Les sommes récoltées ne suffiront pas. Le chantier de l’église qui a pour architecte Pierre Bullet,architecte du roi et de la ville, dont la première pierre est posée le 5 mars 1683 par l’archevêqued’Albi, le dominicain Hyacinthe Serroni, et la duchesse de Luynes, Anne de Rohan- Montbazon, ne setermine qu’en 1769 par la façade signée par le frère Claude, architecte et dominicain. Nombred’édifices religieux abritant des ordres connaîtront de la sorte une économie difficile, et parfois uninachèvement jusqu’à un état persistant de ruines, tels l’église des Bernardins.<strong>DE</strong> L’HÔTEL, CINQUIEME MAISON DU P<strong>LA</strong>N <strong>DE</strong> VERNIQUET (1796), D’ABORD NUMEROTE 42 <strong>RUE</strong><strong>SAINT</strong>-<strong>DOMINIQUE</strong>, À L’ACTUEL 222 BOULEVARD <strong>SAINT</strong>-<strong>GERMAIN</strong>.Un dénommé Bailly est le premier occupant connu de l’immeuble peut-être antérieur au dernieraménagement du couvent. À dater de Pâques 1682, Jean Luillier, seigneur de Labbebille, le loue à viepour un montant forfaitaire de 15 0000 livres. En 1704, M. Goislard, conseiller au Parlement, yréside.Le 12 mai 1708, la comtesse d’Arco signe un bail de six ans ; le loyer annuel est fixé à 1 500 livres.Elle y loge le chevalier de Bavière, le fils qu’elle a eu de l’Electeur Maximilien-Emmanuel, logeant à cemoment au N° 40 actuel de la rue du Cherche-Midi.La marquise de Villette lui succède, puis le 10 avril 1717, pour six ans à nouveau et au loyer annuel,nettement augmenté, de 2 500 livres (le quartier prend de la valeur), à Jean-Baptiste-Julien Danycande Lanazouarn, maître des Comptes, et son épouse Claude-Charlotte de Tilly de Blaru. Le bail seraprolongé.Le 23 avril 1727, les précédents locataires toujours présents, un bail partant de Pâques de neuf ans,intéresse particulièrement l’histoire. Le nouvel occupant est en effet Claude de Saint-Simon, abbé deJumièges, et plus encore abbé de cour aux idées jansénistes. Il demeurait auparavant rue Taranne,voie prolongeant la rue Saint-Dominique vers l’abbaye. Déjà locataire de la maison II, il le sera plustard des maisons IV et VI.
Cousin du duc de Saint-Simon qui habite la maison II, soit le 218 boulevard Saint-Germain, toujoursexistant, entre 1714 et 1746, il héritera de ses papiers à la mort du mémorialiste en 1755. On peutêtre reconnaissant à celui qui était surnommé « Monsieur le Riche » et qui fut si imbu de ses titres etrang, d’avoir évité la vente et la dispersion des Mémoires.Le loyer modéré de 1 800 livres est lié à l’engagement de l’abbé de construire dans le coin du jardin« du côté de la maison occupée par le duc de Saint Simon », une écurie avec grenier au dessus. Surles 1 800 livres de travaux supplémentaires destinés à l’amélioration du confort, il n’en dépensepourtant que 800, les Jacobins réglant le solde.La famille des Saint-Simon représentée par plusieurs de ses membres est bien le symbole de cettesociété de locataires. En 1742, Catherine-Charlotte-Henriette de Canouville de Raffetot loue pourneuf ans au prix annuel de 1 500livres, puis renouvelle pour neuf ans à nouveau en 1751, le loyerpassant à 2 000 livres à la demande de la locataire qui récupère le corps de logis construit dans lejardin par l’abbé (désormais évêque de Metz) qui reloue le 1 er octobre 1757 au prix de 2 900 livres.Quand il meurt le 27 février 1760, sa sœur, Marie-Elisabeth de Rouvroy Saint-Simon, veuve du duc deLaval-Montmorency, maréchal de France, loue à son tour, pour neuf ans et 3 000 livres à dater du 1 eroctobre 1760. Elle meurt dans la maison le 4 janvier 1762.Le chapelet des noms illustres continue de s’égrener. Le 24 février 1762, Marguerite-CharlotteFleuriau de Marville, veuve de Pierre-Emmanuel, marquis de Crussol, loue pour neuf ans toujours ettrois mille livres. Le bail étant résilié le 5 avril 1766 un nouveau bail de même durée et d’un montantde 3 250 livres commence le 1 er juillet en faveur de Marie-Marthe-Françoise de Bonneval, veuve deLouis de Talaru, marquis de Chalmazel, gouverneur de Phalsbourg, premier hôtel de la Reine,demeurant rue de l’Université. Le lendemain de la résiliation du bail, soit le 11 décembre 1770,l’hôtel est loué, à dater du 1 er avril, toujours pour trois, six, neuf ans, à François-Raymond, marquisde Montmort, lieutenant-général, à son épouse Marie-Geneviève Vidaud de Dognon ; le loyer quiaugmente petit à petit est passé à 3 500 livres. Le jour de la résiliation (23 mars 1773), l’hôtel estreloué au même prix à dater du 1 er avril, à Adélaïde-Luce-Madeleine Galard de Béarn-Brassac, veuvede Bertrand-Nompar de Caumont, marquis de Caumont. Ces changements rapides sontsymptomatiques de la fonction quasiment hôtelière, au sens moderne, de ce type de propriété quin’est qu’une halte dans la vie de la haute société contemporaine.Le 1 er avril 1782, le loyer étant passé brutalement à 4 700 livres, l’évêque de Beauvais, François-Joseph de la Rochefoucauld-Bayers prend possession des lieux. Son passage est très rapide puisqu’àpartir du 14 août de la même année, et au même tarif, la nouvelle locataire, qui le sera encore en1790, devient Marie-Louise-Auguste de Montmorency, veuve de Charles, comte de Ruffec,lieutenant-général.