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histoire<br />

LA GAZETTE DE BALI<br />

10<br />

Tournons une page de l’histoire de l’Archipel avec l’historien et écrivain Bernard Dorléans (1947-2011), ce mois-ci…<br />

HYACINTHE DE BOUGAINVILLE A SINGAPOUR<br />

PUIS SURABAYA<br />

Soixante ans après le voyage de<br />

Louis-Antoine de Bougainville,<br />

son fils Hyacinthe de<br />

Bougainville va se lancer dans<br />

un nouveau voyage autour<br />

du monde. Avant ce voyage,<br />

une expédition préliminaire<br />

avait été organisée en 1821-<br />

1823 par la frégate Cléopâtre<br />

dans les Moluques, à Macao,<br />

en Indochine et en Malaisie.<br />

Une relation de ce voyage<br />

aux Indes orientales avait été<br />

rédigée par M. Nourquier<br />

de Camper. Alors que les<br />

Moluques demeuraient<br />

encore le premier producteur<br />

mondial d’épices au monde, les<br />

Hollandais lors de leur retour<br />

en 1824 dans leurs colonies<br />

avaient assoupli leur politique<br />

de méfiance interdisant aux<br />

navires étrangers de pénétrer<br />

dans l’archipel indonésien.<br />

La frégate Cléopatre avait<br />

été cordialement accueillie à<br />

Amboine, à Ternate, à Banda<br />

et dans l’île de Célèbes. L’île<br />

d’Amboine était considérée<br />

à l’époque comme une ville<br />

relativement importante, très<br />

propre avec une importante et<br />

riche communauté chinoise,<br />

placée sous la responsabilité<br />

d’un capitaine sélectionné par<br />

le résident hollandais.<br />

2 mars 1824, une très belle<br />

frégate baptisée Thétis armée<br />

de quarante-quatre canons<br />

et manœuvrée par trois cent<br />

hommes d’équipage quitta<br />

le port de Brest sous le<br />

commandement de Hyacinte de Bougainville pour<br />

traverser l’Océan Indien. Après la signature du traité de<br />

Vienne en 1815, la plupart des établissements français<br />

outre-mer avaient été saisis par les Anglais à l’exception<br />

des îles de la Réunion qui avaient été considérées comme<br />

d’importance stratégique négligeable du fait qu’elle<br />

n’offrait aucun port de qualité. L’île était donc redevenue<br />

« île Bourbon ».<br />

Le 11 août 1824, les deux frégates, la Thétis et<br />

l’Espérance arrivaient en vue de Sumatra puis jetaient<br />

l’ancre à Pulo Penang. Grâce au florissant commerce<br />

de l’opium, c’était également une ville riche et à<br />

l’époque très cosmopolite de 37 000 habitants avec<br />

une garnison d’un millier d’hommes montant la garde<br />

au Fort Cornwallis. La cité était fréquentée par de<br />

nombreux Chinois, Malais, Bengalis, Arméniens, des<br />

Bugis, des Chulias, mais Bougainville comprit sans peine<br />

la décadence inéluctable de ce poste ainsi que celle de<br />

la nouvelle ville de Singapour.<br />

C’est le 1er septembre que les navires français jetaient<br />

l’ancre dans la rade de cette cité encore modeste d’à<br />

peine 13 000 habitants, au sud de la péninsule malaise.<br />

Bougainville nous laisse la première description française<br />

de ce port avec ces misérables quartiers malais comptant<br />

tout au plus 3000 résidents, dont les huttes étaient<br />

construites en bambou, les Javanais préférant utiliser le<br />

bois pour bâtir des maisons juchées sur pilotis ; quant au<br />

quartier chinois ; il donnait déjà l’apparence d’une ville<br />

commerçante relativement opulente comptant 9000<br />

résidents. En ce qui concerne la communauté européenne,<br />

elle ne comptait qu’une centaine de résidents vivant<br />

dans de confortables demeures de style colonial. Il n’y<br />

avait encore aucun édifice public digne de ce nom en<br />

dehors de l’église baptiste. Les trois cent soldats étaient<br />

en majorité des sepoyes, quant à la trentaine d’artilleurs<br />

anglais servant les batteries gardant l’entrée de la rade,<br />

ils vivaient dans de simples baraques de bois. Il n’en reste<br />

pas moins que le port avait déjà le statut de port franc et<br />

faisait preuve d’une intense activité, avec principalement<br />

des navires anglais ancrés dans<br />

la rade, l’essentiel des dépenses<br />

publiques étant financé par les<br />

fermes sur les jeux et les taxes<br />

sur le trafic de l’opium qui<br />

était déjà devenue une activité<br />

fort lucrative, avant même le<br />

déclenchement de la guerre<br />

de l’opium.<br />

Le 9 mars 1825, les deux<br />

frégates, l’Espérance et la<br />

Thétis continuèrent leur route<br />

vers le sud. Le 14 mars, elles<br />

longeaient les détroits de<br />

Bangka et de Billiton, et six<br />

jours plus tard, elles arrivaient<br />

en vue de l’île de Madura et<br />

faisaient relâche dans le port de<br />

Surabaya où Bougainville apprit<br />

la mort du roi Louis XVIII qui<br />

était survenue le 16 septembre<br />

1824 soit 5 mois plus tôt.<br />

Le port de Surabaya donnait<br />

lui aussi une impression<br />

d’intense activité. Tout comme<br />

à Singapour et à Manille,<br />

Bougainville rencontra un<br />

officier militaire français exilé<br />

qui était le commandant de<br />

la place et facilita toutes les<br />

démarches administratives<br />

en rapport avec la visite des<br />

navires français.<br />

De fait, à cette époque et dans<br />

de nombreux endroits dans<br />

le monde, il n’était pas rare<br />

de rencontrer des officiers<br />

français s’étant exilés quelques<br />

décennies plus tôt faisant<br />

suite à la révolution, ou plus<br />

récemment à la chute de l’empire. La vie à Surabaya<br />

paraissait particulièrement attrayante, mais présentait<br />

non moins certains risques et dangers pour la santé des<br />

hommes d’équipage qui n’étaient pas seulement tentés par<br />

la beauté des fruits apportés par de petites embarcations<br />

indigènes s’approchant du bord des navires. Le matin<br />

suivant l’arrivée des vaisseaux français dans le port,<br />

deux embarcations occupées par des femmes, certaines<br />

particulièrement jolies, tournaient sans cesse autour des<br />

navires français… Malheureusement Bougainville prit des<br />

mesures sévères pour interdire l’accès à bord de ces très<br />

indésirables personnes, y compris de celles munies de<br />

« certificats de bonne santé ».<br />

A suivre le mois prochain<br />

Extrait de « Les Français et l’Indonésie »,<br />

Bernard Dorléans, éd. Kailash

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