Y a du baston dans la taule vol1-A4-fil - PDF (2.1 ... - Infokiosques.net
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- Le mieux, c’est de monter sur le toit quand les CRS vont débouler, c’est<br />
le seul endroit pour être en sécurité.<br />
- Et <strong>dans</strong> <strong>la</strong> cour, c’est pas bon avance quelqu’un d’assez lâche. Quand<br />
ils arrivent, on se rend...<br />
- Vaut mieux pas. Que tu te rendes ou non, les premiers en prennent<br />
toujours plein <strong>la</strong> gueule.<br />
- Si on al<strong>la</strong>it voir comment il est ce toit, suggère Aldo.<br />
- Hein dis-je. T’as vu ce qu’il pleut Et comment tu veux monter <br />
- C’est ouvert. Y a une trappe, là-bas.<br />
On grimpe. Vue superbe. D’un côté, les ateliers qui brûlent ; tout autour,<br />
le reflet des gyrophares et les projecteurs installés par les flics. Le long <strong>du</strong><br />
second mur d’enceinte, on distingue de petites taches noires immobiles, tous les<br />
vingt mètres environ, les CRS. Et sur le terrain de foot désert, sous <strong>la</strong> pluie<br />
battante, un échiquier solitaire. Plus tard <strong>dans</strong> <strong>la</strong> soirée, les « gardiens »<br />
amenèrent le directeur sur le toit. Pervers en diable : offrir à un directeur le<br />
spectacle de sa prison en f<strong>la</strong>mmes. Même moment, même endroit, des excités<br />
démolissaient les derniers projecteurs. L’idée de ba<strong>la</strong>ncer le directeur en bas les<br />
effleura. Heureusement, son escorte le redescendit rapidement.<br />
À l’heure <strong>du</strong> journal télévisé, on se retrouve à une vingtaine <strong>dans</strong> le petit<br />
local vidéo. On allume les deux télés à <strong>la</strong> fois, zap en main. « Les détenus sont<br />
retranchés <strong>dans</strong> <strong>la</strong> prison. Certains ont pris position sur les toits. » En réalité,<br />
trois cents <strong>la</strong>scars sur quatre cents s’alcoolisent comme des bêtes. S’il y avait un<br />
assaut maintenant, ils n’auraient même pas <strong>la</strong> force d’éviter les coups de<br />
matraque. On nous rappelle que Georges Ibrahim Abdal<strong>la</strong>h, etc. La forteresse<br />
tient toujours. Fin <strong>du</strong> chapitre Saint-Maur. La salle se vide. On reste trois ou<br />
quatre, à regarder <strong>la</strong> suite des actualités. Deux zigotos débarquent :<br />
- Heu... On voudrait prendre les fiches.<br />
- Les fiches <br />
- Prends tout ce que tu veux, dis-je.<br />
Ils ouvrent un p<strong>la</strong>card, s’emparent des mystérieuses fiches :<br />
- On va brûler tout ça, disent-ils en repartant.<br />
Apparemment, certains ne réalisent pas que <strong>la</strong> prison part en fumée, que<br />
demain nous ne serons plus là, avec ou sans fiches. Des voleurs volent des trucs,<br />
les engrangent <strong>dans</strong> leurs cellules. Un amateur d’art a même fauché des tableaux<br />
peints par un autre détenu. Ces débilos doivent considérer <strong>la</strong> révolte comme une<br />
sorte de récréation : cette nuit on se défoule, on fait <strong>la</strong> fête et demain le traintrain<br />
reprendra comme avant... De <strong>la</strong> bière, toujours de <strong>la</strong> bière, le beurrage<br />
intégral, <strong>la</strong> super-rigo<strong>la</strong>de. Passent des types en cagoule – premiers rebelles qui<br />
ont oublié de se démasquer. Un copain très imbibé me tombe <strong>dans</strong> les bras :<br />
- Mon vieux, braille-t-il, c’est le plus beau jour de ma vie ! Le plus beau<br />
jour de ma vie ! Tiens ! Prends une bière !<br />
Glou glou ! Quelqu’un m’offre un joint : c’est <strong>du</strong> bon, <strong>du</strong> b<strong>la</strong>ck. Les<br />
dealers consomment leur stock ; demain, le commerce prendra fin. Je m’assieds<br />
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