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<strong>and</strong> <strong>Responsibilities</strong> <strong>of</strong> <strong>Non</strong>-<strong>State</strong> <strong>Actors</strong><br />

LES FEMMES ET LES PRATIQUES COUTUMIERES ET<br />

RELIGIEUSES DU MARIAGE EN REPUBLIQUE DE<br />

Dejo Olowu<br />

GUINEE<br />

Michèle Sona Koundouno-N’diaye<br />

Research Partnership 2/2007<br />

The <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights


Les femmes et les pratiques coutumières et religieuses<br />

du mariage en République de Guinée<br />

Michéle Sona Koundouno-N´diaye<br />

3


Les femmes et les pratiques coutumières et religieuses du mariage en République de<br />

Guinee<br />

Michèle Sona Koundouno-N’Diaye<br />

Research Partnership 2/2007, The <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights<br />

This research paper has been produced as a part <strong>of</strong> the Research Partnership Programme<br />

at the <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights, with financial assistance provided by Danida.<br />

However, the statements, facts <strong>and</strong> opinions expressed in the publication are the<br />

responsibility <strong>of</strong> the personal author <strong>and</strong> do not necessarily reflect the position or<br />

opinion <strong>of</strong> the <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights or Danida.<br />

© 2008 Michèle Sona Koundouno-N’diaye<br />

Parts <strong>of</strong> the report may be photocopied or otherwise reproduced if<br />

author <strong>and</strong> source are quoted.<br />

Editorial preparations: Nina Svaneberg<br />

Print: Det Samfundsvidenskabelige Fakultets Reprocenter<br />

ISBN 87-91836-23-9<br />

EAN 9788791836237<br />

Bibliographic in<strong>for</strong>mation according to the Huridocs St<strong>and</strong>ard Format<br />

Title: Les femmes et les pratique coutumieres et religieuses du mariage en Guinee<br />

Personal author: Michèle Sona Koundouno-N’diaye<br />

Corporate author: The <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights<br />

Series title: Research Partnership 2/2007<br />

Index terms: Africa / human rights / gender discrimination<br />

Printed in Denmark 2008<br />

The <strong>Danish</strong> <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights<br />

56 Str<strong>and</strong>gade<br />

1401 Copenhagen K<br />

Tel: + 45 32 69 88 88<br />

Fax: + 45 32 69 88 00<br />

E-mail: center@humanrights.dk<br />

4


TABLE DES MATIERES<br />

BIOGRAPHIE, EXPERIENCE ET REMERCIEMENTS<br />

RESUMÉ<br />

ABREVIATIONS ET SIGLES<br />

INTRODUCTION<br />

A. Bref aperçu du mariage<br />

B. Les objectifs de l’étude et les hypothèses<br />

C. Les outils empruntés et le mode d’analyse des données<br />

I: CONTEXTE DU MARIAGE EN GUINEE<br />

1.1 La problématique<br />

1.2 Les pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée<br />

II: LES FEMMES DANS LE PLURALISME NORMATIF DU MARIAGE<br />

2.1. Que dire des pratiques coutumières et religieuses du mariage<br />

2.2. La dynamique du mariage coutumier et du mariage religieux: Modèles<br />

identifiés<br />

2.2.1. Mariage par alliance : Pacte entre famille et le mariage consensuel<br />

2.2.2. Mariage monogamique et Mariage polygamique<br />

2.2.3. Mariage Endogamique et mariage exogamique<br />

2.2.4. Mariage libre et mariage <strong>for</strong>cé<br />

2.2.5. Mariage précoce et mariage tardif<br />

2.2.6. Lévirat et Sororat<br />

2.2.7. Mariage mixte religieux (Mariage entre deux individus de religions différentes)<br />

2.3. Certains éléments déterminants de la vie du mariage dans ce contexte<br />

III: CARTOGRAPHIE DES PRATIQUES COUTUMIERES ET RELIGIEUSES<br />

IDENTIFIES<br />

3.1. Les pratiques coutumières<br />

3.2. Les pratiques religieuses<br />

5


IV : LES ETAPES CONSTRUCTIVES DU MARIAGE EN GUINEE<br />

4.1. Les manifestations des pratiques coutumières du mariage<br />

4.1.1. Les Relations verticales<br />

4.1.2. Les Relations horizontales<br />

4.2. L’influence des pratiques religieuses dans le mariage<br />

V : IMPACT DE CES PRATIQUES SUR LES FEMMES DANS LE MARIAGE<br />

5.1. La pérennisation de ces pratiques<br />

5.1.1. Les acteurs<br />

5.1.2. Le schémas socio culturels<br />

5.2. L’utilisation de ces pratiques coutumières et religieuses aux fins de contrôle des<br />

femmes dans le mariage<br />

5.3. Persistance du pluralisme des pratiques et pesanteurs<br />

5.3.2. Obstacles à la codification législative<br />

5.3.2.1. Un code civil truffé de dispositions discriminatoires<br />

5.3.2.2. Difficulté d’adoption d’un nouveau code de la famille<br />

5.3.3. Une reconnaissance timide des droits des femmes dans le mariage comme un droit<br />

humain<br />

5.3.4. Perspective pour une meilleure prise en compte de la condition des femmes dans le<br />

mariage<br />

CONCLUSION<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

TABLEAUX:<br />

Tableau 1 : Composition de la dot suivant certaines pratiques coutumières et religieuses<br />

Tableau 2 : Les pratiques coutumières relatives aux femmes dans la vie du couple, données<br />

collectées auprès des femmes mariées (Stériles, ménopausées et veuves) de cinq groupes<br />

ethniques de Guinée<br />

Tableau 3 : Les pratiques coutumières relatives aux femmes dans la vie de couple,<br />

collectées auprès de quelques chefs coutumiers de cinq groupes ethniques de Guinée.<br />

Tableau 4 : Pratiques religieuses du mariage en rapport aux femmes<br />

6


BIOGRAPHIE ET EXPERIENCE<br />

Mme Michèle Sona KOUNDOUNO-N’DIAYE est guinéenne et intervient en tant que<br />

Assistante au Département de Sociologie Elle occupe cumulativement le poste de<br />

Chercheure à l’Université de Sonfonia –Guinée et celui de Directrice de la Chaire<br />

UNESCO-Genre de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry -Guinée. Elle prépare par<br />

mobilité un doctorat en Sociologie à l’Université de Besancon/ Franche Comté en France.<br />

Elle a une expérience de deux ans de conseillère en Développement social et égalité entre<br />

les sexes au Bureau d’Appui à la Coopération Canada-Guinée (BACC) où elle avait pour<br />

mission d’apporter un appui conseil relatif à la stratégie d’intégration de l’égalité entre les<br />

sexes (ES) en Guinée au niveau du BACC et d’assister les ONG partenaires du BACC dans<br />

leurs projets de promotion de l’ES en milieu rural de Guinée.<br />

Elle est aussi membre du Réseau des Chaires UNESCO de l’Afrique de l’Ouest et du<br />

Centre, de DAWN/Afrique (Dévelopment Alternatives with Women <strong>for</strong> a New Era).<br />

L’essentiel de ces actions est axé autour de la problématique des femmes et des enfants en<br />

Guinée.<br />

7


REMERCIEMENTS<br />

A la fin de mon séjour de recherche, je souhaiterais adresser mes sincères remerciements à<br />

l’Institut Danois des Droits de l’Homme (IDDH) de m’avoir <strong>of</strong>fert un cadre idéal m’ayant<br />

davantage outillé sur la thématique du droit de l’homme en général, et spécifiquement sur<br />

le droit de la famille. A travers l’IDDH, je remercie aussi l’équipe de la cellule Afrique de<br />

l’Ouest pour nous avoir in<strong>for</strong>mé de l’existence de ce programme de partenariat, au<br />

Département Recherche pour la collaboration fructueuse et à toute son équipe de<br />

supervision du Research Partnership Program (RPP) 2007 pour le programme de recherche<br />

très enrichissant qui nous a été soumis et pour la franche collaboration.<br />

Ma gratitude à mon superviseur Dr Eva Maria LASSEN pour ces critiques constructives et<br />

pour n’être jamais fatiguée de me lire et relire. Ces commentaires m’ont été d’un gr<strong>and</strong><br />

apport.<br />

Pour avoir assuré mon séjour dans de meilleures conditions, mes sincères remerciements<br />

au Danida Fellowship Center (DFC).<br />

Sans leur autorisation à effectuer ce déplacement et n’eut été leur adhésion à ma démarche<br />

pour les droits des femmes, je ne serais ici à l’IDDH. Je voudrais donc exprimer toute ma<br />

gratitude à mes responsables des Universités de Sonfonia et de Gamal Abdel Nasser de<br />

Conakry..<br />

Collaborer avec les collègues chercheurs de l’Afrique de l’Ouest a été un bonheur et les<br />

échanges ont été très fructueux au cours de ce séjour.<br />

Ma pr<strong>of</strong>onde reconnaissance à l’équipe des enquêteurs de terrain pour leur dynamique<br />

collaboration dans la collecte des in<strong>for</strong>mations et tous ceux qui de près ou de loin<br />

(Copenhague, Sénégal, Guinée), m’ont apporté leur soutien, assistance et concours.<br />

Je voudrais dédier ce modeste travail à mon cher époux Sékou N’DIAYE, qui à peine un<br />

mois de mariage n’a ménagé aucun ef<strong>for</strong>t pour me permettre de prendre part à ce<br />

programme de recherche. Puisse Dieu bénir notre union et le bénir pour, m’avoir compris,<br />

supporté la distance et enfin assisté dans mon analyse des droits de l’homme relatives aux<br />

droits des femmes.<br />

8


RESUME<br />

La présente étude a pour objet de faire ressortir les pratiques coutumières et religieuses du<br />

mariage en Guinée, de décrire ses étapes constructives et de présenter les variables<br />

pertinentes afin de susciter une réflexion sur les discriminations à l’égard des femmes dans<br />

le mariage.<br />

Depuis les années 1960, la Guinée se trouve dans un processus de promotion des droits des<br />

femmes. A cet égard, des textes de loi et de nombreuses conventions internationales ont été<br />

adoptés. Cependant, ces acquis n’ont rien changés à la situation des femmes dans le<br />

mariage. En réalité, la visibilité politique des femmes masque des disparités de genre dans<br />

les relations de mariage. Certaines pratiques coutumières et religieuses du mariage<br />

discriminatoires persistent notamment le mariage polygamique, le mariage <strong>for</strong>cé, le<br />

mariage précoce, le lévirat et le sororat. Ce processus a lieu dans un contexte de pluralisme<br />

normatif et est déterminé par les relations des acteurs, horizontales ou verticales, à travers<br />

un schéma socio culturel<br />

A travers cette étude, il apparaît que la famille, la dot et la progéniture constituent des<br />

éléments déterminants dans l’appréhension des pratiques coutumières et religieuses du<br />

mariage, ce qui expliquerait la perte de ses repères par l’État.<br />

ABSTRACT<br />

The present study aims at identifying customary <strong>and</strong> religious practices <strong>of</strong> marriage in<br />

Guinea; describing the phases <strong>and</strong> elements they involve; <strong>and</strong> presenting the variables that<br />

may raise issues <strong>of</strong> reflection concerning the discrimination <strong>of</strong> women with regard to<br />

marriage.<br />

Since the 1960's Guinean authorities <strong>and</strong> civil society groups have been promoting<br />

women's rights. Successive Guinean governments have legislated in that regard <strong>and</strong><br />

adopted many international conventions. However, these achievements have not changed<br />

the status <strong>of</strong> women in marriage in any significant sense. Women’s presence in public<br />

political life tends instead to mask the fact <strong>of</strong> gender disparities in marriage relationships.<br />

Many customary <strong>and</strong> religious discriminatory practices relating to marriage persist to this<br />

day, including polygamous marriage, <strong>for</strong>ced marriage, early marriage, “levirat” <strong>and</strong><br />

“sororat”. These practices occur within the context <strong>of</strong> normative pluralism <strong>and</strong> follow from<br />

the relations between actors, both horizontally <strong>and</strong> vertically, that are mediated by specific<br />

socio-cultural schemes.<br />

In this study, family, dowry <strong>and</strong> progeny appear as the key elements which help to<br />

underst<strong>and</strong> the customary <strong>and</strong> religious practices <strong>and</strong> which explain in turn why these<br />

practices have become dissociated from the state's benchmarks.<br />

9


INTRODUCTION<br />

A. Bref aperçu du mariage<br />

Le mariage, une valeur de la société connaît aujourd’hui assez de mutations aussi bien en<br />

Occident (des mariages hétérosexuels, on intègre désormais dans les pratiques des mariages<br />

homosexuels 1 ou encore le Pacte Civil de Solidarité « PACS ») que dans les régions<br />

d’Afrique (des mariages endogamique, la population se trouve désormais aussi, face au<br />

phénomène de mariages mixtes locaux et religieux.<br />

Repenser le mariage dans le contexte africain exige une analyse critique de ce qu’il est et<br />

qu’il représente à savoir l’interconnexion entre le code civil et les pratiques coutumières et<br />

religieuses qui le sous tendent. Le mariage se présente en Afrique comme un conditionnel,<br />

une intégration dans le monde adulte et la reconnaissance de sa personnalité en dépendent.<br />

De l’interdépendance du mariage et de ces pratiques, la religion constitue une partie<br />

intégrante de l’héritage culturel guinéen 2 .<br />

L’étude sur les femmes et les pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée<br />

ressort comme une dynamique d’une gr<strong>and</strong>e sensibilité et d’une réelle complexité. Puisque<br />

les individus sont régis par des normes controversées et dans lesquelles les femmes<br />

s’égarent. En d’autres termes, la famille africaine fait face à deux principes à savoir les<br />

pratiques coutumières et les normes religieuses qui ont pour conséquence l’adoption des<br />

textes de lois truffés de dispositions discriminatoires à l’égard des femmes et le<br />

ren<strong>for</strong>cement de l’autorité masculine dans le mariage. LAGOUTTE, S et LASSEN, E.<br />

M 3 (2006 :33-59), soutiennent dans un contexte européen, que les incompatibilités dans<br />

plusieurs cas entre pratiques religieuses et normes légales sont représentées comme des cas<br />

de droits humains, ce qui pourrait aussi d’une certaine manière s’observer en Guinée et<br />

motive notre intérêt dans le cadre de cette recherche de porter un regard sur ce phénomène.<br />

Dans la mesure où, ces auteurs 4 citent les phénomènes concernant les rapports sociaux de<br />

sexe, la famille et les enfants, la liberté d’expression à l’intérieur des communautés<br />

1 Butler, Judith, 1990, Gender Trouble, Feminism <strong>and</strong> the subversion <strong>of</strong> identity, New York, Routledge.<br />

2 Les femmes interviewées en Guinée dans la région du Fouta/les Peulhs, surtout celles qui sont stériles estiment que leur<br />

sort est la volonté de Dieu. De manière récurrente, dès qu’elles n’arrivent pas à donner une explication à un phénomène ou<br />

alors pour mieux se consoler disent ceci : "C’est Dieu qui a fait que je n’ai pas eu d’enfants, c’est Dieu qui a fait que les<br />

autres en ont eu. C’est Dieu, il est dèsfois injuste ». Pour cette femme stérile interviewée, « la femme stérile,<br />

traditionnellement est considérée comme une femme punie de Dieu » (interview réalisé en mai 2007 á Labé dans la sous<br />

préfecture de Sannou en Guinée)<br />

3 Chercheures à l’Institut Danois des Droits de l’Homme à travers leur article « Meeting the challenge : Redefining<br />

Europe’s classical model <strong>for</strong> state intervention in religious practices » tiré du livre Netherl<strong>and</strong>s quarterly <strong>of</strong> Human<br />

Rights, vol 24/1,<br />

4 Lagoutte, S et Lassen , E,M (2006 :33)<br />

11


eligieuses, etc., comme les clivages à l’intérieur desquels se dégagent de manière visible<br />

les écarts entre les pratiques religieuses et les droits humains.<br />

La dynamique du mariage en Afrique repose sur les coutumes et la place accordée à la<br />

religion 5 . Dans cette diversité normative, les femmes sont celles qui paient le plus lourd<br />

tribut. L’existence de la Convention sur l’Elimination de toutes sortes de Discrimination à<br />

l’Egard des Femmes (CEDEF), du code de la famille dans certains pays, de toutes les<br />

conventions (SYMONIDES, J et VOLODINE, V, 1998) et la visibilité participative des<br />

femmes africaines dans la vie publique à l’heure actuelle qui masque les inégalités<br />

correspondantes entre les hommes et les femmes qui réduisent le bien être des femmes dans<br />

leur ménage et leur capacité à remplir leurs aspirations de la vie (CODESRIA, 2005 :24).<br />

Bien que ce phénomène de pluralité des normes ne soit ni l’apanage des régions d’Afrique,<br />

ni un phénomène scientifiquement contemporain 6 , au regard de ce qui précède, l’on se<br />

poserait tout de même les questions suivantes : comment fonctionne ce nomadisme<br />

normatif qui influence le mariage en Guinée? Quels sont les facteurs qui contribuent à cette<br />

diversité de pratiques à l’égard des femmes ? Sur quel contrat de régulation fonctionne le<br />

mariage en Guinée ? Qui sont les acteurs impliqués, de quelle manière et à quel moment ?<br />

Peut être qu’à travers ces interrogations, certains estimeront que je soulève des problèmes<br />

où il n’en faut pas, et que d’autres s’y retrouvent et sont donc curieux de parcourir entre les<br />

lignes, quoiqu’il en soit, cette recherche vise donc à susciter une analyse critique du<br />

mariage dans le contexte guinéen, afin de cerner les interrelations et la problématique des<br />

enjeux controversés liés à la religion, aux coutumes et aux femmes.<br />

Certes en comparaison à d’autres pays, et par rapport au mariage, l’on pourrait supposer<br />

que la Guinée n’apporte pas beaucoup de discussions sur les problèmes légaux affectant le<br />

mariage. Toutefois, les réalités de l’interdépendance entre coutumes, religions et droit<br />

étatique de la famille, dans un monde en pleine mutation engendre sûrement des processus<br />

complexes, mais aussi posent des défis sans précédent aux femmes de tous horizons dans<br />

5 En Guinée, le mariage n’est reconnu que s’il est célébré sous sa <strong>for</strong>me coutumière et que la dot (normalement la dot en<br />

Guinée est plutôt une compensation matrimoniale, puisque les parents du futur époux apporte des cadeaux aux parents de<br />

sa future épouse et aussi pour son épouse ce que l’on appelle « faire la valise de sa femme ») soit payée. Dans le cas d’un<br />

couple musulman, la cérémonie se fait de manière simultanée c’est á dire aucune différence entre le mariage religieux et<br />

coutumier puisque tout se fait au même moment. Par contre, lorsqu’il s’agit d’un couple mixte musulman ou totalement<br />

musulman, l’homme paie donc deux dot, la dot coutumière déjà expliquée et le Sadaq qui elle est la dot religieuse qui est<br />

même plus obligatoire dans cette condition ci. Pour d’amples détails voir l’analyse sur les éléments<br />

déterminants/sociologiques du mariage 2.3.<br />

6 (Sous la direction de Winter Gérard), CHAUVEAU, JP, LE PAPE, M, OLIVIER DE SARDAN, JP, « Inégalités et<br />

politiques publiques en Afrique: Pluralités et jeux d’acteurs», La pluralité des normes et leurs dynamiques en Afrique:<br />

Implications pour les politiques publiques, eds Karthala et IRD, 2001 :145<br />

12


leur existence personnelle. Défis que la religion, la société et les individus suivant toute<br />

apparence, suscitent, intensifient et justifient.<br />

Pour appréhender ce phénomène de mariage, l’analyse a porté sur «Les femmes et les<br />

pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée». Ce phénomène connaît trois<br />

modes de régulation qui passent tout d’abord par celui coutumier 7 , ensuite suivie selon la<br />

religion des futurs époux du mariage religieux ou du mariage civil. Chacune de ces<br />

pratiques est régie par des normes et principes auxquels l’individu doit se con<strong>for</strong>mer pour<br />

voir ses droits garantis dans la famille. Un mariage qui n’a pas été coutumier n’est pas<br />

reconnu dans la conception du guinéen, alors que celui aussi non célébré par un chef<br />

religieux n’est pas aussi reconnu par les principes religieux. D’ailleurs très souvent en<br />

Guinée, le mariage religieux musulman connaît une <strong>for</strong>te imbrication à celui coutumier<br />

alors que le mariage chrétien se démarque de celui coutumier. La coexistence religieuse<br />

permet tout de même une <strong>for</strong>te tolérance au mariage religieux mixte, même si encore<br />

difficile à admettre par certains groupes ethniques. Enfin, le mariage civil est celui établi<br />

par l’Etat qui hérite du code civil français 8 , celui lui ci ne reconnaît que les mariages<br />

contractés devant l’autorité de l’Etat civil.<br />

Choisir ce thème comme point d’ancrage pour cette étude résulte de la difficulté qui<br />

s’observe dans la ratification du code de la famille en Guinée. Mieux, l’adoption du<br />

nouveau code civil qui semble avoir pris en compte l’ensemble des dispositions contenues<br />

dans le précédent projet de loi « Code de la famille et des personnes ». Ce qui par ricochet,<br />

amène à se poser la question sur la problématique de la famille en Guinée et les éventuels<br />

freins auxquels les femmes se butent. A coup sûr, des éléments explicatifs qui se<br />

dégageront aideront à <strong>for</strong>muler certaines recomm<strong>and</strong>ations pour une meilleure<br />

reconnaissance des droits des femmes dans le mariage comme une partie intégrante des<br />

droits de l’homme.<br />

B. Les objectifs de l’étude et les hypothèses<br />

L’objectif de cette recherche est de comprendre et d’expliquer certaines pratiques du<br />

mariage en Guinée en rapport aux femmes.<br />

7 Le mariage coutumier est le mariage contracté suivant les normes coutumières. A savoir l’alliance entre deux familles<br />

et la présentation de la dot qui est l’élément symbolique qui valide ce mariage en Guinée. Les témoins sont les parents et<br />

la parole donnée. Ce type de mariage est très complexe et comprend à lui seul la typologie de mariage présentée dans le<br />

point « 2.2.la dynamique du mariage coutumier: Modèles identifiés ». Le mariage religieux est celui reconnu selon la<br />

religion. Soit le marabout ou l’Imam pour l’islam ou soit le prêtre pour les catholiques. Le mariage civil est celui reconnu<br />

par l’autorité de l’Etat civil, la <strong>for</strong>me contemporaine de mariage et celui reconnu par la loi en Guinée.<br />

8 Emprunt du code civil français mais qui a la spécificité d’unification et de réponses aux revendications des citoyens. La<br />

régulation de la famille se fait sur la base de conciliation entre deux systèmes existants et voulant des changements.<br />

Carbonnier, 2004, 122-125),<br />

13


Les objectifs spécifiques sont entre autres:<br />

Dégager les pratiques coutumières et religieuses du mariage pouvant permettre de<br />

décrire et d’analyser le mariage dans le contexte guinéen qui, à son tour pourrait avoir les<br />

mêmes explications dans certains pays laïcs d’Afrique au sud du Sahara mais <strong>for</strong>tement<br />

islamisés ;<br />

De décrire les étapes constructives du mariage en vue d’appréhender les interrelations et<br />

la coexistence normative qui le régisse ;<br />

De présenter certaines variables pertinentes contribuant à pérenniser ces pratiques<br />

coutumières et religieuses et qui sont quelques fois très discriminatoires à l’égard de la<br />

femme dans le mariage<br />

De poser une analyse critique des ressemblances et dissemblances existant entre les<br />

pratiques coutumières et les pratiques religieuses du mariage ;<br />

De susciter une réflexion commune qui permettra d’identifier des dispositions<br />

pertinentes susceptibles de faire infléchir l’ampleur des discriminations perpétrées contre<br />

les femmes.<br />

Pour appréhender ce phénomène des pratiques du mariage et des femmes, deux hypothèses<br />

s’avèrent pertinentes. Tout d’abord, nous présumons que si la notion de pratique en Guinée<br />

fait référence à celle de normalisation, et au regard des mutations qui s’opèrent dans le<br />

mariage qui malgré tout ne déconstruisent pas le social pour donner aux femmes le droit<br />

d’avoir le droit dans le mariage, l’on retiendrait aisément qu’il y a juxtaposition et/ou<br />

coexistence entre deux valeurs reconnues et ayant les mêmes contrepoids dans bon nombre<br />

de régions d’Afrique à savoir les pratiques religieuses du mariages d’une part et, de l’autre,<br />

les pratiques coutumières du mariage. De cette logique résulte, la seconde hypothèse, celle<br />

qui repose la nature patriarcale de la condition imposée aux femmes qui ne souhaiterait pas<br />

changer le cours normal de la vie du couple.<br />

C. Les outils empruntés et le mode d’analyse des données<br />

L’étude sur les femmes et les pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée et<br />

la possibilité de confirmer ou d’infirmer nos hypothèses ont abouti à exploiter divers<br />

catégories de sources 9 dont deux des plus essentiels, à savoir l’exploitation des sources<br />

documentaires et la réalisation de quelques entrevues, les séminaires et les échanges<br />

interpersonnels.<br />

La revue documentaire est tenue pour un point essentiel de beaucoup de recherches. Elle est<br />

un outil dynamique d’appréhension d’un phénomène social. Elle a constitué l’une des<br />

9 LE MEUR, Pierre-Yves, Approche qualitative de la question foncière, Note méthodologique, Document de travail de<br />

l’unité de Recherche 095, N :4, IRD RÉFO, Montpellier, 2002<br />

14


matières même de la recherche et de diversification de nos éclairages. (Combessie, J,C,<br />

2003 :14)<br />

A travers la revue documentaire deux étapes de collectes de données ont été faites. La<br />

première étape à aidé à appréhender le phénomène à travers l’exploitation des ouvrages<br />

généraux relatifs aux droits de l’homme, au droit de la famille, les ouvrages spécifiques<br />

relatifs au mariage, aux pratiques coutumières et religieuses en rapport à la vie du mariage,<br />

les revues spécialisées sur les femmes dans le mariage en Afrique, la religion et les droits<br />

de l’homme, les rapports d’études et d’évaluation traitant de la situation des rapports<br />

sociaux de sexe en Guinée, les portails de certains sites sur toute cette problématique qui<br />

ont permis de présenter le contexte et à apporter une analyse critique sur les femmes dans le<br />

mariage. Cette étape a été permanente car elle s’est faite en amont et en aval de notre<br />

recherche.<br />

La seconde étape de la revue documentaire ressort très essentielle dans l’analyse de ce fait<br />

social. Elle a servi à dégager au moins deux gr<strong>and</strong>es théories explicatives susceptibles de<br />

jeter les bases d’une réflexion soutenue. Même si l’analyse stratégique 10 , à certains<br />

moments, a servit à poser des argumentaires des phénomènes observés. Tout de même de<br />

manière pointue, ce thème traitant du mariage en Guinée à travers ces pratiques<br />

coutumières et religieuses, a donc eu pour trame de fond et cadre d’analyse que, l’approche<br />

des rapports sociaux de sexe et l’approche du pluralisme normatif. Ces deux approches,<br />

d’une part reconnaissent la diversité du genre humain ayant chacun une valeur à<br />

sauvegarder et de l’autre, défendent le respect des droits humains.<br />

L’approche des rapports sociaux de sexe est la construction sociale de la différence des<br />

sexes. Mais il importe de préciser ce que représente la construction sociale. Le construit<br />

social dans ce domaine revêt trois dimensions d’après Anne Revillard et Laure de Verdalle.<br />

Une première dimension matérielle s’incarnant dans des comportements, des statuts<br />

différenciés selon le sexe, et une distribution inégale des ressources et des espaces sociaux<br />

entre hommes et femmes. La seconde dimension revêt un caractère symbolique, puisqu’il<br />

renvoie aux significations et aux valeurs socialement rattachées au masculin et au féminin.<br />

Dans cette optique l’approche des rapports sociaux de sexe constitue bien un principe<br />

structurant d’organisation de la société indépendamment même de la question relative à la<br />

place des femmes et des hommes. Enfin, la troisième dimension qui se dégage est que le jeu<br />

de ces deux auteurs met l’accent particulier sur le « genre » en tant que rapport social<br />

15


construit sur la différence. Cette différence est intrinsèquement un rapport de pouvoir,<br />

déclinable en termes hiérarchique et en terme de normes d’une part, et de l’autre, une<br />

supériorité sociale des significations et valeurs associées au masculin sur celles associées au<br />

féminin. ( Economie et Humanisme, 2006:1).<br />

C’est ainsi que, Francisco,G 11 (DAWN, 2002 :17), présente que la position, les droits et les<br />

devoirs différenciés de la femme, notamment son assujettissement historique à l’autorité<br />

masculine ou le contrôle de sa reproduction et de sa sexualité par les hommes et les<br />

religieux, tendent à être induit comme partie intégrante d’un système communautaire<br />

alternatif, plus égalitaire.<br />

L’enjeu porteur de cette approche des rapports sociaux de sexe n’est pas que l’étude<br />

systématique et unidimensionnelle des femmes (de leur égalité vis-à-vis des droits, de leur<br />

place dans la société…) mais la qualité de la vie collective au bénéfice de tous. La mixité et<br />

la parité qui en résultent comme stratégie d’intervention ne sont pas tant des objectifs<br />

<strong>for</strong>mels à atteindre que des leviers de développement à dynamiser, sur une base « d’égalité<br />

entre les genres humains différents ». (Berthe, V, Economie et Humanisme, 2006 :10).<br />

Bref, l’approche des rapports sociaux de sexe aide à cerner les disparités existant entre les<br />

hommes et les femmes dans leur interrelation.<br />

Cette approche de pluralisme juridique défend la thèse que le droit est multiple et<br />

hétérogène. Selon cette approche, au même moment dans le même espace social, peuvent<br />

coexister plusieurs systèmes juridiques, le système étatique certes, mais d’autres avec lui,<br />

indépendants de lui, éventuellement ses rivaux. Carbonnier (2004 : 362) reprenant Gény<br />

dans « les méthodes d’interprétations et sources» affirme que cette approche se trouve en<br />

pointillé chez quelques juristes qui admettaient au pr<strong>of</strong>it de certaine communautés un<br />

pouvoir autonome de créer du droit, soit sous sa <strong>for</strong>me législative, soit sous sa <strong>for</strong>me<br />

coutumière.<br />

De cette présentation, il ressort qu’au-delà du pluralisme il y a plutôt des phénomènes de<br />

pluralisme, d’une extrême diversité que CARBONNIER (2004 : 358) classerait comme<br />

10 BERNOUX, P, 1999, la sociologie des organisations, Initiation théorique suivie de douze cas pratiques, 5 e éditions,<br />

Paris Seuil. L’analyse stratégique est une théorie de la théorie des organisations qui défend la thèse que les organisations<br />

sont régit par le jeu des acteurs.<br />

11 Coordinatrice régionale «Asie du Sud-Est» de l’organisation interrégionale autonome du Sud «DAWN»<br />

(Développement Alternatives with Women <strong>for</strong> a New Era) qui agit comme réseau et catalyseur pour le plaidoyer en faveur<br />

de processus de développement alternatifs, mettant l’accent sur les besoins de base des populations du monde,<br />

particulièrement ceux des femmes du tiers monde résidant dans le Sud.<br />

16


suit: phénomènes collectifs et phénomènes individuels, phénomènes de concurrence et<br />

phénomènes de récurrence et enfin le phénomène catégorique et phénomène diffus. De<br />

cette première classification suivant les types de phénomènes, se fait aussi une autre selon<br />

les civilisations. Il y a par exemple selon Carbonnier dans la pluralité des coutumes<br />

françaises en matière successorale, la survivance des droits féodaux dans l’ouest et enfin le<br />

pluralisme post colonial. En Afrique au sud du Sahara, l’on se trouve face à un pluralisme<br />

post colonial. Selon ce type de pluralisme, toute colonisation est un clash entre deux<br />

cultures et après le reflux de colonisateurs, des effets du clash persistent en <strong>for</strong>me de<br />

pluralisme juridique. Il s’installe alors un conflit à domicile à la recherche du droit. Pour<br />

cela, ces auteurs tel que G :A Kouassigan (Tradition et modernisme dans le droit privé de<br />

l’Afrique Francophone, Dakar, 1974), Berouel, (Droit de la Famille au Sénégal, 1981),<br />

Agostini, (Droit Comparé, 1988, n¤138 ); Amsatou Sow Sidibé, (le pluralisme juridique en<br />

Afrique, l’exemple du droit successoral sénégalais, Paris, 1991) pour ne citer que ceux-ci,<br />

sont certains qui ont apporté leur contribution dans l’analyse de ce phénomène en Afrique<br />

en peignant le décor du pluralisme juridique africain. (Carbonnier, 2004 :364)<br />

A travers cette approche, il ressort que le sens des concepts varie selon les sociétés. Pour<br />

Arnaud et Roul<strong>and</strong> repris par HESSELING, G, et al, (2005:9): « lorsqu’il s’agit de<br />

concepts clés, le sens varie considérablement de la coexistence d’une pluralité de cadres ou<br />

systèmes de droit «au sein d’une unité d’analyse sociologique donnée » à l’insistance « sur<br />

le fait qu’à la pluralité des groupes sociaux correspond des systèmes juridiques multiples »<br />

et à l’accentuation de l’existence de « plusieurs systèmes juridiques à la fois ».<br />

Selon le même auteur, malgré les différences, le point essentiel reste le même: une mise en<br />

cause de la conception simultanée de plusieurs systèmes juridiques ou du moins normatifs,<br />

dans une situation sociale donnée.<br />

Dans cette situation, ressort la juxtaposition entre les normes de l’état et celles des<br />

conventions communautaires diverses existant en Guinée et aussi, le sens a donné au droit<br />

peut être polysémique selon que l’individu soit dans l’un ou l’autre côté. De cette manière,<br />

Tamanaha 12 (2000 :313) présente le droit non pas comme une entité donnée mais comme<br />

une construction d’origine culturelle et qui par conséquent, plaide pour une version « non<br />

essentialiste » du droit et du pluralisme juridique. Ce qui a été suivi par les socio<br />

scientifiques, qui eux aussi le définissent comme tout ce que les gens identifient et traitent<br />

en tant que tel dans leurs pratiques sociales<br />

12 Tamanaha Brian, Z est Pr<strong>of</strong>esseur de droit à l’université St John’s à New York. Tamanaha, Brian T, « A <strong>Non</strong>-<br />

Essentialist Concept <strong>of</strong> Legal Pluralism," 27 Journal <strong>of</strong> Law <strong>and</strong> Society 296, 2000<br />

17


L’approche du pluralisme juridique, serait donc cette théorie qui pousse à orienter les<br />

réflexions sur les différentes sources de légitimité, qui s’appuient sur les lois coutumières et<br />

religieuses et par conséquent sont liées aux pratiques du droit étatique et lesquels sont un<br />

phénomène nouveau 13 . (WEILENMAM, M, 2007 :95-102).<br />

Partant de là, les pratiques rationnelles seraient donc des <strong>for</strong>mes d’application du droit<br />

selon une région donnée. Cependant, dans le cas africain, sur la foi de la revue de la<br />

littérature sur le droit en Afrique, ce droit pourrait donc être considéré comme une loi<br />

érigée en la faveur des hommes et au détriment des femmes. Aussi riche que soit cette<br />

culture, certaines de ces règles contribuent à maintenir la femme dans une position<br />

d’infériorité. Du moment qu’il y a une énorme disparité entre le droit étatique et celui<br />

coutumier d’une part, et de l’autre des imperfections à l’intérieur de ces mêmes normes en<br />

les mettant dans un même contexte.<br />

Pour terminer l’analyse critique de ces théories, l’on noterait que, relative à la famille, ces<br />

approches (pluralisme juridique 14 combinée à l’approche des rapports sociaux de sexe 15 ),<br />

ressortent une gr<strong>and</strong>e utilité pour une meilleure compréhension et une meilleure analyse<br />

aussi bien du droit de la famille que la condition des femmes dans le mariage en Afrique.<br />

Puisque le principe juridique de la famille africaine se trouve réfuté par des systèmes<br />

coutumiers et religieux, qui caractérisent une diversité, une complexité et une utilité<br />

relative.<br />

Tous ces ouvrages, articles, revues, bulletins, rapports d’études nationales et internationales<br />

et portails de sites internet ont été accessibles via la bibliothèque de l’Institut Danois des<br />

Droits de l’Homme (IDDH), le département recherche de l’IDDH, les sites spécialisés<br />

disponibles à travers l’IDDH et les rapports d’études internes à la Guinée. La revue<br />

documentaire qui a constitué la première méthode de recherche, a été complétée par des<br />

13 Dr WEILENMAM, Marcus, GTZ/Bureau de recherche sur les conflits dans les pays en développement, Zürich-<br />

Rüschlikon, Suisse. Son article est : « Le pluralisme juridique : Un nouveau défi pour les agences d’Aide au<br />

développeemnt », dans Penal Re<strong>for</strong>m International et la Bluhm legal clinic, « L’accès à la justice en Afrique et au-delà,<br />

PRI, 2007.<br />

14 CARBONNIER, J, Sociologie Juridique, PUF, Paris, 2004 ; HESSELING, Gerti, Djiré Moussa et OOMEN Barbara<br />

(eds), Le droit en Afrique – Expériences locales et droit étatique au Mali, Karthala (Paris) et Afrika –studiecentrum<br />

(Leyde), 2005 ; KOUASSIGAN, Guy Adjeté, Famille, droit et changement social en Afrique Francophone, « Famille,<br />

Droit et Changement social dans les sociétés contemporaines, université Catholique de Louvain, 1978; LUND, C,<br />

« Inégalités et politiques publiques en Afrique : Pluralités et jeux d’acteurs», Les ré<strong>for</strong>mes foncières dans un contexte de<br />

pluralisme juridique et institutionnel : Burkina Faso et Niger, eds Karthala et IRD, 2001, PP : 181-193 ; Weilenmann, M,<br />

(sous la direction de Penal Re<strong>for</strong>m International et la Bluhm legal clinic), « L’accès à la justice en<br />

Afrique et au-delà », Le pluralisme juridique : un nouveau défi pour les agences au développement, PRI, 2007, 95-<br />

102.<br />

18


entretiens semi-dirigés qui ont été réalisés auprès de certaines communautés ethniques en<br />

Guinée. Aussi, les échanges interpersonnels (entrevues exploratoires) suite aux discussions<br />

et séminaires organisés à l’IDDH au cours de notre séjour.<br />

Le choix de l’entrevue semi directif comme outil de collecte des données empiriques<br />

s’explique par notre volonté d’atteindre l’objectif relatif à l'élaboration d’une cartographie<br />

des pratiques coutumières et religieuses relatives au mariage en Guinée. L’entrevue semi<br />

directif a servi à appréhender plus en pr<strong>of</strong>ondeur les impressions et opinions, car cette<br />

méthode de collecte des données laisse la latitude à l’interviewé de se prononcer dans les<br />

moindres détails par rapport à la thématique. Une recherche de visée qualitative et<br />

priorisant la qualité des in<strong>for</strong>mations, voir leur pertinence. Les entrevues semi directifs sont<br />

les plus enclins à cerner toutes les subtilités de cette recherche que le questionnaire qui lui<br />

travaille sur la loi des gr<strong>and</strong>s nombres ressortant les disparités numériques (GRAWITZ, M,<br />

2001). Tout de même dans notre perspective de recherche ultérieure, le questionnaire<br />

pourrait aider à cerner l’ampleur de la mixité religieuse du mariage en Guinée mais aussi<br />

l’ampleur de toutes ces pratiques présentées.<br />

Cependant, à travers l’entrevue semi directif, nous avons pu dégager la diversité qui se situe<br />

aussi bien au niveau des pratiques coutumières qu’au niveau des pratiques religieuses<br />

présentes en Guinée. L’analyse de ces données a prouvé que des re<strong>for</strong>mes en matière de<br />

droit de la famille ne peuvent évoluer sans une base de références conséquente exposant la<br />

diversité culturelle (coutumes et religions) au niveau interne dans un même pays mais aussi<br />

suivant différents pays. Puisque par exemple, le mariage est aussi différent selon la<br />

coutume, la religion, et l’individu lui-même. Ainsi les entrevues empiriques ont aidé à<br />

comprendre en pr<strong>of</strong>ondeur le sens des comportements des communautés ethniques<br />

guinéennes.<br />

La Guinée est un pays multiculturel et multiracial dont les principaux groupes ethniques<br />

sont composés de Peulhs, de Maninkas, de Soussous, et d’un ensemble de petits groupes<br />

ethniqus: les Kissias, les Tomaset les Kpèlès rassemblés sur un même territoire appelé la<br />

Guinée Forestière 16 (DNS et Measure, 2000:1-7). Comme population cible, il y a eu 15<br />

15 LE BRAS CHOPARD, A, (sous la direction de Margaret Maruani), femmes, Genre et sociétés, l’état des savoir, la<br />

découverte, Paris, 2005 : 76-83 ; SOW, F, « Penser les femmes et l’islam en Afrique : une approche féministe »,<br />

contribution à Mama Africa. Mélanges <strong>of</strong>ferts à Catherine Coquery-Vidrovitch. 2005, Paris, L’Harmattan.<br />

16 Direction Nationale de la Statistique de Guinée (DNS) et Macro International Inc (MEASURE DHS+), Enquête<br />

Démographique et de Santé, Guinée 1999. Mai 2000 Calverton, Maryl<strong>and</strong> USA. Ce rapport présente les principaux<br />

résultats de la 2ème enquête démographique et de santé (EDSG-II) réalisée en Guinée en 1999 par la Direction Nationale<br />

de la Statistique. L’enquête a bénéficié d’un appui de l’USAID, du FNUAP, de la BM dans le cadre du Projet Population<br />

et Santé Génésique, l’OMS et l’UNICEF. Ce travail fait partie du programme mondial des enquêtes démographiques et de<br />

19


femmes mariées (5 femmes stériles, 5 femmes ménopausées, 5 femmes veuves) suivant 5<br />

des 6 groupes ethniques importants, 5 chefs coutumiers (Sages du village) respectivement<br />

pris chacun dans une Communauté Rurale de Développement (CRD). C’est autour des<br />

acteurs de ce groupe que l’analyse a porté.<br />

L’objectif du choix de cette population cible résulte de plusieurs phénomènes. Tout d’abord<br />

le choix de 15 femmes mariées et non pas célibataires, simplement parce qu’elles ont une<br />

certaine expérience de la vie du couple. Aussi, les catégories de femmes identifiées (stérile,<br />

ménopausée et veuve) s’expliquent par le fait que ces catégories sont celles qui font plus<br />

face aux réalités du couple que les femmes qui vivent dans une union de mariage<br />

relativement récente ou alors les femmes qui ne font face à aucune de ces contraintes de<br />

manière visible. D’ailleurs une de nos interviewée ménopausée, à travers ses interventions<br />

nous a fait savoir qu’elle est heureuse avec son mari malgré sa situation de femme<br />

ménopausée. Aussi, ces femmes interviewées ont suffisamment d’expériences à partager au<br />

point de considérer leur représentation numérique suffisante. Les interventions de ces<br />

femmes, ont été complétées par les chefs coutumiers gardiens de la tradition dans les<br />

villages. Ceux-ci, suite aux échanges, ont complété les propos des femmes et quelques fois<br />

ont aidé á mieux comprendre certains aspects.<br />

Même si, ce nombre de 15 femmes semble ne pas pouvoir englober l’opinion de l’ensemble<br />

des femmes de ces régions touchées, mais avec la logique de la méthode « d’entrevue »,<br />

nous avons tout au moins réussi à entrer pendant 3 jours en contact avec les interviewés, de<br />

camper leur comportement dans le temps et de cerner en pr<strong>of</strong>ondeur leurs opinions, leurs<br />

expériences et leurs impressions. Ce qui rend notre recherche plus enrichissante car au-delà<br />

de la représentation numérique à savoir que telle région observe plus cette pratique que<br />

l’autre (ce qui est du ressort de l’enquête par questionnaire), nous arrivons à mieux<br />

comprendre les motivations derrière tel type de pratique et de considérations.<br />

A la fin du processus d’entrevue semi-directif, des croisements ont permis de ressortir les<br />

liens entre les différentes variables indépendantes et dépendantes. Ces variables d’analyses<br />

sont :<br />

Variables indépendantes: les rapports sociaux de sexes entre les hommes et les femmes et<br />

le Mariage<br />

santé dont l’objectif est de collecter et diffuer des données démographiques portant en particulier sur la fécondité, la<br />

planification familiale et la santé de la mère et de l’enfant. Il se trouve aussi sur le site: http://www.macroint.com/dhs/<br />

20


Variables dépendante: Les pratiques coutumières du mariage selon les régions et les<br />

pratiques religieuses du mariage suivant les deux importantes religions: L’islam (85%) 17 de<br />

Guinée est celui sunnite (Tidjania et Qadirya) et le christianisme (10%) est composé par<br />

l’église catholique romaine, l’église protestante évangélique et l’église anglicane. Mais<br />

dans le cadre de cette recherche et relativement à la réflexion sur les pratiques religieuses<br />

du mariage, l’accent sera mis sur l’islam et le catholicisme.<br />

Dans son ensemble, la méthodologie de collecte des données adoptée a aidé à clarifier et à<br />

adopter de nouveaux champs d’analyse par endroit et de l’autre à ab<strong>and</strong>onner certaines<br />

pistes de réflexion qui se sont avérées moins pertinentes.<br />

Cette recherche axée sur les femmes et les pratiques coutumières et religieuses, comprend<br />

deux chapitres. Le premier chapitre présente le contexte du mariage en Guinée. Ce chapitre<br />

comprend trois gr<strong>and</strong>s points. Le premier, présente la problématique du mariage, le second<br />

présente les pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée et le troisième<br />

dresse une cartographie des pratiques coutumières et religieuses identifiés. Le second<br />

chapitre présente les femmes dans le pluralisme normatif du mariage en deux points. Le<br />

premier, traite des étapes constructives du mariage en Guinée et le second ressort l’impact<br />

de ces pratiques sur les femmes dans le mariage.<br />

CHAPITRE I: CONTEXTE DU MARIAGE EN GUINEE<br />

« L’avenir de l’humanité passe par la famille» disait le Pape Jean Paul II dans le Familiaris<br />

Consortio 18 . N¤ 86, car la famille est la cellule motrice régulatrice de toute société. C’est<br />

sur les racines normatives, culturelles et religieuses guinénnes du mariage et de la famille<br />

qu’à travers ce chapitre, des réflexions seront posées.<br />

Le chapitre I de notre recherche comprend trois points. A travers ces points, des<br />

orientations sont faites sur les sentiers du mariage. Le point I pose un constat sur le mariage<br />

en Guinée, le second point, présente les pratiques coutumières et religieuses du mariage et<br />

enfin, le dernier dresse une cartographie de quelques pratiques coutumières et religieuses<br />

du mariage.<br />

17 Direction nationale de la Statistique de Guinée et Macro International Inc, Enquête Démographique et de Santé,<br />

Guinée 1999. Mai 2000 Calverton, Maryl<strong>and</strong> USA.<br />

18 Propos repris par SARAH, R (1989:3), Archevêque de l’Eglise Catholique de Guinée, nommé le 9 octobre 2001 au<br />

Vatican par le Pape jean Paul II au poste de Secrétaire de la congrégation pour l'évangélisation des peuples.<br />

21


LA PROBLEMATIQUE<br />

La société guinéenne est dans sa presque totalité <strong>for</strong>tement hiérarchisée et repose sur des<br />

valeurs traditionnelles cultivées dans des familles patriarcales élargies. C’est l’appartenance<br />

à une famille, à un lignage, à une caste ou à toute autre entité sociale qui détermine le<br />

statut, la place et le rôle de l’individu au sein de la société (DIAKITE, B, 2004)<br />

La République de Guinée présente une diversité basée sur les appartenances : régionales,<br />

sociales, géographiques, culturelles, religieuses, historique et économique. Face à cette<br />

pluralité de phénomènes un net constat d’écart important de rapports sociaux de sexe au<br />

pr<strong>of</strong>it des hommes se crée et cela lorsqu’il s’agit de vivre sa féminité d’une région à une<br />

autre, selon la réalité quotidienne et les règles sociales surtout en milieu rural 19 .<br />

La vie du mariage 20 en Guinée connaît assez de soubresauts. D’abord régularisée sous sa<br />

<strong>for</strong>me naturelle, voire coutumière, elle connaît l’ingérence du droit religieux et enfin la<br />

régularisation établit par l’état. Ces différentes évolutions sous des <strong>for</strong>mes très<br />

controversées rendent mitigées l’unification des conceptions et des acceptations autour du<br />

phénomène de mariage.<br />

La structure coutumière de la famille guinéenne est de type endrocentrique et le mariage<br />

souvent polygynique. Les considérations autour de cette polygynie ne sont pas<br />

systématiquement perçues comme négatives par certaines femmes qui la vivent pour une<br />

quelconque raison. Pourtant, si au cours de la première république, la loi contre la<br />

polygamie a été prononcée, il ressort dans ce second régime que cette loi est plus que<br />

désuète d’une part et de l’autre, elle est « sapée » et « bafouée » par ceux qu ne veulent pas<br />

la suivre. Selon ABUTIN ET SCHOUMAKER, repris par DIAKITE (2004 : 40), la<br />

polygamie en Guinée et dans certains autres pays de l’Afrique de l’ouest se situe autour de<br />

45% en 2001. Selon la coutume, la polygamie, au delà de la volonté manifeste de trouver<br />

une autre épouse, est aussi souvent entrainée par la stérilité non prouvé de la femme 21 .<br />

La pratique des relations entretenues dans le mariage est soutenue par le préjugé selon<br />

lequel le statut de la femme est inferieur à celui de l’homme et que toute résistance ou<br />

réaction de sa part, non con<strong>for</strong>me aux normes sociales, donne lieu à des violences, de<br />

19 CEDAW-Guinée, 2000<br />

20 En Guinée bien que le mariage ne soit pas le cadre exclusif des rapports sexuels, il constitue cependant le cadre<br />

privilégié de la procréation (Enquête Démographique de Santé (EDS), Guinée, 1999-85)<br />

21 Ceci est effectif pour tous les groupes ethniques interviewés.<br />

22


diverses natures, qui viennent hypothéquer non seulement l’état des femmes, mais aussi<br />

leur épanouissement moral.<br />

Dans le mariage chaque catégorie de femmes vit une certaine normalisation selon sa région,<br />

sa culture, l’influence de la religion et le droit étatique. Pour certaines femmes, ces<br />

pratiques deviennent vite des frustrations. Dans le cas de la femme veuve, en matière<br />

d’administration des biens, elle est souvent brimée. Il est fréquent que la belle famille de la<br />

femme se précipite pour s’accaparer des biens du défunt. T<strong>and</strong>is que la femme stérile est<br />

obligée de vivre des pratiques telles que le lévirat pour mieux gérer son héritage.<br />

(CEDAW/C/GIN/1, 2000 :42-46).<br />

En matière successorale, l’article 483 di code civil dispose : « le conjoint survivant en<br />

présence d’enfants communs ou d’ascendants du premier degré a le huitième de la<br />

succession ». Cette disposition lèse manifestement la femme lorsqu’on la compare aux<br />

enfants et aux ascendants du premier degré. A <strong>for</strong>tiori lorsqu’elle concourt avec plusieurs<br />

épouses. Par ailleurs, les articles 484 et 485 traitent de la succession de la veuve sans enfant<br />

en présence d’enfants non communs et d’autres ayant des enfants communs dont la part<br />

calculée par fraction de cinq années dans une union conjugale empreinte de dignité et de<br />

dévouement. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :14).<br />

Au delà des normes coutumières, celles religieuses aussi marquent de leur sceau la vie du<br />

couple. Dans cette société à <strong>for</strong>te influence religieuse, les pratiques religieuses sont aussi<br />

empruntées comme fondement du droit légal. Dans le cas du droit musulman il y a<br />

plusieurs dispositions importantes qui régularisent le droit de la famille et qui sont<br />

observées par les communautés. Cependant, certains versets sont retenus comme fondant<br />

une inégalité quelques soient les interprétations religieuses voir coutumières que l’on a pu<br />

ou continue d’en donner par rapport au mariage, au divorce.(SOW, F, 2005). Dans cette<br />

dualité de normes, la condition des femmes est toujours celle autour de laquelle se fonde<br />

tous les débats.<br />

Le droit d’infliger une quelconque sanction à son épouse est admis dans le droit coutumier<br />

et même dans la Shari’a. Il ressort de cette similitude que l’islam noir s’est facilement<br />

adapté aux pratiques coutumières 22 . Ce cas est devenu un phénomène social avec<br />

l’exacerbation de la promiscuité et des sources de frustration.(CEDAW/C/GIN/1, 2000 :42-<br />

46) Si selon le code civil, ces actes sont classés comme des violences faites aux femmes,<br />

dans les pratiques il est très difficile de les cerner de cette manière. La vision coutumière<br />

22 A Cura di jean de la Guérivière, Les multiples visages de l’islam noir, Géopolitique africaine, N.5 – Hiver 2002<br />

23


n’admet surtout pas à la femme de faire un affront à son mari au risque de voir la<br />

malédiction s’abattre sur sa progéniture. Les femmes rurales guinéennes et celles<br />

analphabètes sont celles qui vivent encore plus ces pratiques que les autres femmes 23 .<br />

L’influence de la religion musulmane et celle des parents de la première femme amènent la<br />

conjointe à consentir au second mariage de son époux. On évoque également l’opinion<br />

publique et les nombreux enfants nés du mariage 24 . Les rares contestataires à l’époque qui<br />

voulaient se battre et défendre leur ménage se voyaient bloquées par des considérations<br />

sociales, économiques, surtout religieuses. Et finalement, elles cédaient contre leur gré. En<br />

cas de refus catégorique, la première épouse pouvait être répudiée. De nos jours, son avis<br />

compte peu car avant le mariage, un autre domicile est trouvé pour la nouvelle épouse et<br />

quelques fois mise devant les faits accomplis.<br />

Les femmes sont dès leur jeune âge vouées aux rôles de reproduction, exclues de<br />

l’instruction, les filles et les femmes sont ainsi très vite exposées aux mariages précoce et<br />

<strong>for</strong>cé, ainsi qu’à la polygamie, ce qui détériore les relations entre les femmes (épouse et<br />

coépouses de surcroit) au sein du foyer. De plus, elles sont soumises à l’obéissance pour ne<br />

pas subir les violences qui les diminuent physiquement et parfois les rendent invalides.<br />

En République de Guinée, assez de lois ont été promulguées et, ces lois semblent favoriser<br />

les femmes, mais leur application se heurte à des valeurs multi<strong>for</strong>mes, faute de<br />

compatibilité entre norme, lois et vision stratégique qui pourrait en découler. Les droits<br />

<strong>for</strong>mels acquis par les guinéennes sous la première République sont pour la plupart restés<br />

lettre morte du point de vue application.<br />

En Guinée en 1962, l’Etat avait adopté une loi 25 révisant les discriminations dans la vie du<br />

couple en interdisant la polygamie. Mais ceci s’est soldé par un taux élevé de concubinage.<br />

Ce qui d’une certaine manière pourrait expliquer que la polygamie, le lévirat, le sororat, …<br />

sont des pratiques anciennes qui ont existé et qui continuent à constituer le fondement des<br />

unions en Afrique. Selon que l’on se trouve dans l’un out l’autre coté, la femme est celle<br />

qui paie le plus lourd tribut de cette pluralité normative.<br />

La religion se montre de manière très présente. D’abord le christianisme qui à l’origine a<br />

influencé le code civil (de Napoléon) Français qui reste le modèle de code calqué en<br />

23<br />

Direction nationale de la Statistique de Guinée et Macro International Inc, Enquête Démographique et de Santé, Guinée<br />

1999. Mai 2000 Calverton, Maryl<strong>and</strong> USA.<br />

24<br />

CEDAW/C/GIN/1, Ministère des Affaires sociales, de la promotion féminine et de l’enfance de la Guinée, Rapport<br />

Initial sur la convention sur l’élimination de toutes les <strong>for</strong>mes de discrimination à l’égard des femmes présenté aux<br />

Nations Unies, 2000.<br />

25<br />

La loi n.54-62 du 14 avril 1962 de la République de Guinée<br />

24


Guinée et l’islam, doctrine qui elle a su bien s’africaniser en s’accommodant plus aisément<br />

aux pratiques coutumières. La Guinée un pays laïc à <strong>for</strong>te tendance islamisée, fait encore<br />

partie de ceux qui malgré des ef<strong>for</strong>ts de promotion de la condition des femmes, présentent<br />

certaines résistances non manifeste dans l’adoption du nouveau code de la famille. Le<br />

document d’adoption de ce projet devrait désormais être inclus dans le code civil qui lui<br />

aussi n’arrive pas à être adopté sous sa version révisée 26 . (CEDAW/C/GIN/Q/6/Add.1,<br />

2007 :12)<br />

La prévalence des coutumes qui perpétue le statut inférieur de la femme dans la société et<br />

les assujettit à la violence au sein de leurs familles et dans la communauté constitue un<br />

obstacle sérieux. Ces pratiques comprennent entre autres les MGF, le paiement de la dot<br />

appliquée dans bon nombre de pays (Berété, O, 200 :9)<br />

Les droits des femmes sont violés par des lois et pratiques coutumières et religieuses.<br />

Lorsque ces droit sont en conflit avec ces pratiques se sont toujours ces droits qui sont<br />

sacrifiés ou ignorés exemple la pratique du lévirat, sororat, les lois sur la succession qui<br />

dénient à la femme le droit d’hériter des biens de son mari défunt, l’insuffisance de<br />

garanties en ce qui concerne le mariage constituent de véritables goulots d’étranglements.<br />

(Bérété Oumou, 2000)<br />

Longtemps géré par une souveraineté centrale de 1958 à 1984, la Guinée se retrouve<br />

aujourd’hui face à des nouvelles valeurs très controversées aussi bien dans le domaine de la<br />

politique qu’au niveau de la famille. Cette coexistence des coutumes et des pratiques<br />

religieuses atténuent <strong>for</strong>tement les acquis sur le plan civil des droits, dont pourraient<br />

bénéficier les femmes.<br />

En Guinée les valeurs religieuses et coutumières sont très présentes. Quelques fois<br />

l’application du code civil est souvent influencée par les coutumes et les pratiques sociales<br />

coutumières. Les coutumes et religions, étant très vivaces en Guinée, devraient –elles<br />

contribuer <strong>for</strong>tement au maintien de la femme dans une position de faiblesse et de<br />

subordination à l’homme?<br />

26 Notes tiré de l’entrevue réalisée par Me Hamidou BARRY, Pr<strong>of</strong>esseur á l’université de Sonfonia- Guinée. Idée<br />

confirmée par le document réponse aux questions suscitées par l’examen du rapport unique valant quatrième, cinquième et<br />

sixième rapport périodique de la Guinée relative à la CEDAW aux nations unies, 2007.<br />

25


2. LES PRATIQUES COUTUMIERES ET RELIGIEUSES DU MARIAGE EN<br />

GUINEE<br />

Le mariage existe dans toutes les régions et communautés guinéennes et est réglementé<br />

selon les réalités socioéconomiques et culturelles. En quoi l’étude sur les pratiques relatives<br />

au mariage 27 en Guinée est pertinente ? Le mariage, s’il connaît aujourd’hui de nouvelles<br />

pratiques en Occident et qu’il bouleverse le cours de sa trajectoire, en Guinée par contre le<br />

constat qui se pose s’avère aussi d’une gr<strong>and</strong>e complexité.<br />

C’est bien à l’approche du mois saint de Ramadan en Guinée et avant la saison des pluies 28<br />

que bon nombre de mariages sont célébrés en Guinée, surtout au niveau des couples<br />

musulmans. Que représente t-il réellement et pourquoi tant d’engouement lorsque les<br />

observations permettent de percevoir une certaine discrimination à l’égard des femmes dans<br />

le mariage ? Comment fonctionne t-il ?<br />

Habituellement, le mariage en Guinée se contracte sous trois <strong>for</strong>mes quelque soit la religion<br />

ou le groupe ethnique. La différence observée se situe au niveau des pratiques et des<br />

fondements, mais aussi dans le cas du mariage religieux mixte. À travers les sections qui<br />

suivent, une présentation classique du mariage est donnée en vue de dégager sa particularité<br />

de ceux coutumiers et religieux qui eux aussi sont d’une gr<strong>and</strong>e portée en Guinée.<br />

2.1. Que dire des pratiques coutumières et religieuses du mariage ?<br />

Les pratiques présentées dans ce travail sont celles coutumières et religieuses, qui ont un<br />

rapport direct avec le mariage et qui ont aussi une influence certaine sur son évolution. Ces<br />

pratiques sont des actions en mutation perpétuelles, même si d’aucuns ont du mal à<br />

l’accepter. La pratique du mariage en Guinée a connue assez de changements selon les<br />

groupes ethniques et suivant les religions. Des mariages endogamiques, les familles se<br />

retrouvent devant des mariages exogamiques, mixtes locaux et mixtes religieux.<br />

La dynamique du phénomène coutumier que note CARBONNIER, J (2004), se repère à<br />

travers deux éléments, l’un matériel (Objectif) et l’autre psychologique (subjectif). De point<br />

de vue matériel, la coutume est la pratique effective d’une certaine conduite en un cas<br />

donné. Cette pratique doit présenter quelques épaisseurs dans l’espace et dans le temps, des<br />

caractères de généralité et de constance. De cette <strong>for</strong>me, l’élément psychologique laisse<br />

27 Bien que consciente de la diversité du concept mariage tel le mariage hétérosexuel, le mariage homosexuel, le PACS, il<br />

sera tout de même question dans ce travail de mariage hétérosexuel. Puisque ces nouvelles <strong>for</strong>mes n’ont encore pas ou<br />

presque pas encore influencé les pratiques africaines de mariage.<br />

28 La Guinée connaît deux saisons climatiques, la saison sèche (relativement autour de Octobre jusqu’à début juin) et la<br />

saison des pluies (Juin jusqu’en début octobre). Avec la dé<strong>for</strong>estation et le changement climatique, les saisons sont<br />

perturbées.<br />

26


entrevoir que ce fait social réside dans la persuasion chez les intéressés, qui sont obligés par<br />

le droit d’agir comme ils le font, comme font les autres, d’où un phénomène d’opinion<br />

publique 29 .<br />

La coutume (usage, tradition) est une règle de droit qui s’est établie, non par la volonté du<br />

chef, du prince, de l’Etat, émise en un trait de temps, mais par une pratique répétée des<br />

sujets eux-mêmes. C’est du droit qui s’est constitué par l’habitude. (Carbonnier, 2004 :16)<br />

La coutume s’appréhende selon Carbonnier (2004, 17) comme du droit non écrit, ayant du<br />

sens dans le contexte dans lequel elle est rédigée et apparaîssant de manière plus<br />

significative lorsqu’elle est considérée comme un droit inconscient, instinctif, venant d’en<br />

bas (non des gouvernants mais de la masse). Par ailleurs, les pratiques religieuses ne sont<br />

pas d’essences spontanées: au contraire, elles sont réglées, fixées, codifiées et le respect de<br />

la règle garantit l’efficacité du rituel, tel que la Shari’a dans le droit musulman..<br />

Avec le mariage coutumier en Guinée, le couple se résout à admettre l’inexistence de<br />

documents justifiants l’union du couple. Puisque dans la logique de cette pratique de<br />

mariage, la présence des représentants des deux familles, aussi l’intermédiaire et la<br />

conscience de la population suffisent pour reconnaitre ce type de mariage et constituer la<br />

preuve matérielle de l’acte consommé 30 .<br />

Dans cette relation, le choix du représentant de la famille est important et très crucial car il<br />

est le garant de l’épanouissement du couple. Il est le premier concerné en cas<br />

d’incompatibilité du couple. Très souvent les hommes sont concernés et les femmes<br />

n’interviennent pas dans le processus d’établissement des rapports que dans des<br />

circonstances rares.<br />

Les rituels du mariage ont aussi assez changé, car si les cérémonies de réjouissances étaient<br />

essentiellement marquées par la danse, plus précisément la danse nationale (danse des<br />

mamans), désormais, il y a en Guinée l’importation du SABAR 31 , et aussi du vin<br />

d’honneur. Par ailleurs, dans la dot, la pratique coutumière était plus sobre et modeste<br />

29<br />

CARBONNIER, JEAN, Droit Civil: Introduction, les personnes, la famille, l’enfant, le couple, PUF, 2004, Paris, ed<br />

Quadrige,<br />

30<br />

Tiré des observations faites sur le terrain et des interventions des personnes interviewées (mai-septembre 2007)<br />

31<br />

Démonstrations des pas de dance, importée du Sénégal que très souvent les copines et les sœurs de la future épouse<br />

organisent la veille du mariage.<br />

27


puisque les cadeaux à <strong>of</strong>frir étaient symboliques. Désormais, la valeur de la dot à payer est<br />

plus que élevé et le mariage plus mercantile et très mondain 32 .<br />

Une dynamique de mixité dans le mariage s’observe actuellement. De la mixité locale<br />

(endogamie vers exogamie) s’intègre aussi une mixité religieuse (célébration de mariage<br />

entre un couple de religions différentes), ce qui laisse voir l’intériorisation de nouvelles<br />

considérations et d’autres valeurs de la société 33 .<br />

Bref, les pratiques dans ce contexte, sont toutes les habitudes, les manières de faire, d’agir<br />

des individus par rapport aux femmes dans le mariage. Ainsi, il y a différents types de<br />

mariages coutumiers le tout dans une dynamique de mariage religieux (musulman et<br />

catholique)<br />

2.2. La dynamique du mariage coutumier et religieux : Modèles identifiés 34<br />

Le mariage est une union conjugale mais aussi une alliance interfamille où la<br />

reconnaissance de la parenté bilatérale dans la ligne maternelle aussi bien que paternelle est<br />

requise 35 . Le mariage, en Guinée est le centre de l’existence, même si, aucun code civil ni<br />

aucune entité sociale ne défini le mariage en tant que tel.<br />

Cependant, « le mariage est la plus vieille coutume de l’humanité et l’état de la plupart des<br />

individus adultes » rappel CARBONNIER (2004, 1139). Du point de vue sociologique, le<br />

mariage est « une union sexuelle ritualisée au départ, organisée dans la durée et emportant<br />

automatiquement au rattachement à l’homme des enfants qui naîtront de la femme» 36 .<br />

Le mariage en Afrique et surtout en Guinée répond d’abord aux normes coutumières. Bien<br />

avant la célébration <strong>of</strong>ficielle du mariage, les normes suivies sont celles de la coutume de la<br />

future épouse et une fois, le mariage célébré la femme suit les principes coutumiers de son<br />

époux. Cette disposition se comprend par le fait que la démarche en mariage doit toujours<br />

être faite par la famille de l’homme et donc à eux de se déplacer et de venir à la rencontre<br />

32<br />

Weilenmann, M, (2007 :101-102), avance que le nouveau phénomène qui relève davantage de différents mosaïques de<br />

lois locales font apparaître de nombreuses pratiques locales, considérées comme faisant partie de la « tradition », mais<br />

sont en fait des phénomènes relativement récents, comme par exemple le rapt de la fiancée ou le montant exorbitant exigé<br />

au titre du prix de la fiancée/dot.<br />

33<br />

Désormais observée dans les églises et les mosquées, la célébration de mariage mixte. Tiré de nos entrevues avec deux<br />

chefs religieux (août 2007)<br />

34<br />

Tout comme Roussel (1980 :1026), nous aussi, nous proposons une problématique inverse des modèles matrimoniaux.<br />

C’est á dire au lieu, d’envisager un modèle unique modifié sur certains points par des facteurs divers, nous estimons qu’il<br />

y a une existance dans une même population de modèles multiples interreliés.<br />

35<br />

Ntampaka, Charles in The international survey <strong>of</strong> family law 1996 ( 1999, 432)<br />

36 CARBONNIER (2004, 1139).<br />

28


de celle de la fille. Les normes qui régissent le mariage coutumier est la soumission de la<br />

femme à l’homme, sa discrétion et surtout une plus gr<strong>and</strong>e résignation.<br />

A présent voici, ce qui peut être une classification type du mariage en Guinée. Cette<br />

classification reposant sur la dynamique du mariage coutumier et religieux part de l’analyse<br />

faite par Louis Roussel 37 et orientée sur les entrevues que nous avons réalisées (mai-<br />

septembre 2007)) dans certaines communautés en Guinée dans le cadre de cette recherche.<br />

2.2.1. Mariage par alliance: Pacte entre famille et le mariage consensuel<br />

Le mariage par alliance est une des plus vieilles <strong>for</strong>me d’union coutumière et qui continue<br />

encore à avoir pignon sur rue dans la vie de la famille.<br />

Pacte entre famille<br />

Le pacte entre famille est le type de mariage très rép<strong>and</strong>u en Guinée. Il se présente sous une<br />

<strong>for</strong>me d’alliance entre deux districts, deux villages, deux familles, deux amis. Il est<br />

consommé et reconnu par l’ensemble de la communauté.<br />

« le mariage dans le contexte africain est l’alliance non seulement de l’époux et de<br />

l’épouse, mais tout à la fois l’alliance de leurs familles et de leurs clans, scellé avec le<br />

sceau de la parole donnée et le sang de la kola 38 partagée et mangée ensemble. Le mariage<br />

ne concerne plus seulement deux individus et leur descendance, mais leurs familles et leurs<br />

clans tout entiers. Il est le point où les membres d’une communauté donnée se<br />

rencontrent ». SARAH (1989: 4),<br />

En milieiu Kissi 39 , les alliances se nouaient dès la <strong>for</strong>mation du fœtus, lorsqu’une femme<br />

du village ou d’un village voisin était enceinte, un homme ou une femme amie de la famille<br />

pouvait venir « aimer » cette grossesse en disant: « Si cette femme met au monde une fille,<br />

elle sera la femme de mon fils ; si c’est un homme, il sera son ami ». Et, dès ce moment, il<br />

commence à apporter des cadeaux jusqu’à l’accouchement voir au mariage réel de la fille.<br />

Lorsque cette dernière accouche, les parents du prétendant <strong>of</strong>frent de la « cola » ainsi que<br />

37 Institut National D’études Démographiques, Mariages et divorces. Contribution à une analyse systématique des modèles<br />

matrimoniaux, N :6, Population, 1980, PP 1025-1040. Il appelle son premier modèle de mariage d’Institutionnel ou<br />

traditionnel, ensuite le second il le nomme le mariage d’alliance, après le mariage fusion qui n’est pas très suivi en Guinée<br />

car fait allusion à la famille nucléaire et enfin le mariage Association. Ces réalités étant plus ou moins éloignées de la<br />

réalité guinéenne, nous avons revu ces modèles de mariage pour l’adapter aux modèles identifiés en Guinée.<br />

38 La kola un fruit sauvage très consommé en Afrique. Dans la coutume africaine, elle est très symbolique et revêt un<br />

caractère important. Elle est utilisée dans des affaires de gr<strong>and</strong>es importances telles que pour les baptêmes, le mariage, le<br />

divorce. Dans ce cas de figure, elle est la matérialisation du respect que l’on accorde à celui à qui l’on donne ou à la<br />

famille à laquelle est donnée. Aucun mariage ne peur être consommé sans la présence de la Kola. Le nombre dépend de la<br />

culture. Pour certains une quantité importante est requise et pour d’autres, il y a une limitation. Bref, présenter la cola à<br />

quelqu’un pour lui in<strong>for</strong>mer d’une bonne nouvelle est lui accordée une gr<strong>and</strong>e importance.<br />

39 Tiré de l’entrevue réalisé avec Un chef coutumier Kissie à Gueckédou dans la sous préfecture de Koudou.<br />

29


tant d’autres présents et, symboliquement, ils envoient un « fil blanc » et un « cauri » pour<br />

attacher à la main du nouveau né. C’est cela qui témoigne que c’est une femme<br />

« écobuée », c’est-à-dire, une femme promise en mariage dès la naissance et qui est déjà<br />

entretenue. Lorsqu’elle gr<strong>and</strong>it, l’homme en question accompagné de ses parents, se<br />

présente pour présenter la dot qui est d’ailleurs très symbolique et selon le revenu du<br />

prétendant. Dans ce cas de figure d’une manière générale, les parents ne présentent plus la<br />

dot. Puisque c’est l’ensemble de ces petits gestes posés depuis la naissance qui comptaient<br />

le plus. Cette <strong>for</strong>me de contraction de mariage était très rép<strong>and</strong>ue dans cette communauté<br />

mais d’autres continuent à la pratiquer.<br />

En milieu Peulh 40 par contre, le mariage par le pacte entre deux familles se fait par<br />

l’initiative des parents d’unir leurs jeunes enfants pour vivre le reste de leur vie ensemble.<br />

Dans ce cas, les futurs époux ne se connaîtront de vue yeux que le jour du mariage et ne<br />

partageront le « lit conjugale» que trois jours après le mariage. Toute la procédure est<br />

effectuée par les parents des deux jeunes.<br />

Ce qui pourrait s’observer de nos jours en milieu Kissie et aussi chez les Peulhs, est de<br />

préparer la petite adolescente pour un autre jeune de la localité. La différence est que l’on<br />

attend au moins de voir l’enfant et d’apprécier son comportement.<br />

Les facteurs qui influencent ce type de mariage est l’amitié, la parenté et dans le temps de<br />

la chefferie « traditionnelle ». Cette <strong>for</strong>me d’union fondée sur les bases de l’amitié était et<br />

continue d’être pour d’autre un gage certain d’union durable et de ren<strong>for</strong>cement de liens<br />

entre deux familles. Par contre la logique de la chefferie «traditionnelle», résultait du<br />

pouvoir dont il disposait dans sa contrée. Par exemple en milieu Kissie, le chef ayant libre<br />

droit de disposer des biens sur son territoire, il considère aussi toute femme comme un bien<br />

qu’il peut avoir le droit de posséder. Ceci étant, dès qu’il voit une belle femme qu’il<br />

désirait, qu’elle soit mariée ou pas, il la prenait immédiatement et la fait vivre sous son toit<br />

sans dot, sans présentation de noix de colas… Et si la femme refusait, ses parents étaient<br />

soumis à des bastonnades et à des humiliations de toutes sortes jusqu’à l’emprisonnement.<br />

S’il advenait qu’elle le refusait pour un quelconque mari, ce dernier aussi subissait le même<br />

sort. Ainsi, lorsque certains parents (de culture Kissi) concevaient une fille d’une gr<strong>and</strong>e<br />

beauté, pour éviter tout ennui, ils confiaient cette fille, en plus d’une chèvre, d’un poulet…<br />

au chef en disant : « Nous voulons être tes esclaves. Protège-nous ». Cependant bien que ce<br />

type d’influence ait disparu suite à l’abolition de la chefferie « traditionnelle » en Guinée. la<br />

40 Notes tirés de l’entrevue réalisé avec le chef coutumier /sage du village Sannou dans la préfecture de Labé.<br />

30


pratique continue tout de même 41 avec une nouvelle <strong>for</strong>me de pouvoir qui se créée à travers<br />

les hommes à revenu important (Gr<strong>and</strong>s commerçants, Importateur/exportateur, Hommes<br />

d’affaires, …) qui passent par les mêmes méthodes que celles utilisées par le chef<br />

traditionnel autrefois.<br />

Mariage consensuel 42 .<br />

Dans ce type de mariage, les futur époux se connaissent et il arrive même que le couple<br />

vive ensemble avant la célébration <strong>of</strong>ficielle de leur union. Le principal rôle dans cette<br />

relation est joué par les deux intéressés. Tout de même, les parents sont impliqués et leur<br />

accord est sollicité pour <strong>of</strong>ficialiser et valider la relation. Cette pratique est plus présente en<br />

milieu <strong>for</strong>estier<br />

Par ailleurs, le Code Civil de la république de Guinée (2007 : 31), en son article 211, exige<br />

à l’autorité de l’Etat de dem<strong>and</strong>er le jour même du mariage, le consentement des futurs<br />

époux avant de déclarer le mariage civil contracté devant la loi. Mais cette disposition<br />

n’empêche pas que les autres modèles aussi de mariage ne soient identifiés ou ne soient<br />

contractés par certains.<br />

2.2.2. Mariage monogamique et Mariage polygamique<br />

La religion est celle qui détermine la nature de ce type de mariage. Même si la coutume<br />

ancienne encourage la polygamie, la mutation 43 qui s’opère repose plus sur des<br />

considérations religieuses. Puisque désormais pour certains, la pratique du mariage est<br />

revue et prend la <strong>for</strong>me monogamique et pour les autres elle est plutôt ramenée à la<br />

polygynie limitée à quatre.<br />

Mariage monogamique<br />

Le mariage monogamique est, dans la plupart des cas suivi en Guinée par les chrétiens 44 et<br />

sans aucun souci pour l’épouse de se voir <strong>of</strong>ficiellement secondée par une autre épouse. Le<br />

mariage catholique répond au droit canon. Dans ce contexte, RENAUT, M-H (2003 : 24) 45<br />

41<br />

Le WILDAF/FEDDAF, dans son manuel simplifié du Protocole a la charte africaine des droits de l’homme et<br />

des peuples relatifs aux droits de la femme en Afrique, ( 2006 :18) ayant évoqué que tout mariage doit être conclu avec le<br />

consentement des deux époux, ceci signifie que la pratique perdure encore.<br />

42<br />

Analyse faite sur la base des in<strong>for</strong>mations collectées à travers les entrevues semi dirigés réalisés.<br />

43<br />

Jadis la polygamie ne connaissait pas de limites et les hommes avaient l’entière liberté d’épouser autant de femmes<br />

voulues. Ce cas était plus visible et possible au niveau des chefs politiques, les chefs de canton. chef de district.<br />

44<br />

Le christianisme guinéen est composé des membres de l’église catholique romaine et d’ailleurs qui sont les plus<br />

nombreux de ce groupe religieux, ensuite les membres de l’église protestante évangélique et enfin l’église anglicane.<br />

Toutefois, le groupe religieux étudié à travers cette recherche est l’église catholique romaine.<br />

45<br />

Reprenant Gratien dans son décret « recueil de tout l’ancien droit de l’Eglise » mais aussi le codex du droit canon de<br />

1983<br />

31


argumente que «Le mariage est l’union de l’homme et de la femme établissant une<br />

communauté de vie entre eux »<br />

Dans l’église catholique le mariage est un sacrement, ce qui lui confère cette <strong>for</strong>me<br />

d’indissolubilité 46 . Par ailleurs, Pie XI affirme donc que l’union sainte du mariage véritable<br />

est constituée, d’un ensemble, par la volonté divine et par la volonté humaine 47 . SARAH<br />

(1989), se référant à la constitution dogmatique Gaudium et Spes note du mariage, que :<br />

« Le christ a comblé de bénédiction cet amour aux multiples aspects, issu de la source<br />

divine de la charité, et constitué à l’image de son union avec l’Eglise, le christ continue à<br />

demeurer avec les époux pour que par leur don naturel, ils puissent s’aimer dans une<br />

fidélité perpétuelle, comme lui-même a aimé l’Eglise et s’est livré à lui ».<br />

Le concile du Vatican II insiste sur l’unité du mariage et sur la spiritualité. Cette <strong>for</strong>me de<br />

mariage contrairement à celui coutumier se matérialise par des signatures engageant les<br />

époux et leurs témoins. Son union est célébrée par un prêtre. Par contre d’autres musulmans<br />

dans certaines mesure pratiquent le mariage monogamique..<br />

Mariage polygamique<br />

Le mariage polygamique présent en Guinée, <strong>for</strong>me habituellement suivie par les<br />

musulmans et les animistes 48 (DIAKITE, B, 2004). Dans la logique de l’Islam, le mariage<br />

est une union légale et licite, au vu de la Sharia, entre deux personnes de sexes opposés. Il<br />

doit revêtir le consentement mutuel des futurs époux et requiert certaines conditions qui<br />

sont, la présence d’un tuteur et de deux témoins honnêtes et dignes. Autre condition pour la<br />

validité du mariage musulman est le Sadaq accordée à la femme pour matérialiser sa<br />

véritable intention et enfin la publication du mariage<br />

L’islam dans sa volonté de limiter le nombre des épouses à quatre, répond à l’ancienne<br />

considération qui autorisait les hommes à épouser au tant de femmes que possible. Dans ce<br />

type de mariage polygamique soutenu par l’islam, aucune garantie juridique ne s’<strong>of</strong>fre à la<br />

femme qui, lors de la dissolution du mariage, passera très souvent par la répudiation. Très<br />

souvent en terme de mariage, celui coutumier et religieux musulman sont très liés au point<br />

46 LAGOUTTE, S et LASSEN, E;M (2006: 47), présentent qu’en dehors du catholicisme qui pratique la <strong>for</strong>me<br />

traditionnelle du mariage indissoluble, les chrétiens protestants connaissent aujourd’hui le divorce. Cependant, ce qui<br />

différencie ce type de mariage avec celui musulman est la non bigamie possible.<br />

47 SARAH, 1989,22<br />

48 Le terme « animisme » désigne généralement l’ensemble des religions traditionnelles des Océaniens, des Africains et<br />

des Aborigènes d’Asie. L’animisme renvoie à une vision de l’univers peuplé d’esprits, bien ou malfaisants, et de génies<br />

dotés du pouvoir d’influer sur la vie des vivants. De manière générale, les animistes croient en l’existence d’un dieu<br />

créateur qui est connu sous de multiples autres appellations. Rarement objet direct du culte, ce dieu suprême est<br />

essentiellement invoqué au travers des médiateurs que constituent les dieux « secondaires », les esprits et les ancêtres.<br />

Pour les animistes, ces dieux secondaires, dont les plus importants sont symbolisés par des éléments naturels, tels que le<br />

ciel, la terre ou même les maladies, remplissent la fonction de protecteurs de villages. Sans clergé défini, cette religion fait<br />

néanmoins appel à des « prêtres » qui servent eux aussi d’intermédiaires. http://www.rfo.fr/article155.html<br />

32


de se confondre. Il est difficile de les séparer car habituellement l’un est contenu dans<br />

l’autre.<br />

Le mariage religieux musulman 49 est très souvent plus observé que celui civil, par<br />

conséquent dans le cas où surgit des différents, les femmes se retrouvent frustrées car ne<br />

pouvant revendiquer leurs droits. C’est pourquoi pour parer à cette <strong>for</strong>me d’injustice devant<br />

la loi et pour respecter les valeurs culturelles de certains. Il est instauré en Guinée aux<br />

niveaux des mosquées la validation du mariage par un acte de mariage religieux 50 . Ce qui<br />

est un présage d’espoir pour les femmes, lors de la dissolution du mariage, car il y a une<br />

certaine réadaptation de la loi aux pratiques qui elles aussi évoluent d’une certaine manière.<br />

L’enquête Démographique de Santé 51 « EDS » présente la polygamie comme une pratique<br />

courante en Guinée. Selon les données collectées dans ce rapport, il ressort que plus d’une<br />

femme sur deux (54%) vivent dans une union de polygame. Mais aussi la pratique de la<br />

polygamie est assez différente selon le milieu de résidence. Plus fréquente en milieu rural<br />

qu’en milieu urbain (respectivement 56% et 46%). Au niveau régional 52 , on note que les<br />

femmes en union à Conakry et celles de la Guinée Forestière ont beaucoup moins<br />

fréquemment une ou plusieurs coépouses (respectivement 45% et 47%) que celles des<br />

autres régions de la Guinée. La Haute Guinée compte la plus <strong>for</strong>te proportion de femmes<br />

ayant une seule coépouse avec 42% contre moins de 30% en Guinée Forestière et à<br />

Conakry. Par contre, la Moyenne Guinée se caractérise par la proportion la plus élevée de<br />

femmes ayant deux coépouses et plus (27%), à l’opposé, cette proportion n’est que de 16 %<br />

en Haute Guinée et 18% en Guinée Forestière et á Conakry. Par ailleurs la comparaison<br />

faite de l’EDSG-I 53 et de l’EDSG-II 54 pose le constat que la fréquence de la polygamie a<br />

légèrement augmenté, car en 1992, 50% de femmes et 30% des hommes enquêtés vivaient<br />

en union polygame, contre respectivement, 54% et 34% en 1999. (2000: 87-88)<br />

La polygynie est vue par l’homme comme un moyen d’augmenter son niveau social par<br />

l’accroissement de la richesse par une nombreuse progéniture sans pour autant qu’il puisse<br />

49<br />

Le taux d’analphabétisme très élevé chez les femmes ne leur permet pas de cerner les conséquences d’un mariage sans<br />

acte de mariage dans un état de droit.<br />

50<br />

Très longtemps l’absence de cet acte de mariage a défavorisé les femmes car en cas de divorce, il était difficile de<br />

réclamer leur droit. Sensibilisés par cette injustice dont étaient victimes les femmes devant la loi, et en raison du fait que<br />

le mariage religieux étaient plus célébré, les religieux musulmans ont alors adoptés comme disposition de délivrer un acte<br />

validant le mariage à la mosquée pour parer à ce différent. A certains niveaux, le type de mariage est dem<strong>and</strong>é pour<br />

remplir la plupart des documents administratifs et pr<strong>of</strong>essionnels.<br />

51 Direction nationale de la Statistique –Guinée- et Macro International Inc, Enquête Démographique et de Santé, Guinée<br />

1999. Calverton, mai 2000 Maryl<strong>and</strong> USA.<br />

52<br />

La Guinée est divisée en quatre régions naturelles.<br />

53<br />

Rapport publié en 1992.<br />

54<br />

Ce deuxième rapport EDSG-II a porté 6753 femmes et 1980 hommes enquêtés.<br />

33


especter ses obligations envers les coépouses et ses enfants et que les femmes auront à<br />

charge. Mais aussi elle serait susceptible d’être un moyen de protéger ou de réduire<br />

l’infidélité conjugale et la prostitution. Mais l’illusion d’un tel remède se perçoit peu.<br />

(SARAH, 1999:8) Aujourd’hui, la polygynie comporte dans tous les cas une hausse énorme<br />

des charges (occasion d’une multiplication du nombre des naissances), mais elle est<br />

tragiquement confrontée aux nombreux problèmes des obligations actuelles telles qu’<strong>of</strong>frir<br />

les moyens nécessaires pour l’éducation de l’enfant.<br />

A travers ce type de mariage: «on y découvre le rôle dominateur de l’homme, une certaine<br />

inégalité entre l’homme et la femme, égoïstement, bassement entretenue et l’exploitation<br />

révoltante de la femme par l’homme. La dignité de la femme est souvent totalement<br />

méconnue » SARAH, R (1989, 9).<br />

2.2.3. Mariage Endogamique et mariage exogamique<br />

Le mariage endogamique et exogamique ont tous deux des fondements culturels et<br />

entérinés par la religion quelquefois.<br />

Mariage endogamique<br />

Le mariage endogamique observé en Guinée, est une <strong>for</strong>me de mariage qui se contracte soit<br />

au sein de la communauté, au sein du lignage, au sein du clan, voire au sein de la famille<br />

élargie. Il a pour objectif de préserver l’identité des individus, de conserver les ressources à<br />

l’intérieur de la famille. L’islam contribue à pérenniser cette pratique endogamique, sous<br />

une autre <strong>for</strong>me, car la femme musulmane ne peut épouser un non musulman à moins qu’il<br />

ne change de religion 55 , t<strong>and</strong>is que l’homme musulman a la possibilité d’épouser une autre<br />

femme puisque le système matrimonial est le patriarcat. Ainsi ressort un mariage<br />

endogamique bipolaire revêtant le caractère coutumier d’une part et de l’autre le caractère<br />

religieux. La religion et les principes coutumiers font que, certains groupes tels que les<br />

Peulhs pratiquent très <strong>for</strong>tement le mariage endogamique 56 .<br />

Mariage exogamique<br />

Le mariage est exogamique, lorsqu’il est contracté par deux personnes de familles<br />

différentes et de groupe ethnique différent. Si de nos jours, cette <strong>for</strong>me de mariage se<br />

contracte de manière délibérée, elle se pratique par contre dans certaines régions pour des<br />

raisons d’interdit familial.<br />

55 Voir tableau de pratiques religieuses.<br />

56 Résultat obtenu, après analyse et interprétation des données tirées des entrevus, réalisés sur le terrain<br />

34


Cet interdit est relatif au totem 57 de la famille ou alors à la similitude du même nom de<br />

famille. Chez les Toma, deux personnes de même nom de famille (ex: GUILAVOGUI) ne<br />

peuvent sceller un mariage à moins qu’il soit prouvé l’appartenance à des familles<br />

différentes et de consanguinité très éloignées et de villages différents. Par contre chez les<br />

Guerzés, deux futurs époux ayant les mêmes totems (animal, repas, …) ne peuvent se<br />

marier puisqu’ils sont considérés comme des consanguins.<br />

2.2.4 Mariage libre et mariage <strong>for</strong>cé<br />

Le mariage qu’il soit libre ou <strong>for</strong>cé en Guinée a toujours pour témoins les parents et les<br />

deux familles. Son processus, laisse voir que même s’il est libre le consentement des<br />

parents est toujours sollicité soit avant ou pendant l’union.<br />

Mariage libre<br />

Le mariage libre est le type de mariage dans les cas de figures étudiés à travers cette<br />

recherche, celui dans lequel les futurs époux consentent au mariage sans une contrainte<br />

visible des parents, puisque leur accord compte toujours pour valider l’union.<br />

En milieu Kpèlè/Guerzé, il arrive qu’on confère à la femme le statut de femme mariée sans<br />

que l’homme n’ait donné la dot, mais seulement présenté les « colas » et le tout sous la<br />

responsabilité reconnue des deux familles qui se sont partagé ces « Colas ». Cependant la<br />

femme non dotée, peut continuer à vivre sous le toit de ses parents tout en pouvant<br />

entretenir des relations plus rapprochées avec son époux. Le départ de la femme chez son<br />

mari peut être anticipé si la grossesse survient. Mais dans ce cas, les enfants sont sous<br />

l’autorité de la famille maternelle et pour rétablir la légalité morale et familiale, il revient à<br />

la famille de l’époux d’une manière cérémoniale de présenter la dot.<br />

Chez les Kissie, la valeur très lourde de la dot et sa modalité de remboursement très<br />

difficile et contraignante pousse aujourd’hui les familles kissiei à dem<strong>and</strong>er à la fille en la<br />

présence de sa famille et de celle de sa future belle famille si elle consent au mariage. Son<br />

accord, est son engagement dans la vie de ce mariage et son implication personnelle.<br />

57 Selon KOUASSIGAN, Guy Adjeté, Famille, droit et changement social en Afrique Noire Francophone, « Famille,<br />

Droit et Changement social dans les sociétés contemporaines, université Catholique de Louvain, (1978: 168), la<br />

participation au même culte et la soumission aux mêmes interdits créent entre des individus d’un même groupe des<br />

réseaux complexes de droits et d’obligations qu’ignore souvent la parenté physiologique dans la pensée juridique<br />

européenne.<br />

35


Mariage <strong>for</strong>cé 58<br />

Le mariage <strong>for</strong>cé encore pratiqué, constitue une pression familiale obligeant la fille à<br />

contracter un mariage contre son gré. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :44). Autrement dit, c’est<br />

un mariage contracté sans le consentement de la jeune fille. La jeune fille est <strong>for</strong>cée à<br />

consentir et obligée de s’y résigner. Le mariage <strong>for</strong>cé se comprend à travers le patriarcat qui<br />

donne l’autorité de chef de famille à l’homme, à qui le dernier mot revient. De cette<br />

manière il est donc difficile pour le père de famille d’être désobéît par la junte féminine.<br />

Cette considération fait passer la femme de l’obéissance au père à la soumission au mari.<br />

Le milieu m<strong>and</strong>ingue est celui qui présente de manière régulière cette <strong>for</strong>me de mariage. La<br />

pratique du mariage dans ce milieu est plus que <strong>for</strong>cée et le foyer est dans la plupart des cas<br />

polygamique.<br />

Sur le plan de la coutume, le mariage <strong>for</strong>cé est contraire aux dispositions du code civil qui<br />

pose le consentement des époux comme condition de validité du mariage. Car, l’article 281<br />

du code civil guinéen (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :47) dispose que «le mariage exige le<br />

consentement des deux époux». Le consentement aux termes de l’article 282 du code civil<br />

guinéen (2007) doit être libre et non vicié par la violence ou l’erreur sur la personne ou<br />

l’identité physique.<br />

2.2.5. Mariage précoce et mariage tardif<br />

Cette classification repose sur l’âge au mariage. Si dans certains cas il est précoce et ceci<br />

pour des considérations biologiques dans d’autres cas, la considération culturelle lui donne<br />

sa nature tardive.<br />

Le mariage précoce<br />

Le mariage précoce est la contraction d’un mariage d’une fille physiologiquement jeune<br />

mais aussi n’ayant pas la majorité juridique. Le code civil guinéen fixe l’âge légal du<br />

mariage de la jeune fille à 17 ans. Le mariage précoce est considéré comme par la<br />

communauté comme la solution aux problèmes de <strong>for</strong>nication prématurée ou au risque de<br />

grossesse hors mariage. Cet argument est soutenu aussi bien dans la communauté peuhl<br />

interviewée, que repris dans le rapport du Ministère de la promotion de la femme et de la<br />

protection de l’Enfant et l’UNFPA de Niamey 59 (2005 :21)<br />

58 Le mariage <strong>for</strong>cé et le mariage précoce ne sont pas des dispositions du droit musulman, nous fait certes rappeler SOW,<br />

F (2005) cependant, elle soutient que ces pratiques sont maintenus au nom du respect d’une culture islamique. Dans la<br />

mesure où les Etats et les organisations internationales font recours aux autorités religieuses pour entériner ou abolir une<br />

pratique dans leurs programmes tel par exemple en santé sexuelle et de la reproduction.<br />

59 Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l’Enfant et l’UNFPA, Argumentaire islamique sur l’équité<br />

de Genre, Initiative Genre, Niamey, décembre 2005 : 21<br />

36


La pratique coutumière du mariage à certains niveaux en Guinée, accorde une gr<strong>and</strong>e<br />

importance au mariage de la jeune fille et à la procréation. C’est ce qui explique la<br />

persistance dans les proportions encore élevées de mariages précoces qui a des méfaits<br />

certains sur les femmes. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :44). Pourtant, ce type de mariage<br />

comporte beaucoup de préjudices. IL est actuellement démontré sur le plan médical tel que<br />

ressort dans le rapport du Ministère de la promotion de la femme et de la protection de<br />

l’Enfant et l’UNFPA de Niamey 60 (2005 :21), que le mariage précoce cause à la petite fille<br />

des préjudices physiques, sociaux, et même moraux, tel que le cas des fistuleuses. En<br />

milieu Kissie 61 , le mariage est plutôt précoce, car dès 11 ans et un peu plus, la petite fille,<br />

peut déjà jouir déjà de son statut d’épouse.<br />

Le mariage tardif 62<br />

C’est le mariage de la jeune fille au-delà de l’âge retenu par le code civil. Certes de cette<br />

manière ce type de mariage est moins objet de questionnement. Il est de manière apparente<br />

et contemporaine contracté par des filles qui suivent de très longues études universitaires.<br />

Cependant, elle est aussi une pratique coutumière qui a existé et qui continue dans certaines<br />

communautés en Guinée.<br />

Là, il advient qu’une autre pratique est l’élément qui donne le caractère tardif à ce type de<br />

mariage. En milieu Toma, et Kpélè l’âge optimal d’une jeune fille au mariage est autour de<br />

24 à 26 ans et plus. Ceci s’explique par le fait que la fille devrait non seulement aller en<br />

éducation (Excision 63 , qui durait 3 ans et qui, de nos jours, est revue à environ 2 mois),<br />

mais elle devait aussi avoir une constitution physique apte aux travaux champêtre.<br />

Cependant, les sessions d’excision était très espacées de 6 ans d’intervalle. Autrement dit,<br />

pour une fille qui était retenue pour la session d’indication à l’âge de 18 ans, elle ne pouvait<br />

pas se marier avant l’âge de 21 ans. Par contre d’autres attendent dans la famille de leur<br />

époux jusqu’à atteindre l’âge de suivre ces rites.<br />

60 Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l’Enfant et l’UNFPA, Argumentaire islamique sur l’équité<br />

de Genre, Initiative Genre, Niamey, décembre 2005 : 21<br />

61 Une ONG américaine, suite aux résultats d’une étude en matière de santé de la reproduction menée en Guinée, a<br />

décidée de s’installer environ deux ans dans la préfecture de Kissidougou (zone à <strong>for</strong>te majorité Kissie et avec aussi une<br />

<strong>for</strong>te présence de malinkés), pour soigner les femmes fistuleuses.<br />

62 Modèle identifié suite aux entrevus : Ce modèle ci semble à vue d’œil un modèle conventionnel et du moins apprécié.<br />

Mais les réalités autour laisse voir un autre schéma socioculturel (excision) qui occasion ce nouveau caractère de tardif.<br />

L’ouvrage de Christian Kordt, Resisting state Iconoclasm among the Loma <strong>of</strong> Guinea, Carolina Academic Press Ritual<br />

Studies monographs series, Durham, North Carolina, USA, 2007, aide à mieux comprendre cette communauté Toma dans<br />

ses pratiques coutumières dans l’ensemble.<br />

63 Cette pratique est un tabou. A travers elle, la junte féminine était éduquée sur la vie courante et traditionnelle de la<br />

communauté relative à la vie de la communauté, à la tradition, aux métiers et à la vie sociale et économique de la famille.<br />

Cette expérience prédisposait une fille à son mariage. Les femmes excisées sont différentes des autres femmes non<br />

37


2.2.5. Lévirat et Sororat<br />

Formes de mariage très souvent contractées sous l’influence de la gr<strong>and</strong>e famille pour des<br />

raisons tiers.<br />

Le lévirat:<br />

Le lévirat est une ancienne pratique de mariage de la veuve, au frère de son mari défunt,<br />

même contre son gré, qui continue encore dans certaines situations. Cette pratique vise à<br />

assurer une certaine continuité des liens du mariage et à assurer une certaine protection aux<br />

enfants. L’analyse autour de cette acceptation repose sur la possibilité qu’aura la belle<br />

famille de gérer la veuve. Elle se révèle par endroit comme une violence du droit de la<br />

femme à choisir librement son conjoint. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :44)<br />

Aujourd’hui, si cette pratique perdure, elle pourrait revêtir trois raisons chez les peulhs<br />

suivant nos sources de données collectées á Sannou 64 en mai 2007. Un défunt qui laisse un<br />

héritage matériel assez important, aura sa veuve maintenue dans le foyer pour éviter que les<br />

revenus soient transférés vers d’autres familles. De ce fait, la belle famille organise un<br />

mariage arrangé pour qu’un des frères du défunt épouse la femme. La seconde raison est<br />

liée à la réussite matérielle et financière des enfants nés de ce mariage, la belle famille<br />

mettra tout à pr<strong>of</strong>it afin de garder la veuve pour que les enfants leur restent devoir. Enfin, si<br />

la veuve est encore jeune et a donc la possibilité de procréer, elle passe aussi par le lévirat.<br />

En milieu Kissi, il est ressorti de nos diverses entrevues que le lévirat se produit dans le<br />

strict objectif d’aider la veuve à gérer son héritage, et surtout l’aider à entretenir le champ.<br />

La nature de l’héritage 65 ne lui permet pas de vivre seule, à moins d’avoir des enfants assez<br />

gr<strong>and</strong>s capables d’exécuter des travaux champêtres.<br />

Sous d’autres <strong>for</strong>mes, il est considéré comme un mariage <strong>for</strong>cé et une violation du droit de<br />

la femme à choisir librement son conjoint, car le refus de la femme d'obéir à cette pratique<br />

coutumière la prive de la garde de ses enfants et du droit de demeurer dans le domicile<br />

conjugal. Cette pratique s’avère d’une manière ou d’une autre commune aux différents<br />

groupes ethniques rencontrés.<br />

Le lévirat entre dans la conception philosophique de l’individu en ce sens: «Je suis parce<br />

que nous sommes, et puisque nous sommes, donc je suis». En d’autres termes, l’existence<br />

de l’individu est l’existence du groupe familial, ethnique ou clanique. Et là où l’individu<br />

excisées par le raisonnement, l’expérience dans le foyer conjugal et l’esprit de respect des tabous ou des pratiques<br />

interdites.<br />

64 Sous préfecture de Labé (République de Guinée).<br />

65 Voir Tableau 2 : Les pratiques coutumières relatives aux femmes dans la vie du couple.<br />

38


peut physiquement mourir, sa mort ne doit pas éteindre son existence sociale légale puisque<br />

le « Nous » continue d’exister à la place du « Je ». SARAH (1999 :8)<br />

Le sororat :<br />

Le sororat, est le mariage d’un veuf avec la sœur cadette de l’épouse défunte dans le but de<br />

perpétuer les relations d’alliance entre les familles de l’homme et la femme. L’un des<br />

arguments qui soutiennent cette pratique reste sans doute le souci pour la famille de la<br />

défunte d’<strong>of</strong>frir un encadrement certain aux orphelins par la présence d’une personne<br />

proche à leur défunte fille (généralement sa sœur qui représente la tante « Petite Maman »<br />

aux orphelins). Vue sous cet angle, la décision vient le plus souvent de la famille de la<br />

défunte. Elle pourrait dans certains cas venir de l’homme qui voudrait toujours garder la<br />

mémoire de sa défunte épouse en se fidélisant à sa belle famille.<br />

Cette pratique coutumière du mariage, en plus du fait d’avoir favorisé des mariages<br />

précoces de mineures, a également cautionné des mariages <strong>for</strong>cés. (CEDAW/C/GIN/1,<br />

2000 :44).<br />

2.2.7. Mariage mixte religieux 66<br />

Le mariage mixte sous sa <strong>for</strong>me juridique est celui contracté entre deux personnes de<br />

nationalités différentes. Vue sous l’angle de la société, il est le mariage entre deux groupes<br />

ethnique différents ou de gr<strong>and</strong>es familles différentes (Une autre <strong>for</strong>me d’exogamie ou de<br />

mariage mixte local). Alors que du point de vue religieux, il est le mariage entre deux<br />

personnes de religions différentes.<br />

Dans le cadre spécifique de la Guinée, la coexistence religieuse donne cette nouvelle <strong>for</strong>me<br />

de mariage. L’appréhension du mariage religieux est faite suivant les deux principales<br />

religions 67 à savoir l’islam et le christianisme. Tenir compte du mariage en Guinée à travers<br />

aussi ces deux gr<strong>and</strong>es religions est une approche permettant de cerner toute la complexité<br />

que revêt ce mariage en Guinée.<br />

Habituellement, à l’occasion des mariages en Guinée, les cartes de faire part portent<br />

l’écriteau suivant « Voici donc que l’homme quittera son Père et sa Mère, pour s’attacher à<br />

sa femme et les deux ne feront qu’une seule chair… ». Et cela pour bon nombre de mariages<br />

66 Mixte mis pour deux religions différentes. Notes contenues dans le registre de mariage dans une église catholique de<br />

Guinée et aussi les affirmations d’un Iman en Guinée.<br />

67 L’islam de Guinée rassemble principalement deux confréries qui sont la Qadirya et la Tidjania<br />

(http://www.oasisfle.com/documents/reportage-eleves.htm, http://www.au-senegal.com/art/religion.htm). Le christianisme<br />

domine dans les régions de la Guinée Forestière et de la Guinée Maritime. Même si l’islam est présent dans tout le pays, il<br />

est du moins plus intégré dans la région de la Moyenne Guinée. Dans cette région, les structures sociales et le<br />

39


civils, alors que cette citation est tirée d’un Livre biblique (Ephésiens 5, 31-32). Ainsi, ce<br />

phénomène de mode montre combien de fois par rapport au mariage, le syncrétisme<br />

religieux devient très ancré. L’acceptation du mariage mixte est un signe du nomadisme<br />

interreligieux et d’une réelle intégration du pluralisme religieux.<br />

Bien que le mariage mixte ne soit pas aisé dans sa contraction, des dérogations sont tout de<br />

même acceptées sous conditions 68 , ce qui favorise un taux important de couples mixtes que<br />

l’on rencontre en Guinée. Dans ce cas ci de mariage mixte, la cérémonie prend en compte<br />

le rituel des deux pratiques religieuses en plus des deux autres (civile et coutumière). Ce qui<br />

dénote une certaine tolérance des pratiques religieuses, face à une obligation de suivre les<br />

principes résultant de ces deux pratiques.<br />

Très souvent, dans la situation de mariage mixte 69 , la pratique coutumière voudrait que la<br />

belle famille suive les pratiques coutumières de l’épouse. Tout de Même, les deux <strong>for</strong>mes<br />

de mariage finissent très souvent par être célébrées. Face à cette insistance, la religion<br />

apparaît donc comme un régulateur des relations entre hommes et femmes, mais aussi un<br />

processus d’alliance entre Dieu et les hommes.<br />

L’intérêt de présenter le mariage mixte sous son aspect religieux montre la symbiose qui se<br />

créée entre les religions 70 mais aussi entre les communautés. Mais ce mariage quel qu’il<br />

soit est très souvent synonyme de complexité, et la femme est face aux mêmes principes<br />

religieux malgré des différences près. Face aux différentes pratiques coutumières et<br />

religieuses, c’est donc quoi le mariage civil et quel est sa visée?<br />

Aussi controversée que sensible est l’appréhension du mariage, il est de manière classique<br />

admis comme l’union légitime de deux personnes, dans les conditions prévues par la loi et<br />

qui est contracté devant l’autorité civile (Rey, A, 1998 :808 71 ). En d’autres termes, le<br />

mariage civil est un contrat d'union civile entre deux personnes majeures qui expriment leur<br />

consentement libre et éclairé à faire vie commune ainsi que leur engagement à respecter les<br />

comportement des habitants sont régie par la religion à telle enseigne qu’elle participe à la définition de l’identité ethnique<br />

Peuhl et son omniprésence déteint sur toutes les activités quotidiennes. (DIAKITE, B, 2004:41)<br />

68 http://www.vatican.va/archive/FRA0037/__P3S.HTM, Sami A Aldeeb Abu Sahlieh, Rapports entre droit et religion<br />

dans le monde arabo-musulman - Influence du droit musulman en Suisse, E-SDC N¤6, Genève, 2007<br />

69 Entendu ici, mariage célébré entre futurs époux de religions différentes.<br />

70 La disposition constitutionnelle de la Guinée prévoit qu’elle est un pays unitaire indivisible, laïc mais à <strong>for</strong>te proportion<br />

musulmane (membre de l’Organisation de la Conférence Islamique « OCI »), environ 85% en 2005. Cette constitution<br />

assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, d’ethnie, de sexe, de religion et<br />

d’opinion et respecte toutes les croyances ( http://www.isdc.ch/d2wfiles/document/4603/4017/0/ESDC%202007-6%2015.5.07.pdf )<br />

71 REY, Alain (Sous la direction), , REY (Alain), TOMI (Marianne), HORÉ (Tristan), TANET Chantal, Dictionnaire<br />

historique de la langue française, édition enrichie par Alain Rey et Tristan Hordé, Dictionnaires Le Robert, Paris, 1992-<br />

1998, 3 tomes, 4304 p.<br />

40


droits et obligations liés à cet état. Cet engagement n’est dissout qu’à deux conditions, en<br />

cas de divorce ou alors suite à la mort d’un des deux conjoints.<br />

C’est pourquoi depuis l’indépendance de la Guinée en 1958, le code civil a connu quelques<br />

modifications en son chapitre III intitulé « Des actes de mariage et de leur transcription ».<br />

Par le mariage, de nombreuses familles entrent en relation et des obligations réciproques<br />

naissent. Comme tant d’autres droits reconnus à la femme au même titre que l’homme, le<br />

droit de contracter le mariage est accordé à tout citoyen (homme et femme). Le mariage est<br />

même protégé par la loi fondamentale en son article 16.<br />

L’article 201 du code civil guinéen (2007, 30) rend irrégulier et sans effet tout mariage qui<br />

ne serait pas célébré devant les <strong>of</strong>ficiers de l’état civil. L’article qui suit (Art 202) stipule<br />

que le mariage civil doit précéder obligatoirement le mariage religieux. L’Art 203, exige à<br />

chacun des futurs époux la remise à l’autorité de l’état civil du certificat prénuptial datant<br />

de moins de deux mois avant l’accord de célébration du mariage. Pourtant selon les<br />

pratiques coutumières, ceci n’est pas du tout observé car il y a des cas de lévirat, de sororat,<br />

de mariage endogamiques 72 , … Selon l’article 211, le jour de la célébration est choisi par<br />

les deux époux alors que suivant la coutume et surtout la religion musulmane dominante en<br />

Guinée, le jour de la célébration du mariage est choisi par un érudit selon le calendrier<br />

lunaire. Et de préférence un vendredi. Dans la mesure où le couple tient à le célébrer un<br />

autre jour, la cérémonie est donc repartie en deux, voire plusieurs étapes ; mais tout en<br />

célébrant le mariage religieux musulman le vendredi 73 . L’article 214 stipule que le mariage<br />

doit être signé par l’<strong>of</strong>ficier de l’état civil, en la présence des époux, avec l’accord des pères<br />

ou les chefs de famille dont le consentement est donné au moment de la célébration et par<br />

les témoins. (Code Civil de la République de Guinée, 2007) Ce qui n’est pas le cas pour le<br />

mariage coutumier et même un peu moins de 10 ans pour le mariage religieux musulman en<br />

Guinée.<br />

Pour terminer, nous noterons que cette dynamique du mariage montre à suffisance la<br />

coexistence entre les normes religieuses et culturelles ce qui nous amène à tirer à appuyer la<br />

thèse que le milieu social détermine la conscience sociale.<br />

72 Pratiques présentées et définies dans le chapitre II de la recherche.<br />

73 Pourquoi cette précision de religieux musulman ; parce qu’il peut arriver que le couple soit un couple mixte (musulman<br />

et chrétien). En Guinée, il y a une gr<strong>and</strong>e cohabitation interreligieuse. Dans ce pareils cas, le mariage est célébré selon les<br />

deux religions en suivant de manière modérée les rites de chaque pratique. Le mariage mixte est un phénomène habituel<br />

en Guinée et donc pas nouveau.<br />

41


2.3. Certains éléments déterminants de la vie du mariage dans ce contexte<br />

La dot et la progéniture sont les éléments culturels essentiels et indispensables du mariage<br />

en Guinée.<br />

La dot, même si elle se présente sous des <strong>for</strong>mes variées selon les groupes ethniques, au-<br />

delà de la pratique coutumière, est aussi une tradition musulmane se pratiquant sous une<br />

autre <strong>for</strong>me, ayant un autre sens et appelé « SADAQ 74 ». Selon que l’on soit de l’un ou de<br />

l’autre côté, sa présentation est obligatoire et entérine la validation du mariage.<br />

De la paie de cette dot, il ressort comme des actions résultant des différentes sources de<br />

légitimité 75 justifiant la pratique coutumière du mariage. Ainsi, s’identifie à certains<br />

endroits l’ensemble des jeux d’acteurs et leur système d’action concret 76 . Il ressort de ce<br />

système d’action, la présence de nouvelles pratiques considérées comme faisant partie de la<br />

coutume, mais qui sont en réalité des phénomènes relativement récents comme le rapt de la<br />

fiancée ou le montant exorbitant exigé au titre du prix de la fiancée. Ce qui par conséquent,<br />

donne tout droit à l’homme de disposer librement des droits de son épouse.<br />

Le tableau suivant fait une description détaillée de la dot selon les groupes ethniques et<br />

aussi selon la pratique religieuse islamique. Selon la coutume, la dot est une compensation<br />

matrimoniale. Par ailleurs, le mariage dans son ensemble est synonyme de progéniture<br />

(procréation, fécondité). L’enfant n’appartient au couple que lorsqu’il est conçu par lui et<br />

non lorsqu’il est adopté. L’adoption est pratiquée pour d’autres fins 77 et pour d’autres<br />

raisons. La procréation d’une femme est donc très essentielle dans la vie du couple. Elle<br />

74<br />

La S:4, V : 4 dit : « Et donnez aux femmes leur Mahar ». L’acceptation que la dot appartient à la femme seule; elle a le<br />

droit d’en disposer, dans tous les cas, sans avoir besoin de l’autorisation de son mari , ni de l’adhésion de son père de son<br />

gr<strong>and</strong> père ou de son tuteur testamentaire, qu<strong>and</strong> elle est majeure. Elle pourra l’aliéner ,l’engager , la donner en louange, à<br />

titre de prêt et en faire donation á titre gratuit en faveur de son mari, de ses parents et des tiens (art 97 Qadri) du droit<br />

Egyptien prend la même tournure lorsqu’elle est rapportée aux normes islamique relatives à l’utilisation de la dot par<br />

l’épouse en Guinée est rapportée par Sami Sami A Aldeeb Abu Sahlieh, Les régimes matrimoniaux en droits arabe et<br />

musulman- cas de l’Egypte et du Maroc, E-SDC N¤8, Genève, Institut Suisse de Droit comparé, 2007.<br />

75<br />

Note de Osterhaus Juliane (Spécialiste de la planification pour le droit et la condition féminine au siège de la GTZ) , J,<br />

repris par Weilenmann (2007 :100). Selon Osterhaus, J, le débat dans un contexte de pluralisme juridique soit se<br />

concentrer sur les différentes sources de légitimité qui justifient la discrimination sociale á l’égard des femmes, puis<br />

éclairer lesquelles s’appuient sur la(les) loi (s) coutumières(s), lesquelles sont liées aux pratiques du droit étatique <strong>of</strong>ficiel<br />

et lesquelles sont un phénomène nouveau qui relève davantage de différents mosaïques de lois locales.<br />

76<br />

Bernoux, P, BERNOUX, P, 1999, la sociologie des organisations, Initiation théorique suivie de douze cas pratiques, 5e<br />

éditions, Paris Seuil<br />

77<br />

UNICEF Guinée, Exploitation sexuelle des filles Domestiques, Conakry, septembre 2005. A travers cette étude, on<br />

découvre le pr<strong>of</strong>il de certaines filles adoptées pour des fins d’exercice de taches domestiques. Cette étude, aide à<br />

comprendre le caractère péjoratif de l’adoption locale en Guinée, son ampleur, sa pesanteur et les conséquences.<br />

42


peut faire éviter le divorce et la bigamie. Le manque d’enfant est la principale cause de la<br />

misère des femmes stériles dans le mariage en Guinée.<br />

Un des principes de la sagesse africaine affirme que : « l’homme n’est rien sans la femme,<br />

la femme non plus n’est rien sans l’homme, et les deux ne sont rien sans un troisième<br />

élément qui est l’enfant ». A partir de cette donnée, il revient donc à dire que la procréation<br />

et le mariage, dans les communautés guinéennes, <strong>for</strong>ment une unité indissociable. Sans<br />

procréation un mariage bien que valide, est incomplet en état d’achèvement 78 . (SARAH,<br />

1989:6).<br />

78 Nous reviendrons sur cette considération à travers la condition des femmes stériles, mais aussi quelques fois des<br />

ménopausées au point 4.1. Les manifestations des pratiques coutumières du mariage.<br />

43


Tableau 1 : Composition de la dot suivant certaines pratiques coutumières et religieuses 79<br />

Groupes ethniques Composition de la dot ou du Sadaq<br />

Guerzé<br />

(Kpèlè Hwililöö)<br />

10 noix de cola (5 rouges et 5 blanches)<br />

7 b<strong>and</strong>es de cotonnades 80 .<br />

1 panier de riz (environ 50 kg),<br />

1 porcin<br />

Du vin blanc,<br />

Une certaine somme d’argent.<br />

Kissia 10 noix de colas<br />

1 pagne<br />

Maninka 101 morceaux de savon<br />

Du vin blanc « Vin de palme » synonyme de respect et de considération<br />

La valeur monétaire revient au futur époux selon son revenu<br />

1 Tissu blanc : qui servira à envelopper la jeune fille le jour du mariage;<br />

Du bétail, actuellement, on <strong>of</strong>fre 3 bœufs<br />

De l’argent d’une valeur de 50 000 GNF 81<br />

Des habits pour la fille.<br />

Peulh Des noix de cola,<br />

Toma Des noix de cola,<br />

Du sel (à la place de 2 à 3 kilos de sel, désormais 567 sacs de sel ou l’équivalent de 500 000 GNF<br />

Des cordes 82 (à la place de la corde, une somme de 2, 000,000 GNF est versée à la famille de la fille)<br />

60 guinzés83 et,<br />

Dépenses accessoires<br />

79 Tableau élaboré suite aux entrevues réalisées avec la population cible de l’étude.<br />

80 Des rouleaux d’habits tissés avec des fils de cotonnade.<br />

81 1 Euro équivaut à environ 5500 GNF (décembre 2007)<br />

82 La corde et le sel serviront à stabiliser le bétail, la bergère qui s’en va doit être remplacée par ces éléments<br />

44


Islam Le « SADAQ 84 » est une somme d’argent que l’homme donne cette fois non pas à la famille de la fille mais à sa<br />

future épouse en la présence de tout le monde le jour de la célébration du mariage religieux. Cette somme<br />

appartient uniquement à la femme qui peut en faire ce qu’elle veut. La coutume voudrait que si l’homme peut<br />

être aidé pour payer pour trouver les autres cadeaux pour la dot coutumière celle religieuse doit <strong>for</strong>cément venir<br />

de son revenu propre, d’où la valeur dépend de ce qu’il aura décidé d’<strong>of</strong>frir à la femme.<br />

CARTOGRAPHIE DES PRATIQUES COUTUMIERES ET RELIGIEUSES DU MARIAGE IDENTIFIEES<br />

3.1. Les pratiques coutumières/Processus /dynamique du mariage coutumier<br />

Tableau 2 : Les pratiques coutumières relatives aux femmes dans la vie de couple, collectées auprès de quelques femmes mariées (Stériles,<br />

ménopausées et veuves)<br />

Pratiques Groupe<br />

Âge du mariage<br />

Ethnique 85<br />

PRATIQUES EN RAPPORT AU MARIAGE<br />

G 15 ans âge de mariage mais la procréation n’est autorisée qu’autour de 24 et 28 ans.<br />

K Soit dès le sein de sa mère ou soit entre 11 ans et 15 ans<br />

M 14 à 15 ans (fiançailles) et entre 16 ans et 18 ans mariage<br />

P Entre 12 ans et 20 ans.<br />

T 23 ans et plus<br />

G Deux <strong>for</strong>mes : l’avis des parents lorsque la fille est dans le sein de ses parents ou alors la seconde,<br />

l’entente des deux parties qui après dem<strong>and</strong>ent l’accord des parents<br />

Consentement K Ce sont les parents qui décidaient et maintenant, l’avis de la fille est très sollicité pour ne pas<br />

qu’elle créée des ennuis à sa famille<br />

83 Le guinzé est un morceau de fer torsadé d’une vingtaine de centimètres de long dont un bout est aplati et l’autre pointu, qui représentaient à l’époque la monnaie<br />

traditionnelle des Toma La signification de son usage dans le mariage est synonyme de durabilité en tant qu’un métal. Tel qu’il ne peut pas pourrir, c’est de la même<br />

manière que l’amour qui lit deux conjoints qui se marient ne doit pas pourrir. C’est pourquoi dans certaines contrées Toma, les coques d’arachide sont aussi utilisées à la<br />

place du guinzé s’il manque, en supposant que la coque d’arachide dure sous la terre sans pourrir.<br />

84 Le Sadaq étant une pratique musulmane, il se pratique différemment selon le contexte socioculturel. Ainsi, en Guinée, ce commentaire présenté est la <strong>for</strong>me connue et<br />

pratiquée.<br />

85 Légende: G: Guerzé, K: Kissie, M: Maninka, P: Peulh, T: Toma,<br />

45


Acteurs impliqués<br />

dans<br />

l’organisation du<br />

mariage<br />

Vie du couple (les<br />

3 premiers jours)<br />

M C’est le père (chef de famille) qui décide et la fille doit subir les faits<br />

P Ce sont les parents qui décident et les futurs époux sont mis devant les faits accomplis<br />

T Tout était négocié par les parents et la fille n’a pas le droit de désobéir<br />

G Les belles sœurs (l’épouse du gr<strong>and</strong> frère au futur époux, ou alors la sœur du futur époux), les<br />

parents biologiques, etc.<br />

K Les deux familles, le témoin. Si l’homme a déjà une première épouse, cette première épouse fera<br />

partie de la délégation et sera chef de la délégation<br />

M Les deux pères de familles, un intermédiaire qui lui aussi doit être un homme<br />

P Les deux familles (le frère, les parents du futur époux, les oncles, les tantes)<br />

T Les parents des deux familles,<br />

G Le couple pouvant vivre ensemble bien que la dot ne soit pas encore présentée fait qu’il n’y a pas<br />

de rites autour des premiers jours de mariage<br />

K La belle famille après trois visites consécutives, donnera 10 noix de colas et du vin blanc<br />

synonyme de respect et de considération pou les sages. Juste après les futurs mariés peuvent vivre<br />

ensemble. La durée dépend de l’insistance de la mère de la fille. Le mariage ne sera réellement<br />

consommé qu’à la paie de la dot ( la valeur dépend des moyens de l’homme). Respecter et<br />

travailler pour son beau père et sa belle mère.<br />

M Une entière soumission à toute la famille du mari<br />

P La femme n’a droit d’accéder à la chambre conjugale que le 3 ème jour de mariage. Elle n’a pas le<br />

droit de connaître au préalable son futur époux<br />

T Période d’intense familiarité avec la belle mère<br />

G Aucune différence majeure n’existe entre les nuits. Vue les circonstances, la femme ne sait<br />

jamais à qu<strong>and</strong> sa première nuit tout dépend de la ruse de l´homme.<br />

K Pas de nuit de noce car la fille peut déjà habiter avec son époux avant la présentation de la dot.<br />

Nuit de Noce M Une obligation de rester dans la maison conjugale pour une semaine (bien se nourrir et accomplir<br />

46


Héritage<br />

Devoirs<br />

le devoir conjugal selon la volonté du mari).<br />

P Présence de certaines femmes près de la demeure du couple pour surveiller le couple. En cas de<br />

désaccord entre les époux ces femmes à la porte sont amenées à intervenir (faciliter l’acte à<br />

l’époux et cela en la présence de ces femmes) pour obliger l’épouse à céder à son époux.<br />

T Une période de repos physique car déchargée des tâches domestiques<br />

G<br />

K Dans cette communauté c’est aux femmes d’hériter (terres cultivables et de certains biens) de<br />

l’époux et non les enfants, même celle qui a procréé mais pas dans le foyer du mari défunt.<br />

Seulement, la femme stérile reçoit une part relativement inférieure que celle qui a conçu. Cette<br />

femme stérile et celle qui a des enfants à bas âge sera contraint d’accepter le lévirat pour pr<strong>of</strong>iter<br />

de son héritage. T<strong>and</strong>is que celle dont les enfants sont assez gr<strong>and</strong>s peut ne pas se remarier car les<br />

enfants pourront jouer le rôle de leur père.<br />

M Le bétail appartiendra aux frères du défunt,<br />

La femme ayant enfanté : n’aura qu’une ou deux couvertures<br />

La femme stérile est obligée de faire le lévirat ou alors elle quitte la famille bredouille (les mains<br />

vide)<br />

P Testament séparé dans le cas d’une femme stérile et reçois une part insignifiante.<br />

La veuve qui a procréée a droit à une part et à celle de ses enfants mais aussi sa belle famille<br />

La veuve ayant procréé dans un autre ménage et non dans celui de son défunt époux n’a aucun<br />

droit, soit repart dans son ancien ménage ou alors est pris en charge par ses enfants.<br />

T Les femmes ont les mêmes droits, mais de nature il n’existe pas des testaments<br />

G Aide le mari à épouser une autre femme<br />

K Aide le mari à épouser une autre femme, s’occupe de la maisonnée et de ses beaux parents, est<br />

(lorsqu’elles sont M Partage du revenu avec le mari<br />

protégée par ses beaux parents en cas de différends avec son époux<br />

47


onnes)<br />

Situation de<br />

tension entre<br />

d’une part la<br />

femme et de<br />

l’autre le mari et<br />

la belle famille.<br />

Quelques<br />

modèles de<br />

P La femme stérile doit être sexuellement active puisque ne connaît pas de maternité, mais aussi<br />

aide le mari à trouver sa coépouse.<br />

T L’époux très compréhensif<br />

G Néant n<br />

K Très souvent liés au refus de l’intimité dans le couple. L’homme peut refuser et ceci reste sans<br />

issue mais lorsque c’est la femme qui refuse, elle est battue et risque de se retrouver avec une<br />

coépouse.<br />

M Droit de toute la famille d’infliger des sévices corporels à l’épouse de leur frère, voir de la<br />

répudier, et le mari n’a pas le droit d’intervenir, vouer une gr<strong>and</strong>e soumission et obéissance au<br />

mari, chosification de la femme<br />

P Droit du mari à infliger des sévisses corporelles (bastonnades) et psychologique (injures) en cas<br />

T Néant<br />

de refus d’intimité ; humiliation en cas de prise de parole en public par le mari. Ces sanctions<br />

sont fréquentes chez la femme stérile<br />

G Polygamie (pour prouver la virilité de l’homme, celui qui épouse une femme est à moitié<br />

célibataire), mariage précoce, le lévirat<br />

K Polygamie pour s’occuper du mari et dans les travaux champêtres, le lévirat souvent des femmes<br />

stériles et des jeunes épouses, le mariage précoce,<br />

M Polygamie, lévirat, mariage <strong>for</strong>cé (l’avis ni de la mère, ni même de la fille n’est dem<strong>and</strong>é), le<br />

sororat (pour prendre soin des enfants de sa sœur défunte qui risquent d’être à la merci de leurs<br />

marâtres)<br />

mariage P Lévirat (si le mari a laissé assez de biens, si la femme a des gr<strong>and</strong>s enfants responsables ou alors<br />

si la femme a encore la possibilité de procréer), mariage <strong>for</strong>cé, mariage précoce, polygamie<br />

(trouver une autre épouse pour s’occuper de la belle mère malade ou loin de son fils), Absence<br />

périodique de la femme en cas de période de maternité,<br />

48


Situation réelle<br />

de la femme<br />

mariée<br />

T Le lévirat, le sororat très peu observé, l’excision une condition pour le mariage, le mariage <strong>for</strong>cé<br />

(contraintes financières qui amène la fille à payer de lourd tribut), mariage précoce (lié aux<br />

relations d’amitié entre deux familles, aussi en guise de reconnaissance à la famille qui contribue<br />

énormément aux dépenses relatives à l’excision de la fille), la polygamie.<br />

G La situation de femme stérile est très difficile. D’aucuns ont de la pitié d’autres la traitent comme<br />

une sorcière, une malchanceuse. Dans cette tradition, la femme stérile n’a pas le droit de prendre<br />

part à des évènements importants comme l’accouchement. Bien que tolérée par la communauté<br />

est très insupportable pour la vie du couple.<br />

K Obéissance surtout à sa belle mère, respect à l’endroit de ses beaux frères (Aînés), propriété du<br />

mari et vice versa, pardonner et chercher la bénédiction de ses enfants. La femme ménopausée et<br />

ayant procrée très sollicitée dans le village et partage son point de vue avec le mari par ra apport<br />

à l’avenir des enfants. La jeune femme veuve doit <strong>for</strong>cément se trouver un compagnon. La<br />

femme stérile vit sous un perpétuel choc.<br />

M Esclave du mari et de sa belle famille (ils et elles ont tous les droits sur l’épouse du frère), la<br />

femme doit se soumettre et travailler pour toute sa belle famille.. La femme veuve stérile repars<br />

dans sa famille biologique (car considérée comme une malchanceuse) ou quelque fois elle subit<br />

le lévirat, n’a aucun droit à la parole ni ne doit partager son point de vue, la socialisation selon la<br />

coutume malinké prépare la fille à la vie de polygamie. La femme stérile est considérée comme<br />

« une femme incomplète » aussi bien par son mari que par toutes les femmes du village.<br />

P Conflit avec la belle mère lorsque le mari fait plus attention à ces épouses qu’à sa mère, Menace<br />

de répudiation en cas de désaccord avec la belle mère. Lorsque la femme est stérile, elle est<br />

victime de frustration des coépouses, les enfants lui manquent de respect, victime de salutations<br />

ironiques (lui présenter les condoléances), résignations aux caprices des coépouses. Lorsqu’elle<br />

est ménopausée, elle est congédiée du lit conjugal même si elle manifeste le désir d’y rester<br />

encore.<br />

T Une parfaite harmonie avec la belle famille, la femme stérile est considérée comme celle qui n’a<br />

49


Attitude adoptée<br />

par la femme en<br />

période de<br />

difficulté dans le<br />

couple<br />

Conception de la<br />

communauté de la<br />

femme mariée<br />

G Néant<br />

pas atteint son objectif de femme mariée. Dans la communauté Toma, le respect de la femme du<br />

foyer est de rigueur, le manquement d’une épouse par un des petits frères de son époux, peut<br />

conduire au départ autorisé de la femme du foyer conjugal.<br />

K Une gr<strong>and</strong>e résignation au sort.<br />

M Dans les moments pénibles, les femmes accordent une gr<strong>and</strong>e consécration à Dieu et à sa<br />

volonté. Ceci est plus fréquent chez les femmes stériles.<br />

P Dans les moments pénibles, les femmes accordent une gr<strong>and</strong>e consécration à Dieu et à sa<br />

volonté. Ceci est plus fréquent chez les femmes stériles.<br />

T Pour les femmes stériles gr<strong>and</strong>e consécration á Dieu.<br />

G Stérile : Sorcière et malchanceuse<br />

Ménopausée ayant des enfants: elle est sollicitée par tout le village<br />

Veuve : Distance entre les hommes et la femme, quelquefois traitée de malchanceuse<br />

K Femme stérile : considérée comme une qui a signée un pacte avec le sorcier en lui vendant le<br />

ventre qui reçoit le fœtus, considérée comme un homme dans la communauté<br />

Femme veuve :<br />

M Le jour du mariage, un fouet est remis au mari accompagné de ces mots « cette femme est ta<br />

voleuse, ta menteuse et ton esclave. Fais en ce que tu voudras ». la femme mariée quitte de<br />

l’obéissance au père et passe à la soumission au mari, les travaux domestiques sont son quotidien.<br />

Interdiction <strong>for</strong>melle de contredire le mari, les ressources de la femme (bétail, volaille)<br />

reviennent à l’homme.<br />

P Stérile: Elle est une femme inutile dans le ménage<br />

Ménopausée: Période à partir de laquelle la femme doit « sortir » de la demeure familiale car ne<br />

peut plus supporter les actes sexuels.<br />

T Même conception manifeste à l’égard de toutes les femmes, avec quelques considérations<br />

50


les arguments<br />

avancés vis á vis<br />

de la femme<br />

G Néant<br />

K Néant<br />

disparates par endroit chez les femmes stériles.<br />

M Aucun argument, pas besoin de se justifier devant qui que ce soit, la femme est l’esclave et voilà.<br />

Elle doit suivre son maître et ne rien chercher à comprendre. .<br />

P Lorsque c’est à l’endroit de la femme stérile : il est dit que soit les coépouses lui ont jeté un<br />

mauvais sort ou alors elle est inexaucée de Dieu.<br />

La femme ménopausée, elle dans cette situation doit accepter le mariage d’une nouvelle épouse.<br />

Et ceci est une socialisation que cette communauté repose sur la religion musulmane<br />

T C’est la volonté de Dieu si la femme est stérile<br />

G Néant<br />

K Femme stérile : Sorcière, méchante si elle est rigoureuse<br />

M La femme stérile : elle ressemble à un arbre sans feuilles, ni fruits, donc inutile. D’autres rajoute<br />

Ce qui est dit<br />

que la stérilité est une malédiction de Dieu venant de la femme ou d’un des ancêtres.<br />

habituellement P Très souvent il y a plus de considération autour de la femme stérile. Voici entre autres termes qui<br />

dans la<br />

lui sont lancés: « Femme pour qui on doit de la pitié», «Femme que Dieu n’a pas exaucé»<br />

communauté sur<br />

«Femme méchante ou méchante mère »<br />

les femmes T Femme stérile riche : Elle a signé un pacte en échange de son ventre, ce qui fait qu’elle n’enfante<br />

pas.<br />

Tableau 3 : Les pratiques et conceptions coutumières relatives aux femmes dans la vie de couple 86<br />

Dispositions Groupes<br />

ethniques<br />

PRATIQUES ET CONCEPTIONS COUTUMIERES<br />

G La femme a été un être précieux de la société qui déterminait la valeur sociale d’un homme marié. Il<br />

86 Données collectées auprès de personnes ressources et de chefs coutumiers<br />

51


Perception de la<br />

femme dans les<br />

coutumes jadis<br />

Place de l’enfant<br />

dans le mariage<br />

arrivait tout de même que le père donne sa fille en mariage à un de ses amis.<br />

K La femme est la propriété de l’homme jusqu’à ce qu’il change de ménage. Elle doit obéir, respecter et<br />

aimer sa belle famille pour qu’à son tour, elle aussi soit dorlotée et défendue en cas de différend avec son<br />

mari<br />

M La femme est l’esclave de l’homme et de toute sa famille. La stérilité est très male perçue puisque la<br />

principale raison du mariage est que la femme choisie est celle habilité à porter en son sein la progéniture<br />

de la famille.<br />

P L’avis de la jeune fille n’est pas pris en compte. les parents prenaient les décisions à la place de la fille.<br />

La fille à l’époque n’avait aucune considération<br />

T La femme n’a pas le droit de contredire ses parents<br />

G L’enfant occupe une place de choix. C’est pourquoi la femme stérile vit mal sa féminité, et ceci la pousse<br />

à aider son mari à en épouser une autre.<br />

K L’enfant un élément fondamental de la famille. Il représente la main d’œuvre et un symbole d’honneur. Il<br />

est un critère d’éligibilité dans la chefferie et la notabilité traditionnelle, favorise le ren<strong>for</strong>cement du tissu<br />

social entre les parents.<br />

M L’enfant est le gage de longévité d’un mariage, sans enfant, les liens sont loin d’être garantis.<br />

P Sans enfant, le mariage n’a aucun sens. Un élément important dans un ménage.<br />

L’enfant augmente l’affection et la pitié entre le couple. L’enfant est le fondement du mariage. Sans<br />

enfant, l’union est éphémère et peut être sans lendemain.<br />

T L’enfant es la première raison du mariage et le résultat de la réussite du mariage. Les enfants sont les<br />

G Néant<br />

soldats de leur famille, car ils remplacent aussi dans un futur avenir les parents dans les travaux<br />

domestiques. Ils constituent une main d’œuvre et un espoir des parents. La présence de l’enfant<br />

amoindrie la probabilité de divorce.<br />

K Divorce par consentement :<br />

52


Divorce<br />

Disposition du<br />

mariage<br />

Place de la<br />

religion<br />

M Il existe maintenant mais dans la coutume ancienne, le mariage d’une femme est un départ à vie pour une<br />

P<br />

nouvelle famille. Mais lorsque ceci était prononcé, la famille rembourse la dot de l’homme et celui-ci<br />

prend aussi les enfants et rentre épouser une autre femme. Aujourd’hui, si c’est l’homme qui réclame le<br />

divorce, il n’a plus droit de réclamer sa dot, mais si c’est la femme qui quitte elle doit rendre la dot.<br />

T Commence toujours par la séparation de corps et s’il n’y a pas d’entente, le divorce est prononcé. Ici, le<br />

G Néant<br />

divorce ne se prononçait pas seulement entre les deux familles mais devant la cour des sages pour être<br />

tranché suivant la loi traditionnelle. Seul le guinzé était remboursé. La dot elle ne sera remboursée que si<br />

la femme trouve un mari. Et dès que la dot est remboursée par ce nouveau mari, les enfants du mari<br />

reviennent au nouveau mari car dans cette coutume on dit que « la femme et les enfants appartiennent<br />

au Guinzé ». et la dot est remboursée dans son intégralité.<br />

K La tradition dem<strong>and</strong>e l’obéissance de l’épouse à sa belle mère, le respect à ses beaux frères<br />

M La tradition dem<strong>and</strong>e la soumission à la femme et accorde l’autorité à l’homme et à sa famille sur la<br />

femme.<br />

P La tradition dem<strong>and</strong>e la soumission à la femme et accorde l’autorité à l’homme.<br />

T L’obéissance de la femme á la décision de la famille<br />

G Pratique du christianisme et de l’animisme. Certaines appliquent les règles du christianisme et d’autres ne<br />

pratiquent pas cette religion<br />

K Pratique du christianisme et de l’animisme. Aucune mention particulière relative à la religion n’est faite<br />

par les interviewés<br />

M Tous pratiquent l’islam et de l’animisme. Pas assez de lien. L’islam existe mais n’a pas une gr<strong>and</strong>e<br />

influence sur les pratiques coutumières du mariage.<br />

P Pratique de l’islam. Une pr<strong>of</strong>onde confiance aux chefs religieux, l’islam une référence pour gérer sa vie,<br />

la religion impliquée dans le partage de l’héritage en cas de non existence de testament, l’islam est suivi<br />

53


La vie de couple<br />

Héritage<br />

et régularise assez de pratiques. La communauté peuhle est très attachée à la religion et qui par<br />

conséquent affecte ses us et coutumes, ces croyances. Ce syncrétisme entre coutumes et religion fait la<br />

valeur de la famille peuhle.<br />

T Pratique du christianisme et de l’animisme. Certaines appliquent les règles du christianisme et d’autres ne<br />

pratiquent pas cette religion<br />

G Vie de couple possible (2 voire 3 ans avant de présenter la dot), possibilité pour la fille de rester chez ses<br />

parents et de faire la navette entre les deux familles, MGF (obligatoire) avant de se marier ou alors avant<br />

de procréer, lévirat, mariage précoce,<br />

K Vie de couple possible avant la présentation de la dot, mariage précoce,<br />

M Sévices corporelles à son épouse qui refuse l’acte sexuel, imposition d’une coépouse à la première<br />

épouse, le lévirat obligatoire surtout si la femme veut garder ses biens, mariage <strong>for</strong>cé surtout si le père de<br />

la fille a donné son accord.<br />

P RAPT, Sévices corporelles à la mère d’une fille qui désobéit à son père, polygamie, lévirat ( bien que la<br />

notion ait évolué, la pratique continue toujours), MGF ( pratique entretenue par les femmes elles mêmes),<br />

mariage <strong>for</strong>cé (n’est plus très visible car dans la plupart des cas, l’avis de la fille est dem<strong>and</strong>é mais avec<br />

insistance des parents), Mariage précoce ( pratique dépassée et n’a jamais été autorisée par l’islam<br />

comme le prétendent certains), Exclusion (période des femmes surtout pour des raisons de prise en<br />

charge rapprochée)<br />

T Gr<strong>and</strong>e complicité entre l’homme et la femme.<br />

G En principe, toutes les épouses ont les mêmes droits dans le partage de l’héritage, la petite différence est<br />

si l’on fait aussi référence aux enfants, c’est en ce moment que la stérile se retrouve moins doté.<br />

K Toutes les femmes ont droit à l’héritage, mais pour en jouir, il faut vivre le lévirat ou alors avoir des<br />

enfants majeurs capables de cultiver la terre.<br />

M L’héritage des femmes se limite aux biens périssables et à une certaine somme d’argent. Aux femmes<br />

stériles, le lévirat leur est imposé ou alors elles quittent la famille les mains vide.<br />

54


P La part d’un garçon (plus de charges) est égale á la part de deux filles (appelées à se marier), la part des<br />

enfants est encore plus considérable que celle des femmes.<br />

T Les femmes ont droit aux mêmes héritages, seulement ne peuvent pas l’emporter<br />

3.2. Les pratiques religieuses 87<br />

Tableau 4 : Pratiques religieuses du mariage en rapport aux femmes<br />

Religions<br />

Pratiques<br />

Islam Christianisme: Eglise catholique romaine<br />

Eléments du mariage Sadaq/Dot Échange des anneaux<br />

Type de mariage Monogamie avec possibilité de polygynie limitée<br />

à 4.<br />

Système normatif La Sharia Droit Canon<br />

Nature du mariage Contrat civil Sacrement<br />

Office du mariage<br />

du couple<br />

Témoin <strong>of</strong>ficiel Imam/marabout/ Prêtre<br />

Monogamie stricte sans possibilité de négociation<br />

Cérémonie BENEDICTION, consentement CONSENTEMENT, amour, bénédiction, fidélité<br />

Lieu Mosquée ou Domicile d’un parent de la lignée<br />

paternelle (oncle, frère aîné de la mariée, cousin)<br />

Présence ou non<br />

Dissolution du mariage Dissoluble 88<br />

ou ami proche du papa de la femme<br />

Le couple peut être présent au lieu si tous les<br />

deux sont sur place tout comme il peut être absent<br />

Eglise située tout près du domicile de la femme<br />

Présence obligatoire du couple<br />

Indissoluble<br />

87 Les régions à <strong>for</strong>te tendance musulmane (Maninkas et peulhs), Toutefois dans ces régions le christianisme est presque absent sauf pour des fonctionnaires d’autres<br />

régions mutés dans ces villes. Les régions à <strong>for</strong>te tendance chrétienne (Guerzés, kissias et Tomas). Dans ce second groupe, l’islam commence à avoir une certaine emprise<br />

sur la population.)<br />

88 Sami Aldeeb, Rapports entre droit et religion dans le monde arabo-musulman Influence du droit musulman en Suisse, E-SDC N¤6, Institut Suisse de Droit comparé,<br />

Genève, 2007, 12. Rappelle que bien que le mariage musulman soit dissoluble il n’est pas aussi facile pour la femme que pour l’homme. Car, aussi bien le répudiation, que<br />

55


Forme de dissolution Répudiation, divorce 89<br />

régime patrimonial très structuré<br />

Remariage Remariage possible sous condition :<br />

Empêchement au<br />

mariage 90<br />

Les empêchements<br />

absolus dirimants<br />

Les empêchements<br />

relatifs dirimants<br />

- jusqu’à la limite de vie autorisée<br />

La femme ne peut épouser un homme d’une autre<br />

religion à condition que celui-ci accepte de<br />

changer de religion<br />

Pas d’âge précis<br />

Pilier du mariage Fidélité (puisque l’adultère est sévèrement puni<br />

Matérialisation sur le<br />

plan juridique du<br />

mariage (Preuve)<br />

par la Sharia), la procréation, le consentement,<br />

Auparavant aucun acte ne notifiait la contraction<br />

d’un mariage, mais vers la fin des années 190 et<br />

début des années 2000, que l’islam en Guinée<br />

La mort de l’un des conjoints<br />

Un seul mariage à l’église pas de remariage possible ;<br />

sauf en cas de décès de l’un des conjoints<br />

Le vœu religieux,<br />

Le sacrement d’ordre,<br />

le précédent mariage non dissous «bigamie»,<br />

Défaut d’âge 12 et 14 ans<br />

La parenté par le sang (4 e degré canonique soit 8 e degré<br />

civil : le petit fils d’un cousin germain)<br />

La parenté adoptive<br />

La parenté spirituelle (filleule et parrain)<br />

L’affinité (épouser une femme qui a été l’épouse de<br />

l’un de ses parents)<br />

Liberté (Consentement), Fidélité, Indissolubilité et<br />

Fécondité (Possibilité d’adoption en cas de stérilité).<br />

Signature dans le registre de mariage et remise du<br />

certificat d’acte de mariage au couple<br />

le droit de divorce ne sont accordés qu’à l’homme et à lui seul de mettre fin au mariage et aussi par une déclaration de volonté unilatérale sans motivation ni décision de<br />

justice. Même si la femme exprime la volonté de mettre fin au mariage, le mari reste maître de la situation : sans son accord, le mariage ne peut être dissout.<br />

89 Sami Aldeeb, E-SDC N¤6, (2007, 12), soutient qu’à partir du verset (2 :229) du Coran et des récits de Mahomet, le droit musulman prévoit principalement trois manières<br />

de dissoudre le mariage á savoir la répudiation, le rachat et le divorce. En Guinée cette seconde <strong>for</strong>me est peu pratiquée.<br />

90 RENAUT, (2003:27-28), Maître de conférences à la Faculté de Droit de Brest, dans son ouvrage « Histoire du Droit de la famille », présente la théorie des<br />

empêchements au mariage selon le droit canon. Cette cartographie part donc de cette théorie pour faire le lien entre les empêchements selon l’islam et selon le christianisme<br />

56


Régime<br />

personnels<br />

pécuniaires<br />

Rapports<br />

Rapports<br />

connaît l’instauration de la remise de l’acte de<br />

mariage délivré par l’Imam<br />

Puissance maritale et puissance paternelle (mari<br />

chef de famille), Soumission de la femme et des<br />

enfants<br />

Rapports patrimoniaux entre époux 91<br />

La dot, la pension alimentaire, les biens des<br />

conjoints, les conséquences patrimoniales du<br />

divorce et du décès<br />

Lien religion -coutume Très lié sans aucune démarcation distincte<br />

(l’assemblée des hommes, se fait au même<br />

moment. Possible absence du couple, peut se faire<br />

en famille ou à la mosquée selon la dem<strong>and</strong>e du<br />

couple)<br />

Homme chef de famille, mais sur la base d’une autorité<br />

partagée pour l’éducation des enfants<br />

Régimes matrimoniaux<br />

Très différent (Pratique selon la coutume, célébration<br />

uniquement dans une église en présence du couple et<br />

de tous les amis)<br />

91 Sami Aldeeb, Responsable du droit arabe et musulman à l’Institut Suisse de droit Comparé. N 8, 2007 :4. Sami estime qu’il serait plus approprié de parler non pas<br />

régimes matrimoniaux à l’instar de celui du code civil français, mais de rapports patrimoniaux entre époux.<br />

57


CHAPITRE II : LES FEMMES DANS LE PLURALISME NORMATIF DU<br />

MARIAGE<br />

La Guinée fonctionne sur la base d’une organisation des familles qui favorisent les<br />

relations de pouvoir qui sont établies depuis des générations et qui parfois perdurent<br />

dans les manifestations de la vie moderne.<br />

Dans l’organisation structurelle en Guinée, trois niveaux de pratique du pouvoir<br />

coexistent. Ces pratiques s’exercent à travers des pouvoirs. Au niveau des villages, la<br />

gestion de la communauté se fait à travers le conseil des anciens du village (les doyens,<br />

chefs de villages et les chefs de familles), et les femmes sont soumises à l’autorité des<br />

hommes. Un second pouvoir représenté est celui administratif composé de cadres de<br />

l’Etat (Préfets, Sous-préfets, les chefs de districts et chefs de secteur). Ce niveau de<br />

pouvoir gère les questions sur la base d’un code national et prend moins en compte les<br />

questions des femmes. Enfin, un dernier niveau de pouvoir institutionnalisé est celui<br />

religieux avec l’introduction de manière spécifique de l’autorité nouvelle de l’Imam,<br />

choisi parmi les érudits et son conseil de mosquée 92 (Rapport de la BM/ACDI sur<br />

l’évaluation du genre en Guinée, 2002 : 8).<br />

IV. LES ETAPES CONSTRUCTIVES DU MARIAGE EN GUINEE 93<br />

La famille mais aussi toute la communauté, jouent chacun selon ses compétences un<br />

rôle fondamental dans le mariage. Cette <strong>for</strong>te implication de la société, donne une autre<br />

orientation de la vie du couple et créent de nouvelles relations où coutumes et religions<br />

s’imbriquent.<br />

4.1.1. Les manifestations des pratiques coutumières du mariage<br />

Dans le mariage, les pratiques coutumières font naître des relations de types nouvelles<br />

de relations 94 , pouvant être classées sous deux <strong>for</strong>mes. Cette description classe ses<br />

relations aussi bien sous la <strong>for</strong>me horizontale que verticale.<br />

4.1.1.1.Les Relations verticales<br />

Les relations verticales pr<strong>of</strong>itent très souvent à l’époux, puisque habituellement dans le<br />

mariage plusieurs droits leurs sont accordés. Des droits ayant pour source les normes<br />

coutumières et religieuses et entériner par le code civil.<br />

92<br />

La fréquente référence à l’islam s’explique par le poids numérique que représente cette religion dans la gestion<br />

politique du pays (pays membre de l’OCI). Cette récurrence relative à l’islam ne mésestime pas l’influence du<br />

christianisme dans la gestion des affaires publiques en Guinée.<br />

93<br />

Les types de relations décrites à ce niveau sont celles que la femme mariée entretient avec ses proches et qui très<br />

souvent la déshonorent.<br />

94<br />

G.A:KOUASSIGAN à travers son article « famille, Droit et changement social dans les sociétés contemporaines »<br />

(1978 : 171-173) présente que la hiérarchie entre les générations d’une part et l’égalité entre les membres d’une<br />

même génération d’autre part, établissent à l’intérieur de la famille des relations á la fois verticales et horizontales. Il<br />

ressort bien que cette <strong>for</strong>me de relation cadre avec la parenté. Toutefois, á travers cette recherche, nous avons plutôt<br />

cherché á revoir cette relation selon les rapports sociaux de sexe au sein du couple dans le mariage et de leur<br />

interrelation avec leur famille respective.


Ces relations verticales soutenues par les pratiques coutumières et religieuses se<br />

manifestent sous des <strong>for</strong>mes variées et régissent la vie du couple. Certaines de ces<br />

relations présentées ont déjà été d’une certaine manière soulevées dans le « Rapport<br />

Initial sur la convention sur l’élimination de toutes les <strong>for</strong>mes de discrimination à<br />

l’égard des femmes», présenté aux Nations Unies en 2000, par la Guinée. Ce type de<br />

relation montre les effets des relations relatives à la position de supériorité que l’on<br />

confère aux hommes dans le mariage et que d’autres exploitent de manière inhumaine.<br />

L’exclusion périodique des femmes de leur ménage en cas de grossesse ou de<br />

maternité :<br />

L’analyse autour de l’exclusion périodique des femmes est axée sur des considérations<br />

socio culturelles. Dans d’autres cas par contre, elle est la matérialisation de la virilité de<br />

l’homme. Cette seconde considération s’observe dans les couples polygames où<br />

l’homme a la possibilité de faire recours à l’épouse non en grossesse, très souvent<br />

stérile 95 , censée avoir une sexualité plus intense. Alors que les épouses indisponibles<br />

repartent chez leurs parents pour attendre la maternité.<br />

Suivant les valeurs socioculturelles et sur la foi des données collectées au niveau des<br />

communautés interviewées, cette pratique est une <strong>for</strong>me de prise en charge rapprochée<br />

de la femme en grossesse par sa famille ou sa belle famille, pour mieux respecter les<br />

interdits relatifs à la relation entre l’homme par rapport à la femme enceinte. En milieu<br />

Kissie, par exemple, ceci se produisait vers le 7 ème mois de grossesse.<br />

Le divorce et ses <strong>for</strong>mes<br />

Le divorce suivant la coutume est souvent dem<strong>and</strong>é par l’homme. Ce droit est refusé à<br />

la femme puisque, si elle le dem<strong>and</strong>e ceci signifie le remboursement de la dot dans<br />

certains cas de figure et dans l’autre, une <strong>for</strong>me d’affront à l’autorité masculine.<br />

Sur la base des notes tirées de nos entrevues réalisées en mai 2007 dans la communauté<br />

Toma, le divorce est l’annulation du mariage souvent dû à des problèmes sociaux<br />

d’ordre économique et d’adultère. La dot n’est pas automatiquement remboursée,<br />

puisque le processus commence toujours par la séparation de corps qui peut se solder<br />

par le divorce. Le divorce est prononcé avec l’accord des deux familles, sous l’arbre à<br />

palabre du village et devant les notables qui constituaient une structure de justice pour<br />

s’assurer de la dissolution du mariage suivant la loi traditionnelle. Une fois le jugement<br />

prononcé, la dot (60 guinzés) préalablement payés par l’homme à la famille de la<br />

femme pour le mariage étaient fondamentalement remboursés ainsi que les dépenses<br />

annexes. Le processus de remboursement est accéléré dès que le mari apprenait que sa<br />

femme voulait se remarier avec un autre homme. Cependant, le remboursement de cette<br />

95 Voir notes sur le tableau en rapport aux pratiques coutumières et religieuses, propos avancés par une femme stérile.<br />

59


dot par la famille de la femme fait perdre à l’homme tout droit d’autorité sur ces<br />

enfants, qui eux appartiendront prochainement au nouveau mari de la femme. Celui qui<br />

aura aidé à travers le remariage à rembourser la dot de l’ex époux. C’est pourquoi chez<br />

les tomas on traduit que la femme et ses enfants appartiennent au «Guinzé».<br />

La répudiation :<br />

La répudiation est la <strong>for</strong>me courante de divorce usuelle dans l’islam. An-na’im<br />

(1996 :176) reprend que ce type de divorce est tout aussi inégalitaire, car tout<br />

« musulman peut divorcer de sa ou de n’importe laquelle de ses femmes par talaq 96 ,<br />

répudiation unilatérale, sans avoir à donner de raisons ou à justifier son action devant<br />

qui que ce soit ou auprès d’une autorité. Tout au contraire, une musulmane ne peut<br />

obtenir le divorce qu’avec le consentement du conjoint ou par mesure judiciaire, dans<br />

des cas limités tels que l’incapacité ou la mauvaise volonté à entretenir sa femme ».<br />

Le rapport annuel de la Guinée relatif à la CEDEF, ressort que le nombre de<br />

répudiations du foyer conjugal de la part des hommes est encore très élevé et très<br />

courant. Très souvent c’est la femme qui subit et surtout sans motifs Dans la<br />

répudiation, c’est toujours la femme qui quitte la maison et très souvent laisse les<br />

enfants avec le mari, l’avis des enfants n’est jamais dem<strong>and</strong>é. (CEDAW/C/GIN/1,<br />

2000 :45).<br />

La séparation de corps :<br />

Le phénomène de séparation de corps en Guinée s’observe de manière différente et très<br />

graduelle selon les communautés interviewées. Après analyse et interprétation des<br />

in<strong>for</strong>mations collectées dans le cadre de cette recherche, trois niveaux de considérations<br />

se dégagent, pour les premiers elle est courante, pour les seconds, elle est un phénomène<br />

nouveau, qui est à ses débuts dans sa manifestation et pour les troisièmes, cette<br />

possibilité n’est pas du tout <strong>of</strong>ferte surtout lorsque c’est la femme qui la dem<strong>and</strong>e.<br />

Pour les tenants de la première conception, la séparation de corps est une manière pour<br />

les époux de revoir leur relation. Selon la coutume Toma, en cas d’incompatibilité<br />

d’humeur, la décision est prise de se séparer pour un bon moment en se disant le<br />

proverbe suivant: «Si tu ne fais pas deux marchés, tu ne connaîtras point la valeur et<br />

l’importance de l’un ou de l’autre marché». Cette <strong>for</strong>me de séparation survient après<br />

une longue intervention de la famille des deux parties. Seul la présence des enfants du<br />

couple s’il y en a eu peut réconcilier le couple, en raison du lien que resserrent les<br />

enfants dans ces communautés.<br />

Pour les tenants de la deuxième considération (les Kissias), la pratique est récente parce<br />

qu’elle n’existait pas dans les anciennes pratiques coutumières. La coutume voudrait<br />

96 At-Talâq, le Divorce, est non seulement le nom de cette sourate mais aussi l’intitulé du thème abordé (car elle<br />

contient des règles concernant le divorce).


que la famille ne garde pas longtemps la fille qui s’est réfugiée chez elle. La garder<br />

serait une <strong>for</strong>me de mauvaise préparation du mariage. Enfin pour les derniers, la<br />

séparation de corps n’existe pas pour ne pas dire que c’est un phénomène rare. La<br />

conception m<strong>and</strong>ingue défend l’idée que la femme ne peut quitter sa demeure familiale<br />

avec ou sans motif. Et lorsque ceci se produit, soit elle revient d’elle-même par<br />

insistance de ses parents puisque le mari ne lui proposera pas de revenir ou alors cette<br />

femme ne sera plus reçue par son mari.<br />

Tout de même, la résolution de conflit est toujours l’apanage des sages à travers les<br />

assises familiales se déroulant toujours dans la famille de la femme. Dans certains cas,<br />

cette <strong>for</strong>me ce phénomène précède le divorce.<br />

La ménopause:<br />

La conception coutumière considère la ménopause comme l’âge de la sagesse de la<br />

femme 97 . A cette étape de sa vie, elle est assez sollicitée et prend part à des gr<strong>and</strong>es<br />

cérémonies. Cependant, si elle est stérile, elle peut être brimée dans ses droits, car<br />

l’enfant est un conditionnel dans le mariage africain.<br />

Toutefois, à certains endroits 98 , cette étape ne dispense pas la femme des tâches<br />

domestiques qui sont reparties selon les jours de la semaine et le nombre d’épouses par<br />

le mari. Pour finir, cette étape ressort comme une raison pour d’autres et à une<br />

proportion élevée de contracter un autre mariage bigamique voir polygamique, puisque<br />

considérée comme ne pouvant plus entretenir des relations intimes avec son époux.<br />

La stérilité 99 :<br />

La stérilité dans ce contexte est une situation très déplorable pour la femme. Une fois la<br />

stérilité prouvée, l’autorisation est accordée à l’homme de se remarier et non à la<br />

femme. Très souvent, elle est la cause de remariage de l’époux.<br />

La stérilité en Guinée est considérée comme un état de pitié reconnue par tous. Cette<br />

pitié qu’incarne cette femme amène à lui faire don de quelques enfants pour sa<br />

consolation. La stérilité est une condition très pénible pour les femmes. Une femme<br />

stérile d’un village enquêté soutiendra ces propos en ces termes: «Lorsqu’il s’agit de<br />

travailler toutes les femmes doivent y être mais lorsqu’il s’agit de repartir des<br />

médicaments de premières nécessité aux femmes, il n’en distribue pas aux femmes<br />

stériles, soit disant qu’elles n’en ont pas besoin et d’ailleurs elles n’ont pas d’enfants »<br />

La stérilité a assez de conséquences au niveau de la femme. Ces femmes affirment que<br />

cet état créé chez elles, une certaine instabilité morale et mentale. Cette situation se vit<br />

de plusieurs manières. Primo, elle peut rendre «la femme folle » car elle se fait assez de<br />

97 Voir le tableau sur les femmes et les pratiques coutumières<br />

98 In<strong>for</strong>mations collectées en milieu Malinké dans la sous préfecture de Koumban, Kankan (République de Guinée)<br />

99 Le commentaire autour de ce point vient de notre analyse des entrevues réalisées avec les communautés enquêtées.<br />

61


peine en se dem<strong>and</strong>ant que faire. Certaines s’adonnent à une certaine infidélité à la<br />

quête d’un éventuel géniteur; puisque d’une manière générale, la stérilité est reconnue<br />

comme l’apanage de la femme et jamais l’homme.<br />

Secundo, lorsqu’elle est stérile elle est tenue de travailler sans relâche dans le foyer et<br />

très souvent considérée comme une bonne « femme de ménage » (bonne cuisinière pour<br />

les autres épouses).<br />

Tertio, la stérilité est synonyme de solitude dans le mariage et des préjugés sont<br />

construits autour d’elle. Souvent comparée chez les Kissias à « un manchot qui est<br />

coupé de l’aide que pourraient lui apporter ses mains valides », elle est aussi comparée<br />

à « une borgne » ; car une seule vision, une seule analyse pour une multitude de soucis<br />

n’a guère d’efficacité. Le besoin de survie de cette femme, l’enfonce davantage dans<br />

l’impasse et crée une multitude d’embarras. Ces embarras sont entre autres : le manque<br />

d’être orientée ou guidée puisque seule dans sa vie; le manque d’assurance dans son<br />

choix puisque seule à le juger; l’absence d’espoir puisque ne peut se faire représenter,<br />

défendre ou supporter par aucun enfant ; le souci de ce que deviendra sa part d’héritage;<br />

la peur de la vieillesse et de la maladie puisque vit seule.<br />

Tout laisse à admettre que, la femme stérile a une stricte place dans la vie sociale et fait<br />

face à d’énormes difficultés par rapport à son insertion sociale. Toutefois, la place ou la<br />

considération que peut avoir la femme stérile est fonction de son comportement.<br />

Pour les femmes stériles sympathiques, accueillantes, gentilles, hospitalières, serviables,<br />

qui s’impliquent sans réserve dans la réussite des activités de développement du village,<br />

celles-ci vivent une vie aisée sans ségrégation avec plein d’honneur et de vertu. Par<br />

contre, celles qui pensent que la société est responsable de leur état, manifestent très<br />

souvent des mécontentements lors des accouchements et des cérémonies de baptême au<br />

village. Elles sont farouches et semble t-il dotées d’un mauvais penchant envers les<br />

enfants. C’est pourquoi celles-ci sont par ailleurs accusées d’être dépositaires des<br />

pratiques sorcières dans les villages.<br />

La bastonnade 100 :<br />

La bastonnade est un droit jadis réservé à l’homme. Ce droit lui donne la possibilité<br />

d’administrer une correction corporelle à son épouse en cas de comportement<br />

répréhensible. Ce droit bien qu’aboli par le code civil continue de persister, surtout en<br />

milieu rural. Dans ce jeu, l’homme cherche à imposer une certaine infériorité de la<br />

femme voir à la chosifier.<br />

100 Pour appuyer le référence contenue dans cette section, l’analyse a porté sur les résultats des constations faites<br />

après analyse et interprétations des entrevues réalisés. Les citations ci-dessous, sont les reprises exactes des<br />

affirmations faites par les femmes.


La condition des épouses battues n’est pas toujours visible dans la mesure où les règles<br />

sociales imposent aux victimes une extrême discrétion sur les affaires internes de la<br />

famille. Ces femmes redoutent souvent la honte et/ou la peur en cas d’agression surtout<br />

qu<strong>and</strong> les viols ou les coups sont le fait du mari, de la coépouse, de la belle famille et<br />

même de leur propre famille. C’est seulement dans des cas d’extrême limite tels les<br />

décès et les sc<strong>and</strong>ales ouverts que des enquêtes sont menées par les autorités<br />

compétentes. Très peu de données chiffrées relatives à cette <strong>for</strong>me de violence sont<br />

disponibles se la CEDEF (CEDAW/C/GIN/1, 2000, 45), car la Guinée ne dispose pas<br />

de centre d’accueil spécialisé pour la prise en charge des femmes victimes de violence.<br />

Les quelques ONG (ACEEF : Action Contre l’Exploitation des Enfants et des Femmes;<br />

AGUIAS : Association Guinéenne des Assistantes Sociales) qui interviennent, sont très<br />

peu outillées (UNICEF Guinée, 2005 :22-38).<br />

Parlant de violence on fait allusion à celle retenue par les Nations Unies, ayant un sens<br />

large, globalisante et ne se limitant pas seulement à la « violence physique, sexuelle et<br />

psychologique se produisant au sein de la famille » 101 , y compris le viol conjugal. Cette<br />

violence renvoi également à celle décrite par Amnesty International 102 , c'est-à-dire celle<br />

perpétrée par les membres de la famille du mari 103 (VAN BUEREN, G, 1999: 521-524)<br />

Une analyse situationnelle faite par le Ministère de la Santé et de l’Organisations<br />

Mondiale de la Santé (OMS) montre qu’en 2003, dans les huit régions<br />

administratives 104 du pays 22% des femmes déclarent être victimes de violence. Dans<br />

85%, les auteurs sont des hommes et 15% des femmes. Parmi ces femmes, 80% sont<br />

analphabètes (CEDAW/C/GIN/Q/6/Add.1, 2007 :16-17)<br />

Une étude réalisée à Conakry en 2006 sur la violence faite s aux femmes, sur 317<br />

patients reçus en consultation médico-judicaire, 58 ont été victimes de violence<br />

conjugale, soit une fréquence de 18,30%. Cette même étude montre que 76% des<br />

femmes battues sont musulmanes. Par ailleurs, il ressort de cette étude que 51% des<br />

femmes mariées sont victimes de violences par leurs époux, 25% de célibataires, 3% de<br />

divorcés, 6% des veuves. Autre données apparente de cette étude est que plus une<br />

femme est instruite, moins elle est soumise à une violence car elle est indépendante et<br />

connaît ses droits. Selon le niveau d’étude des femmes, la fréquence des violences<br />

diffère, car 51% de ces femmes sont analphabètes, 19% ont un niveau secondaire et 3%<br />

ont un niveau universitaire. (CEDAW/C/GIN/Q/6/Add.1, 2007 :17)<br />

101 Mais aussi les voies de fait, abus sexuels sur les petites filles dans la maison familiale, violence familiale, violence<br />

en relation avec la dot, viol conjugal, mutilations des organes génitaux féminins et autres pratiques traditionnels<br />

préjudiciables aux femmes, violence non conjugale et violence en rapport avec l’exploitation.<br />

102 Les femmes en Chine Aaindex ASA 17/29/1995.<br />

103 Voir Tableau 2, notes sur « Nuit de Noce : cas de la communauté Peulh»<br />

104 Les huit régions administratives de la Guinée sont Conakry, Kindia, Boké, Labé Mamou, Kankan, Faranah et<br />

N’Zérékoré.<br />

63


En Guinée suivant la même étude sus citée, les motifs de violences à l’égard des<br />

femmes sont entre autres l’incompatibilité d’humeur dans le couple (40%), refus<br />

d’obligation conjugale de la femme mariée (29%), la jalousie relative à la polygamie<br />

(9%), le mariage dans la logique d’obligation de contracter une quelconque relation<br />

(7%) (CEDAW/C/GIN/Q/6/Add.1, 2007 :17)<br />

Sur la foi des enquêtes menées dans le cadre spécifique de cette recherche, les<br />

circonstances dans lesquelles une femme mariée est battue peuvent s’observer à travers<br />

les pratiques M<strong>and</strong>ingues sous deux <strong>for</strong>mes : la première fait référence à la relation<br />

entre la femme mariée et ses parents. S’il arrive que pour un différend quelconque<br />

intervenu au sein du couple, la femme décide de son plein gré de revenir chez ses<br />

parents, l’ordre est donc donné aux frères de la femme par le père de l’obliger à<br />

rejoindre son mari. Dans ce cas tous les moyens peuvent être utilisés pour la faire céder.<br />

La seconde circonstance, est relative au devoir conjugal que l’épouse doit <strong>for</strong>cément<br />

accomplir. Dans la situation de refus manifesté par la femme pour des raisons que<br />

l’homme ne cherche pas à comprendre, le mari a tout droit de la battre autant que<br />

possible et personne n’a le droit d’intervenir. Et l’homme dira à son épouse, « Je t’ai<br />

épousé pour quoi ?:…J’ai investi toute une <strong>for</strong>tune pour t’avoir comme épouse, alors tu<br />

dois rester disponible chaque fois que j’ai besoin de toi». Lorsque ce n’est pas le mari,<br />

ce sont plutôt les sages qui diront au petit matin, «Bats là encore et encore. Tu as le<br />

plein droit de la battre tant qu’elle refuse».<br />

En milieu Kissi, il est aussi fréquent de voir la femme mariée être battue par son mari.<br />

Pour les hommes qui ne voudraient pas se prêter à ce spectacle, ils finissent par choisir<br />

d’épouser une autre femme le plus rapidement possible. Ainsi, le couple se retrouve<br />

dans un mariage polygame.<br />

Cet élément de bastonnade est difficile à cerner car même battues, maltraitées, violées,<br />

les femmes ne portent généralement pas plainte. Elles ont honte de s’exposer ou<br />

d’exposer leur mari. Le rapport « CEDAW/C/GIN/1 (2000, 25)» présente que qu<strong>and</strong> les<br />

femmes portent plainte en pareil cas, ce qui d’ailleurs est très rare, cela abouti au<br />

divorce.<br />

4.1.2. Les Relations horizontales 105<br />

S’agissant des relations horizontales, elles sont entretenues par les deux familles<br />

respectives, mais plus pesant au niveau de la famille du mari. La relation horizontale<br />

entretenue par la famille du mari s’opère selon les pratiques suivantes<br />

105 Encore une fois l’essentiel des analyses viennent de l’analyse et de l’interprétation des entrevues réalisées.


Les pratiques de veuvage :<br />

Les femmes vivent une pratique de veuvage plus longue que celle des hommes.<br />

Généralement complexe suivant la coutume et la religion, cette pratique qui débute à<br />

partir de la mort de l’époux prend fin à la proposition de la veuve à un frère du défunt<br />

(lévirat). Le lévirat qui apparaît suite au veuvage est présent à tous les niveaux. Pratique<br />

imposée à la veuve dans le but de faire bénéficier ses enfants de l’héritage 106 de leur<br />

père défunt, elle vise à fidéliser la veuve à sa belle famille pour éviter qu’elle se sente<br />

ab<strong>and</strong>onnée. La période de veuvage interdit à la femme de réclamer l’héritage du mari<br />

défunt. Elle ne doit pas y faire attention. Elle appartient désormais à la famille de son<br />

défunt mari.<br />

L’héritage de la veuve:<br />

Le partage de l’héritage est un moment crucial après le temps de veuvage de la femme.<br />

Mais cette répartition se fait suivant la coutume (nombre d’enfants surtout) et la religion<br />

(l’Islam).<br />

A certains niveaux, l’héritage ne bouge pas. Il est pour la femme qui continue à vivre<br />

dans la famille de son défunt mari, surtout qu<strong>and</strong> il s’agit des bien matériels fixes ou<br />

immobiliers tel que les lopins de terre, les bâtiments et les plantations surtout se situant<br />

dans le domaine familiale du conjoint où ses frères tentent d’avoir une responsabilité de<br />

ces biens s’il n y a pas des gr<strong>and</strong>s enfants. Les femmes, stériles ou pas, ont dans ce cas<br />

là les mêmes droits. La différence s’observera au niveau du partage qui sera fonction du<br />

nombre d’enfants et d’autres considérations. Le même principe est appliqué pour toutes<br />

les veuves sauf pour celles qui décident de quitter la demeure conjugale, celles-là<br />

n’auront droit qu’aux biens périssables et laisseront à la famille du mari tout ce qui est<br />

en rapport au foncier et à l’immobilier. A d’autres niveaux comme au M<strong>and</strong>ing par<br />

exemple, l’héritage est obtenu sous condition, faute pour la femme d'avoir un statut qui<br />

lui permette de succéder ; même si malgré la conditionnalité, hériter «la terre» revient<br />

aux hommes.<br />

En outre, les préceptes du Coran stipulent que le garçon hérite de deux parts, contre une<br />

part pour la fille. En réalité, comme le partage de la masse successorale est souvent fait<br />

par le conseil de famille en dehors de toute intervention judiciaire, c'est cette règle qui<br />

est appliquée au détriment aussi bien des filles héritières que des mères ayant à leur<br />

charge des filles mineures. (BM/ACDI, 2004)<br />

En dépit de toutes les campagnes de sensibilisation sur les droits des femmes, la veuve<br />

Guinéenne reste confrontée à des difficultés de succession. Cet épineux problème de la<br />

succession, sape le travail de fond que certaines ONG réalisent. La question de la<br />

106 Cet héritage est le plus souvent composé de bétail<br />

65


succession demeure encore, car la position des hommes n’a pas tout à fait changée en ce<br />

qui concerne cette situation. Dans la plupart des cas, la femme est marginalisée dans le<br />

partage de l’héritage. En situation de veuve, la femme, fait objet de tirs croisés entre les<br />

siens et la belle famille. Ceci est exacerbé par le fait que beaucoup de femmes ne<br />

connaissent pas leurs droits. Celles qui en connaissent et comprennent les subtilités sont<br />

souvent empêchées, d’exercer leurs droits. Il n’est pas ainsi rare que dans les foyers<br />

polygames, l’épouse la mieux positionnée s’empare de tous les biens, avec sa<br />

progéniture.<br />

Le viol conjugal :<br />

Cette pratique de viol conjugal est soutenue par la famille élargie du futur mari, la<br />

conception communautaire de la femme mariée, l’interprétation des principes de la<br />

Shari’a et enfin certains anciens dans les zones rurales. Cette pratique connaît une faible<br />

description par les interviewées, car elle passe souvent sous silence.<br />

Certains principes du mariage (surtout en milieu Peulh) voudraient qu’en cas de refus de<br />

la femme de céder à son mari la nuit de noce, le mari soit assisté par certaines<br />

femmes 107 pour permettre à l’homme de passer à l’acte sexuel. Ceci est une pratique qui<br />

perdure en milieu rural et qui trouve son fondement dans la coutume.<br />

Dans la culture Malinké selon les entrevues réalisées, lorsque la femme refuse son mari<br />

au lit sans motif valable (menstruations,…), elle est bastonnée et personne n’a le droit<br />

d’intervenir. Généralement, ceci advient en pleine nuit. Certains peuvent pour cela<br />

battre leur épouse jusqu’au petit matin. Voici certains propos qui peuvent être avancés<br />

dans ce sens: « je t’ai épousé pour quoi ?.... J’ai investi toute une <strong>for</strong>tune pour t’avoir<br />

comme épouse; alors tu dois rester disponible chaque fois que j’ai besoin de toi ».<br />

Pourtant, l’article 321 de la CEDAW/C/GIN/1 (2000:23) stipule que « tout acte de<br />

pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, et commis sur la personne d’autrui<br />

par violence, contrainte ou surprise, constitue un viol ». Dans le cas où cet acte est posé<br />

avec la complicité de deux ou plusieurs complices, une réclusion criminelle à temps de<br />

10 à 20 ans est infligée aux complices.<br />

Dans cette relation horizontale, s’aperçoivent les rôles importants que jouent aussi bien<br />

la belle famille, et l’implication de la famille biologique de l’épouse, toux deux résultant<br />

des mariages précoces et <strong>for</strong>cés et intervenant très souvent à travers l’encouragement du<br />

lévirat et du sororat.<br />

107 Ces femmes sont souvent les belles sœurs (épouse du gr<strong>and</strong> frère du futur mari, les vieilles femmes du village, …)


A partir de cet acte posé se dégage à travers Bahia G. Tahzib-Lie 108 (2004:455), que les<br />

collusions les plus controversées entre les droits humains de la femme, les pratiques et<br />

les normes religieuses se trouvent être la sexualité et la reproduction.<br />

4.2.L’influence des pratiques religieuses dans le mariage<br />

Les théories idéalistes soutenues par Durkheim 109 et présentées par KOUASSIGAN,<br />

Guy Adjeté 110 dans son article « Famille, Droit et Changement social dans les sociétés<br />

contemporaines (1978:162), aident á comprendre le lien étroit entre la religion et les<br />

<strong>for</strong>mes de la famille.<br />

En Guinée, le christianisme domine dans les régions de la Guinée Forestière et une<br />

partie de la Guinée Maritime, alors que l’islam 111 est présent dans tout le pays et du<br />

moins plus intégré dans la région de la Moyenne Guinée et une partie de la haute<br />

Guinée. En moyenne Guinée (Fouta/Peulh), les structures sociales et le comportement<br />

des habitants sont régis par la religion à telle enseigne qu’elle participe à la définition de<br />

l’identité ethnique Peuhle et son omniprésence déteint sur toutes les activités<br />

quotidiennes (DIAKITE, B, 2004:41)<br />

La vision du mariage est presque identique dans toutes les religions révélées. Dans cette<br />

organisation harmonieuse des relations, chacun joue le rôle dévolu par Dieu. Le mariage<br />

est établi suivant des principes selon que l’on se trouve dans un ou l’autre camp. Mais<br />

aussi la vision philosophique de ces pratiques religieuses consiste à promouvoir le bien<br />

être des individus, des familles et de la communauté 112 (Patrick, F, 2006:1).<br />

108 Bahia G. Tahzib-Lie, “Dissenting Women, Religion or belief, <strong>and</strong> the state: Contempory challenges that require<br />

attention” chapter 19, PP 455-495, in Tore LINDHOLM, W.Cole DURBAM, Jr., Bahia G. TAHZIB-LIE (eds),<br />

Facilitating Freedom <strong>of</strong> religion or belief: A Deskbook, 2004 Koninklijke Brill NV. Netherl<strong>and</strong>s<br />

109 Sociologue français, Durkheim a produit assez de recherches et intégrant la religion comme phénomène social<br />

fondamental. Ces ouvrages tels que le Suicide (1897), Les Formes élémentaires de la vie religieuse (1912) pour ne<br />

citer que ceux-ci. Prenant appui sur des études menées en Australie, Durkheim voit dans la religion le phénomène<br />

social fondamental d'où dérivent tous les autres. Il en <strong>of</strong>fre une définition objective qui ne réfère pas au contenu des<br />

dogmes: «C'est le système solidaire de croyances et de pratiques (rites) relatives à des choses sacrées, c'est-à-dire<br />

séparées, interdites.» La dialectique du sacré et du pr<strong>of</strong>ane constitue le noyau du fait social (dans la religion, c'est la<br />

société qui s'adore elle-même) et répond à celle qu'entretiennent individu et société. Produisant les principes de<br />

classification de l'univers, les catégories de temps, d'espace, de <strong>for</strong>ce, etc., elle est à la source de l'exigence de<br />

logique, de rationalité et d'universalité de la science moderne. Durkheim poursuit dans les Formes élémentaires de la<br />

vie religieuse le projet engagé depuis De la division du travail social de faire l'histoire des <strong>for</strong>mes sociales de la prise<br />

de conscience du réel, de produire une théorie générale de l'activité symbolique: l'élaboration d'une sociologie de la<br />

connaissance, à laquelle participa Marcel Mauss. Ainsi, langage, signes, symboles, faits sociaux, ne prennent sens<br />

qu'en fonction d'un contexte social et historique précis et de leur position dans un ensemble de relations.<br />

(http://www.philonet.fr/auteurs/Durkheim.html)<br />

110 Guy Adjeté, dans l’ouvrage Famille, droit et changement social en Afrique Noire Francophone, à travers son<br />

article « Famille, Droit et Changement social dans les sociétés contemporaines, université Catholique de Louvain,<br />

1978 :162.<br />

111 L’article de SOW, F, « Penser les femmes et l’islam en Afrique : une approche féministe », contribution à Mama<br />

Africa. Mélanges <strong>of</strong>ferts à Catherine Coquery-Vidrovitch. Publié en 2005, aide à comprendre que le statut de l’islam<br />

varie d’un pays ´l’autre. D’aucuns ont un statut de royaume musulman, certains de républiques islamiques et d’autres<br />

sont des Etats laïcs. En Afrique au sud du sahara tel est le cas de la Guinée, l’islam s’est développé dans un tissu<br />

social différent, générant des réponses culturelles différentes.<br />

112 Patrick F, FAGAN, Why religion matters Even More : The impact <strong>of</strong> religious Practice on social stability,<br />

Backgrounder, Richard <strong>and</strong> Helen DeVos center <strong>for</strong> religion <strong>and</strong> civil society, The heritage foundation, No1992,<br />

2006<br />

67


Les pratiques religieuses musulmanes reposent sur deux principales sources: Coran et<br />

Sunnah//Hadith). A côté de ces sources, cohabite un ensemble d’autres sources appelé la<br />

Fatwa 113 (Sami, Aldeeb, N.6, 2007:7) Cette <strong>for</strong>me d’organisation rend les pratiques qui<br />

en résultent <strong>for</strong>tes face à un pays et à des systèmes de gouvernance détournés de sa<br />

mission.<br />

Les régions à <strong>for</strong>te connotation musulmane peuvent devenir très sceptiques face à<br />

l’adoption de certains projets de loi considérés comme transposés et non venant des<br />

valeurs propres des individus. Pour ceux qui se démarquent en manifestant un intérêt à<br />

adopter de nouvelles lois, quelques résistances se dégagent toutefois sur des points qui<br />

sont considérés comme fondements de l’islam et par contre sont identifiés comme<br />

incohérents aux droits de la femme dans le mariage. Ces restrictions prévues par le droit<br />

musulman à l’égard des droits reconnus par les conventions internationales se situent<br />

selon Aldeeb, (N.6. 2007, 9) au niveau de l’inégalité entre l’homme et la femme en<br />

matière de mariage (polygamie, répudiation, droit de châtier les femmes)<br />

Cette influence est rarement in<strong>of</strong>fensive, puisque les droits des femmes sont souvent<br />

restreints ou bafoués au nom de la religion. Des stéréotypes de sexe motivés par des<br />

croyances religieuses ont conféré aux hommes un sentiment de supériorité qui a abouti à<br />

un traitement discriminatoire des femmes par les hommes allant même jusqu’au recours<br />

à la violence.<br />

La polygynie 114 est une réalité incontournable que vivent bon nombre de citoyens, ce<br />

qui à la longue a fait contourner la loi, contre l’interdiction du mariage monogamique<br />

instauré en Guinée en 1962 et repris en 1968 par un certain nombre de citoyens. Avec<br />

ces lois, l’acte de consentement de la première épouse vivant au foyer conjugal était<br />

requis et contresigné par le commissariat ou la justice du lieu du domicile de celle-ci.<br />

L’influence de la religion musulmane et celle des enfants de la première épouse la<br />

contraignent à consentir au second mariage de son époux. On y invoque aussi l’opinion<br />

publique et les nombreux enfants déjà nés du mariage. Les rares contestataires qui<br />

veulent s’y opposer sont empêchés par des considérations sociales, économiques,<br />

surtout religieuses. Elles finissent par céder contre leur gré. Pour celles qui y tiennent<br />

jusqu’au bout, elles peuvent être répudiées<br />

113 La Fatwa comprend la Sunnah des compagnons de Mahomet, la Sunnah des Gens de la maison de Mahomet, les<br />

lois révélées avant Mahomet, la coutume, l’ef<strong>for</strong>t rationnel et le consensus. Les fatwas sont une <strong>for</strong>me d’ef<strong>for</strong>t<br />

rationnel. Ce sont des décisions religieuses émises par des religieux ou des autorités religieuses étatiques et supraétatiques.<br />

Elles exposent la manière d’agir pour être en con<strong>for</strong>mité avec les normes religieuses islamiques.<br />

114 L’homme musulman peut épouser jusqu’á quatre épouses, en fonction certes de principes définis par la religion, á<br />

savoir les traiter en toute égalité sur le plan effectif, sexuel et matériel. Si la femme peut être l’épouse d’un<br />

polygame, la femme ne peut être mariée qu’à un homme à la fois.


L’Islam reconnaît à l’homme le titre et la qualité de chef de famille. Le coran à travers<br />

le verset 34 de la sourate 4 dit (SOW, F, 2005): «Les hommes ont autorité sur les<br />

femmes, en raison des faveurs que Dieu accorde à ceux là sur celles-ci, et aussi á cause<br />

des dépenses qu’ils font de leurs biens. Les femmes vertueuses sont obéissantes (à leurs<br />

maris), et protègent ce qui doit être protégé, pendant l’absence de leurs époux, avec la<br />

protection de Dieu. Et quant á celles dont vous craignez la désobéissance de leur époux,<br />

éloignez vous d’elles dans leurs lits et frappez les. Si elles arrivent á vous obéir, alors<br />

ne cherchez pas plus de voie contre elles, car Dieu est certes, haut et Gr<strong>and</strong> ! »<br />

Cette sourate est très souvent source de d’assujettissement de l’épouse vis á vis de son<br />

époux. A travers aussi An-Na’im 115 (1990 :176) l’on peut comprendre que les<br />

conditions du mariage sont inégales dans le contexte islamique. L’homme est toujours<br />

le chef légal de la famille, car « l’époux détient, le droit, l’autorité et le contrôle sur son<br />

épouse a point de la punir de diverses manières et de la battre « légèrement » s’il la juge<br />

incontrôlable. Cette position se rallie à ce verset 34 de la sourate 4 de la Shari’a.<br />

Dans le mariage, SOW, F (2005) évoque le caractère inégalitaire des rapports sociaux<br />

de sexe. Elle rappelle qu’un musulman peut épouser une femme de foi différente. <strong>Non</strong><br />

seulement, il ne peut la contraindre à changer de religion, mais il est même tenu de lui<br />

faciliter sa pratique religieuse, en toute sécurité, en tant que chrétienne ou juive. Ce<br />

n’est pas le cas de la musulmane qui ne peut épouser qu’un homme de la même foi, les<br />

autres lui étant interdits. Tout prétendant non – musulman devra se convertir à l’islam,<br />

pour pouvoir l’épouser.<br />

Dans l’islam, la femme hérite sous condition, faute d'avoir un statut qui lui permette de<br />

succéder. Même si hériter la terre cultivable revient dans la plupart des cas aux hommes.<br />

Les préceptes du Coran stipulent que le garçon hérite de deux parts, contre une part pour<br />

la fille.<br />

Dans le mariage, la femme musulmane bénéficie de toutes les catégories de répartition<br />

attribuées aux héritiers mais de la manière suivante. Elle a droit 116 :<br />

A la moitié en tant qu’unique enfant<br />

Aux 2/3 en tant que fille en l’absence d’un frère,<br />

Au 1/8 en tant qu’épouse dont le mari a des enfants<br />

Au 1/3 en tant mère si le défunt ou la défunte n’a ni enfant, ni frère ou sœur<br />

Au ¼ en tant qu’épouse si le mari n’a pas d’enfant<br />

Au 1/6 en tant que fille s’il y a 2 frères ou sœurs<br />

115 An-Na’im A.A. Towards an Islamic Re<strong>for</strong>mation, Civil Liberties, Human Rights <strong>and</strong> international Laws,<br />

Syracuse Press University, Syracuse, 1990.<br />

116 Notes avancées par le Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l’Enfant et l’UNFPA,<br />

Argumentaire islamique sur l’équité de Genre, Initiative Genre, Niamey, décembre 2005<br />

69


Cette répartition repose sur la considération que les hommes auront plus de charges que<br />

les femmes dans leur vie future, car les femmes seront amenées à se marier, alors que<br />

l’homme reste pour garder le patrimoine familial. Cependant, ne serait-il pas nécessaire<br />

de faire recours à la raison et ce qui est utile pour tous. Puisque, comme le dirait<br />

Mahmud, Zaki Najib 117 , «La clé du vrai aujourd’hui est de bien digérer l’idée que nous<br />

sommes en trans<strong>for</strong>mation, donc en mutation le passé ne saurait régir l’avenir». (Sami<br />

Aldeeb, N.6. 2007, 14)<br />

Considérer certains principes de la religion dans leurs <strong>for</strong>mes anciennes, ne serait qu’un<br />

moyen pour justifier la violation des droits humains. Si l’on met un accent sur ce point<br />

c’est que bon nombre de praticiens ou d’exégètes du droit islamique 118 , en Afrique<br />

rappellent que toutes les conditions de liberté et d’égalité des femmes sont inscrites dans<br />

le coran. Or, An-Na’im (1990 :176) un juriste Soudanais et Sow (2005) Sociologue<br />

sénégalaise, nous rappellent le caractère discriminatoire de la Shari’a. Puisque si la<br />

sociologue avance que les conditions de mariage sont inégales, le juriste quant à lui<br />

soutient que l’homme est toujours le chef légal de la famille, car « l’époux détient, le<br />

droit, l’autorité et le contrôle sur son épouse, au point de la punir de diverses manières<br />

et de la battre « légèrement » s’il la juge incontrôlable ». Ainsi, si d’aucun avancent que<br />

certains principes religieux ne se fondent pas sur la discrimination, il n’en demeure pas<br />

moins que la religion est tout de même utilisée pour justifier des préceptes visant<br />

exclusivement les femmes.<br />

Contrairement aux normes étatiques, une gr<strong>and</strong>e partie de la coutume ne fait pas une<br />

démarcation entre l’islam, la moralité et les autres <strong>for</strong>mes de contrôle social. Ces droits<br />

ne sont pas fermement établis et ils sont parfois obscurcis par la nécessité de maintenir<br />

la cohésion du groupe (NTAMPAKA, C, 1999:441).<br />

Par ailleurs, l’influence des pratiques chrétiennes se perçoit mieux à travers le code civil<br />

de Guinée. Ce code civil reconnaît la monogamie et interdit la polygamie. Au cours de<br />

la première République, cette disposition a certes réduit le taux de mariage<br />

polygamique, mais par contre elle a élevé le taux de concubinage et d’union libre selon<br />

le rapport du CEDAW/C/GIN/1 (2000, 157).<br />

117 Philosophe Egyptien, adepte du positivisme scientifique. Il estime qu’il ne faut prendre du passé arabe, comme du<br />

présent occidental, que ce qui est utile et non ce qui ne l’est pas, il faut recourir á la raison, quelle que soit la source<br />

examinée. Cette position se rallie à celle des musulmans libéraux tel que : An-Na’im A.A. Towards an Islamic<br />

Re<strong>for</strong>mation, Civil Liberties, Human Rights <strong>and</strong> international Laws, Syracuse Press University, Syracuse, 1990,<br />

SOW, F, « Penser les femmes et l’islam en Afrique : une approche féministe », contribution à Mama Africa.<br />

Mélanges <strong>of</strong>ferts à Catherine Coquery-Vidrovitch. L’Harmattan, 2005, Paris.<br />

118 Suliman Ibn Abdal Rahman Al Hukail, les droits de l’homme en islam et la réfutation des préjugés soulevés contre<br />

l’islam, Dar Ashbilia <strong>for</strong> Pu <strong>and</strong> Dist, Riyad, 1999. Ministère de la promotion de la femme et de la protection de<br />

l’Enfant et l’UNFPA, Argumentaire islamique sur l’équité de Genre, Initiative Genre, Niamey, décembre 2005


Les religions valident la vieille considération coutumière du patriarcat et la défende.<br />

Position qui maintient le rôle de la femme à l’épouse, la mère et la femme au foyer<br />

comme modèle idéal. A travers la religion, certaines femmes dans le mariage jouissent<br />

de leur féminité soit dans la maternité classique ou soit celle spirituelle (la vocation<br />

religieuse catholique) t<strong>and</strong>is que d’autres s’organisent en un groupuscule <strong>for</strong>t pour<br />

défendre le devoir de soumission de la femme mariée à son époux (Féminisme<br />

fondamental islamique).<br />

La religion continue de jouer un rôle important dans la vie de nombreuses femmes.<br />

D’ailleurs, qu’elles soient croyantes ou non, la plupart des femmes sont affectées d’une<br />

manière ou d’une autre, par la position des différentes religions à l’égard des femmes,<br />

directement ou par le biais de leur influence certaine sur la société ou l’État.<br />

Les coutumes ou les normes culturelles se sont développées en relation étroite avec les<br />

principes religieux sans toutefois leur être directement imputables. Les observations<br />

faites ouvrent la voie sur une réelle incidence de la religion sur les politiques publiques<br />

et la vie privée susceptible de fragiliser l'égalité femmes hommes et de limiter l'accès<br />

des femmes à leurs droits humains et ainsi que l’exercice de ceux-ci 119 .<br />

En appuyant l’analyse de LASSEN, E ; M 120 (2001 :80), qui le jumelage entre religions<br />

et droits humains n’est jamais simple. Puisque selon le même auteur, dans le passé,<br />

certains groupes religieux ont été reconnue comme ceux qui ont initiés ou légitimés, ce<br />

qui est aujourd’hui appelé les violations des droits de l’homme, les états utilisent la<br />

rhétorique religieuse pour légitimer les abus de droits de l’homme. Même si d’autre<br />

part, l’utilisation des valeurs religieuses et des rhétoriques religieuses ont aussi eu à<br />

promouvoir ce qui aujourd’hui pourrait être appelé de droits de l’homme.<br />

La religion est <strong>for</strong>tement masculinisée de sorte que les principes et les extensions de la<br />

croyance religieuse sont parfois en eux-mêmes, les violations des droits fondamentaux<br />

des femmes (SHEEN, J, 2004 : 513) 121 .<br />

Bien que Louis Gustave Binger estime 122 que l’islam a su se « négrifier », puisqu’il a su<br />

allier ce qu’il y a de plus conciliable avec la nature, ce qui peut être adopté sans examen<br />

par des être simples. Pourtant, LASSEN, E, M (2001. 192), avance que la religion<br />

119 Le lobby Européen des Femmes (LEF) dans une de ses prises de position à avancer à peu près des mêmes idées<br />

dans un contexte européen traitant du christianisme. (2006)<br />

120 Chercheure à l’IDDH, dans son article World religions, World values : In dialogue with the Bible, tiré de Human<br />

Rights on Common Grounds : The Quest <strong>for</strong> Universality.<br />

121 SHEEN, J, Burdens on the right <strong>of</strong> women to assert their freedom <strong>of</strong> religion or belief, in Tore LINDHOLM,<br />

W.Cole DURBAM, Jr., Bahia G. TAHZIB-LIE (eds), “Facilitating Freedom <strong>of</strong> religion or belief: A Deskbook”, 2004<br />

Koninklijke Brill NV. Netherl<strong>and</strong>s<br />

122 Dans ses pages consacrés à « la mentalité du Nègre musulman » tirés de son ouvrage le péril de l’Islam (1906).<br />

Notes trouvées dans l’article de A Cura di jean de la Guérivière, Les multiples visages de l’islam noir, Géopolitique<br />

africaine, N.5 – Hiver 2002.<br />

71


n'<strong>of</strong>fre aucun moyen facile de jeter un pont entre les droits de l'homme et la culture<br />

locale. Même si selon elle, un espoir pourrait être à l’horizon, avec le dialogue ouvert à<br />

l’intérieur des religions.<br />

V. IMPACT DE CES PRATIQUES SUR LES FEMMES DANS LE MARIAGE<br />

La diversité culturelle, selon Panikar repris par Francisco, G, (DAWN, 2006 :16), est<br />

une réalité sur laquelle il faut tout de même insister, dans la mesure où l’identification<br />

des éléments transculturels est un déterminant dans l’étude des comportements. Car il y<br />

a une spécificité d’un ensemble de valeurs acceptables actuellement par tous, même si<br />

les femmes paient le plus lourd tribut de ce pluralisme de phénomènes. Dans ce<br />

système, un ensemble d’acteurs intervient et participent à pérenniser ce phénomène.<br />

5.1.La pérennisation de ces pratiques<br />

De la revue documentaire faite et le dépouillement de nos in<strong>for</strong>mations collectées au<br />

niveau des communautés ethniques, ressortent qu’au regard des différents types de<br />

relations que la femme entretient dans le mariage et de l’analyse faite de ces rapports,<br />

des acteurs interviennent dans la vie du mariage. Et ces acteurs pérennisent leurs actions<br />

á travers un schéma socioculturel.<br />

5.1.1. Les acteurs<br />

Le mari, est le premier acteur dans ce jeu, puisque ayant été moulé dans un système<br />

patriarcal, il se montre très austère face à la réclamation par son épouse de ses droits.<br />

Cet acteur met tout à pr<strong>of</strong>it pour assujettir son épouse con<strong>for</strong>mément aux vieilles<br />

considérations ancestrales. Il est celui qui reproduit ce système inégalitaire dans le<br />

couple.<br />

Bourdieu, P souligne dans « La domination masculine » 123 , et de la manière dont elle est<br />

imposée et subie, l’exemple par excellence de cette soumission paradoxale. Il nomme la<br />

violence symbolique, violence douce, insensible, invisible pour ces victimes mêmes, qui<br />

s’exerce pour l’essentiel par les voies purement symboliques de la communication et de<br />

la connaissance - ou, plus précisément, de la méconnaissance, de la reconnaissance ou, à<br />

la limite, du sentiment. Cette relation sociale extraordinairement ordinaire <strong>of</strong>fre ainsi<br />

une occasion privilégiée de saisir la logique de la domination exercée au nom d’un<br />

principe symbolique connu et reconnu par le dominant comme par le dominé, une<br />

langue (ou une prononciation), un style de vie (ou une manière de penser, de parler ou<br />

d’agir) et, plus généralement, une propriété distinctive, emblème ou stigmate, dont la<br />

plus efficiente symboliquement est cette propriété corporelle parfaitement arbitraire et<br />

non prédictive qu’est la couleur de la peau. (1998)<br />

123 La domination masculine, Editions du Seuil, Paris, 1958, cette œuvre traite des rapports sociaux de sexe dans une<br />

communauté Kabyle en Algérie


Dans cette vision masculine, la position de l’homme guinéen est soutenue par l’art. 324<br />

du code civil mis à jour le 1 er janvier 1996 dans son alinéa 1 qui attribue la qualité de<br />

chef de ménage au mari. CEDAW/C/GIN/1, 2000 :27). Ce même code donne à partir de<br />

l’art. 396 le droit de la puissance paternelle au mari dans l’éducation des enfants. Au-<br />

delà du code, les pratiques religieuses et coutumières aussi défendent ces mêmes<br />

valeurs. Derrière l’acteur « Mari » se trouve tout l’arsenal masculin.<br />

Ensuite, la belle famille qui a le droit de s’ingérer dans les différends du couple et qui<br />

participe à discriminer la femme. Leur intervention se fait sentir à tout moment de la vie<br />

du couple. Au cours du mariage, les frères et les sœurs du mari ont chez les malinkés<br />

tous droits sur la femme (Droit de la répudier, de la punir et autres). Dans d’autres cas,<br />

lors de la période de veuvage de la femme, une réelle jalousie se crée entre la veuve et<br />

la famille de son mari au moment du partage de l’héritage.<br />

Enfin les coépouses, et les femmes gardiennes de la tradition jouent un rôle très<br />

important par rapport à la condition des femmes quel qu’elles soient. Par contre les<br />

femmes stériles subissent en plus de la misère des hommes, l’anéantissement du poids<br />

de leurs coépouses. Cette relation fait naître une certaine hypocrisie et une « bonne<br />

guerre » dans le but de «garder le mari ». Face à ce phénomène, la femme stérile n’a<br />

pas de mot à dire, mais aussi les autres femmes quant à elles manifestent un manque de<br />

solidarité vis-à-vis d’elle, en ce sens qu’elles lui interdisent toute implication à un<br />

évènement important.<br />

5.1.2. Le schéma socio culturel 124<br />

Le schéma socioculturel s’opère à travers l’influence psychologique ayant pour<br />

fondement la croyance religieuse, les préjugés sociétaux, la socialisation et les textes de<br />

lois désuètes. Les textes de lois étatiques sont très souvent truffés de dispositions<br />

discriminatoires. La religion sur la base de droit canon et la Shari’a, est très réfractaire à<br />

certaines dispositions accordant les mêmes droits aussi bien aux hommes qu’aux<br />

femmes. Les préjugés sont assez récurrents et fondent cette conception faite des femmes<br />

et contribue à garder le mythe sur l’infériorité des femmes. Tout ce schéma se bâtit<br />

autour du patriarcat qui est une idéologie très pesante régulant les relations au pr<strong>of</strong>it des<br />

hommes, et reproduisant les inégalités déjà existantes 125 .<br />

Dans ce système patrilinéaire, la solidarité très <strong>for</strong>te unit tous les membres du lignage et<br />

les liens de parenté constituent encore la principale armature de la société.<br />

124 Ce schéma socio culturel a plus d’influence sur les femmes pauvres et celles vivant en zone rurale puisque selon<br />

Weilenmann, M, (2007 :100), ce sont celles qui n’appartiennent pas aux groupes d’un niveau social élevé qui<br />

s’adressent aux tribunaux lorsqu’un conflit survient. Il souligne que cela ne signifie pas qu’elles vivent dans un vide<br />

juridique. Par contre, ces femmes pour régler les conflits, elles sont plus susceptibles de se tourner vers le droit<br />

coutumier et /ou les autorités religieuses (propriétaire terrien, chef de village, missionnaire, sorcier, guérisseur, etc.),<br />

à la campagne, en particulier tendent à voir l’état moderne á travers des lunettes féodales – où agissent comme si<br />

c’était le cas.<br />

125 Cette notion de reproduction est soutenue par Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, La reproduction.<br />

Eléments pour une théorie du système d'enseignement, Paris, Editions de Minuit, 1970.<br />

73


L’organisation traditionnelle des familles ou ménages facilitent la compréhension du<br />

partage du pouvoir établit depuis les générations. Pour toute décision importante,<br />

l’autorisation du chef ou du doyen de la famille est importante car ce type d’exercice du<br />

pouvoir dans cette communauté selon les règles traditionnelles est synonyme de<br />

survivance du pourvoir qui est vecteur de paix et de cohésion sociale.<br />

Selon SARAH, R (1989, 9) à travers cette relation: «On y découvre le rôle dominateur<br />

de l’homme, une certaine inégalité entre l’homme et la femme, égoïstement bassement<br />

entretenue et l’exploitation révoltante de la femme par l’homme. La dignité de la femme<br />

est souvent totalement méconnue ».<br />

La société patriarcale guinéenne contribue à promouvoir les stéréotypes, attitudes et<br />

préjugés à l’encontre des femmes à travers des considérations sociales. Ce qui maintient<br />

les femmes dans une position de subordonnée, le tout habillé par l’existence d’un triple<br />

système légal 126 situé entre la coutume, la religion et le droit. Cette philosophie donne<br />

encore les raisons de fonder une justice de respect des droits des femmes dans le<br />

mariage. Il reste à admettre que la Guinée est caractérisée par un pluralisme accentué<br />

par une sorte de « sur pluralisme » des normes, où l’on reconnaît diverses traces ou<br />

divers effets 127 de l’histoire récente du pays.<br />

Pour terminer, l’on soutiendrait que les pratiques si par ailleurs sont des simples<br />

habitudes, en Afrique elles ont des fondements très significatifs liés aux croyances<br />

religieuses et surnaturelles. Toute pratique correspond à une analyse sociétale.<br />

Seulement très souvent au désavantage de la femme. En réalité elle est la seule à subir<br />

ces pratiques et se retrouve très souvent face à des situations incon<strong>for</strong>tables ne lui<br />

permettant pas de revendiquer ces droits. Il lui faut tout supporter pour la bénédiction et<br />

la réussite des enfants. La féminité devient dans ce cas un h<strong>and</strong>icap puisque la<br />

femme/fille se trouve vulnérable dans ce jeu d’acteurs.<br />

5.2. L’utilisation de ces pratiques coutumières et religieuses aux fins de contrôle<br />

des femmes dans le mariage<br />

Le milieu familial est le premier lieu d’apprentissage des valeurs sociales qui constitue<br />

le point de départ pour la construction des stéréotypes discriminatoires, tout<br />

particulièrement envers la fille qui demeure près de sa mère ou de sa nourrice, ses<br />

premiers modèles. Elle commence toute jeune l’apprentissage des activités domestiques<br />

126 Muyoyeta, Lucy, Présidente du comité de Coordination des ONG pour le Genre et le développement en Zambie.<br />

Dans son article « Réagir sur tous les fronts » dans Economie et Humanisme, 2006, pp 64-68, elle avance que la<br />

femme est au second rang. Puisque de nombreux obstacles les pénalisent dans le système social. Selon elle, les us et<br />

les coutumes rép<strong>and</strong>us maintiennent des femmes dans une position de subordonnée : ceux-ci sont perpétués en raison<br />

de l’existence d’un double système légal (coutumier et moderne). Le droit coutumier est essentiellement patriarcal et<br />

s’applique généralement aux affaires concernant le mariage, le divorce, l’héritage et la propriété des biens. Par<br />

rapport á cette analyse, il nous a semblé intéressant dans le cadre de notre recherche de réadapter cette considération<br />

dans notre contexte de pluralisme normatif entre coutume, religion et droit civil.<br />

127 (sous la direction de Winter Gérard), CHAUVEAU, JP, LE PAPE, M, OLIVIER DE SARDAN, JP, « Inégalités<br />

et politiques publiques en Afrique: Pluralités et jeux d’acteurs», La pluralité des normes et leurs dynamiques en<br />

Afrique : Implications pour les politiques publiques, eds Karthala et IRD, 2001, PP : 147


et s’adonne à des rôles strictement féminins que la société lui confère traditionnellement<br />

au cours de l’initiation..(BM/ACDI, 2004). C’est ainsi que Carbonnier reprenant H, le<br />

Bras et Emm, (2004 :362) dit que: « une mosaïque de droits se constitue lorsqu’une<br />

population éprouve, d’une province à l’autre, d’une classe à l’autre, une propension<br />

inégale à pratiquer tel comportement juridique»<br />

La croyance à Dieu, est une socialisation <strong>for</strong>te présente 128 dans laquelle il est impossible<br />

de dissocier religion et vie quotidienne 129 . Tout commence par Dieu et finit par lui.<br />

Cette omniprésence de la <strong>for</strong>ce divine souvent mal connue amène ceux qui veulent<br />

assujettir d’autres à procéder à des mauvaises interprétations. La pratique de la<br />

polygynie avait bien un fondement dans les anciennes sociétés qui ne répond plus aux<br />

réalités actuelles.<br />

Souvent, en Guinée, certains comportements sont référés soit à la religion soit aux<br />

coutumes, pour leur conférer une certaine garantie. Or les pratiques coutumières et<br />

celles religieuses ne sont que des normes non au service des plus <strong>for</strong>t mais au service de<br />

la population dans le but de faire régner l’ordre et la quiétude. Ces pratiques deviennent<br />

suivant le contexte dans lequel elles sont appliquées des approches ayant pour seule<br />

visée l’organisation de la société. Reposant sur ce socle, cette société selon les normes<br />

sociales gère et régularise les systèmes. Ces pratiques sont une réponse aux réalités<br />

sociétales.<br />

Il y a lieu de se poser la question sur le lien entre le respect des droits humains 130<br />

reconnu en Guinée (liberté, égalité, justice) et lorsque cela est reporté au niveau des<br />

femmes, puisque c’est en ce moment que les voies se séparent (DAWN, 2006) et aussi à<br />

certains niveaux, toutes les femmes ne s’accordent pas sur les mêmes principes et la<br />

religion devient un problème fondamental, qu<strong>and</strong> elle est utilisée non comme système<br />

de foi mais comme un instrument d’accès au pouvoir 131 . C’est en ce moment que l’on se<br />

retrouve face à une mauvaise interprétation de certains principes religieux.<br />

Les coutumes et croyances selon Gita Sen et Bene Madunga (DAWN, 2006) ne sont<br />

souvent nullement anciennes, mais sont des coutumes récentes créées aux fins<br />

spécifiques de contrôle sur les femmes et sur d’autres groupes. Dans cette avancée, l’on<br />

128 Sami Aldeeb, (2007, 8) note que l’Académie islamique du Fiqh qui dépend de l’organisation de la conférence<br />

islamique à laquelle la Guinée est membre a rendu, lors de sa réunion tenue a Manama du 14 au 19 novembre 1998,<br />

une fatwa condamnant la laïcité en l’assimilant à l’athéisme dem<strong>and</strong>ant aux pays membres de la combattre.<br />

129 Voir tableau des pratiques coutumières, où les femmes dans les moments durs font toujours référence à Dieu.<br />

Aussi, Sami, A (N.6, 2007: 9) rappelle que bien que sur le plan <strong>for</strong>mel, le droit musulman couvre peu de domaines,<br />

mais en pratique il joue un rôle important dans presque tous les aspects de la vie. Il sert de référence pour déterminer<br />

ce qui est licite et ce qui est illicite dans les domaines de l’éthique sexuelle (mixité entre hommes et femmes, rapports<br />

sexuels hors mariage, etc.) et médicale (avortement, procréation artificielle, planification, etc.) de la tenue<br />

vestimentaire, ..) du travail de la femme et sa participation à la vie politique et de l’intégrité physique (excision, …)<br />

130 La Guinée a ratifié, les droits de l’homme sont déclamés mais peu appliqués, car il y a une contradiction entre les<br />

déclarations d’intention du gouvernement dans les <strong>for</strong>ums régionaux et internationaux par la ratification de la plupart<br />

des gr<strong>and</strong>es conventions internationales et les faits vécus au quotidien par les femmes.<br />

131 Notes tirées de l’article « Repenser le développement en Afrique : et si les femmes comptaient » de SOW, Fatou,<br />

chercheure au CNRS et membre de DAWN (2006 :16-24).<br />

75


comprend le jeu de groupes fondamentalistes religieux dans cette vive tension de<br />

bipolarisation attisant la flamme entre tradition et droit étatique, des critiques souvent<br />

radicales surtout par rapport aux droits reproductifs et d’égalité entre les sexes. Cette<br />

position des conservateurs religieux n’est que symptomatique de leur objection centrale<br />

à l’égalité entre les sexes elle-même. (DAWN, 2006 :1-9)<br />

L’idéologie de la supériorité de l’homme sur la femme surtout dans le mariage,<br />

véhiculée habituellement en Guinée, est le facteur pesant dans les rapports sociaux de<br />

sexe. Les relations sont désormais transposées sous d’autres <strong>for</strong>mes telles que le droit de<br />

regard de l’homme au revenu de la femme, etc. Dans cette logique, SHEEN, J (2004 :<br />

515) affirme que la religion étant essentiellement politique et relationnelle, dans les<br />

relations de pouvoir, les questions de frontières, de l'identité de groupe, la cohésion et la<br />

continuité sont considérés comme cruciaux, et les institutions religieuses dominées par<br />

les hommes qui eux utilisent leur pouvoir sur les femmes á des fins de subordination.<br />

5.3. Persistance du pluralisme des pratiques et pesanteurs<br />

Au regard de cette présentation, le pluralisme des pratiques et des pesanteurs se<br />

montrent avec une gr<strong>and</strong>e persistance. Pourtant ce phénomène n’est pas sans<br />

conséquence dans la logique du respect des droits des femmes.<br />

5.3.1. Obstacles à la codification législative<br />

L’obstacle à la codification législative se situe aussi bien au niveau du code civil de<br />

Guinée qu’au niveau de l’adoption du nouveau code de la famille. D’une manière<br />

générale, au fil des siècles, le contrôle ou la domination masculine a conduit à des<br />

inégalités structurelles et systématiques et à la discrimination contre les femmes. Cela se<br />

voit dans les lois, politiques et pratiques qui en ont découlé ou qui sont liées à la loi<br />

religieuse. (SHEEN, J, 2004:516)<br />

5.3.1.1.Un code civil truffé de dispositions discriminatoires<br />

Le code civil guinéen en cours de validité date de 1983. Cependant, la Guinée a connu<br />

assez de changements qui ne se sont pas soldés dans le domaine juridique par la révision<br />

du code civil selon les nouvelles données socioculturelles. D’un système socialiste la<br />

Guinée se retrouve dans celui libéral ; le code se retrouve en pr<strong>of</strong>onde contradiction<br />

avec les réalités sociales 132<br />

Le code civil consacre beaucoup de dispositions relatives à la question du mariage ipso<br />

facto du divorce. Les articles 170 à 191, 201 à 221 et 280 à 360 sont consacrés au<br />

mariage, sa dissolution. A travers ces articles, le code civil prévoit les matières<br />

suivantes : les conditions nécessaires pour contracter le mariage, des guinéens à


l’étranger et des étrangers en Guinée, des oppositions à la célébration du mariage, des<br />

nullités du mariage, de la polygamie, des droits et devoirs des époux, de la dissolution<br />

du mariage, etc. Il en est par exemple que l’article 201 du code civil oblige tous les<br />

citoyens à célébrer leur mariage devant un <strong>of</strong>ficier d’état civil. L’article 202 ajoute que<br />

le mariage civil doit précéder obligatoirement le mariage religieux 133<br />

Tout de même, d’autres articles du code civil discriminent la femme lors du divorce et<br />

pour ce qui concerne la minorité, la tutelle et l’émancipation, les discriminations envers<br />

les femmes sont patentes. Pour l'administration des biens des enfants mineurs non<br />

émancipés, l'article 400 décide que du vivant des époux, ce rôle est confié au père. Et,<br />

en cas de déchéance, le tribunal choisira un administrateur sur proposition du conseil de<br />

famille. Par ailleurs, le droit individuel de choisir un tuteur ou une tutrice pour ses<br />

enfants n'appartient qu'au père survivant (article 406 du code civil). Au cas où la mère<br />

serait désignée comme tutrice, elle aura à rendre compte de sa gestion au conseil de<br />

famille et l’article sur l’émancipation accorde au père seul, la possibilité d'émanciper<br />

son<br />

fils mineur (CEDAW/C/GIN/1, 2000)<br />

En matière de droit de la famille, il y a une application et une interprétation incorrecte<br />

en br<strong>and</strong>issant des présupposées références coutumières et religieuses. A travers le<br />

Livre 1 du code civil 134 , l'article 134, relatif à la déclaration de naissance est<br />

discriminatoire En énumérant les personnes devant déclarer la naissance, il ignore la<br />

mère de l'enfant. Parlant du domicile qui constitue un élément très important pour<br />

individualiser une personne, l’article 247 ne permet pas à la femme mariée d'en avoir un<br />

qui lui soit propre. Durant le mariage, le principe du patriarcat fait de la femme la<br />

subordonnée de son époux. L'article 328 : «La femme mariée peut exercer une<br />

pr<strong>of</strong>ession séparée de celle de son mari, à moins que celui-ci ne s'y oppose…..». Par<br />

ailleurs, aux termes de l'article 396, le père exerce durant le mariage, et en tant que chef<br />

du ménage, les droits de puissance paternelle 135 . Le terme est en lui-même<br />

discriminatoire, car perpétuant le concept de patriarcat. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :13)<br />

Par ailleurs le code civil ne prévoit aucune disposition régissant les régimes<br />

matrimoniaux. Suivant le contexte actuel et les dispositions du code civil relatives au<br />

mariage, il apparaît une réelle disparité par rapport à l’évolution de la société guinéenne<br />

132<br />

Notes tirées d’un entretien avec Me Hamidou Barry, Avocat à la Cour (2007)<br />

133<br />

Ce qui est un indice de prégnance du mariage religieux<br />

134<br />

Actuellement révisé, il doit être adopté par l’Assemblée nationale dans sa nouvelle version. Notes tiré d’entretiens<br />

avec Me Hamidou Barry, Avocat. (2007)<br />

135<br />

Cet article viole donc l’esprit de l’article 15 de la CEDAW qui ercomm<strong>and</strong>e aux Etats parties des prendre des<br />

mesures correctives afin d’assurer sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme, les mêmes droits et les mêmes<br />

responsabilités en tant que parents<br />

77


sur tous les aspects de la vie sociale, économique, politique et culturelle. Pourtant<br />

depuis 1995 le législateur guinéen est en cours de révision ou d’amendement du code<br />

civil. Ce projet a été relancé en janvier 2006, mais ce projet se trouve encore dans un<br />

état latent 136.<br />

Guilberteau, A 137 évoque que dans le mariage les femmes sont très souvent victimes de<br />

discriminations qui touchent à leur existence la plus personnelle, ce qui montre<br />

l’urgence de déconstruire un système social porteur d’inégalités. Puisque, ces<br />

discriminations privent les femmes de liberté et leur refuse l’accès à l’égalité (Directrice<br />

Régionale du CNIDFF) á travers sa contribution « La souffrance des femmes appelle au<br />

changement social » (Economie et Humanisme, 2006, 48-50)<br />

On ne peut mieux terminer l’analyse sur ce point que par cette affirmation de<br />

l’Organisation des Etats d’Amérique (OAS) qui dit que « la protection des droits des<br />

femmes à l’intérieur des familles est une mesure essentielle dans la lutte contre la<br />

pauvreté 138 ».<br />

5.3.1.2. Difficulté d’adoption d’un nouveau code de la famille<br />

La République de Guinée sous le régime de Sékou Touré a manifesté sa volonté de<br />

promouvoir la femme et de lui accorder les mêmes droits que les hommes. Ainsi, au<br />

niveau juridictionnel, la loi N.54AN/62 du 14 avril 1962 139 relative au mariage est<br />

adoptée. Dans sa première expérience la Guinée n’a tout de même pas retenu l’option de<br />

monogamie sous sa <strong>for</strong>me classique puisqu’elle ne donne pas une limite du nombre des<br />

épouses. Elle a plutôt dans l’art 9 de la loi du 14 avril 1962, décidé qu’il : «est interdit<br />

qu’un homme qui n’a pas de moyens de subsistance suffisants pour sa propre personne<br />

et dont la première épouse végète dans la misère, épouse une autre femme ». Face à<br />

cette imprécision et le législateur guinéen, constatent l’échec de cette première mesure<br />

prise á l’égard de la polygamie a donc décidé d’abolir cette loi et d’adopter une autre.<br />

Cette nouvelle loi du 5 février 1968 140 en son article 3, donne quelques chances aux<br />

polygames en les autorisant à <strong>for</strong>muler une dem<strong>and</strong>e d’autorisation de contracter une<br />

deuxième union peut être introduite auprès du ministère de l’intérieur pour des<br />

situations graves ayant le caractère d’un véritable cas de <strong>for</strong>ce majeure dûment établies<br />

par des autorités médicales (G.A.KOUASSIGAN, 1978 :203-211). Cette volonté<br />

136<br />

Tiré de l’interview de Me Hamidou Barry, Avocat à la cour et enseignant à la faculté des sciences juridiques de<br />

Sonfonia.<br />

137<br />

Guilberteau, A, directrice régionale du CNIDFF défend cette thèse à travers sa contribution « la souffrance des<br />

femmes appel au changement social » dans la revue Economie et Humanisme, 2006, 48-50<br />

138<br />

De VAN BUEREN, G dans Regards sur le droit de la famille dans le monde, Presse Universitaire de Lyon,<br />

1999 :523<br />

139<br />

L’art 5. de la loi n.54-62 du 14 avril 1962 de la République de Guinée, rend laïc le mariage en Guinée, et<br />

désormais il n’y a de mariage valable au regard de la loi que célébré par l’<strong>of</strong>ficier de l’état Civil. L’art 6, interdit aux<br />

ministres du culte de procéder aux cérémonies religieuses du mariage avant sa célébration par l’<strong>of</strong>ficier de l’État<br />

civil.<br />

140<br />

Loi n. 4-68 du 5 février 1968 de la République de Guinée portant interdiction de la polygamie et réglementant le<br />

divorce


politique se poursuit par la signature le 17 juillet 1981 de la Convention sur<br />

l’Elimination de toutes les <strong>for</strong>mes de Discrimination à l’égard des Femmes (CEDEF)<br />

adoptée en 1979. Cette convention rentre en vigueur en Guinée le 3 septembre 1981,<br />

avant d’être ratifiée le 9 août 1982, même si le législateur n’a pas défini la notion de<br />

« discrimination » (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :3).<br />

Dès lors la volonté politique des dirigeants de la première République connait des<br />

avancées notoires en vue d’accorder à la femme ses droits. Les dispositions prises<br />

reposaient sur l’abolition de la polygynie, la signature et la ratification sans réserve de<br />

toutes les conventions et tous les traités internationaux relatifs aux droits civils,<br />

politiques et humains de la femme. Toutefois, bien que cette disposition d’abolition ait<br />

réduit le taux de mariages polygames, elle a certes par contre élevé le taux de<br />

concubinages, d’unions libres. L’acte de consentement de la première épouse vivant au<br />

foyer conjugal était requis. Cet acte était ensuite contresigné par le commissariat de<br />

police ou la justice du lieu du domicile de celle-ci avant que ne soit accordé le mariage<br />

de la seconde épouse 141 .<br />

Cependant <strong>for</strong>ce est de constater que ce code 142 de la famille sous cette république bien<br />

qu’ayant marqué une nette avancée dans la perception qu’à la société sur la famille, il<br />

n’a pas pu améliorer la condition des femmes, car d’une part, il présentait tout de même<br />

des imperfections par endroit. De l’autre il n’a d’ailleurs pas été tout à fait appliqué car<br />

un peu moins de dix ans, le Président meurt en 1984, et la politique de promotion de la<br />

femme commence à souffrir du désintérêt certain. (CEDAW/C/GIN/1, 2000)<br />

La République de Guinée, dans son processus de démocratisation et à travers sa société<br />

civile très engagée, manifeste une volonté d’adoption d’un nouveau code de la<br />

famille 143 qui est entrain de voir le jour. Ce code a pour vocation de corriger certaines<br />

imperfections du code civil et part des fondements de la CEDEF. Il est élaboré et<br />

soumis aux autorités compétentes pour approbation. Cependant, depuis déjà cinq ans, la<br />

Guinée est sur le dossier de rédaction, ensuite relecture et amendement de ce code. Ce<br />

code prône les principes de liberté de choix du conjoint, d’égalité des conjoints dans le<br />

mariage. Toutefois, son adoption se heurte à des obstacles multi<strong>for</strong>mes. Pour justifier<br />

cette situation, le législateur évoque les contraintes liées au contexte socioculturel. Une<br />

141 CEDAW/C/GIN/1, 2000 :<br />

142 Article 294 du code pénal de 1975 stipule que le mari ne commet de l’adultère que s’il entretient une concubine au<br />

domicile conjugal, alors que lorsqu’il s’agit de la femme un simple acte isolé pouvait suffire. L’article 324 du code<br />

civil mis à jour en 1996 dans son alinéa 1 attribut la qualité de chef de ménage au mari.<br />

143 Le code de la famille adopté au Sénégal depuis 1972 et toujours en vigueur, contient sans nul doute quelques<br />

dispositions discriminatoires à l’égard des femmes, malgré l’existence d’une nouvelle constitution qui réaffirme le<br />

principe d’égalité en droits entre les hommes et les femmes et des ef<strong>for</strong>ts de révisions fournis. Le cas du Sénégal est<br />

identique à celui de la Guinée. Cependant, des avancés notoires s’observent dans d’autres régions. Au Burkina, ce<br />

code est adopté depuis 1970 et a été révisé en 1993. Ce code ci se démarque à travers sa disposition relative à<br />

l’autorité parentale. Au Togo, ce code existe depuis 1981 est aussi revu et am<strong>and</strong>é (Diop, ENDA, 2001)<br />

79


décision d’intégration de tous les articles pris en compte dans ce code de la famille dans<br />

le code civil en cours d’amendement pour éviter que ce code ne soit encore plus<br />

discriminatoire 144 est envisagée selon les législateurs.<br />

Ces discriminations positives dont bénéficient les femmes sont souvent mal comprises<br />

par la population. Certains y voient l’octroi d’avantages iniques aux femmes, d’autres<br />

craignent que les droits à «reconnaître» aux femmes leurs droits, ne donnent la garantie<br />

que les femmes gèrent bien les devoirs correspondants 145 . Ce fait est une résistance<br />

idéologique. Mais ces résistances peuvent être aussi d’ordre conceptuel ou de volonté<br />

politique considérant l’ingérence d’une quelconque personne dans les affaires familiales<br />

comme sapant les valeurs de la société, d’où une revendication considérée comme<br />

illogique ou très ambitieuse. C’est pourquoi, la prise en compte des discriminations<br />

reste noyée dans de gr<strong>and</strong>es approches. Tel est le cas en Guinée de l’intégration du<br />

projet de code de la famille dans le projet de révision du code civil encore en cours.<br />

En effet, l’adhésion aux traités internationaux peut parfois être accompagnée de réserves<br />

amenant l’Etat à se soustraire à certaines dispositions du traité auxquels il ne veut ou ne<br />

peut pas se soumettre. Tel est le cas de l’adoption du code de la famille, et la ratification<br />

de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatives aux droits des<br />

femmes.<br />

La norme et la nature des réserves émises par la Guinée dans l’adoption d’un nouveau<br />

code de la famille constituent de nos jours une préoccupation sérieuse pour la promotion<br />

des droits des femmes. Puisque déclarer que les femmes ont les mêmes droits que les<br />

hommes est perçu comme une nouvelle <strong>for</strong>me de « révolution » ou l’on voudrait<br />

échanger les rôles, aux hommes 146 « le port du pagne » et aux femmes « le port du<br />

pantalon » comme pourrait l’imaginer certains : ceci voudrait plutôt dire que les<br />

femmes aussi bien que les hommes sont des partenaires et que seule la reconnaissance<br />

de la citoyenneté des femmes est un gage certain de développement humain durable.<br />

Pour reprendre Simone de Beauvoir, le salut de la femme ne peut venir que de l’oubli de<br />

sa féminité et donc libérer les femmes, c’est les libérer de leur féminité, et leur<br />

permettre leur plein épanouissement. Quoiqu’il en soit, et suivant ce que défend<br />

Stendhal, « l’admission des femmes à l’égalité parfaite serait une marque de<br />

civilisation » 147<br />

144<br />

Tiré de l’interview de Me Hamidou Barry, Avocat à la cour et enseignant à la faculté des sciences juridiques de<br />

Sonfonia.<br />

145<br />

Ryckmans, H, dans son article Pourquoi tant de résistance contenu dans la revue Economie et Humanisme, 2006,<br />

59-63<br />

146<br />

Dans l’acceptation africaine des modes vestimentaires, on reconnaît les hommes par le port du pantalon et les<br />

femmes par le port unique de pagne (une Et<strong>of</strong>fe que les femmes attachent et qui fait ressortir leur beauté)<br />

147<br />

http://www.actu-presse.com/doc/lacroix_parite_11oct06.pdf


5.3.2. Une reconnaissance timide des droits des femmes dans le mariage comme<br />

un droit humain<br />

L’avènement de la deuxième République (1984) a connu à ses débuts la régression de la<br />

situation des femmes. Puisque la volonté politique par rapport au droit de la famille<br />

entamé en 1975 n’est plus suivie ; un vide juridique se crée. Le processus ne reprend<br />

son cours que lors des préparatifs de la conférence de Beijing en 1995 et mieux aux<br />

lendemains de cette rencontre. La logique n’a pas été suivie car si le précédent code de<br />

la famille était une réponse à la misère que vivaient les femmes à l’époque, il n’a pas<br />

connu d’amendement évolutif. Les codes aussi bien civil que pénal n’ont rien amélioré à<br />

la condition des femmes. Certains articles ont été revus tels que ceux en rapport à<br />

l’adultère dans le mariage, etc., mais ces ef<strong>for</strong>ts s’avèrent insuffisants pour un meilleur<br />

respect des droits des femmes. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :28)<br />

En République de Guinée, il existe une nouvelle constitution «loi fondamentale » votée<br />

par référendum le 23/11/1990 promulguée par décret N0 250/PRG/SGG/90 du 31<br />

décembre 1990. Son préambule consacre l’égalité juridique entre l’homme et la femme.<br />

Cette loi consacre l’adhésion du peuple guinéen aux idéaux et principes de la<br />

déclaration universelle des droits de l’homme, de la charte de l’Organisation de l’Unité<br />

Africaine des droits de l’homme et des peuples. Cette loi garantit en plusieurs articles<br />

une égalité en droits entre homme et femme, mais en pratique cette égalité en droit des<br />

femmes se heurte à des contraintes relatives aux pratiques coutumières et religieuses<br />

surtout dans le mariage (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :14)<br />

La Guinée comme bon nombre de pays africains, a ratifié des conventions et des<br />

instruments juridiques au niveau international et sous-régional sur les droits humains 148 .<br />

L’article 8 de la loi fondamentale indique que tous les êtres humains sont égaux devant<br />

la loi et que les hommes et les femmes ont les mêmes droits. Les dispositions du code<br />

civil en ses articles 280 a 367 sur le mariage et le divorce, 463, 465, 483, 487, 488, 489,<br />

491 sur la succession, 400, 401, 403, 405 et 406 sur la tutelle (Bérété,0 149 , 2000:5), sont<br />

autant de dispositions qui mettent un accent sur les rapports sociaux de sexe dans le<br />

ménage. Mais en réalité, la visibilité statistique des femmes africaines en politique, à<br />

148 La charte africaine des droits des l’homme et des peuples (1981 et 1982), le pacte sur les droits civils et<br />

politiques (1967 et 1978), la CEDAW (1982 et 1992); la convention des droits politiques de la femme (1975), la<br />

convention sur la nationalité des femmes mariées (1975 et 1978); la convention sur le consentement au mariage, l’âge<br />

minimum au mariage et l’enregistrement des mariages (1962 et 1978), ….(Januz Symonides et Vladmir Volodine,<br />

Droits des femmes – recueils des textes normatifs internationaux, UNESCO, 1998). Au niveau national, le pays s’est<br />

dote d’un arsenal juridique garantissant l’égalité des droits de hommes et des femmes comme : la loi fondamentale, le<br />

code pénal, le code civil, le code de travail, le code de la sécurité sociale, le code foncier et domanial et différents<br />

ordonnances complétant ces différents textes. Toutefois, <strong>for</strong>ce est de constater que certains textes et instruments<br />

légaux portent préjudice aux femmes, comme le code du travail et le code civil. (CEDAW/C/GIN/1, 2000 :13)<br />

149 BERETE, Oumou, Egalite de chance et de traitement en faveur des femmes, module de <strong>for</strong>mation, Rapport,<br />

Ministère des Affaires sociales, de la Promotion Féminine et de l’Enfance, Guinée, août 2000.<br />

81


l’heure actuelle, masque les inégalités correspondantes entre hommes et femmes,<br />

beaucoup plus en politique et moins en famille (CODESRIA, 2005).<br />

Les coutumes très vivaces et la religion sacrée en Guinée, contribuent <strong>for</strong>tement à créer<br />

une distorsion entre les droits humains et les pratiques vouant spécifiquement les<br />

femmes dans une position de faiblesse et de subordination à l’homme. Le rôle des<br />

femmes est jugé important dans la production alimentaire, la commercialisation des<br />

produits agricoles, la santé, l’éducation et l’hygiène de la famille. Celui des hommes est<br />

considérable en matière de pouvoir et de prise de décision. Il est donc important<br />

d’analyser les actions du gouvernement et de ses partenaires au développement pour<br />

trans<strong>for</strong>mer ces inégalités entre hommes et femmes. (BM/ACDI, 2004), puisque les<br />

droits de l’homme sont plus proclamés que respectés.<br />

Pourtant, l’article 12 de la CEDEF exhorte déjà les gouvernements à assurer des<br />

services médicaux appropriés en matière de grossesse, d’isolement et de soins post-<br />

natals. De nombreuses femmes n’ont pas accès à ces services ni à ces soins. Les femmes<br />

mariées sont battues et le viol conjugal n’est pas un concept social jugé mériter une<br />

législation. Les mariages précoces <strong>for</strong>cés qui soumettent les jeunes femmes à un viol<br />

légal requièrent activement la mise en vigueur de mesures légales. Dans cette logique,<br />

K<strong>of</strong>i Annan 150 , déplore la situation en ces termes: « La violence contre les femmes est<br />

peut-être la violation la plus honteuse des droits de l’homme... Tant qu’elle se<br />

poursuivra, nous ne pourrons prétendre enregistrer de progrès réels vers l’égalité, le<br />

développement et la paix» (CODESRIA, N. 3 et 4, 2005)<br />

A travers la difficulté de ratification du protocole de la charte Africaine des droits de<br />

l’homme et des peuples relatifs aux droits de la femme 151 , la Guinée manifeste encore<br />

une fois sa faible volonté de promouvoir les droits des femmes. S’il l’est, il n’est pas<br />

encore <strong>of</strong>ficiellement déposé au niveau de la commission de l’Union Africaine chargé<br />

du suivi de ce dossier. Cependant l’acquisition de la charte africaine des droits de<br />

l’homme et des peuples relative aux droits des femmes selon DORCA COKER-<br />

APPIAH 152 (WILDAF, 2006 :3) est très importante car elle devient désormais<br />

l’instrument régional qui protège suffisamment les droits de la femme. Cependant,<br />

l’ardeur manifestée par des dirigeants à signer des traités internationaux ne se traduit<br />

pas toujours en politiques ou en législation concrètes 153 .<br />

150 Ancien Secrétaire général des Nations Unies (1996-2006)<br />

151 Voici certaines dispositions relatives au mariage. Art 5: Elimination de pratiques néfastes. Art 6 : Du mariage sous<br />

toutes ses <strong>for</strong>mes; Art 7 : la séparation de corps, divorce et annulation du mariage. Art 14 : Droit à la santé et au<br />

contrôle des fonctions de reproduction. Art 20 : Droit de la veuve. Enfin, Art 21: droit de succession.<br />

152 Présidente du conseil d’administration du WILDAF<br />

153 CODESRIA, Bulletin, Nos 3 & 4, 2005 Page 21


Le rapport du Ministère des Affaires Sociale, de la promotion Féminine et de l’Enfance<br />

de Guinée en collaboration avec l’UNFPA, souligne que plusieurs textes de lois<br />

promulgués en Guinée découlent de l’adhésion de la Guinée à la CEDEF. A ces textes,<br />

s’ajoute la longue liste d’études et d’organisations de la société civile pour la<br />

reconnaissance et le respect des droits de la femme (2004 :30). La déclaration des droit<br />

de l’Homme et du citoyen de 1789 affirme ce caractère juridique de l’égalité des son<br />

article 1 er en énonçant que les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits,<br />

et assure a tous dans l’article 6, une égalité de traitement et d’accès aux charges<br />

publiques. (Le Bras-Chopard, A, 2005 :75-85). Cette simple déclaration suffit pour<br />

donner aux femmes du monde entier tous les droits.<br />

En Afrique, plus qu’une idée, ce phénomène d’égalité entre les sexes est une condition<br />

qui a du mal à être effective. Souvent très mal perçu, car d’un emploi jugé <strong>for</strong>t<br />

« insupportable » pour les hommes, il finit par susciter des polémiques. La conception<br />

qui soutient ce désagrément est l’idéologie conservatrice que la femme ne peut être<br />

l’égale de l’homme. Selon le sens commun, la nature elle-même soutient cette thèse.<br />

Pourtant, une inégalité physiologique certes mais aucune évidence sur celle relative à la<br />

valeur humaine. Quoiqu’il en soit, voilà déjà trois ans et un mois, que la déclaration<br />

solennelle sur l’égalité entre les hommes et les femmes en Afrique est adoptée et le<br />

niveau d’avancement est encore très « timide ».<br />

Pourquoi tant de discours ou d’entreprises à l’endroit des femmes qui ont déjà semble t-<br />

il assez de pouvoir. N’est ce pas leur donner encore plus de pouvoir. D’ailleurs elles<br />

n’en ont pas besoin. Il semble même que les femmes elles mêmes se plaisent dans cette<br />

situation de femmes soumises puisqu’elles font partie de ceux qui perpétuent ces<br />

pratiques.<br />

De cette logique, il est donc aisé de comprendre le retard accusé par rapport à<br />

l’émergence des droits de la femme 154 dans la catégorie des droits humains et comme<br />

mesure corrective sexuée des premières conventions relatives aux droits humains. En<br />

outre, alors que le droit « collectif » à l’autodétermination était garanti dans le cadre des<br />

droits civils et politiques, une autre strate d’invisibilité des expériences et de la réalité<br />

des femmes s’instituait. Les droits humains ne renvoient pas simplement à une question<br />

de langage et de règle, ils sont ancrés dans les institutions, les processus et les<br />

organisations. La position, les droits et les devoirs différenciés de la femme, notamment<br />

son assujettissement historique à l’autorité masculine ou le contrôle de sa reproduction<br />

et de sa sexualité par les hommes et les religieux, tendent à être idéalisés comme partie<br />

intégrante d’un système communautaire alternatif, plus égalitaire (DAWN, 2006 :17)<br />

154 Pourtant, les droits fondamentaux des femmes et des filles font, intégralement partie des droits universels de la<br />

personne. http://www.fidh.org/article.php3?id_article=2900<br />

83


Malgré le pluralisme religieux, culturel, linguistique et racial, les femmes pour la<br />

plupart militent pour un droit de la famille effectif. C’est pourquoi, la prochaine rentrée<br />

en vigueur du protocole marquera en somme une étape décisive vers l’enracinement<br />

d’une culture de respect et d’exercice des droits humains des femmes dans les sociétés<br />

africaines. L’entrée en vigueur de ce protocole selon Kafui ADJAMAGBO-<br />

JOHNSON 155 , « sera une étape essentielle vers la reconnaissance des droits dont les<br />

violations quotidiennes sont source d’immenses souffrances » (DAWN, 2006)<br />

5.3.3. Perspective pour une meilleure prise en compte de la condition des femmes<br />

dans le mariage<br />

Aujourd’hui plus que jamais, le mariage fonctionne sur une dynamique de relations<br />

étroites que pourraient entretenir ces différentes pratiques (normes coutumières,<br />

religieuses et civiles). Au-delà des disparités qui s’observent dans ces pratiques, elles<br />

sont par endroits des valeurs qui régissent cette société. Car quoiqu’il en soit les unes<br />

favorisent l’autre et l’autre les protègent. C’est suivant cette considération que dans le<br />

cas pratique de la Guinée que le code des personnes et de la famille pourrait être revue<br />

et voir adopté 156 .<br />

Désormais pour cerner les rôles sexuels définis socialement, il faut tenir compte des<br />

attitudes et des valeurs que les communautés ou les sociétés considèrent comme<br />

appropriés à un sexe ou à l’autre. Ainsi, l’analyse des rapports sociaux de sexe dans le<br />

mariage permettra de mettre en valeur et d’expliquer le déséquilibre général que l’on<br />

peut constater dans les relations entre les hommes et les femmes, l’importance des rôles<br />

sexuels dans le régime matrimonial et la vie du mariage.<br />

Ni le droit étatique <strong>of</strong>ficiel, ni le droit populaire, ni le droit religieux, ni les normes<br />

appliquées, ni les nouvelles structures composées d’une mosaïque de lois locales ne sont<br />

des entités isolées que l’on peut opposer les unes aux autres. Elles <strong>for</strong>ment plutôt un<br />

réseau de mécanismes interactifs reliés à une multitude de services juridiques, qui<br />

entrent parfois en concurrence les uns avec les autres mais sont qu<strong>and</strong> même <strong>for</strong>tement<br />

influencés par les règles d’entrée des tribunaux étatiques <strong>of</strong>ficiels. Et puisque les<br />

155 Coordinatrice sous régionale du WILDAF pour l’Afrique de l’ouest.<br />

156 L’article de Weilenmann, M, (2007:99) aide à mieux appréhender ce phénomène. A travers son expérience á la<br />

GTZ (Gesellschaft Technische Zusammenarbeit /coopération technique allem<strong>and</strong>e) qui travaille sur les questions de<br />

pluralisme juridique fait cas d’un projet axé sur la réduction de toutes les <strong>for</strong>mes de violence contre les femmes,<br />

comme les mutilations génitales féminines, les mariages <strong>for</strong>cés et la violence conjugale á travers une ONG HUNDEE<br />

en Ethiopie. Pour cette ONG, «le choix de travailler depuis l’intérieur de la culture a été déterminé par d’une part la<br />

conscience des insuffisances du système juridique moderne pour ce qui est de protéger le femmes contre les diverses<br />

<strong>for</strong>mes de violence et d’abus et de l’autre, la reconnaissance du fait que la culture et la tradition englobent des<br />

mécanismes de protection des femmes et des filles contre les actes de violence á caractère sexiste ». C’est aussi le cas<br />

du code civil de l’Indonésie qui est mis à jour suivant l’évolution de la dynamique familiale, 1999, présenté par<br />

SUPRIADI, Wila Ch<strong>and</strong>rawila, « Le mariage dans la législation indonésienne », pp303.-308 sous la direction de


administrations étatiques modernes s’arrogent un monopole en contrôlant les affaires<br />

pénales, les systèmes parallèles devraient posséder une plus gr<strong>and</strong>e souplesse et des<br />

capacités bien développées de conciliation. Cependant, établir une dichotomie entre les<br />

systèmes de justice parallèle et le droit étatique – et privilégier les premiers au détriment<br />

du second – c’est courir le risque de délégitimer un Etat Nation déjà affaibli 157 .<br />

Harmoniser les pratiques coutumières et les lois nationales et conventions est une<br />

nécessité pour la survie du mariage en Guinée, un gage certain de révision de code<br />

débarrassée de toutes <strong>for</strong>mes de discriminations à l’égard des femmes, dans ce sens où<br />

l’environnement familial a pr<strong>of</strong>ondément évolué. Même si cette société a une tradition<br />

de faire recours aux deux systèmes de valeurs, une réelle nécessité néanmoins se<br />

présente de repenser sur les dispositions susceptibles d’infléchir l’ampleur de ce<br />

phénomène.<br />

La préoccupation de protection des droits de la femme apparait de différentes manières<br />

dans différents contextes. Ce défi doit être résolu dans les contextes d’où ils sont issus,<br />

car si l’expérience d’autres pays peut servir, les actions doivent être menées sur la base<br />

des expériences propres des pays (FERRRIS, E, 2005 :59-60). Les pratiques religieuses,<br />

coutumières et étatiques sont si souvent adaptées à un contexte donné qu’il ne devrait<br />

donc pas exister de modèle st<strong>and</strong>ard applicable à tous les pays. Pourtant bien que ceci<br />

soit une évidence puisque partagée par tous, l’organisation internationale pour le<br />

développement et le droit des femmes a tout de même mis au point un nouveau cadre de<br />

législation modèle. Selon cette organisation, ce cadre (UN DOC E/CN./.4/1996/53 at<br />

20) comprend des éléments importants qui devraient être inclus dans toute stratégie pour<br />

combattre la violence contre les femmes et pouvant être adapté aux différents contextes<br />

sociaux culturels (VAN BUEREN, G, (1999, 522)<br />

La prise en compte des femmes consiste à leur donner des conditions qui autorisent à ne<br />

pas être seulement transmetteuses ou exécutrices, mais aussi créatrices et<br />

éventuellement théoricienne. Il serait donc important dans le contexte guinéen,<br />

d’impliquer les hommes dans la stratégie pour le respect du droit des femmes. En tant<br />

qu’acteurs et partenaires sociaux, jouissant de tous les pouvoirs, de tous les droits et de<br />

tous les privilèges, leur collaboration serait plus pr<strong>of</strong>itable à la mise en œuvre des<br />

stratégies d’égalité pour un monde meilleur, que leur exclusion. La prise en compte à la<br />

fois des rôles et des responsabilités des femmes et des hommes dans une société donnée,<br />

en intégrant leurs différences, leurs complémentarités, leurs synergies et parfois leurs<br />

RUBELIN-DELVICHI, Jacqueline, Regards sur le droit de la famille dans le monde, The international survey <strong>of</strong><br />

family law 1996, the international society <strong>of</strong> family law, centre de droit de la famille, P.U.Lyon, 1999<br />

157 Weilenmann, M, 2007:98<br />

85


conflits, permettent d’intégrer non seulement les rôles spécifiques des femmes mais<br />

aussi la corrélation de leurs rôles avec ceux des hommes et vice versa. Il permet<br />

d’intégrer la dynamique sociale qui existe entre eux.<br />

La promotion du dialogue familial est aussi efficace comme une stratégie d’analyse du<br />

mariage dans le contexte africain, car la discrimination à l’encontre des femmes viole<br />

les principes de l’égalité des droits et du respect de la dignité humaine. Ce dialogue est<br />

un moyen de faire progresser la démocratie et la justice sociale, y compris l’égalité des<br />

chances entre hommes et femmes dans le mariage. Ce processus tient compte du<br />

changement qui s’opère dans la société d’aujourd’hui (CIFT de CMT, 2001).<br />

Reprenant les idées de LE BRAS CHOPARD (Maruani, 2005 :76-83), le processus doit<br />

être une action simultanée par le « bas 158 » et par le « haut ». Ce double mouvement est<br />

particulièrement nécessaire en matière de protection des droits des femmes et de<br />

l’égalité entre les sexes dans une société marquée par des siècles de patriarcat ; qui tout<br />

en admettant aujourd’hui le principe abstrait de droits humains, tarde à le traduire dans<br />

les comportements. D’une part, il faut à la « base » achever de trans<strong>for</strong>mer les<br />

mentalités par un travail de sensibilisation de la population ; d’autre part le rôle du droit,<br />

s’il n’est pas exclusif, reste indispensable pour enregistrer les avancées ou servir<br />

d’aiguillon.<br />

Le défi donc de ratification de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples<br />

relatifs aux droits des femmes ainsi que l’adoption d’un nouveau code de la famille et<br />

son application rigoureux sont une <strong>for</strong>me de réponse aux sentiments d’injustice que<br />

vivent les femmes. La <strong>for</strong>mule pourrait donc être « A un traitement injuste, on remédie<br />

par une discrimination positive », c’est pourquoi toutes ces voix qui se soulèvent et les<br />

différentes législations ratifiées sont des visions qui relèvent le fossé existant et aidant à<br />

mieux respecter les droits des femmes.<br />

158 Bas : structures locales, décideurs locaux ; Haut : Les décideurs politiques, les politiques.


CONCLUSION<br />

Nous voilà au terme de notre recherche qui a porté sur le thème «les femmes et les<br />

pratiques coutumières et religieuses du mariage en Guinée». L’objectif de cette<br />

recherche était de décrire la polarisation des actions autour des femmes dans le mariage,<br />

ce qui a une conséquence réelle sur sa condition. L’étude a donc porté sur cinq groupes<br />

ethniques de Guinée, pour appréhender la dynamique de ces pratiques et leur influence<br />

sur les pratiques.<br />

Après analyse et interprétation des matériaux collectées, il ressort que la philosophie<br />

ancienne de ces pratiques est d’une gr<strong>and</strong>e richesse et d’un sens <strong>for</strong>t de contenu. Ces<br />

pratiques, jadis, consistaient à régulariser les relations du couple. Par ailleurs,<br />

déterminent aussi le lien étroit entre la vie du couple et le pouvoir réconciliateur de<br />

l’existence des enfants du couple. Dans un contexte dénudé de mutations actuelles, ces<br />

pratiques recèlent de gr<strong>and</strong>es richesses et de valeurs culturelles très importantes.<br />

Dans l’analyse des rapports sociaux de sexe dans un mariage, la prise en compte de<br />

l’enfant est très stratégique. Avoir une progéniture est d’une gr<strong>and</strong>e valeur. Cet enfant<br />

dans le couple, devient le point nodal justifiant tout comportement des hommes et des<br />

femmes dans le mariage. L’islam peut autoriser l’homme à prendre une autre épouse si<br />

la stérilité d’une épouse est prouvée. Dans la coutume, la stérilité d’une femme dans le<br />

mariage est considérée comme un échec du couple, puisque la procréation est l’une des<br />

raisons du mariage. La misère des femmes stériles passe sous silence même si elles sont<br />

souvent très blessées dans leurs êtres.<br />

Dem<strong>and</strong>er d’ab<strong>and</strong>onner de facto l’ensemble des valeurs africaines serait perturber<br />

l’essence du mariage en Guinée et contribuer à son étiolement. Le mariage est encore<br />

une valeur fondamentale de la société. Les compromis dans la résolution des différends<br />

dans le couple, l’union scellée entre deux familles, deux clans et deux groupes, etc.<br />

pourront donc disparaître et céder la place à l’individualisme et aux relations des<br />

contrats.<br />

Cependant, la mauvaise interprétation de ces valeurs fait naître de pr<strong>of</strong>ondes mutations<br />

dans le couple, puisque plus que des normes de conduite, certains les utilisent pour<br />

assujettir d’autres. C’est en ce moment que ces pratiques culturelles et religieuses ne<br />

cadrent plus avec la logique « Droits humains » et suite à laquelle les femmes sont les<br />

victimes. Autrement dit, la religion devient donc cette construction intellectuelle qui<br />

explique et justifie un ordre social existant, à partir des raisons naturelles. Une vision<br />

qui en Afrique constitue un voile destiné à cacher la poursuite d’intérêts matériels<br />

égoïstes en ren<strong>for</strong>çant et étendant la domination d’une classe de privilégiés que sont les<br />

hommes.<br />

87


Ces rapports sociaux inscrivent les humains dans une trajectoire de vie suivant des<br />

interactions et des liens d’interdépendances. Cette dynamique s’opère à travers la<br />

socialisation qui est un canal d’inculcation des valeurs à l’individu. Dans la mesure où,<br />

cet individu n’obéit pas à cette règle, il se retrouve dans la spirale de l’exclusion. Ceci<br />

dit, la religion devient un problème fondamental, qu<strong>and</strong> elle est utilisée non comme<br />

système de foi mais comme un instrument d’accès au pouvoir et au contrôle des<br />

individus surtout les femmes. Les fondamentalistes religieux et leurs alliés seraient/ou<br />

ne seraient elles pas ceux, de cette vive tension de bipolarisation qui attisent /ravivent<br />

entre les traditions et la loi étatique.<br />

Cette mutation qui s’opère fait perdre à l’État ses repères. Des phénomènes<br />

complémentaires et de causalité s’observent. D’une manière générale, les mariages<br />

coutumiers et religieux continuent à être plus suivis que ceux civils, mieux une gr<strong>and</strong>e<br />

considération leur est accordée. Alors que le principe du mariage au niveau de l’Etat<br />

civil sur le territoire ne reconnaît que celui célébré par sous autorité. Ce conflit de<br />

valeurs et le souci d’harmonisation mettent l’Etat dans une situation d’incompétence où<br />

les intérêts personnels priment sur ceux nationaux. Ces pratiques coutumières sont<br />

dynamiques et permanentes, alors que les acteurs qui ont pour charge de veiller à<br />

l’application de cette loi sont issus de cette masse populaire et donc socialisés et<br />

reproduisant les valeurs anciennement acquises. Une incertitude se créée. Sans pour<br />

autant m’allier dans un doute que Carbonnier (2004 : 18) défend en considérant douteux<br />

l’issu d’un tel conflit entre l’appareil étatique et la masse populaire d’où est issue la<br />

coutume.<br />

De ce constat, résulte celui relatif, à la difficulté d’adoption d’un nouveau code de la<br />

famille. La résistance manifeste à ce propos, ressort de la considération que ce code<br />

prend sa source de cultures importées, puisque le code regorge des dispositions<br />

contradictoires aux pratiques coutumières et religieuses. Les fondamentalistes religieux<br />

et leurs alliés ne seraient ils pas ceux, de cette vive tension de bipolarisation qui ravivent<br />

entre les traditions et la loi étatique.<br />

Les pratiques rationnelles présentées dans cette étude sont des <strong>for</strong>mes d’application du<br />

droit selon une région donnée. Cependant, dans le cas africain, elles pourraient donc être<br />

considérées comme une loi érigée en la faveur des hommes et au détriment des femmes.<br />

Aussi riches que soient ces cultures, l’ensemble de ces règles contribuent à maintenir la<br />

femme dans une position d’infériorité en raison de la disparité existante entre le droit<br />

étatique et celui coutumier.<br />

Au-delà des coutumes, il apparaît aussi que la religion devient donc cette construction<br />

intellectuelle qui explique et justifie un ordre social existant, à partir des raisons


naturelles. Une vision qui en Afrique constitue un voile destiné à cacher la poursuite<br />

d’intérêts matériels égoïstes en ren<strong>for</strong>çant et étendant la domination d’une classe de<br />

privilégiés que sont les hommes. Ces rapports sociaux inscrivent les humains dans une<br />

trajectoire de vie suivant des interactions et des liens d’interdépendances. Cette<br />

dynamique s’opère à travers la socialisation qui est un canal d’inculcation des valeurs à<br />

l’individu. Dans la mesure où, cet individu n’obéit pas à cette règle, il se retrouve dans<br />

la spirale de l’exclusion. Ainsi, la religion devient un problème fondamental, qu<strong>and</strong> elle<br />

est utilisée non comme système de foi mais comme un instrument d’accès au pouvoir et<br />

au contrôle des individus surtout les femmes.<br />

Considérant que toute religion est un déguisement d’intérêts de classe, et une fois que<br />

cette norme investit le droit, il en ressort un pluralisme juridique. Dès lors, le sens des<br />

concepts varie selon les sociétés. Ainsi Arnaud et Roul<strong>and</strong> repris par HESSELING, G,<br />

et al, (2005:9), dira que : « Lorsqu’il s’agit de concepts clés, le sens varie<br />

considérablement de la coexistence d’une pluralité de cadres ou systèmes de droit au<br />

sein d’une unité d’analyse sociologique donnée » à l’insistance « sur le fait qu’à la<br />

pluralité des groupes sociaux correspond des systèmes juridiques multiples » et à<br />

l’accentuation de l’existence de « plusieurs systèmes juridiques à la fois ».<br />

Dans cette dualité de normes, les groupes religieux et raciaux minoritaires existants tel<br />

le cas de certaines régions de la Guinée ont une influence religieuse et culturelle très<br />

périphérique. Néanmoins ces pratiques ont eu l’opportunité de prospérer avec la<br />

tolérance des mariages mixtes (religions différentes). Ce facteur non moins nouveau<br />

conduit tout de même à un pluralisme normatif dans lequel trois ou plusieurs pratiques<br />

du mariage existent et agissent interactivement.<br />

Le mariage civil calqué sur le modèle de Napoléon, lui-même se référant de la<br />

régulation faite de l’Eglise catholique n’est donc pas exempt de valeurs chrétiennes. Ce<br />

qui, dans le cas africain, et plus spécifiquement celui guinéen, amène à considérer ce<br />

code de « positif » ou alors de loi non naturelle importée de l’occident. En<br />

Conséquence, le code civil est rejeté au pr<strong>of</strong>it des lois coutumières alors que le droit<br />

musulman lui, est considéré comme norme interne. Ainsi, le code de la famille et de<br />

personnes a du mal à être adopté en Guinée puisque s’inspirant de cultures importées.<br />

Pour terminer nous dirons que nos hypothèses de départ ont été confirmées. De manière<br />

générale, en République de Guinée, la femme a acquis sur le plan légal les mêmes droits<br />

que l’homme même si par rapport à son vécu quotidien dans la société ces acquis sont<br />

très <strong>for</strong>tement atténués par la coexistence du droit positif, des coutumes et des pratiques<br />

religieuses. La plupart des instruments juridiques reçoivent des amendements ou des<br />

89


évisions en vue d’améliorer le statut de la femme guinéenne, mais il existe encore un<br />

certain nombre de dispositions discriminatoires telles que: la virilocalité du domicile<br />

conjugal, l’autorité maritale, les éléments constitutifs de l’adultère, l’allocation<br />

familiale. CEDAW/C/GIN/1 (2000, 158)<br />

Il existe aussi, un écart entre l’égalité de droit dont jouissent les femmes et l’égalité de<br />

fait dans les séquences qui pointent la réalité quotidienne. La discrimination peut, en<br />

effet être directe ou indirecte. Dans le premier cas, elle est habituellement patente et<br />

souvent considérée comme intentionnelle. Par contre, la discrimination indirecte peut<br />

être le résultat de politiques et de pratiques économiques et sociales qui, tout en se<br />

voulant neutres, ont des effets discriminatoires. CEDAW/C/GIN/1 (2000, 159)<br />

Toutes ces discriminations structurelles et systématiques fondées sur les pratiques<br />

religieuses et coutumières ont un effet préjudiciable sur les femmes à travers le droit de<br />

la famille relatif au mariage, au divorce, à la garde des enfants, l'entretien et les<br />

questions d'héritage. (SHEEN, J, 2004 :517).<br />

L’étude qui vient d’être achevée á cette étape n’a aucune prétention d’épuiser l’analyse<br />

sur les rapports sociaux de sexe dans le mariage en Guinée. Notre ambition à cette étape<br />

de réflexion s’est limitée à une interprétation préalable du processus de nomadisme<br />

normatif dans le mariage vis-à-vis des femmes et aussi de soulever d’autres<br />

interrogations. Il reste important et très salutaire, dans ce pluralisme normatif présent<br />

dans la famille guinéenne d’orienter les recherches prochaines à des niveaux multiples.


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Bahia G. Tahzib-Lie, “Dissenting Women, Religion or belief, <strong>and</strong> the<br />

state: Contempory challenges that require attention” Cph 19, PP 455-495<br />

Juliet SHEEN, Burdens on the right <strong>of</strong> women to assert their freedom <strong>of</strong><br />

religion or belief, chp 21, pp 513-521.<br />

ARTICLES<br />

21. Christine Obbo, , Equité de Genre, Droits humains et Développement, Bulletin<br />

Numéros 3 et 4, CODESRIA, 2005<br />

22. KOUASSIGAN, Guy Adjeté, Famille, droit et changement social en Afrique<br />

Noire Francophone, « Famille, Droit et Changement social dans les sociétés<br />

contemporaines, université Catholique de Louvain, 1978<br />

23. LAGOUTTE, S et LASSEN, E,M, Meeting the challenge : redefining europe’s classical<br />

model <strong>for</strong> state intervention in religious practices, Netherl<strong>and</strong>s Quarterly <strong>of</strong> Human<br />

Rights, vol 24/1, Netherl<strong>and</strong>s <strong>Institute</strong> <strong>for</strong> Human Rights, 33-59, 2006<br />

24. LASSEN, EVA MARIA, “World religions, World values : In dialogue with the<br />

bible”, Human Rights on Common Grounds: The Quest <strong>for</strong> Universality, ed K. Hastrup,<br />

print in Great Britain, Kluver Law International, 2001, 177-194<br />

25. Patrick F, FAGAN, Why religion matters Even More : The impact <strong>of</strong> religious<br />

Practice on social stability, Backgrounder, Richard <strong>and</strong> Helen DeVos center <strong>for</strong> religion<br />

<strong>and</strong> civil society, The heritage foundation, No1992, 2006<br />

26. Revue de sciences sociales, Anne Revillard et Laure de Verdalle, Dynamique du<br />

Genre (introduction), Terrains et travaux - N:10 (2006)- 3<br />

27. Sami A Aldeeb Abu Sahlieh, Ed. Eleanor Cashin Ritaine, Elodie Arnaud, ,<br />

Institut Suisse de Droit comparé, Genève, 2007<br />

Les régimes matrimoniaux en droits arabe et musulman- cas de l’egypte<br />

et du Maroc, E-SDC, N¤8,<br />

Rapports entre droit et religion dans le monde arabo-musulman-<br />

Influence du droit musulman en Suisse, E-SDC N¤6.<br />

28. SARAH, R, Le mariage et la famille chrétienne en contexte culturel africain, édition<br />

IMC, Conakry, 1989<br />

29. SOW, F, « Penser les femmes et l’islam en Afrique : une approche féministe »,<br />

contribution à Mama Africa. Mélanges <strong>of</strong>ferts à Catherine Coquery-Vidrovitch. 2005,<br />

Paris, L’Harmattan.<br />

30. Suliman Ibn Abdal Rahman Al Hukail, les droits de l’homme en islam et la réfutation<br />

des préjugés soulevés contre l’islam, Dar Ashbilia <strong>for</strong> Pu <strong>and</strong> Dist, Riyad, 1999<br />

31. Tamanaha, Brian T, « A <strong>Non</strong>-Essentialist Concept <strong>of</strong> Legal Pluralism," 27<br />

Journal <strong>of</strong> Law <strong>and</strong> Society 296, 2000<br />

32. Weilenmann, M, (sous la direction de Penal Re<strong>for</strong>m International et la Bluhm legal<br />

clinic), « L’accès à la justice en Afrique et au-delà », Le pluralisme juridique : un<br />

nouveau défi pour les agences au développement, PRI, 2007, 95-102.<br />

33. Winter, G (sous la direction), ¨« Inégalités et politiques publiques en Afrique: Pluralités<br />

et jeux d’acteurs, eds Karthala et IRD, 2001,<br />

CHAUVEAU, JP, LE PAPE, M, OLIVIER DE SARDAN, JP, La<br />

pluralité des normes et leurs dynamiques en Afrique : Implications pour les politiques<br />

publiques, PP : 145-161,<br />

LUND, C, Les ré<strong>for</strong>mes foncières dans un contexte de pluralisme<br />

juridique et institutionnel: Burkina Faso et Niger, PP : 181-193,


RAPPORTS, COMMUNICATIONS ET THESES<br />

34. BANQUE MONDIALE / A C D I (sous la direction de Marie Yvonne Curtis),,<br />

Evaluation de la situation du genre en Guinée, Rapport de Synthèse, République de<br />

Guinée, Mars 2004,<br />

35. BERETE, Oumou, Egalite de chance et de traitement en faveur des femmes,<br />

module de <strong>for</strong>mation, Rapport, Ministère des Affaires sociales, de la Promotion<br />

Féminine et de l’Enfance, aout 2000<br />

36. CEDAW/C/GIN/1, Ministère des Affaires sociales, de la promotion féminine et de<br />

l’enfance de la Guinée, Rapport Initial sur la convention sur l’élimination de toutes les<br />

<strong>for</strong>mes de discrimination à l’égard des femmes présenté aux Nations Unies, 2000.<br />

37. CEDAW/C/GIN/Q/6/Add.1, Ministère des Affaires sociales, de la promotion féminine<br />

et de l’enfance de la Guinée, Réponse aux questions suscitées par l’examen du rapport<br />

unique valant quatrième, cinquième et sixième rapport périodiques de la Guinée relative<br />

à la CEDAW présenté aux Nations Unies, 2007<br />

38. DAWN Africa Region Training <strong>Institute</strong>, Juin 2006, Ghana<br />

39. DIAKITE, B, Facteurs socio ulturels et crétaion d’entreprises en Guinée : Etude<br />

exploratoire des ethnies peule et soussou, thèse Université Laval, Québec, 2004.<br />

40. Diop, Aïda Soumaré, Projet parenté conjointe, ENDA, Dakar, 2001<br />

41. Direction nationale de la Statistique de Guinée et Macro International Inc, Enquête<br />

Démographique et de Santé, Guinée 1999. Mai 2000 Calverton, Maryl<strong>and</strong> USA.<br />

42. LOBBY EUROPEEN DES FEMMES/ EUROPEAN WOMEN’S (LEF/LOBB),<br />

adopte le 27 mai 2006, la religion et les droits humains des femmes<br />

43. Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l’Enfant et l’UNFPA,<br />

Argumentaire islamique sur l’équité de Genre, Initiative Genre, Niamey, décembre<br />

2005<br />

44. SOW, F, « Repenser le développement en Afrique : et si les femmes<br />

comptaient » avec Samir Amin, Mahmood Mamdani, Conférences spéciales de la 10e<br />

Assemblée générale du CODESRIA, 2002, Kampala.<br />

45. UNICEF-Guinée, Exploitation sexuelle des filles Domestiques, Conakry,<br />

septembre 2005<br />

BULLETINS, REVUES ET LOIS<br />

46. A Cura di jean de la Guérivière, Les multiples visages de l’islam noir,<br />

Géopolitique africaine, N.5 – Hiver 2002<br />

47. Confédération internationale des Femmes travailleuses de la CMT, 2001<br />

48. Economie et Humanisme, Dossier égalité entre les femmes-hommes: changer les<br />

rapports sociaux, revue trimestrielle, N¤378, oct. 2006, France<br />

49. FRANCISCO, Gigi, Silence assourdissant sur les droits humains de la femme,<br />

DAWN in<strong>for</strong>me, Development Alternatives with Women <strong>for</strong> a New Area, Bulletin<br />

novembre 2002 : 16-17 ed Thutmes, Sénégal.<br />

50. Loi n. 54-62 DU 14 AVRIL 1962 DE LA République de Guinée<br />

51. Loi N.4-68 du 5 février 1968 de la République de Guinée<br />

52. WILDAF/FEDDAF, Protocole a la charte africaine des droits de l’homme et des<br />

peuples relatifs aux droits de la femme en Afrique, Simplifié, Lomé-Togo, mai 2006<br />

93


Portails de sites internet<br />

http://www.aidh.org/Femme/Comite_FE/39-guinee.htm<br />

http://www.au-senegal.com/art/religion.htm<br />

http://www.fidh.org/article.php3?id_article=2900<br />

http://www.isdc.ch/d2wfiles/document/4603/4017/0/ESDC%202007-6%2015.5.07.pdf<br />

http://www.oasisfle.com/documents/reportage-eleves.htm<br />

http://www.philonet.fr/auteurs/Durkheim.html<br />

http://www.rfo.fr/article155.html<br />

http://www.vatican.va/archive/FRA0037/__P3S.HTM<br />

http://www:actu-presse.com<br />

www.theses.ulaval.ca/2004/21491/21491.pdf<br />

PERSONNES RENCONTREES entre mai 2007– octobre 2007<br />

Chancelier de l’église Catholique et Curé de l’Eglise de Saint Joseph ouvrier Conakry.<br />

Imam de la mosquée de Teminetaye. Commune de Kaloum , Ville de Conakry ,<br />

République de Guinée.<br />

Maitre Hamidou Barry, Avocat á la cour, enseignant á la faculté de droit et sciences<br />

juridiques de l’Université de Sonfonia,<br />

Communauté Guerzé<br />

District de Zogbéta, Sous préfecture de Palé Préfecture de N’Zérékoré<br />

(1 Chef coutumier, Une femme stérile, Une femme veuve, Une femme ménopausée)<br />

Communauté Kissie.<br />

sous préfecture de Koudou, Préfecture de Gueckédou<br />

( 1 Chef coutumier, Une femme stérile, Une femme veuve, Une femme ménopausée)<br />

Communauté Malinké<br />

Sous péfecture de Koumba, Préfecture de Kankan<br />

( Un Chef coutumier, Une femme stérile, Une femme veuve et Une femme<br />

ménopausée)<br />

Communauté Peulh.<br />

sous préfecture de Sannou, Préfecture de Labé<br />

(Un Chef coutumier, Une femme stérile, Une femme veuve et Une femme ménopausée)<br />

Communauté Toma<br />

Sous préfecture de Wolemaï, Préfecture de Macenta<br />

(Un Chef coutumier, Une femme stérile, Une femme veuve, Une femme ménopausée


ISBN 87-91836-23-9<br />

EAN 9788791836237

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