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Vie pédagogique - Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport

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con<strong>du</strong>cteurs qui doivent l’encadrer <strong>et</strong>l’inspirer à la fois. Il me semble que cenouveau curriculum mérite un appuirésolu, d’une part, parce qu’il apparaîtmieux préparer les jeunes générationsau mon<strong>de</strong> dans lequel elles vivront <strong>et</strong>,d’autre part, parce qu’il répond à ceque l’on peut tenir pour <strong>de</strong>s aspirationsfondamentales <strong>de</strong> le sociétéquébécoise. En quoi donc un curriculumqui veut « instruire, socialiser,qualifier », pour reprendre les termes<strong>de</strong>s États généraux sur l’é<strong>du</strong>cation, <strong>et</strong>qui veut privilégier davantage cinqgrands domaines fondamentaux <strong>et</strong> lamaîtrise <strong>de</strong> compétences <strong>de</strong> bas<strong>et</strong>ransférables, selon l’énoncé ministériel<strong>de</strong> septembre 1997, répond-ilmieux aux exigences combinées <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> qui s’annonce <strong>et</strong> <strong>de</strong>s aspirations<strong>de</strong> la société québécoise?LA FIGURE DU MONDEBien que la futurologie soit un exercic<strong>et</strong>rès périlleux <strong>et</strong> que nombre <strong>de</strong> prévisionssur l’avenir se soient révéléestotalement erronées, on ne peut méconnaîtreun certain nombre <strong>de</strong> traitsmajeurs <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> dans lequel vivrontles élèves auxquels est <strong>de</strong>stiné le nouveauprogramme parce que ces traitss’imposent avec une évi<strong>de</strong>nce criante.Or, il se trouve que certains aspects <strong>de</strong>ce programme apparaissent bienbranchés sur le mon<strong>de</strong> qui s’annonce.Ainsi, à travers la mondialisationprennent forme <strong>de</strong>s tendances économiques,sociales <strong>et</strong> culturelles majeuresavec lesquelles auront à composerceux qui sont aujourd’hui <strong>de</strong>s enfants<strong>et</strong> <strong>de</strong>s adolescents. Dans une économiequi se mondialise, la concurrenceentre les nations cesse d’être uneabstraction <strong>et</strong> <strong>de</strong>vient une donnée quotidienne<strong>de</strong> nos existences indivi<strong>du</strong>elles.Le citoyen québécois qui estpeu ou non qualifié professionnellementne subit pas seulement la concurrence<strong>de</strong> ses concitoyens qui sont dansla même situation que lui, mais aussicelle <strong>de</strong> centaines <strong>de</strong> millions d’autresindivi<strong>du</strong>s à travers le mon<strong>de</strong> à qui <strong>de</strong>sentreprises cherchant ce genre <strong>de</strong>main-d’œuvre peu qualifiée, peuventconfier <strong>du</strong> travail, à un salaire bieninférieur au salaire minimum québécois.Plus le savoir <strong>de</strong>vient le moteur<strong>de</strong> toutes les formes d’activités économiques,plus la sous-scolarisation <strong>et</strong>la sous-qualification con<strong>du</strong>isent l’indivi<strong>du</strong>à l’impuissance professionnelle, àla pauvr<strong>et</strong>é, à l’exclusion. Ceux <strong>de</strong> nosjeunes que nous ne parvenons pas àscolariser <strong>et</strong> à qualifier professionnellementseront condamnés à l’inexistenceéconomique <strong>et</strong>, par là, à une marginalisation<strong>et</strong> à une exclusion socialesqui seront encore plus cruelles dansl’avenir. Et plus l’économie se mondialisera,moins il sera possible <strong>de</strong>Photo : Denis Garonpréserver <strong>de</strong>s havres d’insertion économiquelocale pouvant survivre <strong>et</strong>prospérer à l’abri <strong>de</strong> la concurrenceinternationale. Aussi, chaque échec <strong>de</strong>la scolarisation condamne l’indivi<strong>du</strong>qui en est victime à une perpétuelleimpuissance économique. Plus encorequ’il y a une ou <strong>de</strong>ux générations,l’école est <strong>et</strong> sera le terrain sur lequelse jouera le <strong>de</strong>stin économique <strong>et</strong>social <strong>de</strong> chaque jeune. En ce sens, lesuccès <strong>de</strong> l’école se prolonge bien au<strong>de</strong>là <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> l’école elle-même.Aux personnes qui jugeraient mes propostrop obsédés par les considérationséconomiques <strong>et</strong> qui craindraientqu’ils ne rabaissent l’é<strong>du</strong>cation à unepure formation professionnelle étroitementsubordonnée aux impératifsimmédiats <strong>du</strong> marché, je soum<strong>et</strong>trais<strong>de</strong>ux considérations. D’une part, si lapauvr<strong>et</strong>é ou une vie austère librementchoisies peuvent être, pour un indivi<strong>du</strong>,une voie d’épanouissement, cen’est pas le cas <strong>du</strong> dénuement, <strong>de</strong> lamarginalité ou <strong>de</strong> l’exclusion économiquessubis comme <strong>de</strong>s fatalités.D’autre part, je ne vois pas en quoi uneé<strong>du</strong>cation qui, par la familiarisationavec les domaines fondamentaux <strong>du</strong>savoir <strong>et</strong> <strong>de</strong> la culture, comporte, outrel’appropriation d’un héritage culturel,une préparation à une insertion professionnelleréussie serait source d’aliénationpour l’indivi<strong>du</strong>. Dans un contexte<strong>de</strong> mondialisation, l’échec <strong>de</strong>l’école risque <strong>de</strong> con<strong>du</strong>ire tant les indivi<strong>du</strong>sque leur société à une paupérisation,à tout le moins, à la dégradation<strong>de</strong> leur situation économique par rapportau reste <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>et</strong> à leurs propresaspirations. Cela ne libère ni lesindivi<strong>du</strong>s, ni la société. Plus prosaïquement: sans richesse collective, commentune société peut-elle se payer unsystème <strong>de</strong> soins <strong>de</strong> santé, un systèmed’é<strong>du</strong>cation ou les institutions <strong>de</strong> loisir<strong>et</strong> <strong>de</strong> culture qui font la qualité <strong>de</strong> lavie humaine?Par ailleurs, le phénomène <strong>de</strong> la mondialisationa <strong>de</strong>s répercussions quidépassent <strong>de</strong> beaucoup le terrain proprementéconomique. Dans un mon<strong>de</strong>qui ré<strong>du</strong>it chaque jour davantagel’isolement <strong>de</strong>s nations <strong>et</strong> <strong>de</strong>s cultures,qui véhicule à travers les moyens <strong>de</strong>communication à la puissance croissante<strong>de</strong>s valeurs, <strong>de</strong>s images <strong>et</strong> <strong>de</strong>ssymboles qui ne surgissent pas <strong>de</strong> l’expérience<strong>de</strong> la société à laquelle onappartient, c’est l’i<strong>de</strong>ntité sociale <strong>et</strong>culturelle <strong>de</strong> chaque indivi<strong>du</strong> qui estremise en question tout comme lacapacité <strong>de</strong> chaque indivi<strong>du</strong> <strong>de</strong> sesituer dans le mon<strong>de</strong>. Quand la conscienceest quotidiennement envahie<strong>Vie</strong> pédagogique 121, novembre-décembre2001par un flot ininterrompu <strong>de</strong> bruits <strong>et</strong>d’images imposant <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> vie,d’action, <strong>de</strong> bonheur, comment l’indivi<strong>du</strong>,s’il n’est pas capable <strong>de</strong> prendreune distance <strong>et</strong> <strong>de</strong> déployer un regardcritique, peut-il se construire une i<strong>de</strong>ntitépropre qui soit authentique <strong>et</strong>régulatrice <strong>de</strong> son existence, qui nesoit pas simplement l’écho <strong>de</strong>s discoursqu’il entend ou l’imitation servile<strong>de</strong> l’un ou l’autre <strong>de</strong>s modèles que luilancent les médias? En d’autres termes,ce qui est en cause, dans le mon<strong>de</strong> trèsbruyant <strong>et</strong> bourré d’images fabriquéesoù nous vivons, c’est la capacité <strong>de</strong>chacun à répondre, pour lui-même, à<strong>de</strong>s questions fondamentales sur sapropre i<strong>de</strong>ntité (qu’est-ce qu’être unefemme ou un homme? une mère ou unpère? un conjoint ou une conjointe? uncitoyen ou une citoyenne?), <strong>de</strong> construireson i<strong>de</strong>ntité propre au lieud’adopter, comme un vêtement aujourd’huià la mo<strong>de</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>main voué àl’abandon, une i<strong>de</strong>ntité artificielle?Dans toutes les sociétés, le défi estlancé à l’école d’enraciner les jeunesdans leur héritage, afin que, sachantd’où ils viennent, ils sachent qui ilssont <strong>et</strong> peuvent <strong>de</strong>venir <strong>et</strong> aussi afin <strong>de</strong>les rendre capables <strong>de</strong> se libérer <strong>de</strong>l’ensorcellement par les symboles <strong>et</strong>les images dont ils sont sans cessebombardés. Sur ce plan, l’école peutcontribuer à l’authenticité <strong>de</strong>s personnes<strong>et</strong> à leur plus gran<strong>de</strong> autonomie.Le mon<strong>de</strong> qui prend forme quotidiennementest aussi façonné par le développementininterrompu <strong>et</strong> accéléré <strong>de</strong>la science <strong>et</strong> <strong>de</strong> la technologie. On peutdiscerner au moins <strong>de</strong>ux conséquencesmassives <strong>de</strong> ce phénomène dans la vie<strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s sociétés. D’unepart, la science <strong>et</strong> la technologie sont lemoteur <strong>de</strong> l’économie, les bases <strong>de</strong> larichesse <strong>et</strong> <strong>de</strong> la puissance, la source<strong>de</strong> l’innovation, le facteur le plus central<strong>de</strong> la compétitivité. Comme ellesévoluent à une très gran<strong>de</strong> rapidité,elles sont à la fois génératrices <strong>de</strong>désuétu<strong>de</strong> accélérée pour les compétences<strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s, <strong>de</strong>s entreprises,<strong>de</strong>s nations, <strong>et</strong> elles exigent une immensecapacité d’adaptation constanteaux nouveautés qu’elles pro<strong>du</strong>isent, <strong>et</strong>ce, dans tous les domaines <strong>de</strong> l’activitééconomique. À un mon<strong>de</strong> d’une tellemobilité, il est indispensable quel’école assure une préparation adéquatefaute <strong>de</strong> laquelle les indivi<strong>du</strong>s <strong>et</strong> lesnations sont rapi<strong>de</strong>ment déclassés par<strong>de</strong>s concurrents réussissant mieux às’adapter au nouveau <strong>et</strong> à en tirer profit.À la lumière <strong>de</strong> l’évolution rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong>omniprésente <strong>de</strong> la science <strong>et</strong> <strong>de</strong> latechnologie, l’ignorance, le manque <strong>de</strong>7PÉDAGOGIQUE

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