Actualités Corporate - Allen & Overy
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4 <strong>Actualités</strong> <strong>Corporate</strong> <strong>Allen</strong> & <strong>Overy</strong> | N° 2 mai 2012<br />
ou de la société ne doit donc pas répondre aux mêmes<br />
préoccupations ni appeler une protection équivalente.<br />
Cela ne veut pas dire pour autant que règne une totale<br />
liberté. D’une part, si aucune contrepartie financière<br />
n’est aujourd’hui exigée en faveur de l’associé, la<br />
clause de non-concurrence doit sans doute - du fait du<br />
principe fondamental de la liberté du commerce et de<br />
l’industrie, appelé récemment "de libre exercice d’une<br />
activité professionnelle" - être limitée dans le temps,<br />
l’espace et l’objet (Cass. com., 15 mars 2011, pourvoi<br />
n° 10-13824, Sté Hervé Balladur International et<br />
autre). D’autre part, l’obligation de non-concurrence<br />
peut faire l’objet d’un contrôle de proportionnalité :<br />
dans une affaire où le cédant de parts sociales s’est<br />
engagé envers le cessionnaire à ne pas exercer<br />
d’activité concurrente à celle de la société cédée, la<br />
Cour de cassation n’hésite pas à annuler purement et<br />
simplement la clause litigieuse parce qu’elle « apparaît<br />
gravement attentatoire à la liberté commerciale ». La<br />
solution semble curieuse, pour ne pas dire critiquable,<br />
d’une part parce qu’il s’agit d’opérateurs avertis,<br />
conscients de leurs engagements, que la clause ne<br />
paraissait pas d’une sévérité folle et qu’enfin, elle avait<br />
dû sans doute se refléter dans le prix plus élevé de<br />
cession (Cass. com., 13 déc. 2011, pourvoi n° 10-<br />
21653, Sté GTB Distribution et autre). Enfin, en cas de<br />
cumul entre les qualités de salarié et celle d’associé<br />
(hypothèse de plus en plus fréquente : opérations de<br />
LBO, ou de capital risque, distribution d’actions<br />
gratuites, etc.), la jurisprudence tend à mettre en<br />
exergue la qualité de salarié et à reléguer celle<br />
d’associé : toutes les conditions de validité de la clause<br />
de non-concurrence contenue dans un contrat de travail<br />
s’appliquent, et notamment l’exigence d’une<br />
contrepartie financière, avec la même rigueur (Cass.<br />
com., 15 mars 2011, pourvoi n° 10-13824, précité).<br />
Simple application de la théorie de l’accessoire, la<br />
qualité de salarié étant estimée prépondérante, ou<br />
volonté marquée de contrôler fortement les clauses de<br />
non-concurrence 2 ?<br />
Quelle évolution est envisageable ? Quelle<br />
précaution faut-il prendre ?<br />
Contrairement à certains arrêts de Cours d’appel, la<br />
Cour de cassation pose une solution générale en ne<br />
distinguant pas selon que l'associé appartient à telle ou<br />
telle catégorie, ni selon son rôle éventuel dans la<br />
société. La pratique pourrait en revanche se diriger vers<br />
des obligations d'intensité variable : du tout au rien en<br />
passant par des mécanismes d’autorisations préalables,<br />
de limitations de montants, etc. - en fonction du rôle<br />
attendu de tel ou tel associé. Distinguant des<br />
catégories, l'obligation de non-concurrence d'un<br />
2 V. égal. Cass. com., 30 nov. 2011, pourvois n° 11-12905 et 12906,<br />
Sté Deloitte Conseil : clause de non-concurrence dans un pacte<br />
d’actionnaires pour un salarié d’un grand réseau d’audit promu<br />
associé qui se voit attribuer des actions ; la Cour estime que la clause<br />
d’arbitrage n’est pas valable (interdite dans un contrat de travail)<br />
alors qu’elle est parfaitement valable entre associés ou associés et<br />
société ; le juge de la clause de non-concurrence sera donc le Conseil<br />
des prud’hommes.<br />
© <strong>Allen</strong> & <strong>Overy</strong> LLP 2012<br />
associé se justifierait d'autant plus que ce dernier<br />
détiendrait une participation importante, y jouerait un<br />
rôle moteur et actif, ou encore serait un actionnaire<br />
prépondérant ou de référence ; à l'inverse, un sleeping<br />
partner ou un investisseur financier cherchant avant<br />
tout un retour sur son investissement, tel un fonds<br />
d'investissement, serait délié de toute contrainte afin de<br />
rechercher les opportunités d'affaires là où il les trouve.<br />
De même, les solutions pourraient différer selon que<br />
l’on traite du cas d’un actionnaire ou d’un exactionnaire,<br />
ou pour les dirigeants, en distinguant des<br />
intérêts simultanés ou au contraire successifs. Mais que<br />
le propos soit clair : ce n'est pas à la jurisprudence de<br />
fixer ces standards parce qu'il ne faut pas brider la<br />
liberté contractuelle, scléroser l'activité économique et<br />
imposer des carcans. Seule la pratique doit permettre<br />
de dégager des standards, des clauses-types, ou<br />
précisément des pratiques, plus ou moins attendus, des<br />
chartes de gouvernance ou des codes d'éthique,<br />
participant au phénomène de soft law qui se répand<br />
aussi en matière de sociétés.<br />
Finalement, afin d’éviter de mauvaises surprises, une<br />
certaine insécurité juridique et finalement une solution<br />
contentieuse risquant de mettre à mal la prévisibilité<br />
des solutions envisagées par les parties au moment de<br />
la conclusion de leurs accords, l’attention des<br />
praticiens et des opérateurs doit être fortement attirée<br />
sur la nécessité d’expliciter et de justifier les raisons de<br />
l’existence d’une obligation de non-concurrence, son<br />
caractère essentiel et son intérêt pour la société. Ne<br />
rien préciser expose, en cas de contentieux, aux risques<br />
plus haut évoqués : invalidation de la clause ou encore<br />
exigence d’une contrepartie financière suivant la<br />
qualité de celui qui souscrit à l’engagement.<br />
Résumé des arrêts cités, en page suivante.