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Patrick Rayou, Gérard Sensevy

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« procéduraux » qui devraient peut-être suffire à des élèves<br />

relativement autonomes, elle tente de restaurer les savoirs sur le vivant<br />

nécessaires à la réalisation de l’exercice, mais avec une maîtrise<br />

didactique insuffisante du sujet. Elle se replie alors sur ce qu’elle sait<br />

probablement le mieux faire en fonction de sa propre trajectoire<br />

professionnelle 9 : établir un lien personnel avec Safia, lui donner des<br />

raisons de rester dans le jeu scolaire malgré des difficultés évidentes<br />

d’apprentissage. Ce faisant, elle privilégie la dimension<br />

« horizontale » de proximité avec elle, au détriment de celle,<br />

« verticale » (Bernstein, 2007/1996), que constituent les savoirs<br />

scolaires en donnant à Safia, le gain d’une partie qui n’a pas été<br />

vraiment jouée.<br />

Safia, quant à elle, on l’a vu, ne prend pas à sa charge le problème qui<br />

lui est soumis, se contente de donner tous les signes de bonne volonté<br />

attendus d’un élève lors des passages de Claire. Elle attend<br />

visiblement de cette interaction une aide dont elle retient sans doute<br />

moins l’aspect épistémique que la caution que peut apporter une<br />

adulte de sa présence à l’aide aux devoirs et de l’effectuation du<br />

travail. L’attitude de Safia est vraisemblablement assez représentative<br />

de celle des élèves qui fréquentent avec une certaine assiduité les<br />

aides aux devoirs mais dont le faible engagement ne permet pas de<br />

prendre en compte les enjeux des apprentissages.<br />

Elle-même et Claire passent une sorte de compromis par lequel<br />

chacune permet à l'autre de se mettre en règle vis-à-vis des exigences<br />

les plus immédiatement visibles de l'institution.<br />

Finalement, ainsi, entre Claire et Safia, il y a bien action conjointe,<br />

mais la fin première de cette action est sociale plutôt qu’épistémique.<br />

Ce phénomène nous semble renvoyer à ce que Rilhac (2008) nomme<br />

« altération didactique ». Il y a toujours un jeu commun et coopératif,<br />

au sens où l’action de l’un des joueurs ne peut s’exercer sans le<br />

concours de l’autre, mais la fin de l’action commune ne réside plus,<br />

comme au sein du jeu didactique en son ontologie première, dans le<br />

fait que l’élève apprenne. La fin de l’action commune consiste à<br />

continuer une sorte de simulacre de jeu didactique, où le professeur<br />

n’enseigne pas (vraiment), l’élève n’apprend pas (vraiment), mais où<br />

tous deux peuvent (se) donner communément donner l’illusion<br />

d’apprendre et d’enseigner.<br />

2. UNE VARIATION IMAGINAIRE<br />

9<br />

Elle a un DUT d'Arts du spectacle et veut devenir conseillère principale d'éducation<br />

18

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