Il manque, dans l'organisation de la région métropo<strong>le</strong>, une autorité capab<strong>le</strong> de dominer <strong>le</strong>s intérêtsparticuliers, à la manière de Paul Delouvrier (1914-1995), devenu, en 1961, délégué général audistrict de la région de Paris.Le parallè<strong>le</strong> entre Christian Blanc et Paul Delouvrier, l'archétype du « proconsul » gaulliste, estéclairant. Il montre que, comme aux débuts des années 1960, Paris et sa région sont à un momentdécisif de <strong>le</strong>ur histoire, même si Paul Delouvrier n'a pas laissé que de bons souvenirs. Au rebours desopinions « graviéristes » de son temps, il a eu <strong>le</strong> mérite de concevoir un « schéma directeur »ambitieux pour la région parisienne (<strong>le</strong>s vil<strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> RER...). Mais l'éclatement de cel<strong>le</strong>-ci en demultip<strong>le</strong>s pô<strong>le</strong>s était une erreur, on s'en rend compte au<strong>jour</strong>d'hui.Politiquement, la situation dont a hérité son lointain successeur est inextricab<strong>le</strong>. Les élus de l'UMPsont divisés - c'est un défi supplémentaire - sur <strong>le</strong> sens à donner au Grand Paris de Nicolas Sarkozy.Les uns, comme Roger Karoutchi, <strong>le</strong> chef de fi<strong>le</strong> de la droite francilienne, prônent des formu<strong>le</strong>s decoopération soup<strong>le</strong>, librement consentie. Les autres, tel <strong>le</strong> sénateur Philippe Dallier, sont partisansd'une fusion de Paris et de ses trois départements limitrophes. Jean-Paul Huchon, lui, aborde affaiblison duel avec Christian Blanc. Il a été condamné, en février 2007, à six mois d'emprisonnement avecsursis et, surtout, à un an d'inéligibilité pour « prise illéga<strong>le</strong> d'intérêt ». Son procès en appel estimminent.Bertrand Delanoë apparaît du coup comme l'homme de la situation. Le maire (PS) de Paris s'estopportunément démarqué du président de région en expliquant qu'il était prêt à dialoguer avecChristian Blanc. Il sait que Paris, parce que c'est Paris, a tout à gagner à un rapprochement avec sesvoisins, décidé par l'Etat. Jusque-là, il devait déployer des trésors de diplomatie pour par<strong>le</strong>r avenircommun avec <strong>le</strong>s élus de la région, tant <strong>le</strong>ur susceptibilité est à vif. Surtout, à la faveur des é<strong>le</strong>ctionsmunicipa<strong>le</strong>s, M. Delanoë s'est débarrassé des Verts, qui ne forment plus, au Conseil de Paris, ungroupe charnière. Les tours voulues par <strong>le</strong> maire se feront, c'est un signe.Bertrand Le Gendre---------------------------------------------------------Affaibli par <strong>le</strong>s municipa<strong>le</strong>s, Nicolas Sarkozy peine à imposer à la droite un Grand ParisLE MONDE | 19.04.08 | 13h50 •Exit <strong>le</strong> projet de créer un Grand Paris ? Depuis <strong>le</strong> revers des é<strong>le</strong>ctions municipa<strong>le</strong>s, l'Elysée et ladroite parisienne semb<strong>le</strong>nt avoir renoncé à sortir <strong>le</strong>urs ciseaux pour découper une nouvel<strong>le</strong> structureinstitutionnel<strong>le</strong> au coeur de la région I<strong>le</strong>-de-France. Pour renforcer l'attractivité économique de larégion et développer son réseau de transports, Nicolas Sarkozy avait pourtant, <strong>le</strong> premier, en juin2007, esquissé l'idée de créer une "communauté urbaine" à l'échel<strong>le</strong> de l'agglomération parisienne.Dans l'esprit du chef de l'Etat, il s'agissait d'imaginer une solution administrative pour mutualiser <strong>le</strong>smoyens financiers, à l'intérieur d'une zone de 6,5 millions d'habitants. Ce territoire est celui qui connaît<strong>le</strong> plus d'écarts de richesses entre ses col<strong>le</strong>ctivités. Et dispose, en même temps, de la manne desrecettes de taxe professionnel<strong>le</strong> de Paris et du quartier d'affaires de la Défense. Encore faudrait-ildépasser <strong>le</strong>s intérêts particuliers des maires et des départements.Or, la droite est sortie affaiblie des é<strong>le</strong>ctions municipa<strong>le</strong>s et cantona<strong>le</strong>s dans la région. Pour M.Sarkozy, il est devenu plus diffici<strong>le</strong> d'imposer aux barons des Hauts-de-Seine ou aux maires UMP dela petite couronne d'aliéner <strong>le</strong>urs prérogatives - au sein d'une métropo<strong>le</strong> dominée politiquement parParis et son maire PS, Bertrand Delanoë. "Si <strong>le</strong> Grand Paris doit uniquement permettre à la capita<strong>le</strong>d'exercer son imperium sur <strong>le</strong>s communes limitrophes, j'y suis hosti<strong>le</strong>", a prévenu, <strong>le</strong> 17 <strong>avril</strong>, RogerKaroutchi, président du groupe Majorité présidentiel<strong>le</strong> au conseil régional.PROJETS FÉDÉRATEURS
Candidat déclaré aux é<strong>le</strong>ctions régiona<strong>le</strong>s de 2010, ce dernier avait promu, en décembre 2007, "unestructure métropolitaine décisionnaire". M. Karoutchi défendait, la veil<strong>le</strong> des municipa<strong>le</strong>s, un "syndicatmixte" entre communes à l'échel<strong>le</strong> de la métropo<strong>le</strong>. Il estime au<strong>jour</strong>d'hui que pour accélérer <strong>le</strong>s grandschantiers en I<strong>le</strong>-de-France, la solution passe "par une nouvel<strong>le</strong> impulsion et un investissementfinancier de l'Etat plus fort". Plutôt qu'une nouvel<strong>le</strong> "gouvernance", il fonde ses espoirs dans ladétermination de Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du développement de la région-capita<strong>le</strong> àdéfinir, "avant l'été", une "dizaine de grands projets fédérateurs" régionaux.L'idée d'un Grand Paris conserve toutefois un défenseur acharné à droite. Le sénateur (UMP) deSeine-Saint-Denis, Philippe Dallier, propose dans un rapport re<strong>mis</strong> au Sénat, début <strong>avril</strong>, de fusionnerla capita<strong>le</strong> et ses trois départements limitrophes (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne)."L'Etat n'a plus d'argent", plaide-t-il. La seu<strong>le</strong> façon de dégager des moyens est de supprimer deséchelons institutionnels. M. Dallier assure qu'il n'est pas "isolé". Le 14 <strong>avril</strong>, parmi la centaine demaires, conseil<strong>le</strong>rs régionaux ou par<strong>le</strong>mentaires UMP réunis pour l'écouter au conseil régional, pas unne lui a apporté un soutien explicite.A gauche aussi, l'idée de créer un Grand Paris continue de diviser. Les Verts et communistes à laRégion plaident pour <strong>le</strong> renforcement de grandes "intercommunalités" sur <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> des "péta<strong>le</strong>s demarguerite", autour de Paris. Président du groupe PS au conseil régional, Jean-Paul Planchou adéfendu, <strong>le</strong> 17 <strong>avril</strong> devant <strong>le</strong>s élus régionaux, un rapport d'experts qui démontre <strong>le</strong> risque pour lamétropo<strong>le</strong> de se couper du reste de l'espace régional. Même avec <strong>le</strong>s fortes rentrées fisca<strong>le</strong>s de Pariset des Hauts-de-Seine, conclut l'étude, l'agglomération ne pourrait à el<strong>le</strong> seu<strong>le</strong> financer ses transports,ses efforts de logement, ses pô<strong>le</strong>s de recherche. El<strong>le</strong> a donc besoin du soutien financier de la région."On sort enfin d'un débat cantonné à des slogans faci<strong>le</strong>s", sur <strong>le</strong> Grand Paris, s'est réjoui M. Huchon.Béatrice JérômePlaine CommuneLaboratoire du Grand Paris ?Entretien donné au Nouvel ObsAlors que <strong>le</strong>s esprits s'échauffent, <strong>le</strong> président de la plus grande intercommunalité d'I<strong>le</strong>- de-France,Patrick Braouezec, propose sa vision de la future métropo<strong>le</strong>. F<strong>le</strong>urie...Plaine Commune et ses huit vil<strong>le</strong>s est la plus grande intercommunalité de l'I<strong>le</strong>-de-France. Faut- il êtrecommuniste et pauvre pour pouvoir se marier au<strong>jour</strong>d'hui ?Patrick Braouezec Dans la mandature précédente, c'est vrai, six des huit vil<strong>le</strong>s avaient des mairescommunistes. L'initiative est venue de Saint-Denis qui était alors en p<strong>le</strong>in développement. Nous nevoulions pas grandir en tournant <strong>le</strong> dos aux diffi cultés des autres : Aubervilliers, Stains, La Courneuve,Vil<strong>le</strong>taneuse, Pierrefitte, Epinay et l'I<strong>le</strong>-Saint-Denis. Ces communes avaient plutôt intérêt àadhérer à Plaine Commune et à sa charte d'aménagement élaborée en commun. Ail<strong>le</strong>urs en I<strong>le</strong>-de-France, la plupart des vil<strong>le</strong>s ne veu<strong>le</strong>nt pas s'allier par crainte d'avoir à partager <strong>le</strong>urs richesses. Lesin- tercommunalités existantes n'ont souvent qu'une ambition protectionniste - <strong>le</strong>s riches restent entreriches - ou sont à la recherche d'un effet d'aubaine : ne pas payer la Dotation urbaine de solidarité.Les 8 vil<strong>le</strong>s ont-el<strong>le</strong>s gagné quelque chose dans cette alliance ?Quand je suis devenu maire de Saint-Denis en 1991, Pierrefitte voulait attirer des entreprises sur sonterritoire pour bénéfi cier de la taxe professionnel<strong>le</strong>. Saint-Denis réfl échissait au développement deson pô<strong>le</strong> universitaire et Stains voulait faire des opérations de lo- gement. Trois objectifs dont lacompatibilité n'était pas évidente. Il y avait des disparités de taxe professionnel<strong>le</strong>. Pierrefi tte avait untaux à 30% et Saint-Denis, à 17%. Grâce au principe de la solidarité fi nancière, et à la <strong>mis</strong>e en placed'un taux unique, autour de 20%, chaque vil<strong>le</strong> a pu adapter ses projets à son territoire. Au<strong>jour</strong>d'hui,Pierrefi tte va accueillir <strong>le</strong>s Archives nationa<strong>le</strong>s et el<strong>le</strong> ne soucie plus de sa taxe professionnel<strong>le</strong>puisque Saint-Denis partage ses recettes. L'interco a aussi multiplié par deux la capacitéd'investissement sur l'ensemb<strong>le</strong> des vil<strong>le</strong>s, par 1,3 à Saint-Denis mais par 4 ou 5 à Vil<strong>le</strong>taneuse ouEpinay.Plaine Commune peut- el<strong>le</strong> ser vir de modè<strong>le</strong> pour <strong>le</strong> Grand Paris ?Je me garderai bien de par<strong>le</strong>r comme ça, je suis vacciné contre <strong>le</strong>s modè<strong>le</strong>s. En revanche, PlaineCommune est un exemp<strong>le</strong> qui pourrait servir de matrice. La future métropo<strong>le</strong> ne doit pas être