07.11.2014 Views

Zibeline n° 63 en PDF

Zibeline n° 63 en PDF

Zibeline n° 63 en PDF

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

un gratuit qui se lit<br />

N°<strong>63</strong> -<br />

du 15/05/13 au 19/06 /13


Politique culturelle<br />

Pas de femmes, la suite 4, 5<br />

La fin du théâtre 6, 7<br />

Événem<strong>en</strong>ts<br />

Confér<strong>en</strong>ce Camille Claudel, Les Papesses 8<br />

Les Informelles, Chaud dehors 9<br />

La nuit des musées,<br />

le Printemps des Marseillais 10<br />

R<strong>en</strong>dez-vous aux jardins,<br />

Contes et Jardins, Les Eauditives 11<br />

Villa Méditerranée<br />

Forum Libération 12<br />

Ouverture 13<br />

Au programme 14<br />

MuCEM<br />

Entreti<strong>en</strong> avec Bruno Suzzarelli 16<br />

La galerie de la Méditerranée 18<br />

Le noir et le bleu 19<br />

Le Bazar du g<strong>en</strong>re 20<br />

Au programme 21<br />

Marseille-Prov<strong>en</strong>ce 2013<br />

Le grand atelier de Midi, J1,<br />

Picasso céramiste 22, 23<br />

Taysir Batniji, La folle histoire des Arts de la rue 24<br />

Arteum 25<br />

Festins d’Aubagne, Yes We Camp 26<br />

GR13 à Martigues, Puits Morandat 27<br />

Cinémas Arabes, Guédiguian,<br />

Ilotopie, Art Comores 28, 29<br />

This is not music 30<br />

Olivier Py, R<strong>en</strong>contres du 9 e art 32<br />

TransHumance 33<br />

Critiques<br />

Théâtre 34 à 39<br />

Rue 40<br />

Danse 42, 43<br />

Musique 44 à 50<br />

Au programme<br />

Musique 52 à 57<br />

Théâtre 58 à 61<br />

Danse 62 à 64<br />

Jeune public 66 à 68<br />

Cinéma 70 à 74<br />

Art et patrimoine 76<br />

Arts visuels 78 à 84<br />

Littérature<br />

R<strong>en</strong>contres 84 à 87<br />

Livres 88 à 91<br />

Art, CD 92, 93<br />

Arts et sci<strong>en</strong>ces<br />

Divines désespérances, Musée Salagon 94<br />

Quelques<br />

(bonnes) nouvelles<br />

Parce que le pessimisme gagne, quelques bonnes nouvelles :<br />

les homosexuels vont pouvoir se marier, le beau temps arrive,<br />

le MuCEM va faire bouillonner les esprits, la fréqu<strong>en</strong>tation de nos<br />

lieux culturels est <strong>en</strong> forte hausse. Mais, surtout, il n’y a jamais<br />

eu si peu de famines, d’épidémies ou de guerres que durant ces<br />

dernières années.<br />

Si l’av<strong>en</strong>ir de la Terre est inquiétant, si ici le chômage et le<br />

Front National mont<strong>en</strong>t, si ailleurs des dictatures persist<strong>en</strong>t et<br />

des toits s’effondr<strong>en</strong>t sur les esclaves de l’industrie textile,<br />

l’homme n’a jamais aussi peu tué son voisin, malgré le dictateur<br />

Syri<strong>en</strong> et les <strong>en</strong>fants américains.<br />

L’humanité n’avance pas à reculons, voilà de quoi se réjouir ! et<br />

passer à des nouvelles, plus personnelles, sur de légers changem<strong>en</strong>ts<br />

éditoriaux.<br />

Pour répondre à la demande nous avons dû augm<strong>en</strong>ter notre<br />

pagination, soit 96 pages dans ce numéro, notre tirage, 32 000<br />

exemplaires, et mettre des articles supplém<strong>en</strong>taires <strong>en</strong> ligne<br />

quotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t sur notre site. Pour assumer cette nette<br />

croissance de nos activités, plusieurs journalistes sont v<strong>en</strong>ues<br />

rejoindre notre équipe, dont vous découvrirez les signatures<br />

dans ce numéro.<br />

Nous ne parv<strong>en</strong>ons cep<strong>en</strong>dant pas à suivre la demande ! Les<br />

exemplaires disparaiss<strong>en</strong>t très vite, les sollicitations des structures<br />

culturelles se multipli<strong>en</strong>t, nous ne pouvons plus être<br />

disponibles comme nous le souhaitions, portable ouvert et réponse<br />

aux mails… Les pages de <strong>Zibeline</strong> se surcharg<strong>en</strong>t de<br />

numéro <strong>en</strong> numéro, mais nous n’avons pas les moy<strong>en</strong>s économiques<br />

de tirer davantage, de changer notre périodicité m<strong>en</strong>suelle,<br />

ni d’être exhaustifs sur le territoire.<br />

Nous avons donc choisi de mieux annoncer, et d’annoncer moins.<br />

Cep<strong>en</strong>dant vous trouverez sur notre site, dans l’ag<strong>en</strong>da accessible<br />

par le cal<strong>en</strong>drier, des informations supplém<strong>en</strong>taires que<br />

nous n’avons pas pu glisser dans le magazine. Des critiques<br />

aussi, nombreuses, des <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s inédits, qui complèt<strong>en</strong>t nos<br />

articles.<br />

Par ailleurs, pour répondre à ceux qui nous demand<strong>en</strong>t, très<br />

souv<strong>en</strong>t à prés<strong>en</strong>t, d’insérer leurs informations sur notre site,<br />

nous mettons <strong>en</strong> place un système d’annonces, payantes mais<br />

pas chères, pour que ceux dont nous ne connaissons pas le<br />

travail puiss<strong>en</strong>t communiquer leurs informations dans nos<br />

ag<strong>en</strong>das.<br />

Car si nous voulons mettre à disposition du public l’information<br />

et l’analyse culturelles, nous avons besoin de financem<strong>en</strong>ts.<br />

P<strong>en</strong>sez donc à adhérer, et à utiliser ce nouveau service…<br />

AGNÈS FRESCHEL


Assez du féminis<br />

04<br />

P<br />

O<br />

LITI<br />

Q<br />

U<br />

E<br />

C<br />

ULTURELLE<br />

P<strong>en</strong>sant ce milieu a priori cultivé, donc courtois,<br />

nous imaginions qu’ouvrir les yeux de ces<br />

g<strong>en</strong>s policés suffirait à les convaincre qu’une<br />

telle inégalité n’est pas acceptable. Nous<br />

avons donc apposé notre logo <strong>en</strong> expliquant<br />

dans quelles conditions, soit<br />

• sans réclamer une parité difficile à mettre<br />

<strong>en</strong> place<br />

• <strong>en</strong> soulignant les qualités esthétiques ou<br />

intellectuelles de manifestations sans femmes<br />

• <strong>en</strong> décidant de ne pas épingler les très<br />

nombreux solos masculins qui<br />

empliss<strong>en</strong>t pourtant la plupart de<br />

nos pages confér<strong>en</strong>ces, livres et<br />

expos…<br />

Nous p<strong>en</strong>sions que notre démarche<br />

était claire et mesurée, notre<br />

logo ne s’apposant qu’à partir de<br />

moins de 20% de femmes sur<br />

scène et/ou dans l’équipe créatrice.<br />

Tout <strong>en</strong> nous étonnant que<br />

personne n’y ait p<strong>en</strong>sé avant nous,<br />

nous ne p<strong>en</strong>sions pas susciter de<br />

déluge de reproches (des remerciem<strong>en</strong>ts<br />

aussi, de la part de<br />

femmes et d’hommes).<br />

Pour préciser : nous avons reçu<br />

La mise <strong>en</strong> place du<br />

label «pas de femmes»<br />

depuis deux mois dans<br />

<strong>Zibeline</strong> a suscité<br />

des réactions que nous<br />

n’att<strong>en</strong>dions pas…<br />

Interv<strong>en</strong>tion du collectif La Barbe durant la prés<strong>en</strong>tation 2012 de la saison de l'Odéon, exclusivem<strong>en</strong>t<br />

masculine (auteurs, metteurs <strong>en</strong> scène). Luc Bondy avait eu cette réplique culte : "il y a des femmes<br />

dans mon théâtre, à la communication"© Nick Mead<br />

Manifeste du mouvem<strong>en</strong>t H/F (extraits)<br />

égalité femmes hommes<br />

dans l’art et la culture<br />

…Les inégalités invraisemblables qui perdur<strong>en</strong>t dans ces secteurs<br />

hautem<strong>en</strong>t symboliques soulèv<strong>en</strong>t aujourd’hui un vrai problème de<br />

démocratie : quel miroir les arts et la culture offr<strong>en</strong>t-ils à notre<br />

société ? Respect<strong>en</strong>t-ils les principes de partage et de libre accès voulus<br />

par le dispositif public ? Comm<strong>en</strong>t les œuvres et les représ<strong>en</strong>tations qui<br />

y sont produites peuv<strong>en</strong>t-elles parler du monde, si les femmes, qui sont<br />

plus de la moitié de la population française, n’y pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t qu’une part<br />

aussi minime ?<br />

Le mouvem<strong>en</strong>t H/F est convaincu que les inégalités <strong>en</strong>tre femmes et<br />

hommes dans le domaine des arts et de la culture sont le symptôme<br />

d’un dysfonctionnem<strong>en</strong>t profond éloignant nos pratiques de la réalité<br />

et des aspirations de notre pays….<br />

www.snapcgt.org/IMG/pdf/manifeste_HF.pdf<br />

des posts, des mails et mêmes<br />

des lettres anonymes nommant<br />

nos journalistEs par leur prénom<br />

et nous reprochant un «copinage»<br />

relevant du «féminissisme» ;<br />

on nous a écrit qu’on se «trompait<br />

de combat» parce qu’une manifestation<br />

ne pouvait pas à la fois<br />

représ<strong>en</strong>ter les minorités sociales<br />

et les femmes, et qu’aujourd’hui<br />

l’important était le social (Ah<br />

bon ? et quid des femmes des<br />

minorités sociales ?) ; on nous a<br />

écrit «il y <strong>en</strong> a assez, des femmes<br />

incompét<strong>en</strong>tes sont nommées<br />

partout parce qu’il faut des femmes»<br />

(Ah bon ? il ya un réservoir<br />

d’hommes compét<strong>en</strong>ts mais pas<br />

de femmes, parce que… elles sont<br />

plus bêtes ? moins diplômées ?<br />

tourm<strong>en</strong>tées par leurs ovaires ? ).<br />

On nous a reproché d’être féministes,<br />

comme si l’égalité était acquise ! De<br />

poursuivre un combat «ess<strong>en</strong>tialiste» comme<br />

si nous avions jamais parlé d’un art féminin,<br />

ou de la spécificité d’une gouvernance féminine<br />

(nous p<strong>en</strong>sons que les femmes ont tort<br />

de mettre <strong>en</strong> avant des qualités spécifiquem<strong>en</strong>t<br />

féminines, qui à notre s<strong>en</strong>s n’exist<strong>en</strong>t pas).<br />

Le reproche le plus fréqu<strong>en</strong>t remporte la palme<br />

du paternalisme bi<strong>en</strong>veillant. On <strong>en</strong> veut trop<br />

et tout de suite, «parce que quand même pour<br />

les femmes ça a bi<strong>en</strong> avancé». Ce qui est non<br />

seulem<strong>en</strong>t contestable dans les faits durant le<br />

dernier quart de siècle, mais de plus complètem<strong>en</strong>t<br />

insatisfaisant : la loi garantit l’égalité,<br />

et on ne peut pas dire à nos filles qui ont 8<br />

fois moins de chances que nos garçons de dev<strong>en</strong>ir<br />

metteur <strong>en</strong> scène ou musici<strong>en</strong>nes qu’elles<br />

ont déjà plus de liberté que leurs grandmères<br />

: c’est de leurs frères qu’il faut qu’elles<br />

soi<strong>en</strong>t les égales. En termes d’accès aux programmations,<br />

et de rémunération.<br />

Pourquoi l’égalité<br />

dans la culture ?<br />

Une autre question, moins agressive, revi<strong>en</strong>t :<br />

on nous demande pourquoi nous focalisons<br />

notre «combat pour la cause féminine» («féministe»<br />

est décidém<strong>en</strong>t tabou…) dans le<br />

secteur du spectacle et de la culture. En dehors<br />

d’une réponse pragmatique (nous sommes<br />

un journal culturel…), et d’une autre moins<br />

drôle (dans ce secteur-là les inégalités sont<br />

<strong>en</strong>core plus criantes qu’ailleurs), nous r<strong>en</strong>voyons<br />

au raisonnem<strong>en</strong>t du Parlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong>, puis<br />

4 ans après jour pour jour du ministère de la<br />

Culture français (voir <strong>en</strong>cadrés) : les inégalités<br />

des chances et des salaires dans ces secteurs<br />

se doubl<strong>en</strong>t d’une grande influ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> terme<br />

d’image et de représ<strong>en</strong>tation de<br />

soi. Ne pas voir de femmes<br />

créatrices, sur les scènes et les<br />

écrans, à la tête des labos ou<br />

possédant une parole d’experte,<br />

empêche nos petites filles de se<br />

projeter dans ces rôles. Comme<br />

<strong>en</strong> politique ou dans le sport, la<br />

rev<strong>en</strong>dication d’égalité dans le<br />

spectacle et les médias est aussi<br />

un combat pour que change<br />

l’image des femmes…<br />

C’est pourquoi il nous semble<br />

urg<strong>en</strong>t de montrer qu’un certain<br />

sexisme s’est installé dans les<br />

manifestations culturelles, et<br />

combi<strong>en</strong> la mixité reste impossible,<br />

les g<strong>en</strong>res étant de plus <strong>en</strong><br />

plus séparés : nous avons reçu<br />

parmi les remerciem<strong>en</strong>ts des mails<br />

de femmes musici<strong>en</strong>nes qui rêv<strong>en</strong>t<br />

de mixité mais ont fini par<br />

créer des groupes de femmes…<br />

parce que les hommes ne veul<strong>en</strong>t<br />

pas d’elles. Et des mails de comédi<strong>en</strong>nes<br />

qui <strong>en</strong> ont assez de<br />

voir que les rares rôles de femmes<br />

du répertoire sont de plus <strong>en</strong><br />

plus souv<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>us par des hommes<br />

sous prétexte de r<strong>en</strong>ouer<br />

avec le théâtre élisabéthain. À<br />

quand des femmes jouant des<br />

rôles d’hommes ? Mais c’est malheureusem<strong>en</strong>t<br />

dans le secteur<br />

des musiques actuelles, là où la<br />

rev<strong>en</strong>dication d’égalité devrait<br />

être la plus forte, que les femmes<br />

sont le moins nombreuses… et<br />

que notre logo, qui constate des faits, doit<br />

s’assortir souv<strong>en</strong>t de comm<strong>en</strong>taires agacés !<br />

Là, c’est trop…<br />

Pour exemple, le site et le dossier de presse<br />

de This is [not] music, manifestation labellisée<br />

MP2013, jeune et branchée, où nombre<br />

de filles vont chercher une id<strong>en</strong>tité… Le<br />

dossier comporte deux images de musici<strong>en</strong>nes<br />

et 64 photos d’hommes musici<strong>en</strong>s. Une de ces<br />

deux images, publicitaire, fait partie de la<br />

campagne du Mouv’ «Non tout n’était pas mieux<br />

avant» : la femme y joue de l’accordéon, et


me ?<br />

représ<strong>en</strong>te le comble du ringard.<br />

Une autre image de femme, issue<br />

d’une œuvre plastique, est assortie<br />

de ce comm<strong>en</strong>taire : «de<br />

belles créatures frottant langoureusem<strong>en</strong>t<br />

leur corps sur des<br />

capots brûlants ornés des<br />

flammes de l’<strong>en</strong>fer». La femme<br />

infernale, le retour !<br />

Quant aux skateuses, elles sont<br />

abs<strong>en</strong>tes de la programmation,<br />

mais prés<strong>en</strong>tes par une exposition<br />

des moulages de leurs<br />

«bustes». En dehors de cette<br />

partie primordiale de l’anatomie<br />

des sportives de la glisse, les 14<br />

images de sportifs sont des hommes<br />

sauf… une qui illustre une<br />

programmation qui «décrit la<br />

capacité inépuisable de l’être<br />

humain à se r<strong>en</strong>dre ridicule lors<br />

de performances sportives» !<br />

Vous avez dit sexiste ?<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Résolution du Parlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong> (extraits)<br />

A. considérant que les inégalités dans les<br />

possibilités d’emploi et les chances des femmes<br />

et des hommes sont fortem<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tes et<br />

persistantes dans les arts du spectacle,<br />

F. considérant que l’objectif égalitaire dans les<br />

métiers des arts du spectacle suppose de passer<br />

par l’instauration systématique de la mixité,<br />

G. considérant que le tal<strong>en</strong>t n’explique pas seul<br />

la qualité artistique d’une réalisation ou la<br />

réussite d’un parcours professionnel,<br />

H. considérant <strong>en</strong> conséqu<strong>en</strong>ce qu’il convi<strong>en</strong>t<br />

de modifier les situations de ségrégation<br />

actuelles qui persist<strong>en</strong>t toujours dans les arts<br />

du spectacle,<br />

J. considérant que des préjugés persistants<br />

<strong>en</strong>traîn<strong>en</strong>t trop souv<strong>en</strong>t des comportem<strong>en</strong>ts<br />

discriminants à l’égard des femmes dans les<br />

processus de sélection et de nomination ainsi<br />

que dans les relations de travail, et que les<br />

femmes, <strong>en</strong> dépit d’un niveau de formation<br />

supérieur, d’un intérêt pour la formation<br />

continue et de réseaux plus forts, ont souv<strong>en</strong>t<br />

un rev<strong>en</strong>u plus faible que les hommes,<br />

1. souligne l’ampleur et la persistance des<br />

inégalités <strong>en</strong>tre les hommes et les femmes dans<br />

les arts du spectacle et l’impact que le mode<br />

d’organisation inégalitaire de ce secteur peut<br />

avoir sur l’<strong>en</strong>semble de la société, compte t<strong>en</strong>u<br />

de la nature particulière de ses activités ;<br />

7. souligne que la discrimination à l’égard des<br />

femmes pénalise le développem<strong>en</strong>t du secteur<br />

culturel <strong>en</strong> le privant de tal<strong>en</strong>ts et de<br />

compét<strong>en</strong>ces et fait remarquer que les tal<strong>en</strong>ts<br />

ont besoin de r<strong>en</strong>contres avec le public pour être<br />

reconnus ;<br />

9. invite les acteurs du domaine culturel à<br />

améliorer la prés<strong>en</strong>ce des créatrices et de leurs<br />

œuvres dans les programmations, les<br />

collections, les éditions ou les consultations ;<br />

12. invite la Commission et les États membres<br />

à <strong>en</strong>visager, dès à prés<strong>en</strong>t, une première étape<br />

réaliste dans la lutte contre les inégalités dans<br />

les arts du spectacle, consistant à assurer la<br />

prés<strong>en</strong>ce d’au moins un tiers de personnes du<br />

sexe minoritaire dans toutes les branches du<br />

secteur ;<br />

14. rappelle aux institutions culturelles la<br />

nécessité absolue de traduire dans les faits la<br />

notion démocratique selon laquelle à travail<br />

égal <strong>en</strong>tre un homme et une femme doit<br />

correspondre un salaire égalem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tique,<br />

laquelle, dans le domaine artistique comme dans<br />

bi<strong>en</strong> d’autres secteurs, n’est pas toujours<br />

appliquée.<br />

LE PARLEMENT EUROPÉEN, LE 10 MARS 2009<br />

L’intégralité du texte de loi est consultable<br />

sur www.europarl.europa.eu<br />

05<br />

P<br />

O<br />

LITI<br />

Q<br />

U<br />

E<br />

C<br />

U<br />

LTURELLE<br />

Déclaration du ministère de la Culture et de la Communication (extraits)<br />

Contrairem<strong>en</strong>t à beaucoup d’idées reçues, la<br />

réalité de la situation des femmes dans l’univers<br />

de la culture et des médias est bi<strong>en</strong> peu<br />

satisfaisante.<br />

Le constat est sévère : quand elles apparaiss<strong>en</strong>t,<br />

les femmes ont souv<strong>en</strong>t un statut secondaire,<br />

un rôle social minoré. […] La légitimité du savoir<br />

reste masculine. […] Comm<strong>en</strong>t les spectatrices,<br />

et <strong>en</strong> particulier les plus jeunes d’<strong>en</strong>tre elles,<br />

peuv<strong>en</strong>t-elles trouver les repères pour s’id<strong>en</strong>tifier<br />

et pr<strong>en</strong>dre confiance ?<br />

On sait bi<strong>en</strong> que les différ<strong>en</strong>ts modes d’expression<br />

artistique et culturelle, qu’il s’agisse du<br />

spectacle vivant, du cinéma, de la littérature...,<br />

et bi<strong>en</strong> sûr les médias, véhicul<strong>en</strong>t des représ<strong>en</strong>tations<br />

sexistes et des stéréotypes d’autant<br />

plus puissants qu’ils sont souv<strong>en</strong>t peu visibles,<br />

<strong>en</strong> raison de l’autorité intellectuelle de la création<br />

et de la force de l’image, et qu’ils s’ancr<strong>en</strong>t<br />

dans l’inconsci<strong>en</strong>t collectif. Mais cette puissance<br />

peut à rebours s’exercer pour modifier ces<br />

représ<strong>en</strong>tations réductrices ou erronées. Notre<br />

action dans ce domaine, comme dans celui de<br />

l’éducation, est donc déterminante.<br />

Pour que les choses boug<strong>en</strong>t, pour mettre la<br />

société <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t, il faut de la volonté -du<br />

volontarisme peut-être- et un travail de fond.<br />

C’est pourquoi j’ai demandé que figur<strong>en</strong>t dorénavant<br />

dans les lettres de mission de tous les<br />

dirigeants de nos institutions nationales, établissem<strong>en</strong>ts<br />

culturels et médias publics, des<br />

consignes précises pour que la prés<strong>en</strong>ce des<br />

femmes dans les postes de direction comme<br />

dans les programmations soit améliorée ; cette<br />

exig<strong>en</strong>ce figurera égalem<strong>en</strong>t dans les contrats<br />

(contrats de performance, contrats d’objectifs et<br />

de moy<strong>en</strong>s) qu’ils sign<strong>en</strong>t avec le ministère ; et<br />

dans les réseaux du spectacle vivant ou les<br />

réseaux de diffusion de l’art contemporain, ou<br />

<strong>en</strong>core les FRAC, je souhaite, <strong>en</strong> concertation<br />

avec les élus locaux, qui sont comme nous<br />

garants du respect du principe d’égal accès des<br />

femmes et des hommes aux responsabilités, que<br />

nous nous <strong>en</strong>gagions de façon volontariste dans<br />

un processus de respect de la parité.<br />

[…] Parallèlem<strong>en</strong>t à toutes ces mesures incitatives,<br />

quelquefois dissuasives..., il faut aussi<br />

montrer et démontrer tout ce que les femmes<br />

font déjà, et qu’elles peuv<strong>en</strong>t faire avec le même<br />

tal<strong>en</strong>t et les mêmes compét<strong>en</strong>ces que les hommes,<br />

dans tous les domaines. «R<strong>en</strong>dre visible<br />

l’invisible», c’est aussi cela.<br />

AURÉLIE FILIPPETTI, LE 10 MARS 2013<br />

L’intégralité du discours prononcé est consultable<br />

sur le site du ministère de la Culture<br />

www.culturecommunication.gouv.fr<br />

M<strong>en</strong>suel gratuit paraissant<br />

le deuxième mercredi du mois<br />

Edité à 32 000 exemplaires<br />

imprimés sur papier recyclé<br />

Edité par <strong>Zibeline</strong> SARL<br />

76 av<strong>en</strong>ue de la Panouse | n°11<br />

13009 Marseille<br />

Dépôt légal : janvier 2008<br />

Directrice de publication<br />

Rédactrice <strong>en</strong> chef<br />

Agnès Freschel<br />

agnes.freschel@wanadoo.fr<br />

06 09 08 30 34<br />

Imprimé par Rotimpress<br />

17181 Aiguaviva (Esp.)<br />

photo couverture<br />

Le Mucem<br />

Agnès Mellon<br />

095 095 61 70<br />

photographeagnesmellon.blogspot.com<br />

RetrouveZ <strong>Zibeline</strong> et vos invitations sur notre site<br />

www.journalzibeline.fr<br />

Secrétaires de rédaction<br />

Dominique Marçon<br />

journal.zibeline@gmail.com<br />

06 23 00 65 42<br />

Delphine Michelangeli<br />

d.michelangeli@free.fr<br />

06 65 79 81 10<br />

Arts Visuels<br />

Claude Lorin<br />

claudelorin@wanadoo.fr<br />

06 25 54 42 22<br />

Livres<br />

Fred Robert<br />

fred.robert.zibeline@free.fr<br />

06 82 84 88 94<br />

Musique et disques<br />

Jacques Freschel<br />

jacques.freschel@wanadoo.fr<br />

06 20 42 40 57<br />

Thomas Dalicante<br />

thomasdalicante@gmail.com<br />

Dan Warzy<br />

danwarzy@free.fr<br />

Cinéma<br />

Annie Gava<br />

annie.gava@laposte.net<br />

06 86 94 70 44<br />

Élise Padovani<br />

elise.padovani@orange.fr<br />

Philosophie<br />

Régis Vlachos<br />

regis.vlachos@free.fr<br />

Sci<strong>en</strong>ces<br />

Christine Montixi<br />

christne.montixi@yahoo.fr<br />

Polyvolantes<br />

Chris Bourgue<br />

chris.bourgue@wanadoo.fr<br />

06 03 58 65 96<br />

Maryvonne Colombani<br />

mycolombani@yahoo.fr<br />

06 62 10 15 75<br />

Gaëlle Cloarec<br />

ga.cloarec@gmail.com<br />

Marie-Jo Dhô<br />

dho.ramon@wanadoo.fr<br />

Marie Godfrin-Guidicelli<br />

m-g-g@wanadoo.fr<br />

06 64 97 51 56<br />

Anne-Lyse R<strong>en</strong>aut<br />

annelyse.r<strong>en</strong>aut@gmail.com<br />

Maquettiste<br />

Philippe Perotti<br />

philippe.zibeline@gmail.com<br />

06 19 62 03 61<br />

Directrice commerciale<br />

Véronique Linais<br />

vlinais@yahoo.fr<br />

06 <strong>63</strong> 70 64 18<br />

La Régie<br />

Jean-Michel Florant<br />

laregie@gmx.fr<br />

06 22 17 07 56<br />

Collaborateurs réguliers :<br />

Frédéric Isoletta, Kévin<br />

Derveaux, Yves Bergé,<br />

Émili<strong>en</strong> Moreau, Christophe<br />

Floquet, Pierre-Alain Hoyet,<br />

Clarisse Guichard,<br />

Christine Rey, Edouard Barthélémy,<br />

Manon Mathieu


La culture sans artiste,<br />

06<br />

P<br />

O<br />

LITI<br />

Q<br />

U<br />

E<br />

C<br />

ULTURELLE<br />

Si l’année capitale<br />

constitue un formidable<br />

accélérateur <strong>en</strong> termes<br />

d’équipem<strong>en</strong>ts culturels<br />

nul ne sait, aujourd’hui,<br />

avec quel arg<strong>en</strong>t<br />

ils vont fonctionner.<br />

Le paysage théâtral<br />

marseillais, <strong>en</strong> particulier,<br />

est dévasté…<br />

L’offre culturelle à l’av<strong>en</strong>ir sera certainem<strong>en</strong>t<br />

augm<strong>en</strong>tée : le MuCEM, la Villa Méditerranée,<br />

le musée des Beaux Arts et demain celui d’Histoire<br />

vont <strong>en</strong> particulier offrir aux Marseillais<br />

des activités culturelles qu’ils n’avai<strong>en</strong>t jamais<br />

pratiquées. Le territoire de MP2013 n’est pas<br />

<strong>en</strong> reste, depuis les Pénit<strong>en</strong>ts Noirs à Aubagne<br />

<strong>en</strong> passant par le Conservatoire d’Aix, les<br />

musées d’Arles ou l’Ed<strong>en</strong> à La Ciotat. La région<br />

toute <strong>en</strong>tière a été poussée à monter des murs :<br />

la FabricA à Avignon, le Théâtre Liberté à<br />

Toulon, ou le Forum à Fréjus et le Théâtre Durance<br />

à Château-Arnoux rééquilibr<strong>en</strong>t le paysage<br />

théâtral sur le territoire… <strong>en</strong> puisant sur les mêmes<br />

«<strong>en</strong>veloppes budgétaires» (le terme consacré<br />

fleure bon le dessous-de-table…). Ce qui forcém<strong>en</strong>t<br />

appauvrit les autres, et met <strong>en</strong> rivalité<br />

les lieux culturels : difficile alors d’imaginer des<br />

productions communes, lorsque les tutelles jou<strong>en</strong>t<br />

la concurr<strong>en</strong>ce de ceux qui devrai<strong>en</strong>t collaborer…<br />

Cette technique de managem<strong>en</strong>t est bi<strong>en</strong><br />

connue des <strong>en</strong>treprises aux cadres surnuméraires<br />

: pour s’<strong>en</strong> débarrasser elles les font<br />

plancher sur le même projet, pour qu’ils s’épuis<strong>en</strong>t<br />

dans la lutte, et intérioris<strong>en</strong>t les raisons de<br />

leur éviction. Combi<strong>en</strong> de directeurs de lieux<br />

se laiss<strong>en</strong>t aller à dénigrer leurs confrères, qu’ils<br />

décriv<strong>en</strong>t comme des adversaires, et qui le sont<br />

de fait, dans les commissions d’attribution des<br />

collectivités ? Combi<strong>en</strong> d’autres jett<strong>en</strong>t l’éponge<br />

tant le combat est dur ?<br />

un idéal libéral<br />

Le chantier du theatre de La Minoterie © Philippe Houssin<br />

Des lieux sans moy<strong>en</strong>s<br />

Aucun de ces équipem<strong>en</strong>ts d’<strong>en</strong>vergure n’est<br />

destiné à faire vivre les artistes, c’est-à-dire la<br />

création. L’exemple le plus frappant est le nouveau<br />

FRAC Paca, avec son budget annuel d’acquisition<br />

dérisoire, à peine supérieur à ce que la<br />

Région attribue au financem<strong>en</strong>t d’une seule<br />

production cinématographique : 215 000 €,<br />

pour irriguer une région <strong>en</strong>tière ? Or c’est cela<br />

qui permet d’acheter des œuvres aux artistes<br />

et de les faire vivre… À la Friche la Tour Panorama<br />

est érigée, le Pôle Théâtre sorti de terre,<br />

l’une et l’autre sans aucun moy<strong>en</strong> de production,<br />

ni pour les arts visuels, ni pour la création<br />

théâtrale. Le lieu, superbe, a seulem<strong>en</strong>t de quoi<br />

ouvrir ses portes, payer son personnel perman<strong>en</strong>t<br />

et les charges courantes… Beau comme un<br />

frigo vide, et tout aussi glaçant !<br />

C’est sans doute pour la vie théâtrale que le tableau<br />

est le plus affolant. Le Gyptis est assuré<br />

qu’il ne fermera pas, mais va sans doute se transformer<br />

<strong>en</strong> «Pôle image», <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dez <strong>en</strong> cinéma.<br />

Le théâtre est perdu pour la création, même si<br />

une partie des moy<strong>en</strong>s doit, <strong>en</strong> principe, se retrouver<br />

à La Friche : nul ne sait si cette «fusion»<br />

(on dit OPA, non, chez les capitalistes ?) se passera<br />

à budget constant, mais il faudra, au mieux,<br />

financer deux lieux avec les moy<strong>en</strong>s d’un seul…<br />

En effet, Catherine Marnas est nommée à la direction<br />

du Théâtre National de Bordeaux –elle<br />

part par lassitude, par désespoir aussi de jamais<br />

obt<strong>en</strong>ir dans sa ville les moy<strong>en</strong>s de produire et<br />

programmer. Que va dev<strong>en</strong>ir le pôle théâtral<br />

qu’elle devait diriger et qui se retrouve privé de<br />

l’arg<strong>en</strong>t de sa compagnie qui ferme dès janvier<br />

2014 ?<br />

Quant à la Minoterie <strong>en</strong> reconstruction et qui<br />

ouvrira <strong>en</strong> septembre, elle devra produire et programmer<br />

avec un budget de fonctionnem<strong>en</strong>t à<br />

peine supérieur à ce que les Minotiers avai<strong>en</strong>t<br />

pour un lieu de moindre taille et où ils accueillai<strong>en</strong>t<br />

à petits prix : la Ville de Marseille a<br />

augm<strong>en</strong>té sa subv<strong>en</strong>tion de fonctionnem<strong>en</strong>t,<br />

mais celle de l’État est supprimée, celle de la<br />

Région <strong>en</strong> forte baisse… si bi<strong>en</strong> qu’ils n’auront<br />

aucune marge artistique supplém<strong>en</strong>taire : une<br />

fois le personnel payé, il restera une somme<br />

dérisoire, largem<strong>en</strong>t insuffisante pour une programmation<br />

régulière, sans parler d’aide à la<br />

production…<br />

Plus de production<br />

Il n’y aura donc, à Marseille, plus de théâtres <strong>en</strong><br />

capacité de financer des créations : le Toursky<br />

ne pratique que l’accueil, dans des conditions<br />

financières forcém<strong>en</strong>t déplorables ; les Bernardines<br />

ne peuv<strong>en</strong>t sout<strong>en</strong>ir que de petites formes<br />

pas chères, Montévidéo que des lectures, tout<br />

comme les autres petits lieux marseillais ; seul<br />

le Gymnase, qui n’y est obligé par aucune<br />

conv<strong>en</strong>tion, la Criée et le Merlan, qui y sont<br />

<strong>en</strong>joints par leur cahier des charges national,<br />

sont <strong>en</strong> capacité de produire des créations<br />

théâtrales. Mais par choix ou par contrainte –<br />

difficultés du quartier, ori<strong>en</strong>tations esthétiques,<br />

nécessité de remplir les salles avec des formes<br />

sans «prise de tête» ou des affiches prestigieusesils<br />

ne produis<strong>en</strong>t que rarem<strong>en</strong>t des compagnies<br />

théâtrales régionales : le Gymnase/Jeu de<br />

paume les a cantonnées cette année au jeune<br />

public, la Criée se cont<strong>en</strong>te d’accueillir dans sa<br />

petite salle un cycle clown de François Cervantes<br />

; et le Merlan préfère nettem<strong>en</strong>t le cirque,<br />

la danse et les balades.<br />

Le tableau n’est pas plus riant ailleurs : partout<br />

les pôles fusionn<strong>en</strong>t <strong>en</strong> «mutualisant les moy<strong>en</strong>s»,<br />

belle périphrase pour désigner des économies<br />

forcées, et des victoires de directeurs qu’on a<br />

transformés <strong>en</strong> compétiteurs. Le théâtre Liberté<br />

à Toulon, qui ne désemplit pas quelles que<br />

soi<strong>en</strong>t ses propositions, voit son budget amputé<br />

tandis que Châteauvallon est dans le flou et<br />

que le théâtre de Draguignan a dû définitivem<strong>en</strong>t<br />

r<strong>en</strong>oncer à rester un pôle de création. La<br />

Scène nationale de Cavaillon bat de l’aile,<br />

abandonnée par la ville. Celle de Martigues<br />

peine à se trouver un directeur, l’État et la Ville<br />

n’étant pas d’accord sur le projet, si bi<strong>en</strong> qu’aucune<br />

production n’est prévisible. La Passerelle<br />

à Gap produit moins de théâtre, le Théâtre<br />

Durance n’a les moy<strong>en</strong>s que de petites formes,<br />

le Sémaphore de Port-de-Bouc est poussé à<br />

«mutualiser» avec les Salins, Ouest Prov<strong>en</strong>ce<br />

depuis la mutualisation programme surtout du


jeune public… Qui va donc proposer du théâtre de création <strong>en</strong><br />

2014 ? Et qui va financer les compagnies régionales ?<br />

Plus de subv<strong>en</strong>tions<br />

Parallèlem<strong>en</strong>t à cette limitation des capacités de productions des<br />

lieux, les compagnies indép<strong>en</strong>dantes subiss<strong>en</strong>t de plein fouet une<br />

diminution importante de leurs moy<strong>en</strong>s propres. Les aides à la création<br />

se réduis<strong>en</strong>t chaque année, et l’on demande à des compagnies<br />

de monter des spectacles parfois avec 2000 €… tout <strong>en</strong> leur reprochant<br />

de ne pas avoir un fonctionnem<strong>en</strong>t professionnel (<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dez :<br />

payer les répétitions… mais avec quoi ?) ou <strong>en</strong> leur disant qu’ils tourn<strong>en</strong>t<br />

peu (qui les achète ?) ou qu’ils coût<strong>en</strong>t cher dès qu’ils ont un projet<br />

à plus de trois personnes, ou avec un petit décor. Pour les quelques<br />

compagnies conv<strong>en</strong>tionnées (qui ne sont pas financées au projet,<br />

mais reçoiv<strong>en</strong>t des subv<strong>en</strong>tions régulières…), les <strong>en</strong>veloppes se réduis<strong>en</strong>t,<br />

les cahiers des charges s’alourdiss<strong>en</strong>t tandis que tous les<br />

coûts augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t. L’ess<strong>en</strong>tiel de leur énergie se perd dans des recherches<br />

de financem<strong>en</strong>t, et une nécessaire médiation avec des<br />

publics nouveaux puisque les collectivités exig<strong>en</strong>t désormais que les<br />

artistes, à moy<strong>en</strong>s au mieux constants, s’occup<strong>en</strong>t de colmater la<br />

désagrégation sociale <strong>en</strong> marche…<br />

Concrètem<strong>en</strong>t : les crédits déc<strong>en</strong>tralisés de l’État sont <strong>en</strong> forte baisse,<br />

avalés au trois quart par quelques grosses structures (C<strong>en</strong>tres Dramatiques,<br />

Chorégraphiques et d’Art de la rue nationaux, et dans une<br />

moindre mesure Scènes nationales et C<strong>en</strong>tres de Création musicale)<br />

qui <strong>en</strong> ont besoin pour fonctionner. Ne pouvant amputer les moy<strong>en</strong>s<br />

de ces structures nationales, l’État se dés<strong>en</strong>gage sur celles qui déjà<br />

ne se partageai<strong>en</strong>t que leurs miettes. À ces réductions au long cours<br />

vi<strong>en</strong>t s’ajouter une diminution sans précéd<strong>en</strong>t du financem<strong>en</strong>t culturel<br />

de la Région Paca, qui ne sait à quoi vont désormais se limiter<br />

ses compét<strong>en</strong>ces, puisque sa dotation d’État est <strong>en</strong> forte baisse. La<br />

diminution de 6% annoncée <strong>en</strong> 2013 se traduit plutôt par 10%, et<br />

on murmure que cela atteindra 25% de plus <strong>en</strong> 2014… Les conseils<br />

généraux baiss<strong>en</strong>t aussi fortem<strong>en</strong>t leurs subv<strong>en</strong>tions aux compagnies<br />

indép<strong>en</strong>dantes (10 à 15% dans les BdR, jusqu’à 50% dans le Var….).<br />

Dans ces conditions non seulem<strong>en</strong>t aucun tal<strong>en</strong>t nouveau ne peut<br />

éclore, ce qui est déjà le cas depuis 15 ans (d’où l’affreuse t<strong>en</strong>dance des<br />

jeunes artistes à vouloir flinguer les anci<strong>en</strong>s), mais bon nombre de<br />

compagnies ont disparu. D’autres vont suivre, malgré les départs à<br />

la retraite de la génération des pionniers de nos théâtres : les collectivités<br />

ne redistribueront pas leurs moy<strong>en</strong>s aux plus jeunes, <strong>en</strong> profitant<br />

pour économiser.<br />

Pr<strong>en</strong>ez-nous la tête<br />

Conséqu<strong>en</strong>ce immédiate ? Elle est déjà s<strong>en</strong>sible, atténuée par la capitale<br />

culturelle qui nourrit les corps, les yeux et aussi les esprits.<br />

Révélée par elle aussi : il est difficile de programmer du bon théâtre<br />

né dans ce territoire. Les compagnies d’ici ne manqu<strong>en</strong>t pas de tal<strong>en</strong>t,<br />

mais d’arg<strong>en</strong>t : sans répétitions, sans décors, sans possibilité de<br />

commander des textes à un auteur, sans capacité d’aller au-delà du<br />

duo ou trio d’acteurs, elles produis<strong>en</strong>t des œuvres d’une qualité insatisfaisante.<br />

Ce qui permet de justifier des déconv<strong>en</strong>tionnem<strong>en</strong>ts,<br />

autre technique de «gestion des ressources humaines» bi<strong>en</strong> connue<br />

des <strong>en</strong>treprises.<br />

Leur seul moy<strong>en</strong> de survivre est de se tourner vers les arts de la rue,<br />

qui ont ici des moy<strong>en</strong>s de production, de faire du jeune public pas cher,<br />

de proposer des relectures light du répertoire. Ou <strong>en</strong>core : de faire des<br />

lectures, de prés<strong>en</strong>ter des étapes de travail. Bref des formes pauvres,<br />

qui de surcroît éloign<strong>en</strong>t le public.<br />

Est-ce la fin du théâtre ? Si nous ne construisons que des musées et<br />

des boîtes à programmer ce qui tourne ailleurs, nous aurons droit à<br />

de la culture <strong>en</strong> conserve, et devi<strong>en</strong>drons un territoire sans parole.<br />

À l’heure où Marseille Prov<strong>en</strong>ce veut constituer une jonction <strong>en</strong>tre<br />

Méditerranée et Europe, ce serait une catastrophe…<br />

Quant à la volonté plus ou moins consci<strong>en</strong>te d’étouffer le g<strong>en</strong>re dramatique,<br />

de le remplacer peu à peu par les arts du corps, des yeux et<br />

du son (celui qui fait bouger les corps), il relève certes d’une volonté<br />

nécessaire d’affirmer l’importance de la chair et de la libérer, mais<br />

aussi d’une méfiance politique <strong>en</strong>vers la force subversive<br />

de cette pratique millénaire née avec la cité.<br />

On sait comm<strong>en</strong>t Jean Louis Barrault définissait<br />

l’art, c’est à dire pour lui le théâtre : «L’art, dans son<br />

ess<strong>en</strong>ce, est contestation, contestation de la mort,<br />

contestation contre les pharisi<strong>en</strong>s de tous poils, contestation<br />

de soi-même.»<br />

Depuis 68 l’histoire lui a donné tort et nombre de<br />

spectacles cons<strong>en</strong>suels sont v<strong>en</strong>us conforter l’action<br />

de Coca-Cola sur nos cerveaux disponibles. Mais cette<br />

utopie française d’un art révolutionnaire financé par<br />

l’État et les collectivités qui <strong>en</strong> dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t reste possible,<br />

à peu de frais : il suffit d’une volonté politique,<br />

c’est-à-dire d’une prise de consci<strong>en</strong>ce de la force de<br />

l’art, qui permette une réori<strong>en</strong>tation vers la création<br />

des crédits culturels, et refasse une place aux artistes.<br />

Un pôle théâtre qui aurait pour mission de produire,<br />

avec des moy<strong>en</strong>s et sans véto esthétique, toutes les<br />

compagnies régionales ? Une obligation pour toutes<br />

ces structures sorties de terre de les accueillir dans<br />

des conditions déc<strong>en</strong>tes ? Un réexam<strong>en</strong> des <strong>en</strong>veloppes<br />

attribuées aux compagnies indép<strong>en</strong>dantes ?<br />

Tout cela est plus que jamais nécessaire, et nettem<strong>en</strong>t<br />

moins coûteux qu’un stade vélodrome, une<br />

Villa Méditerranée ou les ors du Festival de Cannes.<br />

Sans doute moins r<strong>en</strong>table (quoique, le Palais<br />

de la Glace ou la Buzine…), mais cela s’appelle justem<strong>en</strong>t,<br />

dans notre monde libéral, l’exception culturelle.<br />

AGNÈS FRESCHEL


08<br />

É<br />

V<br />

É<br />

N<br />

E<br />

M<br />

E<br />

N<br />

TS<br />

Conjointem<strong>en</strong>t à l’émouvante exposition De la grâce à l’exil réunissant 12 œuvres<br />

de Camille Claudel et un projet sci<strong>en</strong>tifique et culturel au c<strong>en</strong>tre hospitalier<br />

de Montfavet, Avignon poursuivra la célébration de la sculptrice…<br />

Sublimer <strong>en</strong> 3 dim<strong>en</strong>sions<br />

Révolte, fureur créatrice et destruction... le<br />

poignant destin de Camille Claudel n’a pas fini<br />

de fasciner, si l’on <strong>en</strong> croit la très nombreuse<br />

assistance réunie lors du colloque qui vi<strong>en</strong>t de<br />

lui être consacré à Montfavet. De son art, de<br />

sa passion malheureuse pour Auguste Rodin<br />

on a presque tout dit, de même que de ses<br />

t<strong>en</strong>tatives pour échapper à l’ombre écrasante<br />

du maître. Restait à soulever le voile sur la<br />

tragédie familiale : fillette née trop vite après<br />

le décès d’un frère aîné, elle fut un <strong>en</strong>fant de<br />

remplacem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> somme, comme Van Gogh,<br />

comme Courbet... un cas fréqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> ce XIX e<br />

siècle à la mortalité infantile élevée. L’interv<strong>en</strong>tion<br />

de Michel Autrand montrait qu’au-delà<br />

des appar<strong>en</strong>ces, les destinées si dissemblables<br />

de Paul et Camille Claudel ont un tracé commun<br />

indéniable : celle du jeune frère, «névrotique<br />

et sublimatoire», dont il estimait sur la fin<br />

qu’elle était «une vie manquée» malgré les<br />

succès, et celle de la soeur, dépossédée de<br />

tout, <strong>en</strong>fermée à l’asile de 1913 à 1943. Hervé<br />

Castanet évoquait une femme complexe, qui<br />

«ne ti<strong>en</strong>t pas de l’héroïne hollywoodi<strong>en</strong>ne», <strong>en</strong><br />

incluant dans le tableau son rejet de l’autre,<br />

son antisémitisme, et ses positions anti-dreyfusardes...<br />

peut-être un premier signe de paranoïa<br />

montante. R<strong>en</strong>é Pandelon interrogeait quant<br />

à lui les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre psychose et fécondité artistique,<br />

notamm<strong>en</strong>t chez les femmes où la<br />

folie se décl<strong>en</strong>che globalem<strong>en</strong>t plus tard que<br />

chez les hommes : «Le psychotique met <strong>en</strong> place<br />

son délire là où il y avait un trou ; et la création<br />

peut à certaines conditions faire suppléance.»<br />

Un portrait croisé d’autant plus émouvant qu’il<br />

était livré sur les lieux mêmes où «Camille offrit<br />

ses cheveux au v<strong>en</strong>t», où sont exposées ses<br />

lettres de détresse à sa famille (voir Zib’62). Longtemps<br />

avant sa mort, les médecins estimai<strong>en</strong>t<br />

qu’une sortie de l’hôpital était <strong>en</strong>visageable ;<br />

sa mère a toujours refusé qu’il <strong>en</strong> soit ainsi.<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

Le colloque Camille Claudel, La femme, la folie,<br />

la création a eu lieu le 26 avril au C<strong>en</strong>tre<br />

Hospitalier de Montfavet. Tous les 1 rs mardis<br />

du mois, le Dr Pandelon y anime un séminaire<br />

intitulé Psychose et création, ouvert à tous<br />

et gratuit.<br />

R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts : 04 90 03 92 12<br />

Camille Claudel. De la grâce à l’exil<br />

jusqu’au 2 juin<br />

Musée des Arcades,<br />

C<strong>en</strong>tre hospitalier de Montfavet (84)<br />

04 90 03 90 80<br />

www.camilleclaudel2013.com<br />

…<strong>en</strong> tissant autour d’elle un li<strong>en</strong> avec quatre autres femmes-artistes dans Les Papesses.<br />

Un événem<strong>en</strong>t majeur et passionnant à découvrir dès le 9 juin au Palais des Papes<br />

et à la Collection Lambert<br />

Habemus Papas !<br />

Avec l’exposition Les Papesses, Avignon accueille<br />

un événem<strong>en</strong>t majeur et r<strong>en</strong>oue, après<br />

Picasso <strong>en</strong> 1970 et Barceló <strong>en</strong> 2010, avec les<br />

grandes d’expositions d’été. Grâce au part<strong>en</strong>ariat<br />

accru <strong>en</strong>tre la Collection Lambert et<br />

Avignon Tourisme (société d’économie mixte<br />

gestionnaire du Palais des Papes), la parole<br />

est donnée à cinq femmes artistes. Pour la<br />

première fois, Camille Claudel, Louise Bourgeois,<br />

Kiki Smith, Jana Sterbak et Berlinde De<br />

Bruyckere sont réunies, autour de l’histoire de<br />

Jeanne la Papesse, lég<strong>en</strong>de médiévale longtemps<br />

attestée par l’église romaine, qui prét<strong>en</strong>dait<br />

que cette femme, travestie, élue pape au IX e<br />

siècle, avait accouché un jour à cheval…<br />

300 œuvres tisseront la toile de ces Papesses<br />

de l’art moderne et contemporain, ayant <strong>en</strong><br />

commun une passion pour l’histoire de l’art et<br />

le choix de matériaux complexes, subtilem<strong>en</strong>t<br />

mises <strong>en</strong> dialogue d’un lieu à l’autre par Eric<br />

Mézil directeur de la Collection et commissaire<br />

d’exposition. Si l’hôtel de Caumont accueille<br />

les œuvres les plus fragiles, le Palais des Papes<br />

prés<strong>en</strong>te les pièces monum<strong>en</strong>tales. De la<br />

Grande Chapelle au Jardin B<strong>en</strong>oit XII, jusquelà<br />

inaccessible au public, on découvrira la<br />

Vierge au bûcher ou les tapisseries de Kiki<br />

Smith, l’Araignée ou The Welcoming hands de<br />

Louise Bourgeois, l’installation inédite et<br />

démesurée La Princesse au petit pois de Jana<br />

Sterbak ou les imm<strong>en</strong>ses sphères de verre inspirées<br />

de ses cosmogonies médiévales. Quant<br />

à Camille Claudel, après l’hommage r<strong>en</strong>du à<br />

Montfavet (voir zib’62), près de 30 sculptures,<br />

dont les Causeuses et l’Âge mur, prêtées par le<br />

Musée Rodin et le Grand Palais, seront visibles.<br />

Invitée de la Bi<strong>en</strong>nale de V<strong>en</strong>ise, Berlinde De<br />

Bruyckere prés<strong>en</strong>tera ses inquiétantes vitrines<br />

et sculptures, «du Bacon qui sortirait des tableaux»<br />

selon Eric Mézil. «Il s’agit pratiquem<strong>en</strong>t de monographies<br />

de chaque artiste mais tout va se<br />

croiser, les œuvres vont se parler dans une véritable<br />

interrelation» explique-t-il, ravi des prêts<br />

accordés par les grands musées nationaux :<br />

corps <strong>en</strong> métamorphose de Berlinde De Bruyckère<br />

ou Kiki Smith, alchimie et astrologie<br />

chez Jana Sterbak ou Louise Bourgeois, filiation<br />

chez Claudel ou Kiki Smith. Un résultat<br />

digne de la Cité des Papes, et qui démontre<br />

mine de ri<strong>en</strong> que les femmes peuv<strong>en</strong>t être de<br />

grandes sculptrices à défaut de prélat suprême<br />

! Accessible pour un ticket unique à 15 €<br />

(12 € réduit).<br />

DE.M.<br />

Les Papesses<br />

du 9 juin au 11 novembre<br />

Collection Lambert et Palais des Papes, Avignon<br />

Araignee, Louise Bourgeois © DE.M<br />

www.collectionlambert.com<br />

www.palais-des-papes.com


Chaud dehors capital<br />

La création artistique <strong>en</strong> espace public investit<br />

durant 3 jours la ville d’Aubagne. Issue d’un<br />

part<strong>en</strong>ariat r<strong>en</strong>ouvelé <strong>en</strong>tre le c<strong>en</strong>tre national<br />

de création Lieux Publics et Aubagne, la<br />

manifestation invite le public à suivre les<br />

compagnies régionales dans un nouveau festival<br />

placé sous le signe de Marseille Prov<strong>en</strong>ce<br />

2013 : Chaud dehors 2013.<br />

Dans 1, 2, 3… le plastici<strong>en</strong> Olivier Grossetête<br />

<strong>en</strong>traîne petits et grands à l’édification<br />

de trois bâtim<strong>en</strong>ts éphémères <strong>en</strong> carton. Une<br />

construction collective <strong>en</strong> avant-goût de la<br />

Ville éphémère <strong>en</strong> octobre prochain à Marseille<br />

p<strong>en</strong>dant les Métamorphoses, auxquelles participera<br />

égalem<strong>en</strong>t Archaos qui, avant la Gare<br />

Saint Charles, expérim<strong>en</strong>te les escaliers aubagnais<br />

avec une étape de travail de Run down<br />

issue des duos Stars on stairs. Dans les Urbanologues<br />

associés, le danseur vertical Antoine<br />

le M<strong>en</strong>estrel et Jean-Marie Maddeddu sont<br />

des VRP surréalistes échappés de la Cie Lézard<br />

Bleus pour une déambulation poétique, vue<br />

d’<strong>en</strong> haut ou d’<strong>en</strong> bas, à la découverte de la<br />

mémoire des murs de la ville. Feuilleton théâtral,<br />

plastique et musical à suivre égalem<strong>en</strong>t<br />

avec La Vieille, premier des textes qui constitue<br />

Le Grand ordinaire de la Cie Ambre. Après<br />

avoir illuminé l’inauguration de MP 2013,<br />

Studios de cirque prés<strong>en</strong>te le 3 e volet de la<br />

saga des anges avec Plumes Attacks ou le<br />

dernier jour sur terre. Initié lors de Sirènes et<br />

midi net <strong>en</strong> novembre, Alexandra Tandaim et<br />

la Cie Tandaim (voir p. 35) interrog<strong>en</strong>t dans<br />

We can be heroes © Nicolas Joubard<br />

Le mois du chrysantheme © Vinc<strong>en</strong>t Lucas<br />

Au travail<br />

Chantier au pluriel, performances, résid<strong>en</strong>ces,<br />

visites, cuisines et laboratoires, fabrications<br />

et parcours… il semblerait qu’avec l’arrivée de<br />

Thomas Fourneau à la direction (provisoire<br />

et exceptionnelle) des Informelles 2013 le<br />

monde du théâtre soit <strong>en</strong>fin reconnu comme<br />

partie intégrante de la classe œuvrante sinon<br />

ouvrière, acteurs, metteurs <strong>en</strong> scène et<br />

spectateurs compris. L’invitation est claire à<br />

ne pas rester yeux à moitié ouverts et bras<br />

ballants ni pour les uns, ni pour les autres : il<br />

faudra aller <strong>en</strong> ville sur des places (le cours<br />

d’Esti<strong>en</strong>ne d’Orves pour se mêler aux «héros<br />

chantants» du Group<strong>en</strong>fonction ; les Halles<br />

Delacroix pour découvrir ce que veut vraim<strong>en</strong>t<br />

G<strong>en</strong>eviève Sorin avec son Garçon, s’il vous<br />

plaît ! ; onze fois visiter des chantiers de fin<br />

de résid<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> sautant des barrières à la Gare<br />

Franche et aux Argonautes pour r<strong>en</strong>contrer des<br />

artistes v<strong>en</strong>us de Grèce -Kostas Koutsolelosdu<br />

Portugal -le projet Try Romance de Paula<br />

Diogo et Claudia Gaiolas ; le plastici<strong>en</strong><br />

polymorphe Joâo Garcia Miguel- de Norvège<br />

-le tumultueux musici<strong>en</strong> performeur JÆrg<strong>en</strong><br />

Knuds<strong>en</strong>- et puis de France et de Belgique<br />

tous les autres dont les titres claqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> pure<br />

énergie comme Blast, duo danse batterie,<br />

sonn<strong>en</strong>t chic (Res Privata ) ou jou<strong>en</strong>t au<br />

Le mois du chrysanthème la relation d’intimité<br />

<strong>en</strong>tre un acteur et des spectateurs, <strong>en</strong> «ram<strong>en</strong>ant<br />

nos morts au c<strong>en</strong>tre de nos villes». D’une<br />

tombe à l’autre, sur des mots issus de Douleur<br />

exquise de Sophie Calle, le public déambule<br />

d’une douleur intime à l’autre. La collection<br />

de spectacles continue avec la danse jukebox<br />

de Mouvim<strong>en</strong>to, une performance de Mathilde<br />

Monfreux, l’atelier musical Artaud cité m<strong>en</strong>é<br />

par le compositeur Wilfried W<strong>en</strong>dling avec<br />

cadavre exquis (Autopsie de Geoffrey Copini<br />

côtoie Barbecues, exploration ambitieuse et<br />

quantique du collectif de Quark à partir de<br />

2666 de Bolaño), la palme rev<strong>en</strong>ant à la<br />

sublime question mijotée aux Bernardines par<br />

Aurélie Leroux et Flor<strong>en</strong>ce Pazzottu, éclairée<br />

par l’incisive Marie Christine Soma Où dois-je<br />

<strong>en</strong>core monter avec mon désir ? Saine fatigue<br />

<strong>en</strong> perspective ! Mais comme pour comm<strong>en</strong>cer<br />

les créations par le 7 e jour, Thomas Fourneau,<br />

avec une exquise politesse, ouvre grand la<br />

porte à la Divine Party des Endimanchés<br />

m<strong>en</strong>és par Alexis Forestier, triptyque de<br />

quatre heures où s’<strong>en</strong>trechoqu<strong>en</strong>t le dantesque<br />

et le kafkaï<strong>en</strong>, paroles, images et musique de<br />

l’Enfer au Paradis. Superbe fête de théâtre qui<br />

augurera sans doute du chemin à parcourir<br />

pour le spectateur plein d’espoir ! Et <strong>en</strong>fin un<br />

lieu de fabrique et de monstration pour<br />

compagnies désarg<strong>en</strong>tées…<br />

MARIE-JO DHO<br />

Du Chantier à l’œuvre<br />

du 22 mai au 8 juin<br />

Les Bernardines, Marseille<br />

04 91 24 30 40<br />

www.theatre-bernardines.org<br />

des amateurs, les duos pour fontaines et marchés<br />

du réseau franco-itali<strong>en</strong> Marcher commun.<br />

DE.M.<br />

Chaud Dehors<br />

les 30, 31 mai et 1 juin<br />

Divers lieux, Aubagne<br />

04 91 03 91 28<br />

www.lieuxpublics.com<br />

www.aubagne.fr<br />

09<br />

É<br />

V<br />

É<br />

N<br />

E<br />

M<br />

E<br />

N<br />

TS


10<br />

É<br />

V<br />

É<br />

N<br />

E<br />

M<br />

E<br />

N<br />

TS<br />

C’est beau un musée,<br />

la nuit<br />

Le 18 mai, pour la neuvième année consécutive,<br />

a lieu <strong>en</strong> Europe la Nuit des musées. Le succès<br />

populaire de cette imm<strong>en</strong>se fête, où s’ouvr<strong>en</strong>t<br />

gratuitem<strong>en</strong>t les portes sur des visites nocturnes,<br />

est indéniable, quoiqu’<strong>en</strong> baisse ces dernières<br />

années à cause des restrictions budgétaires qui<br />

permett<strong>en</strong>t plus difficilem<strong>en</strong>t d’inviter du spectacle<br />

vivant... Mais cette année sur le territoire<br />

la capitale culturelle devrait temporairem<strong>en</strong>t<br />

sauver les appar<strong>en</strong>ces !<br />

À Arles les expositions pr<strong>en</strong>dront d’étranges<br />

formes, comme celle du musée Réattu et son<br />

exposition Nuages (voir p78) ; ou marqueront<br />

des lancem<strong>en</strong>ts, ainsi l’éveil de la Vénus d’Arles,<br />

au MdAA (Zib 62).<br />

Les galeries d’art contemporain s’ouvr<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

nocturne à Marseille de même que le premier<br />

étage du J1 et sa superbe exposition Méditerranées,<br />

la Vieille Charité, la Friche qui pr<strong>en</strong>d<br />

de l’avance avec son 48h chrono à partir du 17<br />

mai (voir p 60), le musée Cantini avec l’exposition<br />

Matta (Zib 61), ou <strong>en</strong>core Regards de<br />

Prov<strong>en</strong>ce face à la mer, le nouveau FRAC…<br />

Le musée de la mine de Gréasque organise<br />

un rallie quizz à la lampe de poche et l’atelier<br />

Cézanne d’Aix s’anime de concerts électro-pop.<br />

D’autres font toucher de près une technique,<br />

En 2011 et 2012 les saisons d’été du théâtre Silvain,<br />

organisées par la mairie du 1 er secteur et<br />

sout<strong>en</strong>ue par la Région, avai<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>contré un<br />

succès public inatt<strong>en</strong>du, remplissant souv<strong>en</strong>t<br />

les 2800 places, regroupant sur les gradins de<br />

pierre des dizaines de milliers de<br />

personnes v<strong>en</strong>ues profiter à prix<br />

très doux de propositions culturelles<br />

hétéroclites, propres à am<strong>en</strong>er<br />

au spectacle un public familial<br />

d’après la plage, et souv<strong>en</strong>t de<br />

grande qualité : retransmission <strong>en</strong><br />

direct du Festival d’Aix, soirées<br />

cinéma choisies, Orchestre des<br />

Jeunes de la Méditerranée avec<br />

musique <strong>en</strong> création, opéra pour<br />

tous, et une belle soirée avec Fred<br />

Nevchehirlian… En fabriquant sa<br />

programmation sans grand moy<strong>en</strong>s<br />

mais avec les énergies locales et<br />

les structures existantes, le Théâtre<br />

Silvain avait proposé une culture<br />

de qualité, ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t musicale,<br />

à tous.<br />

Cette année les propositions sont aussi nombreuses<br />

mais s’ori<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t davantage, au printemps,<br />

vers le théâtre, versant comique, <strong>en</strong> accueillant<br />

des recalés de MP2013. Mais qui ne l’est pas ?<br />

les choix <strong>en</strong> termes de théâtre se sont jusqu’à<br />

prés<strong>en</strong>t révélés peu pertin<strong>en</strong>ts, et rares ! Le<br />

celle de la mosaïque au musée des Faï<strong>en</strong>ces<br />

de la Tour d’Aigues…<br />

Nouveauté de l’année, le numérique ! Une<br />

application androïd, Urban Pulse, initiative de<br />

Veolia Transdev, «fonctionne comme une véritable<br />

start-up basée à Paris et New York» et a<br />

pour ambition de dev<strong>en</strong>ir «l’application mondiale<br />

incontournable pour tous ceux qui sort<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

ville». Et qui dispos<strong>en</strong>t d’un matériel adéquat, et<br />

cher, alors que la nuit des musées est une <strong>en</strong>treprise<br />

de démocratisation !<br />

Une initiative moins globalisante : un part<strong>en</strong>ariat<br />

a été noué avec le ministère de l’Éducation pour<br />

Mémoire marseillaise populaire<br />

Le Pays des galejeurs © Stef Durel<br />

© Sam Mert<strong>en</strong>s<br />

Printemps des Marseillais part dans le s<strong>en</strong>s<br />

inverse <strong>en</strong> invitant des grands noms nés près<br />

d’ici : Patrick Bossovi<strong>en</strong>t offrir le 11 juinun stand<br />

up unique sur Marseille, où il retrouve et dépeint<br />

l’esprit des ouvriers d’immigration réc<strong>en</strong>te avec<br />

une acuité surpr<strong>en</strong>ante ; les Carboni repr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />

le 14 juin Au Pays du soleil, opérette<br />

marseillaise qui tourne avec un succès fou à<br />

Paris et Avignon depuis trois ans, et où ils font<br />

preuve d’un savoir faire musical et scénique<br />

dev<strong>en</strong>u très rare <strong>en</strong> son g<strong>en</strong>re ; Philippe Caubère<br />

r<strong>en</strong>ouvelle le 8 juin sa Danse du Diable,<br />

associer les scolaires (primaires, collèges et<br />

lycées) à travers l’opération La Classe. Les élèves<br />

devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t passeurs de culture, transmett<strong>en</strong>t<br />

leur savoir et leurs regards aux visiteurs : 100<br />

musées <strong>en</strong> France sont dans l’av<strong>en</strong>ture, pour<br />

une culture qui ne se disp<strong>en</strong>se pas d’<strong>en</strong> haut<br />

par les ondes, mais se construit <strong>en</strong> rhizome, à<br />

échelle humaine.<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Nuit europé<strong>en</strong>ne des musées<br />

le 18 mai<br />

www.nuitdesmusees.culture.fr<br />

inoubliable exploit d’autobiographie scénique<br />

virtuose ; et Serge Valletti vi<strong>en</strong>t le 16 juin mettre<br />

<strong>en</strong> scène Gilles Ascaride dans son propre<br />

texte J’ai tué Maurice Thorez ! un dialogue hilarant<br />

publié aux éditions du Fioupélan et qui<br />

plonge dans la culture ouvrière<br />

marseillaise des années 60. Enfin<br />

Philippe Caubère revi<strong>en</strong>t avec<br />

Michel Galabru pour leur fameux<br />

Jules et Marcel, échanges épistolaires<br />

<strong>en</strong>tre Pagnol et Raimu le 18<br />

juin.<br />

Autour de ce printemps volontairem<strong>en</strong>t<br />

c<strong>en</strong>tré sur des stars qui vont<br />

plaire, et à prix qui rest<strong>en</strong>t petits<br />

(25 euros un spectacle, mais 50<br />

euros les 5..), d’autres propositions,<br />

souv<strong>en</strong>t gratuites : un concert<br />

Hawa et Rive Gauche (Soul et<br />

électro) le 29 mai, les impressionnantes<br />

r<strong>en</strong>contres vocales des<br />

Vallonés avec 42 chorales le 31<br />

mai, puis des projections, concerts,<br />

et… kermesses ! Tout l’été, à la nuit tombée, à<br />

21h30, avec des navettes maritimes et terrestres<br />

au départ du Vieux Port…<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Théâtre Silvain, Marseille 7 e<br />

www.capsur2013.fr


Richesse et diversité botanique<br />

Pour la 11 e année, la Direction du patrimoine<br />

du ministère de la Culture,<br />

toujours <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat avec l’association<br />

des Parcs et Jardins de France,<br />

vous donne R<strong>en</strong>dez-vous aux jardins<br />

où le temps d’un week-<strong>en</strong>d (31<br />

mai au 2 juin) quelques 2000 jardins<br />

<strong>en</strong> France ouvr<strong>en</strong>t leurs portes, dont<br />

certains seulem<strong>en</strong>t à cette occasion.<br />

En cette année de commémoration<br />

du 4 e c<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire de la naissance<br />

d’André Le Nôtre, jardinier du roi Louis<br />

XIV, la manifestation posera la question<br />

de la création sous le thème «Le<br />

jardin et ses créateurs». Qui crée<br />

le jardin ? Jardinier, concepteur, propriétaire,<br />

théorici<strong>en</strong> de l’art, artiste,<br />

plastici<strong>en</strong>, écrivain, poète, philosophe,<br />

peintre… tous particip<strong>en</strong>t de cette<br />

création qui se laisse tranquillem<strong>en</strong>t<br />

découvrir au grès de déambulations,<br />

mais aussi de confér<strong>en</strong>ces, r<strong>en</strong>contres,<br />

ateliers, installations… selon les<br />

lieux.<br />

À Bouc-Bel-Air, comme chaque<br />

année depuis 21 ans, les Jardins d’Albertas,<br />

classés monum<strong>en</strong>t historique,<br />

programm<strong>en</strong>t les Journées des plantes<br />

(24 au 26 mai). Au programme<br />

des ateliers (de la vannerie de jardin<br />

pour découvrir le tressage de l’osier<br />

de façon traditionnelle, création de<br />

lettres et art postal), une confér<strong>en</strong>ce<br />

par Emmanuel Gueydon, paysagiste,<br />

sur Arbres, herbes et compagnie…<br />

une cohér<strong>en</strong>ce écologique, un tour<br />

de France des arbres remarquables,<br />

découverte des arbres et de leurs<br />

secrets avec Yvan Gindre, expert<br />

ornem<strong>en</strong>tal, visite guidée des jardins,<br />

interludes musicaux, expositions…<br />

À Mane, dans les Alpes de Haute-<br />

Prov<strong>en</strong>ce, le prieuré de Salagon,<br />

site classé Musée de France et Jardin<br />

remarquable, multiplie les manifestations<br />

(1 er et 2 juin). Côté confér<strong>en</strong>ces,<br />

l’ethnobotaniste Pierre Lieutaghi<br />

(concepteur des jardins) donnera<br />

Une leçon de pati<strong>en</strong>ce : les jardins de<br />

Salagon <strong>en</strong>tre int<strong>en</strong>tions humaines et<br />

temps du végétal : <strong>en</strong>tre bilan historique<br />

(les jardins de Salagon ont 25<br />

ans) et av<strong>en</strong>ture culturelle, humaniste<br />

et pédagogique (1 er juin à 15h) ; le<br />

l<strong>en</strong>demain le collectif Transition <strong>en</strong><br />

Forcalquierie prés<strong>en</strong>tera Une autre<br />

façon de cultiver son jardin (à 15h),<br />

donnant des méthodes de culture<br />

© Jardins Albertas<br />

aussi astucieuses qu’originales… Une<br />

exposition vi<strong>en</strong>dra informer sur Les<br />

insectes pollinisateurs, créateurs de<br />

biodiversité au jardin, avec les apiculteurs<br />

amateurs de Haute-Prov<strong>en</strong>ce<br />

et l’association pour la promotion de<br />

l’apiculture de loisirs. Les ateliers,<br />

nombreux, donn<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dez-vous autour<br />

de la création d’un jardin de<br />

s<strong>en</strong>teurs, d’un imaginographe (vous<br />

pourrez créer votre propre jardin<br />

dans une boite magique !), de la<br />

création d’un jardin <strong>en</strong> lasagnes<br />

(méthodes de culture astucieuses, à<br />

découvrir), de teintures végétales…<br />

Si vous ne partez pas avec le clown<br />

Jardinus Felix dans son île verte et<br />

fleurie, ou sur les pas de conteuses<br />

qui vous mèneront Au jardin des<br />

rêves…<br />

DO.M.<br />

Salagon, musée et jardins<br />

Mane<br />

04 92 75 70 50<br />

www.musee-de-salagon.com<br />

Les Jardins d’Albertas<br />

Bouc-Bel-Air<br />

04 91 59 84 94<br />

www.jardinsalbertas.com<br />

www.paca.culture.gouv.fr<br />

11<br />

É<br />

V<br />

É<br />

N<br />

E<br />

M<br />

E<br />

N<br />

TS<br />

De l’eau, du délicat<br />

Pour sa 5 e édition, le festival Les Eauditives,<br />

initié par la Zone d’Intérêt<br />

poétique (ZIP) de Plaine Page, à Barjols,<br />

poursuit sa navigation poétique<br />

et artistique, réunissant pour l’occasion<br />

plus de tr<strong>en</strong>te auteurs et artistes<br />

autour des lieux d’eau de Brignoles<br />

et Barjols. Mais pas seulem<strong>en</strong>t, car<br />

cette année le festival investit aussi<br />

les rues et les places, le Pôle culturel<br />

des Comtes de Prov<strong>en</strong>ce, la médiathèque<br />

de Brignoles, la ZIP…<br />

À Brignoles, les fontaines font l’objet<br />

d’un parcours qui donnera lieu à des<br />

lectures et performances, des installations<br />

plastiques, mais aussi et<br />

surtout à un balisage urbain par des<br />

estampes, affichage mis <strong>en</strong> place par<br />

les artistes graveurs de l’Artothèque ;<br />

la médiathèque accueille un débat<br />

de Georges Olivari et Odile Jacquemin<br />

sur les Eaux et fontaines du Var ;<br />

une exposition de Claudie L<strong>en</strong>zi et<br />

Christian Neroni, Délits de l’eau, r<strong>en</strong>d<br />

compte de leur travail sur la matière.<br />

À Barjols, la rue de la République accueille<br />

des poèmes à ciel ouvert, une<br />

installation performative, et la galerie<br />

ZIP 22 une exposition de Lole Saisset,<br />

Kamishibaïs, Histoire d’eau, soit<br />

des petits théâtres de papier issus de<br />

la tradition des colporteurs japonais.<br />

Enfin la manifestation fera l’objet d’une<br />

publication par les éditions Plaine<br />

Page d’un numéro spécial de la<br />

revue Art Matin.<br />

DO.M.<br />

Les Eauditives<br />

les 7 et 8 juin<br />

Brignoles<br />

les 14 et 15 juin<br />

Barjols<br />

ZIP / Plaine Page<br />

04 94 72 54 81<br />

www.plainepage.com<br />

© X-D.R<br />

Dans le secret<br />

des contes<br />

Cela fait 11 ans que le Parc<br />

des Troènes, à La Valettedu-Var,<br />

se transforme <strong>en</strong> village de contes pour accueillir la<br />

manifestation Contes & Jardins. Avec un public de plus <strong>en</strong> plus<br />

nombreux, 9200 spectateurs <strong>en</strong> 2012 contre 7080 <strong>en</strong> 2011, et <strong>en</strong><br />

progression constante chaque année, elle s’inscrit dans les festivals<br />

qui compt<strong>en</strong>t !<br />

Sous les t<strong>en</strong>tes traditionnelles, ce sont 8 conteurs qui transporteront<br />

petits et grands dans leur imaginaire : Flor<strong>en</strong>ce Desnouveaux,<br />

conteuse, rapporteuse, m<strong>en</strong>teuse, collecteuse hors norme ;<br />

Olivier Ponsot, conteur funambule sur corde vocale ; Jean-Louis<br />

Cu<strong>en</strong>ne dont l’univers musical se regarde avec les oreilles et<br />

s’écoute avec les yeux ; Katia Belalimat qui recueille des contes<br />

issus de la tradition orale touarègue ; Christian Tardif, conteur et<br />

comédi<strong>en</strong>, puise dans le répertoire oral mais aussi les récits de<br />

vie ; Catherine Zarcate, qui a initié le r<strong>en</strong>ouveau du conte <strong>en</strong><br />

France, unit dans chaque récit profondeur et humour ; Raphaël<br />

Faure, qui associe la musique à ses contes ; Christele Pim<strong>en</strong>ta,<br />

formée au théâtre, à la danse, au clown, au masque… ; et Luigi<br />

Rignanese, ciseleur de chansons, d’histoires, de musiques et de<br />

danses collectives… Profitez de tout, la convivialité est le maîtremot<br />

de ce festival «hors du temps». Avec une petite nouveauté<br />

cette année, des r<strong>en</strong>contres et des siestes contées qui permettront<br />

de prolonger le plaisir <strong>en</strong> s’ouvrant à de nouvelles s<strong>en</strong>sations<br />

auditives…<br />

DO.M.<br />

Contes et jardins<br />

du 23 au 26 mai<br />

Parc des Troènes, La Valette<br />

04 94 23 62 06<br />

www.lavalette83.fr


La Villa qui ouvre, qui ou<br />

12<br />

V<br />

ILL<br />

A<br />

M<br />

ÉDITERRANÉE<br />

L’ouverture au public de la Villa<br />

Méditerranée se fait par étapes !<br />

Après un colloque des présid<strong>en</strong>ts<br />

des parlem<strong>en</strong>ts europé<strong>en</strong>s<br />

<strong>en</strong> avril (voir Zib 62), un Forum<br />

du quotidi<strong>en</strong> Libération<br />

a fait bruisser le dialogue…<br />

avant un concert puis un docu.<br />

Le programme se poursuit<br />

et s’int<strong>en</strong>sifie <strong>en</strong> juin (voir p14),<br />

avec l’ouverture des expositions<br />

et pléthore de spectacles,<br />

films et concerts.<br />

Pour nous habituer peu à peu<br />

à l’abondance ?<br />

© Gaelle Cloarec<br />

Libé retrouve son nom<br />

En pleine crise de la presse Libération, qui n’est<br />

parfois pas le dernier à jeter de l’huile sur des<br />

feux inutiles (voir Zib 61), a voulu à Marseille jouer<br />

un rôle fédérateur <strong>en</strong> invitant intellectuels, journalistes,<br />

politiques et citoy<strong>en</strong>s à faire débat autour<br />

de l’actualité méditerrané<strong>en</strong>ne. Huit tables rondes<br />

très ouvertes à la parole du public ont permis<br />

de faire un tour des points chauds du bassin.<br />

Intitulée Agir aujourd’hui <strong>en</strong> Méditerranée, la table<br />

ronde inaugurale réunissait autour d’Alexandra<br />

Schwartzbrod le présid<strong>en</strong>t de la Région PACA<br />

Michel Vauzelle, Samir Dilou, ministre tunisi<strong>en</strong><br />

des droits de l’homme et de la justice transitionnelle,<br />

et Dimitris Kourkoulas, secrétaire d’État<br />

grec aux affaires étrangères. Pour ce dernier, «la<br />

Grèce se trouve plus près de la sortie de crise<br />

que du début, mais cela dép<strong>en</strong>d beaucoup de ce<br />

qui va se passer autour». Pour Samir Dilou, «on<br />

ne peut pas demander aux peuples qui ont souffert<br />

p<strong>en</strong>dant des déc<strong>en</strong>nies d’att<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>core,<br />

pourtant la régulation demande du temps». Pour<br />

Michel Vauzelle <strong>en</strong>fin, la solution apportée par<br />

les élus locaux peut être celle du dialogue avec<br />

la société civile : «Sans att<strong>en</strong>dre que nos gouvernem<strong>en</strong>ts<br />

pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t des décisions, nous pouvons<br />

réfléchir <strong>en</strong>semble, car les jeunes ont les mêmes<br />

préoccupations à Alger ou à Marseille : emploi,<br />

drogue, t<strong>en</strong>tations extrémistes...»<br />

Tous s’inquièt<strong>en</strong>t du dev<strong>en</strong>ir de la Syrie, des conséqu<strong>en</strong>ces<br />

de cette crise humanitaire énorme, et<br />

s’interrog<strong>en</strong>t sur le fait d’armer les rebelles au<br />

risque de voir ces armes se retourner contre la<br />

population. La Grèce a vu augm<strong>en</strong>ter de 400%<br />

le nombre de réfugiés syri<strong>en</strong>s cette année. Dans<br />

notre monde globalisé, une économie détruite<br />

pèse sur tous les voisins...<br />

Une révolution aussi ! un débat s’interrogeait :<br />

Jeunes du Caire de Madrid et d’Athènes, même<br />

combat ? Les trois jeunesses révoltées et<br />

indignées sont différ<strong>en</strong>tes, mais ont des points<br />

communs troublants. Encadrés par le correspondant<br />

de Libération François Musseau, les<br />

jeunes racont<strong>en</strong>t leurs <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts et leurs<br />

espérances : «Nous devons réagir, trouver des<br />

solutions.» Une meilleure communication <strong>en</strong>tre<br />

les élus et le public, <strong>en</strong>tre le Nord et le Sud, et<br />

grâce aux réseaux sociaux permettrait selon eux<br />

une meilleure mobilisation citoy<strong>en</strong>ne. Pour évoluer,<br />

pourquoi pas ?, «vers une nouvelle Europe plus<br />

solidaire». Car l’ess<strong>en</strong>tiel pour eux est de voir se<br />

dessiner un av<strong>en</strong>ir qui les pr<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> compte, <strong>en</strong>fin.<br />

Une exig<strong>en</strong>ce plus criante <strong>en</strong>core lorsque les<br />

regards se conc<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t sur Alger Nouvelle Génération<br />

: <strong>en</strong> 6 courts métrages, on découvre 6<br />

regards différ<strong>en</strong>ts sur Alger rassemblés par les<br />

deux journalistes Aurélie Charon et Caroline<br />

Gillet dans un docum<strong>en</strong>taire. L’objectif, comme<br />

celui de la table ronde qui suit, est de faire<br />

<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre la voix des jeunes Algéri<strong>en</strong>s <strong>en</strong> ce cinquant<strong>en</strong>aire<br />

de l’Indép<strong>en</strong>dance. Une jeunesse<br />

qui ress<strong>en</strong>t le vide, l’<strong>en</strong>nui et l’immobilisme mais<br />

aussi, comme le fait remarquer Amina Zoubir,<br />

l’une des six cinéastes, le manque d’espace<br />

laissé à l’individu. Dans cette Algérie «<strong>en</strong> quête<br />

d’une autre histoire», la sociologue Fatma Oussedic<br />

rappelle l’importance de la lutte féministe,<br />

puisque l’assujettissem<strong>en</strong>t à l’homme reste<br />

ancré dans le mode de vie, sans réel changem<strong>en</strong>t<br />

générationnel.<br />

Presse et libération<br />

Mais c’est sans doute lorsque les débats ont<br />

abordé l’information qu’ils ont eu le plus de<br />

sincère acuité. Ainsi, pour parler d’AL-Jazzera<br />

au-delà des clichés, Mathieu Guidère, professeur<br />

d’Islamologie à l’université de Toulouse,<br />

retraça brièvem<strong>en</strong>t l’histoire de la chaîne<br />

d’information atypique de sa création <strong>en</strong> 1996<br />

jusqu’à son rôle dans le Printemps Arabe. La<br />

perception de la chaîne a fortem<strong>en</strong>t changé<br />

depuis que, sans être actrice des révolutions<br />

elle <strong>en</strong> a permis la diffusion, et a donné un visage<br />

et une parole à l’opposition. Mais c’est aujourd’hui<br />

qu’elle se banalise : fortem<strong>en</strong>t concurr<strong>en</strong>cée<br />

dans les pays où la parole s’est libérée, Al<br />

Jazzera est <strong>en</strong> perte d’audi<strong>en</strong>ce… et se rec<strong>en</strong>tre<br />

sur le sport, une branche considérable qui<br />

impacte majoritairem<strong>en</strong>t les jeunes.<br />

Le débat sur le traitem<strong>en</strong>t de l’information dans<br />

la presse méditerrané<strong>en</strong>ne a su se préserver<br />

des évitem<strong>en</strong>ts habituels et Nicolas Demorand<br />

a d’emblée précisé les <strong>en</strong>jeux : «les voies et<br />

moy<strong>en</strong>s du journalisme de qualité sont <strong>en</strong> érosion<br />

constante. Et si la presse écrite disparait, les<br />

médias dominants, audiovisuels, ne feront pas le<br />

travail démocratique.» Ignacio Cembrero chiffra<br />

précisém<strong>en</strong>t le problème : El Païs avait <strong>en</strong><br />

2006 420 journalistes et v<strong>en</strong>dait 430 000<br />

exemplaires. Aujourd’hui les v<strong>en</strong>tes ont chuté à<br />

310 000 exemplaires, et les recettes publicitaires<br />

ont diminué de 60%. Le journal autrefois<br />

largem<strong>en</strong>t bénéficiaire est aujourd’hui <strong>en</strong> déficit,<br />

les journalistes sont moins de 300, et font le<br />

même travail qu’avant, augm<strong>en</strong>té de celui pour<br />

les éditions numériques… Le traitem<strong>en</strong>t de l’information,<br />

forcém<strong>en</strong>t, s’<strong>en</strong> ress<strong>en</strong>t, le travail<br />

d’investigation est dev<strong>en</strong>u trop rarem<strong>en</strong>t possible,<br />

les sources sont moins vérifiées, on cherche<br />

des sujets qui se v<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t, et ce qui coûte cher,<br />

<strong>en</strong>quête au long cours ou à l’étranger, prés<strong>en</strong>ce


vre…<br />

au parlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong> ou couverture<br />

régionale, tout cela se réduit…<br />

Avirama Golan, journaliste israéli<strong>en</strong>ne,<br />

répondit à une spectatrice<br />

qui l’interpellait sur le traitem<strong>en</strong>t<br />

d’un fait divers à Aubagne, qui avait<br />

été prés<strong>en</strong>té dans Ha’aretz comme<br />

une agression à caractère antisémite<br />

alors qu’il s’agissait d’une simple<br />

altercation : elle avoua, impuissante,<br />

que les faits divers internationaux<br />

ne pouvai<strong>en</strong>t plus être traités<br />

sérieusem<strong>en</strong>t, vérifiés, les témoignages<br />

confrontés, et que son<br />

journal s’<strong>en</strong> remettait comme les<br />

autres à des relais pas toujours<br />

fiables : «Aujourd’hui on sait tout<br />

dans l’instant, c’est magnifique, mais<br />

les fausses nouvelles aussi se multipli<strong>en</strong>t.»<br />

Yannis Pret<strong>en</strong>deris, éditorialiste<br />

pour les quotidi<strong>en</strong>s To Vima et Ta<br />

Nea, fut <strong>en</strong>core plus amer : «La<br />

presse grecque n’a pas vu v<strong>en</strong>ir la<br />

crise, et le peuple le lui reproche,<br />

nous traversons une véritable crise<br />

de confiance parce que nous<br />

n’avons pas été assez bons, et ne<br />

le sommes toujours pas.» Quant au<br />

traitem<strong>en</strong>t de la question europé<strong>en</strong>ne<br />

il est «à côté de la plaque,<br />

la presse se focalise sur Merkel petit<br />

Satan, et n’<strong>en</strong>quête pas.» Et Yannis<br />

Pret<strong>en</strong>deris de conclure : «Nous<br />

devons inv<strong>en</strong>ter un nouveau type de<br />

journalisme, qui sache traiter des<br />

problèmes europé<strong>en</strong>s, qui intervi<strong>en</strong>ne<br />

dans la vie publique, qui dise<br />

pourquoi la Grèce est <strong>en</strong> faillite, qui<br />

voit v<strong>en</strong>ir les choses et les analyse.<br />

Qui cherche à savoir à qui est la<br />

faute et comm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> sortir.»<br />

Redonner de la crédibilité et de la<br />

force démocratique à la presse,<br />

débattre de son av<strong>en</strong>ir et de ses<br />

formes, est sans doute le meilleur<br />

moy<strong>en</strong> pour retrouver des lecteurs.<br />

Le Forum Libération a su ouvrir à<br />

la fois un débat sur cet av<strong>en</strong>ir, et<br />

brillamm<strong>en</strong>t inaugurer l’esprit<br />

démocratique de cette nouvelle<br />

maison de la Méditerranée.<br />

AGNÈS FRESCHEL, GAËLLE CLOAREC<br />

ET MANON MATHIEU<br />

Ces débats ont eu lieu<br />

les 19 et 20 avril<br />

Souleyman,<br />

fouteur de oaï<br />

magnifique<br />

L’icône syri<strong>en</strong>ne de la dabhka<br />

a électrisé l’inauguration musicale<br />

de la Villa Méditerranée<br />

La fête sera de courte durée et aura mal comm<strong>en</strong>cé<br />

(des problèmes techniques ont plombé<br />

le démarrage du concert). Pourtant, <strong>en</strong>tre la star<br />

syri<strong>en</strong>ne des mariages et le public marseillais<br />

v<strong>en</strong>u découvrir le nouvel édifice régional, la nuit<br />

de noces est explosive.<br />

Omar Souleyman, <strong>en</strong> dépit d’une allure austère<br />

rappelant un réc<strong>en</strong>t dictateur iraki<strong>en</strong>, sait décl<strong>en</strong>cher<br />

la liesse. L’homme aux moustaches,<br />

keffieh rouge et lunettes noires ne s’<strong>en</strong>combre<br />

pas d’instrum<strong>en</strong>ts traditionnels. Sur fond de<br />

synthétiseurs strid<strong>en</strong>ts qui reproduis<strong>en</strong>t avec<br />

frénésie des sonorités ori<strong>en</strong>tales (luths, violons,<br />

percussions) <strong>en</strong>tortillées dans une électro primaire,<br />

Souleyman chante son désir pour les femmes.<br />

Celles qu’il a connues autant que celles qui lui<br />

ont échappé, comme le montr<strong>en</strong>t les sous-titres<br />

de ses textes, projetés pour l’occasion <strong>en</strong> fond<br />

de scène. Aujourd’hui réfugié <strong>en</strong> Turquie, il est la<br />

voix d’une dabhka r<strong>en</strong>ouvelée, musique festive<br />

traditionnelle liée à une danse folklorique du<br />

Moy<strong>en</strong>-Ori<strong>en</strong>t qui a fini par <strong>en</strong>traîner l’auditorium<br />

de la Villa Méditerranée. Comme il a su séduire<br />

l’Islandaise Björk et le Britannique Damon Albarn.<br />

Après une heure de concert dans une ambiance<br />

exaltée, Omar quitte la scène, sans rappel. Beaucoup<br />

plus chaleureux, Rayess Bek partage avec<br />

son prédécesseur des origines ori<strong>en</strong>tales -lui est<br />

Libanais- et un goût certain pour la musique<br />

électronique qu’il distille dans un hip hop proche<br />

du slam au propos assez finem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>gagé, repr<strong>en</strong>ant<br />

Brass<strong>en</strong>s et Vian. Mais l’apport le plus<br />

intéressant est la prés<strong>en</strong>ce d’un joueur de oud qui<br />

anoblit une rythmique plutôt conv<strong>en</strong>tionnelle.<br />

THOMAS DALICANTE<br />

Rayess Bek et Omar Souleyman ont joué<br />

le 3 mai à la Villa Méditerranée, à Marseille<br />

Voyage au bout de la nuit<br />

Pour son premier r<strong>en</strong>dez-vous cinéma du cycle<br />

intitulé Les yeux dans les yeux, la Villa Méditerranée<br />

nous a proposé un voyage au bout de la<br />

nuit avec le film de Yolande Zauberman: Would<br />

you have sex with an arab ?, succession des témoignages<br />

de juifs et palestini<strong>en</strong>s israéli<strong>en</strong>s<br />

dans la nuit festive de Tel Aviv.<br />

Ils sont jeunes, écout<strong>en</strong>t la même musique, se<br />

ressembl<strong>en</strong>t, se crois<strong>en</strong>t dans les bars, les boîtes<br />

et dans<strong>en</strong>t au bord du même précipice creusé<br />

par leur Histoire de haine et de sang. Des Romeo<br />

et Juliette pot<strong>en</strong>tiels à qui la réalisatrice, au<br />

mom<strong>en</strong>t où faibliss<strong>en</strong>t les inhibitions, demande<br />

s’ils ferai<strong>en</strong>t l’amour <strong>en</strong>semble. Question simple,<br />

frontale, fermée. La caméra guette la surprise, la<br />

Would you have sex with an arab de Yolande Zauberman<br />

Omar Souleyman Copyright Alex Woodward © Crimson Glow Photography<br />

gêne, la nervosité des interviewés. Avant les<br />

mots, les visages <strong>en</strong> gros plan révèl<strong>en</strong>t le conflit<br />

intime. Car qu’ils l’ai<strong>en</strong>t déjà fait, le ferai<strong>en</strong>t peutêtre,<br />

ou ne le ferai<strong>en</strong>t jamais, les réponses<br />

montr<strong>en</strong>t que l’id<strong>en</strong>tité de l’autre conditionne le<br />

désir. Qu’on ignore «l’<strong>en</strong>nemi» considéré comme<br />

in-<strong>en</strong>visageable ou qu’on couche avec lui par<br />

conviction pacifiste, on a peur de tomber amoureux,<br />

peur des conséqu<strong>en</strong>ces. La mixité chantée<br />

par les poètes est réservée aux courageux qui<br />

accept<strong>en</strong>t d’être des «électrons libres» ou à ceux<br />

qui ont cru un jour à la paix. «Ce n’est pas au lit<br />

qu’on mettra fin à la guerre» dit <strong>en</strong> substance Juliano<br />

Mer-Khamis, metteur <strong>en</strong> scène né d’un<br />

mariage mixte, assassiné à J<strong>en</strong>ine et auquel le<br />

film est dédié. On ne construit<br />

pourtant que sur le désir, affirme<br />

Yolande Zauberman qui croit <strong>en</strong> la<br />

puissance des marges. La traversée<br />

de la nuit qui suit dans sa<br />

dernière séqu<strong>en</strong>ce la traîne rouge<br />

de la fiancée palestini<strong>en</strong>ne, transsexuel<br />

à l’id<strong>en</strong>tité liquide, s’achève<br />

dans la lumière crue du jour sur les<br />

barbes et les schtreimels des<br />

orthodoxes comme une gueule de<br />

bois après l’ivresse. E.P<br />

13<br />

V<br />

I<br />

L<br />

L<br />

A<br />

M<br />

ÉDITERRANÉE


Une Villa pour<br />

la Méditerranée<br />

14<br />

V<br />

ILL<br />

A<br />

M<br />

ÉDITERRANÉE<br />

Construit autour des <strong>en</strong>jeux contemporains<br />

spécifiques à la Méditerranée, le programme<br />

d’ouverture de la Villa Méditerranée, accessible<br />

au public depuis le 3 mai, dévoile la richesse<br />

créative du bassin méditerrané<strong>en</strong>. Le directeur<br />

de la Villa, François de Boisgelin, confiait dans<br />

un réc<strong>en</strong>t <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> (voir zib’57) la particularité<br />

de ce nouveau bâtim<strong>en</strong>t d’être un lieu de r<strong>en</strong>dez-vous<br />

(gratuits pour la plupart) destiné à la<br />

r<strong>en</strong>contre d’experts et à la circulation de tous les<br />

citoy<strong>en</strong>s. En plus de débats et colloques, des<br />

parcours d’exposition sont imaginés et racontés<br />

par un artiste-narrateur (ou une narratrice, promettait<br />

le directeur dans ce même <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>), ainsi<br />

que des manifestations artistiques et culturelles<br />

sout<strong>en</strong>ues cette année par Marseille-Prov<strong>en</strong>ce<br />

2013.<br />

Plus loin que l'horizon, Istanbul, 19-09-2012 © Villa Mediterranee-Bruno Ulmer<br />

Les parcours expositions<br />

Ces parcours, perman<strong>en</strong>ts ou temporaires, validés<br />

par un comité sci<strong>en</strong>tifique, sont la marque<br />

de fabrique de la Villa. Des dispositifs scénographiques<br />

innovants, interactifs, qui plong<strong>en</strong>t<br />

le spectateur dans un récit visuel et sonore.<br />

Ainsi, dès le 14 juin s’ouvre Plus loin que l’horizon,<br />

parcours conçu sur 3 ans et réalim<strong>en</strong>té régulièrem<strong>en</strong>t<br />

par le docum<strong>en</strong>tariste Bruno Ulmer qui<br />

nous plonge, à partir de plusieurs récits des<br />

Ulysses d’aujourd’hui, au cœur des mobilités<br />

méditerrané<strong>en</strong>nes. Tourisme de masse version<br />

croisière dans Welcome on board, ou traversées<br />

humaines avec Les hommes qui march<strong>en</strong>t et Les<br />

clandestins de la mer. Un parcours à vivre <strong>en</strong><br />

pr<strong>en</strong>ant le temps de la contemplation.<br />

Parallèlem<strong>en</strong>t, 2031 <strong>en</strong> Méditerranée, nos futurs !<br />

(du 14 juin à sept 2013), conduit par Régis Sauder,<br />

donne la parole à la jeunesse du pourtour<br />

méditerrané<strong>en</strong>. Après Nous, Princesses de Clèves,<br />

le réalisateur repr<strong>en</strong>d son principe d’ateliers participatifs,<br />

m<strong>en</strong>és à Beyrouth, Izmir, Tunis, et avec<br />

une classe du lycée Saint Exupéry à Marseille,<br />

où des jeunes de 15 à 20 ans dis<strong>en</strong>t librem<strong>en</strong>t<br />

«leur» Méditerranée. Un triple dispositif permettra<br />

de découvrir leurs angoisses, leurs espoirs<br />

et leurs rêves. Le dessinateur «public» B<strong>en</strong>oît<br />

Bonnemaison-Fitte a traduit leurs représ<strong>en</strong>tations<br />

d’av<strong>en</strong>ir p<strong>en</strong>dant qu’une caméra filmait<br />

le travail. Une fresque d’images diffusera les<br />

slogans imaginés par les participants.<br />

La programmation<br />

événem<strong>en</strong>tielle<br />

Des manifestations pluridisciplinaires invit<strong>en</strong>t à<br />

découvrir de nouvelles façons de vivre <strong>en</strong>semble.<br />

Dans le cadre du cycle Exils et retours, le 17<br />

mai, spectacle To Diplo Biblio (Le double livre),<br />

<strong>en</strong> grec surtitré, par la jeune Cie Pequod qui<br />

adapte le roman de Dimitris Hatzis, l’un des<br />

plus importants de la littérature grecque de<br />

l’après-guerre sur le récit d’une émigration <strong>en</strong><br />

Allemagne et d’un retour déraciné. Les 23 et 24<br />

mai, ce sera la pièce bouleversante de Nasser<br />

Djemaï, Invisibles, un hommage aux hommes<br />

v<strong>en</strong>us travailler <strong>en</strong> France et qui vieilliss<strong>en</strong>t ici,<br />

écartelés <strong>en</strong>tre deux rives.<br />

Côté cinéma, beaucoup de projections : le docum<strong>en</strong>taire<br />

les Oubliés de Cassis de Sonia Kichah<br />

(le 21 mai à 19h), les R<strong>en</strong>contres internationales<br />

des cinémas arabes (du 28 mai au 2<br />

juin) avec Aflam (voir p.26) ; Première Passion<br />

de Philippe Baron (4 juin), Pasolini pa* Palestine,<br />

une création making of du collectif Ildi ! eldi<br />

d’après le film d’Avre<strong>en</strong> Anastas (le 6) ; Mur de<br />

Simone Bitton, Une bouteille à la mer de<br />

Thierry Binisti et Le fils de l’autre de Lauraine<br />

Levy (le 8) ; Le cochon de Gaza de Sylvain<br />

Estival (le 9), et le 11 juin à 18h30, confér<strong>en</strong>ce<br />

sur la problématique de l’eau rare L’eau <strong>en</strong><br />

partage. Le soir, concert Une nuit dans le désert<br />

du joueur de oud Yaïr Dalal et le 25 juin, les<br />

pionniers du rap Algéri<strong>en</strong> : Lofti Double Kanon.<br />

Avec Le Trait et Le temps scellé, la chorégraphe<br />

Nacera Belaza prés<strong>en</strong>te le 28 juin deux pièces<br />

hypnotiques qui inocul<strong>en</strong>t l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> cercles<br />

et délicatesse, la force de leur empreinte spirituelle.<br />

La création d’Hubert Colas, Gratte-Ciel, à partir<br />

du docum<strong>en</strong>taire de Sonia Chiambretto créé<br />

sur la base d’archives et témoignages de jeunes<br />

Algéri<strong>en</strong>s conclura cette ouverture, du 3 au 7<br />

juillet.<br />

DE.M.<br />

04 95 09 42 52<br />

www.villa-mediterranee.org<br />

Le Temps scellé<br />

© The Jakarta Post<br />

- Jerry Adiguna


Voyage à l’intérieur du MuCEM<br />

Cet équipem<strong>en</strong>t majeur sera une bulle d’oxygène pour toute la région !<br />

Pourtant, à quelques jours de son ouverture, le cont<strong>en</strong>u et la vocation du musée rest<strong>en</strong>t<br />

mystérieux pour la plupart de ceux qui l’ont vu patiemm<strong>en</strong>t s’ériger au fil des ans…<br />

16<br />

M<br />

UCE<br />

M<br />

Un Musée des civilisations<br />

© Agnès Mellon<br />

Bruno Suzzarelli<br />

Directeur du MuCEM, anci<strong>en</strong> inspecteur général<br />

de l’administration au ministère de la<br />

Culture, il a dirigé depuis novembre 2009 la<br />

création du musée à Marseille, et la construction<br />

des trois pôles : le bâtim<strong>en</strong>t du J4 et ses<br />

passerelles, le Fort saint Jean et ses jardins,<br />

le C<strong>en</strong>tre de ressources et le déménagem<strong>en</strong>t<br />

des collections. Aujourd’hui il coordonne le<br />

fonctionnem<strong>en</strong>t, l’évolution du projet et la<br />

programmation culturelle.<br />

Bruno Suzzarelli © MUCEM-Christophe Fouin<br />

<strong>Zibeline</strong> : Le MuCEM a longtemps passé pour<br />

une Arlési<strong>en</strong>ne muséale, un projet dont tout le<br />

monde parle et que personne ne voit jamais.<br />

Pouvez-vous nous rappeler ses origines ?<br />

Bruno Suzzarelli : C’est le premier Musée national<br />

déc<strong>en</strong>tralisé <strong>en</strong> province, un geste fort,<br />

qui a pris du temps. La décision de principe du<br />

ministère remonte à 2000, les études préparatoires<br />

se sont succédé, les concours… il y a eu<br />

trois ans de flottem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre 2005 et 2008, puis<br />

la désignation de Marseille-Prov<strong>en</strong>ce comme<br />

Capitale europé<strong>en</strong>ne de la Culture a permis<br />

d’accélérer le mouvem<strong>en</strong>t, de convaincre les<br />

collectivités de participer à l’investissem<strong>en</strong>t :<br />

dans l’intérêt de tous il fallait que le MuCEM soit<br />

ouvert <strong>en</strong> 2013.<br />

Ce ne sera pas le seul établissem<strong>en</strong>t national <strong>en</strong><br />

région, certains monum<strong>en</strong>ts historiques comme<br />

le Château de Compiègne ont ce statut, et les<br />

ant<strong>en</strong>nes régionales du Louvre ou du C<strong>en</strong>tre<br />

Pompidou relèv<strong>en</strong>t d’un financem<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>tral<br />

d’État. Mais là il s’agissait de faire v<strong>en</strong>ir les collections<br />

du musée parisi<strong>en</strong> des Arts et Traditions<br />

Populaires, ce qui a un tout autre s<strong>en</strong>s.<br />

Il y a eu égalem<strong>en</strong>t, dès le début du projet de<br />

déc<strong>en</strong>tralisation, des hésitations sur le cont<strong>en</strong>u…<br />

Oui, à plusieurs titres. Fallait-il faire v<strong>en</strong>ir à Marseille<br />

les Arts et Traditions Populaires tels qu’ils<br />

étai<strong>en</strong>t, ou changer le format et le projet sci<strong>en</strong>tifique<br />

? Mon prédécesseur, Michel Colardelle,<br />

a compris qu’il fallait élargir le champ géographique<br />

d’un fonds muséal ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t français<br />

et historiquem<strong>en</strong>t colonial, pour l’ouvrir à un XX e<br />

siècle éclaté. Depuis 2009 nous <strong>en</strong>visageons le<br />

MuCEM comme un musée de la Méditerranée dans<br />

son rapport avec l’Europe, changem<strong>en</strong>t qui s’est<br />

opéré ici, <strong>en</strong> nous imprégnant du territoire.<br />

Un autre aspect important est notre vocation<br />

pluridisciplinaire…<br />

Un musée DES civilisations…<br />

Oui. On ne prét<strong>en</strong>d pas être issus de l’ethnologie,<br />

nos témoignages ne sont pas seulem<strong>en</strong>t<br />

ethnographiques. Ils relèv<strong>en</strong>t du quotidi<strong>en</strong>, mais<br />

r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t compte de tous les regards des sci<strong>en</strong>ces<br />

sociales, des phénomènes de société, des<br />

grandes questions qui agit<strong>en</strong>t la Méditerranée : la<br />

mobilité, la religion, les guerres, l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t…<br />

Outre les expositions perman<strong>en</strong>tes et temporaires<br />

nous voulons que le MuCEM soit un lieu<br />

de r<strong>en</strong>contres, de débats, de propositions artistiques,<br />

dans un esprit très accueillant. Nous avons<br />

une ambition démocratique, nous voulons nous<br />

adresser aux g<strong>en</strong>s qui vont et ne vont pas au<br />

musée <strong>en</strong> multipliant les occasions de les intéresser.<br />

Un musée comme le nôtre doit faire<br />

compr<strong>en</strong>dre sa vocation.<br />

Qui est ?<br />

De créer une nouvelle vision de la Méditerranée,<br />

qui n’impose pas un point de vue européaniste.<br />

De donner du recul, pour permettre d’élever le<br />

niveau de compréh<strong>en</strong>sion de cet espace.<br />

Définir un champ, c’est définir ses frontières.<br />

Vous limiterez-vous à la Méditerranée, irez-vous<br />

vers l’Asie et l’Afrique ?<br />

Nous n’empièterons pas sur les collections et<br />

vocations du Quai Branly !<br />

N’y a-t-il pas quelque chose de gênant dans le<br />

fait de garder à Paris les Musées d’Art, et d’établir<br />

à Marseille les Traditions populaires ?<br />

Marseille est une ville populaire, ce qui n’a pas<br />

de li<strong>en</strong> avec nos collections. On récuse ici cette<br />

idée de la hiérarchie <strong>en</strong>tre les arts : pour construire<br />

un musée des civilisations les questions<br />

de société s’expos<strong>en</strong>t à travers des objets usuels,<br />

des beaux arts, de l’art contemporain : le regard<br />

des artistes est important et différ<strong>en</strong>t, un musée<br />

de société qui s’<strong>en</strong> priverait se couperait une<br />

jambe.<br />

Combi<strong>en</strong> de visiteurs att<strong>en</strong>dez-vous ?<br />

On estime à 250 000 le nombre annuel de visiteurs<br />

dans tous les musées de Marseille. Ce qui<br />

est largem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> dessous de villes équival<strong>en</strong>tes<br />

ou plus petites comme Bordeaux, Lille, Toulouse<br />

ou Lyon. Ce retard va être comblé avec tous les<br />

nouveaux équipem<strong>en</strong>ts muséaux. Ici nous comptons<br />

sur 300 000 visiteurs annuels, ce qui semble<br />

un objectif moy<strong>en</strong> ambitieux mais raisonnable.<br />

Nous travaillons sur des segm<strong>en</strong>ts de public,<br />

scolaires, touristes, ou dans le champ social,<br />

pour que tout le monde vi<strong>en</strong>ne…<br />

Le fonctionnem<strong>en</strong>t du MuCEM suppose une<br />

part de recettes propres importante <strong>en</strong> volume.<br />

Comm<strong>en</strong>t comptez-vous l’obt<strong>en</strong>ir ?<br />

Oui, de l’ordre de18 ou 20%, ce qui peut sembler<br />

peu, et le serait à Paris. Mais ici, avec la politique<br />

tarifaire qui correspond à nos ambitions démocratiques,<br />

la billetterie ne suffira pas à fournir<br />

ces recettes. Les cas de gratuité sont nombreux,<br />

il n’y a pas ici le même cons<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t à payer.<br />

Comm<strong>en</strong>t allez-vous faire ?<br />

Le mécénat n’est pas non plus facile à l’heure<br />

actuelle… Nous allons louer les espaces à des<br />

événem<strong>en</strong>ts privés. Il y aura aussi une librairie et<br />

un restaurant. Qui ne transformeront pas ce lieu<br />

<strong>en</strong> temple de la consommation !<br />

Pas de boutiques avec des fac-similé <strong>en</strong> plâtre ?<br />

Avec la Librairie Maupetit je p<strong>en</strong>se que l’on peut<br />

gager sur la qualité !<br />

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL


18<br />

M<br />

UCE<br />

M<br />

Exposer la p<strong>en</strong>sée<br />

<strong>Zibeline</strong> : Vous êtes responsable du cont<strong>en</strong>u<br />

sci<strong>en</strong>tifique du musée de l’Europe et de la Méditerranée.<br />

Pourquoi avoir conçu la majeure partie<br />

de sa surface perman<strong>en</strong>te comme des galeries de<br />

la Méditerranée ?<br />

Zeev Gourarier : Il y avait une idée forte préalable<br />

à ma v<strong>en</strong>ue, qui n’était pas une bonne idée : comm<strong>en</strong>t<br />

faire un musée de l’Europe et de la Méditerranée<br />

sans être néocolonialiste ? Les collections des ATP<br />

sont historiquem<strong>en</strong>t constituées d’objets français<br />

et de ses anci<strong>en</strong>nes colonies… et la Méditerranée<br />

n’apparti<strong>en</strong>t pas à l’Europe. Il fallait par ailleurs<br />

construire ce musée autour d’une problématique.<br />

P<strong>en</strong>ser la Méditerranée va de soi.<br />

Pourquoi ?<br />

La méditerranée est un <strong>en</strong>semble cohér<strong>en</strong>t qui<br />

constitue un cas particulier de l’histoire des hommes,<br />

un bassin de civilisation singulier, où les trois grands<br />

monothéismes sont nés. Il y a des histoires parallèles<br />

des civilisations. Certes le bassin méditerrané<strong>en</strong><br />

n’est pas supérieur aux bassins chinois ou aztèque.<br />

Mais on peut y retrouver des traces des grandes<br />

mutations humaines, sur un temps long, conjoncturel<br />

et événem<strong>en</strong>tiel.<br />

C’est-à-dire ?<br />

La première galerie s’appelle, dans cet ordre, Inv<strong>en</strong>tion<br />

de l’agriculture et naissance des Dieux. En<br />

Méditerranée cela se passe il y a 6000 ans, mais<br />

les dieux sont nés aussi ailleurs. Tout se passe<br />

comme si, <strong>en</strong> se séd<strong>en</strong>tarisant, <strong>en</strong> domestiquant<br />

la nature, l’homme ne pouvait plus se s<strong>en</strong>tir un animal.<br />

Et que cette domination de la nature le conduise,<br />

par analogie, à inv<strong>en</strong>ter des dieux le dominant.<br />

Cela se passe partout, chez tous les hommes, de<br />

la même manière.<br />

Et vous allez montrer cela ? Que l’homme inv<strong>en</strong>te<br />

Dieu ?<br />

Les dieux. Oui, je vais essayer ! Ce n’est pas facile<br />

d’exposer des concepts que le visiteur peut appréh<strong>en</strong>der<br />

au gré de ses déambulations… Donc :<br />

Al-Buraq devant la mosquee Al-Aqsa, Nasser Ellefi, Tunisie, vers 2000,<br />

peinture sous verre © MuCEM<br />

l’homme quitte la p<strong>en</strong>sée totémique, celle d’un<br />

aborigène qui se p<strong>en</strong>se kangourou –pas comme<br />

un kangourou, mais véritablem<strong>en</strong>t kangourou. Il<br />

quitte aussi la p<strong>en</strong>sée animiste, celle qui fait que<br />

l’on demande son avis à la montagne, aux élém<strong>en</strong>ts<br />

-la p<strong>en</strong>sée animiste persiste dans la croyance<br />

astrologique, un mode de p<strong>en</strong>sée ne disparait pas<br />

tout à fait quand une autre apparait…<br />

Donc, l’homme inv<strong>en</strong>te les dieux…<br />

Oui, c’est la première révolution de l’humanité. Le<br />

chasseur-cueilleur se séd<strong>en</strong>tarise, partout dans le<br />

monde par vague, et change son mode de p<strong>en</strong>sée.<br />

Il devi<strong>en</strong>t analogique et p<strong>en</strong>se que, puisqu’il plante<br />

et domestique, quelqu’un l’a créé et décide pour<br />

lui. Il n’est plus l’animal, mais comme l’animal.<br />

C’est donc une vision de l’homme que vous exposez<br />

dans vos galeries. Y’at-il une hiérarchie<br />

<strong>en</strong>tre ces modes de p<strong>en</strong>sée, un progrès ?<br />

Zeev Gourarier<br />

Conservateur général du patrimoine, il est le<br />

directeur sci<strong>en</strong>tifique et culturel du MuCEM<br />

depuis novembre 2010, le commissaire des<br />

expositions perman<strong>en</strong>tes des galeries de la<br />

Méditerranée et du Temps des loisirs. Directeur<br />

adjoint des ATP jusqu’à leur fermeture <strong>en</strong><br />

2002, puis directeur du musée de l’homme,<br />

il a publié de nombreux ouvrages, notamm<strong>en</strong>t<br />

sur la fête<br />

et le cirque, et<br />

conçu de grandes<br />

expositions<br />

au Grand Palais<br />

ou à Versailles.<br />

Zeev Gourarier<br />

© MuCEM<br />

L’homme développe des systèmes de p<strong>en</strong>sée <strong>en</strong><br />

rapport avec le monde dans lequel il vit. Le mode<br />

de p<strong>en</strong>sée du chasseur cueilleur est le meilleur dans<br />

son monde, et ne peut pas être un modèle dans le<br />

nôtre, même si il peut nous appr<strong>en</strong>dre des choses.<br />

Depuis 100 000 ans au moins les capacités cognitives<br />

des hommes n’ont pas changé, il n’y a pas<br />

de supériorité d’une civilisation sur une autre. Tout<br />

au plus des progrès, techniques, et des progrès<br />

dans le respect de l’autre.<br />

La Méditerranée n’est donc pour vous qu’un<br />

exemple ?<br />

Non. Elle a de fortes singularités conjoncturelles,<br />

qui l’ont conduite vers la seconde grande mutation<br />

de l’humanité. L’inv<strong>en</strong>tion des monothéismes,<br />

dont Jérusalem sera le symbole dans l’exposition,<br />

conduit l’homme à p<strong>en</strong>ser que ce ne sont pas les<br />

dieux qui font mal et lui qui subit, mais lui qui agit<br />

mal, qui est responsable et redevable auprès des<br />

autres. Ce qui constitue un progrès moral considérable,<br />

et permet l’inv<strong>en</strong>tion de la citoy<strong>en</strong>neté (objet de<br />

la troisième galerie) qui naît <strong>en</strong> Grèce, mystérieusem<strong>en</strong>t.<br />

Pas pour tous…<br />

Oui la citoy<strong>en</strong>neté grecque est sectorielle, il faut<br />

être homme, libre, avoir une panoplie… Les céramiques<br />

grecques ne montr<strong>en</strong>t pas le citoy<strong>en</strong> qui<br />

vote, mais qui chasse ou banquète. La citoy<strong>en</strong>neté<br />

évolue, <strong>en</strong> particulier parce que le Christ proclame<br />

que tous les hommes ont une âme, y compris le<br />

Rois mages v<strong>en</strong>us d’ailleurs… Peu à peu on se<br />

demande pourquoi Dieu n’a pas donné d’âme aux<br />

Amérindi<strong>en</strong>s, si les noirs, si les femmes ont une<br />

âme, et quelque chose se passe au niveau de la<br />

morale. Même si -nous le montrons avec une guillotine,<br />

le mur de Berlin- le droit à la vie ou le droit<br />

de circuler ne sont pas acquis.<br />

Vous parliez d’une seconde grande mutation, que<br />

nous sommes <strong>en</strong> train de vivre, comme les chasseurs-cueilleurs<br />

?<br />

Oui. Nous sortons du mode de p<strong>en</strong>sée analogique,<br />

c’est la p<strong>en</strong>sée naturaliste qui pr<strong>en</strong>d le dessus.<br />

Nous ne sommes plus des agriculteurs, nous ne<br />

compr<strong>en</strong>ons plus le monde par comparaison, mais<br />

<strong>en</strong> le découvrant, <strong>en</strong> compr<strong>en</strong>ant que nous sommes<br />

différ<strong>en</strong>ts de la nature, mais constitués de la<br />

même matière.<br />

Donc sans nécessité de Dieu créateur.<br />

L’idée de Dieu comm<strong>en</strong>ce à ne plus être obligatoire<br />

au XVIII e siècle. Avant cela c’est in<strong>en</strong>visageable.<br />

L’homme a découvert le monde ; avec Vasco de Gama<br />

la Méditerranée est dev<strong>en</strong>ue une mer intérieure.<br />

Dans Au-delà du monde connu, la quatrième galerie,<br />

on <strong>en</strong>tre dans le temps événem<strong>en</strong>tiel, on montre<br />

de beaux objets, une sirène des îles Fidji, des<br />

soieries, des porcelaines, des objets précieux… pour<br />

que ceux que j’ai perdu avec mes concepts ai<strong>en</strong>t<br />

au moins le plaisir des yeux ! La navigation, les<br />

cartes des Portulans, un astrolabe, des instrum<strong>en</strong>ts<br />

de précision, une caravelle…<br />

Après cela il n’y aura plus qu’à <strong>en</strong>chainer avec le<br />

Noir et le Bleu ?<br />

Oui, il comm<strong>en</strong>ce où mes galeries finiss<strong>en</strong>t !<br />

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL


Les Lumières et leur ombre<br />

<strong>Zibeline</strong> : Le Noir et le bleu est le titre d’un ouvrage que<br />

vous avez publié <strong>en</strong> 1998…<br />

Oui, cette exposition est le fruit d’une vingtaine d’années<br />

de réflexion. Il s’agit de mettre <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce ce qui fait de<br />

la lumière et ce qui la nie. C’est-à-dire la barbarie. Les<br />

lumières et leur ombre.<br />

Qui sont donc reliées ?<br />

Oui. L’exposition part des Désastres de la guerre de Goya.<br />

Des idéaux des Lumières qui conduis<strong>en</strong>t à la répression<br />

barbare, à la douleur. Ce qui interroge dès l’<strong>en</strong>trée sur<br />

l’idée de civilisation, et permet d’écrire immédiatem<strong>en</strong>t<br />

ce mot au pluriel. Il faut r<strong>en</strong>verser la carte m<strong>en</strong>tale pour<br />

compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’ombre et la lumière sont reliées.<br />

Pourquoi symboliser les contradictions par ces couleurs,<br />

qui d’ailleurs ne s’oppos<strong>en</strong>t pas ?<br />

Parce que les 400 œuvres que nous exposons nous parl<strong>en</strong>t<br />

aussi de notre «obstination à rêver, dans laquelle chaque<br />

civilisation trouve s<strong>en</strong>s et direction» comme l’affirme<br />

Wajdi Mouawad : face à Goya il y a Miro, son bleu, infini, que<br />

le Noir ponctue, plus ou moins, linéaire comme l’écriture.<br />

À partir de ces trois points départ, le Bleu, le Noir, le rêve<br />

méditerrané<strong>en</strong>, vous avez conçu un parcours historique…<br />

…<strong>en</strong> douze mom<strong>en</strong>ts. Nous suivons le fil du temps par<br />

nappes, <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant garde d’équilibrer les représ<strong>en</strong>tations<br />

: chaque mom<strong>en</strong>t doit être regardé des deux rives,<br />

sans euroc<strong>en</strong>trisme. Or nous avons, historiquem<strong>en</strong>t, plus<br />

de représ<strong>en</strong>tations europé<strong>en</strong>nes. J’ai donc veillé à ce que<br />

les œuvres exposées se répond<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t possible<br />

<strong>en</strong> miroir. Ainsi, lorsque nous évoquons la conquête<br />

napoléoni<strong>en</strong>ne de l’Égypte, nous mettons <strong>en</strong> regard la<br />

répression du Caire vue par Abel Gance ou Youssef Chahine.<br />

Pour la colonisation française nous montrons les<br />

représ<strong>en</strong>tations algéri<strong>en</strong>nes d’Abd el-Kader, où il apparaît<br />

sur un pied d’égalité avec Napoléon III. Nous montrons aussi<br />

comm<strong>en</strong>t Mehemet Ali, qui se prés<strong>en</strong>te comme le successeur<br />

de Bonaparte, repr<strong>en</strong>d l’argum<strong>en</strong>t de civilisation<br />

pour moderniser l’Égypte.<br />

Les int<strong>en</strong>tions civilisatrices sont donc ambigües, dominatrices,<br />

mais relevant d’une utopie ?<br />

Dès 1832 l’utopie méditerrané<strong>en</strong>ne apparait chez les<br />

Saint Simoni<strong>en</strong>s. Le topos du Rêve méditerrané<strong>en</strong> passe<br />

<strong>en</strong>suite par le philhellénisme, la célébration de l’antique.<br />

La Grèce blanche, comme le dit Philippe Jockey, qui blanchissait<br />

la statuaire pour r<strong>en</strong>dre purs les visages, jusqu’aux<br />

films nazis de L<strong>en</strong>i Rief<strong>en</strong>stahl… On retrouve pourtant le<br />

rêve Saint Simoni<strong>en</strong> autour du percem<strong>en</strong>t du Canal de Suez<br />

avec de belles images d’archives du début du siècle, qui<br />

célèbr<strong>en</strong>t une continuité dev<strong>en</strong>ue possible par la connexion<br />

du chemin de fer et de la navigation à vapeur…<br />

L’idéal du progrès technique…<br />

Ou le même, celui, généreux, de La Civilisation Universelle<br />

nourrie par la Raison, fondée par la Sci<strong>en</strong>ce et agie<br />

par la Technique. En même temps le XIX e siècle a inv<strong>en</strong>té<br />

la mer, la villégiature, le Grand Tour, bâtit des corniches…<br />

Nous montrons cela à travers des affiches, des objets,<br />

des photographies. Puis nous nous attachons à trois villes<br />

composées de multiples populations : Istanbul, Alexandrie,<br />

Beyrouth. Le rêve cosmopolite a plusieurs visages, effrayant<br />

lorsqu’on regarde le Registre des indésirables à<br />

Istanbul même si, à travers les photographies du personnel<br />

de la banque Ottomane, on se r<strong>en</strong>d compte à quel<br />

point ce cosmopolitisme était réel…<br />

Le parcours se poursuit par l’évocation de trois intellectuels…<br />

Oui. Le Gai savoir de Nietzsche, le Cimetière marin de Paul<br />

Valéry, la Prière de Taha Hussein. La Méditerranée est,<br />

pour ces trois hommes-là, un rêve partagé. Il y a aussi,<br />

dans les années 30, une connexion intellectuelle et artistique,<br />

que l’on illustre par le mom<strong>en</strong>t andalou de Lorca<br />

et de Manuel de Falla. Puis le parcours vire au tragique…<br />

Comm<strong>en</strong>t illustrez-vous cette plongée dans le Noir ?<br />

Avec le Minotaure de Masson. On s’interroge sur les représ<strong>en</strong>tations<br />

fascistes, nazies, que l’on met <strong>en</strong> regard avec<br />

la résistance d’Abdelkrim au Maroc ; sur les reconstitutions<br />

des batailles qui servai<strong>en</strong>t la propagande ; sur la<br />

France, qui, pour le c<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire de la conquête algéri<strong>en</strong>ne,<br />

l’a rejouée <strong>en</strong> armes. Avec des arrêts sur les nœuds tragiques<br />

de l’Histoire, qui ont brisé le rêve : l’inc<strong>en</strong>die de<br />

Smyrne <strong>en</strong> 1922, Barcelone 36/40, la destruction de<br />

Marseille <strong>en</strong> 43, Setif 45, Jérusalem 48, Suez 56, avec le<br />

déboulonnage de la statue de Lesseps, Alger 62, avec <strong>en</strong><br />

regard la joie des Algéri<strong>en</strong>s, le désespoir de ceux qui<br />

part<strong>en</strong>t…<br />

Le Noir a-t-il gagné, l’idéal est-il mort ?<br />

Wajdi Mouawad nous dit le contraire dès l’<strong>en</strong>trée. Les<br />

poètes et les artistes le réinv<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, ou <strong>en</strong> témoign<strong>en</strong>t :<br />

Thierry Fabre<br />

Responsable du développem<strong>en</strong>t culturel et des relations<br />

internationales du MuCEM, commissaire général<br />

de l’exposition inaugurale Le noir et le bleu, chargé de<br />

la programmation culturelle Les Int<strong>en</strong>sités d’été.<br />

Docteur <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces politiques,<br />

il a quitté l’Institut du<br />

Monde Arabe et la revue Al<br />

Qantara qu’il dirigeait pour<br />

fonder à Marseille, <strong>en</strong><br />

1994, les R<strong>en</strong>contres<br />

d’Averroès, et la revue<br />

La P<strong>en</strong>sée de midi qu’il a<br />

dirigé durant ses 10 ans<br />

d’exist<strong>en</strong>ce.<br />

Thierry Fabre © Agnès Mellon<br />

Bleu II, Joan Miro, 1961, C<strong>en</strong>tre National Georges Pompidou, Paris<br />

Soutine, De Staël, Klein et sa Vague<br />

regard<strong>en</strong>t à nouveau vers le Bleu… Il<br />

est réinv<strong>en</strong>té aussi par le savoir, et<br />

nous évoquerons Germaine Tillion, et<br />

Braudel. Avec des salves d’av<strong>en</strong>ir<br />

pour conclure : une installation contemporaine<br />

humoristique de Larissa<br />

Sansour, et l’espoir porté par les<br />

peuples qui aujourd’hui écriv<strong>en</strong>t une<br />

partie significative de l’histoire, avec<br />

les révolutions…<br />

Au long de ce parcours, les œuvres<br />

illustr<strong>en</strong>t-elles une thèse ?<br />

Les œuvres ne sont pas là pour illustrer,<br />

mais pour faire surgir. Avec cet<br />

alliage rare d’œuvres d’art, d’archives<br />

fortes et de créations contemporaines,<br />

nous cherchons à créer une<br />

puissance symbolique, un mode de<br />

préh<strong>en</strong>sion s<strong>en</strong>sible, pour exposer<br />

une p<strong>en</strong>sée visuelle. Un catalogue<br />

complété par un abécédaire, ainsi<br />

qu’un ouvrage évoquant sous forme<br />

de Portraits ceux qui sont évoqués<br />

dans l’exposition, prolongeront la<br />

démarche, et donneront une épaisseur<br />

plus conceptuelle à ce qui est<br />

mis <strong>en</strong> œuvre ici. Tous sont sous<br />

presse, et seront disponibles le jour<br />

de l’inauguration.<br />

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL<br />

Le Noir et le Bleu. Un rêve méditerrané<strong>en</strong><br />

1500 m , J4<br />

jusqu’au 6 janvier 2014<br />

www.mucem.org<br />

19<br />

M<br />

P2013


20<br />

M<br />

UCE<br />

M<br />

Les g<strong>en</strong>res humains ?<br />

<strong>Zibeline</strong> : Pourquoi avez-vous choisi de vous<br />

c<strong>en</strong>trer, pour cette exposition inaugurale temporaire,<br />

sur la question du g<strong>en</strong>re <strong>en</strong> Méditerranée ?<br />

D<strong>en</strong>is Chevallier : Un musée des civilisations doit<br />

aborder les grandes questions de société qui<br />

agit<strong>en</strong>t son espace. Les questions chaudes et<br />

polémiques. Nous <strong>en</strong> avons défini plusieurs : celle<br />

de l’eau, le thème du religieux, les migrations, la<br />

ville, et toutes les interrogations liées à l’altérité,<br />

à comm<strong>en</strong>t vivre «<strong>en</strong>tre autres». Le MuCEM veut<br />

s’emparer de ces sujets brûlants, prés<strong>en</strong>ts aussi<br />

dans les expositions inaugurales… Mais le point<br />

à propos du masculin féminin, fondateur du groupe<br />

social basique, ainsi que la manière dont les<br />

sociétés méditerrané<strong>en</strong>nes codifi<strong>en</strong>t la sexualité,<br />

nous semblai<strong>en</strong>t ess<strong>en</strong>tiels à poser d’<strong>en</strong>trée.<br />

L’exposition va parler d’homosexualité, de rapport<br />

<strong>en</strong>tre les sexes ?<br />

Entre autres. Nous allons parler de l’égalité hommes<br />

femmes, <strong>en</strong> particulier au travail. De la question<br />

du voile, qui stigmatise les femmes ou qu’elles<br />

rev<strong>en</strong>diqu<strong>en</strong>t comme un signe d’appart<strong>en</strong>ance à<br />

une communauté. Puis de la sexualité, hétéro et<br />

homosexuelle : la virginité, l’âge du mariage, la s<strong>en</strong>sualité.<br />

Et de la rev<strong>en</strong>dication de g<strong>en</strong>re qui est<br />

réc<strong>en</strong>te, des lois répressives sur l’homosexualité<br />

autour de la Méditerranée.<br />

L’actualité, avec la loi du mariage pour tous et les<br />

mouvem<strong>en</strong>ts homophobes, r<strong>en</strong>d ce sujet brûlant…<br />

Le vivez-vous comme un risque ou comme une<br />

chance ?<br />

Cela tombe plutôt bi<strong>en</strong> ! Les g<strong>en</strong>s sont aujourd’hui<br />

intéressés par le sujet. On ne cherche pas<br />

à exciter, il n’y a aucune provocation dans notre<br />

démarche, mais il faut montrer ce qui est. Par<br />

exemple, on pourra nous taxer d’islamophobes <strong>en</strong><br />

regardant la carte des règlem<strong>en</strong>tations sur l’homosexualité.<br />

On a beau atténuer les couleurs,<br />

opposer le gris pâle au bleu plutôt que le noir au<br />

blanc, il apparait clairem<strong>en</strong>t que les pays musulmans<br />

conserv<strong>en</strong>t des lois homophobes. Il faut le dire…<br />

Qu’allez-vous montrer dans ces 500 m 2 ?<br />

Nous avons défini des thématiques -nous n’avions<br />

D<strong>en</strong>is Chevallier<br />

Conservateur du patrimoine, docteur <strong>en</strong> ethnologie,<br />

il est directeur adjoint du MuCEM,<br />

responsable du départem<strong>en</strong>t recherche et<br />

<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t, commissaire de l’exposition Au<br />

Bazar du g<strong>en</strong>re, et de<br />

la programmation culturelle<br />

de la Semaine<br />

du g<strong>en</strong>re. Il prépare,<br />

pour 2014 et 2015, des<br />

expositions temporaires<br />

sur le Carnaval,<br />

les Lieux Saints, la<br />

nourriture…<br />

D<strong>en</strong>is Chevallier<br />

© Frederic Presles<br />

pas la place pour une approche historique- et<br />

nous sommes conc<strong>en</strong>trés sur les changem<strong>en</strong>ts<br />

depuis 50 ans. C’est-à-dire depuis la révolution<br />

de la contraception. En Algérie il y a 50 ans les femmes<br />

se mariai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre 16 et 18 ans et avai<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

moy<strong>en</strong>ne 6 <strong>en</strong>fants. Aujourd’hui elles se mari<strong>en</strong>t<br />

à 30 et ont 2 <strong>en</strong>fants. Notre section Mon v<strong>en</strong>tre<br />

est à moi retrace cela, et le fait qu’une «femme<br />

accomplie» reste généralem<strong>en</strong>t une mère <strong>en</strong><br />

Méditerranée. Les Chemins de l’égalité pass<strong>en</strong>t<br />

donc par la rev<strong>en</strong>dication des droits politiques,<br />

mais aussi ici par Myriam Lamare championne<br />

de boxe, les féministes qui lutt<strong>en</strong>t contre les images<br />

dégradées de la femme, contre Berlusconi<br />

<strong>en</strong> 2011… On s’attache au combat LGBT à travers<br />

l’histoire des Gay Pride, de leur répression, <strong>en</strong><br />

montrant que les droits, comme le mariage pour<br />

tous, précèd<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t les sociétés… qui continu<strong>en</strong>t<br />

à fabriquer des objets homophobes, des<br />

insultes courantes homophobes. On a ainsi conçu<br />

une douche sonore homophobe, pour faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre<br />

la viol<strong>en</strong>ce des mots…<br />

Cela peut être choquant !<br />

Selon Walter B<strong>en</strong>jamin il faut produire «un petit<br />

choc pour faire <strong>en</strong>trer l’histoire dans les mémoires».<br />

C’est ainsi que je conçois une exposition,<br />

qui pour moi n’est pas un alignem<strong>en</strong>t de beaux<br />

objets.<br />

Y aura-t-il cep<strong>en</strong>dant des œuvres d’art ?<br />

Oui, des commandes contemporaines, à Fred<br />

Sathal par exemple, une tr<strong>en</strong>taine d’œuvres <strong>en</strong><br />

tout, comme cette tapisserie de Sandra Dukiç<br />

qui exhorte Enfante ! Une vingtaine de films aussi,<br />

dont une commande. Les lesbi<strong>en</strong>nes de Nan<br />

Goldin qui répond<strong>en</strong>t aux Damnées de Rodin…<br />

puis des objets issus des collections des ATP, des<br />

amulettes viriles, des vêtem<strong>en</strong>ts… et des collectes<br />

réc<strong>en</strong>tes : des objets acquis lors de pèlerinages<br />

de fertilité, un kit d’hym<strong>en</strong> artificiel, interdit <strong>en</strong><br />

Égypte, preuve que cela marche, des costumes<br />

de Gay Pride, des photos de banderoles rev<strong>en</strong>dicatrices<br />

; des objets plus anci<strong>en</strong>s aussi, une coupe<br />

de XVI e siècle qui montre la femme qui sort de la<br />

côte d’Adam… On évoque aussi la viol<strong>en</strong>ce faite<br />

aux femmes <strong>en</strong> Égypte, les Vierges jurées <strong>en</strong><br />

Afghanistan, qui ont le droit d’être traitées <strong>en</strong><br />

hommes si elles jur<strong>en</strong>t de rester vierges…<br />

Les objets d’art ont-ils pour vous une valeur différ<strong>en</strong>te<br />

des objets du quotidi<strong>en</strong> ?<br />

Pas dans le cadre d’une exposition comme celleci.<br />

L’équilibre art/objet de peu ne compte pas, la<br />

valeur archéologique non plus, il faut que l’objet<br />

dise quelque chose, qu’il ait du s<strong>en</strong>s, la charge<br />

esthétique ou émotionnelle pouvant être plus ou<br />

moins forte. Il faut que l’objet soit rare, ou surpr<strong>en</strong>ant,<br />

mais sa valeur m’importe peu dans ce<br />

cadre. Les objets sont les mots des muséologues,<br />

ils s’articul<strong>en</strong>t les uns aux autres, ils n’ont pas de<br />

s<strong>en</strong>s tout seul…<br />

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL<br />

Au Bazar du g<strong>en</strong>re,<br />

Féminin-Masculin <strong>en</strong> Méditerranée<br />

500 m 2 , J4<br />

jusqu’au 6 janvier<br />

www.mucem.org<br />

Rataj - Enfante, Sandra Dukic, Banja Luka, Bosnie-Herzegovine,<br />

2006, matiere textile © MuCEM, Christophe Fouin


Trois autres expositions inaugurales comm<strong>en</strong>ceront le 7 juin,<br />

ainsi qu’une programmation artistique gratuite<br />

Panneaux de Van Cray<strong>en</strong>est, Charles Van Craey<strong>en</strong>est, France, 1947, bois, matiere textile © MuCEM<br />

Fort Saint-Jean<br />

Le Temps des Loisirs<br />

☛Exposition perman<strong>en</strong>te, accrochage<br />

r<strong>en</strong>ouvelé tous les 3 ans, 850 m 2 .<br />

☛Commissaire général : Zeev Gourarier<br />

Un parcours historique retrace le passage des<br />

fêtes rituelles millénaires à la société des loisirs,<br />

après la Révolution puis au Second Empire (fête<br />

foraine, cirque, magie…). Une exposition riche<br />

<strong>en</strong> objets rares et spectaculaires, trésors de la<br />

collection des ATP ou acquisitions retraçant les<br />

rites de passages (de la naissance à la mort), les<br />

fêtes cal<strong>en</strong>daires (solstices, v<strong>en</strong>danges, moissons,<br />

fêtes religieuses…) puis les fêtes foraines,<br />

cirque et marionnettes…<br />

Expositions photographiques<br />

☛Quatre expositions photographiques<br />

successives, 320 m 2 .<br />

☛Commissaire général : François Cheval<br />

Du 7 juin au 29 juillet : Les choses de ce côté<br />

du monde, une exposition collective prés<strong>en</strong>te le<br />

travail de huit vidéastes et photographes contemporains<br />

autour de Marseille et ses <strong>en</strong>virons<br />

(André Mérian, Stéphane Couturier, Servet<br />

Kocyigit, Ange Leccia, Patrick Tosani…)<br />

Du 9 août au 23 sept : Odyssées d’Antoine<br />

d’Agata, un portrait des migrants auxquels il<br />

s’est mêlé lors de leurs périples aux frontières.<br />

Ateliers de l’Euroméditerranée.<br />

Du 4 oct au 18 nov : Memory of<br />

trees, de Kathryn Cook, séries<br />

<strong>en</strong> noir et blanc et couleur où la<br />

photographe américaine a recherché,<br />

à Marseille et <strong>en</strong> Turquie,<br />

la mémoire effacée du génocide<br />

arméni<strong>en</strong>. Ateliers de l’Euroméditerranée.<br />

Du 29 nov au 28 janv : Mare-<br />

Mater. Patrick Zachmann<br />

voyage à travers la mémoire<br />

juive, confronte son histoire<br />

familiale à celle des migrants<br />

d’aujourd’hui.<br />

La mère du King, Saida, 2001<br />

© Jean-Luc Moul<strong>en</strong>e<br />

21<br />

M<br />

UCEM<br />

C<strong>en</strong>tre de Conservation<br />

et de Ressources<br />

Enseigne de baraque foraine, France, 20e siecle © MuCEM<br />

☛Des personnalités extérieures pos<strong>en</strong>t<br />

sur les collections du MuCEM, conservées<br />

au CCR, un regard libre qui tisse des li<strong>en</strong>s<br />

inédits. 100 m2.<br />

Jusqu’au 6 janv : Prés<strong>en</strong>tée vivante. Jean Blaise,<br />

directeur général du Voyage à Nantes, a fait appel<br />

à l’écrivain Joy Sorman pour relier des objets<br />

divers possédant chacun une histoire propre.<br />

Avec la commissaire d’exposition Patricia Buck,<br />

ils ont mis <strong>en</strong> scène ces objets choisis autour<br />

du texte de Joy Sorman.<br />

Les Int<strong>en</strong>sités d’été<br />

Dès l’ouverture et durant tout l’été, une programmation<br />

de cinéma, concerts, débats et de<br />

spectacles de plein air, offerte aux visiteurs, au<br />

Fort Saint Jean ou dans l’Auditorium Germaine<br />

Tillion… Cela comm<strong>en</strong>ce à Marseille dans les<br />

années 40 pour finir le 1 er septembre <strong>en</strong> évoquant<br />

Marseille aujourd’hui… Autant de propositions<br />

qui s’inscriv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> complém<strong>en</strong>t et écho aux<br />

expositions temporaires et perman<strong>en</strong>tes.<br />

Au programme<br />

Le 7 juin à 22h : Concert d’ouverture avec le<br />

Khoury Project des frères Khoury (oud, violon,<br />

qanoun) qui invit<strong>en</strong>t la chanteuse andalouse<br />

Estrella Mor<strong>en</strong>te<br />

Le 14 juin à 18h30 : une r<strong>en</strong>contre autour de<br />

l’Art <strong>en</strong> guerre à la Villa Air Bel et au camp des<br />

Milles, suivie à 22h de la projection de Transit<br />

de R<strong>en</strong>é Allio, d’après Anna Seghers<br />

Le 15 juin à 14h : Etat de piège ou la filière<br />

marseillaise, docum<strong>en</strong>taire de Terry Wehn Damish,<br />

suivi à 16h30 des Camps du sil<strong>en</strong>ce de<br />

Bernard Mangiante et d’une r<strong>en</strong>contre débat,<br />

à 18h30, autour de Varian Fry et Gilberto<br />

Bosques<br />

À 21h30 : On chantait quand même - Radio transit,<br />

spectacle de Serge Hureau et du hall de la<br />

chanson, autour de la TSF p<strong>en</strong>dant l’occupation<br />

Le 16 juin à 16h30 : Resisting paradise, un docum<strong>en</strong>taire<br />

de Barbara Hammer suivi à 18h30<br />

de Fluchweg nach Marseille (la fuite vers Marseille)<br />

de Ingemo Enstrom<br />

Du 17 au 22 juin : Prix Med (voir p 72) R<strong>en</strong>contres,<br />

projections de docum<strong>en</strong>taires et remise<br />

des prix.<br />

www.mucem.org<br />

Estrella Mor<strong>en</strong>te © X-D.R


22<br />

M<br />

P2013<br />

Le premier temps de la capitale culturelle a su rassembler les foules, proposer<br />

des formes contemporaines, et de singulières surprises. Même si la satiété esthétique<br />

ou intellectuelle ne fut pas toujours au r<strong>en</strong>dez-vous. En sera-t-il de même pour le second<br />

épisode, qui s’annonce <strong>en</strong>core plus fort ?<br />

De Cézanne à Matisse :<br />

notre id<strong>en</strong>tité<br />

culturelle ?<br />

Assurém<strong>en</strong>t, cela va être une grande exposition : tout<br />

le monde l’att<strong>en</strong>d, ces peintres-là sont les préférés des<br />

Français et des touristes qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>en</strong> France. Le<br />

Palais Longchamp et le Musée Granet, chacun dans<br />

son g<strong>en</strong>re, sont des lieux magnifiques, rénovés, tout à<br />

fait prêts à accueillir une grande exposition internationale,<br />

tant au niveau de la sécurité des œuvres que<br />

de la circulation des publics. Cela fait longtemps que<br />

l’on att<strong>en</strong>d un vrai musée des beaux arts à Marseille,<br />

et une fois <strong>en</strong>core la capitale culturelle a permis l’équipem<strong>en</strong>t<br />

d’un lieu indisp<strong>en</strong>sable. Bref tout est réuni<br />

pour que Le Grand Atelier du Midi soit le climax, <strong>en</strong><br />

termes de fréqu<strong>en</strong>tation, d’une année culturelle qui<br />

réunit les foules.<br />

On peut cep<strong>en</strong>dant s’interroger sur l’insistance de<br />

Jean-Claude Gaudin, lors de la confér<strong>en</strong>ce de presse<br />

organisée à Paris, à prés<strong>en</strong>ter cette exposition comme<br />

«le véritable début de la Capitale.» La Mairie de Marseille<br />

souti<strong>en</strong>t pourtant ses artistes et la création. Pourquoi<br />

prés<strong>en</strong>ter ainsi cette exposition qui, si elle ravit le secteur<br />

du tourisme, et va permettre à chacun d’approcher<br />

un patrimoine inégalé pour au plus 19 euros (billet couplé<br />

plein tarif), ne crée aucune richesse culturelle, et dép<strong>en</strong>se<br />

un budget colossal (non communiqué) <strong>en</strong> assurances,<br />

frais de transports, et locations d’œuvres ? Au plus<br />

jette-t-elle des ponts inédits <strong>en</strong>tre des œuvres et des<br />

courants, comme le font l’expo Rodin à Arles ou Picasso<br />

à Aubagne : pour magnifiques qu’elles soi<strong>en</strong>t, ces<br />

expositions ne peuv<strong>en</strong>t s’annoncer comme les événem<strong>en</strong>ts<br />

primordiaux d’une Capitale qui veut avant<br />

tout fabriquer de la culture. Où est aujourd’hui l’atelier<br />

du midi qui permettra de léguer un patrimoine à nos<br />

<strong>en</strong>fants ?<br />

Un événem<strong>en</strong>t exceptionnel<br />

Mais la curiosité du public pour cette période artistique<br />

semble infinie, comme un éternel retour à ce qui figure<br />

<strong>en</strong> déformant, permettant à la fois de reconnaitre le<br />

sujet et d’admirer la distorsion. Dans ce domaine patrimonial<br />

l’exposition est indéniablem<strong>en</strong>t exceptionnelle,<br />

tant au niveau du volume (près de 200 œuvres rassemblées,<br />

dont nombre de grands formats et pléthore<br />

d’œuvres majeures, mais 1 seule femme sur 49 artistes)<br />

que du point de vue adopté. Il s’agit <strong>en</strong> effet de<br />

voir ces œuvres tout à côté des paysages qui les ont<br />

vues naître, dans leur lumière de l’été.<br />

Bruno Ély et Marie-Paule Vial, respectivem<strong>en</strong>t commissaires<br />

des expositions à Granet et à Longchamp,<br />

ont conçu des parcours éclairants, choisis, truffés de<br />

André Derain, Le Faubourg de Collioure, 1905. Huile sur toile, 59.5 x 73.2 cm,<br />

Paris, C<strong>en</strong>tre Pompidou, musée national d’art moderne, achat <strong>en</strong> 1966<br />

© C<strong>en</strong>tre Pompidou, MNAM-CCI, dist. RMN-Grand Palais – Philippe Migeat<br />

© ADAGP, Paris 2013<br />

Pablo Picasso, Paysage, Juan-les-Pins, 1924. Huile sur toile, 38 x 46 cm,<br />

collection particulière © Succession Picasso 2013<br />

mises <strong>en</strong> perspectives inédites. À<br />

Marseille l’histoire de la couleur,<br />

les fauves, depuis les tourm<strong>en</strong>ts de<br />

Van Gogh, l’éclat de Bonnard,<br />

jusqu’aux années 50 avec Monet,<br />

R<strong>en</strong>oir, Dufy, Signac, Soutine,<br />

Vallotton, Dali. À Aix l’histoire<br />

des formes depuis Cézanne bi<strong>en</strong><br />

sûr, jusqu’à l’abstraction ou aux<br />

papiers découpés <strong>en</strong> passant par<br />

le cubisme, Picasso, Derain, Gauguin,<br />

Man Ray, Modigliani,<br />

Matisse, Braque… L’itinéraire de<br />

ces peintres se croise autour des<br />

mêmes motifs dans les paysages<br />

prov<strong>en</strong>çaux, mais aussi à Collioure,<br />

<strong>en</strong> Espagne, <strong>en</strong> Italie, sur les rives<br />

de cette Méditerranée latine où<br />

tous sont v<strong>en</strong>us séjourner, s’arrêter<br />

et vivre. Et qui éclate indéniablem<strong>en</strong>t<br />

dans leurs œuvres, paysages<br />

marins, Sainte Victoire, Estaque,<br />

voies ferroviaires et jardins éclairés<br />

de la même lumière, faisant jaillir<br />

la couleur et la forme indomptées…<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Le Grand Atelier du midi<br />

du 13 juin au 13 oct<br />

Musée Granet, Aix<br />

Musée des Beaux Arts, Marseille<br />

www.mp2013.fr/le-grand-atelier-dumidi-2<br />

Claude Monet,<br />

Antibes, 1888.<br />

Huile sur toile,<br />

65 x 92 cm,<br />

Londres,<br />

The Courtauld<br />

Institute<br />

© The Samuel<br />

Courtauld Trust,<br />

The courtauld<br />

Gallery London


Picasso<br />

et la<br />

mère méditerranée<br />

Si le magnifique catalogue de 224 pages est trop Femme aux cheveux verts de 1948 dont on voit<br />

lourd pour visiter l’exposition Picasso céramiste<br />

et la Méditerranée à Aubagne, le hors-série tude des thèmes : les faunes cannibalis<strong>en</strong>t les<br />

les «accid<strong>en</strong>ts de cuisson». Pour saisir l’ampli-<br />

Découverte Gallimard écrit par Bruno Gaudichon plats à viande, les pichets, les tomettes ; les<br />

est idéal. Petit, pratique, thématique et abondamm<strong>en</strong>t<br />

iconographié, il dit tout sur son av<strong>en</strong>ture coupelles et des plats espagnols ; les poissons<br />

motifs tauromachiques <strong>en</strong>vahiss<strong>en</strong>t l’arène des<br />

de la terre : le rapport du sujet ou du motif au et les grappes de raisin comme des natures mortes<br />

support, l’inspiration tauromachique, «les grecqueries»<br />

ou l’Antiquité revisitée, l’<strong>en</strong>racinem<strong>en</strong>t Par une habile mise <strong>en</strong> perspective de l’anci<strong>en</strong><br />

offertes…<br />

dans la production traditionnelle locale, l’inv<strong>en</strong>tion<br />

perman<strong>en</strong>te… Mais on peut tout aussi touche les néophytes comme les érudits. À la<br />

et du moderne, et par sa générosité, l’exposition<br />

bi<strong>en</strong> appréh<strong>en</strong>der le dialogue du maître avec la manière de l’illustre artiste qui légua la majorité<br />

Méditerranée vierge de toute information tant de ses pièces aux musées de Malaga, de Barcelone,<br />

Céret, Paris, Antibes, et qui travailla main<br />

l’exposition se lit à «œuvre ouverte». Nul besoin<br />

donc de savoir que sa visite de l’exposition des dans la main avec les artisans céramistes de<br />

potiers de Vallauris <strong>en</strong> juillet 1946 fut une révélation<br />

ou que son installation à Antibes à 65 ans à Vallauris. Qui, <strong>en</strong> pleine maturité, «retrouva ce<br />

l’atelier Madoura de Georges et Suzanne Ramié<br />

sera un retour aux sources, décisif et foisonnant, s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’appart<strong>en</strong>ir à la culture méditerrané<strong>en</strong>ne»<br />

et ne cessa jamais d’ouvrir de nouveaux<br />

pour admirer ces 160 pièces hors normes. Il suffit<br />

d’aiguiser son regard pour percevoir dans les chemins. Jusqu’à sa mort.<br />

formes l’importance des sources antiques ou MARIE GODFRIN-GUIDICELLI<br />

populaires méditerrané<strong>en</strong>nes : les gourdes portées<br />

sur le dos se transform<strong>en</strong>t <strong>en</strong> insectes, les<br />

poêlons à châtaignes devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t des masques, jusqu’au 13 oct<br />

les tomettes et les lastres sont détournées de Chapelle des Pénit<strong>en</strong>ts noirs-c<strong>en</strong>tre d’art,<br />

leur usage et dans les Tanagra, il réinv<strong>en</strong>te ses Aubagne<br />

propres codes. Pour remarquer la spontanéité www.picasso2013.com<br />

des dessins exécutés d’un seul trait car il réalisait<br />

ses céramiques <strong>en</strong> peintre ! Pour s’étonner À lire<br />

de la matité ou de la brillance des couleurs déclinées<br />

<strong>en</strong> d’infinies variations comme cette Hors-série Découverte Gallimard, 8,30<br />

Catalogue, Gallimard, 39 euros<br />

euros<br />

Tête de femme (recto), Tête d’homme (verso),<br />

12-8-50. Poêlon à châtaignes, terre cuite<br />

rouge chamotte tournée,peinte aux <strong>en</strong>gobes,<br />

intérieur sous alquifoux 32,5 x 7,5 cm.<br />

Diam. 22 cm. Pièce unique. Coll. part.<br />

© Successions Picasso 2012<br />

© Maurice Aeschimann<br />

Oeuvre de Patrice © Gaelle Cloarec<br />

Les beaux<br />

jours J1<br />

Nul ne sait <strong>en</strong>core ce qu’il advi<strong>en</strong>dra de lui<br />

après l’année capitale... mais chic ! Le J1 prolonge<br />

son ouverture jusqu’au 26 mai inclus,<br />

occasion pour ses insatiables visiteurs (150 000<br />

comptabilisés fin avril, soit 10 000 visiteurs<br />

par semaine…) de savourer <strong>en</strong>core ce lieu<br />

d’exception avant la pause estivale.<br />

De se pr<strong>en</strong>dre au jeu du photomaton arg<strong>en</strong>tique<br />

installé par Eddy Bourgeois, qui permet<br />

de composer un petit scénario <strong>en</strong> 4 images,<br />

et remporte un tel succès qu’une exposition<br />

est prévue à l’automne. De se perdre le long<br />

des tombes du Père Lachaise, dont Stéphanie<br />

Solinas a collecté les phrases d’adieu<br />

(«Qu’un nuage d’amour aille jusqu’à toi», «Ma<br />

tristesse est profonde, mais je sais que je te<br />

retrouverai»...) et photographié les médaillons,<br />

qui ressembl<strong>en</strong>t de loin à des empreintes<br />

digitales, et de près à un corps radiographié.<br />

De s’attarder sur les visages composant l’ultime<br />

mosaïque des Chercheurs de midi,<br />

celle des Personnages, après l’épisode des<br />

Paysages et celui des Usages. La plus nostalgique,<br />

la plus touchante peut-être, celle où<br />

l’on voit le plus de photographies anci<strong>en</strong>nes,<br />

qui évolu<strong>en</strong>t du cliché posé «bourgeois» datant<br />

d’une époque où les appareils coûtai<strong>en</strong>t cher<br />

à la démocratisation des prises de vue spontanées.<br />

La Galerie travaille sur un projet de<br />

livre et DVD avec les Éditions Bec <strong>en</strong> l’air,<br />

pour que les très nombreuses images reçues<br />

ai<strong>en</strong>t un av<strong>en</strong>ir...<br />

Occasion surtout de découvrir l’incroyable<br />

travail de Patrice, compagnon d’Emmaüs à<br />

la Pointe Rouge, qui dans son atelier élabore<br />

une multitude d’objets mystérieux et évid<strong>en</strong>ts<br />

à la fois. Un sablier avec des cailloux <strong>en</strong> guise<br />

de sable, pour que le temps passe moins vite ;<br />

une série de couverts aux gestes caressants ;<br />

une pipe qui ne cassera pas, r<strong>en</strong>forcée qu’elle<br />

est par une chaîne... Ce monsieur si discret<br />

qu’il a choisi de n’avoir qu’un prénom risque<br />

de ne pas pouvoir rester anonyme longtemps !<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

À v<strong>en</strong>ir<br />

Le Corbusier et la question du brutalisme<br />

du 11 octobre au 12 janvier<br />

J1, Marseille<br />

04 91 88 25 13<br />

www.mp2013.fr<br />

23<br />

M<br />

P2013


24<br />

M<br />

P2013<br />

Ri<strong>en</strong> ne s’efface tout à fait<br />

L’artiste palestini<strong>en</strong> Taysir Batniji<br />

inaugure le nouvel espace culturel de<br />

Salon-de-Prov<strong>en</strong>ce. Un premier choix<br />

hardi qui met <strong>en</strong> avant l’art<br />

contemporain<br />

Non loin de l’emblématique fontaine moussue<br />

vi<strong>en</strong>t de s’ouvrir l’Espace culturel Robert de<br />

Lamanon, un nouvel équipem<strong>en</strong>t dédié aux arts<br />

visuels à Salon-de-Prov<strong>en</strong>ce. Cette première<br />

proposition offre aux Salonnais et aux visiteurs<br />

l’opportunité d’une familiarisation avec la création<br />

actuelle <strong>en</strong>couragée par Marseille-Prov<strong>en</strong>ce 2013.<br />

L’exposition propose un panel du travail de l’artiste<br />

sous différ<strong>en</strong>ts médiums photo, dessin,<br />

objet/sculpture, installation dont la pièce réalisée<br />

dans la savonnerie Marius Fabre prés<strong>en</strong>tée<br />

auparavant à Marseille (Ici, Ailleurs, La Friche).<br />

Taysir Batniji réaffirme ici l’article 13 de la Déclaration<br />

des droits de l’homme de 1948 dont la<br />

portée se veut autant locale qu’universelle à<br />

travers un matériau commun au bassin méditerrané<strong>en</strong>,<br />

éphémère (une première version <strong>en</strong><br />

chocolat près de G<strong>en</strong>ève <strong>en</strong> 2007) et symbolique<br />

(soin, pureté, tradition). Plus spectaculaire<br />

et allusive, Mine de ri<strong>en</strong>, écriture murale éphémère<br />

a été réalisée au graphite avec quatre<br />

jeunes salonnais dans le cadre d’un chantier<br />

éducatif (1).<br />

Taysir Batniji, L'homme ne vit pas seulem<strong>en</strong>t de pain #2, Salon-de-Prov<strong>en</strong>ce, 2013, vue partielle © C. Lorin-<strong>Zibeline</strong><br />

L’approche politique et humaniste se retrouve<br />

dans cinq vidéos volontairem<strong>en</strong>t brouillées (projection<br />

sur mur noir) suggérant la confusion des<br />

vies quotidi<strong>en</strong>nes de personnes <strong>en</strong> transit.<br />

Pour une première, ce choix porte une ambition<br />

certaine compte t<strong>en</strong>u d’un public toujours à<br />

conquérir pour la culture. Celui-ci pourra se<br />

tourner <strong>en</strong>suite vers les œuvres d’art singulier<br />

de Raymond R<strong>en</strong>aud, personnalité artistique<br />

salonnaise remarquée par Jean Dubuffet, ou<br />

observer bi<strong>en</strong>tôt depuis le château de l’Empéri<br />

l’anamorphose urbaine éphémère conçue spécialem<strong>en</strong>t<br />

par Felice Varini. Comme d’autres<br />

communes Salon se met à l’art contemporain.<br />

Gageons que le projet se confirme au-delà de<br />

2013 !<br />

CLAUDE LORIN<br />

Taysir Batniji<br />

L’Homme ne vit pas seulem<strong>en</strong>t de pain<br />

jusqu’au 16 juin<br />

Espace Robert de Lamanon, Salon-de-Prov<strong>en</strong>ce<br />

ateliers et visites guidées<br />

04 90 44 89 90<br />

(1) <strong>en</strong> collaboration avec l’Addap13 et l’Aagesc<br />

(Association pour l’Animation des Equipem<strong>en</strong>ts<br />

Sociaux)<br />

Comme une vibrante cathédrale...<br />

Le Vieux-Port transfiguré pour l’inauguration de la Folle histoire !<br />

Personne n’aurait imaginé traverser le Vieux-<br />

Port de Fort à Fort à pied sec, sinon <strong>en</strong> rêve...<br />

Ce rêve est dev<strong>en</strong>u réalité pour plus de 400 000<br />

personnes les 3 et 4 mai grâce à Carabosse<br />

qui, loin d’être la méchante fée du conte, est un<br />

collectif d’artistes multiples, comédi<strong>en</strong>s, plastici<strong>en</strong>s<br />

aimant jouer avec le feu <strong>en</strong> décl<strong>en</strong>chant<br />

des rêves ! Sollicités par Karwan, structure initiatrice<br />

du projet, ils ont imaginé la construction<br />

d’un ponton de 160m, constitué de dalles carrées<br />

flottant sur des boudins gonflants. Dès le début<br />

de la soirée la foule att<strong>en</strong>dait le départ, pressée<br />

de chaque côté du port. À 20h30, les prom<strong>en</strong>eurs<br />

empruntai<strong>en</strong>t la passerelle par vagues<br />

pour contempler l’ét<strong>en</strong>due marine empourprée<br />

par le soleil couchant. Peu à peu des hommes<br />

et des femmes <strong>en</strong> noir ont mis chaque soir le<br />

feu à 6000 pots de terre susp<strong>en</strong>dus à des structures<br />

métalliques, certaines tournant sur<br />

elles-mêmes, d’autres formant un tunnel de<br />

flammes sur 300m devant la mairie. Ainsi<br />

scénographiés, les 230 000 m 2 du port form<strong>en</strong>t<br />

une place publique sur laquelle on peut déambuler<br />

<strong>en</strong> valse l<strong>en</strong>te parmi les parfums agréables<br />

de la cire. Entre les deux Forts une grue de 35m<br />

a élevé peu à peu 5 sphères formant un lustre<br />

monum<strong>en</strong>tal. Du haut des jardins du Pharo, de<br />

l’esplanade de St Victor ou de celle de St Laur<strong>en</strong>t,<br />

la vue sur la ville illuminée avec douceur<br />

est stupéfiante. Les marseillais, les voisins et les<br />

touristes promèn<strong>en</strong>t leur plaisir dans le calme,<br />

se réchauff<strong>en</strong>t aux braséros cylindriques sur le<br />

quai de la Fraternité. Instants magiques de La<br />

folle histoire des Arts de la rue qui <strong>en</strong> est à<br />

sa 4 e édition grâce à la participation de MPM,<br />

de la ville de Marseille et surtout du CG 13 ainsi<br />

que, pour cette année capitale, MP 2013 (budget<br />

un peu moins de 2,5 Md’euros). Aurait-on<br />

pu imaginer des propositions artistiques plus<br />

consistantes pour cette Capitale qui fait déambuler<br />

les foules mais nourrit peu les esprits ?<br />

Sans doute. Mais ainsi Marseille retrouve le<br />

dialogue avec son port et les Arts de la rue lui<br />

ouvr<strong>en</strong>t les portes d’un rêve fraternel.<br />

CHRIS BOURGUE<br />

Le Vieux-Port <strong>en</strong>tre flammes et flots a eu lieu<br />

les 3 et 4 mai sur le Vieux-Port à Marseille<br />

À v<strong>en</strong>ir<br />

Moteurs ! le 17 mai Cité des Arts de la Rue<br />

T’as de la chance d’être mon frère !<br />

No Tunes International le 16 mai à Aureille<br />

Dream City les 18 et 19 mai à L’Estaque<br />

Waterlitz Générik Vapeur le 19 mai sur le J4<br />

The color of times déambulation d’ Artonik<br />

le 20 mai Bd de Paris et aussi à Marignane,<br />

Lambesc, Charleval, Port-Saint-Louis-du-Rhône<br />

© Agnes Mellon<br />

et Aureille<br />

Toutes les manifestations sont gratuites<br />

La Folle histoire jusqu’au 20 mai à Marseille<br />

(voir Zib’62)<br />

www.follehistoire.fr<br />

www.cg13.fr


Parc d’attractions<br />

Après la préfiguration <strong>en</strong> 2012 du projet Le chez soi<br />

et l’ailleurs dans le cadre d’Ulysses (voir p 76),<br />

Arteum explore L’autre côté du rêve avec <strong>en</strong> <strong>en</strong> point<br />

d’orgue une création du Cabanon Vertical<br />

Le château, à la fois musée et hôtel<br />

de ville de Châteauneuf-le-Rouge<br />

avait accueilli l’année précéd<strong>en</strong>te<br />

un premier volet dont les installations<br />

sont toujours visibles dans le<br />

parc et continu<strong>en</strong>t d’évoluer avec<br />

le temps (Zib 53). De l’autre côté du<br />

rêve inscrit le second chapitre <strong>en</strong><br />

occupant autant le musée pour une<br />

exposition collective de pièces empruntées<br />

majoritairem<strong>en</strong>t à plusieurs<br />

organismes publics (Fonds Communal<br />

d’Art contemporain de Marseille et<br />

divers FRACs), que l’extérieur avec<br />

un projet monum<strong>en</strong>tal commandé<br />

au collectif d’artistes du Cabanon<br />

Vertical.<br />

Au dernier étage du bâtim<strong>en</strong>t accueillant<br />

la partie muséale, les<br />

œuvres bénéfici<strong>en</strong>t d’une réc<strong>en</strong>te<br />

rénovation bi<strong>en</strong> v<strong>en</strong>ue. La commissaire,<br />

Christiane Courbon, s’<strong>en</strong><br />

réjouit : «Cela va nous permettre<br />

une meilleure visibilité d’accrochage.<br />

Pour les œuvres nous avons recherché<br />

des pièces qui traduis<strong>en</strong>t ces<br />

questions liées au voyage concernant<br />

le territoire, l’errance ou le<br />

déracinem<strong>en</strong>t. Le périple d’Ulysse<br />

c’est se frotter aux frontières ou aux<br />

pertes de repères, ce qui crée la<br />

r<strong>en</strong>contre aussi. Des questions donc<br />

très contemporaines.» Les regards<br />

sont variés : Marie Bovo, Wolfgang<br />

Laïb, Bouchra Khalili, Tatiana<br />

Trouvé, Yves Belorgey, Mathieu<br />

Mercier…<br />

Dans le jardin à la française composé<br />

de buis taillés datant du XVII e<br />

siècle, un parcours initiatique et<br />

ludique emmène le visiteur par des<br />

passages obligés <strong>en</strong>tre des arbustes<br />

de quatre mètres de haut, tels<br />

des escaliers, porte dérobée, culde-sac,<br />

passerelle, pont susp<strong>en</strong>du,<br />

poste de guet et points de vue <strong>en</strong><br />

pin douglas et jeu de miroir combinant<br />

intériorité du cheminem<strong>en</strong>t et<br />

aménagem<strong>en</strong>t d’ouvertures visuelles<br />

nouvelles offertes sur l’horizon. «Nous<br />

Le Cabanon Vertical, Au risque de se perdre, installation dans le parc du chateau, vue partielle. 2013 © C. Lorin-<strong>Zibeline</strong><br />

avons travaillé comme un éclaté<br />

d’architecture <strong>en</strong> ménageant des<br />

déplacem<strong>en</strong>ts et des pauses. Ce<br />

sont des structures de bois comme<br />

un décor de théâtre qui se r<strong>en</strong>d visible<br />

et praticable. Ça peut évoquer<br />

ce qu’on appelle des folies ou le<br />

jardin du Désert de Retz. Le dispositif<br />

s’intègre au lieu mais il n’est<br />

pas fait pour la contemplation. Avec<br />

cet itinéraire on provoque une expéri<strong>en</strong>ce<br />

déroutante, une sorte de<br />

révélateur où les g<strong>en</strong>s se perd<strong>en</strong>t et<br />

se retrouv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> écho au parcours<br />

d’Ulysse chahuté par les dieux» explique<br />

Olivier Bedu qui a travaillé<br />

précédemm<strong>en</strong>t avec Tadashi Kawamata<br />

<strong>en</strong> Camargue (Zib 61).<br />

Cette complexité int<strong>en</strong>tionnelle se<br />

r<strong>en</strong>force d’un dispositif sonore conçu<br />

pour le projet : le poète Maxime<br />

Hort<strong>en</strong>se Pascal a travaillé une<br />

écriture <strong>en</strong> «confrontant poésie<br />

contemporaine, traces homériques,<br />

lignes joyci<strong>en</strong>nes» auxquelles se<br />

joint une déclar’action de Juli<strong>en</strong><br />

Blaine, dans une mise <strong>en</strong> design<br />

sonore de Julian Mannarini et<br />

Jean Baptiste Zellal.<br />

CLAUDE LORIN<br />

Le chez-soi et l’ailleurs,<br />

l’autre côté du rêve<br />

jusqu’au 27 juillet au musée<br />

jusqu’au 27 octobre dans le parc<br />

Marché Noir et extraits<br />

interv<strong>en</strong>tion chorégraphiée<br />

du GUID/Ballet Preljocaj<br />

le 1 er juin à 11h<br />

Arteum-musée d’art<br />

contemporain<br />

Châteauneuf-le-Rouge<br />

04 42 58 61 53<br />

www.mac-arteum.com<br />

25<br />

M<br />

P2013


Le deuxième temps de la capitale culturelle s’annonce, avec les grandes<br />

expos, les festivals et le plein air. Pour vivre la culture autrem<strong>en</strong>t, à table<br />

ou <strong>en</strong> déambulant…<br />

Aubagne, ou l’art de la convivialité<br />

26<br />

M<br />

P2013<br />

Cette ville a quelque chose d’étonnant. Il suffit<br />

qu’un brin de soleil s’y pointe pour que les visages<br />

s’éclair<strong>en</strong>t, que les bonjours <strong>en</strong>tre inconnus<br />

s’échang<strong>en</strong>t, que sur les marchés on vous<br />

r<strong>en</strong>seigne avec un sourire et un acc<strong>en</strong>t qui a<br />

gardé le chant de la Prov<strong>en</strong>ce. Est-ce les transports<br />

gratuits, la proximité des collines, la taille<br />

humaine, l’histoire ouvrière ? Le Festin du 4 mai<br />

avait quelque chose du banquet de mariage où<br />

l’on se retrouve avec des inconnus et quelques<br />

camarades, sauf que les mets préparés par<br />

Christophe Dufau revisitai<strong>en</strong>t avec génie les<br />

traditions populaires prov<strong>en</strong>çales (bouillabaisse<br />

d’épinard, anchoïade, dessert au f<strong>en</strong>ouil et pastis)<br />

ou niçoise (le stockfish), et que le vin choisi<br />

par Philippe Faure-Brac, du Cassis au Beaumesde-V<strong>en</strong>ise,<br />

étai<strong>en</strong>t des nectars. 600 personnes<br />

pour partager ce festin à petit prix sur des nappes<br />

blanches, p<strong>en</strong>dant que quelques comédi<strong>en</strong>s<br />

pass<strong>en</strong>t vous susurrer des recettes littéraires,<br />

que les élèves de l’école d’hôtellerie s’activ<strong>en</strong>t<br />

pour que tout soit parfait… Vous avez dit culture<br />

? Celle du goût sans doute, et du partage<br />

vrai, d’autant que s’inaugure aussi une belle<br />

statue de Manon <strong>en</strong> jean rose de Jorge et Lucy<br />

© A.F<br />

Orta, qu’on offre à chaque convive une assiette<br />

de cette céramique qu’on fabrique là, que des<br />

débats sur le slow food se déroul<strong>en</strong>t sur la<br />

place, à côté d’un marché intellig<strong>en</strong>t, artisanal et<br />

biologique… Un art de vivre, de p<strong>en</strong>ser, dans<br />

cette commune qui a vu naître les AMAP, et sait<br />

aussi exposer de sublimes céramiques de<br />

Picasso (voir p23).<br />

Bi<strong>en</strong>tôt il y aura le Pompidou mobile. Et bi<strong>en</strong>tôt<br />

aussi les Festins de Méditerranée traverseront<br />

d’autres villes, puisqu’il est vraim<strong>en</strong>t question<br />

lors de cette année capitale d’explorer les cultures<br />

culinaires… depuis ces festins partagés<br />

jusqu’aux Carrioles mobiles et aux tables<br />

théâtrales de la Friche <strong>en</strong> septembre.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Programme des prochains festins<br />

www.journalzibeline.fr/programme/manger-<strong>en</strong>semble<br />

Programme culinaire de MP2013<br />

www.mp2013.fr/le-theatre-des-cuisines<br />

Programme de L’An commun <strong>en</strong> Pays d’Aubagne<br />

www.aubagne.fr<br />

www.mp2013.fr<br />

1, 2, 3... c mpez !<br />

Les campeurs utopistes du Quai de<br />

la Lave à l’Estaque ont <strong>en</strong>fin obt<strong>en</strong>u<br />

l’autorisation de concrétiser leur<br />

projet Yes we camp. Le feu vert<br />

du GPMM a pris la forme d’une<br />

conv<strong>en</strong>tion signée jusqu’au 30<br />

novembre 2013, sous réserve de<br />

validation par la commission de<br />

sécurité. Une dernière étape qui ne<br />

devrait pas poser problème, la<br />

mise aux normes étant supervisée<br />

par le Bataillon des Marins Pompiers<br />

et l’APAVE pour la maîtrise des<br />

risques techniques et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux.<br />

C’est un soulagem<strong>en</strong>t pour le porteparole<br />

de l’équipe, Nicolas Détrie :<br />

«Jusqu’à il y a quelques jours, nous<br />

n’étions pas sûrs de pouvoir réaliser<br />

ce projet <strong>en</strong> toute légalité.» Car cette<br />

initiative à l’interface <strong>en</strong>tre MP2013<br />

et son Off a suscité un investissem<strong>en</strong>t<br />

important dans une ville<br />

comme Marseille, singulièrem<strong>en</strong>t<br />

démunie de campings.<br />

Yes we camp <strong>en</strong> quelques chiffres,<br />

ce sont 22 personnes pour le staff<br />

perman<strong>en</strong>t, 43 associations locales<br />

r<strong>en</strong>contrées, 468 «kisskissbankers»<br />

mobilisés pour co-financer l’av<strong>en</strong>ture,<br />

et 207 propositions reçues<br />

suite à l’appel à projet, pour un espace<br />

de 6000 m 2 qui proposera 180<br />

places d’hébergem<strong>en</strong>t. Et l’objectif,<br />

construire un village éphémère<br />

où il fera bon vivre, dans «une sorte<br />

d’été 1936 où flotte dans l’air un<br />

parfum des possibles». Artistes,<br />

bricoleurs, architectes mett<strong>en</strong>t les<br />

bouchées doubles pour que les<br />

Vue aeri<strong>en</strong>ne site integral © Alice Audebert<br />

multiples facettes du projet voi<strong>en</strong>t<br />

le jour au plus vite : scène polyval<strong>en</strong>te,<br />

ateliers, potagers mobiles,<br />

vélo-laveurs (on pédale pour faire<br />

tourner la machine), tours sanitaires<br />

(toilettes sèches au 1 er étage,<br />

douches au 2 e et chauffe-eau solaires<br />

tout <strong>en</strong> haut), sans parler des<br />

espaces de bivouac et des<br />

caravanes relookées.<br />

Lors de la r<strong>en</strong>contre organisée le<br />

17 avril au CAUE13 pour annoncer<br />

le succès des démarches auprès<br />

du Port, on s<strong>en</strong>tait l’effervesc<strong>en</strong>ce<br />

monter : les initiateurs du projet,<br />

Olivier Bedu (du collectif Cabanon<br />

Vertical) et Eric Pringles ont<br />

de quoi être fiers des énergies assemblées<br />

autour d’eux. Avec la<br />

bénédiction de MP2013, si l’on <strong>en</strong><br />

juge d’après la prés<strong>en</strong>ce souriante<br />

de leur parrain Jean-François<br />

Chougnet.<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

www.yeswecamp.org


Arp<strong>en</strong>ter le territoire<br />

Au long des 365 kms du GR 2013, six temps<br />

forts sont prévus. Le premier a eu lieu du 12 au<br />

14 avril <strong>en</strong> Pays de Martigues et a proposé,<br />

le temps d’un beau week<strong>en</strong>d, de découvrir un<br />

territoire atypique, méconnu des habitants de<br />

la région. Des paysages inatt<strong>en</strong>dus qu’on a<br />

comm<strong>en</strong>cé à déguster p<strong>en</strong>dant le pique-nique<br />

point de vue organisé par le collectif SAFI.<br />

Les pieds dans l’eau (ou presque) au bord<br />

d’une petite plage délicieuse devant l’étang<br />

couvert de voiles, avec <strong>en</strong> arrière-plan la Sainte-Victoire<br />

et le massif de l’Etoile, qui l’eût cru ?<br />

Des paysages étonnants qu’on a <strong>en</strong>suite appris<br />

à déchiffrer grâce aux nombreuses randonnées<br />

que marcheurs, artistes et sci<strong>en</strong>tifiques<br />

avai<strong>en</strong>t concoctées pour ce week<strong>en</strong>d spécial.<br />

Au nombre de celles-ci, la balade De gare à<br />

Géométrie<br />

Les Ateliers de l’EuroMéditerranée<br />

permett<strong>en</strong>t l’éclosion de<br />

productions atypiques. Oiseaux/<br />

Tonnerre, produit avec le GMEM<br />

dans le cadre de son festival (voir<br />

p 43) <strong>en</strong> est un exemple à la fois<br />

surpr<strong>en</strong>ant et attachant. L’installation<br />

sonore se fonde sur une<br />

géométrie géographique particulière<br />

qui joue de la dualité <strong>en</strong>tre la<br />

nature et des marques de l’activité<br />

humaine. Le puits Morandat<br />

plonge dans les <strong>en</strong>trailles de la<br />

terre à une profondeur équivalant<br />

à la hauteur de la Sainte Victoire<br />

qui lui fait face. Entre les deux,<br />

il y a le paysage naturel, les strates<br />

de son histoire géologique et<br />

sous-marine. Histoire de mémoires,<br />

intimes et collectives, minérales<br />

et humaines, tout cela s’<strong>en</strong>trelace<br />

dans une bande-son composée<br />

par Célia Houdart aux textes et<br />

Sébasti<strong>en</strong> Roux à la création<br />

sonore. Deux années ont été nécessaires<br />

à ce travail à quatre<br />

mains, inspiré de r<strong>en</strong>contres avec<br />

d’anci<strong>en</strong>s mineurs, «de l’acoustique<br />

de leur métier, mais aussi<br />

/////////////////////////////////////////<br />

des oiseaux qui nichai<strong>en</strong>t dans<br />

leurs anci<strong>en</strong>s vestiaires». Le but :<br />

«composer la bande-son d’un film<br />

imaginaire.»<br />

L’écoute se déroule <strong>en</strong> deux temps,<br />

l’un au puits Morandat, pièce emplie<br />

de brumes où grond<strong>en</strong>t le tonnerre,<br />

les machines d’autrefois,<br />

dans des alvéoles plongées dans<br />

la pénombre où elle et lui évoqu<strong>en</strong>t<br />

leur marche par touches<br />

impressionnistes.<br />

Le second réclame plus d’efforts<br />

physiques : démarrant à la Maison<br />

de la Sainte Victoire, il suit un<br />

chemin parfois escarpé, rythmé<br />

par trois stations d’écoute. Les<br />

sons diffusés dans le casque<br />

s’immisc<strong>en</strong>t parmi ceux qui <strong>en</strong>tour<strong>en</strong>t<br />

le marcheur, cré<strong>en</strong>t des<br />

confusions parfois angoissantes.<br />

À l’esthétique du fragm<strong>en</strong>t, proposée<br />

par les artistes, le jeu de<br />

piste du parcours apporte une<br />

homogénéité. La Marbrière clôt<br />

la balade, clin d’œil à la mine !<br />

Ouf !<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Jusqu’au<br />

12 mai installation<br />

au Puits Morandat, Gardanne<br />

Jusqu’à fin 2013 parcours sonore<br />

sur la Montagne Sainte-Victoire<br />

www.mp2013.fr/auprogramme/atelierseuromediterranee/celia-houdart-etsebasti<strong>en</strong>-roux-i-<strong>en</strong>treprises-dupuits-morandat<br />

En file indi<strong>en</strong>ne sur le ch<strong>en</strong>al de Caronte © Pierre Carrelet<br />

gare, emm<strong>en</strong>ée par Sophie Bertran de Balanda.<br />

Pour cette architecte de formation, urbaniste<br />

depuis tr<strong>en</strong>te ans auprès de la collectivité<br />

de Martigues, le territoire martégal constitue<br />

un «très bon laboratoire de lecture du paysage».<br />

Dans les parcours qu’elle imagine elle veut<br />

appr<strong>en</strong>dre aux prom<strong>en</strong>eurs à lire le territoire<br />

qu’ils ont sous les yeux, leur donner une culture<br />

du regard, un véritable point de vue, aux<br />

deux s<strong>en</strong>s du terme. Elle avait donc organisé<br />

une marche de la gare de Croix-Sainte à celle<br />

de Port-de-Bouc, afin de faire appréh<strong>en</strong>der<br />

concrètem<strong>en</strong>t la réalité de cet espace gagné<br />

sur les eaux. Du plateau du Campéou à la passe<br />

de Bouc, le long du ch<strong>en</strong>al de Caronte, <strong>en</strong>tre<br />

voies de chemin de fer et usines abandonnées,<br />

on a suivi l’histoire du lieu, des salines à l’industrie.<br />

On s’est aussi posé la question de son<br />

dev<strong>en</strong>ir : comm<strong>en</strong>t requalifier ces no man’s land,<br />

à quoi les affecter dans un usage qui intéresse<br />

la population ? Plus de 150 personnes ont suivi<br />

cette randonnée inédite, ponctuée de lectures,<br />

au cœur d’un paysage hors-normes.<br />

Reste à savoir ce que devi<strong>en</strong>dra ce nouveau<br />

GR une fois les temps forts passés : cette production<br />

importante de l’année capitale<br />

culturelle, décidém<strong>en</strong>t plus sociétale qu’artistique,<br />

permettra-t-elle, une fois passées les<br />

randonnées organisées, que les citoy<strong>en</strong>s<br />

s’appropri<strong>en</strong>t autrem<strong>en</strong>t les paysages métropolitains<br />

?<br />

FRED ROBERT<br />

www.mp2013/gr2013<br />

© Maryvonne Colombani<br />

27<br />

M<br />

P2013


28<br />

M<br />

P2013<br />

Arabes<br />

Du 28 mai au 2 juin se ti<strong>en</strong>dront à Marseille les premières R<strong>en</strong>contres<br />

Internationales des Cinémas Arabes, un mom<strong>en</strong>t important d’échanges<br />

<strong>en</strong>tre cinéastes, professionnels des rives de la Méditerranée et le<br />

public. L’organisation de ces R<strong>en</strong>contres portées par AFLAM qui porte<br />

depuis des années le cinéma arabe devant des publics diversifiés, et<br />

permet ainsi d’<strong>en</strong> saisir la richesse, n’est pas allé sans difficulté : le mot<br />

Méditerrané<strong>en</strong> si prés<strong>en</strong>t dans les programmations et les discours<br />

politiques serait-il un euphémisme qui cacherait la difficulté à programmer<br />

la culture arabe ? La programmation prévue <strong>en</strong> cette année capitale est<br />

sans doute, par la mise <strong>en</strong> miroir des films des deux rives, par les thèmes<br />

abordés, depuis la jeunesse sans av<strong>en</strong>ir jusqu’à la place des femmes et<br />

le rapport à la religion, la meilleure voie de dialogue et de destruction<br />

raisonnée des rétic<strong>en</strong>ces et racismes ordinaires… D’autant que la prés<strong>en</strong>ce<br />

des réalisateurs s’assortit de nombreuses actions <strong>en</strong>vers les scolaires<br />

et des publics peu habitués à fréqu<strong>en</strong>ter le cinéma d’auteur.<br />

50 films, longs et courts, dont 9 <strong>en</strong> première française, une soixantaine<br />

de cinéastes invités, des tables rondes thématiques, des r<strong>en</strong>contres avec<br />

des critiques, des ateliers, sont au programme de cette manifestation qui<br />

se déroulera à la Villa Méditerranée, au Cinéma Les Variétés, à la Maison<br />

de la Région et au CRDP.<br />

A la Une, à la Villa Méditerranée, propose des longs métrages réc<strong>en</strong>ts<br />

comme Wadjda de la Saoudi<strong>en</strong>ne Haifaa Al Mansour, R<strong>en</strong>gaine de<br />

Rachid Djaïdani, Comme si nous attrapions un cobra de la Syri<strong>en</strong>ne Hala<br />

al Abdallah ou Millefeuille du Tunisi<strong>en</strong> Nouri Bouzid.<br />

En ouverture le 28 mai à 20h, Mort à v<strong>en</strong>dre prés<strong>en</strong>té par un critique et suivi<br />

d’un débat avec le réalisateur Faouzi B<strong>en</strong>saïdi, (comme tous les autres<br />

films), nous plongera dans le quotidi<strong>en</strong> de trois jeunes sans av<strong>en</strong>ir à Tétouan.<br />

Un cinéaste, un parcours mettra <strong>en</strong> lumière le travail d’Ibrahim Batout<br />

qui a joué un rôle important dans le r<strong>en</strong>ouveau du cinéma arabe de la nouvelle<br />

génération dont on pourra voir le travail dans la section Jeunes Tal<strong>en</strong>ts.<br />

Quatre critiques de cinéma, Giuseppe Gariazzo, Jean Michel Frodon,<br />

Jean-Pierre Rehm et Sofiane Hadjadj, prés<strong>en</strong>teront chacun 2 films, un<br />

film arabe et un film non-arabe dans la section Un critique, deux regards.<br />

Le public pourra ainsi voir Rome plutôt que vous de Tarek Teguia<br />

et Copie Conforme d’Abbas Kiarostami, Sur la planche de Leila Kilani<br />

et Nénette et Boni de Claire D<strong>en</strong>is, Ici et ailleurs de Godard et Deux mètres<br />

de cette terre d’Ahmad Natche ; Terra incognita de Ghassan Salhab<br />

et Mill<strong>en</strong>ium mambo de Hou Hsiao Hsi<strong>en</strong>.<br />

Enfin, invité dans la section Le cousin de…, consacrée à un cinéaste v<strong>en</strong>u<br />

d’ailleurs, le Sicili<strong>en</strong> Pasquale Scimeca dont on pourra voir plusieurs<br />

films dont Malavoglia.<br />

Sans nul doute, ces R<strong>en</strong>contres sauront-elles créer des li<strong>en</strong>s durables <strong>en</strong>tre<br />

les réalisateurs, les publics et les acteurs culturels arabes et europé<strong>en</strong>s.<br />

AGNÈS FRESCHEL ET ANNIE GAVA<br />

Wadjda de Haifaa Al Mansour<br />

MP2013 avec<br />

C’est à La Criée qu’a démarré le 23 avril le voyage avec Robert.<br />

Robert, c’est Guédiguian, une des deux «figures emblématiques»<br />

du cinéma à qui MP13 a décidé de r<strong>en</strong>dre hommage du<br />

19 au 30 juin, le deuxième étant R<strong>en</strong>é Allio dont une rétrospective<br />

sera prés<strong>en</strong>tée <strong>en</strong> novembre. MP2013 a donc emm<strong>en</strong>é<br />

le cinéaste et sa bande <strong>en</strong> navette maritime du Vieux Port à<br />

l’Estaque, à l’Alhambra, pour ce qui était aussi une «<strong>en</strong>trée <strong>en</strong><br />

matière» de la programmation cinéma MP 2013, voyage agrém<strong>en</strong>té<br />

d’une escale à La Ciotat, à l’Ed<strong>en</strong>, doy<strong>en</strong>ne des salles de<br />

cinéma du monde qui rouvrira le 9 octobre et accueillera le<br />

Festival Cris du Monde <strong>en</strong> novembre.<br />

Ont donc été rapidem<strong>en</strong>t évoqués Pier Paolo Pasolini, la force<br />

scandaleuse du passé qui comm<strong>en</strong>ce le 14 mai, les Itinéraires<br />

cinématographiques comme Ecrans voyageurs qui se poursuit<br />

<strong>en</strong> plein air, le ciné concert, Monte Cristo, le fantôme du Château<br />

d’If, Etoiles et cinéma, le programme de dix films proposés dans<br />

les parcs de Marseille à partir du 26 juillet. Oubliées : les premières<br />

R<strong>en</strong>contres Internationales des Cinémas Arabes que MP<br />

2013 coproduit avec AFLAM (voir ci-contre). On peut s’interroger !<br />

Robert <strong>en</strong> livre et <strong>en</strong> films<br />

Ce fut aussi l’occasion pour Christophe Kantcheff de prés<strong>en</strong>ter<br />

son superbe livre, Robert Guédiguian, cinéaste, publié<br />

aux éditions Le Chêne, dans lequel il sort de l’exégèse de Robert,<br />

pour analyser et traduire son univers et sa vision du monde.<br />

Robert Guédiguian © A.G<br />

AFLAM<br />

04 91 47 73 94<br />

www.lesr<strong>en</strong>contresdaflam.fr


Robert<br />

C’est aussi ce qu’ont fait brillamm<strong>en</strong>t<br />

son monteur Bernard Sasia<br />

et Clém<strong>en</strong>tine Yelnik. Ils ont plongé<br />

durant un an dans l’œuvre du<br />

cinéaste qui a «le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’une<br />

mission accomplie, qui a été le porte<br />

parole de g<strong>en</strong>s qui n’ont pas la<br />

parole, r<strong>en</strong>dant ainsi la parole à son<br />

père et qui est très fier de ce qu’il a<br />

accompli». Constitué de scènes<br />

des films, remontées, comm<strong>en</strong>tées<br />

souv<strong>en</strong>t avec humour, Robert sans<br />

Robert, dont c’était la deuxième<br />

projection après la Cinémathèque<br />

française, est un vrai film qui nous<br />

donne <strong>en</strong>vie de revoir l’œuvre, qui<br />

nous parle avec finesse du travail<br />

de monteur et nous offre un voyage<br />

dans les strates du temps. Il<br />

sera projeté à l’Alhambra ainsi que<br />

le docum<strong>en</strong>taire de Richard Copans,<br />

En vérité, je vous le dis.<br />

Et l’on pourra égalem<strong>en</strong>t voir et<br />

revoir les films de Robert durant<br />

douze jours, ses 17 longs métrages,<br />

prés<strong>en</strong>tés, le soir, par le cinéaste<br />

ou un des membres de la Tribu<br />

(voir sur notre site son abécédaire)<br />

Gérard Meylan, Ariane Ascaride,<br />

Jean-Pierre Darroussin,<br />

Gérard Boudet qu’on retrouve<br />

dans presque tous les films depuis<br />

Le dernier été, sorti <strong>en</strong> 1980 jusqu’aux<br />

Neiges du Kilimandjaro <strong>en</strong><br />

2011, <strong>en</strong> passant par Marius et Jeannette,<br />

le film qui l’a fait largem<strong>en</strong>t<br />

connaître…<br />

Au Fil d’Ariane<br />

C’est le titre du prochain film que<br />

le cinéaste comm<strong>en</strong>ce à tourner le<br />

13 mai dans la région, avec tous<br />

ses acteurs, «laissant tout le monde<br />

s’exprimer car la mise <strong>en</strong> scène,<br />

c’est aussi laisser chacun faire ses<br />

propositions.»<br />

Dans les salles, dans les rues, allez<br />

donc retrouver Robert !<br />

ANNIE GAVA<br />

Rétrospective intégrale<br />

Robert Guédiguian<br />

du 19 au 30 juin<br />

du 23 au 30 juin<br />

L’Alhambra, Marseille<br />

04 91 03 84 66<br />

www.alhambracine.com<br />

du 19 au 23 juin<br />

La Criée, Marseille<br />

04 91 54 70 54<br />

www.theatre-lacriee.com<br />

Opera d'O © Matthieu Dussol<br />

L’eau de l’av<strong>en</strong>ir<br />

Et revoilà la compagnie Ilotopie à<br />

Martigues ! Pour cette nouvelle expéri<strong>en</strong>ce<br />

aquatique, une cité lacustre,<br />

architecture flottante déjà existante<br />

dans le magasin de la compagnie,<br />

est ici revisitée, agrandie, prête à<br />

fabriquer son électricité avec ses<br />

panneaux photovoltaïques pour ses<br />

bras articulés, sa sonorisation et<br />

ses lumières.<br />

AnApOs, du nom d’un dieu fleuve<br />

de l’est de la Sicile, est une véritable<br />

cité flottante, ancrée au fond<br />

de l’étang, qui avec ses al<strong>en</strong>tours<br />

couvre 2 hectares <strong>en</strong>tre Ferrières<br />

et l’île sur l’étang. Unités d’habitations,<br />

potagers d’énergies, forum,<br />

sculptures, fixes ou <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t,<br />

sous l’eau ou jouant avec l’émerg<strong>en</strong>ce,<br />

tout est à découvrir et à tester. Et<br />

notamm<strong>en</strong>t les 5 Janus, cinq divinités<br />

aquatiques qui laiss<strong>en</strong>t émerger<br />

doucem<strong>en</strong>t de la surface leurs<br />

énormes têtes bifaces, avant de<br />

disparaitre sous l’eau, <strong>en</strong> cycle<br />

aléatoire. Ou <strong>en</strong>core le gr<strong>en</strong>ier<br />

sous-marin, qui laisse voir des personnages<br />

fictifs, des architectures<br />

«intérieures» et des installations<br />

La 1 re édition du Festival Arts Comores<br />

s’annonce comme une<br />

célébration festive de la culture<br />

Comori<strong>en</strong>ne, assez peu connue <strong>en</strong><br />

France, pourtant toujours Française<br />

<strong>en</strong> partie, et faisant partie de<br />

notre histoire coloniale… À Marseille,<br />

où la discrète communauté<br />

Comori<strong>en</strong>ne est pourtant très représ<strong>en</strong>tée<br />

(le chiffre difficilem<strong>en</strong>t<br />

vérifiable de 10% de la population<br />

est fréquemm<strong>en</strong>t avancé), l’événem<strong>en</strong>t<br />

est de taille. Accueilli pour<br />

l’ess<strong>en</strong>tiel au Parc du Grand Séminaire<br />

par la mairie des 13 e et<br />

14 e arr. où l’ess<strong>en</strong>tiel des Comori<strong>en</strong>s<br />

résid<strong>en</strong>t, le festival se veut<br />

démonstratif de la richesse de cette<br />

culture influ<strong>en</strong>cée par l’Afrique et<br />

l’Ori<strong>en</strong>t, par un Islam très souple et<br />

un matriarcat ancestral, par le<br />

Français, le Mahorais et une multitude<br />

de langues vernaculaires, par<br />

des paysages très contrastés et<br />

des niveaux de vie très différ<strong>en</strong>ts<br />

étonnantes visibles <strong>en</strong> embarcation<br />

(canoës, pédalos ou paddle) à la<br />

verticale des scènes visitées. Pour<br />

compléter cette proposition, Ilotopie<br />

pr<strong>en</strong>d l’eau avec sa création<br />

Opéra d’O, spectacle nocturne<br />

féérique à voir les soirs de week<strong>en</strong>d<br />

(31 mai, 1 er , 7 et 8 juin). Cette<br />

fable aquatique pose une loupe<br />

très grossissante sur un état de fait<br />

qui n’aura échappé à personne :<br />

l’eau va manquer. Une réalité qu’il<br />

est bon de rappeler, pour une prise<br />

de consci<strong>en</strong>ce qui passe par un<br />

univers qui oscille <strong>en</strong>tre douce folie<br />

et farce grotesque, un opéra baroque<br />

qui imagine des l<strong>en</strong>demains<br />

inatt<strong>en</strong>dus sans pour autant masquer<br />

un dés<strong>en</strong>chantem<strong>en</strong>t grinçant.<br />

DO.M.<br />

AnApOs, cité lacustre<br />

du 31 mai au 9 juin<br />

Place des Aires, sortie du canal<br />

Bauss<strong>en</strong>gue, Martigues<br />

04 42 06 90 61<br />

www.mp2013.fr<br />

www.ville-martigues.fr<br />

www.ilotopie.com<br />

Visibilité Comori<strong>en</strong>ne<br />

sur chaque île, et dans la diaspora…<br />

ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t installée dans<br />

une ville qui l’ignore.<br />

Peintures, sculptures, photographies,<br />

installations, mais aussi musique<br />

seront au r<strong>en</strong>dez-vous avec un temps<br />

fort très att<strong>en</strong>du : la dernière œuvre<br />

du chanteur Comori<strong>en</strong>, et créateur<br />

du label Wedoo Music, organisateur<br />

de l’événem<strong>en</strong>t, Chébli Msaïdie.<br />

Heza, le chemin du Taarab est un<br />

spectacle largem<strong>en</strong>t inspiré de son<br />

histoire personnelle, une épopée<br />

africaine dans laquelle il repr<strong>en</strong>d le<br />

répertoire de son père <strong>en</strong> y mêlant<br />

ses propres compositions.<br />

Entre valeurs modernes et pratiques<br />

ancestrales, les Comores s’ouvr<strong>en</strong>t<br />

ainsi sur le monde. Et Marseille,<br />

<strong>en</strong>fin, à elles ? DO.M.<br />

du 28 juin au 6 juillet<br />

Divers lieux, Marseille<br />

09 67 24 36 19<br />

www.mp2013.fr


Eh les mecs,<br />

surfez sur la Friche !<br />

30<br />

M<br />

P2013<br />

Un événem<strong>en</strong>t majeur dans un lieu<br />

magique, pour une culture jeune<br />

et… masculine !<br />

This is (not) music, <strong>en</strong> quelques chiffres, c’est<br />

40 000 m 2 , p<strong>en</strong>dant 47 jours, avec plus de 20<br />

événem<strong>en</strong>ts sportifs, 58 artistes et 60 concerts !<br />

À la croisée <strong>en</strong>tre l’art contemporain, la musique,<br />

l’action sport et le street art, le projet initié<br />

par le Cabaret Aléatoire donne aussi l’occasion<br />

de découvrir la Friche dans ses nouveaux habits<br />

et sous un nouvel angle, celui de la culture<br />

urbaine. Après s’être répandue dans le monde<br />

<strong>en</strong>tier, cette culture est dev<strong>en</strong>ue l’une des sources<br />

d’inspirations de nombreux artistes contemporains.<br />

Ils sont souv<strong>en</strong>t eux-mêmes adeptes de<br />

skate, BMX ou de surf comme le célèbre John<br />

Serverson connu pour son film Big Wednesday,<br />

fondateur de Surfer’s Magazine, et dont la photographie<br />

prise <strong>en</strong> 1964 du surfer Greg Noll face<br />

à la vague mythique de Banzai Pipeline ouvre<br />

l’exposition Dernière Vague.<br />

Ce parcours, ét<strong>en</strong>du sur 2500 m 2 , permet de découvrir<br />

l’influ<strong>en</strong>ce des sports de glisse dans tous<br />

les domaines des beaux arts ou arts appliqués<br />

et visuels, comme l’architecture avec la prés<strong>en</strong>tation<br />

des projets futuristes inspirés de skatepark<br />

de Vito Acconci ; la sculpture avec les œuvres<br />

hybrides de Wilfrid Alm<strong>en</strong>dra s’inspirant des<br />

univers du rock, de la moto, du surf, du skate ou<br />

<strong>en</strong>core BMX ; le graffiti comme l’œuvre dédiée<br />

à l’histoire du skateboard de Tilt, un artiste toulousain<br />

connu mondialem<strong>en</strong>t pour ses flops<br />

(lettrage <strong>en</strong> forme de bulle) qui a fait ses premiers<br />

tags sur des banks de skate.<br />

Des films situ<strong>en</strong>t ces sports dans des pays où<br />

on les att<strong>en</strong>d peu : ils peuv<strong>en</strong>t se pratiquer avec<br />

peu de moy<strong>en</strong>s et quel que soit le niveau de vie,<br />

comme pour ces jeunes ougandais filmés par<br />

Yann Gross évoluant sur des spots qu’ils ont<br />

construits eux-mêmes avec de la brique, et qui<br />

grâce à la débrouille et à leur communauté créée<br />

autour du skateboard organis<strong>en</strong>t leur premier<br />

contest de skate !<br />

Tout aussi émouvant, le film de Pierre Michelon<br />

s’intéresse à la pratique du surf <strong>en</strong> Algérie :<br />

il y suit des jeunes qui ont découvert presque<br />

«par hasard» le plaisir de surfer ces vagues. Un<br />

bonheur qui leur fait oublier, le temps d’une glisse,<br />

les difficultés économiques du pays.<br />

Bref, une très belle exposition prés<strong>en</strong>tant des<br />

figures emblématiques comme Mike Giant,<br />

Jim Phillips ou <strong>en</strong>core Alexander Klein, et un<br />

geste inaugural fort pour la Friche et cette nouvelle<br />

Tour-Panorama impressionnante, comme<br />

l’imm<strong>en</strong>se fresque colorée du street artiste,<br />

Remed.<br />

Vito Acconci, A Skate Park that Glides Over the Land & Drops Into the Sea (detail), 2004, Projet de skatepark (non realise) pour The Third Mill<strong>en</strong>nium<br />

park, San Juan Puerto Rico © Acconci studio<br />

On déplore d’autant plus que cette exposition<br />

soit marquée par le manque d’artistes féminines<br />

(seulem<strong>en</strong>t 4 !) et que justem<strong>en</strong>t une femme artiste<br />

comme Madeleine Berkhemer mette <strong>en</strong><br />

avant dans ses œuvres l’image stéréotypée de<br />

la pin-up américaine légèrem<strong>en</strong>t vêtue dessinée<br />

sur des plateaux de skateboard. Les femmes qui<br />

s’intéress<strong>en</strong>t et pratiqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> nombre ce g<strong>en</strong>re<br />

de sport ne sont représ<strong>en</strong>tées dans l’exposition<br />

Op<strong>en</strong> Your Art au skateshop de la Friche, que<br />

par des moulages de bustes de femmes issues<br />

de la street culture (voir p 5).<br />

Ambiance !<br />

Néanmoins, il faut t<strong>en</strong>ter l’expéri<strong>en</strong>ce de passer<br />

une soirée à la Friche ! Le soir sur le toit-terrasse,<br />

l’ambiance est décontractée avec les DJs<br />

aux platines, le bar, les transats, les baby-foot,<br />

la mini-rampe de skate... Côté musique, la soirée<br />

finit souv<strong>en</strong>t au Cabaret Aléatoire qui a proposé<br />

(et proposera <strong>en</strong>core) des artistes de haut niveau.<br />

Ainsi Oy a offert une performance incroyable :<br />

la chanteuse a su avec grâce allier soul et beats<br />

électroniques et Cody Chesnutt a pris la relève<br />

avec tal<strong>en</strong>t. Le programme est très varié, allant<br />

de spécialistes de techno/house comme Shaun<br />

Reeves au provocateur et plus que célèbre<br />

rockeur anglais Pete Doherty. C’est aussi<br />

l’occasion unique de voir l’impressionnant rappeur<br />

américain Mos Def, heureux d’être prés<strong>en</strong>t<br />

sur une scène marseillaise malgré une acoustique<br />

un peu décevante. En espérant que ce ne<br />

sera pas le cas pour le concert tant att<strong>en</strong>du des<br />

Wu-Tan Clan le 24 mai à la Cartonnerie !<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

Prochaine programmation musicale<br />

17 mai : Soirée éclectique / Oiseaux de nuit,<br />

film-docum<strong>en</strong>taire de Chassol + MYSELF + Djs<br />

résid<strong>en</strong>ts de Radio Gr<strong>en</strong>ouille<br />

18 mai : Musique jeune public/ MIC & ROB,<br />

concert goûter<br />

Création jazz, hip hop / Musique Rebelle Round<br />

2013, 50 artistes et musici<strong>en</strong>s invités par le batteur<br />

Ahmad Compoaré<br />

20 mai : Concert hip hop / Grems by Skullcandy<br />

+ NEMIR<br />

23 mai : Concert Rock / La Femme<br />

24 mai : Concert hip hop / Wu-Tan Clan<br />

This is (not) music<br />

jusqu’au 9 juin<br />

04 95 04 95 04<br />

www.lafriche.org


32<br />

M<br />

P2013<br />

Trilogie Eschyle<br />

Le travail qu’Olivier Py a m<strong>en</strong>é sur<br />

Eschyle est <strong>en</strong> tout point remarquable.<br />

Par sa compréh<strong>en</strong>sion profonde<br />

et sa mise <strong>en</strong> perspective limpide<br />

avec notre prés<strong>en</strong>t ; par sa «traduction»<br />

<strong>en</strong> vers qui sans trop<br />

bousculer le texte le fait résonner<br />

avec notre Méditerranée : ses exils,<br />

la viol<strong>en</strong>ce faite aux femmes, le<br />

caractère sacré de l’accueil, la<br />

compassion pour l’<strong>en</strong>nemi. Car le<br />

dépouillem<strong>en</strong>t et le lyrisme d’Eschyle,<br />

à l’origine du théâtre, r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t la<br />

tragédie vers les fondem<strong>en</strong>ts de la<br />

cité, dans la démesure de la décision<br />

politique, loin des délibérations amoureuses<br />

ou des conflits domestiques<br />

qui ont fondé notre théâtre moderne.<br />

Cette démesure parle immédiatem<strong>en</strong>t,<br />

à tous ; aux lycé<strong>en</strong>s malgré<br />

Pas question de buller<br />

Aix serait-elle un paradis des bulles ? Pour le<br />

public qui courait les expositions et préférait<br />

rester <strong>en</strong>fermé dans la Cité du Livre <strong>en</strong> dépit de<br />

la chaleur et d’un soleil radieux les 12, 13 et 14<br />

avril derniers, assurém<strong>en</strong>t oui. Le week<strong>en</strong>d BD,<br />

temps fort des R<strong>en</strong>contres du 9 e art, reste un<br />

mom<strong>en</strong>t privilégié pour les amateurs de tous<br />

âges, qui ne recul<strong>en</strong>t devant aucune file d’att<strong>en</strong>te<br />

afin de pouvoir échanger quelques mots<br />

avec leurs dessinateurs préférés et surtout de<br />

repartir avec une belle dédicace sur la page de<br />

garde de leurs albums. Pour les auteurs, <strong>en</strong> revanche,<br />

ces trois jours de r<strong>en</strong>contres et de<br />

signatures sont un véritable marathon. Ils n’ont<br />

pas été invités pour buller. Car une dédicace de<br />

bédéiste, c’est autre chose que quelques mots.<br />

Un dessin, si possible personnalisé, demande<br />

du temps, de l’énergie. Voilà pourquoi on n’a<br />

parfois fait qu’<strong>en</strong>trapercevoir des crânes (celui,<br />

chauve, du Flamand Herr Seele, créateur du<br />

Cowboy H<strong>en</strong>k, ou ceux, plus chevelus, de l’extravagante<br />

équipe de Métamorphose). P<strong>en</strong>chés<br />

sur les albums, ils dessinai<strong>en</strong>t et dessinai<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong>core. Un marathon, on vous dit. Mais pour la<br />

librairie du festival, qui regroupait plusieurs <strong>en</strong>seignes<br />

aixoises, une bonne opération commerciale,<br />

la plupart des albums se v<strong>en</strong>dant pas moins<br />

d’une vingtaine d’euros…FRED ROBERT<br />

Les Perses © Alain Fonteray<br />

la langue ardue et l’âpreté ascétique<br />

du dispositif scénique. Car<br />

Olivier Py a voulu adopter les principes<br />

d’un «théâtre d’interv<strong>en</strong>tion»,<br />

forme légère portée par trois acteurs,<br />

sans décor ni attirail technique,<br />

disposant simplem<strong>en</strong>t de leur voix,<br />

de leur corps et du texte, debout<br />

sur des tables qu’ils arp<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t et<br />

devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t des terres qu’ils déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t<br />

ou désir<strong>en</strong>t. Des acteurs <strong>en</strong><br />

tout point hors du commun :<br />

Mireille Herbstmeyer, Frédéric<br />

Giroutru et Philippe Girard sont<br />

des monstres qui tonn<strong>en</strong>t et pleur<strong>en</strong>t,<br />

s’effondr<strong>en</strong>t et se redress<strong>en</strong>t<br />

là, devant vous, à portée de souffle,<br />

mais si loin dans l’émotion que personne<br />

n’ose avancer la main. (Mais<br />

comm<strong>en</strong>t font-ils pour jouer chaque<br />

jour, deux ou trois fois, des<br />

pièces différ<strong>en</strong>tes ?).<br />

Celui qui n’était pas <strong>en</strong>core le futur<br />

directeur d’Avignon avait prés<strong>en</strong>té<br />

chacune des pièces à l’Odéon qu’il<br />

dirigeait alors, puis aux ATP d’Aix,<br />

<strong>en</strong>fin la trilogie aux ATP d’Avignon.<br />

Soit Les Suppliantes –les Egypti<strong>en</strong>nes<br />

viol<strong>en</strong>tées demand<strong>en</strong>t l’asile<br />

au risque de la guerre-, Les Sept<br />

contre Thèbes –ou comm<strong>en</strong>t Etéocle<br />

combat la terreur m<strong>en</strong>ée aux<br />

portes de la Cité par son frère-, Les<br />

Perses –ou l’arrogance des Grecs<br />

vue par les yeux de leur <strong>en</strong>nemi<br />

victorieux. Trois pièces étonnantes,<br />

qui n’apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas aux mêmes<br />

cycles, mais <strong>en</strong> form<strong>en</strong>t un nouveau,<br />

<strong>en</strong> trois épisodes de 50 mns,<br />

à voir d’un trait pour les plus<br />

accrocs à l’émotion archaïque<br />

débridée.<br />

A.F.<br />

Les Suppliantes<br />

le 5 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 5 juin à 20h<br />

Salle Yves Montand, Saint Cannat<br />

le 11 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 11 juin à 20h<br />

Les Amandiers, Aix<br />

Les Sept contre Thèbes<br />

le 6 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 6 juin à 20h<br />

Les Amandiers, Aix<br />

le 12 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 12 juin à 20h<br />

Voûte Chabaud, V<strong>en</strong>elles<br />

Les Perses<br />

le 7 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 7 juin à 20h<br />

Le Château, Trets<br />

le 13 juin à 15h<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

le 13 juin à 20h<br />

Salle Ferrat, Le Tholonet<br />

L’intégrale Eschyle<br />

le 8 juin à 19h<br />

Fondation Vasarely, Aix<br />

le 14 juin à 19h<br />

Le Château, Peyrolles<br />

ATP, Aix<br />

04 42 26 83 98<br />

www.atpaix.com<br />

© Gaëlle Cloarec<br />

Jacques Ferrandez a lui aussi couru le marathon<br />

des dédicaces ; ce qui ne l’a pas empêché<br />

de s’interrompre <strong>en</strong>tre deux séances pour honorer<br />

son RDV Café BD avec Frédéric Bosser.<br />

Albert Camus, tout particulièrem<strong>en</strong>t célébré <strong>en</strong><br />

cette année c<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire de sa naissance, a été<br />

au c<strong>en</strong>tre de l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>. Ferrandez a rappelé<br />

l’importance qu’a eue pour lui l’adaptation <strong>en</strong><br />

2009 de L’hôte, ce «cond<strong>en</strong>sé de l’œuvre de<br />

Camus <strong>en</strong> 25 pages». Son adaptation de cette<br />

nouvelle peu connue a été appréciée par la fille<br />

de l’écrivain, Catherine, qui lui a <strong>en</strong>suite donné<br />

le feu vert pour celle de L’Etranger. Evidemm<strong>en</strong>t,<br />

«s’attaquer à un tel monum<strong>en</strong>t, ça fout la trouille»<br />

avoue le dessinateur. Ce qu’il craignait surtout,<br />

c’était de trahir l’imagination du lecteur. Son<br />

souci majeur a d’ailleurs été de donner un visage<br />

à Meursault (lire chronique p90) Mais pour le<br />

reste, il ne s’est pas posé trop de questions. En<br />

ce qui concerne le cadre par exemple, il lui est<br />

apparu évid<strong>en</strong>t qu’il devait garder celui de l’époque<br />

de rédaction du roman, donc de l’Algérie<br />

d’avant la Seconde Guerre Mondiale, celle qu’a<br />

connue Camus. Et quand on l’interroge sur les<br />

raisons de cette adaptation, il redit son attachem<strong>en</strong>t<br />

viscéral à l’Algérie, qui le rapproche de<br />

l’auteur de Noces. Il rappelle aussi l’actualité du<br />

personnage de Meursault et la dim<strong>en</strong>sion universelle<br />

du propos de L’Etranger (qui pose <strong>en</strong>tre<br />

autres la question de la norme sociale). Il affirme<br />

son admiration pour celui qu’il qualifie avec<br />

humour d’«auteur dégagé». D’ailleurs, conclut-il,<br />

aujourd’hui <strong>en</strong> Algérie même ceux qui le jug<strong>en</strong>t<br />

«colonial» reconnaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> lui «un très grand<br />

écrivain algéri<strong>en</strong>.» F.R.<br />

Le week<strong>en</strong>d BD des R<strong>en</strong>contres du 9 e art a eu lieu<br />

les 12, 13 et 14 avril à Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce.<br />

Certaines expositions dur<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core <strong>en</strong> mai et juin.<br />

www.bd-aix.com


La grande cavalcade<br />

Transhumance 2013, Animaglyphe Crau © Lionel Roux-Theatre du c<strong>en</strong>taure<br />

Répartie sur trois semaines et six temps forts, la TansHumance initiée<br />

par le Théâtre du C<strong>en</strong>taure est l’un des événem<strong>en</strong>ts phares de<br />

ce printemps 2013 sur le territoire de Marseille Prov<strong>en</strong>ce. De son succès<br />

dép<strong>en</strong>dra une bonne part du bilan de l’année capitale, tant au niveau<br />

de la fréqu<strong>en</strong>tation du public que de la qualité artistique…<br />

Sabots fourchus, sabots ferrés... la valse des<br />

ongulés est prête à comm<strong>en</strong>cer, ou plutôt<br />

leur longue marche à travers le territoire de<br />

MP2013. V<strong>en</strong>us de l’autre côté des Alpes,<br />

les chevaux des Mar<strong>en</strong>nes et les vaches<br />

itali<strong>en</strong>nes aux cornes <strong>en</strong> forme de lyre<br />

rejoindront les jum<strong>en</strong>ts de Camargue et les<br />

brebis de la Crau dans un cheminem<strong>en</strong>t qui<br />

débutera le 18 mai à Cuges-les-Pins, et<br />

s’achèvera sur le Vieux Port de Marseille le<br />

9 juin. Entre les deux, une multitude d’étapes<br />

pour se métamorphoser <strong>en</strong> «TransHuman»<br />

le temps d’une randonnée, d’un bivouac ou<br />

d’un pique-nique : Istres, Lambesc, Les<br />

Baux de Prov<strong>en</strong>ce, Salon, Châteaur<strong>en</strong>ard,<br />

Miramas, Saint-Antonin, Saint-Martin-de-<br />

Crau, Meyrargues, Trets... On pourra «dessiner<br />

dans le paysage», aussi, <strong>en</strong> réalisant un Animaglyphe<br />

: «œuvre de land art participative»,<br />

chorégraphie mêlant hommes et bêtes, ces<br />

«tracés éphémères pour le regard des oiseaux»<br />

seront filmés depuis les airs sur les<br />

flancs de la Sainte-Victoire comme ils l’ont<br />

déjà été à Rome, Piazza del Popolo, et sur<br />

les plages marocaines. Ou <strong>en</strong>core banqueter<br />

à la camarguaise, danser sous les étoiles,<br />

repr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> chœur l’hymne de Manu<br />

Théron écrit pour l’occasion, goûter les<br />

chansons de Prov<strong>en</strong>ce et d’Italie... R<strong>en</strong>dezvous<br />

à mi-parcours le 1 er juin à l’Etang des<br />

Aulnes pour la Ré-Union des trajectoires,<br />

lors d’un BalBête conçu par Serge Hureau<br />

et chorégraphié par Dominique Rebaud<br />

(avec de vrais musici<strong>en</strong>s pour m<strong>en</strong>er le<br />

branle ! Lo Còr de la Plana, El Maya el Asilah<br />

et Assurd).<br />

Pour s’inscrire, participer à pied ou à cheval,<br />

se r<strong>en</strong>seigner sur les parcours, il faut se<br />

r<strong>en</strong>dre sur le site internet de MP2013, dont<br />

les équipes sont sur les d<strong>en</strong>ts depuis des<br />

mois. Concrétiser le rêve poétique du C<strong>en</strong>taure<br />

d’une communion <strong>en</strong>tre l’homme et<br />

l’animal, nature et cultures sur le pourtour<br />

de la Méditerranée n’a effectivem<strong>en</strong>t pas<br />

été une mince affaire. Outre le retrait des<br />

cavaliers marocains privés de TransHumance<br />

par un Office du Tourisme confondant<br />

capitale culturelle et foire artisanale, il a fallu<br />

gérer les multiples interv<strong>en</strong>ants, et la grogne<br />

des artistes du territoire qui ont eu l’impression<br />

d’être remplacés par des animaux.<br />

Et puis <strong>en</strong>core dialoguer avec les collectivités<br />

concernées, réunir les autorisations<br />

nécessaires au déplacem<strong>en</strong>t des troupeaux,<br />

prévoir la logistique, la sécurité, pr<strong>en</strong>dre des<br />

mesures sanitaires... Un ordre d’idées ? 26<br />

semi-remorques att<strong>en</strong>dront les bêtes au soir<br />

de l’arrivée à Marseille, pour les rapatrier. Et<br />

l’on n’imagine pas le tonnage de crottin qu’il<br />

faudra évacuer...<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

La TransHumance<br />

du 17 mai au 9 juin<br />

www.mp2013.fr/transhumance<br />

Salon de la C<strong>en</strong>tauresse, installations vidéo<br />

Jusqu’au 1 er sept<br />

MdAA, Arles<br />

www.arles-antique.cg13.fr<br />

TransHumance, film d’art de moy<strong>en</strong> métrage<br />

du 28 mai au 11 juin<br />

Carrières de Lumières, Les-Baux-de-<br />

Prov<strong>en</strong>ce<br />

04 90 54 47 37<br />

L’Observatoire du Bout du Monde, installation<br />

multimédia<br />

Juin-juillet et sept-oct tous les v<strong>en</strong>dredis et<br />

samedis<br />

Théâtre du C<strong>en</strong>taure, Marseille<br />

04 91 25 38 10<br />

Vernissage exposition photo de Lionel Roux<br />

et lancem<strong>en</strong>t du livre TransHumance (Actes Sud)<br />

le 13 juillet<br />

Arènes, Saintes-Maries-de-la-Mer<br />

04 90 97 85 86


34<br />

T<br />

H<br />

É<br />

Â<br />

TRE<br />

Radical ?<br />

François-Michel Pes<strong>en</strong>ti a la réputation d’être<br />

un metteur <strong>en</strong> scène «difficile», qui n’hésite pas<br />

à pr<strong>en</strong>dre le spectateur à rebrousse-poil et les<br />

acteurs de front, loin de toute complaisance et<br />

davantage dans la «transaction secrète» que<br />

dans le «donnant donnant» du spectaculaire.<br />

Mais s’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir avec l’homme relève -on ose à<br />

peine le dire sous cette forme- de la partie de<br />

plaisir, tant la parole cisèle, définit et dresse les<br />

contours fermes d’un travail d’artiste.<br />

À bâtons rompus la cohér<strong>en</strong>ce de l’œuvre, passée<br />

et <strong>en</strong> cours, se dessine à partir de quelques<br />

mots tout simples : le «retour» par exemple, terme<br />

avec lequel la presse accueille (<strong>Zibeline</strong> aussi !)<br />

quasim<strong>en</strong>t chaque proposition nouvelle. C’est<br />

que la Compagnie du Point Aveugle -tout un<br />

programme- revi<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t de loin. François<br />

Michel Pes<strong>en</strong>ti rappelle combi<strong>en</strong> sa collaboration<br />

avec les pays asiatiques (Chine, Taïwan,<br />

Japon <strong>en</strong> particulier) a été déterminante dans<br />

son approche de la scène et du traitem<strong>en</strong>t de la<br />

langue, toujours finalem<strong>en</strong>t étrangère comme<br />

un territoire à traverser ; pas d’exotisme dans<br />

cette démarche mais la même logique que celle<br />

qui pousse à s’<strong>en</strong>gager dans les grands textes -<br />

«haute langue» dit-il- aussi bi<strong>en</strong> Duras ou Koltès<br />

que Racine et Kleist avec toute la distance à parcourir<br />

pour le spectateur d’aujourd’hui.<br />

Il parle <strong>en</strong>core de la nécessité absolue du «travail<br />

d’oreille» et de la perception fine de l’autre,<br />

l’acteur, matériau émotionnel fondam<strong>en</strong>tal du<br />

Francois-Michel Pesanti © X-D.R<br />

théâtre : c’est sa manière de faire, la nature propre<br />

de chaque acteur qui construit la dramaturgie<br />

bi<strong>en</strong> davantage qu’une mise <strong>en</strong> scène m<strong>en</strong>ée<br />

de l’extérieur. C’est justem<strong>en</strong>t cette «dramaturgie<br />

sauvage» qui constituait le fond et la forme<br />

du spectacle précéd<strong>en</strong>t A sec, t<strong>en</strong>tative de point<br />

final sinon de «liquidation» d’une expéri<strong>en</strong>ce<br />

collective, quasi «familiale», m<strong>en</strong>ée depuis des<br />

années ; le metteur <strong>en</strong> scène prés<strong>en</strong>t au plateau<br />

y mettait à mal sa fonction dont la mort était<br />

montrée comme une composante subtile...<br />

Pas de cruauté pourtant dans le sourire de<br />

Pes<strong>en</strong>ti mais de la malice, forme première de<br />

l’intellig<strong>en</strong>ce et avec le Solaris de Stanislas Lem<br />

prés<strong>en</strong>té aux Bernardines <strong>en</strong> une version personnelle<br />

sinon allégée, le «retour» est total : ce<br />

texte, nous dit-il, est déjà matière sous-jac<strong>en</strong>te<br />

de bon nombre de ses spectacles et revi<strong>en</strong>t ici<br />

sous forme de lecture-performance dont il est<br />

l’acteur, accompagné de Marcelle Basso,<br />

survivante du dernier opus. Sci<strong>en</strong>ce-fiction métaphysique,<br />

histoire d’amour désincarnée,<br />

fantasmes et interrogations sur l’id<strong>en</strong>tité et le<br />

réel que traduit parallèlem<strong>en</strong>t le trajet stylisé de<br />

la lune et du soleil dans les images de deux<br />

plastici<strong>en</strong>s brésili<strong>en</strong>s auteurs d’une installation<br />

au protocole rigoureux. Expéri<strong>en</strong>ce forte pour le<br />

spectateur, r<strong>en</strong>contre avec sa propre vie et<br />

voyage jusqu’au «seuil noir que tout œuvre suppose»<br />

(Point Aveugle, <strong>en</strong>core) et que tout<br />

homme porte <strong>en</strong> lui, c’est le souhait du metteur<br />

<strong>en</strong> scène. Radicalité bi<strong>en</strong> honnête donc, au s<strong>en</strong>s<br />

noble du terme que F.-M. Pes<strong>en</strong>ti cerne <strong>en</strong> trois<br />

formules qui, l’air de ri<strong>en</strong>, tram<strong>en</strong>t tout l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong><br />

«ne ri<strong>en</strong> dire de moi», «croire <strong>en</strong> quelque<br />

chose», «montrer ce <strong>en</strong> quoi je crois». Radical ?<br />

Limpide !<br />

MARIE JO DHO<br />

Solaris d’après Stanislas Lem / lecture et mise<br />

<strong>en</strong> espace de F.-M. Pes<strong>en</strong>ti dans une installation<br />

de Rafael Lain et Angelica Detanico a été<br />

prés<strong>en</strong>té au théâtre des Bernardines,<br />

Marseille, le 19 et 20 avril<br />

Tête de Maure et Fleur Rouge<br />

Pour la Corse et pour le Parti : si la<br />

mort a un s<strong>en</strong>s, celle du résistant<br />

Jean Nicoli décapité par un soldat<br />

itali<strong>en</strong> le 30 août 1943 convoque<br />

tout un monde de passion et de<br />

fidélité, de trahison aussi peut-être…<br />

ce sont <strong>en</strong> tout cas les images fortes<br />

que dessin<strong>en</strong>t sobrem<strong>en</strong>t le<br />

texte et la mise <strong>en</strong> scène de Noël<br />

Casale pour (ô combi<strong>en</strong> pour) l’actrice<br />

Edith Mérieau quasim<strong>en</strong>t<br />

seule <strong>en</strong> salle, tout près des spectateurs.<br />

C’est d’abord Jeanne l’épouse<br />

qui raconte simplem<strong>en</strong>t la vie d’un<br />

instituteur qui respire large : départ<br />

pour l’Afrique, le Soudan, les rives<br />

du Niger et les premières prises de<br />

consci<strong>en</strong>ce communes des ravages<br />

de la colonisation ; retour au<br />

pays et organisation du maquis qui<br />

<strong>en</strong> Corse relève aussi de la poésie.<br />

Voix posée et mains expressives la<br />

grande jeune femme se déplace<br />

doucem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> une prés<strong>en</strong>ce apaisante<br />

dont on réalise soudain qu’elle<br />

est celle d’une rev<strong>en</strong>ante extralucide<br />

puisque, morte huit ans avant<br />

son mari, elle porte douloureusem<strong>en</strong>t<br />

le récit de son supplice.<br />

L’estrade à claire-voie qu’elle emprunte<br />

parfois laisse filtrer une<br />

étrange lumière, seul artifice avec<br />

quelques échos de Webern pour<br />

accompagner la lég<strong>en</strong>de <strong>en</strong> train<br />

de se construire. Puis, comme toujours<br />

dans le théâtre de Noël Casale,<br />

se lèv<strong>en</strong>t les autres, le fasciste athlétique<br />

qui de sa foulée impériale<br />

occupe la région et pourchasse le<br />

communiste ou l’impayable administrateur<br />

colonial <strong>en</strong> grand singe<br />

dont les gestes ne sont pas moins<br />

monstrueux que les discours : inaltérable<br />

sur la durée, toujours juste<br />

y compris dans l’excès et la caricature,<br />

Edith Mérieau les incarne<br />

tous formidablem<strong>en</strong>t ! À tel point<br />

que la v<strong>en</strong>ue sur scène de Moustapha<br />

Mboupqui <strong>en</strong>tonne un chant<br />

de deuil après lecture des lettres<br />

© Eric Rondepierre<br />

ultimes de celui qui va mourir semble<br />

superflue… Quant au soleil sur<br />

l’Alta Rocca nul doute qu’il continue<br />

à éclairer la vie de Noël Casale !<br />

M.J.D<br />

Vie de Jean Nicoli (texte et mise<br />

<strong>en</strong> scène de Noël Casale)<br />

a été prés<strong>en</strong>té aux Bernardines,<br />

Marseille, du 29 avril au 4 mai


Ni pute ni soumise<br />

Une création de la Comédie Française à Marseille, d’un texte<br />

contemporain traduit de l’arabe, est assurém<strong>en</strong>t un symbole<br />

fort. D’autant que Rituel pour une métamorphose, du Syri<strong>en</strong><br />

Saadallah Wannous, n’est pas anodin : brossant le tableau<br />

d’une société ori<strong>en</strong>tale (Damas, fin XIX e ) soumettant les<br />

femmes ou les prostituant, minée par les conflits politiques et<br />

sombrant dans la folie du mysticisme ou un extrémisme<br />

religieux fondé sur la répression sexuelle, le texte s’attache aux<br />

racines historiques des Islams fondam<strong>en</strong>talistes, tout <strong>en</strong><br />

prônant la libération du désir dans des élans de pureté ou des<br />

vertiges qui font p<strong>en</strong>ser aux contrastes de G<strong>en</strong>êt. La scène<br />

c<strong>en</strong>trale de la métamorphose, dans laquelle Julie Sicard brûle<br />

d’une flamme intérieure fascinante, est un très beau sommet<br />

dramatique. Hélas le reste n’est pas à cette hauteur. Les<br />

comédi<strong>en</strong>s du Français sembl<strong>en</strong>t <strong>en</strong>goncés dans des costumes<br />

ori<strong>en</strong>talisants qui brid<strong>en</strong>t leurs gestes, même D<strong>en</strong>is Podalydès<br />

n’est pas toujours juste, et Thierry Hancisse, <strong>en</strong> dehors de la<br />

scène où il se dévoile, semble inspiré par Iznogoud : gestes<br />

psychologiques, petits yeux qui se fronc<strong>en</strong>t, raideur… les<br />

techniques de jeu sont anci<strong>en</strong>nes (je me déplace je parle je fais<br />

un geste je parle je barytone et articule) dans cette vieille<br />

maison lorsqu’un metteur <strong>en</strong> scène inspiré ne les bouscule<br />

pas… Pourtant la scénographie, riche, est belle, jouant de<br />

transpar<strong>en</strong>ce, d’arabesques subtiles et d’une belle surprise. Et<br />

les allusions à Guantanamo, un peu lourdes, rappell<strong>en</strong>t avec<br />

pertin<strong>en</strong>ce que l’usage de la torture perdure. Peut être que dans<br />

un espace moins restreint, avec le travail du temps, la subtilité<br />

du texte passera mieux ? Car si la religion n’est pas remise <strong>en</strong><br />

cause les fous de dieu <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour leur grade, et le sort<br />

réservé aux femmes et aux homosexuels dans une société qui<br />

meurt de tuer le désir.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Rituel pour une métamorphose a été créé au Gymnase, Marseille,<br />

du 29 avril au 7 mai<br />

Il sera repris à la Comédie Française, Paris, du 18 mai au 11 juillet<br />

www.comedie-francaise.fr<br />

© Cosimo Mirco Magliocca


36<br />

T<br />

H<br />

É<br />

Â<br />

TRE<br />

Trois pour neuf,<br />

mais…<br />

Ils sont dynamiques, vifs, drôles,<br />

et trois seulem<strong>en</strong>t pour jouer les<br />

neuf personnages du Misanthrope.<br />

La troupe du Cartoun Sardine<br />

Théâtre s’<strong>en</strong> donne à cœur joie<br />

dans cette interprétation. L’idée<br />

Célébrer l’esprit<br />

de troupe<br />

L’amour du théâtre est une chose rare, y compris chez les<br />

metteurs <strong>en</strong> scène. Charles Eric Petit et ses comédi<strong>en</strong>s<br />

aim<strong>en</strong>t le texte, le jeu, jusqu’à plonger dans le répertoire<br />

shakespeari<strong>en</strong> pour y trouver des choses à dire sur notre<br />

monde. Sans le bousculer, <strong>en</strong> y ajoutant aux marges un cadre<br />

qui reflète leur vie d’aujourd’hui.<br />

Car le Songe d’une nuit d’été est une pièce sur le théâtre, et sur<br />

le couple. Les Individus (c’est ainsi que la compagnie se<br />

nomme) emm<strong>en</strong>és par Charles Eric Petit mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> abyme la<br />

pièce de Shakespeare pour y parler d’une troupe d’aujourd’hui,<br />

désarg<strong>en</strong>tée et <strong>en</strong>thousiaste, traversée d’ego, de désirs et de<br />

passions. Dans un décor <strong>en</strong> ruine faits de portants et de<br />

costumes récupérés çà et là ils trouv<strong>en</strong>t le matériau pour jouer<br />

les couples de la comédie, les rois et les dieux qui se<br />

divertiss<strong>en</strong>t du destin des hommes, les citoy<strong>en</strong>s et les artisans<br />

qui les subiss<strong>en</strong>t mais parvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à garder leur route <strong>en</strong> dépit<br />

des consignes, manipulations et ratages des instances<br />

supérieures. Et les comédi<strong>en</strong>s-personnages s’amus<strong>en</strong>t,<br />

adoptant le ton parfois philosophique du texte, tournant<br />

g<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>en</strong> dérision sa pompe, r<strong>en</strong>dant s<strong>en</strong>sible sa magie à<br />

deux balles, glissant de mise <strong>en</strong> abyme <strong>en</strong> linéarité, fabriquant<br />

au passage de très jolies images dans des cadres, puis<br />

plongeant sans hésitation dans le comique le plus farcesque,<br />

têtes d’ânes et chassés-croisées, parodie de théâtre élégiaque<br />

par des artisans qui sursignifi<strong>en</strong>t la lune ou le lion. Tous les<br />

comédi<strong>en</strong>s sont justes, mesurés ou<br />

déchainés lorsqu’il le faut, incarnant<br />

sans hésitation l’émotion ou la<br />

distance, la viol<strong>en</strong>ce des désirs et la<br />

versatilité dérisoire des s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts.<br />

Une troupe et un spectacle qui<br />

devrai<strong>en</strong>t avoir un bel av<strong>en</strong>ir, si les<br />

programmateurs et les<br />

subv<strong>en</strong>tionneurs aimai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core,<br />

un tant soit peu, le théâtre.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Le Songe d’une nuit d’été a été créé<br />

au théâtre Gyptis, Marseille, du 9<br />

au 13 avril<br />

© Mathieu Bonfils<br />

© X-D.R<br />

© RML<br />

est originale, les effets comiques<br />

bi<strong>en</strong> v<strong>en</strong>us, les g<strong>en</strong>s ri<strong>en</strong>t beaucoup<br />

aux facéties des petits<br />

marquis, d’Oronte, poète amateur<br />

et surfait, des minauderies de<br />

Célimène. Tout ce qui correspond<br />

à la superficialité de la vie de cour<br />

est r<strong>en</strong>du avec brio. L’escarpolette<br />

de la coquette r<strong>en</strong>voie à une<br />

Véronique qui ne se laisse pas<br />

cueillir… mais… comme dans la<br />

scène des portraits bi<strong>en</strong> trop<br />

écourtée : à cet allant de commedia<br />

dell’arte, et l’indéniable complicité<br />

avec le public, manqu<strong>en</strong>t profondeur<br />

et nuances. L’atrabilaire<br />

amoureux a davantage d’épaisseur<br />

que celle qui lui est ici accordée.<br />

Les aveuglem<strong>en</strong>ts du rigoriste Alceste,<br />

son intransigeance, sa<br />

volonté héroïque d’absolu dans un<br />

Compassion<br />

ou torture ?<br />

La première mise <strong>en</strong> scène de Vinc<strong>en</strong>t<br />

Franchi est une surprise de<br />

taille : l’assistant de R<strong>en</strong>aud Marie<br />

Leblanc est jeune, et s’attaquer<br />

ainsi à une pièce réc<strong>en</strong>te de Lars<br />

Nor<strong>en</strong>, complexe et rude, dénote<br />

un courage certain… La justesse<br />

de la mise <strong>en</strong> œuvre confirme une<br />

maturité peu commune. Se déroulant<br />

dans un lieu ambigu -est-on<br />

dans une prison, un hôpital psychiatrique,<br />

un espace m<strong>en</strong>tal, une<br />

chambre, un bureau ?– Acte repose<br />

sur des incohér<strong>en</strong>ces psychologiques<br />

et des anachronismes constants<br />

qui dérout<strong>en</strong>t, interdis<strong>en</strong>t aux acteurs<br />

de se réfugier dans une incarnation<br />

facile, et les oblige pourtant à trouver<br />

des ressorts, une id<strong>en</strong>tité, à leurs<br />

personnages. Lui se prét<strong>en</strong>d médecin,<br />

mais est-il un psychiatre, un<br />

tortionnaire, un policier ? Elle, une<br />

terroriste allemande des années<br />

70, semble pourtant se battre<br />

comme une résistante contre un<br />

nazisme sous jac<strong>en</strong>t… Le texte roule,<br />

assume ses ambigüités sans les<br />

résoudre, plongeant les deux personnages<br />

dans un huis clos où ils<br />

se dévoil<strong>en</strong>t, se livr<strong>en</strong>t, s’épaul<strong>en</strong>t,<br />

se révolt<strong>en</strong>t et se désir<strong>en</strong>t même<br />

monde où la frivolité l’emporte, les<br />

nuances chères à Philinte, qui sait<br />

rester droit tout <strong>en</strong> sachant moduler<br />

ses attitudes avec tact, la<br />

finesse d’Éliante, qui analyse avec<br />

justesse la cristallisation de l’amour<br />

d’Alceste pour Célimène, sont<br />

gommés ; de trop nombreux passages<br />

sont supprimés. Aussi,<br />

l’étonnante gravité de la pièce<br />

malgré son appellation de comédie<br />

qui avait déjà surpris les<br />

spectateurs du XVII e , est abs<strong>en</strong>te<br />

cruellem<strong>en</strong>t. La consci<strong>en</strong>ce douloureuse<br />

de cet «<strong>en</strong>nemi du g<strong>en</strong>re<br />

humain» est sacrifiée au seul profit<br />

des effets comiques de ses excès.<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Le Misanthrope a été joué<br />

le 3 mai au Toursky, Marseille<br />

parfois, avec dégoût. Vinc<strong>en</strong>t Franchi<br />

met <strong>en</strong> scène ses acteurs dans<br />

un espace neutre dont la lumière<br />

évolue patiemm<strong>en</strong>t, avec des <strong>en</strong>volées<br />

de dialogues troués de<br />

sil<strong>en</strong>ces, des changem<strong>en</strong>ts de ton<br />

injustifiés et pertin<strong>en</strong>ts. La tâche<br />

pour les jeunes acteurs, incarnant<br />

des personnages plus âgés, est<br />

énorme, et ils sont un peu frêles<br />

pour ces rôles écrasants, marchant<br />

dans le bon s<strong>en</strong>s et au bon rythme<br />

mais pas toujours justes s’ils sont<br />

souv<strong>en</strong>t touchants. Quoi qu’il <strong>en</strong><br />

soit, le travail de cette compagnie<br />

toulonnaise est remarquable d’intellig<strong>en</strong>ce<br />

dramatique, interrogeant<br />

notre rapport à la révolte, au<br />

remords et à la culpabilité peut<br />

être, à la soumission et à la terreur<br />

sûrem<strong>en</strong>t. Le texte demeure brut et<br />

lourd comme un bloc de granit, on<br />

voudrait le relire et revoir <strong>en</strong>core,<br />

tant son jeu avec le réalisme<br />

dramatique reste intrigant.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

La Cie la Souricière a joué Acte<br />

de Lars Nor<strong>en</strong> du 16 au 27 avril<br />

au Théâtre de L<strong>en</strong>che,<br />

Marseille


Artaud<br />

Tunisi<strong>en</strong><br />

On le compare à Gide, Rimbaud, Artaud, et<br />

pourtant Mnaouar Smadah, né à Nefta, la<br />

perle du Djerid <strong>en</strong> 1931 et disparu un 28<br />

décembre 1998, poète, luthiste, écrivain,<br />

journaliste, compositeur, responsable de la<br />

qualité des paroles pour les chansons à la<br />

radio tunisi<strong>en</strong>ne, producteur à la radio<br />

algéri<strong>en</strong>ne, est bi<strong>en</strong> peu connu des publics<br />

hors de la Tunisie. La Compagnie Alzhar<br />

s’attache à r<strong>en</strong>dre à un plus large public ce<br />

«pilier de la culture tunisi<strong>en</strong>ne» dont on ne<br />

trouve aucune traduction, explique Jeanne<br />

Poitevin, metteur <strong>en</strong> scène de Affaires et<br />

peines. «Un livre compr<strong>en</strong>ant les poèmes<br />

traduits pour le spectacle est <strong>en</strong> cours<br />

d’élaboration et verra le jour probablem<strong>en</strong>t<br />

l’an prochain», nous assure-t-elle.<br />

Son travail, créé lors du festival de poésie<br />

Les voix de la Méditerranée <strong>en</strong> 2011, s’inscrit<br />

dans la continuité de ceux initiés <strong>en</strong> Tunisie,<br />

depuis sept ans, riches de questionnem<strong>en</strong>t<br />

sur le dev<strong>en</strong>ir des relations nord/sud, des<br />

espoirs suscités par la révolution, et la<br />

volonté d’un réel partage culturel. Symbole<br />

de cette ambition, le choix des deux acteurs<br />

qui interprèt<strong>en</strong>t les textes de Mnaouar<br />

Smadah, issus des deux rives, Maxime<br />

Carasso qui lit d’abord les poèmes <strong>en</strong><br />

français, Heykel Mani, qui les interprète<br />

<strong>en</strong>suite <strong>en</strong> arabe. Le s<strong>en</strong>s est donné, puis on<br />

se plaît à le conjuguer aux sonorités du texte<br />

arabe : douceur des syllabes, échos de<br />

voyelles semblables, âpreté de certains<br />

acc<strong>en</strong>ts, passion première du conteur qui<br />

s’emporte. «C’est le désert qui s’éveille au<br />

v<strong>en</strong>t» pour un poète qui affirmait «dans la<br />

terre des douleurs, je me suis exilé».<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Affaires et peines a été joué le 18 avril<br />

au Hang’Art à Gardanne<br />

© Thierry Mondet<br />

«T’as joué, t’as perdu !»<br />

La nouvelle création de Serge Barbuscia, Droit<br />

dans le mur, s’organise à partir de l’idée cocasse<br />

-et juteuse- de métamorphoser l’anci<strong>en</strong>ne<br />

prison avignonnaise Sainte-Anne <strong>en</strong> hôtel 5<br />

étoiles. Une actualité locale à rebondissem<strong>en</strong>t<br />

que le metteur <strong>en</strong> scène ouvre à la question<br />

universelle du vivre-<strong>en</strong>semble. En convoquant<br />

poésie, chansons <strong>en</strong>gagées et humour, il<br />

continue d’interroger la condition humaine et<br />

pr<strong>en</strong>d position contre l’exclusion (la Fondation<br />

Abbé Pierre souti<strong>en</strong>t le projet). La pièce<br />

intercale dans un aller-retour <strong>en</strong>tre fiction et réel<br />

une mosaïque littéraire (Michaux, Baudelaire,<br />

Aragon, Guéno), la voix et la colère de l’Abbé<br />

Pierre, Coluche, Ferré, et des témoignages vidéo<br />

des visiteurs de cette prison insalubre qui vivrait<br />

«un conte de fée <strong>en</strong> dev<strong>en</strong>ant un palace dédié au<br />

Murmures et cascades<br />

Alexandra Tobelaim aime à travailler sur les<br />

histoires ordinaires, qu’elle pêche ici et là, dans<br />

les transcriptions du réel. Villa Olga est écrit à<br />

partir de faits divers de la Côte d’Azur, sa<br />

Seconde surprise de l’amour frotte Marivaux<br />

avec les confessions impudiques de Sophie<br />

Calle, et Italie Brésil pr<strong>en</strong>d naissance dans un<br />

match culte. Pour débuter une longue<br />

association avec le théâtre de la Minoterie (voir<br />

p 6) elle a conçu une semaine d’événem<strong>en</strong>ts de<br />

rue près de la Joliette. Avec sa bande de<br />

comédi<strong>en</strong>s, elle a donné à <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre dans des<br />

situations spatiales inatt<strong>en</strong>dues, au creux d’un<br />

confessionnal de papier ou sous une cascades<br />

de mots, des histoires vraies plus<br />

invraisemblables que les sc<strong>en</strong>arii les plus<br />

délirants. Un américain à la double vie qui a tué<br />

© A.F<br />

bonheur». Les trois comédi<strong>en</strong>s, impliqués dans<br />

le refus de l’amnésie, «sinon, on va droit dans le<br />

mur», t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t d’abattre les murs du sil<strong>en</strong>ce,<br />

vol<strong>en</strong>t sur le mythe d’Icare, se cogn<strong>en</strong>t aux<br />

diagonales labyrinthiques de l’<strong>en</strong>fermem<strong>en</strong>t. La<br />

vie ne serait-elle qu’une grande partie de<br />

Monopoly, sans pitié pour les perdants ? La<br />

faillite ou le pactole, aller direct pour la prison<br />

ou éternel retour à la case départ. Est-ce ainsi<br />

que les hommes viv<strong>en</strong>t ?<br />

DELPHINE MICHELANGELI<br />

Droit dans le mur s’est joué les 13 et 14 avril<br />

au théâtre du Balcon à Avignon,<br />

<strong>en</strong> avant-première le 9 avril au Toursky à Marseille,<br />

dans le cadre du Rapport au mal-logem<strong>en</strong>t 2013<br />

sa famille puis <strong>en</strong> a fondé une autre ; une vieille<br />

dame qui met un voleur <strong>en</strong> fuite… sursaut<br />

d’horreur ou de dignité qui ont occupé un temps<br />

la consci<strong>en</strong>ce commune, et sont ou non restés<br />

dans les mémoires.<br />

Des Faits divers à partager à nouveau l’aprèsmidi<br />

dans le quartier de la Joliette du 21 au 24<br />

mai. On pourra retrouver égalem<strong>en</strong>t la cie<br />

Tandaim le 1 er juin dans Le mois du<br />

Chrysanthème (voir Zib’57) lors du Festival<br />

Chaud Dehors à Aubagne (voir p 9) et dans le<br />

savoureux Italie Brésil au théâtre de<br />

Fontblanche, Vitrolles, le 14 juin.<br />

A.F.<br />

Les Faits divers se sont déroulés du 23 au 27 avril<br />

aux ABD Gaston Defferre<br />

37<br />

T<br />

H<br />

É<br />

Â<br />

TRE


38<br />

T<br />

H<br />

É<br />

Â<br />

TRE<br />

L’art des<br />

liaisons<br />

On savait John Malkovich familier des Liaisons<br />

dangereuses : l’acteur a composé un Valmont<br />

inoubliable, parfaitem<strong>en</strong>t subjectif et crédible à<br />

la fois, émouvant et fidèle à la lettre du texte<br />

épistolaire… Mais l’intellig<strong>en</strong>ce d’un acteur et<br />

celle d’un metteur <strong>en</strong> scène sont-elles de même<br />

nature ? L’habitude de l’écran ne nuit-elle pas à<br />

la scène et John Malkovich, même s’il vit <strong>en</strong><br />

Luberon, <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d-il suffisamm<strong>en</strong>t la langue<br />

classique française ?<br />

Dès les premières scènes toutes les craintes<br />

sont balayées. Avec une audace sans esbroufe<br />

Malkovich propose une autre lecture du roman,<br />

une Merteuil plus masculine, un Valmont superficiel,<br />

une Tourvel <strong>en</strong>goncée, une Cécile Volange<br />

nettem<strong>en</strong>t violée… Surtout, tous évolu<strong>en</strong>t dans<br />

un espace placé au c<strong>en</strong>tre de tous les regards,<br />

puisque les comédi<strong>en</strong>s ne quitt<strong>en</strong>t pas la scène<br />

lorsqu’ils sont hors jeu, et que des regards<br />

s’échang<strong>en</strong>t comme si tous manipulai<strong>en</strong>t chacun.<br />

On retrouve le XVIII e dans des accessoires<br />

symboliques et la langue qui adapte les lettres<br />

<strong>en</strong> dialogue sans <strong>en</strong> gommer la saveur. Des<br />

téléphones cellulaires et des tablettes remplac<strong>en</strong>t<br />

les lettres sans choquer, pour rappeler<br />

Jeux dangereux<br />

Seul, sur le plateau du théâtre les Argonautes, un<br />

co-médi<strong>en</strong> formidable <strong>en</strong>dosse tour à tour les quatre<br />

rôles du thriller Pour rire pour passer le temps de<br />

Sylvain Levey. Entouré de quatre micros, chacun<br />

représ<strong>en</strong>-tant l’un des protagonistes, dans une<br />

mise <strong>en</strong> scène épurée où les jeux de lumières ont<br />

toute leur importance, Gilbert Traïna donne vie<br />

au texte avec la virtuosité d’un comédi<strong>en</strong> pour qui<br />

la technique n’interdit pas l’émotion de l’incarnation.<br />

Son travail tant au niveau vocal qu’au niveau<br />

gestuel est impressionnant, et fait éclater la singularité<br />

et le caractère étouffant de la pièce. Une<br />

atmosphère pernicieuse s’installe sur son simple<br />

© Cosimo Mirco Magliocca<br />

l’immaturité de ces personnages désœuvrés,<br />

gâtés et fin de règne. Même le féminisme de<br />

Merteuil apparait pour ce qu’il est : la volonté<br />

de domination d’un être opprimé par son «sexe»,<br />

mais détruisant les autres femmes avec une<br />

infinie cruauté.<br />

Les jeunes comédi<strong>en</strong>s sont l’élégance même,<br />

raffinés et vains comme des aristocrates sadi<strong>en</strong>s.<br />

Seul Valmont, cabot, un brin précieux, <strong>en</strong><br />

fait trop. Mais succéder à John Malkovich sous<br />

sa direction ne doit pas être évid<strong>en</strong>t…<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Les Liaisons dangereuses s’est joué<br />

du 9 au 19 avril au Jeu de Paume, Aix<br />

souffle, ce jeu de bruits et de respiration étant plus<br />

expressif <strong>en</strong>core que les mots eux-mêmes. Un<br />

effet relayé par les casques audio que port<strong>en</strong>t les<br />

spectateurs, et la précision gestuelle insufflée par<br />

Thierry Escarmant, à mi-chemin de la mise <strong>en</strong><br />

scène et de la chorégraphie.<br />

L’histoire, quant à elle, divisée <strong>en</strong> sept scènes, reste<br />

simple : un conc<strong>en</strong>tré de viol<strong>en</strong>ce malsaine et de<br />

barbarie gratuite qui surgit comme un divertissem<strong>en</strong>t.<br />

Car dans ce huis clos se révèle une inconsci<strong>en</strong>ce<br />

dangereuse du mal, qui s’exerce «pour passer le<br />

temps», pour le plaisir de manipuler l’un et de lyncher<br />

l’autre, sans motif appar<strong>en</strong>t.<br />

Un texte saisissant qui<br />

exhibe l’omniprés<strong>en</strong>ce de<br />

la viol<strong>en</strong>ce dans notre<br />

société, sinon pour <strong>en</strong><br />

extirper les racines, au<br />

moins pour qu’on ne<br />

puisse pas l’ignorer.<br />

MANON MATHIEU<br />

© S. Levey<br />

Pour rire pour passer<br />

le temps était au Théâtre<br />

Les Argonautes,<br />

Marseille, du 9 au 11 avril<br />

À v<strong>en</strong>ir<br />

le 17 mai<br />

Les Salins, Martigues<br />

04 42 49 02 00<br />

www.theatre-des-salins.fr<br />

Être ou ne pas...<br />

Cette question fondam<strong>en</strong>tale à tout le moins n’a<br />

pas fini de hanter le théâtre et ce n’est pas Valère<br />

Novarina qui l’élude ou l’esquive dans<br />

l’Espace Furieux dont l’Atelier de Création de<br />

l’Universitéde Prov<strong>en</strong>cea prés<strong>en</strong>té des extraits<br />

significatifs. Une fois de plus les étudiants, sous<br />

la direction de Louis Dieuzayde, nous convoqu<strong>en</strong>t<br />

«devant la parole», devant le Verbe fait chair.<br />

Premier texte de Novarina <strong>en</strong>tré au répertoire<br />

de la Comédie Française, cette version pour la<br />

scène conti<strong>en</strong>t à plein les thèmes, les mots et<br />

quasim<strong>en</strong>t tous les personnages constitutifs de<br />

l’univers du dramaturge. De quoi nourrir l’acte de<br />

théâtre auquel se livr<strong>en</strong>t sans se ménager les<br />

seize jeunes g<strong>en</strong>s qui «sont» sur le plateau et ne<br />

représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong>. Pas facile d’explorer le «je<br />

suis» qui, <strong>en</strong> lettres de néon, griffe le mur du fond<br />

sans incarner mais <strong>en</strong> jouant, tout simplem<strong>en</strong>t<br />

l’un après l’autre et parfois plusieurs pour un rôle :<br />

Jean Singulier est trois qui se succèd<strong>en</strong>t dans une<br />

parfaite fluidité et comble d’ironie La Figure Pauvre<br />

aussi pour énumérer dans une belle litanie<br />

cosmique la liste des herbes et des plantes ! Réglées<br />

réglo les apparitions et les disparitions,<br />

rythme impeccable scandé par la couleur des<br />

vêtem<strong>en</strong>ts (costumes?): brun, rouge, orangé,<br />

une certaine chaleur dans la véhém<strong>en</strong>ce des<br />

paroles qui «se» racont<strong>en</strong>t, vies à la diable ou énumérations<br />

de chiffres innombrables. Travail<br />

formidable qui avale les faiblesses de jeu (il y <strong>en</strong><br />

a peu : assis <strong>en</strong> brochette sur un banc, bouche<br />

ouverte, écuelle à la main ils réussiss<strong>en</strong>t tous<br />

l’exam<strong>en</strong> frontal) et recrée le novarimonde à l’id<strong>en</strong>tique,<br />

tableaux compris dans une fidèle littéralité<br />

scénographique. Novarina sans Novarina, c’est<br />

possible!<br />

MARIE JO DHO<br />

L’ Espace Furieux a été donné<br />

au Théâtre Vitez, Aix, du 23 au 27 avril


Sous le squelette<br />

Il y a chez Courteline un art du dialogue qui<br />

relève du croquis. Comme un dessinateur<br />

parvi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> quelques traits appuyés et peu<br />

réalistes à r<strong>en</strong>dre l’idée d’un personnage,<br />

Courteline saisit dans ses échanges verbaux<br />

l’ess<strong>en</strong>ce des relations humaines, qu’il conc<strong>en</strong>tre<br />

<strong>en</strong> saynètes explosives. Monter ces<br />

huit très courtes pièces face public, <strong>en</strong> les<br />

jouant mais à distance, sans décor ni costumes,<br />

sans artifice, permet d’<strong>en</strong> faire surgir,<br />

à sec, la puissante mécanique ; la terrifiante<br />

vision d’une humanité veule et grossière<br />

© Joachim Olaya<br />

C’est que du bonheur !<br />

Longtemps complice d’Olivier Py, Olivier<br />

Balazuc s’est lancé dans la folle av<strong>en</strong>ture<br />

d’adapter pour le théâtre deux textes critiques<br />

de l’anthropologue Éric Chauvier : La<br />

crise comm<strong>en</strong>ce où finit le langage et Que<br />

du bonheur. La mince affaire ! Le résultat<br />

est une réussite totale : l’acteur-metteur <strong>en</strong><br />

scène-scénographe, accompagné de la comédi<strong>en</strong>ne<br />

Valérie Kéruzoré et du musici<strong>en</strong><br />

B<strong>en</strong>jamin Ritter, parvi<strong>en</strong>t à nous faire avaler<br />

termes et jugem<strong>en</strong>ts thétiques avec la<br />

même dextérité qu’un magici<strong>en</strong> lance ses<br />

couteaux. C’est dire le tal<strong>en</strong>t du trio. Sous les<br />

appar<strong>en</strong>ces habiles d’une confér<strong>en</strong>ce, les<br />

voici dissertant, rugissant, s’<strong>en</strong>tredéchirant,<br />

dansant même, sur la crise économique, la<br />

crise de nerfs, la crise immobilière, la crise<br />

exist<strong>en</strong>tielle… À l’aube d’une nouvelle ère,<br />

paraît-il… Paroles d’expert, verbiage critique,<br />

sci<strong>en</strong>tifique, analyses, cotations, stratégies<br />

de v<strong>en</strong>te et de communication : ri<strong>en</strong> n’est<br />

évacué pour nous asséner que «la crise est<br />

comme une nuit sans fin qui nous terrorise».<br />

Bref, un règlem<strong>en</strong>t de comptes <strong>en</strong> bonne et<br />

due forme est <strong>en</strong> train de se jouer <strong>en</strong>tre «un<br />

velléitaire, un homme théâtralem<strong>en</strong>t obscène»<br />

et une optimiste forc<strong>en</strong>ée qui rétrécit son<br />

champ lexical au seul «c’est que du bonheur !».<br />

aussi, petite bourgeoisie à l’idéal plat, et<br />

peuple qui la singe, artistes prét<strong>en</strong>tieux et<br />

femmes acariâtres… Sans décorum Courteline<br />

apparaît sans pitié, avec toute la drôlerie<br />

de la méchanceté. Il faut dire que Michel<br />

Fau est éclatant d’intellig<strong>en</strong>ce du jeu : toujours<br />

hors de ses personnages, et dedans<br />

pourtant, les faisant exister d’un geste, femmes<br />

et hommes, cyniques et naïfs, puis<br />

jouant à ne plus jouer sans étonnem<strong>en</strong>t…<br />

Jérôme Deschamps hélas à ses côtés<br />

n’est pas à sa hauteur. Il adopte une l<strong>en</strong>teur<br />

d’élocution et une posture avachie fatigantes,<br />

systématiques, drôles un instant mais<br />

loin du tourbillon de son compagnon à<br />

mille facettes. Si bi<strong>en</strong> que leurs dialogues,<br />

déséquilibrés, ne pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t que lorsque<br />

Michel Fau occupe le premier rôle, ce qui<br />

laisse avec l’impression que Jérôme Deschamps<br />

n’a pas su se mettre <strong>en</strong> scène.<br />

Ou qu’un peu plus de travail n’aurait pas<br />

nui ?<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Courteline <strong>en</strong> d<strong>en</strong>telles a été joué<br />

au Théâtre Liberté, Toulon, les 10 et 11 avril<br />

Et pour faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre leurs dissonances, tout<br />

est possible, comme de transformer la salle<br />

de confér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> jeu télévisuel, <strong>en</strong> ring de<br />

boxe, <strong>en</strong> salle d’interrogatoire. Comme de<br />

pr<strong>en</strong>dre à partie le public qui jubile.<br />

M.G.-G.<br />

La crise comm<strong>en</strong>ce où finit le langage<br />

a été prés<strong>en</strong>té les 10 et 11 avril<br />

au Théâtre liberté, Toulon<br />

© JL Fernandez<br />

Dans le<br />

tourbillon<br />

de la vie<br />

© Philippe Delacroix<br />

Un homme aime une femme, Marie. Ils ont l’âge<br />

de p<strong>en</strong>ser à la mort plus qu’à l’amour, et pourtant<br />

ils s’aim<strong>en</strong>t. Malgré les corps flétris, malgré<br />

la mémoire éparse qui resurgit par bribes.<br />

Toujours dans le désordre. Parfois même ce<br />

sont des cauchemars, voire des fantasmes. La<br />

maladie ne dit pas <strong>en</strong>core son nom, et l’accouchem<strong>en</strong>t<br />

des souv<strong>en</strong>irs est douloureux… À sa<br />

manière très singulière d’<strong>en</strong>trecroiser la parole<br />

théâtrale («nous élaborons une matière textuelle<br />

composée de monologues, de dialogues»), la<br />

chorégraphie aéri<strong>en</strong>ne (Zimmermann et De<br />

Perrot plan<strong>en</strong>t sur le travail des corps <strong>en</strong> apesanteur),<br />

l’acrobatie circassi<strong>en</strong>ne et le jeu des<br />

sons (de Vivaldi, Purcell et Bach interprétés par<br />

l’Ensemble Vocalita à la création sonore), Julie<br />

Bérès inv<strong>en</strong>te une fiction onirique tissée de<br />

morceaux de vie universels. Avec quelle intellig<strong>en</strong>ce<br />

des mots, quelle ingéniosité scénographique,<br />

quelle perfection du jeu ! L<strong>en</strong>demains de fête est<br />

le tableau vivant d’un monde tragique, car<br />

tellem<strong>en</strong>t humain, habité par des fantômes, des<br />

apparitions troublantes, des disparitions comiques,<br />

des funambules de la vie désarticulés. Où<br />

les acteurs, danseurs et chanteurs remont<strong>en</strong>t le<br />

cours de la vie à contre-courant, s<strong>en</strong>s dessus<br />

dessous, r<strong>en</strong>versés, culbutés. Où la pudeur des<br />

s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts n’a pas à rougir de l’impudeur des<br />

corps amoureux : c’est cru, c’est beau, c’est<br />

vrai. C’est drôle et absurde aussi. C’est «une<br />

histoire de g<strong>en</strong>s qui se batt<strong>en</strong>t mais qui ne se<br />

plaign<strong>en</strong>t pas.»<br />

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI<br />

L<strong>en</strong>demains de fête a été joué les 3 et 4 mai<br />

au Théâtre de Grasse<br />

39<br />

T<br />

H<br />

É<br />

Â<br />

TRE


40<br />

R<br />

U<br />

E<br />

Écoutez<br />

sans voir<br />

Le directeur de Lieux Publics est un compositeur.<br />

Pourtant les installations de Pierre<br />

Sauvageot sont aussi visuelles que sonores :<br />

son Champ harmonique aux Goudes a mis <strong>en</strong><br />

spectacle justem<strong>en</strong>t la fabrique du son, leur<br />

beauté artisanale. Mais il sait programmer de la<br />

musique abstraite lors de ses Sirènes et midi<br />

net. Voire de l’électroacoustique ! Ce qui désori<strong>en</strong>te<br />

un peu son public habitué à voir…<br />

C’est qu’il n’est pas si facile d’écouter. Le 8 mai<br />

lorsque la sirène ret<strong>en</strong>tit elle est captée et relayée<br />

par l‘ordinateur d’Hervé Birolini qui amplifie<br />

son aspect inquiétant, lui donne des graves et<br />

des craquem<strong>en</strong>ts qui tourn<strong>en</strong>t autour du public…<br />

qui se rapproche des deux musici<strong>en</strong>s. Les<br />

<strong>en</strong>fants mont<strong>en</strong>t sur les épaules des par<strong>en</strong>ts,<br />

certains s’éloign<strong>en</strong>t. Puis la vielle à roue de Val<strong>en</strong>tin<br />

Clastrier <strong>en</strong>tre <strong>en</strong> jeu, et tous les regards<br />

s’accroch<strong>en</strong>t à elle : les sons naiss<strong>en</strong>t de gestes<br />

qui se voi<strong>en</strong>t, glissades infinies, bribes de modes<br />

traditionnels puis pulsations <strong>en</strong>fin, qui rassur<strong>en</strong>t.<br />

Les corps des spectateurs désori<strong>en</strong>tés se mett<strong>en</strong>t<br />

à marquer le rythme, berc<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>fants,<br />

tandis qu’Hervé Birolini fouette l’air comme un<br />

batteur sans caisse claire, sans abandonner ses<br />

nappes et <strong>en</strong>veloppes qui fond<strong>en</strong>t le tapis sonore.<br />

Les musici<strong>en</strong>s mont<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble, cresc<strong>en</strong>do,<br />

vers l’aigu, puis s’arrêt<strong>en</strong>t. La sirène de fin ret<strong>en</strong>tit<br />

comme un rideau qui tombe.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Champ harmonique s’est exposé aux Goudes<br />

du 4 au 28 avril<br />

V<strong>en</strong>ue d’ailleurs, coproduite par le GMEM<br />

et lieux publics, s’est déroulée dans le cadre<br />

du festival les Musiques (voir p 43 et p 47)<br />

À v<strong>en</strong>ir<br />

Chorus, une sirène futuriste, mécanique<br />

et musicale de Ray Lee<br />

Le 5 juin à midi net<br />

Parvis de l’Opéra, Marseille<br />

04 91 03 81 28<br />

www.lieuxpublics.com<br />

© A.F<br />

Sur scène<br />

au quotidi<strong>en</strong><br />

Quand le théâtre se transforme<br />

<strong>en</strong> lieu de vie<br />

Pour 6 semaines, le Merlan est dev<strong>en</strong>u un<br />

navire où les visiteurs peuv<strong>en</strong>t déambuler<br />

librem<strong>en</strong>t, du lac souterrain au grand bivouac<br />

installé directem<strong>en</strong>t sur la scène, <strong>en</strong> passant<br />

par l’hyper médiathèque. Un projet<br />

d’<strong>en</strong>vergure mis <strong>en</strong> place à l’occasion de la<br />

capitale culturelle par les artistes Gr<strong>en</strong>oblois<br />

du collectif Ici même.<br />

Ce refuge, r<strong>en</strong>ommé Foundouk, multiplie les<br />

activités, les mom<strong>en</strong>ts de partages et de<br />

découvertes. Jusqu’au 25 mai le Merlan<br />

ouvre ses portes nuits et jours du jeudi soir<br />

au lundi matin pour des projections, performances<br />

et changem<strong>en</strong>ts scénographiques,<br />

et des balades à la découverte du quartier<br />

et de Marseille. Lors des nocturnes, de 19h<br />

jusqu’au l<strong>en</strong>demain matin 7h, les prom<strong>en</strong>eurs<br />

sont am<strong>en</strong>és à déambuler autour du<br />

Merlan, avec <strong>en</strong> poche un plan stylisé à la<br />

manière d’Ici même, au-devant des r<strong>en</strong>contres<br />

et des explorations de ce monde de<br />

la nuit. En plein jour, l’observation de la ville<br />

continue, mais les yeux fermés. Des concerts<br />

de sons de villes sont organisés tous les<br />

après-midi dans sept lieux différ<strong>en</strong>ts de<br />

En att<strong>en</strong>dant le temps fort de la 13 e édition<br />

des Envies Rhônem<strong>en</strong>ts du 20 au 28<br />

juillet, le Citron Jaune, C<strong>en</strong>tre national des<br />

Arts de la Rue, propose un parcours d’art<br />

contemporain d’avril à fin septembre. Une<br />

idée originale pour faire découvrir au public<br />

des installations plastiques dans ce cadre<br />

unique qu’est la Camargue. L’ouverture de<br />

ce parcours a eu lieu le 5 avril avec la création<br />

contemporaine Les Flûtes du Bois d’Arg<strong>en</strong>t<br />

d’Erik Samakh au domaine de la Palissade.<br />

Vêtu d’une combinaison de chasseur, ce<br />

sympathique personnage n’est pas muni<br />

d’un fusil mais d’un objet beaucoup plus<br />

pacifique qui a la vertu presque magique de<br />

Marseille. Une immersion de tous les s<strong>en</strong>s<br />

et une marche étonnante pour explorer un<br />

secteur, seulem<strong>en</strong>t guidé par la main de<br />

l’accompagnateur auquel il faut donner<br />

toute sa confiance. Le noir d’un parking, le<br />

cliquetis d’une souris d’ordinateur, s’assoir<br />

sur un banc au soleil… tout a un aspect différ<strong>en</strong>t<br />

lorsque l’ouïe pr<strong>en</strong>d le dessus sur la<br />

vue. Et lorsqu’il est question de vivre plutôt<br />

que de regarder…<br />

MANON MATHIEU<br />

Opératour Ici-même Tous travaux d’art<br />

Le Merlan, Marseille<br />

Jusqu’au 25 mai<br />

04 91 11 19 20<br />

www.merlan.org<br />

La Camargue <strong>en</strong>chantée !<br />

© Anne-Lyse R<strong>en</strong>aut<br />

Foundouk © X-D.R<br />

capturer… le v<strong>en</strong>t ! Les flûtes d’Erik Samakh<br />

ont la particularité d’être autonomes. Constituées<br />

d’un tuyau d’orgue et d’une tête<br />

solaire, ces drôles de tiges sont posées<br />

discrètem<strong>en</strong>t sur des branches mortes. Les<br />

flûtes se fond<strong>en</strong>t dans le décor naturel du<br />

Bois d’Arg<strong>en</strong>t qu’elles berc<strong>en</strong>t par leur<br />

musique apaisante.<br />

À travers cette installation, le but du plastici<strong>en</strong><br />

est «d’amplifier la nature du lieu ainsi<br />

que les s<strong>en</strong>s» et plus particulièrem<strong>en</strong>t l’ouïe.<br />

En fonction des v<strong>en</strong>ts et de leurs directions,<br />

la tonalité des flûtes change et attire l’att<strong>en</strong>tion<br />

des visiteurs sur d’autres sons de la nature.<br />

Aux frottem<strong>en</strong>ts des feuilles se mêl<strong>en</strong>t<br />

tantôt les bruits urbains de la ville voisine<br />

tantôt ceux de la mer. Pour Erik Semakh, ce<br />

parcours est «l’occasion de faire v<strong>en</strong>ir les<br />

g<strong>en</strong>s dans un <strong>en</strong>droit qu’ils ne connaiss<strong>en</strong>t<br />

pas ou de le redécouvrir d’une toute autre<br />

manière». De Rio à la Lorraine <strong>en</strong> passant<br />

par l’Italie, ses flûtes ont <strong>en</strong>chanté le monde<br />

<strong>en</strong>tier. Une chance de pouvoir les accueillir<br />

pour la première fois dans cette magnifique<br />

Camargue !<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

Les Flûtes du Bois d’Arg<strong>en</strong>t est un parcours<br />

ouvert du 5 avril à fin septembre au Domaine<br />

de la Palissade, Salin-de-Giraud


42<br />

D<br />

A<br />

N<br />

SE<br />

Nuits câlines<br />

Angelin Preljocaj voulait avec ses<br />

Nuits écrire un chant de gloire à<br />

Shéhérazade, femme suprême qui<br />

peuple les nuits de son Sultan tyran<br />

et gagne le droit de vivre de ses<br />

récits essoufflants. Cela comm<strong>en</strong>ce<br />

au harem, <strong>en</strong>tre femmes lascives,<br />

se poursuit par un bal de virils guerriers,<br />

se peuple d’oppression, puis<br />

peu à peu l’érotisme s’installe, torride,<br />

offrant de magnifiques duos,<br />

Le sport<br />

est une danse<br />

comme<br />

les autres<br />

Quand Frédéric Flamandconçoit<br />

une création pour l’espace public,<br />

il ne le fait pas à moitié. Au contraire,<br />

il offre plus ! Tous les danseurs du<br />

BNM plus ceux de la classe<br />

d’insertion, un dispositif scénographique<br />

impressionnant, pléthore<br />

de costumes… et un allant réjouissant<br />

! De quoi est-il question dans<br />

Sport fiction ? de célébrer le mouvem<strong>en</strong>t<br />

et son pouvoir d’évocation.<br />

À la manière d’une revue, par une<br />

succession de numéro, les danseurs<br />

donn<strong>en</strong>t à voir chaque sport, avec jubilation !<br />

Du foot à la boxe, du vélo au t<strong>en</strong>nis, de la natation au<br />

saut à la perche… avec de légers décalages pour surpr<strong>en</strong>dre<br />

le regard : les footballeurs s’attach<strong>en</strong>t à des<br />

barres horizontales de babyfoot, des femmes box<strong>en</strong>t,<br />

les escrimeurs r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t des ballerines… Les katas<br />

de judo, un ballet d’hommes d’affaires, des patineurs<br />

et des gymnastes évoqu<strong>en</strong>t une esthétique du sport<br />

proche des recherches chorégraphiques : on voit la<br />

danse de chaque discipline, avec un côté suranné<br />

années 30, des t<strong>en</strong>niswom<strong>en</strong> qui ressembl<strong>en</strong>t à Olive<br />

de Popeye, des projections d’archives sportives de<br />

tous les temps surtout anci<strong>en</strong>s, et d’ingénieuses<br />

explorant des déhanchem<strong>en</strong>ts et<br />

des gestes de bras empruntés aux<br />

danses ori<strong>en</strong>tales, un tableau fort<br />

sur This is a man’s world, un autre<br />

ironique inspiré du générique d’un<br />

James Bond… Puis le propos se délite<br />

dans une succession de mom<strong>en</strong>ts<br />

portés par des interprètes sublimes,<br />

mais émaillée de trop peu de<br />

contrastes pour qu’un certain <strong>en</strong>nui<br />

ne s’installe pas, malgré une<br />

© Agnès Mellon<br />

scénographie de lumière subtile.<br />

La s<strong>en</strong>sualité se désincarne <strong>en</strong> dépit<br />

de la beauté des corps, jusqu’aux<br />

deux derniers tableaux qui se c<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong>fin sur le propos qui semblait<br />

ess<strong>en</strong>tiel : une Shéhérazade multipliée<br />

dompte l’homme <strong>en</strong> l’<strong>en</strong>robant<br />

des effluves de son narguilé comme<br />

celle des Mille et une nuits<br />

remportait son combat par le charme<br />

de ses récits ; puis elle passe à<br />

travers les grilles de sa prison,<br />

libérée par le Sultan qui la laisse<br />

vivre au terme du combat des s<strong>en</strong>s<br />

et de l’esprit. On r<strong>en</strong>oue alors, <strong>en</strong>fin,<br />

avec l’exceptionnelle inv<strong>en</strong>tivité<br />

du chorégraphe. Avant cela sa<br />

danse reste techniquem<strong>en</strong>t parfaite<br />

mais ses Nuits mériterai<strong>en</strong>t d’être<br />

resserrées, et leur propos plus lisible<br />

: car l’érotisme n’y semble ni<br />

franchem<strong>en</strong>t vaincu, ni vraim<strong>en</strong>t<br />

triomphant. Parce que la douleur<br />

n’y est pas aussi s<strong>en</strong>sible que dans<br />

Liqueurs de chair ?<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Les Nuits ont été crées au GTP,<br />

Aix, les 29 et 30 avril<br />

allusions, sans ral<strong>en</strong>tis ni saccades, aux décompositions<br />

du mouvem<strong>en</strong>t de Muybridge. La musique,<br />

répétitive américaine (John Adams), mais aussi extraite<br />

de cartoons ou des films de Tati, sonne à la fois symphonique<br />

et simple, alerte, burlesque comme cette<br />

célébration de l’épopée sportive, qui évite soigneusem<strong>en</strong>t<br />

ses tragédies et ambiguïtés, pour rechercher<br />

leurs esthétiques. Leurs danses ?<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Sport fiction a été créé à la gare Saint Charles,<br />

Marseille, les 10 et 11 avril dans le cadre<br />

de la Folle histoire des arts de la rue<br />

© Agnès Mellon<br />

Deuxième étape de Constellations à Toulon, KKI au musée d'art © MGG - <strong>Zibeline</strong><br />

De haut<br />

<strong>en</strong> bas<br />

Au premier jour Kubilai Khan Investigations<br />

prit de l’altitude pour<br />

déplacer danses et performances<br />

au sommet du Mont Faron à Toulon.<br />

Un parcours avec haltes inédites<br />

et galaxies sonores… Le l<strong>en</strong>demain<br />

KKI trouvait de belles résonances<br />

avec l’espace de la ville pris «comme<br />

un terrain de jeu», où les formes<br />

hybrides conçues par Franck<br />

Micheletti induisai<strong>en</strong>t «des rapports<br />

moins conv<strong>en</strong>tionnels qu’au<br />

théâtre, au plus près de la danse et<br />

des artistes». Comme dans les<br />

salles vides du Musée d’art propices<br />

aux investigations spatiales<br />

des danseurs aux prises avec le<br />

chambranle d’une porte, une tablechevalet<br />

recouverte de coulures ou<br />

une bicyclette maniée par Camille<br />

Chatelain dont on découvrira à la<br />

Cave de Lilith les tal<strong>en</strong>ts de chanteuse.<br />

Ce fut l’occasion d’une belle<br />

révélation : <strong>en</strong> costume blanc et<br />

chemise noire, le jeune chorégraphe-danseur<br />

Simon Tanguy offrit<br />

un solo époustouflant, tout <strong>en</strong> énergie<br />

démesurée. Tel un cabri dans<br />

l’arène il <strong>en</strong>tra dans une sorte de<br />

fureur de danser et de déclamer,<br />

soufflant, h<strong>en</strong>nissant presque !<br />

Après une halte chez Contrebandes,<br />

la procession s’élança jusqu’à<br />

la galerie Axolotl où Franck Micheletti<br />

et le clarinettiste B<strong>en</strong>oit<br />

Bottex improvisèr<strong>en</strong>t un duo frénétique,<br />

avant de s’<strong>en</strong>foncer dans<br />

d’autres mondes sonores à l’Arbre<br />

à Bulles. Au troisième jour Constellations<br />

bouclait sa trajectoire au<br />

niveau zéro de la mer, transformant<br />

les jardins de la Tour royale <strong>en</strong><br />

scène à ciel ouvert : une manière<br />

de pr<strong>en</strong>dre la large…<br />

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI<br />

Constellations s’est déroulé<br />

les 9, 10 et 11 mai à Toulon


Persistance de la lumière<br />

Comme dans un tableau surréaliste<br />

la scène prés<strong>en</strong>te trois espaces<br />

autonomes <strong>en</strong> écho délivrant chacun<br />

un fragm<strong>en</strong>t, un éclat de la<br />

puissante «méditation sur l’éternité»<br />

qu’a voulue Michel Kelem<strong>en</strong>is<br />

avec la création de Siwa (lieu mythique<br />

où Alexandre le grand a eu<br />

la révélation de son caractère divin) :<br />

le quatuor Tana interprète dans<br />

l’ombre du lointain Debussy et Yves<br />

Chauris ; les quatre danseurs<br />

hommes occup<strong>en</strong>t le cœur du plateau,<br />

oasis minérale malicieusem<strong>en</strong>t<br />

convoquée par quelques verres<br />

d’eau, sous un ciel déchiré par le<br />

soleil double à la course à peine<br />

perceptible de la vidéo de Steeve<br />

Calvo. Ambitieux, le projet chorégraphique<br />

livre une danse sagem<strong>en</strong>t<br />

virile : la vie et la mort, l’attirance et<br />

la rupture, la solidarité… les interprètes<br />

se guett<strong>en</strong>t, se cherch<strong>en</strong>t,<br />

s’ébauch<strong>en</strong>t <strong>en</strong> se frôlant ; contacts,<br />

reptations, jeux à trois contre ou<br />

pour un ; grave mais pas trop : ça<br />

se déhanche, ça fait la statue et le<br />

haut-relief, ça offre un bouquet de<br />

visages au projecteur (Jean Basti<strong>en</strong><br />

Nehr au zénith) et ça fait la<br />

nique à la musique qui ne s’<strong>en</strong> porte<br />

que mieux. Le quatuor Tana<br />

paisiblem<strong>en</strong>t, libère Debussy de<br />

ses miroitem<strong>en</strong>ts franchem<strong>en</strong>t impressionnistes<br />

et laisse vivre <strong>en</strong>tre<br />

les mouvem<strong>en</strong>ts de l’œuvre <strong>en</strong><br />

sol(eil) mineur, mélodique et expressive,<br />

les pizzicati, les raclem<strong>en</strong>ts<br />

à sec et les strid<strong>en</strong>ces rêches des<br />

cordes du Paysage emprunté que<br />

le jeune compositeur Yves Chauris<br />

a écrit pour accompagner l’œuvre<br />

© Agnès Mellon<br />

scénique avec une grande intellig<strong>en</strong>ce<br />

de l’univers m<strong>en</strong>tal du<br />

chorégraphe. Beau travail de<br />

correspondances !<br />

MARIE JO DHO<br />

SIWA, pour quatre hommes<br />

et quatuor (dont deux femmes)<br />

a été donné le 4 mai au théâtre<br />

de la Criée, Marseille, dans le cadre<br />

du Festival du GMEM (voir p 47)<br />

43<br />

D<br />

A<br />

N<br />

SE<br />

Osez le Hip rock !<br />

Médaillé d’or <strong>en</strong> Modern Jazz, élève<br />

de la Rosella Hightower à Cannes,<br />

formé <strong>en</strong> danse contemporaine à<br />

New York, Hamid B<strong>en</strong> Mahi est<br />

un ovni du hip hop. Cette large palette<br />

lui a permis d’<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre un<br />

travail de recherche dont il est l’initiateur,<br />

et de rapprocher le hip hop<br />

de la danse contemporaine. Mais<br />

ici il va jusqu’au rock ! Sans dénaturer<br />

les mouvem<strong>en</strong>ts désarticulés<br />

et les acrobaties performatives du<br />

hip hop, le chorégraphe offre au<br />

public une nouvelle vision de la<br />

danse urbaine, qui détache le hip<br />

hop du rap et l’appar<strong>en</strong>te aux révoltes<br />

du rock.<br />

Sur scène, ce sont les anci<strong>en</strong>s musici<strong>en</strong>s<br />

d’Alain Bashung, Yan<br />

Péchin à la guitare et Bobby Jocky<br />

à la basse, qui revisit<strong>en</strong>t considérablem<strong>en</strong>t<br />

les airs de la figure de<br />

proue du rock français. Une base<br />

sonore qui rythme les pas des danseurs<br />

vêtus de jeans et de vestes<br />

<strong>en</strong> peau. On p<strong>en</strong>se aux habits de<br />

bison des apaches. Ils form<strong>en</strong>t<br />

comme eux une tribu marginalisée,<br />

sembl<strong>en</strong>t égarés dans ce décor de<br />

garage automobile délabré, qui<br />

rappelle ce mouvem<strong>en</strong>t musical<br />

des années 60, précurseur du punk<br />

rock, intitulé «garage rock». Ainsi,<br />

ces danseurs évolu<strong>en</strong>t dans un univers<br />

atypique <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce éloigné<br />

du leur. Cep<strong>en</strong>dant, au fil des tableaux,<br />

les individus sont traversés<br />

par ces s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts universels que<br />

sont l’amour, la mélancolie, la<br />

colère et parfois la folie. Qui sont<br />

les mêmes pour les <strong>en</strong>fants du<br />

rock et du rap ?<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

Apache a été donné le 3 mai<br />

au théâtre de Fos<br />

© Laur<strong>en</strong>t Philippe<br />

Repulsion © Dieter Hartwig<br />

Hip H(electr)op<br />

Dans ce spectacle <strong>en</strong> deux parties, le compositeur, vidéaste et<br />

chorégraphe Hiroaki Umeda s’interroge sur les interactions<br />

<strong>en</strong>tre le réel et le virtuel. La première partie intitulée Duo est <strong>en</strong><br />

fait un solo dans lequel le danseur se retrouve à côté de son<br />

double numérique. Les nouvelles performances technologiques<br />

permett<strong>en</strong>t à cet hologramme de se dédoubler, se brouiller et<br />

parfois même de se zoomer. Le duo semble difficile à mettre <strong>en</strong><br />

place face à ce double aux «superpouvoirs». Mais c’est sans<br />

compter sur le tal<strong>en</strong>t de danseur désarticulé d’Umeda, qui grâce<br />

à sa connaissance du geste et des technologies numériques<br />

réussit à transporter le spectateur dans cet univers singulier <strong>en</strong><br />

double dim<strong>en</strong>sion mi-numérique/mi-humaine, ou les avatars<br />

contamin<strong>en</strong>t le mouvem<strong>en</strong>t des corps.<br />

La musique électronique est le fil continu de ce spectacle. On<br />

la retrouve dans la deuxième partie avec une pièce d’<strong>en</strong>semble<br />

composée de trois danseurs hip hop. 2.repulsion met <strong>en</strong> avant<br />

la mécanisation du corps. L’ondulation des corps de ces<br />

danseurs hors pair suit avec précision les vibrations viol<strong>en</strong>tes de<br />

la musique. Comme si des ondes sonores virtuelles les traversai<strong>en</strong>t.<br />

Ils ne se regard<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant pas et seule leur association<br />

permettra de maîtriser cette énergie.<br />

À travers ces deux chorégraphies expérim<strong>en</strong>tales, Hiroaki Umeda<br />

bouleverse les codes habituels du hip hop. En l’associant à<br />

une musique électrisante et saccadée, procédant par flux, il<br />

inv<strong>en</strong>te une esthétique aussi complexe qu’élégante grâce au<br />

rapport harmonieux ou conflictuel qu’il établit <strong>en</strong>tre corps urbains<br />

et nouvelles technologies. A-L.R.<br />

2.repulsion / Duo a eu lieu les 11 et 12 avril à l’Odéon, Nîmes


44<br />

M<br />

USIQUE<br />

L’art sans<br />

frontière<br />

Nadia Beugre © X-D.R<br />

Chorégraphe et commissaire de cette<br />

exposition, Alain Buffard s’intéresse à ces<br />

individus qui ont subi un va-et-vi<strong>en</strong>t culturel<br />

<strong>en</strong> partie hérité du colonialisme du XIX e siècle.<br />

De gré ou plus souv<strong>en</strong>t de force, ces<br />

r<strong>en</strong>contres ont produit des p<strong>en</strong>sées, des<br />

œuvres et des histoires singulières. Histoires<br />

Parallèles : Pays mêlés ne parle pas de<br />

métissage culturel mais plutôt de ces<br />

richesses indescriptibles produites par un<br />

voyage au-delà des frontières ou par l’arrivée<br />

d’un étranger sur ses terres. Pour cela, le<br />

chorégraphe a choisi un <strong>en</strong>droit qu’il considère<br />

comme «emblématique de notre histoire<br />

coloniale», le muséum d’Histoire naturelle<br />

ainsi que la chapelle des Jésuites de la ville de<br />

Nîmes. Dans ces lieux publics s’insèr<strong>en</strong>t des<br />

histoires qu’on ne trouve pas dans les livres<br />

d’école. Des histoires parfois locales, comme<br />

les portraits d’Anna-Katharina Scheidegger,<br />

de ces travailleurs indochinois am<strong>en</strong>és <strong>en</strong><br />

France <strong>en</strong> 1914 qui ont apporté, par exemple,<br />

leur savoir à la riziculture camarguaise (voir p<br />

70). Parfois touchantes comme la r<strong>en</strong>contre<br />

émouvante <strong>en</strong>tre la mère de l’artiste turque<br />

Ferhat Özgür qui porte le foulard traditionnel<br />

et échange ses vêtem<strong>en</strong>ts avec sa voisine, une<br />

professeure habillée de façon moderne. Parfois<br />

illégales comme The Mapping Journey Project,<br />

de l’artiste franco-marocaine Bouchra Khalili,<br />

qui montre à travers 8 vidéos ces migrants<br />

racontant leur parcours <strong>en</strong> dessinant sur la<br />

carte officielle leur propre carte clandestine.<br />

Le concert des tal<strong>en</strong>tueux Ballaké Sissoko et<br />

Vinc<strong>en</strong>t Segal a donné l’occasion d’admirer le<br />

flux int<strong>en</strong>se des notes délicates de la kora,<br />

une harpe-luth Mali<strong>en</strong>ne à 21 cordes, et le<br />

génie du violoncelliste qui pince, frappe, et<br />

fait vibrer les cordes de son instrum<strong>en</strong>t avec<br />

une aisance déconcertante.<br />

Quant à Nadia Beugré, c’est sur scène qu’elle<br />

trouve ses Quartiers libres. La danseuse<br />

<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>d une lutte effrontée contre un<br />

monde asservissant, symbolisé par ce câble de<br />

micro <strong>en</strong>chainé à son cou, ou <strong>en</strong>core cette<br />

multitude de bouteilles <strong>en</strong> plastique vides<br />

dont elle est recouverte. Cette vision<br />

particulière du monde est le fruit du<br />

croisem<strong>en</strong>t des cultures qu’elle a vécues et<br />

permet ainsi la création d’œuvres aussi<br />

précieuses qu’uniques !<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

L’exposition Histoires parallèles : pays mêlés<br />

s’est t<strong>en</strong>ue au muséum d’Histoire naturelle<br />

et à la chapelle des Jésuites<br />

du 7 mars au 28 avril, Nîmes<br />

Ballaké Sissoko et Vinc<strong>en</strong>t Segal ont joué<br />

le 19 avril au Théâtre de Nîmes<br />

Quartier Libres a eu lieu le 20 avril<br />

à l’Odéon, Nîmes<br />

Service ferroviaire<br />

maximum<br />

Dénicher des musici<strong>en</strong>s tal<strong>en</strong>tueux des quatre coins de la<br />

planète, B<strong>en</strong>jamin MiNiMuM <strong>en</strong> a l’habitude à travers Mondomix,<br />

magazine de référ<strong>en</strong>ce des musiques du monde dont<br />

il est le rédacteur <strong>en</strong> chef. Lorsque ses amis de la Mesón lui<br />

ont proposé une carte blanche, il <strong>en</strong> a profité pour faire coup<br />

double : prés<strong>en</strong>ter aux Marseillais l’univers underground naïf<br />

des m a r y s e et leur création commune Ferroviaire. La r<strong>en</strong>contre<br />

<strong>en</strong>tre la musique acoustique et ludique des sœurs<br />

jumelles parisi<strong>en</strong>nes d’origine philippine et les mix bruitistes<br />

de l’artiste reporter donne vie à un tableau musical aux<br />

pigm<strong>en</strong>ts urbains d’ess<strong>en</strong>ce traditionnelle.<br />

Rappelant Björk ou <strong>en</strong>core Camille, les m a r y s e jou<strong>en</strong>t, au<br />

s<strong>en</strong>s propre, avec une multitude d’instrum<strong>en</strong>ts (principalem<strong>en</strong>t<br />

du violon et de la harpe) ou d’objets dont elles ont décidé qu’ils<br />

le devi<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t. Petits cris tribaux et soupirs s<strong>en</strong>suels <strong>en</strong><br />

boucle, ambiance minimaliste, elles sembl<strong>en</strong>t s’inspirer aussi<br />

bi<strong>en</strong> de l’air que du feu, de l’eau que de la terre. Des morceaux<br />

auxquels les collages sonores de MiNiMuM, réalisés à partir<br />

de sons <strong>en</strong>registrés <strong>en</strong>tre autres dans la gare Saint-Charles,<br />

font étonnamm<strong>en</strong>t écho. T.D.<br />

© X-D.R<br />

B<strong>en</strong>jamin MiNiMuM<br />

et m a r y s e ont<br />

prés<strong>en</strong>té Ferroviaire<br />

le 5 avril à la Mesón,<br />

à Marseille<br />

An Pierle © X-D.R<br />

An Pierlé,<br />

une sobre<br />

mélancolie<br />

Elle a voulu r<strong>en</strong>ouer avec ses premières amours. Un tête-à-tête avec son<br />

piano. Sur scène, la formule lui réussit toujours aussi bi<strong>en</strong>. An Pierlé<br />

a égalem<strong>en</strong>t retrouvé avec un plaisir affirmé le Poste à Galène, salle qui<br />

l’avait accueilli avec son groupe de rock White Velvet. Cette fois-ci,<br />

l’exc<strong>en</strong>tricité de l’artiste belge n’est pas dans ses mélodies poétiques<br />

aux arrangem<strong>en</strong>ts tout <strong>en</strong> sobriété. C’est plutôt <strong>en</strong>tre deux ballades<br />

que la blonde dévie. Reconnaissant elle-même que les morceaux de<br />

son dernier album, Strange Days, ne sont pas d’une grande gaîté, elle<br />

plaisante avec la mélancolie de certains textes, tous <strong>en</strong> anglais.<br />

S’amuse à aguicher le public, assise sur un ballon de grossesse <strong>en</strong> guise<br />

de tabouret de piano. À presque 39 ans, elle évolue dans un univers<br />

malicieux. Sa voix puissante et limpide, dont elle joue avec s<strong>en</strong>sualité<br />

et espièglerie, rappelle inévitablem<strong>en</strong>t celle de Kate Bush. R<strong>en</strong>due<br />

célèbre <strong>en</strong> France par une version cocasse d’Il est cinq heures de<br />

Jacques Dutronc, An Pierlé a fait de la reprise une spécialité.<br />

Aujourd’hui, c’est le tube de Talk Talk, Such a shame, qu’elle se<br />

réapproprie avec la douceur <strong>en</strong>voutante qui la caractérise.<br />

THOMAS DALICANTE<br />

An Pierlé s’est produite le 25 avril au Poste à Galène à Marseille


46<br />

M<br />

USIQUE<br />

L’esprit d’inv<strong>en</strong>tion<br />

Sur son luxueux clavecin à pédalier<br />

(copie d’un instrum<strong>en</strong>t itali<strong>en</strong><br />

du XVIII e siècle), sonore, conçu<br />

pour l’opéra, le 11 avril <strong>en</strong> la Salle<br />

Musicatreize, Freddy Eichelberger<br />

<strong>en</strong>tame une desc<strong>en</strong>te chromatique<br />

qui rappelle la Chaconne illustrant<br />

la Mort de Didon de Purcell. À ce<br />

figuralisme baroque, le claveciniste<br />

superpose des arpèges qui<br />

frapp<strong>en</strong>t illico l’oreille… Malgré<br />

l’incongruité proposée, on reconnait<br />

une fameuse intro, d’ordinaire jouée<br />

à la guitare, celle du tube de Led<br />

Zep : Stairway to heav<strong>en</strong> ! Mais où<br />

donc veut nous conduire le musici<strong>en</strong>,<br />

à l’issue d’une heure d’improvisations<br />

virtuoses, classiques, un brin<br />

monocordes, durant laquelle il a<br />

r<strong>en</strong>oué avec l’esprit d’inv<strong>en</strong>tion<br />

de Bach, après qu’il s’est joué du<br />

Opéra Série A ?<br />

contrepoint et des susp<strong>en</strong>sions,<br />

de la basse continue et des marches<br />

harmoniques, d’ornem<strong>en</strong>ts,<br />

L’idée d’assister à trois plombes d’opéra seria, même mozarti<strong>en</strong>, faisait<br />

craindre qu’Orphée cédât à… Morphée ! C’est que le livret de La Clém<strong>en</strong>ce<br />

de Titus n’a pas l’allant des trois grands opéras écrit par Da Ponte.<br />

Foin de la comédie dans ce testam<strong>en</strong>t du g<strong>en</strong>re créé trois mois avant<br />

la mort de Mozart. On y trouve toutefois des ressorts, comme au final<br />

du 1 er acte, quand les quiproquos nou<strong>en</strong>t une situation captivante, le<br />

Capitole flambe et qu’on manque d’assassiner l’empereur… et qu’un<br />

magnifique Quintette avec chœur, aussi, fonde un sommet de l’histoire<br />

de l’Opéra.<br />

Finalem<strong>en</strong>t conquis, le public a cédé à la perfection de récits, aux merveilles<br />

d’arie… à une riche distribution et la direction minimale, épousant<br />

le chant, de Mark Shanahan. La mise <strong>en</strong> scène de David Mc Vicar (Festival<br />

d’Aix 2011), souligne la gémellarité de l’ouvrage avec La Flûte<br />

<strong>en</strong>chantée : car La Clem<strong>en</strong>za di Tito se nourrit aussi de symboles maçonniques.<br />

Quand Titus apparait, souverain éclairé rayonnant dans son<br />

habit des Lumières (Paolo Fanale superbe ténor), c’est le jeune Tamino<br />

qu’on imagine, après qu’il aurait remplacé Sarastro à la tête du Temple,<br />

mais étrangem<strong>en</strong>t protégé par une poignée de sbires aux postures (un<br />

peu ridicules) de samouraïs. Seule la blanche Servilia (Clém<strong>en</strong>ce Barrabé,<br />

jeune soprano française pleine d’av<strong>en</strong>ir) est <strong>en</strong> mesure de suppléer<br />

sa Bérénice (Pamina ?) perdue. Sinon, Rome est <strong>en</strong> noir, <strong>en</strong> prise aux passions<br />

! En tête, la diabolique Vittelia (héroïque Teresa Romano !) qui<br />

se démarque toutefois de la «Reine de la nuit» lorsqu’elle trouve la<br />

voie de l’Initiation. L’œuvre vire au rouge au final, celui du cœur, certes,<br />

mais aussi du sang, plaie ouverte dans l’esprit de Titus, meurtri, trahi<br />

par son ami Sesto (belle Kate Aldrich <strong>en</strong> travesti !) gagné à son tour<br />

par la confusion des s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts qu’exprim<strong>en</strong>t si bi<strong>en</strong> les ultimes accords<br />

syncopés de l’orchestre.<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

La Clém<strong>en</strong>ce de Titus<br />

de Mozart a été<br />

prés<strong>en</strong>té<br />

du 4 au 12 mai<br />

à l’Opéra de Marseille<br />

© Christian Dresse<br />

© Lucas Belhatem<br />

Freddy Eichelberger © Robin Davies<br />

Pharaonique<br />

modes ou chorals, pour former une<br />

espèce de vaste «Suite» baroque ?<br />

L’empilage final affiche une «collision»<br />

frappante, originale, dont<br />

les flèches s’oppos<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> s<strong>en</strong>s<br />

inverse… Car on ne sait s’il faut<br />

suivre la «mise au tombeau» ou<br />

«l’asc<strong>en</strong>sion» au Paradis ?<br />

On n’aura pas de réponse… si ce<br />

n’est un délicieux bis offert sous<br />

la forme de variations sur une mélodie<br />

<strong>en</strong>têtante, «tube» égalem<strong>en</strong>t…<br />

mais d’un autre temps : «Une jeune<br />

fillette» qu’on a «r<strong>en</strong>du nonette»<br />

et qui «n’att<strong>en</strong>d que la mort»…<br />

On la fredonne à l’issue d’un programme<br />

plaisant, mais qu’on aurait<br />

p<strong>en</strong>sé plus «iconoclaste», usant<br />

trop peu, hormis quelque ostinato<br />

contemporain ou tango chaloupé,<br />

de recyclages, métissages…<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

En ce début de printemps, l’Opéra de Toulon a programmé<br />

Aïda, un des imm<strong>en</strong>ses succès lyriques de Verdi, dans une<br />

reprise de production de l’Opéra de Nice. Commande créée<br />

<strong>en</strong> 1871 au Caire alors que le compositeur était au sommet<br />

de son art, cet ouvrage lyrique surpr<strong>en</strong>d par son sujet<br />

exotique mais aussi par ses proportions imposantes. Verdi<br />

prônant la libération du joug ? On aurait tort <strong>en</strong> tout cas d’y<br />

voir un simple exercice de style ori<strong>en</strong>taliste destiné à mettre<br />

<strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce un tal<strong>en</strong>t que nul ne contestait à l’époque. En<br />

effet, le compositeur dans son souci de réalisme jetait déjà<br />

les bases de ce qu’allait dev<strong>en</strong>ir plus tard le vérisme, <strong>en</strong><br />

explorant l’intimité de ses personnages avec une infinie<br />

délicatesse tout <strong>en</strong> offrant une synthèse musicale des<br />

traditions française, itali<strong>en</strong>ne et allemande.<br />

Fort d’un plateau vocal puissant et homogène sur le plan<br />

dynamique, et de premiers rôles vocalem<strong>en</strong>t convaincants<br />

malgré les graves peu sûrs du rôle titre (Mardi Byers), ce<br />

spectacle mettait <strong>en</strong> lumière cette recherche de vérité dans<br />

l’expression des s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts. Cep<strong>en</strong>dant, les décors massifs<br />

et monum<strong>en</strong>taux, ainsi que la prés<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> nombre des<br />

chœurs auxquels s’ajoutait parfois un ballet, confinai<strong>en</strong>t<br />

parfois les protagonistes dans un statisme dommageable et<br />

étouffai<strong>en</strong>t une mise <strong>en</strong> scène très classique inspirée par une<br />

Égypte Antique de carte postale. Fort heureusem<strong>en</strong>t, la<br />

direction souple et aéri<strong>en</strong>ne du chef Alberto Hold-Garrido<br />

a su avec bonheur éviter l’écueil d’un style orchestral<br />

imposant et parfois pompier, tout <strong>en</strong> ménageant un espace<br />

confortable aux chanteurs.<br />

ÉMILIEN MOREAU<br />

Aïda a été prés<strong>en</strong>té du 7 au 13 avril à l’Opéra de Toulon


Répertoire et création<br />

contemporains<br />

Le festival les Musiques du GMEM s’éclate <strong>en</strong>tre<br />

Aperghis et Dusapin<br />

O M<strong>en</strong>sch © Marthe Lemelle<br />

Donati<strong>en</strong>ne Michel-Dansac © Mikael Libert<br />

Ça redonde et bégaie le 3 mai à La Criée, s’accumule<br />

et récite… musique des mots, chant schizo, gymnastique<br />

des tocs et des maux de mémoire… chez<br />

Georges Aperghis, ce compositeur qui explore depuis<br />

quarante ans l’univers singulier du «théâtre musical» !<br />

Inspirée du quotidi<strong>en</strong>, sa langue, poétique, absurde<br />

et drôle, a trouvé son clown blond, burlesque, au visage<br />

angélique : Donnati<strong>en</strong>ne Michel-Dansac. Depuis<br />

près de dix ans, elle jongle <strong>en</strong>tre Tourbillons et Calmes<br />

plats (1989-92) et des textes, fragm<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> inserts,<br />

d’Olivier Cadiot. Au prix d’un travail scénique colossal,<br />

d’une précision métronomique, une heure durant,<br />

l’artiste joue de décalages, cassures de rythmes et de<br />

la voix, des int<strong>en</strong>tions, alors que son visage projeté<br />

sur écrans <strong>en</strong> jardin et cour, guide le spectateur dans<br />

un jeu subtil de champ-contrechamps, chant-contrechants,<br />

au croisem<strong>en</strong>t des arts. Brava !<br />

Un couple d’heures plus tard, alors que sur les quais<br />

du port Flammes et Flots bat son plein, l’Ensemble<br />

C Barré (dir. Sébasti<strong>en</strong> Boin) livre un programme qu’on<br />

considère aujourd’hui comme classique. Pourtant, le<br />

geste créateur de Ligeti dans son Concerto pour violoncelle<br />

(1966) conserve toute sa force d’antan : un<br />

continuum sonore qui dévoile toute une palette de<br />

textures, jusqu’au sil<strong>en</strong>ce (certes, brouillé par les flonflons<br />

de la fête extérieure) et sa cad<strong>en</strong>ce fantomatique<br />

(Alexis Descharmes). X<strong>en</strong>akis aussi, et son architecture<br />

chaotique, strid<strong>en</strong>te et mécanique, déshumanisée<br />

(Thalleïn, 1984), ou le masque pointilliste de Donatoni<br />

(Flag, 1987), gravit<strong>en</strong>t autour d’opus de Pascal<br />

Dusapin Ces derniers mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> jeu la voix (Françoise<br />

Kubler) dans un folklore dépouillé d’accroches<br />

géographique et temporelle (Ask, 1987), l’exclamation<br />

douloureuse (Ô Berio, 2006) ou la relation<br />

dantesque au Créateur (Comoedia, 1992). Une complexité<br />

où chacun peut trouver son chemin, suivre<br />

une voie énigmatique… au demeurant stimulante !<br />

L’héritage allemand<br />

O M<strong>en</strong>sch est le fruit de la r<strong>en</strong>contre <strong>en</strong>tre Pascal<br />

Dusapin et l’œuvre de Nietzsche. Créé le 30 avril à<br />

la Criée <strong>en</strong> 27 mom<strong>en</strong>ts, dont 4 Interludes au piano.<br />

Nietzsche ne résume t-il pas tout l’héritage romantique<br />

germanique ? Dusapin aime ce vague, sa lumière<br />

douce, l’homme qui erre dans le brouillard, le dépouillem<strong>en</strong>t,<br />

le voyageur… Ces mille peintures défil<strong>en</strong>t<br />

à travers O M<strong>en</strong>sch, un «opéra» pour baryton et piano<br />

appuyé par des vidéos, des jeux de lumières, des<br />

ajouts de musique concrète. Les textes provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />

de poésies de jeunesse puis d’aphorismes, et construis<strong>en</strong>t<br />

un parcours, qui part du rejet de Wagner à<br />

travers le Prélude de Tristan, que Dusapin se plaît à<br />

r<strong>en</strong>dre besogneux sous les doigts magiques de Vanessa<br />

Wagner ; car Nietzsche fut si déçu par Wagner<br />

tombant aux pieds de la croix (Parsifal 1883) ! Ayant<br />

découvert le Sud, Naples, l’Italie, Nietzsche souhaite<br />

une mutation du goût et Carm<strong>en</strong> le fascine. Mais comm<strong>en</strong>t<br />

se libérer de Wagner ? Georg Nigl représ<strong>en</strong>te<br />

cette puissance dans la lutte, incarnant la musique<br />

inclassable, expressive, l<strong>en</strong>te ou vivace, tonale, atonale,<br />

méta tonale, habitée d’images de films expressionnistes<br />

(Fritz Lang, Murnau). Les accords l<strong>en</strong>ts sont<br />

<strong>en</strong>trecoupés de longues plages de sil<strong>en</strong>ces d’une<br />

troublante l<strong>en</strong>teur : C’est la guerre qui grandit. Le<br />

baryton-acteur, impressionnant, exploite tous les<br />

registres de sa voix si souple, de la basse profonde<br />

au contre ténor, voix de tête pour les passages plus<br />

exaltés, légers ou philosophiques. En contorsions<br />

inspirées de photographies anci<strong>en</strong>nes, il est tour à<br />

tour clown, acrobate, funambule, p<strong>en</strong>seur. Il s’éveille<br />

au désir, convoque une soif de méchanceté. Puis<br />

bondit comme l’oiseau sur les toits : le piano devi<strong>en</strong>t<br />

joueur, modal. Jusqu’à ce qu’un aigle convoque la<br />

nuit, l<strong>en</strong>to, voix de tête, le v<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fond.<br />

Dieu est mort, mais cette musique contemporaine<br />

est bi<strong>en</strong> vivante.<br />

JACQUES FRESCHEL ET YVES BERGÉ<br />

Voir égalem<strong>en</strong>t Siwa p 43 et V<strong>en</strong>ue d’ailleurs p 40<br />

Tradition,<br />

prolongem<strong>en</strong>t<br />

et<br />

fusion<br />

Philippe Boivin, compositeur, professeur<br />

au CFMI, s’est lancé dans<br />

un pari d’écriture assez fou, <strong>en</strong><br />

mêlant les polyphonies de Musicatreize<br />

aux sonorités traditionnelles<br />

du gamelan Bintang Tiga, dirigé<br />

par Gaston Sylvestre ! La création<br />

Trio Bhuwana (id<strong>en</strong>tité bouddhique<br />

des trois mondes) se décline<br />

<strong>en</strong> deux parties : Swah Swara et<br />

Bhur Gong. Elle associe des poèmes<br />

sur la méditation, le savoir, et se<br />

conclut par une pièce étrange et<br />

puissante (Syllabaire des consonnes)<br />

où les basses lugubres figur<strong>en</strong>t<br />

la mort. La seconde partie fait apprécier<br />

le duo des 2 soprani (Kaoli<br />

Isshiki et Claire Gouton) comme<br />

deux flûtes solistes sur des textes<br />

de Jean-Antoine de Baïf et François<br />

Villon. Les notes du gamelan<br />

étant dans une gamme non tempérée,<br />

Roland Hayrabédian a du<br />

jongler, dans sa direction et son<br />

écoute, avec des problèmes de<br />

hauteurs, r<strong>en</strong>dant un <strong>en</strong>semble<br />

parfois instable, la résonance des<br />

gongs, xylophones, métallophones,<br />

percussions brouillant, <strong>en</strong> nappes<br />

sonores et gammes p<strong>en</strong>tatoniques,<br />

les échelles plus tonales des parties<br />

vocales. La musique cyclique<br />

dans l’esprit de la tradition balinaise<br />

et javanaise, où l’individu<br />

se met toujours au service du collectif,<br />

est r<strong>en</strong>due par un <strong>en</strong>semble<br />

percussif coloré, tons rouge et or,<br />

où chacun pr<strong>en</strong>d sa place, att<strong>en</strong>d,<br />

écoute, partage, s’efface pour<br />

laisser <strong>en</strong>trer les voix. Une énergie<br />

vibratoire pour un pari réussi,<br />

<strong>en</strong>tre tradition et modernité.<br />

YVES BERGÉ<br />

Ce concert a eu lieu le 19 avril à la<br />

Salle Musicatreize, Marseille<br />

© Yves Bergé<br />

47<br />

M<br />

USIQUE


48<br />

M<br />

USIQUE<br />

Entre l’anci<strong>en</strong><br />

et le nouveau<br />

De manière atypique se dessinait<br />

la formation de l’Ensemble Les<br />

Voix animées, pour l’interprétation<br />

du deuxième volet de la<br />

trilogie du cycle Entre terre et mer,<br />

Gaudeamus : une soprano, deux<br />

contre-ténors, deux ténors, un<br />

baryton, Luc Coadou, égalem<strong>en</strong>t<br />

à la direction musicale. Le programme<br />

s’orchestre autour de la<br />

Missa «Viri Galilaei» de Palestrina,<br />

à la jointure <strong>en</strong>tre la R<strong>en</strong>aissance<br />

et le baroque. Vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t s’intercaler<br />

des motets de Josquin des<br />

Prés et de Tomas Luis de Victoria,<br />

tous deux ayant appart<strong>en</strong>u<br />

comme l’illustre maître à la<br />

Chapelle Pontificale. Les pièces<br />

s’appui<strong>en</strong>t sur l’assise de la basse,<br />

s’élèv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> cathédrales, sonn<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> cloches victorieuses, recherch<strong>en</strong>t<br />

la plénitude, s’emport<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> un langoureux vertige. Les<br />

lumières du soir ocr<strong>en</strong>t les murs<br />

de l’abside, les chants des oiseaux<br />

répond<strong>en</strong>t aux chanteurs.<br />

Les voix superbes se gliss<strong>en</strong>t<br />

avec aisance dans ce répertoire,<br />

cisèl<strong>en</strong>t les phrases musicales,<br />

sculpt<strong>en</strong>t la matière, définiss<strong>en</strong>t<br />

de nouveaux et subtils équilibres.<br />

Par trois fois, <strong>en</strong> nappes sonores<br />

aéri<strong>en</strong>nes, juste appuyées par<br />

une pulsation monocorde, le motet<br />

Sicut cervus de Dimitri Tchesnokov<br />

(commande des Voix animées)<br />

auquel <strong>en</strong> bis répondra <strong>en</strong> écho<br />

lointain le Sicut cervus de Palestrina.<br />

Dimitri Tchesnokov, particulièrem<strong>en</strong>t<br />

heureux de pouvoir écrire<br />

pour un tel chœur -deux autres<br />

motets accompagneront bi<strong>en</strong>tôt<br />

Les voix animees, Gaudeamus, abbaye du Thoronet © Bernard Vanste<strong>en</strong>berghe<br />

ce concert-, a écrit, explique-t-il,<br />

ce motet avec le souti<strong>en</strong> de la<br />

SACEM, spécialem<strong>en</strong>t pour ces voix<br />

et le cadre acoustique de l’abbaye<br />

du Thoronet. La qualité du<br />

sil<strong>en</strong>ce qui laisse résonner les<br />

dernières harmoniques, suffit à<br />

<strong>en</strong> dire la réussite.<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Le concert a été donné le 14 avril<br />

à l’Abbaye du Thoronet<br />

À v<strong>en</strong>ir<br />

«Music Divine»<br />

le 11 mai<br />

Eglise de l’Immaculée<br />

Conception, Toulon<br />

le 12 mai<br />

Abbaye du Thoronet<br />

06 51 <strong>63</strong> 51 65<br />

www.lesvoixanimees.com<br />

Marseille baroque<br />

En cette année capitale, Jean-Marc Aymes<br />

et l’<strong>en</strong>semble Concerto Soave, nous emmèn<strong>en</strong>t<br />

de Naples à Marseille, à la découverte<br />

de musici<strong>en</strong>s méconnus. Marseille comptait<br />

de nombreux maîtres de chapelle de tal<strong>en</strong>t<br />

aux XVII e et XVIII e siècles ! Le napolitain<br />

Pergolesi est le seul compositeur référ<strong>en</strong>t<br />

du concert, r<strong>en</strong>du immortel par le Stabat<br />

Mater, écrit juste avant sa mort à… 29 ans !<br />

Dans son sublime Salve Regina, la voix de<br />

Maria-Cristina Kiehr se fond dans le legato<br />

des cordes, avec une magnifique montée<br />

chromatique...<br />

Les surprises comm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t avec l’Ouverture<br />

de l’opéra Andromaque de Leonardo Leo,<br />

rappelant l’énergie des opéras itali<strong>en</strong>s. L’<strong>en</strong>semble<br />

(10 cordes, basson, clavecin) imprime<br />

de belles <strong>en</strong>volées. On se pose alors dans<br />

la cité phocé<strong>en</strong>ne pour se délecter du Dies<br />

Irae d’Alexandre Louët, né à l’angle de la<br />

rue Grignan et de la rue Paradis <strong>en</strong> 1743 !<br />

La soprano dévoile son art parfait du style<br />

baroque : vocalises, longues t<strong>en</strong>ues, sons <strong>en</strong>flés,<br />

relâchés. L’esprit du concerto grosso<br />

est très prés<strong>en</strong>t ; les musici<strong>en</strong>s s’<strong>en</strong> donn<strong>en</strong>t<br />

à cœur joie, dans un jeu de questionsréponses<br />

jubilatoire, prouvant que les<br />

voyages étai<strong>en</strong>t incessants <strong>en</strong>tre Marseille<br />

et l’Italie. On p<strong>en</strong>se à Corelli, Vivaldi, ou<br />

Gluck et Bach.<br />

De Chalabreuil on ne sait pratiquem<strong>en</strong>t<br />

ri<strong>en</strong>, mais son Exultate Deo a tout le charme<br />

du motet à la française, avec alternance<br />

de vocalises et de phrases plus déclamées.<br />

Une Sonate, brillante et dansante, de Pierre-Gabriel<br />

Buffardin, virtuose et pédagogue<br />

hors pair de la flûte, complète ce riche<br />

programme, qui permet de redécouvrir le<br />

génie de ces compositeurs prov<strong>en</strong>çaux<br />

oubliés, fuss<strong>en</strong>t-il de répertoire !<br />

YVES BERGÉ<br />

Ce concert a eu lieu le 27 avril dans le cadre<br />

du Festival de musique sacrée de Marseille<br />

Concerto soave © Yves Bergé<br />

Des flûtes<br />

pour des violons<br />

L’<strong>en</strong>semble des Festes d’Orphée, spécialisé dans<br />

le répertoire baroque, s’est amusé à décliner les<br />

flûtes dans son dernier concert, Flûtes <strong>en</strong> fête, de<br />

la ténor à la «sopranino». Le programme très éclectique<br />

musarde <strong>en</strong>tre les auteurs baroques. Le<br />

Concerto IV de Schickhardt dont l’allegro aurait<br />

pu servir d’indicatif pour l’anci<strong>en</strong>ne ORTF, laisse la<br />

Canzoni francese de Frescobaldi accorder à la<br />

partie de la viole de gambe une indép<strong>en</strong>dance visà-vis<br />

des flûtes qu’elle ne faisait que sout<strong>en</strong>ir<br />

précédemm<strong>en</strong>t. Boismortier apporte une construction<br />

plus complexe dans un style fleuri et<br />

narratif ; Pachelbel reste très sage avec ses variations<br />

de flûtes <strong>en</strong> canon sur l’ostinato de la viole<br />

de gambe. Michel Corrette ouvre la deuxième partie<br />

la plaçant dans le registre mutin et léger, avec<br />

le Concerto comique La servante au bon tabac où<br />

chacun reconnaît l’air de la comptine. L’<strong>en</strong>train du<br />

morceau fait passer les curieux frottem<strong>en</strong>ts du<br />

Concerto a quatro de Telemann, transcrit pour quatre<br />

flûtes. La Fantazia de Purcell guide alors les auditeurs<br />

dans un univers étrange, travail de demandes<br />

et réponses, échos, auxquels succède l’écriture<br />

lumineuse de Vivaldi dans son Concerto pour quatre<br />

violons transcrit pour flûtes et basse continue.<br />

Le bis quitte totalem<strong>en</strong>t ces univers pour une<br />

œuvre «retrouvée par John Towner Williams»,<br />

dixit <strong>en</strong> souriant Guy Laur<strong>en</strong>t. Il s’agit du thème<br />

d’Indiana Jones qui achève ce concert sinon dans<br />

la création du moins dans la bonne humeur.<br />

M.C.<br />

L’Ensemble des Festes d’Orphée s’est produit le 30 avril<br />

à la Chapelle des Oblats, Aix


Premiers de cordées<br />

Juste après qu’on a assisté à quelques<br />

concerts de musique de chambre dans la<br />

(trop) grande salle du GTP lors du Festival<br />

de Pâques à Aix, on se retrouve le 9 avril<br />

à l’Auditorium de la Timone, dans des conditions<br />

optimales d’écoute et de vision, pour<br />

le dernier récital de la saison 2012-2013<br />

de la Société de Musique de Chambre de<br />

Marseille (SMCM). On y ré<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d le Quatuor<br />

Modigliani, toujours jeune <strong>en</strong>semble<br />

qui s’invite à la Faculté Médecine pour la<br />

5 e fois… <strong>en</strong> à peine dix ans ! De fait, ces<br />

quatre garçons surdoués, dont le parcours<br />

commun est époustouflant, ont comm<strong>en</strong>cé<br />

à jouer <strong>en</strong>semble <strong>en</strong> 2003 : ils souffl<strong>en</strong>t<br />

dix bougies musicales <strong>en</strong> notre compagnie.<br />

On loue, par ailleurs, le «flair» de l’équipe<br />

de Bernard Camau l’intimant à découvrir,<br />

avant tout le monde, de jeunes tal<strong>en</strong>ts !<br />

Dans la salle palissée de bois, près de 500<br />

personnes appréci<strong>en</strong>t l’acoustique nette<br />

du lieu comme la proximité avec les artistes.<br />

Si les quatre instrum<strong>en</strong>ts itali<strong>en</strong>s des<br />

XVII e et XVIII e siècles mett<strong>en</strong>t un temps<br />

avant de trouver leur plein régime, justesse,<br />

cohésion, pâte sonore dans l’Opus 50<br />

n°1 de Haydn ou l’ultime Quatuor n°16 de<br />

Beethov<strong>en</strong>, et de fulgurants mom<strong>en</strong>ts de<br />

grâce inv<strong>en</strong>tive, les Modigliani recouvr<strong>en</strong>t<br />

la hauteur de leur (déjà grand) r<strong>en</strong>om dans<br />

Ravel. Ils nous embarqu<strong>en</strong>t dans la sonorité<br />

soyeuse, féerique et colorée, pointilliste<br />

et expressive du génial Quatuor <strong>en</strong> fa qui<br />

rythma les images d’Un cœur <strong>en</strong> hiver de<br />

Sautet.<br />

La prochaine saison<br />

Placée sous le signe de la jeunesse, d’octobre<br />

2013 à avril 2014, le programme s’appuie<br />

sur de jeunes artistes récemm<strong>en</strong>t et brillamm<strong>en</strong>t<br />

primés à Bordeaux, Vi<strong>en</strong>ne, Pékin,<br />

G<strong>en</strong>ève, New York comme les quatre filles<br />

du Quatuor Zaïde ou, canadi<strong>en</strong>nes, celles<br />

du Cecilia String Quartet pour une étape<br />

dans leur tournée europé<strong>en</strong>ne, les cordes<br />

mixtes du Quatuor Hermès ou la belle<br />

pianiste russe Natasha Paremsky. En duos,<br />

on retrouve Lise Berthaud (alto) et Adam<br />

Laloum, Julian Steckel (violoncelle) et<br />

Paul Rivinius (piano), Nurit Stark (violon)<br />

et Cédric Pescia (piano), <strong>en</strong> trio <strong>en</strong>fin Liana<br />

Gourdjia (violon), Marc Coppey<br />

(violoncelle) et Peter Paul (piano). Traditionnellem<strong>en</strong>t,<br />

la SMCM accueille la<br />

Bi<strong>en</strong>nale Internationale de Quintette à<br />

V<strong>en</strong>t pour une belle affiche de Dixtuors.<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

Dev<strong>en</strong>ir adhér<strong>en</strong>t :<br />

Espace Culture 04 96 11 04 60<br />

Par courrier : Société de Musique de<br />

Chambre de Marseille, 21 Bd Hagu<strong>en</strong>au,<br />

6 allée Ste Colombe 13012 Marseille -<br />

smcm@laposte.net<br />

www.musiquedechambremarseille.org<br />

Quatuor Modigliani © Andrew Fr<strong>en</strong>ch<br />

Abdel Rahman el Bacha © Mitsuta<br />

Abdel Rahman<br />

«le Pacha»<br />

Ce n’est pas Le Vaisseau fantôme que dirige<br />

Fabrizio Maria Carminati au Silo le 12 avril !<br />

De fait, dans la vaste nef de l’anci<strong>en</strong> magasin<br />

à grain transmuté <strong>en</strong> salle de concert, l’Orchestre<br />

de Philharmonique de Marseille possède<br />

un bi<strong>en</strong> «Capitaine», bondissant, électrique…<br />

C’est Wagner, cep<strong>en</strong>dant qu’il conduit à la baguette,<br />

Ouvertures des Maîtres Chanteurs de<br />

Nuremberg et de Tannhäuser : on les voudrait<br />

plus augustes, célestes quand on les trouve<br />

militaires, pompières, grossières... Avec le chef<br />

itali<strong>en</strong>, c’est un peu «Chico» qui s’introduit au<br />

V<strong>en</strong>usberg ! Alors on ferme les yeux, car on se<br />

dit que la vue brouille parfois l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dem<strong>en</strong>t…<br />

et l’orchestre joue bi<strong>en</strong>, sans faille, ni accroc.<br />

Il aurait sans doute mérité une plus grande<br />

hauteur de vue, échelle de nuances dans l’équilibre<br />

des pupitres, un dessin plus précis des<br />

traits instrum<strong>en</strong>taux dans les tutti…<br />

Aussi, quand il attaque la longue introduction<br />

orchestrale du 1 er Concerto de Brahms, tranchante<br />

comme une hache… on pr<strong>en</strong>d peur !<br />

Mais, ouf, le Silo trouve son «Pacha» ! Dès les<br />

premières mesures du piano, Abdel Rahman<br />

el Bacha impose son tempo, son style, sa<br />

vision détachée, puissante et articulée. Il marie<br />

le souffle romantique au lyrisme mystique, tire<br />

à lui l’orchestre, impose une écoute mutuelle,<br />

oscille <strong>en</strong>tre la fusion et le combat, détaille…<br />

On r<strong>en</strong>oue avec l’ess<strong>en</strong>tiel : la justesse du ton<br />

et l’émotion !<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

49<br />

M<br />

USIQUE


50<br />

M<br />

USIQUE<br />

Alexandre Tharaud © Marco Borggreve<br />

Tharaud l’explosif<br />

Alexandre Tharaud a une élégance naturelle,<br />

et une posture de dandy toujours juvénile. Ses<br />

44 ans passés sembl<strong>en</strong>t une erreur administrative<br />

! D’abord les Neuf pièces lyriques de Grieg,<br />

où le pianiste joue de toutes les atmosphères<br />

chères au compositeur de Peer Gynt : lyrisme,<br />

thèmes populaires, technique parfaite, phrases<br />

larges très affirmées dans le registre grave.<br />

Puis les Kindersz<strong>en</strong><strong>en</strong> op. 15 de Schumann, de<br />

caractère apaisé et passionné, qui contrast<strong>en</strong>t<br />

avec le refus de Wieck d’accorder la main de sa<br />

fille Clara à Robert. Tharaud surpr<strong>en</strong>d par un<br />

jeu parfois assez marqué, puis soudain, plein<br />

de finesse : Der Dichter spricht (le poète parle),<br />

l<strong>en</strong>te, si déchirante.<br />

On att<strong>en</strong>dait la transposition de l’Adagietto,<br />

extrait de la 5 e symphonie de Mahler. Tout aussi<br />

brillant que soit cet exercice de haute volée,<br />

on est très éloigné de l’esprit de l’œuvre : le<br />

génie de Mahler était de r<strong>en</strong>dre invisible, planant,<br />

éthéré son orchestre, cordes à peine effleurées.<br />

Tharaud <strong>en</strong> fait quelque chose de très<br />

symphonique, démarrant par un mezzoforte où<br />

Mahler <strong>en</strong>trait sur la pointe des pieds, nappe<br />

immuable et magique, immortalisée sublimem<strong>en</strong>t<br />

par Visconti (Mort à V<strong>en</strong>ise). Tharaud<br />

a voulu prouver au piano ce que Mahler avait<br />

refusé à l’orchestre, mais transposer le génie<br />

orchestral de Mahler au piano n’est-il pas une<br />

inutile gageure ?<br />

Dans l’Appassionata de Beethov<strong>en</strong>, l’Allegro<br />

ma non troppo est brillant, jouissif, la technique<br />

époustouflante, malgré un Andante con<br />

moto nerveux. Tharaud aime apprivoiser les<br />

résonances finales, maîtriser les ultimes vibrations,<br />

et la main tourne après le sil<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>core,<br />

comme pour dire : j’ai le son que je veux. Un<br />

pianiste exceptionnel, qui sera unique lorsqu’il<br />

trouvera l’équilibre <strong>en</strong>tre technique et humanité,<br />

affirmation et poésie.<br />

YVES BERGÉ<br />

Le récital a été donné le 20 avril<br />

à l’Auditorium du Pharo, Marseille<br />

Verdi ma non troppo !<br />

Foin des «La donna è mobile», «Questa o quella» et autre «De miei<br />

bol<strong>en</strong>ti spiriti» ! Ces airs «ténorissimes» tirés de Rigoletto et La Traviata,<br />

on ne les <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dra pas, lors même qu’ils sont communém<strong>en</strong>t associés<br />

au «Re d’Italia» dont Rolando Villazòn célèbre le bic<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire le 2<br />

mai au Grand Théâtre de Prov<strong>en</strong>ce ! Le plus beau «lirico» actuel y<br />

repr<strong>en</strong>d seulem<strong>en</strong>t la partie la moins «courue» de son dernier disque<br />

Villazon Verdi publié <strong>en</strong> 2013 pour Deutsche Grammophon.<br />

Pas une concession de la part du franco-mexicain, même <strong>en</strong> bis où<br />

certains att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t de reconnaitre quelques notes familières ! La star<br />

n’<strong>en</strong> a pas besoin pour triompher, faire lever les foules : elle remplit la<br />

salle sur son nom seul, génère une minute d’acclamation lorsqu’elle<br />

n’a pas <strong>en</strong>core ouvert le clapet à contre-ut… Hormis Ah la paterna<br />

mano de Macbeth ou Quando le sere al placido de Luisa Miller, les airs<br />

d’I Lombardi, Il Corsaro ou Oberto écrits par Verdi autour de la tr<strong>en</strong>taine,<br />

contrevi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t aux us et recettes consistant à livrer à l’auditoire ce qu’il<br />

att<strong>en</strong>d, plutôt que l’emm<strong>en</strong>er vers des terres nouvelles.<br />

Pas d’effet de cirque non plus ! Tout au plus passe-t-il par un si naturel,<br />

<strong>en</strong> début de récital, aigu <strong>en</strong> accroche de funambule : il n’y revi<strong>en</strong>dra<br />

plus ! De surcroit, c’est avec une série de Romanze méconnues du<br />

maître de l’opéra, orchestrées avec gout par Luciano Berio, que<br />

Villazòn l’emporte (avec l’Orchestre National Symphonique<br />

Tchèque), par son tal<strong>en</strong>t propre. C’est qu’à quarante ans le ténor est<br />

au faîte de la maturité : son timbre est d’une beauté lumineuse, art du<br />

chant maîtrisé au<br />

millimètre, un métier<br />

théâtral hors pair<br />

© Agnès Mellon<br />

doublé d’une<br />

personnalité<br />

éminemm<strong>en</strong>t<br />

humaine,<br />

généreuse, dont<br />

la conniv<strong>en</strong>ce, le<br />

s<strong>en</strong>s du partage<br />

avec le public, à<br />

fleur de peau,<br />

ravit !<br />

JACQUES<br />

FRESCHEL<br />

Dans le monde des pianistes<br />

virtuoses, gravit<strong>en</strong>t au firmam<strong>en</strong>t<br />

des interprètes<br />

illustres quelques femmes<br />

d’exception telles que Martha<br />

Argerich ou <strong>en</strong>core la<br />

locale Hélène Grimaud.<br />

Dans cet aréopage très<br />

fermé de dames de caractère,<br />

la pianiste portugaise<br />

Maria Jo o Pires, par son<br />

charisme, sa discrétion, son<br />

amour de la transmission,<br />

est une figure emblématique.<br />

Interprète d’un soir au<br />

GTP dans le Concerto n°2 <strong>en</strong> fa mineur opus 21 du juvénile<br />

Chopin, le public aura pu apprécier l’excell<strong>en</strong>ce de son toucher,<br />

la grâce de son jeu, sans emphase, tout <strong>en</strong> intériorité,<br />

d’une virtuosité aristocratique exempte de démonstration<br />

pyrotechnique comme l’aimait le pianiste polonais. Avec<br />

quelle poésie elle mit <strong>en</strong> valeur l’élégance mélodique du<br />

Larghetto ! Chaque note, chaque ornem<strong>en</strong>tation, pesée, soupesée,<br />

trouva sa juste place au sein d’un discours ciselé,<br />

d<strong>en</strong>telle de mots muets écorchée d’une douce mélancolie. Le<br />

très bel Orchestre de Chambre de Bâle, tout à l’écoute et<br />

au service de la soliste, mit parfaitem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> relief la beauté<br />

de cette pièce de pianiste pour pianiste ! Mais le célèbre chef<br />

Trevor Pinnock, à la tête de cet <strong>en</strong>semble tal<strong>en</strong>tueux, bi<strong>en</strong><br />

équilibré, avec une belle pâte de cordes, aurait été bi<strong>en</strong> inspiré<br />

d’<strong>en</strong>tourer le chef-d’œuvre de Chopin d’autres pièces que<br />

l’insipide Siegfried Idyll de Wagner, poème symphonique<br />

interminable <strong>en</strong> hommage à la naissance de son fils et de la<br />

sempiternelle «Jupiter» de Mozart. Mais dès la sortie du concert<br />

ces pièces étai<strong>en</strong>t oubliées et restai<strong>en</strong>t dans les oreilles<br />

les magnifiques pages dessinées par la grande Maria.<br />

CHRISTOPHE FLOQUET<br />

Maria-Joao Pires © Felix Broede<br />

Concert donné au GTP, à Aix, le 4 mai<br />

Madame M.


52<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

M<br />

USIQUE<br />

Le Gyptis <strong>en</strong> Surprise[s]<br />

L’événem<strong>en</strong>t est majeur à Marseille, émouvant<br />

pour tous ceux ont suivi l’av<strong>en</strong>ture du couple<br />

Chatôt-Vouyoucas dans l’histoire théâtrale de<br />

la ville, au Théâtre de la Belle de Mai depuis 1987<br />

et même une dizaine d’années auparavant au<br />

petit Théâtre Massalia de la rue Grignan… Ti<strong>en</strong>s<br />

on se souvi<strong>en</strong>t avec nostalgie d’un Godot ou<br />

d’un Claudel qu’on y découvrait à l’époque ! Cygnes<br />

blancs, Françoise et Andonis chant<strong>en</strong>t leurs<br />

dernières notes <strong>en</strong> Surprise[s] le 23 mai à 19h15<br />

au Théâtre Gyptis qui devi<strong>en</strong>dra un Pôle image,<br />

sans doute, dans la foulée du départ. Mais<br />

le duo n’a pas manqué de cultiver l’art de la transmission,<br />

car la belle équipe qu’il a formée, et<br />

qui mène maint<strong>en</strong>ant la danse, ne manquera pas<br />

de développer l’ouvrage, explorer de nouvelles<br />

voies… on le dit… à quelques <strong>en</strong>cablures de là !<br />

La musique a toujours occupé une part honnête<br />

de la programmation du Gyptis, <strong>en</strong>core dernièrem<strong>en</strong>t<br />

avec Lettres d’amour et des amours.<br />

Pour cette ultime quinzaine de mai, <strong>en</strong> guise<br />

de flèches du Parthe, comme pour signifier que<br />

le combat continue, noble, tourné vers l’av<strong>en</strong>ir<br />

et la création, c’est l’Ensemble Télémaque qui<br />

joue l’invité Surprise[s] !<br />

D’abord avec la Mort Marraine, beau conte de<br />

Grimm mis <strong>en</strong> musique par Raoul Lay, joué par<br />

Agnès Audiffr<strong>en</strong> et mis <strong>en</strong> scène par Julie<br />

Cordier. Un spectacle à succès, pour tout public,<br />

qui tourne depuis cinq ans. Puis c’est vers<br />

l’un des compositeurs phare de la création contemporaine<br />

que le directeur musical se tourne.<br />

Passion opéra !<br />

Après La Clém<strong>en</strong>ce de Titus, l’affiche de la Place<br />

Reyer reste classique, antique… La reine Cléopâtre<br />

mise <strong>en</strong> musique par Jules Mass<strong>en</strong>et, pr<strong>en</strong>d<br />

la suite du Mozart Imperator ! C’est un «Drame<br />

passionnel» sur le poème de Louis Pay<strong>en</strong> qu’on<br />

suit, qu’on vit, <strong>en</strong>tre la mythique et s<strong>en</strong>suelle<br />

Egypti<strong>en</strong>ne, dompteuse d’aspics, (Béatrice Uria-<br />

Monzon) et son amoureux jusqu’au-boutiste<br />

Marc-Antoine qui trahira et se tuera pour elle<br />

(Jean-François Lapointe)… Et (ouf !), on découvre<br />

un nouveau chef-d’œuvre de l’auteur de<br />

Manon, Thaïs, Le Cid, Werther, C<strong>en</strong>drillon ou Don<br />

Quichotte sur la Canebière, car Cléopâtre n’y a<br />

jamais été représ<strong>en</strong>té depuis sa création posthume<br />

<strong>en</strong> 1914. Pour cette nouvelle production,<br />

on met le paquet : pour la vue, avec le trio<br />

Roubaud / Favre / Duflot et pour l’ouïe, au<br />

La Mort marraine © Agnès Mellon<br />

Thierry Machuel effectue un travail singulier<br />

sur le chant choral, la poésie contemporaine,<br />

explore une nouvelle poétique musicale autour<br />

Gospel, du Nô, des chants traditionnels palestini<strong>en</strong>s,<br />

basques… Si bi<strong>en</strong> qu’aujourd’hui on<br />

étudie son œuvre au baccalauréat !<br />

Nous d’ici-bas<br />

Dans son dernier oratorio, joué le <strong>en</strong> création<br />

mondiale Thierry Machuel évoque à nouveau<br />

service d’un chant français qu’on retrouve toujours<br />

avec plaisir, une distribution royale<br />

<strong>en</strong>richie de Luca Lombardo, l’un des meilleurs<br />

ténors contemporains pour interpréter l’esclave<br />

Spakos dev<strong>en</strong>u amant-fou de la Reine,<br />

ou Kimy Mc Lar<strong>en</strong> <strong>en</strong> Octavie, épouse délaissée.<br />

C’est le «king» Laur<strong>en</strong>ce Foster qui dirige<br />

l’Orchestre et les Chœurs de l’Opéra.<br />

Auparavant, l’Orchestre Philharmonique de<br />

Marseille aura achevé sa saison dans le cadre<br />

de l’ultime concert du 18 e Festival de Musique<br />

Sacrée <strong>en</strong> accompagnant le Chœur PACA (dir.<br />

Michel Piquemal) et un beau quatuor de solistes<br />

dans un programme Dvorak (Psaume, Te<br />

deum et Messe <strong>en</strong> ré majeur).<br />

Le dernier concert de musique de chambre nous<br />

emmène du côté ibéro-latin de Turina, Falla<br />

l’univers carcéral, à partir d’ateliers qu’il a animé<br />

à la prison de Clairvaux (elle fut aussi autrefois<br />

un monastère). Là, aux côtés de musici<strong>en</strong>s<br />

professionnels, comme la soprano Brigitte<br />

Peyré, près d’une c<strong>en</strong>taine de jeunes choristes<br />

marseillais chant<strong>en</strong>t l’ombre et rêv<strong>en</strong>t de lumière,<br />

récit<strong>en</strong>t l’<strong>en</strong>fermem<strong>en</strong>t, l’exclusion, l’espoir<br />

et la peur de liberté, intérieure, fantasmée…<br />

chuchot<strong>en</strong>t, trembl<strong>en</strong>t, cri<strong>en</strong>t, questionn<strong>en</strong>t<br />

le sil<strong>en</strong>ce, les conv<strong>en</strong>tions, les flous de la mémoire<br />

et de l’id<strong>en</strong>tité… Un hymne à la vie et<br />

aux songes d’<strong>en</strong>fants !<br />

70 jeunes filles<br />

L’Ensemble Télémaque repr<strong>en</strong>d égalem<strong>en</strong>t,<br />

pour la 70 e fois, La jeune fille aux mains d’arg<strong>en</strong>t,<br />

opéra créé <strong>en</strong> 2006, pour comédi<strong>en</strong> (Franck Manzoni)<br />

et marionnettes, chœur et instrum<strong>en</strong>ts,<br />

mis <strong>en</strong> musique par Raoul Lay sur un livret<br />

d’Olivier Py (d’après Grimm), mis <strong>en</strong> scène par<br />

Catherine Marnas.<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

MARSEILLE. La Mort Marraine le 16 mai<br />

à 14h30 et 19h15<br />

SAINT-MARTIN DE CRAU. Le 24 mai à 20h30.<br />

Salle Mistral (scolaire à 14h30)<br />

04 91 39 29 13 www.<strong>en</strong>semble-telemaque.com<br />

Nous d’ici-bas. Le 31 mai à 14h30 et 18h30.<br />

Entrée libre sur réservation<br />

04 91 11 00 91 Théâtre Gyptis<br />

www.theatregyptis.com<br />

www.theatregyptis.com<br />

ou Piazzolla, avec Laur<strong>en</strong>ce Stevaux (soprano),<br />

Elisabeth Soulignac (violon) et Agathe<br />

Dipiro (piano). J.F.<br />

MARSEILLE. Cléopâtre. Les 15, 18, 20 juin à 20h<br />

et le 23 juin à 14h30. Opéra<br />

Confér<strong>en</strong>ce Opéra. Le 8 juin à 15h. Foyer Opéra<br />

et R<strong>en</strong>contre à l’Alcazar. Le 12 juin à 17h.<br />

Salle de confér<strong>en</strong>ce. Entrée libre<br />

Concert Dvorak. Le 29 mai à 20h30.<br />

Eglise Saint-Michel<br />

Musique de chambre Le 25 mai à 17h.<br />

Foyer Opéra<br />

04 91 55 11 10<br />

http://opera.marseille.fr<br />

RetrouveZ sur notre site tous nos articles et d’autres <strong>en</strong>core !<br />

-l’Abécédaire Guédiguian<br />

- Vinc<strong>en</strong>t Peirani 5tet au théâtre Fontblanche, Vitrolles<br />

-Polyphonie System à la Machine à Coudre, MArseille<br />

- Martine Joséphine Thomas au Méjan, Arles<br />

- C’est la faute à Vénus à la Chapelle Saint-Joseph, Marseille<br />

- Orphée aux <strong>en</strong>fers au théâtre du Lacydon, Marseille<br />

- le Sextuor Cattanea au Château des Remparts, Trets<br />

- Barbe Bleue à l’Odéon, Marseille<br />

-Adam Laloum à la Criée, MArseille<br />

- Baptiste Trotignon au GTP, Aix<br />

- Jeanne Garraud à Théâtre et Chansons, Aix<br />

- Choré de Jean-Christophe Maillot au Grimaldi Forum de Monaco<br />

-Le Catalogue de l’exposition Rodin à la lumière de l’antique<br />

- Steph<strong>en</strong> Sondheim de R<strong>en</strong>aud Machart, Actes Sud<br />

- Saint Georges regardait ailleurs de Jabbour Douaihy, Actes sud<br />

www.journalzibeline.fr


Giono salutaire !<br />

Commande 2013 du Festival de Chaillol, dirigé<br />

par Michaël Dian (<strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat avec le<br />

GMEM) au Marseillais Georges Bœuf, L’homme<br />

qui plantait des arbres, d’après la nouvelle<br />

de Giono, est créée <strong>en</strong> avant-première dans la<br />

ville du compositeur. Elle essaimera <strong>en</strong>suite<br />

ses graines sonores, sa poésie écolo-humaniste,<br />

fera rimer répertoires et territoires du côté<br />

de Gap et du Champsaur (du 23 au 26 mai<br />

Week-<strong>en</strong>d musicaux & les 24 et 27 juillet Festival).<br />

Quel autre texte que celui du berger<br />

Elzéard Bouffier (prés<strong>en</strong>té <strong>en</strong> 1953 comme auth<strong>en</strong>tique)<br />

peut incarner aussi int<strong>en</strong>sém<strong>en</strong>t<br />

l’espoir de la r<strong>en</strong>aissance des vallées alpines ?<br />

À la lecture sobre, «radiophonique» de la comédi<strong>en</strong>ne<br />

Bénédicte Debilly, Georges Bœuf joint<br />

un <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sonore, non illustratif, mais<br />

s<strong>en</strong>sible, explorant la matière acoustique à<br />

l’image de la musique concrète, soulignant les<br />

articulations du récit : ce sont Claudio Bettinelli<br />

aux percussions (minérales, végétales,<br />

collectées dans les Alpes…) et Joël Versavaud<br />

au souffle de ses saxophones, qui traceront<br />

cette harmonie de l’homme et la nature que<br />

chantait Giono.<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

MARSEILLE. L’homme qui plantait des arbres. Le 22<br />

mai à 20h. Salle Musicatreize<br />

04 91 00 91 31 www.musicatreize.org<br />

Joel Versavaud © X-D.R.<br />

Duo et quatuor<br />

Le formidable jeune pianiste David Kadouch<br />

et Edgar Moreau, violoncelliste récemm<strong>en</strong>t<br />

révélé aux Victoires de la Musique 2013, propos<strong>en</strong>t,<br />

dans le cadre du Festival de La Roque<br />

d’Anthéron hors-saison une beau programme<br />

de Sonates de Debussy (n°1), Schubert (Arpeggione)<br />

et Chostakovitch (op.40 – le 21 mai<br />

à 20h).<br />

On poursuit dans l’anci<strong>en</strong>ne halle aux poissons<br />

avec de la musique de chambre et le Jerusalem<br />

String Quartet qui joue les Quatuors n°1<br />

de Smetana, n°3 de Chostakovitch et les Bagatelles<br />

de Mark Kopytman (le 27 mai à 20h <strong>en</strong><br />

part<strong>en</strong>ariat avec Marseille Concerts). J.F<br />

MARSEILLE. La Criée<br />

04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////<br />

Programme de salle…<br />

L’Ensemble Musicatreize dirigé par Roland<br />

Hayrabedian retrouve son «chez-soi» pour un<br />

beau programme vocal autour du Cycle des<br />

berceuses : deux pièces <strong>en</strong> création de Félix<br />

Ibarrondo et Daniel Tosi s’ouvr<strong>en</strong>t à la lumire<br />

méditerrané<strong>en</strong>ne, nouvelles fleurs <strong>en</strong>racinées<br />

dans la tradition orale et le monde de l’efance.<br />

Maurice Ohana (Berceuse et Sybille) comme la<br />

«liturgie du métal», alchimique Maadann de<br />

Zad Moultaka, complèt<strong>en</strong>t l’affiche (le 12 juin<br />

à 20h).<br />

C’est aussi l’accordéoniste Pascal Contet qui<br />

s’invite dans un programme mixant le baroque<br />

Couperin à la bossa nova ou Piazzolla, comme<br />

le contemporain Bruno Mantovani ou l’inclassable<br />

Jacques Rebotier… (le 14 juin à 20h).<br />

J.F.<br />

Concerts à 20h. Salle Musicatreize<br />

Réservations au 04 91 00 91 31<br />

www.musicatreize.org<br />

De Fuchs à Imbert<br />

Julie Fuchs (Révélation lyrique aux Victoires<br />

de la Musique 2011) est de ces jeunes sopranos<br />

capables de passer de la comédie musicale<br />

ou l’opérette à l’opéra (belle Galatée au Festival<br />

d’Aix 2011 !). On la découvre <strong>en</strong> récital<br />

dans l’écrin aixois (le 24 mai à 20h30. Théâtre<br />

du Jeu de Paume).<br />

On att<strong>en</strong>dait à Marseille la v<strong>en</strong>ue du saxophoniste<br />

Raphaël Imbert, depuis son Mozart<br />

Ellington initié au GTP <strong>en</strong> 2011et la sortie du<br />

disque Heav<strong>en</strong>s Amadeus & the Duke (CD Jazz<br />

Village-harmonia mundi JV 570011). Avec les<br />

sbires jazzy de la Compagnie Nine Spirit, la<br />

voix chaleureuse de Marion Rampal, les cordes<br />

classieuses du Quatuor Manfred ou Flor<strong>en</strong>t<br />

Héau à la clarinette, les éclats du swing d’Ellington<br />

et les Lumières mozarti<strong>en</strong>nes «se fond<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> une seule et même lueur», <strong>en</strong>fin sur la<br />

Canebière ! (le 15 juin à 20h30. Théâtre du<br />

Gymnase).<br />

08 2013 2013 www.lestheatres.net<br />

Festival<br />

d’Aix-<strong>en</strong>-Avance<br />

Dès la mi-juin, le Festival d’Aix pr<strong>en</strong>d les devants<br />

sur les traditionnelles dates lyriques de<br />

juillet (Don Giovanni, Rigoletto, Elektra… <strong>en</strong><br />

2013). Toute une série de programmes autour<br />

de Francis Poul<strong>en</strong>c, à l’occasion du cinquant<strong>en</strong>aire<br />

de sa disparition <strong>en</strong> 19<strong>63</strong>, est donnée<br />

à Aix (GTP, Hôtel Maynier d’Oppède, Bois de<br />

l’Aune), Rousset et Marseille (La Criée). On<br />

<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d Les Mamelles de Tirésias avec les chanteurs<br />

de l’Académie Europé<strong>en</strong>ne de Musique,<br />

«Je fais ce qui me chante», spectacle mis <strong>en</strong><br />

scène par Olivier Balazuc, et sa belle musique<br />

de chambre par des spécialistes du g<strong>en</strong>re (Eric<br />

le Sage, Lise Berhaud, François Salque…).<br />

J.F<br />

Festival d’Aix <strong>en</strong> juin. Hommage à Francis Poul<strong>en</strong>c<br />

du 14 au 18 juin<br />

Programme complet sur www.festival-aix.com<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////


54<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

M<br />

USIQUE<br />

ICLA dans la rue !<br />

La bi<strong>en</strong>nale d’art contemporain tunisi<strong>en</strong>ne<br />

Dream City fait escale à l’Estaque et propose<br />

trois parcours artistiques imaginés <strong>en</strong> collaboration<br />

avec les artistes «estaqué<strong>en</strong>s» Jean-Marie<br />

Arnaud Sanchez et Ali B<strong>en</strong>rezkallah. On parcourt<br />

les rues, pénètre des espaces inatt<strong>en</strong>dus,<br />

découvre des créations, installations, performances,<br />

ballades sonores, visuelles... Quai de<br />

la Lave on écoute Solange Baron (accordéon)<br />

et Christina Bini (percussions) interpréter Icla,<br />

pièce de la jeune compositrice itali<strong>en</strong>ne Alice<br />

Berni. Un subtil dialogue, énergique ou hypnotique,<br />

à goûter l’après-midi ! J.F<br />

L’ESTAQUE. Les 18 et 19 mai à 14h, 15h, 15h45,<br />

16h30 et 17h30. Quai de la Lave<br />

www.<strong>en</strong>semble-telemaque.com<br />

De la Terre au ciel<br />

Après les Sonates de Mozart données à Marseille<br />

(Salle Musicatreize) ou le programme De<br />

Naples à Marseille joué au Festival de Musique<br />

Sacrée, Jean-Marc Aymes embarque les<br />

musici<strong>en</strong>s de Concerto Soave pour la V<strong>en</strong>ise<br />

prov<strong>en</strong>çale. Pour le dernier concert de la saison<br />

de la Scène Nationale Les Salins, on <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<br />

des merveilles baroques : la cantate Ariane<br />

d’Alessandro Scarlatti, le Salve Regina et des<br />

extraits de l’oratorio La Resurrezione d’Ha<strong>en</strong>del,<br />

servis par la voix unique de María Cristina<br />

Kiehr. J.F.<br />

MARTIGUES. Le 21 mai à 20h30.<br />

Eglise de la Madeleine<br />

04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr<br />

L’Art de la fugue<br />

© Christophe Manquillet<br />

L’une des plus belles œuvres de Bach ! Sa<br />

dernière fugue écrite d’après les lettres (notes)<br />

de son nom (B.A.C.H.) est inachevée, susp<strong>en</strong>due,<br />

au milieu d’une phrase, comme si le Kantor<br />

avait laissé-là… tomber sa plume… définitivem<strong>en</strong>t<br />

pris la «fuite» ! C’est la pianiste Célimène<br />

Daudet qui joue l’opus et dialogue avec les<br />

corps <strong>en</strong> apesanteur du circassi<strong>en</strong> Yoann<br />

Bourgeois, la danseuse Marie Fonte, au gré<br />

d’une scénographie poétique signée Goury. J.F<br />

GAP. Les 30 et 31 mai à 20h30.<br />

Théâtre La Passerelle<br />

04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////<br />

Toujours le dimanche !<br />

Les quatre dimanches du 26 mai au 16 juin<br />

sont à réserver ! Pour sa 7 e édition, le festival<br />

Autour des Claviers, initié par le Duo KW (les<br />

pianistes Clara Kastler & Hubert Woringer),<br />

nous emporte dans un voyage empli d’évocations<br />

littéraires et musicales.<br />

Dans l’ordre : Diane de Montlivault et l’inénarrable<br />

virtuose François-R<strong>en</strong>é Duchâble<br />

mêl<strong>en</strong>t textes et partitions romantiques, Chopin,<br />

Sand, Liszt, Marie d’Agout, Schumann et<br />

sa Clara («Langages croisés»). Deux générations<br />

de sopranos turques Aytül Büyüksaraç<br />

et Elif G<strong>en</strong>ek, nous font découvrir la musique<br />

classique du XX e siècle de leur pays <strong>en</strong> compagnie<br />

du pianiste Sylvain Souret («Les Voix<br />

d’Izmir»). La jeune Sarah Lavaud met toute<br />

sa s<strong>en</strong>sibilité au service de «Saint-Ex.» avec<br />

maître Bertrand Perier à la lecture («Un Petit<br />

Prince»). Enfin, l’<strong>en</strong>semble Ad Fontes (dir. Jan<br />

Heiting) sout<strong>en</strong>u par le Duo KW jou<strong>en</strong>t la Création<br />

de Haydn et r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t hommage à Poul<strong>en</strong>c<br />

avec son Gloria.<br />

Qualité et éclectisme, deux conditions du<br />

bonheur ? M.C.<br />

LE THOLONET. Les 26 mai, 9 et 16 juin, les dimanches<br />

à 18h30. Eglise St-Joseph, domaine Aubrun. Et le<br />

2 juin à l’Eglise du Tholonet.<br />

04 42 96 96 96 www.autourdesclaviers.com<br />

Dalberto vs El Bacha<br />

Michel Dalberto © J.-P. Raibaud<br />

Ou Schubert vs Beethov<strong>en</strong> ! Deux soirées,<br />

deux magnifiques pianistes, chacun pour un<br />

programme majeur ! Les derniers feux artistiques<br />

de la saison du Théâtre de Nîmes sont<br />

allumés (et <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>us !), lors de deux concerts<br />

<strong>en</strong>chaînés, par Michel Dalberto et Abdel<br />

Rahman El Bacha. Ils interprèt<strong>en</strong>t respectivem<strong>en</strong>t<br />

les quatre ultimes Sonates de Schubert<br />

et Beethov<strong>en</strong>… Monum<strong>en</strong>tal ! J.F<br />

NÎMES. Les 7 et 8 juin à 20h et 22h.<br />

Théâtre de Nîmes<br />

04 66 36 65 10www.theatred<strong>en</strong>imes.com<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////<br />

Mísia <strong>en</strong> Liberté<br />

© B. Aragao<br />

Voilà une petite vingtaine d’année que l’une<br />

des belles figures du fado moderne, héritière<br />

d’Amália Rodrigues, tangue son train nocturnal,<br />

la «saudade» portugaise, <strong>en</strong>tre passion et<br />

élégance ! Mísia livre, au pied du Faron, un<br />

florilège de son dernier album <strong>en</strong>chanteur : La<br />

Reine de la Nuit. J.F<br />

TOULON. Le 21 mai à 20h30. Théâtre Liberté<br />

04 98 00 56 76 www.theatre-liberte.fr<br />

Symphonique<br />

Jean-Christophe Spinosi s’invite à la tête de<br />

l’Orchestre de l’Opéra de Toulon dans Beethov<strong>en</strong><br />

(7 e symphonie), Haydn («L’ours») et le<br />

1 er concerto pour violoncelle de Saint-Saëns avec<br />

Jérôme Pernoo (le 31 mai à 21h30. Opéra de<br />

Toulon).<br />

Jean-François Heisser dirige l’O. L.R.A.P. dans<br />

un programme symphonique et lyrique (Turina,<br />

Ravel, Falla…) augm<strong>en</strong>té de marionnettes<br />

(le 7 juin à 20h30. Opéra d’Avignon). J.F<br />

04 94 92 70 78 www.operadetoulon.fr<br />

04 90 82 42 42 www.opera-avignon.fr<br />

Roméo et Juliette<br />

Sonia Yoncheva © Javier Del Real<br />

L’opéra de Gounod, mis <strong>en</strong> scène par Paul<br />

Emile Fourny et dirigé par Alain Guingual !<br />

Les amants de Vérone sont interprétés par<br />

Sonya Yoncheva et Florian Laconi. J.F<br />

AVIGNON. Le 26 mai à 14h30<br />

et le 28 mai à 20h. Opéra<br />

04 90 82 42 42 www.opera-avignon.fr


56<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

M<br />

USIQUE<br />

Couleurs Urbaines<br />

5 e édition du Festival Couleurs Urbaines dans<br />

le Var avec des stars internationales, les révélations<br />

de demain ou la scène locale. À la<br />

Seyne-sur-Mer : hip hop avec K<strong>en</strong>y Arkana<br />

(30 mai, Bourse du travail), r<strong>en</strong>contre de danse<br />

avec la Battle sur Seyne (15 juin, <strong>en</strong>trée libre) et<br />

Biga Ranx, HK & les Saltimbanks et Flavia<br />

Coelho (14 juin, esplanade Marine sur invitation).<br />

Groundation Meta & The Cornestones<br />

joueront à Six-Fours (31 mai, espace Malraux),<br />

Idir à Ollioules (7 juin, Châteauvallon) et Elisa<br />

Do Brasil à Toulon (8 juin, Bar à Thym). La ville<br />

accueille égalem<strong>en</strong>t une Roller jam session (1 er<br />

juin, Statepark) et la projection du film docum<strong>en</strong>taire<br />

sur la Côte d’Ivoire Sabadou de Samir<br />

B<strong>en</strong>chikh (29 mai, cinéma le Royal).<br />

du 29 mai au 15 juin<br />

Toulon, Six-fours les plages, Ollioules, la Seynesur-Mer<br />

www.festival-couleursurbaines.com<br />

Esprit Musique<br />

Les 3 groupes Lauréats du Concours Jeunes<br />

Tal<strong>en</strong>ts Caisse d’Epargne 2013 sont <strong>en</strong><br />

tournée dans la Région et c’est au Cargo de<br />

Nuit qu’ils offriront leur deuxième date, <strong>en</strong> <strong>en</strong>trée<br />

libre. Les nancé<strong>en</strong>s de Backstage Rodeo<br />

déploieront leur rock underground déjanté<br />

teinté de blues. Mélange disco synthétique et<br />

cold wave avec The George Kaplan Conspiracy<br />

pour une électropop mutine et dansante.<br />

Puis, blues rock psychédélique avec le trio breton<br />

The Same Old Band, qui promet une expéri<strong>en</strong>ce<br />

proche de la transe, avec ses guitares<br />

tortueuses et lancinantes. À l’issue du concert,<br />

les spectateurs repartiront avec la compilation<br />

Esprit Musique #2.<br />

le 22 mai<br />

Cargo de Nuit, Arles<br />

04 90 49 55 99<br />

www.cargod<strong>en</strong>uit.com<br />

Flavia Coelho © Roch Armando<br />

Festival Flam<strong>en</strong>co<br />

Dans le cadre du XXIII e Festival Mai-Diterranée,<br />

le Toursky vibrera au son du flam<strong>en</strong>co<br />

sous la direction artistique de José-Luis Gomez.<br />

Danse d’une dynamique impressionnante<br />

avec Jairo Barrull qui, <strong>en</strong>tre gestes épurés et<br />

aéri<strong>en</strong>s, retrace dans Her<strong>en</strong>cia son héritage<br />

artistique à travers sept générations (le 23 mai).<br />

Un zapateado d’une virtuosité hors du commun.<br />

Le 24 mai, Visitando el Mundo signe le retour de<br />

Chispa Negra qui mêle flam<strong>en</strong>co traditionnel<br />

et reprises de titres de Leonard Coh<strong>en</strong> à Hotel<br />

California. Explosif et virtuose.<br />

IX e Festival International Flam<strong>en</strong>co<br />

les 23 et 24 mai<br />

Théâtre Toursky, Marseille<br />

0 820 300 033<br />

www.toursky.org<br />

Chispa Negra © Nathalie Goux<br />

Les R<strong>en</strong>dez-Vous...<br />

De mai à juillet, les publics sont invités à découvrir<br />

à l’heure de l’apéro des artistes de la<br />

scène musicale régionale. Un festival convivial<br />

et gratuit organisé par le Bureau Intermédiaire<br />

de Production, avec six r<strong>en</strong>contres<br />

musicales qui r<strong>en</strong>ou<strong>en</strong>t avec la tradition populaire<br />

<strong>en</strong> lieu et place de l’emblématique Kiosque à<br />

musique des Réformés et un programme<br />

élargi à des ateliers jeune public et des Djs<br />

chaque soir. Premier r<strong>en</strong>dez-vous avec Mysterlô,<br />

OK Bonnie et Girls on the rocks le 19 mai, Sugarcraft<br />

et Nassim Dj le 2 juin, Bal décalé le 30 juin,<br />

Date With Elvis, Gaïo et Del’Amott le 7 juil et<br />

Hugo Kant, Markovo et Eve Dahan le 21 juil.<br />

Nouvelle destination à l’Estaque avec un R<strong>en</strong>dez-vous<br />

Barg’eau sur une scène flottante, le<br />

15 juin, avec Wayaz, Hyph<strong>en</strong> Hyph<strong>en</strong> et Maniacx.<br />

Les r<strong>en</strong>dez-vous du kiosque<br />

du 19 mai au 21 juillet<br />

Kiosque à musique des Réformés, Marseille 1 er<br />

Espace Mistral de l’Estaque, Marseille 16e<br />

06 84 52 99 15<br />

www.r<strong>en</strong>dezvousdukiosque.fr<br />

www.mp2013.fr<br />

Rona Hartner © Dana Stephane Maitec<br />

OK Bonnie © Marc Thirouin<br />

Mai <strong>en</strong> musique<br />

Carte blanche à Nathalie Joly qui propose p<strong>en</strong>dant<br />

15 jours spectacles musicaux, r<strong>en</strong>contres<br />

d’artistes, confér<strong>en</strong>ce et exposition autour du<br />

thème des Diseuses avec un dytique consacré<br />

au parlé chanté d’Yvette Guilbert. Paris-Bukarest<br />

r<strong>en</strong>dra hommage à la chanteuse roumaine<br />

Maria Tanase (16 au 18 mai), le spectacle sur<br />

la correspondance d’Yvette Guilbert et Freud Je<br />

ne sais quoi (30 mai) succèdera au second<br />

épisode sur le destin de la «Reine du Caf’conç»<br />

dans En v’là une drôle d’affaire (21 au 25 mai).<br />

Confrontation <strong>en</strong>tre Slam et Rap avec à la<br />

participation du groupe DGT Crew, dans Diseuses<br />

d’hier à aujourd’hui (28 et 29 mai).<br />

du 16 au 30 mai<br />

Théâtre de L<strong>en</strong>che, Marseille<br />

04 91 91 52 22<br />

www.theatredel<strong>en</strong>che.info<br />

Les 20 ans de<br />

la Fête du Panier<br />

En plein cœur de Marseille, l’incontournable Fête<br />

du Panier célèbre l’été et son 20 e anniversaire.<br />

L’événem<strong>en</strong>t populaire et festif Marseillais<br />

rassemble durant 2 jours petits et grands <strong>en</strong><br />

alliant propositions artistiques v<strong>en</strong>ues du monde<br />

<strong>en</strong>tier et interv<strong>en</strong>tions associatives, dans le<br />

quartier mythique du Panier. Avec la Cumbia<br />

Chicharra, le duo d’Aixoises Andromakers, le<br />

groupe de jazz funk marseillais Accoules Sax,<br />

les chansons napolitaines et tradition comique<br />

avec I Posteggiatori & Hélène Coriace, l’électro<br />

tsigane de Rona Hartner & Dj’Tagada. Et<br />

<strong>en</strong>core : Ablaye Cissoko, Moussu T e Lei<br />

Jov<strong>en</strong>ts, D’Aqui Dub, Mad Professor, le projet<br />

marseillais Gainsbourg Confid<strong>en</strong>tiel, New<br />

York Gypsy All Stars… À noter égalem<strong>en</strong>t le<br />

21 juin, la v<strong>en</strong>ue du groupe mythique reggae des<br />

années 70, the Abyssinians, et le 22 la performance<br />

originale de l’égypti<strong>en</strong> Mina Ghobrial<br />

qui allie flûte traversière et beat box.<br />

les 21 et 22 juin<br />

Divers lieux, quartier du Panier, Marseille<br />

04 91 91 09 28<br />

www.fetedupanier.com


Sons du Lub<br />

En une journée, les Sons du Lub’ plong<strong>en</strong>t les ruelles<br />

de Beaumont de Pertuis dans une av<strong>en</strong>ture musicale<br />

festive et populaire, la 9 e du nom. 20 concerts donnés<br />

gratuitem<strong>en</strong>t sur 4 scènes, une traditionnelle bourse<br />

aux instrum<strong>en</strong>ts, des spectacles de rue, des ateliers<br />

pour <strong>en</strong>fants. Au programme : les gagnants du Tremplin<br />

Rock Underplane, le blues agricole de Free Beans,<br />

hip hop rock avec Gamac, arabian rock avec Tem<strong>en</strong>ik<br />

Electric, les incontournables Raoul Petite suivis de<br />

Scarecrow. Mais <strong>en</strong>core Solsista, Junky Monkies, la<br />

Pétank Elektro, Nell Sin, Ottilie B et l’opéra comique<br />

Carm<strong>en</strong> par l’OPI. Pour les <strong>en</strong>fants, B.A.B. ou initiation<br />

au répertoire classique avec Famille Maestro. Mirabeau<br />

accueillera égalem<strong>en</strong>t un concert de Lina And.<br />

Et si la pluie s’invite, un chapiteau est prévu.<br />

le 19 mai<br />

Divers lieux, Beaumont de Pertuis<br />

et Mirabeau (84)<br />

06 95 13 97 73<br />

www.arc<strong>en</strong>solasso.fr<br />

Joutes musicales<br />

Au cœur de la Prov<strong>en</strong>ce Verte, la 16 e édition du Festival<br />

des nouvelles musiques traditionnelles du monde,<br />

labellisée Marseille-Prov<strong>en</strong>ce 2013, donne à <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre<br />

pour l’occasion les métissages des musiques de la<br />

Méditerranée : les Sérénades du Mélonious Quartet,<br />

la Nouba contemporaine de Montanaro, Mascarimirí<br />

et le GitanistanOrkestra, Françoise Atlan, Sébasti<strong>en</strong><br />

Bertrand et le concert bal Grand’Danse Connection<br />

Club. L’occasion égalem<strong>en</strong>t de relier les <strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>ts<br />

du label Silex depuis 20 ans aux projets accueillis<br />

aujourd’hui au Chantier avec André Ricros, Val<strong>en</strong>tin<br />

Clastrier, Jacques Pell<strong>en</strong> et Eric Barret, Jean-François<br />

Vrod, B<strong>en</strong>jamin Mélia et Belouga Quartet,<br />

Isabelle Bazin, Lo Còr de la Plana…<br />

Joutes musicales de printemps<br />

du 17 au 19 mai<br />

Divers lieux, Corr<strong>en</strong>s<br />

04 94 59 56 49<br />

www.lechantier.com<br />

Jean-Francois Vrod © X-D.R<br />

Le Vaisseau voyageur © X-D.R<br />

Le Monde est chez nous<br />

Organisée par la Régie Culturelle Régionale<br />

dans le cadre de l’année Capitale,<br />

<strong>en</strong> prolongem<strong>en</strong>t des précéd<strong>en</strong>tes Bi<strong>en</strong>nales<br />

autour des pratiques <strong>en</strong> amateur, la<br />

manifestation Le Monde est chez nous<br />

prés<strong>en</strong>te les 8 et 9 juin 40 spectacles gratuits,<br />

800 artistes rassemblés sur 5 scènes<br />

à Aubagne. Musiques, danses et créations<br />

rythmeront ces 2 jours de fête et de<br />

rassemblem<strong>en</strong>t pour «une République des<br />

Musiques» où se côtoi<strong>en</strong>t artistes et citoy<strong>en</strong>s<br />

passeurs de cultures du monde.<br />

La Région Paca, terre d’accueil des ces<br />

artistes issus des rives de la Méditerranée,<br />

met ainsi <strong>en</strong> valeur les «patrimoines<br />

culturels immatériels coexistant sur son<br />

territoire»et développe l’échange des savoirs.<br />

Deux grandes étapes au programme : des<br />

ateliers dédiés à la pratique et à la création,<br />

m<strong>en</strong>és toute l’année par des artistes<br />

de la région, dont un premier r<strong>en</strong>dez-vous<br />

accueilli sur le territoire <strong>en</strong> avant-première<br />

à Cuges-les Pins, le 18 mai, pour l’ouverture<br />

de TransHumance, projet phare de<br />

Scènes de bistrots<br />

BATpointG © Matthieu Wassik<br />

MP2013. Puis le public pourra découvrir<br />

<strong>en</strong> juin les cultures constituant l’id<strong>en</strong>tité<br />

de la région dans un Tour du monde des<br />

cultures de 48h : danses prov<strong>en</strong>çales et<br />

occitanes, capoeira, doudouks arméni<strong>en</strong>s<br />

et tambours africains, rap et chants comori<strong>en</strong>s,<br />

musique tsigane et voix du<br />

monde, balèti et bal sévillan, musiques et<br />

danses de Grèce, de Chine, d’Inde et des<br />

Balkans, traditions juives, soufis, berbères...<br />

Un Passo-carriero méditerrané<strong>en</strong> et<br />

afro-américain composé de 300 musici<strong>en</strong>s<br />

<strong>en</strong> déambulation ouvrira la fête tandis qu’un<br />

village associatif, esplanade Charles de<br />

Gaulle, prés<strong>en</strong>tera les actions artistiques<br />

de nombreuses associations régionales.<br />

Une fête multicolore, fédératrice et métissée<br />

pour un patrimoine et une diversité<br />

culturels partagés.<br />

DE.M.<br />

les 8 et 9 juin<br />

Divers lieux, Aubagne<br />

www.laregie-paca.com<br />

Les artistes de la région<br />

s’invit<strong>en</strong>t à vos tables de<br />

Bistrots de Pays, transformées<br />

<strong>en</strong> scènes de<br />

spectacle pour l’occasion.<br />

20 r<strong>en</strong>dez-vous musicaux,<br />

sout<strong>en</strong>us par la<br />

Région Paca et initiés par<br />

la Régie Culturelle, s’inscriv<strong>en</strong>t<br />

sur le territoire et<br />

notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> milieu<br />

rural. Le Trio Fernandez<br />

distillera son flam<strong>en</strong>co<br />

(le 17 mai à Massoins,<br />

le 18 à Caille et Aiglun),<br />

et BATpointG son hip<br />

hop musette (le 16 à La<br />

Bastidonne, le 18 à Puimichel, le 24 à<br />

Bras d’Asse et le 25 à La Tour-sur-<br />

Tinée). Quant au choro brésili<strong>en</strong> du duo<br />

Luzi-Nascim<strong>en</strong>to et la chanson traditionnelle<br />

des Balbelettes, ils assureront<br />

une tournée régionale à l’automne prochain.<br />

Liste des bistrots concernés sur<br />

www.bistrotdepays.com.<br />

du 9 au 25 mai<br />

04 42 94 92 00<br />

www.regionpaca.fr<br />

www.bistrotdepays.com<br />

57<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

M<br />

USIQUE


58<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

T<br />

HÉÂTRE<br />

Les Suppliantes<br />

© Raphael Arnaud<br />

Jean-Pierre Vinc<strong>en</strong>t réunit cinquante femmes<br />

et quelques hommes amateurs de la cité<br />

phocé<strong>en</strong>ne, passionnés de théâtre, pour faire<br />

<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre le texte d’Eschyle et révéler cette<br />

intrigue d’une évid<strong>en</strong>te clarté autour de la<br />

démocratie, du respect des femmes, de<br />

l’étranger, la viol<strong>en</strong>ce et l’hospitalité. Plus d’un<br />

an de travail pour raconter l’histoire des arrières<br />

petites-filles de la prêtresse Lo, fugitives<br />

att<strong>en</strong>dant l’asile dans la plus emblématique des<br />

cités grecques Argos.<br />

du 10 au 13 juin<br />

Théâtre du Gymnase, Marseille<br />

08 2013 2013<br />

www.lestheatres.net<br />

Tartuffe<br />

La musique de Marylin Manson rythme la<br />

reprise du Tartuffe de Molière par Laur<strong>en</strong>t<br />

Delvert. Une intrigue transposée dans une<br />

famille bobo d’aujourd’hui où Tartuffe redevi<strong>en</strong>t<br />

un homme d’église, ange démoniaque<br />

mystérieux, séduisant et repoussant. Le jeune<br />

metteur <strong>en</strong> scène rajoute à la version initiale<br />

c<strong>en</strong>surée une formidable puissance dramatique,<br />

fait tomber les masques et offre à cet Imposteur<br />

un contrepoint autour des dérives destructrices<br />

des religions.<br />

du 23 au 25 mai<br />

La Criée, Marseille<br />

04 91 54 70 54<br />

wwwtheatre-lacriee.com<br />

© Paul Delort<br />

© Brigitte Enguerand<br />

Le jeu de l’amour…<br />

Galin Stoev fait partager son attirance pour la<br />

langue labyrinthique de Marivaux et <strong>en</strong>traine<br />

la Comédie-Française dans sa prose, laissant<br />

maîtres et serviteurs se défier et se pr<strong>en</strong>dre<br />

dans les filets de la confusion amoureuse. En<br />

rapprochant l’espace de la scène et celui des<br />

coulisses, le metteur <strong>en</strong> scène bulgare faire<br />

éclater les contradictions subtiles de l’être<br />

humain et dévoile la cruauté d’un r<strong>en</strong>versem<strong>en</strong>t<br />

social éphémère.<br />

Le jeu de l’amour et du hasard<br />

du 29 mai au 1 er juin<br />

La Criée, Marseille<br />

04 91 54 70 54<br />

wwwtheatre-lacriee.com<br />

Mangeront-ils ?<br />

Laur<strong>en</strong>t Pelly met <strong>en</strong> scène la comédie <strong>en</strong> vers<br />

débridée et ins<strong>en</strong>sée de Victor Hugo. Tout<br />

juste créée au théâtre national de Toulouse<br />

(dirigé par le prolifique metteur <strong>en</strong> scène), la<br />

pièce nous plonge dans l’audace et la liberté de<br />

l’auteur, auprès de deux tourtereaux rebelles,<br />

d’une sorcière c<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire, un clochard céleste,<br />

une nature empoisonnée et des talismans. Et<br />

derrière la fable rocambolesque, Hugo parle de<br />

justice et de vérité, de la puissance des faibles<br />

et de la grandeur des petits.<br />

du 12 au 15 juin<br />

La Criée, Marseille<br />

04 91 54 70 54<br />

wwwtheatre-lacriee.com<br />

© Cordula Treml<br />

© X-D.R<br />

Oh les beaux jours<br />

Qui att<strong>en</strong>drait les Nono dans Becket ? Un<br />

théâtre à l’écriture sèche et serrée, peu<br />

primesautière, maniant plutôt l’humour du<br />

désespoir dans un monde <strong>en</strong> ruine qui ne cesse<br />

de continuer à mourir… Mais ses personnages<br />

sont aussi des clowns, et les cabarets des Nono<br />

ont montré que Serge Noyelle savait être<br />

grinçant. Sa Winnie (Marion Coutris) s’<strong>en</strong>fonce<br />

dans la terre, mais garde des couleurs aux<br />

joues, <strong>en</strong> att<strong>en</strong>dant… Godot qu’ils mont<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

novembre.<br />

du 16 mai au 8 juin<br />

Théâtre Nono, Marseille<br />

04 91 75 64 59<br />

www.theatre-nono.com<br />

Reine de beauté<br />

Au cours du Festival Mai-diterranée, la capitale<br />

europé<strong>en</strong>ne de la Culture 2013 slovaque s’invite<br />

au Toursky. Ainsi, le théâtre National de Ko ice<br />

prés<strong>en</strong>te un huis clos tragi-comique de Martin<br />

McDonagh. La comédie met <strong>en</strong> scène une mère<br />

qui refuse toute liberté à sa fille de 40 ans. Sous<br />

les échanges acerbes, la société tout <strong>en</strong>tière est<br />

démontée. Un repas slovaque à la sortie pour<br />

se remettre de ses émotions !<br />

La reine de beauté de Le<strong>en</strong>ane<br />

le 17 mai<br />

Théâtre Toursky, Marseille<br />

0 820 300 033<br />

www.toursky.org


60<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

T<br />

HÉÂTRE<br />

48 h chrono<br />

L’an dernier la première édition s’était déroulée<br />

dans une convivialité et effervesc<strong>en</strong>ce dignes<br />

<strong>en</strong>fin du bouillon de culture de la Friche, partant<br />

dans tous les s<strong>en</strong>s et ins<strong>en</strong>sé, sauf que quelque<br />

chose se trame là d’irremplaçable. Cette année<br />

rebelote, avec Thierry Bédard <strong>en</strong> maître<br />

d’œuvre qui a proposé aux artistes résid<strong>en</strong>ts de<br />

nous livrer leur vision, actuelle et future, utopiste<br />

ou réaliste, de la ville. Lui même prés<strong>en</strong>te Slums<br />

et La Planète (voir p66), et ses 48h chrono<br />

s’inscriv<strong>en</strong>t dans This is [not] Music (voir p28).<br />

Mais il y aura près d’une soixantaine de<br />

propositions <strong>en</strong> 48h, depuis une visite de la<br />

crèche <strong>en</strong> chanson ou des jardins<br />

communautaires, jusqu’à une séance d’aérobic<br />

township d’Auréli<strong>en</strong> Desclozeaux, <strong>en</strong> passant<br />

par un avant goût musical d’El Cachafaz (Alain<br />

Aubin), une scène embarquée de Radio<br />

Gr<strong>en</strong>ouille, Zinc et Ornicar, de la musique<br />

Nord et Sud…<br />

La compagnie Alzhar, sous la houlette de<br />

Jeanne Poitevin, fait partager sa lecture du<br />

texte apocryphe d’Albert Camus, Le Premier<br />

homme. Il est mis <strong>en</strong> résonnance <strong>en</strong>tre les<br />

acteurs sur scène et la vidéo qui transcrit<br />

l’évolution de cette création depuis 2010 à<br />

travers des ateliers miroirs, réalisés <strong>en</strong> PACA, <strong>en</strong><br />

Tunisie, Algérie, Espagne, Italie… 70 artistes sur<br />

des images de la mémoire méditerrané<strong>en</strong>ne.<br />

Nord et Sud dans nos histoires<br />

le 24 mai<br />

Théâtre du Golfe, La Ciotat<br />

04 42 08 92 87<br />

www.laciotat.com<br />

Balade contée<br />

Sylvie Viéville de la Compagnie Amarande<br />

vous <strong>en</strong>traîne dans une prom<strong>en</strong>ade par les<br />

s<strong>en</strong>tiers (prévoir de bonnes chaussures ! et un<br />

goûter) qu’elle peuple de contes. Les elfes<br />

s’éveill<strong>en</strong>t, lutins, farfadets, gnomes,<br />

apparaiss<strong>en</strong>t. À partir de 8 ans, r<strong>en</strong>dez-vous au<br />

domaine des Marres<br />

le 25 mai à 14h<br />

Simiane-Collongue<br />

04 42 22 62 34<br />

www.simiane-collongue.fr<br />

© B<strong>en</strong>jamin Tavaron<br />

répétitive américaine <strong>en</strong> quatuor pour s’éveiller<br />

le dimanche matin, Unframed de JR qui<br />

s’inaugure, le groupedunes qui fait visiter son<br />

installation, une prom<strong>en</strong>ade dansée d’Appaix,<br />

une visite peuplée de fantômes par l’Erac guidé<br />

par les Parnas, et du côté des intellectuels<br />

Lettre d’une inconnue<br />

Le texte bouleversant de Stefan Zweig est<br />

interprété par Sarah Biasini, dans une mise <strong>en</strong><br />

scène de Christophe Lidon. Un écrivain reçoit<br />

un jour une lettre anonyme, celle d’une femme<br />

qui vi<strong>en</strong>t de perdre son <strong>en</strong>fant et qui avant de<br />

disparaître elle-même lui déclare son<br />

inconditionnelle passion. Un texte éblouissant<br />

que Max Ophuls avait porté au cinéma <strong>en</strong> 1945.<br />

le 24 mai<br />

Espace Gérard Philipe, Port-Saint-Louis<br />

04 42 48 52 31<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

© Bonlieu sc<strong>en</strong>e nationale<br />

© F. Lot<br />

© Guy Delahaye<br />

tchacheurs Bruce Bégout et Marc Rosmini,<br />

Christian Salmon, Jean Luc Brisson… Ne<br />

ratez pas non plus les Écrans multiples, docu ou<br />

vidéo expérim<strong>en</strong>tales, fiction même, et télé. Et<br />

surtout, La République Marseille de D<strong>en</strong>is<br />

Gheerbrant proposé par Marseille Objectif<br />

danse (voir p 74). Le tout est gratuit, sauf<br />

exception rare, dans cet «espace public <strong>en</strong><br />

perpétuelle transformation» comme aime à le<br />

dire son directeur Alain Arnaudet. Mais dont<br />

on aimerait qu’il ait les moy<strong>en</strong>s de se<br />

transformer plus efficacem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> espace de<br />

production (voir p 6) ! A.F.<br />

du 17 au 19 mai<br />

La Friche, Marseille<br />

04 91 11 45 <strong>63</strong><br />

www.lafriche.org<br />

Influ<strong>en</strong>ces<br />

«Par quelles influ<strong>en</strong>ces sommes-nous traversés ?<br />

Et comm<strong>en</strong>t ces influ<strong>en</strong>ces diverses color<strong>en</strong>telles<br />

notre perception du monde et de<br />

nous-mêmes ?» Dans son spectacle interactif et<br />

théâtral, Thierry Collet utilise la magie m<strong>en</strong>tale<br />

comme un outil de questionnem<strong>en</strong>t sur notre<br />

libre arbitre. Il établit des parallèles troublants<br />

<strong>en</strong>tre ses procédés de manipulation et ceux des<br />

stratégies de marketing et de publicité… À partir<br />

de 15 ans.<br />

Les 29 et 30 mai<br />

Théâtre de Grasse<br />

04 93 40 53 00<br />

www.theatredegrasse.com<br />

Forever young<br />

Léo et sa sœur Léa reçoiv<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t<br />

de la voix de Gilles, l’ami, l’amant, disparu. Il leur<br />

demande post mortem de se livrer à un Grand<br />

Jeu par lequel ils doiv<strong>en</strong>t fonder une cellule hors<br />

du monde où leurs utopies pr<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t vie. Les<br />

grands thèmes de la vie de la lutte de la mort<br />

sont abordés à travers les textes d’Artaud,<br />

Céline, Ferré, Péguy et tant d’autres. Une révolte<br />

où la vie et la littérature se rejoign<strong>en</strong>t dans une<br />

mise <strong>en</strong> scène de Jean-François Matignon<br />

avec la compagnie Fraction.<br />

le 17 mai<br />

Le Sémaphore, Port-de-Bouc<br />

04 42 06 39 09<br />

www.theatre-semaphore-portdebouc.com


Le Mare nostrum<br />

Dans le cadre de sa résid<strong>en</strong>ce d’auteur au<br />

Conservatoire du Grand-Avignon, Jean-Yves<br />

Picq a travaillé avec les élèves de dernière<br />

année du cycle spécialisé théâtre. C’est au<br />

milieu de la Méditerranée qu’on les retrouve, sur<br />

un radeau de fortune alors qu’ils étai<strong>en</strong>t partis<br />

pour une croisière de luxe… L’occasion de<br />

r<strong>en</strong>dre hommage à la littérature maritime et à<br />

la mythologie.<br />

du 7 au 9 juin<br />

Théâtre des Halles, Avignon<br />

04 32 76 24 51<br />

www.theatredeshalles.com<br />

© X-D.R<br />

Le Dindon<br />

En résid<strong>en</strong>ce artistique à la Fabrik’Théâtre, le<br />

Théâtre du Kronope y crée Le Dindon de<br />

Georges Feydeau, dans une mise <strong>en</strong> scène de<br />

Guy Simon. En plus du délire burlesque et<br />

décalé qu’on leur connaît, le Kronope fera se<br />

confronter les codes de la Commedia dell’arte<br />

avec ceux du vaudeville… Avec cinq comédi<strong>en</strong>s<br />

pour une vingtaine de rôles !<br />

les 24 et 25 mai<br />

Fabrik’Théâtre, Avignon<br />

04 90 86 47 81<br />

fabriktheatre.fr<br />

PinKpunK CirKus<br />

Pink et punk sont deux jumeaux qui viv<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

Ardoisie, près de la Pampa. Après la disparition<br />

soudaine de leur mère, directrice d’un vieux<br />

cirque, ils décid<strong>en</strong>t de repr<strong>en</strong>dre le flambeau,<br />

avec leurs copains Ficelle, joueur de blues, et<br />

Manouche, danseuse de séguedille et<br />

fandango… Joël Jouanneau met <strong>en</strong> scène son<br />

propre texte à la langue fluide et musicale qui<br />

mêle toujours le grave au léger.<br />

le 15 mai<br />

La Passerelle, Gap<br />

04 92 52 52 52<br />

www.theatre-la-passerelle.eu<br />

© Juli<strong>en</strong> Piffaut<br />

© Frederic Iovino<br />

… À la française !<br />

Nouveau cabaret pour l’inclassable Edouard<br />

Baer, qui décide, avec sa troupe de fidèles<br />

lurons, de redorer l’image de la France, pays<br />

dev<strong>en</strong>u mal aimé. Luigi, un de ses personnages<br />

fétiches, devi<strong>en</strong>t VRP attitré d’une Semaine pour<br />

la France, et mènera sa troupe, de chansons<br />

improbables <strong>en</strong> tableaux loufoques, pour une<br />

déclaration d’amour… irrésistible ?<br />

le 16 mai<br />

Théâtre Liberté, Toulon<br />

04 98 00 56 76<br />

www.theatre-liberte.fr<br />

Retour à Argos<br />

Au mom<strong>en</strong>t où Olivier Py (voir p29) les repr<strong>en</strong>d<br />

dans la région et où Jean-Pierre Vinc<strong>en</strong>t les<br />

monte au Gymnase (voir p 56), Irène Bonnaud<br />

revisite elle aussi Les Suppliantes d’Eschyle pour<br />

<strong>en</strong> révéler l’actualité. Elle y associe une réflexion<br />

contemporaine sur «la forteresse Europe», et sa<br />

politique <strong>en</strong>vers les migrants, et met <strong>en</strong> scène<br />

ces demandeuses d’asile nées <strong>en</strong> Afrique,<br />

parties requérir l’hospitalité <strong>en</strong> Europe, pour fuir<br />

le mariage forcé qu’on leur impose <strong>en</strong> Egypte…<br />

les 24 et 25 mai<br />

Théâtre Liberté, Toulon<br />

04 98 00 56 76<br />

www.theatre-liberte.fr<br />

© Daniel Angeli<br />

© Pascal Victor<br />

Les trois Parques…<br />

Dix ans après le premier volet de sa trilogie<br />

Rêve, Evénem<strong>en</strong>t, Souv<strong>en</strong>ir, Jacques Rebotier<br />

donne une suite à son spectacle Les Ouvertures<br />

Sont. Assises dans un nulle part contemporain,<br />

derrière des masques représ<strong>en</strong>tant leurs<br />

propres visages, elles détourn<strong>en</strong>t les discours,<br />

réordonn<strong>en</strong>t le monde et coup<strong>en</strong>t net le cours<br />

des exist<strong>en</strong>ces. Furies, fées ou grâces, elles sont<br />

les réincarnations des figures mythiques<br />

féminines.<br />

Les trois Parques m’att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t dans le parking<br />

les 30 et 31 mai<br />

Théâtre Liberté, Toulon<br />

04 98 00 56 76<br />

www.theatre-liberte.fr<br />

© Victor Tonelli<br />

La locandiera<br />

Mirandolina est une femme libre... Dans son<br />

auberge les hommes de passage la séduis<strong>en</strong>t,<br />

sauf un, chevalier misogyne qui s’est juré de ne<br />

jamais donner son cœur à une femme. En<br />

cherchant à le mettre à g<strong>en</strong>ou, elle tombera<br />

dans le piège qu’elle a fom<strong>en</strong>té, victime des<br />

s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts avec lesquels elle aura<br />

imprudemm<strong>en</strong>t joué. Dominique Blanc et André<br />

Marcon font merveille dans les rôles-titres, dans<br />

une mise <strong>en</strong> scène de Marc Paqui<strong>en</strong>.<br />

les 30 et 31 mai<br />

Théâtre Liberté, Toulon<br />

04 98 00 56 76<br />

www.theatre-liberte.fr<br />

61<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

T<br />

HÉÂTRE


62<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

D<br />

ANSE<br />

E<br />

T<br />

R<br />

UE<br />

Paysages et campagnes<br />

À l’image du filet auquel se susp<strong>en</strong>dait Bill T.<br />

Jones dans l’un de ses tout premiers combats<br />

avec la pesanteur, dans les années 1980, le<br />

Festival de Marseille ressemble à un <strong>en</strong>trelacs<br />

de géographies, d’écritures, de générations<br />

artistiques. Où s’<strong>en</strong>châss<strong>en</strong>t, avec de belles<br />

lignes de force, 6 créations, 1 première <strong>en</strong> Europe,<br />

7 premières <strong>en</strong> France et 3 grandes compagnies<br />

invitées pour la première fois à Marseille... dont<br />

Bill T. Jones, justem<strong>en</strong>t ! L’<strong>en</strong>semble maillant le<br />

territoire de 9 points de r<strong>en</strong>contres, <strong>en</strong>tre nouveaux<br />

(Villa Méditerranée, Campagne Pastré,<br />

Gard<strong>en</strong>s-Cité des arts de la rue inaugurée à<br />

cette occasion…), anci<strong>en</strong>s (La Criée, le Silo, l’Alcazar-BMVR…)<br />

et retrouvailles (le BNM). Exit la<br />

salle Vallier pourtant plébiscitée par les artistes…<br />

Cette 18 e édition ne déroge pas à la règle<br />

d’un festival «passeur et rassembleur» qui capte<br />

dans sa nasse les figures prestigieuses (Ohad<br />

Naharin, Sasha Walz, Pierre Droulers, Ryoji<br />

Ikeda), les perles souv<strong>en</strong>t insaisissables (Gregory<br />

Maqoma, le plastici<strong>en</strong> suédois Christian<br />

Partos) tout <strong>en</strong> restant à l’écoute des expressions<br />

régionales (Hubert Colas et Sonia Chiambretto,<br />

Christophe Haleb, Georges Appaix,<br />

le Gmem). Enfin, à année particulière, tempo<br />

particulier : le festival comm<strong>en</strong>cera le 19 juin,<br />

profitera des chaleurs de fin d’été <strong>en</strong> compagnie<br />

Bill-T. Jones, Body Against Body © Paul B. Goode<br />

de Christophe Haleb du 29 août au 21 sept<br />

(dans le cadre du nouveau temps fort du BNM<br />

«Août <strong>en</strong> danse»), programmera une création<br />

d’Alexandros Markeas et Eli Commins<br />

portée par Piano et Cie le 5 nov, et jouera même<br />

les prolongations jusqu’au 19 déc avec le<br />

mythique Alonzo King LINES Ballet.<br />

Un programme ambitieux donc, malgré des<br />

péripéties qui mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> danger son financem<strong>en</strong>t<br />

: si la Ville de Marseille reste toujours<br />

aussi fidèle à «son Festival», si Jean-Claude Gaudin<br />

réaffirme années après années sa «fierté»<br />

de ce festival «de stature internationale», le brutal<br />

dés<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t de la Région surpr<strong>en</strong>d. Car<br />

ce festival, doté de 1.333 M d’euros par la Ville<br />

de Marseille, a vu le Conseil Régional diminuer<br />

sa participation de 40%, ram<strong>en</strong>ant celle-ci à<br />

50 000 euros. Or le festival de Marseille est un<br />

des rares programmateurs du territoire à coproduire<br />

<strong>en</strong>core des compagnies régionales, et<br />

Apolline Quintrand affirmait que malgré cette<br />

diminution les 120 000 euros affectés à ces productions<br />

n’étai<strong>en</strong>t pas touchés… grâce <strong>en</strong> partie<br />

au grand retour du Conseil Général 13, abs<strong>en</strong>t<br />

depuis 2003 du financem<strong>en</strong>t du Festival, qui<br />

remet la main à la bourse à hauteur de 50 000<br />

euros… On s<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> dans ces affectations et<br />

désaffections des alliances et froids politiques,<br />

dont il faudrait préserver le financem<strong>en</strong>t des<br />

manifestations culturelles, qui ne sont pas des<br />

outils de campagne…<br />

M.G.-G. ET A.F.<br />

Festival de Marseille<br />

du 19 juin au 12 juillet<br />

04 91 99 02 50<br />

www.festivaldemarseille.com<br />

Tous les plaisirs sont permis<br />

La Croisée des Danses ne m<strong>en</strong>t pas qui conjugue<br />

trois écritures portées par deux artistes de<br />

la scène régionale (Système Castafiore installé<br />

à Grasse et Kubilai Khan Investigations à Toulon),<br />

et la compagnie Käfig qui fit le buzz à la<br />

Bi<strong>en</strong>nale de la danse de Lyon <strong>en</strong> 2010 avec Boxe<br />

boxe. Comme Système Castafiore le fit <strong>en</strong> 2009<br />

à la Bi<strong>en</strong>nale de danse de Cannes avec Stand<br />

Alone Zone… Pas de création donc, mais le plaisir<br />

de revoir trois univers à des années lumière<br />

les uns les autres. Gants de velours et sacré<br />

dose d’humour pour Mourad Merzouki qui mixe<br />

Stand alone a Zone, Systeme Castafiore © Karl Biscuit<br />

l’art de l’esquive et du mouvem<strong>en</strong>t dans un ballet<br />

où les droites et les coups de pied s’<strong>en</strong>chaîn<strong>en</strong>t<br />

avec virtuosité, où les crochets s’étir<strong>en</strong>t dans<br />

les cordes à l’infini, où les sauts et les rebonds<br />

rythm<strong>en</strong>t les échanges. Un grand jeu de séduction<br />

<strong>en</strong>tre la boxe et le hip hop sur une musique<br />

décalée interprétée par le Quatuor Varèse…<br />

Dans Stand Alone Zone, Karl Biscuit et Marcia<br />

Barcellos orchestr<strong>en</strong>t créatures hybrides, métaphores<br />

poétiques et images de synthèse pour<br />

peindre, au fil des saynètes, un monde visuel à<br />

la lisière du réel et du fantastique. Habitué à se<br />

fondre dans l’espace public, Franck Micheletti<br />

déplace sa compagnie KKI sur le plateau tout <strong>en</strong><br />

la plongeant dans la réalité urbaine. Celle des<br />

mégalopoles dont sont issus ses danseurs :<br />

Suède, Singapour, Mozambique, Hongrie, Japon.<br />

Leur univers sonore mixé <strong>en</strong> live dédoublant,<br />

dans un puissant écho, la t<strong>en</strong>sion des corps<br />

lancés dans la folie des villes.<br />

M.G.-G.<br />

La Croisée des Danses<br />

du 18 au 25 mai<br />

La Croisée des arts, Saint-Maximin<br />

04 94 59 84 59<br />

www.var.fr<br />

Tous dehors<br />

La Scène nationale de Gap offre une fin de<br />

saison c<strong>en</strong>trée sur les arts du cirque et le<br />

théâtre de rue. Après PinKpunK Cirkus de Joël<br />

Jouanneau (15 mai), le collectif Ivan Mosjoukine,<br />

dans De nos jours (notes on the circus)<br />

déroule 80 saynètes sur le quotidi<strong>en</strong>, la vie et<br />

les s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts (18 mai, réservé aux adultes). Du<br />

21 au 29 mai, le collectif AOCmêle dans K’Boum<br />

(dès 6 ans, <strong>en</strong> exc<strong>en</strong>trés) humour, performance,<br />

hip hop, danse contemporaine, capoeira et BMX.<br />

Le relai sera passé les 30 et 31 mai au circassi<strong>en</strong><br />

danseur Yoann Bourgeois et la danseuse<br />

Marie Fonte dans l’Art de la fugue, pour un<br />

dialogue des corps <strong>en</strong> apesanteur.<br />

Du 31 mai au 2 juin, Tous dehors <strong>en</strong>fin ! distillera<br />

dans le c<strong>en</strong>tre de Gap et au col de Gleize théâtre,<br />

musique de rue, déambulation, cirque. Au<br />

programme : Urbaphonix de la cie Décor sonore,<br />

Mademoiselle de la cie Jeanne Simone, une<br />

traversée <strong>en</strong> 12 minutes de Phèdre dans Les<br />

Racines par la cie Didascalie & co, Commandos<br />

poétiques des Souffleurs et Cavale de Yoann<br />

Bourgeois avec un duo virtuose qui relativise<br />

avec l’attraction terrestre.DE.M.<br />

Théâtre la Passerelle, Gap<br />

04 92 52 52 52<br />

www.theatre-la-passerelle.eu


Ouverture 22<br />

Comme à son habitude le Ballet National de<br />

Marseille ouvre ses portes pour accueillir deux<br />

créations très différ<strong>en</strong>tes, qu’il coproduit <strong>en</strong> ses<br />

murs : Trikonanga est un solo de danse<br />

indi<strong>en</strong>ne interprété par Hemabharathy Palani,<br />

qui transforme la danse codifiée kuchipudi <strong>en</strong><br />

abstraction sur les triangles du corps… Emio<br />

Greco et Pieter C.Scholt<strong>en</strong> repr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la<br />

pièce pour 12 danseurs qu’ils avai<strong>en</strong>t créée <strong>en</strong><br />

octobre pour le Ballet : Double Points :<br />

Extremalism, qui sait à la fois être athlétique et<br />

ondulante, brutale et s<strong>en</strong>suelle…<br />

du 23 au 25 mai<br />

Studio du BNM, Marseille<br />

04 91 327 327<br />

www.ballet-de-marseille.com<br />

À bas bruit<br />

Le circassi<strong>en</strong> Mathurin Bolze poursuit sa<br />

quête artistique autour de la place de l’homme<br />

face à des situations de risque et de solitude. Il<br />

met <strong>en</strong> scène trois artistes (Mitia Fedot<strong>en</strong>ko,<br />

Elise Legros et Cyrille Musy) qui contribu<strong>en</strong>t à<br />

créer le spectacle à partir de récits de<br />

marcheurs, de films, et notamm<strong>en</strong>t celui du<br />

ciné-ethnologue Jean Rouch, Jaguar. Les<br />

acrobaties -roue de hamster à taille humaine,<br />

tapis roulant- figur<strong>en</strong>t toutes les marches,<br />

immobiles, sautillantes ou disloquées, ode à la<br />

prom<strong>en</strong>ade voire à l’errance…<br />

les 24 et 25 mai<br />

Les Salins, Martigues<br />

04 42 49 02 00<br />

www.theatre-des-salins.fr<br />

Extremalism © Agnès Mellon<br />

Nubes<br />

Tous les nuages sont-ils des brebis ? Inspirée de<br />

l’univers de Magritte, la compagnie de danse<br />

madrilène Aracaladanza invite le public (dès 4<br />

ans) à <strong>en</strong>trer dans un monde imaginaire où les<br />

tableaux du peintre devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t support au rêve<br />

et à l’émerveillem<strong>en</strong>t. La créativité débordante<br />

du chorégraphe Enrique Cabrera allie fantaisie,<br />

imagination et magie.<br />

le 29 mai<br />

Théâtre des Salins, Martigues<br />

04 42 49 02 00<br />

www.theatre-des-salins.fr<br />

© Eduardo Garcia Gonzalez<br />

Vinática<br />

Consacrée meilleure interprète par le Prix<br />

national de la danse <strong>en</strong> Espagne à 26 ans,<br />

reconnue pour son audace, sa transgression et<br />

sa souplesse, Rocío Molina prés<strong>en</strong>te sa<br />

sixième création qui porte le titre de celle qui ne<br />

met pas d’eau dans son vin. Dans un décor<br />

inspiré de Brueghel, la danseuse dessine son<br />

flam<strong>en</strong>co transgressif et auth<strong>en</strong>tique,<br />

accompagnée de trois musici<strong>en</strong>s, d’un chi<strong>en</strong> et<br />

de restes d’<strong>en</strong>fance.<br />

le 15 juin<br />

Théâtre de l’Olivier, Istres<br />

0810 006 826<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

© Jean Barak<br />

Aquatique © X-D.R<br />

Gr<strong>en</strong>ade les 20 ans<br />

20 ans après la création du groupe Gr<strong>en</strong>ade, la<br />

chorégraphe Josette Baïz retrace un panorama<br />

éclectique de la danse contemporaine. Un<br />

spectacle rassemblant des extraits du répertoire<br />

de chorégraphes emblématiques : Jérôme Bel,<br />

Philippe Découflé, Michel Kelem<strong>en</strong>is, Angelin<br />

Preljocaj… réinterprété par des danseurs, petits<br />

et grands, d’origines et de cultures différ<strong>en</strong>tes.<br />

le 31 mai<br />

Théâtre de Fos<br />

0810 006 826<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

Danse le Monde !<br />

Le festival Danse le monde ! <strong>en</strong>traine le public<br />

sur le thème de l’Asie, précisém<strong>en</strong>t <strong>en</strong> direction<br />

de la Chine et l’Inde. Un voyage au cœur des<br />

racines de l’écriture chorégraphique avec deux<br />

créations de la compagnie San Tuo Qi :<br />

Aquatique (6 juin) et Dieu Tonnerre (le 7).<br />

Natyarambh<strong>en</strong> de la Cie Natya clôturera la 4 e<br />

édition, le 8 juin, pour une démonstration des<br />

prouesses techniques et rythmiques de la danse<br />

indi<strong>en</strong>ne, dans le respect du répertoire<br />

traditionnel.<br />

du 6 au 8 juin<br />

Théâtre Golovine, Avignon<br />

04 90 86 01 27<br />

www.theatre-golovine.com<br />

<strong>63</strong><br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

D<br />

ANSE<br />

© Christophe Raynaud De Lage<br />

© Felix Vazquez<br />

Tes jambes nues<br />

Immergée tout au long de la saison au cœur du<br />

village de Noves, part<strong>en</strong>aire de la Scène<br />

nationale dans ses tournées Nomade(s), la<br />

chorégraphe Julie Desprairies emmène ses<br />

interprètes, professionnels et amateurs, dans<br />

une danse agricole, emprunte d’universel et<br />

porteuse d’un imaginaire poétique.<br />

le 7 juin<br />

<strong>en</strong> Nomade(s) au Théâtre de Verdure, Noves<br />

Théâtre de Cavaillon<br />

04 90 78 64 64<br />

www.theatredecavaillon.com


64<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

D<br />

ANSE<br />

Contes tordus<br />

Sur une musique d’Alexandre Meyer, Julie<br />

Nioche et Christophe Huysman ont conçu et<br />

interprèt<strong>en</strong>t ce spectacle où la danse et<br />

l’<strong>en</strong>fance se rejoign<strong>en</strong>t (à partir de 14 ans).<br />

Balles multicolores, drôles de skis, équilibres<br />

improbables, leurs permett<strong>en</strong>t d’évoquer la<br />

précarité inhér<strong>en</strong>te à la vie. Le jeu et l’illusoire<br />

pour atteindre une certaine réalité…<br />

le 18 mai<br />

Théâtre d’Arles<br />

04 90 52 51 55<br />

www.theatre-arles.com<br />

Demain, je n’ai plus...<br />

Anci<strong>en</strong> du collectif AOC, Sylvain Decure se<br />

lance dans la création d’un spectacle solo. Le<br />

chall<strong>en</strong>ge est de taille. Enfermé dans une boîte<br />

vitrée de 60 cm de large sur 2m20 de haut avec<br />

un tas d’objets du quotidi<strong>en</strong>, ce personnage<br />

atypique t<strong>en</strong>te de répondre à sa manière aux<br />

problèmes de l’isolem<strong>en</strong>t du corps et de l’esprit.<br />

Une performance physique unique aussi<br />

burlesque que dramatique.<br />

Demain je n’ai plus ri<strong>en</strong><br />

le 18 mai<br />

Théâtre d’Arles<br />

04 90 52 51 51<br />

www.theatre-arles.com<br />

© Celie Vald<strong>en</strong>aire © Christophe Raynaud de Lage<br />

La Curva<br />

Vinc<strong>en</strong>te Escudero se produisait <strong>en</strong> 1924 dans<br />

un petit théâtre parisi<strong>en</strong> du même nom. À partir<br />

de ce mot, Israel Galvan compose une<br />

chorégraphie superbe, rythmée par le piano jazz<br />

très contemporain de Sylvie Courvoisier, la voix<br />

flam<strong>en</strong>ca d’Inés Bacán, les palmas de Bobote.<br />

Israel Galvan danse, infléchissant les courbes<br />

de l’espace pour créer un univers de t<strong>en</strong>sions<br />

et de courbes. Magnifique !<br />

les 24 et 25 mai<br />

Châteauvallon, Ollioules<br />

04 94 22 02 02<br />

www.chateauvallon.com<br />

À louer<br />

La compagnie belge Peeping Tom, familière du<br />

pavillon Noir qui a programmé tous ses<br />

spectacles, revi<strong>en</strong>t avec les mêmes danseurs,<br />

chanteurs, comédi<strong>en</strong>s. Ils se retrouv<strong>en</strong>t dans un<br />

château hanté où domine l’incertitude, où les<br />

codes spatiaux temporels se perd<strong>en</strong>t. La<br />

virtuosité de la danse et la mise <strong>en</strong> scène<br />

théâtralis<strong>en</strong>t un univers fantasmagorique,<br />

scénographiquem<strong>en</strong>t superbe.<br />

les 15 et 16 mai<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

04 42 26 83 98<br />

www.preljocaj.org<br />

Atonkoun<br />

Serge Somé, originaire du pays Dagara<br />

<strong>en</strong>seigne la danse traditionnelle et afro<br />

contemporaine à l’École de Danse<br />

Internationale Irène Tassembedo et <strong>en</strong> Europe.<br />

Dans Atonkoun, il évoque le thème des<br />

cérémonies funéraires, au son des balafons,<br />

quand les proches vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pleurer le défunt, lui<br />

port<strong>en</strong>t des offrandes. S’inscrivant <strong>en</strong>tre<br />

tradition et modernité, cette chorégraphie joue<br />

sur la plastique et l’énergie.<br />

le 19 juin<br />

Pavillon Noir, Aix<br />

04 42 26 83 98<br />

www.preljocaj.org<br />

Le Sacre © JC Carbonne<br />

© Felix Vazquez<br />

© Julie Verlind<strong>en</strong><br />

Sacre et Royaume<br />

Deux pièces d’Angelin Preljocaj, pour le<br />

bonheur des spectateurs du GTP. Le Sacre du<br />

Printemps, charnel, puissant, met <strong>en</strong> scène la<br />

danse cruelle du désir ; le Ballet Preljocaj<br />

interprète avec fougue cette œuvre maîtresse<br />

qui revisite sans le dévoyer l’argum<strong>en</strong>t de<br />

Stravinski. Royaume Uni créé pour quatre<br />

danseuses hip hop à Suresne, voit la r<strong>en</strong>contre<br />

de deux esthétiques, et parie que la danse<br />

contemporaine peut introduire du féminin dans<br />

le hip hop. Les énergies se mêl<strong>en</strong>t, créant un<br />

g<strong>en</strong>re nouveau.<br />

Sacre du Printemps/ Royaume Uni<br />

du 23 au 25 mai<br />

Grand Théâtre de Prov<strong>en</strong>ce, Aix<br />

04 42 91 69 69<br />

www.grandtheatre.fr<br />

Rêv’illusion<br />

Première mondiale au Bois de l’Aune pour cette<br />

création de Taoufiq Izeddiou qui poursuit ainsi<br />

son compagnonnage avec la salle. Cette<br />

chorégraphie veut bousculer les codes,<br />

évoquant ainsi les bouleversem<strong>en</strong>ts qui ont eu<br />

lieu de l’autre côté de la Méditerranée. Une<br />

saine insol<strong>en</strong>ce pour se libérer de la c<strong>en</strong>sure et<br />

de l’<strong>en</strong>fermem<strong>en</strong>t. L’artiste rev<strong>en</strong>dique la folie<br />

pour ses danseurs de la Compagnie Anania.<br />

«Laissez-moi danser le rire !».<br />

Les 7 et 8 juin<br />

Bois de l’Aune, Aix<br />

04 42 93 85 40<br />

www.agglo-paysdaix.fr


66<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

J<br />

EUNE<br />

P<br />

UBLIC<br />

Festival François Cervantes<br />

Il est un résid<strong>en</strong>t assidu un familier des scènes<br />

de la Friche depuis 2004 mais c’est la première<br />

fois que François Cervantes se produira à La<br />

Criée. Ce passionné travaille depuis 20 ans sur<br />

la figure du clown, <strong>en</strong> particulier avec la grande<br />

comédi<strong>en</strong>ne qu’est Catherine Germain-<br />

Arletti. Le Festival qui lui est consacré est<br />

l’occasion de montrer à de nouveaux<br />

spectateurs les multiples facettes du clown<br />

théâtral, individu aussi mystérieux<br />

qu’extravagant. Un mom<strong>en</strong>t composé de quatre<br />

spectacles et d’une r<strong>en</strong>contre-échanges, La<br />

Petite histoire du clown, illustrée avec l’équipe<br />

de la cie L’<strong>en</strong>treprise.<br />

La curiosité des anges met <strong>en</strong> scène la<br />

naissance de deux clowns, Zig et Arletti. Deux<br />

êtres à part et si purs qu’ils n’ont besoin que<br />

très peu de mots pour aller à la r<strong>en</strong>contre de<br />

l’autre. Arletti se retrouvera seule dans le 6 e jour.<br />

Elle qui n’est pas sûre d’être homme, femme…<br />

veut désormais compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t<br />

l’av<strong>en</strong>ture humaine a comm<strong>en</strong>cé à travers les<br />

multiples épisodes de la G<strong>en</strong>èse. Dans Le<br />

concert, Arletti r<strong>en</strong>contre Philippe, un musici<strong>en</strong><br />

pour qui elle se passionne mais qui a une toute<br />

autre conception de la musique, et de l’amour.<br />

Carnages est une fête collective où les clowns<br />

H<strong>en</strong>riette & Matisse<br />

Aussi subtil qu’ingénieux, le chorégraphe<br />

Michel Kelem<strong>en</strong>is fait découvrir au jeune<br />

public l’univers coloré du peintre H<strong>en</strong>ri<br />

Matisse accompagné de l’une de ses muses<br />

préférées, Mademoiselle H<strong>en</strong>riette. Il offre une<br />

mise <strong>en</strong> scène ludique et pétillante sur l’acte de<br />

création savamm<strong>en</strong>t orchestrée par quatre<br />

personnages : l’artiste, le modèle, le pinceau du<br />

trait et celui de la couleur. À partir de 5 ans.<br />

les 14 et 15 mai<br />

Salle Aristide Briand, Saint-Chamond<br />

04 77 31 04 41<br />

www.saint-chamond.fr<br />

© Daniela Nieri<br />

© Agnes Mellon<br />

investiss<strong>en</strong>t les hauts lieux du théâtre et de la<br />

littérature à partir du répertoire des célèbres<br />

clowns du XX e siècle, comme les frères<br />

Fratellini.<br />

Un voyage à suivre étape par étape, pour qu’une<br />

relation unique se crée avec ces personnages<br />

émouvants qui décal<strong>en</strong>t le réel pour ouvrir un<br />

espace onirique. À partir de 11 ans.<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

La curiosité des anges<br />

le 4 juin<br />

Le 6 ème jour<br />

le 6 juin<br />

La Petite histoire du clown<br />

le 7 juin<br />

Carnages<br />

les 6 et 7 juin<br />

Le concert<br />

Le 7 juin<br />

La criée, Marseille<br />

04 91 54 70 54<br />

www.theatre-lacriee.com<br />

Western<br />

Le Sixieme jour © Christophe Raynaud de Lage<br />

Terres<br />

L’un est grand et plutôt terre à terre, l’autre est<br />

petit et naïf. Mais c’est <strong>en</strong>semble qu’ils<br />

s’appropri<strong>en</strong>t une parcelle de terrain. Tout<br />

bascule lorsqu’une jeune femme sans attache<br />

s’invite dans leur propriété et qu’un homme<br />

décrète qu’il a hérité du bi<strong>en</strong>. Une fable<br />

émouvante et philosophique : revisitant le «ceci<br />

est à moi» de Rousseau, Elise Martin traite<br />

avec légèreté des origines de la propriété et de<br />

la socialité. À partir de 9 ans.<br />

Le 15 mai<br />

Théâtre La Colonne, Miramas<br />

04 90 58 37 86<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

le 25 mai<br />

Théâtre de Nîmes<br />

04 66 36 65 10<br />

www.theatred<strong>en</strong>imes.com<br />

«Le western… nous a offert toute une galerie de<br />

héros simples et humains dans lesquels nous<br />

reconnaître». Conteur et acteur d’exception,<br />

Massimo Schuster est un marionnettiste qui<br />

transforme la pacotille <strong>en</strong> rêves éveillés. Grâce<br />

à la dynamique «cinématographique» du théâtre<br />

de papier, il fait voyager petits et grands au plein<br />

cœur du Far West à travers les av<strong>en</strong>tures du<br />

jeune cow-boy Tom, qui n’est autre que… luimême<br />

? À partir de 8 ans.<br />

le 18 mai<br />

Théâtre des Salins, Martigues<br />

04 42 49 02 00<br />

www.theatre-des-salins.fr<br />

La Planète…<br />

Johanna Mariama Bah ou Mame Fama Ly<br />

donn<strong>en</strong>t un autre regard sur le monde. Avec un<br />

globe terrestre gonflable, pour observer et<br />

p<strong>en</strong>ser le monde à l’<strong>en</strong>vers, la confér<strong>en</strong>ce<br />

sci<strong>en</strong>tifique et pédagogique reste ludique. La<br />

planétologue détourne la vision des <strong>en</strong>fants et<br />

des adolesc<strong>en</strong>ts, comme de leurs par<strong>en</strong>ts.<br />

La Planète (ou comm<strong>en</strong>t se représ<strong>en</strong>ter le monde ?)<br />

les 18 et 19 mai<br />

Théâtre Massalia, Marseille<br />

04 95 04 95 70<br />

www.theatremassalia.com


Le Schpountz<br />

Mildiou…<br />

© X-D.R<br />

Ali Baba…<br />

Métilde Weyergans et Samuel Hercule revisit<strong>en</strong>t<br />

le conte des Mille et une Nuits <strong>en</strong> le plongeant<br />

dans un burlesque proche du film muet. Cassim<br />

et Ali Baba sont gérants de station-service, chevauch<strong>en</strong>t<br />

des Harley Davidson et combl<strong>en</strong>t leurs<br />

soirées vides de westerns télévisés. Dès 8 ans.<br />

Ali Baba et les 40 voleurs<br />

le 7 juin<br />

La Croisée des Arts, Saint-Maximin<br />

04 94 59 84 59<br />

www.var.fr<br />

68<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

J<br />

EUNE<br />

P<br />

UBLIC<br />

Pour clore son Cycle la Comp. Marius livre une<br />

version sobre mais généreuse de la pièce de<br />

Pagnol, la r<strong>en</strong>dant universelle de son acc<strong>en</strong>t<br />

belge… L’œuvre célèbre la simplicité du peuple<br />

et des villages, au travers de ce personnage<br />

désordonné aux habits rapiécés, né sur le<br />

tournage du film Angèle. Comme à son<br />

habitude la troupe délaisse les théâtres<br />

préférant jouer dans les paysages naturels où<br />

Pagnol aimait tourner.<br />

du 6 au 9 juin<br />

Domaine de Lavalduc, Istres<br />

0810 006 826<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

Une belle, une bête<br />

C’est <strong>en</strong> ombres et lumières que Flor<strong>en</strong>ce<br />

Lavaud rapporte son interprétation du célèbre<br />

conte de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont.<br />

Les vidéos projetées et les sons guid<strong>en</strong>t plus<br />

<strong>en</strong>core que la voix. Un mélange de mystère,<br />

effroi et fascination pour retracer l’histoire de<br />

ces deux êtres que tout oppose. Dès 9 ans.<br />

le 29 mai<br />

Théâtre de l’Olivier, Istres<br />

0810 006 826<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

Le Schpountz, Marcel Pagnol © Christian Loubradou<br />

Ainé, second ou dernier, quelle place t<strong>en</strong>ir dans<br />

la famille, dans la fratrie ? Ce conte fantastique<br />

écrit par Gérard Potier parle de la préfér<strong>en</strong>ce<br />

familiale comme de la quête d’égalité. Un<br />

voyage imaginaire à partager <strong>en</strong> famille, que<br />

propose la compagnie Le Bazar Mythique,<br />

accompagné par l’accordéon de Maryse Roux.<br />

Dès 7 ans.<br />

Mildiou, l’<strong>en</strong>fant du champ de patates<br />

le 24 mai<br />

Espace Robert Hossein, Grans<br />

0810 006 826<br />

www.sc<strong>en</strong>esetcines.fr<br />

Léon le nul<br />

Un plongeon au cœur d’une vie, celle de Léon.<br />

Cette fable sociétale et réaliste parle de famille<br />

sans patriarche, d’une mère un peu trop<br />

débordée, et d’un <strong>en</strong>fant à l’imagination<br />

débordante qui veut grandir. La compagnie<br />

Visavies rapporte ses peurs mais aussi ses<br />

amours, au travers de sons et vidéos pour un<br />

spectacle à mi-chemin <strong>en</strong>tre théâtre et dessin<br />

animé. Dès 11 ans.<br />

le 31 mai<br />

La Croisée des Arts, Saint-Maximin<br />

04 94 59 84 59<br />

www.var.fr<br />

© Francois Saint Remy<br />

© Michel Jacquelin<br />

© Laur<strong>en</strong>t Combe<br />

We dance to forget<br />

De Michael Jackson aux Velvet Underground<br />

<strong>en</strong> passant par U2, les danseurs de l’équipe<br />

belge des fABULEUS invit<strong>en</strong>t le spectateur à<br />

cette joyeuse «party» rythmées par les musiques<br />

pop et <strong>en</strong>diablées de ces dernières<br />

déc<strong>en</strong>nies. Ce couple déjanté déborde d’énergie<br />

qu’il communique avec force et optimisme<br />

dans des chorégraphies survoltées. Att<strong>en</strong>tion :<br />

bonne humeur contagieuse à l’horizon.<br />

le 31 mai<br />

PôlejeunePublic, Le Revest<br />

04 94 98 12 10<br />

www.polejeunepublic.com<br />

L’Art Tang<strong>en</strong>t…<br />

L’Art Tang<strong>en</strong>t désigne d’après ses concepteurs<br />

toutes ces œuvres ou p<strong>en</strong>sées qui, par leurs trajectoires<br />

aléatoires, se trouv<strong>en</strong>t proches de l’art<br />

contemporain. S’inspirant d’artistes comme<br />

Marcel Duchampet Pierre Dac, Odile Darbelleyet<br />

Michel Jacquelincré<strong>en</strong>t une performance<br />

à la fois plastique et théâtrale à travers des<br />

r<strong>en</strong>dez-vous nomades et ludiques.<br />

L’Art Tang<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Valise et Party T<br />

Du 24 au 30 mai<br />

Le 24 mai, Bibliothèque de Peynier<br />

Le 25 mai, Bibliothèque des 2 Ormes, Aix<br />

Le 26 mai, Jardins d’Albertas dans le cadre de la<br />

journée des jardins, Bouc-Bel-Air<br />

Le 27 mai, C<strong>en</strong>tre social des Amandiers, Aix<br />

Le 28 mai, Bois de L’Aune, Aix<br />

04 42 93 85 40<br />

www.agglo-paysdaix.fr


70<br />

C<br />

I<br />

N<br />

É<br />

M<br />

A<br />

Une trop longue nuit<br />

Sorti au niveau national le 30<br />

janvier, malgré une critique favorable,<br />

le souti<strong>en</strong> de la ligue des<br />

droits de l’homme, l’appui de<br />

Lilian Thuram et de Christiane<br />

Taubira, Công Binh de Lam Lê<br />

n’a trouvé de salle ni à Marseille<br />

ni à Aix pour éclairer cette «longue<br />

nuit indochinoise» (sous-titre du<br />

film) et dissiper une amnésie<br />

historique mâtinée de culpabilité.<br />

C’est pourtant à Marseille<br />

au camp de Mazargues qu’une<br />

partie de ce drame colonial s’est<br />

déroulé. C’est pourtant au cimetière<br />

St Pierre que M. Than,<br />

nonagénaire de l’Estaque <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t<br />

le carré des Indochinois<br />

oubliés. Le Chambord sollicité<br />

par la région qui a aidé à la production<br />

du film, a mis fin à cette<br />

aberration le 4 avril pour une<br />

séance, hélas, unique. Les Công<br />

Cong Binh, la longue nuit indochinoise de Lam Le<br />

Binh (littéralem<strong>en</strong>t ouvrierssoldats)<br />

étai<strong>en</strong>t 20 000 jeunes<br />

vietnami<strong>en</strong>s. Enrôlés de force <strong>en</strong><br />

1937 pour aller sout<strong>en</strong>ir l’(a)mère<br />

patrie qu’ils p<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>t invincible,<br />

bloqués <strong>en</strong> France par la défaite<br />

de 40, parias corvéables à merci<br />

p<strong>en</strong>dant près de dix ans, ils fur<strong>en</strong>t<br />

14 000 à rev<strong>en</strong>ir chez eux, repris<br />

dans la tourm<strong>en</strong>te de la guerre<br />

d’Indochine, injustem<strong>en</strong>t considérés<br />

comme des traîtres. Le<br />

réalisateur donne la parole aux<br />

quelques survivants. Ils racont<strong>en</strong>t<br />

avec dignité, humour parfois, sans<br />

haine, sans plainte, l’arrachem<strong>en</strong>t<br />

aux familles, le voyage<br />

étouffant dans les cales, l’arrivée<br />

à Marseille, le transfert aux Baumettes,<br />

les camps, les poudrières<br />

qui brûl<strong>en</strong>t les poumons, le sel<br />

des Salins de Giraud qui ronge la<br />

peau, le froid, la faim, la soif, la<br />

culture du riz <strong>en</strong> Camargue dont<br />

ils fur<strong>en</strong>t pionniers, la prise de<br />

consci<strong>en</strong>ce progressive de leur<br />

condition, la politisation des camps,<br />

les affrontem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>tre trotskistes<br />

et communistes, les faux-espoirs<br />

de la Libération, le mal du<br />

pays, la v<strong>en</strong>ue d’Oncle Hô <strong>en</strong> 46.<br />

Puis, le retour, l’opprobre, le<br />

soupçon, la torture pour certains.<br />

Ils dis<strong>en</strong>t la honte, le sil<strong>en</strong>ce, la<br />

surdité de la France pour reconnaître<br />

leurs droits. Le réalisateur<br />

les accouche peu à peu de ce<br />

passé douloureux, suit la chronologie,<br />

intercale leurs propos<br />

d’images d’archives, met <strong>en</strong><br />

scène leurs petits-<strong>en</strong>fants <strong>en</strong><br />

quête de réhabilitation, convoque<br />

le discours d’Aimé Césaire<br />

dont la petite-fille d’un de ces<br />

malgré-eux lit des extraits. L’interv<strong>en</strong>tion<br />

des Marionnettes sur<br />

l’eau de Hanoï qui, tel un chœur<br />

antique comm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t le destin<br />

des Công Binh du point de vue<br />

de ceux qui les att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t, rythm<strong>en</strong>t<br />

le docum<strong>en</strong>taire, les<br />

intégrant déjà, par l’intermédiaire<br />

d’un art ancestral, à la mémoire<br />

collective. On songe aux «dépatriés<br />

expatriés» de Prévert ces<br />

«étranges étrangers» auxquels<br />

on a r<strong>en</strong>voyé leurs «petits couteaux<br />

dans le dos» et on sort de<br />

la salle indignés de n’<strong>en</strong> avoir<br />

ri<strong>en</strong> su.<br />

ELISE PADOVANI<br />

Công Binh, la longue nuit<br />

indochinoise,<br />

film de Lam Lê<br />

Le Cinéma s’expose (mal) à la Buzine<br />

Des caméras uniques <strong>en</strong> leur g<strong>en</strong>re <strong>en</strong>tassées<br />

dans une salle-couloir, des affiches les unes sur<br />

les autres, du matériel précieux <strong>en</strong> hauteur grâce<br />

à des cartons ornés de tissus colorés… Le tout<br />

ressemble davantage à une brocante qu’à une<br />

exposition, au grand dam de François et Hervé<br />

Loubeau, organisateurs du Cinéma s’expose, qui<br />

déplor<strong>en</strong>t leurs conditions d’accueil au Château de<br />

la Buzine. L’adjointe au maire déléguée au cinéma,<br />

Éliane Zayan, ne cache pas sa colère. Originellem<strong>en</strong>t<br />

prévue dans la grande salle du rez-de-chaussée,<br />

<strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t rénovée et vide de surcroit, la collection<br />

cinématographique des frères Loubeau a été<br />

délogée, arbitrairem<strong>en</strong>t semble-t-il, au dernier<br />

étage du Château. Une «salle multimédia» peu<br />

apte à recevoir expositions et visiteurs. La v<strong>en</strong>ue<br />

des scolaires et les projections de films et docum<strong>en</strong>taires<br />

sur l’inv<strong>en</strong>tion du cinéma prévues sont<br />

donc compromises, au grand regret de la directrice<br />

de l’établissem<strong>en</strong>t Christine Fillette, instauratrice<br />

de cet évènem<strong>en</strong>t exceptionnel à la Buzine. Parce<br />

qu’<strong>en</strong> effet, «le cinéma s’expose» n’<strong>en</strong> est pas à<br />

son coup d’essai. L’association qui déti<strong>en</strong>t une<br />

imm<strong>en</strong>se collection de plus de 8 000 appareils et<br />

80 000 titres, a déjà effectué près de 400 expositions<br />

<strong>en</strong> France. De ville <strong>en</strong> ville, l’exposition cumule<br />

les visiteurs et les succès puisque comme le dit<br />

François Loubeau «le cinéma intéresse tout le<br />

monde, je n’ai jamais r<strong>en</strong>contré une personne qui<br />

n’aime pas ça !».<br />

Malgré tout, le public pourra apercevoir la caméra<br />

utilisée lors du tournage du film Les tontons flingueurs,<br />

celle de Charlie Chaplin ou <strong>en</strong>core l’une<br />

des premières télévisions au monde : le phénakistiscope,<br />

mise au point <strong>en</strong> 1832 par le Belge Joseph<br />

Plateau. Lanternes magiques, zootropes, lampascopes,<br />

praxinoscopes… et autres appareils sont<br />

ainsi réunis pour un voyage historique vers le temps<br />

des pionniers. Somme toute, une exposition passionnante<br />

et de qualité, à voir… dans un autre lieu,<br />

qui lui octroiera l’espace et l’ampleur mérités ?<br />

MANON MATHIEU<br />

jusqu’au 30 juin<br />

Château de la Buzine, Marseille<br />

04 91 45 27 60<br />

www.labuzine.com<br />

Drôles<br />

de dames<br />

Le 10 avril, au Prado à Marseille,<br />

était prés<strong>en</strong>té <strong>en</strong><br />

avant-première, Cheba Louisa,<br />

le premier long métrage de<br />

Françoise Charpiat, un film<br />

qu’elle a co-écrit avec Mariem<br />

Habidat et qu’a produit Anne<br />

Derré. Un film de femmes<br />

donc, d’autant qu’il raconte,<br />

<strong>en</strong>tre autre, l’amitié qui se<br />

noue <strong>en</strong>tre deux femmes que<br />

tout semble opposer au départ<br />

et qui se r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t par<br />

hasard. Emma (Isabelle Carré),<br />

une rousse extravertie et<br />

aux t<strong>en</strong>ues exc<strong>en</strong>triques qui<br />

élève seule ses deux <strong>en</strong>fants,<br />

pour éviter une saisie d’huissier,<br />

force presque la porte de<br />

Djemila (Rachida Brakni), issue<br />

de l’immigration, juriste et<br />

(trop ?) intégrée qui vi<strong>en</strong>t de<br />

pr<strong>en</strong>dre un appartem<strong>en</strong>t pour<br />

essayer d’échapper à sa mère<br />

(Biyouna) qui veut tout décider<br />

pour elle.<br />

Quand Djemila découvre dans<br />

une valise que lui donne discrètem<strong>en</strong>t<br />

son père, ce qu’on<br />

lui a tu jusque là ; les disques<br />

de sa grand-mère, Cheba<br />

Louisa, une star du chaâbi, des<br />

films <strong>en</strong> super-8 où on la voit<br />

danser dans les cabarets, c’est<br />

le début de sa prise de consci<strong>en</strong>ce.<br />

Elle comm<strong>en</strong>ce à<br />

assumer l’héritage familial, ce<br />

qui va lui permettre de se<br />

libérer.<br />

On sort de ce film qui parle du<br />

poids des racines et de la<br />

famille, de préjugés et de tabous<br />

mais aussi de solidarité,<br />

d’ouverture à l’autre, d’amitié<br />

et de liberté, ragaillardi, avec<br />

l’<strong>en</strong>vie de chanter rai et chaâbi.<br />

Une bouffée d’oxygène qu’on<br />

doit à la superbe interprétation<br />

et à l’énergie des comédi<strong>en</strong>nes<br />

ainsi qu’à la musique de<br />

Rachid Taha.<br />

ANNIE GAVA<br />

Sortie <strong>en</strong> salles le 8 mai<br />

Rachida Brakni, Biyouna et Francoise Charpiat © A.G.


72<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

C<br />

INÉMA<br />

Rêver révolte…<br />

Découvrir les portraits cinématographiques d’une<br />

jeunesse prise <strong>en</strong>tre rêves et réalité, parfois <strong>en</strong><br />

perte de repères mais toujours <strong>en</strong> quête d’un av<strong>en</strong>ir<br />

meilleur, c’est ce que propose nouv.o.monde<br />

de Rousset, à travers 12 longs métrages et 11 films<br />

courts de jeunes cinéastes ou de réalisateurs<br />

confirmés. Après Indignation/Révolution <strong>en</strong> 2012,<br />

ce festival qui a pour objectif d’éclairer les mouvem<strong>en</strong>ts<br />

du monde, se focalise cette année sur les<br />

Jeunesses de Rêves et de Révoltes.<br />

On y découvrira des films inédits comme La jeunesse<br />

a-t-elle une histoire ? de Jacques Royer,<br />

Electrick Childr<strong>en</strong> de l’Américaine Rebecca Thomas,<br />

la révélation du dernier festival de Sundance,<br />

La Guerra del Maiale de David Maria Putortì<br />

adapté du roman d’Adolfo Bioy Casares ou The<br />

Comedian de Tom Shkolnik. En avant-première,<br />

Eat, Sleep, die de la Suédoise Gabriela Pichler,<br />

Grand Prix du Jury au Festival Premiers Plans<br />

d’Angers, nous fera suivre Raisa, une jeune immigrante<br />

d’Europe de l’Est dev<strong>en</strong>ue<br />

ouvrière <strong>en</strong> Suède, qui se<br />

retrouve lic<strong>en</strong>ciée malgré sa<br />

rigueur et son dévouem<strong>en</strong>t<br />

professionnels. Son interprète<br />

principale, Nermina Lukac, une<br />

institutrice dont c’est le premier<br />

rôle, a obt<strong>en</strong>u le prix «Shooting<br />

stars» à la <strong>63</strong> e Berlinale. On pourra<br />

partager aussi les soucis de<br />

trois jeunes au Maroc dans Mort<br />

à v<strong>en</strong>dre de Faouzi B<strong>en</strong>saïdi<br />

(voir Zib’57), suivre les av<strong>en</strong>tures<br />

de deux amis tr<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aires dans<br />

Mobile Home de François Pirot.<br />

Quant à Guerrière de David<br />

Wn<strong>en</strong>d, une plongée dans l’univers<br />

néo-nazi actuel, c’est le<br />

film coup de poing du festival,<br />

multi primé aux German Awards<br />

2012.<br />

Une séance de 6 courts, tous primés dans des<br />

festivals internationaux, mettra aussi l’acc<strong>en</strong>t sur<br />

«La jeunesse», avec les excell<strong>en</strong>ts Brûleurs de<br />

Farid B<strong>en</strong>toumi et Froz<strong>en</strong> Stories de Grzegorz<br />

Jaroszuk ainsi que La fugue de Jean- Bernard<br />

Marlin, sout<strong>en</strong>u par la Région et Ours d’Or du<br />

court-métrage à la Berlinale 2013.<br />

Les projections sont accompagnées de r<strong>en</strong>contres,<br />

d’une exposition autour de l’affiche de film et pour<br />

la 1 e fois une séance aura lieu hors les murs le 28<br />

mai, au cinéma Le Casino à Trets : Wadjda de<br />

Haifaa Al Mansour.<br />

ANNIE GAVA<br />

Eat, Sleep, die de Gabriela Pichler<br />

nouv.o.monde<br />

du 30 mai au 2 juin<br />

Salle Émili<strong>en</strong> V<strong>en</strong>tre, Rousset<br />

04 42 53 36 39<br />

www.filmsdelta.com/nouvomonde.html<br />

Un tour <strong>en</strong> Méditerranée<br />

Du 17 au 22 juin, se ti<strong>en</strong>dra la 17 e édition du PRI-<br />

MED (Prix international du docum<strong>en</strong>taire et du<br />

reportage méditerrané<strong>en</strong>), organisé par le CMCA<br />

(C<strong>en</strong>tre Méditerrané<strong>en</strong> de la Communication<br />

Audiovisuelle), un r<strong>en</strong>dez-vous important qui propose<br />

au public une sélection de docum<strong>en</strong>taires et<br />

de reportages liés à la Méditerranée. Ainsi, parmi<br />

les 440 films reçus, on pourra voir gratuitem<strong>en</strong>t au<br />

MuCEM et à la Villa Méditerranée, 31 films v<strong>en</strong>us<br />

de 36 pays et répartis dans différ<strong>en</strong>tes sections :<br />

«Enjeux méditerrané<strong>en</strong>s, Mémoire de la Méditerranée,<br />

Art, patrimoine et cultures de la Méditerranée,<br />

Première œuvre, Reportage, Court méditerrané<strong>en</strong><br />

et prix multimédia de la Méditerranée.»<br />

Italy love it or leave it<br />

Parmi les thèmes abordés, la condition des femmes,<br />

(Dance of outlaws ; Ich liebe dich) des jeunes<br />

(We are here) ou des <strong>en</strong>fants (Living skin), la résistance<br />

(Five brok<strong>en</strong> cameras ; Italy : love it or leave<br />

it ; Maudit soit le phosphate), la mémoire de luttes<br />

ou de la guerre (In utero Srebr<strong>en</strong>ica ; Troufions),<br />

ou d’exils (Tinghir Jerusalem, les échos du Mellah),<br />

les conséqu<strong>en</strong>ces de l’arrivée du progrès (Le<br />

Thé ou l’électricité) ou de la pollution (Méditerranée,<br />

une soupe de plastique).<br />

Le 21 juin à 17h au MuCEM, les jurys présidés par<br />

Hala Zureiqat et Samah Soula remettront les prix<br />

aux réalisateurs dont vous pourrez voir les docum<strong>en</strong>taires<br />

et reportages le 22 juin, au MuCEM de<br />

12h à 19h et à la Villa méditerranée de 18h30 à<br />

22h30. Et comme les années précéd<strong>en</strong>tes, durant<br />

2 mois, l’Alcazar offrira les visionnem<strong>en</strong>ts à la<br />

demande.<br />

ANNIE GAVA<br />

CMCA<br />

04 91 42 03 02<br />

http://primed.tv/le-cmca<br />

Comme chaque<br />

ce que les autres<br />

Tapis rou<br />

Trois films sout<strong>en</strong>us par la<br />

Région PACA avec une <strong>en</strong>veloppe<br />

de 150 000 € à 200 000 €<br />

chacun seront prés<strong>en</strong>tés à<br />

Cannes cette année. Deux font<br />

partie de la sélection officielle<br />

Un certain regard : Grand<br />

C<strong>en</strong>tral de Rebecca Zlotowski,<br />

avec Tahar Rahim et Léa<br />

Seydoux, et L’inconnu du lac<br />

d’Alain Guiraudie, film gay<br />

audacieux qui n’aurait pu se<br />

faire sans l’appui de la Région.<br />

Le troisième ouvrira la<br />

Semaine de la Critique : Suzanne,<br />

de Katell Quillévéré,<br />

histoire d’amour avec dans le<br />

rôle principal Sara Forestier,<br />

sur la p<strong>en</strong>te savonneuse de la<br />

délinquance.<br />

Les interv<strong>en</strong>tions de la collec-<br />

Quatorze<br />

Depuis plusieurs années, la<br />

Quinzaine des Réalisateurs,<br />

manifestation née après Mai<br />

68 au Festival de Cannes pour<br />

protester contre l’éviction<br />

d’H<strong>en</strong>ri Langlois de la Cinémathèque<br />

Française, propose<br />

des reprises à Paris, Marseille,<br />

Bruxelles et G<strong>en</strong>ève...<br />

Ainsi, du 28 mai au 4 juin,<br />

l’Alhambra Cinémarseille<br />

accueille 14 longs métrages<br />

sur les 21 que comporte la<br />

sélection.<br />

Cinq films français : H<strong>en</strong>ri, la<br />

r<strong>en</strong>contre de deux êtres <strong>en</strong><br />

marge, prés<strong>en</strong>té <strong>en</strong> ouverture<br />

le 28 à 20h30, <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce<br />

du délégué général Edouard<br />

Waintrop et de la réalisatrice<br />

Yolande Moreau. Tip top de<br />

Serge Bozon où deux femmes<br />

de l’IGPN <strong>en</strong>quêt<strong>en</strong>t sur<br />

la mort d’un indic. Les<br />

Apaches, premier long de<br />

Thierry de Peretti qui nous<br />

emmène à Porto Vecchio et,<br />

<strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce du réalisateur le<br />

31 à 20h30, La fille du 14<br />

juillet, premier long d’Antonin<br />

Peretjatko qui nous fait<br />

parcourir les routes estivales<br />

d’une France <strong>en</strong> crise. Une<br />

comédie, Les Garçons et


année <strong>Zibeline</strong> annonce de Cannes<br />

ne diront pas…<br />

ge et lunettes noires<br />

tivité <strong>en</strong> faveur de l’audiovisuel ne se limit<strong>en</strong>t<br />

pas à ce souti<strong>en</strong> financier. Pour que<br />

ces 10 jours soi<strong>en</strong>t une occasion d’explorer<br />

un patrimoine autant que de découvrir des<br />

nouveautés, un part<strong>en</strong>ariat a été noué avec<br />

le Festival dans le cadre de l’opération<br />

«Cinéma de la Plage» : classiques, avantpremières<br />

et grands succès populaires<br />

seront projetés gratuitem<strong>en</strong>t tous les soirs.<br />

Cette année comme les précéd<strong>en</strong>tes, ce<br />

sont égalem<strong>en</strong>t près de 20 000 élèves qui<br />

ont bénéficié du dispositif «lycé<strong>en</strong>s et appr<strong>en</strong>tis<br />

au cinéma», visant à «promouvoir<br />

auprès des plus jeunes une culture cinématographique<br />

qui les conduira à dev<strong>en</strong>ir<br />

des spectateurs curieux, exigeants et<br />

critiques» <strong>en</strong> leur donnant accès à des<br />

œuvres de qualité. 500 d’<strong>en</strong>tre eux iront à<br />

Cannes assister à une multitude de séances…<br />

et à une montée des marches à<br />

grand r<strong>en</strong>fort de paillettes.<br />

à la Quinzaine !<br />

H<strong>en</strong>ri de Yolande Moreau<br />

Guillaume à table ! de Guillaume Galli<strong>en</strong>ne<br />

adapté de son spectacle théâtral.<br />

Trois films américains : Blue Ruin de<br />

Jeremy Saulnier, l’histoire d’un vagabond<br />

solitaire qui, après une terrible nouvelle, se<br />

met <strong>en</strong> route pour la maison de son <strong>en</strong>fance<br />

afin d’accomplir sa v<strong>en</strong>geance. Le<br />

Congrès, mi-film réaliste, mi-dessin<br />

animé fantastique d’Ari Folman, adapté<br />

d’un roman culte de Stanislaw Lem et<br />

Jodorowsky’s Dune, un docum<strong>en</strong>taire de<br />

Franck Pavich sur les coulisses d’un projet<br />

avorté, l’adaptation du roman de sci<strong>en</strong>cefiction<br />

Dune par le Chili<strong>en</strong> Alejandro<br />

Jodorowsky dans les années 1970. Ce film<br />

P<strong>en</strong>dant la durée du Festival, la Région<br />

occupera un stand avec une programmation<br />

spécifique : on notera la remise du prix<br />

Med in Sc<strong>en</strong>ario le 18, la prés<strong>en</strong>tation du<br />

Manifeste pour une exploitation cinématographique<br />

indép<strong>en</strong>dante par le Groupem<strong>en</strong>t<br />

National des Cinémas de Recherche le 20,<br />

et une réunion d’information sur les<br />

nouvelles conditions de tournage dans les<br />

Calanques le 21.<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

Festival de Cannes<br />

du 15 au 26 mai 2013<br />

www.festival-cannes.com<br />

sera prés<strong>en</strong>té le 1 er juin à 14h avant La<br />

danse de la réalité, adapté de l’autobiographie<br />

d’Alejandro Jodorowsky qui n’avait<br />

plus réalisé de film depuis 1990. V<strong>en</strong>u<br />

aussi du Chili, L’été des poissons volants,<br />

premier film de Marcela Said, qui nous fait<br />

partager les vacances d’une adolesc<strong>en</strong>te<br />

dans la riche maison familiale, alors que<br />

la m<strong>en</strong>ace de la guérilla gronde. Dans Ugly<br />

d’Anurag Kashyap, une fillette de dix ans<br />

dont les par<strong>en</strong>ts sont divorcés a disparu et<br />

c’est le périple de deux adolesc<strong>en</strong>ts dans le<br />

monde du vol de cuivre que l’on suit dans<br />

Le géant égoïste de Clio Barnard. Tout<br />

juste sorti de prison, Sombra se dit que,<br />

vraim<strong>en</strong>t, il aurait peut-être mieux fait de<br />

rester à l’ombre dans Après la nuit de<br />

Basil da Cunha ; quant à Saul, il découvre<br />

à Haïfa, un père transformé, un monde<br />

réinv<strong>en</strong>té et, peut-être, l’espoir d’une vie<br />

nouvelle dans A Strange Course of Ev<strong>en</strong>ts<br />

de Raphaël Nadjari.<br />

Ce sont les deux tiers de la sélection de la<br />

Quinzaine que nous permet de voir cette<br />

année l’Alhambra et tous les cinéphiles<br />

s’<strong>en</strong> réjouiss<strong>en</strong>t !<br />

A.G.<br />

Alhambra Cinémarseille<br />

04 91 03 84 66<br />

www.alhambracine.com<br />

Visions<br />

Sociales<br />

Parrainée par le réalisateur Costa-Gavras<br />

et organisée par la CCAS 1 <strong>en</strong> marge du<br />

Festival de Cannes, la 11 e édition de Visions<br />

Sociales, un «cinéma pour éveiller<br />

nos consci<strong>en</strong>ces», aura lieu du 18 au 26<br />

mai. Une manifestation <strong>en</strong> accès libre qui<br />

s’attache à montrer un cinéma d’auteur<br />

questionnant l’ordre social et l’état du<br />

monde avec une mise <strong>en</strong> avant cette année<br />

du cinéma indép<strong>en</strong>dant américain (les<br />

Bêtes du sud sauvage de B<strong>en</strong>h Zeitlin,<br />

Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow, There<br />

will be blood de Paul-Thomas Anderson,<br />

The Que<strong>en</strong> of Versailles de Laur<strong>en</strong> Gre<strong>en</strong>field,<br />

A little Closer de Matthew Petock).<br />

Un focus sur le cinéma des femmes, actrices<br />

ou réalisatrices, sera égalem<strong>en</strong>t proposé :<br />

Violeta d’Andrés Wood (<strong>en</strong> ouverture le 18<br />

mai à 21h), Blancanieves de Pablo Berger,<br />

Wadjda de Haifaa Al-Mansour, Djeca, Enfants<br />

de Sarajevo d’Aida Begic, Les<br />

Invisibles de Sébasti<strong>en</strong> Lifshitz…).<br />

16 longs métrages, des courts, une exposition,<br />

des r<strong>en</strong>contres Métiers du cinéma<br />

(le 21 mai à 18h avec Jean-Baptiste Thoret),<br />

des débats (avec Costa-Gavras le 25 mai à<br />

15h à l’issue de la projection de son film Le<br />

Capital ; Gérard Mordillat le 18 mai à 15h<br />

pour Le grand retournem<strong>en</strong>t) et 7 films<br />

inédits des part<strong>en</strong>aires de la manifestation<br />

(ACID, Semaine de la Critique, Quinzaine<br />

des Réalisateurs, Cinéfondation : Un certain<br />

Regard, Festival de Cannes Sélection<br />

officielle).<br />

Soirée de clôture le 25 mai à partir de 21h<br />

(5 € <strong>en</strong> faveur d’une association).<br />

DE.M.<br />

Visions Sociales<br />

du 18 au 26 mai<br />

Château des Mineurs, Domaine d’Agecroft<br />

Mandelieu-La Napoule, Cannes<br />

www.ccas-visions-sociales.org<br />

1<br />

Caisse C<strong>en</strong>trale d’Activités Sociales<br />

de l’énergie<br />

Violeta de Andres Wood<br />

73<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

C<br />

INÉMA


74<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

C<br />

INÉMA<br />

Escales <strong>en</strong> plein air<br />

Certains l’aim<strong>en</strong>t chaud de Billy Wilder<br />

Écrans voyageurs, qui a accueilli sept<br />

cinéastes depuis le mois de février dans<br />

différ<strong>en</strong>tes salles du territoire, continue <strong>en</strong><br />

plein air, proposant huit grands mom<strong>en</strong>ts de<br />

l’histoire du cinéma sur des sites particuliers.<br />

Ainsi le 24 mai, au bord de l’Étang de<br />

l’Olivier à Istres, <strong>en</strong> ouverture du Festin de<br />

Méditerranée (voir p. 25) ce sera Certains<br />

l’aim<strong>en</strong>t chaud de Billy Wilder.<br />

L’escale suivante sera au bord de l’Huveaune,<br />

le 15 juin à Roquevaire avec La mort aux<br />

trousses d’Hitchcock, projection qui clôturera<br />

un tournoi de joutes sur l’Huveaune,<br />

remise <strong>en</strong> eaux pour l’occasion. Les spectateurs<br />

sont invités à v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> famille, pour<br />

profiter du site et pique-niquer sur place.<br />

04 91 91 07 99<br />

http://ecransvoyageurs.blogspot.fr<br />

La République<br />

Marseille<br />

Le 17 mai de 23h à 5h sur le toit-terrasse de<br />

La Friche, projection de sept films du cinéaste<br />

voyageur D<strong>en</strong>is Gheerbrant, qui nous<br />

emmèn<strong>en</strong>t dans «sept univers qui compos<strong>en</strong>t<br />

une ville comme une république, celle<br />

des dockers, des militants ouvriers, des<br />

femmes d’une cité jardin ou des habitants<br />

d’une énorme cité ghetto et, dans ses replis,<br />

à la r<strong>en</strong>contre de tout un peuple, anci<strong>en</strong><br />

junkie, boxeur, ou toutes jeunes filles devant<br />

la vie.» Film produit par Les Films d’Ici et<br />

Les Films du Tambour de Soie.<br />

Marseille objectif DansE<br />

04 95 04 96 42<br />

www.marseille-objectif-danse.org<br />

Les Femmes de la cite Saint-Louis de D<strong>en</strong>is Gheerbrant<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////<br />

Frontières<br />

dedans/dehors<br />

Du 13 au 30 juin à la Friche, Lieux Fictifs<br />

propose un dialogue <strong>en</strong>tre l’art, la prison et<br />

la société, développé de 2009 à 2013, avec le<br />

souti<strong>en</strong> de MP 2013. Deux projets de créations<br />

partagées <strong>en</strong>tre artistes, personnes<br />

dét<strong>en</strong>ues (ceux du dedans), et personnes<br />

libres (ceux du dehors) sont ainsi prés<strong>en</strong>tés :<br />

Dans la solitude des champs de coton de<br />

Bernard-Marie Koltès, une installation cinématographique<br />

de 120 mn interprétée par<br />

27 dét<strong>en</strong>us des Baumettes et habitants de<br />

Marseille, réalisée par Caroline Caccavale et<br />

Joseph Césarini et coproduite par la Cie<br />

Alzhar. Images <strong>en</strong> mémoire, images <strong>en</strong> miroir,<br />

une exposition vidéographique de courts<br />

métrages réalisés <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat avec l’INA<br />

à partir d’images d’archives dans le cadre<br />

d’ateliers participatifs composés de personnes<br />

dét<strong>en</strong>ues et de groupes extérieurs, <strong>en</strong><br />

France, <strong>en</strong> Europe et <strong>en</strong> Méditerranée.<br />

04 95 04 96 37<br />

www.lieuxfictifs.org<br />

Prado made in China<br />

La troisième édition du Festival du Cinéma<br />

Chinois <strong>en</strong> France se ti<strong>en</strong>dra du 13 mai au<br />

12 juin, à Paris, Lyon, Marseille, Cannes,<br />

Strasbourg, Biarritz et La Réunion.<br />

À Marseille, du 4 au 7 juin, c’est le cinéma Le<br />

Prado qui accueille 10 films inédits <strong>en</strong> France.<br />

Trois comédies : Love in the Buffde Ho Cheung,<br />

Prix du Public au Festival d’Osaka 2013 ;<br />

Perdus <strong>en</strong> Thaïlande de Xu Zh<strong>en</strong>g (le plus<br />

gros succès commercial de tous les temps<br />

<strong>en</strong> Chine !) ; et Full Circle de Zhang Yang,<br />

prés<strong>en</strong>té <strong>en</strong> ouverture le 4 juin à 20h.<br />

Un «fantasy action film», Painted Skin 2 de<br />

Wu Ershan avec Zhao Wei (invitée d’honneur<br />

de cette édition) dont sera prés<strong>en</strong>té le 1 er<br />

film, So Young.<br />

Deux drames : Caught in the Web, le dernier<br />

film de Ch<strong>en</strong> Kaige qui avait réalisé Adieu<br />

ma concubine et 1942 de F<strong>en</strong>g Xiaogang,<br />

«meilleur film chinois» aux 32e Hong-Kong<br />

Film Awards.<br />

Un biopic qui raconte le destin tragique de<br />

Xiao Hong, très proche du grand écrivain Lu<br />

Xun, Falling Flowers de Huo Jianqi.<br />

Deux films d’action : La porte du dragonde Tsui<br />

Hark et The Bullet Vanishes d’Er Dongsh<strong>en</strong>g<br />

F<strong>en</strong>g Shuide Wang Jingnous permettra de voir<br />

l’actrice Yan Bingyan, invitée de cette édition.<br />

Le Prado, Marseille<br />

www.cinema-leprado.fr<br />

Caught in the Web de Ch<strong>en</strong> Kaige<br />

//////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////<br />

Ciné-concerts<br />

Du 15 au 17 mai à 20h, à l’Auditorium du Thor,<br />

festival de ciné-concerts. Le 15, Métropolis<br />

de Fritz Lang (1927, version intégrale restaurée<br />

2011), accompagné par Actuel Remix,<br />

groupe électro de l’Arfi, qui mixe les musiques<br />

de Richie Hawtin et l’œuvre de Iannis<br />

X<strong>en</strong>akis. Le 16, L’homme à la camérade Dziga<br />

Vertov et la musique d’Archipass. Pour finir<br />

le 17, avec le souti<strong>en</strong> de l’association des<br />

amis de Georges Méliès, 16 parmi les 520<br />

films de ce pionnier du cinéma, sur une musique<br />

originale composée et interprétée par<br />

l’arrière petite-fille de Méliès, Marie-Hélène<br />

Lehérissey, avec Lawr<strong>en</strong>ce Lehérissey : de<br />

La T<strong>en</strong>tation de Saint Antoine (1898) à La Fée<br />

Carabosse (1906).<br />

04 90 33 96 80<br />

www.artsvivants<strong>en</strong>vaucluse.fr<br />

Force scandaleuse<br />

du passé<br />

Mama Roma de Pier Paolo Pasolini<br />

En coproduction avec Marseille-Prov<strong>en</strong>ce<br />

2013, le FIDMarseille, Alphabetville, l’INA et<br />

le cipM célèbr<strong>en</strong>t du 14 mai au 29 juin l’œuvre<br />

de Pier Paolo Pasolini, poète, romancier,<br />

dramaturge, essayiste, polémiste, chroniqueur,<br />

cinéaste et peintre : 23 films, des<br />

expositions thématiques, des lectures, des<br />

confér<strong>en</strong>ces, performances et vidéos d’archive<br />

seront proposés dans différ<strong>en</strong>ts lieux<br />

de Marseille.<br />

Au CRDP, du 16 au 25 mai, 8 films dont<br />

Mama Roma, Le Décameron, Accatone… À<br />

partir du 28 mai, au cinéma Le Miroir, à la<br />

Vieille Charité, les films de Pasolini dont<br />

Médée, Œdipe roi et une programmation de<br />

docum<strong>en</strong>taires INA sur cet auteur-réalisateur.<br />

On pourra voir aussi des films au MuCEM,<br />

à la Villa Méditerranée et à la Friche La Belle<br />

de Mai. De plus, le FIDMarseille repr<strong>en</strong>dra<br />

l’intégrale du 2 au 8 juillet.<br />

www.mp2013.fr


76<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RT<br />

E<br />

T<br />

P<br />

ATRIMOINE<br />

Moebius et l’Odyssée<br />

Pour les 30 ans des FRAC, trois<br />

régions, Languedoc-Roussillon,<br />

Bretagne et PACA, se sont unies<br />

autour des Ulysses. Le Pont du<br />

Gard, <strong>en</strong> Languedoc-Roussillon,<br />

accueille deux créateurs, Sophie<br />

Dejode et Bertrand Lacombe.<br />

Ils s’intéress<strong>en</strong>t à la figure d’Ulysse<br />

à travers l’œuvre fondatrice d’Homère<br />

et son écho dans le roman<br />

de Joyce. Qui donne l’articulation<br />

de l’exposition avec les deux<br />

figures de Bloom et Dedalus, inextricablem<strong>en</strong>t<br />

imbriquées par un<br />

ruban de Moebius : une boucle<br />

infinie qui conduit du voyage au<br />

repli, r<strong>en</strong>dant indissociables qualités<br />

et défauts, et effaçant leurs<br />

limites. En maths on parle de surface<br />

non-ori<strong>en</strong>table, dans l’épopée<br />

homérique d’un retour qui éloigne<br />

: une construction de bois<br />

habillée de diverses couleurs <strong>en</strong><br />

utilise le schéma, constituant<br />

dans ses boucles 18 petites salles<br />

L’idée est née d’un trio complice :<br />

Véronique Legrand, directrice de<br />

l’abbaye de Montmajour, Isabelle<br />

Reiher du C<strong>en</strong>tre International de<br />

Recherche sur le Verre et les Arts<br />

Plastiques (CIRVA) et Christian<br />

Lacroix, arlési<strong>en</strong> de naissance.<br />

Des souv<strong>en</strong>irs d’<strong>en</strong>fance, d’anci<strong>en</strong>nes<br />

collaborations ou <strong>en</strong>core<br />

cette inclination commune pour<br />

l’art contemporain leur ont permis<br />

d’initier ce projet inédit. «Suite à<br />

la baisse de fréqu<strong>en</strong>tation du public,<br />

cette exposition est l’occasion<br />

d’habiller ces lieux vides au XXI e<br />

siècle sans les dénaturer !» nous<br />

confie Véronique Legrand. L’anci<strong>en</strong>ne<br />

administratrice du château<br />

de Tarascon gardait <strong>en</strong> elle depuis<br />

longtemps cette <strong>en</strong>vie de collaborer<br />

avec le CIRVA (la sélection<br />

prés<strong>en</strong>tée ici vaut à elle seule la<br />

visite !) et sa r<strong>en</strong>contre avec Lacroix<br />

lui a permis de concrétiser<br />

ses souhaits.<br />

Cette abbaye construite sur des<br />

marécages, inscrite au patrimoine<br />

mondial de l’Unesco, est pour Christian<br />

Lacroix «l’île» sur laquelle il<br />

s’amusait à chercher des trésors<br />

disparus. Comme le lég<strong>en</strong>daire collier<br />

de la reine Marie-Antoinette<br />

caché par le cardinal de Rohan,<br />

anci<strong>en</strong> prieur de l’abbaye ! Des<br />

trésors que l’on retrouve à travers<br />

Beautiful Steps #4 de Lang_Baumann, bois et peinture, 2009 © C. Lorin_<strong>Zibeline</strong><br />

ou plutôt alvéoles dans lesquelles<br />

sont exposées des œuvres qui<br />

rappell<strong>en</strong>t les thèmes mythologiques<br />

homériques ou les organes<br />

du corps humain, ceux qui tiss<strong>en</strong>t<br />

une trame dans le roman de<br />

Joyce.<br />

Les œuvres sont pour la plupart<br />

issues des collections des FRAC,<br />

d’autres ont été créées spécialem<strong>en</strong>t<br />

dans le cadre de ce projet,<br />

par les deux artistes. Ils ont même<br />

dupliqué, ont remanié certaines<br />

œuvres pour les besoins de l’exposition.<br />

Le ruban autour duquel<br />

ont été érigés des points d’observation<br />

qui permett<strong>en</strong>t une vue<br />

<strong>en</strong> hauteur, a été construit sur<br />

place, un chantier de 5 semaines<br />

confie Hervé Hubidos, directeur<br />

culture et médiation du Pont du<br />

Gard. «Ce n’est pas une exposition<br />

conceptuelle, tout le monde peut<br />

y trouver quelque chose. Les installations<br />

assez ludiques plais<strong>en</strong>t<br />

les broderies d’or et d’arg<strong>en</strong>t des<br />

chasubles exposés dans la sacristie<br />

<strong>en</strong> écho avec d’autres, plus<br />

Ulysse Pirate, Pont du Gard © Beaux Arts<br />

aux <strong>en</strong>fants.» Et <strong>en</strong> effet, <strong>en</strong>tre<br />

le chat de Troie, le cerveau à vapeur,<br />

le lapin étrange, la sirène<br />

<strong>en</strong> baskets jaunes, l’imaginaire<br />

jubile. Dehors, le bateau d’un<br />

Ulysse-pirate nous att<strong>en</strong>d, le<br />

Holy Glory. Un art contemporain<br />

qui, s’il n’oublie pas ses racines,<br />

sait aussi trouver ses propres<br />

voies. Est-ce le roman de Joyce,<br />

l’épopée d’Homère ou la majesté<br />

inébranlable de l’aqueduc romain<br />

Lacroix, mes trésors cachés<br />

contemporains mais tout aussi<br />

somptueux, comme ces costumes<br />

créés par le styliste pour le chœur<br />

qui leur a inspiré cette foison de<br />

détails, indép<strong>en</strong>dants et fondus<br />

dans la structure ?<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

Ulysse Pirate<br />

jusqu’au 31 octobre<br />

Pont du Gard<br />

04 66 37 50 99<br />

www.pontdugard.fr<br />

Lire égalem<strong>en</strong>t p.25<br />

de femmes d’Aïda à l’Opéra de<br />

Cologne flottant sous une arcade<br />

rocheuse de la crypte.<br />

Dans le cœur de la tour de Mons<br />

Majoris (la plus haute colline), on<br />

découvre avant d’atteindre la vue<br />

spectaculaire sur Arles et ses<br />

plaines, le Cortège <strong>en</strong>dormi de<br />

Jean-Michel Othoniel dont les<br />

croix de verres soufflés sont sublimées<br />

par la couleur sablée de<br />

la pierre du donjon du XIV e . Le<br />

parcours est semé d’union insolite<br />

<strong>en</strong>tre le verre, la peinture, le<br />

bois, le tissu ou même le bronze…<br />

et la pierre de l’abbaye,<br />

comme avec cet escalier monum<strong>en</strong>tal<br />

<strong>en</strong> lévitation de Lang/<br />

Baumann dans la croisée du<br />

transept, les tableaux de Bernard<br />

Quesniaux, les œuvres Erik Dietman<br />

ou Pierre Charpin : la volonté<br />

de Christian Lacroix était de<br />

«montrer Montmajour sous un jour<br />

inatt<strong>en</strong>du et auth<strong>en</strong>tique», et la<br />

r<strong>en</strong>contre <strong>en</strong>tre patrimoine et art<br />

contemporain a lieu.<br />

ANNE-LYSE RENAUT<br />

Mon île de Montmajour<br />

jusqu’au 3 novembre<br />

Abbaye de Montmajour, Arles<br />

04 90 54 64 17<br />

montmajour.monum<strong>en</strong>ts-nationaux.fr


78<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RTS<br />

V<br />

ISUELS<br />

Le corps<br />

du nuage<br />

Pour sa dernière exposition au sein<br />

du musée Réattu, Michèle Moutashar<br />

explique ses choix et sa démarche<br />

singulière de commissaire.<br />

Plus proche d’un corps à corps<br />

avec les œuvres que<br />

de l’int<strong>en</strong>tion démonstrative<br />

L'oeuvre de Jaume Pl<strong>en</strong>sa <strong>en</strong> cours d'installation- Nuage IV, 2012, acier, 180x122x196cm © C. Lorin_<strong>Zibeline</strong><br />

<strong>Zibeline</strong> : Quelle a été la g<strong>en</strong>èse de ce projet ?<br />

Michèle Moutashar : Cela vi<strong>en</strong>t de loin. D’un premier<br />

étonnem<strong>en</strong>t avec Le Corrège à Parme, plus<br />

tard d’une réflexion de Arp à propos de la concrétisation<br />

des nuages, <strong>en</strong>suite de la r<strong>en</strong>contre avec<br />

Hubert Damisch qui part lui aussi du Corrège pour<br />

son livre sur la théorie du nuage.<br />

Pourquoi le nuage a-t-il soulevé un tel intérêt ?<br />

Il est différ<strong>en</strong>t pour le moine taôiste, le berger mali<strong>en</strong><br />

<strong>en</strong> att<strong>en</strong>te de la pluie, le peintre occid<strong>en</strong>tal, mais le<br />

nuage touche à l’anthropologie, à la vie quotidi<strong>en</strong>ne,<br />

la sci<strong>en</strong>ce, l’histoire de l’art. Mais pour toucher<br />

au nuage si vous restez dans le ciel vous êtes foutu !<br />

Bi<strong>en</strong> des g<strong>en</strong>s ont essayé de faire une typologie de<br />

cet insaisissable mais ça ne marche pas, on ne<br />

peut les dépeindre complètem<strong>en</strong>t. En Asie le nuage<br />

exprime l’énergie vitale. Une des pièces fondam<strong>en</strong>tales<br />

au début de l’exposition est une pierre<br />

de lettré chinoise façonnée dans les torr<strong>en</strong>ts qui<br />

<strong>en</strong> a gardé l’énergie dans ses formes et sert de<br />

support de méditation. Arp a montré comm<strong>en</strong>t le<br />

nuage s’incarne, peut être à portée de main, à<br />

portée de hanche, à portée de corps. Le nuage est<br />

au-delà des notions d’abstraction et de figuration,<br />

totalem<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>suel pour ne pas dire sexuel.<br />

Dans cet esprit comm<strong>en</strong>t avez-vous conçu cette<br />

exposition ?<br />

Pour moi il y a deux manières de faire des expositions.<br />

La première, la plus fréqu<strong>en</strong>te : vous avez<br />

une théorie et vous allez chercher des œuvres qui<br />

confirm<strong>en</strong>t votre théorie. C’est la meilleure façon<br />

d’empêcher le spectateur d’<strong>en</strong>trer <strong>en</strong> contact avec<br />

l’œuvre d’art. Pour moi une œuvre d’art est un<br />

corps vivant qui parle, le minimum est de pouvoir<br />

lui donner la possibilité de s’exprimer. L’autre façon<br />

d’exposer est de faire comme les pêcheurs<br />

méditerrané<strong>en</strong>s à la palangrotte. Vous avez une<br />

sorte de ligne que vous lancez, moi ma ligne c’était<br />

Arp et une certaine empathie avec le sujet, les<br />

émotions produites par Le Corrège. J’ai constitué<br />

un corpus d’œuvres qui sont des<br />

bombes d’énergie, qui exprim<strong>en</strong>t<br />

tout : la notion de métamorphose,<br />

de flux continu, d’incarnation.<br />

Tout <strong>en</strong> constituant cela, j’avais<br />

<strong>en</strong> tête ce bâtim<strong>en</strong>t, son paysage<br />

: la quantité d’eau qui tourne<br />

sous ses f<strong>en</strong>êtres, le mistral qu’il<br />

se pr<strong>en</strong>d <strong>en</strong> pleine figure, la lumière<br />

qui est excessive. Réattu<br />

y a fait son atelier. Sa chambre<br />

des nuages. C’est comme ça que<br />

les Chinois désign<strong>en</strong>t l’<strong>en</strong>droit<br />

où ils réfléchiss<strong>en</strong>t.<br />

L’exposition <strong>en</strong>tière est un nuage<br />

moulé par le bâtim<strong>en</strong>t. Nous<br />

sommes dans une partition organique<br />

où le visiteur <strong>en</strong> est la<br />

clef. C’est lui qui combine tous<br />

les élém<strong>en</strong>ts d’une façon mouvante.<br />

Nous nous éloignons de la part<br />

conceptuelle…<br />

En mettant le visiteur comme<br />

acteur physique et m<strong>en</strong>tal vous<br />

dépassez les clivages d’érudition.<br />

La fréqu<strong>en</strong>tation d’une exposition<br />

ne peut pas être uniquem<strong>en</strong>t<br />

intellectuelle. Regardez les tasses<br />

à café de Bailly-Maître-Grand,<br />

il n’y a pas plus trivial et plus<br />

exist<strong>en</strong>tiel.<br />

PROPOS RECUEILLIS PAR CLAUDE LORIN<br />

Nuage<br />

jusqu’au 31 octobre<br />

Musée Réattu, Arles<br />

04 90 49 37 58<br />

www.museereattu.arles.fr<br />

Électrons libres<br />

Peu d’élus et peu de pièces, De<br />

main <strong>en</strong> main resserre son propos<br />

sur la sculpture du XX e siècle<br />

dans le Sud autour de 9 artistes<br />

et 33 œuvres. Un choix réalisé par<br />

Jean-Roch Bouiller, conservateur,<br />

chargé de l’art contemporain<br />

au MuCEM, pour dire sa conviction<br />

: «C’est une histoire d’artistes<br />

charismatiques qui ont laissé<br />

des empreintes profondes chez<br />

ceux qui les ont r<strong>en</strong>contrés», et<br />

son interrogation : «Dessin<strong>en</strong>t-ils,<br />

bout à bout, les contours d’une<br />

géographie artistique propre à la<br />

sculpture ?» Constitu<strong>en</strong>t-ils un<br />

foyer artistique, ri<strong>en</strong> n’est moins sûr.<br />

Mais des filiations apparaiss<strong>en</strong>t,<br />

des préoccupations communes,<br />

des admirations partagées. Plus<br />

<strong>en</strong>core, une indép<strong>en</strong>dance d’esprit.<br />

Richard Baquié traça sa route<br />

<strong>en</strong> solitaire, comme Judith Bartolani<br />

(superbe sélection de 3<br />

Fourmi-lion, 1993, 25 x 87 cm, grains de verre fondus sur des grains de sable CIRVA (Marseille)<br />

© Richard Monnier (Galerie Arlogos Frac Paca)<br />

œuvres à la fragilité puissante),<br />

tous deux influ<strong>en</strong>cés par Toni<br />

Grand qui transmit son goût de<br />

la liberté à Richard Monnier (ces<br />

Sablier réalisés au CIRVA ouvr<strong>en</strong>t<br />

une voie de transpar<strong>en</strong>ce<br />

sur sa sculpture <strong>en</strong> gravier et<br />

plâtre Tout tas est-il ôté d’un tout ?)<br />

et Arnaud Vasseux, merveilleux<br />

observateur de la réaction des<br />

matériaux qu’il assemble (résine,<br />

<strong>en</strong>cre, plâtre). Natif de Briançon,<br />

professeur à Nice, aujourd’hui<br />

Marseillais, Dominique Angel<br />

est insaisissable, même si sa Pièce<br />

supplém<strong>en</strong>taire le met <strong>en</strong> scène<br />

piégé par la glaise, sculpture<br />

éphémère que l’on appréh<strong>en</strong>de<br />

à travers la trace photographique…<br />

Des œuvres mises <strong>en</strong><br />

perspective avec celles d’André<br />

Masson, César et Germaine<br />

Richier qui leur ouvrir<strong>en</strong>t une<br />

voie royale.<br />

M.G.-G.<br />

De main <strong>en</strong> main<br />

jusqu’au 9 juin<br />

Galerie d’art du Conseil général,<br />

Aix<br />

Catalogue, éd. SilvanaEditorial,<br />

22 €<br />

04 13 31 50 70<br />

www.culture-13.fr


Un cru gouleyant<br />

Les chiffres sont éloqu<strong>en</strong>ts et les artistes<br />

loquaces : le Sm’art est une réussite ! Ce ne<br />

sont pas les 20 000 personnes qui ont flâné<br />

au Parc Jourdan qui le dém<strong>en</strong>tiront : 30 %<br />

de hausse de fréqu<strong>en</strong>tation depuis son implantation<br />

<strong>en</strong> c<strong>en</strong>tre ville, sans compter<br />

l’augm<strong>en</strong>tation des v<strong>en</strong>tes de 10 % par<br />

rapport à 2012. Ces chiffres record n’étonn<strong>en</strong>t<br />

pas Christiane Michel, créatrice et<br />

commissaire du Sm’art. «Je fais tous les<br />

salons d’art et je sais que depuis une dizaine<br />

d’années le métier de galeriste est <strong>en</strong> zone<br />

de turbul<strong>en</strong>ces. Celles qui ont plus de 25 ans<br />

ont des artistes connus, mais pas les autres…<br />

À raison de 58 000 professionnels inscrits à<br />

la Maison des artistes, il est clair qu’il y a un<br />

déséquilibre ! Beaucoup de g<strong>en</strong>s de tal<strong>en</strong>t<br />

ne sav<strong>en</strong>t pas où prés<strong>en</strong>ter leurs œuvres.»<br />

Quant aux salons de décoration qui flirt<strong>en</strong>t<br />

avec l’art contemporain, ils ferai<strong>en</strong>t fausse<br />

route : «Ce n’est pas la même démarche.<br />

Les g<strong>en</strong>s veul<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>contrer des artistes et<br />

non pas des décorateurs.» Au Sm’art, impossible<br />

de ne pas les voir devant leur t<strong>en</strong>te<br />

blanche munis de pressbook, de catalogues,<br />

de cartes de visite et d’un large sourire. Car<br />

s’il y a compétition, il y a «une belle coopération<br />

et une vraie émulation». Sourski, installée<br />

à Auriol, a participé au salon l’an dernier<br />

Sourski dans son atelier au Sm'art, mai 2013 © MGG/<strong>Zibeline</strong><br />

avec l’Art-Gallery Laramée et revi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> nom<br />

propre : «Quand on fait un salon, il faut persévérer<br />

pour que le public s’habitue à votre<br />

travail, pour transformer les coups de cœur<br />

<strong>en</strong> désir d’achat. Je participe au SIAC à<br />

Marseille depuis 3 ans, j’expose dans les<br />

jardins d’Albertas pour les Journées des<br />

plantes. Depuis 12 ans que je me consacre à<br />

la sculpture, c’est comme si je jetais des<br />

bouteilles à la mer… aujourd’hui je suis ravie<br />

des v<strong>en</strong>tes et des contacts.» Même <strong>en</strong>thousiasme<br />

de l’association La Bourguette qui<br />

lutte contre l’autisme et prés<strong>en</strong>te les œuvres<br />

de Chantal et Frédéric réalisées dans les<br />

ateliers ferronnerie et céramique. Avec 15<br />

pièces v<strong>en</strong>dues, dont 3 mini David, répliques<br />

de la sculpture du Parc de Bagatelle à la<br />

mairie du 8 e de Marseille, c’est toute la motivation<br />

des équipes et des pati<strong>en</strong>ts qui est<br />

boostée. Pour sa première participation, le<br />

sculpteur seynois Mimi est positif : «Avec les<br />

v<strong>en</strong>tes je couvre mes frais et le pot<strong>en</strong>tiel dans<br />

l’av<strong>en</strong>ir est intéressant. C’est un bon investissem<strong>en</strong>t.<br />

Après le SIAC, j’ai retrouvé des<br />

collectionneurs fidèles.» Il faut dire que même<br />

installées au fond d’une allée, ses sculptures<br />

monum<strong>en</strong>tales <strong>en</strong> résine noire et<br />

blanche respir<strong>en</strong>t à pleins poumons à l’orée<br />

de la canopée.<br />

M.G.-G.<br />

Le Sm’art s’est déroulé<br />

à Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce du 2 au 6 mai<br />

79<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RTS<br />

V<br />

ISUELS<br />

Animaux au bestiaire<br />

À Istres et sur le territoire<br />

Ouest-Prov<strong>en</strong>ce Animal<br />

Paradise nous emmène à<br />

la r<strong>en</strong>contre d’un bestiaire<br />

peu commun où Darwin<br />

aurait du mal à reconnaitre<br />

une généalogie…<br />

Noé œuvra sur ordre pour recréer<br />

un paradis. De l’éd<strong>en</strong> à<br />

l’<strong>en</strong>fer nombre d’artistes n’ont<br />

pas att<strong>en</strong>du qu’on leur montre<br />

un chemin pour emprunter d’autres<br />

voies. Animal Paradise, <strong>en</strong><br />

convoquant les bons et mauvais<br />

g<strong>en</strong>res, déployé <strong>en</strong> divers lieux<br />

istré<strong>en</strong>s et villes part<strong>en</strong>aires<br />

(Œuvres <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t), montre<br />

comm<strong>en</strong>t des artistes -une<br />

tr<strong>en</strong>taine dont la moitié sont des<br />

femmes, pour ça aussi ça nous<br />

plaît !- s’empar<strong>en</strong>t de la figure<br />

animal dans des dispositifs signifiants<br />

complexes et inatt<strong>en</strong>dus.<br />

Après l’installation historique de<br />

Gloria Friedmann ou I’m an animal<br />

de Myriam Méchita, une des<br />

pièces les plus signifiantes avec<br />

Farm set pigs de Pascal Bernier,<br />

la mythologie animale se décline<br />

sous de multiples tournures. Animal<br />

naturalisé, hybride (Grünfeld,<br />

Gagliardi), trophée, robotisé (Cadet,<br />

Blanchard), squelettique/<br />

Mickey (Rubinstein) ou sublimé/<br />

or (Zanca), pop (Jabbour,Ciavaldini),<br />

pseudo sci<strong>en</strong>tifique (Duchêne),<br />

r<strong>en</strong>ouvelant la tradition du dessin<br />

(Otero Torres), <strong>en</strong> paradis exotique<br />

(Ghelloussi), abs<strong>en</strong>t/prés<strong>en</strong>t<br />

(Castell)… Sans pour autant<br />

I'm an animal too, Myriam Mechita, 2010/2013 © C. Lorin/<strong>Zibeline</strong><br />

confiner les œuvres dans des<br />

catégories commodes, l’animalité<br />

s’expose <strong>en</strong> postures incongrues,<br />

inquiétantes ou dés<strong>en</strong>chantées<br />

comptant que le visiteur saura<br />

construire sa part d’appropriation<br />

dans cette arche fantastique<br />

où <strong>en</strong> filigrane une autre part de<br />

l’Homme est donnée à voir avec<br />

ses résonnances actuelles. Le<br />

travail <strong>en</strong>tamé voici deux ans par<br />

Catherine Soria et l’équipe de la<br />

POPARTs se confirme tant par<br />

l’approche conceptuelle que par<br />

le choix des œuvres sans craindre<br />

le grand public ni les ouvertures<br />

plus pointues. Seul bémol, le<br />

bâtim<strong>en</strong>t dont on rappelle les<br />

limites. Confér<strong>en</strong>ces, visites nature,<br />

évènem<strong>en</strong>ts ponctu<strong>en</strong>t la<br />

programmation.<br />

CLAUDE LORIN<br />

Animal Paradise<br />

jusqu’au 12 octobre<br />

Poparts, C<strong>en</strong>tre d’Art<br />

Contemporain Intercommunal<br />

Istres et autres lieux<br />

04 42 55 17 10<br />

www.ouestprov<strong>en</strong>ce.fr


5 e P.A.C.<br />

Pour sa 5 e édition le Printemps de l’Art Contemporain joue<br />

les contretemps mais reste à l’heure de MP2013. Le réseau<br />

Marseille Expos propose <strong>en</strong> 3 jours, 3 parcours pour<br />

une quarantaine de lieux <strong>en</strong> 3 quartiers : r<strong>en</strong>contres avec<br />

les artistes, lectures, colloque, performances et nocturnes.<br />

Ouverture de tous les lieux dès le 17 mai, de 11h à 22 h, soirée<br />

d’inauguration à la maison de v<strong>en</strong>te Leclere à partir de 22h,<br />

<strong>en</strong>trée libre. C.L.<br />

Printemps de l’Art Contemporain #5<br />

les 17, 18 et 19 mai<br />

Marseille<br />

www.marseilleexpos.com<br />

80<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RTS<br />

V<br />

ISUELS<br />

Lionel Scoccimaro, Customize Vanity Thing, 2010. courtesy Galerie Olivier Robert<br />

Marc Heller<br />

«Ciel, la terre !» s’exclame le photographe marseillais Marc Heller lorsqu’il est aux<br />

commandes d’un avion, fasciné depuis les années 70 par la photo, la nature et le<br />

vertige des airs. De série <strong>en</strong> série, la réalité des paysages s’efface derrière un jeu<br />

abstrait de couleurs : terre ? eau ? sable ? Oui, mais pas uniquem<strong>en</strong>t : harmonies<br />

de vert acide et d’orange <strong>en</strong>flammé, ét<strong>en</strong>dues irréelles, frontières floues,<br />

géométries variables… M.G.-G.<br />

Ciel ! La terre, balade aéri<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> Prov<strong>en</strong>ce<br />

du 14 mai au 23 juin<br />

Office de tourisme, Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce<br />

04 42 16 11 61<br />

www.aix<strong>en</strong>prov<strong>en</strong>cetourism.com<br />

© Marc Heller<br />

Animal design<br />

Quel fabuleux bestiaire ! De tout temps les animaux ont été l’objet de représ<strong>en</strong>tations<br />

et les designers ne dérog<strong>en</strong>t pas au plaisir de combiner formes et symboles. En témoigne<br />

l’exposition du C<strong>en</strong>tre Design Marseille qui réunit une quarantaine de pièces, et presque<br />

autant de matières et de fonctionnalités aussi inatt<strong>en</strong>dues que poétiques, aussi<br />

humoristiques qu’inutiles parfois… M.G.-G.<br />

du 15 mai au 29 juin<br />

Galerie Montgrand, Marseille 6 e<br />

06 72 43 19 55<br />

www.designmarseille.org<br />

© Frederique Morrel<br />

Les Arts éphémères<br />

Le festival des Arts éphémères souligne les relations inv<strong>en</strong>tives de l’art<br />

contemporain au paysage et à la nature à travers une sélection d’artistes qui jou<strong>en</strong>t<br />

avec la tradition du land art (Caroline le Méhauté, Julia Cottin, Olivier Millagou, Jean-<br />

Marc Voillot, Ugo Schiavi), mais pas uniquem<strong>en</strong>t. D’autres trouv<strong>en</strong>t «naturellem<strong>en</strong>t»<br />

leur place, dehors comme dedans : Anne-Valérie Gasc, Ilana Salama Ortar, Frédéric<br />

Pradeau, Aymeric Louis, Véronique Rizzo, Alain Pontarelli, Pascale Mijares, Karine<br />

Rougier, Solange Trigger, Laur<strong>en</strong>t Perbos… M.G.-G.<br />

Ongles © Laur<strong>en</strong>t Perbos<br />

du 23 mai au 13 juin<br />

Parcs et salons de Maison Blanche, Marseille 9 e et 10 e<br />

04 91 14 <strong>63</strong> 50<br />

www.marseille9-10.fr


Réservoir Rock<br />

Le Château-musée Edgar Melik cache des espaces insolites, comme ce réservoir<br />

où les œuvres de Jean-Baptiste Gaubert se métamorphoseront «<strong>en</strong> prestations<br />

audiovisuelles inédites». Le temps d’une performance le 26 mai, peintures, photos<br />

et vidéos réinv<strong>en</strong>teront un déjeuner sur l’herbe impressionniste, superposition de<br />

petites touches picturales et de musique improvisée avec son groupe. La toile et<br />

l’installation sonore in situ composeront la pièce Réservoir Rock… M.G.-G.<br />

Performance <strong>en</strong> live de Jean Baptiste Gaubert © X.D-R<br />

jusqu’au 30 septembre<br />

Château-musée Edgar Melik, Cabriès<br />

04 42 22 42 81<br />

www.musee-melik.fr<br />

82<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RTS<br />

V<br />

ISUELS<br />

Tableau historique<br />

Jérôme Cavalière, Camila Oliveira Fairclough, Cécile Meynier,<br />

Olivier Mosset, Frédéric Sanchez, Hugo Schuwer Boss<br />

compos<strong>en</strong>t une sorte de best of autour de l’œuvre abstraite et<br />

radicale d’Olivier Mosset. On évoquera sans doute l’audace du<br />

jeune Rausch<strong>en</strong>berg gommant les dessins du grand De Kooning.<br />

Le geste est passé dans l’histoire de l’art. Les œuvres le ferontelles<br />

avec autant de radicalité ? C.L.<br />

Tableau Historique<br />

du 17 mai au 28 juin<br />

GAD-Galerie Arnaud Deschin, Marseille 1 er<br />

06 75 67 20 96<br />

http://lagad.eu<br />

Jerome Cavaliere, Entreti<strong>en</strong> avec une oeuvre d'art,<br />

Essai #1, #2 et #3 2012 Video HDV, 16-9, 14' © courtesy artiste et galerie A. Deschin<br />

Fabrice Lauterjung, photographie de la serie Et quand il eut passe le pont (© F. Lauterjung<br />

Escales<br />

Le projet Ulysses (FRAC PACA) propose quatre escales<br />

dans le Pays de Martigues. Le patrimoine résonnera avec l’art<br />

contemporain : à la Chapelle Notre Dame de Miséricorde, Et quand<br />

il eut passé le pont de Fabrice Lauterjung, Aquarelles d’Yvan<br />

Salomone au C<strong>en</strong>tre d’Art Fernand Léger à Port-de-Bouc<br />

et sur le site archéologique de Saint-Blaise/Saint-Mitreles-Remparts<br />

Jean-Jacques Rullier expose Fragm<strong>en</strong>ts<br />

de la coexist<strong>en</strong>ce des mondes et à partir du 21 juin<br />

Le glissem<strong>en</strong>t des croyances au musée Ziem. C.L.<br />

Escale sur la Petite Mer<br />

Pays de Martigues<br />

du 18 mai au 13 octobre<br />

www.paysdemartigues.fr<br />

www.villedemartigues.fr<br />

www.portdebouc.fr<br />

Photomed<br />

C’est sous le cèdre du Liban qu’est placé le 3 e Festival de la<br />

photographie méditerrané<strong>en</strong>ne concocté par Jean-Luc<br />

Monterosso, directeur de la Maison europé<strong>en</strong>ne de la<br />

photographie. Avec la même exig<strong>en</strong>ce : promouvoir des tal<strong>en</strong>ts<br />

méconnus (la photographie slovène), r<strong>en</strong>dre hommage à de<br />

grandes figures (Gabriel Basilico, Nino Migliori, Fouad Elkoury),<br />

découvrir des œuvres inédites (Costa-Gavras), organiser des<br />

workshops ou <strong>en</strong>core provoquer des r<strong>en</strong>contres impromptues. M.G.-G.<br />

du 23 mai au 16 juin<br />

Sanary, Bandol, B<strong>en</strong>dor, Toulon<br />

www.festivalphotomed.com<br />

Serie Watercolor, 2012 © Maz<strong>en</strong> Jannoun (selection La jeune photographie libanaise)


Fake off<br />

Enfin une galerie marseillaise loin du triangle d’or ! Celle-ci<br />

opère au cœur des Puces, parmi ses antiquaires… <strong>en</strong> offrant<br />

une large sélection particulièrem<strong>en</strong>t inspirée d’artistes<br />

contemporains vivant pour la plupart à Marseille. Il y <strong>en</strong> a<br />

pour tous les bons goûts, à des prix franchem<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

dessous du marché, et tous les artistes qui compt<strong>en</strong>t y sont,<br />

avec plusieurs oeuvres (Clavère, B<strong>en</strong>istri, Sémiramoth,<br />

Dantzer, Rizzo, Scoccimaro, Olmeta, Perbos, Discepolo…).<br />

Les Vierges de Maila Gracia, et les blocs de marbre évidés<br />

d’Attila Rath Geber donn<strong>en</strong>t <strong>en</strong>vie d’investir indifféremm<strong>en</strong>t<br />

dans la pierre et la plume ! Un nouvel accrochage à partir du<br />

6 juin. A.F.<br />

Maila Gracia, Vierge noire, technique mixte, moules bois, 2010, Dame Blanche, technique mixte cauris velour,<br />

2013, Cousine Madeleine, technique mixte, cheveux humains, 2013 © Galerie Saint Laur<strong>en</strong>t<br />

Publications d’artistes<br />

Deuxième édition de Publications d’artistes pour des Paroles croisées autour de la<br />

Bibliothèque Mobile d’Andrea Blum avec L’atelier cinq, Jouke Kleerebezem, wip-art,<br />

L’éditions des petits livres, monotone press, La fabrique s<strong>en</strong>sible et le C<strong>en</strong>tre de<br />

docum<strong>en</strong>tation du FRAC PACA. La fabrique s<strong>en</strong>sible propose aussi <strong>en</strong> souscription<br />

Merveilles de Marie Ducaté, une exposition de l’artiste et une installation d’Eric Watier.<br />

Vernissage le 8 juin à 18h30. C.L.<br />

jusqu’au 25 mai<br />

Galerie Saint laur<strong>en</strong>t, Marseille 15 e<br />

06 76 91 42 61<br />

www.galeriesaintlaur<strong>en</strong>t.com<br />

83<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

A<br />

RTS<br />

V<br />

ISUELS<br />

les 7, 8, 9 juin<br />

Les Baux-de-Prov<strong>en</strong>ce<br />

04 90 54 34 39<br />

www.publicationsdartistes.org<br />

www.lafabriques<strong>en</strong>sible.com<br />

Merveilles de Marie Ducate, 2013, livre d'artiste,<br />

éditions la fabrique s<strong>en</strong>sible<br />

Patrimoine r<strong>en</strong>ouvelé<br />

En organisant un des concours artistiques les mieux dotés de France, la CCI<br />

Marseille-Prov<strong>en</strong>ce récomp<strong>en</strong>se chaque année des artistes qui se sont intéressés<br />

aux <strong>en</strong>jeux économiques de son territoire. Cette exposition rétrospective est<br />

l’occasion de découvrir les œuvres primées depuis 2008 de jeunes tal<strong>en</strong>ts comme<br />

Marc Quer, Mohamed Bourouissa ou Sandra Lor<strong>en</strong>zi. Originaires de la région ou du<br />

monde <strong>en</strong>tier, ils se distingu<strong>en</strong>t par l’originalité, la qualité et l’innovation technique<br />

de leurs créations. A-L.R.<br />

De l'eternel avec une date de peremption,tirage sur papier<br />

archive Editions P, 60x80 cm, laureat 2012 © Marc Quer<br />

Un patrimoine r<strong>en</strong>ouvelé - Acquisitions 2008-2013<br />

du 2 mai au 12 juin<br />

Palais de la Bourse, Marseille<br />

0810 113 133<br />

www.palaisdelabourse2013.ccimp.com<br />

Flâneries d’Art<br />

Andréa Ferréol et ses complices sav<strong>en</strong>t ouvrir les portes des lieux<br />

secrets, parfums du XVIIIe conjugués aux arts contemporains.<br />

Pour la septième édition de ses flâneries, pas moins de 21 artistes<br />

internationaux (Sophia Vari, Titouan Lamazou…) essaimeront les<br />

jardins aixois, tandis que des musici<strong>en</strong>s partageront des airs<br />

d’opéra, de jazz, de tango, une création chorégraphique de<br />

Nicolas Zemmour… M.C.<br />

Titouan Lamazou © X-D.R<br />

les 15 et 16 juin<br />

Divers lieux, Aix<br />

www.aix-<strong>en</strong>-oeuvres.com/flaneries-2013


Les voix du sil<strong>en</strong>ce<br />

84<br />

A<br />

U<br />

P<br />

R<br />

O<br />

GR<br />

A<br />

M<br />

M<br />

E<br />

R<br />

ENCONTRES<br />

Largem<strong>en</strong>t amorcé l’an dernier, le déploiem<strong>en</strong>t du Festival du Livre de La<br />

Canebière, organisé par l’association Couleurs Cactus, se poursuivra lors<br />

de sa prochaine édition. Il s’ét<strong>en</strong>dra cette année sur dix jours, du 7 au 16<br />

juin, et <strong>en</strong> de nombreux lieux autres que le désormais traditionnel square<br />

Léon Blum. Si le festival reste amarré dans le premier arrondissem<strong>en</strong>t,<br />

investissant plusieurs espaces du c<strong>en</strong>tre ville, comme Les Grands Terrains,<br />

l’Alcazar, l’Espace Culture ou La Compagnie, il regarde de plus <strong>en</strong> plus<br />

vers la mer. Il fera ainsi escale au Vieux-Port, dans l’anse de la Fausse-<br />

Monnaie, au Frioul et même à L’Estaque, puisque la mairie des 15 e et 16 e<br />

arrondissem<strong>en</strong>ts l’y a invité toute une journée (le 15). Les r<strong>en</strong>contres, ateliers<br />

d’écriture, lectures et performances proposés cette année, sans compter les<br />

concerts, bals et autres événem<strong>en</strong>ts purem<strong>en</strong>t festifs, s’y multipli<strong>en</strong>t allègrem<strong>en</strong>t.<br />

Mais cette manifestation qui semble vouloir voguer toutes voiles<br />

dehors parvi<strong>en</strong>t à conserver ses lignes de force !<br />

Le thème ret<strong>en</strong>u pour cette édition est celui du sil<strong>en</strong>ce : sil<strong>en</strong>ce de la c<strong>en</strong>sure,<br />

de l’omerta, des non-dits et des interdits, sil<strong>en</strong>ce égalem<strong>en</strong>t du rêve,<br />

du souffle poétique, de l’inspiration. Le sil<strong>en</strong>ce sera donc décliné sous toutes<br />

ses formes, parlé, chanté et écrit. Parmi les invités, le journaliste, dramaturge<br />

et plastici<strong>en</strong> algéri<strong>en</strong> Mustapha B<strong>en</strong>fodil jouera un rôle important : il<br />

prés<strong>en</strong>tera son installation Sans têtes, c<strong>en</strong>surée <strong>en</strong> 2011 lors de la Bi<strong>en</strong>nale<br />

des Emirats Arabes Unis, proposera une performance et parlera de son<br />

dernier texte, Le point de vue de la mort (Al Dante) qui sera mis <strong>en</strong> scène<br />

au Off d’Avignon cet été. Plusieurs occasions donc de mieux connaître cet<br />

artiste <strong>en</strong>gagé contre la c<strong>en</strong>sure.<br />

On pourra égalem<strong>en</strong>t découvrir le thriller déjanté de l’Espagnol Javier<br />

Calvo (Le jardin susp<strong>en</strong>du ; éditions Galaade), le roman graphique d’Antonin<br />

Dubuisson et Alain Glykos (La grande catastrophe ; Cambourakis)<br />

et bi<strong>en</strong> d’autres ouvrages. On retrouvera aussi avec plaisir R<strong>en</strong>é Frégni<br />

autour de son dernier roman Sous la ville rouge (Gallimard), dont l’intrigue<br />

se situe à Marseille. Le principe de la mini résid<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> duo sera égalem<strong>en</strong>t<br />

reconduit cette année avec le romancier Marcus Malte et le photographe<br />

Abed Abidat. Tous deux ont un projet commun autour du sil<strong>en</strong>ce, qu’ils<br />

vi<strong>en</strong>dront prés<strong>en</strong>ter à la fin du festival, mom<strong>en</strong>t où sera décerné le Prix de<br />

la Nouvelle, dont <strong>Zibeline</strong> est part<strong>en</strong>aire.<br />

Pas de doute, <strong>en</strong> 2013, le Festival du Livre va faire du bruit !<br />

FRED ROBERT<br />

Lire <strong>en</strong> sil<strong>en</strong>ce © Jose Caddy<br />

5 e Festival du Livre de la Canebière Carnets de route<br />

du 7 au 16 juin<br />

Marseille<br />

www.couleurs-cactus.com<br />

L’universalisme politique<br />

Dernière confér<strong>en</strong>ce de la saison<br />

pour Échange et diffusion<br />

des savoirs, avec Mireille<br />

Delmas-Marty. La juriste de<br />

r<strong>en</strong>ommée internationale vi<strong>en</strong>dra<br />

parler de l’universalisme<br />

politique à l’épreuve de la<br />

mondialisation, partant du<br />

cosmopolitisme, rêvé notamm<strong>en</strong>t<br />

par Kant, qui devi<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

partie réalité avec l’actuelle<br />

mondialisation du droit. Avec<br />

des obstacles visibles dans le<br />

droit du commerce et des<br />

finances, le droit des droits de<br />

l’homme ou celui applicable<br />

aux nouvelles technologies.<br />

DO.M.<br />

le 30 mai à 18h45<br />

Hôtel du départem<strong>en</strong>t,<br />

Marseille<br />

04 96 11 24 50<br />

www.cg13.fr<br />

Mireille Delmas-Marty © Emmanuelle Marchadour<br />

Cultures croisées<br />

Pour sa 11 e édition, la manifestation l’Espagne des trois cultures n’a<br />

de cesse d’ouvrir un espace de solidarité, de dialogue, de reconnaissance<br />

pour aboutir à une fête de tolérance et de culture. À l’image d’une<br />

Espagne harmonieuse qui vivait harmonieusem<strong>en</strong>t la cohabitation<br />

des trois grands monothéismes, musulman, juif, chréti<strong>en</strong>. Un<br />

patrimoine hispano-judéo-musulman que l’association marseillaise<br />

Horizontes del sur explore dans différ<strong>en</strong>tes interfaces culturelles,<br />

du 21 mai au 10 juin. Parmi les temps forts de ces r<strong>en</strong>contres, des<br />

confér<strong>en</strong>ces, nombreuses, sont programmées à l’Alcazar, notamm<strong>en</strong>t<br />

celle d’Antonio Soler autour de son dernier livre, Boabdil, ou de<br />

Virginie Ruiz sur Moga-dor au cœur des trois cultures méditerrané<strong>en</strong>nes<br />

chréti<strong>en</strong>ne, juive et musulmane : un pont jeté <strong>en</strong>tre le Mexique et le<br />

Maroc dans l’œuvre d’Alberto Ruy-Sánchez. Seront aussi projetés les<br />

docum<strong>en</strong>taires de Vivian Imar et Marcelo Trotta, Legado et celui de<br />

Miguel E. López Lorca, Los expulsados, ainsi que le film de Maria<br />

Victoria M<strong>en</strong>is, La Cámara oscura. Sans oublier l’expo sur les<br />

«gauchos juifs», le café littéraire, la programmation musicale…<br />

DO.M.<br />

L’Espagne des trois cultures<br />

du 21 mai au 10 juin<br />

Divers lieux, Marseille<br />

04 91 08 53 78<br />

www.horizontesdelsur.fr


86<br />

L<br />

ITTÉ<br />

R<br />

A<br />

T<br />

U<br />

RE<br />

Ouvrages de l’Atelier du Tilde © Juliette Luck2<br />

Que viva CoLibriS<br />

Faut-il multiplier les mom<strong>en</strong>ts festifs (concerts,<br />

milongas…) pour qu’un festival littéraire soit jugé<br />

digne d’être financièrem<strong>en</strong>t sout<strong>en</strong>u ? À l’issue<br />

de la sixième édition de CoLibriS, on peut se<br />

poser la question. Depuis sa création, la manifestation<br />

a déployé ses ailes, ouvrant des perspectives<br />

inédites, comme le croisem<strong>en</strong>t de regards latinoarabes<br />

pour la prés<strong>en</strong>te édition, et gagnant année<br />

après année une notoriété internationale. Le<br />

travail de fond, que les acteurs de ce festival mèn<strong>en</strong>t<br />

avec <strong>en</strong>thousiasme pour faire connaître et<br />

apprécier les littératures contemporaines d’Amérique<br />

latine, ne semble pourtant pas convaincre<br />

les institutions. Celles-ci ne cess<strong>en</strong>t de réduire<br />

leurs aides, au point que l’équilibre financier de<br />

la manifestation relève aujourd’hui de la gageure.<br />

Le budget de la culture est <strong>en</strong> baisse et à l’intérieur<br />

dudit budget, la littérature est loin de se<br />

tailler la part du lion : trop peu visible, dis<strong>en</strong>t les<br />

uns ; trop élitiste, critiqu<strong>en</strong>t les autres. S’ils avai<strong>en</strong>t<br />

assisté aux échanges stimulants qui se sont t<strong>en</strong>us<br />

à La Friche, ils aurai<strong>en</strong>t constaté qu’exig<strong>en</strong>ce littéraire<br />

et accessibilité, même lorsque les sujets<br />

abordés sont complexes, sont compatibles. C’est<br />

d’ailleurs une des grandes qualités de CoLibriS,<br />

qui n’est pas un salon où l’on vi<strong>en</strong>t faire ses courses,<br />

mais un véritable lieu, stimulant, de recherche,<br />

d’échange et de découvertes.<br />

Parmi les r<strong>en</strong>contres passionnantes de cette<br />

édition, la table ronde qui a réuni Carlos Liscano,<br />

Matias Néspolo, Maïssa Beyet Kamel Daoud<br />

autour du thème de «l’écrivain, voix politique».<br />

Hernan Harispe a lancé le débat. Constatant le<br />

bouleversem<strong>en</strong>t politique et social du contin<strong>en</strong>t<br />

sud-américain depuis deux déc<strong>en</strong>nies, voyant le<br />

même changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> germe dans le monde<br />

arabe, il a demandé si la littérature accompagnait<br />

ou non ces mutations. Selon l’Uruguay<strong>en</strong> Liscano,<br />

il y a actuellem<strong>en</strong>t un «divorce» <strong>en</strong>tre littérature<br />

et politique <strong>en</strong> Amérique latine, ce que corrobore<br />

le jeune écrivain arg<strong>en</strong>tin Néspolo (voir p. 88)<br />

pour les années 1990 du moins. Cette période<br />

d’évolution néolibérale de tout le contin<strong>en</strong>t a<br />

favorisé l’éclosion d’une littérature plus légère,<br />

plus formaliste, moins <strong>en</strong>gagée. Mais les temps<br />

chang<strong>en</strong>t ; de nombreux écrivains de sa génération<br />

r<strong>en</strong>ou<strong>en</strong>t aujourd’hui avec des thèmes<br />

politiques, liés au poids de l’héritage des dictatures.<br />

Face à des auteurs sud-américains «impliqués»,<br />

les Algéri<strong>en</strong>s se dis<strong>en</strong>t totalem<strong>en</strong>t «<strong>en</strong>gagés».<br />

Kamel Daoud (voir p. 88) rappelle brillamm<strong>en</strong>t<br />

la nécessité de la littérature face à la dictature. À<br />

quoi Maïssa Bey ajoute que «toute prise de parole<br />

dans un pays où la transgression des codes est<br />

sévèrem<strong>en</strong>t punie est un acte politique.» Daoud<br />

conclura pourtant que l’expéri<strong>en</strong>ce de l’Amérque<br />

latine l’intéresse mais ne répond pas à sa question<br />

fondam<strong>en</strong>tale : comm<strong>en</strong>t vaincre la dictature<br />

religieuse ?<br />

CoLibriS permet aussi des découvertes. D’auteurs,<br />

comme le Chili<strong>en</strong> d’origine palestini<strong>en</strong>ne<br />

Walter Garib ; un octogénaire flamboyant à<br />

l’élocution magistrale (voir p. 89). D’éditeurs<br />

égalem<strong>en</strong>t. L’Atelier du Tilde, à qui l’on doit<br />

l’édition du Voyageur au tapis magique de Garib,<br />

était à l’honneur cette année. Cette maison lyonnaise<br />

(créée <strong>en</strong> août 2010) est née de la volonté<br />

de trois jeunes traducteurs de diffuser des œuvres<br />

latino-américaines et espagnoles inédites <strong>en</strong><br />

français, d’où le nom «tilde», tout <strong>en</strong> soignant<br />

l’objet de façon très artisanale, d’où le terme<br />

d’«atelier». Les jeunes éditeurs font presque tout<br />

eux-mêmes, traduction, fabrication, diffusion…,<br />

ce qui leur permet de proposer de très beaux<br />

livres à des prix très doux. Une démarche peu<br />

lucrative mais généreuse !<br />

Pour l’équipe de La Marelle, l’heure est désormais<br />

aux bilans. Qu’advi<strong>en</strong>dra-t-il de CoLibriS<br />

<strong>en</strong> 2014 ? Sans doute faudra-t-il l’associer à<br />

d’autres événem<strong>en</strong>ts (le festival de cinéma sudaméricain<br />

?). L’ouverture au public scolaire et<br />

universitaire, largem<strong>en</strong>t amorcée cette année<br />

devrait croître <strong>en</strong>core. Afin que (sur)vive un<br />

festival littéraire de grande qualité !<br />

FRED ROBERT<br />

Le festival CoLibriS s’est déroulé à Marseille<br />

(La Friche) et dans la région du 24 au 30 avril<br />

Traduire<br />

l’implicite<br />

En conclusion du festival littéraire,<br />

CoLibriS proposait à l’Espace Van<br />

Gogh d’Arles, au siège du CITL*,<br />

une r<strong>en</strong>contre animée par Yann<br />

Nicol <strong>en</strong>tre Alberto Ruy-Sanchez<br />

(voir p. 89) et son traducteur, Gabriel<br />

Iaculi. L’échange extrêmem<strong>en</strong>t riche<br />

permettait un nouveau déchiffrem<strong>en</strong>t<br />

des arcanes de l’œuvre de<br />

Ruy-Sanchez et une approche passionnante<br />

de l’art de la traduction.<br />

Il n’est pas de meilleure lecture, plus<br />

approfondie que celle de la traduction<br />

affirme Gabriel Iaculi : «Ma<br />

méthode est très hétérodoxe, il s’écoule<br />

un an ou deux <strong>en</strong>tre ma première<br />

lecture et la traduction.» «Comm<strong>en</strong>t<br />

faire s<strong>en</strong>tir <strong>en</strong> français au lecteur les<br />

allusions du texte ? En traduisant, je<br />

compr<strong>en</strong>ds le chemin de l’auteur et je<br />

suis obligé d’emprunter le mi<strong>en</strong> par<br />

un tour à la fois totalem<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>t<br />

et qui à l’issue est à peu près semblable.»<br />

Dans l’écriture baroque de<br />

l’écrivain mexicain, tout se joue sur<br />

la polysémie, l’implicite, c’est ce<br />

qu’il faut r<strong>en</strong>dre, absolum<strong>en</strong>t ! Dans<br />

le roman, un personnage ess<strong>en</strong>tiel,<br />

le potier : Gabriel Iaculi s’initie alors<br />

à la poterie. «Quelle chance pour moi<br />

d’avoir un tel traducteur ! sourit<br />

Alberto Ruy-Sanchez. De toute façon,<br />

comme pour un chorégraphe, mon<br />

livre ne m’apparti<strong>en</strong>t plus <strong>en</strong> français,<br />

il est l’œuvre de Gabriel !» Quel<br />

bonheur pour le lecteur !<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

© M.C<br />

Cette r<strong>en</strong>contre au eu lieu le 30 avril<br />

à l’Espace Van Gogh, Arles<br />

*CITL : Collège International<br />

des traducteurs littéraires


Des Américains<br />

à Draguignan<br />

Débarquem<strong>en</strong>t américain dans le Haut-Var pour<br />

la troisième édition des Escapades Littéraires,<br />

organisées par l’association Libraires du Sud. Ce<br />

festival littéraire est des plus plaisants. Grâce au<br />

lieu d’abord : au fond d’une placette ombragée<br />

de platanes et aménagée <strong>en</strong> café se ti<strong>en</strong>t la Chapelle<br />

de l’Observance. Acquis par la commune<br />

<strong>en</strong> 1992 et restauré jusqu’<strong>en</strong> 2005, ce bel édifice<br />

du XVIe siècle est aujourd’hui dédié aux expositions<br />

d’art contemporain et aux manifestations<br />

culturelles. On y circule à l’aise, mais tout est<br />

conc<strong>en</strong>tré. Grâce <strong>en</strong>suite à l’accueil, excell<strong>en</strong>t, et<br />

à l’ambiance, conviviale et propice aux échanges.<br />

Ici, tout le monde se parle et tous -bénévoles de<br />

l’association, lecteurs, équipe de la municipalité,<br />

interprètes, journalistes, auteurs, libraires- sont<br />

«à fond» pour faire de ce jeune festival une manifestation<br />

qui compte dans le paysage littéraire<br />

de la région.<br />

Ils y réussiss<strong>en</strong>t aussi grâce à la qualité des r<strong>en</strong>contres<br />

proposées. En une journée, on a ainsi pu<br />

redécouvrir Mark Twain à travers l’hommage<br />

que lui a r<strong>en</strong>du Bernard Hoepffner. Le traducteur<br />

vi<strong>en</strong>t de proposer une version nettem<strong>en</strong>t<br />

moins édulcorée que les précéd<strong>en</strong>tes de Tom<br />

Sawyer (voir p .91) et Huckleberry Finn, plus <strong>en</strong><br />

accord avec l’esprit des deux romans, pas vraim<strong>en</strong>t<br />

politiquem<strong>en</strong>t corrects ni destinés aux<br />

<strong>en</strong>fants (surtout le second). On a égalem<strong>en</strong>t pu<br />

r<strong>en</strong>contrer Richard Russo et Iain Levison dont<br />

les romans bross<strong>en</strong>t le portrait d’une Amérique<br />

<strong>en</strong> crise. On a parlé comics et romans graphiques<br />

avec Gilbert Shelton, créateur des Freaks Brothers,<br />

Marc Voline, qui a énormém<strong>en</strong>t fait pour<br />

qu’on n’oublie pas George Harriman et son<br />

Krazy Kat, et le tal<strong>en</strong>tueux quadra Anthony Pastor,<br />

qui a redit l’importance de la culture US<br />

pour sa génération. Ses romans graphiques jou<strong>en</strong>t<br />

constamm<strong>en</strong>t avec les codes du western ou du<br />

roman hard boiled. Une table ronde a réuni Rick<br />

Bass, Adam Novy et David Vann sur le thème<br />

des « grands espaces américains » (voir p. 90). Bass<br />

a rappelé l’influ<strong>en</strong>ce de Jim Harrison sur lui.<br />

Celui qui dit préférer les ours au métro vit aujourd’hui<br />

dans le Montana, au fond d’une vallée<br />

sauvage ; une expéri<strong>en</strong>ce assez proche de celle que<br />

Thoreau rapporte dans Wald<strong>en</strong>. Vann dit avoir<br />

été marqué pour toujours par son <strong>en</strong>fance sur<br />

une île, près de l’océan, <strong>en</strong> bordure d’«une forêt<br />

très humide et très d<strong>en</strong>se» puis par son adolesc<strong>en</strong>ce<br />

près de Sacram<strong>en</strong>to, dans une propriété<br />

qui ressemble fort à celle qu’il évoque dans Impurs<br />

(lire chronique p. 90). La description du paysage<br />

est pour lui une façon de figurer l’émerg<strong>en</strong>ce de<br />

l’inconsci<strong>en</strong>t. Pour le très pince-sans-rire Adam<br />

Novy <strong>en</strong> revanche, la forêt reste «un lieu d’échec<br />

personnel» (il est nul <strong>en</strong> feux de camp) ; pas de<br />

forêt donc dans sa Cité des oiseaux mais une «géographie<br />

de la dislocation» et la création d’un<br />

nouvel espace, d’un monde souterrain surpeuplé.<br />

De belles r<strong>en</strong>contres <strong>en</strong> vérité, et un festival à<br />

découvrir absolum<strong>en</strong>t.<br />

FRED ROBERT<br />

Les Escapades littéraires ont eu lieu à Draguignan<br />

(Var), Chapelle de l’Observance, du 3 au 5 mai<br />

© Hass<strong>en</strong> Haddouche/filtrages<br />

Bouquet<br />

final<br />

Le 12 avril, au Portail Coucou à<br />

Salon, se clôturait la 8e édition de<br />

Lire Ensemble, manifestation intercommunale<br />

autour du livre et de<br />

la lecture organisée par Agglopole<br />

Prov<strong>en</strong>ce, où durant une quinzaine<br />

de jours les 17 communes du territoire<br />

ont accueilli nombre de<br />

manifestations au sein de leurs<br />

bibliothèques.<br />

Lors de cette soirée tous étai<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ts,<br />

les participants des concours<br />

qui att<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t la remise des prix,<br />

mais aussi ceux qui avai<strong>en</strong>t participé<br />

aux ateliers graphiques et<br />

d’écriture (notamm<strong>en</strong>t avec Jo Ros,<br />

Jihad Darwiche etThomas Azuelos)<br />

et dont était visible la richesse<br />

de production ! La compagnie Tout<br />

Samba’L offrait aussi un beau mom<strong>en</strong>t<br />

avec une lecture-spectacle<br />

autour d’une sélection de portraits<br />

littéraires écrits par Jo Ros, haute <strong>en</strong><br />

couleurs, à l’image de ces habitants<br />

qui lui ont ouvert leur porte et leur<br />

vie. Un kaléidoscope de personnalités<br />

qui, selon les mots de l’auteur,<br />

lie «tradition et modernisme <strong>en</strong> préservant<br />

la mémoire, la sauvegarde des<br />

patrimoines [...] Pour que ri<strong>en</strong> ne<br />

s’oublie de ces vies, de ces tranches<br />

d’histoire locale adossée à celle de la<br />

planète». Le recueil est <strong>en</strong> ligne sur<br />

le site de l’Agglopole, surfez-y...<br />

Émotion et belles r<strong>en</strong>contres <strong>en</strong>fin<br />

autour des lauréats des concours de<br />

nouvelles ados (sur le thème R<strong>en</strong>contres<br />

du 13 e type) et adultes (sur<br />

celui de G<strong>en</strong>s d’ici et d’ailleurs), avec<br />

deux beaux premiers Prix de chaque<br />

côté. Une participation importante,<br />

dont la qualité fut soulignée par les<br />

membres des jurys. Et notamm<strong>en</strong>t<br />

celle d’Hélène Katsaras, Grand<br />

Prix Agglopole Prov<strong>en</strong>ce, G<strong>en</strong>s qui<br />

ri<strong>en</strong>t, g<strong>en</strong>s qui pleur<strong>en</strong>t, déclinaison<br />

emballante du thème imposé, unanimem<strong>en</strong>t<br />

saluée. Ses écrits à v<strong>en</strong>ir<br />

sont att<strong>en</strong>dus avec impati<strong>en</strong>ce...<br />

DO.M.<br />

Lire Ensemble s’est déroulé<br />

du 29 mars au 12 avril<br />

sur le territoire d’Agglopole Prov<strong>en</strong>ce<br />

87<br />

L<br />

ITTÉ<br />

R<br />

A<br />

T<br />

U<br />

RE


88<br />

L<br />

I<br />

V<br />

R<br />

ES<br />

Pour parler d’eux<br />

Michèle Lesbre s’intéresse à la façon dont les<br />

événem<strong>en</strong>ts de notre vie personnelle s’insèr<strong>en</strong>t<br />

dans une écriture romanesque <strong>en</strong> une sorte<br />

d’incrustation, pas toujours volontaire, dit-elle...<br />

Ce n’est pas le récit de soi qui l’intéresse mais<br />

plutôt comm<strong>en</strong>t l’histoire du monde et des hommes<br />

traverse notre propre histoire. En décembre<br />

2003, avant de se précipiter sous un wagon du<br />

métro, un vieil homme a souri à Michèle Lesbre<br />

(voir Zib’62). Tu p<strong>en</strong>dant des années, ce récit<br />

ouvre le roman : trois pages coups de poing qui<br />

introduis<strong>en</strong>t une fiction, celle d’une femme<br />

amoureuse qui, bouleversée par ce qu’elle vi<strong>en</strong>t<br />

de vivre, r<strong>en</strong>once à rejoindre son amant.<br />

Beaux, riches et moraux<br />

Milieu du XXIe siècle. La Norvège, <strong>en</strong>richie par<br />

ses gisem<strong>en</strong>ts sous-marins, domine un monde<br />

que la crise a appauvri et que la pénurie d’or noir<br />

paralyse (le baril de brut est à plus de 300 dollars).<br />

Pourtant, il y a quelque chose de pourri dans ce<br />

royaume d’anticipation, où tous jouiss<strong>en</strong>t de la<br />

manne pétrolière, où on <strong>en</strong>voie les vieux vivre<br />

des retraites dorées sur les côtes méditerrané<strong>en</strong>nes,<br />

où l’on se battrait presque pour aller <strong>en</strong><br />

prison tant ces lieux de dét<strong>en</strong>tion sont agréables<br />

à vivre. Car il s’avère difficile de concilier richesse<br />

et vertu, même lorsque cette alliance paradoxale<br />

est au cœur du système politique… Lorsque Brut<br />

Selon Matias Néspolo, il y aurait sept façons de<br />

tuer un chat. Dans son livre pourtant, on n’<strong>en</strong> verra<br />

que deux, «la g<strong>en</strong>tille et la dégueulasse» ; c’est ce<br />

que professe Chueco (le Tordu) à son copain<br />

Gringo, le narrateur. Dès les premières lignes, on<br />

plonge : dans la misère, la débrouille, la mort et<br />

l’argot des rues. La scène inaugurale donne le<br />

ton, percutant. Et ce chat que Chueco exécute<br />

g<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t, d’un coup, dans un bruit «de branche<br />

morte qui casse» parcourra le roman, comme une<br />

métaphore de l’exist<strong>en</strong>ce m<strong>en</strong>acée des habitants<br />

du bidonville de la banlieue de Bu<strong>en</strong>os Aires où<br />

se déroul<strong>en</strong>t ces quelques jours décisifs de l’exist<strong>en</strong>ce<br />

du Gringo. Un chat qu’on tue parce qu’il<br />

faut bi<strong>en</strong> manger, dont la peau ferait un joli manteau<br />

de poupée si elle ne se mettait à grouiller<br />

La vie de Victor Dojlida, personnage c<strong>en</strong>tral du<br />

récit de 2001 qui vi<strong>en</strong>t d’être réédité, l’a fascinée<br />

au même titre. Ce polonais réfugié à Homécourt,<br />

puis résistant et déporté, fut emprisonné<br />

<strong>en</strong> France p<strong>en</strong>dant 40 ans après avoir voulu se<br />

v<strong>en</strong>ger de son arrestation par un policier français.<br />

À sa libération <strong>en</strong> 1989, Michèle Lesbre l’a r<strong>en</strong>contré,<br />

est dev<strong>en</strong>ue son amie, considérant comme<br />

un «geste citoy<strong>en</strong>» de parler de cet homme <strong>en</strong><br />

colère. Elle témoigne ainsi de l’influ<strong>en</strong>ce du<br />

politique sur la vie privée, naviguant <strong>en</strong>tre réalité<br />

et fiction, prés<strong>en</strong>t et passé, <strong>en</strong> un dosage subtil.<br />

CHRIS BOURGUE<br />

Qui aime bi<strong>en</strong> châtie bi<strong>en</strong><br />

Il faut être du pays pour se permettre de t<strong>en</strong>ir un<br />

discours aussi noir sur l’Algérie, sur Alger la Blanche<br />

(«vaste estomac», «évier d’histoires»),sur un peuple<br />

«souffrant de désœuvrem<strong>en</strong>t», «tellem<strong>en</strong>t écrasé que<br />

le jour où nous nous sommes levés notre échine est<br />

restée courbée». À travers ses personnages d’anci<strong>en</strong>s<br />

militaires, de coureur de fond ou de nègre pour<br />

anci<strong>en</strong> combattant analphabète, Kamel Daoud<br />

t<strong>en</strong>te d’exorciser un défaitisme quasim<strong>en</strong>t décrit<br />

comme atavique, une malédiction gravée par des<br />

années de colonisation sur l’arbre généalogique<br />

est paru <strong>en</strong> 2011, ce premier roman de Dalibor<br />

Frioux a été remarqué. De fait, cette cynique<br />

contre-utopie ne manque ni de brio ni d’à-propos,<br />

la réflexion sur les li<strong>en</strong>s pervers qu’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />

morale et arg<strong>en</strong>t étant largem<strong>en</strong>t d’actualité. Mais<br />

si certaines scènes sont de vraies trouvailles, celle<br />

par exemple où les privilégiés invités à une «réunion<br />

de baptême d’un nouveau champ pétrolier»<br />

doiv<strong>en</strong>t se rincer la bouche au pétrole pour trouver<br />

l’inspiration, l’<strong>en</strong>semble pâtit de la distance<br />

volontaire que l’auteur mainti<strong>en</strong>t avec des personnages-marionnettes<br />

qui ne sembl<strong>en</strong>t exister<br />

que pour illustrer sa thèse. FRED ROBERT<br />

des algéri<strong>en</strong>s.<br />

Car dans ces quatre nouvelles, sous des mots rageurs<br />

d’amour ambival<strong>en</strong>t, on perçoit une note<br />

de détermination infinie. Cet auteur-là ne baissera<br />

pas la garde, il a le souffle du marathoni<strong>en</strong> qui<br />

ne s’arrêtera plus de courir, une fois la ligne de la<br />

victoire franchie, derrière «les petits détails qui<br />

continu<strong>en</strong>t de tinter comme des casseroles, les<br />

grandes questions qui n’ont pas de porte, et les rêves<br />

qui traîn<strong>en</strong>t par terre».<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

La g<strong>en</strong>tille et la dégueulasse<br />

d’asticots… Mort subite ou mort l<strong>en</strong>te, putréfaction,<br />

à l’image d’une Arg<strong>en</strong>tine plongée dans la<br />

crise. Ce court récit, qu’on dévore, peut se lire<br />

comme un roman noir : batailles rangées <strong>en</strong>tre<br />

clans rivaux pour le contrôle de la rev<strong>en</strong>te de drogue,<br />

cambriolages, prostitution, corruption, scènes<br />

nocturnes, bars glauques et morts viol<strong>en</strong>tes, tout<br />

y est. Mais Néspolo va plus loin. En soignant l’épaisseur<br />

psychologique de son jeune héros, tout<br />

<strong>en</strong> angoisse et <strong>en</strong> s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts mêlés, d’amour, de<br />

culpabilité, plein du désir de sortir de là mais<br />

consci<strong>en</strong>t de la nécessité d’aller jusqu’au bout de<br />

son destin, comme Achab dans Moby Dick, un<br />

livre que Gringo traîne partout avec lui et dont<br />

il comm<strong>en</strong>te les épisodes de manière très personnelle.<br />

Mais surtout, <strong>en</strong> brossant <strong>en</strong> filigrane le<br />

Écoute la pluie<br />

Michèle Lesbre<br />

Sabine Wespieser, 14 €<br />

Victor Dojlida, une vie dans<br />

l’ombre<br />

Michèle Lesbre<br />

Sabine Wespieser, 14 €<br />

Cette r<strong>en</strong>contre du cycle Écrivains <strong>en</strong> dialogue a eu lieu<br />

aux ABD le 9 avril, à Marseille<br />

Brut<br />

Dalibor Frioux<br />

Seuil, 21,50 €<br />

Dalibor Frioux sera invité<br />

le 18 mai à Gardanne<br />

et à Marseille dans le cadre<br />

des Escales <strong>en</strong> Librairies<br />

(association Libraires à<br />

Marseille)<br />

www.librairie-paca.com<br />

Le Minotaure 504<br />

Kamel Daoud<br />

Sabine Wespieser Éditeur,<br />

13 €<br />

Kamel Daoud était prés<strong>en</strong>t<br />

lors du festival CoLibriS<br />

(voir p. 86) qui s’est déroulé<br />

du 24 au 30 avril<br />

portrait saisissant de son pays au bord du chaos,<br />

Néspolo signe un premier roman prometteur.<br />

F.R<br />

Sept façons de tuer<br />

un chat<br />

Matias Néspolo<br />

traduit de l’espagnol<br />

(Arg<strong>en</strong>tine) par D<strong>en</strong>ise<br />

Laroutis<br />

Thierry Magnier,<br />

22,30 €<br />

Matias Néspolo était invité<br />

au festival CoLibriS


Hamsa, la loi du cinq<br />

Surtout, ne pas déduire de la photographie de<br />

couverture la nature du texte ! Il ne s’agit absolum<strong>en</strong>t<br />

pas d’une espagnolade parfumée d’eau de<br />

rose de mauvaise qualité ! À mon corps désirant,<br />

sixième volume consacré à Mogador (actuelle<br />

Essaouira), clôt un cycle consacré au désir où<br />

tous les écueils du g<strong>en</strong>re sont évités. L’écriture<br />

d’une grande pureté est celle du conteur à laquelle<br />

parfois se mêl<strong>en</strong>t des fragm<strong>en</strong>ts poétiques.<br />

Les récits s’<strong>en</strong>trelac<strong>en</strong>t ; les lieux, les époques<br />

trouv<strong>en</strong>t d’étranges échos, <strong>en</strong>tre le Mexique et le<br />

Maroc, surgissem<strong>en</strong>ts dans le désert, chasseurs<br />

d’orchidées et insectes de lumière. Scand<strong>en</strong>t les<br />

articulations de l’ouvrage les blasons de chaque<br />

doigt de la main. Cinq doigts, cinq étapes, cinq<br />

mouvem<strong>en</strong>ts, cinq, comme le chiffre sacré de<br />

l’islam, comme les cinq doigts de la main de<br />

Hamsa avec, <strong>en</strong> vague de fond, le livre d’Ibn<br />

Hazm, La loi de Hamsa, véritable art d’aimer.<br />

Cet art se retrouve sublimé dans la mort : l’amante<br />

passe une commande étrange au potier, un<br />

objet parfaitem<strong>en</strong>t inutile qui serait façonné des<br />

c<strong>en</strong>dres des deux amants à leur mort. Alchimie<br />

de la terre et du feu, alchimie de l’écriture, «j’écris<br />

comme l’artisan travaille la matière». Les narrations<br />

se mêl<strong>en</strong>t, chacune ancrée dans ses songes,<br />

son appréh<strong>en</strong>sion du monde, «du délire qu’est la<br />

vie», dont «la réalité ultime est le désir». «Les corps<br />

amoureux sont des dunes que le v<strong>en</strong>t déplace <strong>en</strong><br />

contant leur histoire.» Alberto Ruy-Sanchez nous<br />

emporte dans un ouvrage inclassable, baroque et<br />

subtil d’une émouvante profondeur. Est-ce ainsi<br />

que naiss<strong>en</strong>t les lég<strong>en</strong>des ?<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

À mon corps désirant<br />

Albert Ruy-Sanchez<br />

Galaade, 21 €<br />

89<br />

L<br />

I<br />

V<br />

De haute laine<br />

C’est bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du sur un tapis volant que l’aïeul<br />

Aziz, au début du XXe siècle, a rejoint les<br />

Amériques depuis sa Palestine natale et sa desc<strong>en</strong>dance<br />

ébahie le croit sur parole ; il faut dire que<br />

ses tal<strong>en</strong>ts de conteur et de commerçant ambulant<br />

converg<strong>en</strong>t pour <strong>en</strong> faire un «Magnifique»<br />

dont les av<strong>en</strong>tures sont au cœur du roman de<br />

Walter Garib, auteur chili<strong>en</strong> de r<strong>en</strong>om, desc<strong>en</strong>dant<br />

de ces émigrants arabes qui ont fait souche<br />

<strong>en</strong> t<strong>en</strong>tant de préserver l’ess<strong>en</strong>tiel de leur id<strong>en</strong>tité<br />

culturelle. Et c’est, semble-t-il, pour r<strong>en</strong>iem<strong>en</strong>t<br />

des origines du clan familial qu’à la troisième<br />

génération Bachir Magdalani -dont le nom n’a<br />

ri<strong>en</strong> d’itali<strong>en</strong>, malgré ses t<strong>en</strong>tatives pathétiques de<br />

s’<strong>en</strong> persuader- subit la cinglante humiliation<br />

sociale qui ouvre magistralem<strong>en</strong>t ce récit labyrinthique.<br />

Mosaïque bigarrée, emboîtem<strong>en</strong>t vertigineux<br />

de scènes <strong>en</strong> abyme, ruptures spatio-temporelles<br />

et arboresc<strong>en</strong>ce des souv<strong>en</strong>irs décl<strong>en</strong>chés par un<br />

mot, une odeur ou une saveur exig<strong>en</strong>t un lecteur aux<br />

aguets prêt à suivre le narrateur hyper-omnisci<strong>en</strong>t<br />

dans ses sauts et gambades sur un territoire truffé<br />

de noms et de référ<strong>en</strong>ces historiques lointaines<br />

(la guerre du Chaco <strong>en</strong>tre Bolivie et Paraguay<br />

1932-1935...). La traductrice Solène Bérodot a<br />

r<strong>en</strong>du ce coupé-collé de motifs proliférants, âme<br />

du récit tout autant que la personnalité du grandpère<br />

et de ses femmes, <strong>en</strong> virtuose du passé-simple<br />

qui donne à chaque scène remémorée sa d<strong>en</strong>sité<br />

de prés<strong>en</strong>t. Comble de bonheur, ce texte si d<strong>en</strong>se<br />

a trouvé «son» livre : coutures et nœuds appar<strong>en</strong>ts,<br />

reliure japonaise à l’aiguille, coffret à la<br />

vignette chatoyante, les petites mains non plus<br />

ne chôm<strong>en</strong>t pas à l’atelier du tilde, maison<br />

d’édition lyonnaise associative respectueuse du<br />

travail (très) bi<strong>en</strong> fait. Aucune résistance vraim<strong>en</strong>t<br />

à se laisser emporter par ce Tapis Magique !<br />

MARIE JO DHO<br />

Le voyageur au tapis<br />

magique<br />

Walter Garib<br />

L’atelier du tilde, 22 €<br />

www.atelier-du-tilde.org<br />

Walter Garib et l’atelier<br />

du tilde étai<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ts<br />

au Festival CoLibris<br />

«Regards latino-arabes» du<br />

24 au 30 avril (voir p. 86)<br />

R<br />

ES<br />

Le visage de Meursault<br />

Il a osé ! Jacques Ferrandez a osé donner un visage<br />

et un corps à cet homme sans prénom, dont<br />

tous les lecteurs de L’étranger se sont forgé une<br />

image personnelle. Un sacré défi. Mais qui d’autre<br />

que lui pouvait le relever ? Comme Camus,<br />

Ferrandez connaît bi<strong>en</strong> l’Algérie où il est né et<br />

où il séjourne régulièrem<strong>en</strong>t ; ses Carnets d’Ori<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> sont la preuve. Il connaît aussi très bi<strong>en</strong> l’œuvre<br />

de Camus, dont il a déjà adapté une nouvelle<br />

L’hôte (Gallimard, 2009). Son adaptation <strong>en</strong><br />

bande dessinée du célèbre roman n’est donc pas<br />

si choquante. D’autant plus qu’il réalise ici une<br />

œuvre d’une grande force plastique et d’une<br />

indéniable fidélité au texte et à l’esprit de Camus.<br />

Son Meursault blond aux faux airs de James Dean<br />

est assez proche du personnage originel de jeune<br />

adulte qui refuse de jouer le jeu. Et ses traits<br />

imprécis reflèt<strong>en</strong>t son caractère énigmatique. De<br />

même, le cadre, réaliste, est celui de l’Alger coloniale<br />

des années tr<strong>en</strong>te, époque à laquelle Camus<br />

écrivit son roman (paru seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1942).<br />

Quant au texte, du début à la fin, c’est celui du<br />

romancier. Ferrandez a seulem<strong>en</strong>t pris soin de<br />

transformer la «voix off» du livre <strong>en</strong> paroles<br />

directes. Il l’a fait habilem<strong>en</strong>t : ainsi sa façon<br />

d’insérer le célèbre incipit «Aujourd’hui maman<br />

est morte…» est tout à fait judicieuse. Certaines<br />

scènes, celle du meurtre par exemple, se pass<strong>en</strong>t<br />

de mots ; sur une double page aquarellée figurant<br />

la plage vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t s’incruster les vignettes qui<br />

rythm<strong>en</strong>t l’action. Une technique chère au dessinateur,<br />

qu’on retrouve tout au long de l’album et<br />

qui donne à cette (re)lecture de L’étranger sa<br />

couleur particulière.<br />

FRED ROBERT<br />

L’étranger d’après l’œuvre d’Albert Camus<br />

Jacques Ferrandez<br />

Gallimard, 22 €<br />

Lire aussi p. 32 le compte-r<strong>en</strong>du de la r<strong>en</strong>contre<br />

avec Jacques Ferrandez dans le cadre<br />

des R<strong>en</strong>contres du 9 e art à Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce


90<br />

L<br />

I<br />

V<br />

R<br />

ES<br />

Les joies de la famille<br />

Sukkwan Island puis Désolations avai<strong>en</strong>t plongé le<br />

lecteur dans l’humidité et les glaces de l’Alaska.<br />

Le troisième roman de David Vann, Impurs,<br />

l’étouffe dans la fournaise californi<strong>en</strong>ne. Dans<br />

tous les cas, des conditions extrêmes et très vite<br />

l’<strong>en</strong>fer. Un <strong>en</strong>fer dont la nature glacée ou ard<strong>en</strong>te<br />

n’est que le miroir. Car le véritable <strong>en</strong>fer est celui<br />

que subiss<strong>en</strong>t les personnages au sein de familles<br />

mortifères. Le démontage <strong>en</strong> règle de la sacrosainte<br />

famille et la mise à jour de ses non-dits, de<br />

ses viol<strong>en</strong>ces, de ses perversions de toutes sortes,<br />

tels sembl<strong>en</strong>t être les projets principaux de Vann.<br />

Les deux romans précéd<strong>en</strong>ts dressai<strong>en</strong>t un tableau<br />

terrifiant de la relation père/fils. Avec Impurs,<br />

le romancier (qui est né <strong>en</strong> Alaska et a grandi <strong>en</strong><br />

Californie ; ti<strong>en</strong>s, ti<strong>en</strong>s…) s’attaque aux rapports<br />

malsains qui uniss<strong>en</strong>t Gal<strong>en</strong>, un jeune adulte de<br />

22 ans, oisif, adepte du new age et de la masturbation,<br />

et sa mère SuzieQ. Dès les premières<br />

pages, tout est dit : «L’air était irrespirable. Si<br />

brûlant que sa gorge était un tunnel desséché, […]<br />

et il ne savait pas pourquoi il ne parv<strong>en</strong>ait pas à<br />

partir, tout simplem<strong>en</strong>t. Elle avait fait de lui une<br />

sorte d’époux, lui, son fils. […] et chaque jour il<br />

avait le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t qu’il ne pourrait supporter un<br />

jour de plus, mais chaque jour il restait.» Le roman<br />

de Vann rappelle la tragédie grecque ou racini<strong>en</strong>ne,<br />

son déroulem<strong>en</strong>t inéluctable, ses héros<br />

accablés par un destin familial qui fait d’eux des<br />

maudits, des «impurs». Par son rapport à la nature<br />

à la fois concret et symbolique, il se place aussi<br />

dans la lignée des grands romans américains. Un<br />

drame tellurique se joue, dans la sueur et la<br />

poussière ; le titre originel est d’ailleurs Dirt<br />

(saleté). Un style remarquable mais une lecture<br />

difficile, surtout pour les femmes et mères.<br />

FRED ROBERT<br />

Yaak la vérité qui compte<br />

«La Nature est l’étalon-or d’un système biologique et<br />

flexible» nous explique Rick Bass. Anci<strong>en</strong> géologue<br />

installé depuis des déc<strong>en</strong>nies dans la vallée<br />

du Yaak («flèche» <strong>en</strong> indi<strong>en</strong> Koot<strong>en</strong>ai), il lutte pour<br />

que son territoire devi<strong>en</strong>ne réserve naturelle.<br />

Dans un combat inégal qui l’oppose aux compagnies<br />

forestières, il t<strong>en</strong>te de faire interdire les<br />

coupes à blanc, ces déboisem<strong>en</strong>ts ultimes dévastant<br />

parcelles et forêts comme on vide les rayons<br />

des supermarchés. Une belle cause pour un beau<br />

plaidoyer lyrique, quand on ajoute <strong>en</strong>core que<br />

pumas, grizzlys, loups, aigles royaux et ombles<br />

plates constitu<strong>en</strong>t les habitants de cet Éd<strong>en</strong><br />

calfeutré dans le nord du Montana. Sans parler<br />

des parterres de fleurs nommées lys des glaciers,<br />

castillèjes d’Amérique, sabots de la vierge, orchidées<br />

colombe, lune-fougères… Mais les bons<br />

s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts ne génèr<strong>en</strong>t pas forcém<strong>en</strong>t la belle<br />

Sonate d’automne<br />

Ce livre pourrait se prés<strong>en</strong>ter ainsi : <strong>en</strong> vingt-etune<br />

adresses et soixante-quatre années de<br />

pérégrinations, voici toute la vérité sur le corps<br />

dans lequel «habite» la personne nommée Paul<br />

Auster. Ri<strong>en</strong> n’y manque des chutes, pincem<strong>en</strong>ts,<br />

morsures, maladies, souffrances, glissem<strong>en</strong>ts,<br />

paniques et pertes irrémédiables subies par le<br />

vaisseau fragile dont le capitaine est aussi le<br />

coryphée. Enfin, comme bon nombre de critiques<br />

ou d’interviews l’ont souligné jusqu’ici, on<br />

n’oubliera pas de saluer au passage la grande<br />

«sincérité» de l’écrivain, sa manière pudique et<br />

pourtant lyrique de transformer les larmes <strong>en</strong><br />

écriture. Sauf qu’à y regarder de près, ri<strong>en</strong> n’est<br />

Vrai. Bi<strong>en</strong> sûr, Brooklyn, Manhattan, les morts<br />

subites du père et de la mère, la recherche compulsive<br />

des corps à aimer, les crises de panique, la<br />

douleur, tout est véridique. Mais Paul Auster est<br />

littérature, et Rick Bass n’est pas Giono. Sans<br />

aller vers l’allégorie de L’homme qui plantait des<br />

arbres, on se pr<strong>en</strong>d à rêver d’un Chant du monde<br />

des espaces américains, avec cette urg<strong>en</strong>ce viol<strong>en</strong>te<br />

et passionnée qui se garde du p<strong>en</strong>sum. Bass,<br />

qui prét<strong>en</strong>d traquer le Vrai et ri<strong>en</strong> d’autre, exprime<br />

nombre de banalités -Si un lieu est source de<br />

paix, ne peut-il transmettre cette paix à ceux qui<br />

l’habit<strong>en</strong>t ?- voire des idées réactionnaires -Les<br />

rythmes sanguins de la terre qui persist<strong>en</strong>t dans nos<br />

veines affirm<strong>en</strong>t qu’il nous faut nous reconnecter à<br />

des rythmes stables et naturels-. Quelques passages<br />

(Quatre coyotes et Cette terre sauvage) nous laiss<strong>en</strong>t<br />

pourtant imaginer qu’un autre livre était<br />

possible, puisé aux mystères et aux eaux glacées<br />

des sombres forêts du Nord.<br />

ÉDOUARD BARTHELEMY<br />

un imm<strong>en</strong>se écrivain, c’est-à-dire un grand<br />

m<strong>en</strong>teur. Son travail consiste à éclairer certaines<br />

scènes tandis que d’autres rest<strong>en</strong>t dans l’ombre.<br />

Et progressivem<strong>en</strong>t, sinueusem<strong>en</strong>t, sans jamais<br />

ri<strong>en</strong> y laisser paraître, c’est ce travail d’ombres et<br />

de lumières qui, par ses manques et l’habileté de<br />

l’auteur, insinue peu à peu un vertige (Vertigo ?)<br />

<strong>en</strong> nous. Quelle est cette sœur schizophrène dont<br />

on ne dit <strong>en</strong> tout et pour tout que deux mots ?<br />

Pourquoi cette grand-mère a-t-elle abattu son<br />

mari ? Qu’est-ce qui r<strong>en</strong>dait ce père si taciturne ?<br />

Loin d’avoir produit une bluette sur le temps qui<br />

passe et les ravages de la vieillesse, Auster<br />

manipule sous nos yeux un théâtre de morts et<br />

de vivants qui nous glace et nous <strong>en</strong>ivre. De la<br />

grande littérature de fiction.<br />

E.B.<br />

Impurs<br />

David Vann<br />

traduit de<br />

l’américain par<br />

Laura Derajinski<br />

Gallmeister,<br />

23,10 €<br />

David Vann et son éditeur Olivier Gallmeister<br />

étai<strong>en</strong>t invités aux Escapades littéraires de Draguignan<br />

(voir p. 87)<br />

Le Livre de Yaak<br />

Rick Bass<br />

Gallmeister,<br />

20,90 €<br />

Rick Bass était prés<strong>en</strong>t lors des Escapades littéraires<br />

de Draguignan<br />

Chronique d’hiver<br />

Paul Auster, trad.<br />

Pierre Furlan<br />

Actes Sud,<br />

22,50 €


In the pocket<br />

On pourrait parier sans risque que Tom et son<br />

indécrottable copain Huck n’aurai<strong>en</strong>t pas r<strong>en</strong>ié<br />

la nouvelle av<strong>en</strong>ture que se pai<strong>en</strong>t les éditions<br />

Tristram basées à Auch dans le Gers : le lancem<strong>en</strong>t<br />

d’une collection de poche, économique<br />

donc, douze titres par an, dans un format maniable,<br />

au poids plume et à la couverture au<br />

pelliculage brillant -miroir d’appoint au cas où ?<br />

«Souple» c’est son nom, sa qualité plastique et<br />

sans doute morale au vu de la diversité du catalogue<br />

! Nous y retrouvons parmi les premiers<br />

parus la «nouvelle traduction» (2008) des Av<strong>en</strong>tures<br />

de Tom Sawyer, ressuscitées par la foi <strong>en</strong><br />

l’impureté fertile de la langue de Mark Twain qui<br />

anime le traducteur Bernard Hoepffner. Roman<br />

pour «garçons et filles» peut-être mais dont l’auteur<br />

«espère qu’il ne sera pas esquivé par les<br />

adultes» ce classique de la littérature américaine<br />

(1876), ici rétabli <strong>en</strong> version intégrale, explore<br />

les territoires les moins exposés à la facilité narrative<br />

et à l’angélisme sucré! Pesanteur d’une<br />

Femme et irlandaise<br />

Témoignage étonnant que celui de cette écrivaine<br />

qui décide à 78 ans d’écrire sa biographie,<br />

ne voulant pas <strong>en</strong> laisser le soin à d’autres ! Il lui<br />

aura fallu trois ans pour <strong>en</strong> v<strong>en</strong>ir à bout. Nécessairem<strong>en</strong>t,<br />

bi<strong>en</strong> que non exhaustif et non linéaire, le<br />

récit se développe <strong>en</strong> un gros volume dont on<br />

regrette parfois les longues digressions sur la vie<br />

sociale et surtout mondaine d’Edna O’Bri<strong>en</strong>.<br />

Car elle a côtoyé <strong>en</strong> toute simplicité, et souv<strong>en</strong>t<br />

au cours de soirées bi<strong>en</strong> arrosées, des artistes, des<br />

célébrités, tels Samuel Beckett, Paul Mac Cartney,<br />

Jackie Onassis, Martha Graham... Elle a<br />

connu la pauvreté et l’opul<strong>en</strong>ce, l’opprobre et<br />

l’adulation. Un grand nombre de ses livres ont<br />

été condamnés par les austères autorités ecclésiastiques<br />

irlandaises qui ne plaisantai<strong>en</strong>t pas avec<br />

la morale dans les années 60, lors de la parution<br />

de son premier livre, traité d’«immondice». Car<br />

communauté villageoise d’avant la guerre civile,<br />

réglée par le puritanisme, École et l’Église indissociables<br />

(saveur acide des sermons des dames<br />

patronnesses ou du Révér<strong>en</strong>d), lutte perman<strong>en</strong>te<br />

<strong>en</strong>tre le Bi<strong>en</strong> et le Mal dans les consci<strong>en</strong>ces, perman<strong>en</strong>ce<br />

des superstitions et omniprés<strong>en</strong>ce de la<br />

mort sur les bords du l<strong>en</strong>t Mississipi : les «bêtises»<br />

et les écarts de conduite de Tom et Huckleberry<br />

Finn ne sont que la manifestation d’un élan vital<br />

vers la liberté d’être.<br />

Le traducteur reste finem<strong>en</strong>t proche de la littéralité<br />

au risque mesuré de semer un léger trouble<br />

de lecture face aux incorrections ou ellipses langagières<br />

de certains personnages tel Injun Joe (le<br />

très très méchant indi<strong>en</strong>) et n’hésite pas à conserver<br />

certaines proximités avec le lexique biblique<br />

qui imprègne nombre de situations. Belle occasion<br />

que nous offre Tristram de fuguer avec Tom<br />

dans la poche-revolver !<br />

MARIE JO DHO<br />

Marseille, capitale littéraire<br />

Rémi Duchêne dédie son ouvrage à son père,<br />

Roger Duchêne, le génial dixseptièmiste que<br />

tous les étudiants de lettres aixois ont un jour<br />

croisé. L’embarcadère des lettres est un bel hommage,<br />

garant d’une transmission de l’amour des<br />

écrivains... S’attachant à une période couvrant la<br />

première moitié du XX e siècle, l’auteur évoque,<br />

quasim<strong>en</strong>t au s<strong>en</strong>s premier du terme, les grandes<br />

figures littéraires qui ont vécu ou passé par<br />

Marseille, ville incontournable à l’époque pour<br />

tout voyage vers les ori<strong>en</strong>ts. Le cont<strong>en</strong>u est érudit,<br />

précis, fourni d’anecdotes mais aussi d’analyses<br />

rapides et pertin<strong>en</strong>tes des œuvres. Un tableau<br />

esquissé des situations historiques et économiques<br />

accorde à l’<strong>en</strong>semble les contextualisations<br />

nécessaires. Les vies des écrivains tels Camus,<br />

Colette, Simone de Beauvoir, Sartre, Éluard,<br />

Malraux, Apollinaire, Coh<strong>en</strong>, G<strong>en</strong>êt, Pagnol...<br />

les li<strong>en</strong>s qui les ont unis, les raisons qui les ont<br />

m<strong>en</strong>és à Marseille, se dessin<strong>en</strong>t au fil des chapitres,<br />

et finiss<strong>en</strong>t par définir une alchimie <strong>en</strong>tre<br />

la littérature et ses sources d’inspirations : trames<br />

romanesques, visions poétiques et philosophiques,<br />

trouv<strong>en</strong>t ici leur cristallisation. On compr<strong>en</strong>d<br />

l’effervesc<strong>en</strong>ce créatrice, qui trouvait alors l’une<br />

de ses expressions les plus vivantes dans le creuset<br />

des Cahiers du Sud de Jean Ballard. Sans<br />

jamais édulcorer la vision de Marseille, Rémi<br />

Duchêne tisse d’une plume alerte et passionnée<br />

un imm<strong>en</strong>se poème amoureux pour cette ville,<br />

«blanc coquillage/ Bruissant de lointaines rumeurs»<br />

(Louis Brauquier). Car Marseille est une ville<br />

où l’on a beaucoup écrit…<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

la jeune femme d’alors n’a pas hésité à parler<br />

crûm<strong>en</strong>t de sexualité et d’émancipation.<br />

Les mémoires relat<strong>en</strong>t son «initiation brutale» à<br />

la sexualité dès les années de couv<strong>en</strong>t, puis la fuite<br />

et le mariage <strong>en</strong> 1954 avec l’écrivain Ernest Gébler<br />

qui jalousera rapidem<strong>en</strong>t son succès littéraire et<br />

qu’elle quittera <strong>en</strong> 1962, luttant pour la garde de<br />

ses deux fils. Le récit témoigne aussi de son<br />

amour des livres et des mots, de l’admiration de<br />

la poésie de Yeats, et de l’attachem<strong>en</strong>t au pays<br />

qu’elle a ancré au cœur, et dont elle évoque<br />

l’histoire sanglante dans des chapitres poignants.<br />

CHRIS BOURGUE<br />

Fille de la campagne<br />

Edna O’Bri<strong>en</strong><br />

Sabine Wespieser, 25 €<br />

Les av<strong>en</strong>tures de Tom Sawyer<br />

Mark Twain<br />

Traduction de Bernard Hoeffpner<br />

Collection souple des éditions Tristram, 9,95 €<br />

L’embarcadère<br />

des lettres<br />

Rémi Duchêne<br />

JC Lattès, 23 €<br />

Edna O’Bri<strong>en</strong> sera à Lyon le 1er juin dans le cadre<br />

des Assises internationales du roman (AIR)<br />

www.villagillet.net<br />

91<br />

L<br />

I<br />

V<br />

R<br />

ES


92<br />

L<br />

I<br />

V<br />

R<br />

ES<br />

Déambulations princières<br />

L’attachem<strong>en</strong>t du photographe ciotad<strong>en</strong> Michel<br />

Eis<strong>en</strong>lohr pour Marseille est tel qu’il lui a déjà<br />

consacré deux ouvrages : Trésor des églises de<br />

Marseille <strong>en</strong> 2010 (Éd. Ville de Marseille) et<br />

Aime comme Marseille <strong>en</strong> 2002 chez Images du<br />

Sud. Le même éditeur publie aujourd’hui Palais<br />

Longchamp, monum<strong>en</strong>tal et secret, fruit d’une<br />

errance dans les lieux <strong>en</strong>tre 2005 et 2007, avant<br />

sa remise <strong>en</strong> valeur. Un travail d’ombres et de<br />

lumières, de courbes et de droites, d’abs<strong>en</strong>ce et<br />

de prés<strong>en</strong>ce qui fait la part belle à la patine du<br />

temps. Et une approche sil<strong>en</strong>cieuse et respectueuse<br />

digne d’un «photographe romantique»<br />

auquel Rudy Ricciotti voue une sincère<br />

admiration : «En revoyant ses photos, j’ai p<strong>en</strong>sé à<br />

Curzio Malaparte comme à Pierre Paolo Pasolini<br />

quand les récits accroch<strong>en</strong>t le cœur.» Par petites<br />

touches, Michel Eis<strong>en</strong>lohr saisit l’âme du Palais<br />

Un lieu, une histoire, une rue, une scène, une<br />

personne : chaque fois que Roland Laboye décl<strong>en</strong>che<br />

son appareil photo c’est une part de<br />

lui-même qu’il offre <strong>en</strong> partage. Petites tranches<br />

de vies plurielles qu’il fait si<strong>en</strong>nes par sa proximité<br />

et son empathie. Un voyou coiffé d’une banane<br />

r<strong>en</strong>contre un flic au costume repassé, un coup de<br />

v<strong>en</strong>t voile de pied <strong>en</strong> cap une none, une femme<br />

au chemisier fleuri se fond dans le décor d’une<br />

pépinière, un chi<strong>en</strong> bondissant et un cheval à<br />

bascule partag<strong>en</strong>t le même élan, triste visage d’un<br />

homme surmonté d’un trophée de tête de<br />

taureau… Quels li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre tous si ce n’est son<br />

regard aimable sur les objets et les g<strong>en</strong>s ? Si ce<br />

n’est sa manière décalée (et caustique) de débusquer<br />

l’inatt<strong>en</strong>du, l’absurde ou l’incongru pour<br />

vriller <strong>en</strong> un éclair le sérieux des appar<strong>en</strong>ces !<br />

et de son château d’eau, l’usure des pierres, la<br />

majesté des caryatides, la vie sil<strong>en</strong>cieuse des<br />

tableaux posés à même le sol, le temps susp<strong>en</strong>du<br />

des réserves, les saisons du parc dont on <strong>en</strong>trevoie<br />

les traces de l’anci<strong>en</strong> jardin zoologique. Une série<br />

romantique peut-être, classique certainem<strong>en</strong>t,<br />

qui laisse au sujet le premier rôle comme la mise<br />

<strong>en</strong> page sans chichi privilégie les photos.<br />

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI<br />

Palais Longchamp, monum<strong>en</strong>tal et secret<br />

Images du Sud, 22 €<br />

R<strong>en</strong>contre et dédicace le 13 juin à 17h30,<br />

Espace culture, Marseille<br />

Exposition au Pavillon M du 12 au 19 juillet :<br />

vernissage et concert le 11 juillet à 18h ;<br />

r<strong>en</strong>contre et dédicace le 12 juillet de 10h à 15h<br />

En tête à tête avec Laboye<br />

Roland Laboye attrape le monde par le petit bout<br />

de la lorgnette, toujours à l’arrière des paysages<br />

ou derrière ses sujets, à tel point qu’on le croirait<br />

invisible. D’abord on sourit, puis on se gausse,<br />

et <strong>en</strong>fin on éclate d’un rire franc face à tant de<br />

situations désopilantes et d’angles de vue<br />

inatt<strong>en</strong>dus ! Fruit du hasard ou d’une mise <strong>en</strong><br />

scène, Le sirop de la rue se déguste par petites<br />

lampées pour faire durer le plaisir. M.G-G.<br />

À lire<br />

Le sirop de la rue, Le Bec <strong>en</strong> l’air, 28 €<br />

À voir<br />

Au Musée des Tapisseries à Aix jusqu’au 2 juin<br />

(04 42 23 09 91), <strong>en</strong> collaboration avec l’association<br />

La photographie (Aix)<br />

Exposition au C<strong>en</strong>tre culturel,<br />

Saint-Raphaël du 15 juin au 3 août<br />

R<strong>en</strong>contre et confér<strong>en</strong>ce le 28 juin à 18h<br />

animée par Rémy Kerténian, responsable<br />

de la Maison de la photographie de Toulon<br />

Photographier ?<br />

Le photographiable réunit les actes du colloque<br />

qui s’est déroulé à la Bibliothèque de l’Alcazar<br />

(BMVR) à Marseille <strong>en</strong> novembre 2009, doublé<br />

d’une exposition intitulée explicitem<strong>en</strong>t Aux<br />

limites du photographiable dont nous retrouvons<br />

certaines œuvres <strong>en</strong> fin d’ouvrage. La proposition<br />

des initiateurs, Michel Guérin et Jean Arrouye,<br />

professeurs à l’université d’Aix-Marseille, s’articule<br />

à partir d’un essai de référ<strong>en</strong>ce Pour une philosophie<br />

de la photographie de Vilém Flusser paru <strong>en</strong><br />

1996 où l’auteur s’interroge sur le rôle programmatique<br />

des techniques et des appareils dans<br />

l’acte photographique, le photographiable. La<br />

notion fait l’objet de nombreux développem<strong>en</strong>ts<br />

et controverses, suscite aussi l’ext<strong>en</strong>sion vers des<br />

champs de réflexion relatifs notamm<strong>en</strong>t à notre<br />

société postmoderne, les limites et possibilités des<br />

technologies, la redéfinition de la photographie,<br />

de ses effets de réalité ou de déréalisation du<br />

monde, appuyés sur divers exemples artistiques<br />

comme sociétaux.<br />

Cette tâche complexe s’ordonne selon trois champs<br />

de réflexion pour autant de chapitres : Questions<br />

philosophiques, anthropologiques, éthiques puis<br />

Esthétiques <strong>en</strong>fin selon les Paradigmes littéraires et<br />

artistiques. On va jusqu’à supposer que dans tout<br />

art du visuel il y aurait du photographique avant<br />

même l’avènem<strong>en</strong>t de la photographie. On suggère<br />

aussi que «les limites du photographiable»<br />

sont «faites pour être reculées et déplacées».<br />

L’ouvrage <strong>en</strong>couragerait à aller plus loin, et à<br />

travailler à la modification de ces limites, pour<br />

toucher à l’ess<strong>en</strong>ce de l’artistique vs des usages<br />

plus prosaïques, à l’instar des artistes prés<strong>en</strong>tés<br />

dans Aux limites du photographiable.<br />

CLAUDE LORIN<br />

Le photographiable<br />

Ouvrage collectif sous la direction de Michel Guérin<br />

et Jean Arrouye<br />

Presses Universitaires de Prov<strong>en</strong>ce, 24 €


Schubert limpide<br />

Maria-Joao Pires était <strong>en</strong> concert le 4 mai au<br />

Grand Théâtre de Prov<strong>en</strong>ce où elle a joué le 2 e<br />

concerto de Chopin <strong>en</strong> compagnie de l’Orchestre<br />

de chambre de Bâle (dir. Trevor Pinnock) (voir<br />

article p. 50). Au disque, la pianiste portugaise,<br />

depuis son Voyage magnifique gravé <strong>en</strong> 1997,<br />

poursuit le dialogue intime qu’elle noue avec<br />

Schubert, tout <strong>en</strong> limpidité dans l’élan instrum<strong>en</strong>tal<br />

qu’elle impulse au clavier, jamais brumeux,<br />

et dont le fil sonore reste ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t mélodique.<br />

Avec les Sonates «tardives» n°16 (D.845) et<br />

la testam<strong>en</strong>taire n°21 (D.960), Pires s’attache à<br />

r<strong>en</strong>dre le caractère méditatif, aéri<strong>en</strong> de ce romantisme<br />

vi<strong>en</strong>nois, si singulier… chefs-d’œuvre qui<br />

touch<strong>en</strong>t à tous coups !<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

Schubert<br />

Maria-Joao Pires<br />

CD Deutsche<br />

Grammophon<br />

477 8107<br />

À l’improviste<br />

L’altiste Guillaume Roy prés<strong>en</strong>te, <strong>en</strong> solo, pour<br />

le label marseillais émouvance, onze plages improvisées<br />

tirées de sessions d’<strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>ts<br />

qu’on suit au fil d’idées, travaillées <strong>en</strong> coulisse ou<br />

écloses sur le vif, motifs polaires sur lesquels on<br />

s’appuie et qui hant<strong>en</strong>t comme une obsession<br />

qu’on ne parvi<strong>en</strong>t pas à refouler. On se frotte à<br />

ses cordes, ondule dans ses boucles <strong>en</strong> trémolos,<br />

on y pr<strong>en</strong>d le jus, s’immisce au creux du sil<strong>en</strong>ce<br />

<strong>en</strong>tre deux souffles, harmoniques qui s’étiol<strong>en</strong>t<br />

vers le grave… Gouttelettes qui claqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> pizzicati<br />

ou sonorités qui sembl<strong>en</strong>t issues de trames<br />

électroniques, <strong>en</strong> trompe-oreille, l’alto chante<br />

d’une voix rauque, ou à peine, à l’oreille et s’<strong>en</strong>hardit<br />

au fil de mots/sons grommelés (Corinne<br />

Frimas), crachotant comme un disque rayé…<br />

Un chemin insolite !<br />

J.F.<br />

From scratch<br />

Guillaume Roy<br />

CD émouvance<br />

EMV 1035<br />

www.emouvance.com<br />

91<br />

C<br />

D<br />

«Chat noir»<br />

Ça comm<strong>en</strong>ce par une Grève générale, slogans de<br />

rue qui s’emboit<strong>en</strong>t aux syncopes d’un reggae<br />

revisité, au riff à l’unisson d’une guitare et d’un<br />

violon jazzy-gipsy… Alors surprise : on perçoit un<br />

discours <strong>en</strong>registré, habilem<strong>en</strong>t intégré, superposé<br />

<strong>en</strong> une espèce de slam distancié et onirique…<br />

on reconnait une voix : celle de… Stéphane Hessel,<br />

l’auteur d’Indignez-vous disparu <strong>en</strong> février<br />

dernier ! Le ton est donné : coloré et festif, composite…<br />

La douzaine de morceaux qui se<br />

succèd<strong>en</strong>t doiv<strong>en</strong>t beaucoup à leur auteur<br />

Philippe Esch<strong>en</strong>br<strong>en</strong>ner (guitare, chant,<br />

bouzouki) et m<strong>en</strong>eur du groupe marseillais<br />

Djanamango, qui arrange aussi des standards de<br />

jazz, des traditionnels tziganes pour piano et<br />

synthé, batterie, violon, basse. À découvrir !<br />

J.F.<br />

Chat noir<br />

Djanamango<br />

CD Voilà du Son<br />

203459<br />

www.myspace.com/<br />

djanamango<br />

Sorti des dunes<br />

De l’electro-pop-rock arabisant made in Marseille.<br />

Tem<strong>en</strong>ik Electric, c’est un peu tout ça, et<br />

mais pas seulem<strong>en</strong>t. Après quelques années de<br />

maturation qui ont façonné une tonalité méditerrané<strong>en</strong>ne<br />

profondém<strong>en</strong>t actuelle, le groupe<br />

sort son premier album, Ouesh Hada ? Même si<br />

la recherche de comparaisons est souv<strong>en</strong>t vaine et<br />

dévalorisante, on p<strong>en</strong>se inévitablem<strong>en</strong>t à Rachid<br />

Taha et c’est, dans ce cas, plutôt gratifiant. «On est<br />

des <strong>en</strong>fants du rock et du chaâbi, de la pop et des<br />

musiques ori<strong>en</strong>tales», explique simplem<strong>en</strong>t Mehdi<br />

Haddjeri, auteur et interprète. Les textes <strong>en</strong> arabe<br />

(algéri<strong>en</strong> dialectal) sont autant de regards sur<br />

le monde d’aujourd’hui. Parfois sans concessions,<br />

<strong>en</strong> résonnance avec les guitares musclées, les<br />

transes gnawa et les rythmes electro. Les instrum<strong>en</strong>ts<br />

traditionnels du Maghreb ne sonn<strong>en</strong>t pas<br />

comme des pièces rapportées par nécessité<br />

culturelle, mais apport<strong>en</strong>t leur douce rugosité.<br />

Ils font eux aussi le son Tem<strong>en</strong>ik. Un son qui<br />

invite à la révolte <strong>en</strong> dansant.<br />

THOMAS DALICANTE<br />

Ouesh Hada ?<br />

L’autre distribution<br />

disponible depuis le<br />

29 avril<br />

Marsatac revi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> galette<br />

Mixatac #1 Bamako est le premier chapitre d’une<br />

collection d’albums faisant suite à des créations<br />

<strong>en</strong>tre musici<strong>en</strong>s marseillais et d’autres rives, initiées<br />

par le festival Marsatac. C’est <strong>en</strong> 2008 que<br />

le projet «Mixup» voit le jour à travers deux<br />

résid<strong>en</strong>ces à Bamako puis à Marseille. Enregistré<br />

au mythique studio Bogolan, l’album offre une<br />

r<strong>en</strong>contre réussie <strong>en</strong>tre la musique mandingue et<br />

les rythmes électroniques, un dialogue <strong>en</strong>tre instrum<strong>en</strong>ts<br />

traditionnels -kora, percussions, balafon,<br />

sokou- et les machines d’aujourd’hui. Plus de<br />

quinze artistes ont participé à l’av<strong>en</strong>ture parmi<br />

lesquels de grands noms de la scène actuelle<br />

mali<strong>en</strong>ne : Ahmed Fofana, Massaran Kouyaté,<br />

Issa Bagayogo, Aboubacar Koné, Neba Solo, Sidiki<br />

Diabaté... On n’est pas étonné de retrouver,<br />

côté français, les alchimistes David Walters et Alif<br />

Tree. À noter : les deux prochains albums de la<br />

série Mixatac prolongeront les créations Essaouira<br />

2009 (disponible fin mai) et Beyrouth 2012<br />

(sortie <strong>en</strong> septembre). Il aurait été dommage de<br />

ne pas immortaliser des concerts qui ont marqué<br />

les esprits.<br />

T.D.<br />

Mixatac #1 Bamako<br />

Orane/L’autre<br />

distribution


94<br />

A<br />

RTS<br />

E<br />

T<br />

S<br />

CIE<br />

N<br />

CES<br />

La carpe et le lapin<br />

Certes, l’exposition Un loisir érudit<br />

n’occupe que deux salles à l’étage<br />

du prieuré de Salagon, mais le<br />

cont<strong>en</strong>u est assez d<strong>en</strong>se, nourri de<br />

repères chronologiques précis et<br />

pose d’intéressantes problématiques.<br />

Il s’agit par le biais de la<br />

prés<strong>en</strong>tation de travaux du marquis<br />

François de Ripert-Montclar, plaques<br />

de verre et photographies appart<strong>en</strong>ant<br />

au fonds du musée de Salagon,<br />

d’aborder la photographie et ses<br />

usages au XIXe siècle. Court historique,<br />

des recherches de Niepce<br />

(1812) à l’inv<strong>en</strong>tion de la plaque à<br />

gélatine sèche (1880), biographie<br />

de la famille de Monclar, s’esquiss<strong>en</strong>t<br />

au fil des photographies. Elles<br />

répond<strong>en</strong>t à la double fonction<br />

d’objet de mémoire, et d’affirmation<br />

de soi, par la collation des possessions<br />

matérielles. «Photographier,<br />

précise l’un des textes exposés, c’est<br />

posséder», se faire photographier,<br />

c’est aussi une rev<strong>en</strong>dication de<br />

classe : par ce biais, la bourgeoisie<br />

montante du XIX e siècle manifeste<br />

son pouvoir. Bi<strong>en</strong> vite cep<strong>en</strong>dant,<br />

avec l’inv<strong>en</strong>tion de la photo-carte<br />

On n’imagine pas la carpe et le lapin<br />

s’aimer d’amour t<strong>en</strong>dre... Pas plus<br />

qu’on ne voit un sci<strong>en</strong>tifique et un<br />

dramaturge collaborer aisém<strong>en</strong>t, tant<br />

leurs champs sont éloignés. C’est<br />

bi<strong>en</strong> l’a priori sur lequel a travaillé<br />

Thibaut Rossigneux lorsqu’il a créé<br />

sa série de Binômes, persuadé que la<br />

sci<strong>en</strong>ce peut «dev<strong>en</strong>ir une source<br />

d’inspiration féconde pour le théâtre<br />

contemporain».<br />

Et il a eu raison ! La r<strong>en</strong>contre <strong>en</strong>tre<br />

Thierry Tatoni, chercheur d’Aix-Marseille<br />

Université, et l’auteur Simon<br />

Grangeat a donné naissance à une<br />

œuvre étonnante. Le premier se dit<br />

écologue, et non écologiste, ce qui<br />

n’<strong>en</strong>lève ri<strong>en</strong> à la t<strong>en</strong>eur hautem<strong>en</strong>t<br />

politique de son discours... très clairem<strong>en</strong>t<br />

repris dans la pièce par le<br />

second, d’une manière humoristique<br />

qui fait honneur à son titre :<br />

Divines désespérances.<br />

Et il <strong>en</strong> faut de l’humour et de la<br />

pertin<strong>en</strong>ce pour faire passer les<br />

perspectives alarmantes de l’humanité<br />

: au rythme où s’accélèr<strong>en</strong>t le<br />

réchauffem<strong>en</strong>t climatique, la pollution<br />

et l’épuisem<strong>en</strong>t des ressources,<br />

«Il va y avoir beaucoup de morts. Oh,<br />

l’espèce humaine ne disparaîtra pas,<br />

il n’y a pas de raisons qu’elle sorte<br />

du schéma classique de l’évolution,<br />

mais sur 6 milliards d’individus, il<br />

n’<strong>en</strong> restera peut-être qu’un, et la vie<br />

sera très différ<strong>en</strong>te.»<br />

C’est tout l’intérêt de cette démarche,<br />

souligné par Thierry Tatoni qui<br />

Objectifs et gélatine<br />

de Disderi, cet art se «démocratise»,<br />

quittant les guéridons, la<br />

photo rejoint les albums.<br />

Plus curieusem<strong>en</strong>t, apparaiss<strong>en</strong>t les<br />

photos-cartes de visite souv<strong>en</strong>t<br />

portraits de personnages importants,<br />

Napoléon III <strong>en</strong> était un<br />

adepte ! On glissait ces photos dans<br />

l’album familial, lustre de la proximité<br />

! La photo-carte connaît aussi<br />

un vif <strong>en</strong>gouem<strong>en</strong>t, on y joue déjà<br />

avec les codes figés qu’imposai<strong>en</strong>t<br />

© Ugo Mechri<br />

avoue avoir pris consci<strong>en</strong>ce grâce à<br />

ce projet de ses difficultés à communiquer<br />

son travail. Bi<strong>en</strong> sûr, on<br />

ne résume pas 30 ans de recherches<br />

<strong>en</strong> une représ<strong>en</strong>tation, mais ce format<br />

mêlant <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> vidéo et texte<br />

théâtral est extrêmem<strong>en</strong>t percutant.<br />

15 Binômes ont vu le jour avec des<br />

biologistes, climatologues, physici<strong>en</strong>s,<br />

immunologistes... D’autres<br />

sont <strong>en</strong> préparation, toujours avec<br />

les mêmes contraintes : une r<strong>en</strong>contre<br />

de 50 minutes <strong>en</strong>tre l’auteur<br />

et le sci<strong>en</strong>tifique, puis deux mois<br />

d’écriture sans contacts autorisés.<br />

La pièce est <strong>en</strong>suite créée par la<br />

compagnie Le s<strong>en</strong>s des mots, dont<br />

les 5 membres se relai<strong>en</strong>t, successivem<strong>en</strong>t<br />

metteur <strong>en</strong> scène, assistant<br />

et acteurs.<br />

«Les sci<strong>en</strong>tifiques ont toujours peur<br />

d’être <strong>en</strong>nuyeux face à des artistes<br />

supposés m<strong>en</strong>er une vie excitante.<br />

Les artistes ont peur de ne ri<strong>en</strong> compr<strong>en</strong>dre,<br />

d’être bêtes.» Élisabeth<br />

Mazev a même rêvé à la veille d’une<br />

r<strong>en</strong>contre avec un mathématici<strong>en</strong>...<br />

qu’elle devait repasser le bac ! Voilà<br />

au grand bénéfice du spectateur<br />

une jolie démonstration qu’il n’y a<br />

pas de rapprochem<strong>en</strong>t impossible,<br />

pour peu que l’on accepte de surmonter<br />

ses appréh<strong>en</strong>sions initiales.<br />

GAËLLE CLOAREC<br />

les poses des balbutiem<strong>en</strong>ts. La<br />

photographie reste néanmoins un<br />

art réservé à une élite, noble ou<br />

bourgeoise. On s’approvisionne chez<br />

Lumière à Lyon (1882), on s’essaie<br />

aux portraits, aux compositions…<br />

on <strong>en</strong>tre à la Société française de<br />

photographie (1852) à celle de Marseille<br />

ou à l’Office aixois (1860).<br />

Les membres de la Société française<br />

d’archéologie, dont notre<br />

marquis fait partie, s’attach<strong>en</strong>t à<br />

L'aperitif au pied du chateau d'Allemagne, dernier quart du XIXe siecle, Musee de Salagon © Francois de Ripert-Monclar<br />

La représ<strong>en</strong>tation de Divines<br />

désespérances a eu lieu le 3 mai<br />

au Théâtre de la Cité (Marseille).<br />

La compagnie Le s<strong>en</strong>s des mots<br />

sera prés<strong>en</strong>te <strong>en</strong> Avignon<br />

p<strong>en</strong>dant tout le festival 2013<br />

avec d’autres Binômes.<br />

Sous les flots<br />

R<strong>en</strong>dez-vous au Point de Bascule<br />

pour un Bar des Sci<strong>en</strong>ces consacré<br />

aux rejets de polluants <strong>en</strong> mer, et à<br />

leur place dans un débat citoy<strong>en</strong>.<br />

Comm<strong>en</strong>t nous emparer de cette<br />

question cruciale pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t<br />

et la santé ? En prés<strong>en</strong>ce de<br />

Philippe Mioche, professeur d’histoire<br />

contemporaine à l’Université<br />

Aix-Marseille, Présid<strong>en</strong>t de l’Association<br />

Mémoire Industrie et Patrimoine<br />

<strong>en</strong> Prov<strong>en</strong>ce, Jacques Mordini, ingénieur<br />

retraité de l’Usine Péchiney,<br />

Yves Lancelot, Océanographe, anci<strong>en</strong><br />

Directeur de recherche au CNRS, et<br />

B<strong>en</strong>jamin Durand, Directeur du<br />

Parc National des Calanques. G.C.<br />

le 16 mai à 18h30<br />

Le Point de Bascule, Marseille<br />

06 11 05 87 54<br />

www.levillagedesfacteursdimages.org<br />

étudier les monum<strong>en</strong>ts antiques et<br />

médiévaux de la région (une mission<br />

héliographique est mandatée<br />

<strong>en</strong> 1851 pour archiver une vaste partie<br />

du patrimoine architectural français.<br />

Mistral y participe). Photographie<br />

de mémoire, photographie sci<strong>en</strong>tifique,<br />

on la retrouve aussi dans<br />

l’espionnage ! Avec le Photo-éclair<br />

de Fetter, que l’on camoufle sous<br />

une veste, dans un chapeau, un<br />

livre, un sac…déjà <strong>en</strong> 1849, il sert<br />

à id<strong>en</strong>tifier les m<strong>en</strong>eurs d’une grève<br />

de tramways. Il est aussi l’instrum<strong>en</strong>t<br />

de prédilection des ancêtres<br />

des paparazzis ! Le droit à l’image<br />

déjà se pose pour une pratique si<br />

<strong>en</strong>racinée dans nos habitudes, que<br />

l’on oublie à quel point elle est<br />

réc<strong>en</strong>te.<br />

MARYVONNE COLOMBANI<br />

jusqu’au 30 juin, Salagon (Mane)<br />

04 92 75 70 50<br />

www.musee-de-salagon.com<br />

Catalogue de l’exposition : 10 €<br />

Voir égalem<strong>en</strong>t : R<strong>en</strong>dez-vous aux<br />

jardins p.11

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!