La grammaire est une chanson douce. E. Orsenna de l ... - Oasisfle
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Une autre famille d'idées sombres rôdaient<br />
autour <strong>de</strong> moi à la manière <strong>de</strong> guêpes qui atten<strong>de</strong>nt<br />
l'instant propice pour piquer. Au moment<br />
où nous embarquions dans la pirogue, j'avais<br />
surpris <strong>une</strong> conversation, <strong>une</strong> conversation chuchotée<br />
entre mon sublime et son oncle Henri.<br />
- Il y a longtemps qu'on ne les a pas vus.<br />
- Oui, ça m'étonne. D'habitu<strong>de</strong>, on les a sur le<br />
dos dès le len<strong>de</strong>main d'un naufrage.<br />
- Espérons qu'ils vont laisser tranquilles nos<br />
amis.<br />
-Pauvre charmante <strong>de</strong>moiselle! Je l'imagine<br />
très mal enfermée...<br />
De qui parlaient-ils ? Et qui voulait m'emprisonner<br />
?<br />
Comme nos accompagnateurs, je guettais<br />
l'horizon. D'où arriveraient mes ennemis ?<br />
Heureusement, notre traversée ne dura pas un<br />
quart d'heure et personne ne vint la déranger.<br />
Brûlé, cet îlot, comme <strong>une</strong> galette <strong>de</strong>s rois<br />
trop longtemps laissée dans le four. Et vi<strong>de</strong>,<br />
absolument, <strong>de</strong> plantes, d'êtres vivants, <strong>de</strong><br />
constructions, l'endroit champion du mon<strong>de</strong><br />
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catégorie désert, imbattable au Livre Guinness<br />
<strong>de</strong>s records (chapitre «Rien»). Un plateau<br />
rocheux marron foncé, détergé, délavé, récuré...<br />
Tel était l'endroit <strong>de</strong> charme où nous avions<br />
débarqué.<br />
Drôle <strong>de</strong> choix pour <strong>une</strong> excursion!<br />
Monsieur Henri ne tarda pas à nous donner la<br />
raison <strong>de</strong> notre venue.<br />
- Vous savez pourquoi les déserts avancent, un<br />
peu partout sur notre Terre ?... Il suffirait <strong>de</strong> fermer<br />
les paupières pour la voir avancer vers nous,<br />
cette terrible armée <strong>de</strong> sable. On nous parle <strong>de</strong><br />
réchauffement <strong>de</strong> la planète, <strong>de</strong> forêts dévastées...<br />
C'<strong>est</strong> sans doute vrai. Mais l'on oublie<br />
l'essentiel. Ici, il y a cent ans, vivaient <strong>de</strong>ux villages,<br />
avec tout ce qu'il faut pour être heureux,<br />
<strong>de</strong>s plantes, <strong>de</strong>s paillotes, <strong>de</strong> l'eau <strong>douce</strong>, <strong>de</strong>s<br />
femmes, <strong>de</strong>s hommes, <strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong>s animaux...<br />
Je ne pouvais y croire.<br />
Ici, <strong>de</strong> la vie! Sur ce carré <strong>de</strong> la désolation?<br />
Allons donc ! Je forçais mon cerveau à imaginer<br />
mais il refusait, il renâclait, il me prenait pour<br />
<strong>une</strong> folle.<br />
-... Un jour, <strong>une</strong> tempête aussi forte que la<br />
vôtre a soufflé sur cette île. Des arbres ont été<br />
arrachés, bien sûr, et <strong>de</strong>s maisons se sont envo-<br />
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