l'île pour pdf..pub - la-bibliothèque Saint-Herblain

J. F. : À partir d’une population initiale – le groupe fondateur – des processus de dérive génétique et de
sélection de certains caractères vont aboutir à la formation de nouvelles espèces. L’adaptation aux
conditions particulières rencontrées sur l’île joue bien évidemment un rôle majeur. La raréfaction des
prédateurs et la limitation des ressources entrent aussi en ligne de compte pour expliquer des
particularités parfois étonnantes (chou géant, hippopotame nain, grillon aptère…).
Si des espèces nouvelles apparaissent, d’autres se raréfient et disparaissent : sur les îles le faible effectif
des espèces vivantes les rend d’autant plus vulnérables aux catastrophes climatiques telles que
sécheresses, ouragans, éruptions volcaniques…
Ainsi l’oiseau emblématique de l‘île Maurice, le célèbre dodo cher à Lewis Carroll plaisamment évoqué
dans Longue vie aux dodos de Dick King-Smith, a-t-il complètement disparu, il y a trois siècles.
L’Express du 5 janvier 2006 – sous le titre « On a retrouvé le dodo » – annonce la découverte d’un
gisement d’ossements vieux de deux à trois mille ans. Incapables de voler, ces Raphidae si faciles à
chasser furent progressivement exterminés au cours du XVIII e siècle comme le précise Le Grand Livre
des espèces disparues de Jean-Christophe Balouet et Eric Alibert. Naturellement ce n’est pas la seule
extinction d’espèce qu’on ait à déplorer : la liste est longue de l’oiseau-éléphant de Madagascar au loup
de Tasmanie en passant par le lapin-rat de Corse ou les moas de Nouvelle-Zélande.
Le livre de Catherine et Michel Orliac, Des dieux regardent les étoiles. Les derniers secrets de l’île de
Pâques, signale la disparition du Toromiro, un petit arbre dont le beau bois résistant fut utilisé, entre
autres, pour la confection des moai. Et parmi les Plantes en péril listées par Jean-Marie Pelt, force est de
constater que, sur les îles, les espèces disparaissent plus vite encore que sur les continents.
U.G. : Autre effet du confinement insulaire, le développement de certaines maladies susceptibles de
toucher végétaux, animaux ou êtres humains, peut atteindre des proportions inattendues : qu’on songe
seulement au chikungunya…
J. F. : Chez les hommes, l’isolement géographique contribue à créer des conditions de vie nouvelles :
enfermés dans un espace restreint loin du continent, les insulaires vont inventer un univers à eux, ces
particularismes locaux leur permettant d’affirmer leur différence et leur identité. Du fait de la petitesse de
la communauté, les relations sociales sont normalement plus denses et les liens entre individus plus forts,
du moins est-ce la vision du monde qui ressort de Grandeur des îles d’Odette Du Puigodeau, un recueil
d’articles sur les îles bretonnes où se dessine une société où chacun aurait trouvé sa place en somme.
L’Homme des îles de Tomas O’Crohan campe des silhouettes inoubliables, celles des habitants des îles
Blasket en Irlande. Grandeur et humilité de la condition humaine trouvent là leur illustration précise et
poignante dans un récit à la fois rude et tendre, plein de rires et de vie.