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La reconduction du bail, en cas de congé pour vente (loi<br />
de 1989), va donc s'ajouter à la prorogation du bail, sans<br />
que l'une absorbe l'autre. C'est donc à une application<br />
cumulative des délais qu'appellent l'accord de 2005 et la<br />
loi de 2006.<br />
2.3 Protection des locataires<br />
en cas de vente d'un<br />
immeuble entier (art.<br />
10.1. de la loi du 31<br />
décembre 1975)<br />
La loi Aurillac modifie de façon substantielle le régime<br />
juridique et fiscal de la vente d'un entier immeuble d'habitation<br />
: le vendeur doit en effet, préalablement à la<br />
vente, offrir à chaque locataire d'acquérir son logement,<br />
à moins que l'acquéreur de l'entier immeuble s'engage à<br />
proroger les baux en cours.<br />
Ce nouveau droit de préemption des locataires contredit<br />
au moins à deux égards l'organisation juridique préexistante<br />
: là où la vente d'un bâtiment entier fait<br />
exception à l'exercice du droit de préemption institué<br />
par l'article 10 de la loi du 31 décembre 1975, le nouveau<br />
droit y fonde sa condition d'exercice ; là où l'existence<br />
de dix logements mis en vente entraîne<br />
l'obligation d'assurer aux locataires information, délai et<br />
protection, par le jeu de l'accord collectif de location du<br />
9 juin 1998, retardant d'autant l'exercice du droit de<br />
préemption du locataire, le nouveau droit doit être mis<br />
en œuvre immédiatement et sans autre prévention.<br />
Cette observation liminaire, qui caractérise désormais<br />
la complexité et la relative incohérence du système<br />
juridique d'ensemble, doit conduire à examiner le nouveau<br />
droit de préemption des locataires comme figurant<br />
un troisième régime juridique, singulier, autonome<br />
et indépendant des deux autres droits de préemption<br />
avec lesquels dorénavant il faudra toutefois qu'il coexiste.<br />
2.3.1 Conditions d'ouverture du droit<br />
du locataire :<br />
Le nouveau droit suppose l'existence d'une vente (1),<br />
ou d'une cession de parts d'une société d'attribution<br />
(2), ayant pour objet un immeuble à usage d'habitation<br />
ou mixte (3) de plus de dix logements (4), qui s'opère<br />
dans sa totalité et en une seule fois (5), sauf au profit de<br />
certains acquéreurs ou cessionnaires (6).<br />
22<br />
(1) C'est à l'occasion de la vente projetée par le propriétaire<br />
que naît le droit du locataire à une protection<br />
particulière.<br />
La vente ne s'assimile pas à toutes cessions à titre onéreux<br />
et ne se confond par exemple ni avec l'échange, ni<br />
avec l'apport à société : en contrepartie d'une vente, le<br />
vendeur perçoit un prix ; en contrepartie d'un échange,<br />
l'échangiste reçoit un bien ; en contrepartie d'un<br />
apport, l'apporteur reçoit des titres de la société bénéficiaire<br />
de l'apport.<br />
Seules les ventes sont donc concernées, sauf bien<br />
entendu en cas de fraude à la loi : si l'apporteur à<br />
société devait en effet céder les titres reçus en contrepartie<br />
de l'apport, un instant de raison après celui-ci, il<br />
pourrait être démontré que l'apporteur est dénué d'affectio<br />
societatis et que la seule finalité de l'opération<br />
est de contourner la loi, ce qui justifierait la requalification<br />
de l'opération.<br />
Se pose aussi la question de savoir si les ventes par<br />
adjudication, judiciaire ou amiable, sont concernées au<br />
même titre que les ventes de gré à gré. L'article 10 de la<br />
loi du 31 décembre 1975 avait justement déclaré l'ancien<br />
droit de préemption du locataire applicable à ces ventes,<br />
mais organisé un régime dérogatoire d'application, que<br />
justifie le particularisme de l'adjudication publique.<br />
Le silence de la loi nouvelle oblige à considérer que la<br />
nouvelle protection des locataires joue indistinctement,<br />
que la vente soit volontaire et forcée. Mais l'absence de<br />
régime dérogatoire oblige à ce que le cahier des charges<br />
de l'adjudication impose aux futurs enchérisseurs<br />
de proroger les baux en cours, s'ils deviennent adjudicataires,<br />
car le mécanisme du nouveau droit de préemption<br />
est, à défaut d'adaptation légale, incompatible avec<br />
celui des enchères publiques.<br />
La loi ne distingue pas enfin suivant l'auteur de la vente :<br />
une personne physique est concernée autant qu'une<br />
personne morale, une personne publique autant qu'une<br />
personne privée.<br />
(2) La loi nouvelle assimile à la vente la cession de la<br />
totalité des parts d'une société d'attribution, c'est-àdire<br />
donnant aux <strong>associés</strong> vocation à l'attribution, en<br />
propriété ou en jouissance, d'une partie déterminée de<br />
l'immeuble social.<br />
On sait que ces sociétés régies par les lois du 28 juin<br />
1938 et du 4 janvier 1978 ont permis le développement<br />
de la construction d'immeubles collectifs. Beaucoup ont<br />
été dissoutes et transformées en copropriétés, mais<br />
bon nombre subsistent : il est raisonnable d'assimiler<br />
la cession de la totalité de leurs parts à une vente de