur l'histoire <strong>de</strong> la forêt<br />

Dès la première moitié du XIXème, l'administration a tenté <strong>de</strong> soumettre les forêts au<br />

régime forestier. La politique française <strong>de</strong> restauration <strong>de</strong>s terrains <strong>de</strong> montagne (RTM)<br />

s'est affirmée durant la secon<strong>de</strong> moitié du XIXème siècle, à la suite <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s crues<br />

<strong>de</strong>s années 1845-1860. En 1860, une loi <strong>de</strong> boisement a pour objectif <strong>de</strong> résoudre les<br />

questions d'érosion, par une politique <strong>de</strong> boisement systématique ne tenant guère<br />

compte <strong>de</strong>s populations rurales. Cette loi rencontrera <strong>de</strong> fortes résistances jusqu'à son<br />

abrogation en 1874. « Ce n'est qu'à partir <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> 1882 que l'on peut légitimement<br />

parler <strong>de</strong> restauration <strong>de</strong>s terrains <strong>de</strong> montagne » (Brugnot & Cassayre, 2002).<br />

Une étu<strong>de</strong> récente sur les conflits forestiers au cours du XIXème siècle a pris pour<br />

exemple la montagne <strong>de</strong> Lure (Simon L. et al., 2007). Pour ce qui nous intéresse, les<br />

auteurs considèrent, d'après l'analyse <strong>de</strong>s documents disponibles dans les archives<br />

départementales, que la montagne <strong>de</strong> Lure était toujours abondamment boisée durant<br />

la secon<strong>de</strong> moitié du XIXème, et que son boisement était <strong>de</strong> qualité. Les ventes<br />

autorisées par l'administration forestière, sans diminution notable durant cette pério<strong>de</strong>,<br />

attestent d'une ressource forestière importante, notamment <strong>de</strong> chênes et <strong>de</strong> hêtres, à<br />

RL’indigénat d’une espèce ligneuse du groupe <strong>de</strong> Sorbus hybrida L.. en France :<br />

le sorbier <strong>de</strong> Legré à la montagne <strong>de</strong> Lure.<br />

B. CORNIER<br />

<strong>Mésogée</strong> Volume 64l <strong>2008</strong><br />

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