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Kiosque international dclg<br />

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Analyses &<br />

Décryptages<br />

e<br />

15<br />

Clap de fin d’une conférence climatique trop virtuelle pour être honnête...<br />

Le centre de conférence, aussi laid<br />

et aussi énergétivore que la folle<br />

ville de Doha<br />

Par Par Claude-Marie Vadrot :<br />

Politis ( France)<br />

Jusqu’au bout les<br />

couloirs de la<br />

conférence<br />

climatique de Doha,<br />

ont bruissé de<br />

rumeurs et<br />

d’informations plus<br />

ou moins vérifiables.<br />

Ce n’est évidemment pas une<br />

première pour une conférence<br />

internationale de cette<br />

ampleur. Mais cette année,<br />

une grande nouveauté : les textes<br />

imprimés avaient totalement disparu !<br />

Les Nations Unies et les responsables<br />

Qataris ont formellement interdit<br />

toute distribution de communiqués,<br />

de textes et de brochures. Les délégations<br />

ou les (rares) ONG présentes qui<br />

avaient outrepassé cet ukase le premier<br />

jour ont été menacées de représailles<br />

voire de retrait de leurs accréditations.<br />

Pierre Radanne, ancien directeur<br />

de l’Ademe et aujourd’hui responsable<br />

de l’agence Facteur 4 qui<br />

conseille de nombreux pays africains<br />

émergents, a ainsi été interpellé par<br />

deux policiers des Nations Unies<br />

parce qu’il glissait dans les boites à lettres<br />

des délégations une « note de<br />

décryptage » présentant en 90 pages<br />

les enjeux de Doha. Un document en<br />

anglais ou en français qu’il distribue<br />

depuis des années et est très apprécié<br />

par les scientifiques et des politiques<br />

du climat. Il a fallu l’intervention d’un<br />

haut responsable des Nations Unies<br />

pour qu’il soit exceptionnellement<br />

autorisé à distribuer une centaine<br />

d’exemplaire de son étude.<br />

Plus de papiers, donc, sur les<br />

tables, sur les comptoirs ou dans les<br />

présentoirs. Les prises de position, les<br />

discours, les communiqués, les explications,<br />

les lieux de réunion, les<br />

annonces de conférence de presse, les<br />

appels, les protestations ont disparu<br />

dans le gouffre insondable d’Internet.<br />

Explication avancée par les organisateurs<br />

: économie de papier. Inutile de<br />

leur rappeler que le papier est recyclable<br />

et que cette « économie » parait<br />

dérisoire dans l’énorme palais des<br />

congrès dont les milliers de mètres<br />

carrés sont en permanence climatisés.<br />

Manifestement les services de communication<br />

des Nations Unies sont<br />

enchantés par leur idée et râlent si on<br />

leur parle de Green Washing.<br />

Donc, pour les délégations, pour<br />

les participants, pour la presse, pour<br />

les représentants de la société civile, il<br />

ne reste plus que la rumeur ou d’erratiques<br />

messages Internet. Plus invérifiable<br />

que les papiers distribués et<br />

facilement censurable. Les responsables<br />

de l’ONU se récrient : « mais tout<br />

se trouve sur Internet ! Vous nous faites<br />

un procès moyenâgeux, il faut<br />

vivre avec notre temps ». Certes...<br />

Mais le moindre écrit, offert aux passants<br />

de cette agora climatique, avait<br />

ses chances d’être lu, de produire ses<br />

effets. Le discours du plus méconnu<br />

des chefs d’Etat ou de gouvernement<br />

pouvait, à tête reposée, intéresser,<br />

offrir une idée originale ou une solution.<br />

Les communiqués pouvaient<br />

faire réfléchir. Tous ces messages<br />

gisent désormais dans un puits sans<br />

fond dans lequel les recherches d’informations<br />

sont soit épuisantes, soit<br />

vouées à l’échec.<br />

Le fonctionnement d’une conférence<br />

sur le climat est donc devenu<br />

virtuel et les textes se croisent sur la<br />

Toile pratiquement sans se rencontrer.<br />

D’abord parce que personne ne sait<br />

vraiment où les trouver et aussi parce<br />

que nul ne sait à qui les envoyer. La<br />

COP 18, puisque tel est son nom, est à<br />

la fois sourde et quasiment muette.<br />

Penser qu’il puisse s’agir d’une bonne<br />

solution pour écarter toutes les opinions<br />

divergentes, relève évidemment<br />

de la mauvaise foi journaliste.<br />

Pourtant, depuis qu’ils sont arrivés ici,<br />

les journalistes et les participants<br />

naviguent dans le noir. Quand aux<br />

ONG, en dehors des grands noms<br />

associatifs « embedded » dans la<br />

grande machine onusienne qui les<br />

réduit au rôle de courroies de transmission<br />

des idées reçues et des pressions<br />

diplomatiques, elles sont également<br />

sourdes et muettes. Elles sont<br />

d’ailleurs fort peu nombreuses à<br />

Doha. Pour la première fois depuis<br />

Kyoto, la société civile est quasiment<br />

absente. Et les négociations sérieuses<br />

qui ont commencé lundi dernier et se<br />

sont peu à peu intensifié intensifier à<br />

partir de mardi avec l’arrivée des<br />

ministres et des chefs de gouvernement<br />

se sont déroulées à l’abri des<br />

regards et de la contestation. Non plus<br />

au rythme des textes qui circulent<br />

mais à celui des rumeurs. Et ces dernières<br />

sont encore nombreuses vendredi<br />

soir au moment où il semble<br />

apparaître que le Protocole de Kyoto<br />

sera prolongée, y compris avec<br />

l’Australie, mais que le Fonds Vert<br />

destiné à aider les pays les plus pauvres<br />

sera remis à plus tard...<br />

Il n’aura pas été question non plus,<br />

malgré les demandes pressantes des<br />

rares ONG présentes, d’évoquer longuement<br />

la très rapide fonte des glaces<br />

de l’Arctique qui a pourtant été<br />

confirmée il y a quelques jours par<br />

l’étude de 47 experts réunis par la<br />

NASA et le professeur Andrew<br />

Shepered de l’université anglaise de<br />

Leeds. Elle établi pourtant une relation<br />

entre cette fonte accélérée et l’occurrence<br />

d’ouragan comme celui qui a<br />

récemment ravagé New York et la<br />

Côte est des Etats Unis. Explication<br />

simple : les USA, la Canada et la<br />

Russie se réjouissent de l’ouverture,<br />

une grande partie de l’année désormais,<br />

du passage du Nord-Ouest pour<br />

leurs navires. Et pour leurs recherches<br />

pétrolières off shore dans les eaux glaciales<br />

de ces régions.<br />

L’Europe, pour sa part, n’a jamais<br />

pu ni s’exprimer d’une seule voix ni<br />

disposer d’une marge de discussion<br />

cette semaine, en raison de l’attitude<br />

de la Pologne qui a décidé de bloquer<br />

toutes les avancées possibles pour<br />

conserver le droit d’utiliser sans restriction<br />

ses réserves de charbon sans<br />

encourir la moindre sanction.<br />

Il n’aura pas été question d’évoquer<br />

publiquement la reconnaissance<br />

par le HCR, le Haut Comité des<br />

Nations Unies pour les Réfugiés, la<br />

question des « réfugiés climatiques »<br />

déjà évalués à une cinquantaine de<br />

millions. Chiffre qui pourrait atteindre<br />

300 millions au cours des vingt<br />

prochaines années affirment les<br />

experts du GIEC, le Groupement<br />

International pour l’Etude du Climat.<br />

Des experts qui, comme le Français<br />

Jean Jouzel arrivé ici dimanche dernier,<br />

n’auront pas eu la possibilité de<br />

faire distribuer dans la Centre de<br />

conférence, leurs plus récentes analyses<br />

pour inciter à la société civile à<br />

faire pression sur les politiques. Sous<br />

couvert de « modernité » et d’écologie,<br />

la décision de l’ONU et du Qatar<br />

de supprimer le papier, s’apparente<br />

donc bien à une censure... C-M. V<br />

ALGERIE NEWS Lundi 10 décembre 2012

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