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Marylène Eytier<br />
ment, à la bonne place, avec le bon rôle et le bon sens.” Alchimie<br />
aussi que celle d’un groupe qui garde les pieds sur terre et les chevilles<br />
dans la bonne paire d’Adidas, comme le prouve 20Syl : “Les<br />
gens s’imaginent que depuis que l’on est en licence avec Universal<br />
on est rentré dans un système avec des gros studios, des gros producteurs<br />
derrière et que c’est devenu une grosse machine, alors<br />
que finalement, depuis la première cas-<br />
sette, les méthodes de travail et le côté artisanal<br />
n’ont pas vraiment changé. Avec<br />
plus de moyens peut-être, plus de machines,<br />
mais finalement, on ne crache pas<br />
plus haut que notre bouche ! En terme de<br />
production, on fait avec les moyens que<br />
l’on a, de façon artisanale. Chacun vient<br />
apporter sa petite pincée, et moi j’organise.<br />
Je joue un peu le chef d’orchestre qui vient canaliser les énergies,<br />
le point de ralliement et de ramification où tous les musiciens<br />
viennent se retrouver. On avance couche par couche, tranquillement,<br />
sans pression, sans horaire de studio à respecter… Nous<br />
sommes vraiment libres en “fonctionnement home studio”. C’est<br />
comme ça que l’on arrive à avoir un univers très personnel en<br />
contrôlant toute la partie artistique.”<br />
16 pièces, le dernier opus, évoque autant que les deux autres<br />
“l’existence, l’être, autant dans nos coups de gueule que dans nos<br />
moments de légèreté, ou alors un détail de la vie quotidienne, des<br />
questionnements sur la paternité. C’est un album de la trentaine,<br />
entre le jeune pour les vieux et le vieux pour les jeunes. Quel est<br />
mon rôle dans ce monde, dans mon entourage ? Dans ce métier<br />
très ludique, on a du mal à devenir adulte, et la vie d’artiste c’est<br />
une vie un peu égoïste.” Mais un concert d’<strong>Hocus</strong> <strong>Pocus</strong> fera mentir<br />
son leader ; généreux à la ville, ils le sont plus encore à la scène<br />
et là où le succès peut mettre les ego en surchauffe, le collectif<br />
absorbe le choc : “Le défi à l’heure actuelle, c’est de récréer, dans<br />
des salles de 800 ou 1000 places, une ambiance intimiste où tu<br />
as juste à descendre de la scène pour être dans la salle, où chaque<br />
personne se sent privilégiée de partager ce moment. Oublier la<br />
mise en scène, le lieu pour entrer dans l’humain et se retrouver<br />
en contact direct avec les gens. On veut recréer cette ambiance de<br />
club dans un Zénith. C’est un défi énorme, j’ai vu tellement de<br />
“Dans ce métier<br />
très ludique,<br />
on a du mal à<br />
devenir adulte.”<br />
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concerts dans des grandes salles où j’avais l’impression de regarder<br />
la télé ! Je n’ai vraiment pas envie de ça.” David, le guitariste,<br />
ajoute : “Beaucoup d’artistes disent juste “merci” à la fin, même<br />
pas “bonjour”… Pourtant le public, c’est juste ce qu’il attend : une<br />
communication. On croise des gens qui nous ont déjà vus cinq ou<br />
six fois et qui ne sont toujours pas blasés ou lassés. J’aime à dire<br />
que le public c’est notre dixième musi-<br />
cien, il y a une place qui lui est réservée<br />
dans chaque morceau. Que ce soit dans<br />
l’échange et la participation, mais aussi<br />
dans l’écoute et l’atmosphère que l’on<br />
va créer. Et c’est pour ça que les gens<br />
viennent s’éclater ; quand ils viennent à<br />
un concert d’<strong>Hocus</strong>, ils se sentent acteur<br />
et pas seulement spectateur.” Et 20Syl<br />
de conclure : “There is no <strong>Hocus</strong> <strong>Pocus</strong>, il n’y a pas de trucage !<br />
Ce qui résume assez bien l’esprit du groupe sur scène : c’est du<br />
live, du spectacle vivant, quelque chose que l’on ne pourra jamais<br />
télécharger !”<br />
Si on les classe facilement dans le rap en studio, c’est plutôt vers<br />
un jazz-rap qu’ils tendent sur scène : “On essaie de digérer toutes<br />
nos influences et de les retransmettre en énergie scénique ; le funk<br />
avec des clins d’œil aux JB’s, Maceo Parker, le côté jazz avec le<br />
choix des sonorités, des accords. La place du jazz est dans l’improvisation<br />
en live, mais aussi dans les couleurs, par un certains<br />
choix d’harmonies, de rythmes ou d’accords. On se réserve toujours<br />
des places d’improvisation, notamment les cuivres.” Ce que<br />
confirme David : “On essaie de garder l’essentiel sur scène et surtout<br />
le côté ludique, afin que les gens trouvent leur place. Le studio<br />
décrit un temps présent, un instant précis, alors que le live crée<br />
une émotion. On passe de quelque chose de très électronique sur<br />
l’album à des versions parfois ultra-acoustiques qui donnent une<br />
nouvelle émotion en live, comme des parties B qui vont faire le<br />
petit frisson supplémentaire.” Rap donc, ou plutôt hip-hop, et la<br />
différence est d’importance. 20Syl explique : “Le rap est l’une des<br />
disciplines du hip-hop, comme le graffiti, la danse, le human beatbox,<br />
etc. Je fais du rap, je mets du chant dans mon rap, je mets de<br />
la chanson française dans mon rap et aussi je mets du rap dans la<br />
chanson française. On a aussi, dans <strong>Hocus</strong> <strong>Pocus</strong>, d’autres ingré-