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Travail complet au format pdf - Gymnase Auguste Piccard

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La chanson jazz française Arn<strong>au</strong>d Nussb<strong>au</strong>mer 3M3<br />

Olivier Piguet 13.nov.2006<br />

Vincenzo Di Marco<br />

<strong>Gymnase</strong> <strong>Auguste</strong> <strong>Piccard</strong><br />

Au-delà du masque de Gainsbourg<br />

Chanter parfume crânement la nuit


Remerciements<br />

Sachant pertinemment que les remerciements ne sont lus uniquement par les personnes espé-<br />

rant retrouver leur nom dans une liste interminable, il est de mon devoir d’essayer d’être<br />

concis afin d’éviter à un maximum de personnes non concernées de lire cette page.<br />

Commençons par l’essentiel : merci à Serge Gainsbourg d’avoir été.<br />

Merci <strong>au</strong>x <strong>au</strong>teurs de mes sources qui, avant moi, ont été passionnés par le sujet.<br />

Je remercie également mes deux professeurs : messieurs Vincenzo Di Marco et Olivier Pi-<br />

guet, pour le suivi de ce travail, et l’intérêt qu’ils ont manifesté pour le sujet.<br />

Merci <strong>au</strong>ssi à Cl<strong>au</strong>dio Rugo, mon professeur de guitare, pour les cours d’harmonie qu’il me<br />

donne avec patience…<br />

Merci à mon frère Quentin, qui m’a prêté d’une part son ordinateur avec tous les risques que<br />

cela implique et d’<strong>au</strong>tre part, l’intégrale des disques de Gainsbourg.<br />

Merci à mes parents qui aiment la musique et sans qui je ne serais probablement pas né.<br />

Merci à ma tante Véronique de m’avoir prêté un be<strong>au</strong> documentaire sur Gainsbourg.<br />

Merci à Florian Sulliger et Mathias Rumo pour les séances de photocopies.<br />

Finalement, un grand merci <strong>au</strong> <strong>Gymnase</strong> <strong>Auguste</strong> <strong>Piccard</strong> qui offre un grand choix de sujets<br />

de travail et qui donne les moyens de les réaliser.


Table des matières<br />

I Introduction ………………………………………………………………………………….2<br />

II Les femmes « de » Gainsbourg…………....…….…………………………………………..3<br />

III De la peinture à la musique……...….………………………………………………………4<br />

IV Un amour pur……………….……….……………………………………………………...6<br />

V L’imperfection………………………………………………………………………………7<br />

VI Un Gainsbourg moqueur……………………………………………………………………9<br />

VII Le misogyne……….……………………………………………………………………..11<br />

VIII Le poète et le provocateur……………………………………………………………….12<br />

IX Conclusion………………………………………………………………………………...16<br />

X Sources…………….…….............…………………………………………………………17<br />

XI Annexes………………………...…………………………………………………………18<br />

1


I Introduction « Je suis l’homme à tête de chou »<br />

Il est l’homme à tête de chou ! Difficile de se faire aimer. Et pourtant… « Moitié légume,<br />

moitié mec ». Personnage étonnant, Gainsbourg était <strong>au</strong>ssi une personnalité complexe qui<br />

restera toujours une énigme pour ses admirateurs comme pour ses <strong>au</strong>diteurs. En public, il se<br />

jouait de tout, ne connaissait <strong>au</strong>cune limite. Ses textes, qu’ils portent sur l’amour, la politique,<br />

l’art, ont toujours eu quelque chose de dérangeant ou <strong>au</strong> moins de taquin. Où se trouvait la<br />

limite entre le réel et le jeu, la limite entre l’acteur et l’homme sensé, la limite entre le poète et<br />

le provocateur ? Serge Gainsbourg, chantre de la provocation !<br />

Dans cette présentation, nous 1 nous sommes concentrés sur la « période jazz » de son oeuvre<br />

en choisissant quatre chansons tirées de ses premiers albums. Le premier but de ce travail<br />

étant de comprendre, dans la mesure du possible, certains comportements de Gainsbourg par<br />

l’entremise de sa musique, nous avons choisi un corpus musical en fonction du style des<br />

chansons et du thème qu’elles évoquaient. Ainsi, Elaeudanla teïteïa (1963), La fille <strong>au</strong> rasoir<br />

(1963), En relisant ta lettre (1961) et, Ce mortel ennui (1962) ont été analysées dans l’ordre<br />

précité car, comme nous le verrons plus bas, cet ordre permet de voir une évolution du carac-<br />

tère de Serge Gainsbourg. 2<br />

Ce travail n’a évidemment pas la prétention d’être une étude systématique de la vie de Serge<br />

Gainsbourg. Nos affirmations sont soit des relations trouvées dans des livres cités dans la bi-<br />

bliographie, soit les interprétations ou hypothèses que nous laissent entrevoir les textes de<br />

l’<strong>au</strong>teur. Les deux premiers chapitres portent essentiellement sur la biographie de Gainsbourg,<br />

et ce afin de donner un sens <strong>au</strong>x études de textes qui les suivent. Quant <strong>au</strong> dernier chapitre, il<br />

a pour but de synthétiser les quatre analyses précédentes et nous conduira à la conclusion.<br />

La démarche qui suit nous permettra de vérifier si Gainsbourg était <strong>au</strong>ssi «aquoiboniste» qu’il<br />

le prétendait. La question est la suivante : le masque du cynisme ne pourrait-il cacher <strong>au</strong>tre<br />

chose qu’un visage blasé et moqueur ? Physiquement, moitié légume, moitié mec ; mais psy-<br />

chologiquement… ?<br />

1 La première personne du pluriel est utilisée dans ce travail car j’ai jugé que, ce que j’y disais n’était en fin de<br />

compte, que le fruit de mes lectures et non un travail accompli par ma personne, en son entier. C’est donc par<br />

honnêteté intellectuelle que nous utiliserons cette forme.<br />

2 Afin de rendre le travail plus facile et agréable à lire, les textes des quatre chansons figurent dans l’annexe du<br />

travail<br />

2


II Les femmes « de » Gainsbourg<br />

Comme tous les enfants, Gainsbourg eut comme premier contact féminin, le contact maternel.<br />

De grandes oreilles, braillant dans la petite cuisine d’un appartement misérable à Paris, il est<br />

né le 2 avril 1928. Autant dire qu’il vécut son adolescence durant la deuxième guerre et, étant<br />

juif, qu’il endura de nombreuses persécutions. Sa mère, comme le disait Gainsbourg lui<br />

même, était une sainte. Elle se décarcassait pour trouver des combines afin que tous ses en-<br />

fants mangent à leur faim. Cette énergie qu’elle déployait était le fruit de sa mélancolie, de sa<br />

tristesse. Selon Jane Birkin, qui fut l’épouse de Gainsbourg, ces deux éléments naissaient du<br />

fait que la famille Ginzburg était déracinée. Alors, pour trouver la force de survivre, ils<br />

avaient toujours un « surs<strong>au</strong>t de burlesque » 3 , un sens de la dérision que l’on sent reporté dans<br />

les chansons de Gainsbourg.<br />

La deuxième approche que Serge eut des femmes se déroula dans une académie de peinture<br />

où il rencontra une très belle femme. Cette dernière, probablement un modèle, le croisait ré-<br />

gulièrement. Le jeune apprenti en peinture n’en était pas encore <strong>au</strong> nu. Et son imagination lui<br />

permettait de croire en une femme parfaite, en un tout qui, contrairement <strong>au</strong>x hommes, se<br />

rapprochait de la perfection. Il f<strong>au</strong>t dire que jusque-là le futur Gainsbarre n’avait connu que<br />

deux modèles féminins, sa mère et ce mannequin, qui possédaient tous deux, à leur manière,<br />

quelque chose d’angélique, un aspect de la perfection. Grande fut sa déception lorsqu’un be<strong>au</strong><br />

jour, il aperçut d’entre les jambes d’un modèle un bout de serviette hygiénique. Cet incident<br />

provoqua chez lui une répulsion, qui pourtant donna de be<strong>au</strong>x fruits sous la forme de chan-<br />

sons.<br />

Gainsbourg décrit 4 , ou plutôt cite, de nombreux petites aventures avec des femmes <strong>au</strong> terme<br />

desquelles il ressent toujours une déception profonde. Tout doucement le petit Lucien sentait<br />

en lui poindre une inévitable misogynie bientôt amplifiée par un chagrin d’amour : Serge ra-<br />

conte 5 qu’une fois, alors qu’il avait rencontré une arrière-petite-fille de Tolstoï, il l’emmena<br />

dans sa chambre, et lorsqu’elle fut nue, elle prit peur. Gainsbourg explique qu’il respecta son<br />

appréhension. Il devait la revoir le lendemain, elle n’est pas revenue. Mais quinze ans plus<br />

3 Gilles VERLANT, Gainsbourg ou le garçon s<strong>au</strong>vage, Paris, Albin Michel, 1985, p. 16<br />

4 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p.88<br />

5 Yves SALGUES, Gainsbourg ou la provocation permanente, éditions Jean-Cl<strong>au</strong>de Lattès, 1989, pp. 141 à 145<br />

3


tard ils se revoient, et Gainsbourg explique : « …Je n’étais plus Lucien, j’étais Gainsbourg et<br />

cette fois c’est elle qui voulait se faire baiser, mais je l’ai envoyée chier… ».<br />

Ainsi Serge Gainsbourg avait grandi, il n’était plus un petit morveux complexé par ses gran-<br />

des oreilles. Il était laid, mais il utilisait sa laideur ; ce qui <strong>au</strong>rait passé pour de la misogynie,<br />

sa dureté envers les femmes, n’avait cessé de croître. Il expliquait cela de la façon sui-<br />

vante : « À cette époque je n’étais pas misogyne, j’étais pudique (…) Comment voulez-vous<br />

qu’avec ma gueule je sois tendre ? » 6 . Durant sa vie, il <strong>au</strong>ra plusieurs femmes. Parfois céliba-<br />

taire, parfois polygame, « ses » femmes vont lui inspirer l’amour. Chacun de ses albums, qu’il<br />

soit jazz, pop, rock, reggae ou funk comportera <strong>au</strong> minimum quelques chansons ayant pour<br />

titre le nom d’une femme. Il chantera le bel amour dans ses grands moments de dépression et<br />

les ruptures quand tout ira bien. Mais jamais, ô grand jamais, il ne dira « je t’aime » sans ar-<br />

rière-pensées ou sous-entendus à une femme. Il alignera par exemple ces deux mots pour<br />

dire : « Je dois avoir perdu la raison, je t’aime Manon ». Ce « Manon » que l’on peut inter-<br />

préter comme un « mais non ». (Cette chanson fut un hommage <strong>au</strong> livre de l’abbé Prévost.)<br />

Son aversion des femmes est née d’une désillusion. Il voulait croire en une femme parfaite<br />

(et, en cela, il pourrait très bien être comparé à Solal des Solal dans Belle du Seigneur), qui<br />

n’existe pas. Celle qui s’approcha le plus de la perfection fut Jane Birkin qu’il dit avoir peinte<br />

avant même de l’avoir connue. « C’était un idéal pictural » 7<br />

III De la peinture à la musique<br />

La musique fut, dans un premier temps, un gagne-pain pour Serge Gainsbourg. Tout comme<br />

son père, il avait eu comme première ambition de devenir peintre. Il avait be<strong>au</strong>coup de talent<br />

et ses professeurs croyaient en lui. Mais il savait pertinemment que, dans le métier, on<br />

« crevait la dalle » et que pour vivre, il lui f<strong>au</strong>drait <strong>au</strong>tre chose. Joseph Ginzburg qui était un<br />

bon pianiste de boîtes avait prévu le coup et avait payé à son fils des cours de guitare. Le voilà<br />

donc lancé dans la musique. Mais quinze années de sa vie avaient été, ou allaient être consa-<br />

crées à la peinture. Autant dire que cela lui laisserait des traces. Quand il parlait de la musi-<br />

que, Serge la définissait comme étant « un art mineur destiné <strong>au</strong>x mineures » 8 . Un art mineur<br />

6 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p. 91<br />

7 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p. 18<br />

8 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p. 46<br />

4


par opposition bien sûr à la peinture. Mineur car, selon lui, tout art pouvant être abordé sans<br />

connaissances préalables (nous vous réservons le droit d’être d’accord ou pas avec cela) ne<br />

peut être considéré que comme mineur. Mais ceci n’avait rien d’insultant pour qui que ce fût<br />

si ce n’est pour Gainsbourg lui-même.<br />

Le plus surprenant dans cette période, est que les rares toiles qui en restent, celle qui n’ont pas<br />

été détruites par Gainsbourg, seraient peintes d’une manière délicate et nous montreraient un<br />

peintre impressionniste <strong>au</strong>x couleurs tendres. Certains disent que c’est une contradiction totale<br />

avec son art, dit mineur, qui est souvent violent, cynique, démesuré, agressif. Nous ne voyons<br />

pas cela ainsi. Ce contraste entre ces deux manières de s’exprimer, ces deux arts, viendrait<br />

d’une frustration. Cette dernière évidemment induite par le fait que Gainsbourg fut forcé à<br />

faire de la musique. Un art majeur plein de vie, de joie, de tendresse ; un art mineur triste, dur<br />

et cynique. Deux aspects complémentaires grâce <strong>au</strong>xquels on comprend que ce peintre-<br />

musicien qu’était Gainsbourg n’était pas tout noir comme ses chansons le laissent entendre.<br />

Serge Gainsbourg raconte que ses premiers souvenirs furent <strong>au</strong>ditifs. Son père, comme nous<br />

l’avons dit précédemment, était un pianiste de boîte. Il était plus précisément ce qu’on appelle<br />

un pianiste de métier et était capable de jouer dans tous les styles. Il faisait partie d’une race<br />

de musiciens qui n’existe plus de nos jours. Son aisance, on la retrouve chez son fils, dans son<br />

style. En effet, du jazz <strong>au</strong> reggae en passant par le rock, on peut dire que Gainsbourg est un<br />

des seuls <strong>au</strong>teurs qui ait essayé et joué <strong>au</strong>tant de styles. Ainsi Serge Gainsbourg fut par<br />

l’entremise de son père, très vite plongé dans la musique.<br />

La musique que Gainsbourg aimait était le jazz. Il aimait Charles Trenet pour son côté swing.<br />

Mais jusque-là, la passion n’y est pas vraiment. Il ne cesse de regretter sa peinture qu’il aimait<br />

tant. Il ne crée rien et ne fait que jouer dans des boîtes pour gagner son pain. Il assiste de ma-<br />

nière intéressée à quelques concerts de jazz, mais sans plus. Jusqu’<strong>au</strong> jour où il voit Boris<br />

Vian sur scène en 1957! « Il prend une claque dans la tronche, c’est le déclic » 9 . Et la passion<br />

est née ainsi. Gainsbourg va alors composer une année plus tard « le poinçonneur des lilas »,<br />

qui, pour une première chanson, et même dans l’absolu, est un chef d’œuvre. Il f<strong>au</strong>t dire que<br />

Gainsbourg a alors trente ans et qu’il a un vaste bagage culturel. Sur scène il se comportera<br />

9 Gilles VERLANT, Gainsbourg ou le garçon s<strong>au</strong>vage, Paris, Albin Michel, 1985, p. 24<br />

5


comme Boris Vian. Froid et rigide, il deviendra d’une totale agressivité face <strong>au</strong> public. Cette<br />

manière de faire est une réaction à la timidité qui l’habitait.<br />

On pourra voir par la suite que Gainsbourg a totalement abandonné le jazz pour se tourner,<br />

dans un premier temps, vers le rock. Cet abandon est, à la musique, ce que fut la destruction<br />

des toiles de Gainsbourg à la peinture. Une envie de détruire 10 sa propre création qui ne<br />

s’atténuera pas avec le temps et qui dévoile chez Gainsbourg un profond besoin de change-<br />

ment, de renouve<strong>au</strong>. « Tout ce qui est atteint est détruit » écrit Montherlant. Peut-être que<br />

Gainsbourg appliquait cette affirmation à la lettre, ou peut-être qu’il adoptait cette attitude<br />

enfantine qui est de toujours vouloir zappper et qu’il gardera toute sa vie.<br />

IV Un amour pur<br />

Comme nous l’avons dit précédemment, Gainsbourg a parlé de nombreuses fois de l’amour<br />

dans ses chansons. Il était féru de jeux de mots, mais dans la chanson qui va suivre, c’est avec<br />

des lettres qu’il joue. « Elaeudanla teïteïa » est une chanson qu’il a écrite en 1963. Dans cette<br />

chanson, il décrit l’amour qu’il porte à une « femme » nommée Laetitia . Un amour maladif<br />

qui irait, à première vue, jusqu’à l’idée de sacrifice. D’un point de vue musical, cette chanson<br />

est très simple : une guitare, une guitare basse et un thème répété huit fois. Elle est ainsi très<br />

répétitive : lorsque Gainsbourg chante ce qu’on pourrait appeler le leitmotiv de la chanson<br />

(Elaeudanla teïteïa) le guitariste joue une ligne de basse qui reprend le thème chanté. Cet effet<br />

de répétition est amplifié par l’utilisation de deux rimes seulement (« ive » et « a »).<br />

L’assemblage de ces deux éléments (répétition et simplicité) et l’absence de percussion donne<br />

la sensation d’être bercé. Ajoutons encore que, quand les couplets sont chantés, la guitare joue<br />

subitement des accords qui, eux, sont gais et offrent une touche de couleur à la chanson, une<br />

touche de rêve.<br />

Au début, Gainsbourg chante le nom de Laetitia qu’il a tapé sur sa machine à écrire. Le sim-<br />

ple fait d’écrire ce nom va faire ressurgir de sa mémoire tout ce qui se rapporte à sa bien-<br />

aimée. Ainsi, les temps des verbes permettent de voir le point suivant : les couplets numéro<br />

deux, trois, quatre, cinq et six sont en fait les pensées de Gainsbourg tournées vers sa bien-<br />

aimée ; pensées induites par l’écriture du nom de Laetitia <strong>au</strong> début comme à la fin de la chan-<br />

10 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p. 100<br />

6


son. En effet, dans le premier couplet, le temps des verbes est <strong>au</strong> passé composé ; Gainsbourg<br />

décrit alors ce qu’il a fait. Puis, du passé composé <strong>au</strong> présent, l’<strong>au</strong>diteur saisit que les paroles<br />

dites <strong>au</strong> présent sont le fruit d’une mémoire réveillée par la simple écriture d’un nom. À<br />

l’écriture s’ajoute la parole. Cette manière inlassable de répéter l’épellation d’un prénom nous<br />

montre la force incantatoire de ce prénom (Laetitia) pour Gainsbourg. Une manière scandée,<br />

répétitive et monotone qui sied parfaitement à la musique que nous avons décrite plus h<strong>au</strong>t.<br />

Comme nous l’avons dit plus h<strong>au</strong>t, le premier couplet nous montre implicitement un homme<br />

rêvassant et écrivant le nom de son amour. Le second couplet nous laisse entrevoir que cet<br />

homme est en couple avec une certaine Laetitia. Il aimerait que les jours se suivent et qu’ils<br />

restent comme ils sont sans changement. Le troisième couplet nous apporte un nouvel élé-<br />

ment : le fait de se souvenir de Laetitia est douloureux ; cela nous indique que, soit la<br />

« dulcinée » du narrateur est loin d’un point de vue géographique, soit elle l’a quitté. Rete-<br />

nons la seconde hypothèse. La fleur dont il parle <strong>au</strong> quatrième couplet est la fleur d’amour ici<br />

prise comme symbole de ce h<strong>au</strong>t sentiment. Et l’on voit le jeu <strong>au</strong>quel il se prête. Il sait perti-<br />

nemment que cette fleur est maladive. Cette fleur est malsaine, mais il la touche quand<br />

même ! Provocation, folie ou envie de suicide ? Toujours sur ce même ton monotone, il dé-<br />

clare, dans l’antépénultième paragraphe, qu’il serait prêt à faire n’importe quoi pour elle. Un<br />

amour fou, démesuré. Encore f<strong>au</strong>drait-il définir le terme :« aller à la dérive ». Mais ici il<br />

semblerait que l’in<strong>format</strong>ion réside dans le fait que le narrateur est prêt à tout pour récupérer<br />

son ex-compagne. Dans l’avant-dernière strophe, il avoue qu’il serait irraisonnable de conti-<br />

nuer ainsi à rêver à sa compagne depuis longtemps perdue. Et la dernière strophe nous ramène<br />

à la réalité, à la table sur laquelle il écrivait ce nom, le passé composé reprend, la chanson se<br />

termine.<br />

Cette brève histoire d’amour nous fait penser à un amour d’enfants ou de jeunes adultes. Le<br />

prénom Laetitia n’est d’ailleurs pas anodin. Laetitia est un nom évocateur de joie. Et le p<strong>au</strong>vre<br />

gamin qui voit partir son amour et qui en rêve. Ce rêve propre à l’enfance à laquelle renvoie<br />

le nom en phonétique du titre, cette enfance dans laquelle réside encore un amour pur.<br />

V L’imperfection<br />

En 1963, dans le même album que la chanson précédente, Gainsbourg écrit « la fille <strong>au</strong> ra-<br />

soir ». Cette chanson a pour première symbolique l’incommunicabilité. L’écriture de cette<br />

7


chanson avait été motivée par le plan d’un film dans lequel on voyait une espèce de « garce »<br />

qui se rasait les jambes. Comme <strong>au</strong>tre symbolique on peut voir l’imperfection féminine. En<br />

effet, le simple fait de s’épiler nous rappelle que nous descendons du singe et dans certains<br />

cas, pour certaines personnes (Gainsbourg croyait en une femme parfaite comme nous l’avons<br />

dit plus h<strong>au</strong>t) , cette idée est dérangeante.<br />

La chanson est divisée en quatre couplets. Les trois premiers ont une architecture de rimes<br />

identique: ABABCC. Cette chanson, tout comme la précédente, n’est jouée que par une gui-<br />

tare électrique et une guitare basse. La basse joue de manière continue et soutient ainsi la<br />

chanson ; le guitariste (Elek Bacsik) joue de manière sèche, précise et agressive ce qui crée un<br />

contraste avec la douceur de la voix de Gainsbourg. Dans le premier couplet, le narrateur nous<br />

présente la situation telle qu’il la voit. Une femme (sa compagne) se rasant les jambes. La<br />

« musique créée par le rasoir couvre la chanson dite de Clara. Il y a ici un double sens. Ou<br />

bien le narrateur veut parler d’une chanson s’appelant « la chanson de Clara » 11 qui serait<br />

dans la petite histoire couverte par le bruit du rasoir. Ou bien il parle de la chanson qu’il<br />

chante en la nommant « chanson de Clara » et le rasoir couvrant cette chanson serait la gui-<br />

tare. On peut <strong>au</strong>ssi retenir les deux sens. En fin de paragraphe, la phrase « elle aimait ses ca-<br />

resses » (les caresses du rasoir, évidemment) nous montre une certaine insatisfaction du nar-<br />

rateur. Comme s’il avouait que sa compagne préférait les caresses de son rasoir <strong>au</strong>x siennes.<br />

Ainsi le rasoir prendrait plus d’importance que l’homme dans la vie de Clara. Serait-ce un<br />

amour fétichiste que nous décrit ici Gainsbourg ? Dans l’optique du schéma quinaire, la com-<br />

plication se trouverait dans le second paragraphe. Le narrateur ressent comme une rage in-<br />

duite par le rasoir électrique, mais cette rage qui l’anime, il la garde pour lui, il reste silen-<br />

cieux. Dans le troisième paragraphe, quand il se décide à parler à Clara pour lui dire qu’il est<br />

agacé, il se rend vite compte que cela n’intéresse pas son interlocutrice. Elle continue tran-<br />

quillement ses petites affaires ; et le balancement tranquille de la chanson reflète très bien ce<br />

comportement qu’adopte Clara. Alors le narrateur explose en fin de troisième paragraphe et<br />

déclare son amour. « Sous le rasoir électrique, tu n’as rien entendu Clara … ». Ce dernier pa-<br />

ragraphe nous montre, ou plutôt, sous-entend qu’un homme est en train de bouillir, qu’une<br />

violence contenue, mais qui explosera bientôt, reste pour l’instant à l’intérieur de cet homme.<br />

La guitare accentue cette sensation de rage contenue. Le narrateur, les dents serrées, rumine<br />

son incapacité à se faire entendre.<br />

11 Qui est probablement un clin d’œil à la chanson de Lara de M<strong>au</strong>rice Jarre et de Hubert Ithier<br />

8


Cette deuxième chanson nous montre quelques éléments qui ont fait de Gainsbourg un miso-<br />

gyne : le narcissisme de Clara et sa nature imparfaite. Une imperfection qui peut être compa-<br />

rée à celle que Gainsbourg avait perçu lors de l’épisode de la serviette hygiénique cité plus<br />

h<strong>au</strong>t. On sent alors que cette histoire de rasoir se termine sur une tension qui devra un be<strong>au</strong><br />

jour se résoudre. Mais la suite, nous pouvons la deviner.<br />

VI Un Gainsbourg moqueur<br />

« En relisant ta lettre » est une chanson que Gainsbourg écrivit en 1961 et dans laquelle nous<br />

pouvions voir Gainsbourg commenter une lettre qu’il a reçue d’une de ses compagnes. Cette<br />

dernière semble éperdue d’amour pour cet homme qui, avec l’âge, devient de plus en plus<br />

railleur.<br />

La musique fait sourire et a presque quelques teintes grotesques. Elle est lente et soporifique.<br />

Une batterie, un saxophone baryton, un saxophone ténor, une clarinette et une flûte traversière<br />

jouent de manière posée et continue pour les trois premiers, et en alternance pour les deux<br />

derniers (le premier et le troisième quart de la chanson pour la clarinette et le deuxième et<br />

quatrième quart pour la flûte). L’orchestration et la façon dont chante Gainsbourg le font ap-<br />

paraître comme quelqu’un de dédaigneux voire snob.<br />

La chanson commence par cette constatation, dite d’une voix neutre, à peine dédaigneuse :<br />

« En relisant ta lettre, je m’aperçois que l’orthographe et toi ça fait deux ». Cette lettre com-<br />

prend un très fort message d’amour et de détresse que Gainsbourg ne prend pas <strong>au</strong> sérieux<br />

mais tourne plutôt en ridicule en ponctuant le texte de petites remarques assassines toutes en<br />

rapport avec la manière d’écrire la lettre. Plus une question de forme que de fond en fin de<br />

compte. Et en cela on reconnaît très bien Gainsbourg qui, comme nous l’avons déjà montré,<br />

était très attaché <strong>au</strong>x apparences. Cela s’explique-t-il par le complexe développé en raison de<br />

sa propre laideur ?<br />

Nous avons fractionné la chanson en huit parties ; la phrase d’introduction citée plus h<strong>au</strong>t<br />

n’entrant pas en compte dans ce calcul. Toutes les six lignes commence une nouvelle partie.<br />

Les cinq premières parties présentent toutes le même schéma : quatre des six lignes font par-<br />

ties de la lettre, les deux <strong>au</strong>tres sont des commentaires du narrateur. Lorsque Gainsbourg<br />

chante la lettre à proprement parler, il le fait d’une voix mielleuse comme s’il imitait la voix<br />

9


de sa compagne . Mais lorsqu’il fait ses commentaires liés à l’orthographe, il les dit sur un ton<br />

moqueur.<br />

Dans la première partie, la fille déclare son amour. Dans la deuxième, elle demande à Gains-<br />

bourg de na pas la délaisser. Dans la troisième, elle pose un jugement et expose ses senti-<br />

ments. Elle trouve la perspective d’une rupture ridicule et explique que ça la touche énormé-<br />

ment. Dans la quatrième, elle fait du chantage. En effet, elle déclare qu’en cas de séparation,<br />

elle en finira avec la vie. Dans la cinquième, l’<strong>au</strong>diteur peut voir (ou plutôt entendre) une once<br />

de proposition immédiatement changée en insultes. La dernière partie, dans laquelle on peut<br />

voir directement la lettre, nous montre que la fille menace le narrateur. Gainsbourg écrit cela<br />

comme si ce cursus s’appliquait à toutes les relations et comme s’il n’y avait plus rien à en<br />

retirer étant donné que ce sentiment est connu et répétitif. Cette vision pessimiste est très cer-<br />

tainement l’effet ainsi que la c<strong>au</strong>se de nombreuses expériences amoureuses qui <strong>au</strong>raient mal<br />

tourné.<br />

Dans la sixième partie, on peut voir que le nombre de lignes partagées entre la fille et le nar-<br />

rateur est équilibré (ils en ont trois chacun). Ceci introduit les deux dernière parties qui, telles<br />

que nous les avons interprétées, ne contiennent que du texte dit par le narrateur. De plus,<br />

Gainsbourg qui, durant toute la chanson semble intouchable, « intouché » par les propos de la<br />

fille, paraît presque troublé par le « ça s’ra ta f<strong>au</strong>te » qu’il répète comme pour s’en rendre bien<br />

compte, comme s’il méditait là-dessus. On verrait ainsi Gainsbourg s’émouvoir devant un<br />

éventuel suicide de sa compagne ; suicide dont il serait la c<strong>au</strong>se. Ceci peut évidemment être<br />

interprété d’une <strong>au</strong>tre façon. Gainsbourg semble étonné de ne pas voir de f<strong>au</strong>tes<br />

d’orthographe dans cette phrase c’est pourquoi il croche dessus. Quoi qu’il en soit, il reste sur<br />

cette dernière remarque et ceci le fait réagir.<br />

Les deux dernières parties forment la réponse du narrateur après la lecture de la lettre. Les<br />

parties sept et huit sont chantées d’une manière confondant les deux tons utilisés précédem-<br />

ment. Dans la partie sept, Gainsbourg sous-entend que la fille menaçait de se suicider en pre-<br />

nant plusieurs cachets de gardénal. Le narrateur lui répond nonchalamment qu’elle devrait<br />

n’en prendre qu’un, et, comble de l’ironie, il lui lance que ça la calmera ! Enfin, dans la der-<br />

nière partie, il lui explique qu’après avoir pris son médicament, tout ira mieux (« l’cafard, les<br />

pleurs, les peines de cœurs »). Une <strong>au</strong>tre manière de minimiser l’importance de l’amour :<br />

même après les plus grosses peines, un cachet et ça repart !<br />

10


Cette troisième chanson nous permet de voir un Serge Gainsbourg h<strong>au</strong>tain dont on pourra dire<br />

que : « lui c’est un homme d’expérience », regardant de h<strong>au</strong>t les affres de l’amour.<br />

VII Le misogyne<br />

Le quatrième et dernier texte que nous allons étudier a été écrit avant les trois <strong>au</strong>tres. Cette<br />

chanson, intitulée « ce mortel ennui », écrite en 1958, nous parle du sentiment de Gainsbourg<br />

(comme d’habitude), lorsqu’il est en couple avec une femme. Un rythme lent d’ambiance<br />

nous rappelle ces vieux films de gangsters à la s<strong>au</strong>ce américaine : l’<strong>au</strong>teur <strong>au</strong>rait très bien pu<br />

faire la bande originale d’un film comme les tontons flingueurs. Cette atmosphère feutrée<br />

pourrait laisser croire, comme nous le verrons plus bas, que Gainsbourg se complaît dans cet<br />

ennui.<br />

Musicalement, cette chanson comprend trois thèmes : le premier, dont la première ligne est<br />

toujours ponctuée du mot « ennui », est dit, ainsi que joué (piano, guitare basse, xylophone,<br />

guitare, batterie) d’une manière saccadée et très lente. Ce procédé met en exergue l’« ennui ».<br />

En effet, l’ennui est dû à la répétition de choses, d’événements. Ici, le fait de jouer d’une ma-<br />

nière si « carrée » sous-entend que tout est répétitif. Le deuxième thème, interprété d’une ma-<br />

nière plus fluide, est joué lorsque Gainsbourg se met à s’imaginer en train de faire bouger les<br />

choses (« Le jour où j’<strong>au</strong>rai assez d’estomac » ou encore « Il f<strong>au</strong>dra bien que je me décide un<br />

jour »). Ce thème, joué deux fois dans la chanson, est plus coulant afin d’imager la rêverie du<br />

narrateur. Le troisième thème, que l’on pourrait appeler communément un bridge 12 , est joué<br />

<strong>au</strong> milieu de la chanson. Il est utilisé pour décrire le quotidien du couple, et, de ce fait, se pré-<br />

sente comme étant un peu plus lent que les deux précédents.<br />

Ainsi, Gainsbourg s’ennuie dans toutes ses relations amoureuses (« ce mortel ennui (…) qui<br />

me suit pas à pas »). Mais pourquoi continuerait-il alors de vivre avec des femmes qui sont<br />

selon lui mortellement ennuyeuses ? Sa chanson nous l’explique : la première réponse est tout<br />

simplement physique (« il n’est rien besoin de dire à l’horizontale »). La seconde est plus mo-<br />

rale. Il a peur que l’abandon, plonge sa compagne dans une telle tristesse qu’elle se suicide. Il<br />

serait pourtant possible de croire que Gainsbourg lui-même pu éprouver de l’attachement pour<br />

une femme et ses qualités : ses attraits physiques évidemment mais <strong>au</strong>ssi la sensibilité et la<br />

12 En Français : un pont. Elément (partie) de transition reliant un couplet à un refrain ou deux couplets.<br />

11


tendresse qu’elle lui porte. Mais le dénouement de la chanson est moins poétique : on apprend<br />

que s’il reste avec les femmes, c’est pour ne pas avoir (comble de l’absurde)… d’ennuis.<br />

Nous avions dit précédemment que « la chanson de Clara » portait en elle le symbole de<br />

l’incommunicabilité. Cette dernière se retrouve dans «ce mortel ennui ». Gainsbourg dit qu’ils<br />

ne se disent rien à la verticale (en dehors du lit) et que pour tuer le temps il fait des mots croi-<br />

sés (jeu souvent assimilé, tout comme le solitaire et tetris, à l’ennui). Dans son jeu, il remplit<br />

les lettres « a » et « o » du mot amour (_m_ur). Les trois lettres restantes formant le mot<br />

« mur » représentant ici le signe de l’incommunicabilité. De plus, les phonèmes « a » et « o »<br />

dits ainsi nous rappellent l’expression : Des bas et des h<strong>au</strong>ts (des h<strong>au</strong>ts et des bas). Cela peut<br />

signifier que le narrateur doit remplir lui-même les bas et les h<strong>au</strong>ts du couple étant donné que<br />

jusqu’alors ils étaient inexistants et que cette relation est plate.<br />

Alors, il nous présente la femme qui serait attractive : celle avec qui il pourrait dialoguer.<br />

Paradoxalement, pour se défaire de cette femme ennuyeuse, Gainsbourg ne semble pas vou-<br />

loir adopter la voie du dialogue. Assurément, cette façon d’agir pourrait lui permettre une<br />

séparation sans que, dans un deuxième temps, la femme se suicide. Et Gainsbourg le sait,<br />

avec son intellect supérieur. Mais sa misogynie le pousse à croire que, dans ce cas, le dialogue<br />

ne peut être utile et qu’éternellement il s’ennuiera <strong>au</strong>x côtés de celle qu’il désire. 13<br />

Deux questions se posent alors : croit-il que, même s’il pouvait quitter cette femme, la sui-<br />

vante ne pourrait être mieux ? Ou est-il, somme toute, satisfait de son couple ? Seule la der-<br />

nière phrase de la chanson nous laisse émettre cette hypothèse. Car, s’il se laisse faire c’est<br />

que, dans le fond, cet être caractériel est content de son sort.<br />

VIII Le poète et le provocateur<br />

Gainsbourg, dans sa période jazz, a chanté l’amour tel qu’il le voyait du h<strong>au</strong>t de sa trentaine<br />

d’années. Il s’est souvenu de ses premières amours (Laetitia), ses premières ruptures (Clara)<br />

et la croissance de sa misogynie <strong>au</strong>x dépens de ses illusions (« en relisant ta lettre » « ce<br />

mortel ennui »). Mais il était encore très jeune à l’époque. Que lui a apporté cette perception<br />

d’une certaine aversion pour les femmes puis pour le genre humain sur les trente années qui<br />

13 Ce mortel ennui est la chanson la plus clairement <strong>au</strong>tobiographique : cf. : Gilles VERLANT, Gainsbourg,<br />

Paris, Albin Michel, 2000, p. 148<br />

12


ont précédé sa mort ? En était-il content ? Quelques anecdotes et textes que nous allons par-<br />

courir vont à nouve<strong>au</strong> nous permettre de mieux comprendre un personnage complexe qui<br />

s’était bâti grâce à la musique.<br />

Le poète et le provocateur. Lucien Ginzburg et Gainsbarre. Deux personnages <strong>au</strong>x antipodes<br />

de la moralité et entre eux, un homme : Serge Gainsbourg. Sa musique, son art mineur, a sû-<br />

rement reflété la totalité des épisodes de sa vie. Ses actes et aphorismes furent les connecteurs<br />

articulant la machine de ses pensées, de ses colères, de ses peines, de ses réflexions. Et le<br />

moteur de tout cela : les femmes. Il était misogyne par pudeur. Et sa « gueule » rendait crédi-<br />

ble sa misogynie. Si Gainsbourg avait été un bellâtre éternellement jeune, il n’<strong>au</strong>rait jamais pu<br />

être <strong>au</strong>ssi froid et direct avec les personnes qu’il voyait ou rencontrait. Sa misogynie a tourné<br />

en une misanthropie qui, à son tour, se transforma en provocation permanente. 14<br />

I want to fuck her. Inutile de traduire cette phrase bien connue que Gainsbourg disait sur un<br />

plate<strong>au</strong> de télévision lors d’une entrevue avec Whitney Houston. On reconnaît bien ici Gains-<br />

bourg narguant son monde comme il eut l’habitude de le faire depuis qu’il se fit appeler<br />

Gainsbarre. On le reconnaît également quand il s’insurge contre le système d’imposition fran-<br />

çais en brûlant (encore une fois en direct sur une grande chaîne française !) un billet de cinq<br />

cent francs. Ou encore lorsqu’il fait une attaque cardiaque et qu’on lui prescrit d’arrêter la<br />

cigarette et l’alcool ; il répond que de toute façon, la viande se conserve très bien si on la<br />

fume ou encore si elle reste plongée dans l’alcool 15 . Eternel provocateur dans ses chansons, il<br />

va donner jour à de nombreux titres qui feront jaser la presse bien pensante de Paris tels que :<br />

« Aux armes et caetera », « Lemon inceste », « Rock around the bunker ». Ce dernier titre<br />

sera rejeté par les programmateurs radios (des amateurs en effet) unanimement outragés par la<br />

provocation que représentait cette chanson (voir <strong>au</strong>ssi « S.S. in Uruguay » et « Nazi rock »).<br />

Ces textes sont purement un coup de maître, et l’on pourrait croire que les chaînes radios<br />

avaient alors oublié que le petit Lucien Ginzburg portait l’étoile j<strong>au</strong>ne durant toute la seconde<br />

guerre. Mais Gainsbourg ricane, il rumine sa vengeance. D’ici quelques années, les disques<br />

d’or pleuvront et le nouve<strong>au</strong> Gainsbarre ne s<strong>au</strong>ra plus où les mettre.<br />

14 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, pages 84 à 92. Cette source est la<br />

plus grande c<strong>au</strong>se de ces affirmations. Lesdites affirmations proviennent également du documentaire de Serge<br />

Gainsbourg à Gainsbarre 1958-1991.<br />

15 Gilles VERLANT/ Yves DESNOS/ Yann GRASLAND, De Serge Gainsbourg à Gainsbarre 1958-1991,<br />

France, Universal Picture (France), 1994<br />

13


C’est en ‘79 que Gainsbourg mit à profit son sens de la « provoc » si bien conservé et mesuré<br />

jusqu’alors. Il avait décidé en 1963 de quitter définitivement la scène lorsqu’on lui avait<br />

avoué que lors de l’une de ses représentations, ce n’était pas lui mais un certain Boby La-<br />

pointe faisant l’ouverture qui avait brillé. Un goût amer lui était alors resté dans la bouche<br />

(bel euphémisme). Presque vingt ans plus tard, il revient de Jamaïque avec sous le bras les<br />

bandes de « <strong>au</strong>x armes et caetera ». C’est une réconciliation entre les jeunes et ce quinquagé-<br />

naire toujours intact qui jusqu’ici n’avait jamais été reconnu par les nouvelles générations ! Et<br />

Gainsbourg tellement enchanté de cette réconciliation en a, grand sentimental, les larmes <strong>au</strong>x<br />

yeux. Pour faire taire les critiques « ultra-patriotiques », il achètera à prix fort le manuscrit de<br />

Rouget de Lisle, <strong>au</strong>teur de la Marseillaise.<br />

Ainsi nous avons illustré la vie que mena Gainsbourg par quelques anecdotes. En public, il<br />

était déb<strong>au</strong>ché et rien ne pouvait l’arrêter, mais derrière ce masque qu’il s’était construit, un<br />

homme bien plus sensible et réfléchi voyait le monde d’un œil objectif et agissait en consé-<br />

quence. Par tous ses actes de provocation, il a fait réfléchir ou <strong>au</strong> moins réagir et donc a fait<br />

bouger les choses !<br />

Nous conclurons ce chapitre en posant que nous ne pensons pas que Gainsbourg était misan-<br />

thrope, et encore moins misogyne ; nous pensons qu’<strong>au</strong> contraire, il aimait son monde pour<br />

ses vacheries et qu’il lui pardonnait en lui rendant la pareille et ainsi, en le faisant réagir (cer-<br />

cle vicieux). Le dernier exemple, celui de la Marseillaise, est, de loin, le meilleur : il est allé à<br />

Kingston ; il a réussi à s’y faire accepter ce qui, paraît-il, n’était pas chose aisée, à y pratiquer<br />

sa musique et enfin ramener les meilleurs ragea-men du monde ainsi qu’une très grande chan-<br />

son. Et tout cela pour atteindre les jeunes, une couche de la population qu’il souhaitait avoir<br />

pour public. Finie la musique dite d’intellectuels, place à quelque chose d’accessible, d’ouvert<br />

à tous. Gainsbourg, « musicien-humaniste » des temps modernes, a su utiliser sa misogynie<br />

puis sa misanthropie, deux éléments cultivés avec zèle durant sa vie, dans une démarche qui,<br />

finalement, permit le rapprochement des genres, des couleurs, des époques et des âges.<br />

Dans le fond, les textes qu’écrivit Gainsbourg (<strong>au</strong> premier abord évidemment), ne présentè-<br />

rent jamais rien de bien méchant. À quelques exceptions près, je vous l’accorde. Mais les<br />

tournures que prenait le texte, et cela grâce à une grande capacité à user de l’implicite, pou-<br />

vaient changer un texte d’amour en chanson salace. Ainsi, ce cynique, mais cynique par phi-<br />

lanthropie, a, de son temps, fait crier <strong>au</strong> scandale, a fait pleurer, a scandalisé ou encore boule-<br />

14


versé. Mais c’est le genre d’homme qui, par l’art, fait avancer le monde et, lorsqu’on regarde<br />

le paysage musical français actuel, on ne peut s’empêcher de se dire qu’il manque quand<br />

même un peu.<br />

15


IX Conclusion « Je suis venu te dire que je m’en vais »<br />

Plus qu’un état d’esprit, la misogynie de Gainsbourg fut pour lui un outil, un moyen. Pour se<br />

faire connaître, pour avoir un public, pour se faire aimer, il a su utiliser ce procédé. Lorsqu’il<br />

se comporta tendrement avec l’arrière-petite-fille de Tolstoï, il fut extrêmement déçu.<br />

L’abandonnait-elle pour sa tendresse, pour sa « non-virilité » ? Quoi qu’il en soit, après cela il<br />

se transforma en Serge Gainsbourg (en mâle), et lorsqu’elle revint, les rôles furent inversés.<br />

Rappelons-nous les onze manèges de séduction élaborés par Solal lorsqu’il voulut séduire<br />

Arianne Deume. Ne décrivent-ils pas exactement ce que Gainsbourg fait avec ses compa-<br />

gnes ? Mais n’oublions pas que derrière ce masque de moquerie s’est caché un jour un être<br />

sensible qui a voulu croire en un amour pur (Laetitia). L’expérience lui a fait comprendre<br />

qu’il ne fallait pas, en apparence, être un tendre. Il se créa donc ce personnage provocant :<br />

Gainsbarre. Et lorsqu’il revêtait le costume de Gainsbarre, il faisait crier, il faisait pleurer, il<br />

faisait bouger les choses. « Gainsbourg cache son immense pudeur poétique sous un masque<br />

de bouleversante obscénité » 16 . Mais il fait cela car il aime son public, il lui offre du spectacle.<br />

Est-ce qu’un misanthrope <strong>au</strong>rait fait crier <strong>au</strong> scandale la moitié de l’hexagone dans le dessein<br />

de toucher les jeunes (<strong>au</strong>x armes et caetera) ?<br />

Encore une chose ; Gainsbourg a été décoré du titre d’officier de l’Ordre des Arts et des Let-<br />

tres. Notons que Clint Eastwood et Coluche n’en sont que chevaliers. Comme le dit très bien<br />

Gilles Verlant : « les héros ont de drôles de tronches de nos jours ». Cet homme à tête de chou<br />

est un héros dont la francophonie peut être fière. Il est venu dire qu’il s’en allait. On l’a mis<br />

dans un grand trou car son 6’35 lui avait fait les yeux doux. Un revolver qui lui a fait les yeux<br />

doux toute sa vie. « Le succès et la gloire ne nous griseront jamais que les tempes » disait-il.<br />

Il avait raison. Trente-trois ans de composition et une place dans la postérité. « Le masque<br />

tombe, l’homme reste, (…) » et le héros ne s’évanouit pas 17 .<br />

16 Gilles VERLANT, Gainsbourg ou le garçon s<strong>au</strong>vage, Paris, Albin Michel, p. 180<br />

17 Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, p.24<br />

16


X Sources<br />

Bibliographie :<br />

Gilles VERLANT, Gainsbourg ou le garçon s<strong>au</strong>vage, Paris, Albin Michel, 1985, 201 pages<br />

Gilles VERLANT, Au bout de la nuit, Paris, Editions Hors Collection, 1996, 155 pages<br />

Yves SALGUES, Gainsbourg ou la provocation permanente, éditions Jean-Cl<strong>au</strong>de Lattès,<br />

1989, pages 133 à 145<br />

Gilles VERLANT, Gainsbourg, Paris, Albin Michel, 2000, pages 127 à 160<br />

Gilles VERLANT, édition définitive, Paris, Albin Michel, 1985 et 1992, 279 pages<br />

Support vidéo :<br />

Gilles VERLANT/ Yves DESNOS/ Yann GRASLAND, De Serge Gainsbourg à Gainsbarre<br />

1958-1991, France, Universal Picture (France), 1994<br />

Support Audio :<br />

Serge GAINSBOURG, De Gainsbourg à Gainsbarre, France, Phonogram (France), 1994<br />

17


XI Annexes<br />

• Paroles de Elaeudanla Teïtéïa<br />

• Paroles de La fille <strong>au</strong> rasoir<br />

• Paroles de En relisant ta lettre<br />

• Paroles de Ce mortel ennui<br />

• Paroles et musique de Le Gymnasien<br />

18


Serge Gainsbourg<br />

ElaeudanlaTeïtéïa (1963)<br />

Sur ma remington portative<br />

J'ai écrit ton nom Laetitia<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

Laetitia les jours qui se suivent<br />

Hélas ne se ressemblent pas<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

C'est ma douleur que je cultive<br />

En frappant ces huit lettres-là<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

C'est une fleur bien maladive<br />

Je la touche du bout des doigts<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

S'il f<strong>au</strong>t aller à la dérive<br />

Je veux bien y aller pour toi<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

Ma raison en définitive<br />

Se perd dans ces huit lettres là<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

Sur ma remington portative<br />

J'ai écrit ton nom Laetitia<br />

Elaeudanla Teïtéïa<br />

19


Serge Gainsbourg<br />

La fille <strong>au</strong> rasoir (1963)<br />

Le rasoir électrique<br />

Couvrait la chanson de Clara<br />

La jolie musique<br />

Qui sortait de cet engin-là<br />

C'était sa faiblesse<br />

Elle aimait ses caresses<br />

Le rasoir électrique<br />

Frôlait la jambe de Clara<br />

Ce bruit métallique<br />

Avait l'don de me mettre hors de moi<br />

Ce n'était pas drôle<br />

De garder mon self-control<br />

Le rasoir électrique<br />

Me rendait dingue mais Clara<br />

N'prenait <strong>au</strong> tragique<br />

Ni mes angoisses ni mes a-<br />

Mours un jour quand même<br />

Je lui ai dit je t'aime<br />

Sous l'rasoir électrique<br />

Tu n'as rien entendu Clara<br />

Tu n'as rien entendu Clara<br />

Tu n'as rien entendu Clara<br />

20


Serge Gainsbourg<br />

En relisant ta lettre (1961)<br />

En relisant ta lettre je m'aperçois que l'orthographe et toi, ça fait deux<br />

C'est toi que j'aime<br />

Ne prend qu'un M<br />

Par-dessus tout<br />

Ne me dis point<br />

Il en manque un<br />

Que tu t'en fous<br />

Je t'en supplie<br />

Point sur le i<br />

Fais-moi confiance<br />

Je suis l'esclave<br />

Sans accent grave<br />

Des apparences<br />

C'est ridicule<br />

C majuscule<br />

C'était si bien<br />

Tout ça m'affecte<br />

Ça c'est correct<br />

Au plus h<strong>au</strong>t point<br />

Si tu renonces<br />

Comme ça s'prononce<br />

À m'écouter<br />

Avec la vie<br />

Comme ça s'écrit<br />

J'en finirai<br />

Pour me garder<br />

Ne prends qu'un D<br />

Tant de rancune<br />

T'as pas de cœur<br />

Y a pas d'erreur<br />

Là y'en a une<br />

J'en mourrirai<br />

N'est pas français<br />

N'comprends-tu pas ?<br />

Ça s'ra ta f<strong>au</strong>te<br />

Ça s'ra ta f<strong>au</strong>te<br />

Là y'en a pas<br />

Moi j'te signale<br />

Que gardénal<br />

Ne prend pas d'E<br />

Mais n'en prend qu'un<br />

Cachet <strong>au</strong> moins<br />

N'en prend pas deux<br />

Ça t'calmera<br />

Et tu verras<br />

Tout r'tombe à l'e<strong>au</strong><br />

L'cafard, les pleurs<br />

21


les peines de cœur<br />

O E dans l'O<br />

Serge Gainsbourg<br />

Ce mortel ennui (1962)<br />

Ce mortel ennui<br />

Qui me vient<br />

Quand je suis avec toi<br />

Ce mortel ennui<br />

Qui me tient<br />

Et me suis pas à pas<br />

Le jour où j'<strong>au</strong>rai assez d'estomac<br />

Et de toi<br />

Pour te laisser choir<br />

Ce jour-là, oh oui ce jour là, je crois<br />

Oui je crois<br />

Que<br />

Je<br />

Pourrai voir<br />

Ce mortel ennui<br />

Se tailler<br />

À l'anglaise loin de moi<br />

Bien sûr il n'est rien besoin de dire<br />

À l'horizontale<br />

Mais on ne trouve plus rien à se dire<br />

À la verticale<br />

Alors pour tuer le temps<br />

Entre l'amour et l'amour<br />

J'prends l'journal et mon stylo<br />

Et je remplis<br />

Et les a et les o<br />

Il f<strong>au</strong>dra bien que j'me décide un jour<br />

Mon amour<br />

À me faire la malle<br />

Mais j'ai peur qu'tu n'ailles dans la salle de bains<br />

Tendre la main<br />

Vers<br />

Le<br />

Gardénal<br />

Comme je n'veux pas d'ennui<br />

Avec ma<br />

Conscience et ton père<br />

Je m'laisse faire !<br />

22


La chanson jazz française Arn<strong>au</strong>d Nussb<strong>au</strong>mer 3M3<br />

Olivier Piguet 13 nov.2006<br />

Vincenzo Di Marco<br />

<strong>Gymnase</strong> <strong>Auguste</strong> <strong>Piccard</strong><br />

Au-delà du masque de Gainsbourg (fiche résumé)<br />

Regardez-le ! Non mais regardez-le ! Des oreilles de chou, le teint pâle, des valises sous les<br />

yeux, une barbe de plusieurs jours. En public, il est provocant, grossier, parfois aviné ou en-<br />

core sous l’effet de stupéfiants. Toujours la clope <strong>au</strong> bec, il ricane froidement lorsqu’il toise<br />

son monde et se permet les plus grosses vacheries. Eh ouais, c’est lui Gainsbarre ! ou Serge<br />

Gainsbourg pour les non-initiés. Auprès du grand public, ce personnage étonnant est le plus<br />

souvent connu pour ses actes et certains de ses propos. Mais maintenant fermez les yeux et<br />

écoutez sa musique… Ne vous êtes vous jamais posé la question, très cher lecteur, si ce n’est<br />

pas d’abord son immense génie qui l’a mené sous les feux de la scène mondiale ?<br />

Le travail que je vous propose est une étude de la vie de Gainsbourg basée sur l’analyse de<br />

quatre de ses textes. Les quatre chansons étudiées ont été choisies selon les critères suivants :<br />

le thème qu’elles évoquaient (c’est-à-dire, l’évolution de la perception de Gainsbourg pour les<br />

femmes), et leur style (soit le jazz comme le laisse supposer le titre de la présentation). J’ai<br />

donc choisi Elaeudanla teïteïa, la fille <strong>au</strong> rasoir, en relisant ta lettre et ce mortel ennui,<br />

comme princip<strong>au</strong>x supports de ma démarche. Cette dernière se divise en trois parties princi-<br />

pales : la première a pour but de vous faire connaître Gainsbourg grâce à différentes anecdo-<br />

tes ou récits. La deuxième, le cœur du travail, consiste en l’analyse des quatre textes. Et la<br />

troisième est une synthèse des deux premières appuyée par quelques faits et témoignages i .<br />

Cela dans le but de répondre à la question suivante : sous son masque cynique y <strong>au</strong>rait-il une<br />

once d’amour ?<br />

La conclusion est étonnante, et j’espère qu’après la lecture de ce travail, vous <strong>au</strong>rez compris<br />

un peu mieux ce personnage complexe qu’est Serge Gainsbourg. Un personnage encore vi-<br />

vant <strong>au</strong>jourd’hui grâce évidemment à sa personnalité, mais avant tout grâce à sa musique. Si<br />

vous aimez Gainsbourg, alors lisez ce travail et si vous ne l’aimez pas, lisez-le et peut-être<br />

que vous irez acheter l’intégrale de ses albums dans la semaine qui vient. Bonne lecture !<br />

i Sans <strong>au</strong>cun rapport avec la première partie du travail, notons que dans l’annexe figure une composition, une<br />

chanson jazz, que j’ai écrite avec mon ami Séverin Bussy.

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