12 | diffusionLes Suds à Arles, l'excell<strong>en</strong>ce d'un Festival d'étéToutes les musiques et les grandesvoix <strong>du</strong> <strong>monde</strong> se retrouv<strong>en</strong>t à Arles àl’invitation de Marie-José Justamond,chef d’orchestre de la manifestation LesSuds à Arles qui combine musique etpatrimoine.Créé <strong>en</strong> 1996, Les Suds à Arles est dev<strong>en</strong>uau fil des ans l’un des grands r<strong>en</strong>dez-vousannuels des musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong> <strong>en</strong> France :comm<strong>en</strong>t expliquez-vous un tel succès ?Marie-José Justamond : C’est grâce au tal<strong>en</strong>t desartistes prés<strong>en</strong>ts, au charme de la ville d’Arles età son patrimoine, grâce égalem<strong>en</strong>t à la volontéd’harmonie <strong>en</strong>tre l’id<strong>en</strong>tité de la manifestationet son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Les lieux des manifestationssont généralem<strong>en</strong>t très typés, commepour les Escales de Saint-Nazaire qui s’inscriv<strong>en</strong>tdans un patrimoine in<strong>du</strong>striel, ou <strong>en</strong>corela Fiesta des Suds à Marseille. Il n’y a pas deconcurr<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre nous, mais une complém<strong>en</strong>taritéet une véritable émulation <strong>en</strong>tre les artisteset les publics. À Arles et à Marseille, nousn’avons pas les mêmes populations ni le mêmeterritoire, <strong>du</strong> coup les artistes sont prés<strong>en</strong>tés demanière différ<strong>en</strong>te.Quel est votre regard sur l’évolution <strong>du</strong>secteur des musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong>, son impactauprès <strong>du</strong> public ?Marie-José Justamond : Il y a un <strong>en</strong>thousiasme<strong>du</strong> public, c’est vrai. Pourtant, la situation desmanifestations est dev<strong>en</strong>ue plus difficile depuiscinq ans car il y a vraim<strong>en</strong>t une perte <strong>du</strong> pouvoird’achat. Le public culturel, français et europé<strong>en</strong>,a per<strong>du</strong> un peu ses repères : on est obligéaujourd’hui de rev<strong>en</strong>ir aux têtes d’affiche, et levirage vers une plus grande notoriété est dev<strong>en</strong>unécessaire. Les Suds à Arles peut se le permettresans trop de concession car nous disposonsde lieux pour les découvertes. Nous faisons toutpour conserver un public populaire.Durant ces années, le festival a-t-il tissédes li<strong>en</strong>s hors <strong>du</strong> territoire ?Marie-José Justamond : Nous faisons partie deplusieurs réseaux professionnels comme ZoneFranche qui rassemble divers acteurs des musiques<strong>du</strong> <strong>monde</strong>, plutôt francophones (Afrique,Belgique, Canada…), et European Forum ofWorldwide Music Festivals qui va bi<strong>en</strong> au-delàde l’Europe. Grâce à ces réseaux, nous fréqu<strong>en</strong>tonsd’autres festivals dans le <strong>monde</strong> avec lesquelsnous échangeons nos points de vue artistiqueset professionnels. C’est passionnant.Les Suds à Arles a-t-il vocation à accompagnerles artistes ?Marie-José Justamond : Les Suds, par exemple,a des relations très proches avec Lo Còr de laPlana, des li<strong>en</strong>s très forts. De manière concrète,nous avons un projet <strong>en</strong> cours avec l’Andalousieet déjà une expéri<strong>en</strong>ce commune <strong>en</strong> Israël. Il ya <strong>en</strong>tre eux et nous un cousinage serré et riche :après New York, Lo Còr de la Plana sera <strong>en</strong> résid<strong>en</strong>cecet été à Arles et se pro<strong>du</strong>ira au ThéâtreAntique. C’est un projet que nous sout<strong>en</strong>ons avecle C<strong>en</strong>tre national des variétés et dont j’aimeraisque la population prov<strong>en</strong>çale s’approprie.D’autres artistes revi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour cette nouvelleédition car le festival, la scène et le public ontévolué : on ne veut pas se priver de retrouvaillesavec Goran Bregovic, déjà accueilli <strong>en</strong> 1999, ouavec le trio Joubran. Le bouillonnem<strong>en</strong>t créatifet passionnant des musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong> est peutêtrelié à la population de la région, très coloréeet métissée, et qui correspond à une réalité de territoire.On a peut-être la chance, aussi, d’avoirdes politiques qui <strong>en</strong>courag<strong>en</strong>t et développ<strong>en</strong>tcette créativité, ce dynamisme. La candidaturede Marseille Prov<strong>en</strong>ce capitale europé<strong>en</strong>ne de laculture 2013 va dans ce s<strong>en</strong>s.www.suds-arles.comUne Anche Passe, François Heim, Stimmhorn,André Minvielle au Théâtre de ver<strong>du</strong>re de Corr<strong>en</strong>s.© Bill Akwa BetotéLes joutes musicalesde printemps, la création aucœur des vignesAprès dix années d’exist<strong>en</strong>ce, les Joutesmusicales de Printemps à Corr<strong>en</strong>samorc<strong>en</strong>t "un virage qui s’inscritdans la continuité"annonce FrançoiseDastrevigne, directrice <strong>du</strong> festival et<strong>du</strong> Chantier-c<strong>en</strong>tre de création desnouvelles musiques traditionnelles etmusiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong>.Le festival - né <strong>du</strong> désir collectif d’unvillage autour de Miquèu Montanaro- conjugue plusieurs facteurs que FrançoiseDastrevigne souhaite conserver :son exig<strong>en</strong>ce de qualité car "il est la vitrine<strong>du</strong> travail de création <strong>du</strong> Chantier",son esprit convivial dans son organisationet le choix de lieux intimistes (l’église, leFort-Gibron par exemple), et la participationdes villageois. Mais les Joutes musicalesde Printemps n’ont cessé de grossirau fil des éditions au point de devoir sestructurer et se professionnaliser plus <strong>en</strong>core.Plus de concerts, plus d’animations etd’ateliers, plus de public aussi p<strong>en</strong>dant le[Collection Repères n°5 - <strong>mars</strong> <strong>2008</strong> - © <strong>Arcade</strong> <strong>PACA</strong>]
diffusion | 13Babel Med Music, le r<strong>en</strong>dez-vous annuel des professionnelsUnique <strong>en</strong> son g<strong>en</strong>re <strong>en</strong> France, BabelMed Music est un marché professionneldes musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong> doublé d’unfestival. Sur le site <strong>du</strong> Dock des Suds àMarseille, Babel Med Music se partagedonc <strong>en</strong>tre un espace marché de 2 000 m 2pouvant accueillir une c<strong>en</strong>taine de standsprofessionnels et un espace festif où sepro<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t une tr<strong>en</strong>taine de groupessélectionnés par un jury international.R<strong>en</strong>contre avec son co-directeurartistique, Sami Sadak.Babel Med Music a seulem<strong>en</strong>t trois ansd’exist<strong>en</strong>ce et déjà <strong>du</strong> succès, qu’est-ce quifait sa singularité ?Sami Sadak : En <strong>2008</strong>, la manifestation est déjàdev<strong>en</strong>ue un r<strong>en</strong>dez-vous incontournable des musiques<strong>du</strong> <strong>monde</strong> <strong>en</strong> France et à l’international.Pourquoi ? Parce que à part le Womex, il n’existepas d’autres r<strong>en</strong>dez-vous professionnels où lesdiffuseurs, les ag<strong>en</strong>ts et les médias vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t découvrirde nouveaux tal<strong>en</strong>ts. Babel Med Musica aussi la particularité d’être un lieu d’échangeset de réflexions avec des tables rondes, des débatset des confér<strong>en</strong>ces sur l’actualité des musiques <strong>du</strong><strong>monde</strong>.Justem<strong>en</strong>t, comm<strong>en</strong>t se situe Babel MedMusic par rapport au Womex, le StrictlyMundial n’existant plus ?Sami Sadak : Babel Med Music apporte une approcheéthique <strong>du</strong> secteur car les frais, les <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>tset les cachets des artistes sont payés. Deplus, la manifestation est indép<strong>en</strong>dante de toutgroupe de pression : le comité de sélection artistiqueest composé de journalistes et de directeurs defestivals français et étrangers (Belgique, Maroc,Allemagne…). Il n’y a ni labels ni tourneurs. Notreapproche est totalem<strong>en</strong>t indép<strong>en</strong>dante.Quelle place réservez-vous aux artistes dela région ?Sami Sadak : Depuis le début, Babel Med Musica voulu mettre <strong>en</strong> avant, dans ce marché international,les tal<strong>en</strong>ts de la région <strong>en</strong> programmant7 à 10 groupes chaque année. C’est un coup deprojecteur nécessaire et indisp<strong>en</strong>sable <strong>du</strong> travaildéjà réalisé par les autres opérateurs culturels dela région, car Babel Med Music n’a pas souhaitése couper de l’existant, au contraire.Après seulem<strong>en</strong>t trois éditions, vous recevez300 candidatures d’artistes, touchez2 000 professionnels et plus de 3 000 personnesà chaque concert. Quelles sont lesraisons d’une telle montée <strong>en</strong> puissance ?Sami Sadak : Babel Med Music s’est installé trèsvite dans le paysage car les choix artistiques sesont avérés pertin<strong>en</strong>ts. Beaucoup d’artistes quisont passés ici font carrière aujourd’hui ; pourcertains, le décollage se fait tout de suite aprèssous la forme de contrats grâce à la prés<strong>en</strong>ce desdiffuseurs et des professionnels. La reconnaissancedes milieux professionnels est arrivée très viteégalem<strong>en</strong>t car, par exemple, France Musique, laSacem, la Fondation Anna Lindht et Phonopacaont choisi Babel Med Music pour y décerner leurprix annuel de musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong>. L’autre élém<strong>en</strong>timportant est l’ouverture <strong>du</strong> marché professionnelau public avec les concerts, c’est une autrede nos particularités. Preuve que les artistes nepeuv<strong>en</strong>t se pro<strong>du</strong>ire que devant un vrai publicet que les professionnels ne peuv<strong>en</strong>t les voir quedans de vraies conditions de concerts. Souv<strong>en</strong>t,c’est pour les artistes leur premier passage dans larégion, parfois même <strong>en</strong> France. On s’att<strong>en</strong>daità un vrai répondant des professionnels et <strong>du</strong> public,mais peut-être pas aussi rapidem<strong>en</strong>t…www.dock-des-suds.org<strong>2008</strong>. 4 e édition de Babel Med Music. © Ray Lubrano del Amorweek-<strong>en</strong>d de la P<strong>en</strong>tecôte : il est importantdésormais de veiller à la sécurité de tous,de monter une régie technique et d’offrirde meilleures conditions d’accueil tout <strong>en</strong>conservant l’esprit "familial". Le tout <strong>en</strong>veillant à une cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre le caractère"bio"<strong>du</strong> village et les prestations, <strong>en</strong>tre lelieu et la manifestation. À cette exig<strong>en</strong>cerépond un programme artistique composéde concerts et de musiques déambulatoires(mise <strong>en</strong> valeur de la création), d’ateliers<strong>en</strong>fants-par<strong>en</strong>ts autour des chants <strong>du</strong><strong>monde</strong>, d’ateliers musique et danse pour lesamateurs et de scènes ouvertes aux écolesde musique. Si le festival se préoccupe dela transmission, il s’<strong>en</strong>gage égalem<strong>en</strong>t dansla recherche et la réflexion avec des tempsd’échanges mettant <strong>en</strong> valeur l’histoire musicaleet la démarche créative <strong>du</strong> musici<strong>en</strong>qui porte ces musiques. Cette année, le livrede Frank T<strong>en</strong>aille <strong>Musiques</strong> et chants<strong>en</strong> Occitanie, création et tradition <strong>en</strong> paysd’Oc* sera au cœur d’une r<strong>en</strong>contre avecle public. Les Joutes, qui ne désempliss<strong>en</strong>tpas, att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t plus de 2000 personnes : unintérêt que Françoise Dastrevigne expliquepar la nature même des musiques traditionnelleset <strong>du</strong> <strong>monde</strong> "qui touch<strong>en</strong>t lesg<strong>en</strong>s au plus profond, qui sont <strong>en</strong> relationavec une mémoire". Même si la qualité et l<strong>en</strong>iveau d’exig<strong>en</strong>ce artistique sont pointus,remarque-t-elle <strong>en</strong>core, "les artistes ont <strong>du</strong>succès car leurs musiques s’inscriv<strong>en</strong>t dansla mémoire collective. Paradoxalem<strong>en</strong>t, ellessont accessibles facilem<strong>en</strong>t. Le publicdemande à découvrir d’autres cultures tout<strong>en</strong> se réappropriant les si<strong>en</strong>nes. Cela toucheau patrimoine immatériel : les g<strong>en</strong>s sont <strong>en</strong>recherche de li<strong>en</strong> social et d’id<strong>en</strong>tité et cesmusiques sont au cœur de cela".(*) <strong>Musiques</strong> et chants <strong>en</strong> Occitanie, création et tradition<strong>en</strong> pays d’Oc, éditions <strong>du</strong> Layeur, commande <strong>du</strong>Chantier-c<strong>en</strong>tre de création des nouvelles musiquestraditionnelles et musiques <strong>du</strong> <strong>monde</strong>.www.joutes-musicales.com[Collection Repères n°5 - <strong>mars</strong> <strong>2008</strong> - © <strong>Arcade</strong> <strong>PACA</strong>]