livret de l'exposition Post Mortem - Helios

POSTMORTEM ?27 NOV 2009 • 30 MAI 2010

Exposition co-produite par le Département du Rhôneet l’Institut national d’archéologie préventive (Inrap).CommissariatChristian Goudineau, professeur au Collège de FranceJacques Lasfargues, directeur des musées d’archéologie du RhôneComité scientifiqueFrédérique Blaizot, Institut national d’archéologie préventiveJean-Claude Golvin, Centre national de la recherche scientifiqueMatthieu Poux, Université Lyon 2 LumièreSarah Rey, Collège de FranceHugues Savay-Guerraz, Musée gallo-romain de Lyon-FourvièreLaurence Tranoy, Université de La RochelleRemerciements aux organismes prêteursBibliothèque universitaire de Bâle, SuisseMuseo della Civilta Romana, RomeMusée Bargoin, Clermont-FerrandMusée d’Archéologie nationale, Saint-Germain-en-LayeMusée Saint-Raymond, musée des Antiques, ToulouseMinistère de la Culture et de la CommunicationDRAC, Service régional de l’Archéologie AuvergneDRAC, Service régional de l’Archéologie Rhône-AlpesCette exposition a reçu le label « exposition d’intérêt national »du Ministère de la Culture et de la CommunicationRéalisationMusée gallo-romain de Lyon-Fourvière, service des expositions temporaires :Jean-Claude Chadefaux, Marie-Laure Cuvillier, Matthieu Souche, Robert Berthodin, Franck BroginRégie des collections : Maria ParaskevaMoulages : Mélanie Lioux, Eddy TellesCopies céramiques : Jean-Jacques Dubernard, Poterie des Chals,Roussillon (Isère) avec le concours de Armand Desbat et Georges CardosoDessins : Jean-Claude Golvin, Marie-Noëlle BaudrandRestauration des collections :CREAM centre G. Chapotat, Vienne (Isère)Atelier Lionel LefèvreEmmanuel DesrochesPhotos : Christian Thioc et Jean-Michel Degueule2

SOMMAIRE1a- Veillée funèbre ....................................................................................................61b- La mort exposée .................................................................................................71c- Derniers adieux ...................................................................................................81d- Mémoire des défunts.........................................................................................92- Le cortège funèbre......................................................................................10 - 113- Tout pour les funérailles.....................................................................................124a- Monde des vivants, monde des morts...........................................................134b- Le tombeau des Deux Amants ........................................................................144c- Masques de Larves ..........................................................................................155- Quand les morts dialoguent avec les vivants..................................................156- Bûcher funéraire.................................................................................................167a- Après la crémation............................................................................................177b- Fours culinaires................................................................................................188a- Epitaphe de Blandinia Martiola .......................................................................188b- Epitaphe d’Aufidia Antiochis............................................................................198c- Epitaphe d’Ancharia Bassa ..............................................................................199- Dépôt de crémation en ossuaire ......................................................................2010- Dépôt de crémation mixte ...............................................................................2111- Tombe de Primilla..............................................................................................2212a- Sarcophage en marbre...................................................................................2312b- Sarcophage de Calpurnia ...............................................................................2313a- Monuments funéraires de sévirs augustaux..............................................2413b- Monument de M. Claudius Cotta ...................................................................2413c- Monument de la famille Aufidius ..................................................................2514- Inhumation ........................................................................................................2615- Inhumation ........................................................................................................27Quelques épitaphes ................................................................................................2816- Sépulture d’un chien ........................................................................................2917a- Tombe d’un nourrisson ..................................................................................3017b- Sépulture en amphore ...................................................................................3118- Vases ossuaires................................................................................................3119- Fosse rituelle.....................................................................................................3220- Libations............................................................................................................3221- L’archéologie funéraire .....................................................................................3322- Le bûcher ..........................................................................................................3423- Les dépôts de crémation.................................................................................3524- Les inhumations...............................................................................................3625- Les tombes d’enfants ......................................................................................3626- Commémorations.............................................................................................3727- Les Martres de Veyre........................................................................................3728- L’énigme de l’ascia ...........................................................................................383

4PLAN EXPOSITION “ POST MORTEM ? “

1a - VEILLÉE FUNÈBREÀ Rome comme dans les provinces, les Romains nourrissent à l’égard de la mortune forme de crainte superstitieuse. Elle est vécue comme une souillure temporairequi affecte toute la famille du défunt et sa maison, considérées comme« funestes ». Cette situation de crise est signalée, au niveau de l’entrée, par deslampes éclairées et des branches de pin ou de cyprès.Le rite des funérailles ou funus vise à mettre un terme à cette situation de crise, quine prend fin qu’avec la sortie et l’inhumation de la dépouille. L’exposition du corps surson lit de mort dressé dans l’atrium, la principale pièce de réception, met en œuvreune succession de rituels immortalisés par les textes et les représentationsfigurées : dernier baiser, fermeture des yeux, lavage, onction et habillement de ladépouille, déclamation de formules rituelles, offrande monétaire dite « du denier deCharon »...Le bas-relief funéraire des Haterii, conservé au musée du Vatican, nous en offre uninstantané saisissant : au chevet du mort s’active toute une foule de familiers etd’esclaves, réunie au son des musiciens, à la lueur des lampes, des torches et desbougies, dans une atmosphère baignée d’effluves d’encens...Difficiles à appréhender sur le plan archéologique, ces rites nécessitent certains accessoiresqui se retrouvent parfois parmi le mobilier funéraire déposé dans lessépultures : lits, chars et masques funéraires, ustensiles de toilette, flacons àonguents, lampes ou monnaies, se rattachent principalement à cette étape.6

1b - LA MORT EXPOSÉEDans cette reconstitution d’une veillée funèbre, telle qu’elle aurait pu avoir lieu àLyon au début du second siècle de notre ère, le corps du défunt est exposé sur sonlit mortuaire (lectus funebris) disposé dans la pièce principale de la maison (atrium),les pieds face à la porte, en position de recevoir ses hôtes comme il le faisait de sonvivant. Les atriums des grandes maisons aristocratiques mises au jour dans lecentre de la colonie de Lugdunum ont certainement accueilli ce type de cérémonies.Devant la porte et sur le rebord des fenêtres sont placées des lampes à huile, desbranches de pin ou de cyprès (arbre consacré aux dieux des Enfers, qui ne repoussejamais après avoir été coupé), en guise d’avertissement pour les passants quiseraient tentés de pénétrer et de s’exposer à la souillure d’une maison devenue« funeste ».Dans les tombes, les lits funèbres ne sont conservés que sous la forme de piedsen fer et de décors d’applique en os ou en ivoire soumis au feu du bûcher. Le lit estéclairé de toutes parts par des bougies et des lampes à huile portées par descandélabres en bronze ou disposées près du défunt. Ces supports se retrouventtrès fréquemment dans le mobilier funéraire, de même que les brûloirs à encens encéramique qui servaient à masquer les odeurs dues à la décomposition du corps.Au pied du lit est dressée une table, chargée de mets et de boissons destinés aubanquet funéraire. La pièce est ornée de guirlandes de fleurs et de fruits apportéespar ses proches, semblables à celles représentées sur la stèle d’une défunte retrouvéeà Lyon.7

1c - DERNIERS ADIEUXLa veillée du corps est l’occasion d’accomplir toute une série de rites deséparation, qui visent autant à honorer le défunt qu’à s’assurer de sondépart définitif. Leur durée varie en fonction du statut social des familles :de trois à sept jours pour les plus riches, à quelques heures, pour les moinsfortunés.Fermer les yeux du mort (oculos condere) en constitue, comme de nosjours, la première étape. En témoignent les paupières closes du visage dela jeune Claudia Victoria, moulé « d’après nature » pour la réalisation deson masque funéraire. Le fils du défunt ou le membre de sa famille le plusproche l'embrasse sur la bouche pour recueillir son dernier soupir.On l’appelle ensuite à trois reprises et à voix haute (conclamatio), à l’aidede formules standardisées ou poétiques dont les épitaphes perpétuent lesouvenir.Déposé à terre, le corps est lavé à l’aide d’une éponge imbibée d’eauchaude, puis oint d’huiles parfumées. De cette étape témoignent peut-être,dans les tombes, la présence de vases destinés aux ablutions, ainsi queles innombrables balsamaires (unguentaria) en verre ou en céramiqueutilisés pour le conditionnement d’onguents ou de décoctions parfumées.Le défunt est ensuite habillé d’une toge blanche, de ses habits de fonctionou d’un simple linceul de couleur blanche ou noire. Il est souvent paré desbijoux et insignes de son rang, comme les anneaux d’or des chevaliers,qui sont généralement incinérés avec le corps (Properce IV, 7, 9). Dans lemême temps, on place dans sa bouche ou sur ses paupières une monnaiedestinée à régler le passage de l’âme sur le fleuve des enfers. Ce rituel, ditdu « denier de Charon », est emprunté aux Grecs. Il est attesté à Lyon parles nombreuses pièces de monnaies retrouvées dans les sépultures.Le défunt est souvent équipé d’une lampe à huile qui l’accompagnera dansla tombe, destinée à éclairer les ténèbres lors de son voyage dans l’audelà.8

1d - MÉMOIRE DES DÉFUNTSL’une des dernières étapes du rituel consiste à réaliser un masque dudéfunt, qui permettra d’en conserver une image la plus fidèle possible.Le terme d’imago désigne à l’origine les masques en cire apposés sur levisage du mort, ornés de peintures et de pierres colorées, puis montéssur des bustes et exposés dans des niches ou des armoires ménagéesdans l’atrium. Au fil du temps, ces masques font place à de véritablesportraits funéraires en pierre, dont les fouilles de Lyon livrent denombreux exemples. La mise en scène de ces portraits dans les atriumsdes grandes familles aristocratiques valorise l’ancienneté de leur lignée,proportionnelle au nombre d’images d’ancêtres (imagines maiorum)qu’elles exhibent à leurs hôtes.Les moulages originaux sont soigneusement conservés, afin de permettrede nouveaux tirages. L’un d’eux a été découvert en 1874 à Lyon,lors de travaux de construction d’une ligne de chemin de fer passantpar la rue de Trion. L’empreinte en relief d’un masque funéraire, déposéavec le corps d’une fillette dans une tombe en dalles surmontée d’uneinscription, dédiée par sa propre mère « aux dieux Mânes et à la mémoirede Claudia Victoria, âgée de dix ans, un mois et onze jours ». Du moulageen plâtre de son visage ne nous est parvenue qu’une épreuve réalisée aumoment de la découverte. Ses traits tendus dans la mort, ses orbitesenfoncées et sa bouche légèrement crispée, reflètent la souffranceendurée lors des derniers instants.Le « masque » original, probablement moulé durant la veillée, neconstitue en fait que l’empreinte en négatif à partir de laquelle étaientréalisés un ou plusieurs portraits en positif. Ces tirages en cire permettaientde reproduire le visage à l’infini, sous la forme de masques oude bustes en pierre. La position de l’objet aux pieds du squelette sembleexclure, en l’occurrence, qu’il ait été porté par la défunte au moment deson enfouissement, à la manière des masques funéraires connus dans lemonde oriental, mycénien ou égyptien.9

2 - LE CORTÈGE FUNÈBREComme pour la veillée du corps, le cortège funèbre qui conduisait le défunt jusqu’àsa tombe est une étape des funérailles qu’on connaît mal. Les textes ne sont pasd’une grande précision probablement parce que les rites funéraires étaient siancrés dans le quotidien, qu’il semblait inutile de les décrire en détail. Dans l’espritdes Romains, la religion et le culte des morts étaient deux réalités bien séparées.Aucun prêtre ne participait au cortège : la mort était perçue comme une souillure.Toute personne qui croisait un cortège devait ce jour là ne plus s’approcher destemples. « La mort est un repos et le repos s’accommode de la nuit », prétendaientles plus conservateurs. Les flambeaux allumés en plein jour rappelaient qu’enprincipe les funérailles devaient avoir lieu la nuit, afin de ne pas « souiller les yeuxdes hommes par un spectacle de mauvais augure ».Le cortège est ouvert à une assistance nombreuse, variable en fonction du statutsocial du défunt. Ici, on suppose que c’est un riche habitant de Lugdunum, unpersonnage influent dans sa cité. A l’arrière, d’abord ses affranchis, qui dépendentencore de leur ancien maître. Puis ses clients, ceux qu’il a protégés et entretenus deson vivant, éventuellement dans le cadre professionnel. Enfin, les personnagesofficiels, les amis proches et la famille. Tous ne participeront pas aux différentesétapes de la cérémonie, seuls les plus proches du défunt seront admis autour de sonbûcher.10

À l’avant du cortège, des musiciens et une troupe de pleureuses professionnellesdont les familles les plus fortunées s’attachent les services. Les cheveux défaits,le visage couvert de poussière, elles miment les gestes du plus profond désespoir,accompagnés de chants rythmés par les flûtes et les cors. Cette mise en scènefaisait partie des rites funéraires. Chacun savait qu’elle n’avait rien à voir avec unetristesse sincère.11

3 - TOUT POUR LES FUNÉRAILLESAucun texte ni aucune découverte n’atteste l’existence de boutiquesspécialisées. Mais la diversité des objets liés aux funérailles rend leurexistence plausible, sans oublier les différentes fêtes et commémorationsauxquelles participaient les familles et les amis du défunt. Outrel’abondante vaisselle de terre cuite, souvent brisée rituellement au coursdes cérémonies, on utilisait de grandes quantités d’huiles parfumées etd’encens, du vin et de la nourriture, des fleurs et des fruits, ainsi que desobjets réservés à un usage cultuel, comme des vases miniatures ou desstatuettes.12

4a - MONDE DES VIVANTS, MONDE DES MORTSDepuis une vingtaine d’années, l’archéologie funéraire a connu en Franceun développement considérable, autant par le nombre de fouilles que parle renouveau de ses méthodes. Entre 1990 et 2008, à Lyon, sur les 77opérations de fouilles préventives concernant l’époque romaine, 33 ontporté sur des tombes. Toute la périphérie de la ville a révélé des ensemblesfunéraires au départ des grandes voies.Conformément au droit romain, les sépultures sont localisées horsdu centre ville. À Lyon, où l’on ne connaît pas de rempart, la limite queles tombes ne devaient pas franchir n’était pas visible dans le paysage.Les résultats des recherches récentes amènent à nuancer l’image traditionnelledes « nécropoles » à la périphérie de la ville. Les tombesconstituent plutôt des ensembles qui s’intercalent dans les vides du tissuurbain, et font la transition entre des zones artisanales, des entrepôts,des maisons. Si les voies ont un rôle attractif indéniable, certains ensemblesfunéraires en sont éloignés, notamment les plus modestes,dépourvus de monuments. Ils occupent parfois des lieux humides oumême des bâtiments en ruines.13

4b - LE TOMBEAU DES DEUX-AMANTSJusqu’au début du 18e siècle, on voyait sur la rive droite de la Saône,vers l’entrée nord de Lyon, ce petit monument appelé le tombeau desDeux-Amants. Il fut détruit en 1707, car il gênait la circulation. Sa fonctionétait déjà une énigme. Sa situation, au croisement de deux chemins, etl’absence d’inscription funéraire ont conduit certains à y voir un petitsanctuaire de carrefour. Cette hypothèse était rejetée par ceux qui leconsidéraient comme un mausolée. On n’en sait pas plus aujourd’hui.Cependant, sa forme et sa localisation à l’extérieur de la ville, en bordured’une voie qui longeait la Saône, conviendraient bien pour un tombeau.Il doit son appellation à une légende populaire qui rapporte que deuxamants, après s’être longtemps cherchés de par le monde, étaient mortsde joie en se rencontrant à Lyon. C’était « le lieu d’un sépulture commune,afin que ceux-là ne soient pas séparés dans la mort qui s’étaient aiméspendant la vie ».14

4c - MASQUES DE LARVESCes masques qui devaient être placés sur les murs d’enclos des ensemblesfunéraires sont censés représenter les Larves, les esprits des mortslaissés sans sépulture et qui reviennent tourmenter les vivants.5 - QUAND LES MORTS DIALOGUENT AVEC LES VIVANTSLa plupart des monuments funéraires dotés d’une inscription sont placésau bord des voies, pour être vus par tous. À travers son épitaphe, le défunts’adresse souvent au passant pour lui demander de perpétuer sonsouvenir par la lecture ou l’inciter à jouir de la vie pendant qu’il estencore temps.Aux dieux Mânes, au repos éternel de Lucius Rufinus. J’ai de mon vivant,gravé cette épitaphe afin que, lorsque mon âme goûtera le repos parmiles Ombres, habitantes des bords du Styx, et que mon corps, subissant laloi du destin, aura pris gîte dans cette maison faite d’un bloc de pierre,elle soit un témoin survivant de mon existence, et que ma voix, conservéepar ces lignes confiées au marbre, revive par ta voix, qui que tu sois,passant, qui t’arrêteras pour les lire.Ici repose Rottio, autrefois plein de jeunesse et de vigueur. A ce tombeau,qu’il s’est préparé pour lui-même, il a joint bientôt celui de sa nourriceMarciane, et ensuite celui de Verina, sa sœur de lait, et il les a dédié sousl’ascia par les soins de Claudius Sequens, son patron.Lyon 5e, Fourvière, clos de l’Antiquaille.Entré au musée au début du 19e siècle.15

6 - BÛCHER FUNÉRAIRELe rite de la crémation existait en Gaule avant la conquête romaine, maisil s’est généralisé avec la romanisation. Il est majoritaire à Lyon jusqu’aumilieu du 2e siècle. Les plus grands bûchers étaient dressés au-dessusde fosses. Une fois la combustion achevée, elles contiennent les restesdu défunt, ainsi que les vestiges des objets qui l’accompagnaient. Leurfouille minutieuse, le relevé précis de tous les éléments découverts (os,graines, charbons, fragments de céramique, clous, verre...), et enfin demultiples analyses permettent de proposer de telles reconstitutions.Autour du lit funéraire ont été déposés des objets, souvent rangés surdes étagères. La vaisselle de table tient une large part, jusqu'à cinquanterécipients sur les bûchers lyonnais les plus anciens. Certains contiennentde la nourriture (de la viande, des légumes), ainsi que des fruits, despâtisseries ou du pain. On retrouve souvent des céramiques brisées et enpartie calcinées : c’est la vaisselle utilisée au cours de la cérémonie,brisée ensuite dans le bûcher en cours de combustion. L’archéologie illustreainsi l’importance du banquet funéraire partagé (symboliquement)par les vivants avec le défunt et les dieux.D’autres objets jouaient un rôle particulier au cours des funérailles,comme les flacons à parfum ou les instruments de toilette. Enfin, figurentparfois des objets personnels du défunt, souvent mutilés pour périr aveclui. La perche servira à activer les flammes en cours de combustion.Lyon 5e, rue Commandant Charcot 2001 ;Clermont-Ferrand, La Grande-Borne, 2002.Datation : 1er-2e siècle16

7a - APRÈS LA CRÉMATIONLe bûcher ne constitue pas, en général, la sépulture définitive. Une fois lacrémation achevée, une partie des os est prélevée pour être transportéeailleurs. C’est le moment du prélèvement qui est reconstitué : les os ontété triés, puis lavés. Ils seront ensuite placés dans une urne en plomb quisera enfouie dans le sol, ou dans un monument en pierre. Une cruche enterre cuite a été brisée et les fragments ont été jetés dans la fosse. Il s’agitpeut-être du récipient qui contenait le vin avec lequel on a lavé les os.Après comblement de la fosse, l’emplacement du bûcher est parfoissignalé par un petit tertre de cailloux.Lyon 5e, rue Commandant Charcot 2001 ;Clermont-Ferrand, La Grande-Borne, 2002.Datation : 1er-2e siècle17

7b - FOURS CULINAIRESPlusieurs ensembles funéraires de Lyon comportaient des fours rudimentaires,creusés à même le sol, utilisés pour la cuisson de la nourritureau cours des funérailles et des repas commémoratifs sur les tombes.Ils sont à rapprocher des débris de vaisselle culinaire et d’amphoresretrouvés dans des fosses dépotoirs, à proximité. Ce sont les témoins dece que les familles apportaient pour cuisiner, manger et boire au coursdes repas funéraires.Lyon, périphérique Nord, 1996Datation : 2e-3e siècle8a - EPITAPHE DE BLANDINIA MARTIOLAÀ partir du IIe siècle, le monument funéraire présente généralement laforme d’un autel et les épitaphes deviennent parfois longues. La dédicaceaux dieux Mânes (abrégé DM pour D(iis) M(anibus), devient la règlegénérale, ainsi que la mention et la représentation de l’ascia (outil figurésur la première ligne). Les dates de naissance et de décès ne sont pasindiquées, mais on précise parfois, comme ici, la durée de la vie.Aux dieux Mânes et à la mémoire éternelle de Blandinia Martiola, jeunefemme pleine d’innocence, morte à l’âge de dix-huit ans, neuf mois etcinq jours ; Pompeius Catussa, de la cité des Séquanes, artiste stucateur,à son épouse incomparable, remplie de bonté à son égard, qui a vécuavec lui cinq ans, six mois et dix-huit jours, pure de toute souillure, a élevéce tombeau et aussi pour lui-même et l’a dédié sous l’ascia.Toi qui lis ces lignes, va au bain d’Apollon, ce qu’avec ma femme j’aisouvent fait et voudrais encore faire si cela était possible.Lyon 5e, quartier Saint-Georges ; découverte en 1815.Datation : 2e-3e siècle18

8b - EPITAPHE D’AUFIDIA ANTIOCHISCe coffre de marbre était destiné à l’urne qui contenait les cendres de ladéfunte.Aux dieux Mânes d’Aufidia Antiochis, son mari Sextus Aufidius Thiasus afait ce tombeau pour son épouse très chère.Datation : 1er-2e siècle8c - EPITAPHE D’ANCHARIA BASSALes plus anciens monuments funéraires de Lugdunum, mausolées ousimple stèles, remontent à l’extrême fin du Ier siècle avant J.-C. Les textesdes épitaphes sont alors très brefs, et se limitent au nom du défunt.Ancharia Bassa, affranchie de Quintus, repose ici.Lyon 5e, Fourvière, quartier de Trion ; découverte en 1885.19

9 - DÉPÔT DE CRÉMATION EN OSSUAIREUne fois la crémation achevée, une partie des restes a été prélevée, puisenfouie ailleurs. Les archéologues distinguent plusieurs types de dépôts,dont deux sont reconstitués ici.Dans le dépôt de crémation en ossuaire, une partie des ossements brûlésont été prélevés, lavés puis rassemblés dans un vase, le plus souvent enterre cuite. Cet ossuaire est ensuite déposé dans un monument de pierreou, comme ici, dans une fosse. Il est accompagné de plusieurs objets : unflacon à parfum brisé, une cruche, dont le col a été volontairement cassé,ainsi que quelques coupelles, placées sur une petite étagère. Les vasesà liquide (la cruche) et ceux destinés aux nourritures solides (lescoupelles) sont toujours séparés. L’analyse de la forme de la fosse etde la position des objets permet de conclure que l’ensemble n’était pasrecouvert de terre, mais occupait un espace vide, probablement sous unecouverture de bois.Lyon 9e, Vaise, rue Berthet, 2000.Datation : milieu du 1er siècle20

10 - DÉPÔT DE CRÉMATION MIXTELe terme de dépôt mixte désigne une fosse qui contient à la fois unossuaire (avec quelques-uns des ossements brûlés) et une partie desrésidus non triés de la crémation. Deux objets ont été déposés près del’ossuaire : un flacon à parfum et une cruche. L’ensemble avait étédisposé dans une sorte de coffre en bois. Le couvercle pouvait être retirépour les libations. À l’extérieur du coffre, avant de combler la fosse, on arépandu en vrac une partie des résidus de la crémation : ossementsbrûlés, débris de verre fondu et de céramique, clous. Ce type de tombeobéirait au double impératif du rituel romain : recouvrir de terre unepartie des restes du défunt (ce sont les résidus de la crémation), tout enlaissant une autre partie accessible aux libations (dans le vase-ossuaire).Lyon 5e, 19 rue des Granges, 2003Datation : milieu du 1er siècle21

11 - TOMBE DE PRIMILLACe petit monument funéraire porte une courte épitaphe : « Aux dieuxMânes. A la mémoire éternelle de Primilla, sa fille, Terentius Pritto a faitfaire (ce monument) ». La défunte, parée de pendants d’oreilles et d’uncollier, est représentée tenant un coffret à bijoux. C’est l’un des très raresportraits funéraires connus à Lyon. À la différence d’autres régions de laGaule, où le défunt est volontiers représenté dans l’exercice de sa profession,l’art funéraire lyonnais se signale par sa grande sobriété. Cetteabsence d’image est compensée par des inscriptions d'une qualitéde gravure exceptionnelle, l'épitaphe constituant le seul ornement dumonument. Les trois autels situés derrière vous en constituent de bonsexemples.Lyon 5e, quartier de Trion, 1885.Datation : 3e siècle.22

12a - SARCOPHAGE EN MARBRECette cuve de sarcophage est décorée d’un motif géométrique fréquent,dit en strigile, qui imite la forme de la raclette utilisée comme instrumentde toilette. Les défunts sont représentés debout, levant la main en signede dernier adieu. Au centre, une amphore rappelle le rôle du vin et deslibations dans le rituel funéraire. Il s’agit probablement d’une œuvreimportée d’Italie. Le couvercle devait porter l’épitaphe.Origine incertaine, Arles ?12b - SARCOPHAGE DE CALPURNIA« Aux dieux Mânes et à la mémoire éternelle de Calpurnia Severa, femmetrès vertueuse, qui, de son vivant, a fait élever pour elle-même et pourCalpurnia Delicata, son héritière, ce tombeau et l’a dédié sous l’ascia ».Selon une pratique fréquente, la défunte a fait réaliser son tombeau deson vivant. L’ascia mentionnée à la fin est l’outil représenté de chaquecôté de la première ligne. Les lettres ont été peintes en rouge au 19e siècle,mais il est probable que toutes les inscriptions étaient à l’origine coloréesde cette façon.Lyon 1er, Les Terreaux, remployé dans les fondations de l’église N-D de laPlatière. Entré au musée au début du 19e siècleDatation : fin 2e-3e siècle23

13a - MONUMENTS FUNÉRAIRES DE SÉVIRS AUGUSTAUXIl est exceptionnel à Lyon de découvrir des monuments funéraires surleur emplacement d’origine. La plupart du temps, ils ont été démontés,et les blocs de pierre qui les composaient ont été remployés dansdiverses constructions. D’où le grand intérêt de cette découverte : troisautels funéraires, avec leur épitaphe, étaient associés aux blocs de pierrecontenant les ossuaires. Il s’agit, pour deux d’entre eux, de membres defamilles de prêtres du culte impérial, les sévirs augustaux. Leurs tombesétaient réunies dans un même espace, probablement un enclos qui leurétait réservé.Lyon 5e, rue Pierre Audry, le long de la voie descendant de Fourvière à Vaise, 1983Datation : fin du 2e siècleAux dieux Mânes de Iulia Eutychia, épouse très aimée et femme d’un raremérite, qui a vécu 33 ans, 10 mois, 26 jours, Quintus AtessatiusEuphrosinus, sévir augustal à Lyon, a élevé ce monument et l’a dédiésous l’ascia.13b - MONUMENT DE M. CLAUDIUS COTTAAux dieux Mânes et à la mémoire de Marcus Claudius Cotta, sévir augustalà Lyon et ancien curateur de cette corporation, également sévir de lacolonie Traiana [en Germanie], Iulia Synete, a élevé ce monument à celuiqui fut pour elle un excellent mari et à elle-même de son vivant, et elle l’adédié sous l’ascia.24

13c - MONUMENT DE LA FAMILLE AUFIDIUSLe troisième monument, présenté démonté, est une tombe double, celled’un père et de son fils.Aux dieux Mânes et à la mémoire de Sextus Aufidius Veratianus, qui avécu 14 ans, 4 mois et 23 jours. Aufidius Potentinus et Fabia Verina,ses parents, ont pris soin d’élever ce tombeau à leur fils, qui leur a étéinjustement arraché.Et aux dieux Mânes de Sextus Aufidius Potentinus, sévir augustal à Lyon,Aufidia Vera à son père chéri, et Fabia Verina à son mari très bon et trèsaimé ont fait inscrire ce monument comme il l’avait lui-même prescrit,et elle l’a dédié aussi pour elle même de son vivant sous l’asciaDessin : J.-L. Gisclon, Inrap25

14 - INHUMATIONSi le rite de la crémation domine après la conquête romaine, l’inhumationqui existait antérieurement en Gaule n’a jamais totalement disparu. Cettesépulture en constitue un exemple. Le corps n’est pas allongé sur le dos,mais sur le côté, et cette position rappelle aussi une pratique plusancienne. Cette reconstitution illustre la démarche de l’archéo-anthropologiequi consiste à retrouver la position d’origine de tous les éléments dela tombe. Les déplacements d’os relevés sur le squelette ont permis deconclure que le corps n’avait pas été recouvert de terre, mais qu’il avaitété placé sous une couverture. Les récipients n’ont pas été découvertsintacts sur le fond de la fosse, mais fragmentés et renversés sur unecouche de terre. Ils s’étaient donc effondrés dans l’espace vide en coursde comblement. La fosse étant trop étroite pour qu’on ait pu installer desétagères, on suppose que les vases reposaient sur le couvercle au-dessusdu corps. Une seconde couverture devait clore l’ensemble.Lyon 9e, rue du Mont-d’Or, 2007.Datation : fin du 1er siècle avant-début du 1er siècle après Jésus-Christ.26

15 - INHUMATIONAu 4e siècle, le rite de la crémation est totalement abandonné. Lesdéfunts sont inhumés dans des fosses, des cercueils de bois, de plombou des sarcophages en pierre. Grâce à la conservation du squelette, il devientpossible de déterminer le sexe du défunt et son âge (non sans unemarge d’incertitude). Cette femme, âgée d’environ 40 ans, était placéedans un cercueil en planches clouées, comme l’attestent la présence declous en fer découverts dans les angles de la fosse. L’abondance de lavaisselle liée à la boisson (cruches et gobelets) indique la permanence durite du banquet funéraire. Seul les clous en fer attestaient la présence deses chaussures. Plusieurs monnaies ont été découvertes à la hauteur duthorax : elles étaient peut-être rangées dans une bourse que portait surelle la défunte. La découverte de clous en fer permet de reconstituer unepaire de chaussures posée sur le couvercle.Lyon 9e, quai Arloing, 1989.Datation : début du 4e siècle.27

QUELQUES ÉPITAPHESEh ! oh ! le voyageur !Arrête-toi ici un tout petit instant !Tu fais signe que non ? Tu ne veux rien savoir ?C’est pourtant bien ici qu’un jour tu reviendras !Mes dix-huit ans de vie, je les ai occupés aussi bien que j’ai pu,dans l’affection de tous, ma mère et mes amis.Crois-moi : plaisante, amuse-toi !Car ici où je suis, c’est tout à fait lugubre !Vivez, vous les heureux ! et versez le vin offert à nos Mânes !Et puis souvenez-vous que vous nous rejoindrez !Voyageur, voyageur !Ce que tu es, moi je le fus ; ce que je suis, tu le seras...Sans doute es-tu las, voyageur. Ne le prends pas mal, je t’en prie,et contemple ma tombe.Lis et prends bien ton temps : tu en apprendras quelque chose.Tant que j’étais en vie : la joie, l’amour de mes amis.Aujourd’hui, je gis là, sans plus pouvoir bouger et mes os se reposent.Salut, et mène bien ta vie, jusqu’à rencontrer ton destin.Ce qui suffit à tout humain : mes os reposent tranquillement.Je ne me soucie plus d’avoir faim.Je n’ai plus mal aux pieds ;je n’ai plus à gagner de quoi payer mon loyer ;et j’ai trouvé en plus un logis éternel et gratuit.Jadis, nous n’étions pas. Puis nous vînmes au monde, tranquilles.Nous sommes maintenant, ce qu’alors nous étions : sans soucis.Salut !D’après Tombeaux romains. Anthologie d’épitaphes latines,traduites du latin par Danielle Porte, Le Promeneur, 199828

16 - SÉPULTURE D’UN CHIENLes chiens sont très présents en Gaule romaine, utilisés pour la chasse,la garde des biens et des troupeaux et comme animaux de compagnie.Après leur mort, leur sort varie considérablement. Aux dépouilles deschiens errants, découverts parmi les détritus (par exemple dans la cornedu port de Marseille), on opposera les chiens qui ont reçu une véritablesépulture, comme celui-ci. Il est accompagné d’un pichet en terre cuitevolontairement mutilé, comme pour la sépulture d’un humain.Lyon 9e, Vaise, quartier Saint-Pierre, 1982Datation : 3e siècleTombe d’une petite chienne, porte Pinciana, RomeEn Gaule je suis née et Perle était mon nom, un nom qui fut tiré desrichesses de l’onde, un nom qui allait bien à ma beauté insigne. L’audaceme faisait courir ici et là dans les chemins forestiers, chasser dans lesvallons les bêtes fauves hirsutes. Je ne supportais pas d’être tenue enlaisse, et mon pelage blanc refusait du bâton l’inadmissible offense.J’étais sur les genoux de mon maître, de sa femme, et puis lassée, j’allaissur un lit bien moelleux. Je savais m’exprimer mieux qu’il n’est ordinairepar ma face de chien et son muet langage. Mais jamais mes aboiementsn’ont effrayé personne ! Maintenant je suis morte, en donnant la lumièreaux fils que je portais. Sous ce marbre exigu m’emprisonne la terre...D. Porte, Tombeaux romains, anthologie d’épitaphes latines, p. 9529

17a - TOMBE D’UN NOURRISSONDans la société romaine, la mortalité des jeunes enfants est très élevée.Sur 1000 naissances, 200 à 250 bébés n’atteignaient pas l’âge d’un an.On s’attendrait à ce que leurs sépultures ne soient pas traitées avec lesmêmes égards que celles des adultes. Mais il n’en est rien : si les tombesdes jeunes enfants occupent souvent une place à part dans les espacesfunéraires, elles font l’objet des mêmes soins que celles des adultes.L’archéologie confirme les textes : la crémation d’un être humain n’estpas permise avant la venue de ses dents. Généralement, les enfantsdécédés avant l’âge d’un an sont inhumés, accompagnés comme ici devaisselle et de nourriture. Plusieurs vases sont des exemplaires miniatures.Le dépôt d’une épaule de mouton et d’un jambon de porc évoque,avec la vaisselle, les repas funéraires à venir.Beaumont (Puy de Dôme), Champ Madame, 2004Datation : 2e siècle30

17b - SÉPULTURE EN AMPHOREUne amphore vide, dont la partie supérieure a été soigneusement découpée,a servi pour inhumer un enfant décédé avant l’âge de 6 mois.Cette pratique est courante aux 4e-5e siècles dans le Midi de la Gaule. Ledéfunt était accompagné uniquement d’un lot de huit monnaies enbronze.Lyon 5e, rue des Fossés de Trion, 2004Datation : milieu du 4e siècle18 - LES VASES-OSSUAIRES :DIVERSITÉ DES FORMES ET DES MATÉRIAUXLes plus fréquents sont de simples pots en terre cuite, identiques à ceuxutilisés dans les cuisines. D’autres, en verre, en plomb ou en pierre,étaient produits spécialement pour les funérailles.31

19 - FOSSE RITUELLEÀ proximité des tombes, se trouvent parfois des fosses dépourvuesd’ossements humains. Elles contiennent des récipients de petite taille oumême miniatures, relevant de la vaisselle de table, mais aussi des vasesà cuire ou à contenir des denrées, qui sont absents ou rares sur les bûchers.Ils sont associés à des aliments préalablement brûlés qui n’ont pas étéplacés au hasard, mais rangés par catégories et disposés parfois sur desétagères. Certaines installations ont entièrement brûlé sur place. Cesfosses sont interprétées comme des vestiges liés aux fêtes commémoratives,au cours desquelles le repas funéraire était partagé avec lesdieux Mânes sous la forme d’un holocauste.Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), La grande Borne, 2002Datation : 2e siècle20 - LIBATIONSEn latin, les libations désignent tous les sacrifices non sanglants offertsaux divinités : liquides, herbes aromatiques, miel, fruit, sel, alimentsdivers, gâteaux... Ils étaient déposés ou brûlés sur un autel. Dans le cadredu culte funéraire, les libations consistent à verser un liquide sur lesrestes du défunt, en général du vin pur. D’où les multiples dispositifs quimettent en communication les tombes avec l’extérieur. Ici, un conduit defortune a été réalisé en découpant une amphore vide.Lyon 7e, rue Rochette-Chevrier, 2000Datation : fin 2e-début du 3e siècle32

21 - L’ARCHÉOLOGIE FUNÉRAIREDepuis le 16e siècle, à Lyon, on s’intéresse à la religion romaine et auculte des morts. Mais pendant longtemps, ce sont les textes de l’Antiquitéet les inscriptions funéraires qui ont constitué les principales sourcesd’information. Il a fallu attendre la fin du 20e siècle pour que les restesdes défunts ainsi que les dépôts de toute nature qui les accompagnent,deviennent enfin des sujets d’étude à part entière.À partir des années 1985, avec l’essor des fouilles préventives, s’estdéveloppée une véritable archéologie funéraire. C’est avant tout un travaild’équipe, qui nécessite le concours de nombreux de spécialistes. Leurbut est d’analyser le plus minutieusement possible les vestiges, afin dereconstituer les gestes et les rites funéraires du passé.Photo : Inrap33

22 - LE BÛCHERLa fouille des bûchers révèle que de nombreux objets ont été déposéspour être brûlés avec le corps. La vaisselle de terre cuite tient une placeessentielle.Quelques objets font partie des biens personnels du défunt, comme descoffrets, des bijoux ou des instruments en rapport avec son métier. Lesflacons à parfum ou les instruments de toilette sont fréquents.Parmi les débris recueillis dans les fosses des bûchers, les céramologuesretrouvent fréquemment des vases volontairement brisés et partiellementbrûlés. Ils sont interprétés comme la vaisselle du repas que les participantsont consommé le jour des funérailles.34

23 - LES DÉPÔTS DE CRÉMATIONAccompagnant les restes du défunt issus du bûcher, on trouve souventdans les dépôts de crémation divers objets : l’omniprésence de la vaissellerenvoie peut-être, une fois encore, à la pratique des banquetsfunéraires. Ces vases portent souvent des mutilations interprétéescomme le marquage des biens réservés au mort. D’autres objets sontfréquents : des petits flacons à parfum, des lampes et parfois un miroir.35

24 - LES INHUMATIONSDans le courant du 3e siècle après Jésus-Christ, les bûchers tendent àdisparaître et le rite de l’inhumation devient le plus fréquent. Les objetsqu’on découvre dans les tombes ne présentent cependant pas de changementradical par rapport aux siècles précédents. On retrouve la vaissellequi évoque les repas funéraires, notamment la consommation du vin. Ledéfunt est parfois accompagné de ses bijoux et même de ses chaussures.On dépose également des statuettes en terre cuite.25 - LES TOMBES D’ENFANTSConformément aux usages romains, les enfants morts en bas-âge sonttoujours inhumés. Les objets déposés dans leurs sépultures sont lesmêmes que ceux des adultes. Les bébés portaient souvent des amulettes :des médaillons découpés dans des bois de cerf, des clochettes en bronze,des monnaies percées ou des bagues d’adultes portées en pendentif etmême des représentations phalliques.36

26 - COMMÉMORATIONSLes découvertes de fours culinaires et de grandes quantités de vaissellenon brûlée sont liées à la pratique des repas funéraires que les famillesvenaient consommer régulièrement sur les tombes. D’autres rites decommémoration ont laissé des traces archéologiques. Il s’agit surtoutdes libations, qui expliquent les nombreux dispositifs mettant encommunication la tombe et l’extérieur, comme ces vases-ossuaires auxcouvercles percés.27 - LES MARTRES-DE-VEYRE : UNE CONSERVATION EXCEPTIONNELLEAu cours de la seconde moitié du 19e siècle, dans la commune desMartres-de-Veyre, un peu au sud de Clermont-Ferrand, ont été mises aujour plusieurs inhumations qui présentaient un état de conservationexceptionnel. Tous les objets en matière organique qui se décomposenthabituellement dans le sol ont subsisté ici.37

28 - L’ÉNIGME DE L’ASCIAAux dieux Mânes et à la mémoire de Claudia Victoria, morte à l’âge de dixans, un mois et onze jours ; Claudia Severina a élevé ce tombeau à sa fillechérie et, de son vivant, pour elle-même et l’a dédié sous l’ascia.La mère de Claudia Victoria avait voulu conserver un souvenir de sonenfant en réalisant le moulage de son visage. Le moule fut ensuitedéposé dans son cercueil. Un tirage est présenté ici.Sur les monuments funéraires de Lyon, à partir du 2e siècle, apparaît trèssouvent un outil désigné en latin par le mot ascia. Il s’agit d’une sorted’herminette, un outil en fer destiné au travail du bois qui apparaît ici surle côté droit de l’autel. De nombreuses épitaphes se terminent par laformule sub ascia dedicavit, qui signifie que la tombe a été « dédiée sousl’ascia ». Depuis au moins le 17e siècle, les historiens se demandent àquoi pouvait servir cet instrument. Il jouait probablement un rôlesymbolique au cours des cérémonies funéraires, mais aucun texte del’antiquité ne le mentionne.Lyon 5e, Fourvière, quartier de Trion ; découvert en 187438

Un papillon sur la banquise