16.01.2015 Views

Gbagbo à Fraternité Matin - fratmat.info

Gbagbo à Fraternité Matin - fratmat.info

Gbagbo à Fraternité Matin - fratmat.info

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

<strong>Gbagbo</strong> à Fraternité <strong>Matin</strong><br />

Fraternité <strong>Matin</strong> / Jeudi 17 décembre 2009<br />

19<br />

M. le Président de la République,<br />

soyez le bienvenu. Des voix plus<br />

autorisées que la mienne auront le<br />

temps de vous souhaiter véritablement<br />

la bienvenue au sein du groupe<br />

Fraternité <strong>Matin</strong>. Mais, en attendant<br />

cela, permettez que nous puissions<br />

exprimer notre joie de vous<br />

recevoir à Fraternité <strong>Matin</strong> à l’occasion<br />

des 45 ans de ce groupe de<br />

presse. C’était depuis le 9 décembre<br />

dernier. Vous êtes le troisième<br />

Président de la République à visiter<br />

cette entreprise. Le Président Félix<br />

Houphouet-Boigny, c’était le 9<br />

décembre 1964, pour couper le<br />

ruban symbolique des locaux de<br />

Frat-Mat qui vous accueille. Le<br />

Président Henri Konan Bédié y est<br />

passé en 1994 sous la direction de<br />

Michel Kouamé. Et aujourd’hui,<br />

vous êtes présent parmi nous.<br />

Toutefois, vous faites mieux,<br />

contrairement à vos deux prédécesseurs.<br />

Vous acceptez de répondre<br />

aux questions des journalistes qui<br />

sont là, devant vous. Hier, quand<br />

nous avons fait le recensement,<br />

nous notions 94 journalistes, de 51<br />

organes de presse. Aussi bien au<br />

plan national qu’international. Nous<br />

avons même des confrères qui arrivent<br />

des Pays-Bas. Et comme nous<br />

avons titré ce matin, «le grand<br />

oral», ce sera donc un grand oral.<br />

Nous voudrions donc sincèrement<br />

vous remercier d’avoir accepté,<br />

aussi spontanément, d’être notre<br />

invité à cette tribune que nous appelons<br />

«l’invité des rédactions de<br />

Fraternité <strong>Matin</strong>». Avant vous,<br />

nous avons reçu des hommes politiques<br />

comme le Premier ministre,<br />

Pascal Affi N’guessan, présent ce<br />

matin, des ministres, des directeurs<br />

généraux des sociétés d’Etat, dont<br />

M. Ahoua Don Mello. Vous êtes<br />

notre 10 e et dernier invité de l’année<br />

2009. Et nous voudrions véritablement<br />

vous dire: merci M. le<br />

Président de la République.<br />

Le thème qui nous rassemble, c’est<br />

«De la conquête à l’exercice du<br />

pouvoir d’Etat». Avant de laisser la<br />

parole aux confrères qui sont<br />

nombreux, et qui voudront certainement<br />

poser des questions au<br />

Président de la République, je voudrais<br />

demander au Chef de l’Etat<br />

de nous dire, quels sont ses sentiments<br />

concernant les 45 ans de<br />

Fraternité <strong>Matin</strong>, dont la privatisation<br />

était à l’ordre du jour dès son<br />

accès au pouvoir.<br />

-J’étais élève quand Fraternité<br />

<strong>Matin</strong> est né. Il y a eu même pour le<br />

lancement de Fraternité <strong>Matin</strong>, une<br />

tombola. Je n’ai plus en tête le nom<br />

de celui qui a gagné. Mais, c’était<br />

un de nos amis. Il avait gagné un<br />

million de Fcfa. A l’époque, ça nous<br />

semblait faramineux. Celui qui<br />

avait gagné cette somme nous<br />

paraissait un homme immensément<br />

riche. C’est la deuxième fois que<br />

vous avez parlé de la privatisation<br />

de Fraternité <strong>Matin</strong>. Et votre<br />

Directeur général et vous-même.<br />

Ce n’est pas un débat qu’on peut<br />

cacher. Quand je regarde les pays<br />

où la presse est développée et libre,<br />

je ne vois pas de journal papier qui<br />

appartienne à l’Etat. Que ce soit en<br />

Europe occidentale, en Amérique<br />

du Nord, il n’y a pas de journal<br />

papier appartenant à l’Etat. J’ai<br />

donc effectivement mis à l’ordre du<br />

jour, lors d’un de mes conseils de<br />

ministres, la privatisation de<br />

Fraternité <strong>Matin</strong>. Je pense que c’était<br />

un acte de modernité, de modernisation<br />

de l’Etat. Mais, je n’ai pas<br />

eu à m’adresser au conseil des<br />

ministres pour appliquer cette décision.<br />

On est donc passés là-dessus<br />

rapidement. En conseil des ministres,<br />

c’est le Président qui décide.<br />

C’est sa décision qu’on prend<br />

comme résultat du débat du Conseil<br />

des ministres. Mais, même si le<br />

débat a lieu, c’est pour que le<br />

Président, même s’il a le pouvoir de<br />

décider, écoute au moins ceux qu’il<br />

a nommés. C’est pourquoi, j’ai posé<br />

ce problème. Tous ceux qui étaient<br />

là ont souhaité qu’on laisse<br />

Fraternité <strong>Matin</strong> en l’état. Et nous<br />

l’avons laissé l’Etat.<br />

FERRO M. BALLy:<br />

Nous voudrions soumettre au<br />

Président de la République de<br />

répondre après chaque question.<br />

Permettant de rendre le débat plus<br />

dynamique.<br />

ALFRED DAN MOussA<br />

(Ddr, Fraternité <strong>Matin</strong>):<br />

Excellence M. le Président de la<br />

République, je voudrais très sincèrement<br />

vous traduire la gratitude<br />

de l’Union internationale de la<br />

presse francophone (Upf) pour les<br />

actes que vous posez en sa faveur.<br />

Je voudrais citer à titre d’exemple,<br />

la dépénalisation des délits de<br />

presse, une idée chère à l’Upf. Je<br />

voudrais souligner qu’une chose<br />

est d’avoir réussi cette politique<br />

dans votre pays, une autre est de<br />

faire partager cette idée à vos<br />

pairs, aux gouvernements francophones.<br />

M. le Président de la<br />

République, pouvez-vous lever le<br />

voile de votre stratégie en direction<br />

des pays francophones<br />

-Je n’en ai pas beaucoup, des stratégies<br />

en direction des pays francophones.<br />

Parce que, je pense que la<br />

meilleure manière de communiquer<br />

une idée, c’est de l’appliquer<br />

soi-même. Et sur ce point, je vais<br />

lancer un appel aux journalistes.<br />

D’abord, il faut savoir que nous n’avons<br />

pas dépénalisé les délits de<br />

presse. Nous avons supprimé la<br />

peine d’emprisonnement parce que<br />

les sanctions pénales, sont des peines.<br />

Je regrette que les magistrats ne<br />

les utilisent pas très souvent pour<br />

décourager certains journaux qui<br />

écrivent n’importe quoi. Mais, nous<br />

estimions que ce n’est pas la peine<br />

de mettre quelqu’un en prison à<br />

cause de ce qu’il pense. Moi-même,<br />

j’ai été en prison à cause de ce que<br />

je pense. Mon ami Aboudramane<br />

sangaré a été deux fois en prison<br />

parce qu’il était le Directeur de<br />

publication du «Nouvel Horizon» et<br />

«La Voie», c’était sale pour la Côte<br />

d’Ivoire. Je n’ai pas aimé çela. Et je<br />

n’ai pas souhaité que cela revienne.<br />

Nous avons donc décidé qu’on ne<br />

doive pas condamner un journaliste<br />

à des peines d’emprisonnement<br />

pour des idées qu’il émet. Nous l’avons<br />

fait. Mais, au moment où nous<br />

le faisions, beaucoup de Chefs<br />

d’Etat m’ont dit que ce n’était pas<br />

bon. Et beaucoup d’Ivoiriens, des<br />

responsables politiques, m’ont dit la<br />

même chose. Et que les journalistes<br />

allaient prendre cette liberté pour la<br />

licence. J’ai tenu bon. C’est ma<br />

conviction profonde que çà ne servira<br />

à rien de mettre quelqu’un en<br />

prison à cause de ce qu’il dit. J’ai<br />

donc tenu bon, et nous avons fait<br />

passer cela. Maintenant, c’est vous<br />

qui devriez me donner raison ou<br />

tort. Aujourd’hui, beaucoup d’hommes<br />

politiques ivoiriens, ceux qui<br />

me disaient, hier, de ne pas faire<br />

voter cette loi, viennent me dire:<br />

«on t’a dit et tu ne nous as écoutés.Tu<br />

vois tous ceux-là qui écrivent<br />

n’importe quoi. Ou qui écrivent sur<br />

le compte des autres.» Dans cette<br />

bataille, moi, j’ai fait ma part. Aux<br />

journalistes de faire la leur. En faisant<br />

ma part, j’ai estimé que les<br />

journalistes allaient avoir un sursaut<br />

de responsabilité. Hier encore, j’ai<br />

lu des choses qui n’étaient pas bien.<br />

Alors qu’il suffit de s’<strong>info</strong>rmer. Et<br />

on peut s’<strong>info</strong>rmer. sans faire de<br />

publicité, le journal que j’aime le<br />

plus au monde est «Le Canard<br />

Enchaîné». Il peut passer un an à<br />

faire des recherches pour vérifier<br />

une <strong>info</strong>rmation. Mais, après quand<br />

il voit que l’<strong>info</strong>rmation est juste,<br />

confirmée après des recoupements,<br />

il la déroule. Je vous en prie, ne<br />

nous donnez pas tort. sinon, lorsqu’un<br />

autre Président viendra, il va<br />

remettre les peines d’emprisonnement<br />

et on va recommencer les<br />

mêmes ballets à la Maca. Au<br />

moment où je prenais cette décision,<br />

j’ai discuté avec des Chefs<br />

d’Etat, des hommes politiques ivoiriens<br />

de tous les bords, dont je tais<br />

les noms, qui n’étaient pas d’accord.<br />

Confortons la liberté de la<br />

presse au lieu de la mettre en péril.<br />

ABEL DOuALy<br />

(Frat-Mat):<br />

M. le Président de la République,<br />

on vous a, tout à l’heure, fait don<br />

de deux cadeaux. Dont un rappelle<br />

votre passage à Akouédo en<br />

tant qu’étudiant. Vous l’avez dit.<br />

Mais, aussi, il y a Séguéla, quand<br />

vous étiez enseignant. Alors, on se<br />

demande aujourd’hui, comment<br />

ces divergences de vue de l’étudiant<br />

et de l’enseignant se sont<br />

transformées en lutte politique<br />

pour vous conduire à la<br />

Présidence de la République.<br />

J’enchaîne pour demander au<br />

moment où vous êtes en face de la<br />

presse nationale et internationale,<br />

quel est le bilan de vos 9 ans passés<br />

à la tête de l’Etat.<br />

Vous posez des questions très différentes.<br />

Je vous demanderais de les<br />

saucissonner. Je suis prêt à répondre<br />

à tout.<br />

Comment les désaccords de l’enseignant,<br />

de l’étudiant se sont-ils<br />

transformés en lutte idéologique<br />

Ce ne sont pas des désaccords.<br />

Quand j’étais étudiant, il faut vous<br />

en souvenir, il y avait le parti<br />

unique. Ce n’est pas parce qu’il y a<br />

le parti unique qu’il n’y a pas plusieurs<br />

pensées. C’est pour çà que<br />

nous disons toujours et moi, je le<br />

dis. Je l’ai écrit dans un livre à<br />

paraître dans quelques jours : la<br />

Côte d’Ivoire dont je rêve, n’est pas<br />

celle d’hier. Parce que j’entends<br />

souvent des gens dire: «ah oui !il<br />

faut qu’on revienne à la Côte<br />

d’Ivoire d’avant». Moi, je n’aimais<br />

pas la Côte d’ivoire d’avant. Et je<br />

Le Président saluant Jacob Adjobi, un ancien photographe de Fraternité <strong>Matin</strong>.<br />

ne veux pas qu’on y revienne. Je<br />

veux un pays pacifié, démocratique<br />

et prospère. Je ne veux pas du tout<br />

qu’on revienne à la Côte d’Ivoire<br />

d’avant. Parce que, c’est nous qui<br />

étions en prison. A cause de ce que<br />

nous pensions. Et je ne veux pas de<br />

çà. Je ne veux d’un pays où celui<br />

qui pense différemment de celui<br />

qui est au pouvoir, va en prison. Je<br />

ne suis pas le seul. Comme je suis<br />

aujourd’hui Président de la<br />

République, on retrouve mes traces<br />

dans tel camp militaire. Même<br />

parmi vous les journalistes, il y en a<br />

plusieurs qui ont été dans les camps<br />

militaires. J’étais à Akouédo en<br />

1969, mais ce n’était pas l’arrestation<br />

la plus douloureuse parce que<br />

nous n’y avions fait que 15 jours. Et<br />

à la suite des négociations entreprises<br />

par usher Assouan qui ont<br />

abouti à la rédaction de cette lettre,<br />

nous sommes sortis. Nous avons<br />

passé nos examens. J’étais en année<br />

de licence puis après je suis allé en<br />

exil. Vous avez parlé aussi de<br />

séguéla, là j’étais enseignant, j’avais<br />

eu des problèmes idéologiques<br />

avec le Pdci et j’ai été arrêté, j’y ai<br />

fait deux ans. C’est à séguéla et à<br />

Bouaké que j’ai connu Djéni<br />

Kobena qui était avec moi pendant<br />

les 22 mois plus exactement. J’y ai<br />

rencontré également Hoba Albert,<br />

qui est maintenant secrétaire général<br />

du Conseil économique et<br />

social, Guéi Robert qui était capitaine<br />

à l’Ecole des forces armées (Efa)<br />

où j’ai connu d’ailleurs l’armée.<br />

Mais la leçon que j’en tire, c’est ce<br />

que je vous ai dit tout à l’heure. Je<br />

ne suis pas parmi ceux qui regrettent<br />

la Côte d’Ivoire passée. Je veux<br />

qu’on avance et pour avancer il faut<br />

une Côte d’Ivoire prospère, démocratique.<br />

Il faut bâtir la paix sur la<br />

démocratie et la prospérité. Il ne<br />

faut pas donner aux gens le sentiment<br />

que c’était bon avant. Ceux<br />

qui disent que c’était bon savent<br />

pourquoi ils le disent. Parce qu’ils<br />

n’étaient pas du côté de ceux qui<br />

allaient en prison. Mais avec ceux<br />

qui siégeaient dans les instances où<br />

l’on décidait d’envoyer les gens en<br />

prison. Moi je n’y étais pas.<br />

FERRO M. BALLy:<br />

Est-ce qu’on pourrait préciser la<br />

pensée de M. Abel Doualy qui<br />

souhaitait savoir si c’étaient des<br />

divergences idéologiques.<br />

Moi, j’étais opposé au Pdci-Rda,<br />

donc j’avais une ligne politique.<br />

une chose est d’avoir une pensée<br />

politique, une autre est de soutenir<br />

cette pensée dans une organisation.<br />

Quand nous sommes sortis<br />

d’Akouédo en 1969 et qu’on a<br />

passé la licence que j’ai obtenue, je<br />

suis allé en Europe. A cette époque,<br />

tous ceux qui sortaient de prison, on<br />

les envoyait tous en France, pour<br />

qu’ils débarrassent le plancher.<br />

Même ceux qui n’avaient pas obtenu<br />

la licence. C’est ainsi que Jean<br />

Noël Loukou s’est retrouvé en Aix<br />

en Provence, Assoa Adou à<br />

strasbourg... donc quand nous sommes<br />

arrivés en Europe, nous avons<br />

rencontré un certain Zadi Zaourou<br />

Bernard qui était notre grand frère<br />

et qui nous a pris en charge. On a<br />

travaillé et on se réunissait régulièrement<br />

dans la chambre d’Assoa<br />

Adou à strasbourg. Nous avons<br />

créé une organisation marxiste.<br />

Nous étions quatre : Zadi Zaourou,<br />

Assoa Adou, Traoré Mamadou<br />

appelé « Traoré le Puissant » et<br />

que je viens de retrouver. Il est<br />

maintenant professeur à<br />

strasbourg. Il vient de temps en<br />

temps voir sa maman ici, et en profite<br />

pour me rendre visite. Et moi-

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!