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Livres<br />
Sinon la mort te gagnait - Le Point du jour<br />
Jean-Christophe Bourcart, la photo d’une vie<br />
Le Point du jour a rarement publié <strong>des</strong> textes. Celui-ci, signé par <strong>le</strong> photographe Jean-Christophe Bourcart,<br />
est magnifique. Intime, urgent, bou<strong>le</strong>versant.<br />
Jean-Christophe Bourcart raconte comme<br />
il semb<strong>le</strong> photographier. À l’instinct. Sinon la mort te<br />
gagnait est un livre à part. Inclassab<strong>le</strong>. « Un roman si<br />
l’on veut et si l’on veut une théorie ; la théorie de soimême<br />
» propose l’<strong>au</strong>teur en ouverture, en empruntant<br />
cette citation de P<strong>au</strong>l Valéry. Jean-Christophe<br />
Bourcart livre une succession de souvenirs. Écrits <strong>au</strong><br />
présent, de façon succincte, sans souci de poser <strong>le</strong><br />
contexte. Presque hâtivement. Comme s’il avait peur<br />
qu’ils ne lui échappent. Alors il se presse. Rythme<br />
rapide. Aucune transition. « J’ai un train é<strong>le</strong>ctrique,<br />
<strong>des</strong> petits soldats et une col<strong>le</strong>ction de rétroviseurs<br />
que j’arrache <strong>le</strong> soir dans <strong>le</strong> quartier quand on traine<br />
avec <strong>des</strong> copains. J’enflamme un wagon et il rou<strong>le</strong> en<br />
fondant. Je recueil<strong>le</strong> un petit chat, mais il s<strong>au</strong>te par<br />
la fenêtre et se casse <strong>le</strong>s pattes. Je rêve que maman<br />
vient dans ma chambre pour me tuer. »<br />
Jean-Christophe Bourcart insère <strong>au</strong>ssi <strong>des</strong> photos<br />
d’enfance, <strong>des</strong> photos personnel<strong>le</strong>s ou tirées de ses<br />
reportages professionnels. Ce livre est une urgence.<br />
Un bilan. La photo d’une vie faite de voyages, de ren-<br />
Vous n’étiez pas là - Vertica<strong>le</strong>s<br />
Biographie<br />
Nico-noclaste<br />
Alban Lefranc, né à Caen, s’empare du mythe<br />
de Nico, égérie <strong>des</strong> seventies, et déjoue ses pièges.<br />
L’exercice est péril<strong>le</strong>ux. Écrire la biographie d’un être qui<br />
adorait fabu<strong>le</strong>r sur sa propre existence, brouil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s cartes et s’inventer<br />
mil<strong>le</strong> histoires. « On épluche <strong>des</strong> artic<strong>le</strong>s, <strong>des</strong> films, <strong>des</strong> chansons,<br />
<strong>des</strong> photos : <strong>le</strong>s circonstances sont peu sûres, <strong>le</strong>s témoins sont morts.<br />
La m<strong>au</strong>vaise foi et la glorio<strong>le</strong> <strong>des</strong> <strong>au</strong>tres ont fait <strong>le</strong> reste. » Il en f<strong>au</strong>drait<br />
plus pour arrêter Alban Lefranc, écrivain et traducteur de l’al<strong>le</strong>mand.<br />
Son personnage ? Christa Päffgen, plus connue sous <strong>le</strong> pseudonyme<br />
masculin de Nico dans <strong>le</strong>s années 60. Née à Cologne en 1938, mannequin<br />
pour <strong>le</strong>s plus grands couturiers, actrice (el<strong>le</strong> a fait ses débuts<br />
dans <strong>le</strong> film de Fellini, La Dolce vita) puis chanteuse. Égérie d’Andy<br />
Warhol, el<strong>le</strong> rejoignit <strong>le</strong> temps d’un album <strong>le</strong> mythique groupe de Lou<br />
Reed, The velvet underground. Devenue toxicomane, Nico décédera<br />
à Ibiza en 1988. Voilà pour <strong>le</strong>s faits. Enrobés par pas mal de clichés<br />
et d’imprécisions. Mais <strong>le</strong>s clichés n’intéressent pas Alban Lefranc. Et<br />
puis à quoi bon ? Sans cesse son personnage se dérobe sur la page.<br />
Il f<strong>au</strong>t donc formu<strong>le</strong>r <strong>des</strong> hypothèses, <strong>des</strong> suggestions. « Une fol<strong>le</strong><br />
troupe hirsute d’enfances court sur votre pe<strong>au</strong>. Je vous en propose<br />
plusieurs, je sais que vous <strong>le</strong>s aimez toutes. [… Est-ce qu’une petite<br />
fil<strong>le</strong> qui court sous <strong>le</strong>s bombes, tresses lustrées dans <strong>le</strong> cou, à Cologne<br />
ou Berlin, <strong>au</strong> milieu <strong>des</strong> restes humaines fumants, vous contenterait,<br />
pour commencer ? »<br />
Ironique, tendre, jamais dupe, Alban Lefranc s’amuse. Apostrophe<br />
Nico : « Christa Päffgen, aimée <strong>des</strong> dieux, petite fil<strong>le</strong> triomphante qui<br />
peut mourir à tout instant. » Mais Alban Lefranc se joue <strong>au</strong>ssi du genre<br />
biographique. Ponctuant son texte de verbes conjugués <strong>au</strong> conditionnels,<br />
nombreuses questions, de « Sans doute… »… Parfois il ose <strong>le</strong><br />
« je ». Ce sont <strong>des</strong> passages poignants. Fina<strong>le</strong>ment sa tentative de biographie<br />
se rapproche de ce qu’était Nico, une femme qui ne se laissait<br />
pas attraper. Alors il lui écrit quelques-unes de ses vies possib<strong>le</strong>s.<br />
ù<br />
Vous n’étiez pas là, Alban Lefranc (Vertica<strong>le</strong>s, 2008).<br />
Retrouvez l’<strong>au</strong>teur sur son blog : http://alban<strong>le</strong>franc.blogspot.com<br />
contres, d’amours malheureuses, de questionnements<br />
sexuels, d’expériences extrêmes avec la drogue, de<br />
crise de dépressions profon<strong>des</strong> et d’images. Comme<br />
si jusqu’à présent, jusqu’à l’heure d’écrire ce livre, et<br />
de devenir père, il avait fallu remplir, comb<strong>le</strong>r, pallier,<br />
« sinon la mort te gagnait ». Et puis la rencontre avec<br />
Marina, la naissance d’Elio. Urgence sans doute <strong>au</strong>ssi<br />
parce que la cécité <strong>le</strong> menace. Mais n’est-el<strong>le</strong> pas « <strong>le</strong><br />
meil<strong>le</strong>ur remède pour <strong>le</strong>s voyeurs obsessionnels ? »<br />
Jean-Christophe Bourcart ne raconte pas ses souvenirs.<br />
Il est ses souvenirs. Il est <strong>le</strong> petit garçon qui dit<br />
« je » et par<strong>le</strong> <strong>au</strong> présent. Il est cet ado toujours un<br />
peu emprunté. Ce jeune homme qui se cherche, ce<br />
jeune photographe débutant. La somme d’une vie.<br />
La fabrique d’un être.<br />
« Sans cesse, j’ai projeté sur l’<strong>au</strong>tre ce qui m’appartenait.<br />
D’un manqué initial, je suis parti non pas vers<br />
<strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres, mais vers <strong>le</strong>ur image. Bien sûr, je n’y ai<br />
trouvé que <strong>le</strong> vide, que j’ai pris pour la mort. » Entre<br />
lui et <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres, Jean-Christophe Bourcart a toujours<br />
mis un appareil photographique. « Ma façon d’être<br />
mars 2009 livre / échange 14<br />
avec, c’est d’être séparé. Je continue à filmer. » Et<br />
avançant dans sa quête de souvenirs, s’approchant<br />
du présent sur <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> livre se termine, <strong>le</strong> photographe<br />
semb<strong>le</strong> ouvrir <strong>le</strong>s yeux. À l’heure où la cécité<br />
<strong>le</strong> menace. Paradoxe. « Je voudrais faire la paix, avec<br />
<strong>le</strong>s gens que j’aime mais <strong>au</strong>ssi avec <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. Cela<br />
viendra d’une façon ou d’une <strong>au</strong>tre. » L’écriture suit<br />
<strong>le</strong> cheminement de l’homme. El<strong>le</strong> s’apaise sur <strong>le</strong>s dernières<br />
pages à mesure qu’el<strong>le</strong> rejoint son <strong>au</strong>teur, ici<br />
et maintenant. « Il fallait que je retrouve ces images<br />
qui dormaient en moi, il fallait que je <strong>le</strong>s ramène de<br />
ce côté-ci du miroir. » La naissance de son fils semb<strong>le</strong><br />
<strong>le</strong> réparer. Leur portrait à tous deux est la dernière<br />
photo de l’ouvrage. L’homme est en paix.<br />
ù<br />
Nathalie Col<strong>le</strong>vil<strong>le</strong><br />
Sinon la mort te gagnait, Jean-Christophe Bourcart<br />
(Le Point du jour, 2008)<br />
L’Imprévisib<strong>le</strong> - Le jeu de la règ<strong>le</strong><br />
Le succès prévisib<strong>le</strong><br />
de L’Imprévisib<strong>le</strong><br />
L’Imprévisib<strong>le</strong> est paru pour la deuxième année. Et continue de se<br />
moquer avec douceur et be<strong>au</strong>coup d’esprit d’une <strong>des</strong> nouvel<strong>le</strong>s marottes<br />
de notre société : déclarer que tel<strong>le</strong> ou tel<strong>le</strong> année, journée, semaine, sera<br />
dévolue à une c<strong>au</strong>se, de la plus so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> à la plus farfelue. États, organismes,<br />
associations y ont même pris goût. L’O.N.U. a ainsi annoncé que 2009<br />
serait l’année <strong>des</strong> fibres naturel<strong>le</strong>s ! Mais ce sera <strong>au</strong>ssi l’Année mondia<strong>le</strong><br />
de l’astronomie, l’Année internationa<strong>le</strong> de la planète Terre, l’Année de la<br />
créativité et de l’innovation…<br />
L’Imprévisib<strong>le</strong> n’avait donc <strong>au</strong>cune raison de s’arrêter à un seul opus. C’eût<br />
été dommage. Il rythmera donc à nouve<strong>au</strong> nos jours cette année. Deux<br />
éditeurs caennais, Marie-Liesse Clavreul et Thierry Kershero, y ont veillé.<br />
L’Imprévisib<strong>le</strong> a gardé son <strong>format</strong> de poche, son élégante typographie<br />
(signée par <strong>le</strong> Caennais Cédric Lacherez), ses cou<strong>le</strong>urs discrètes... Et surtout<br />
<strong>le</strong>s deux éditeurs ont gardé <strong>le</strong> même processus pour élaborer cet agenda<br />
pas comme <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. « Nous avons dans un premier temps répertorié,<br />
pour chaque jour, <strong>des</strong> faits qui ont eu lieu durant <strong>des</strong> années finissant<br />
par 9 dans <strong>le</strong> ca<strong>le</strong>ndrier grégorien ; <strong>le</strong>squels faits sont venus s’ajouter <strong>au</strong>x<br />
données provenant du ca<strong>le</strong>ndrier visé par l’État français, <strong>des</strong> ca<strong>le</strong>ndriers<br />
religieux (catholique, juif, musulman, bouddhiste), de celui <strong>des</strong> traditions<br />
populaires, de l’Almanach <strong>des</strong> honnêtes gens, du Ca<strong>le</strong>ndrier du Père Ubu,<br />
du Ca<strong>le</strong>ndrier révolutionnaire français, etc., sans oublier ni <strong>le</strong>s événements<br />
d’ores et déjà programmés pour 2009, ni, bien entendu, la somme existante<br />
<strong>des</strong> journées mondia<strong>le</strong>s, internationa<strong>le</strong>s en tout genre. C’est ensuite sur la<br />
base de ces données col<strong>le</strong>ctées, parmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s il nous a fallu opérer <strong>des</strong><br />
choix, que nous avons nommé chacune <strong>des</strong> 365 journées que devait, à sa<br />
manière, instituer cet agenda », expliquent-ils en ouverture de l’ouvrage.<br />
Ce qui donne <strong>des</strong> appellations <strong>au</strong>ssi savoureuses que « journée de la bul<strong>le</strong><br />
spéculative », « journée de la touche étoi<strong>le</strong> », « journée de la tenue correcte<br />
exigée »… en écho à la concomitance parfois déconcertante d’événements<br />
ayant réel<strong>le</strong>ment eu lieu. Les jours se suivent et ne se ressemb<strong>le</strong>nt pas. Cet<br />
agenda vous <strong>le</strong> rappel<strong>le</strong>ra tous <strong>le</strong>s jours de l’année 2009.<br />
ù<br />
L’Imprévisib<strong>le</strong>, (Le Jeu de la règ<strong>le</strong>, 2008)