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Acte 1 - Le Proscenium

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AVERTISSEMENT<br />

Ce texte a été téléchargé depuis le site<br />

http://www.leproscenium.com<br />

Ce texte est protégé par les droits d’auteur.<br />

En conséquence avant son exploitation vous devez obtenir<br />

l’autorisation de l’auteur soit directement auprès de lui, soit auprès<br />

de l’organisme qui gère ses droits (la SACD par exemple pour la<br />

France).<br />

Pour les textes des auteurs membres de la SACD, la SACD peut<br />

faire interdire la représentation le soir même si l'autorisation de<br />

jouer n'a pas été obtenue par la troupe.<br />

<strong>Le</strong> réseau national des représentants de la SACD (et leurs<br />

homologues à l'étranger) veille au respect des droits des auteurs et<br />

vérifie que les autorisations ont été obtenues, même a posteriori.<br />

Lors de sa représentation la structure de représentation (théâtre,<br />

MJC, festival…) doit s’acquitter des droits d’auteur et la troupe doit<br />

produire le justificatif d’autorisation de jouer. <strong>Le</strong> non respect de ces<br />

règles entraine des sanctions (financières entre autres) pour la<br />

troupe et pour la structure de représentation.<br />

Ceci n’est pas une recommandation, mais une<br />

obligation, y compris pour les troupes amateurs.<br />

Merci de respecter les droits des auteurs afin que les troupes et le<br />

public puissent toujours profiter de nouveaux textes.


CANICULE et FRIC - FRAC<br />

COMEDIE POLICIERE en 5 actes<br />

De Andrée ROBIN -LIGOT<br />

Canicule et Fric-Frac


1 Caractéristiques<br />

Durée approximative: 105 minutes<br />

Distribution :<br />

• NARRATEUR ou NARRATRICE<br />

• Personnage A : AMIRAL - 68 ans, ancien Commandant de la Marine<br />

marchande, veuf, grande gueule<br />

• Personnage B : HERMINE - 74 ans, demoiselle, ancienne mercière, tricote<br />

presque en permanence.<br />

• Personnage C : ERNEST - 70 ans, dit «Titine», célibataire efféminé, mystique<br />

sur les bords.<br />

• Personnage D : SIMONE - 65 ans, veuve, boulimique, très ronde.<br />

• Personnage E : GISELE - 62 ans, célibataire, ancienne contractuelle à la<br />

retraite.<br />

• Personnage F : COCO - 22 ans, employée aux Charmettes.<br />

• Personnage G : PRUNELLE - 62 ans, caustique et hautaine, bien que très<br />

fleur bleue.<br />

• Personnage H : INFIRMIERE ou INFIRMIER, âge indifférent (très revêche)<br />

• Personnage I : ANIMATEUR ou ANIMATRICE, âge indifférent<br />

• NOMBRE DE FIGURANTS désirés pour un petit passage chanté et dansé.<br />

Décor : La salle de repos d'un foyer logement, commune à tous les pensionnaires.<br />

Fauteuils, table basse, rayonnages avec livres, guéridon, etc….<br />

Costumes : Description des costumes si nécessaire<br />

Public: Type de public pouvant assister à une représentation du texte<br />

Synopsis : <strong>Le</strong>s résidents de la maison de retraite LES CHARMETTES sont<br />

confrontés à une énigme policière et à une forte canicule. Il en faudrait davantage<br />

pour leur saper le moral ! Ceux qui ont déjà pu les apprécier dans COQUIN DE<br />

SORT, du même auteur, ne manqueront pas de partager cette nouvelle aventure<br />

avec eux. Pour ceux qui ne les connaissent pas encore, c’est le moment ou jamais<br />

d’entrer dans leur univers burlesque et, comme il n’est pas nécessaire d’avoir donné<br />

« COQUIN DE SORT » pour monter « CANICULE ET FRIC FRAC », personne ne<br />

regrettera de s’être laisser aller à cette folie douce, au contraire !<br />

L’auteur peut être contacté par courriel à l’adresse suivante :<br />

pamela.dooner@laposte.net


ACTE I<br />

Rideau fermé - Fond musical de la noce en sourdine<br />

SCENE 1<br />

Narrateur et les personnages qui défilent sur l’avant -scène, la tête dans un grand<br />

cadre vide, au fur et à mesure que le narrateur les présente.<br />

Narrateur<br />

Chers spectateurs, ce soir, nous vous convions, de nouveau, aux Charmettes. <strong>Le</strong>s<br />

Charmettes, vous vous souvenez ? Mais si, cette maison de retraite dont une dizaine<br />

de résidents ont succombé à l’absorption de chocolats empoisonnés à la digitaline,<br />

qu’une nièce, pressée d’hériter de sa tante, lui adressait chaque mois. Mais si ! Et la<br />

tante, qui ne digérant pas le chocolat, les distribuait généreusement autour d’elle, ça<br />

vous revient ? Pas vraiment ?<br />

Alors feuilletons ensemble l’album photo des survivants, ça vous rafraîchira la<br />

mémoire,<br />

Bon, commençons par celle -ci !<br />

(Hermine défile, le buste encadré et tricotant)<br />

Voici Hermine, dite Mimine Top 50, parce que, dès qu’un mot, dans la conversation,<br />

lui fait penser à un air connu, elle l’entonne automatiquement. C’est à elle que sa<br />

nièce envoyait les fameux chocolats empoisonnés.<br />

Mimine est une grande tricoteuse devant l’Eternel car elle tente d’épuiser, avant que<br />

les mites ne s’y mettent, le stock de laine qui lui est resté sur les bras quand elle a<br />

cessé d’exploiter son commerce de laines et colifichets. Elle tricote beaucoup pour<br />

ses amis et l’air de rien, c’est du travail !<br />

Travail ?<br />

<strong>Le</strong> travail c’est la santé<br />

Rien faire, c’est la conserver<br />

<strong>Le</strong>s prisonniers…<br />

Hermine<br />

(sursautant et chantant)<br />

(Elle disparaît de l’autre coté de la scène.)<br />

Canicule et Fric-Frac 4/82


Et voilà, qu’est ce que je vous disais ?<br />

Narrateur<br />

Ah ! Une autre grande figure des Charmettes, l’Amiral ! Ancien de la marine<br />

marchande, veuf, fort caractère, grande gueule mais cœur d’or, et grand gaillard<br />

toujours vert !<br />

Amiral<br />

Je suis toujours le gaillard d’avant ! Mettez vous bien ça dans la tête moussaillons !<br />

(Exit).<br />

Narrateur<br />

Plein d'humour ! C’est à lui que chacun des pensionnaires des Charmettes doit le<br />

surnom qui lui a été attribué.<br />

Photo suivante, voici Jumbo ! Pardonnez-moi, je devrais dire Simone ! Encore un<br />

coup de l’Amiral. Il l’a surnommée Jumbo, vu son embonpoint mais elle croit que son<br />

surnom est « Beau petit oiseau des îles ». Simone est extrêmement gourmande et<br />

ne saurait résister à l’appel des sucreries. Sans doute compense-t-elle ainsi la perte<br />

de Lulu, son époux tant aimé !<br />

(Pendant sa présentation, elle mange quelque chose qui lui échappe. Elle se penche<br />

malaisément hors du cadre, désespérée de voir ce qu’elle mangeait lui échapper<br />

irrémédiablement, le poussant du pied involontairement, jusqu’à sa sortie de scène.)<br />

A qui le tour maintenant ? Ah ! Ernest ! Ernest Castor, dit Titine !<br />

Titine est un personnage un peu ambigu,<br />

(Mimiques efféminées d’Ernest dans son cadre.)<br />

d’où son surnom. Charmant au demeurant, bien que très souvent en conflit avec<br />

l’Amiral qui se fait un plaisir de l’asticoter. Ernest est un passionné de métaphysique<br />

et de surnaturel. La vie après la vie l’intéresse beaucoup et il tient absolument à ce<br />

que ses amis profitent de ses recherches et études !<br />

Photo suivante : Eh bien, c’est Gisèle ! Gisèle qui avait été introduite aux Charmettes<br />

par le commissaire <strong>Le</strong>pic pour essayer de comprendre pourquoi tant de<br />

pensionnaires passaient de vie à trépas sans prévenir. Et ma foi, grâce à elle,<br />

l’énigme a été résolue et depuis, la maison de retraite a retrouvé sa sérénité.<br />

Gisèle est une ancienne aubergine, une contractuelle chargée de verbaliser les<br />

automobilistes indisciplinés. Aux Charmettes, on l’appelle Marie Pervenche. Elle n’y<br />

réside pas mais y passe très régulièrement revoir les amis qu’elle s’y est fait lors de<br />

son enquête et un peu plus spécialement l’Amiral, à qui elle a fait battre le cœur un<br />

peu plus vite qu’il ne faudrait.<br />

Autre photo : L’animateur (trice) chargé(e) des distractions des pensionnaires, qui a<br />

eu bien du mal à trouver un pôle d’intérêt commun à nos résidents. Ils ont fini par se<br />

décider pour une activité théâtrale !<br />

Et celui (celle) ci, l’infirmier (ère) des Charmettes, bête noire des pensionnaires,<br />

chaleureux (euse) comme un iceberg, aimable comme la porte des Baumettes et<br />

surnommée Docteur Jekyll !<br />

Canicule et Fric-Frac 5/82


(la munir d’une grosse seringue remplie d’eau qu’elle projette sur les spectateurs)<br />

(sur le ton de la confidence)<br />

Certains des pensionnaires se demandent même si la nuit venue, il (elle) ne devient<br />

pas un genre de Mister Hyde !<br />

Dernière photo : Colette ! Coco pour les intimes. Elle travaille au bien être des<br />

résidents.<br />

(Colette est en robe de mariée)<br />

Comme vous pouvez le constater, aujourd’hui est un grand jour pour elle. En effet,<br />

elle se marie avec Charly !<br />

(Charly la rattrape en courant)<br />

Charly ! L’inspecteur de police dont elle a fait la conquête lors de l’enquête dont je<br />

viens de vous parler. Oui, oui, c’est aujourd’hui qu’a lieu la noce ! Aux Charmettes !<br />

Comme ils l’avaient promis. Alors ! Vivent les Mariés ! !<br />

(<strong>Le</strong> rideau s’ouvre, la musique est plus forte. On sent qu’il fait très chaud. Pas de<br />

veste, pas de cravate ou alors dénouée, manches de chemises relevées. Une<br />

farandole traverse la scène (musique et danse au choix, par exemple une ridée pour<br />

la Bretagne) composée d’autant de figurants que l’on voudra, y compris enfants<br />

endimanchés, les acteurs présents dans la scène suivante occupent la queue de la<br />

farandole. Quand tout le monde a traversé la scène, la musique et les chants, rires,<br />

éclats de voix s’estompent. Sur scène une table recouverte d’une nappe sur laquelle<br />

traînent quelques bouteilles, verres, petits gâteaux, quelques sièges.)<br />

Et vivent les mariés !<br />

SCENE 2<br />

Amiral, Simone, Ernest, Hermine<br />

Amiral<br />

(Des coulisses, on reprend « Vivent les mariés !»)<br />

Simone<br />

(s’effondrant sur un siège et s’épongeant avec la nappe de la table)<br />

C’est pas humain d’être obligée de se trémousser comme ça par une chaleur<br />

pareille !<br />

Canicule et Fric-Frac 6/82


Amiral<br />

(à la salle)<br />

Surtout avec un popotin de cette ampleur !<br />

Et après un repas comme celui -là !<br />

Ernest<br />

Simone<br />

(Prenant et avalant un des petits gâteaux sur la table)<br />

Ne m’en parlez pas ! Pan -ta -gru -é -li -que ! Trop ! Beaucoup trop !<br />

Trop ! Vous êtes sûre ?<br />

Oh pardon ! Beaucoup, beaucoup trop !<br />

Hermine<br />

(perfide)<br />

Simone<br />

(rotant)<br />

Ernest<br />

Ça ne vous empêche pas de faire fête à ces mignardises pourtant !<br />

Simone<br />

Ecoutez Ernest ! Vous savez bien que c’est au-dessus de mes forces de les laisser<br />

perdre ! Mais, je maintiens, c’était beaucoup trop !<br />

Amiral<br />

Alors pourquoi diable avoir repris systématiquement de chaque plat ?<br />

Simone<br />

Par pitié pour le pauvre serveur désappointé qui faisait le tour des tables en<br />

repassant ses plats et à qui tout le monde disait : « Non merci ! Non merci ! »<br />

Ernest<br />

(ironique)<br />

Ah ! Je comprends ! En somme, vous vous êtes dévouée pour faire plaisir au<br />

serveur !<br />

Exactement !<br />

Simone<br />

Hermine<br />

Eh bien ! Vous avez réussi ! La mine réjouie qu’il avait dès le second passage des<br />

vols au vent financière !<br />

Il est venu à vous directement.<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 7/82


Et s’en est retourné, avec un sourire fendu jusqu’aux oreilles, vers les cuisines.<br />

Tant mieux !<br />

Simone<br />

(ravie)<br />

Hermine<br />

Où les autres serveurs, massés derrière la porte, l’attendaient hilares ! Je les ai vus.<br />

Hilares ?<br />

Hilares !<br />

Simone<br />

(étonnée)<br />

Amiral, Ernest, Hermine<br />

Amiral<br />

Comme quoi, vous avez contribué au réjouissement collectif d’une brigade entière en<br />

bâfrant comme ce n’est pas permis.<br />

Vous croyez ?<br />

Simone<br />

Hermine<br />

C’est certain ! <strong>Le</strong> petit jeu s’est reproduit lors du second passage des filets de sole<br />

Nantua et du gigot flageolets.<br />

Ah ! Je n’ai pas repris de flageolets !<br />

Heureusement pour nous !<br />

Simone<br />

Ernest<br />

(Il se pince le nez.)<br />

Amiral<br />

Puis lors du second passage de la ronde des fromages.<br />

Hermine<br />

Alors que, notez le bien, on ne repasse jamais le fromage deux fois. Dans aucun<br />

restaurant !<br />

La preuve que si !<br />

Simone<br />

Ernest<br />

J’ai bien observé à ce moment là. Derrière la porte, c’était du délire quand le serveur<br />

a regagné la cuisine !<br />

A ce point ! Eh bien dites donc !<br />

Simone<br />

Canicule et Fric-Frac 8/82


Amiral<br />

Quand il est revenu, rien que pour vous, avec une seconde part de gâteau, assez<br />

énorme, je l’ai senti inquiet. Alliez vous la refuser ?<br />

Bien sûr que non ! Ça ne se refuse pas !<br />

Simone<br />

Ernest<br />

Quand vous l’avez acceptée, son visage s’est détendu. Il était aux anges !<br />

Amiral<br />

Et pour cause ! Il venait de gagner cent euros qu’il avait pariés avec les cuisiniers et<br />

les serveurs. Je le sais de source sûre, je lui ai tiré les vers du nez à la fin du repas.<br />

Simone<br />

(étonnée)<br />

Cent Euros ! Vous m’en direz tant ! Je sens que ces euros là vont davantage me<br />

rester sur l’estomac que mon repas. Je vais aller prendre un oxyboldine pour les<br />

digérer. Faites plaisir tiens, faites plaisir !<br />

(Elle sort en s’épongeant.)<br />

SCENE 3<br />

Amiral, Ernest, Hermine<br />

Amiral<br />

Pauvre Jumbo ! Elle me fait penser à un boa constrictor qui vient de s'enfiler une<br />

proie trois fois plus grosse que lui.<br />

Ernest<br />

A la différence près que le boa, après çà, il jeûne des semaines. Mais Simone, elle,<br />

dès demain matin, elle attaquera les tartines de beurre et confitures !<br />

La confiture, ça dégouline<br />

Ça coule, coule sur les mains,..<br />

Ça passe par les trous d' la tartine,<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Ernest<br />

(chantant)<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 9/82


Pourquoi y a -t -il des trous dans l'pain ?<br />

(chantant)<br />

Ma foi ! Hermine, vous finirez par nous convertir à ces petits airs que vous inspirent<br />

nos conversations. On y prend goût finalement.<br />

Oui, on y prend goût.<br />

Ernest<br />

(s'épongeant)<br />

(Baîllant.)<br />

Mes amis, je crois que cette chaleur devient insupportable.<br />

Hermine<br />

Il va pourtant bien falloir s'en accommoder La météo prévoit encore plus chaud pour<br />

demain.<br />

Amiral<br />

(s'épongeant)<br />

Eh bien, ça promet ! Je me liquéfie déjà, alors demain...<br />

Ernest<br />

Vous vous réveillerez peut être demain matin à l'état de flaque.<br />

Hermine<br />

(riant)<br />

Et en faisant votre chambre, Coco pensera que vous avez fait pipi au lit !<br />

Amiral<br />

Très drôle vraiment ! Au lieu de dire de pareilles âneries, vous feriez mieux d'aller<br />

vous coucher, comme j'y vais moi -même de ce pas. La journée a été fatigante !<br />

Ernest<br />

Déjà ! Même pas une dernière petite danse Amiral ?<br />

(On entend la musique en sourdine d'un tango, tendant les bras vers l'Amiral)<br />

Allez ! Un petit tango ! Joue contre joue !<br />

Dansons, joue contre joue...<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Ernest<br />

(chantant et dansant, tout en se rapprochant de l'Amiral en lui tendant les bras)<br />

Dansons, joue contre joue…<br />

(L’amiral se défile et c’est Hermine qui prend place dans les bras d’Ernest.)<br />

Hermine<br />

(continuant de chanter en dansant)<br />

Canicule et Fric-Frac 10/82


Dansons, joue contre joue …<br />

(Ernest, tout en dansant se contorsionne pour continuer à voir l’Amiral.)<br />

Amiral<br />

La journée ayant été plus arrosée que de raison, je veux bien considérer cette<br />

scabreuse proposition comme l'émanation des vapeurs de l'alcool que vous avez<br />

ingurgité sans modération aucune. Joue contre joue ! Non mais !<br />

(Chuchote.)<br />

Je n'suis pas celle que vous croyez, Monsieur Castor ! Et je me répète, vous devriez,<br />

comme moi, aller vous coucher !<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Couchés dans le foin avec le soleil pour témoin<br />

Un petit oiseau...<br />

Ernest<br />

(chantant et dansant)<br />

Qui chante au loin (Jean Nohain et Mireille)<br />

(Ils sortent tous.)<br />

RIDEAU<br />

Canicule et Fric-Frac 11/82


ACTE II<br />

<strong>Le</strong> lendemain<br />

SCENE 1<br />

Ernest, Amiral, Hermine, Simone<br />

(Tous les quatre sont assis en rang d'oignons, les pieds nus dans chacun sa bassine<br />

d'eau.<br />

Un petit canard en plastique flotte dans celle de Simone. Ernest a gardé ses<br />

chaussettes. Tenues vestimentaires les plus légères possibles : petits chemisiers<br />

dont les premiers boutons sont déboutonnés et amples jupes de cotonnade plus ou<br />

moins arrangées en barboteuses pour les femmes; marcels pour les hommes. Ou, si<br />

la troupe a monté « Coquin de sort » auparavant et est toujours en possession du<br />

maillot de bain rayé de l'amiral, le ressortir pour l'occasion. Un short en tricot noir à<br />

pois rouges serait le bienvenu pour Ernest.<br />

Durant la scène, chacun cherche à se rafraîchir qui, avec un éventail, qui, avec une<br />

éponge qu'il s'étreint sur les bras, les jambes ou sur ceux de son voisin pour lui<br />

rendre service.)<br />

Amiral<br />

(sarcastique)<br />

Alors Jumb... Beau petit oiseau des îles, on a bien dormi ? Pas de problème de<br />

digestion ?<br />

Simone<br />

Pour être tout à fait franche, je me sens quand même un peu barbouillée ce matin.<br />

Hermine<br />

(perfide)<br />

Ça, par exemple ! On se demande bien pourquoi ! Ce doit être la chaleur !<br />

Amiral<br />

(trempant un mouchoir qu'il avait sur la tête dans sa bassine et se rafraîchissant<br />

avec le visage et la nuque)<br />

Ah ! Matelots, voilà qui fait du bien ! Ah ! Que c'est bon !<br />

Ben dites donc ! C'est hygiénique !<br />

(Soupir de satisfaction)<br />

Ernest<br />

(grimaçant de dégoût)<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 12/82


Sachez, Mônsieur, que j'ai pris une douche froide d'un quart d'heure ce matin. Je<br />

suis propre comme un sou neuf. Et comme je n'en profite pas pour faire la lessive de<br />

mes chaussettes, moi, oui Mônsieur, c'est assez hygiénique !<br />

Simone<br />

Ça ne vaut quand même pas un bon bain froid !<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Ah ! C'qu'on s'rait bien, si on prenait un bain<br />

On f'rait des grosses bulles, jouerait au sous marin<br />

Ernest<br />

(poursuivant en chantant)<br />

On chant'rait sous la mousse pour les voisins (Henri Salvador)<br />

Amiral<br />

Ne vous donnez surtout pas la peine de chanter pour moi, vous avez une voix de<br />

fausset plutôt désagréable.<br />

Oh ! Vous,<br />

ça va comme ça !<br />

Ernest<br />

(Vexé)<br />

(La guêpe)<br />

(Si l'amiral porte son costume jaune et marron)<br />

Vous savez ce qu'elle vous dit la voix de fausset ?<br />

Amiral<br />

(si Ernest porte un short noir à pois rouges)<br />

Et tu sais ce qu'elle te dit la guêpe, espèce de coccinelle ?<br />

Simone<br />

Et voilà, c'est reparti ! Vous savez que vous êtes fatigants tous les deux !<br />

Hermine<br />

C'est vrai, ça ! Toujours en train de vous asticoter !<br />

C'est sa faute ! Il fait rien qu'à m'embêter !<br />

Ernest<br />

(petit garçon)<br />

Amiral<br />

(se moquant)<br />

Je fais rien qu'à l'embêter ! Voyez vous ça ? Vous allez voir qu'il va se plaindre à la<br />

direction<br />

Canicule et Fric-Frac 13/82


(<strong>Le</strong>vant le doigt comme en classe)<br />

Madame, madame, y'a l'amiral qui fait rien qu'à m'embêter !<br />

Deux mômes de niveau maternel !<br />

Pas vrai coin-coin ?<br />

Et petite section par dessus le marché !<br />

Simone<br />

(S'adressant à son canard dans la bassine.)<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

(désignant Simone)<br />

Et c'est elle, qui discute avec un canard en plastique, qui vient nous parler de<br />

maternelle ! C'est quand même un peu fort !<br />

Ah ! Vous êtes là vous quatre !<br />

SCENE 2<br />

<strong>Le</strong>s mêmes, Infirmière<br />

Infirmièr (e)<br />

(ton rogue)<br />

Amiral<br />

(ironique)<br />

Comme vous voyez, ma douceur ! (mon roudoudou !)<br />

Infirmière<br />

Je vous cherche depuis un quart d'heure ! Vous ne pouvez pas rester dans la salle<br />

climatisée comme tout le monde ? Non ?<br />

Ernest<br />

Elle est mal réglée votre clim ! La moitié des Charmettes est au lit avec une angine,<br />

grâce à elle !<br />

Simone<br />

C'est vrai çà ! Il doit faire plus chaud dans un igloo que dans votre salle soit disant<br />

climatisée.<br />

Hermine<br />

Même en manteau d'hiver, on y claque des appareils dentaires !<br />

Canicule et Fric-Frac 14/82


Infirmière<br />

Nous avons quelques problèmes de réglages, je vous l'accorde ; mais ça vaut mieux<br />

que de risquer de mourir de déshydratation ici.<br />

Permettez ! Je suis très frileuse moi !<br />

Simone<br />

Ernest<br />

Vous ne devriez pourtant pas l'être ! L'épaisseur de votre couche adipeuse devrait<br />

vous assurer une bonne isolation.<br />

Comme la laine de verre ?<br />

Hermine<br />

(interrogative)<br />

Simone<br />

(haussant les épaules)<br />

Très drôle ! En tous cas, s'il faut mourir, je préfère que ce soit déshydratée plutôt que<br />

congelée !<br />

Amiral<br />

(à l'infirmière)<br />

Si, tout au moins, vous n'y voyez pas d'inconvénient.<br />

Ernest<br />

C'est quand même de notre propre peau qu'il s'agit après tout et...<br />

Infirmière<br />

(pincée)<br />

En effet, rien ne vous oblige à profiter de la climatisation qui a coûté la peau des<br />

fesses pour être installée, pour votre confort, selon les nouvelles lois en vigueur.<br />

Hermine<br />

Ouais ! Ça valait bien la peine de sucrer leur lundi de Pentecôte férié à bon nombre<br />

de pauvres salariés pour en arriver à un résultat pareil !<br />

Simone<br />

(imitant Arlette Laguillers et levant mollement le poing)<br />

Travailleuses ! Travailleurs ! Restez chez vous le lundi de Pentecôte ! Pour nous<br />

empêcher d'avoir trop chaud, ils vont réussir à nous faire crever de froid !<br />

Infirmière<br />

(rude)<br />

Ça suffit Madame Simone ! Je suis pour ma part, obligée de veiller sur votre santé,<br />

que vous le vouliez ou non. Et pour ce faire, je vais vous demander quelques<br />

minutes de votre précieux temps pour une petite séance de relaxation !<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 15/82


Ah oui ! C'est chouette, ça ! Relaxez nous !<br />

Infirmière<br />

Très bien ! On se laisse aller contre son dossier …<br />

Reelax<br />

Amiral<br />

Infirmière<br />

On détend bien bras et jambes... mou, tout mou …<br />

Relax, Relax !<br />

On ferme les yeux !<br />

Reeelakche !<br />

Hermine<br />

Infirmière<br />

Simone<br />

(mâchonnant un bonbon)<br />

Infirmière<br />

On ouvre la bouche, mâchoires inférieures bien tombantes... Et voilà !<br />

(Elle leur asperge la figure avec une eau minérale en bombe)<br />

Et voilà ! Mission accomplie ! <strong>Le</strong>s voilà hydratés !<br />

(Elle sort)<br />

SCENE 3<br />

Hermine, Ernest, Simone<br />

Chacun réagit à sa manière, Simone en crache son bonbon, sursaut des uns et des<br />

autres<br />

Ça va pas, non !<br />

Hermine<br />

Ernest Tarée ! Elle (il) est tarée cette toupie ! (ce malade !)<br />

Amiral<br />

Me faire boire de l'eau ! Sans mon autorisation ! De l'eau douce, à moi, ancien<br />

capitaine au long cours !<br />

Simone<br />

Canicule et Fric-Frac 16/82


(récupérant son bonbon et le rinçant dans sa bassine avant de le remettre dans sa<br />

bouche)<br />

Vous l'auriez préférée salée ?<br />

Amiral<br />

Salée ? La chaleur vous égare Jumb... beau petit oiseau des îles !<br />

Simone<br />

(se mouillant le front)<br />

C'est pourtant vrai que ça chauffe là - dedans ! Et puis c'est plutôt l'heure d'un thé,<br />

avec des petits gâteaux.<br />

Hermine<br />

Du thé ? Par cette chaleur ! Vous n'y pensez pas ! Moi, je rêve d'une limonade bien<br />

fraîche !<br />

Avec deux ou trois icebergs dedans !<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Sachez, pourtant, qu'une boisson chaude désaltère bien mieux...<br />

Amiral<br />

(lui coupant la parole)<br />

On s'en fiche, nous on préfère n'importe quoi de froid « on the rocks » de préférence,<br />

et on laisse la cup of tea aux angliches !<br />

Tea for two and two for tea<br />

Me for you and you for me<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Simone<br />

(épuisée)<br />

Mais ou trouvez vous encore la force de chanter Mimine ? Pour moi, c'est au-dessus<br />

de mes forces !<br />

Ernest<br />

Tant mieux pour vous ma chère, car sans vous froisser, si vous avez le nom d'un<br />

petit oiseau des îles, vous n'en avez guère le ramage !<br />

Amiral<br />

Et c'est la voix de fausset qui se permet de critiquer celle de Simone ! Mieux vaut<br />

entendre ça que d'être sourd ! Bon sang, c'qu'il peut faire chaud !<br />

Cho-Cacao<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Canicule et Fric-Frac 17/82


Cho - cho - chocolat !<br />

Ernest<br />

C'est peut être vrai finalement que le climat déraille de plus en plus.<br />

Simone<br />

La faute aux gaz à effet de serre, d'après les climatologues !<br />

Amiral<br />

On se demande bien qui croire dans tout ça. Car enfin depuis que le monde est<br />

monde, notre bonne vieille planète a déjà subi plusieurs périodes de glaciations et de<br />

réchauffements sans que l'on en puisse rendre responsables l'activité humaine, très<br />

limitée alors ou les rejets industriels encore inexistants.<br />

Ernest<br />

C'est pourtant vrai ça ! Ah ! Ce climat ! Vous voulez que je vous dise ? Moi, ça me<br />

donne mal au ventre !<br />

Hermine<br />

Vous faites peut être de l'aérophagie Ernest, mais ça ne peut pas être le climat.<br />

Ernest<br />

Si, si c'est le climat ! Parce qu'en bon écologiste que je suis, je n'ose même plus<br />

péter de peur d'aggraver la situation.<br />

Simone<br />

(les bras au ciel)<br />

Ah Bah ! Forcément si on ne pète plus, ça ballonne !<br />

Amiral<br />

Sincèrement Titine, tu penses vraiment que les émanations de ton pétard peuvent<br />

avoir une telle influence sur le trou d’ozone ?<br />

Ernest<br />

Dans le doute, je m'abstiens ! Je serre mes p’tites mimiches !<br />

Hermine<br />

Ne vous rendez quand même pas malade Ernest ! La canicule suffit !<br />

Simone<br />

Si ça continue, il risque encore d'y avoir pas mal de décès chez les personnes très<br />

âgées.<br />

Ernest<br />

On va encore voir les urgentistes débordés et les politiques nous faire le coup des<br />

petits pères du peuple désolés de voir, tant de leurs chers vieux concitoyens,<br />

emportés par la vague de chaleur.<br />

Désolés ! Tu parles !<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 18/82


Hermine<br />

Oh ! Mais si, quand même ! Je me souviens lors de la première canicule, les<br />

allocutions des politiques à la télévision. Ils avaient l'air très affectés.<br />

Oh, oui alors ! Très affectés !<br />

Simone<br />

Amiral<br />

Ça oui, ils affectaient d'être affectés ! Ils faisaient semblants d'être désolés !<br />

Oh ! Vous croyez vraiment ?<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

J'en suis certain ! Voici, à peu de choses près, ce que nous avons alors entendu de<br />

la bouche de nos dirigeants :<br />

(Si l'acteur en est capable, il peut imiter un politique connu du moment.)<br />

« Chers concitoyens, c'est avec une grande émotion que nous déplorons la perte<br />

d'environ une quinzaine de mille de nos anciens, que la canicule a ravis à notre<br />

affection. Bla... Bla... bla... Nous n'étions pas préparés à faire face à une chaleur de<br />

cette ampleur mais cette leçon, croyez le bien, nous sera profitable et nous nous<br />

engageons à prendre les mesures qui s'imposent pour que nous ne revivions plus<br />

jamais ça ! Bla...bla...bla...»<br />

Hermine<br />

Vous voyez bien, ils étaient désolés ! C'est ce que je disais !<br />

Amiral<br />

C'est ce qu'ils ont dit ! Et c'est ce que vous avez entendu, parce que vous êtes<br />

quelqu'un de droit et sans malice. Mais en réalité, si je traduis leurs pensées en clair,<br />

voici ce que vous auriez dû entendre :<br />

« Chers concitoyens, Bonne nouvelle ! Quinze mille anciens, qui en dépit de leur âge<br />

et de leurs maladies, s'accrochaient encore à la vie, viennent de nous quitter avec la<br />

canicule. <strong>Le</strong>s caisses de retraite vont donc faire l'économie de millions d'€uros; le<br />

trou de la Sécurité Sociale devrait s'amenuiser d'autant, nombre de logements qui<br />

n'abritaient plus qu'un seul habitant vont se libérer.<br />

Vive la canicule ! Pourvu qu'il y en ait une tous les ans ! »<br />

Simone<br />

Oh ! Comment pouvez vous dire ça, Amiral ?<br />

Amiral<br />

Mais malheureusement ma pauvre Simone, parce que c'est vrai !<br />

Vous y allez tout de même un peu fort !<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Canicule et Fric-Frac 19/82


Mais en y réfléchissant bien, vous avez sûrement raison ! Ça m'en fait froid dans le<br />

dos !<br />

Simone<br />

Vous avez bien de la chance, moi, j'ai toujours aussi chaud !<br />

SCENE 4<br />

<strong>Le</strong>s mêmes, Animateur (trice)<br />

Animateur<br />

Ah ! Voilà mes acteurs ! Dites donc, on se croit aux bains de mer, ou quoi ?<br />

Hermine<br />

Chèr (e) animateur (trice), ne pensez pas un seul instant pouvoir nous animer de<br />

quelque façon que ce soit par une chaleur pareille !<br />

Simone<br />

(Développant un bonbon)<br />

J'attrape une suée, rien qu'en développant un bonbon ! C'est vous dire !<br />

Amiral<br />

Pas le moindre souffle d'air c'est le pot au noir ! Faut amener les voiles ! Rien d'autre<br />

à faire que trempette dans la bassine ! Et encore ! En gardant les orteils immobiles le<br />

possible !<br />

Animateur<br />

Moi qui avais l'intention de vous faire travailler un peu !<br />

Hermine<br />

(Chantant)<br />

Travailler, c'est trop dur, et voler, c'est pas beau<br />

D'mander la charité...<br />

Animateur<br />

(Riant)<br />

Incorrigible Hermine ! Rien de pénible, rassurez vous ! Juste apprendre un peu vos<br />

rôles.<br />

Simone<br />

Canicule et Fric-Frac 20/82


(Ronchon)<br />

On a vraiment eu l'idée du siècle en acceptant cette idée de faire du théâtre !<br />

Animateur<br />

Je ne vous ai pourtant pas forcé la main ! Vous avez tous accepté avec<br />

enthousiasme, si je me souviens bien !<br />

Amiral<br />

Peut être ! Il n'empêche qu'on aurait mieux fait de refuser le théâtre comme on avait<br />

refusé la vannerie.<br />

Ernest<br />

L'origami, pour faire les cocottes en papier.<br />

La plongée sous marine.<br />

(Prononcer en se bridant les yeux avec les doigts.)<br />

Hermine<br />

Simone<br />

Moi, ce sont les cours de cuisine qui m'auraient bien plus intéressée.<br />

Animateur<br />

Oui, je sais, mais les autres n'ont pas suivi.<br />

Amiral<br />

(à Simone)<br />

Pour votre bien Jumb....beau petit oiseau des îles, pour votre bien !<br />

Ernest<br />

Tout à fait ! Vous n'avez déjà que trop tendance à vous remplir le jabot au -delà du<br />

raisonnable à chaque repas...<br />

Hermine<br />

Vous donner l'occasion d'en faire autant en dehors, pendant des cours de cuisine,<br />

aurait été de la non assistance à personne en danger !<br />

Animateur<br />

C'est assez vrai, Simone ! Vous pouvez dire que vous avez des amis qui prennent<br />

soin de vous.<br />

Simone<br />

(agacée)<br />

Mais zut à la fin ! Je suis assez grande pour m'occuper de ma santé toute seule !<br />

(Elle avale un autre bonbon.)<br />

Et j'aurais bien préféré fabriquer des tartes plutôt que d'en prendre plein la figure<br />

dans le rôle qui m'a été attribué dans votre fameuse pièce !<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 21/82


Vous n'aimez pas les recevoir, et moi, je n'aime pas les donner, soyez en sûre ! Ah !<br />

S'il s'agissait de talocher Titine, je crois que je n'aurais aucun mal à habiter le rôle !<br />

Titine<br />

Ça, je le crois sans peine, mon salaud, mais malheureusement pour toi, le<br />

personnage qui reçoit les gifles, c'est une femme !<br />

Amiral<br />

Justement ! Tu n'aurais pas eu à te forcer pour la jouer !<br />

Titine<br />

Comme tu n'as pas à te forcer pour jouer les goujats !<br />

On se calme, on se calme !<br />

Hermine<br />

Animateur<br />

Bien, bien, je préfère ne pas m'immiscer dans vos discussions !<br />

C'est ça ! Ne vous mimmiscez pas !<br />

Simone<br />

Animateur<br />

Je vous remets vos livrets en espérant que lors de la prochaine répétition, les scènes<br />

un, deux et trois de l'<strong>Acte</strong> I seront sues.<br />

Simone<br />

Si je sais mon rôle, j'aurais droit à une petite récompense ?<br />

Quel genre de récompense, Simone ?<br />

Une tarte !<br />

Animateur<br />

Simone<br />

Ernest<br />

(surpris)<br />

Comment ? Vous voulez que l'Amiral vous en file une de plus ?<br />

Simone<br />

Mais non, bien sûr ! J'en veux une vraie avec de la crème !<br />

On verra ! On verra !<br />

(Elle se lèche les lèvres.)<br />

Animateur<br />

(riant et en sortant)<br />

Canicule et Fric-Frac 22/82


RIDEAU<br />

Canicule et Fric-Frac 23/82


ACTE III<br />

Quelques semaines plus tard.<br />

SCENE 1<br />

Coco, Amiral, Hermine, Simone, Ernest<br />

Coco passe la serpillière en chantonnant.<br />

Coco<br />

(chantant)<br />

Vous avez dû en faire de beaux voyages de noces en montagne,<br />

Vous avez dû en faire des châteaux comme les gosses, en Espagne !<br />

Amiral<br />

(survenant, un journal à la main)<br />

Alors ma toute belle, on est bien gaie ce matin ! Vous nous avez manqué pendant<br />

votre voyage de noces. On se languissait savez vous.<br />

Hermine<br />

(entrant avec l'Amiral, son tricot rouge et noir avec elle)<br />

Ah ! Coco, Bonjour ! Alors ? Cette lune de miel, c'était comment ?<br />

Simone<br />

(arrivant sur le mot miel)<br />

Du miel ? Où ça ? Je n'en ai pas eu, moi ! J'en veux bien moi !<br />

Hermine<br />

Non Simone ! Il n'y a rien à picorer pour le moment, nous parlons seulement de la<br />

lune de miel de Coco et Charly.<br />

Ah ! Dommage !<br />

Simone<br />

(désappointée)<br />

Amiral<br />

(à la salle)<br />

Ce n'est plus une femme, c'est un garde manger ! (A Coco.) Alors, ce voyage de<br />

noces ?<br />

Coco<br />

Canicule et Fric-Frac 24/82


Un rêve Amiral ! Ah ! Venise, les gondoles !<br />

Laisse les gondoles à Venise<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

<strong>Le</strong> printemps sur la Tamise, on n’ouvre pas les valises, est si bien !<br />

Ernest<br />

(entrant à ce moment, prend la main d’Hermine et reprend avec elle)<br />

Laisse les gondoles à Venise…etc…...<br />

Amiral<br />

(à Coco)<br />

Et votre petit mari, a-t-il été à la hauteur ? L'inspecteur Couturier, puisque c'est son<br />

nom, s'est-il révélé en amour créateur de haute couture ou fabriquant de prêt-àporter<br />

?<br />

Vous êtes bien curieux !<br />

Ça !<br />

C'est son côté libidineux qui ressort !<br />

Coco<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

Coco<br />

Pour répondre à votre question Amiral, sachez que mon Couturier s'est défendu<br />

comme un Dior ! Et je peux même vous confier qu'il est particulièrement doué pour<br />

les finitions. Ça ! C'est un adepte du travail perlé ! Nul endroit où la petite main ne<br />

passe et repasse !<br />

Amiral<br />

Eh bien tant mieux ma belle ! Tant mieux pour vous et tant mieux pour nous qui<br />

bénéficierons de votre bonne humeur tant que votre Couturier vous fera du sur<br />

mesures !<br />

Simone<br />

(quittant la scène)<br />

Bon, les travaux d'aiguille de Monsieur Charly m'étant indifférents, je vais voir aux<br />

cuisines si je peux trouver un peu de miel. Vous m'avez mis l'eau à la bouche tout à<br />

l'heure !<br />

SCENE 2<br />

Canicule et Fric-Frac 25/82


Hermine, Coco, Ernest, Amiral<br />

Amiral<br />

Et allez donc, pas de répit dans la prise des calories !<br />

Charly a repris le travail, lui aussi ?<br />

Hermine<br />

(à Coco)<br />

Coco<br />

Et comment ! C’est que la police est sur les dents avec ce hold-up à la Poste !<br />

Y’a de quoi ! Un million d'euros !<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Ma foi, je n'aurais jamais pensé qu'il pouvait y avoir tant d'argent liquide dans un si<br />

petit bureau de poste !<br />

Amiral<br />

(dépliant son journal)<br />

Ah ça, c'était très exceptionnel ! Mais ça s'explique très bien ! Vous allez<br />

comprendre. Attendez ! Ah ! Voilà ! (Il cherche la page, puis lisant.)<br />

« Un Hold-up d'un million d'euros à Charmançon les Bruyères. »<br />

Un million d'euros !<br />

C'est ce qui est écrit là !<br />

Hermine, Ernest, Coco<br />

(pensifs)<br />

Amiral<br />

(Lisant.)<br />

« Dans l'après midi du (date à choisir) dernier, à 16h50, à 10 minutes de l'heure de<br />

fermeture, un homme corpulent, portant barbe et moustache, bien vêtu, est entré<br />

dans l'agence postale de Charmançon les Bruyères et s'est dirigé vers la<br />

photocopieuse où il s'est occupé à tirer des photocopies. »<br />

Hermin<br />

S'est dirigé vers la photocopieuse où il s'est occupé à tirer des photocopies ! Tu<br />

parles d'un style ! Il ne se triture pas beaucoup les méninges ce journaliste !<br />

Ernest<br />

D'autre part, que vouliez vous qu'il fit d'autre à la photocopieuse que des<br />

photocopies ?<br />

Amiral<br />

(impatient)<br />

Canicule et Fric-Frac 26/82


Bon ! on ne va peut être pas y passer la prochaine marée non plus sur ces<br />

photocopies, hein ? Je reprends :<br />

(Lisant.)<br />

A 16h50, à 10 mn de la fermeture mm...mmmm.....mmm ...où il s'est occupé à tirer<br />

des photocopies. ..<br />

(Appuyer sur photocopies et attendre une réaction des autres qui ne vient pas.)<br />

Il était 16h55 lorsque la préposée est allée fermer la porte d'entrée de l'agence pour<br />

éviter les clients de dernière minute.<br />

Coco<br />

Ça ne m'étonne pas d'elle. Elle a toujours peur de faire 5 mn de trop et c'est souvent<br />

qu'elle enferme le dernier client pour que personne d'autre ne puisse entrer juste<br />

avant l'heure de fermeture.<br />

Hermine<br />

Comment ça ? Elle enferme le dernier client ?<br />

Coco<br />

Elle l'enferme ! Façon de parler. Elle lui rouvre la porte quand elle a fini de le servir<br />

bien sûr ! Mais pendant ce temps là, personne ne risque d'entrer pour lui faire faire<br />

du rab !<br />

Ernest<br />

Ah ! Bon, vous me rassurez, j'avais cru comprendre qu'elle...<br />

Amiral<br />

(le coupant, énervé)<br />

Bon, ça suffit les commentaires maintenant ! Je poursuis.<br />

(Lisant.)<br />

« Une fois la porte close, la préposée est repassée devant la photocopieuse pour<br />

regagner son guichet. C'est là qu'elle a été retrouvée le lendemain matin, ligotée et<br />

bâillonnée. »<br />

<strong>Le</strong> lendemain matin ?<br />

Hermine<br />

Coco<br />

(riant)<br />

Eh bien ! Pour quelqu'un qui ne voulait pas faire cinq minutes de rab ! C'est réussi !<br />

Bien fait ! Ça lui apprendra à tirer au flan !<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

(exaspéré, refilant brutalement le journal à Ernest)<br />

Tiens la pipelette, prends la relève, moi, j'abandonne !<br />

Canicule et Fric-Frac 27/82


Ernest<br />

(lisant)<br />

« C'est là qu'elle a été retrouvée le lendemain,<br />

(Riant.)<br />

le lendemain matin, ligotée et bâillonnée ! »<br />

(Riant.)<br />

Elle est bien capable de demander que cette nuit de repos forcé lui soit payée en<br />

heures sup ; et au tarif de nuit, par dessus le marché !<br />

S'il vous plaît Ernest, venez en au fait !<br />

Oui ! Allez ! Allez !<br />

Hermine<br />

(impatiente)<br />

Coco<br />

Amiral<br />

(trépignant)<br />

Il m'énerve ! Il m'énerve ! Titine, si tu continues, je sens que je vais rompre mes<br />

amarres !<br />

Ernest<br />

(reprenant sa lecture, calmement)<br />

Voilà ! Voilà ! « En cette période du passage du franc à l'€uro, l'agence postale,<br />

contrairement à l'habitude, croulait sous les espèces. Ce qui fait penser aux<br />

enquêteurs que le ou les malfaiteurs devaient être particulièrement bien informés<br />

pour avoir choisi ce moment pour opérer. <strong>Le</strong> commissaire <strong>Le</strong>pic et son adjoint,<br />

l'inspecteur Couturier, sont en charge de l'enquête pour retrouver le butin et les<br />

auteurs du vol. »<br />

Coco<br />

Eh bien ! Je ne voudrais pas être à la place de la préposée ! On va la soupçonner.<br />

C'est sûr, elle va passer se sales quart d’heure la grande Fernande !<br />

Quand je pense à Fernande, je ban…..<br />

Ben non, bien sûr, pas moi !<br />

Ni vous non plus Titine, hein ? Non plus !<br />

Quand je pense à Fernande…<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

(Se ravisant.)<br />

(A Ernest.)<br />

(Reprenant en chantant.)<br />

Canicule et Fric-Frac 28/82


Je ban…...<br />

Amiral<br />

(chantant)<br />

Coco<br />

(riant)<br />

Vous ne changerez jamais Hermine ! Bien ! Je ne m'ennuie pas avec vous mais nous<br />

avons une nouvelle pensionnaire qui arrive et j'ai encore sa chambre à briquer.<br />

(Elle sort et croise Gisèle qui entre.)<br />

Tiens, bonjour Marie Pervenche ! Belle journée, n'est ce pas ?<br />

Bonjour Coco ! Superbe en effet !<br />

SCENE 3<br />

Gisèle, Amiral, Ernest, Hermine<br />

Gisèle<br />

(à Coco)<br />

(Aux autres.)<br />

Bonjour les amis ! Ah ! <strong>Le</strong> journal ! Je parie que l'on discute du fameux hold -up !<br />

Amiral<br />

(empressé)<br />

Chère Gisèle, comme c'est gentil de nous rendre visite.<br />

Vous nous manquiez !<br />

(Il lui baise la main.)<br />

Gisèle<br />

Merci Amiral ! Vous savez bien que c'est toujours un grand plaisir pour moi de me<br />

joindre à vous.<br />

Ernest<br />

Alors Marie Pervenche, en voilà une belle énigme à résoudre !<br />

Hermine<br />

Je pense, pour ma part, que la préposée saucissonnée n'est sûrement pas blanche<br />

comme neige dans cette histoire ! Qu'en pensez vous ?<br />

Gisèle<br />

Canicule et Fric-Frac 29/82


C'est ma foi bien possible. Comme il se peut aussi qu'elle n'y soit pour rien !<br />

Amiral<br />

Ah ! Je vois que vous y avez déjà réfléchi ! Alors ? Ce voleur ! D'après vous, il a<br />

employé quelle tactique ?<br />

La tac a tac tactique du gendarme<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

C'est de bien observer, sans se faire remarquer<br />

La tac a tac tactique du gendarme<br />

Ernest<br />

(poursuivant avec elle)<br />

C'est d'avoir avant tout, les yeux en face des trous (Bourvil)<br />

Gisèle<br />

(riant)<br />

En l'occurrence, il s'agit plutôt de la tactique du voleur et je dois vous avouer,<br />

humblement, mes amis, que pour le moment, je patauge lamentablement.<br />

Amiral<br />

Ce qui ne saurait durer bien longtemps ; et je suis bien certain que vous n'allez pas<br />

avoir besoin de beaucoup de temps pour nous échafauder une belle théorie qui...<br />

Gisèle<br />

Vous me prêtez plus de facultés de déduction que je n'en possède réellement,<br />

Amiral. Je ne suis pas Hercule Poirot ! Et j'ai beau mettre mes petites cellules grises<br />

à contribution, je n'en sais pas plus que ce journal pour le moment.<br />

SCENE 4<br />

Gisèle, Amiral, Ernest, Hermine, Simone<br />

Simone<br />

(entre en se léchant les doigts)<br />

Ah ! Bonjour Gisèle ! C'est gentil de vous joindre à nous.<br />

(Elle lui serre la main. Gisèle se retrouve avec les doigts tout collants et se débrouille<br />

comme elle peut pour les essuyer. Pourquoi pas subrepticement à la jupe de<br />

Simone.)<br />

Gisèle<br />

Canicule et Fric-Frac 30/82


Bonjour Simone ! Bonjour ! Chaud, chaud quand même, hein !<br />

J'irais même jusqu'à dire poisseux, non ?<br />

(Secouant sa main.)<br />

Hermine<br />

Revenons en au Hold-up, Gisèle. Vous n'avez vraiment aucune idée de ce qui s'est<br />

passé ?<br />

Gisèle<br />

De ce qui s'est passé, tout le monde en a une idée. Il suffit de lire le journal, tout y<br />

est ou presque ; mais de celui qui a fait le coup, c'est une autre paire de manches !<br />

Ernest<br />

(excité)<br />

Et si nous interrogions les Esprits ? Avec ce guéridon par exemple ! Qu'est ce que<br />

vous en dites ? On aura peut - être une réponse.<br />

Amiral<br />

Ah ! Ça faisait longtemps que l'esprit dérangé n'avait pas dérangé les Esprits !<br />

Hermine<br />

Voyons Amiral ! Un peu de courtoisie que diable !<br />

Simone<br />

(enthousiaste)<br />

Oh oui ! Oh oui , le guéridon ! Et cette fois - ci, Ernest, faites moi plaisir, essayez<br />

d'entrer en contact avec Lucien, mon mari, mon Lulu !<br />

Gisèle<br />

Ma foi, si ça doit vous faire plaisir Simone, je veux bien quant à moi, tenter<br />

l'expérience. Faire tourner les tables, c'est une chose qui manque à mon palmarès.<br />

Ernest<br />

(ravi)<br />

Ah ! Merci, Marie pervenche ! Vous allez voir, vous risquez d'être surprise ! Surprise<br />

et même convaincue !<br />

Amiral<br />

Pour ma part, il est hors de question que je me prête à ce genre de singeries.<br />

Simone<br />

(déçue)<br />

Mais sans vous, on ne fera jamais le tour de la table en se touchant les petits doigts.<br />

Elle est trop grande pour quatre !<br />

Hermine<br />

Allons, un bon mouvement Amiral ! Pour faire plaisir à Simone !<br />

(L'Amiral fait signe que NON.)<br />

Canicule et Fric-Frac 31/82


Gisèle<br />

(doucereuse)<br />

Et si c'est moi qui vous le demande, marin de mon cœur, vous ne ferez pas un petit<br />

effort ?<br />

Amiral<br />

(ravi)<br />

Ah ! Si c'est vous qui me le demandez, ma pervenche, le marin de votre cœur ne<br />

peut que s'embarquer dans cette galère et avec bonnes grâces, de surcroit !<br />

Et que j'te roucoule ! Et que j'te roucoule !<br />

Cou cou rou cou cou<br />

Simone<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

(bis)<br />

Je sais que l'Amour existe ! (La Paloma .Nana Mouskouri)<br />

Ernest<br />

Bien, bien, bien ! Installons nous donc confortablement !<br />

(On déplace chaises et guéridon et on s'assoit autour.)<br />

Alors maintenant, vous allez mettre vos deux mains à quelques centimètres audessus<br />

de la table en faisant en sorte de vous toucher par les petits doigts.<br />

(Ils s'exécutent.)<br />

Voilà ! Trrrrès bien ! Maintenant, chacun essaie de faire le vide dans son esprit, sauf<br />

Simone qui va penser très très très fort à son Lucien.<br />

On n'a pas l'air idiot du tout !<br />

Amiral<br />

(maugréant)<br />

Gisèle<br />

(lui souriant)<br />

Vous aviez dit « avec bonnes grâces », très cher !<br />

Amiral<br />

C'est juste ! Je vais m'efforcer d'être gracieux, pour vous complaire, très chère !<br />

Cou cou rou cou cou...<br />

Hermine<br />

(chantant mais à mi -voix)<br />

Ernest<br />

(la coupant)<br />

Canicule et Fric-Frac 32/82


Chut ! ! ! Silence, maintenant ! Je dois me concentrer.<br />

Amiral<br />

Ça ! C'est pas gagné ! Il est tellement éparpillé !<br />

Chut ! ! !<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Ernest<br />

(respire lentement, profondément, ferme les yeux et d'une voix profonde)<br />

Lucien, es tu là ? Si tu es là, frappe un coup.<br />

Il est là ! Il est là ! Tu es là mon Lulu ?<br />

Chut ! Lulu, es tu là ?<br />

(On entend frapper un coup.)<br />

Simone<br />

(folle de joie)<br />

Ernest<br />

(Un coup.)<br />

(Voix profonde d'Ernest.)<br />

Puisque tu es là, peux tu répondre à la question suivante : « Qui est le pignouf qui a<br />

fait le coup du hold-up de Charmançon les Bruyères ? »<br />

Comment ça, de quelle couleur ?<br />

Qu'est ce qu'il dit ?<br />

La question !<br />

Eh bien quoi ? la question !<br />

Il demande de quelle couleur elle est !<br />

(Temps d'attente, puis étonné.)<br />

Simone<br />

(impatiente)<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

(goguenard, sur le ton de Didier Bourdon dans le sketche des inconnus :<br />

Télémagouille)<br />

Vous pouvez répéter la question ? Lulu !<br />

(Mimiques des autres à l'Amiral pour qu'il se taise.)<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 33/82


Il demande si c'est une question bleue.<br />

Une question bleue ?<br />

(étonné)<br />

Gisèle<br />

(étonnée)<br />

Hermine<br />

Mais y'a pas de couleur ! Une question n'a pas de couleur !<br />

Ben non ! Y'a pas de couleur !<br />

Chut !<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Ernest<br />

(Ecoutant la voix de Lulu puis, de plus en plus incrédule.)<br />

Et il veut mille francs pour répondre à notre question !<br />

Qu'est ce que c'est que ce gogo ?<br />

C'est pas mon Lulu, ça, c'est sûr !<br />

Amiral<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

Il peut toujours se brosser pour qu'on lui donne mille francs !<br />

Hermine<br />

(levant lez yeux au ciel et parlant haut pour se faire entendre de l'esprit)<br />

Y'en a plus d'abord des francs ! On est passé à l'€uro ! Faudrait voir à se tenir<br />

informé là-haut !<br />

Chut ! ! !<br />

Ah ! Ça par exemple !<br />

Qu'est ce qu'il raconte encore ?<br />

Ernest<br />

(Ecoute, stupéfait.)<br />

Simone<br />

Ernest<br />

Il a dit : « à demain, si vous le voulez bien ! »<br />

Amiral<br />

(s'esclaffant)<br />

Et voilà ! Notre super médium extra lucide s'est trompé de Lucien ! On vient d'avoir<br />

Lucien Genès et le jeu des mille francs, en direct de l'au-delà ! Et il s'est bien payé<br />

Canicule et Fric-Frac 34/82


notre tête, par dessus le marché ! Comme je le disais tout à l'heure, nous avons l'air<br />

de gros crétins !<br />

Gisèle<br />

Reconnaissez quand même, très cher, que nous avons eu un Lucien !<br />

Ah ! Vous voyez !<br />

Ernest<br />

(retrouvant son aplomb)<br />

Simone<br />

(confuse)<br />

Ce doit être de ma faute. Je voulais tellement retrouver mon Lulu à l'époque de notre<br />

« jeunesse » ! J'ai dû penser JEUNESSE trop fort !...<br />

SCENE 5<br />

Coco, Simone, Prunelle, Hermine, Amiral, Ernest, Gisèle, Infirmière<br />

Coco entre, suivie de Prunelle qui tire sur un sac à roulettes bien plein d'une main et<br />

tient dans l'autre un paquet de biscuits ouvert.<br />

Coco<br />

Désolée de vous interrompre, mais, Madame Deshaies que voici, vient d'arriver et sa<br />

chambre n'est pas tout à fait prête. Je pensais que vous pourriez en profiter pour<br />

faire connaissance pendant que je termine.<br />

Parfait ! Je vous laisse !<br />

Simone<br />

Mais bien sûr !<br />

Coco<br />

(Elle sort.)<br />

Simone<br />

(proposant un bonbon à Prunelle, en lorgnant sur le paquet de biscuits)<br />

Vous en voulez un madame Lahaie ?<br />

Prunelle<br />

Deshaies ! Prunelle Deshaies ! Non, merci !<br />

(Simone se met le bonbon dans la bouche, déçue de ne pas s'être vue proposer un<br />

biscuit.)<br />

Hermine<br />

Canicule et Fric-Frac 35/82


Prunelle ! Quel joli prénom ! Bienvenue aux Charmettes ! Moi, c'est Hermine, dite<br />

Mimine Top Cinquante !<br />

Amiral<br />

(lui tendant la main et la retirant voyant que ses deux mains sont occupées)<br />

Bonjour matelot ! Moi, c'est l'Amiral !<br />

(Désignant Ernest)<br />

<strong>Le</strong> moussaillon, là, c'est Titine ! Enfin, Ernest !<br />

Bonjour Madame !<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

Bonjour Prunelle ! Je suis Gisèle, dite « Marie Pervenche », et voici Simone, alias<br />

Jumbo... euh.. Beau petit oiseau des îles.<br />

Prunelle<br />

(interdite)<br />

Bonjour à tous ! Dites moi, c'est ébouriffant, tous ces noms et surnoms !<br />

Simone<br />

Vous vous retirez aux « Charmettes » définitivement ?<br />

Prunelle<br />

Grand Dieu, non ! J'espère que mon séjour ici n'est que provisoire !<br />

Des ennuis de santé, peut être ?<br />

Non, non, pas particulièrement.<br />

Amiral<br />

Prunelle<br />

(evasive)<br />

Hermine<br />

La solitude, sans doute, qui devient trop pesante ?<br />

Prunelle<br />

(qui va d'abord dire non puis, se ravisant, saute sur l'occasion)<br />

N... C'est ça ! La solitude ! Vous avez raison ! Je suis bien seule ! Et maintenant...<br />

Hermine<br />

(lui coupant la parole et chantant)<br />

Que vais je faire ? Vers quel néant glissera ma vie ?<br />

Toutes ces nuits, pourquoi, pour qui ?<br />

Ernest<br />

(enchaînant)<br />

Canicule et Fric-Frac 36/82


Et ce matin, qui revient pour rien !<br />

Ebouriffant ! Ça les prend souvent ?<br />

Prunelle<br />

(eberluée)<br />

Gisèle<br />

Dès qu'un mot, dans la conversation, inspire une chanson à notre chère Hermine.<br />

Eh bien ! Ça promet !<br />

Prunelle<br />

(Au public)<br />

Simone<br />

Dites donc madame La Prune, vous qui arrivez du dehors, que dit-on du hold-up de<br />

la poste à Charmançon ? Y a-t-il du nouveau ?<br />

Prunelle<br />

Ma foi, je n'ai rien entendu dire de particulier. Rien de plus que ce qui est paru au<br />

journal. C'est ébouriffant cette affaire, non ?<br />

Moi, ce qui m'ébouriffe,<br />

Amiral<br />

(Se décoiffant avec les doigts ou décoiffant Ernest)<br />

C'est que vous vous échiniez à trimballer ce sac à roulettes. Il ne va pas s'envoler<br />

vous savez. Vous pouvez le laisser dans un coin, ce sera plus pratique. Tenez, je<br />

vais vous le mettre là-bas.<br />

Non, non, merci, je préfère le garder !<br />

(Il va pour prendre le sac)<br />

Prunelle<br />

(vivement)<br />

Hermine<br />

(au public)<br />

Elle a sans doute peur qu'on lui chipe ses petites culottes en pilou !<br />

Ernest<br />

(qui vient de prendre le fameux sac dans les jambes)<br />

Dans ce cas, essayez de le tenir loin de mes jambes ! Vous allez finir par me péter<br />

une varice !<br />

Qui vient de se péter une varice ?<br />

Infirmière<br />

(entrant sur ces derniers mots)<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 37/82


Personne encore, mais ça ne saurait tarder !<br />

Infirmière<br />

(sèchement)<br />

Coco m'a dit que je vous trouverais ici, Madame Deshaies ! Je vous prie de bien<br />

vouloir me suivre à l'infirmerie pour que j'établisse votre dossier médical.<br />

Prunelle<br />

Bien, bien, je vous suis, mais je ne suis pas malade, vous savez.<br />

Infirmière<br />

C'est ce que nous verrons, chère Madame ! Après vous ! (Elles sortent.)<br />

SCENE 6<br />

Gisèle<br />

Eh bien, mes bons amis, que pensez vous du personnage ?<br />

Amiral<br />

Cette prunelle des haies porte bien son nom. Je la trouve, pour ma part, piquante et<br />

acide comme le petit fruit bleu des haies de prunelliers ! Piquante et acide ! C'est ça !<br />

Simone<br />

Et pas partageuse ! Vous croyez qu'elle nous aurait offert un de ses biscuits ? Que<br />

nenni ! Et puis avec tous ses « C'est ébouriffant », elle me donne envie d'une mise<br />

en plis !<br />

Hermine<br />

(impatiente)<br />

Quel surnom allez vous lui donner Amiral ?<br />

Puis je suggérer « Pète varice » ?<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

Elle n'a pas l'air très à l'aise. Il est vrai que se trouver parachutée parmi nous, sans<br />

tambour ni trompette a de quoi déstabiliser n'importe qui.<br />

Amiral<br />

(réfléchissant)<br />

Prunelle des haies ! Acide et piquante... Voyons... As pour acide.. Pic pour piquante.<br />

Aspic !<br />

Canicule et Fric-Frac 38/82


Comme la vipère ?<br />

Simone<br />

Amiral<br />

Comme la vipère, exactement ! Qu'est ce que vous en dites ?<br />

Hermine<br />

Vous allez peut être un peu vite en besogne, Amiral, en affublant cette personne du<br />

surnom d'aspic sans avoir fait plus ample connaissance. Elle nous réserve peut être<br />

des trésors d'amabilité et de douceur !<br />

Ernest<br />

(ironique)<br />

C'est ça ! Bien cachés alors dans son sac à varices roulant ! Euh ! A malice, je<br />

voulais dire son sac à malice, bien sûr !<br />

Gisèle<br />

Voilà un beau lapsus révélateur, Ernest, qui nous démontre combien l'état de vos<br />

jambes vous préoccupe !<br />

Simone<br />

Il a bien raison d'en prendre soin ! Parce que quand ça commence à péter de<br />

partout, ces foutues varices, ce n'est guère réjouissant !<br />

Amiral<br />

(mielleux et moqueur)<br />

C'est que notre Titine a le mollet délicat, le jarret galbé, la cuisse fuselée, bref, de<br />

belles gambettes !<br />

On dit que j'ai de belles gambettes,<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Ernest<br />

(levant la jambe)<br />

C’est vrai ! Vous ne croyez pas si bien dire, Mistinguette ! Elles ne sont pas si mal<br />

mes jambes, après tout.<br />

Gisèle<br />

Mais c'est certain, Ernest et je connais bien des femmes qui vous les envieraient.<br />

Amiral<br />

Bon, on a peut être des sujets de conversation autrement intéressants que les<br />

guiboles de Titine, non ?<br />

Simone<br />

(fouillant ses poches)<br />

Allons bon, je n'ai plus de bonbon, je vais refaire le plein. Quelqu'un en voudra ?<br />

Canicule et Fric-Frac 39/82


Non, non, merci !<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Simone<br />

Tant mieux ! Il m'en restera davantage ! A plus tard ! !<br />

(Elle sort.)<br />

Hermine<br />

(la suivant)<br />

Je vous accompagne, il me faut une nouvelle pelote de laine !<br />

Gisèle<br />

Au fait, amiral, j'ai apporté ce que vous m'aviez demandé. Vous m'accompagnez<br />

jusqu'à ma voiture ?<br />

Amiral<br />

Ah ! Vous avez trouvé mes petits objets ! Chouette alors ! Allons y ma belle !<br />

(Il tend son bras à Gisèle)<br />

Mets ton aile sous mon abattis et partons comme deux volailles !<br />

Vous avez de ces expressions !<br />

Gisèle<br />

(riant, lui donne le bras)<br />

(Ils sortent, bras dessus, bras dessous.)<br />

Amiral<br />

N'est ce pas ? Ça me vient de ma grand-mère.<br />

(Ils sortent, bras dessus bras dessous)<br />

SCENE 7<br />

Ernest, Prunelle, Infirmière<br />

Ernest, resté seul, sort de sa poche le livret laissé par l'animateur.<br />

Ernest<br />

Bien, profitons de ce moment de solitude pour réviser mon rôle dans cette fameuse<br />

pièce. Alors,<br />

voyons voir !<br />

(Ouvrant et feuilletant le livret.)<br />

Canicule et Fric-Frac 40/82


(Lisant tourné vers la salle sans voir que Prunelle entre.)<br />

« Ne soyez pas si timide ma chère, venez ! »<br />

« Venez plus près de moi ! »<br />

(Etonnée, Prunelle s'avance un peu, silencieusement.)<br />

« Vous aurais-je blessée sans le vouloir,<br />

(Prunelle avance encore.)<br />

Pour que vous me battiez froid de cette façon ?<br />

Quoi, pas un mot, pas un regard !<br />

Ne suis je donc, pour vous, qu'un vulgaire paillasson ?<br />

Pour que vous piétiniez ainsi mon pauvre cœur<br />

(Incompréhension de Prunelle.)<br />

Qui a battu pour vous dès le premier regard.<br />

(Emotion de Prunelle qui croit qu'il s'adresse à elle.)<br />

Vous faut il me traiter avec tant de hauteur<br />

Ah ! Douce beauté, ma mie,<br />

N'attendez pas demain,<br />

(Surprise ravie de Prunelle.)<br />

Pour me rendre la vie en me prenant la main ! »<br />

(Prunelle se précipite et prend la main tendue d'Ernest.)<br />

Je la prends avec joie ! Grand fou !<br />

Prunelle<br />

Ernest<br />

(sursautant)<br />

Mais qu'est ce que... Ah ! L'Aspic ! ! Mais que...<br />

(Il cache son livret.)<br />

Prunelle<br />

C'est la première fois que l'on me fait une déclaration si galante. Alors, comme ça,<br />

dès le premier regard, votre cœur a battu pour moi ?<br />

Mais ce n'est pas... enfin, c'est...<br />

C'est merveilleux, mon chéri !<br />

Ernest<br />

(gêné)<br />

Prunelle<br />

(se collant contre Ernest)<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 41/82


(bras écartés pour ne pas toucher Prunelle et reculant petit à petit pour se dégager<br />

d'elle, tandis qu'elle s'avance pour n'en pas décoller.)<br />

Oui, mais non ! Vous devez savoir Madame, que je… que.. Que je suis plutôt gay.<br />

Voilà c’est dit !.<br />

Prunelle<br />

Vous êtes gai! Mais c’est merveilleux, ça me changera de mon défunt mari qui était<br />

triste comme un bonnet de nuit !<br />

Mais je vous dis que je suis gay !<br />

Ernest<br />

Prunelle<br />

(chantant)<br />

A en pleurer, à en pleurer ou à en rire mais dans le fond qu'est ce que ça fait ?<br />

(chanson d’Alain Barriere)<br />

(Parlé.)<br />

Vous vous souvenez ? Alain Barrière, nos jeunes années !<br />

Votre amie Hermine, si elle avait été là, n'aurait sans doute pas manqué l'occasion<br />

de vous le chanter.<br />

Ernest<br />

Je suppose que oui ! Mais vous ne comprenez pas. Je veux dire que...<br />

Que Prunelle<br />

vous a tapé dans la prunelle<br />

Si, si, j'ai bien compris !<br />

Prunelle<br />

(Geste du doigt se désignant.)<br />

(Geste du doigt désignant l'œil d'Ernest.)<br />

(Voix rauque de désir.)<br />

Mon chou, c'est quand tu voudras, où tu voudras ! Je suis toute à toi !<br />

Maman, j'ai peur !<br />

Ernest<br />

(paniqué, à la salle)<br />

Infirmière<br />

(entrant)<br />

Ah ! En voilà au moins deux ! Pour votre gouverne, sachez que la météo prévoit, de<br />

nouveau, une journée caniculaire pour demain. Prévenez vos amis, qu'ils prennent<br />

leurs dispositions vestimentaires et autres. Compris ? Et rassemblement dans la<br />

salle climatisée ! O -bli -ga -toi -re -ment !<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 42/82


(sautant sur l'occasion d'échapper à Prunelle)<br />

Merci de l'information ! Je cours de ce pas les avertir.<br />

Qu'est ce qu'il est chou !<br />

(Il sort.)<br />

Prunelle<br />

(béate d'admiration, à l'infirmière)<br />

Infirmière<br />

(étonnée)<br />

Vous trouvez ? Enfin, chacun son goût, n'est ce pas ? Mais permettez moi de vous<br />

dire que si vous le trouvez chou aujourd'hui avec 21° au soleil, vous risquez de le<br />

trouver chou-rouge demain, avec 38° à l'ombre !<br />

Prunelle<br />

Enfin ! Ne me dites pas qu'il n'est pas trognon !<br />

C'est ça, il est trognon... de chou !<br />

Oh !<br />

Infirmière<br />

Prunelle<br />

(vexée)<br />

RIDEAU<br />

Canicule et Fric-Frac 43/82


ACTE IV<br />

SCENE 1<br />

Amiral, Ernest, Hermine, Simone, Coco, Gisèle<br />

L'Amiral, Hermine, Ernest et Simone sont en train de réinstaller leurs bassines et de<br />

les remplir avec Coco. Ils s'y installent pendant le déroulement de la scène. Même<br />

genre de tenues que la première fois !<br />

Amiral<br />

(bougonnant)<br />

Obligatoirement, O -bli -ga -toi -re -ment ! C'est ce que nous allons voir !<br />

Elle n'avait pas l'air de plaisanter !<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

De toutes façons, le mot plaisanterie ne figure même pas au dictionnaire du Docteur<br />

Jekyll !<br />

Simone<br />

Elle pourra bien crier tant qu'elle voudra, il est hors de question que j'aille me les<br />

geler dans sa « chambre froide » ! Non mais, des fois ! On n'est pas du veau froid<br />

quand même !<br />

Amiral<br />

(rieur)<br />

D'autant que nous avons de quoi lui rabattre le caquet !<br />

Ernest<br />

Pour une fois, j'attends son coup de gueule avec impatience !<br />

Hermine<br />

(à Coco qui entre avec de l'eau en seaux ou en brocs pour emplir les bassines)<br />

Ici, ma jolie, si vous le voulez bien.<br />

(Coco s'exécute puis s'occupe des autres bassines, tout en discutant.)<br />

Coco<br />

Et voilà, vous allez pouvoir faire trempette. Vous savez que si je n'avais pas peur de<br />

me faire pincer, je m'installerais bien avec vous, moi !<br />

Canicule et Fric-Frac 44/82


Ben faut pas vous en priver ma petite !<br />

Simone<br />

Coco<br />

Eh ! C'est que je ne suis pas payée pour me prélasser les doigts de pieds en éventail<br />

dans une bassine. Je vais vous chercher du rab !<br />

(Elle se dirige vers la sortie et croise Gisèle qui entre, un journal à la main.)<br />

Bonjour Marie Pervenche ! Ça va encore cogner aujourd'hui !<br />

Ça, vous pouvez le dire mon petit !<br />

Gisèle<br />

Coco<br />

(précieuse)<br />

Désirez vous un jacuzzi personnel Gisèle, pour tenir compagnie à vos amis ?<br />

Gisèle<br />

(amusée)<br />

Ma foi, pourquoi pas ? Si ça ne vous dérange pas trop.<br />

Inutile Coco !<br />

A vos ordres Capitaine !<br />

Amiral<br />

Coco<br />

(saluant militairement)<br />

(Elle sort.)<br />

Amiral<br />

Venez Gisèle, venez vous installer près de moi.<br />

Mais bien volontiers !<br />

Gisèle, j'ai l'honneur de vous demander...<br />

Gisèle<br />

Amiral<br />

(cérémonieux, lui prenant les mains)<br />

(<strong>Le</strong>s autres sont aux aguets, s'attendant presque à ce qu'il lui demande sa main.)<br />

Cou cou rou cou cou…….<br />

Hermine<br />

(mi-voix, chante)<br />

Amiral<br />

J'ai l'honneur de vous demander... vos deux pieds pour partager ma bassine !<br />

(Haussements d'épaules des autres, rires de Gisèle.)<br />

Canicule et Fric-Frac 45/82


Nous allons mariner de concert, si cela ne vous dérange pas.<br />

Gisèle<br />

Nullement mon cher, au contraire ! Marinons, marinons !<br />

(Elle enlève ses chaussures et s'installe.)<br />

Simone<br />

Ah ! Je vois que vous nous avez apporté le journal Marie Pervenche ! Ça, c'est gentil<br />

!<br />

Hermine<br />

Alors ? Que dit-on ce matin à propos du hold-up ?<br />

Est-ce qu'ils ont pincé les coupables ?<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

(dépliant le journal)<br />

Ils n'ont pincé personne et doivent plutôt patauger car il est offert une récompense de<br />

cent mille euros à qui aidera à les retrouver.<br />

Simone<br />

(sourire béat)<br />

Cent mille euros ! Des montagnes de bonbons et de pâtisseries, des torrents de miel!<br />

Voyons, Simone !<br />

Eh ben quoi ? C'est pas vrai peut être ?<br />

Amiral<br />

(réprobateur)<br />

Simone<br />

(prenant un bonbon)<br />

Hermine<br />

Dites donc Gisèle, imaginez que, grâce à vous, nous trouvions les coupables ! Cent<br />

mille euros !<br />

Ernest<br />

(dédaigneux)<br />

Ce n'est pas l'argent qui aidera vos pauvres esprits étroits et bassement matériels à<br />

s'élever et atteindre leur plein épanouissement. Et puis d'abord, qu'est ce qu'on en<br />

ferait de tous ces euros ?<br />

Amiral<br />

Sainte Titine ! Si, par hasard, nous décrochons la timbale, je te promets que tu ne<br />

verras pas la couleur d'un seul centime d'euro; pour ne pas nuire au plein<br />

épanouissement de ton grand esprit.<br />

(Geste du pouce passé sous les dents.)<br />

Canicule et Fric-Frac 46/82


Pas ça ! Rassuré ?<br />

Euh ! Ben... c'est à …<br />

Ernest<br />

(bredouillant)<br />

Amiral<br />

(lui coupant la parole)<br />

Il est d'accord ! Mais il a raison sur un point. Qu'est ce qu'on en ferait ?<br />

Gisèle<br />

(riant)<br />

Pourquoi pas une piscine, avec un bassin qui présenterait des endroits confortables<br />

pour s'asseoir, avec des jets pulsés qui vous masseraient le dos pendant que vous<br />

feriez trempette.<br />

Coco<br />

(entrée avec un nouveau seau au début de le réplique de Gisèle, remplit les<br />

bassines qui ne le sont pas encore)<br />

Mais qui se remplirait sans l'aide de mes seaux !<br />

Amiral<br />

Vous savez que c'est une bonne idée ça, Marie Pervenche !<br />

Mouais, si on veut ! Moi, je préfèrerais...<br />

Simone<br />

(désabusée)<br />

Ernest<br />

Des palettes entières de fraises tagada et une tonne de biscuits au chocolat, on sait !<br />

Coco<br />

Voilà ! Maintenant, je vais vous préparer des boissons fraîches.<br />

Vous êtes un amour ! Coco !<br />

(Elle sort.)<br />

Hermine<br />

Canicule et Fric-Frac 47/82


SCENE 2<br />

Infirmière, <strong>Le</strong>s mêmes.<br />

Infirmière<br />

(entrant, mauvaise)<br />

Ah ! Ils sont là les cocos ! Qu'est ce que j'avais dit ? Tout le monde dans la salle<br />

climatisée. O -bli -ga -toi -re -ment ! Vous ne savez pas ce que ça veut dire, peut<br />

être, O -bli -ga -toi -re -ment ?<br />

Amiral<br />

Eh bien, eh bien, ma gracieuse, (mon roudoudou) ne nous fâchons pas.<br />

Simone<br />

Nous sommes majeurs et vaccinés et libres de choisir le moyen de nous rafraîchir<br />

qui nous convient.<br />

Absolument !<br />

C'est aussi mon avis !<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Infirmière<br />

Ah ! C'est comme ça ! On veut jouer aux réfractaires ! On conteste mon autorité ! On<br />

se rebelle !<br />

Amiral<br />

Tout de suite les grands mots ! On préfère, c'est tout !<br />

Infirmière<br />

Vous préférez ! Vous préférez rester ici quitte à faire des malaises dus à la<br />

déshydratation ? Par cette chaleur ?<br />

Simone<br />

Justement, vous ne devriez pas vous énerver comme ça !<br />

Ça vous donne chaud !<br />

Vous êtes toute rouge !<br />

Pas plus que vous, le chou !<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

Infirmière<br />

(Elle sort sa bombe d'eau minérale de sa poche.)<br />

Canicule et Fric-Frac 48/82


Il est grand temps que je vous rafraîchisse les idées, tous, autant que vous y êtes !<br />

Canonniers, à vos postes !<br />

Feu à volonté !<br />

Amiral<br />

(Chacun, sauf Gisèle, sort un pistolet à eau.)<br />

(Ils aspergent l'infirmière avec leurs pistolets et des gerbes d'eau des bassines en<br />

riant.)<br />

Ernest<br />

Attends voir, Jekyll ! Je vais te mouiller le bec !<br />

(Il l'arrose.)<br />

Hermine<br />

(fait de même en chantant sur l'air de la chanson « Alouette je te plumerai »)<br />

Je vais te mouiller le bec !<br />

Et la tête<br />

Et la tête ! Alouette ! Alouette... A a a a a a<br />

Mais, c'est une insurrection !<br />

Non, c'est une mutinerie !<br />

(bis)<br />

Simone<br />

(de même, chantant)<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Infirmière<br />

(se protégeant comme elle peut)<br />

Gisèle<br />

Infirmière<br />

Ça, par exemple, vous ne l'emporterez pas au paradis !<br />

(Elle recule vers la sortie pendant que les autres continuent à l'asperger en<br />

chantant.)<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Alouette, méchante alouette, Alouette, je te mouillerai !<br />

Il va y avoir des représailles, croyez moi !<br />

Infirmière<br />

(Mauvaise)<br />

(Elle sort)<br />

Gisèle<br />

Canicule et Fric-Frac 49/82


Je comprends mieux maintenant l'achat de ces babioles, soit disant pour vos petits<br />

neveux !<br />

Simone<br />

La voilà rafraîchie, la pas fraîche ! Je crois qu'on l'a matée pour aujourd'hui !<br />

Ernest<br />

Qu'est ce qu'elle a voulu dire avec son « pas plus que vous le chou ! » Ça n'a aucun<br />

sens !<br />

(Ils se réinstallent dans les bassines et, de temps en temps, au-dessus de la bassine<br />

de l'Amiral, apparaissent la jambe de Gisèle réunie par les doigts de pied à celle de<br />

l'Amiral, comme le seraient deux mains aux doigts entrelacés.)<br />

Hermine<br />

A propos de chou, si on en revenait à la feuille de chou régionale et à la récompense<br />

promise pour retrouver l'argent du hold-up.<br />

C'est en seconde page, lisez vous même.<br />

Vous permettez ?<br />

Gisèle<br />

(tendant le journal)<br />

Simone<br />

(se saisissant du journal)<br />

Coco<br />

(revenant avec un chariot roulant avec des boissons fraîches dans de très grands<br />

verres avec touilleurs et glaçons)<br />

Et voilà la barmaid ! Citrons pressés frais et eau glacée pour tout le monde ! Et tenez<br />

vous bien, avec des pailles !<br />

(Elle fait la distribution.)<br />

Amiral<br />

Alors là, quel service ! Pour un peu, on se croirait au Ritz !<br />

(A Simone)<br />

Eh bien Simone, ce journal ? On vous écoute !<br />

Voilà, bonne dégustation à tous !<br />

Merci Coco !<br />

Coco<br />

(sortant)<br />

Ernest<br />

Infirmière<br />

(entrant en colère)<br />

Canicule et Fric-Frac 50/82


Je vous ai promis des représailles ! Eh bien, ce soir, ce sera lavement vermiguge<br />

pour tout le monde ! Ah mais ! Je vais vous faire passer le goût des mutineries moi !<br />

Oh non !<br />

Oh oui ! Oh oui !<br />

Pas pour vous le chou, évidemment !<br />

Et pourquoi donc, pas pour moi ?<br />

J’ai dit représailles, pas gâteries !<br />

Tous<br />

(sauf Ernest et Gisèle)<br />

Ernest<br />

(réjoui, applaudissant)<br />

Infirmière<br />

Ernest<br />

Infirmière<br />

Ernest<br />

C’est de la discrimination ! Je me plaindrai !<br />

C’est ça, plaignez-vous !<br />

Infirmière<br />

(Elle sort.)<br />

Ernest<br />

Non mais quelle peau d’hareng quand même !<br />

Si elle croit qu’on va se laisser faire !<br />

Va y avoir du sport ce soir ! C’est sûr !<br />

Amiral<br />

Simone<br />

Hermine<br />

(à Simone)<br />

Bon, si on revenait à cette lecture, Simone !<br />

Voilà, voilà !<br />

Simone<br />

(Lisant.)<br />

« Faire fondre le chocolat au bain -marie dans un peu de lait chaud. Ajouter le sucre.<br />

Bien remuer pour le faire dissoudre »<br />

(Elle se passe la langue sur les lèvres.)<br />

Canicule et Fric-Frac 51/82


Gisèle<br />

Il me semble que notre Jumb...beau petit oiseau des îles se soit trompé de page.<br />

Elle est sur les recettes de cuisine !<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Vous ne pensez donc qu'à galimafrer, espèce de mâche dru !<br />

Simone<br />

Dites donc, restez poli « le chou » ou la mâche dru va vous bouloter tout cru ! Non<br />

mais ! Page deux. Voilà !<br />

(Lisant.)<br />

<strong>Le</strong> hold-up de la poste de Charmançon les Bruyères.<br />

(Regardant Ernest avec animosité.)<br />

Ça ne vaut pas la crème au chocolat si vous voulez mon avis !<br />

Simone, page deux !<br />

Hermine<br />

(s'impatientant)<br />

Simone<br />

Page deux ! Si vous y tenez ! (Lisant.) « La police fait savoir qu'une prime de cent<br />

mille euros récompensera la personne qui lui permettra de mettre la main sur le<br />

cerveau du hold-up et le million d'euros volés»<br />

SCENE 3<br />

Prunelle, Gisèle, Amiral, Hermine, Simone, Ernest<br />

Prunelle entre en grelottant et en claquant des dents, vêtue d'un gros manteau et un<br />

bonnet de laine sur la tête.<br />

Hermine<br />

Eh bien dites donc, vous avez l'air gelée ma pauvre Madame Deshaies !<br />

C'est la la la sa sa salle cli cli cli -matisée !<br />

Prunelle<br />

(claquant des dents)<br />

Canicule et Fric-Frac 52/82


Amiral<br />

Fallait faire comme nous, fallait pas y aller !<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Ah il fallait pas, il fallait pas qu'elle y'aille, Ah il fallait pas, il fallait pas y'aller !<br />

Elle avait dit o - bli - ga - toi - re !<br />

Prunelle<br />

(Elle se déshabille petit à petit et se rapproche d'Ernest en déboutonnant le haut de<br />

son corsage et en lui lançant des œillades incendiaires.)<br />

Gisèle<br />

Vous avez attrapé un sacré coup de froid dites donc ! Ça vous en a atteint les nerfs<br />

optiques. Vous n'arrêtez pas de cligner !<br />

Prunelle<br />

(sèchement)<br />

Mes nerfs optiques vont bien, merci ! Et je cligne si je veux !<br />

Simone<br />

(continuant à lire le journal)<br />

Tiens ! Il y a eu une effraction, au 10 de la rue Condorcet hier soir !<br />

Qu’est-ce que vous dites ?<br />

Prunelle<br />

(sursautant)<br />

Simone<br />

C'est en page quatre : effraction 10 rue Condorcet.<br />

Mais c'est chez moi ça ! Faites voir !<br />

Ah bon !<br />

Prunelle<br />

(s'emparant du journal)<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Prunelle<br />

(lisant)<br />

« Vers deux heures, ce matin, une patrouille de police faisant sa ronde, a été<br />

intriguée par une porte fracturée et béante au 10 de la rue Condorcet. En pénétrant<br />

dans les lieux il est apparu que l'appartement avait fait l'objet d'une fouille en règle »<br />

Ah les salauds ! <strong>Le</strong>s salauds !<br />

(Reprenant sa lecture.)<br />

Canicule et Fric-Frac 53/82


« En effet le désordre qui régnait <strong>Le</strong>s propriétaires étaient absents au moment de la<br />

découverte du fric-frac. La police enquête. » Et ils m'ont mis le bordel en plus !<br />

Gisèle<br />

Mais qui ça, ils ? Vous en parlez comme si vous saviez qui a fait le coup !<br />

Prunelle<br />

(sur la défensive)<br />

Mais pas du tout ! Pas du tout ! Qu'est ce que vous allez chercher ? Comment<br />

voulez-vous que je sache ? Comment peut-on s'imaginer...<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

En voyant un vol d'hirondelles, que l'automne vient d'arriver.<br />

Prunelle<br />

Ah vous ! Fermez là hein ! C'est bien le moment de chanter !<br />

Ernest<br />

(espérant s'en débarrasser)<br />

C'est ballot, mais vous allez devoir rentrer chez vous alors !<br />

Prunelle<br />

Ça, n'y comptez pas ! J'aurais bien trop peur ! Je suis là ! J'y reste !<br />

Amiral<br />

Il faudra pourtant bien que vous y alliez, ne serait-ce que pour faire l'inventaire de ce<br />

qui vous a été dérobé. La police va avoir besoin d’une déclaration de vol détaillée.<br />

Prunelle<br />

Non, non, non et non, je n’irai pas ! La police n’a qu’à se déplacer et venir ici ! Je leur<br />

dirai ce que contenait ma maison et ils se débrouilleront.<br />

Je me sens bien ici, protégée.<br />

(Elle se rapproche d’Ernest en minaudant.)<br />

Gisèle<br />

Je crains bien qu'on ne vous laisse pas le choix ma chère. Vous allez devoir y aller,<br />

bon gré, mal gré.<br />

Absolument ! Z'aurez pas le choix, l'aspic !<br />

Simone<br />

(Se reprenant.)<br />

Euh ! L'aspi, l'aspirine ! L'aspirine ! C'est ça qu'il vous faut, pour vous détendre ! Ça<br />

détend l'aspirine ! Je vais vous en chercher.<br />

(Elle sort.)<br />

Prunelle<br />

Canicule et Fric-Frac 54/82


(haussant les épaules)<br />

L'aspirine, tu parles ! L'aspirine n'y fera rien et je n'irai pas !<br />

Amiral<br />

Mais enfin, ce n'est quand même pas la mer à boire que d'aller jeter un œil chez<br />

vous, que diable !<br />

Prunelle<br />

C'est vous qui le dites, mais moi je sais ! Je sais que ça va être insurmontable. Ca va<br />

être…<br />

(Idée lumineuse.)<br />

Il paraît que quand on vous cambriole, vous avez la sensation d'avoir subi un viol !<br />

Voilà ! Eh bien moi,<br />

(Regards appuyés sur Ernest)<br />

Je veux bien être violée mais avec mon consentement ! C'est clair ?<br />

(Gestes de désespoir d'Ernest.)<br />

Ernest<br />

On n’en sortira pas !<br />

Hermine<br />

Dites donc Gisèle, vous pourriez peut être y aller, vous, chez Prunelle, pour voir de<br />

quoi il retourne ?<br />

Gisèle<br />

Mais on n’entre pas sur les lieux d'un cambriolage comme dans un moulin ! La police<br />

a dû poser des scellés ou il y aura un garde à la porte ! J'ai bien peur que...<br />

Ernest<br />

Dites donc le commissaire <strong>Le</strong>pic vous doit bien quelques faveurs après l'enquête que<br />

vous avez menée à bien, ici, l'année dernière !<br />

Amiral<br />

En le caressant dans le sens du poil, je parie qu'il ne vous refusera pas une petite<br />

intrusion sur les lieux du délit. Quel homme, normalement constitué<br />

pourrait vous résister ma Pervenche !<br />

(Coup d'œil à Titine.)<br />

Ernest<br />

(reprenant espoir, à prunelle)<br />

Vous pourriez aller avec elle ! A deux, vous n'auriez plus lieu d'avoir peur !<br />

Prunelle<br />

Inutile d'insister, je ne bougerai plus des Charmettes !<br />

(Désespoir d'Ernest.)<br />

Gisèle<br />

Canicule et Fric-Frac 55/82


Bon, c'est entendu ! Je vais voir <strong>Le</strong>pic et mener ma petite enquête.<br />

(Elle se lève, se rechausse)<br />

Je repasserai demain vous faire mon rapport. En attendant<br />

(A Prunelle)<br />

Vous m'établissez la liste de tout ce qui a pu tenter vos voleurs et on comparera avec<br />

ce que j'aurai trouvé sur les lieux.<br />

(Se frottant les mains)<br />

Finalement, ça me fait plutôt plaisir de reprendre du service ! Allez, en piste ! A<br />

demain les amis !<br />

A demain ma Pervenche !<br />

A demain !<br />

Soyez prudente !<br />

Amiral<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Prunelle<br />

RIDEAU<br />

Canicule et Fric-Frac 56/82


ACTE V<br />

SCENE 1<br />

Hermine, Amiral, Ernest, Simone<br />

Hermine assise, tricote en chantonnant. L'Amiral, tenant son pistolet à eau, entre<br />

tout doucement et lui colle le canon dans le dos.<br />

Haut les mains !<br />

Amiral<br />

Hermine<br />

(souriant)<br />

Même pas peur ! Vous pouvez rengainer Al Capone, d'autant que la température<br />

étant redevenue normale, l'artillerie lourde ne s'impose plus.<br />

Amiral<br />

Il n'est pas chargé mais il peut, peut être encore, intimider le Docteur Jekyll.<br />

(Il voit arriver Ernest.)<br />

Attention Mimine, soyez prête à défendre chèrement votre vertu, voici Casanova, en<br />

personne, qui rapplique. Vous avez vu comment il a emballé la Prunelle ?<br />

Hermine<br />

(riant)<br />

Je crois plutôt qu'elle s'est emballée toute seule la vieille pouliche !<br />

Ernest<br />

Bonjour ! On respire mieux aujourd'hui, n'est ce pas ?<br />

Salut matelot ! Déjà sur le pont ?<br />

Amiral<br />

Hermine<br />

Bien dormi Ernest ? Vous avez fait de beaux rêves ?<br />

Ernest<br />

Ah, pour ça non ! J'ai cauchemardé toute la nuit !<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 57/82


Allons bon ! <strong>Le</strong>s esprits que vous ne cessez de déranger seraient-ils venus se<br />

venger en troublant votre sommeil ?<br />

Si ce n'était que ça !<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Qu'est ce qui a bien pu vous tourmenter à ce point ?<br />

L'aspic ! J'ai rêvé de serpent toute la nuit.<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

(taquin)<br />

Voilà où ça mène d'aller séduire la Prunelle !<br />

Ernest<br />

Mais je n'ai rien séduit du tout ! C'est un malentendu ! Je répétais mon rôle pour<br />

l'atelier théâtre et elle est entrée sans que je m'en aperçoive.<br />

Hermine<br />

La scène 2 de l'<strong>Acte</strong> I, je parie ! « Ne suis je donc pour vous qu'un vulgaire<br />

paillasson.<br />

Pour que vous piétiniez ainsi mon cœur..»<br />

Amiral<br />

(la main sur le cœur, déclamant)<br />

« Ah ! Douce beauté, Ma mie, n'attendez pas demain.»<br />

Ernest<br />

« Pour me rendre la vie en me donnant la main.»<br />

Non !<br />

Si, hélas !<br />

Elle a pris ça pour elle ?<br />

Comme je vous le dis !<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Ça alors ! Mais vous avez essayé de la détromper au moins ?<br />

Ernest<br />

Et comment donc ! Je lui ai dit que je suis gay !<br />

Canicule et Fric-Frac 58/82


Et alors ? Sa réaction ?<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Ça lui a beaucoup plu ! Elle m'a pris pour un rigolo !<br />

Hermine<br />

Y'a pas à tortiller, il va falloir lui mettre les points sur les « i ».<br />

Tu veux que je m'en charge, Titine ?<br />

Amiral<br />

Ernest<br />

Non, non, merci bien ! Je me méfie, figure-toi !<br />

Amiral<br />

C'est pourtant de bon cœur tu sais. Je me ferais un plaisir de lui faire comprendre<br />

que sans Brigitte Bardot, ton espèce aurait disparu depuis longtemps, massacrée sur<br />

la banquise sous les coups de machette de dégénérés qui se fichent des bébés<br />

phoques comme de leur première barboteuse !<br />

Hermine<br />

Ernest a raison ! Mieux vaut qu'il se débrouille tout seul. Vous ne feriez qu'envenimer<br />

les choses.<br />

Ernest<br />

Si cette vipère reste aux Charmettes, ma vie va devenir un véritable enfer !<br />

Amiral<br />

Ça, toutes les femmes ne sont pas des Marie Pervenche ! Hélas !<br />

Hermine<br />

Gisèle ne devrait pas tarder à venir nous faire son rapport ! J'ai hâte d'y être !<br />

Chalut la compagnie !<br />

(Simone entre en mangeant une tartine.)<br />

Simone<br />

(bouche pleine)<br />

Ernest<br />

Bonjour ! Jamais le bec vide, n'est-ce pas, Simone ?<br />

Hermine<br />

Prenez garde, ma chère, vous allez finir par devenir un vrai petit tonneau !<br />

Amiral<br />

Un tonneau sans fond, comme celui des Danaïdes !<br />

Simone<br />

Canicule et Fric-Frac 59/82


Parfait ! S'il n'a pas de fond, je veux bien être ce tonneau là, que je pourrai emplir et<br />

emplir sans qu'il ne déborde jamais !<br />

Ernest<br />

Mais vous vous rendez compte Simone qu'en mangeant sans répit comme vous le<br />

faites vous creusez votre tombe avec vos dents !<br />

Simone<br />

Sans doute, et alors ? J'irai retrouver mon Lulu plus rapidement, ce qui n'est pas<br />

pour me déplaire, tout en jouissant des papilles, ce qui me plaît beaucoup !<br />

Vous n'êtes pas raisonnable, Simone !<br />

Hermine<br />

Simone<br />

M'en fiche ! Veux pas être raisonnable ! Et d'abord mon Lulu qui avait des lettres me<br />

disait toujours : « Raison sans sel est fade nourriture » et moi je rajoute : deux points,<br />

ouvrez les guillemets : « Raison sans sucre est une vraie torture ! »<br />

Amiral<br />

Que pouvons nous répondre à cela ? Désormais...<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Désormais, on ne nous verra plus ensemble. Désormais....<br />

SCENE 2<br />

Gisèle, Amiral, Ernest, Hermine, Simone<br />

Gisèle entre, un œil au beurre noir, un bandage sur la tête, un bras en écharpe et<br />

claudiquant. On pense qu'elle a pris un coup sur la mâchoire car elle s'exprime très<br />

difficilement, tout en restant compréhensible.<br />

Amiral<br />

(se précipitant vers elle, affolé)<br />

Grands Dieux ma pervenche, que vous est-il arrivé ?<br />

Ernest<br />

(s'empressant comme Hermine et Simone et lui apportant un siège)<br />

Seigneur dans quel état êtes-vous ? Vous avez eu un accident de voiture ?<br />

(N)on, (N)on !<br />

Gisèle<br />

(Signes de dénégation)<br />

Canicule et Fric-Frac 60/82


Un chauffard vous a renversé ?<br />

On vous a agressée alors ?<br />

(C)'est (ç)à !<br />

Hermine<br />

Gisèle<br />

(N)on, (n)on !<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

(opinant du chef)<br />

Amiral<br />

(en colère)<br />

Quel malade vous a fait ça ? Que j'aille lui arranger le portrait séance tenante !<br />

(J's)ais (p)as !<br />

C'est un homme, sûrement !<br />

(D)eux !<br />

Gisèle<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

(montrant deux doigts)<br />

Hermine<br />

Quoi ? Deux hommes contre une femme ! <strong>Le</strong>s lâches !<br />

Et ça s'est passé où ?<br />

(Ch)ez (l)'aspic<br />

Où ?<br />

(Ch)ez (l)'aspic !<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Gisèle<br />

(imitant le dessin d'un serpent avec son bras valide)<br />

Amiral<br />

Chez l'aspic ? Ca, elle ne va pas l'emporter au paradis la vipère ! Faites-moi voir<br />

cette mâchoire...<br />

(Il la manipule, cris de douleur de Gisèle et soupir de soulagement.)<br />

On ne comprend pas un mot de ce que vous dites !<br />

Canicule et Fric-Frac 61/82


(Seconde manipulation et nouveau cri.)<br />

Gisèle<br />

Aaah ! ! (M)erci A(m)iral ! Aaah ! (ç)a, (ç)a, cha va mieux !<br />

Ernest<br />

Qu'est ce que vous voulez parier qu'elle avait une petite idée de la réception qui vous<br />

attendait chez elle ?<br />

Hermine<br />

La fourbe ! C'est bien pour ça qu'elle ne voulait absolument pas y aller elle-même.<br />

Simone<br />

Mais ça ne l'a pas gênée de vous envoyer au casse-pipe à sa place ! Quelle ordure !<br />

Non mais quelle ordure !<br />

Ernest<br />

Quand je vous dis qu'il faut s'en débarrasser !<br />

Amiral<br />

Comptez sur moi ! Elle ne va pas s'incruster longtemps ! Je vais te la soigner, moi !<br />

Hermine<br />

Avez-vous, au moins, eu le temps de jeter un œil chez elle, Gisèle ?<br />

Oui, j'ai fait l'inventaire !<br />

Et j'ai aussi trouvé ça !<br />

Mazette ! Deux cents euros !<br />

Vous n'en avez trouvé qu'un seul ?<br />

Gisèle<br />

(Elle sort une liste de sa poche)<br />

(Elle sort un billet de 200 €uros)<br />

Simone<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

Oui, mais tenez vous bien, il était sous un tapis. J'ai bien failli ne pas le voir car seul<br />

un minuscule coin du billet était visible.<br />

Amiral<br />

Vous croyez que ça peut avoir un rapport avec le hold-up de la poste ?<br />

Ce n'est pas impossible !<br />

Gisèle<br />

Simone<br />

Canicule et Fric-Frac 62/82


Oui, mais ce n'est pas parce qu'on trouve un billet de deux cents euros chez<br />

quelqu'un qu'il a dévalisé la poste ! Je pourrais en avoir et je vous jure que je n'ai<br />

jamais...<br />

Hermine<br />

(lui coupant la parole)<br />

Et bien sûr, vous les laisseriez traîner n'importe où ?<br />

Ah ça non par exemple !<br />

Vous voyez bien que c'est louche !<br />

Simone<br />

Ernest<br />

Amiral<br />

D'autres indices, peut-être, ma Pervenche ?<br />

Gisèle<br />

En effet ! Tout était sens dessus-dessous, comme si on avait cherché quelque chose<br />

en particulier, mais rien de ce qui fait d'habitude le bonheur des cambrioleurs n'a l'air<br />

de manquer à l'appel.<br />

Téléviseur ?<br />

En place !<br />

Vidéo, CD, etc... ?<br />

Hermine<br />

Gisèle<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

En grande quantité ! Et du matériel dernier cri !<br />

Argenterie<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

J'ai recensé deux ménagères en argent massif, des livres rares magnifiquement<br />

reliés. Entre nous soit dit, j'avoue avoir dû lutter contre la tentation de faire main<br />

basse sur quelques volumes en profitant de l'occasion.<br />

Oh ! Marie Pervenche !<br />

Rassurez vous ! J'ai résisté !<br />

Amiral<br />

Gisèle<br />

Hermine<br />

Canicule et Fric-Frac 63/82


Dites donc, elle a l'air de péter dans la soie, la Prunelle ! C'est le moins que l'on<br />

puisse dire !<br />

Gisèle<br />

Ça, elle n'a pas l'air d'avoir des fins de mois difficiles ! J'ai aussi découvert une<br />

collection de timbres qui doit valoir son pesant de pépètes. D'autre part, aucun<br />

tableau n'a l'air de manquer aux murs, bien qu'il y en ait de fort beaux !<br />

Des bijoux ?<br />

Ah non ! Je n'ai pas trouvé de bijoux !<br />

C'est peut-être ça qu'ils ont volé !<br />

Amiral<br />

Gisèle<br />

Hermine<br />

Simone<br />

Qu'est ce que vous en dites, Marie Pervenche ? Ce serait pour des bijoux tout ce<br />

cirque ?<br />

Gisèle<br />

Allez savoir ! Mais ça n'a sûrement pas été leur seul but !<br />

Qu'est-ce qui vous fait penser ça ?<br />

Ernest<br />

Gisèle<br />

<strong>Le</strong>s phrases qu'ils ont prononcées quand ils me sont tombés sur le dos et m'ont<br />

rouée de coups, juste au moment où je m'apprêtais à sortir de la maison de Prunelle.<br />

Amiral<br />

Oh ! <strong>Le</strong>s monstres ! Et que vous ont-ils dit ?<br />

Gisèle<br />

« Qu'est ce que t'as fait du sac, la vieille ? Qu'est ce que t'as fait du sac ! Tu vas<br />

cracher le morceau de gré ou de force ! Alors parle ! »<br />

Hermine<br />

Mon Dieu Gisèle ! Ce que vous avez dû avoir peur !<br />

Simone<br />

Et comment avez vous fait pour leur échapper ?<br />

Gisèle<br />

La Providence s'en est mêlée mes amis, heureusement ! Figurez vous qu'au moment<br />

où ils me tapaient consciencieusement dessus, des sirènes de police ont retenti dans<br />

la rue et mes agresseurs ont alors décampé, vitesse grand V. Ils ont sans doute<br />

pensé que la police revenait sur les lieux. Je vous prie de croire que j'ai rassemblé<br />

mes abattis aussi vite que j'ai pu !<br />

Canicule et Fric-Frac 64/82


Simone<br />

Mais alors, l'aspic pourrait être l'auteur du hold-up ?<br />

Ernest<br />

La préposée a fait la description d'un homme corpulent, portant barbe et moustache !<br />

Pour la barbe et les moustaches, il aurait pu utiliser des postiches, mais prendre la<br />

Prunelle pour un homme corpulent, j'en doute fort !<br />

Amiral<br />

Mais si la préposée est complice, elle a tout intérêt à brouiller les pistes et décrire<br />

son supposé agresseur à l'opposé de ce qu'il est en réalité.<br />

Gisèle<br />

Si ce cambriolage chez Prunelle a quelque chose à voir avec le hold-up, c'est qu'il y<br />

a eu embrouilles quelque part puisqu'il y a eu représailles !<br />

Simone<br />

En bon serpent perfide qu'elle est, elle a dû vouloir les doubler !<br />

Hermine<br />

De toutes façons, il va bien falloir tirer ça au clair !<br />

Ernest<br />

Surtout si on veut empocher les cent mille euros !<br />

Amiral<br />

Mais tu n'empocheras rien du tout Titine ! Que fais tu de l'élévation de ton esprit ?<br />

Non, non, cet argent pourri, tu n'en verras pas la couleur ! Je te l'ai promis, pas ça !<br />

(Geste du pouce sur les dents.)<br />

Ernest<br />

(vexé)<br />

Alors là, ça m'est bien égal ! Je suis bien au-dessus de ça, voyez vous ! Et comblé<br />

de satisfactions spirituelles, je n'ai besoin de rien...<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Besoin de rien, envie de toi, envie de toi comme personne...<br />

Hermine, est-ce bien le moment ?<br />

Gisèle<br />

Simone<br />

Ce serait plutôt le moment de cuisiner l'aspic !<br />

(Illumination.)<br />

Au fait ! Il paraît que c'est très bon le serpent quand c'est bien cuisiné !<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 65/82


Si tu allais nous la chercher Titine ?<br />

Ernest<br />

Ah non alors, pas moi ! Elle va encore penser que je lui cours après !<br />

Bon, j'y vais<br />

Hermine<br />

(Elle amorce une sortie et revient aussitôt)<br />

Pas la peine ! La voilà justement qui vient par ici !<br />

SCENE 3<br />

Prunelle, Gisèle, Amiral, Simone, Hermine, Ernest<br />

Prunelle<br />

(entre, sa liste à la main)<br />

Bonjour tout le monde ! Oh Seigneur Madame Gisèle ! Qu'est-ce qui vous est arrivé?<br />

A votre avis ?<br />

Gisèle<br />

(sèchement)<br />

Amiral<br />

Vous n'en avez pas une petite idée par hasard ?<br />

Prunelle<br />

(hésitante)<br />

Ma foi non ! Comment voulez vous que je...<br />

Simone<br />

(hypocrite)<br />

C'est vrai ça Amiral, comment voulez vous que cette pauvre prune s'attende à<br />

retrouver Gisèle en marmelade en sortant de chez elle ?<br />

Ma foi !<br />

Vous feriez mieux de tout avouer<br />

N'avoue jamais, jamais, jamais...<br />

Prunelle<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Canicule et Fric-Frac 66/82


Mais vous avouer quoi, mon chou ?<br />

Prunelle<br />

(agacée)<br />

Ernest<br />

(exaspéré)<br />

Je ne suis pas votre chou ! Ni pomme, ni rave, ni de Bruxelles, ni à la crème et<br />

encore moins de chine !<br />

Prunelle<br />

Faudrait peut-être savoir ce que vous voulez, vous !<br />

Trêve de discussion.<br />

Gisèle<br />

(A Prunelle.)<br />

Vous avez dressé votre liste ? Bien ! Donnez moi ça !<br />

(De son côté, elle lui tend quelques feuillets,un par un en énumérant les diverses<br />

pièces concernées.)<br />

Voici ce que j'ai trouvé chez vous, pièce par pièce ! La cuisine, l'entrée, la chambre,<br />

etc... Vérifiez et signalez moi ce qui vous manque.<br />

Prunelle<br />

Merci ! C'est vraiment très gentil de votre part !<br />

Gisèle<br />

C'est surtout très stupide ! J'ai quand même été bien stupide d'aller me faire tabasser<br />

à votre place !<br />

Amiral<br />

(à Prunelle)<br />

Vous vous rendez compte de l'état où on a mis ma Pervenche, par votre faute ? Je<br />

ne sais pas ce qui me retient de vous envoyer mon poing dans la figure. Ça me<br />

soulagerait !<br />

Simone<br />

Et moi aussi, par la même occasion ! Tiens, malgré la curiosité qui me dévore, je vais<br />

aller me faire un petit en-cas ! Ça me remontera le moral ! <strong>Le</strong>s faux-culs me<br />

dépriment !<br />

Ernest<br />

Je vous accompagne, Simone ! J'ai besoin de changer d'air !<br />

Oh ! Vous m'abandonnez, mon ch.. cher ?<br />

Prunelle<br />

(déçue)<br />

Ernest<br />

Canicule et Fric-Frac 67/82


Je vous laisse à votre conscience.<br />

(Il sort.)<br />

Hermine<br />

(se levant à son tour)<br />

A votre conscience ou à votre inconscience ! Vous nous raconterez Gisèle ?<br />

Bien entendu !<br />

(Elle sort.)<br />

Gisèle<br />

SCENE 4<br />

Amiral, Gisèle, Prunelle<br />

Amiral<br />

Bien ! Et maintenant si nous essayions d'y voir plus clair.<br />

C'est ça ! Comparons nos listes.<br />

Gisèle<br />

(Elles s'assoient toutes les deux, chacune vérifie sa liste tandis que l'amiral<br />

déambule.)<br />

Au fait, aviez vous des bijoux chez vous ?<br />

Amiral<br />

Prunelle<br />

(hautaine)<br />

Bien sur que non ! A part ceux que je porte sur moi, tous mes bijoux sont à ma<br />

banque, dans un coffre !<br />

Amiral<br />

(la singeant sans qu'elle s'en aperçoive)<br />

Tous mes bijoux sont à la banque, dans un coffre ! Alors, à première vue, ils ont volé<br />

quoi ?<br />

Gisèle<br />

Pour le moment, d'après votre liste, rien ne manque !<br />

Prunelle<br />

(affolée)<br />

Ah ! Mon sac Vuitton n'est plus dans ma chambre !<br />

Gisèle<br />

Par contre, il figure dans la liste de la salle de bain, vérifiez !<br />

Canicule et Fric-Frac 68/82


Ah oui ! J'ai eu peur !<br />

Je l'ai trouvé dans la baignoire !<br />

Ah bon !<br />

Pleine !<br />

Quoi, pleine ?<br />

La baignoire !<br />

Et mon Vuitton dedans ?<br />

Et votre Vuitton dedans !<br />

<strong>Le</strong>s vandales ! Mon Vuitton dans le bain !<br />

Prunelle<br />

(vérifiant)<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Amiral<br />

(à la salle)<br />

Bien fait ! Il y en a une autre que j'enverrais bien au bain, moi, et avec un parpaing<br />

au cou encore !<br />

(Mielleux à Prunelle.)<br />

Et à part le Vuitton, quelque chose d'autre ?<br />

Apparemment, tout à l'air d'être là.<br />

Prunelle<br />

Amiral<br />

(perfide)<br />

Mais si tout est là, que pouvaient-ils bien chercher alors ?<br />

Ça, on se le demande !<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

(sortant le billet de 200 euros)<br />

Ce ne serait pas les petits frères de ce billet, par hasard ?<br />

Canicule et Fric-Frac 69/82


Prunelle<br />

(bafouillant)<br />

Oh ! Ça ! Et donc... pourquoi donc... alors là... pourquoi donc... ?<br />

Amiral<br />

Parce qu'il se trouvait sous votre tapis figurez-vous !<br />

Gisèle<br />

Et qu'en me tabassant à qui mieux mieux, vos voyous n'arrêtaient pas de répéter «<br />

Ou qu't'as mis l'sac la vieille ? Ou qu't'as mis l'sac ? »<br />

Amiral<br />

Vous feriez mieux de vous mettre à table si vous ne voulez pas vous retrouver au<br />

commissariat de police, soupçonnée du hold-up de la poste, entre les pattes du<br />

Commissaire <strong>Le</strong>pic.<br />

Gisèle<br />

Qui n'a pas la réputation d'être un tendre, même avec les dames, et qui saura bien<br />

vous faire cracher le morceau !<br />

Prunelle<br />

Oh Mon Dieu ! Non, pas la police ! Pas ça !<br />

Vous avez le choix ! C'est <strong>Le</strong>pic ou nous !<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Bon, c'est entendu ! Mais je préfère m'expliquer seule à seule avec Gisèle et pas ici<br />

où tout le monde peut nous entendre. Allons dans ma chambre, nous serons plus<br />

tranquilles.<br />

Comme vous voudrez, allons-y !<br />

Gisèle<br />

(Elles sortent.)<br />

SCENE 5<br />

Amiral, Prunelle<br />

Amiral<br />

Bien, puisque je suis de trop, profitons en pour potasser un peu mon rôle !<br />

(Il sort son livret de sa poche et le feuillette.)<br />

Canicule et Fric-Frac 70/82


Quand je pense que l'aspic a pris pour elle les déclarations du rôle de Titine ! Elle est<br />

bien bonne, celle-là ! Et il fallait que ça tombe sur lui ! C'est d'un cocasse ! Ah,<br />

j'aurais bien voulu assister à la scène ! Ça devait valoir son pesant d'or !<br />

Bon, revenons à nos moutons. J'ai intérêt à m'accrocher aux branches moi, parce<br />

que j'ai un rôle difficile à tenir. J'en étais rendu à l'<strong>Acte</strong> II. Voyons voir ce qui m'est<br />

réservé de beau. De quoi, de quoi ? Il ne croit quand même pas que je vais faire ça !<br />

Déjà, envoyer des baffes sur la trompe de Jumbo, ce n'est pas de la tarte,<br />

(Précieux)<br />

si je puis m'exprimer ainsi, mais là, ça dépasse mes capacités ! Je ne m'en sortirai<br />

jamais ! Et en plus, je déteste ce truc ! <strong>Le</strong> texte, ça peut encore aller, ça frise la<br />

débilité mentale, mais bon, ça pourra quand même le faire.<br />

(Lisant.)<br />

Mon tendre amour, rien ne saurait m'émotionner<br />

Comme une larme de tes grands yeux langoureux<br />

Comme le doux sourire de tes lèvres gourmandes<br />

O mon aimée, rien ne saurait mieux me charmer<br />

Que tes si jolis seins, comme oiseaux duveteux<br />

Blottis dans mes deux mains, dansant la sarabande.<br />

On a déjà pas l'air malin en débitant de telles fadaises, mais, tenons nous bien, il faut<br />

le faire en rapant !<br />

En râpant des carottes, ce serait encore faisable, mais à la façon d'un groupe style<br />

«Nique ta mère» alors là ! C'est pas gagné ! Ça va être coton ! Je vais avoir l'air d'un<br />

grand corps malade ! Voyons voir.<br />

(Il s'essaie à déclamer et danser sur un rythme rap, puis au bout d'un moment, il<br />

s'aperçoit que Prunelle revient.)<br />

V'la l'aspic qui revient ! Profitons-en !<br />

(Prunelle entre derrière l'amiral tourné vers la scène tout en lorgnant de biais sur<br />

Prunelle.)<br />

Amiral<br />

Ce que je vais vous confier là, je ne peux pas vous le dire en face. Je sais que ça va<br />

vous surprendre, mais...<br />

Mon tendre amour, rien ne saurait m'émotionner<br />

Comme une larme de tes grands yeux langoureux<br />

Comme le doux sourire de tes lèvres gourmandes<br />

O mon aimée, rien ne saurait mieux me charmer<br />

Que tes si jolis seins, comme oiseaux duveteux<br />

Blottis dans mes deux mains, dansant la sarabande.<br />

Prunelle<br />

(emoustillée)<br />

Canicule et Fric-Frac 71/82


Mon Dieu ! Lui aussi ! Je ne pensais pas faire encore tant d'effet !<br />

(Elle se rapproche émue de l'amiral qui la surveille d'un œil, et quand il voit qu'elle<br />

est à portée de main.)<br />

C’est ébouriffant !<br />

Amiral<br />

(à la salle)<br />

Je m’en vais te l’ébouriffer moi ! Et maintenant répétons la tarte !<br />

(Il la gifle.)<br />

Prunelle<br />

Aie ! Mais qu'est-ce qui vous prend ? Vous êtes malade !<br />

Amiral<br />

Oh ! Vous étiez là ! Mille pardons ! Si j'avais su !<br />

Prunelle<br />

Parce que vous ne saviez pas que j'étais là peut-être ?<br />

Amiral<br />

Mais non, bien sûr ! Je répétais mon rôle, me croyant seul et paf !<br />

Non ! Vous répétiez un rôle ?<br />

Prunelle<br />

(Elle se frotte la joue.)<br />

Amiral<br />

Elle était bien envoyée, hein ? Cette fois, je crois que je la tiens bien !<br />

Prunelle<br />

Et il vous faut des félicitions en plus ? Et puis quoi encore ?<br />

Amiral<br />

Alors, ça y est, vous vous êtes confessée ? Gisèle vous a donné l'absolution ou vous<br />

devrez faire un pèlerinage au commissariat de police, pieds nus, la tête couverte de<br />

cendres et en vous flagellant pour votre pénitence ?<br />

Prunelle<br />

Pour le moment, Gisèle est au téléphone et raconte tout à l'inspecteur Couturier.<br />

Ah, ah ! Vous êtes mouillée alors ?<br />

Disons que je suis humectée !<br />

Amiral<br />

Prunelle<br />

Canicule et Fric-Frac 72/82


SCENE 6<br />

Amiral, Prunelle, Gisèle, Hermine, Ernest, Simone<br />

Gisèle entre, se frottant les mains de satisfaction<br />

Amiral<br />

Alors, ma Pervenche, vous avez démasqué le cerveau du hold-up ?<br />

Gisèle<br />

Pas si vite, pas si vite ! Avant de vous répondre, j'aimerais bien que nos amis soient<br />

tous là, ça m'évitera d'avoir à me répéter.<br />

Bien entendu ! Je vais les rassembler.<br />

Tout le monde sur le pont !<br />

Amiral<br />

(Il sort en criant.)<br />

Prunelle<br />

Vous croyez que je vais être inquiétée Gisèle ? Qu'on va me juger, me mettre en<br />

prison ?<br />

Gisèle<br />

Ça, je ne suis pas juge, mais j'avoue qu'une peine de prison, même avec sursis, ne<br />

serait pas pour me déplaire. Mon passage à tabac me reste sur l'estomac, voyez<br />

vous ! Car osez dire que vous ne saviez pas ce qui m'attendait en me rendant chez<br />

vous ?<br />

Prunelle<br />

Sincèrement, si je suis venue me réfugier ici, c'est parce que je craignais quelque<br />

chose dans le genre.<br />

Ah ! Vous l'avouez !<br />

Gisèle<br />

Prunelle<br />

Mais j'espérais bien qu'il ne vous arrive aucun mal. De plus, j'avais cru comprendre<br />

que <strong>Le</strong>pic allait vous accompagner.<br />

Gisèle<br />

Il était trop occupé avec son hold-up sur les bras pour se déplacer pour ce qu'il<br />

prenait pour un banal cambriolage. S'il avait su !<br />

(Des coulisses, on entend que les autres arrivent ainsi que le bruit d'une<br />

conversation)<br />

Elle a avoué ? J'ai hâte de savoir ! Dépêchons nous, poussez pas ! etc ...<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 73/82


(entrant avec les autres à sa suite)<br />

Et voilà, tout l'équipage est là, les écoutilles<br />

(Il montre ses oreilles.)<br />

grandes ouvertes. Racontez nous tout ça par le menu.<br />

Oui, oui, par le menu !<br />

<strong>Le</strong>s trois autres<br />

Gisèle<br />

Par le menu, je ne peux pas, n'en connaissant moi-même que les grandes lignes.<br />

Alors, tout commence pour Prunelle la nuit du (date à choisir.) où, vers une heure du<br />

matin, elle se réveille en pensant qu'elle a oublié de sortir sa poubelle pour le<br />

ramassage du lendemain.<br />

Prunelle<br />

Je me lève donc et je sors dans la rue avec mon conteneur quand j'aperçois devant<br />

la poste...<br />

Gisèle<br />

Eh oui ! La poste est aussi dans la rue Condorcet !<br />

Alors, qu'est che que vous aperchevez ?<br />

Simone<br />

(mâchouillant un bonbon)<br />

Prunelle<br />

Une grosse voiture dont le coffre est ouvert et un homme qui est en train d'y<br />

enfourner des sacs.<br />

Gisèle<br />

Au bruit que produit Prunelle avec sa poubelle, l'homme se retourne, se précipite<br />

pour enfourner les derniers sacs à terre, ferme le coffre et s'engouffre dans la voiture,<br />

côté passager, pendant que celle-ci démarre sur les chapeaux de roue.<br />

Prunelle<br />

Pas assez vite cependant pour que cela m'empêche de mémoriser le numéro<br />

d'immatriculation mais trop vite pour avoir pensé au sac qui était resté posé sur le toit<br />

et qui est dégringolé aux premiers tours de roue. Sac que je me suis empressée<br />

d'aller récupérer. Rentrée à la maison, j'ouvre ce fameux sac !<br />

Et là !<br />

Amiral<br />

(Se tapant dans les mains)<br />

Dans le mille ! C'est bourré de billets de banque !<br />

Ça alors !<br />

Ernest<br />

Prunelle<br />

Canicule et Fric-Frac 74/82


Eh oui !<br />

Eh bien dites donc, quelle aventure !<br />

Hermine<br />

Gisèle<br />

Prunelle, consciente que tout cela est louche note tout de suite le numéro<br />

d'immatriculation du véhicule.<br />

Prunelle<br />

Ah bien oui, tout de suite ! Je craignais qu'il ne me sorte de la tête, vous comprenez?<br />

Et puis je me suis mise à gamberger. Je me suis dit que c'étaient sûrement des<br />

gangsters, qu'ils m'avaient vue sortir de la maison, qu'ils allaient sans doute revenir<br />

chercher le sac perdu. Alors, j'ai tout éteint et cachée derrière les rideaux de la<br />

fenêtre du rez-de-chaussée, j'ai attendu en scrutant la rue.<br />

Et ils chont repachés ?<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

Exactement ! Tout doucement, ils se sont arrêtés devant la maison, ont marché un<br />

peu dans la rue à la recherche du sac, pendant que Prunelle se concentrait sur leur<br />

voiture : marque, couleur, etc...<br />

Amiral<br />

Vous n'avez pas manqué de sang froid, dites donc !<br />

Normal pour un aspic !<br />

Ernest<br />

Prunelle<br />

Qu'est-ce qu'il veut dire avec son aspic ? J'ai pourtant bien failli en manquer, de sang<br />

froid, quand l'un d'eux est venu jusqu'à ma porte et que je l'entendais essayer d'en<br />

manœuvrer la poignée. J'ai bien cru m'évanouir !<br />

Simone<br />

Moi, à cha plache, ch'est chûr, che m'évanouichais !<br />

Prunelle<br />

Vous comprenez donc pourquoi, dès le lendemain matin, je rappliquais aux<br />

Charmettes avec armes et bagages.<br />

Hermine<br />

Et avec des milliers d'euros dans un sac à roulettes dont vous ne vouliez vous<br />

séparer à aucun prix.<br />

Ernest<br />

Quitte à péter les varices de tout le monde !<br />

Gisèle<br />

Canicule et Fric-Frac 75/82


Mais il ne vous est pas venu à l'esprit d'aller raconter tout ça à la police et de rendre<br />

l'argent ?<br />

Prunelle<br />

Si, bien sûr ! Mais en réfléchissant bien, je me suis dit que les voleurs seraient bien<br />

malins s'ils pensaient à venir me dénicher aux Charmettes, qu'ils ne se feraient peut<br />

être jamais prendre, auquel cas, ils ne parleraient jamais de moi à la police et que je<br />

pourrais alors garder mon petit magot ! Je n'avais plus qu'à attendre et voir venir !<br />

Amiral<br />

Bien raisonné ! Mais c'était compter sans Gisèle !<br />

Simone<br />

Alors, la récompense des cent mille euros, on l'aura ou on l'aura pas ?<br />

Gisèle<br />

Un peu de patience, Simone ! Avec les renseignements fournis par Prunelle, le<br />

numéro d'immatriculation de la voiture surtout...<br />

Hermine<br />

S'il s'agit d'une voiture volée, on l'a dans le baba !<br />

Gisèle<br />

C'est hélas une éventualité ! Enfin, l'inspecteur Couturier s'occupe de retrouver ce joli<br />

monde et les euros volés.<br />

S'ils sont toujours en leur possession !<br />

Ernest<br />

Simone<br />

On pourrait faire main bache chur le chac à roulettes ! Cha nous dédommagerait !<br />

Vous n'y pensez pas Simone !<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

De toutes façons, ces billets-là aussi, la police va vouloir les récupérer, non ?<br />

Gisèle<br />

C'est certain ! Et Prunelle devra faire une déposition et si on met la main sur les<br />

voleurs, elle devra les identifier, ses ennuis ne font que commencer !<br />

Ah ! Aurait-on déjà des nouvelles ?<br />

Allo ? Oui, c'est moi !<br />

(<strong>Le</strong> portable de Gisèle sonne.)<br />

(Pendant qu'elle écoute, les autres cherchent à savoir ce qui se dit et la<br />

questionnent. Elle répond par des signes et des chut !)<br />

C'est Couturier ?<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 76/82


Eh bien dites donc !<br />

C’est Couturier oui ou non ?<br />

Gisèle<br />

(écoutant)<br />

Amiral<br />

Gisèle<br />

(acquiesce de la tête et considérant ses blessures)<br />

Sans dégât, sans dégât, c’est vous qui le dites !…...Non !…..Vous allez prendre du<br />

galon dites donc !<br />

Il les a eus ?<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

C’est Coco qui va être surprise !…...Oui !…...D’accord !<br />

Et les euros ?<br />

La récompenche, on l'a ? on l'a pas ?<br />

Et pour la petite récompense ?<br />

On l'aura quand, si on l'a ?<br />

Mais ce sera parfait !<br />

Ernest<br />

(aux autres)<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

Hermine<br />

Gisèle<br />

(Ecoutant.)<br />

……..Oui, j’imagine que vous avez du pain sur la planche !…...Oui…...<br />

... Merci de m'avoir prévenue... Oui !... A très bientôt !... C'est ça, au revoir ! ! ! !<br />

Alors Gisèle !<br />

Ne nous faites pas languir !<br />

Racontez-nous !<br />

(Elle regarde les autres triomphante.)<br />

Amiral<br />

Prunelle<br />

Ernest<br />

Hermine<br />

Canicule et Fric-Frac 77/82


Je meurs d'impatience !<br />

Moi auchi, moi auchi !<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

Eh bien les amis, tout est rentré dans l'ordre ! <strong>Le</strong>s cambrioleurs sont arrêtés et les<br />

euros retrouvés !<br />

Il a été efficace le petit Couturier.<br />

Prunelle<br />

Gisèle<br />

Grâce à vous qui avez relevé le numéro de la voiture, car d'après l'inspecteur, on a<br />

affaire à des malfaiteurs occasionnels. La préposée s'est vantée dans son entourage<br />

des sommes considérables qu'elle voyait s'entasser à la poste. C'est arrivé aux<br />

oreilles de nos branquignols qui ont vu là le moyen de s'enrichir rapidement mais qui,<br />

heureusement pour nous, n'ont pas le cerveau alambiqué de criminels endurcis. Ils<br />

ont fait le coup avec leur propre voiture et entassé leur butin dans leur garage. De<br />

vrais enfants de chœur !<br />

Hermine<br />

Ça a dû être du gâteau pour Couturier de les coffrer !<br />

Alors, la récompense ?<br />

Simone<br />

Gisèle<br />

Nous sera remise dès demain matin par <strong>Le</strong>pic au commissariat !<br />

Hourra ! Vive Marie Pervenche !<br />

Tous<br />

Hermine<br />

(Chantant)<br />

Elle est vraiment, elle est vraiment, elle est vraiment phénoménale la la la la la la la...<br />

Ernest<br />

Ça c'est vrai ! Vous êtes un sacré phénomène Gisèle !<br />

Prunelle<br />

Malheureusement pour moi qui grâce à vous vais devoir rendre des comptes.<br />

Gisèle<br />

Je ne vous l'ai pas dit, mais j'ai arrangé le coup avec Couturier. Je lui ai un peu<br />

caché votre intention de garder le sac pour vous. Et puis, c'est quand même vous qui<br />

avez fourni l'indice qui a permis cet heureux dénouement. Non seulement vous ne<br />

serez pas inquiétée mais je pense même que vous aurez droit aux félicitations !<br />

Prunelle<br />

Canicule et Fric-Frac 78/82


Ça, c'est vraiment chic de votre part Gisèle !<br />

Amiral<br />

<strong>Le</strong>s félicitations tant qu'on voudra mais en ce qui concerne les cent mille euros...<br />

Je vous laisse ma part et je déménage !<br />

Vous vous installez aux Charmettes ?<br />

Prunelle<br />

Ernest<br />

(inquiet)<br />

Prunelle<br />

Non ! Je file sur la Côte d'Azur rejoindre ma fille à Menton.<br />

Gisèle<br />

(riant)<br />

A Menton ? Ça tombe bien, vous pourrez racheter un Vuitton de contrefaçon à<br />

Vintimille !<br />

Prunelle<br />

Pour avoir affaire à la police ? Merci bien ! Je suis vaccinée ! Bien, je vous laisse<br />

entre amis. Il faut que j’aille téléphoner à ma fille pour organiser mon départ.<br />

(Elle sort.)<br />

SCENE 7<br />

Hermine, Ernest, Simone, Amiral, Gisèle, Animateur<br />

Voilà qui se termine au mieux.<br />

Hermine<br />

Ernest<br />

(satisfait)<br />

Ça oui, par exemple ! L'animal à sang froid quitte le navire !<br />

Simone<br />

N'empêche, j'aurais bien aimé la calotter moi !<br />

C'est déjà fait ! Je m'en suis chargé !<br />

Non ?<br />

Amiral<br />

<strong>Le</strong>s autres<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 79/82


Si !<br />

(Singeant Prunelle.)<br />

Et c’était assez ébouriffant ! Et maintenant, si nous décidions de l'usage des cent<br />

mille euros !<br />

J'avais suggéré une super piscine.<br />

Moi, ça me plairait bien !<br />

Gisèle<br />

Hermine<br />

Simone<br />

A moi aussi ! Il paraît que dans l'eau, le poids du corps s'allège !<br />

Ernest<br />

Et s'il reste de l'argent, on pourrait faire installer une climatisation digne de ce nom !<br />

Amiral<br />

Ce qui nous permettrait d'envisager sereinement toutes les canicules à venir.<br />

Gisèle<br />

Alors, c'est décidé, va pour la super piscine !<br />

Amiral<br />

La seule chose qui me chagrine, c'est que nous n'aurons plus l'occasion de mariner<br />

dans la même bassine. Je ne vous demanderais plus de m'accorder vos deux pieds !<br />

Ernest<br />

Mais pour l'aider à descendre dans l'eau rien ne vous empêchera de lui demander sa<br />

main !<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main, ne gravons pas nos noms au bas d'un<br />

parchemin ! (Brassens)<br />

Simone<br />

A vos âges, c'est sûr, personne ne vous demande de convoler en bonne et due<br />

forme. Mais personne non plus ne vous empêche de réunir tous vos amis autour d'un<br />

bon gueuleton pour célébrer...<br />

Ernest<br />

Célébrer un amour bien réel par des noces virtuelles, en quelque sorte.<br />

Voilà !<br />

Simone<br />

(acquiescant)<br />

Amiral<br />

Canicule et Fric-Frac 80/82


Qu'en dit ma Pervenche ?<br />

(emu)<br />

Gisèle<br />

Ma foi, c'est bien tentant et j'accepte avec bonheur, Amiral de mon cœur !<br />

Cou cou rou cou cou !<br />

Hermine<br />

(chantant)<br />

Amiral<br />

(se mettant à raper et à danser, une casquette sur la tête, visière sur l'arrière)<br />

<strong>Le</strong>s amis, les amis, je suis fou de bonheur !<br />

Elle a, elle a dit oui, la Pervenche de mon cœur !<br />

(Il bisse et Ernest se joint à lui, disant «il» là ou l'amiral dit «je» et «son» là ou il<br />

«mon»)<br />

Amiral<br />

(même jeu)<br />

<strong>Le</strong>s amis, les amis, c'est le plus beau des jours !<br />

Car ma Marie Pervenche répond à mon Amour !<br />

(Il bisse, même reprise avec Ernest qui dira «son» quand l'amiral dira «mon».<br />

Simone et Hermine, de leur côté essaient de se trémousser comme elles le peuvent)<br />

Animateur<br />

(entrant)<br />

Ah ! Je vois qu'on s'entraîne pour la représentation ! Pas mal, pas mal !<br />

Amiral<br />

(rapant toujours)<br />

La représentation, il n'en est plus question !<br />

Monsieur l'animateur, vous n'avez plus d'acteurs !<br />

(Madame l’animatrice, vous n’avez plus d’actrices !<br />

Ça nous cassait les pieds d'avoir à répéter !<br />

(Il bisse - Ernest, même jeu l'accompagne.)<br />

Animateur<br />

(désespéré)<br />

Mais qu'est ce que vous voulez faire à la fin ?<br />

De l'aquagym !<br />

Tous<br />

Animateur<br />

Canicule et Fric-Frac 81/82


De l'aquagym !<br />

Et l'amour !<br />

(<strong>Le</strong>vant les bras au ciel en sortant)<br />

Amiral<br />

(Il recommence à raper et danser.)<br />

« <strong>Le</strong>s amis, les amis, je suis fou de bonheur !...<br />

Etc …»<br />

RIDEAU<br />

Canicule et Fric-Frac 82/82

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