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20<br />

bonnES fEuillES<br />

émi<strong>le</strong> allais<br />

<strong>le</strong> grand livre rouge<br />

au cœur des années 20, <strong>le</strong>s parents d’émi<strong>le</strong><br />

décident de changer de métier. Fini la boulangerie et <strong>le</strong><br />

bûcheronnage. Le coup<strong>le</strong> construit son hôtel, <strong>le</strong> Beau Site, à deux<br />

pas du palace du Mont d’Arbois. Un hôtel plus accessib<strong>le</strong>, pour<br />

une clientè<strong>le</strong> familia<strong>le</strong>, moins fortunée : “Une bonne idée !”. Émi<strong>le</strong><br />

est désormais au cœur de l’évolution touristique de son village.<br />

Une aubaine. « J’ai tout de suite cherché à me faire engager<br />

comme “porteur” des caravanes que je voyais passer. Ce qui a<br />

été très vite fait auprès de mon onc<strong>le</strong> Hilaire ! »<br />

Dès 1925, au rythme de sept à huit heures de ski par jour, il est un<br />

porteur zélé dans <strong>le</strong> sillage de son tonton, accompagnateur très<br />

prisé. Émi<strong>le</strong> fait tranquil<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> p<strong>le</strong>in de musc<strong>le</strong>s, de globu<strong>le</strong>s<br />

et d’expérience. Le ski est pour lui une porte ouverte sur un<br />

autre monde : « Il y avait par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> comte Montefiore qui<br />

se déplaçait beaucoup. On allait de Megève aux Contamines,<br />

à Hauteluce, Notre-Dame-de-Bel<strong>le</strong>combe, à Chamonix même.<br />

Pour moi, la vraie technique de mes débuts, c’était ces balades<br />

dans la montagne vierge et l’acrobatie sur <strong>le</strong>s skis, sauts péril<strong>le</strong>ux,<br />

sauts sur <strong>le</strong>s bâtons. C’était merveil<strong>le</strong>ux ! »<br />

De retour à l’hôtel familial, Émi<strong>le</strong> Allais a tout loisir de lorgner sur <strong>le</strong><br />

palace voisin, <strong>le</strong> magnifique Hôtel du Mont d’Arbois de la Baronne<br />

Noémie de Rotschild, qu’il a la chance parfois d’accompagner<br />

dans ses randonnées. Il y observe d’élégants skieurs aux pulls<br />

rouges qui distil<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>ur savoir, <strong>le</strong> sourire entendu et la raie sur <strong>le</strong><br />

côté, impeccab<strong>le</strong>. Pour initier <strong>le</strong>ur riche clientè<strong>le</strong> aux joies du ski,<br />

la baronne, et son “responsab<strong>le</strong> des sports”, l’élégant Monsieur<br />

Parodi, ont en effet fait appel à des moniteurs autrichiens, formés<br />

par Hannes Schneider, l’inventeur de l’enseignement du ski, et du<br />

mythique stem-boggen, <strong>le</strong> virage à la mode !<br />

Parmi ces moniteurs mondains, un skieur de bel<strong>le</strong> stature, à la<br />

technique sophistiquée, un certain Otto Lantschner, Tyrolien<br />

pur sucre, moniteur formé à l’éco<strong>le</strong> de Hannes Schneider. Très<br />

impressionné par cet Otto de course, qui descend dans un sty<strong>le</strong><br />

impeccab<strong>le</strong> <strong>le</strong>s pentes du Mont d’Arbois, <strong>le</strong> jeune Émi<strong>le</strong> ne <strong>le</strong><br />

quitte pas des yeux et <strong>le</strong> suit à la trace. Intrigué par ce gamin<br />

qui ne lui lâche pas <strong>le</strong> knickerbocker et qui se débrouil<strong>le</strong> pas<br />

si mal, <strong>le</strong> moniteur mondain lui lance enfin : « t’as envie que je<br />

t’apprenne ? ». Tu par<strong>le</strong>s si il veut Émi<strong>le</strong> !<br />

I LE NEWS GRATUIT DU SKI DE COMPETITION I NUMERO 02<br />

Par gil<strong>le</strong>s ChaPPaZ<br />

michEl guérin A réuSSi à fAirE DE SA viE unE ExiStEncE DE livrES Et DE cimES. l'un DE SES DErniErS<br />

coupS, AvAnt DE DécéDEr cEt AutomnE DE mAnièrE prémAturéE, AurA été DE fAirE EntrEr émilE AllAiS<br />

Au "pAnthéon" DE lA montAgnE AvAnt quE cElui-ci nE nouS quittE. lES bEAux livrES DES EDitionS guérin<br />

étAiEnt "rougES, commE lES chAuSSEttES Et lES pullS portéS pAr lES montAgnArDS DE l'EnfAncE" DE<br />

michEl. cEttE foiS, cE SErA rougE commE lES tEnuES DES monitEurS, Dont AllAiS A rEçu lA prEmièrE<br />

méDAillE DES DiplôméS. prEmiEr tricolorE méDAillé olympiquE, prEmiEr chAmpion Du monDE frAnçAiS,<br />

émilE DE mEgèvE ESt AujourD'hui lE prEmiEr SKiEur à Avoir "Son" livrE rougE, écrit pAr gillES chAppAz<br />

biEn Sûr.<br />

pour se procurer la légende d’Emi<strong>le</strong><br />

www.editionsguerin.com<br />

tour à tour hockeyeur,<br />

cycliste, gymnaste, ou<br />

perchiste, Emi<strong>le</strong> est<br />

décidément un brillant<br />

touche-à-tout.<br />

Dès lors, Otto Lantschner va <strong>le</strong> prendre sous son ai<strong>le</strong> et lui<br />

inculquer ses secrets de la glisse.<br />

Émi<strong>le</strong>, esprit curieux et perfectionniste dans l’âme, ouvre grand<br />

ses oreil<strong>le</strong>s, observe à tout-va, se nourrit de la science de son<br />

premier maître, et, s’en rend-il seu<strong>le</strong>ment compte, « rationalise »<br />

son approche du sport. Rien ne doit jamais être laissé au hasard,<br />

dans quelque domaine que ce soit.<br />

Est-ce par simp<strong>le</strong> goût du jeu, par besoin vital de se dépenser, par<br />

envie de se dépasser toujours, ou est-ce déjà par intuition inspirée<br />

et anticipation calculée ? -al<strong>le</strong>z savoir avec un tel gaillard-, toujours<br />

est-il qu’il comprend avant tout <strong>le</strong> monde <strong>le</strong> profit à tirer d’une<br />

condition physique et d’une gestuel<strong>le</strong> impeccab<strong>le</strong>s. Et lorsque,<br />

à la demande du club de ski, débarque à Megève un moniteur<br />

d’éducation physique, <strong>le</strong> jeune Allais suit son enseignement avec<br />

un enthousiasme gourmand, <strong>le</strong> même enthousiasme avec <strong>le</strong>quel il<br />

a emprunté <strong>le</strong>s traces de son onc<strong>le</strong> Hilaire et d’Otto l’Autrichien.<br />

Le type instal<strong>le</strong> des barres parallè<strong>le</strong>s, un cheval d’arçon et une<br />

barre fixe, transforme un coin de la plaine de Megève en petit<br />

stade d’altitude, apprend aux gamins un peu gauches l’art du<br />

mouvement juste. Émi<strong>le</strong> est évidemment <strong>le</strong> plus assidu. Il en<br />

fait plus qu’à son tour. Et râ<strong>le</strong> même parce que ces installations<br />

sommaires sont en p<strong>le</strong>in air : « Quand il p<strong>le</strong>uvait, on couvrait tout<br />

ça, ça m’a toujours peiné qu’on n’ait pas un abri, c’était dommage.<br />

Vraiment dommage ! » Émi<strong>le</strong> va même s’essayer, avec succès, au<br />

saut à la perche. « Avec des trucs en bois au début, et comme<br />

je sautais pas mal, j’ai fini avec une perche en bambou qui pliait<br />

un peu. » Et avec cette perche qu’il sait faire plier avec justesse,<br />

il passe des barres de plus en plus é<strong>le</strong>vées. Des hauteurs dignes<br />

des spécialistes aguerris.<br />

Tour à tour hockeyeur, cycliste, gymnaste, ou perchiste, Émi<strong>le</strong> est<br />

décidément un brillant touche-à-tout. « J’avais <strong>le</strong> sport dans <strong>le</strong><br />

sang » reconnaît-il dans un fier sourire. Le sport et la bougeotte.<br />

Toujours en mouvement, il n’en manque pas une lorsqu’il s’agit de<br />

faire valoir ses dispositions naturel<strong>le</strong>s. Il n’est pas rare par exemp<strong>le</strong><br />

de <strong>le</strong> voir en opposition grimper entre <strong>le</strong>s deux maisons voisines<br />

ou monter sur <strong>le</strong>s toits boucher <strong>le</strong>s cheminées et faire croire aux<br />

occupants qu’el<strong>le</strong>s tirent mal ! Galopin avec ça !<br />

Et lorsqu’un jour de fête au village, il s’agit d’al<strong>le</strong>r chercher au<br />

sommet d’un mât de cocagne passé au savon noir des jambons<br />

et des boîtes de biscuit, qui est <strong>le</strong> seul à réussir à décrocher <strong>le</strong><br />

gros lot ? Émi<strong>le</strong>, bien sûr, qui sacrifie à l’occasion sa culotte du<br />

dimanche toute neuve portée pour <strong>le</strong>s vêpres. La tail<strong>le</strong> du jambon,<br />

la qualité des produits ramenés et <strong>le</strong> calibre de sa démonstration<br />

l’exonéreront heureusement des réprimandes maternel<strong>le</strong>s…<br />

Mais, voyez comme <strong>le</strong>s choses sont bien faites, c’est fina<strong>le</strong>ment<br />

sur <strong>le</strong>s pistes, skis aux pieds, qu’Émi<strong>le</strong> va démontrer l’excel<strong>le</strong>nce<br />

de ses chromosomes montagnards et la va<strong>le</strong>ur intrinsèque de ses<br />

gènes athlétiques. Ce qui l’a conquis en premier dans ce sport<br />

balbutiant ? « Je crois que c’est <strong>le</strong> fait de la vitesse. Oui, même si<br />

on n’allait pas très vite, j’aimais la sensation de vitesse que procure<br />

la glisse. La vitesse et aussi un certain sentiment de liberté. »

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