La grammaire est une chanson douce. E. Orsenna de l ... - Oasisfle
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- Ce qui veut dire ?<br />
- L'obsession que j'ai <strong>de</strong> toi s'<strong>est</strong> enfoncée sur<br />
ma tête comme un chapeau trop grand. Je suis<br />
coiffé <strong>de</strong> toi. Je ne vois plus que toi...<br />
-Je vais essayer. Si ça ne marche pas, je vous le<br />
rapporte.<br />
Nous aurions pu r<strong>est</strong>er jusqu'à la nuit. <strong>La</strong> file<br />
<strong>de</strong>s clients s'allongeait. Thomas, comme moi,<br />
tendait l'oreille, «je vais lui faire <strong>une</strong> langue fourrée»,<br />
on jouera à «la bête à <strong>de</strong>ux dos». Ses yeux<br />
brillaient, il avait l'air <strong>de</strong> comprendre <strong>de</strong>s choses.<br />
Il faisait provision. Il saurait leur parler, aux filles,<br />
dès son retour, elles n'en reviendraient pas.<br />
Depuis le temps qu'il cherchait <strong>une</strong> recette pour<br />
draguer les gran<strong>de</strong>s, les bien trop gran<strong>de</strong>s pour<br />
lui.<br />
Devant les autres boutiques aussi, <strong>une</strong> foule se<br />
pressait. J'aurais volontiers passé du temps avec<br />
DlEUDONNÉ<br />
APPELEUR DIPLÔMÉ<br />
DES PLANTES ET DES POISSONS<br />
ou chez la mystérieuse<br />
50<br />
MARIE-LOUISE<br />
ÉTYMOLOGISTE EN QUATRE LANGUES<br />
En réponse à mon air égaré, Monsieur Henri<br />
expliqua :<br />
- L'étymologie raconte l'origine <strong>de</strong>s mots.<br />
«Enfer», par exemple, vient du latin infernus<br />
(inférieur), quelque chose qui se trouve en <strong>de</strong>ssous.<br />
Mais venez, j'ai bien d'autres endroits <strong>de</strong><br />
l'île à vous montrer. Maintenant, vous connaissez<br />
l'adresse. Revenez quand vous voulez.<br />
Il nous entraînait déjà. J'ai juste eu le temps<br />
d'entendre <strong>une</strong> belle liste d'injures proposées à<br />
quelqu'un qui ne supportait plus son patron.<br />
«Guette au trou», «bec à mer<strong>de</strong>», «nain d'ia<br />
couille»... Je me suis dit que toutes allaient à<br />
mon frère comme un gant, et plus efficaces que<br />
mes petites insultes habituelles, «imbécile»,<br />
« crétin », « nullard ».<br />
J'allais pour <strong>de</strong> bon l'agonir, celui-là. Je venais<br />
<strong>de</strong> l'apprendre, ce mot-là, «agonir» c'<strong>est</strong>-àdire<br />
insulter, <strong>de</strong> «honnir» c'<strong>est</strong>-à-dire dét<strong>est</strong>er.<br />
L'agonir pour qu'il agonise, mon frère adoré et<br />
dét<strong>est</strong>é, l'agonir pour qu'il se tor<strong>de</strong> à mes pieds<br />
dès que j'ouvrirai la bouche, en <strong>de</strong>mandant<br />
grâce.<br />
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