SOUS L\'HORIZON.pdf - FRAC Basse-Normandie
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le fonds régional d’art contemporain basse-normandie<br />
service éducatif<br />
dossier pédagogique<br />
Marcel DINAHET, Paysage frotté, 2001, Vidéo, DVD, 3’50 en boucle, Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />
sous l’horizon des mers<br />
réseau des espaces d’art actuel en collège et lycée / 2013<br />
9 RUE VAUBENARD 14000 CAEN 02 31 93 09 00 www.frac-bn.org
sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Le Frac <strong>Basse</strong>-NormaNdie<br />
Une histoire de l’art au présent<br />
C’est bien en ces termes paradoxaux que peut se nommer l’action des Frac. Dès 1983, le parti a été pris de<br />
réunir des œuvres qui n’avaient a priori que leur seule contemporanéité à faire valoir, afin de constituer un<br />
patrimoine, trésor régional au risque du présent.<br />
La collection du Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> fait état aujourd’hui de plus de 900 œuvres de près de 400 artistes.<br />
En évolution permanente, la collection trouve sa cohérence dans des lignes de force qui vont de la peinture<br />
abstraite à un ensemble photographique qui s’approprie le paysage, le portrait, le corps et dont une large<br />
part fait écho à la construction d’une image en relation à l’architecture. Plus récemment, c’est la place<br />
de l’humain dans la société contemporaine (systèmes urbains, so-ciaux et informatifs) qui est questionnée<br />
dans des œuvres aux médiums diversifiés (photographie, sculpture, vidéo, installation). Enfin une section est<br />
consacrée aux œuvres en rapport à l’Histoire contemporaine.<br />
Une collection en mouvement<br />
D’abord conçue comme un ensemble d’œuvres disponibles pour des expositions sur le territoire régional<br />
dans les différents lieux susceptibles de les accueillir (musées, centres, d’art, centres culturels, sites historiques),<br />
le Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> bénéficie depuis 1996 d’espaces d’expositions propres. L’activité d’expositions<br />
se répartit donc selon ces deux axes : l’un de diffusion de la collection sur le territoire régional,<br />
l’autre d’expositions au Frac dans lesquelles sont invités des artistes contemporains dans des expositions<br />
monographiques ou thématiques. Il est en effet essentiel au Frac d’être en contact direct avec la création<br />
contemporaine, échanges fructueux dans le flux vivant de l’actualité de l’art.<br />
La rencontre<br />
Outre cette rencontre permanente par l’exposition, c’est à une éducation du regard et à la sensibi-lisation<br />
des publics que le Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> consacre une large part de son activité. Les ser-vices culturels et<br />
éducatifs mettent en place ces formations dans le cadre de nombreux échanges et collaborations qui vont<br />
de l’école primaire à l’université. Au public adulte, il est proposé des rencontres avec des artistes, des conférences<br />
ou encore des soirées vidéo.<br />
Le Frac propose en accès libre un important fonds documentaire, monographies d’artistes contemporains,<br />
ouvrages généraux et revues. La banque de données Vidéomuseum qui répertorie l’ensemble des collections<br />
des Frac et des principaux musées d’art contemporain français y est consultable.<br />
La collection du Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> est consultable en ligne : www.frac-bn.org/collection.htm<br />
Contact : Mathilde Johan, Chargée des publics 02 31 93 92 41 mathilde.johan@frac-bn.org
sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Les œuvres de Véronique Joumard et de<br />
Marcel Dinahet sont des paysages de mer à<br />
perte d’horizon. Invitant à la contemplation, ils<br />
assument leur lignée dans l’histoire d’un genre<br />
devenu un classique. Mais leur apparente<br />
simplicité cachent peut-être des enjeux autres ;<br />
ceux de la perception de l’espace, de la relation<br />
du corps au paysage, ceux aussi des modes de<br />
représentation propre à la photographie et à la<br />
vidéo.<br />
Ainsi Travelling de Véronique Joumard estil<br />
la double vue d’un paysage méditerranéen<br />
depuis un bâtiment inachevé. Se donnant dans<br />
sa totalité sans rien cacher de son objet, ce<br />
diptyque devient, après un examen approfondi,<br />
un jeu complexe de cadres dans le cadre et de<br />
perspectives contrariées. C’est la cohérence<br />
ressentie dans un premier temps face à l’image<br />
qui devient alors une énigme.<br />
Marcel Dinahet explore, lui, la baie du Mont<br />
Saint Michel : « les lumières, l’éloignement de<br />
l’horizon, les reflets qui se répercutent dans les<br />
nuages, les colorations y sont très particulières.<br />
L’espace vous enveloppe. », dit l’artiste de ce<br />
paysage maintes fois parcouru. La vidéo Sur<br />
la baie est une marche vers un l’horizon qui<br />
semble impossible à atteindre et où « sol, ciel<br />
se mélangent. Paysage frotté accentue les<br />
mélanges colorés et la sensation de perte de<br />
repères que l’on a dans la baie à marée basse. »<br />
L’expérience physique du paysage par l’artiste,<br />
l’utilisation de la vidéo comme extension<br />
de son corps, lui permettent de révéler les<br />
particularités matérielles et sensorielles du<br />
lieu.<br />
* Le Bateau Ivre, Arthur Rimbaud, 1871
sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Marcel DINAHET<br />
Né en 1943 à Morlaix, vit et travaille à Rennes<br />
Paysage frotté, 2001,<br />
Vidéo, DVD, 3 mn 50 en boucle<br />
Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />
Dans « Périples » ouvrage consacré à Marcel<br />
Dinahet, le critique Jean-Marc Huitorel<br />
résume ainsi le parcours de l’artiste :<br />
«Ce que Marcel Dinahet interroge, plus<br />
que la nature, c’est la notion de limite et<br />
de frontière, l’idée d’espace et de jonction,<br />
la butée, les interfaces. Plus précisément<br />
encore, la limite que Dinahet teste et<br />
expérimente, c’est le contour même de<br />
cela qu’on appelle l’art. Le territoire de<br />
l’artiste est moins un espace naturel en soi<br />
que l’espace naturel comme métaphore du<br />
champ qui est le sien, celui de l’art. »<br />
A propos des quatre vidéos réalisées dans<br />
Sur la baie, 2001<br />
Vidéo DVD 1 mn 37 en boucle intégré<br />
Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />
et sur la Baie du Mont-Saint-Michel, Marcel<br />
Dinahet donne les raisons de sa prédilection<br />
pour ce site :<br />
« La baie est un des espaces du littoral<br />
que je visite le plus avec le Cap Fréhel.<br />
Sur cet espace on enregistre les plus forts<br />
coefficients de marée d’Europe. Les variations<br />
lumineuses, visuelles y sont en mouvements<br />
permanents. Les perceptions d’espace sont<br />
d’une exceptionnelle amplitude. Où que l’on<br />
se situe le Mont est présent. Depuis quelques<br />
années je vais régulièrement de Cancale à<br />
Granville en passant par Chérrueix, le Mont-<br />
Saint-Michel et les îles Chausey.»
sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Véronique JOUMARD<br />
Née en 1964 à Grenoble, vit et travaille à Paris<br />
Travelling, 2003, photographies couleur,<br />
115 x 190 cm chaque,<br />
Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />
Véronique Joumard place la notion d’expérimentation au centre de son œuvre. Elle<br />
engage physiquement le spectateur parfois par sa simple présence, parfois par une<br />
action.<br />
Travelling (2003) est une double vue d’un paysage méditerranéen à partir d’un<br />
intérieur à l’identité incertaine, bâtiment inachevé en construction ou à l’abandon.<br />
Le cadrage serré entre les piliers de l’architecture perturbe la lecture de l’espace<br />
photographié, privant l’œil de tout point de fuite.<br />
«L’art de Véronique Joumard s’ouvre (ainsi) à une tendance profonde, celle qui<br />
voit l’œuvre douter de la légitimité qui serait la sienne à s’instaurer en objet de<br />
contemplation et qui donc (...) transforme celui-ci en appareil - en appareil à<br />
regarder ce qui n’est pas elle. Témoins de cette révolution copernicienne, avec<br />
laquelle l’œuvre se présente non plus comme le foyer du regard, mais comme le lieu<br />
d’un point de vue sur ce qui, autour d’elle, n’est pas œuvre d’art (...). L’art accomplit<br />
littéralement, une révolution ; il cesse d’être uniquement l’objet du spectacle, ce<br />
point focal offert à l’œil du public, pour devenir aussi l’observatoire d’un espace (...)<br />
Je regarde depuis cela même qui devait être l’objet de mon regard, l’œuvre.»<br />
1(Michel Gauthier : Blind test. Les lumières de Véronique Joumard, in Véronique Joumard, Les presses du réel, Dijon, 2010)
sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Quelques références<br />
La mer<br />
La mer est un thème récurrent de la peinture occidentale. Elle a évolué au cours de l’histoire en même temps que se<br />
transformait la relation entre les hommes et l’océan. Si la «marine» a vu le jour au Pays-Bas du XVIIème siècle, le thème<br />
du paysage marin est réinvesti au XIXème par les futurs impressionnistes. Courbet observe une mer tourmentée,<br />
inquiétante encore emplie d’angoisse romantique, la mer est toujours un élément incontrôlable et un lieu dangereux.<br />
Monet, quant à lui fasciné par la mer, appartient déjà à un siècle qui apprivoise et analyse, étudie ses mouvements et<br />
variations lumineuses. Dans tous les cas la mer est tout à la fois l’immatériel et l’infini.<br />
Gustave Courbet (1819-1877)<br />
La mer orageuse dit aussi La vague, 1870<br />
Huile sur toile, 117 x 160,5 cm<br />
Collection Musée d’Orsay<br />
© RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski<br />
Éprouver le paysage ou le «sentiment océanique»<br />
Les deux vidéos Paysage frotté et Sur la baie de Marcel Dinahet créent un sentiment d’immersion dans le paysage.<br />
Le paysage Travelling de Véronique Joumard est à l’inverse marqué par une séparation, le bâtiment qui instaure une<br />
distance entre le spectateur et la mer qu’il contemple.<br />
La relation entre l’artiste et la nature n’est-elle pas toujours dans cette relation ambivalente de fusion et de séparation ?<br />
«On retrouve, au cœur de la relation entre art et nature, l’expérience existentielle fondamentale d’une oscillation constante entre la<br />
rêverie fusionnelle et la conscience de séparation. Sentiments contradictoires qui, on le sait, traversent aussi la littérature. «Ne faire<br />
qu’un avec toutes choses vivantes, retourner par un radieux oubli de soi dans le Tout de la Nature...» écrivait Hölderlin pour revenir<br />
ensuite, dans un mouvement de lucidité douloureuse, au constat de la séparation : «... j’ai parfaitement appris à me distinguer de<br />
ce qui m’entoure : et me voilà isolé dans la beauté du monde...». N’est-ce pas le désir de fusion qui habite Monet, quand il donne<br />
à certains de ses grands Nymphéas ce mouvement centrifuge qui dilate la peinture à l’intérieur de son cadre, ou encore lorsque, à<br />
l’Orangerie, tout près de la mort, il semble tendre vers l’unique, l’impossible tableau sans bord où s’engloutir - et peinture et nature,<br />
là, se superposent et se confondent ? Et c’est peut-être à l’inverse l’exclusion, le fait que toute forme de «sentiment océanique» nous<br />
soit désormais interdit, que vient signifier la mince barrière d’eau qui occupe le tout premier plan de bon ombre des toiles de Poussin,<br />
repoussant le paysage arcadien, inéluctablement, sur l’autre rive.»<br />
Colette Garraud, L’idée de nature dans l’art contemporain, édition Flammarion et CNAP, collection La Création contemporaine, Paris, 1994.
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sous l’horizon des mers<br />
Marcel Dinahet et Véronique Joumard<br />
Quelques pistes<br />
Référence à la peinture et au cinéma : Le titre Travelling de Véronique Joumard fait directement référence au<br />
cinéma mais la déconstruction de l’espace et le genre du paysage rappellent les expériences de la peinture.<br />
Ce sont les couleurs, lumières et particularités plastiques de la baie du Mont-Saint-Michel que Marcel Dinahet<br />
cherche à rendre compte comme les peintres avant lui.<br />
Première arts plastiques : Figuration et construction<br />
Terminale arts plastiques : Œuvre, filiation et ruptures<br />
2nde cinéma-audiovisuel : Le plan<br />
Le temps figuré : Paysage frotté donne une impression de vitesse (par le mouvement de la caméra), tandis que les<br />
deux images du Travelling induisent un temps entre les deux photographies.<br />
Première arts plastiques : Figuration et temps conjugués<br />
Collège Histoire des arts : «Arts, espace et temps»<br />
La vue démultipliée : Les ouvertures de l’architecture dans Travelling créent des cadres à l’intérieur de l’image<br />
comme autant d’autres paysages possibles. Tandis que les vidéos de Marcel Dinahet tentent une vue globale du<br />
paysage environnant, une vue à 360° dans Paysage frotté ou encore du plus lointain au plus proche dans Sur la<br />
baie.<br />
Expérimenter le paysage : Marcel Dinahet explore physiquement le paysage, les vidéos sont les traces des<br />
mouvements de son corps dans la baie du Mont-Saint-Michel. Le spectateur ressent le vertige de l’artiste face au<br />
paysage.<br />
5ème arts plastiques : réaliser une image de voyage, de marche.<br />
4ème arts plastiques : rendre visible le déplacement et le mouvement<br />
Histoire des arts Lycée : «Arts, corps, expressions»<br />
Perturber la perception de l’espace : Dans Travelling la cohérence des lignes de forces de la composition ne<br />
correspond pas forcement aux lignes réelles des bâtiments et du paysage. Les deux photographies suggèrent deux<br />
points de vues d’un même lieu, un lien entre les deux images difficile à définir avec certitude.<br />
Toutes les lignes de fuite du dyptique emmènent le regard du spectateur à l’extérieur de l’image et non en son<br />
centre comme dans la perspective classique. Dans Paysage frotté de Marcel Dinahet l’horizon chavire, dans Sur la<br />
baie, il se dérobe en permanence.<br />
Première arts plastiques : Figuration et construction.<br />
Terminale arts plastiques : L’espace du sensible.<br />
Collège Histoire des arts : «Arts, espace et temps»<br />
Histoire des arts Lycée : «Arts, réalités, imaginaires»<br />
La mer : Chez Marcel Dinahet la mer est un paysage vécu physiquement, chez Véronique Joumard un paysage à<br />
contempler mais inaccessible, un ailleurs.<br />
5ème arts plastiques : L’eau comme élément aléatoire<br />
Terminale Histoire des arts : Le paysage depuis le milieu du XIXème siècle.