Mécano-sensibilité cellulaire : adaptation physique à la rigidité
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Bio<strong>physique</strong><br />
générateurs de force <strong>à</strong> <strong>la</strong> charge. Ce mécanisme d’<strong>adaptation</strong><br />
<strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>rigidité</strong> est par nature très différent des modèles<br />
qui impliquent une régu<strong>la</strong>tion de <strong>la</strong> contractilité <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong><br />
via des cascades biochimiques (encadré 1). Une différence<br />
notable entre ces deux processus réside dans le temps<br />
caractéristique de réponse. Une réponse de type purement<br />
mécanique, comme dans le cas d’une <strong>adaptation</strong><br />
d’impédance, doit être quasi-instantanée. En revanche,<br />
des boucles de régu<strong>la</strong>tion chimique déclenchées au niveau<br />
local des adhésions, amplifiées et coordonnées <strong>à</strong> l’échelle<br />
de <strong>la</strong> cellule dans son ensemble, exigeraient au minimum<br />
quelques secondes. C’est ainsi que nous avons cherché <strong>à</strong><br />
révéler <strong>la</strong> cinétique de réponse de <strong>la</strong> cellule <strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>rigidité</strong>,<br />
mais ce<strong>la</strong> exigeait au préa<strong>la</strong>ble de mettre au point un procédé<br />
permettant de changer, en temps réel, <strong>la</strong> <strong>rigidité</strong> perçue<br />
par une cellule vivante.<br />
a<br />
Force (nN)<br />
400<br />
300<br />
200<br />
100<br />
0<br />
0 200 400 600 800 1000<br />
90<br />
5<br />
1200<br />
Raideur effective (nN/µm)<br />
Raideur effective et réponse<br />
instantanée <strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>rigidité</strong><br />
Lorsqu’une cellule se contracte entre les micro<strong>la</strong>melles<br />
de notre appareil <strong>à</strong> force, <strong>la</strong> déformation <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong><br />
et <strong>la</strong> déformation de <strong>la</strong> <strong>la</strong>melle-ressort sont égales<br />
(figure 1). La re<strong>la</strong>tion force-déformation est donc imposée<br />
par <strong>la</strong> micro-<strong>la</strong>melle dont <strong>la</strong> raideur contrôle ainsi le point<br />
de fonctionnement de <strong>la</strong> machinerie contractile de <strong>la</strong> cellule.<br />
Pour nous affranchir de <strong>la</strong> raideur <strong>physique</strong> de <strong>la</strong><br />
<strong>la</strong>melle-ressort, nous avons développé un système de<br />
double rétroaction qui nous permet de contrôler indépendamment<br />
déformation <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong> et déformation de <strong>la</strong><br />
<strong>la</strong>melle-ressort (encadré 2). Nous pouvons ainsi imposer, <strong>à</strong><br />
loisir et en temps réel, une re<strong>la</strong>tion force-déformation<br />
arbitraire correspondant <strong>à</strong> une raideur effective comprise<br />
entre zéro et l’infini.<br />
Nous avons ainsi pu mesurer <strong>la</strong> force de traction générée<br />
par une cellule isolée soumise <strong>à</strong> des changements soudains<br />
et importants de <strong>la</strong> raideur effective, alternant par<br />
exemple entre 5 et 90 nN/μm (figure 4a). <strong>à</strong> titre de comparaison,<br />
nous avons reporté sur le même graphe les courbes<br />
de traction obtenues avec des ressorts de raideurs équivalentes<br />
aux valeurs de k eff (5 et 90 nN/μm). La première<br />
observation est que <strong>la</strong> pente dF/dt change <strong>à</strong> chaque changement<br />
de raideur effective. De plus, que <strong>la</strong> valeur de <strong>la</strong> raideur<br />
soit simulée ou corresponde <strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>rigidité</strong> vraie d’une<br />
<strong>la</strong>melle-ressort, les pentes observées sont identiques. La<br />
cellule se comporte donc vis-<strong>à</strong>-vis du système <strong>à</strong> raideur<br />
effective comme elle le fait avec de vrais ressorts, adaptant<br />
dF/dt (et donc <strong>la</strong> vitesse de contraction et <strong>la</strong> puissance<br />
mécanique) <strong>à</strong> <strong>la</strong> raideur perçue de son environnement.<br />
Ensuite, il apparaît que le paramètre de contrôle de <strong>la</strong><br />
réponse <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong> est bien <strong>la</strong> raideur et non le niveau de<br />
force cellule-substrat. D’une part, on observe que les changements<br />
de raideur effective (par définition, discontinuité<br />
de k eff ) ont lieu sans discontinuité pour <strong>la</strong> valeur de <strong>la</strong><br />
force F. D’autre part, deux changements identiques de k eff<br />
effectués <strong>à</strong> différentes valeurs de force induisent le même<br />
b<br />
Force (nN)<br />
206<br />
204<br />
202<br />
200<br />
198<br />
196<br />
1010<br />
1015<br />
1020<br />
Temps (s)<br />
1025<br />
1030<br />
Figure 4 – (a) évolution de <strong>la</strong> force de traction (bleu) lors d’une expérience<br />
où <strong>la</strong> raideur effective (rouge) est commutée de 5 <strong>à</strong> 90 nN/μm et vice<br />
versa. Les points en noir servent de références ; ils correspondent aux<br />
résultats obtenus avec des <strong>la</strong>melles-ressorts de raideurs équivalentes<br />
aux valeurs de k eff choisies (disques pleins : 5 nN/μm – disques vides :<br />
90 nN/μm). On observe que, pour une valeur de raideur donnée,<br />
dF/dt est <strong>la</strong> même que <strong>la</strong> raideur soit réelle ou effective. Par ailleurs, <strong>la</strong> valeur<br />
de dF/dt est c<strong>la</strong>irement contrôlée par k eff , et non par le niveau de <strong>la</strong> force F.<br />
Par exemple, pour deux niveaux de forces différents, le passage de <strong>la</strong> valeur<br />
de raideur haute, <strong>à</strong> <strong>la</strong> valeur basse, induit <strong>la</strong> même modification de dF/dt. (b)<br />
Détail sur un changement de raideur effective. La force générée par <strong>la</strong> cellule<br />
est relevée <strong>à</strong> intervalles de 0,1 seconde (points bleus). On ne peut distinguer<br />
de régime transitoire entre les pentes dF/dt avant et après le changement<br />
de raideur effective. L’<strong>adaptation</strong> de <strong>la</strong> contractilité <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong> a donc lieu en<br />
moins de 0,1 seconde (figure adaptée de Mitrossilis et al. PNAS 2010).<br />
changement de pente dF/dt. Cette observation est en désaccord<br />
avec les modèles admis jusque l<strong>à</strong> qui supposaient que<br />
<strong>la</strong> réponse <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong> est contrôlée par le niveau de force<br />
appliqué <strong>à</strong> certaines molécules mécano-sensibles.<br />
Enfin, si l’on se concentre sur un changement de raideur<br />
donné (figure 4b), on observe que le changement de<br />
dF/dt (pente locale de <strong>la</strong> courbe de force) a lieu brutalement,<br />
sans que l’on puisse percevoir un quelconque<br />
régime transitoire. L’<strong>adaptation</strong> de <strong>la</strong> contractilité <strong>cellu<strong>la</strong>ire</strong><br />
<strong>à</strong> <strong>la</strong> raideur se fait donc sur une échelle de temps plus<br />
rapide que <strong>la</strong> résolution temporelle de notre système d’acquisition,<br />
c’est-<strong>à</strong>-dire en moins de 0,1 seconde. Les<br />
90<br />
5<br />
Raideur effective (nN/µm)<br />
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