Alain Marcom : "Le terre-paille est une technique inégalable en ...

Paysannerie et patrimoine"À Bourg-Saint-Bernard, continue Alain Marcom, nous venons de construire un bâtiment enterre-paille pour une famille de paysans, avec la terre de leur terrain et la paille de leur champ.Le fait que des paysans soient en mesure d'auto-construire des bâtiments, pour eux et pourleurs familles, leur confère évidemment une capacité nouvelle d'autonomie et les préserved'un endettement trop élevé. La capacité de faire ces choses au rythme des travaux agricolesleur permet aussi de se réinsérer dans une logique de cycles naturels, car le cycle desbâtiments est un cycle comme un autre. On peut donc très bien imaginer un paysan qui feraitdes briques de terre-paille, en hiver pendant la saison creuse, qui les laisserait sécher pendanttout le printemps pour construire enfin, une fois l'été venu. Il sauvegarderait ainsi des savoirfaireet s'impliquerait dans des réseaux sociaux locaux en rendant service, le cas échéant, àdes voisins désireux de construire. Tout cela lui fournirait un peu de diversification à unmoment de basse activité et lui permettrait de valoriser ce qui est encore trop souvent vucomme un déchet agricole… Et si on retourne vers notre histoire, on remarque qu'il y a deuxcents ans, un maçon à temps plein, cela n'existait pratiquement pas. Par contre, tous étaientdes paysans ! Et, dès qu'on utilise la terre dans le bâtiment, on renoue ce lien avec lapaysannerie. Quand j'utilise de la terre pour réaliser des adobes, du mortier ou des enduits,j'éprouve un plaisir qui va bien au-delà du simple plaisir de construire. J'ai l'impression deretrouver mes aïeux, j'ai le sentiment de renouer les fils de mon histoire, je tutoie et jequestionne mes arrière-arrière-grands-parents qui étaient déjà des maçons. Pour cela, je vaisvoir une vieille maison, j'essaie de comprendre comment ils ont bâti, je m'efforce de dénicherles trucs et astuces intéressants…Il y a donc matière à beaucoup apprendre dans le patrimoine local. Et nous y sommes bienobligés puisque, de toute façon, aucune école contemporaine ne va nous apprendre la terre.Nous sommes contraints et forcés de démonter des vieux trucs qui font partie de l'héritage, deregarder comment ils fonctionnent, d'observer, de critiquer, d'analyser, de discuter àplusieurs… Le patrimoine, c'est l'université des évidences ! Nous habitons dans l'esttoulousain et nous disposons d'un énorme patrimoine en vieilles fermes. Il n'est nimonumental, ni même spécialement renommé, mais est souvent acquis par des urbains quiviennent s'installer à la campagne. Ce sont nos clients ! Nous démontons sans arrêt desmorceaux de fermes, nous remontons des morceaux de charpentes, nous agrandissons,rehaussons, etc."Une technique de plus en plus compétitive"Le terre-paille convient parfaitement dans un cadre urbain également, ajoute Alain Marcom,mais moins on aura de surfaces exposées aux pluies battantes et moins on prendra de risques.À Toulouse, par exemple, tous les murs pignons des maisons de la deuxième moitié du XIXesiècle sont faits en briques crues, alors que les murs de façades sont en briques cuites. Lesimmeubles écroulés laissent bien voir ces deux grands murs pignons en briques crues. Et laterre ne venait pas en camions d'Allemagne ; elle était simplement prélevée à même lechantier, ou presque.Aujourd'hui, en France, la réglementation thermique a engendré de tels changementsprofessionnels qu'il reste à peine 5% de différence de coûts entre du conventionnel et del'écologique. Mais plus on évolue vers le standard passif, avec beaucoup de machineries dansla maison, et si on inclut le coût énergétique, le coût d'entretien et le coût de remplacement detout cet équipement, l'écoconstruction sera progressivement moins chère. C'est ma conviction