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U n<br />
espoir pour les otages<br />
retenus par la guérilla<br />
des FARC en Colombie<br />
? Une «zone de rencontre»<br />
avec les Forces armées révolutionnaires<br />
de Colombie<br />
(FARC) pour y «définir» sans<br />
armes «l'échange humanitaire»<br />
d'otages de cette guérilla<br />
marxiste, dont la Franco-Colombienne<br />
Ingrid Betancourt,<br />
ancienne candidate à la présidentielle,<br />
contre des guérilleros<br />
emprisonnés a été acceptée<br />
publiquement vendredi 7 décembre<br />
par le président colombien<br />
Alvaro Uribe. Le geste du<br />
président Uribe intervient au<br />
lendemain du rappel, par<br />
l'Agence Anncol proche des<br />
FARC, de la principale exigence<br />
préalable posée par la guérilla<br />
à un échange humanitaire,<br />
à savoir la démilitarisation<br />
pendant 45 jours des municipalités<br />
de Florida et de Pradera<br />
(sud-ouest de la Colombie)<br />
<strong>El</strong> <strong>Watan</strong> - Lundi 10 décembre 2007 - 13<br />
INTERNATIONALE<br />
L'AMÉRIQUE DU SUD SE PENCHE AUJOURD'HUI SUR LA PROPOSITION D'ALVARO URIBE<br />
Une dernière chance<br />
pour les otages en Colombie ?<br />
●A l'occasion de la cérémonie d'investiture de la présidente argentine<br />
Cristina Kirchner aujourd'hui, les chefs d'Etats d'Amérique du Sud plancheront<br />
sur les développements de la question des otages en Colombie.<br />
pour y négocier l'échange, indique<br />
l'agence Latin Reporters.<br />
Le rappel d'Anncol répondait<br />
au message télévisé du<br />
président français Nicolas Sarkozy,<br />
qui a appelé le chef présumé<br />
des FARC, Manuel Marulanda,<br />
à libérer Ingrid<br />
Betancourt avant Noël. Mais,<br />
rappelle l'agence Latin Reporter,<br />
un précédent incite au pessimisme.<br />
En décembre 2005,<br />
l'Espagne, la Suisse et la France<br />
proposaient au gouvernement<br />
colombien et aux FARC<br />
de négocier, avec la garantie<br />
d'observateurs internationaux,<br />
l'échange humanitaire dans<br />
une zone démilitarisée évacuée<br />
par tous les combattants, donc<br />
neutre. La zone suggérée alors<br />
était de 180 km 2 . Les FARC réclament<br />
la libération de 500<br />
guérilleros emprisonnés en<br />
échange de 45 otages, dont Ingrid<br />
Betancourt.<br />
Adlène Meddi<br />
HERVÉ MARRO. Porte-parole du Comité de soutien à Ingrid<br />
Betancourt, Clara Rojas et tous les otages en Colombie (Paris, France)<br />
«Nous restons prudents»<br />
Propos recueillis par<br />
Adlène Meddi<br />
Comment appréciez-vous la proposition<br />
du président colombien de créer<br />
une zone de négociation avec les<br />
FARC ?<br />
Nous regardons cette proposition avec<br />
un bon œil, bien sûr. Une manière de<br />
construire quelque chose avec l'espoir de<br />
commencer à partir de là des négociations,<br />
un dialogue. Mais nous restons pru-<br />
dents aussi : le président Uribe à déjà fait<br />
des propositions aux FARC avant de faire<br />
des volte-face décevantes. Mais nous gardons<br />
espoir. Nous savons par exemple que<br />
le président français Nicolas Sarkozy, au<br />
premier plan, fera tout ce qu'il faut.<br />
Pourquoi cette annonce du président<br />
Uribe ?<br />
M. Uribe veut peut-être venir avec une<br />
nouvelle proposition à la réunion lundi<br />
(aujourd'hui) de tous les chefs d'Etat sudaméricains<br />
à Buenos Aires (à l'occasion<br />
de l'investiture de la présidente argentine<br />
Cristina Kirchner).<br />
Et la pression internationale ?<br />
Par ailleurs, la proposition du président<br />
Uribe a été rapide et je pense que cela a été<br />
causé par la pression de la communauté<br />
internationale. Du Canada à l’Italie, de la<br />
France à la Colombie la mobilisation est<br />
très forte. Les dernières images des otages<br />
ont fait prendre conscience à la communauté<br />
internationale la réalité des souffrances<br />
de ces otages. Ad. M.<br />
LE LONG CHEMIN DES NÉGOCIATIONS<br />
■ 1998<br />
— 9 juillet. Première rencontre<br />
du président colombien Andres<br />
Pastrana et du chef historique des<br />
FARC, Manuel Marulanda.<br />
— 7 novembre. Remise aux<br />
FARC d'une zone démilitarisée<br />
de 42 000 km 2 dans le sud du<br />
pays.<br />
■1999<br />
— 7 janvier. Ouverture des négociations<br />
entre les FARC et le<br />
gouvernement.<br />
—17 juillet. Pourparlers suspendus<br />
à la suite d'une nouvelle offensive<br />
des FARC et de leur refus<br />
d'une commission internationale<br />
dans la zone démilitarisée.<br />
■2001<br />
— 8 mars. Réunion entre les<br />
FARC et le gouvernement en présence<br />
de diplomates de 26 pays.<br />
■2002<br />
—14 janvier. Pastrana déclare<br />
que le processus de paix avec les<br />
FARC continue.<br />
— 23 février. Enlèvement par les<br />
FARC de la Franco-Colombienne<br />
Ingrid Betancourt, candidate à<br />
l'élection présidentielle.<br />
— 7 août. Investiture du président<br />
conservateur Alvaro Uribe,<br />
partisan de la manière forte<br />
contre la guérilla.<br />
■2003<br />
Dernière image d’Ingrid Betancourt datée d’octobre dernier<br />
—5 mai. Le président Uribe,<br />
après l'exécution spectaculaire<br />
par les FARC de dix de leurs<br />
otages, propose à la France d'accueillir<br />
les rebelles détenus, mais<br />
les FARC exigent leur libération<br />
en Colombie.<br />
—9 juillet. La France envoie un<br />
avion dans l'Amazonie brésilienne<br />
pour récupérer Ingrid Betancourt,<br />
en cas de libération. L'opération<br />
échoue.<br />
■2004<br />
— 26 février. A la demande de<br />
M. Uribe, la France manifeste sa<br />
disponibilité à accueillir sur son<br />
sol les guérilleros relâchés.<br />
— 8 novembre. Les FARC refusent<br />
une proposition d'échange<br />
du président Uribe.<br />
■2005<br />
— 3 août. Les FARC réclament,<br />
comme conditions préalables à<br />
des négociations, le retrait de la<br />
force publique des municipalités<br />
de Pradera et Florida (sud-ouest)<br />
et le retour de deux de leurs dirigeants<br />
extradés aux Etats-Unis.<br />
Les autorités refusent.<br />
— Septembre. Le gouvernement<br />
colombien accuse la France<br />
d'«ingérence» dans ses affaires<br />
intérieures après l'envoi secret<br />
d'un émissaire français.<br />
■2006<br />
— 23 juin. Les FARC se décla-<br />
PHOTO : D. R.<br />
rent «disponibles et volontaires»<br />
pour un accord humanitaire.<br />
— 24 septembre. Dans une vidéo<br />
des FARC, 12 députés colombiens<br />
retenus en otages demandent<br />
au gouvernement<br />
d'accepter la démilitarisation demandée<br />
par la guérilla.<br />
— 28 septembre. Le président<br />
Uribe accepte de démilitariser les<br />
municipalités de Florida et de<br />
Pradera (sud-ouest) et de les déclarer<br />
«zone de rencontre» pendant<br />
45 jours.<br />
■2007<br />
— 4 juin. A la demande de Nicolas<br />
Sarkozy, Rodrigo Granda,<br />
haut dirigeant des FARC, est libéré<br />
pour contribuer à l'ouverture<br />
de négociations et part à Cuba le<br />
18.<br />
— 28 juin. Les FARC annoncent<br />
la mort de 11 des 12 députés<br />
qu'elles détenaient depuis cinq<br />
ans et qui figuraient parmi les<br />
otages susceptibles d'être échangés.<br />
—19 août. Le président vénézuélien<br />
Chavez propose ses bons<br />
offices comme médiateur.<br />
— 20 novembre. Hugo Chavez<br />
se rend à Paris les mains vides<br />
alors qu'il avait promis d'apporter<br />
des preuves de vie.<br />
— 22 novembre. Alvaro Uribe<br />
met fin à la médiation de Chavez.<br />
— 30 novembre. Trois guérilleros<br />
des FARC en possession de<br />
vidéos avec des preuves de vie de<br />
plusieurs otages, dont Ingrid Betancourt<br />
sont capturés par l'armée<br />
colombienne.<br />
— 6 décembre. Nicolas Sarkozy<br />
envoie un message audio et vidéo<br />
au chef des FARC.<br />
— 7 décembre. Alvaro Uribe annonce<br />
la création d'une zone de<br />
Marulanda,<br />
le chef des<br />
FARC<br />
Manuel Marulanda Vélez, né le 12<br />
mai 1930, est le nom de guerre de<br />
Pedro Antonio Marin souvent surnommé<br />
Tirofijo «Tir précis», chef et<br />
fondateur du groupe guérillero colombien<br />
des FARC, Fuerzas Armadas<br />
Revolucionarias de Colombia.<br />
Il est le plus ancien leader d'un groupe révolutionnaire encore<br />
actif. C'est aux débuts des années 1950 qu'il fonde une milice<br />
paysanne d'autodéfense. La Colombie est alors la proie à la<br />
Violencia, une guerre civile sanglante d'une grande sauvagerie<br />
qui à la fin des années 1940, début des années 1950, voit<br />
des persécutions paysannes par une police inféodée au parti<br />
conservateur. La Colombie vit alors dans l'anarchie. En campagne,<br />
se créent de nombreuses milices d'autodéfense dont<br />
beaucoup se livrent au banditisme. Pas celle créée par Tirofijo.<br />
Influencé par le marxisme-léninisme et par la révolution<br />
cubaine, le jeune agriculteur transforme alors sa milice en<br />
1964 avec une cinquantaine d'autres paysans et leurs familles,<br />
en Forces armées révolutionnaires de Colombie, les<br />
FARC. Vivant dans la clandestinité depuis plus de 40 ans dans<br />
la jungle colombienne, on pense qu'il n'a pas mis les pieds<br />
dans une ville depuis plus de 30 ans et qu'il ne s'est jamais<br />
rendu à Bogota. Il n'a jamais été arrêté bien que tous les présidents<br />
successifs de Colombie aient promis de le faire. En 40<br />
ans, il a créé une véritable organisation de près de 17 000 soldats.<br />
Les FARC sont reconnues comme organisation terroriste<br />
par les Etats-Unis et l'Union européenne.<br />
Uribe,<br />
le président<br />
intransigeant<br />
Réélu en 2006, Alvaro Uribe Vélez,<br />
né le 4 juillet 1952 à Medellin, est<br />
depuis le 7 août 2002 le président<br />
de la Colombie. Avocat, ancien<br />
gouverneur, il fut membre du Parti<br />
libéral – l'un des deux partis traditionnels<br />
colombiens avec le parti<br />
conservateur –, qu'il quitta pour se présenter en tant que candidat<br />
indépendant lors de l'élection présidentielle de 2002.<br />
Soupçonné de liens avec les cartels de la drogue, selon un<br />
rapport de la Defense Intelligence Agency (DIA) datant de<br />
1991, de complicité avec les groupes paramilitaires d'extrême-droite,<br />
Uribe s'est néanmoins associé avec, dès son arrivée<br />
au pouvoir, avec les Etats-Unis dans leur guerre contre le<br />
terrorisme et il a poursuivi le plan Colombie de lutte antidrogue.<br />
Il a proposé une quasi-amnistie des forces d'autodéfenses<br />
unies de Colombie (AUC, des paramilitaires d'extrême<br />
droite), et obtenu que plusieurs milliers (ou dizaines de milliers)<br />
des membres de ces milices déposent les armes, ce qui<br />
pose le problème de leur réinsertion. Il n'a pas établi de dialogue<br />
avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie<br />
(FARC, groupe d'extrême gauche), après l'échec de son prédécesseur.<br />
Les conditions préalables qu'il pose et celles que posent<br />
les FARC avant de commencer des négociations sont pour<br />
le moment incompatibles. Il a néanmoins réussi à faire reculer<br />
l'insécurité : près de 500 otages ont été libérés par des opérations<br />
de police en deux ans, et le nombre d'homicides est passé<br />
de 28 700 à 18 000 de 2002 à 2005.