Journal du 11 septembre 2006 - Département de sociologie
Journal du 11 septembre 2006 - Département de sociologie
Journal du 11 septembre 2006 - Département de sociologie
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Le Poids-Lu<br />
le journal <strong>de</strong>s étudiant-e-s en <strong>sociologie</strong> au premier cycle <strong>de</strong> l’UQÀM<br />
Édition <strong>du</strong> <strong>11</strong> <strong>septembre</strong> <strong>2006</strong>, volume 1, numéro 3, 4 pages, 200 exemplaires, 200 <strong>de</strong> moins que La Minerve!<br />
Karl Marx, Le Capital<br />
Max Weber, Économie<br />
et société<br />
Émile Durkheim, De la<br />
division <strong>du</strong> travail social<br />
Phillipe Marchand, Pamplet <strong>de</strong> <strong>sociologie</strong><br />
critique traitant <strong>de</strong> la pandémie<br />
sociale que représente la réification<br />
caractérisée par le fétichisme <strong>de</strong> la<br />
marchandise imposé par un régime<br />
capitaliste néo-libéral mondialisé<br />
<strong>Journal</strong> Le Poids-Lu journalsocio@hotmail.com page 1
Le Poids-Lu, c’est...<br />
Après un quatre mois et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong><br />
congé étudiant, bien mérité d'ailleurs, les<br />
universitaires que nous sommes retournent<br />
à la besogne quotidienne. Besogne<br />
ar<strong>du</strong>e, soit, mais ô combien rafraîchissante<br />
lorsque l'on sort <strong>de</strong> l'environnement <strong>de</strong>s<br />
emplois étudiants d'été, souvent marqués<br />
d'horaires impossibles, <strong>de</strong> patrons désespérants<br />
et <strong>de</strong> travaux manuels nous<br />
éloignant sans cesse <strong>du</strong> brassage <strong>de</strong> crâne.<br />
S'il s'agissait seulement <strong>de</strong>s cours, <strong>de</strong>s professeur-e-s<br />
et <strong>de</strong>s travaux, on ne s'ennuierait<br />
pas autant ! Mais, se sont surtout<br />
les nombreuses discussions, débats et<br />
engueula<strong>de</strong>s qui flottent dans les locaux<br />
d'associations étudiantes qui nous manquent<br />
cruellement lors <strong>de</strong> la belle saison.<br />
Adversaires une journée, combattant ami<br />
l'autre, se sont toutes ces têtes, parfois sans<br />
nom, que nous côtoyons en hiver et qui,<br />
par leur absence en été, nous fait apprécier<br />
les mois <strong>de</strong> mai, juin et juillet, mais qui,<br />
toujours par leur absence, nous fait appréciez<br />
également l'arrivée <strong>du</strong> mois <strong>de</strong> <strong>septembre</strong>.<br />
Bonjour à tous et toutes !!!<br />
Et il y a ceux et celles qui commencent<br />
l'université cette semaine. Ces<br />
nouvelles têtes, nouvelles proies pour les<br />
ven<strong>de</strong>ur-e-s d'idées, <strong>de</strong>vront s'acclimater<br />
dans cet univers où la pensée est rapi<strong>de</strong>ment<br />
cataloguée, étiquetée, brochée et distribuée<br />
!!!! Ils et elles <strong>de</strong>vront apprendre<br />
quels sont les combats qui animent les<br />
divers départements, quels sont les débats<br />
qui déchirent les assemblées étudiantes,<br />
quels sont les mêmes débats qui solidarisent<br />
ces mêmes assemblées étudiantes<br />
et, surtout, quels sont les différents<br />
courants idéologiques qui façonnent les<br />
professeur-e-s comme les étudiant-e-s. Et il<br />
y en a d'autres qui ne font que passer par<br />
là. Ceux-là même qui trouvent étourdissant<br />
tous ces organismes et associations,<br />
qui militent pour <strong>de</strong>s causes différentes et<br />
particulières, où l'absence <strong>de</strong> causes communes<br />
est <strong>de</strong>venue leur raison d'existence.<br />
Hé bien, à ceux et celles-là, n'hésitons pas à<br />
leur dire : «Allez, venez faire un tour à l'asso<br />
<strong>de</strong> socio, juste pour basher sur un prof,<br />
tiens !» Il faut commencer quelque part et<br />
souvent ce quelque part se retrouve dans<br />
les éléments communs entre étudiant-e-s,<br />
ici la critique envers nos gourou adorés !<br />
Mot <strong>du</strong> coordo<br />
Pour ceux et celles qui lisent ce journal<br />
pour la première fois, voici brièvement sa<br />
petite histoire. Commencer timi<strong>de</strong>ment<br />
l'an <strong>de</strong>rnier, plusieurs réunions ont eu lieu<br />
à l'automne pour jeter les bases <strong>du</strong> journal.<br />
À l'hiver, il était temps <strong>de</strong> passer <strong>de</strong> la<br />
parole aux actes, ainsi le premier journal<br />
socio, nommé Le Poids-Lu, vu le jour le 6<br />
février <strong>2006</strong>. Il y eu également une secon<strong>de</strong><br />
parution à l'hiver <strong>2006</strong>, soit le 27 mars, plus<br />
imposante, où nous avons osé le format 12<br />
pages. Le nom, Le Poids-Lu, vient d'un<br />
remue-méninges improvisé sur le divan<br />
dans le local <strong>de</strong> l'association étudiante <strong>de</strong><br />
<strong>sociologie</strong>. Pour l'interprétation sérieuse, il<br />
signifie qu'il est un poids dans le département,<br />
et que ce poids, il est lu ! Pour l'interprétation<br />
loufoque, il manifeste un petit<br />
clin d'œil à tous ceux et celles qui pensent<br />
que les étudiant-e-s en <strong>sociologie</strong> ne sont<br />
que <strong>de</strong>s poilu-e-s !!! Bonne lecture et bonne<br />
rentrée.<br />
Bertrand Lavoie, étudiant en <strong>sociologie</strong><br />
Bloc technique<br />
Équipe:<br />
-Hubert Forcier<br />
-Myriam Campeau<br />
-Bertrand Lavoie<br />
-Sophie Renaud<br />
-Pierre-Yves Charpentier<br />
Nous tenons à remercier tous ceux et<br />
celles qui ont participé au journal, ainsi<br />
que toute l’équipe <strong>du</strong> MotDit.<br />
Chaque texte reflète l’opinion <strong>de</strong> son<br />
auteur-e et n’engage en rien le journal.<br />
Dépôt légal, Bibliothèque Nationale<br />
<strong>du</strong> Québec.<br />
Fièrement monté à Verchères, petit<br />
village au bord <strong>du</strong> fleuve.<br />
Le bloc info <strong>de</strong> votre v<br />
asso <strong>de</strong> socio<br />
Bien le bonjour à vous chers étudiants et chères<br />
étudiantes! Un bonjour particulier à nos nouveaux<br />
et à nos nouvelles qui viennent embellir<br />
le paysage sociologique uqamien.<br />
Le retour en classe est maintenant chose faite,<br />
et une nouvelle année scolaire débute. Avec<br />
elle, l'implication ahurissante et reconnue <strong>du</strong><br />
département <strong>de</strong> <strong>sociologie</strong> au premier cycle<br />
reprend <strong>du</strong> poil <strong>de</strong> la bête et s'apprête à une<br />
autre année bien remplie.<br />
En effet, votre asso est toujours là pour vous,<br />
peu importe les innombrables questions qui<br />
peuvent peupler vos esprits «universitairiens»<br />
Tout d'abord, nous tiendrons une première<br />
assemblée générale <strong>de</strong> <strong>sociologie</strong> au premier<br />
cycle le mercredi 13 <strong>septembre</strong> <strong>2006</strong> au A-5020<br />
à 12:30, où il sera surtout important <strong>de</strong> tenir les<br />
élections <strong>de</strong>s nouveaux exécutants et exécutantes<br />
<strong>de</strong> l'année <strong>2006</strong>-2007. À cet effet, la plupart<br />
<strong>de</strong>s postes seront à combler, nous vous<br />
incitons donc fortement à, tout d'abord, vous<br />
présenter en assemblée et, qui sait, vous<br />
présenter à un <strong>de</strong>s postes, tous plus attirants les<br />
uns que les autres.<br />
De plus, il est à noter que, comme l'année<br />
<strong>de</strong>rnière, votre asso fera tout son possible pour<br />
vous faire parvenir l'information qui vous<br />
touche <strong>de</strong> près ou <strong>de</strong> loin, soit par l'envoi <strong>de</strong><br />
courriel aux membres <strong>de</strong> l'AEESPC-UQÀM,<br />
par la pose d'affiches <strong>de</strong> toute sorte au local <strong>de</strong><br />
l'asso, ou par la tenue d'assemblée générale.<br />
Si vous avez le moindre problème, n'hésitez pas<br />
à venir faire un tour au local <strong>de</strong> l'asso au A-<br />
2470, ou à nous contacter au : aeespc@altern.org<br />
Sur ce, nous vous souhaitons une rentrée plus<br />
profitable que jamais. Que la force soit avec<br />
vous !<br />
L'exécutif <strong>de</strong> l'Association <strong>de</strong>s étudiants et<br />
<strong>de</strong>s étudiantes <strong>de</strong> <strong>sociologie</strong> au premier cycle<br />
<strong>de</strong> l'UQÀM (AEESPC-UQÀM)<br />
Le Poids-Lu au cours <strong>de</strong> la session d’automne automne <strong>2006</strong>:<br />
2e parution 3e parution<br />
Date <strong>de</strong> tombée: 16 octobre <strong>2006</strong> 20 novembre <strong>2006</strong><br />
Date <strong>de</strong> parution: 30 octobre <strong>2006</strong> 4 décembre <strong>2006</strong><br />
<strong>Journal</strong> Le Poids-Lu journalsocio@hotmail.com page 2
La page 3, celle où il y a <strong>de</strong>ux textes.<br />
Bien le bonjour à vous, nouveaux étudiants et<br />
nouvelles étudiantes!<br />
Quelle joie <strong>de</strong> voir une relève <strong>de</strong> futurs et <strong>de</strong><br />
futures sociologues aussi valeureuse!<br />
Encore une bourrée <strong>de</strong> beaux pelleteurs <strong>de</strong><br />
nuages et <strong>de</strong> belles pelleteuses <strong>de</strong> nuages!<br />
Nous voici, grâce au coup <strong>de</strong> pouce amené par<br />
l'avènement <strong>de</strong> ce journal velu, en un espace où<br />
je peux, <strong>du</strong> haut <strong>de</strong> mon expérience redoutable,<br />
vous dictez les multiples dogmes qui vous permettront<br />
d'accé<strong>de</strong>r aux différents cercles flous<br />
<strong>de</strong> la vie universitaire et sociologique <strong>de</strong> ce<br />
grand établissement. Tenez vous le pour dit,<br />
cette année sera bien remplie. De tout, tout.<br />
Laissez-moi donc la chance <strong>de</strong> vous lancer au<br />
sein <strong>du</strong> paysage sociologique uqamien, version<br />
«hubertienne», et <strong>de</strong> vous dresser un portrait,<br />
évi<strong>de</strong>mment trop rapi<strong>de</strong>, <strong>de</strong> ce qui pourrait vous<br />
attendre.<br />
Une première année universitaire se résume,<br />
tout au moins dans mon cas, en <strong>de</strong>ux mots :<br />
implication et connaissance.<br />
Visite guidée<br />
En effet, cette première année fut tout d'abord<br />
une ouverture politique et sociale sur le mon<strong>de</strong>.<br />
Le niveau et la qualité possibles d'implications<br />
politiques et sociales sont étonnants, que l'on<br />
pense à une implication au sein <strong>du</strong> mouvement<br />
étudiant, au sein <strong>de</strong>s différents médias étudiants,<br />
ou encore à travers les multiples groupes<br />
qui peuplent ces murs. Les formes d'engagements<br />
sont tellement amples que quelquefois,<br />
elles en viennent qu'à s'entrecouper, voire s'entrechoquer.<br />
C'est d'ailleurs à ce niveau qu'il peut<br />
sembler y avoir nécessité d'amélioration, à<br />
savoir à ce que chacun <strong>de</strong>s acteurs sociaux qui<br />
forment dans sa diversité un lieu commun <strong>de</strong><br />
partage et d'expression <strong>du</strong> mouvement étudiant,<br />
vise à ne pas entraver, par le biais <strong>de</strong> ses multiples<br />
activités, celles <strong>de</strong> groupes qui s'intéressent<br />
souvent à <strong>de</strong>s causes connexes aux siennes.<br />
Face à un tel amas <strong>de</strong> causes rassembleuses,<br />
vous verrez justement en quels points vous pouvez<br />
ou non vous impliquer, et permettre <strong>de</strong> mettre<br />
un terme à ce creux que semble subir les<br />
milieux étudiants, en ce qui concerne le faible<br />
niveau d'engagement d'une forte couche étudiante.<br />
Ce mon<strong>de</strong> est celui <strong>de</strong> l'implication certes, mais<br />
aussi celui <strong>de</strong> la connaissance. Celle-ci est<br />
comme une choppe <strong>de</strong> bière qui, suite à une<br />
bonne lampée, se remplit automatiquement,<br />
comme si <strong>de</strong> rien n'était. Quelle joie, vous direz!<br />
Oui, mais prenez gar<strong>de</strong> à ne pas tomber mala<strong>de</strong>.<br />
Le premier enivrement peut vite être remplacé<br />
par une aversion profon<strong>de</strong>, si le buveur s'y jette<br />
sans protection première.<br />
par Hubert Forcier<br />
En ce qui concerne la connaissance, le but d'une<br />
vocation sociologique est souvent lié à un désir<br />
<strong>de</strong> mieux comprendre le mon<strong>de</strong>. En effet, combien<br />
d'étudiants et d'étudiantes auront inscrit<br />
cette science comme choix universitaire, uniquement<br />
afin <strong>de</strong> mieux savoir se retrouver dans ce<br />
bor<strong>de</strong>l ambiant. Après un an, il me semble toutefois<br />
que la connaissance <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> s'éloigne <strong>de</strong><br />
plus en plus, plutôt qu'elle ne se laisse bercer par<br />
mon désir <strong>de</strong> la saisir. Un an, ce fut assez pour<br />
voir que le mon<strong>de</strong> est hautement plus complexe<br />
que ce que j'aurais pu m'attendre. Il est aussi<br />
beaucoup plus politique qu'il ne me le paraissait<br />
à même date l'an <strong>de</strong>rnier. Politique, ce mot s'agence<br />
maintenant aux moindres situations <strong>de</strong> la<br />
vie quotidienne. L'appropriation partielle <strong>de</strong> la<br />
connaissance permet tout <strong>de</strong> même <strong>de</strong> voir<br />
apparaître la condition <strong>de</strong> l'intellectuel, (à ce<br />
sujet loin <strong>de</strong> moi la prétention <strong>de</strong> m'inclure déjà<br />
dans ce grand cercle) comme celle paradoxale <strong>de</strong><br />
l'éloignement constant entre son niveau d'é<strong>du</strong>cation<br />
à la hausse et sa capacité à se faire comprendre<br />
par ceux et celles qu'il «observe ».<br />
Je m'attar<strong>de</strong>rais encore bien longtemps à <strong>de</strong><br />
telles pensées et à un bilan <strong>de</strong> cette année qui<br />
s'est si vite achevée, mais je me dois d'arrêter, ne<br />
voulant tomber dans le dogmatisme creux et<br />
pensant que la découverte pure est beaucoup<br />
plus captivante que la connaissance totale d'un<br />
mon<strong>de</strong> inconnu. Souhaitons donc que l'accueil<br />
<strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> nouveau pour vous soit aussi fort<br />
que vos plus gran<strong>de</strong>s attentes. Une <strong>de</strong>rnière<br />
chose, j'espère vous voir vous lancer bien vite<br />
dans les méandres <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> merveilleux<br />
qu'est celui <strong>de</strong> la <strong>sociologie</strong>.<br />
Bonne chance!<br />
Tous ces gens assis là, dans les gradins. Tous<br />
avaient déboursé le fruit <strong>de</strong> leur labeur pour<br />
pouvoir assister au grand spectacle. Tous dans le<br />
même but, afin <strong>de</strong> perpétrer une action <strong>de</strong>s plus<br />
innées : rire. Certains d'entre eux en avaient<br />
même oublié la signification, l'émotion qu'il<br />
amène, tellement il ne leur était plus quotidien.<br />
Cela faisait bien son affaire parce qu'au moins,<br />
ils le faisaient manger, et rire à son tour. Mais lui,<br />
c'était d'eux qu'il riait. Ce spectacle incroyable,<br />
tous ces gens mornes, assis à attendre, tellement<br />
conditionnés qu'ils étaient à s'esclaffer qu'un<br />
rien les faisait rigoler.<br />
Ils avaient payé, ça <strong>de</strong>vait être drôle.<br />
Ses gestes, il les savait immoraux, mais jamais ne<br />
les regrettait. En y pensant même, il en jouissait.<br />
Chaque fois qu'il sortait dans les rues il y repensait.<br />
Tous ces gens affolés, pressés, bousculés,<br />
ayant quelque part où aller. Chacun avait sa<br />
petite raison, son pourquoi conditionné à sa<br />
montre. C'était si présent, mais personne ne le<br />
voyait. Tous trop pressés pour l'apprécier : la vie.<br />
En y repensant, il ne s'en voulait point. Ce<br />
La <strong>du</strong>re leçon <strong>de</strong> vie<br />
patient attablé, puant le lait avarié, crachant tous<br />
ses soucis avec une telle angoisse. Il en vibrait,<br />
les yeux aux larmes tellement cela l'affectait.<br />
Mais pourtant son problème n'en était pas un,<br />
mais lui, il l'écoutait… Jusqu'à… VLAN!<br />
Un petit coup, tout petit coup <strong>de</strong> scalpel juste<br />
bien placé. L'entaille qui déjà crachait, lançait le<br />
sang. Les yeux exorbités, il les avait soudain<br />
oubliés. Tous ses petits soucis disparaissaient au<br />
fur et à mesure que cela coulait.<br />
Non, définitivement il le méritait.<br />
C'était la même chose pour ceux-là. Se conditionnant<br />
quotidiennement, s'asphyxiant <strong>de</strong> leur<br />
bâtonnet <strong>de</strong> cancer. Ils s'en pourrissaient les<br />
<strong>de</strong>nts, s'en jaunissaient les mains. Quand <strong>de</strong>vant<br />
lui ils s'assoyaient, l'envie le reprenait. Ils lui<br />
déchargeaient toujours la même sala<strong>de</strong>, jours<br />
après jours, il en mangeait. Inconscients qu'ils<br />
étaient, ne méritant pas ce qu'ils avaient. Le<br />
scalpel toujours si parfaitement affilé, il était toujours<br />
là pour l'ai<strong>de</strong>r. Et VLAN!<br />
Jamais ils ne boiraient leur vieille bouteille.<br />
par Pierre-Yves Charpentier<br />
Jamais ils ne dépenseront l'argent amassé.<br />
Jamais le jour idéal n'arrivera pour leur surprise.<br />
Jamais ils n'attendront plus pour leurs projets.<br />
Plus jamais ils oublieront <strong>de</strong> profiter, remettant<br />
tout toujours trop pour plus tard.<br />
Après cela, il l'appelait, heureusement qu'il le<br />
connaissait. Vingt-cinq minutes et puis partit.<br />
Un autre client passait sans remarquer trace.<br />
Le soir, rentrant chez lui, il passait par un nouveau<br />
chemin, puis s'égarant <strong>de</strong>s heures <strong>du</strong>rant. Il<br />
se retrouvait dans l'inconnu, mais toujours il<br />
savait qu'un boulot l'y attendait. Parce que<br />
désormais ils étaient partout. Toujours si nombreux,<br />
cette race <strong>de</strong> charognards dévorant leur<br />
boulette entourée <strong>de</strong> pain blanchi. Il savait qu'il<br />
ne serait chômeur parce que cette race avait<br />
oublié la vie.<br />
Elle n'est pas un défi ni un prix, mais un don<br />
dont tu es investi. Tu l'oriente à ta façon.<br />
Lui, il donnait la leçon.<br />
Tous autour <strong>de</strong> lui, riant <strong>de</strong> ses acrobaties,<br />
faisant le pitre, le clown, il s'amusait aussi.<br />
<strong>Journal</strong> Le Poids-Lu journalsocio@hotmail.com page 3
Méthodologie 101<br />
Q- Quel est le plus grand problème <strong>de</strong>s sociétés<br />
actuelles selon vous <br />
R- Le plus grand problème, bouf, le plus grand<br />
problème..mmm, ben, premièrement, <strong>de</strong>s<br />
sociétés actuelles, les sociétés occi<strong>de</strong>ntales <br />
Q- Euh, oui…<br />
R- Bien, je dirais que le problème le plus important,<br />
avant <strong>de</strong> le nommer, je dirais qu'il est structurel,<br />
et non ponctuel. Ce qui veut dire qu'il<br />
prend sa source dans les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong>s<br />
sociétés actuelles. Quels sont les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong>s<br />
sociétés actuelles Bon, par exemple le Canada,<br />
ce qui est au fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> cette société, c'est la<br />
liberté indivi<strong>du</strong>elle, les droits indivi<strong>du</strong>els, les<br />
chartes <strong>de</strong>s droits. Ces droits sont une bonne<br />
chose en soi, mais se sont les dérives qui<br />
découlent <strong>de</strong> ces droits là qui représentent le<br />
problème : l'indivi<strong>du</strong>alisme.<br />
Q- Vous pensez que l'indivi<strong>du</strong>alisme est le plus grand<br />
problème <strong>de</strong>s sociétés actuelles Vous ne pensez pas<br />
que c'est, par exemple, les problèmes environnementaux<br />
<br />
R- Attention, je ne dis pas que les problèmes<br />
environnementaux ne sont pas importants.<br />
Mais, je crois que l'indivi<strong>du</strong>alisme en est la<br />
source. L'importance <strong>de</strong> l'indivi<strong>du</strong>, la considération<br />
trop exacerbée <strong>de</strong> la personne crée <strong>de</strong>s problèmes,<br />
tels que ceux qui sont à la source <strong>de</strong>s<br />
changements climatiques, par exemple. Les plus<br />
gran<strong>de</strong>s dérives sociales découlent, pour la plupart,<br />
toutes <strong>de</strong> l'indivi<strong>du</strong>alisme : la dénatalité, la<br />
perte <strong>de</strong> repères collectifs, le déclin <strong>de</strong> la religion,<br />
la méfiance envers la politique et, bien sûr,<br />
les changements climatiques.<br />
Q- De quelles manières l'indivi<strong>du</strong>alisme peut-il<br />
représenter la source <strong>de</strong>s changements climatiques <br />
R- Vous avez une fixation sur les changements<br />
climatiques, vous Vous faites bien, car, si nous<br />
<strong>de</strong>vions faire un «top 5» <strong>de</strong>s problèmes actuels,<br />
l'environnement y figurerait certainement. Les<br />
changements climatiques, donc, représentent<br />
une préoccupation environnementale importante.<br />
Pourquoi l'indivi<strong>du</strong>alisme est la source <strong>de</strong><br />
ce problème environnemental C'est une question<br />
d'incompatibilité. L'environnement et les<br />
questions environnementales sont difficilement<br />
compatibles avec les droits indivi<strong>du</strong>els, parce<br />
que l'environnement, c'est quelque chose <strong>de</strong> fondamentalement<br />
collectif. Il est plutôt rare d'entendre<br />
<strong>de</strong>s militants environnementaux dire :<br />
«Nous <strong>de</strong>vons sauver uniquement la cour<br />
arrière <strong>de</strong> telle ou telle personne.»<br />
L'environnement, parce qu'elle transcen<strong>de</strong> les<br />
indivi<strong>du</strong>s, villes, nations, continents, est obligatoirement<br />
une question collective, ce qui l'oppose<br />
avec les droits indivi<strong>du</strong>els. Ainsi, nous<br />
avons <strong>de</strong>s situations où <strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s se foutent<br />
carrément <strong>de</strong>s questions environnementales, et<br />
Verbatim<br />
1<br />
sur l’indivi<strong>du</strong>alisme<br />
le pire, dans tout cela, c'est qu'ils en ont légalement<br />
le droit ! Il <strong>de</strong>vient dès lors plus que difficile<br />
<strong>de</strong> légiférer collectivement pour éviter <strong>de</strong><br />
telles dérives. La seule chose que les gouvernements<br />
peuvent faire, c'est <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s alternatives<br />
: transports en commun, subventions<br />
pour véhicules hybri<strong>de</strong>s, etc. Mais, ces mesures<br />
ne sont que <strong>de</strong>s baumes que nous appliquons<br />
sans vraiment régler le problème.<br />
Q- Vous pensez que l'indivi<strong>du</strong>alisme est un problème<br />
structurel qui découle <strong>de</strong>s droits indivi<strong>du</strong>els.<br />
Comment voyez-vous la place, dès lors, <strong>de</strong>s droits<br />
indivi<strong>du</strong>els dans les sociétés actuelles <br />
R- En fait, <strong>de</strong>puis les dérives horribles <strong>du</strong> nationalisme<br />
survenu dans certains pays européens<br />
lors <strong>du</strong> début <strong>du</strong> siècle <strong>de</strong>rnier, nous assistons à<br />
une montée impressionnante <strong>de</strong> la place <strong>de</strong>s<br />
droits indivi<strong>du</strong>els dans les sociétés. C'est vrai<br />
que l'exemple allemand était frappant : un État<br />
qui, légalement, légifère pour éliminer <strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s<br />
sur son territoire. Depuis ce temps,<br />
plusieurs dictons expriment bien la situation<br />
sociale <strong>de</strong> l'importance indivi<strong>du</strong>el : «On est<br />
jamais mieux servi que par soi-même», «Il n'y a<br />
pas personne qui va me dire quoi faire», «Tout le<br />
mon<strong>de</strong> est unique», «Fait ce que toi tu veux<br />
faire», «N'écoute pas les autres, n'écoute que<br />
toi», etc. Il y a une idéologie qui s'est formé pour<br />
assurer la promotion <strong>de</strong>s droits indivi<strong>du</strong>els, c'est<br />
la tradition idéologique et politique libérale. Les<br />
fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la tradition libérale assurent la<br />
promotion <strong>de</strong>s droits indivi<strong>du</strong>els dans les<br />
sociétés. Ce qu'il aurait fallu, c'est une tradition<br />
collective qui se développe en parallèle, pour<br />
assurer un équilibre entre les droits indivi<strong>du</strong>els<br />
et les droits collectifs, ce qui n'a pas été fait, ou<br />
mal fait, avec l'exemple soviétique, entre autre.<br />
Q- Qu'enten<strong>de</strong>z-vous par droits collectifs Et <strong>de</strong><br />
quelle manière concevez-vous cet équilibre dont vous<br />
parlez <br />
R- Actuellement, il n'y a qu'un droit collectif qui<br />
est vraiment promu, aux Nations Unies : le<br />
droits <strong>de</strong>s peuples à l'autodétermination. C'est<br />
bien normal, puisque les droits collectifs, par<br />
nature, sont bien plus complexes que les droits<br />
indivi<strong>du</strong>els. Un indivi<strong>du</strong>, tout le mon<strong>de</strong> c'est ce<br />
que c'est. Mais un collectif Il y a un énorme travail<br />
juridique et politique à effectuer ici, soit la<br />
définition <strong>de</strong>s droits collectifs. Et ce n'est évi<strong>de</strong>ment<br />
pas <strong>de</strong>s gouvernements issus <strong>de</strong> la tradition<br />
libérale qui oseront s'aventurer sur ce terrain.<br />
De toute façon, ce serait contraire à leurs<br />
idéaux. Par droits collectifs, nous pourrions dire<br />
qu'il y a le droit à une communauté linguistique<br />
<strong>de</strong> protéger sa langue, par exemple. Sur ce cas,<br />
les Français d'Amérique représentent bien l'exemple<br />
d'une communauté linguistique qui<br />
essaie <strong>de</strong> protéger la langue française dans un<br />
continent <strong>de</strong> plus en plus homogénéisé. Les<br />
Catalans forment aussi un bel exemple. Il y a<br />
aussi le droit à une communauté politique <strong>de</strong><br />
par Bertrand Lavoie<br />
Homme arrosant son asphalte, exemple <strong>de</strong><br />
confrontation entre la liberté indivi<strong>du</strong>elle et<br />
les conscientisations environnementales.<br />
s'édifier en État souverain. L'exemple <strong>du</strong> Québec<br />
illustre très bien cette situation. L'Écosse et la<br />
Corse ont longtemps exprimé ce désir aussi, ce<br />
que l'on nomme les pays Basques aussi, en<br />
Espagne. Tous ces droits collectifs sont extrêmement<br />
difficiles à défendre dans <strong>de</strong>s sociétés où<br />
les droits indivi<strong>du</strong>els en représentent les fon<strong>de</strong>ments.<br />
Que peut-on répondre actuellement à<br />
quelqu'un qui dit : «Moi, j'écoute la musique que<br />
je veux !», «Moi, je parlerai la langue que je veux,<br />
et mes enfants iront dans une école qui enseignera<br />
la langue que je désir qu'ils apprennent !» <br />
De quelle manière promouvoir le droit à la communauté<br />
linguistique <strong>de</strong> protéger sa langue sans<br />
compromettre le droit à la libre expression <strong>de</strong><br />
chacun Cet équilibre est possible, je crois.<br />
Attention, il ne s'agit pas ici <strong>de</strong> compromis entre<br />
les <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> droits. Il serait bien trop difficile<br />
<strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire les droits indivi<strong>du</strong>els, voire<br />
impossibles. Il s'agit plutôt <strong>de</strong> trouver un équilibre<br />
entre les <strong>de</strong>ux. Je pourrais bien voir <strong>de</strong>s<br />
droits indivi<strong>du</strong>els tels qu'ils sont actuellement,<br />
mais encadrer par <strong>de</strong>s droits collectifs. À mon<br />
avis, dès que quelqu'un ou quelque chose<br />
<strong>de</strong>vient collectif, il ou elle <strong>de</strong>vrait en respecter les<br />
droits. Une chanson qui passe à la radio, un livre<br />
qui est écrit, une compagnie qui pro<strong>du</strong>it <strong>de</strong>s<br />
biens, un bar ou un restaurant, etc.<br />
Actuellement, ce n'est que <strong>de</strong>s politiques qui<br />
sont prises pour assurer <strong>de</strong>s principes politiques,<br />
comme les quotas <strong>de</strong> chansons françaises à la<br />
radio. Ce qui <strong>de</strong>vrait se faire en plus, c'est un<br />
respect <strong>de</strong> droits collectifs assurer par le système<br />
juridique. Mais, avant que nous en soyons là, il y<br />
a, comme je l'ai dit, un énorme travail juridique<br />
et politique à effectuer.<br />
1 Verbatim: compte-ren<strong>du</strong> écrit d’une entrevue<br />
orale.<br />
<strong>Journal</strong> Le Poids-Lu journalsocio@hotmail.com page 4