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III - Centre de Recherche en Gestion - Ecole Polytechnique

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2. lorsque cette structure cognitive est remise <strong>en</strong> cause, un changem<strong>en</strong>t profond et brutalse produit; à d'assez longues pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> stabilité relative succè<strong>de</strong>nt donc <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s<strong>de</strong> bouleversem<strong>en</strong>t, brèves mais int<strong>en</strong>ses.Dès lors, le comportem<strong>en</strong>t "normal" <strong>de</strong>s organisations est un développem<strong>en</strong>t incrém<strong>en</strong>taI.Les actions stratégiques s'ajout<strong>en</strong>t aux actions stratégiques précé<strong>de</strong>ntes, à l'<strong>en</strong>sembleplus ou moins bi<strong>en</strong> consolidé <strong>de</strong>s actions stratégiques passées. L'organisation est dotéed'une dynamique constante, d'un élan ("mom<strong>en</strong>tum", MILLER & FRIESEN, 1980),dont le moteur est cette structure cognitive c<strong>en</strong>trale et relativem<strong>en</strong>t stable, qui inspire lesactions stratégiques.Cep<strong>en</strong>dant, la dynamique induite par la structure cognitive n'est pas nécessairem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>phase avec l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Cela dép<strong>en</strong>d <strong>en</strong> fait <strong>de</strong> la "qualité" <strong>de</strong> la structure cognitivec<strong>en</strong>trale. Elle peut pêcher par sursimplification, par imprécision, par superstition, ou pardésuétu<strong>de</strong>. Il est donc probable que se produis<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ratés ou <strong>de</strong>s actions inadéquates.L'accumulation <strong>de</strong>s difficultés, la répétition <strong>de</strong>s échecs, ou l'apparition d'un problèmegrave (catégorisé comme "crise") provoqu<strong>en</strong>t la remise <strong>en</strong> question <strong>de</strong> la structurecognitive c<strong>en</strong>trale, qui implique la remise <strong>en</strong> cause <strong>de</strong> ceux qui la port<strong>en</strong>t et la mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong>oeuvre. Cela peut am<strong>en</strong>er une redistribution du pouvoir, un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s dirigeants et,corrélativem<strong>en</strong>t, un changem<strong>en</strong>t drastique <strong>de</strong> nombre <strong>de</strong> variables organisationnelles.C'est, selon l'expression <strong>de</strong> J.P. NIOCHE, le "grand jeu", par lequel se redéfiniss<strong>en</strong>t lanature du jeu stratégique, la règle du jeu interne et externe, et la liste <strong>de</strong>s joueurs(ANASTASSOPOULOS, BLANC, NIOCHE ET RAMANANTSOA, 1985).En plaçant les processus cognitifs au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> sa problématique, cette troisièmeperspective fait un li<strong>en</strong> direct <strong>en</strong>tre l'analyse <strong>de</strong>s processus et les approches <strong>de</strong>sorganisations <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> culture ou d'i<strong>de</strong>ntité, approches plus statiques par nature. Lastructure cognitive c<strong>en</strong>trale est <strong>en</strong> effet un élém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la culture ou <strong>de</strong> l'i<strong>de</strong>ntité d'uneorganisationl-'. On peut rapprocher cette vision <strong>de</strong> l'organisation <strong>de</strong> la notion d'i<strong>de</strong>ntitédéveloppée par LARÇON & REITTER (1979) (voir aussi REITTER &RAMANANTSOA (198.5), et STRATEGOR (1988)), qui met <strong>en</strong> relation <strong>de</strong>sproductions symboliques (structure sociale informelle, histoire, mythes, etc) et unimaginaire organisationnel avec un <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> facteurs politiques et structurels.L'élargissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la décision stratégique à l'action stratégique modifie considérablem<strong>en</strong>tle rôle supposé <strong>de</strong>s problèmes stratégiques. Ceux-ci ne sont plus comme dans la premièreperspective, <strong>de</strong>s stimuli décodés <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s faits collectés et analysés <strong>en</strong>regard <strong>de</strong> normes ou d'objectifs à atteindre, et donnant lieu à un diagnostic qui<strong>en</strong>cl<strong>en</strong>chera un processus séqu<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong> résolution, se terminant par l'adoption d'unesolution qui éteint le problème. Ce ne sont plus seulem<strong>en</strong>t, comme dans la secon<strong>de</strong>perspective, les sources plus ou moins obscures d'une activité bureaucratique oupolitique égalem<strong>en</strong>t ori<strong>en</strong>tée vers leur extinction. La troisième perspective redonne auxproblèmes une place <strong>de</strong> choix dans l'organisation, mais une place différ<strong>en</strong>te. Lesproblèmes <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t intéressants <strong>en</strong> eux-mêmes, non plus <strong>en</strong> raison <strong>de</strong> leur futurerésolution, c'est-à-dire <strong>de</strong> leur extinction.Cette perspective a-t-elle généré <strong>de</strong>s travaux portant spécifiquem<strong>en</strong>t sur les problèmesstratégiques et leur formulation 7 La contribution la plus marquante est celle <strong>de</strong> JaneDUTTON (1988)14. DUTTON emprunte à la Sci<strong>en</strong>ce Politique le concept d'ag<strong>en</strong>dal t etdéveloppe un modèle reposant sur la conjonction <strong>de</strong> processus politiques et <strong>de</strong> processuscognitifs. Les acteurs pouss<strong>en</strong>t certaines "questions" ou " controverses" ("issues") sur1.3 Cela est explicite chez certains auteurs, et notamm<strong>en</strong>t chez JOHNSON (1987),14 Voir égalem<strong>en</strong>t: DUTION, FAHEY, & NARA YANAN (J 98.3) ; DUITON (J 986) ; DUnON &DUNCAN (J 987a et 1987b) ; DUITON & JACKSON (J 987) ; JACKSON & DUTTON (J 988).15 On trouve dans PADIOLEAU (1982) une synthèse <strong>de</strong> la littérature sur l'ag<strong>en</strong>da politique ainsi qu'uneutilisation du concept dans le domaine public français" L'ag<strong>en</strong>da politique est défini par PADIOLEAUcomme "l'<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s problèmes perçus comme appelant un débat public, voire l'interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>sautorités politiques légitimes", Pour une recherche <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ampleur sur l'ag<strong>en</strong>da politique, voirKINGDON (J 984)68l'ag<strong>en</strong>da. Mais ces questions s'impos<strong>en</strong>t elles-mêmes à l'att<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>s acteurs, avec plusou moins <strong>de</strong> force selon leurs caractéristiques propres (notamm<strong>en</strong>t par rapport à lastratégie suivie par l'organisation). La culture <strong>de</strong> l'organisation est un élém<strong>en</strong>t <strong>de</strong>contexte, qui influ<strong>en</strong>ce l'év<strong>en</strong>tail <strong>de</strong>s questions stratégiques <strong>en</strong>visageables parl'organisation.Le modèle <strong>de</strong> DUTTON n'a cep<strong>en</strong>dant pas été validé empiriquem<strong>en</strong>t. L'étu<strong>de</strong> <strong>en</strong>profon<strong>de</strong>ur, dans une organisation, <strong>de</strong> ces processus <strong>de</strong> formulation <strong>de</strong>s problèmesstratégiques et <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l'ag<strong>en</strong>da, va nous permettre <strong>de</strong> constater la complexité<strong>de</strong> ces phénomènes, et <strong>en</strong> même temps, <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre la mesure <strong>de</strong> leur richesse. Elle nousconduira à proposer un cadre d'analyse qui, bi<strong>en</strong> que repr<strong>en</strong>ant la notion d'ag<strong>en</strong>da,s'écarte s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t du modèle <strong>de</strong> la Sci<strong>en</strong>ce Politique et <strong>de</strong> ses dérivés.2. L'ETUDE EMPIRIQUE.2.1. METHODOLOGIEL'étu<strong>de</strong> s'est déroulée dans une <strong>en</strong>treprise du secteur parapétrolier, qu'on appelera laCSP. Le coeur <strong>de</strong> la démarche a consisté à interviewer régulièrem<strong>en</strong>t (tous les quatremois à peu près) les dirigeants <strong>de</strong> cette <strong>en</strong>treprise (soit six personnes). La question <strong>de</strong>départ était généralem<strong>en</strong>t : "quels sont selon vous les problèmes qui concern<strong>en</strong>tactuellem<strong>en</strong>t la CSP 7". Une secon<strong>de</strong> question était: "quels sont les problèmes qui vousconcern<strong>en</strong>t, vous-même, actuellem<strong>en</strong>t 7"Chacune <strong>de</strong>s phases d'interviews a donc produit une série datée <strong>de</strong> "photos" <strong>de</strong> l'ag<strong>en</strong>dadécisionnel et <strong>de</strong>s problèmes, prises selon les points <strong>de</strong> vue différ<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s participants.Quatre séries ont été réalisées, permettant d'observer les mouvem<strong>en</strong>ts sur l'ag<strong>en</strong>dadécisionnel et les évolutions <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s problèmes, un peu à la manière d'uneétu<strong>de</strong> stroboscopique du mouvem<strong>en</strong>t. L'<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s données recueillies a ainsi unedim<strong>en</strong>sion synchronique et une dim<strong>en</strong>sion diachronique.En fait, les interviews couvrai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t les pério<strong>de</strong>s écoulées <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux phasessuccessives, <strong>de</strong> manière à ne pas laisser échapper <strong>de</strong>s "évènem<strong>en</strong>ts" ponctuels surv<strong>en</strong>ussur l'ag<strong>en</strong>da. Il s'agissait donc parfois plus d'un "léger différé" que d'un réel "direct".Les problèmes ayant <strong>de</strong>s rythmes d'évolution très différ<strong>en</strong>ts, on a donc eu <strong>de</strong>sreconstitutions rétrospectives (mais interv<strong>en</strong>ant dans un délai bref), et égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>srecueils <strong>de</strong> données "à chaud".La méthodologie employée ici découle d'une stratégie <strong>de</strong> recherche visant às'accommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la complexité, et non à la réduire. En cela elle est similaire à celledéfinie par MINTZBERG (1979) ou suivie par JOHNSON (1987). Cette stratégiecomporte <strong>de</strong>s limites, découlant <strong>de</strong> ce choix initial.La première limite provi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la focalisation sur une seule organisation. Il est évi<strong>de</strong>nt quecette organisation n'est <strong>en</strong> ri<strong>en</strong> représ<strong>en</strong>tative <strong>de</strong> quoi que ce soit. Il est même clair, aucontraire, qu'elle constitue par <strong>de</strong> très nombreux aspects une exception, un cas limite,une bizarrerie. Ce caractère exceptionnel <strong>de</strong> l'organisation n'a pas été ignoré ouminimisé, au contraire: on a cherché à s'<strong>en</strong> servir, pour observer <strong>de</strong>s phénomènes qui,du fait <strong>de</strong> ce caractère spécial, apparaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> pleine lumière, alors qu'ils jou<strong>en</strong>tprobablem<strong>en</strong>t un rôle plus discret, donc plus obscur, dans d'autres cas.Une <strong>de</strong>uxième limitation est le p<strong>en</strong>dant temporel <strong>de</strong> la première: nous avons étudié unprocessus particulièrem<strong>en</strong>t dép<strong>en</strong>dant du mom<strong>en</strong>t et du flux temporel. La pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>l'étu<strong>de</strong> a été choisie <strong>de</strong> manière arbitraire. Ri<strong>en</strong> n'indique qu'elle soit représ<strong>en</strong>tative <strong>de</strong> cequi se passe <strong>en</strong> général dans cette organisation, pour autant que cette idée <strong>de</strong> situation"normale" ait un s<strong>en</strong>s lorsqu'on s'intéresse aux problèmes stratégiques. On p<strong>en</strong>se plutôtque certains problèmes peuv<strong>en</strong>t s'inscrire dans (et <strong>en</strong> même temps produire) la continuitéstratégique, tandis que d'autres vont signaler (et pousser à) la "révolution". Enl'occurr<strong>en</strong>ce, c'est l'hypothèse que l'on est t<strong>en</strong>té <strong>de</strong> faire sur la situation <strong>de</strong> l'organisation69

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