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et si on laissait pousser ? - Saint-Priest

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saint-priest<br />

Envir<strong>on</strong>nement<br />

“Éliminer les mauvaises herbes<br />

est un n<strong>on</strong>-sens biologique”<br />

Écrivain, paysagiste de renommée m<strong>on</strong>diale <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> professeur<br />

à l'École nati<strong>on</strong>ale supérieure du paysage à Versailles,<br />

Gilles Clément est un fervent défenseur de ces plantes<br />

qu'<strong>on</strong> appelle les “mauvaises herbes”. Il a notamment<br />

c<strong>on</strong>çu les jardins du musée du Quai Branly ou ceux de<br />

l'Arche de la Défense à Paris<br />

Dans votre ouvrage Éloge des vagab<strong>on</strong>des,<br />

vous prenez parti pour toutes les mauvaises<br />

herbes qu'<strong>on</strong> veut à tout prix chasser des<br />

espaces publics. Pourquoi est-ce <str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g> important<br />

de les sauvegarder sel<strong>on</strong> vous <br />

D'une manière générale, toute biodiver<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g>té est<br />

importante à sauvegarder. À l'heure actuelle,<br />

avec le bilan écologique qu'<strong>on</strong> c<strong>on</strong>naît, n'importe<br />

quelle interventi<strong>on</strong> sur l'espace ne peut plus faire<br />

l'éc<strong>on</strong>omie d'une réflexi<strong>on</strong>. Ces herbes qu'<strong>on</strong><br />

dit "mauvaises" ne s<strong>on</strong>t pas là par hasard. Elles<br />

perm<str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g>tent à des insectes de se nourrir. Elles<br />

peuvent être importantes pour les abeilles. Elles<br />

appartiennent à un ensemble biologique cohérent<br />

qui est menacé <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> qu'il faut protéger.<br />

C'est un problème m<strong>on</strong>dial <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> certaines municipalités<br />

<strong>on</strong>t décidé de s'en sai<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g>r. Depuis quelques<br />

années, Rennes, Grenoble, Dunkerque, Paris, La<br />

Rochelle <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> d'autres villes encore <strong>on</strong>t défini de<br />

nouvelles politiques face aux produits phytosanitaires.<br />

On voit des insectes revenir, <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> c'est une<br />

b<strong>on</strong>ne chose. Mais la partie est loin d'être gagnée.<br />

Certains agriculteurs <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> les particuliers c<strong>on</strong>tinuent<br />

à faire de gros dégâts.<br />

D'où vient ce besoin de traquer les mauvaises<br />

herbes Pourquoi av<strong>on</strong>s-nous tant de<br />

mal à les accepter <br />

C'est une posture culturelle uniquement. Éliminer<br />

les mauvaises herbes à tout prix est un n<strong>on</strong>-sens<br />

biologique. Cela n'a pas n<strong>on</strong> plus de justificati<strong>on</strong>s<br />

en terme de santé. C'est ancré dans notre civilisati<strong>on</strong><br />

manichéenne, qui repose sur les c<strong>on</strong>cepts de<br />

bien <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> de mal. Or, à bien y réfléchir, une herbe<br />

n'est ni b<strong>on</strong>ne ni mauvaise, elle est. Point.<br />

Ce besoin de maîtriser la nature a toujours été là.<br />

Auparavant il était <str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g>mplement manuel <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> mécanique,<br />

mais depuis le XIX e <str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g>ècle <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> l'arrivée de la<br />

chimie, il pose problème. Dans d'autres civilisati<strong>on</strong>s,<br />

chez les hindouistes ou chez les animistes<br />

par exemple, <strong>on</strong> n'aurait pas idée de tuer la vie<br />

ain<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g>. En Inde d'ailleurs, les lobbies du phytosanitaire<br />

<strong>on</strong>t bien plus de mal à imposer leurs produits.<br />

Des rébelli<strong>on</strong>s citoyennes s'organisent.<br />

On ne peut pas n<strong>on</strong> plus accepter que<br />

les mauvaises herbes col<strong>on</strong>isent tout. Que<br />

faire <br />

Il faut jardiner autrement. Autrefois, le jardinier<br />

était garant d'un ordre, d'une esthétique.<br />

Aujourd'hui, il doit aus<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g> protéger la vie. Pour ce<br />

faire, il doit peut-être jardiner moins, c'est-à-dire<br />

passer moins de temps à faire des gestes c<strong>on</strong>venus<br />

pour obtenir une propr<str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g>é qui n'a aucun sens<br />

dans un jardin, <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> observer plus, pour faire des<br />

gestes précis au moment où il le faut.<br />

Au lieu d'utiliser des produits chimiques, il faudrait<br />

aus<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g> davantage recourir à la lutte biologique<br />

: la coccinelle ou le chrysope mangent les<br />

pucer<strong>on</strong>s, le lait éradique les champign<strong>on</strong>s…<br />

On c<strong>on</strong>naît tout un tas de rec<str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g>tes ancestrales<br />

pas vraiment homologuées mais la pres<str<strong>on</strong>g>si</str<strong>on</strong>g><strong>on</strong> des<br />

lobbies phytosanitaires est telle que certains jardiniers<br />

<strong>on</strong>t peur de dire qu'ils les utilisent. Il faut en<br />

parler <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> ne plus accepter de se taire.<br />

Friche, herbes folles, Gilles Clément<br />

défie les normes <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> faire la part belle au<br />

sauvage. Ici, le jardin du musée du<br />

Quai Branly (en haut) <str<strong>on</strong>g>et</str<strong>on</strong>g> les jardins de<br />

l'Arche de la Défense (en bas), à Paris.<br />

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