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Actualités Corporate - Allen & Overy

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2 <strong>Actualités</strong> <strong>Corporate</strong> | N°2 - mai 2012<br />

Entretien avec Daniel Cohen<br />

Les clauses de non-concurrence à la lumière de la<br />

jurisprudence récente<br />

Les arrêts récents de la Cour de cassation relatifs à<br />

l’existence ou non d’une obligation de nonconcurrence<br />

des associés ou des dirigeants vous<br />

paraissent-ils isolés ou traduisent-ils un<br />

mouvement plus large ?<br />

S’ils ne sont pas encore légion, les arrêts rendus en la<br />

matière s’inscrivent dans une lignée déjà ancienne.<br />

Toutefois, ceux rendus récemment s’intéressent<br />

substantiellement à des préoccupations analogues et<br />

sont suffisamment proches chronologiquement les uns<br />

des autres pour traduire un mouvement d’ensemble et<br />

d’ampleur. La jurisprudence est de plus en plus<br />

fréquemment saisie des interrogations suivantes :<br />

existe-il en droit des sociétés une obligation de nonconcurrence<br />

qui pèserait sur les associés ou sur les<br />

dirigeants ? Faut-il distinguer entre ces deux<br />

catégories ? Cette obligation est-elle intrinsèque à la<br />

fonction, à la qualité ou, au contraire, n’a–t-elle raison<br />

d’être qu’au travers de l'engagement contractuel ? En<br />

répondant certes au coup par coup, au gré des espèces,<br />

la jurisprudence commence néanmoins à dresser un<br />

véritable panorama d’ensemble des solutions.<br />

Pourquoi ces solutions paraissent-elles délicates à<br />

poser ? La Cour de cassation entend-t-elle fixer<br />

une fois pour toutes la ligne à suivre ou au<br />

contraire, n’a-t-elle pour objectif qu’arbitrer entre<br />

des intérêts contraires, en trouvant de subtils<br />

équilibres ?<br />

Comme bien souvent en matière économique, la Cour<br />

de cassation fait à la fois preuve de pragmatisme et de<br />

bon sens mais entend faire respecter des principes<br />

supérieurs. L’obligation de non-concurrence participe<br />

en effet d’une délicate équation. D’un côté, la liberté<br />

du commerce et de l’industrie est un principe<br />

fondamental, qui découle historiquement de la<br />

Révolution française (décret d’Allarde). Cette liberté<br />

empêche logiquement de brider abusivement toute<br />

activité extérieure à la sphère de telle société civile ou<br />

commerciale en particulier. Le droit des sociétés,<br />

comme d’autres matières, ne saurait autoriser trop<br />

largement ce type de restriction générale. D’un autre<br />

côté, il faut nécessairement préserver l’intérêt social de<br />

la société en cause et il n’est pas possible d’admettre<br />

que les dirigeants, voire les associés, se livrent à toute<br />

sorte d’activités concurrentes à celle poursuivie par la<br />

société dont ils font partie intégrante. Des limites là<br />

aussi doivent être posées. La jurisprudence tranche<br />

© <strong>Allen</strong> & <strong>Overy</strong> LLP 2012<br />

donc entre ces impératifs catégoriques contradictoires<br />

et d’une manière qui me semble en général plutôt<br />

satisfaisante, même si de-ci, de-là, telle ou telle<br />

solution spécifique soulève de légitimes interrogations.<br />

Précisément, ces solutions sont-elles aujourd’hui<br />

clairement définies ? Existe-t-il encore des zones<br />

d’ombre ?<br />

La summa divisio entre les solutions réside clairement<br />

en droit positif dans la distinction entre associés d’une<br />

part et dirigeants d’autre part. Pour synthétiser, on peut<br />

dire que pour les associés, de manière générale, il<br />

n’existe pas aujourd'hui d’obligation de nonconcurrence<br />

à l’égard de la société dont ils sont<br />

membres alors que la solution inverse prévaut pour les<br />

dirigeants sociaux. L'arrêt rendu par la Cour de<br />

cassation, chambre commerciale, en date du 15<br />

novembre 2011 est particulièrement éclairant : il<br />

indique que "sauf stipulation contraire, l'associé d'une<br />

société à responsabilité limitée n'est, en cette qualité,<br />

tenu ni de s'abstenir d'exercer une activité concurrente<br />

de celle de la société ni d'informer celle-ci d'une telle<br />

activité et doit seulement s'abstenir d'actes de<br />

concurrence déloyaux" ; en revanche, il souligne<br />

qu'une "obligation de loyauté et de fidélité" pèse "en<br />

raison de sa qualité" sur le gérant, "lui interdisant de<br />

négocier, en qualité de gérant d'une autre société, un<br />

marché dans le même domaine d'activité".<br />

La solution d'ensemble paraît raisonnable. Un associé<br />

n'est pas un dirigeant.<br />

Si autrefois on estimait qu'un associé ne pouvait<br />

exercer une activité concurrente ou participer à une<br />

société concurrente du fait de l'existence de l'affectio<br />

societatis, la jurisprudence se montre aujourd'hui plus<br />

souple : seuls des actes de concurrence déloyale sont<br />

interdits, ce qui vaudrait tout autant pour des tiers à la<br />

société ; ce n'est donc que le rappel du droit commun<br />

applicable à tout un chacun. L'obligation de nonconcurrence<br />

de l'associé n'existe pas sauf stipulation<br />

contraire. Cette solution s'applique de manière générale<br />

aux actionnaires, associés des sociétés de capitaux ; en<br />

revanche, sa généralisation aux sociétés de personnes<br />

est bien moins évidente puisqu'y règne un fort intuitu<br />

personae. C'est sans doute la raison pour laquelle la loi,<br />

dans certaines circonstances interdit à l'associé<br />

d'exercer une activité concurrente : ainsi par exemple<br />

des sociétés civiles professionnelles (Art. 4, loi du 29<br />

nov. 1966). On peut estimer, même si la jurisprudence<br />

ne le dit pas, ou pas encore, qu'une obligation implicite

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