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La définition d'une stratégie d'intervention - ICOMOS Open Archive

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<strong>La</strong> définition d’une stratégie d’intervention.<br />

<strong>La</strong> definición de una estrategia de intervención<br />

Defining a strategy for intervention<br />

vie avec une nouvelle épouse. Volvent compte aussi, comme les autres<br />

communes, nombre de résidents « intermittents » qui se dirigent vers<br />

l’âge de la retraite. Ceux-là sont en général originaires du nord de<br />

l’Europe : Suisse, Allemagne, Belgique, Angleterre. Pour eux aussi une<br />

installation plus durable au pays de la lavande offre une perspective de<br />

« seconde vie », à moins qu’ils ne s’en tiennent à la « double vie » d’une<br />

résidence alternée.<br />

Tous ces comportements sont autant d’illustrations d’une alliance d’un<br />

nouveau genre entre la ville et la campagne. On pourrait y ajouter les<br />

emplois urbains des épouses des fermiers, qui souvent sécurisent les<br />

paris économiques de la ferme. Et aussi les fréquents mariages entre fils<br />

ou filles de la ville et filles ou fils de la ferme. Ces nouveaux fermiers ou<br />

fermières par mariage sont souvent les plus actifs, les plus inventifs.<br />

Architectures en sursis<br />

Le pays de la Roanne appartient au monde méditerranéen et son<br />

patrimoine bâti peut être assimilé à celui de l’arrière-pays provençal,<br />

aussi bien dans son style que dans ses matériaux et modes constructifs.<br />

Murs de pierre calcaire tout venant, chaînages d’angle de gros appareil,<br />

encadrement des ouvertures en pierre de taille, toits de tuiles canal ;<br />

les habitations reçoivent un enduit et s’ornent de deux ou trois rangs<br />

de génoises, à la différence des bâtiments d’exploitation où la pierre<br />

reste apparente. Sauf dans les bourgs et villages anciennement fortifiés<br />

où les maisons, étroites, se développent verticalement sur deux ou<br />

trois étages sous grenier, la maison paysanne s’étale horizontalement<br />

et se contente d’un seul étage. Dans les villages et hameaux elle est<br />

construite en mitoyenneté sur rue. Elle dispose en général d’un perron<br />

(pesuro) conduisant à l’étage où se trouve le logement, le rez-dechaussée<br />

étant en partie ou totalement réservé aux animaux et au<br />

matériel agricole.<br />

Ce petit patrimoine rural est menacé par trois types de périls : sa<br />

disparition par abandon, sa réinterprétation pour un usage moderne,<br />

son engloutissement dans une dynamique de développement<br />

économique. Dans les trois cas, les « acteurs » urbains sont concernés.<br />

<strong>La</strong> longue dépopulation du pays de la Roanne a laissé des dizaines de<br />

fermes et de bergeries en ruines, dont les vestiges témoignent d’un<br />

passé peu éloigné, un siècle à peine, où toutes les niches du territoire<br />

étaient occupées, cultivées, pâturées. <strong>La</strong> plupart ne subsisteront que<br />

sous la forme d’un toponyme sur une carte. Mais beaucoup ont été<br />

sauvées, presque toujours par des « amoureux des vieilles pierres » 3<br />

venus de la ville. Il en est de même de beaucoup de maisons de village.<br />

Grâce à eux, le tracé de quelques rues et ruelles en perdition reste<br />

lisible.<br />

Vient ensuite le débat quasi insoluble de la restauration de ces bâtisses.<br />

Leurs nouveaux propriétaires ne sont pas des paysans. Le seraient-ils, ils<br />

ne sont pas censés vivre comme autrefois. <strong>La</strong> question est la même pour<br />

les paysans du cru, citoyens modernes avec des besoins modernes. On<br />

veut plus de lumière, des toits plus étanches, des murs plus isolants, des<br />

terrasses sur les aires de battage, des jardins d’agrément sur les anciens<br />

potagers. En outre, les artisans maçons n’ont plus les gestes d’autrefois,<br />

n’ont plus les matériaux tirés de l’environnement naturel immédiat. Ils<br />

s’approvisionnent à la ville.<br />

Ainsi, aux yeux des puristes, des petits outrages sont commis tous les<br />

jours envers l’architecture vernaculaire. Il faut pourtant reconnaître que,<br />

dans l’ensemble, les nouveaux résidents font pour le mieux, avec une<br />

passion certaine pour la petite part de patrimoine « exotique » auquel<br />

ils se sont identifiés. Et quand l’occasion leur en est donnée, ils sont les<br />

premiers à se mobiliser pour la restauration d’une église romane ou<br />

d’un lavoir.<br />

Face à cette sage restitution d’un paysage bâti expurgé de toute l’activité<br />

agricole qui l’avait autrefois engendré, certains hameaux regorgent au<br />

contraire de vie agreste. C’est paradoxalement là que, sauf exception,<br />

le fragile patrimoine est bousculé, submergé par des constructions<br />

adventices, des hangars et des bâtiments d’exploitation construits au<br />

moindre coût, généralement en parpaings de ciment et toits de tôle.<br />

A cela s’ajoute un amoncellement de matériels agricoles réformés et<br />

l’objets divers. Bref, lorsqu’on se réjouit d’un regain d’économie rurale il<br />

<br />

Toutefois, la progression de la sensibilité « écologiste » en milieu rural<br />

commence à faire une place à de nouveaux matériaux « naturels »<br />

dans les exploitations. Il faut aussi se réjouir que, jusqu’ici, le pays de la<br />

Roanne ait échappé à la fièvre des lotissements.<br />

1 Géographe, directeur de recherche IRD, responsable de l’équipe doctorale « Orients<br />

Urbains » (Université Paris X-Nanterre).<br />

2 Cette communication est le condensé d’un texte développé, encore inédit, mais que<br />

l’auteur met volontiers à la disposition des lecteurs intéressés.<br />

3 Cf. notre communication au symposium RehabiMed de Marseille (23-25 septembre<br />

2005), intitulée « Les amoureux des vieilles pierres et ceux qui les habitent par nécessité<br />

». Bien qu’elle s’applique à la sauvegarde des centres historiques des grandes villes, elle<br />

évoque une même dualité d’acteurs.<br />

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