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Kiosque international<br />
Analyses &<br />
Décryptages<br />
EDITO<br />
Baas Airlines<br />
Issa Goraieb, L’Orient Le<br />
Jour / Liban<br />
Aplus d’un titre, le raid<br />
aérien lancé mercredi<br />
par Israël contre la Syrie<br />
apporte un élément<br />
absolument nouveau, et non des<br />
moindres, à la dimension régionale<br />
de la terrible crise dont ce<br />
pays est depuis deux ans le théâtre.À<br />
cette opération, la Syrie qui,<br />
en dépit de ses sanglants déboires,<br />
continue de se poser en fer de<br />
lance de la lutte contre Israël s’est<br />
promis d’apporter une réponse<br />
surprenante. Ce qui serait franchement<br />
surprenant, c’est qu’il y<br />
ait, pour changer, ne serait-ce<br />
qu’un semblant de riposte. Car il<br />
n’y eut aucune réaction de<br />
défense quand les avions frappés<br />
de l’étoile de David rasèrent, il y a<br />
quelques années, un site nucléaire<br />
aménagé avec l’aide des Nord-<br />
Coréens près de Deir ez-Zor. Ou<br />
encore quand ils franchirent le<br />
mur du son à basse altitude audessus<br />
de Damas, faisant voler en<br />
éclats toutes les vitres du palais<br />
présidentiel.<br />
L’humiliation est bien plus<br />
cuisante cette fois, puisque l’on<br />
voit un régime usant massivement<br />
de sa force aérienne pour<br />
écraser une population en révolte,<br />
mais qui se garde bien d’envoyer<br />
ses valeureux pilotes affronter<br />
l’intrus. Artiste de la propagande,<br />
voilà pourtant que le pouvoir<br />
baassiste s’empresse de brandir ce<br />
spectaculaire développement<br />
comme la preuve éclatante, indiscutable,<br />
d’une collusion entre<br />
l’ennemi extérieur et les bandes<br />
terroristes de l’intérieur. Puérile<br />
argumentation, que rend plus<br />
ridicule encore la version officielle<br />
de l’objectif détruit : un<br />
centre de recherches où la fine<br />
fleur du génie militaire baassiste<br />
planchait studieusement sur la<br />
production ou la mise à niveau<br />
d’armements conventionnels. On<br />
n’a pas été jusqu’à soutenir que<br />
ces recherches de pointe ôtaient le<br />
sommeil aux généraux d’Israël...<br />
La cible effectivement attaquée<br />
– un convoi d’armements en<br />
route vers le Liban – en dit long,<br />
néanmoins, sur les préoccupations<br />
et motivations réelles de<br />
l’État hébreu. Une profusion de<br />
mises en garde ont été lancées ces<br />
derniers temps, à Tel-Aviv comme<br />
à Washington, contre un éventuel<br />
transfert à la milice chiite des<br />
armes chimiques que détient la<br />
Syrie, et Israël procède ostensiblement<br />
à la distribution de masques<br />
à gaz à sa population. Sans en<br />
venir à de telles extrémités cependant,<br />
des envois de missiles sol-air<br />
et antichars destinés au<br />
Hezbollah, comme cela était probablement<br />
le cas mercredi, suffisaient<br />
amplement, semble-t-il,<br />
pour allumer toute une série de<br />
clignotants rouges et provoquer le<br />
raid de mercredi.<br />
Reste à se demander si, dans la<br />
cacophonie de l’actuel débat sur<br />
la nouvelle loi électorale,<br />
quelqu’un de responsable à<br />
Beyrouth s’est seulement inquiété<br />
de savoir à quelle éventualité précise<br />
devaient parer les armements<br />
interceptés et détruits. Et, le cas<br />
échéant, si ce responsable est allé<br />
jusqu’à demander des explications<br />
à une milice qui a déjà<br />
entraîné le pays tout entier dans<br />
une guerre dévastatrice et qui met<br />
en péril le providentiel bouclier<br />
qu’est la résolution 1701 de<br />
l’ONU.<br />
Des manifestants surprises se<br />
sont invités au deuxième anniversaire<br />
de la révolution. Habillés en<br />
noir, ceux que l'on nomme les «<br />
Black Block » prônent le recours à<br />
la violence pour lutter contre le<br />
régime des Frères musulmans. On<br />
les remarque dès le premier coup<br />
d’oeil. Masqués, cagoulés, vêtus<br />
entièrement en noir, des dizaines<br />
de personnes ont suivi le flot<br />
constant des manifestants. Leur<br />
apparition a été brutale et s’est<br />
imposée aux quatre coins du<br />
pays.<br />
Black Block, derrière les masques noirs,<br />
la violence<br />
Aliaa Al-Korachi, Ahram<br />
Hebdo / Egypte<br />
Au bout de leurs bras, ces<br />
manifestants venus<br />
d’ailleurs, qui s’autoappellent<br />
Black Block,<br />
ont brandi des drapeaux noirs sur<br />
lesquels ils ont inscrit « Sang<br />
contre sang, balles contre balles »<br />
et « Nous sommes l’anarchie pour<br />
éviter le désordre ». Leurs slogans<br />
contrastaient avec les banderoles<br />
des autres manifestants, appelant<br />
davantage à « l’action pacifique »<br />
qu’à la violence. Malgré leurs<br />
revendications différentes, ces<br />
activistes se sont placés en garants<br />
de la sécurité des manifestants. Ils<br />
étaient toujours au premier rang<br />
dans les affrontements face aux<br />
forces de l’ordre.<br />
L’identité de ces jeunes « Black<br />
Block » reste encore inconnue.<br />
On ne connaît ni leur identité, ni<br />
leur nombre. Il existe seulement<br />
une page Facebook, créée à la mijanvier,<br />
qui a récolté pas moins de<br />
20 000 « J’aime » en une journée.<br />
La raison de ce manque d’information<br />
est très simple : les « Black<br />
Block » ne sont ni mouvement, ni<br />
organisation. Il s’agit plutôt d’une<br />
« tactique », d’une manière de<br />
manifester qui respecte plusieurs<br />
règles. Tout d’abord, les « Black<br />
Block » n’ont ni chef, ni membres,<br />
chacun manifestant selon sa propre<br />
volonté. Ils agissent dans une<br />
sorte d’anarchie organisée. A<br />
l’abri derrière leurs masques et<br />
leur anonymat, ils mènent des<br />
actions directes, en solo ou en<br />
groupe. Leurs actions préférées<br />
visent en grande majorité tous les<br />
symboles matériels du capitalisme<br />
ou les agents des forces de<br />
l’ordre. Les masques qu’ils portent<br />
empêchent les policiers de les<br />
cibler et d’arrêter un individu en<br />
particulier. Les origines des Black<br />
Block remontent en 1980, à<br />
Berlin-Ouest. A cette date, les<br />
autorités de la ville décident de<br />
mettre fin aux occupations d’universités<br />
et aux squats. En réaction,<br />
des jeunes, bien décidés à<br />
protéger leur logement éphémère,<br />
s’habillent en noir et descendent<br />
affronter, en face-à-face, les forces<br />
de l’ordre venus les expulser. Le<br />
terme « Black Block » réapparaîtra<br />
à plusieurs reprises avec, à<br />
chaque fois, une nouvelle cause à<br />
défendre. En 1991, des personnes<br />
vêtues de noir protestent violemment<br />
contre la guerre en Iraq. En<br />
1988, des cagoules sombres profitent<br />
de l’intérêt médiatique d’une<br />
conférence de l’OMC pour casser<br />
des succursales de banques et des<br />
magasins tels que Gap, Levi’s ou<br />
McDonald’s.<br />
Révolutionnaires ou<br />
casseurs ?<br />
Face à ce passé souvent ancré<br />
dans la violence, les manifestants<br />
égyptiens ont douté des réelles<br />
intentions des hommes en noir.<br />
Certains ont pris leur distance dès<br />
le premier jour, les accusant de<br />
porter atteinte au caractère pacifique<br />
de leur combat. Pour<br />
preuve, une série d’actes de violence<br />
ont été revendiqués par les «<br />
BB ». A Charqiya, les Black Block<br />
ont encerclé la maison du président<br />
avant d’être dispersés par les<br />
forces de l’ordre. Devant le palais<br />
présidentiel, à Al-Ittihadiya, ils<br />
ont devancé les manifestants<br />
pour enlever les barbelés et ouvrir<br />
la route. A Suez, c’est le commissariat<br />
qui a été visé. A chaque fois,<br />
ce sont les mêmes témoignages.<br />
Des hommes habillés en noir,<br />
visage caché, attaquent les bâtiments<br />
officiels. Du prime abord,<br />
on dirait que leur principale cible<br />
est Mohamad Morsi. Pour faire<br />
face à ces attaques imprévisibles,<br />
le comité de la sécurité nationale<br />
de la Chambre basse a organisé<br />
une réunion d’urgence. Il s’agissait<br />
pour eux de comprendre le<br />
danger que représente les Black<br />
Block pour mieux les combattre.<br />
Malgré leur manque de hiérarchie,<br />
les Black Block ont tout de<br />
même diffusé un communiqué<br />
sur le Net. Il est clairement écrit<br />
qu’ils ne visent pas « les institutions<br />
de l’Etat, mais celles des<br />
Frères musulmans ». Ils menacent<br />
ces derniers « d’une escalade douloureuse<br />
» si les milices de la<br />
confrérie n’arrêtent pas le « terrorisme<br />
systématique » contre le<br />
peuple égyptien. Ils ajoutent que<br />
ces attaques ont aussi constitué «<br />
un message pour montrer l’échec<br />
ALGERIE NEWS Lundi 4 février 2013<br />
de la gouvernance ». Pour autant,<br />
les « black block » se déclarent<br />
sans affiliation politique et sans<br />
appartenance quelconque à<br />
aucun groupe. Les Black Block ne<br />
sont d’ailleurs pas les seuls à prodiguer<br />
la violence au sein des<br />
manifestations. « Egales » ou «<br />
Faces Noires » ont aussi fait leur<br />
apparition, d’abord sur la toile,<br />
puis dans la rue égyptienne. Selon<br />
plusieurs spécialistes sécuritaires,<br />
la présence de ces groupes en<br />
Egypte est un réel danger car,<br />
apparaissant masqués, ils donnent<br />
la chance à des intrus de s’y<br />
infiltrer pour détruire le pays sous<br />
le nom de ces Black Block. La présence<br />
de cette tendance en Egypte<br />
suscite bien des craintes. S’agit-il<br />
réellement de la première apparition<br />
des Black Block en Egypte ?<br />
Ou ces derniers ont-ils déjà joué<br />
un rôle dans les événements troublants<br />
des deux dernières années ?<br />
S’agirait-il d’un début de l’ère de<br />
milices ? Pour la sociologue Azza<br />
Korayem, « l’émergence de ce<br />
groupe est un indice de l’état de<br />
l’instabilité par laquelle passe le<br />
pays, qui secrète des phénomènes<br />
contradictoires et conflictuels. Il<br />
est difficile de nommer ceux qui<br />
recourent à la violence et soulèvent<br />
le slogan du chaos des révolutionnaires.<br />
L’action du Black<br />
Block est contre-productive pour<br />
la mise en place d’une alternative<br />
politique ». En réponse aux actes<br />
des Black Block, « la brigade islamiste<br />
» a diffusé une vidéo dans<br />
laquelle elle menace de mort les<br />
anarchistes visant la chute du<br />
régime.