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Tl2Ba2CuO6+δ - Laboratoire National des Champs Magnétiques ...

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RésuméCe travail de thèse est basé sur <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques de l’aimantationdans les supraconducteurs à haute température critique. Ces matériaux ont été découvert en1986 par Bednorz et Müller. Ils sont caractérisés par la présence de plans CuO 2 dont on peutfaire varier la concentration électronique. A faible dopage, ces systèmes se comportent commeun isolant, les électrons étant localisés par une forte répulsion coulombienne. A très fortdopage, ces systèmes retrouvent un comportement de type liquide de Fermi. Entre ces deuxextrêmes, un dôme supraconducteur, dont la température critique maximum correspondau dopage dit optimum, apparaît. Différentes son<strong>des</strong> expérimentales ont révélé, du côtésous-dopé, la présence d’une phase dite pseudogap. La physique de ces systèmes soulèveplusieurs questions fondamentales : quelle est la nature de cette phase pseudogap, quel estle mécanisme d’appariement à l’origine de la supraconductivité ?Au cours de cette thèse, nous avons développé un système de mesure de l’aimantationpar cantilever piezorésistif sous champ magnétique intense à très basse température. Nosmesures ont révélé la présence d’oscillations quantiques de l’aimantation <strong>des</strong> deux cotésdu diagramme de phase et ce pour la première fois. Ces oscillations prouvent l’existenced’une surface de Fermi fermée et cohérente qui évolue d’une large orbite de trou du côtésur-dopé à une surface de Fermi contenant une ou plusieurs petites poches du côté sousdopé.De plus, la présence d’un battement de ces oscillations suggère la restauration de lacohérence selon l’axe c à très basse température du côté sous-dopé du diagramme de phase.Ces différents faits expérimentaux vont dans le sens d’un état fondamental de type liquidede Fermi. Le pseudogap marquerait alors l’apparition d’une phase ordonnée en compétitionavec la supraconductivité.Mots clés : Supraconducteur à haute température critique, surface de Fermi, oscillationsquantiques, aimantation, champ magnétique intense, réfrigérateur à dilution, cantileverCette thèse a été effectué au :<strong>Laboratoire</strong> <strong>National</strong> <strong>des</strong> <strong>Champs</strong> Magnétiques Intenses - Toulouse143, av. de Rangueil31400 Toulouse Franceiii


Summaryde Haas-van Alphen effect in the hight temperature superconductorsThis thesis work is based on quantum oscillation measurements of the magnetizationin high temperature superconductors. These materials were discovered in 1986 by Bednorzand Müller. They are characterized by the presence of CuO 2 planes of which the electronicconcentration can be changed. At low doping, these systems have insulating behavior, theelectron being localised by strong Coulomb repulsion. At very high doping, these systemsrecover Fermi liquid behavior. Between these two extremes there is a superconducting domeat which the maximum critical temperature corresponding to a doping, called optimum,arises. Various experimental probes reveal, on the underdoped side, the presence of the socalledpseudogap phase. The physics of this system raise several fundamental questions :What is the nature of this pseudogap phase and what is the pairing mechanism at the originof this superconductivity.During this thesis, we have developed a measurent system of the magnetization witha piezoresistive cantilever under high magnetic field and at very low temperature. Ourmeasurements have revealed the presence of quantum oscillations of the magnetization forthe first time on each side of the phase diagram. These oscillations attest of the existenceof a closed and coherent Fermi surface which evolves from a huge orbit of holes on theoverdoped side to a Fermi surface containing one or several small pockets on the underdopedside. Moreover, the presence of a beating in these oscillations suggest the restoration of thecoherence along the c-axis at very low temperature and at very high magnetic field onthe underdoped side. These different experimental facts are consistent with a Fermi liquidfundamental state. The pseudogap is a hallmark of the appearance of an ordered phase incompetition with superconductivity.Keywords : High temperature superconductor, Fermi surface, quantum oscillations, magnetization,high magnetic field, dilution fridge, cantileveriv


RemerciementsDurant cette thèse, j’ai été encadré principalement par trois personnes qui m’ont chacuneapprise une partie du métier d’expérimentateur.Je tiens à remercier tout d’abord David Vignolles, mon Directeur de thèse pour la passioncommunicative avec laquelle il m’a transmis les techniques de mesure de l’aimantation etle travail sous binoculaire. Venant d’un laboratoire de physique théorique je vous laisseimaginer le challenge. Nous avons développé ensemble un système permettant de faire <strong>des</strong>mesures très performantes. La phase de développement et les premières mesures resteront,pour moi, <strong>des</strong> moments très forts. David a toujours eu du temps à me consacrer malgréces nombreuses heures de cours. Ce fut très agréable et enrichissant de travailler ensemble,merci encore.Je tiens ensuite à remercier Cyril Proust, mon deuxième Directeur de thèse. A la fin duMaster 2 eme année, c’est grâce à lui que j’ai pu effectuer ma thèse au sein de l’équipe FFC.Il m’a appris à exploiter au mieux mes capacités. Quelque soit le développement de macarrière professionnelle cela me sera très profitable. Ses connaissances et son sens physiquem’ont permis de mieux appréhender les systèmes de mesures et les propriétés physique <strong>des</strong>composés étudiés. Merci de m’avoir encadré durant cette thèse et d’avoir fait de moi, jel’espère, un bon expérimentateur.J’ai aussi beaucoup travaillé avec Alain Audouard, notre spécialiste <strong>des</strong> oscillations quantiques.Merci de m’avoir appris à analyser et interpréter les signaux mesurés. C’est grâce àla finesse de son analyse que nous avons pu mettre en lumière les détails subtils de la surfacede Fermi de YBa 2 Cu 3 O 6.5 . Je tiens particulièrement à le remercier pour son soutien moralet pour être resté l’homme qui mange une pomme à midi.Je remercie aussi les membres de mon jury de thèse. Le Professeur Joachim Wosnitzadu HLD à Dresde qui, malgré un agenda surchargé, m’a fait l’honneur d’accepter le statutde rapporteur. Philippe Bourges Directeur de Recherche CEA au LLB à Saclay pour sonrôle de rapporteur et son implication concernant nos résultats. Claude Berthier, Directeurde Recherche au LNCMI à Grenoble, qui m’a fait l’honneur de présider le jury de thèse.Je tiens à remercier très chaleureusement Sylvain Capponi, Professeur au LPT à Toulousepour avoir acceptée le rôle d’examinateur et pour m’avoir soutenu depuis la maîtrise.Un grand merci à Marc Nardone qui a conçu et réalisé le réfrigérateur à dilution fonctionnantsous champ pulsé sans lequel le projet de thèse n’aurait jamais pu être accompli. Ilm’a aussi appris tout ce que je sais sur la cryogénie et a toujours été présent lorsque j’avaisbesoin de lui lors de l’utilisation de la dilution.v


Je remercie également le Directeur du LNCMI, Geert Rikken pour avoir accepté macandidature et permis de présenter les travaux du groupe lors de nombreuses conférences.Merci aussi pour les excellentes conditions de travail dont j’ai pu bénéficier.Les découvertes obtenues lors de cette thèse n’auraient pas pu avoir lieu sans de nombreuxcollaborateurs que je tiens tout particulièrement à remercier. Doug Bonn, RuixingLiang, Walter Hardy, leur étudiant Brad Ramshaw et postdoc James Day de l’universitéde Colombie Britannique ont réussi à synthétiser <strong>des</strong> échantillons de qualité exceptionnellesans lesquels les mesures d’oscillations quantiques n’auraient pas pu être réalisées dansYBa 2 Cu 3 O 6.5 . J’ai aussi eu la chance de collaborer avec Nigel Hussey et Antony Carringtonde l’université de Bristol ainsi que leurs postdocs Ali Bangura et John Fletcher. Travailleravec eux fut enrichissant et très plaisant. Je remercie aussi Andy Mackenzie et son étudianteAlexandra Gibbs de l’université de St. Andrews qui ont synthétisé de très bons échantillonsde Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ et de Sr 2 RuO 4 . Un grand merci également à Jacques Flouquet et DaiAoki du SPSMS à Grenoble pour les discussions et les mesures concernant CeCoIn 5 . Pourfinir, je tiens à remercier Louis Taillefer ainsi que son postdoc Nicolas Doiron-Leyraud etses étudiants David LeBoeuf et Jean-Batiste Bonnemaison pour les discussions physiquestoujours enrichissantes.Durant ces trois années, mon paysage quotidien fut esquissé par la présence de plusieurspersonnes que je remercie remercie d’avoir participer de manière active à mon évolutionpersonnelle et à la réussite de ma thèse.Julien Levallois, mon mentor et guide spirituel : t’en fait pas toi aussi tu touchera <strong>des</strong>boobs.Bertrand Griffe, l’homme qui vit au rythme de la bouffe et du bon vin.Un petit mot subtil pour Loïc Drigo : la plomberie c’est facile surtout avec un gros manche.Florent Durantel pour les livres très intéressant que tu m’a prêté au péril de ta vie, bonnechance pour la nouvelle.Baptiste Vignolle : lâche la pression au boulot et bonne chance pour ta nouvelle vie de papa.Abdelaziz Zitouni, un trésor d’une seule pièce c’est déjà pas mal et merci de m’avoir accompagnélors <strong>des</strong> lancements de la dilu.William Knafo, ça fait plaisir d’être récompensé par du foie gras pour avoir porté quelquescartons.Je remercie aussi chaleureusement tous les autres membres du laboratoire qui m’ont croisétous les jours, merci pour ces trois années.vi


Je tiens à remercier ma famille, sans le soutien de qui, je n’aurais jamais eu la chance depouvoir effectuer une thèse. Merci maman pour ton soutien, tes tomates farcies et tes riffs debasse. Merci papa pour m’avoir fait découvrir le monde et le veau aux morilles. Guillaumej’ai été docteur avant toi mais la blouse avec le nom en filigrane t’es réservé. Ta rougailde saucisse déchire. Chloé, cocotte comme dirait Guildu, continu comme ça t’es la meilleurquand tu bosses... heu sauf en cuisine. Merci aussi à Laurent l’informaticien motard fou.Je tiens aussi tout particulièrement à remercier mes grands-parents. Pépé André qui m’aappris à penser et à appréhender le monde comme un physicien. Mémé Huguette pour sessucculentes briques aux oeufs et à la menthe ainsi que les balla<strong>des</strong> en forêt. Pibo, pour tonaccueil toujours si chaleureux et pour m’avoir fait découvrir la grande bouffe. Zouzou poursa magnifique recette de cannelé : chut, c’est un secret ! Je remercie aussi Erik, Fabienne,Hanaé et Romain pour les vacances qui déchirent, ménagez-vous quand même un peu. Merciencore à toute la famille !Je tiens aussi à remercier mes amis proches. Gaël dont les goûts littéraires et culinairessont autant de bons mots et de hauts faits capable de ravir le plus raffiné <strong>des</strong> gentilshommes.Gailord le coureur musicien qui part toujours à fond. Julien dit la bête et ce n’estpas uniquement parcequ’il est roux. Je remercie chaleureusement Angel d’être venu mesoutenir et Adeline pour avoir su me mettre en confiance avant l’oral. Pour finir un grandmerci a Alex qui me suit depuis mes débuts à la fac.Merci aussi à vous d’avoir ouvert cette thèse qui vous apportera, je l’espère les informationsque vous recherchez.vii


CitationsL’homme de science le sait bien, lui, que seule la science, a pu, au fil <strong>des</strong> siècles, lui apporterl’horloge pointeuse et le parcmètre automatique sans lesquels il n’est pas de bonheurterrestre possible.Vivons heureux en attendant la mort de Pierre Desproges-Mais moi je croyais que vous étiez comme messieurs De Villalobos et Maupertuis !Que comme eux vous ne renonciez jamais.Que comme eux vous aviez toujours un riant visage à présenter à l’adversité...Un beau geste face au malheur, un bon mot face au danger...Que comme eux, vous possédiez ce je-ne-sais-quoi qui permet les plus improbables victoires,et qui, quand on perd, empêche les méchants de triompher tout à fait...Cette chose que mes amis appelaient...-Le Panache !De cape et de crocs de Ayroles et Masbou....Il n’y a encore que quarante ans, un écrivain, un peintre, un musicien pouvaient être<strong>des</strong> personnages importants. Mais maintenant...Il n’y a plus que quelques vielles caricaturesqui résistent à la <strong>des</strong>truction... Un Hemingway... un Stravinski... un Picasso... la génération<strong>des</strong> grands-pères et <strong>des</strong> arrière-grands-père, quoi... non, non, ce que vous faites n’intéresseplus personne... Toi-même, est-ce que tu vas aux exposition d’art abstrait ? Es-ce que tulis les articles de la critique là-<strong>des</strong>sus ? Folie, pure folie, conspirations d’une secte de survivantsqui réussissent encore à s’imposer çà et là par roublardise et à vendre, par hasard,un tableau aberrant pour deux millions. Les derniers frémissements, oui, voilà les ultimessursauts d’une agonie irrémédiable. Vous autres artistes, vous suivez un chemin et le publicun autre et ainsi vous vous éloignez toujours plus, et un jour viendra où la distance seratelle... vous pourrez crier, il n’y aura pas un chien pour vous écouter...-Et pourtant..., dis-je.-Et pourtant quoi ?-Et Pourtant, dis-je, même quand il n’y aura plus personne pour lire les histoires que nousécrivons tant bien que mal, même quand les expositions resteront désertes et que les musiciensjoueront leurs compositions devant <strong>des</strong> rangées de fauteuils vi<strong>des</strong>, les choses que nousferons, pas moi, mais ceux qui font mon métier...-Allez, courage, courage..., me harcelait, sarcastique, mon ami.-Oui, les histoires que l’on écrira, les tableaux qu’on peindra, les musiques que l’on composera,les choses stupi<strong>des</strong>, folles, incompréhensibles et inutiles dont tu parles seront pourtanttoujours la pointe extrême de l’homme, son unique étendard.Le Magicien de Dino Buzzativiii


Introduction généraleIntroduction généraleDepuis plus de 20 ans et malgré de nombreuses recherches, le mécanisme à l’origine de lasupraconductivité à haute température dans les oxy<strong>des</strong> de cuivre reste un problème ouvert.Ces matériaux furent découverts par Bednorz et Müller en 1986. Alors que la températurecritique record était de 23 K dans les supraconducteurs conventionnels, elle atteint maintenant194 K sous pression dans ces nouveaux composés. Ces matériaux sont caractériséspar la présence de plans CuO 2 an alternance avec <strong>des</strong> plans réservoirs de charges. Leurspropriétés dépendent fortement de la densité électronique dans ces plans. A faible dopage,le composé se comporte comme un isolant de Mott, les électrons étant localisés par uneforte répulsion coulombienne. A très fort dopage, ces systèmes retrouvent un comportementde type liquide de Fermi. Entre ces deux extrêmes, un dôme supraconducteur apparaît.Différentes son<strong>des</strong> expérimentales ont révélé un comportement anormal du côté sous-dopé,indiquant la présence d’une phase dite pseudogap. L’origine et la nature de cette phase restent,à l’heure actuelle, <strong>des</strong> questions fondamentales soulevées par les supraconducteurs àhaute température critique. Deux classes de scénario sont susceptibles d’expliquer l’évolution<strong>des</strong> propriétés électroniques <strong>des</strong> cuprates en fonction du dopage. Le premier considère lepseudogap comme un état précurseur de la supraconductivité alors que dans le deuxième, lepseudogap marque l’apparition d’une phase ordonnée en compétition avec la supraconductivité.Au cours de cette thèse, nous avons développé un système de mesure original de l’aimantationsous champ magnétique pulsé dans un réfrigérateur à dilution grâce à <strong>des</strong> cantileverspiezorésistifs. Nous nous sommes intéressés au phénomène d’oscillations quantiques de l’aimantationqui permet de caractériser la surface de Fermi d’un matériau. La mesure <strong>des</strong>oscillations quantiques dans les cuprates permet en principe d’étudier l’évolution de la surfacede Fermi en fonction du dopage. Cependant, la mesure de ce phénomène est renduedifficile car elle nécessite à la fois une sonde expérimentale très sensible, <strong>des</strong> très bassetempératures, <strong>des</strong> forts champs magnétiques et <strong>des</strong> échantillons d’une bonne qualité cristalline.Nos mesures ont révélé pour la première fois la présence d’oscillations quantiquesde l’aimantation (effet de Haas-van Alphen) <strong>des</strong> deux côtés du diagramme de phase et ontpermis d’apporter <strong>des</strong> éléments essentiels à la compréhension de la physique <strong>des</strong> cuprates.ix


Introduction généraleLa première partie de cette thèse présente de brefs rappels sur la physique du solide, la supraconductivitéet les oscillations quantiques. La deuxième partie est une revue non exhaustivesur les supraconducteurs à haute température. Les différentes phases caractérisant le diagrammede phases y sont abordées. La troisième partie est consacrée au développement de latechniques de mesure qui a permis les mesures d’effet de Haas-van Alphen dans ces composés.Lors du quatrième chapitre, les mesures d’oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ , uncuprate sur-dopé, sont présentées. Le cinquième chapitre présente les mesures d’oscillationsquantiques du côté sous-dopé dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 et YBa 2 Cu 4 O 8 . La sixième partie estune discussion sur les résultats obtenus et les différents scénarios susceptibles d’expliquer lanature et l’évolution de la surface de Fermi ainsi révélée.x


Table <strong>des</strong> matièresTable <strong>des</strong> matièresIntroduction généraleix1 Rappels : 11.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.2 Les supraconducteurs conventionnels : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.3 Les supraconducteurs non conventionnels : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.4 Introduction aux oscillations quantiques : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.4.1 Théorie de Lifshitz Kosevitch : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.4.2 Mesure <strong>des</strong> oscillations quantiques par la méthode du couple : . . . . . . 111.4.3 Grandeurs physiques déduites <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques : . . . 122 Introduction aux supraconducteurs à haute température critique : 132.1 Historique : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132.2 Structure : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.3 Diagramme de phases : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162.3.1 Isolant de Mott : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.3.2 La phase pseudogap : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202.3.3 La phase supraconductrice : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252.3.4 Le coté sur-dopé : Un liquide de Fermi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302.3.5 Diagramme de phases sous champ : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312.4 Approches théoriques susceptibles de décrire le diagramme de phases : . . . . . . 343 Techniques de mesure 373.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373.2 Dispositif expérimental : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373.2.1 Générateur : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 383.2.2 Bobine : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393.2.3 Cryogénie : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 403.3 Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé : . . . . . . . 433.3.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 433.3.2 Moment magnétique : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 433.3.3 Cantilever piezorésistif : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 443.3.4 Préparation du cantilever et montage de l’échantillon : . . . . . . . . . . 463.3.5 Calibration du cantilever : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 473.3.6 Mesure et optimisation du signal : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 503.3.7 Courants induits : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523.3.8 Effet de Haas-van Alphen dans Sr 2 RuO 4 dans un cryostat 4 He : . . . . . 543.4 Utilisation d’un cantilever dans un bain 3 He/ 4 He : . . . . . . . . . . . . . . . . 56i


Table <strong>des</strong> matières3.4.1 Système de mesure : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 563.4.2 Simulation de la température de l’échantillon à l’intérieur de la capsule : . 573.5 Effet de Haas-van Alphen à très basse température dans Sr 2 RuO 4 : . . . . . . . 604 Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés 634.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 634.2 Synthèse et structure <strong>des</strong> cristaux de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ : . . . . . . . . . . . . . . 644.3 Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 654.4 Comparaison avec d’autres types de mesures : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 734.4.1 Oscillation de la magnétorésistance dépendante de l’angle : . . . . . . . . 734.4.2 Spectroscopie par photoémission résolue en angle : . . . . . . . . . . . . 744.4.3 Mesures d’effet Hall . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 754.4.4 Mesures de chaleur spécifique : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 754.4.5 Comparaison avec les mesures d’oscillations quantiques : . . . . . . . . . 774.5 Conclusion : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 785 Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phases 795.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 795.2 Composés : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 805.2.1 YBa 2 Cu 3 O 6+δ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 805.2.2 YBa 2 Cu 4 O 8 : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835.3 Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 et YBa 2 Cu 3 O 6.54 : . . . . . . . . . 845.3.1 Effet de Haas-van Alphen : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 845.3.2 Comparaison <strong>des</strong> mesures dHvA et SdH : . . . . . . . . . . . . . . . . . 885.4 Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 4 O 8 : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 905.5 Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 : . . . . 935.5.1 Mesures : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 935.5.2 Scénario sur l’origine du battement : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 985.6 Conclusion : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1006 Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage : 1016.1 Introduction : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1016.2 État normal ou phase de vortex : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1026.2.1 Oscillations quantiques dans la phase mixte : . . . . . . . . . . . . . . . 1026.2.2 Mesures représentatives de l’état normal : . . . . . . . . . . . . . . . . . 1036.3 Evolution de la surface de Fermi avec le dopage : . . . . . . . . . . . . . . . . . 1076.3.1 Evolution de la densité de porteur avec le dopage : . . . . . . . . . . . . 1076.3.2 Evidences de porteurs de type électron : . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1096.4 Calculs de structure de ban<strong>des</strong> : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1106.4.1 Cas de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1106.4.2 Cas de YBa 2 Cu 3 O 6+δ et YBa 2 Cu 4 O 8 : . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1126.5 Prédictions de la topologie de la surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates sous-dopés : . . . 1146.5.1 Isolant de Mott dopé : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1146.5.2 Ordre en compétition : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1176.5.3 Phase induite par le champ magnétique : . . . . . . . . . . . . . . . . . 1206.6 Indications d’un point critique quantique : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1216.7 Analogie avec les cuprates dopés aux électrons : . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1237 Conclusion 127ii


Table <strong>des</strong> matièresConclusion générale 127iii


Chapitre 1Rappels1.1 Introduction :Un métal est un système complexe. Il est constitué d’un très grand nombre d’électronset d’ions en interactions. Il n’existe pas de solution analytique capable de prendre en comptetoutes ces interactions. Une approche présentée par Landau en 1957 [1], appelée théorie duliquide de Fermi, permet, sous certaines conditions, de le décrire comme un gaz de quasiparticuleslibres, c’est à dire un gaz de particules sans interaction.Il est nécessaire que la fonction d’onde à N électrons avec ou sans interactions ait la mêmestructure. La distribution <strong>des</strong> niveaux d’énergies évolue adiabatiquement quand on brancheles interactions. Les états électroniques résultants peuvent alors être décrits comme <strong>des</strong> excitationsélémentaires de spin 1/2 et de charge q. Ces états sont appelés quasiparticules. Leschangements dus aux interactions électroniques sont pris en compte dans la renormalisationde la masse et du rapport gyromagnétique <strong>des</strong> quasiparticules. La validité de cette approcherepose sur ce concept de quasiparticule qui permet de traiter les interactions entre ellescomme une perturbation de l’état fondamental <strong>des</strong> électrons libres. Pour que cette approchesoit valide, il faut cependant que le temps de diffusion quasiparticule-quasiparticule soitsuffisamment grand pour pouvoir considérer les états comme stationnaires. Les quasiparticulessont <strong>des</strong> fermions et obéissent donc à la statistique de Fermi-Dirac. Au niveau deFermi, ils ne peuvent diffuser que vers <strong>des</strong> états de plus hautes énergies. Les quasiparticulesau niveau de Fermi ne peuvent donc pas être diffusées à T = 0 K. Le temps de diffusionest alors infini. Cette assertion est vrai dans un matériau parfait, sans impuretés. Pour <strong>des</strong>quasiparticules proches du niveau de Fermi, les interactions électron-électron conduisent àune relation modifiée entre l’énergie et le vecteur d’onde mais ne remettent pas en cause lastructure du modèle <strong>des</strong> électrons indépendants. Le système peut alors être décrit commeun liquide de Fermi.Dans un métal, E F ≃ 1 eV ce qui correspond à T F ≃ 12000 K. Dans la gamme detempérature où nous travaillons, les quasiparticules sont donc très proches du niveau deFermi. Ce modèle a rencontré un grand succès en prédisant avec un bon accord quantitatifet qualitatif les grandeurs thermodynamiques <strong>des</strong> métaux [2].1


1. Rappels :La dispersion en énergie d’un gaz de quasiparticules libres est :E(k) = 2 k 22m ∗ (1.1)où m ∗ est la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules. Cette masse représente la masse d’unequasiparticule renormalisée par les interactions. Dans un système à fortes corrélations électroniquescomme les système à fermions lourds, elle peut atteindre plusieurs centaines de fois la massed’un électron libre. La chaleur spécifique s’exprime sous la forme :C V = γ T + P T 3 (1.2)P T 3 représente la chaleur spécifique <strong>des</strong> phonons et γ T celle due aux excitationsélectroniques.γ = m∗ k F k 2 B3 2 (1.3)avec γ le coefficient de Sommerfield. Si on connaît k F , c’est à dire la densité de porteur,on peut en déduire la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules.Les mesures de résistivité sont plus difficile à interpréter car les mécanismes de diffusiondoivent être pris en compte. La règle de Matthiessen permet de séparer les contributions <strong>des</strong>différents mécanismes. La résistivité est alors la somme <strong>des</strong> résistivités dues aux différentsmécanismes.ρ = ∑ im ∗n e 2 τ i(1.4)n, e et τ représentent respectivement la densité de porteurs, la charge de l’électron et letemps de relaxation. Dans le cadre du transport à basse température si les interactions parles impuretés et les quasiparticules prédominent, la résistivité suit une loi du type :avec A ∝m∗2n EF kF2et ρ 0 =m∗n e 2 τ 0ρ = ρ 0 + A T 2 (1.5)la résistivité résiduelle. Elle est due aux diffusions <strong>des</strong>porteurs par <strong>des</strong> impuretés. τ 0 représente la durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules à températurenulle.La susceptibilité paramagnétique d’un liquide de Fermi est décrite par la susceptibilitéde Pauli. Ce modèle tient compte du couplage entre le spin <strong>des</strong> électrons et le champmagnétique. Les hypothèses du modèle sont <strong>des</strong> états électroniques indépendants et uneréponse orbitale négligeable. Dans ce cas, l’aimantation ne dépend que de la différence dedensité d’états entre les électrons de spin parallèles et anti-parallèles au champ. Dans le casoù µ B H


Les supraconducteurs conventionnels :1.2 Les supraconducteurs conventionnels :Tout commença avec la liquéfaction de l’hélium par K. Onnes en 1908. Cette découverteouvrit un nouveau domaine de la physique, celui <strong>des</strong> très basses températures. Peu de tempsaprès, en 1911, M.G. Holst et K. Onnes ont découvert que le mercure présente une conductivitéinfinie en <strong>des</strong>sous d’une température critique T c = 4 K. Ce phénomène fut nommésupraconductivité. L’histoire ne retiendra que le nom de Onnes qui reçut le prix Nobel en1913. Puis d’autres métaux tels le plomb (T c = 7K) et l’étain (T c = 4 K) révélèrent, euxaussi, une conductivité parfaite à très basse température. Un autre effet fut découvert dansces matériaux supraconducteurs en 1933 par W. Meissner et R. Ochsenfeld. En <strong>des</strong>sous d’uncertain champ magnétique critique, le supraconducteur possède un diamagnétisme parfait :c’est l’effet Meissner Ochsenfeld.Un modèle phénoménologique pour décrire la transition entre l’état normal et supraconducteursest publié en 1950 par Ginzburg et Landau [3]. Il prévoit deux types de supraconducteuren fonction du paramètre κ, rapport entre la longueur de pénétration λ duchamp magnétique et la longueur de cohérence du paramètre de phase ξ (κ = λ ξ). Les supraconducteursde type I (κ < √ 1 2) soumis à un champ magnétique transitent vers l’étatnormal à un champ critique H c . Le matériau passe directement d’un état où le champ estcomplètement écranté par les supercourants à celui où il n’y a plus de supercourants. Dansun supraconducteur de type II (κ > √ 12) le champ ne pénètre pas dans l’échantillon en<strong>des</strong>sous de H c1 puis, au <strong>des</strong>sus de ce champ, le champ pénètre progressivement sous formede vortex. Chaque vortex contient un quantum de flux magnétique (Φ 0 = h 2e). L’échantillontransite vers l’état normal au-<strong>des</strong>sus de H c2 .Figure 1.1 – Diagramme de phases champ moyen pour les deux types de supraconducteur[4].3


1. Rappels :Il a fallut attendre 1957 pour qu’une théorie puisse expliquer l’origine microscopique duphénomène dans les supraconducteurs conventionnels. C’est l’effet isotopique qui a mis lesthéoriciens sur la voie [5, 6]. Cet effet révèle la relation entre la température critique <strong>des</strong> supraconducteurset la masse <strong>des</strong> ions qui constituent le réseau cristallin. L’idée développée parCooper est qu’un potentiel attractif peut compenser la répulsion coulombienne entre 2 quasiparticules.Cette interaction attractive va donner naissance à <strong>des</strong> états liés appelés pairesde Cooper [7]. La théorie développée par Bardeen, Cooper et Schrieffer (BCS) [8] décritune instabilité de l’état métallique vers l’état supraconducteur due au potentiel d’interactionentre deux quasiparticules. L’effet isotopique suggère que l’origine de cette interactionest liée aux phonons. Le rôle <strong>des</strong> phonons fut confirmé par <strong>des</strong> mesures de microscopie àeffet tunnel [9] et de neutron [10]. La fonction d’onde de l’état fondamental BCS s’écrit enseconde quantification :∏( u k + v k c + k,↑ c+ −k,↓) | vide > (1.8)k


Les supraconducteurs non conventionnels :Gor’kov a montré la correspondance entre le paramètre d’ordre de la théorie de Ginzburg-Landau et ∆ [11], le gap supraconducteur. Plus le couplage <strong>des</strong> électrons avec les phononsest important, plus la T c du matériau est grande. Donc plus le taux de diffusion <strong>des</strong> quasiparticulesdue aux phonons est grand, plus la T c est haute. Les matériaux qui conduisent lemieux le courant ne sont pas les matériaux avec les T c les plus hautes. Pour les composéspurs, c’est le nobium qui a la plus haute T c = 9.2 K. Nb 3 Ge détient actuellement le recordpour les supraconducteurs conventionnels avec une T c = 23.2 K [12].La théorie BCS peut être étendue à d’autres symétries de gap que la symétrie s et à unmécanisme de couplage autre que les vibrations du réseau.1.3 Les supraconducteurs non conventionnels :Dans le cas conventionnel, le potentiel d’interaction à l’origine de l’instabilité de la surfacede Fermi est isotrope et indépendant du spin. Les paires de Cooper se forment alorsavec une symétrie s. Lorsque l’interaction à l’origine de l’instabilité est plus complexe lespaires peuvent se former avec <strong>des</strong> symétries plus basses. Dans ce cas, plusieurs symétriesadditionnelles à la symétrie de jauge sont brisées par le paramètre d’ordre lors de la transition.Pour certaines symétries, <strong>des</strong> zones de la surface de Fermi sont non gappées (noeuds)et <strong>des</strong> quasiparticules subsistent.Figure 1.3 – Diagramme de phases a) <strong>des</strong> supraconducteurs à haute température critique[13], b) du conducteur organique (T MT T F ) 2 P F 6 [14] et c) du fermions lourd UGe 2 [15].D’autres mécanismes que les phonons peuvent être à l’origine d’une transition supraconductrice,on parle alors de supraconductivité non conventionnelle. De nombreux matériauxsont susceptibles de posséder une telle supraconductivité comme, par exemple, les matériauxà fermions lourds [16], les conducteurs organiques [17] et les supraconducteurs à hautetempérature critique [18]. La figure 1.3 présente le diagramme de phases de différentscomposés. Ces matériaux présentent un état supraconducteur proche d’un état ordonnémagnétiquement. Dans les cuprates et la famille de composé à fermions lourds CeM 2 X 2 ,l’état supraconducteur apparaît au voisinage d’un état antiferromagnétique. La températurecritique dans les cuprates est de l’ordre de 194 K dans HgBa 2 Ca 2 Cu 2 O 8 sous pression [19].5


1. Rappels :Une température critique si haute et la proximité d’un état ordonné magnétiquement amotivé les théoriciens à explorer d’autres mécanismes de couplage qui ne seraient pas liés auxphonons. Un modèle phénoménologique développé par Monthoux [15] permet d’appréhenderl’effet <strong>des</strong> interactions spin-spin et charge-charge sur le potentiel attractif <strong>des</strong> paires de Cooper.Dans le cas d’un matériaux proche d’un état antiferromagnétique, le potentiel attractifoscille dans l’espace avec une période comparable à celle d’un réseau tétragonal. L’amplitudedu potentiel est plus forte dans un cas bidimensionnel que tridimensionnel. Des régionsrépulsive sont situées le long <strong>des</strong> diagonales. Dans ce cas, un gap supraconducteur de symétried où les noeuds sont situés le long <strong>des</strong> diagonales peut être énergétiquement favorable.Dans UGe 2 , un ordre ferromagnétique est proche du dôme supraconducteur. Si le matériauxest proche d’un ordre ferromagnétique, le potentiel dû aux spins est attractif si les spins sontparallèles. Dans ce cas les paires vont se former dans un état triplet de spin plutôt que singulet.Le principe de Pauli entraîne une dépendance particulière du potentiel attractif enfonction du moment angulaire. Une <strong>des</strong> symétries qui permet de rendre compte de cettecontribution est une symétrie de type p. Ce type de supraconductivité a été observée trèsrécemment dans UGe 2 et UrRhGe [20, 21].Les propriétés thermodynamiques permettent de révéler la présence de noeuds dans legap supraconducteur. En effet, si le gap supraconducteur présente <strong>des</strong> noeuds, <strong>des</strong> excitationsapparaissent même à très basse température et l’évolution de ces grandeurs en fonction de latempérature suit une loi de puissance et non une loi exponentielle comme dans le cas d’unesymétrie s. Dans les supraconducteurs à haute température critique, plusieurs expériencesont révélé un gap supraconducteur de symétrie d (voir chap. 2.4.3).1.4 Introduction aux oscillations quantiques :C’est en 1930 que les premières mesures d’oscillations quantiques de l’aimantation ont étéeffectuées [22]. W. J. de Haas et P. M. van Alphen ont mesuré l’aimantation d’un échantillonde Bismuth à T= 15 K et jusqu’à B= 20 T. En 1952, Onsager [23] relie la fréquence <strong>des</strong>oscillations à la surface de Fermi perpendiculaire au champ magnétique appliqué. Depuisles années 1960, cette technique a été utilisée dans de nombreux métaux pour en déduirela surface de Fermi, la masse effective cyclotron et le libre parcours moyen <strong>des</strong> porteurs.Un inventaire <strong>des</strong> surfaces de Fermi <strong>des</strong> métaux présenté sous la forme d’un tableau deMendeleïev peut être consulté sur le site http ://www.phys.ufl.edu/fermisurface/. Cettetechnique a également été utilisée dans les matériaux à fortes corrélations électroniquescomme les matériaux organiques ou <strong>des</strong> composés à fermions lourds et plus récemment lessupraconducteurs à hautes températures critiques [13].1.4.1 Théorie de Lifshitz Kosevitch :L’hamiltonien d’un gaz d’électrons libres soumis à un champ magnétique s’écrit :H = (⃗p + q ⃗ A) 22m(1.9)⃗p = m ⃗v correspond à l’impulsion <strong>des</strong> particules sans champ magnétique, A ⃗ au potentielvecteur tel que B ⃗ = rot( ⃗ A) ⃗ et q = −e à la charge <strong>des</strong> particules.6


Introduction aux oscillations quantiques :Le champ magnétique est dirigé suivant l’axe ⃗e z . Dans la jauge de Landau, le potentielvecteur s’écrit A ⃗ = (0, B x, 0). L’opérateur potentiel vecteur et impulsion commutent([A, p] = 0). Soit ω c = e Bmla pulsation cyclotron, l’Hamiltonien peut alors se développersous la forme :H = − 2 ∆2m + iω cx ddy + m 2 ω c 2 x 2 (1.10)L’Hamiltonien ne dépend que de x, la fonction d’onde stationnaire est donc de la forme :La solution de l’équation de Schrödinger est alors :[− 2d 2|Ψ >= Φ(x) e i(ky.y+kz.z) (1.11)2m dx 2 + 12m ( k y − m ω c x) 2 ] |Ψ >= (ɛ − 2 k z)|Ψ > (1.12)2mCette équation correspond à l’équation d’un oscillateur harmonique de pulsation ω c . Lesvaleurs propres correspondantes sont :ɛ n = (n + 1/2) ω c + 2 kz22 mLe graphique 1.4 représente la dispersion en énergie en fonction de k z .(1.13)E FhcE n=0E n=1E n=2E n=3E n=4E n=5E n=6E n=7E n=8E n=9k ZFigure 1.4 – Dispersion en énergie <strong>des</strong> niveaux de Landau en fonction de k z .7


1. Rappels :L’énergie <strong>des</strong> électrons libres soumis à un champ magnétique est quantifiée dans ladirection perpendiculaire au champ magnétique. Ce phénomène est appelé quantification enniveaux de Landau et les différentes ban<strong>des</strong> (E n ) sont appelées sous-ban<strong>des</strong> de Landau. Dansla direction parallèle au champ magnétique, la dispersion énergétique n’est pas modifiée. Lesniveaux de Landau sont espacés de ω c . Cet écart est donc proportionnel au champ.L x et L y sont les dimensions de la boite dans laquelle les électrons sont enfermés. D’aprèsl’équation 1.12, l’impulsion maximum est obtenue pour k y = eBc L x. La dégénérescence dechaque sous niveau de Landau est :g = 2 e Bh c L x L y (1.14)où le facteur 2 permet de prendre en compte le spin. La densité d’états s’exprime alors :n(ɛ) = V ω c 4π 2 ( 2 m 2 ) 3 2∞∑[ɛ − (n + 1 2 ) ω c] − 1 2 (1.15)n=0avec V le volume. La densité d’états diverge dès que ɛ = (n + 1 2 ) ω c. Ce phénomène alieu quand un niveau de Landau coupe le niveau de Fermi. Il est donc périodique en fonctionde l’inverse du champ magnétique.Figure 1.5 – Densité d’états 3D en fonction de l’énergie à champ nul (ligne pointillée) et enprésence d’un champ magnétique (ligne pleine).La figure 1.5 représente la densité d’états en fonction de l’énergie. En présence d’unchamp magnétique, les états électronique se réorganisent et une divergence apparaît à chaquefois que l’énergie de Fermi coincide avec l’un <strong>des</strong> niveaux de Landau. La divergence dela densité d’états entraîne l’oscillation <strong>des</strong> différentes propriétés électroniques. Soit τ ladurée de vie <strong>des</strong> quasiparticules avant d’être diffusées par les impuretés. D’après le principed’incertitude d’Heisenberg ∆ɛ.∆τ ≥ 2. La largeur <strong>des</strong> niveaux de Landau est de l’ordre de∆ɛ ≥ 2τ . 8


Introduction aux oscillations quantiques :Pour pouvoir observer <strong>des</strong> effets dus à la quantification en niveaux de Landau, il fautque la largeur du niveau soit plus petite que l’écart entre les niveaux (ω c ). Cette conditionpeut s’exprimer ainsi :ω c τ >> 1 (1.16)Une autre condition à respecter pour pouvoir observer la quantification en niveaux deLandau est liée à la température. En effet, si l’élargissement <strong>des</strong> niveaux de Landau dû auxfluctuations thermiques est supérieur à l’écart entre les niveaux, il n’y a plus de discontinuitéde la distribution au niveau de Fermi.ω c >> 2 πk B T (1.17)L’aimantation est proportionnelle à l’énergie libre. La divergence de la densité d’étatentraîne une oscillation de l’énergie libre et donc de l’aimantation du système. Ce phénomèneest appelé effet de Haas-van Alphen [22]. La divergence de la densité d’états induit aussi uneoscillation de la magnétorésistance et de l’effet Hall. Cet effet est appelé effet ShubnikovdeHaas. Une manière de comprendre l’origine de cet effet est que le taux de diffusion<strong>des</strong> quasiparticules est proportionnel à la densité d’état. Plus un grand nombre d’états estdisponible, plus la probabilité de diffusion augmente.Les oscillations quantiques sont décrites par la théorie de Lifshitz-Kosevich [24, 25]. Leshypothèses de ce modèle sont un système se comportant comme un liquide de Fermi, unniveau de Fermi constant et un taux de diffusion isotrope. L’oscillation de l’aimantations’écrit alors :M ∝ ∑ iA 0 i B 1 2∞∑ αT m( ∗ i) αT m ∗Bsinh iB} {{ }R Tp=1(exp − αT D im ∗ )iB} {{ }R D( πgi pm ∗ ) ( ( )icosp 3 Fi2 sin 2πp2m 0 B − γ i ± π )4} {{ }R S(1.18)Avec α = 2π2 k B m 0e∼ 14.69 T/K, m ∗ i la masse effective en unité m 0 , g i le facteur deLandé, T Di la température de Dingle, γ i le déphasage. La somme sur i porte sur les différentsextremums de la surface de Fermi perpendiculaire au champ. L’équation est écrite dans lecas de poches 3D. Il n’y a pas de terme en B 1 2 dans le cas 2D. La somme sur p porte surles différentes harmoniques. Les oscillations <strong>des</strong> mesures de transport sont déphasées de π 2par rapport à celles de l’aimantation car les premières sont directement reliées à la densitéd’état alors que les deuxièmes sont reliées à sa dérivée.Les oscillations quantiques sont périodiques en fonction de l’inverse du champ magnétiqueet la fréquences est directement proportionnelle à l’aire extrémale de la surface de Fermiperpendiculaire au champ. La relation d’Onsager permet de déduire l’aire de la surface deFermi à partir de la fréquence <strong>des</strong> oscillations :A i = 2πe F i (1.19)L’amplitude de l’oscillation comporte trois termes d’amortissement : R T , R D et R S .Le facteur R T décrit l’amortissement de l’amplitude dû à l’étalement de la distribution deFermi Dirac en fonction de la température. Elle est liée à la masse effective cyclotron (m ∗ i )qui tient compte <strong>des</strong> interactions électrons-électrons et électrons-phonons.9


1. Rappels :Le facteur d’amortissement de Dingle, R D , prend en compte la dépendance avec le champmagnétique de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations. Ce facteur permet de prendre en compte l’élargissement<strong>des</strong> niveaux de Landau dû à la durée de vie finie <strong>des</strong> quasiparticules. On définit la températurede Dingle T D (K) :T D =2πk B τ(1.20)avec τ la durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules. Le facteur de réduction de Dingle dépend defaçon exponentielle de la durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules d’où l’importance de mesurer <strong>des</strong>cristaux de la meilleure qualité possible.Le facteur d’amortissement de spin, R S est dû au décalage Zeeman entre les quasiparticulesde spin parallèle et anti-parallèle au champ. Ce décalage en énergie va décaler lesfréquences d’oscillations suivant la direction <strong>des</strong> spins. Le facteur de réduction est égal àzéro quand g i p m ∗ i2 m 0= 1 + 2 n avec n ɛ N. C’est ce qu’on appelle l’effet spin zéro qui permetde déduire la valeur de g <strong>des</strong> mesures. La mesure de spin zéro nécessite de pouvoir faire <strong>des</strong>mesures pour différentes orientations du champ magnétique par rapport à l’échantillon.La durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules (τ) déduites <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiquesest généralement inférieure à celle déduites <strong>des</strong> mesures de la résistivité résiduelle (τ ρ ). Eneffet, les diffusions à petit angle ne vont pas affecter le temps de vie <strong>des</strong> quasiparticulesmesuré en transport alors qu’elles vont modifier la trajectoire de la quasiparticule sur uneorbite cyclotron et briser sa cohérence de phase.10


Introduction aux oscillations quantiques :1.4.2 Mesure <strong>des</strong> oscillations quantiques par la méthode du couple :1.4.2.1 Principe :Nous utilisons une méthode basée sur <strong>des</strong> mesures de couple magnétique pour mesurerl’effet de Haas-van Alphen (voir chap.3). L’aimantation ( ⃗ M) d’un composé est reliée aupotentiel thermodynamique (Ω) par :⃗M = −( −−→ grad B Ω) (1.21)Si la surface de Fermi est anisotrope, la partie oscillatoire va présenter deux composantes: l’une parallèle au champ appliqué (M // ) et l’autre perpendiculaire (M ⊥ ). A partirde l’expression du gradient en coordonnées cylindriques, on montre que :M // = − δΩδB(1.22)M ⊥ = − 1 B (δΩ δθ ) (1.23)La partie oscillatoire de l’aimantation d’un échantillon est directement reliée à la surface<strong>des</strong> poches de la surface de Fermi (eq. 1.18). Ces deux composantes sont reliées par :M ⊥ = − 1 δFF δθ M // (1.24)avec F la fréquence correspondant à l’aire de la surface de Fermi perpendiculaire auchamp. Quand un tel composé est soumis à un champ magnétique, un couple de force estinduit entre son aimantation et le champ magnétique. Le couple s’exprime ainsi :τ = M ⃗ ∧ B ⃗ = M ⊥ B = − 1 δFF δθ M //B (1.25)Cette méthode permet une mesure relativement simple <strong>des</strong> oscillations de Haas-vanAlphen. Cependant, si le champ est parfaitement aligné avec une direction de symétrie dela surface de Fermi ( δFδθ= 0) le signal est nul.1.4.2.2 Interaction du couple magnétique :Plus le couple magnétique est important, plus le bras de levier supportant l’échantillon sedéforme changeant ainsi la valeur de l’angle entre le champ magnétique et l’aimantation aucours du pulse. Ce phénomène peut créer l’apparition d’artefact, comme <strong>des</strong> harmoniques dela fréquence principale ou <strong>des</strong> combinaisons de fréquences. Il est appelé ”torque interaction”[25]. Un paramètre p rend compte de l’importance de cet effet :p = 2π γ ( )F 1 ∆F(1.26)c B F ∆Θoù c est le couple magnétique en fonction de l’angle et γ l’amplitude <strong>des</strong> oscillations. Sip


1. Rappels :1.4.3 Grandeurs physiques déduites <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques :Une fois le signal mesuré, on extrait la partie oscillatoire en soustrayant une monotone.On effectue ensuite une transformée de Fourier de la partie oscillatoire dans une fenêtre dechamp [B min , B max ]. Le champ moyen auquel est associé l’amplitude de la transformée de2Fourier estB moy= 1B max+ 1B min.1.4.3.1 Extraction de la masse effective :Dans l’équation 1.18, seul le facteur de réduction thermique depend de la température.α T m ∗R T =B sinh ( ) (1.27)α T m ∗BSoit A l’amplitude <strong>des</strong> oscillations, l’équation 1.18 peut s’écrire sous la forme :( ) Aln = ln(A 0 B 1 α m ∗ ) ( ( )) αT m∗2 RT −ln sinhT BB moy} {{ }constante(1.28)En mesurant la variation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations en fonction de la température, onpeut en déduire la masse effective d’après (eq. 1.28).1.4.3.2 Extraction de la température de Dingle :Une fois la masse effective déduite, on peut extraire la température de Dingle. Dans lecas bidimensionnel,ln( A R T) = ln(A 0 ) − α m∗ T DB moy(1.29)On effectue <strong>des</strong> transformées de Fourier de la partie oscillatoire dans différentes fenêtresde champ. Connaissant la masse effective, l’évolution de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations enfonction du champ permet d’extraire la température de Dingle. La durée de vie <strong>des</strong> quasiparticulesest reliée à la température de Dingle par l’équation 1.20. La renormalisation del’amplitude <strong>des</strong> oscillations par le facteur de réduction thermique permet de superposer lesdifférentes températures sur la même courbe.12


Chapitre 2Introduction aux supraconducteurs à hautetempérature critique :2.1 Historique :Le premier supraconducteur à haute température critique, La 2−x Ba x CuO 4−x , fut découvertpar Bednorz et Müller en 1986 [18]. Ce composé présente <strong>des</strong> plans d’oxyde de cuivre etdevient supraconducteur à T c = 30 K. De nombreux scientifiques se lancèrent alors dansla recherche de nouveaux composés dont le but ultime serait un matériau supraconducteurà température ambiante. Le record, de 194 K, est atteint en 1993 dans HgBa 2 Ca 2 Cu 2 O 8sous pression [19]. Depuis vingt deux ans, <strong>des</strong> milliers d’articles ont été publiés pour tenterde comprendre ces supraconducteurs à haute température critique ou cuprates. Il n’ya, à l’heure actuelle, aucun consensus entre les différents modèles théoriques et certainesexperiences semblent être en contradiction. Deux gran<strong>des</strong> questions subsistent : quel est lemécanisme d’appariement <strong>des</strong> paires d’électrons conduisant à <strong>des</strong> températures critiques siélevées et quelle est la nature de l’état normal ?Dans la suite de ce chapitre, la structure de ces composés et leur diagramme de phasesseront présentés. Enfin, différents scénarios susceptibles d’expliquer la physique de ces composésseront discutés.13


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :2.2 Structure :Figure 2.1 – Structure simplifiée <strong>des</strong> supraconducteurs à haute température critique [27].Les supraconducteurs à haute température critique appartiennent à la famille <strong>des</strong> pérovskites.Ils sont composés de plans conducteurs constitués d’atomes de cuivre et d’oxygène en alternancesoit avec <strong>des</strong> plans isolants, soit avec <strong>des</strong> plans constitués de chaînes CuO dans lecas d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ (fig. 2.1). Les porteurs de charge vont se propager à deux dimensionsle long <strong>des</strong> orbitales de cuivre et d’oxygène. Les plans CuO 2 correspondent aux directionscristallographiques (a, b). L’axe c représente la direction perpendiculaire au plan CuO 2 . Lescuprates peuvent avoir 1, 2 ou 3 plans CuO 2 par maille élémentaire. YBa 2 Cu 3 O 6+δ , parexemple, possède deux plans CuO 2 par maille élémentaire. Différentes métho<strong>des</strong> permettentde doper en trous les plans conducteurs de ces composés :– par substitution, comme c’est le cas de La 2−x Sr x CuO 4 , qui est dopé en substituantun atome trivalent La 3+ par un atome divalent Sr 2+ ce qui a pour effet d’arracher unélectron <strong>des</strong> plan CuO 2 .– par oxygénation <strong>des</strong> plans isolants, comme pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ où l’on peut rajouter<strong>des</strong> atomes d’oxygène dans <strong>des</strong> chaînes de cuivre (cf 5.2).Ils existent aussi <strong>des</strong> composés dopés aux électrons tel que Pr 2−x Ce x CuO 4−δ et Nd 2−x Ce x CuO 4[28].14


Structure :Au cours de cette thèse, les mesures ont été effectuées dans <strong>des</strong> échantillons d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ etde Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ (un monoplan). Ces deux composés se dopent par oxygénation <strong>des</strong> plansisolants et permettent d’explorer différentes gammes de dopage (fig. 2.2).Figure 2.2 – Structure cristalline <strong>des</strong> échantillons mesurés pour différents dopages. preprésente le nombre de porteurs ajoutés par atome de cuivre.15


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :2.3 Diagramme de phases :Une <strong>des</strong> approches possibles pour comprendre le mécanisme à l’origine de la supraconductivitédans les cuprates est d’étudier le diagramme de phases en fonction du dopageprésenté sur la figure 2.3.250Sous dopéT NDopage optimalT*Surdopé200Température (K)15010050AFPseudogapT C« Métal étrange »LiquidedeFermiSupraconductivité00.0 0.1 0.2 0.3Dopage, pFigure 2.3 – Diagramme de phases générique <strong>des</strong> supraconducteurs à haute températurecritique.A dopage nul, le composé est un isolant de Mott avec un ordre antiferromagnétiqueà longue distance (T N ∼ 410 K pour YBa 2 Cu 3 O 6 ). Cette phase isolante perdure jusqu’àun dopage de p ≈ 0.03 trou par atome de cuivre. Le dôme supraconducteur s’étend dep ≈ 0.05 (YBa 2 Cu 3 O 6+δ ) à p ≈ 0.3 (Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ ). Le dopage p ≈ 0.16 correspondant àla température critique (T c ) la plus élevée est appelé dopage optimal. Les dopages inférieurs(supérieurs) sont appelés sous-dopés (sur-dopés). La phase sous-dopée est caractérisée parune phase étrange aux propriétés électroniques très anisotropes. Cette phase apparaît quandon franchit la température de pseudogap (T ∗ ). Cette phase reste encore mal comprise. Prochedu dopage optimal le matériau se comporte comme un métal étrange caractérisé par unedépendance linéaire de la résisitivité en fonction de la température. Du côté sur-dopé, onretrouve un comportement de type liquide de Fermi. Cependant il faut atteindre un très fortdopage pour que le composé présente une résistivité purement quadratique en fonction dela température. Les différentes phases du diagramme de phases sont décrites dans la suitedu paragraphe.16


Diagramme de phases :2.3.1 Isolant de Mott :Certains matériaux présentent un caractère isolant dû à une forte interaction électronique.C’est, par exemple, le cas de NiO qui présente une structure électronique 3d 9 avec unélectron libre sur les sites de Ni + . La dernière orbitale occupée est à demi remplie, lescalculs de structure de bande prédisent alors un comportement métallique. Cependant, lecomposé se comporte comme un isolant. N. F. Mott proposa en 1949 [29] un modèle susceptibled’expliquer l’origine de ce comportement isolant. Les électrons sont localisés sur lessites de nickel à cause de la répulsion coulombienne. C’est ce qu’on appelle un isolant deMott. Ce système est décrit par l’Hamiltonien de Hubbard [30] :H =∑,σt (c † j,σ c i,σ + hc) + U ∑ in i,↑ n i,↓ (2.1)t représente le terme de saut premier voisin d’un site i vers un site j et U l’énergie quecoûte un site doublement occupé. On peut assimiler t à l’énergie cinétique et U à la répulsioncoulombienne. Dans le cas du demi-remplissage et lorsque le rapport U/t augmente, un gaps’ouvre progressivement au niveau de fermi.Si U >> t, un site doublement occupé coûte une grande énergie au système. Le système secomporte alors comme un isolant car le saut d’un site à l’autre coûte une grande énergie.Les électrons se localisent. La théorie de champ moyen dynamique (DMFT) permet demieux comprendre la transition de Mott. C’est une approche non perturbative qui permet,en principe, de décrire à la fois la limite localisée et itinérante d’un système [31]. Cetteapproche est basée sur les interactions d’un site unique avec un champ effectif (bain). Lescorrélations locales entre le site et le bain sont traitées de manière exacte. On calcule ensuitede façon auto-cohérente l’interaction entre cet atome unique et le bain.Figure 2.4 – Spectre de la densité locale pour plusieurs valeurs de U.17


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :La figure 2.4 représente le spectre attendu pour un hamiltonien de Hubbard au demiremplissage.Les corrélations électroniques augmentent du haut vers le bas. En haut, lesystème se comporte comme un métal alors qu’en bas le système est un isolant. On peutchanger le rapport U/t en dopant le système ou, par exemple, en changeant la distanceinter-site avec de la pression.Dans les supraconducteurs à haute température critique à dopage nul, la configurationélectronique <strong>des</strong> atomes de cuivre est Cu 2+ (3d 9 ) et celle de l’oxygène, O 2− (2s 2 2p 6 ). Il y aune levée de dégénérescence <strong>des</strong> niveaux d’énergie due au champ cristallin et seule l’orbitaled x 2 −y2 <strong>des</strong> sites de cuivre est à demi-occupée (fig. 2.5).Figure 2.5 – Levée de dégénérescence <strong>des</strong> niveaux d’énergies orbitaux due au champ cristallinsur les atomes de cuivres.Dans les cuprates à dopage nul, on est bien au demi-remplissage avec un seul trou paratome de cuivre. Leur structure électronique basse énergie peut, à priori, être ramenée à unsystème à une bande [32].EEbande de HubbardsupérieureE Fε dε pU∆a) b)bande de HubbardinférieureFigure 2.6 – Ouverture du gap de Mott en fonction du rapport U/t.18


Diagramme de phases :La figure 2.6 a) représente la structure de bande schématique attendue dans le cas d’uncuprate à dopage nul et avec <strong>des</strong> corrélations électroniques faibles. Dans le cas de la figure2.6 b), les corrélations électroniques sont très importantes (U >> t) et la bande provenantde l’orbitale d du cuivre s’ouvre alors en une bande inférieure sous le niveau de Fermi etune bande supérieure au <strong>des</strong>sus. Un gap ∆ de l’ordre de 2 eV s’ouvre alors au niveau deFermi. Ces composés sont <strong>des</strong> isolants de Mott.Des mesures de diffraction de neutrons [33, 34], de susceptibilité magnétique [35] et deµSr [36] indiquent la présence d’un ordre antiferromagnétique dans ces composés. Cet ordresubsiste jusqu’à un dopage de p = 0.03 trou par atome de cuivre pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ .La température de Néel est de T N = 325 K dans La 2 Cu O 4 et de T N = 410 K dansYBa 2 Cu 3 O 6 . Les mesures de neutrons [37] ont montré que les moments magnétiques dansY Ba 2 Cu 3 O 6.05 s’ordonnent le long de l’axe [100] ou [010] sans champ et le long de l’axe [110]si on le soumet à un champ magnétique le long de l’axe [001]. A dopage nul, la direction <strong>des</strong>moments magnétiques dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ est sensible au champ.19


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :2.3.2 La phase pseudogap :Des mesures de résonance magnétique nucléaire (RMN) en 1989 [38, 39] ont mis enévidence une anomalie quand on croise T ∗ du côté sous dopé du diagramme de phases. Latechnique de RMN permet de sonder les excitations de spin. Dans un métal, les mesuresdu temps de relaxation (T 1 T ) (proportionnel à la susceptibilité) sont indépendantes de latempérature. En effet dans un métal, la susceptibilité magnétique peut être décrite par lasusceptibilité de Pauli (eq. 1.7). La susceptibilité magnétique est alors directement reliée à ladensité d’état électronique qui ne varie pas dans un métal, dans la gamme de température oùl’on travaille (E F ∼ 12000 K). Ce comportement est appelé comportement de Korringa. Legraphique montre les mesures de ((T 1 T ) −1 ) dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ sous-dopé et dopé optimum.Figure 2.7 – Mesures de (T 1 T ) −1 <strong>des</strong> atomes de cuivre en fonction de la température dansYBa 2 Cu 3 O 6.95 (carrés) et YBa 2 Cu 3 O 6.64 (cercles) d’après [39].Dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ sous-dopé (fig. 2.7), la mesure de (T 1 T ) −1 passe par un maximumà T ∗ et diminue ensuite avec la température. L’amplitude de (T 1 T ) −1 diminue de prés de80% entre T ∗ et T c du côté sous-dopé. L’apparition du pseudogap est aussi marquée dansles mesures de Knight-Shift [38]. Cette perte de signal suggère, dans un cas simple, unediminution de la densité de porteurs qui peut être attribuée à l’ouverture d’un gap dans lesexcitations de spin. La température associée à l’ouverture du pseudogap diminue quand onaugmente le dopage et rejoint le dôme supraconducteur vers le dopage optimum.20


Diagramme de phases :Figure 2.8 – Résistivité en fonction de la température dans YBa 2 Cu 4 O 8 d’après [40].La résistivité électrique à haute température du côté sous-dopé est dominée par un tauxde diffusion qui varie linéairement avec la température. Quand on croise T ∗ , une légèredéviation à la linéarité apparaît (fig. 2.8) lorsque le courant est injecté dans le plan. Ladiminution de la résistivité est directement reliée à la diminution du taux de diffusion <strong>des</strong>quasiparticules. Cette anomalie peut être associée à une perte de densité d’états partiellementcompensée par une diminution du taux de diffusion <strong>des</strong> quasiparticules. L’apparitiondu pseudogap est aussi visible dans les mesures de conductivité transverse (ρ c ) [40]. Lesvaleurs de T ∗ déterminées en transport diminuent avec le dopage et rejoignent le dômesupraconducteur proche du dopage optimum en accord avec les mesures de RMN.Figure 2.9 – Conductivité optique électronique de YBa 2 Cu 3 O 6.7 (T c = 63 K) le long del’axe c en fonction de la fréquence pour différentes températures [41].Les mesures de conductivité optique infrarouge d’un composé permettent de déduirele taux de diffusion <strong>des</strong> quasiparticules en fonction de la fréquence. Dans le plan (a,b) laconductivité optique à basse fréquence chute quand on croise T ∗ [42]. Cette chute suggèrel’ouverture d’un gap dans les excitations basses énergies.21


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :Des mesures de conductivité optique le long de l’axe c montrent <strong>des</strong> anomalies similaires(figure 2.9) [41]. La température associée à la diminution de la conductivité est similaireà celle détectée en RMN. L’apparition du pseudogap est donc marquée par une perte deconductivité à basse fréquence. L’évolution de la température de cette anomalie avec ledopage est en accord avec les mesures de RMN et de résistivité électrique.Figure 2.10 – Chaleur spécifique électronique en fonction de la température pour différentsdopages dans Y 0.8 Ca 0.2 Ba 2 Cu 3 O 7−δ [43]. (a) côté sur-dopé (b) côté sous-dopé. L’encartmontre la relation entre le dopage et la température critique.Une étude de la chaleur spécifique électronique (γ) pour différents dopages a été effectuéepar Loram et al. [43, 44] dans Y 0.8 Ca 0.2 Ba 2 Cu 3 O 7−δ . La chaleur spécifique électronique estdirectement reliée à la masse effective (m ∗ ) et au rayon de la surface de Fermi dans l’espaceréciproque (k F ) (eq. 1.3). Du côté sur-dopé et au <strong>des</strong>sus de T c , la chaleur spécifique estconstante en fonction de la température (fig. a) 2.10). La chaleur spécifique électronique ducoté sur-dopé se comporte donc comme dans le cas d’un métal standard. Du côté sous-dopé(fig. b) 2.10), γ présente une légère déviation à la linéarité au <strong>des</strong>sus de T c . Loram et al. ontsuggéré que la température à laquelle la déviation à la linéarité survient marque l’apparitiondu pseudogap. L’apparition d’un ordre antiferromagnétique serait marquée par un saut dechaleur spécifique. L’apparition du pseudogap n’entraîne rien d’aussi radical. Les auteursont donc suggéré que le pseudogap marquerait l’apparition d’une phase caractérisée par unordre à courte portée. Ces mesures sont rendues très difficiles par la gamme de températureconcernée, les phonons représentant près de 98% du signal. La valeur de T ∗ diminue quandon augmente le dopage.22


Diagramme de phases :La diffusion élastique (inélastique) de neutrons est une technique de choix pour sonderles ordres (excitations) magnétiques présents dans un composé. C’est une sonde résolue enq qui permet d’extraire indirectement la susceptibilité magnétique locale. Cette quantitépeut être considérée comme une mesure de la densité d’état <strong>des</strong> excitations magnétiques.Les cuprates présentent certaines caractéristiques qui rendent ce type de mesures délicates.En effet, les moments magnétiques associés sont faibles et la largeur caractéristique de labande d’excitation magnétique est grande (plusieurs centaines de meV).La nature de la phase de pseudogap pourrait être associée à la présence d’un ordre encompétition ou coexistant avec la supraconductivité. Les mesures de diffusion élastique deneutron paraissent être une <strong>des</strong> son<strong>des</strong> les mieux adaptées pour révéler la présence d’unordre magnétique. Les composés supraconducteurs étant obtenus en dopant un isolant antiferromagnétiquede Mott, il paraît probable que le magnétisme joue un rôle important dansla physique de ces systèmes.Ce n’est que très récemment, suite à un long travail de développement expérimentald’un spectromètre triple axe permettant <strong>des</strong> mesures de neutron polarisé, que la présenced’un ordre associé au pseudogap a pu être révélée. Le signal magnétique associé à cet ordrese superpose au pic de Bragg, celui-ci ayant une intensité bien supérieure. Il convient doncd’effectuer <strong>des</strong> mesures de diffusion de neutrons polarisés afin d’extraire la contribution dusignal magnétique. Ces mesures sont rendues difficiles par de nombreux obstacles techniques.C’est donc grâce à un tour de force expérimental que Fauqué et al. ont réussi à mesurer,pour la première fois, un ordre magnétique associé au pseudogap (voir fig. 2.11) [45]. Cesmesures, tout d’abord effectuées dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ pour <strong>des</strong> dopages allant de 6.5 à 6.85par l’équipe de P. Bourges, ont été confirmées par d’autres mesures dans Hg1201 en collaborationavec l’équipe de M. Greven [46]. La température d’apparition de cet ordre est enaccord avec les autres son<strong>des</strong>. Cet ordre magnétique est associé à un vecteur d’onde dans lesplans Q 2D = (0, 0) et présente une amplitude de l’ordre de 0.1µB. Les auteurs ont suggéréque cet ordre pourrait être associé par exemple aux courants circulaires proposés par Varma[47]. L’ordre magnétique découvert ne brise pas la symétrie de translation, mais brise cellede rotation et de renversement du temps.Figure 2.11 – Représentation schématique d’ordre qui brise la symétrie par renversement dutemps mais pas la symétrie par translation a) [45] et b) [46].23


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :Il est intéressant de mettre en parallèle ces travaux avec les mesures d’effet Kerr effectuéespar Xia et al. [48]. Ces dernières ont identifié l’apparition d’un ordre brisant lasymétrie par renversement du temps en <strong>des</strong>sous de la température de pseudogap T ∗ . Alorsque les mesures de neutrons mesurent l’amplitude du moment magnétique, l’effet Kerr estsensible à l’aimantation moyenne par maille, ce qui pourrait expliquer que ces dernières ontrévélé un signal 1000 fois plus faible que celui mesuré en neutron polarisé. Il est probableque ces deux mesures (effet Kerr et diffusion de neutrons polarisés) aient identifié le mêmeordre magnétique.Les mesures de spectroscopie par photoémission résolue en angle (ARPES) sont <strong>des</strong>mesures qui permettent d’avoir directement accès à la structure électronique d’un composé.Elles consistent à envoyer <strong>des</strong> photons de haute énergie sur le composé afin d’arracher <strong>des</strong>électrons. Les lois de conservation de l’énergie et de l’impulsion permettent de remonter àl’énergie et au vecteur d’onde <strong>des</strong> états électroniques occupés. En première approximation,l’intensité du signal est directement proportionnelle à la distribution de Fermi et à la fonctionspectrale à une quasiparticule [49]. L’ARPES est une mesure de surface qui sonde les étatsélectroniques de surface représentatif <strong>des</strong> états de volume.Dans les cuprates sous-dopés à haute température (T > T ∗ ), la surface de Fermi déduite <strong>des</strong>mesures d’ARPES consiste en un large cylindre. Quand on croise T ∗ , ces mesures révèlentune apparente <strong>des</strong>truction de la surface de Fermi en arcs déconnectés (fig. 2.12).Figure 2.12 – Fig. haut gauche : Points de la zone de Brillouin où les mesures d’ARPESont été effectuées. Fig. bas gauche : Spectre d’ARPES en fonction de la température (lignenoire). Fig. droite : Représentation schématique de l’évolution de la surface de Fermi enfonction de la température. Mesures effectuées dans Bi 2 Sr 2 CaCu 2 O 8+δ [50].24


Diagramme de phases :La figure 2.12 (gauche) représente le spectre d’ARPES en fonction de la températureen trois différents points de la zone de Brillouin dans Bi 2 Sr 2 CaCu 2 O 8+δ . Cette figure montrel’ouverture progressive d’un gap en <strong>des</strong>sous de T ∗ . La figure 2.12 (droite) est une représentationschématique de la surface de Fermi en fonction de la température. Un gap s’ouvre progressivementdans les régions antinodales ((±π, 0),(0, ±π)) en <strong>des</strong>sous de T ∗ . La surface de Fermiest alors constituée de quatre arcs dans les régions nodales (±π, ±π). Une surface de Fermisimilaire a été déduite <strong>des</strong> mesures d’ARPES dans NaCCOC [51], Bi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ [52]et La 2−x Sr x CuO 4 [53]. La longueur de ces arcs diminue à la fois avec la température et ledopage.Il n’y a pas encore de consensus sur l’existence et l’origine de ces arcs. Les différentsscénarios susceptibles d’interpreter ces mesures sont développés dans le chapitre (6.5.1).Une façon d’interpréter ces résultats comme le suggèrent <strong>des</strong> calculs CDMFT [54] et derécentes mesures d’ARPES [55] est que seul un côté <strong>des</strong> poches situées aux noeuds estrévélée par les mesures d’ARPES [56]. La surface de Fermi serait alors constituée de quatrepetites poches situé aux noeuds de la surface de Fermi dans la phase pseudogap.2.3.3 La phase supraconductrice :Figure 2.13 – Les points et la ligne correspondent respectivement aux valeurs expérimentalesmesurées pour différents composés et à la relation de Tallon [57].Le dôme supraconducteur apparaît à partir du dopage p = 0.05 et subsiste jusqu’àenviron p = 0.30 dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . Le dôme correspondant à YBa 2 Cu 3 O 6+δ présenteune Tcmax de 94 K pour un dopage de p = 0.16. Une relation empirique, appelée la relationde Tallon [57], relie le dopage et la T c <strong>des</strong> différents composés. Cette relation s’écrit :T cT c,max= 1 − 82.6(p − 0.16) 2 (2.2)25


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :Cette formule suit raisonnablement bien les variations de la température critique enfonction du dopage déterminée expérimentalement pour différents composés (fig. 2.13). Unedéplétion non prédite est observée autour de p = 1 8 . Cette baisse de T c pourrait être liée à laprésence d’une phase en compétition avec la supraconductivité autour de ce dopage comme,par exemple une phase de ”stripes” [58].Figure 2.14 – Gap en fonction de l’angle sur la surface de Fermi [59].La présence de paires de Cooper dans l’état supraconducteur fut confirmée dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ parGough [60]. Des mesures de la longueur de pénétration [36] et d’ARPES (fig. 2.14) [59] ontrévélé la présence de noeuds dans le gap supraconducteur.Figure 2.15 – Phase du gap supraconducteur déterminée expérimentalement.La symétrie d x 2 −y 2 du gap supraconducteur (fig. 2.15) fut révélée par <strong>des</strong> mesures deSQUID dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ [61] et confirmée par une expérience d’interférence à troiscristaux dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ [62]. La symétrie d du gap supraconducteur implique qu’àtempérature nulle, <strong>des</strong> quasiparticules sont présentes aux noeuds de la surface de Fermi etparticipent aux propriétés physiques.26


Diagramme de phases :A l’heure actuelle, il n’y a pas de consensus sur le mécanisme à l’origine de l’appariement<strong>des</strong> quasiparticules en paires de Cooper. Les deux types de mécanisme proposés sont baséssur <strong>des</strong> vibrations du réseau ou <strong>des</strong> fluctuations magnétiques.Un mécanisme de type phononique a été suggéré par <strong>des</strong> mesures de microscopie à effettunnel [63] et d’ARPES [64] qui révèlent la présence d’un changement abrupt de la dispersionen énergie (kink) à la direction nodale autour de 50 meV. Des mesures de l’effet isotopiqueont été éffectuées dans plusieurs familles de cuprates afin de vérifier cette hypothèse demécanisme.Figure 2.16 – Amplitude du changement de T C due à l’effet isotopique en fonction du dopage[65]. La zone grisée correspond à l’anomalie dans le dôme supraconducteur.L’amplitude de l’effet isotopique (∆T c ) diminue lorsque le dopage augmente et au dopageoptimum l’effet est devenu négligeable. Changer la taille et la masse <strong>des</strong> atomes d’oxygènesa donc un rôle sur la T c mais la température critique ne varie pas en √ 1Mcomme dans lecas <strong>des</strong> supraconducteurs conventionnels. C’est au dopage où l’état supraconducteur est leplus stable que l’effet isotopique est le plus faible. De plus, de récentes mesures de neutronsuggèrent que le kink observé par ARPES pourrait avoir pour origine <strong>des</strong> excitationsmagnétiques plutôt que <strong>des</strong> phonons [66]. Il paraît donc peu probable que les phonons soientresponsables de l’appariement <strong>des</strong> quasiparticules dans les cuprates.L’autre type de mécanisme suggéré par <strong>des</strong> mesures de neutrons [66] et de conductivitéoptique [67] est un appariement d’origine magnétique. Dès l’apparition de la supraconductivitéà haute température critique dans les cuprates, <strong>des</strong> mesures de diffusion inélastiquede neutrons ont été effectuées afin de caractériser le spectre de ces excitations. Ces travauxont été en partie motivés par la recherche d’énergies caractéristiques pouvant être liées àla supraconductivité. Les progrès réalisés aux cours de ces 20 dernières années, à la foisen terme de synthèse cristalline et de développement <strong>des</strong> spectromètres pour les mesuresde diffusion inélastique de neutrons ont permis une meilleure connaissance <strong>des</strong> excitationsmagnétiques.27


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :Figure 2.17 – Énergie renormalisé par l’énergie de superéchange en fonction du vecteurd’onde dans l’espace réciproque pour différents composés d’après [68].La figure 2.17 présente la dispersion <strong>des</strong> excitations magnétiques en fonction de l’énergieet de la direction k dans l’espace réciproque pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ et La 2−x Sr x CuO 4 . Cettedispersion en forme de sablier, selon Tranquada est générique, au moins pour les composésYBa 2 Cu 3 O 6+δ , La 2−x Sr x CuO 4 , La 2−x Ba x CuO 4 [65]. Cette dispersion se caractérise parune réponse incommensurée à basse énergie. L’incommensurabilité δ diminue à mesure quel’énergie augmente, jusqu’à devenir nulle (la réponse est commensurée) à E c . Pour de plushautes énergies, la réponse est de nouveau incommensurée, avec une dispersion linéaire relativementsimilaire à la dispersion du composé parent associée à une onde de spin [69].Cette ”universalité” a été mise à mal par de récentes mesures effectuée dans <strong>des</strong> mono cristauxde haute qualité (démaclés) de YBa 2 Cu 3 O 6.6 [70]. En effet, la dispersion <strong>des</strong> excitationsmagnétiques montre une anisotropie entre l’axe a et l’axe b.Figure 2.18 – Énergie de la résonance en fonction du dopage dans YBa 2Cu 3 O 6+δBi 2 Sr 2 CaCu 2 O 8+δ [71].et28


Diagramme de phases :A basse énergie, la dispersion qui se termine par une réponse commensurée, conduit à unerésonance en E c (forte augmentation de l’intensité du signal) lorsque l’on passe T c . Cetterésonance est observée dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ (0.5 ≤ δ ≤ 0.7), Bi 2 Sr 2 CaCu 2 O 8+δ [72, 71]et Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ [73], mais est absente (en E c ) dans La 2−x Sr x CuO 4 [74]. L’énergie caractéristiquede la résonance suit le dôme supraconducteur (E r ∼ 5.3k B T ) (voir fig. 2.18).Différents scénarios ont été proposés pour expliquer la dispersion à basse énergie : scénariosde type excitoniques (mode collectif avec S=1) [75], stripes [68], ou lié à la topologie de lasurface de Fermi [76].Figure 2.19 – Gap de spin en fonction de T c dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ [77].En <strong>des</strong>sous de Tc, certains composés présentent un gap de spin. Dans La 2−x Sr x CuO 4 cegap de spin est présent pour <strong>des</strong> compositions proches du dopage optimal dans La 2−x Sr x CuO 4(∆ S = 8 meV pour x = 0.16) et disparaît à un dopage de x = 0.14. Dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ , legap de spin s’étend sur une plus large gamme de dopage (voir fig. 2.19). Ce gap est maximalpour le composé à dopage optimal (∆ S = 33 meV pour δ = 7) et décroît linéairement avecT c pour atteindre quelques meV dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 . Pour <strong>des</strong> dopages inférieurs à δ = 6.5,la dynamique de spin change et les composés présentent une réponse quasi-élastique [78].Dans La 2−x Sr x CuO 4 à dopage optimal, deux échelles d’énergie caractéristiques dans la susceptibilitémagnétique ont récemment été découvertes [66]. La comparaison de ces mesuresavec le spectre bosonique extrait de mesure de conductivité optique [79] suggère un appariementd’origine magnétique.Malgrès de nombreux travaux, il apparaît difficile d’extraire une ou plusieurs énergiescaractéristiques et universelles à tous les cuprates dopés en trou (gap de spin, résonance ouautre) dans le spectre <strong>des</strong> excitations magnétiques qui serait pertinente pour la supraconductivité.Cependant le composé parent <strong>des</strong> supraconducteurs à haute température critiqueest un isolant antiferromagnétique de Mott dont la répulsion coulombienne est l’ordre de2 eV et le terme d’échange J de l’ordre de 0.12 eV. Il parait probable, vu l’amplitude de cesdeux termes, que le magnétisme joue un rôle prépondérant dans le mécanisme d’appariementde ces composés [15].29


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :2.3.4 Le coté sur-dopé : Un liquide de FermiFigure 2.20 – Spectre d’ARPES à T = 10 K dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ à p = 0.26 [80].Au delà du dopage optimal, la température critique diminue et tend vers zéro autour dep = 0.3 dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . La chaleur spécifique électronique est constante sur une largegamme de température dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopé [81] comme dans le cas d’un liquidede Fermi. Les quasiparticules de ce composé obéissent à la loi de Wiedmann-Franz [82], unesignature robuste d’un liquide de Fermi. Dans le cas très sur-dopé la résistivité intraplanaireρ (a,b) varie de manière quadratique en fonction de la température [83]. L’AMRO (AngularMagnetoResistance Oscillations) [84] et l’ARPES [80] ont révélé une surface de Fermiconstituée d’un large cylindre quasi-2D de trou dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ (fig. 2.20).Ces mesuressont en accords avec les calculs de structure de ban<strong>des</strong> [85, 86].Le transport le long de l’axe c suit également une loi en T 2 à fort dopage [87]. Desdéviations à cette loi apparaissent quand on diminue le dopage. Ces mesures indiquent quele transport est métallique le long de l’axe c du côté sur-dopé.Ces différentes mesures sont de forts indices d’un liquide de Fermi, cependant plus le dopagedu composé se rapproche de celui du dopé optimum, plus ρ (a,b) s’écarte de la dépendancequadratique en température (fig. 2.21). Une maniére de prendre en compte cette déviationest de rajouter une composante linéaire à la résistivité ρ (a,b) = ρ 0 + βT 2 + αT [82]. Dansce cas, le terme additionnel pourrait être assimilé à l’effet <strong>des</strong> fluctuations dû à la présenced’un point quantique critique caché par le dôme supraconducteur [88].30


Diagramme de phases :Figure 2.21 – Evolution de la résistivité en fonction de la température pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ etTl 2 Ba 2 CuO 6+δ [89].2.3.5 Diagramme de phases sous champ :Dans les plans CuO 2 d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ le rapport entre la longueur de pénétration (λ =0.8 µm) et la longueur de cohérence (ξ = 0.003 µm) est κ = 270. Les supraconducteurs àhaute température critique sont donc <strong>des</strong> supaconducteurs de type II extrême. Le champmagnétique va pénétrer sous forme de vortex dans ces échantillons.Figure 2.22 – Diagramme de phases champ magnétique température dans le cas (a) deBi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ et (b) de YBa 2 Cu 3 O 6+δ d’après [4].31


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :Un modèle développé par Fisher [4] permet de décrire les différentes phases que lescomposés présentent sous champ magnétique en accords avec les mesures [90, 91]. Ce modèleest basé sur une approche de type champ moyen de l’équation de Ginzburg Landau. Leparamètre principal est le rapport d’anisotropie de la longueur de cohérence dans le plan etperpendiculaire aux plans R = ξ abξ c. Le graphique 2.22 représente le diagramme de phasesprédit par le modèle dans le cas de Bi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ R ≃ 50 (a) et d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ R ≃5 (b). A champ nul, le composé présente une phase de type Meissner où le champ ne pénètrepas dans le composé. Si on augmente le champ magnétique, le composé transite vers unephase dite solide de vortex où le champ pénètre sous forme de quantum de flux. Ces vortexsont ancrés dans le composé et ne peuvent pas bouger. Si on augmente encore le champmagnétique les vortex vont se désancrer et le composé va transiter (B irr ) vers une phase diteliquide de vortex. La gamme de champ et de température sur laquelle le composé va présentercette phase liquide de vortex dépend du facteur R. Dans les supraconducteur de types IIconventionnels, la phase liquide de vortex est très proche de H c2 . Dans les hauts T c , à causede la forte anisotropie et de la faible longueur de cohérence, la phase liquide de vortex existesur une large gamme de champ et de température [92]. Le diagramme de phases sous champ(fig. 2.22) présente, dans le cas de Bi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ (a), une phase de vortex liqui<strong>des</strong>ur une très large gamme de champ et de température. Dans le cas d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ (b), lerapport d’anisotropie est dix fois moins fort et la gamme de champ sur laquelle la phase devortex liquide s’étend est plus restreinte. A très basse température, le champ critique B c2obtenue en champ moyen est plus proche du champ irréversible B irr dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ quedans Bi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ . Pour révéler l’état normal, il faut encore augmenter le champmagnétique. Cette transition entre l’état liquide de vortex et l’état normal (H c2 ) n’est pasune transition de phase thermodynamique à cause de la faible longueur de cohérence. Cettetransition est un crossover entre ces deux états [4].0.06Couple magnétique (a. u.)H irr0.040.020.00-0.02-R xy( )0 10 20 30 40 50 60B (T)Figure 2.23 – Couple magnétique et effet Hall en fonction du champ magnétique dansYBa 2 Cu 3 O 6.51 à T = 1.5K.32


Diagramme de phases :La figure 2.23 représente une mesure de couple magnétique et d’effet Hall dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 .A bas champ (B < 10 T), <strong>des</strong> anomalies apparaissent. Le mécanisme à l’origine de ces sautsde flux sera détaillé dans le chapitre 5. Pour B < B irr = 27 T, le composé présente unephase solide de vortex. Cette phase est caractérisée par une résistivité nulle en transportet une hystérésis de l’aimantation. Quand B >> B irr le composé entre dans une phase deliquide de vortex. Les mesures de transport révèlent alors un signal différent de zéro. Le faitque la résistance soit non nulle dans une phase dominée par les vortex entre B irr et B c2est due à un phénomène appelé flux-flow. Chaque vortex contient un quantum de flux (φ 0 ).Lorsque l’on soumet l’échantillon à un courant ⃗j, il en résulte une force de Lorentz :⃗F = ⃗j ∧ ⃗ φ 0 (2.3)Pour les mesures sous champ pulsé, il faut aussi prendre en compte le courant induitpar le dB/dt dans l’échantillon. Dans l’état liquide de vortex, les vortex sont désancréset vont bouger à cause de la force de Lorentz. Seule une force de viscosité va freiner leurmouvement. En faisant bouger les vortex, on crée de la dissipation d’où l’apparition d’unsignal résistif différent de zéro. Une bonne approximation pour la résistivité mesurée dansl’état de flux-flow est :ρ = ρ normal ∗ B B c2(2.4)A très fort champ, autour de 50 T, les mesures de transports changent de comportementet aucune anomalie du couple magnétique n’apparaît. Même si il subsiste <strong>des</strong> excitations detype vortex, on peut penser qu’à partir de ce champ, ce sont les quasiparticules de l’étatnormal qui dominent.A bas champ, B < B irr , la mesure de couple magnétique révèle une hystérésis de l’aimantation.L’origine du mécanisme est similaire à celui du flux flow et est due à la force de Lorentzentre le courant induit par le dB/dt et les vortex. Si les vortex sont ancrés, le composé vasubir une force dont la direction dépend du courant induit et donc du signe de dBdt . CommedB/dt change de signe durant le pulse, la force résultante sur l’échantillon va aussi changerde signe. Au <strong>des</strong>sus du champ irréversible les vortex sont libre de se déplacer et l’hystérésisdisparaît.33


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :2.4 Approches théoriques susceptibles de décrire le diagrammede phases :Deux classes de scénarii sont susceptibles de décrire l’évolution <strong>des</strong> propriétés physiques<strong>des</strong> supracondcuteurs à haute température critique en fonction du dopage : isolant de Mottdopé et ordre en compétition.Figure 2.24 – Diagramme de phases dans un scénario isolant de Mott : T ∗ marque l’apparitiond’une phase précurseur.Dans la classe isolant de Mott dopé (fig. 2.24), le pseudogap est un état précurseur dela supraconductivité et T ∗ se confond avec T c à partir du dopage maximal. Les mesuresd’ARPES montrent l’ouverture d’un gap de symétrie d aux antinoeuds de la surface deFermi quand on croise T ∗ . Ce gap évolue continûment avec la température et le passage àl’état supraconducteur à T c ne s’accompagne d’aucun changement important [50]. La densitésuperfluide est très faible par rapport à <strong>des</strong> supraconducteurs conventionnels et sembleêtre proportionnel à T c [93]. D’après Emery et Kivelson, la rigidité de la phase <strong>des</strong> pairesde Cooper est liée à la densité superfluide et la phase fluctue de façon importante. Ils ontdéveloppé un modèle phénoménologique où T ∗ marque l’apparition de paires de Coopersans cohérence de phase [94]. La longueur de cohérence <strong>des</strong> cuprates est bien plus courteque dans les supraconducteurs conventionnels. A T c , la cohérence de phase est restaurée et<strong>des</strong> supercourants peuvent alors circuler dans l’échantillon.Un autre modèle appartenant à une classe similaire a été imaginé par Anderson [95]. Le composéparent est un isolant de Mott où les électrons sont couplés antiferromagnétiquement.En rajoutant <strong>des</strong> trous dans le système, on détruit l’ordre antiferromagnétique et l’état fondamentaldu système est une superposition d’états singulets (et triplet suivant le dopage).Dans ce modèle, T ∗ marque l’apparition d’un gap de spin dû à l’appariement <strong>des</strong> électronsen singulet de spin. Cette état est appelé un liquide de spin. Dans cette phase pseudogap,il y a une séparation <strong>des</strong> degrés de liberté de spin et de charge et le système présente deuxtypes d’excitations :– Les spinons qui sont <strong>des</strong> excitations de type fermion sans charge et de spin 1 2 .– Les holons qui sont <strong>des</strong> excitations de types boson de charge e et sans spin.34


Approches théoriques susceptibles de décrire le diagramme de phases :A T c , les excitations de charge deviennent cohérentes et le composé devient supraconducteur.Les mesures de chaleur spécifique [43] et de susceptibilité [38] ne mettent pas enévidence de séparation spin charge dans les cuprates.Figure 2.25 – Diagramme de phases dans un scénario ordre en compétition : T ∗ marquel’apparition d’une phase en compétition avec la supraconductivité.La seconde classe de scénario stipule que la phase pseudogap est une phase ordonnée encompétition avec la supraconductivité dont le paramètre d’ordre reste encore à déterminer(fig. 2.25). En dopant l’isolant de Mott, l’ordre antiferromagnétique est détruit à faible dopage.A beaucoup plus fort dopage le composé se comporte comme un liquide de Fermi.Entre les deux, une phase caractérisée par une perte de densité de porteur apparait à T ∗ .La ligne marquant T ∗ se prolonge alors jusqu’à un point quantique critique qui marqueune transition entre une phase ordonnée (à gauche) et un liquide de Fermi. Le pseudogapmarquerait alors l’apparition d’une phase ordonnée et T ∗ un changement de phase thermodynamiqueavec une brisure de symétrie. Dans ce scénario, la phase supraconductrices’appuierait sur les fortes fluctuations quantiques autour de ce point quantique critique.Nous allons brièvement passer en revue les différents ordres proposés.T ∗ peut marquer l’apparition d’une onde de densité de symétrie d (d-DW)(fig. 2.26) commel’ont suggéré Laughlin et Chakravarty [96]. Cet ordre est induit par un courant de plaquette.Dans ce cas, le paramètre d’ordre brise les symétries de rotation et de translation et resteinvariant par combinaison <strong>des</strong> deux. La symétrie par renversement du temps n’est brisée quedans le cas où le moment magnétique est différent suivant les directions up et down. Cesdeux types d’ordre induisent une reconstruction de la surface de fermi au vecteur d’ondeQ = (π, π). Le vecteur d’onde caractérisant ces ordres peut être décalé de δ. Dans ce cas ontparle de vecteur d’onde incommensuré Q = (π + δ, π). Des mesures de neutrons ont mis enévidence un pic élastique d’excitation magnétique incommensuré dans YBa 2 Cu 3 O 6.45 [78]mais pas dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 [77] ni dans YBa 2 Cu 3 O 6.6 [97].Varma a proposé un modèle basé sur <strong>des</strong> courants orbitaux [47] entre les sites oxygènes etles cuivres (fig. 2.26). Chaque cellule unité est alors divisée en quatres plaquettes où circule<strong>des</strong> courants orbitaux dans <strong>des</strong> directions alternativements opposées. Ce type d’ordre brisela symétrie par renversement du temps et par rotation mais pas celle par translation. Des35


2. Introduction aux supraconducteurs à haute température critique :mesures de neutrons [45] et d’effet Kerr [48] dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ ont été interprétées commel’apparition d’un tel ordre à champ nul. Cependant, ce type d’ordre n’entraîne pas de reconstructionde la surface de Fermi et ne peut donc pas expliquer les mesures d’oscillationsquantiques et d’effet Hall [98].Figure 2.26 – Représentation <strong>des</strong> moments induits dans les plans CuO 2 pour différentsordres.Il existe une classe de composés où un ordre appelé stripes a clairement été mis enévidence. Il s’agit de composés du type La 2−x Ba x CuO 4+δ et La 2−x Sr x CuO 4 dopé au Ndet à l’Eu. Des mesures de diffraction de neutrons ont mis en évidence une onde de densitéde spin 1D et de charge 1D incommensurables dans La 2−x Ba x CuO 4+δ [99, 100]. La superpositiond’une onde de densité de charge et de spin statique incommensurable a aussi étéobservée dans La 2−x Sr x CuO 4 dopé Nd et Eu pour x = 1/8 [58]. A basse température cettephase est caractérisée par l’apparition de rivières de charge séparées par <strong>des</strong> régions antiferromagnétiquesisolantes (fig. 2.27). Sur la figure 2.27, les stripes sont statiques mais ellespeuvent également être dynamique et seront alors plus dures à détecter [100]. Les excitationsmagnétiques mesurées par diffusion de neutrons [101] dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ à un dopage deδ = 6.6 et δ = 6.85 sont 2D ce qui exclue la présence de stripes statiques.Figure 2.27 – Modèle d’un ordre de stripes dans un plan CuO 2 à p = 1/8 [58].36


Chapitre 3Techniques de mesure3.1 Introduction :Ce chapitre présente l’environnement expérimental utilisé au cours de ma thèse. Lapremière partie est consacrée au générateur, bobine et cryostat qui ont permis d’atteindrede très fort champ magnétique à <strong>des</strong> températures de l’ordre de la centaine de millikelvin.La deuxième partie présente les mesures de couple magnétique en champ pulsé. Ledéveloppement et l’optimisation de cette technique de mesure en champ pulsé dans unréfrigérateur à dilution a représenté une partie importante de mon travail et sera abordédans la troisième partie. La quatrième partie présente les résultats <strong>des</strong> tests de validationde ce système réalisés dans un échantillon de Sr 2 RuO 4 .3.2 Dispositif expérimental :Il existe peu d’installations capables de fournir de très forts champs magnétiques dansle monde. Ces installations sont réparties en deux catégories. Celles permettant d’obtenirun champ magnétique continu comme le <strong>Laboratoire</strong> <strong>National</strong> <strong>des</strong> <strong>Champs</strong> MagnétiquesIntenses (LNCMI) à Grenoble, le High Magnetic Field Laboratory (HFML) au Pays Bas,le <strong>National</strong> High Magnetic Field Laboratory (NHMFL) aux États Unis et le High MagneticField Laboratory (HMFL) au Japon. Ces installations permettent d’atteindre de trèsforts champs magnétiques statiques (le record est de 45 T pour le NHMFL). Cependant,ces installations demandent d’énormes ressources électriques et <strong>des</strong> systèmes de refroidissementde bobine très lourds. L’autre catégorie produit un champ magnétique pulsé qui aété inventé par Kapitza en 1924. Les principales installations capables de délivrer de fortschamps magnétiques pulsées sont le <strong>Laboratoire</strong> <strong>National</strong> <strong>des</strong> <strong>Champs</strong> Magnétiques Intenses(LNCMI) à Toulouse, le Hochfeld-Magnetlabor Dresden (HLD) en Allemagne , le <strong>National</strong>High Magnetic Field Laboratory (NHMFL) aux États Unis. Les temps caractéristiques sontbeaucoup plus courts (pulse de l’ordre de quelques millisecon<strong>des</strong> à la centaine de millisecon<strong>des</strong>)mais permettent de monter à de plus forts champs (le record est de 90 T auNHMFL). Ces installations nécessitent moins d’énergie et sont moins encombrantes. Cependant,la courte durée du pulse magnétique complique les mesures.37


3. Techniques de mesure3.2.1 Générateur :Le LNCMI à Toulouse utilise un générateur capable de délivrer une énergie de 14MJdurant un pulse de quelques centaines de millisecon<strong>des</strong> permettant d’atteindre un champ de60 T.Le générateur (fig. 3.1) est constitué de 10 cellules de 60 condensateurs que l’on chargejusqu’à 24 kV. On note la capacité électrique du banc de condensateurs C. Une fois lacharge atteinte, les thyristors optiques de puissance se ferment et les condensateurs sont alorsconnectés à la bobine d’inductance L et de résistance r. Le système se comporte alors commeun circuit LC, r étant négligeable, et le courant oscille à une fréquence propre de F = 1/ √ LC.Il atteindra sa valeur maximale à T = √ LC/4. La tension aux bornes de la bobine changealors de signe. La phase de la tension est décalée de π/2 par rapport à celle de courant. Lesdio<strong>des</strong> de puissance crowbar montées en parallèle deviennent alors conductrices et courtcircuitentla bobine. Le courant décroît exponentiellement avec un temps caractéristiqueτ = L/r T . A la fin du pulse, une impulsion optique déclenche l’ouverture <strong>des</strong> thyristorsoptiques de puissance. Cette méthode de décroissance est appelée méthode crowbar.Figure 3.1 – Schéma du générateur 14 MJ38


Dispositif expérimental :3.2.2 Bobine :Nous utilisons <strong>des</strong> bobines Cuivre Zylon à densité de renforts optimisés d’un diamètreintérieur de 28 mm. Le temps de montée est 50 ms et la durée totale du pulse est de 400 ms.Un champ de 55 T correspond à une énergie de 3.3 MJ.La figure 3.2 représente un profil de champ en fonction du temps. Nous utilisons généralementle signal lors de la <strong>des</strong>cente pour analyser les données. La bobine est plongée directementdans un bain d’azote liquide. La limite élastique du cuivre est alors multipliée par deux et sarésistance électrique diminue d’un facteur sept. Durant le pulse, la température de la bobineva passer de 77 K à une température proche de 300 K. Après un pulse, il faut attendreque la bobine refroidisse. Afin de diminuer le temps d’attente nécessaire entre deux tirs, onpeut pomper sur le bain d’azote. Un système développé au laboratoire permet égalementd’accélérer le refroidissement. Des fentes situées dans la bobine permettent à l’azote decirculer. Ces bobines sont dites à refroidissement rapide. Le temps d’attente entre deux tirspasse de 4 h à 1 h 15 si on utilise la combinaison de ces deux systèmes.Pour calculer le champ magnétique, on utilise la mesure de la tension induite aux bornesd’une bobine pickup située près de l’échantillon. La relation entre le champ et la tensioncréée aux bornes de la pickup est :e = dφdt = S dBdt + B dSdt(3.1)où e est la tension en volt et S est la section de la pickup en m 2 . La section de la pickupétant constante, cette équation se résume à :e = S dB(3.2)dtIl suffit alors de connaître la section de la bobine et de mesurer la tension aux bornes decelle-ci au cours du pulse pour remonter au champ magnétique par intégration (fig. 3.2) .3000602000dB/dt100030B(T)00-10000.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5t(s)Figure 3.2 – La ligne noire représente le signal aux bornes de la bobine pickup. La lignerouge représente le profil de champ magnétique.39


3. Techniques de mesure3.2.3 Cryogénie :L’effet que nous cherchons à mesurer nécessite l’utilisation de très basses températures.Nous avons utilisé deux systèmes différents : un cryostat 4 He et un réfrigérateur à dilution.La bobine est immergée dans un cryostat azote (fig. 3.3) qui est en acier inoxydablenon magnétique. L’acier inoxydable a comme avantage une bonne tenue mécanique et uneconductivité faible. Un vide secondaire est maintenu entre les deux parois. Des couches <strong>des</strong>uper isolant sont placées entre celles-ci afin de découpler le plus possible l’azote du milieuambiant. Un câble coaxial de puissance relie la bobine au générateur.Pour les mesures en 4 He, le cryostat helium (fig. 3.3) permet d’effectuer <strong>des</strong> mesuresjusqu’à une température de 1.5 K en pompant sur le bain d’hélium. Il est construit en acierinoxydable. Le cryostat est constitué de deux bains reliés entre eux par un capillaire. Laqueue du cryostat est dans le prolongement du bain du bas. Elle est glissée au centre de labobine. L’échantillon est placé au centre de la bobine dans la queue du cryostat grâce à unecanne en fibre de verre. Le cryostat que nous avons utilisé possède un diamètre intérieurutile de 19 mm.Figure 3.3 – a) Schéma du cryostat azote dans lequel est fixée la bobine b) Schéma ducryostat héliumL’hélium liquide est transféré directement dans le bain du haut. Une vanne pointeaupermet de contrôler le débit du compartiment du haut vers celui du bas. Un chauffage réaliséà l’aide d’un fil de manganin situé dans le vide d’isolation permet de réguler la températureentre 1.5 K et 300 K. Les capteurs de température sont <strong>des</strong> résistances de type CERNOX.La température est mesurée et régulée avec un contrôleur de température LAKESHORE370.40


Dispositif expérimental :3.2.3.1 Réfrigérateur à dilution :Le principe du réfrigérateur à dilution a été énoncé pour la première fois en 1951 [102].Cette technique permet d’atteindre <strong>des</strong> températures de l’ordre du millikelvin. La gamme detempérature ainsi explorée est plus basse que celle atteinte par système à circulation d’ 3 He(T min ∼ 300 mK) ou d’ 4 He pompé (T min ∼ 1 K). Le principe de refroidissement est basésur une propriété particulière du mélange 3 He − 4 He. La figure 3.4 représente le diagrammede phases du mélange.Figure 3.4 – a) Diagramme de phases du mélange 3 He − 4 He [103]. b)Schéma d’un cryostatà dilution [104]. Point : phase diluée, croix phase concentrée.En <strong>des</strong>sous de T = 0.7 K et pour une certaine concentration d’ 3 He, le mélange sesépare en deux phases : une phase diluée (D) et une phase concentrée (C) en 3 He. A unetempérature inférieure à 100 mK, la phase diluée contient environ 7% d’ 3 He et la phaseconcentré 100%. A pression constante, l’enthalpie de ces atomes d’ 3 He est plus grande dansla phase diluée que dans la phase concentrée.3 H D − 3 H C = 82 T 2 J/mol (3.3)Le principe de la dilution est de faire circuler <strong>des</strong> atomes d’ 3 He de la phase riche versla phase diluée. A chaque fois qu’un atome traverse l’interface, il absorbe une partie de lachaleur de la phase diluée.La figure 3.4 représente le principe de circulation du réfrigérateur à dilution. Venant de lapompe, l’ 3 He gazeux se condense sur le pot maintenu à basse température en pompant surun bain d’ 4 He. Il se refroidit ensuite sur l’évaporateur (bouilleur) et passe par une séried’échangeurs thermiques et rentre dans la chambre de mélange où a lieu la dilution. Pardifférence de pression osmotique, l’ 3 He peut remonter jusqu’au bouilleur où il sera pompéavant d’être à nouveau réinjecté.41


3. Techniques de mesureFigure 3.5 – Schéma et photographie du réfrigérateur à dilution (d’après Marc Nardone).Le réfrigérateur que nous utilisons est unique (fig. 3.5). Il a été conçu et assemblé parMarc Nardone (LNCMI). Les contraintes liées au fonctionnement d’une dilution en champpulsé sont :– le peu de place au centre du champ. Le diamètre intérieur du cryostat hélium est del’ordre de 19 mm et il doit contenir la chambre de mélange 3 He et 4 He.– l’impossibilité d’utiliser du métal dans la zone proche du champ.900T (mK)60030000 30 60 90Puissance (µW)Figure 3.6 – Courbe de puissance frigorifique du réfrigérateur à dilution.La figure 3.6 représente la courbe puissance obtenue pour ce réfrigérateur à dilution enfonction de la température du bain. Lors de nos expériences, la puissance dissipée par lescantilevers est de l’ordre de la dizaine de microwatts. Cette puissance a donc un impact surla température limite de l’échantillon (voir 3.4).42


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :3.3 Mesure du couple magnétique avec un cantilever souschamp pulsé :3.3.1 Introduction :Le principe de mesure d’un couple mécanique ou électromagnétique avec une balance detorsion est connu depuis plus de deux siècles. Il a été inventé par John Mitchell. C’est cetype de système qui permit la première mesure de la constante de gravitation par HenryCavendish en 1798 et de la force entre deux charges par Charles Augustin de Coulomben 1784. Le système de mesure que nous utilisons est plus évolué mais le principe reste lemême. Les bases de la technique ont été posées par Brooks et al. 1986 [105] qui ont mesuréles oscillations de Haas-van Alphen dans un conducteur organique à l’aide d’un systèmecapacitif.3.3.2 Moment magnétique :Un composé présentant une aimantation ⃗ M anisotrope soumis à un champ magnétiqueexterne ⃗ B présente un couple magnétique et une force due aux gradients de champ. Lechamp magnétique est dans les cuprates très légèrement décalé par rapport à l’axe c.Figure 3.7 – Représentation schématique d’un couple magnétique.L’équation du couple magnétique est⃗τ = ⃗ M ∧ ⃗ B = MB sin θ ⃗e τ (3.4)θ est l’angle entre le champ magnétique et l’aimantation du composé. Si l’aimantationdu composé est parallèle au champ magnétique, le couple magnétique résultant est nul.La force due aux gradients de champ s’exprime :F =⃗ grad( ⃗ M. ⃗ B) (3.5)Le profil de champ (fig. 3.8) montre une inhomogénéité de champ inférieure à 0.2 %sur 5 mm autour du maximum. Le système de mesure étant placé au centre du champ, àplus ou moins 1 mm, la contribution de la composante force due au gradient de champ estnégligeable.43


3. Techniques de mesure1.000.95B/B max0.900.85-6 -4 -2 0 2 4 6h(cm)Figure 3.8 – Profil de champ dans la bobine en fonction de la distance par rapport au centre.3.3.3 Cantilever piezorésistif :Le couple magnétique d’un composé soumis à un champ magnétique ⃗ B va induire unedéflection du bras de levier du cantilever sur lequel l’échantillon est fixé. Cette déflectionpeut être mesurée de différentes manières.On peut mesurer la déflection du bras de levier par rapport à son point d’origine à l’aided’un système optique ou capacitif. Un système optique est très difficile à mettre en oeuvrepour <strong>des</strong> mesures en champ magnétique pulsé à cause du manque de place dans le cryostatet <strong>des</strong> vibrations durant le pulse. Un système capacitif permet une mesure très précise quiest tout à fait adaptée à une utilisation en champ statique. Dans le cas du champ pulsé,pour pouvoir découpler le cantilever <strong>des</strong> vibrations mécaniques dû au pulse, la fréquencede résonance du bras doit être la plus élevée possible. Ceci se traduit par une réduction detaille du cantilever et la faible surface du bras rend alors la mesure capacitive très difficile[106].Le développement de la microscopie tunnel (AFM) s’est accompagné de la miniaturisationet de l’amélioration de différents cantilevers dont les cantilevers piezorésistifs [107].La déformation du bras de levier due au couple magnétique va produire <strong>des</strong> contraintesmécaniques à la base <strong>des</strong> bras de leviers dont on peut mesurer l’amplitude avec un cristalpiezorésistif. Quand un matériau est soumis à <strong>des</strong> contraintes, sa résistance change d’une partà cause du changement de géométrie mais aussi, dans le cas de certains semi-conducteurs,à un changement de leur structure de ban<strong>des</strong> [108].L’utilisation de cantilevers commerciaux pour <strong>des</strong> mesures de moments magnétiquesfut introduit pour la première fois par Rossel et al. en 1996 en champ statique [109] (voirégalement D. Hall pour un article de revue sur le sujet [110]). Omichi et al. [111] ontété les premiers à utiliser un cantilever piezorésistif en champ pulsé. Ces cantilevers sont44


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :commercialisés par la firme Seiko sous la référence PRC120 (voir figure 3.9).Figure 3.9 – Photo d’un cantilever Seiko.Deux bras de levier d’épaisseur 5 µm de longueurs différentes (50 µm et 120 µm) partentd’une base en silicium (fig. 3.10). L’échantillon est collé sur le bras le plus long, l’autreservant de référence. Un capteur piezorésistif est implanté à la base <strong>des</strong> bras de levier pardopage au bore avec un faisceau d’ion. Des pistes en aluminium relient ces capteurs aux filsde mesures.Figure 3.10 – Photo <strong>des</strong> bras de levier d’un cantilever avec et sans échantillon.45


3. Techniques de mesure3.3.4 Préparation du cantilever et montage de l’échantillon :Ces deux étapes sont cruciales et le moindre choc sur l’un <strong>des</strong> deux bras de levier rendrale cantilever inutilisable.3.3.4.1 Séparation du cantilever de la plaquette :Les cantilevers commerciaux piezoresistifs sont livrés sur <strong>des</strong> plaquettes. Celles-ci sonttrop gran<strong>des</strong> pour être montées sur le porte échantillon. On décolle le cantilever de sonsupport en essayant de ne pas abîmer les fils d’or qui partent <strong>des</strong> pistes. Cette opérations’effectue en trois étapes :– Les fils d’or sont renforcés avec du vernis GE.– Les fils sont déconnectés du support– On décolle délicatement le cantilever de son support.3.3.4.2 Collage de l’échantillon :Au début de ma thèse, cette opération était effectuée manuellement. On déposait, toutd’abord, à l’aide d’un fil très fin (20 µm) de la colle (graisse à vide) à l’extrémité du bras.On positionnait ensuite de la même manière l’échantillon. Cette manipulation était trèsdélicate. Sur les conseils de A. Carrington, l’achat d’un micro-manipulateur et la mise enplace d’une nouvelle procédure a grandement simplifié et sécurisé le processus de collage.Celui-ci s’effectue en six étapes (fig. 3.11).– L’échantillon est découpé à l’aide d’une lame de rasoir. La taille typique est 100∗100∗10 µm 3 .– L’échantillon est posé au bord d’une lame de verre.– Le cantilever est fixé sur le bord du micro-manipulateur en face de la lame de verreavec une goutte de graisse à vide.– On dépose une goutte d’epoxy à prise rapide à coté de l’échantillon.– A l’aide du micro-manipulateur, on vient prendre une petite quantité de colle et ondéplace le bras au <strong>des</strong>sus de l’échantillon. On l’abaisse ensuite pour exercer une pression.– On laisse sécher puis on relève le cantilever.Figure 3.11 – Collage d’un échantillon d’après Bergemman [26].46


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :3.3.5 Calibration du cantilever :3.3.5.1 Variation de la résistance du piezo (∆R) en fonction de la déflectiondu bras :Lors d’une mesure de couple magnétique, le bras du cantilever va tourner par rapportà sa position initiale. Notons Θ l’angle entre le champ magnétique et l’aimantation del’échantillon. Pour quantifier la variation d’angle en fonction de la variation de résistance, lebras du cantilever a été déplacé à l’aide d’un micro-manipulateur et la variation de résistancecorrespondante enregistrée. Soit ∆Θ le changement d’angle dû au couple de force exercé surle bras de levier (fig. 3.12).Figure 3.12 – Changement de Θ dû à la deflection du bras de levier.On mesure ∆Θ en fonction de ∆R et on en déduit :∆Θ(˚) ∼ 57 ∆R(3.6)RUne déflection de 1˚ degré correspond donc à une variation relative de résistance de2 10 −2 .3.3.5.2 Calibration de la variation de résistance en fonction du coupleappliqué :On souhaite quantifier la correspondance entre un couple exercé sur le bras et un changementde résistance du cantilever.τ = κ ∆R(3.7)RPour estimer la valeur de κ, un échantillon de grande taille dont on connaît la masse estfixé sur le bras de levier.Un morceau de molybdène de volume V = 3.6 10 −12 m 3 et de densité ρ = 10.2 kg/dm 3est fixé au bras. Le cantilever est monté sur une canne de mesure tournante. On peut ainsimesurer le couple dû au poids du composé suivant différents angles.47


3. Techniques de mesureL’expression du couple est :τ g = V ρgl sin Θ (3.8)Avec g la constante de gravitation de la terre et l = 260 µm la longueur totale du bras.En changeant l’angle θ, la force exercée sur le bras de levier est modifiée. Le moment seramaximum pour θ = 90˚(C // ) et minimum pour θ = 0˚(C ⊥ ).0.30.2ExpérienceFit0.1R (ohm)0.0-0.1-0.2-0.3-100 -50 0 50 100angle (°)Figure 3.13 – Mesure de la variation de la résistance du piezo en fonction de l’angle àT = 4.2 K. La courbe en noir correspond à la mesure et celle en rouge est un ajustementd’après l’équation (3.8).∆R max ∼ 0.3 Ω correspond à ∆R maxRdu bras de levier est inférieure à 0.03˚.∼ 5.3 10 −4 . La variation d’angle due à la déflectionLa courbe est symétrique par rapport à zéro. La procédure permet d’extraire la variationde résistance correspondant à un θ de 90 ˚. Le couple exercé sur le bras de levier parl’échantillon de molybdène pour un angle de 90˚est :On en déduit la valeur de κ :τ g = 9.5 10 −11 N.m (3.9)κ = τ g∆RR∼ 180 ± 6 nN.m (3.10)Cette mesure est en bon accord avec celle effectuée par John Cooper à Bristol [112] surle même type de cantilever Seiko. La valeur limite pour le cantilever avant la rupture estde ∆RR∼ 0.2. Cela correspond à un angle de déflection maximum de 10 ˚ et un couple del’ordre de 30 nN.m (soit une force de 250 µN).48


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :L’angle entre le champ magnétique et la normale aux plans conducteurs doit être inférieurà quelques degrés pour éviter que le cantilever casse lors du tir à cause du très fort signaldû à la phase solide de vortex (voir chap. 2). Si par contre, cet angle est trop faible, lecouple magnétique lié aux oscillations quantiques est indétectable (voir eq. 1.25). La mesure<strong>des</strong> oscillations quantiques dans les cuprates avec un cantilever est donc une expérience trèsdélicate.3.3.5.3 Comportement du cristal piezorésistif en fonction de la température :220200nN m)1801600 50 100T (K)Figure 3.14 – Changement de κ en fonction de la température.Cette calibration a été réalisée pour différentes températures (fig. 3.14) et montre unchangement de sensibilité du piezo en fonction de la température. A basse température(T < 10 K) on peut considérer que la variation de κ est négligeable (∆κ < 1%).3.3.5.4 Magnétorésistance <strong>des</strong> cristaux piezorésistifs :0.12R/R0.080.040.000 10 20 30 40 50B (T)Figure 3.15 – Magnétorésistance <strong>des</strong> piezos à T = 1.5 K.49


3. Techniques de mesureLa figure 3.15 représente la magnétorésistance d’un cantilever à 1.5 K. La magnétorésistancerelative est de l’ordre de 13%. Cette variation est du même ordre de grandeur que celledue au couple magnétique lié à l’échantillon. Pour mesurer uniquement la contribution del’échantillon, il faut donc soustraire celle de la magnétorésisitance <strong>des</strong> piezos. Pour cela, onplace les deux piezos (celui de référence et celui du bras supportant l’échantillon) dans deuxbranches d’un pont de Wheatstone (voir 3.3.6).3.3.6 Mesure et optimisation du signal :3.3.6.1 Contraintes liées au champ pulsé :L’utilisation de champ magnétique pulsé contrairement au champ statique présente <strong>des</strong>avantages en terme de coût et permet d’atteindre <strong>des</strong> champs plus forts. Cependant, ladurée du pulse qui est de quelques centaines de millisecon<strong>des</strong> va entraîner de nombreusescontraintes de mesures :– D’après la loi de Faraday, tout changement de flux magnétique va entraîner <strong>des</strong> tensionsinduites. Ces induits vont perturber la mesure. Pour les diminuer au maximun,les fils de mesure sont torsadés par paires et sont collés le long de la canne pour réduirel’aire soumise au champ (eq. 3.1).– On ne peut pas utiliser de métal ce qui complique les couplages thermiques à très bassetempérature. Des calculs <strong>des</strong> couplages thermiques dans un réfrigérateur à dilutionseront présentés par la suite.– Toute la chaîne de mesure doit être extrêmement performante vu la durée <strong>des</strong> pulsesde champ. On va utiliser un système de détection synchrone numérique. L’acquisitiondu signal est effectuée par 4 cartes <strong>National</strong> Instrument P XI − 5922.– les vibrations de la bobine pendant le tir peuvent se révéler très gênantes. La meilleuresolution a consisté à solidariser la bobine, le cryostat hélium et la canne de mesure.3.3.6.2 Système de mesure :Au cours de ces trois dernières années, le dispositifs expérimental a beaucoup évolué. Jene présenterai que le système final qui a permis d’obtenir la meilleur résolution expérimentale.Figure 3.16 – Représentation schématique du système de mesureLa figure 3.16 présente un survol du système d’acquisition. Nous allons décortiquer cesblocs un par un. Un amplificateur à détection synchrone (Stanford Research SR830) est utilisécomme source de tension alternative. La fréquence du signal utilisé (f ref ) est de l’ordrede 60 kHz. Elle permet de s’affranchir <strong>des</strong> problèmes de tensions induites lors du pulse quiont un spectre en fréquence beaucoup plus faible.50


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :Figure 3.17 – Représentation schématique du pont de Wheatstone.Cette source alimente un pont de Wheatstone (fig. 3.17) qui permet d’éliminer le signaldû à la magnétoréristance <strong>des</strong> piezos. Le signal mesuré ∆V est centré en zéro et un calibreadapté à la mesure peut être utilisé. Le pont est constitué de 2 résistances de 3 kΩ (R),<strong>des</strong> deux piezos (R p1 , R p2 ) et d’une résistance variable (R var ). Cette résistance permetd’équilibrer le pont aux différentes températures de mesure. Les lois de l’électrocinétiquepermettent d’écrire l’équation du pont :∆Ve=R∆R(R + R p1 ) 2 11 − ∆R(R+R p1 )(3.11)où ∆R représente la variation de résistance du piezo du à l’échantillon. Pour ∆R


3. Techniques de mesureCe qui correspond à une sensibilité à 50 Tesla de :m min = 1.5 10 −13 A.m 2 = 1.5 10 −10 emu (3.14)Ce système est parfaitement adapté à la mesure <strong>des</strong> oscillations quantiques ou à ladétection de transitions de phase magnétique. Par contre, il ne permet pas de remonter demanière simple à l’aimantation absolue de l’échantillon.3.3.7 Courants induits :Dans cette section, nous avons calculé la puissance dissipée par les courants induits dansun échantillon.Les échantillons ont une épaisseur typique d’environ 10 µm et ce sont de mauvais métaux(libre parcours moyen de l’ordre de l = 300 Ȧ). Les effets d’épaisseur de peau sont négligeables(γ Y BCO ∼ 2 cm). Pour les calculs suivants, le champ magnétique est donc considéré commehomogène dans l’échantillon.On considère <strong>des</strong> échantillons de forme cylindrique de rayon a de hauteur l afin <strong>des</strong>implifier les calculs de courant induit. D’après les équations de Maxwell, la densité decourant induite dans le composé est :j φ (r, t) = − r dB⃗2ρ dt(3.15)La puissance instantanée dissipée par effet Joule due au courant induit dans le composéest :P (t) = lπ8ρ a4 ( δ ⃗ Bδt )2 (3.16)1.5x10 -91.0x10 -9P (W)5.0x10 -100.00.0 0.1 0.2 0.3t(s)Figure 3.18 – Puissance instantanée en fonction du temps dans un échantillon cylindriqued’ YBa 2 Cu 3 O 6+δ de rayon 56 µm et d’épaisseur 10 µm.52


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :Couple magnétique (A. U.)0.50.0-0.5H irr upH irr downT=1.5K0 20 40B (T)Figure 3.19 – Couple magnétique en fonction du champ.La puissance dissipée (de l’ordre du nW) est relativement faible comparativement à lapuissance frigorifique disponible (voir chap. 3.2.3) et n’entraîne pas de chauffage significatifde l’échantillon. Une autre source de chauffage provient <strong>des</strong> mouvements de vortex lorsde la montée du champ. Celle-ci est difficilement quantifiable. Il est donc important deregarder avec attention l’allure <strong>des</strong> courbes pour déterminer un éventuel chauffage au coursdu pulse. La figure 3.19 montre une <strong>des</strong> premières courbes obtenue où un effet de chauffageest clairement visible sur la différence <strong>des</strong> champs irréversibles (H irr ). Ce phénomène, lié àune mauvaise thermalisation de l’échantillon, a été résolue par l’utilisation du dispositif àcapsule décrit par la suite.53


3. Techniques de mesure3.3.8 Effet de Haas-van Alphen dans Sr 2 RuO 4 dans un cryostat 4 He :Sr 2 RuO 4 fait partie <strong>des</strong> ruthénates métalliques (pour une revue, voir [113]). Sa structurecristalline est proche de celle <strong>des</strong> cuprates et les plans RuO 2 présentent une conductivitéρ a,b ∼ 2 10 −6 Ω cm à T = 4.2 K. A basse température, le composé présente une surface deFermi quasi bidimensionnelle. Les mesures d’effet de Haas-van Alphen en champ statique[114] sont en bon accord avec les calculs de ban<strong>des</strong> [115].Figure 3.20 – Surface de Fermi déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques dansSr 2 RuO 4 [113].Nous avons utilisé ce composé pour mettre au point et tester le système de mesure. Descristaux d’excellentes qualités ont été synthétisés par A. Gibbs et A.P. Mackenzie de l’Universitéde St Andrews. Nous avons mesuré <strong>des</strong> oscillations quantiques dans Sr 2 RuO 4 jusqu’à1.5 K de deux manières différentes : l’une en plongeant directement le cantilever dans le baind’hélium et l’autre en l’enfermant dans une capsule préalablement remplie d’ 4 He gazeux àtempérature ambiante (fig. 3.24).partie oscillatoire (a.u.)10-11.5K2.65K3.52K26 28 30 32 34B (T)Figure 3.21 – Partie oscillatoire du couple magnétique dans un bain d’hélium pour différentestempératures.54


Mesure du couple magnétique avec un cantilever sous champ pulsé :La figure 3.21 montre <strong>des</strong> oscillations de Haas-van Alphen pour différentes températuresavec le cantilever dans le liquide. La fréquence principale est de F = 2950 T . Elle correspondà la poche α (fig. 3.20). Cette valeur est en bon accord avec les mesures de Yoshida et al. [116]et de Bergemann et al. [117] qui ont respectivement mesuré une fréquence de F = 2970 Tet F = 2930 T.Amplitude renomalisé14121086420m * =3.29m 0m * =2.9m 0LiquideCapsuleAjustement LK dans le liquideAjustement LK dans la capsule1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5T(K)Figure 3.22 – Amplitude renormalisée de la transformé de Fourier de la partie oscillatoirepour différentes températures.En traçant la variation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations en fonction de la température, onextrait la masse effective dans les deux cas (fig. 3.22). Dans la bibliographie [118, 116]la masse effective de l’orbite α est de 3.37 m 0 . Les mesures effectuées directement dans leliquide donne une masse de 2.9 m 0 , très inférieur à la masse attendue. Ce phénomène est trèsprobablement lié à la détérioration <strong>des</strong> propriétés mécaniques (diminution de la fréquencede résonance et du coefficient d’amortissement) du bras de levier dans le liquide [119]. Lesmesures effectuées dans le gaz d’échange conduisent à la bonne valeur de la masse effective.C’est donc ce système de capsule qui a été utilisé dans le réfrigérateur à dilution.55


3. Techniques de mesure3.4 Utilisation d’un cantilever dans un bain 3 He/ 4 He :Le dispositif conçu lors de cette thèse est le premier système de mesure de couplemagnétique sous champ magnétique pulsé dans un réfrigérateur à dilution. Le développementet la mise en place du système a occupé une bonne partie de cette thèse.3.4.1 Système de mesure :3.4.1.1 Canne de mesure :La canne de mesure (fig.3.23) est équipée de quatre paires de fils de cuivres de diamètre50 µm et de six paires de manganin 100 µm . Le manganin est plus résistif que le cuivre. Iltransmet donc moins de chaleur du haut vers le bas de la canne. Il est utilisé pour cablerles deux thermomètres, le chauffage et la pickup. Les fils de cuivre serviront pour les fils demesure.Deux thermomètres différents sont utilisés. Un Cernox pour les mesures au <strong>des</strong>sus de 1 Ket un oxyde de ruthenium pour les mesures à très basse température. Ces deux thermomètressont placés directement dans la chambre de mélange. L’oxyde de ruthenium est collé au vernisGE le plus près possible de l’échantillon (fig. 3.23). Une jauge de contrainte (R = 330 Ω)sert de chauffage.Figure 3.23 – Schéma de la canne de mesure3.4.1.2 Capsule :La capsule (fig. 3.24) dans laquelle est enfermé le cantilever est vissée au bout de la canne.Une autre canne a été construite pour <strong>des</strong> mesures en hélium 4. Elle permet de sélectionneret d’orienter l’échantillon avant de démarrer une expérience en dilution. La capsule doit êtreparfaitement étanche à l’hélium superfluide.56


Utilisation d’un cantilever dans un bain 3 He/ 4 He :Figure 3.24 – Photo de la capsule avant fermeture.3.4.2 Simulation de la température de l’échantillon à l’intérieur de la capsule :Cette section présente un modèle simple qui donne <strong>des</strong> indications sur le couplage thermiqueentre l’échantillon et le bain. Les formules utilisées sont issues du Pobell [120].Figure 3.25 – Schéma de la capsuleLe cantilever est enfermé dans une capsule en araldite sous une atmosphère d’hélium4 à température et pression ambiante. La figure 3.25 représente la capsule plongée dans lebain d’hélium du réfrigérateur à dilution. L’hélium contenu dans la capsule va se condenser,monter sur les bords et se coupler avec l’échantillon. Nous pouvons mesurer la températuredu bain d’helium (T 1 ) mais pas directement celle de l’échantillon. Nous allons néanmoinsessayer d’estimer la température de celui-ci par une série de calculs simples.57


3. Techniques de mesure3.4.2.1 Calcul de l’épaisseur du film d’hélium superfluide :On ferme la capsule dans une atmosphère d’hélium à température et pression ambiante.Soit V He le volume de la capsule : V He = 4, 6 10 −8 m 3 . Le nombre de molécules d’hélium enferméesdans la capsule est n = P VRT ∼ 1, 8 10−6 mol. Le volume molaire de l’ 4 He superfluideà T = 0 K est V m = 27, 58 cm 3 /mol. Si tout l’hélium se condense, le volume de superfluideest V superfluide = 5 10 −5 cm 3 . L’épaisseur de superfluide au fond de la boite (h 1 ) est alors :h 1 = V superfluideπ.r 2 = 2, 2 µm (3.17)L’épaisseur du film superfluide remontant le long de la boite est de h 2 = 330 nm.3.4.2.2 Calcul du gradient de température :Le système de mesure est un pont de Wheatstone alimenté par une tension e dontchacune <strong>des</strong> branches est constituée d’une résistance (3000 Ω) et d’un cristal piezo (500 Ω).Le courant qui y circule est égal à I =e3500A et donc la puissance dissipée par les deuxpiezos est :P piezo (µW ) = 80e 2 (3.18)On considère pour simplifier les calculs que la chaleur dissipée par les piezos est absorbéepar le bain d’hélium superfluide.On peut schématiser le système de la façon suivante :Figure 3.26 – Modèle simplifié <strong>des</strong> échanges thermiques dans la capsule.A très basse température, une résistance thermique apparaît à l’interface entre deuxmatériaux différents. Plus la température baisse et plus cette résistance est importante. Siun isolant non magnétique est en contact avec de l’hélium liquide le transfert d’énergie nepeut se faire qu’à travers les phonons. Le gradient de température à l’interface est due à lanon correspondance <strong>des</strong> spectres de phonon. On peut modéliser ce phénomène comme unerésistance à l’interface <strong>des</strong> deux matériaux. La formule générale de Kapitza est :P = ∆TR k(3.19)58


Utilisation d’un cantilever dans un bain 3 He/ 4 He :P étant la puissance du courant de chaleur. La résistance de Kapitza entre un mélanged’hélium et un solide est :0, 02R k (K/W ) =A .T −3 (3.20)Avec A la surface de contact entre le mélange et le solide.Ici pour le contact entre l’araldite et le mélange A ∼ 8, 6 10 −5 m 2 . D’ou R k1 = 233 T1 −3 . Onen déduit :T 2 − T 1 = 233 T −31 .P (3.21)La différence de température due à l’épaisseur d’araldite peut être modélisée par :P (W ) = A l∫ T2T 1k(T )dT (3.22)Avec l la longueur du matériau, A sa surface de contact et k sa conductivité thermique.Dans le cas de l’araldite k(T ) = 5 10 −2 T 2 W/m K [120], l = 1 10 −3 m et A = 8, 6 10 −5 m 2 .On en déduit :T 3 3 − T 3 2 = 698 P (3.23)Pour finir, la résistance de Kapitza entre l’araldite et l’ 4 He est :R k (K/W ) =0, 01A T −3 (3.24)La surface de contact entre l’araldite et le mélange est A = 5, 7 10 −5 m 2 d’ou R k3 =176 T −33 . On en déduitOn peut alors calculer la relation entre T 1 et T 4 .T 4 =T 4 − T 3 = 176 T −33 P (3.25)176 P−3[698 P + (233 T1 −3 + [698 P + (233 TP + T 1 ) 3 1 P + T 1 ) 3 ] 1 3 (3.26)]Le graphique (3.27) représente la température à l’intérieur de la capsule en fonctionde la température du bain pour différentes tensions d’alimentation <strong>des</strong> piezos. Ce modèlesimple montre que la température la plus basse pour l’échantillon n’est donc pas obtenuepour la température la plus basse du bain à cause <strong>des</strong> résistances de Kapitza du système.Le paramètre qui domine le gradient de température est R k1 . Si on veut diminuer l’écartde température, il faut diminuer R k1 ∝ 1/A 1 , donc augmenter la surface de contact entre lemélange et la boite.59


3. Techniques de mesure1,0T 4(K)0,90,80,70,60,50,40,30,20,1e=0.05Ve=0.1Ve=0.2Ve=0.4V0,00,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0T bain(K)Figure 3.27 – Calcul de la température à l’intérieur de la capsule en fonction de latempérature du bain externe et de la tension d’alimentation <strong>des</strong> piezos.3.5 Effet de Haas-van Alphen à très basse température dansSr 2 RuO 4 :4.0Sr 2RuO 4560 mKMoment magnétique (a. u.)0.0-4.00 20 40B(T)Figure 3.28 – Mesure du couple magnétique dans Sr 2 RuO 4Nous avons testé le système en mesurant le couple magnétique de Sr 2 RuO 4 dans leréfrigérateur à dilution (fig. 3.28). Ce composé est idéal pour valider le système. Il présente60


Effet de Haas-van Alphen à très basse température dans Sr 2 RuO 4 :<strong>des</strong> oscillations quantiques à différentes fréquences avec différentes masses effectives et cetteétude a permis de mesurer la température in-situ de l’échantillon. Des oscillations quantiquesapparaissent à partir de 10 T. Ce signal comporte plusieurs fréquences très proches.L’amplitude du signal ne varie pas comme une exponentielle en fonction du champ à cause<strong>des</strong> battements entre ces différentes fréquences.Amplitude (Arbit. Units)1010,1αF=3031T2αF=6106T3αF=9104T 4αF=12160TSr2RuO4 560mKβ1F=12560Tβ2F=12900TγF=18640T0 5000 10000 15000 20000F(T)Figure 3.29 – Transformée de Fourier de la partie oscillatoire du signal représenté sur lafigure (3.28).La figure 3.29 représente la transformée de Fourier de la partie oscillatoire du couplemagnétique. Le spectre de Fourier du signal révèle trois fréquences principales en accord avecla littérature [113]. Plusieurs fréquences proches ainsi que <strong>des</strong> combinaisons de fréquencessont révélées par la transformée de Fourier. Le bruit sur la mesure est négligeable par rapportà l’amplitude <strong>des</strong> pics de la transformée de Fourier. Les valeurs <strong>des</strong> fréquences mesurées sonten très bon accord avec celles de la littérature [116, 118].ln(A/T)-0.4-0.6-0.8-1.0-1.2-1.4-1.6-1.8-2.0expérienceTracé LK avec m*=3.3 mo0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1.0 1.1T(K)Figure 3.30 – Tracé de la masse effective correspondant à F α61


3. Techniques de mesureLa variation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiques en fonction de la température dépendde la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules. On va utiliser cette variation pour déduire latempérature de l’échantillon. Pour cela, on recale les différentes températures pour obtenirune masse de m ∗ = 3.3m 0 en partant d’un point de référence à T = 4.2 K. La figure 3.30présente l’amplitude de la transformé de Fourier en fonction de la température ajustée. Lamasse effective correspondante à la fréquence α est fixée.On va procéder de la même manière pour différentes tensions d’alimentation du pontde Wheatstone. Le graphique 3.31 représente la température de l’échantillon déduite de lavariation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiques en fonction de la température du bain pourdifférentes tensions d’alimentation.1.00.8T échantillon(K)0.60.40.2e=0.05Ve=0.1Ve=0.4V0.00.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0T bain(K)Figure 3.31 – Température de l’échantillon en fonction de la température du bain pourdifférentes tensions d’alimentation.La température de l’échantillon la plus basse est de l’ordre de 500 mK pour e = 0.05 V.Le rapport signal sur bruit est moins bon avec une tension d’alimentation aussi faible d’oùl’incertitude sur la température. En accord avec le modèle précédent, on constate que latempérature de l’échantillon la plus basse n’est pas celle obtenue pour une température debain la plus basse. Au <strong>des</strong>sus de 800 mK, la température de l’échantillon est la même quecelle du bain pour e = 0.4 V.62


Chapitre 4Oscillations quantiques dansTl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés4.1 Introduction :Différentes son<strong>des</strong> expérimentales témoignent d’un comportement de type liquide deFermi du côté sur-dopé du diagramme de phase <strong>des</strong> cuprates. Cependant, malgré de nombreusestentatives, les oscillations quantiques n’avaient pas pu être détectées dans ces composés.Nous avons mesuré pour la première fois <strong>des</strong> oscillations quantiques de l’aimantationdans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ , un cuprate sur-dopé. Des mesures d’oscillations quantiques dela magnétorésistance ont également été effectuées par le groupe de Toulouse en collaborationavec les groupes de N. Hussey et A. Carrington (Bristol). Ces mesures révèlent unegrande orbite couvrant les 2/3 de la première zone de Brillouin. L’observation d’oscillationsquantiques confirme la présence de quasiparticules cohérentes sur toute la surfacede Fermi et le comportement de type liquide de Fermi du côté sur-dopé du diagrammede phases <strong>des</strong> cuprates. Les facteurs déterminants qui ont permis cette mesure sont unchamp magnétique de 60 T, un excellent rapport signal sur bruit, <strong>des</strong> basses températures(∼ 600 mK) et <strong>des</strong> cristaux d’excellente qualité. La première partie de ce chapitre estconsacrée aux composés de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . La deuxième partie présente les mesures d’oscillationsquantiques de l’aimantation et de la magnétorésistance transverse. La dernièrepartie souligne la cohérence entre les grandeurs déduites <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiqueset d’autres son<strong>des</strong> expérimentales.63


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés4.2 Synthèse et structure <strong>des</strong> cristaux de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :Les échantillons étudiés ont été synthétisés par A. P. Mackenzie [121] il y a une quinzained’années. La méthode de croissance <strong>des</strong> cristaux est appelée méthode de ”self-flux”. Cetteméthode consiste à mélanger différentes poudres dans un creuset à haute température. Lescristaux sont ensuite recuits sous une atmosphère d’oxygène à une température compriseentre 540 K et 720 K pendant une semaine environ.Figure 4.1 – Cellule unité de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ [122].Le composé présente une structure tétragonale de type pérovskite (fig.4.1). La températurecritique optimale T c = 93 K est obtenue pour δ = 0 et décroît ensuite rapidement avec ledopage. Ce composé présente un avantage par rapport aux autres composés sur-dopés telque La 2−x Sr x CuO 4 . Dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ le dopage se fait par insertion d’oxygène entre lesdeux plans T lO (fig.4.1) [123]. Le désordre associé à un dopage par oxygène a moins d’impactsur la durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules <strong>des</strong> plans CuO 2 que celui associé à un dopagepar substitution. La principale source de désordre lors de la synthèse vient de la substitution<strong>des</strong> atomes de cuivre par du thallium.L’équipe de N. Hussey et A. Carrington a mesuré le rapport de résistivité résiduel (RRR)d’une vingtaine échantillons et a sélectionné les 4 meilleurs échantillons qui présentaient unRRR supérieur à 20 autour du dopage correspondant à une température critique de 10−20 Kenviron.64


Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :4.3 Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :Des mesures de la dépendance angulaire de la magnétorésistance (voir chap. 4.4.1)montrent une surface de Fermi constituée d’une large orbite [84] et le coefficient électroniquede la chaleur spécifique indique une forte masse effective [81]. L’amplitude <strong>des</strong> oscillationsquantiques est directement reliée à ces grandeurs par les facteurs de réduction de Dingle etthermique. Leur observation est donc rendue difficile par une forte masse effective et un largevecteur d’onde de Fermi. C’est en combinant un champ magnétique intense (59 T), de trèsbasse température (0.6 K), <strong>des</strong> échantillons de bonne qualité et une mesure haute résolutionque nous avons réussi à observer <strong>des</strong> oscillations quantiques. Les mesures présentées dansla suite de ce chapitre sont <strong>des</strong> mesures de couple magnétique effectuées avec un cantileverpiezorésistif dans un réfrigérateur à dilution sous champ magnétique pulsé.H irrCouple magnétique (a. u.)H*(a.u.)H p52 54 56 580 20 40 60B (T)Figure 4.2 – Couple magnétique en fonction de B à T = 0.6 K. L’encart montre un zoomdu signal lors de la <strong>des</strong>cente du champ.La figure 4.2 représente la moyenne de cinq mesures de couple magnétique en fonctiondu champ. Les flèches indiquent la montée et la <strong>des</strong>cente du champ. Des oscillations deHaas-van Alphen sont clairement visibles à fort champ dans ce composé (voir encart fig.4.2). A bas champ, autour de 5 T le signal passe par un maximum (H p ). Cet effet est appeléeffet de pic. Une anomalie de l’aimantation H ∗ [124] marque un second effet de pic qui peutêtre attribué à une transition entre deux phases soli<strong>des</strong> de vortex. H irr marque le champ au<strong>des</strong>sus duquel l’irréversibilité magnétique disparaît. H irr est une transition entre une phasede vortex solide et liquide. La largeur de la phase liquide de vortex est due à la large anisotropiedu cristal et la faible longueur de cohérence dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . Ces deux facteursaffaiblissent les interactions entre vortex et les fluctuations thermiques vont permettre auxvortex de se désancrer.65


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés1.00Amplitude (a.u.)0.750.500.25Partie oscillatoire (a.u.)0.0180.0201/B (T -1 )0.000 10 20 30 40F (kT)Figure 4.3 – Transformée de Fourier de la partie oscillatoire du signal entre 48 T et 59 T àT = 0.6 K. L’encart montre la partie oscillatoire du signal en fonction de l’inverse du champmagnétique.On soustrait une monotone au signal pour ne faire apparaître que la partie oscillatoire(encart fig.4.3). On fait ensuite une transformée de Fourier de ce signal (fig. 4.3). La transforméede Fourier montre un seul pic à une fréquence extrêmement rapide de 18.1 kT.La fréquence <strong>des</strong> oscillations de Haas-van Alphen est reliée à l’aire de la surface de Fermiperpendiculaire au champ via la relation d’Onsager. Une fréquence de F= 18100 ± 50T correspond a une aire de 172.8 ± 0.5 nm −2 soit 65 % de la première zone de Brillouin2π(S 1ZB = (0.38637 nm )2 ). Si on suppose une surface de Fermi cylindrique, l’aire mesuréeéquivaut à un k F moyen de 7.42±0.05 nm −1 . Dans le cas d’un liquide de Fermi, le théorèmede Luttinger à 2D permet de déduire la densité de porteur à partir de l’aire de la surface deFermi. Le nombre de porteur par atome de cuivre est défini par :n = 2 ASF espace <strong>des</strong> kS 1ZB(4.1)La densité de porteur déduites <strong>des</strong> mesures de Haas-van Alphen est donc n = 1.3 soit1 + p porteurs par atome de cuivre.66


Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :Nous avons montré au chapitre 3 qu’à très basse température (T < 1.5 K), la températurede l’échantillon ne correspondait pas à celle du bain. Des mesures précises de H irr dansTl 2 Ba 2 CuO 6+δ auraient pu permettre de déterminer cette température car <strong>des</strong> mesures ontaussi été effectuées en champ statique jusqu’a 14 mK [125]. Ces mesures montrent que lavaleur de H irr augmente quand la température diminue et ne montrent pas de signe de saturation.Ces mesures seraient donc un bon outil pour connaître précisément la températurede l’échantillon. Malheureusement, la valeur de B irr est sensible au dB/dt (fig. 4.4). Quandon augmente le dB/dt, la force exercée sur les vortex augmente. Cette force va désancrer lesvortex et la transition entre état de vortex solide et liquide intervient à plus bas champ. Onne peut donc malheureusement pas utiliser les mesures effectuées en champ statique pourrecaler la température. Nous avons donc estimé la température à partir de la calibrationeffectuée pour Sr 2 RuO 4 (voir chap. 3).Couple magnétique (a.u.)0-1B(T)604020Bmax=59TBmax=22TBmax=40T00.0 0.2 t(s) 0.4-20 20 40 60B(T)Figure 4.4 – Mesure du couple magnétique pour différents profils de champ à la mêmetempérature.67


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés58.8T55.5T 52.6T50TT=1.8KPartie oscillatoire (a.u.)0.017 0.018 0.019 0.0201/B (T -1 )T=1.6KT=1.4KT=1.2KT=1KT=0.9KT=0.8KT=0.6KT=0.6KFigure 4.5 – Partie oscillatoire du signal du couple magnétique en fonction de l’inverse duchamp magnétique pour différentes températures.La figure 4.5 montre la partie oscillatoire de l’aimantation en fonction de l’inversedu champ magnétique à différentes températures. L’amplitude du signal oscillatoire croîtavec le champ magnétique et quand la température diminue. Cette dépendance est typique<strong>des</strong> phénomènes d’oscillations quantiques. L’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiquesdans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ est 1000 fois plus petite que celle mesurée dans Sr 2 RuO 4 dans lesmêmes conditions de champ et de température. Le rapport signal sur bruit diminue rapidementquand la température augmente à cause du facteur de réduction thermique <strong>des</strong>oscillations quantiques (R T ).68


Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :Pour déterminer la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules responsables <strong>des</strong> oscillations quantiques,on trace l’amplitude du signal obtenue par transformée de Fourier en fonction de latempérature. La largeur de la fenêtre de champ pour la transformée de Fourier doit êtresuffisamment grande pour s’affranchir <strong>des</strong> artefacts dus aux bruits. En effet, l’amplitudedu signal mesuré est faible et plus la fenêtre est petite, plus l’amplitude de la transforméede Fourier est sensible au bruit. Il est donc nécessaire de choisir une fenêtre de champsuffisamment grande pour s’affranchir de ce problème.Amplitude TF normalisé (a.u.)N=10N=20N=300.0175 0.0180 0.0185 0.01901/B(T -1 )Figure 4.6 – Amplitude obtenue par transformée de Fourier de la partie oscillatoire ducouple magnétique en fonction de l’inverse du champ magnétique pour différentes fenêtresde champ magnétique. La fenêtre est décalée d’une oscillation entre chaque point. N est lenombre d’oscillations dans la fenêtre.Afin de déterminer une taille de fenêtre optimale, on trace la variation d’amplitude dela transformée de Fourier renormalisée par la largeur de la fenêtre de champ. La figure4.6 montre que les amplitu<strong>des</strong> <strong>des</strong> transformées de Fourier convergent pour une taille defenêtre supérieure à 20 oscillations. Pour l’analyse, nous prendrons une taille de fenêtre de30 oscillations.69


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopésAmplitude renormalisé (a. u.)Bruit de fond de la transformée de Fourier0.5 1.0 1.5 2.0T(K)Figure 4.7 – Amplitude renormalisée de la transformée de Fourier entre 53.7 T et 58.9 T(30 oscillations) en fonction de la température. Les points expérimentaux sont représentéspar les symboles. Les lignes sont obtenues à l’aide de la théorie Lifshitz Kosevitch. Le traitplein est l’ajustement le plus proche <strong>des</strong> points expérimentaux conduisant à une masseeffective m ∗ = 5.79 m 0 à basse température. Les traits pointillés représentent l’erreur due àla dispersion de ces mêmes points.On trace la variation d’amplitude de la transformée de Fourier en fonction de la température(voir fig. 4.7). Le signal d’oscillations quantiques est très faible. L’amplitude de la transforméede Fourier pour une température supérieur à T = 1 K est trop faible par rapport aubruit pour être considéré comme fiable. L’ajustement à la théorie de Lifshitz Kosevitch estdonc restreint à la gamme de température 0.6 − 1 K. La masse effective déduites est dem ∗ = 5.79 ± 0.65m 0 .A la précision expérimentale près, la masse effective reste constante en fonction du champ.Cette observation valide l’utilisation de la théorie Lifshitz Kosevitch pour extraire la masseeffective.70


Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :ln(A n/R T)0.0180 0.0184 0.01881/B (T -1 )Figure 4.8 – Dépendance de ln(A/R T ) en fonction de l’inverse du champ magnétique àT = 600 mK. La ligne correspond à un ajustement à la théorie Lifshitz Kosevitch conduisantà T D = 5.85 K.Étudier la variation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations en fonction du champ magnétique permetd’extraire la température de Dingle (T D ) <strong>des</strong> quasiparticules. Nous avons effectué unesérie de transformées de Fourier pour différentes fenêtres de champ. La dépendance du logarithmede l’amplitude <strong>des</strong> oscillations de Haas-van Alphen renormalisée par le facteurde réduction due à la température suit une dépendance linéaire en fonction de l’inverse duchamp magnétique. Un tracé effectué grâce à la théorie Lifshitz Kosevitch permet d’extraireune température de Dingle de T D = 5.85 K. Cette valeur correspond à un temps derelaxation de :τ =2 π k B T D= 2.1 ± 0.3 10 −13 s (4.2)A 55 T, w c τ = 0.36. Des mesures de transport [89, 82] permettent d’extraire à très bassetempérature un temps de relaxation de l’ordre de τ transport = 4.7 10 −13 s (l ∼ 670Ȧ) dans<strong>des</strong> échantillons avec une T c = 15 K.La différence de durée de vie <strong>des</strong> états électroniques peut être attribué aux processusde backscattering (voir chap. 1.4), à la différence de pureté cristalline entre les différentséchantillons et aux incertitu<strong>des</strong> de mesure. Le libre parcours moyen déduit de l’effet de71


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopésHaas-van Alphen est de l’ordre de :Le rayon de l’orbite cyclotron à 55 T est :l = v F τ = k Fτ ∼ 320 Ȧ (4.3)m∗ r c = v Fw c= 88.5 nm (4.4)Dans l’espace réel, la taille <strong>des</strong> orbites cyclotrons est donc l oc = 556 nm. A 55T, le libreparcours moyen est donc inférieur à la circonférence de l’orbite cyclotron et w c τ = 0.33 enmoyenne. La quasiparticule est donc diffusée avant d’avoir parcouru une orbite entière et ilest alors inhabituel d’observer <strong>des</strong> effets quantiques dans ces conditions (w c τ < 1). Cependant,<strong>des</strong> oscillations quantiques ont déjà été observées dans <strong>des</strong> matériaux organiques pour<strong>des</strong> valeurs de w c τ ∼ 0.3 [126].En parallèle, <strong>des</strong> oscillations quantiques de la magnétorésistance transverse ont été observéesdans un autre échantillon de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ dans un cryostat hélium [126].Les fréquences <strong>des</strong> oscillations quantiques mesurées dans les deux échantillons sont identiques,le dopage est donc le même. La masse effective déduite <strong>des</strong> mesures de transportest de m ∗ = 4.1 ± 1 m 0 Au vu de la faible l’amplitude <strong>des</strong> oscillations et <strong>des</strong> difficultés demesure, il est logique d’attribuer cette différence de masse effective entre les deux mesuresà <strong>des</strong> incertitu<strong>des</strong> de mesures et à la faible gamme de température explorée. Suite à cesobservations, <strong>des</strong> mesures complémentaires ont été effectuées par le groupe de A. Carringtonà Tallahassee dans une plus grande gamme de température. Ils ont ainsi pu déterminerplus précisément la masse effective <strong>des</strong> quasipaticules qui est m ∗ = 5.6 ± 0.2 m 0 . Le tableauci-<strong>des</strong>sous permet de résumer les grandeurs déduites <strong>des</strong> oscillations de Haas-van Alphen.Grandeursde Haas-van AlphenF (T)18.1 ± 0.05 kTA k172.6 ± 0.5 nm −2n(porteur/atome de Cuivre) 1.30m ∗ (m 0 ) m ∗ = 5.79 ± 0.65 m 0T D (K) 5.85l (Ȧ) 32072


Comparaison avec d’autres types de mesures :4.4 Comparaison avec d’autres types de mesures :4.4.1 Oscillation de la magnétorésistance dépendante de l’angle :Le signal de magnétorésistance d’un métal est dû aux quasiparticules issues de la surfacede Fermi perpendiculaire au champ magnétique appliqué. Si on fait varier l’orientation duchamp magnétique, la trajectoire <strong>des</strong> porteurs varie sur la surface de Fermi. Dans le casd’un métal présentant une surface de Fermi bidimensionnelle avec un gondolement (i.e. <strong>des</strong>interactions transverses non négligeables), la magnétorésistance va osciller en fonction durapport de surface entre les deux surfaces de Fermi extrémales (fig. 4.9).ck F tanθ = π(n − 1 4 ) (4.5)où c est la distance entre deux plan conducteurs et n ɛ N. Pour <strong>des</strong> valeurs particulièresde θ, (eq. 4.5) la surface de Fermi ne présente qu’un seul extremum.Figure 4.9 – Schéma d’une surface de Fermi présentant un gondolement [127].La dégénérescence <strong>des</strong> niveaux de Landau est alors plus importante. L’amplitude <strong>des</strong>oscillations quantiques et la magnétorésistance passe par un maximum. Ces angles particulierssont appelés angles de Yamaji [127]. Cet effet appelé oscillation angulaire de lamagnétorésistance (AMRO) fut mesuré pour la première fois dans <strong>des</strong> matériaux organiques[128]. Ce type de mesure permet de déduire le vecteur d’onde au niveau de Fermi k F . Desmesures d’AMRO à T = 4.2 K et H = 45 T dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ (T c = 20 K) [84] ont misen évidence une surface de Fermi quasi-bidimensionnelle dont la surface correspond à 62%(k F = 7.35 ± 0.1 nm −1 ) de la première zone de Brillouin. Ces mesures reflètent que le transportest cohérent le long de l’axe c à cette température. La figure 4.10 est une représentationschématique du gondolement déduit <strong>des</strong> mesures d’AMRO.73


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopésFigure 4.10 – Schéma d’une surface de Fermi déduite <strong>des</strong> mesures d’AMRO (crédit N.Hussey). Le gondolement a été multiplié par dix.La résolution de nos mesures d’oscillations quantiques ne nous a pas permis de détecterce gondolement. De plus, le gondolement est tel qu’un maximum fait face à un creux. Lasurface de Fermi ne présente donc que <strong>des</strong> extremums très proches rendant leur observationplus difficile.4.4.2 Spectroscopie par photoémission résolue en angle :La spectroscopie par photoémission résolue en angle (ARPES) est une technique spectroscopiquequi consiste à arracher <strong>des</strong> électrons de la surface du composé avec <strong>des</strong> photons.En remontant à l’énergie et au vecteur d’onde de l’électron arraché, on obtient <strong>des</strong> informationssur la dispersion énergétique et donc sur la surface de Fermi. Les mesures dansTl 2 Ba 2 CuO 6+δ (T c = 30 K) à T = 10 K [80] ont mis en évidence une surface de Fermi quasi2D qui recouvre 63 ± 2% (k F = 7.28 ± 0.22 nm −1 ) de la première zone de Brillouin. Lamasse effective déduite <strong>des</strong> mesures d’ARPES au niveau de Fermi est en bon accord aveccelle mesurée en de Haas-van Alphen [129].Figure 4.11 – Spectre d’ARPES d’après [80] (fig. a). Durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules enfonction de l’angle (fig. b) ).74


Comparaison avec d’autres types de mesures :La figure 4.11 représente l’intensité du signal mesuré en fonction de l’énergie de liaison.Le pic de cohérence <strong>des</strong> quasiparticules est de l’ordre de la dizaine de meV aux antinoeudset de la centaine de meV aux noeuds. La largeur <strong>des</strong> pics est liée à la durée de vie <strong>des</strong>quasiparticules par la relation Γ = /τ. Le graphique 4.11 b) représente la durée de vie<strong>des</strong> quasiparticules en fonction de l’angle déduite <strong>des</strong> mesures d’ARPES. La durée de vie<strong>des</strong> quasiparicules déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques est un ordre de grandeurplus grand que celle déduite <strong>des</strong> mesures d’ARPES suggérant la présence d’un terme dediffusion additionnel à la surface [130]. Des mesures de transports mettent aussi en évidenceune anisotropie de la durée de vie dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopé [131]. On ne peut donc pasconclure sur la cohérence <strong>des</strong> quasiparticules sur toute la surface de Fermi.4.4.3 Mesures d’effet HallFigure 4.12 – Coefficient de Hall en fonction de la température [89].Des mesures d’effet Hall ont été effectuées dans un composé avec T c < 15 K [89]. A bassetempérature dans le régime de collision élastique, R H = 8.510 −10 m 3 /C qui se convertit enune densité de porteur de n = 1.3 trous par atome de cuivre. On peut donc conclure que lesmesures d’effet Hall et les mesures d’oscillations quantiques sont en bon accord.4.4.4 Mesures de chaleur spécifique :Des mesures de chaleur spécifique ont été effectuées dans du Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ polycrystalin[81] (voir fig. 4.13). Ces mesures permettent de déduire la chaleur spécifique électroniquemolaire γ el = 6.5 ± 2 mJ mol −1 K −2 .Pour une surface de Fermi 2D, la chaleur spécifique électronique est décrite par le coefficientde Sommerfeld et est reliée à la masse effective par :γ el = πN Ak 2 B a23 2 m ∗ . (4.6)75


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopésFigure 4.13 – Chaleur spécifique électronique massique en fonction de la température dansTl 2 Ba 2 CuO 6+δ [81].En considérant que m ∗ = 5.6 m 0 , on trouve γ el = 6.72 ± 1 mJ mol −1 K −2 . Ces deuxmesures sont donc en très bon accord et confirment que les oscillations quantiques révèlentbien toute la surface de Fermi. Cette mesure permet aussi une comparaison quantitative <strong>des</strong>masses effectives <strong>des</strong> quasiparticules à fort champ et sans champ. Elle montre que le champmagnétique n’induit pas de modification de la surface de Fermi et qu’elle est composée d’uneseule orbite dans les cuprates sur-dopés.76


Comparaison avec d’autres types de mesures :4.4.5 Comparaison avec les mesures d’oscillations quantiques :Figure 4.14 – Surface de Fermi déduite de différentes son<strong>des</strong> expérimentales.La première figure permet de comparer les différents k F obtenus par <strong>des</strong> mesures d’AMRO(voir fig. 4.14 (a)), d’ARPES (b) et d’oscillations quantiques (c). La surface de Fermi déduite<strong>des</strong> oscillations quantiques est en bon accord avec celle mesurée sous champ (AMRO) et cellemesurée par spectroscopie (ARPES) à champ nul.Le tableau présente la densité de porteur déduite <strong>des</strong> mesures en fonction <strong>des</strong> techniqueet <strong>des</strong> T c <strong>des</strong> composés.Technique T c n (atome de Cu)ARPES [80] 30 K 1.26 ± 0.08AMRO [84] 20 K 1.28 ± 0.04oscillations quantiques [126] 10K 1.3 ± 0.02Les densités de porteurs déduites <strong>des</strong> différentes techniques de mesure sont cohérentes.Les cuprates très sur-dopés ont une densité de porteur de n = 1 + p par atome de cuivre,comme le prévoit les calculs de structure de ban<strong>des</strong>.77


4. Oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopés4.5 Conclusion :Nous avons observé pour la première fois <strong>des</strong> oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ àune fréquence de F = 18100 T [126]. Cette fréquence correspond à une surface de Fermicouvrant 65 % de la première zone de Brillouin en accord avec les mesures d’AMRO, d’effetHall et d’ARPES. Les mesures d’AMRO mettent aussi en évidence un gondolement de lasurface de Fermi que nous ne pouvons pas observer avec nos mesures. Le dopage du composéest n = 1 + p, ce qui est prévu par les calculs de structure de ban<strong>des</strong>. Des mesuresde chaleur spécifique permettent d’affirmer que l’on mesure bien toute la surface de Fermi.La masse effective déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques et de la chaleur spécifiqueest grande (m ∗ = 5.6 m 0 ) par rapport à celle prédite par les calculs de structure de bande(m ∗ = 1.4 m 0 ), indiquant la présence de fortes corrélations électroniques même à fort dopage.Les mesures avec et sans champ sont cohérentes et valident ainsi l’utilisation d’unchamp magnétique pour révéler l’état fondamental du système. Les mesures d’oscillationsquantiques ont permis de confirmer la cohérence <strong>des</strong> quasiparticules sur toute la surface deFermi. Les cuprates présentent donc un comportement de type liquide de Fermi du côtétrès sur-dopé du diagramme de phases. De plus, la mesure ne révèle pas de témoignage dupseudogap qui a donc disparu à plus faible dopage.78


Chapitre 5Oscillations quantiques du coté sous-dopé dudiagramme de phases5.1 Introduction :La nature de la phase pseudogap n’est, à l’heure actuelle, pas encore comprise. Denombreuses son<strong>des</strong>, comme la RMN, le transport ou l’ARPES, révèlent <strong>des</strong> anomalies parrapport à un liquide de Fermi standard. Une tentative de mesure <strong>des</strong> oscillations quantiquesde l’aimantation a été effectuée pour la première fois dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 en 1991 par Kido[132]. Cette mesure a été effectuée à 1.8 K, jusqu’à 27 T dans <strong>des</strong> poudres orientées. Lesignal mesuré contient une oscillation et demi de très faible amplitude. Une fréquence de540 ± 30 T et une masse effective de 2.1 ± 0.5 m 0 ont été déduites d’une analyse spectraleutilisant la méthode de maximisation de l’entropie. Il semble cependant difficile au vu dusignal brut, de la largeur de la fenêtre de champ et de l’utilisation de poudre de conclure surla présence d’oscillations quantiques dans les cuprates sous-dopés. Ce chapitre présente lespremières mesures d’effet de Haas-van Alphen dans <strong>des</strong> monocristaux du côté sous-dopé dudiagramme de phases. La première partie est une introduction à la structure cristalline deYBa 2 Cu 3 O 6+δ et YBa 2 Cu 4 O 8 . Les mesures d’oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51et YBa 2 Cu 3 O 6.54 sont ensuite présentées ainsi qu’une comparaison avec les mesures d’effetSdH. Le chapitre continue avec les oscillations quantiques mesurées dans YBa 2 Cu 4 O 8 etfinit avec <strong>des</strong> mesures haute résolution à très basse température effectuées plus récemmentdans YBa 2 Cu 3 O 6.51 et YBa 2 Cu 3 O 6.54 dans l’idée de détecter d’autres fréquences.79


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phases5.2 Composés :5.2.1 YBa 2 Cu 3 O 6+δFigure 5.1 – Cellule unité du composé Y Ba 2 Cu 3 O 7 [133].Comme tous les cuprates, le composé YBa 2 Cu 3 O 6+δ présente une structure de typepérovskite (fig. 5.1). La cellule unité contient deux plans CuO 2 adjacents séparés de 3.2 Ȧpar un plan d’yttrium. Les plans CuO 2 sont <strong>des</strong> plans conducteurs et sont représentés parla base <strong>des</strong> polyhédres. La structure contient également <strong>des</strong> chaînes CuO séparées <strong>des</strong> plansconducteurs par <strong>des</strong> plans de BaO. En rajoutant <strong>des</strong> atomes d’oxygène dans ces chaînes, lavalence du cuivre change et <strong>des</strong> électrons sont arrachés <strong>des</strong> plans CuO 2 . Le contrôle du tauxd’oxygène dans les chaînes permet alors de contrôler le dopage du composé. Ces chaînessont dirigées selon l’axe ⃗ b. Les chaînes du composé représenté sur la figure 5.1 sont pleines.Elles correspondent à la structure d’un composé légèrement sur-dopé (δ = 1, T c ≃ 90 K).Le dopage optimal correspond à δ = 0.95 et à T c ≃ 94 K. En faisant varier le dopage,les oxygènes <strong>des</strong> chaînes peuvent s’ordonner pour certaines valeurs de δ, en formant unesuperstructure. Cette superstructure a pu être mise en évidence par <strong>des</strong> mesures de rayonsX [134]. Le nom donné à ces superstructures découle de la périodicité du vecteur d’onderéciproque Q suivant l’axe ⃗a.80


Composés :Figure 5.2 – Schéma <strong>des</strong> différentes superstructures <strong>des</strong> chaînes CuO dansYBa 2 Cu 3 O 6+δ [133].Pour δ < 0.35, le cristal présente une structure tétragonale (|a| = |b|). Quand on augmentele dopage au-dela de δ > 0.35, il y a une transition structurale et la maille s’allonge lelong de l’axe b. La structure du composé passe alors de tétragonale à orthorhombique. Pour0.35 < δ < 0.62, le composé présente une structure stable constituée d’une alternance dechaîne vide et pleine (fig. 5.2). Cette superstructure est appelé ortho − II. Quand le dopagene correspond pas exactement au demi remplissage (δ = 0.5) il va y avoir <strong>des</strong> oxygènesen excès ou en défaut par rapport à cette structure (cette phase est appelé ortho − II incomplète).Autour de δ = 0.62, le composé est un mélange de phase ortho − II et −V . Enaugmentant encore le dopage, le composé présente une superstructure de type ortho − V IIIautour de δ = 0.67. Entre δ = 0.72 et δ = 0.82, le composé adopte une structure de typeortho−III. Finalement à fort dopage, le composé va tendre vers une phase de type ortho−Ioù toutes les chaînes sont remplies.Dans ce composé, les chaînes peuvent s’ordonner en domaines tournés de 90˚les uns parrapport aux autres. Ce phénomène est appelé maclage et ces domaines sont observables avecun microscope à lumière polarisée. L’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiques est très sensible àla durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules. Or à chaque fois qu’une quasiparticule traverse la frontièreentre deux domaines, elle a une très forte probabilité d’être diffusée. Pour augmenter la taille<strong>des</strong> domaines, on peut démacler l’échantillon. Pour cela, une pression uniaxiale (100 atm)est exercée sur l’échantillon à une température de 300˚C [135].81


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phasesFigure 5.3 – Diagramme de phases structural en fonction de δ [134].La figure 5.3 présente le diagramme de phases structural en fonction de δ. La phasela plus stable à un dopage intermédiaire est la phase ortho − II. On constate aussi quesi on augmente la température autour de 100 ˚C, l’échantillon transite vers une phaseortho − I désordonné. La phase ortho − V III est encore plus instable et nécessite degarder l’échantillon à relativement basse température. Pour un même dopage, il existedonc différents arrangements d’oxygène dans les chaînes et on peut se demander si l’ordredans les chaînes influe sur la phase supraconductrice <strong>des</strong> plans. Des mesures ont montréune dépendance entre la T c et la vitesse de refroidissement de l’échantillon entre la phasetétragonale et les phases orthorhombiques ordonnées [136]. La température critique diminuesi l’échantillon est refroidi trop rapidement car les chaînes n’ont pas eu le temps de s’ordonner.Si on laisse l’échantillon à température ambiante, du moins dans le cas d’ortho − II, latempérature critique a tendance à augmenter.Les échantillons que nous avons mesurés ont été synthétisés par Doug Bonn, WalterHardy et Ruxing Liang de l’université de Colombie Britanique (Vancouver, Canada). Ils onteffectué une croissance <strong>des</strong> cristaux par la méthode de self-flux. Cette méthode consiste àmélanger <strong>des</strong> poudres de Y 2 O 3 − BaO − CuO à haute température dans un creuset inerte enBaZrO 3 [137]. Ils ont ainsi pu réaliser <strong>des</strong> échantillons d’une très grande pureté (99.99%)dont la structure cristalline est de très bonne qualité [138].82


Composés :Le dopage auquel correspond les échantillons d’YBa 2 Cu 3 O 6+δ synthétisés dépend de leurconcentration en oxygène et de l’ordre dans les chaînes. De plus, ce composé présente unedéplétion du dome supraconducteur autour du dopage p = 1 8qui n’est pas prise en comptedans la relation de Tallon (eq. 2.4). Des mesures [139] ont montré que la concentration deporteurs dans les plans CuO 2 est reliée au paramètre de maille selon c par la relation :p = 11.491 (1 − cc 0) + 5.17 ∗ 10 9 (1 − c c 0) 6 (5.1)avec c 0 = 1.18447 nm correspondant au paramètre de maille à dopage nul (T = 295K).Cette relation permet de reproduire la déplétion du dôme autour de p = 1 8non prise encompte par la relation de Tallon.Les échantillons que nous avons mesurés correspondent à <strong>des</strong> dopages de δ = 0.51 (T c =57.5K) et δ = 0.54 (T c = 60K) soit p = 0.1 trous par atome de cuivre. Des mesures derayons X effectuées dans ces échantillons révèlent une longueur de corrélation de l’ordre de58 Ȧ (la longueur de corrélation est la longueur typique sans alternance de chaînes le longde l’axe c) [135] et traduisent la grande pureté cristalline <strong>des</strong> échantillons mesurés.5.2.2 YBa 2 Cu 4 O 8 :Les cristaux d’YBa 2 Cu 4 O 8 ont une structure semblable au composé YBa 2 Cu 3 O 6+δ si cen’est la présence de deux plans de chaînes CuO (fig. 5.4).Figure 5.4 – Cellule unité du composé YBa 2 Cu 4 O 8 [133].La présence de deux chaînes exclut le phénomène de maclage. Ce composé a la particularitéd’être stoechiométrique. Les chaînes sont pleines et il n’est pas possible de changer ledopage du composé. Si on tente de changer l’oxygénation <strong>des</strong> chaînes à haute pression et83


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phaseshaute température, la structure cristalline du composé va changer en YBa 2 Cu 3 O 6+δ [140]. Cecomposé ne présente pas de désordre dû à <strong>des</strong> substitutions ou à <strong>des</strong> absences d’oxygène maispeut, néanmoins, présenter <strong>des</strong> phases parasites de YBa 2 Cu 3 O 6+δ . Les cristaux YBa 2 Cu 4 O 8 ontété synthétisés par N. Hussey et S. Adachi du Superconducting Research Laboratory à Tokyo.Ils ont utilisé la méthode de self-flux sous haute pression dans <strong>des</strong> creusets de Y 2 O 3 .5.3 Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 etYBa 2 Cu 3 O 6.54 :5.3.1 Effet de Haas-van Alphen :Nous avons mesuré l’effet de Haas-van Alphen dans plusieurs cristaux à dopage trèsproches Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 (Y BCO6.51) et Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 (Y BCO6.54).Le graphique (5.5) présente une mesure du couple magnétique pour chaque échantillon à laplus basse température atteinte. L’angle entre l’axe c <strong>des</strong> cristaux et le champ magnétiqueest typiquement de quelques degrés.Figure 5.5 – Couple magnétique en fonction du champ magnétique à T = 600 ± 200 mKpour Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 (a) et Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 (b). Les encarts sont <strong>des</strong> zooms sur la partie hautchamp, la ligne rouge représente la monotone soustraite au signal pour extraire la partieoscillatoire.Le signal devient réversible au <strong>des</strong>sus d’un champ critique appelé B irr (chap. 2). En <strong>des</strong>sousde B irr , <strong>des</strong> sauts très rapi<strong>des</strong> de l’aimantation apparaissent [141]. Ce phénomène est dûà la réorganisation du flux magnétique rentrant dans l’échantillon [142]. Dans l’état solide devortex (B < B irr ), les défauts cristallins fixent le réseau de vortex dans chaque plan CuO 2 .Une variation de champ crée une accumulation de vortex à la surface induisant ainsi un gradientde champ magnétique dans l’échantillon. Ce gradient de champ induit un courant <strong>des</strong>urface (⃗▽∧ ⃗ B = µ 0⃗ Jc ). Un chauffage dû au mouvement de vortex apparaît alors. La densitésuperfluide locale est alors réduite. Cette réduction de densité superfluide induit un chauffagelocal augmentant ainsi l’ampleur du phénomène. En l’absence de couplage thermiqueeffectif, cette chaleur n’est pas dissipée suffisamment rapidement pour empêcher certainesrégions de l’échantillon de redevenir métallique (à très basse température la résistance de84


Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 et YBa 2 Cu 3 O 6.54 :Kapitza empêche un bon couplage entre le bain et l’échantillon (voir chap. 3). Une foisqu’une partie de l’échantillon est devenue métallique, le flux peut y pénétrer entièrementdiminuant ainsi les courants de surface. L’échantillon refroidit alors très vite et redevient supraconducteuravec un nouvel arrangement de vortex. Le processus peut alors recommencer.Lors de la monté (50 ms), les sauts de flux sont rapi<strong>des</strong> [143] et notre système d’acquisition(τ aquisition = 100 µs) ne nous permet pas de les mesurer. Leur présence n’est révélée que par<strong>des</strong> anomalies de la courbe d’aimantation sous B irr . Lors de la <strong>des</strong>cente (350 ms) <strong>des</strong> sautsde flux apparaissent clairement à la fin du pulse où le dB/dt est faible.Les mesures révèlent la présence d’oscillations de Haas-van Alphen à fort champ dans lesdeux composés (voir encart fig. 5.6). Par la suite, on ne travaille que sur la partie oscillatoiredu signal mesuré lors de la <strong>des</strong>cente. La partie oscillatoire est obtenue en soustrayant unemonotone au signal de couple magnétique (voir encart fig. 5.6).Figure 5.6 – Transformé de Fourier de la partie oscillatoire du signal pour Y BCO 6.51 (a) etY BCO 6.54 (b). Les encarts montrent la partie oscillatoire du signal en fonction de l’inversedu champ magnétique.La transformée de Fourier présente un pic principal à une fréquence F = 529±20 T pourY BCO6.51 et F = 532 ± 20 T pour Y BCO6.54. La relation d’Onsager permet de déduireles aires de la surface de Fermi correspondante. Une fréquence de 530 ± 20 T correspond àune poche d’aire 5 ± 0.2 nm −2 soit 1.9 ± 0.3 % de la première zone de Brillouin. D’après lethéorème de Luttinger (eq. 4.1), la densité de porteur pour une poche est n = 0.038 ± 0.004porteurs par atome de cuivre. Ce sujet sera abordé plus en détail dans le chapitre 6.La figure 5.7 montre la partie oscillatoire du couple magnétique obtenue pour différentestempératures. Les mesures dans Y BCO 6.51 ont été effectuées dans un réfrigérateur à dilutionet permettent de couvrir une gamme de température de 0.5 K à 4.2 K. Nous avons effectué lesmesures dans Y BCO 6.54 dans un cryostat 4 He entre 1.5 K et 10 K et dans un réfrigérateurà dilution à T = 600 mK uniquement (voir chap. 5.5). Cependant on ne peut pas comparerl’évolution de l’amplitude entre les deux mesures car l’angle entre l’échantillon et le champmagnétique n’est pas rigoureusement le même entre les deux séries d’expériences.85


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phasesFigure 5.7 – Partie oscillatoire du couple magnétique en fonction de l’inverse du champmagnétique à différentes températures pour Y BCO 6.51 dans un réfrigérateur à dilution (a)et pour Y BCO 6.54 dans un cryostat 4 He.Le graphique 5.8 représente la variation de l’amplitude du pic principal de la transforméede Fourier en fonction de la température pour les deux échantillons. La dépendanceen température de l’amplitude <strong>des</strong> transformées de Fourier suit relativement bien la théorieLifshitz Kosevitch. Ces mesures permettent d’extraire la masse effective <strong>des</strong> quasiparticulesresponsables <strong>des</strong> oscillations quantiques. En effectuant une analyse dans plusieursgammes de champ magnétique, on trouve une masse effective de m ∗ = 1.76 ± 0.05 m 0 pourY Ba 2 Cu 3 O 6.51 et m ∗ = 1.54 ± 0.05 m 0 pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 .Figure 5.8 – a) Amplitude renormalisée de la transformée de Fourier entre 40.33 T et 57.5 T(B moy = 47.41 T) dans Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 . b) Amplitude renormalisée de la transformée deFourier entre 40 T et 56 T (B moy = 46.67 T) dans Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 . Les lignes correspondentà la théorie Lifshitz Kosevitch pour <strong>des</strong> masses effective de m ∗ = 1.76 m 0 pour Y BCO 6.51et m ∗ = 1.54 m 0 pour Y BCO 6.54 .86


Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 et YBa 2 Cu 3 O 6.54 :Figure 5.9 – Variation de la masse effective déduite <strong>des</strong> oscillations quantiques dansY BCO 6.51 (gauche) et Y BCO 6.54 (droite). La ligne rouge représente la valeur moyenneet les lignes en pointillés bleu représentent l’erreur relative.La figure 5.9 représente les masses effectives obtenues dans différentes fenêtres de champmagnétique.Pour les deux échantillons, la masse effective ne varie pas en fonction du champaux incertitu<strong>des</strong> expérimentales près. Cette observation valide l’utilisation de la théorie LifshitzKosevitch pour décrire la variation d’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiques en fonctionde la température.Figure 5.10 – Variation de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations pour une fenêtre de 3 oscillationsrenormalisée par le facteur de réduction thermique (m ∗ = 1.75 m 0 pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 etm ∗ = 1.5 m 0 pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 ).D’après la théorie Lifshitz Kosevitch, la variation de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiquesen fonction du champ est reliée à la durée de vie <strong>des</strong> quasiparticules. Le graphique5.10 représente le logarithme de l’amplitude du signal divisée par le facteur de réductionthermique en fonction de l’inverse du champ magnétique (analyse de Dingle, cf chap. 1.4). Laprécision <strong>des</strong> mesures ne permet pas de distinguer un éventuel facteur de réduction additionneldans la phase mixte (voir chap. 6). La droite correspond à la théorie Lifshitz Kosevitch87


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phaseset permet de déduire une température de Dingle de T D = 6 ± 0.8 K et donc une durée devie de τ = 2 ± 0.3 10 −13 s soit ω c τ = 1 ± 0.2 à B = 50 T. Si on considère une surface deFermi cylindrique, le libre parcours moyen déduit est de l = 16 nm. La figure 5.10(b) révèleun comportement non linéaire du logarithme de l’amplitude de la transformée de Fourieren fonction de l’inverse du champ magnétique. Ce phénomène peut avoir pour origine <strong>des</strong>battements liés à la présence de plusieurs fréquences proches (voir chap. 5.5). Un ajustementlinéaire <strong>des</strong> données permet de déduire une température de Dingle T D = 9.22 ± 2.5 K. Ladurée de vie <strong>des</strong> quasiparticules est donc de τ = 1.3 ± 10 −13 s soit l = 11 nm.5.3.2 Comparaison <strong>des</strong> mesures dHvA et SdH :Les mesures précédentes permettent de comparer les oscillations quantiques de l’aimantationavec celle de la magnétorésistance transverse et de l’effet Hall dans Y Ba 2 Cu 3 O 6.51[144].Torque (a. u.)R xy( )100.00-0.03b)0.08 c)a)0.5 K0.8 K1.4 K2.9 K4.1 K1.5K2.1K2.5K3K3.5K4.2KR xx( )0.001.5K2.1K2.5K3K3.5K4.2K30 40 50 60B (T)Figure 5.11 – Dépendance en champ (a) du couple magnétique, (b) de la résistance de Hallet (c) de la magnétorésistance transverse à différentes températures. Les courbes de la fig.(a) sont décalées pour <strong>des</strong> raisons de clarté.88


Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 et YBa 2 Cu 3 O 6.54 :La figure 5.11 montre a) <strong>des</strong> mesures d’aimantation, b) d’effet Hall et c) de magnétotransporttransverse (I//a, b, B//c). Pour les expériences de transport, le champ irréversible (B irr ∼30 T) correspond au champ où la résistance devient finie. On entre alors dans un régimede ”flux flow” où une tension électrique est induite par le mouvement du réseau de vortex(eq. 2.2). Aux plus basses températures, on mesure 5 oscillations de la résistance de Hall(R xy ), cinq oscillations de la magnétorésistance R xx et huit oscillations de l’aimantation.Le déphasage entre les oscillations quantiques de R xx et de R xy est de π. C’est ce qui estattendu dans le cas d’une poche de quasiparticules de type électron car R xy est sensibleau signe <strong>des</strong> porteurs de charges. Le déphasage entre les mesures de Haas-van Alphen etShubnikov-de Haas est de π 2. C’est ce qui est attendu dans le cas de la théorie Lifshitz Kosevitchstandard [25] et est une indication de la validité de cette approche.Les transformées de Fourier montrent un maximum autour de F = 530 ± 20 T pour lestrois types de mesures. La surface de Fermi déduites est donc la même pour les oscillationsdHvA et Shubnikov-de Haas.-42.1ln(A/T)-6m * (m 0)1.81.540 45 50B(T)-8dHvASdH0 2 4 6T(K)Figure 5.12 – Logarithme de l’amplitude de la transformée de Fourier divisée par latempérature pour les mesures Shubnikov-de Haas (triangle) et dHvA (carrés) entre 47.4 T et51.7 T en fonction de la température pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 . L’encart représente la variationde la masse effective en fonction du champ magnétique.La figure 5.12 permet de comparer la dépendance en température de l’amplitude <strong>des</strong>oscillations quantiques pour l’effet de Haas-van Alphen et Shubnikov-de Haas. La théorieLifshitz Kosevitch permet de bien reproduire le comportement <strong>des</strong> oscillations quantiquesen fonction de la température pour les deux techniques de mesure. La masse effective <strong>des</strong>quasiparticules responsables <strong>des</strong> oscillations quantiques est de m ∗ = 1.8 ± 0.1m 0 . L’encartde la figure 5.12 montre la masse effective déduite <strong>des</strong> mesures de Haas-van Alphen etShubnikov-de Haas pour différentes gammes de champ. A la résolution expérimentale près,la masse effective reste constante en fonction du champ.La surface de Fermi et la masse effective cyclotron déduites <strong>des</strong> mesures d’aimantation, dela magnétorésistance et de l’effet Hall sont en très bon accord.89


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phases5.4 Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 4 O 8 :Le dopage auquel correspond les échantillons de YBa 2 Cu 4 O 8 par rapport à ceux deYBa 2 Cu 3 O 6+δ est difficile à déterminer. En effet, cet échantillon est stoechiométrique et onne peut pas en faire varier le dopage. Des mesures de pouvoir thermoélectrique le long del’axe ⃗a [145] suggérerait un dopage autour de p = 0.125. Cette valeur correspond au dopagedans YBa 2 Cu 3 O 6.67 . Par contre si on compare la température critique et T ∗ aux échantillonsde YBa 2 Cu 3 O 6+δ , le dopage est plutôt situé autour de p = 0.14 [57].2couple magnétique (a. u.)100.000-0.00545 50 550 20 40 60B(T)Figure 5.13 – Couple magnétique en fonction du champ magnétique à T = 600 mK. L’encartest un zoom sur la partie haut champ.Nous avons effectué <strong>des</strong> mesures de couple magnétique sous champ magnétique pulséau LNCMI dans un réfrigérateur à dilution (fig. 5.13). La figure 5.13 montre l’apparition àfort champ d’oscillations quantiques de très faible amplitude, du même ordre de grandeurque les oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . A fort champ et à une température deT = 600 mK, on détecte seulement trois oscillations et demi. L’amplitude <strong>des</strong> oscillationsest trop faible pour extraire une masse effective.L’encart de la figure 5.14 représente la partie oscillatoire du couple magnétique moyennéesur cinq tirs. La transformée de Fourier est constituée d’un seul pic à une fréquence deF = 620 ± 30 T ce qui correspond à une aire de 6.3 ± 0.28 nm −2 , soit 2.4% de la premièrezone de Brillouin.90


Oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 4 O 8 :Amplitude (a.u.)oscillatory torque (a.u.)0.018 0.020 0.0221/B(T -1 )0 1000 2000F(T)Figure 5.14 – Transformée de Fourier de la partie oscillatoire du signal à T = 600 mK entreB min = 43 T et B max = 57.5 T. Encart : partie oscillatoire du signal.Des mesures de l’effet Shubnikov-de Haas dans ce composé ont été effectuées à Toulouseau LNCMI [146] et au NHMFL à Los Alamos [145]. Les premiers ont effectué <strong>des</strong> mesuresclassiques de magnétorésistance et de l’effect Hall jusqu’a B = 61 T et T = 1.5 K. Lesseconds ont utilisé une méthode de mesure sans contact basée sur l’oscillation d’une diodetunnel (T DO). La mesure a été effectué dans un cryostat 3 He (T = 500 mK) et jusqu’à unchamp de 85 T.Figure 5.15 – Parties oscillatoires à différentes températures mesurées (a) au LNCMI [146]et (b) au NHMFL [145].91


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phasesLa figure 5.15 montre les parties oscillatoires <strong>des</strong> signaux mesurées dans deux échantillonsavec deux techniques différentes. Les mesures révèlent la présence d’oscillations quantiques.La dépendance de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations en fonction de la température permet dedéterminer la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules. Les résultats <strong>des</strong> différentes mesures sontsynthétisés dans le tableau ci-<strong>des</strong>sous.Grandeurs dHvA SdH [146] TDO [145]Température critique 81.5K 80KFréquence (T) 620 ± 30T 660 ± 30 T 660 ± 15 TAire de la surface de Fermi (nm −2 ) 5.9 ± 0.3 6.3 ± 0.3 6.3 ± 0.15% de la première zone de Brillouin 2.4n(porteur/atomedeCuivre/poche) 0.024m ∗ (m 0 ) 2.7 ± 0.3 3 ± 0.3l 90 ± 30Ȧ 400ȦLa fréquence déterminée par les mesures de couple magnétique est plus faible que celledéterminée par les deux autres expériences. Cette mesure présente une grande incertitudedue à la petite fenêtre de champ et à la faible amplitude <strong>des</strong> oscillations. Le libre parcoursmoyen mesuré en TDO est quatre fois plus important que celui mesuré en Shubnikov-deHaas. La fenêtre de champ dans laquelle sont effectuées les mesures de TDO est plus grande(52 T à 83 T) que celle de Shubnikov-de Haas (49 T à 61 T). Un facteur de réduction additionneldû à l’état mixte [147] pourrait affecter les mesures à faible champ. Ce phénomènepourrait être une explication de la différence de libre parcours moyen déduit <strong>des</strong> deux mesures.92


Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 :5.5 Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dansYBa 2 Cu 3 O 6.51 :Peu après nos premières mesures, un groupe de Cambridge a effectué <strong>des</strong> mesures deHaas-van Alphen dans Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 sous champ statique au NHMFL jusqu’a 45T [148].Ils ont observé une fréquence additionnelle de faible amplitude autour de F = 1600 T. Laprésence de cette fréquence additionnelle est déterminante pour comprendre le mécanismeà l’origine de la reconstruction de la surface de Fermi (voir chap.6). Nous avons donc poussénos investigations pour confirmer ou non la présence cette fréquence additionnelle.5.5.1 Mesures :2.00.081.50.04couple magnétique (a. u.)1.00.50.00.0030 40 50-0.5-1.00 20 40 60B(T)Figure 5.16 – Couple magnétique en fonction du champ pour YBa 2 Cu 3 O 6.51YBa 2 Cu 3 O 6.54 (rouge). L’encart est un zoom sur la partie fort champ.(noir) etNous avons effectué une série de mesure dans le réfrigérateur à dilution à la températurede base (T ≃ 0.5 K). Le graphique présente le couple magnétique mesuré dans les deux composésY Ba 2 Cu 3 O 6.51 et Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 . Nous avons effectué dix tirs à la même températureet avons ensuite moyenné les parties oscillatoires. Le graphique 5.17 représente les partiesoscillatoires moyennées pour les deux composés. Les courbes en trait plein représentent ladépendance en champ magnétique de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations attendue par la théorieLifshitz Kosevitch (les valeurs de masse effective et de température de Dingle extraites <strong>des</strong>mesures de la section 5.3).93


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phasesFigure 5.17 – Partie oscillatoire du couple en fonction du champ magnétique (cercle) etl’évolution de l’amplitude prédite par Lifshitz Kosevitch(trait). (a) correspond à l’échantillonde Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 (T D = 6.2 K et m ∗ = 1.75 m 0 ) et (b) à Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 (T D = 9.22 K etm ∗ = 1.5 m 0 ).L’amplitude ne suit pas une dépendance exponentielle mais un battement apparaît pourles deux composés. Ce battement peut être expliqué par la présence de plusieurs fréquencesproches. Dans le cas d’oscillations quantiques avec plusieurs fréquences, la théorie LifshitzKosevitch prédit un comportement de type :τ oscillatoire = B ∑ iA 0 iα T m ∗ iBsinh( α T m∗ iBα T i ) e− D m∗ iB(sin 2 π( F )iB − γ i)(5.2)Il y a alors 5 paramètres ajustables pour chaque fréquence. Dans le cas où le rapportT/B est grand le sinus hyperbolique se réduit à 1 2 e α T m∗ iB . L’équation peut alors se simplifieren :τ = ∑ iA i e − B iBsin(2 π(F iB − γ i) (5.3)avec B i = α (TD i + T ) m∗ i . Le nombre de paramètres ajustables passe de 5 à 4 parfréquences.94


Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 :La figure 5.18 montre la partie oscillatoire du signal mesuré auquel nous avons retranchéles contributions dues aux différentes fréquences une par une. Nous avons effectué cettesoustraction par amplitude décroissante.Figure 5.18 – Partie oscillatoire du couple magnétique de Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 (cercle noir) etY Ba 2 Cu 3 O 6.54 (cercle bleu) auxquelles on retranche pas à pas <strong>des</strong> ajustements (ligne rouge)obtenues à partir de la théorie Lifshitz Kosevitch.Les graphiques 5.18 sont divisés en quatre parties. Le premier cadran présente la partieoscillatoire mesuré (symboles) et l’ajustement (ligne pleine) effectuée à partir de la théorieLifshitz Kosevitch avec une seule fréquence F 1 ≃ 540 T. Dans le deuxième cadran lessymboles représentent le signal résiduel obtenu en retranchant l’ajustement F 1 à la partieoscillatoire mesurée. La ligne correspond à un ajustement à partir de la théorie LifshitzKosevitch avec une seconde fréquence F 2 ≃= 450 T. Dans le troisième cadran le résiduel(symboles) peut encore être ajusté avec une troisième fréquence F 3 ≃ 630 T. Enfin, dansle quatrième cadran, le résiduel comporte une quatrième fréquence F 4 ≃ 1120 T de faibleamplitude.95


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phasesLe tableau suivant résume les résultats obtenus pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 .Fréquence A i B i γ i Amplitude(B = 40 T)F 1 = 540 ± 15 T 0.0097 265 0.71 1.3 10 −5F 2 = 450 ± 15 T 3.42 10 −4 181 0.42 3.7 10 −6F 3 = 630 ± 40 T 8.45 10 −3 382 0.47 6 10 −7F 4 = 1130 ± 20 T 9.72 924 0.369 9 10 −10La même procédure pour les mesures de Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 donne les résultats suivant :Fréquence A i B i γ i Amplitude(B = 40 T)F 1 = 541 ± 15 T 5 10 −3 213 0.69 2.5 10 −5F 2 = 453 ± 15 T 3.9 10 −3 159 0.45 7.37 10 −6F 3 = 637 ± 40 T 1.12 10 −4 136 0.12 3.87 10 −6F 4 = 1119 ± 20 T 1.17 10 −4 225 0.39 4.25 10 −7La combinaison de ces différentes fréquences permet de reproduire parfaitement lesdonnées expérimentale. Hormis les valeurs de fréquences, l’incertitude sur les valeurs déduites<strong>des</strong> ajustement est importante. On peut néanmoins interpréter les tendances <strong>des</strong> différentescomposantes avec confiance. L’amplitude de F 1 est 3 à 4 fois plus forte que F 2 . L’amplitudede F 4 est très faible et peut être interprétée comme une harmonique de F 1 .Figure 5.19 – Transformée de Fourier du signal moyenné (symboles) et <strong>des</strong> différentes composantesdéduites de l’ajustement avec la formule 5.3 (ligne : F 1 rouge, F 2 vert, F 3 orange,F 4 cyan) pour Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 (a) et Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 (b).La figure 5.19 représente les transformées de Fourier <strong>des</strong> signaux moyennés sur dix pulsesde champ (symboles) ainsi que les différentes fréquences obtenues par ajustement avec lathéorie Lifshitz Kosevitch : F 1 (rouge), F 2 (vert), F 3 (orange), F 4 (cyan).96


Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 :Il est bon de rappeler que la transformée de Fourier <strong>des</strong> sommes est différente de lasomme <strong>des</strong> transformées de Fourier. La transformée de Fourier sur l’ajustement à quatrefréquences permet de reproduire l’épaulement à gauche du pic principal et le petit pic àdroite. De plus, la présence de ces fréquences proches permet d’expliquer les ondulationsobservées sur les graphiques de Dingle (voir fig. 5.10).Nous n’avons pas détecté la fréquence autour de 1600 T observée par le groupe deCambridge [148]. Ce groupe a effectué <strong>des</strong> mesures à T = 30 mK et jusqu’à B = 45 T dansY Ba 2 Cu 3 O 6.51 . La figure 5.20 est la transformée de Fourier du signal qu’ils ont mesuré.Figure 5.20 – Transformée de Fourier du signal d’oscillations quantiques de l’aimantationdans YBa 2 Cu 3 O 6.51 . Encart : oscillation dHvA en fonction du champ. [148]Le rapport d’amplitude entre le pic à F = 1600 T et celui à F = 550 T est de 4.2%à T = 30 mK. En tenant compte de la masse effective(3.8 m 0 ) associée à cette fréquenceet <strong>des</strong> facteurs de réductions thermiques, ce rapport devrait être de 3.8 % à T = 0.6 K etB moy = 40 T. Le bruit autour de 1600 T, obtenu sur nos expériences, est inférieur à 1% dupic principal. Nous n’avons donc pas confirmé la présence de cette fréquence additionnelle.97


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phases5.5.2 Scénario sur l’origine du battement :Les mesures d’oscillations quantiques ont mis en évidence <strong>des</strong> battements dus à laprésence de fréquences proches. On ne peut pas exclure l’interprétation que chaque fréquencecorresponde à une poche. Cependant, l’explication la plus naturelle est d’invoqué un gondolementde la surface de Fermi. Des battements dans les mesures d’oscillations quantiquesont été observés dans plusieurs familles de composés comme Sr 2 RuO 4 [113] ou <strong>des</strong> composésorganiques [149].Un gondolement de la surface de Fermi, dû à couplage entre les plans, peut causer l’apparitionde fréquences supplémentaires. La figure 5.21 représente une surface de Fermi avecdeux extremums due à un gondolement le long de l’axe z.Figure 5.21 – Représentation schématique d’une surface de Fermi présentant un gondolementle long de l’axe z.Dans le cas d’un cuprates quasi-2D et pour une structure de bande très simple, la dispersionen énergie s’écrit [127] :ɛ(k) =22 m ∗ (k2 x + ky) 2 − 2 t c ⊥ cos(c k z) (5.4)avec t c ⊥ le terme de saut entre <strong>des</strong> plans CuO 2 à travers l’isolant et c la distance entredeux plans conducteur. D’après la relation d’Onsager F = k2 F2e, la relation entre l’énergiede Fermi et la fréquence d’oscillation est E F = eF/m ∗ . Les fréquences <strong>des</strong> oscillationsquantiques correspondent aux extremums de la surface de Fermi perpendiculaire au champ.Cette dispersion présente un minimum pour ck z = 0 et un maximum pour ck z = π. Ladifférence de fréquence correspondant aux deux extremums de la surface de Fermi est :∆F = 4tc ⊥ m∗e(5.5)98


Effet de Haas-van Alphen moyenné haute résolution dans YBa 2 Cu 3 O 6.51 :La différence de fréquences déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques est de ∆F =90 T. Cette valeur correspond à un terme de saut entre les plans conducteur de l’ordre det c ⊥≃ 1.3 meV soit environ 15 K.La maille élémentaire de YBa 2 Cu 3 O 6+δ contient deux plans CuO 2 conducteurs correspondantà deux orbitales, l’une liante et l’autre antiliante (bilayer splitting). Des calculs prenanten compte une reconstruction de la surface de Fermi prédisent un terme de saut t b ⊥ ≃ 8 meVsoit environ 96 K lié au bilayer splitting dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 [48]. Les calculs de structure debande prédisent une large orbite avec un terme de saut t b ⊥≃ 200 meV≃ 2400 K [150, 151].Le désaccord entre ces deux valeurs va dans le sens d’une reconstruction de la surface deFermi.Si on suppose que la quatrième fréquence est une harmonique, les oscillations quantiques ontrévélé la présence de trois fréquences différentes. La présence d’un bilayer splitting induit laprésence de deux fréquences. Si on tient compte, en plus, d’un gondolement de la surface deFermi pour chacune de ces fréquences, on s’attend à trouver quatre fréquences. Or nous n’endétectons que trois. La quatrième fréquence est peut être très proche de l’une <strong>des</strong> fréquencesmesurées ou son amplitude est peut être trop faible pour être détectée.Figure 5.22 – Anisotropie de la résistivité en fonction de la température pour différent dopage[152].L’observation de battements <strong>des</strong> oscillations quantiques qui serait due à un gondolementde la surface de Fermi et au bilayer splitting est une forte indication, à bassetempérature, d’une cohérence métallique le long de l’axe c. Les mesures de transport dansYBa 2 Cu 3 O 6+δ [152] montrent à plus haute température une forte anisotropie de la résistivitédans le pseudogap (fig. 5.22). Ces mesures montrent la présence d’un état incohérent, nonmétallique, dans la direction perpendiculaire aux plans conducteurs. Nos mesures indiquentdonc qu’à température suffisamment basse, lorsque la supraconductivité est détruite par unchamp magnétique, la cohérence le long de l’axe c est restaurée. La surface de Fermi deYBa 2 Cu 3 O 6.5 devient donc 3D à basse température. De récentes mesures de transport dansYBa 2 Cu 3 O 6+δ confirment cette hypothèse.99


5. Oscillations quantiques du côté sous-dopé du diagramme de phases5.6 Conclusion :Les mesures d’oscillations quantiques dans Y Ba 2 Cu 3 O 6.51 et Y Ba 2 Cu 3 O 6.54 indiquentla présence d’une surface de Fermi fermée et cohérente [153]. La variation d’amplitude <strong>des</strong>oscillations quantiques obéit à la théorie Lifshitz Kosevitch et semble donc indiquer un étatfondamental de type liquide de Fermi. Des mesures d’oscillations quantiques ont aussi étéeffectuées dans YBa 2 Cu 4 O 8 un composé stœchiométrique. Ces mesures indiquent que lesoscillations quantiques ne sont pas uniquement présentes dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ proche du dopage1/8 mais plutôt une propriété générique <strong>des</strong> cuprates sous-dopés [154].Suite à <strong>des</strong> mesures d’une autre fréquence nous avons amélioré la qualité de nos mesures.Cependant nous n’avons pas pu détecté cette nouvelle fréquence. L’amplitude <strong>des</strong> oscillationsen fonction de 1 B ne suit pas une dépendance exponentielle dans Y Ba 2Cu 3 O 6.51 etY Ba 2 Cu 3 O 6.54 . Ces mesures suggèrent la présence de plusieurs fréquences proches qui causeun battement de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations quantiques.100


Chapitre 6Evolution de la surface de Fermi en fonctiondu dopage :6.1 Introduction :Les mesures d’oscillations quantiques ont révélé que la surface de Fermi consiste en unelarge orbite du côté sur-dopé et en une ou plusieurs petites poches du côté sous-dopé dudiagramme de phase <strong>des</strong> supraconducteurs à haute température critique. La première partiede ce chapitre est consacrée aux phénomènes expérimentaux indiquant que ces mesures sontreprésentatives de l’état normal et non à la phase de vortex. La suite présente l’évolution de lasurface de Fermi avec le dopage déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques, <strong>des</strong> mesuresd’effet Hall et de pouvoir thermoélectrique. Ces deux dernières suggérant la présence deporteurs de type électron du côté sous-dopé. Les différents scénarios susceptibles d’expliquerces mesures ainsi que l’apparente contradiction avec les mesures d’ARPES seront ensuiteprésentés. Pour finir, certaines indications d’un point critique quantique dans le diagrammede phase <strong>des</strong> cuprates seront évoquées.101


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :6.2 État normal ou phase de vortex :6.2.1 Oscillations quantiques dans la phase mixte :Des oscillations quantiques ont été mesurées en <strong>des</strong>sous de B c2 dans la phase mixte dansdifférents composés. L’observation de l’effet de Haas-van Alphen à un champ inférieur à B c2est courante dans les matériaux à fortes corrélations électroniques. La fréquence mesuréene varie pas à la transition (B c2 ) dans les composés supraconducteurs de type II [155], àfermions lourds [156] et organiques [157].Figure 6.1 – Mesure de l’effet de Haas-van Alphen (F = 600 T) dans κ − (BEDT −T T F ) 2 Cu(NCS) 2 [157].La figure 6.1 présente la mesure d’un effet de Haas-van Alphen en fonction du champdans κ − (BEDT − T T F ) 2 Cu(NCS) 2 [157].Figure 6.2 – Logarithme de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations renormalisée par le facteur deréduction thermique dans κ − (BEDT − T T F ) 2 Cu(NCS) 2 [157].La plupart <strong>des</strong> expériences ont montré une réduction de l’amplitude <strong>des</strong> oscillations en<strong>des</strong>sous de B c2 . La figure 6.2 montre un graphique de Dingle obtenu à partir <strong>des</strong> mesuresdans κ − (BEDT − T T F ) 2 Cu(NCS) 2 (fig. 6.1). L’amplitude <strong>des</strong> oscillations est fortementamortie en <strong>des</strong>sous de B c2 à cause <strong>des</strong> fluctuations supraconductrices. Dans le cas102


État normal ou phase de vortex :<strong>des</strong> supraconducteurs de type II, ce facteur de réduction additionnel peut être attribué àl’élargissement <strong>des</strong> niveaux de Landau causé par la présence de vortex [158]. Les mesuresd’oscillations quantiques que nous avons effectuées dans les cuprates n’ont pas permis demettre en évidence un facteur de réduction additionnel. On peut envisager que la faibleamplitude du signal mesuré ne nous a pas permis de le détecter. Notons que ce facteurd’amortissement additionnel n’a pas été détecté par <strong>des</strong> mesures d’effet Shubnikov-de Haasdans un autre composé organique [159]. Ce facteur de réduction additionnel est donc, soitde très faible amplitude, soit inexistant dans les cuprates. La cause pourrait être la symétriedu paramètre d’ordre supraconducteur. En conclusion, les mesures d’oscillations quantiquesdans la phase mixte permettent une mesure directe de la surface de Fermi. Les vortexpeuvent induire une réduction de l’amplitude en fonction du champ mais cela ne change pasla valeur de la fréquence.6.2.2 Mesures représentatives de l’état normal :6.2.2.1 Effet Hall :Dans la gamme de champ magnétique et de température dans laquelle nous travaillons, laphysique du système est-elle dominée par <strong>des</strong> mouvements de vortex ou <strong>des</strong> quasiparticulesreprésentatives de l’état normal ?Figure 6.3 – Effet Hall en fonction de la température pour différents champs dansYBa 2 Cu 3 O 6.5 [98].Le graphique 6.3 représente la constante de Hall dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 en fonction de latempérature pour différents champs magnétiques. A basse température, l’amplitude de laconstante de Hall ne varie plus pour <strong>des</strong> champs supérieurs à 50 T. La contribution <strong>des</strong>vortex semble donc négligeable au <strong>des</strong>sus de 50 T dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 à basse température.103


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Figure 6.4 – Effet Hall en fonction de la température pour différents champs dansYBa 2 Cu 4 O 8 [98].Le graphique 6.4 représente la constante de Hall en fonction de la température pourdifférents champs magnétiques dans YBa 2 Cu 4 O 8 . A basse température, l’amplitude dela constante de Hall ne change plus au <strong>des</strong>sus de 50 T. La contribution <strong>des</strong> vortex dansYBa 2 Cu 4 O 8 peut donc être négligée dans la gamme de champ où les oscillations quantiquesont été détectées. De plus, la constante de Hall est constante à basse température pourdifférents champs. Ce comportement métallique est une forte indication que la contribution<strong>des</strong> vortex au signal est négligeable au <strong>des</strong>sus de 50 T.D’après les mesures d’effet Hall, la contribution <strong>des</strong> vortex semble négligeable à bassetempérature dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 et YBa 2 Cu 4 O 8 au <strong>des</strong>sus de 50 T. Les oscillations de l’aimantationne sont donc pas dues à <strong>des</strong> interférences entre le liquide de vortex et <strong>des</strong> modulationsdu réseau cristallin [160].Le champ magnétique a-t-il une influence sur la température à laquelle la constante deHall change de signe ?Soit T 0 la température de changement de signe de l’effet Hall. Pour YBa 2 Cu 3 O 6.5 (fig.6.3), T 0 ∼ 30 K ne varie plus quand on augmente le champ au <strong>des</strong>sus de 40 T. Le graphique6.5 représente le diagramme de phases champ magnétique-température déduit <strong>des</strong> mesuresd’effet Hall dans YBa 2 Cu 3 O 6.67 dont la température critique est T c = 63 K, ce qui correspondà un dopage de l’ordre de p = 0.12 . Le changement de signe de la constante de Halla lieu au <strong>des</strong>sus de T c . Le champ magnétique n’a aucun effet sur la valeur de T 0 = 70 K. Lechangement de signe ne peut donc pas être attribué à <strong>des</strong> mouvements de vortex de typeflux flow. Le champ n’est donc pas à l’origine du changement de signe dans YBa 2 Cu 3 O 6.67 .Comme nous le verrons dans le paragraphe 6.3.2, ce changement de signe de l’effet Hall peuts’interpréter simplement dans un modèle à deux ban<strong>des</strong> où les mobilités <strong>des</strong> différents typesde porteurs n’ont pas la même dépendance en température.104


État normal ou phase de vortex :Figure 6.5 – Diagramme de phases champ magnétique-température déduit <strong>des</strong> mesures d’effetHall dans YBa 2 Cu 3 O 6.67 [98].6.2.2.2 Effet Nernst dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ :Des mesures d’effet Nernst [161] et d’aimantation [162, 163] dans La 2−x Sr x CuO 4 etLa − Bi2201 montrent <strong>des</strong> anomalies jusqu’à très fort champ. La forte amplitude de l’effetNernst positif à fort champ a été attribuée par les auteurs à la présence d’excitations detype vortex. Cette interprétation est corroborée par la réponse diamagnétique observée par<strong>des</strong> mesures d’aimantation, qui persiste jusqu’à très fort champ dans ces échantillons. Lesauteurs ont interprété ces résultats comme la mise en évidence d’un état supraconduteur sanscohérence de phase qui subsisterait jusqu’à haute température et fort champ magnétique.Ces mesures suggèrent que <strong>des</strong> fluctuations supraconductrices persistent jusqu’à B c2 = 80 Tdans La 2−x Sr x CuO 4 (p = 0.1).Figure 6.6 – Effet Nernst renormalisé par la température en fonction du champ pourdifférentes températures dans YBa 2 Cu 3 O 6,67 [164].105


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ , la situation est différente car la région de fluctuations supraconductricessemble plus étroite que dans La 2−x Sr x CuO 4 et La-Bi2201. Récemment, <strong>des</strong> mesuresd’effet Nernst dans YBa 2 Cu 3 O 6,67 [164] ont été effectuées en champ statique jusqu’à 30 T.Notons que par convention, la contribution <strong>des</strong> vortex au signal d’effet Nernst est toujourspositive [165]. A bas champ, le signal est positif et la contribution <strong>des</strong> vortex domine (voirfig. 6.6). A plus fort champ, l’effet Nernst devient négatif et tend vers une constante. Lacontribution <strong>des</strong> vortex devient donc négligeable au <strong>des</strong>sus de B = 28 T à T = 9 K.Ce signal négatif dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ a été attribué aux quasiparticules dans l’état normal.En effet, on peut estimer cette contribution d’après la relation [165] :νT ≃ π2 k B µ(6.1)3 e T Foù µ est la mobilité et T F est la température de Fermi que l’on peut déduire à partir<strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques. La contribution <strong>des</strong> quasiparticules peut alors êtreestimée à ν T ≃ 7 nV/K2 T et peut expliquer l’amplitude de l’effet Nernst à basse températureet fort champ. La contribution <strong>des</strong> vortex devient donc négligeable dans cette gamme detempérature et de champ.Les mesures d’effet Hall et d’effet Nernst montrent que l’influence <strong>des</strong> vortex est négligeabledans la gamme de températures et de champs magnétiques dans laquelle nous travaillons.Les effets mesurés dans ces composés sont donc dus à <strong>des</strong> quasiparticules représentatives del’état normal plutôt qu’à <strong>des</strong> phénomènes liés à la phase de vortex.106


Evolution de la surface de Fermi avec le dopage :6.3 Evolution de la surface de Fermi avec le dopage :6.3.1 Evolution de la densité de porteur avec le dopage :Des oscillations quantiques, signature d’une surface de Fermi fermée et cohérente, ontété détectées du côté sous-dopé et sur-dopé du diagramme de phases <strong>des</strong> cuprates. Dans lesdeux cas, <strong>des</strong> mesures d’effets Shubnikov-de Haas et de Haas-van Alphen ont été effectuées.Les résultats obtenus grâce à ces deux techniques de mesures sont en très bon accord.1.00Amplitude renomalisé0.750.500.250.00100 1000 10000F(T)Figure 6.7 – Amplitude <strong>des</strong> transformées de Fourier renormalisées pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ (lignenoire) et Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ (ligne rouge). Encart : Aires <strong>des</strong> surfaces de Fermi déduites <strong>des</strong>fréquences à partir de la relation d’Onsager. Rappelons que les oscillations quantiques nepermettent pas de déterminer la localisation <strong>des</strong> poches dans l’espace réciproque.La figure 6.7 montre les transformées de Fourier renormalisées de la partie oscillatoire del’effet de Haas-van Alphen dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ (p = 0.1) et dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ (p = 0.3).La différence de fréquence observée, de 540 T pour les sous-dopés à 18100 T pour les surdopés,est très importante et témoigne d’un changement radical de la surface de Fermiavec le dopage. La relation d’Onsager permet de calculer l’aire de la surface de Fermi àpartir de la fréquence d’oscillation. Mais les mesures d’oscillations quantiques ne donnentpas d’indication sur le nombre de poches identiques, ni sur leur localisation dans l’espace <strong>des</strong>impulsion. Dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ , l’accord entre les mesures de chaleur spécifique électroniqueet les mesures d’oscillations quantiques indique que la surface de Fermi est constituée d’uneseule poche (voir encart fig. 6.7). Du coté sous-dopé, nous pouvons seulement dire que lasurface de Fermi mesurée correspond à une petite poche couvrant 2% de la première zone deBrillouin. La surface de Fermi évolue d’une poche recouvrant 65 % de la première zone deBrillouin à un dopage p = 0.3 à une surface de Fermi comprenant une ou plusieurs pochesrecouvrant environ 2 % de la première zone de Brillouin à un dopage p = 0.1. Le changementde surface de Fermi en fonction du dopage est dramatique.107


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Le théorème de Luttinger permet de déduire, dans le cas d’un liquide de Fermi, la densitéde porteurs de l’aire de la surface de Fermi (voir chap.1.3). Le graphique 6.8 représente ladensité de porteur déduite de différentes mesures ainsi que la chaleur spécifique électroniqueen fonction du dopage dans différents cuprates.Densité de porteurs (par atome de Cu par plan)1.51.00.5n=1+ppR HP critAMRO0.00.00.00 0.05 0.10 0.15 0.20 0.25 0.30 0.35 0.40Dopage pARPESOQ1.51.00.5(Tc )Figure 6.8 – Evolution de la densité de porteur et de la chaleur spécifique électronique enfonction du dopage [144].La densité de porteur du côté sous-dopé (cercles violets) déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillationsquantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ et YBa 2 Cu 4 O 8 a été calculée dans le cas d’uneseule poche. Les carrés noirs correspondent à celle déduites <strong>des</strong> mesures d’effet Hall à bassetempérature dans La-Bi2201 [166]. La chaleur spécifique électronique (cercles rouges) a étémesurée dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ [167]. Les diamants à p = 0.26 et p = 0.28 sont déduits <strong>des</strong>mesures d’AMRO [84] et d’ARPES [80] dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ . La densité de porteur du cotésur-dopé (cercle bleu) est déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ .Dans le cas sur-dopé, la densité de porteur est proportionnelle à 1+p porteurs par atome decuivre. Du côté sous-dopé, l’ouverture du pseudogap entraîne une réduction de la densité deporteur [168, 87]. La densité de porteur est alors plus proche de p que de 1 + p. Il y a deuxinterprétations possibles pour expliquer qu’à p = 0.1, la densité de porteur ne correspondepas à celle prédite par les calculs de structure de ban<strong>des</strong> (1+p porteurs). Soit une partie <strong>des</strong>porteurs reste localisée à cause d’interactions magnétiques dues à la proximité d’un isolantde Mott, soit la surface de Fermi a subi une reconstruction due à la présence d’un ordre encompétition avec la supraconductivité (voir chap. 2). L’évolution de la densité de porteur enfonction du dopage va s’effectuer de différentes manières suivant le scénario envisagé [169].Soit la densité de porteur évolue continûment, soit la présence d’un ordre en compétitionentraîne une reconstruction de la surface de Fermi à un point quantique critique caché par ledôme supraconducteur. D’après la figure 6.8, la transition entre p et 1 + p porteur s’effectueà un dopage critique autour de p = 0.19.108


Evolution de la surface de Fermi avec le dopage :6.3.2 Evidences de porteurs de type électron :Figure 6.9 – Résistance de Hall en fonction de la température pour différents composés[98, 89].Les mesures d’effet Hall dans les sous-dopés [98] et sur-dopés témoignent de comportementstrès différents. La figure 6.9 représente la dépendance en température de la constantede Hall pour Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ [89] et YBa 2 Cu 3 O 6+δ (δ = 0.5 et δ = 0.67) [98]. Dans le cas <strong>des</strong>sur-dopés, le comportement de l’effet Hall [125] est analogue à celui d’un métal avec un seultype de porteur. Le coefficient de Hall est à peu près constant en fonction de la températureet la densité de porteur déduite <strong>des</strong> mesures est en bon accord avec celle déduite <strong>des</strong> mesuresd’oscillations quantiques. Le cas <strong>des</strong> sous-dopés est singulièrement différent car le signe del’effet Hall change avec la température. Une façon simple d’interpréter les données est <strong>des</strong>upposer qu’à haute température, les porteurs de type trou dominent et la constante deHall est positive. A basse température, la mobilité <strong>des</strong> électrons devient plus importanteque celle <strong>des</strong> trous et le signe de l’effet Hall change. La seule façon d’expliquer la présenced’une poche d’électron dans la surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates dopés aux trous est d’invoquerune reconstruction de la surface de Fermi. Cependant, l’ordre responsable de cette transitionreste encore à déterminer.Des mesures d’effet Hall dans La-Bi2201 [166] et dans La 2−x Sr x CuO 4 [170] ne révèlent pasde changement de signe en fonction de la température. La présence de désordre dans cescomposés peut expliquer cette différence de comportement. Dans NbSe 2 , l’effet Hall changede signe à T = 27 K. Cette température marque une transition de phase due à l’apparitiond’une onde de densité de charge. Si on rajoute <strong>des</strong> impuretés alors la constante de Hall nechange plus de signe [171]. La mobilité <strong>des</strong> électrons semble, dans ce composé, plus affectéepar le désordre que celle <strong>des</strong> trous. Un phénomène analogue pourrait affecter les porteursde charge dans La-Bi2201 et La 2−x Sr x CuO 4 .109


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Figure 6.10 – Pouvoir thermoélectrique en fonction du champ dans YBa 2 Cu 3 O 6.67 [164].De récentes mesures de pouvoir thermoélectrique révèlent aussi un changement de signeen fonction de la température dans YBa 2 Cu 3 O 6.67 [164]. Le signe du coefficient thermoélectriquedépend du signe <strong>des</strong> porteurs. Le changement de signe de ce coefficient peut donc êtreexpliqué par la présence de deux types de porteurs dont les mobilités changent avec latempérature. Les mesures du pouvoir thermoélectrique confirment les mesures d’effet Hallet la présence de porteurs de type électron à basse température.6.4 Calculs de structure de ban<strong>des</strong> :Avant de nous lancer dans la discussion <strong>des</strong> différents scénarios permettant d’expliquerla surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates, il est utile de rappeler les résultats obtenus par les calculsde structure de ban<strong>des</strong>.6.4.1 Cas de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ :Figure 6.11 – Surface de Fermi déduite <strong>des</strong> calculs de structures de ban<strong>des</strong> dansTl 2 Ba 2 CuO 6+δ au dopage optimum [85].Des calculs de structure de ban<strong>des</strong> de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ à dopage optimal ont été effectuéspar Singh et al. [85]. Ces calculs utilisent la théorie de la fonctionnelle de la densité avec110


Calculs de structure de ban<strong>des</strong> :l’approximation de la densité locale. Ils révèlent la présence d’une large orbite de trou etd’une petite poche d’électron au niveau de Fermi (voir fig. 6.11). La large orbite de troucorrespondant aux plans CuO 2 est centrée en (π, π), et son aire recouvre 50% de la premièrezone de Brillouin. La petite poche correspond à la bande T lO et est centré en (0, 0). Lafréquence attendue dans le cas de cette poche est beaucoup plus petite que celle de la bandeCuO 2 .Figure 6.12 – Structure de bande de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ d’après [86]. (a) Calculs de structure deban<strong>des</strong> dans le composé dopé optimum, (b) Calculs de structure de ban<strong>des</strong> dans le composédopé à 24%Sahrakorpi et al. [86] ont utilisé une extension de la méthode de calcul pour pouvoir calculerla structure de ban<strong>des</strong> de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ à plus fort dopage. Le graphique 6.12 présentela structure de bande de Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ dans le cas dopé optimum et sur-dopé. Un dopagede 24% décale en énergie la bande T lO au <strong>des</strong>sus du niveau de Fermi (+0.9eV). La surfacede Fermi consiste alors en une large orbite de trou correspondant à 1 + p porteurs et dont lamasse de bande est de m ∗ = 1.2 m e . La surface de Fermi déterminée expérimentalement estaussi constituée d’une grande orbite de trou comprenant 1 + p porteurs d’après les mesuresd’oscillations quantiques [126], d’AMRO [84], d’ARPES[80] et d’effet Hall [89]. De plus, lesporteurs sont de type trou en accord avec les mesures d’effet Hall [125] et d’ARPES [80]. Il ya donc un bon accord entre la surface de Fermi mesurée et celle déterminée par les calculs <strong>des</strong>tructure de bande du côté sur-dopé. La masse effective déduite <strong>des</strong> mesures d’oscillationsquantiques, d’ARPES et de chaleur spécifique est l’ordre de m ∗ ≃ 5 m e . Cette valeur estplus élevée que celle déduite <strong>des</strong> calculs de structure de bande (m ∗ = 1.2 m e ). Ce typede calcul ne prend pas en compte les interactions électron-phonon et électron-électron. Ladifférence entre la masse de bande et la masse effective mesurée suggère la présence de fortescorrélations électroniques dans les supraconducteurs à haute température critique, même àfort dopage.111


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :6.4.2 Cas de YBa 2 Cu 3 O 6+δ et YBa 2 Cu 4 O 8 :Les calculs de structure de ban<strong>des</strong> dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 ont été effectués par différentsgroupes [150, 151, 172] avec différentes techniques. Les résultats obtenus sont en bon accord.Dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 la cellule unité est doublée le long de l’axe ⃗a due à l’alternance dechaînes CuO pleines et vi<strong>des</strong>. La figure 6.13 représente la structure de ban<strong>des</strong> prédite pourYBa 2 Cu 3 O 6.5 [151].Figure 6.13 – Structure de bande de YBa 2 Cu 3 O 6.5 d’après [151].Les calculs de structure de ban<strong>des</strong> prédisent la présence d’une bande 1D provenant <strong>des</strong>chaînes CuO, de deux gran<strong>des</strong> poches cylindriques de trou et d’une petite poche cylindriquede trou centré en (0, π). Les gran<strong>des</strong> poches sont scindées en deux, l’une associée à unebande liante et l’autre à une bande antiliante séparée de ∆E ∼ 200 meV. Ce phénomène,appelé bilayer splitting, est causé par la présence de 2 plans CuO 2 par maille élémentaire.Les mesures d’oscillations quantiques ont révélé l’existence d’une petite poche recouvrant2% de la première zone de Brillouin au niveau de Fermi qui pourrait correspondre à lapetite poche centrée en (0, π). Elle correspond à un recouvrement entre les chaînes CuOvia les oxygènes <strong>des</strong> plans BaO. Pour faire correspondre son aire à celle mesurée, on peutdécaler légèrement le niveau de Fermi. Décaler le niveau de Fermi <strong>des</strong> calculs de ban<strong>des</strong> pourreproduire la structure électronique observée expérimentalement est un procédé courant. Parexemple pour reproduire la surface de Fermi déduite <strong>des</strong> oscillations quantiques, le niveaude Fermi doit être décalé de 40 meV dans SrRu 2 O 4 [173] et de 100 meV dans MgB 2 [174] .112


Calculs de structure de ban<strong>des</strong> :Figure 6.14 – Surface de Fermi tridimensionnelle de YBa 2 Cu 3 O 6.5 pour deux décalagesdifférents de la surface de Fermi [150]. La couleur indique le caractère <strong>des</strong> ban<strong>des</strong>. C pourchaîne et P pour plan.Les surfaces de Fermi déduites <strong>des</strong> calculs de bande dont le niveau de Fermi est décaléde ∆E F = ±20 meV sont montrées sur la figure 6.14. Un décalage de ∆E F ± −20 meVpermet donc d’ajuster la taille de la poche avec celle mesurée. Cependant, le gondolementou la masse effective ne sont pas en accords avec ceux mesurés. Si les oscillations quantiquesmesurées sont dues à cette poche, il reste deux autres fréquences autour de 4000 Tet 3500 T [150] dues aux plans CuO 2 à détecter. La surface de Fermi prédite par les calculsde ban<strong>des</strong> est constituée uniquement de poches de trou ce qui est incompatible avec lesmesures d’effet Hall et de pouvoir thermoélectrique (chap. 6.3.2). De plus, les mesures detransport dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 indiquent que les chaînes ont un comportement isolant à bassetempérature [13]. Il parait donc peut probable que la poche détectée soit liée aux chaines.Il est donc difficile de réconcilier les mesures d’oscillations quantiques et d’effet Hall dansYBa 2 Cu 3 O 6+δ avec les calculs de structures de ban<strong>des</strong>.La situation est sans appel dans YBa 2 Cu 4 O 8 dont la structure de ban<strong>des</strong> [150] estreprésentée sur la figure 6.15. En effet, le décalage pour faire apparaître une poche correspondantà la surface de Fermi mesurée est maintenant de ∆E F = −400 meV. Un teldécalage du niveau de Fermi pour s’accorder aux expériences nous amène à conclure que lescalculs de structure de bande ne sont pas adaptés dans le cas de YBa 2 Cu 4 O 8 .113


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Figure 6.15 – Structure de ban<strong>des</strong> de YBa 2 Cu 4 O 8 [150].Les calculs de bande ne sont donc pas adaptés pour décrire les oscillations quantiqueset le changement de signe de l’effet Hall et du pouvoir thermoélectrique observés dansles supraconducteurs à haute température critique du côté sous-dopé du diagramme dephases. Si les mesures d’oscillations quantiques sondent directement la surface de Fermiprovenant <strong>des</strong> états électroniques <strong>des</strong> plans CuO 2 , alors l’état fondamental d’YBa 2 Cu 4 O 8 etde YBa 2 Cu 3 O 6.5 ne correspond pas à ces calculs. Par contre dans le cas <strong>des</strong> sur-dopés,les calculs de bande sont adaptés pour décrire ces systèmes. Il existe donc une différencefondamentale entre la physique <strong>des</strong> cuprates sous-dopé et sur-dopé.6.5 Prédictions de la topologie de la surface de Fermi <strong>des</strong>cuprates sous-dopés :6.5.1 Isolant de Mott dopé :Lorsque l’on croise T ∗ , les mesures d’ARPES révèlent une apparente <strong>des</strong>truction de lasurface de Fermi dans les régions antinodales. La surface de Fermi est alors constituée de4 arcs situés aux noeuds du paramètre supraconducteur d x 2 −y2. La longueur de ces arcsdiminue à la fois avec la température et le dopage. Des mesures ont été effectuées dansNaCCOC [51], Bi 2 Sr 2−x La x CuO 6+δ [52] et La 2−x Sr x CuO 4 [53]. Dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ , lesmesures d’ARPES sont plus délicates. En effet, le cristal se clive entre les chaînes CuO etles plans BaO ce qui induit une réorganisation <strong>des</strong> charges et une polarisation de la surface.Le dopage de la surface devient sur-dopé et ne correspond donc plus au dopage du volume[175]. Hossain et al. ont proposé de contrôler le dopage de la surface en y adsorbant <strong>des</strong>atomes de potassium [175]. Ils arrivent alors à retrouver une surface de Fermi constituée de4 arcs comme pour les autres cuprates.114


Prédictions de la topologie de la surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates sous-dopés :Une façon de réconcilier une surface de Fermi ouverte constituée de 4 arcs avec les pochesrévélées par les mesures d’oscillations quantiques est de supposer que les mesures d’ARPESne détectent qu’une partie de ces poches [56]. Récemment, <strong>des</strong> mesures d’ARPES auraientmis en évidence <strong>des</strong> poches fermées dans Bi 2 (Sr 2−x La x )CuO 6+δ [55] mais ces mesures restentà confirmer.Plusieurs scénarios peuvent réconcilier les mesures d’arcs en ARPES et la présence de pocheau niveau de Fermi. Des calculs basés sur le modèle de Hubbard par une approche de typeCDMFT [54] ont montré la proximité d’une ligne de zéros dans la fonction de Green quipeut entraîner la suppression du poids spectral d’un côté de la poche. La surface de Fermiserait alors constituée de quatre poches nodales.Un autre scénario a été envisagé par Harrisson [176] qui a pris en comptes <strong>des</strong> fluctuationsantiferromagnétiques lentes. Le composé se comporte comme un verre antiferromagnétiqueavec une faible longueur de corrélation. A basse température et fort champ, la longueur decorrélation est grande et la surface de Fermi est constituée de 4 poches nodales. A plus hautetempérature et sans champ magnétique, la longueur de corrélation diminue et la surface deFermi est alors constituée de 4 arcs de Fermi. Des mesures de neutron auraient mis enévidence la présence d’un ordre antiferromagnétique dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ [177]. Cependantces mesures ne sont pas reproductibles d’un échantillon à un autre et la présence d’un telordre fait débat au sein de la communauté [178].D’autres calculs en champ moyen [179] basés sur le modèle t − t ′ − J essaient de rendrecompte de l’influence du champ magnétique sur la surface de Fermi. Les auteurs ont considéréque le champ magnétique induit un ordre antiferromagnétique d’aimantation m 0 . Les surfacesde Fermi prédites sont représentées sur la figure 6.16.Figure 6.16 –6.16.Evolution de la surface de Fermi dans un quadrant de la zone de BrillouinSoit p le dopage de l’échantillon. Si il n’y a pas d’ordre antiferromagnétique (cas a) l’airede chaque poche est p/4. Si un ordre antiferromagnétique est présent, la première zone deBrillouin est divisée par deux et la taille (p/2) <strong>des</strong> poches est doublée.115


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Les différents scénarios envisagés ici pour réconcilier les mesures d’ARPES et d’oscillationsquantiques, prédisent une surface de Fermi constitué de 4 poches nodales dont l’ARPESne révélerait qu’une partie. Ces scénarios s’inscrivent dans la famille dites d’isolant de Mottoù le pseudogap marque l’apparition d’un état précurseur de la supraconductivité et où lasurface de Fermi évoluerait de 4 poches nodales à une seul grande poche continûment avecle dopage. La figure 6.17 compare la surface de Fermi déduites <strong>des</strong> mesures d’oscillationsquantiques à celle déduite <strong>des</strong> mesures d’ARPES, en supposant qu’elles ne détectent qu’uncôté de la poche.Figure 6.17 – Reconstitution de la surface de Fermi dans NaCCOC [51] à p = 0.1. Le cercleblanc représente la surface de fermi à T > T ∗ . La surface <strong>des</strong> poches rouges correspond auxmesures d’oscillations quantiques.Si on applique le théorème de Luttinger dans le cas de quatres poches de trou, ontrouve p = 0.15 pour YBa 2 Cu 3 O 6.5 (p = 0.1) et p = 0.19 pour YBa 2 Cu 4 O 8 (p ∼ 0.14). Ensupposant que la densité de porteur est égale au dopage p du côté sous-dopé du diagrammede phases, l’erreur sur le dopage est de 50 %. Si on considére que le champ magnétique induitun ordre antiferromagnétique [179], le dopage déduit <strong>des</strong> mesures d’oscillations quantiquescorrespond à p = 0.075 pour YBa 2 Cu 3 O 6+δ soit 25 % d’erreur. Un scénario de type isolantde Mott dopé ne prévoit pas la présence de porteurs de type électron mis en évidence par lesmesures d’effet Hall et de pouvoir thermoélectrique. D’autre part, une théorie de type isolantde Mott dopé prévoit que le dôme supraconduteur et le pseudogap sont confondus du côtésur-dopé, c’est à dire que le dopage pour lequel T ∗ = 0 correspond au dopage pour lequelT c = 0 (cf chap. 2.4). Les mesures d’oscillations quantiques dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ sur-dopémontrent que la grande orbite est rétablie à un dopage situé dans le dôme supraconducteur.Le dôme supraconduteur et le pseudogap ne sont donc pas confondus à fort dopage et lepseudogap disparaît quelque part sous le dôme supraconducteur.116


Prédictions de la topologie de la surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates sous-dopés :6.5.2 Ordre en compétition :La présence de petites poches de type électron du côté sous-dopé ne peut pas êtreexpliquée ni dans le cadre <strong>des</strong> calculs de bande, ni par un scénario de type ordre précurseur.En fait, le seul moyen de faire apparaître <strong>des</strong> poches d’électrons au niveau de Fermi dansYBa 2 Cu 3 O 6.5 est d’invoquer une reconstruction de la surface de Fermi [180]. La surfacede Fermi évoluerait alors d’une large poche de trou à haute température en une surfacede Fermi constituée de petites poches de trous et d’électrons à basse température. Cettereconstruction serait causée par l’apparition d’une phase ordonnée en <strong>des</strong>sous de T ∗ (voirchap. 2.5) dont le paramètre d’ordre reste encore à déterminer. Nous allons passer en revueles différents scénarios de type ordre en compétition qui pourrait expliquer la formation deces poches.6.5.2.1 Ordre commensuré :Figure 6.18 – a) Onde de densité de spin à Q = (π, π). b) Surface de Fermi reconstruitesuivant le vecteur Q = (π, π). Carré vert poche d’électron, ellipsoïde orange poche de trou[144].Nous allons commencer par le scénario le plus simple. Imaginons que le matériau présenteune onde de densité de spin caractérisée par un vecteur d’onde antiferromagnétique commensuréQ AF = (π, π) (fig. 6.18). La présence de cet ordre entraîne un changement de latopologie de la surface de Fermi. Après reconstruction, la nouvelle zone de Brillouin contientalors 2 poches de trou et une poche d’électron (fig. 6.18). En supposant que le théorèmede Luttinger est respecté, on peut écrire p = 0.1 = n trou − nélectron pour YBa 2 Cu 3 O 6.5 .Connaissant l’aire de la poche d’électron (F = 550 T), on en déduit celle de la poche detrou (F ≃ 980 T). Dans YBa 2 Cu 4 O 8 la fréquence correspondant à la poche d’électron estF = 660 T et celle de la poche de trou serait F ≃ 1300 T. A ce jour, ce scénario n’a pas étéconfirmé car la seconde fréquence n’a pas été mesurée de manière probante.117


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Un autre scénario envisagé suppose que le pseudogap marquerait l’apparition d’uneonde de densité de symétrie d [96]. Cet ordre caché repose sur <strong>des</strong> courants de plaquettedonnant lieu à un antiferromagnétisme orbital (fig. 6.19). Dans le cas d’une onde de densitéd commensuré, la surface de Fermi a été calculée par Chakravarty et al. [180]. D’autrescalculs prenant en compte le bilayer splitting ont ensuite été effectués (fig. 6.19) [181]. Lescontraintes du calcul sont l’aire de la poche correspondant à la fréquence de 550 T et lerespect du théorème de Luttinger.Figure 6.19 – a) Onde de densité d [96]. b) Surface de Fermi reconstruite [181]. Carré vertpoche d’électron, ellipsoïde orange poche de trou.La figure 6.19 montre la surface de Fermi reconstruite dans le cas d’un vecteur d’ordrecommensuré. Le bilayer splitting affecte plus les poches d’électrons que de trous. Les fréquencessont de F=944 T et F=967 T pour les trous (noeuds) et de F= 570 T et F= 450 T pourles électrons (antinoeuds). Les valeurs <strong>des</strong> fréquences dues au bilayer splitting sont compatiblesavec celles déduites <strong>des</strong> mesures de couple magnétique. Cependant, les courantsde plaquettes induisent <strong>des</strong> moments magnétiques de l’ordre de 0.05 µ B qui n’ont pas étédétectés de façon probante par les mesures de neutrons.Des calculs ont aussi été effectués en prenant en compte l’ordre dans les chaînes [182]. La surfacede Fermi est alors constitué de 3 poches de fréquence F α = 530T (électron), F β = 1580T(trou) et F γ = 410T (trou) avec la possibilité de rupture magnétique entre les différentespoches.6.5.2.2 Ordre incommensuré :De récentes mesures d’oscillations quantiques dans YBa 2 Cu 3 O 6.5 ont détecté une fréquenceadditionnelle autour de F= 1600 T [148]. Les auteurs ont suggéré une reconstruction avec unvecteur d’onde incommensuré Q = (π(1 − 2δ), π) due à une onde de densité de spin spiraleou hélicoïdale. (1 − 2δ) représente le déplacement de la diffusion magnétique par rapport auvecteur d’onde antiferromagnétique. La reconstruction a été effectuée dans le cas incommensuré[181] avec comme contrainte supplémentaire la présence d’une poche correspondant àla fréquence à F= 1600 T (fig. 6.20).118


Prédictions de la topologie de la surface de Fermi <strong>des</strong> cuprates sous-dopés :Figure 6.20 – Surface de Fermi reconstruite [181] dans un cas incommensuré. Carré vertpoche d’électron, ellipsoïde orange poche de trou.Les fréquences prédites sont de F= 1661 T et F= 215 T pour les trous et F= 535 T etF= 442 T pour les électrons. Il manque donc une fréquence de trou autour de F = 215 Tqui est difficilement détectable compte tenu de la taille de la fenêtre de champ magnétiquedans laquelle <strong>des</strong> oscillations quantiques apparaissent. De surcroît, la seconde fréquence detrous F= 1660 T n’a pas été confirmée par nos récentes mesures de couple magnétique hauterésolution (chap. 5.5).6.5.2.3 Ordre de stripe :Une réduction importante et parfois un changement de signe de l’effet Hall et du pouvoirthermoélectrique en fonction de la température se produit dans Eu-LSCO, Nd-LSCO etLBCO autour d’un dopage de 1/8 [98, 164, 183]. Dans ces matériaux la chute du coefficientde Hall est causée par l’apparition d’un ordre de stripe [58, 184, 183] (voir chap. 2.5). Milliset Norman [185] ont calculé la surface de Fermi dans le cas d’un ordre de stripes autour dep = 1 8 en faisant varier le potentiel de spin V s et de charge V c .Figure 6.21 – Surface de Fermi calculée d’après [185]. Les poches d’électrons sont en bleu,les poches de trous sont en rose au centre, les feuillets quasi-1D sont en rouge [183].119


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :La surface de Fermi en accord avec les mesures d’oscillations quantiques est obtenuepour V s = 0.2 eV et V c = 0.15 eV et est représentée sur la figure 6.21. La présence dechaînes quasi-1D exclue l’utilisation du théorème de Luttinger. La présence d’un ordre <strong>des</strong>tripe induit une reconstruction qui fait apparaître <strong>des</strong> petites poches de trous et d’électronset pourrait donc expliquer les mesures d’oscillations quantiques et d’effet Hall. Cependant,les mesures de neutron et de rayon X diffusants n’ont détecté aucun ordre de stripes dansYBa 2 Cu 3 O 6+δ à ce jour.6.5.3 Phase induite par le champ magnétique :La surface de Fermi mise en évidence par les oscillations quantiques du côté sous-dopéest-elle la signature de l’état fondamental du système ou d’un ordre induit par le champmagnétique ?Il est possible que du côté sous dopé, deux états fondamentaux soient proches en énergie.L’application d’une perturbation externe, comme le champ magnétique par exemple, peutfavoriser un état fondamental au détriment de l’autre. On peut alors parler d’ordre induitou stabilisé par le champ.Plusieurs étu<strong>des</strong> se sont intéressées à la modification de la dynamique de spin dans La 2−x Sr x CuO 4 [186]lorsque l’on applique un champ magnétique perpendiculairement au plan CuO2. Pour lescomposés sous dopés (de 0.1 < x < 0.12), un signal quasi-élastique incommensuré est présentà champ nul. L’application d’un champ magnétique de 15 T a pour effet d’augmenter l’intensitéde cette réponse statique incommensurée. A plus fort dopage (x = 0.14), la dynamiquede spin à champ nul change, avec l’apparition d’un gap de spin dans l’état supraconducteur.L’application d’un champ magnétique le long de l’axe c induit alors une réponse statiqueincommensurée. La stabilisation d’une onde de densité de spin par le champ magnétiquea été invoquée pour interpréter ces résultats. Dans le cas de La 2−x Sr x CuO 4 , cette ondede spin serait associée à la stabilisation d’un ordre de stripe, naturellement présent autourde la composition de p = 1/8. Pour les dopages inférieurs à 1/8, deux états co-existeraientà champ nul : une onde de densité de spin et un état supraconducteur. L’application duchamp magnétique renforce l’onde de densité de spin au détriment de la phase supraconductrice.Pour <strong>des</strong> dopages supérieurs à 1/8, l’état fondamental serait l’état supraconducteur,et l’application d’un champ magnétique viendrait induire une onde de densité de spin quicoexisterait avec la supraconductivité. Cependant, ces expériences ont été effectuées à <strong>des</strong>champs magnétiques bien inférieurs au champ nécessaire pour détruire la supraconductivitéet restaurer l’état normal.Il existe peu d’étu<strong>des</strong> concernant la modification de la dynamique de spin induite par lechamp magnétique dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ . Une étude récente de Haug et al. a été menée dans<strong>des</strong> monocristaux de YBa 2 Cu 3 O 6.45 (T c = 35 K) [187]. Une réponse quasi-statique incommensuréeest présente à champ nul au vecteur d’onde (π, π ± δ). L’application d’un champmagnétique selon l’axe c a pour effet de renforcer cette réponse élastique, au détriment defluctuations basses énergies. Cet effet est comparable aux résultats reportés pour La 2−x Sr x CuO 4 àun dopage similaire. Cependant, une étude sur les effets du champ magnétique sur la dynamiquede spin pour YBa 2 Cu 3 O 6.5 n’a pas été effectuée à ce jour. A champ nul, la dynamiquede spin change radicalement pour δ ≥ 0.5, avec notamment l’apparition d’un gap de spinpouvant atteindre ∆ S ≃ 30 meV pour les composés proches du dopage optimal. Il est doncdifficile de conclure sur l’effet d’un fort champ dans ces composés.Des mesures de RMN dans YBa 2 Cu 4 O 8 montrent que le pseudogap n’est pas affecté par le120


Indications d’un point critique quantique :champ magnétique jusqu’a 28 T [188]. L’échantillon que nous avons mesuré présente un H irrde l’ordre de 40 T et aucune anomalie n’est visible au <strong>des</strong>sus de ce champ. Si le champ induitune reconstruction de la surface de Fermi dans YBa 2 Cu 4 O 8 cette reconstruction aurait donclieu entre 28 T et 40 T et serait masquée par la phase de vortex.Dans Tl 2 Ba 2 CuO 6+δ , les mesures d’oscillations quantiques à fort champ sont compatiblesavec les mesures de chaleur spécifique et d’ARPES effectuées sans champ. Dans le cas <strong>des</strong>cuprates très sur-dopé le champ magnétique n’a donc pas d’influence sur l’état fondamental.Il apparaît donc probable que le champ magnétique ait pour rôle de révéler les propriétésphysiques de l’état normal <strong>des</strong> cuprates et non d’induire un ordre.6.6 Indications d’un point critique quantique :Dans cette section, nous allons brièvement passer en revue les différentes son<strong>des</strong> en faveurde la présence d’un point quantique critique dans le diagramme de phases <strong>des</strong> cuprates.Un point quantique critique marque la transition à température nulle entre un état ordonnéet un liquide de Fermi. Au point quantique critique, le système est marqué par de très fortesfluctuations, qui entraînent par exemple une variation linéaire de la résistivité en fonctionde la température et une divergence de la masse effective <strong>des</strong> quasiparticules à ce point.C’est le cas par exemple dans certains systèmes à fermions lourds [189]. Dans les cupratesdopés aux trous, la situation est plus compliquée.Récemment, une série de mesures a mis en évidence la présence d’un ordre magnétiquedans les cuprates sous-dopés. Des mesures de neutrons [45] dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ et dansHgBa 2 CuO 4+d [46] ont mis en évidence la présence d’un ordre magnétique à un vecteurd’onde Q= (0, 0). Le graphique 6.22 montre la température d’apparition de l’ordre en fonctiondu dopage.Figure 6.22 – a) Diagramme de phases universel d’après les mesures de neutron [46]. b)Diagramme de phases d’après les mesures d’effet Kerr [48].121


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Des mesures d’effet Kerr mettent en évidence une brisure de symétrie par renversementdu temps, témoignant de l’apparition d’un ordre à longue portée, dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ [48].L’effet suit T ∗ en fonction du dopage et a même pu être détecté jusque dans la phase supraconductrice(voir fig. 6.22b)). Cette mesure supporte l’idée que T ∗ se prolonge jusqu’à unpoint quantique critique à température nulle. Le pseudogap marquerait alors une transitionvers un ordre peut être magnétique et le point quantique critique serait caché par le dôme supraconducteur.Des mesures de susceptibilité magnétique [190] dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ témoignentaussi de l’apparition d’un ordre magnétique à longue porté dans YBa 2 Cu 3 O 6+δ sous-dopédont la dépendance en fonction du dopage suit T ∗ . Ces mesures suggèrent la présence d’unpoint quantique critique entre p = 0.14 et p = 0.25.Cependant, ces mesures sont controversées au vu de la faible amplitude du signal détecté.De plus, l’ordre est associé à un vecteur d’onde Q= (0, 0) ne permet pas d’expliquer lesmesures d’oscillations quantiques et d’effet Hall car il n’induit pas de reconstruction de lasurface de Fermi.Des mesures de magnétorésistance dans La 2−x Sr x CuO 4 [88] ont permis d’extraire une composantelinéaire et quadratique de la résitivité en fonction de la température : ρ = ρ 0 +α 1 T + α 2 T 2 . L’évolution <strong>des</strong> termes α 1 et α 2 en fonction du dopage est représentée surla figure 6.23.En supposant que la contribution maximum du terme linéaire correspond audopage où les fluctuations sont les plus fortes, le dopage critique serait de p c = 0.19.Figure 6.23 – Composante linéaire (α 1 ) et quadratique (α 2 ) de la résistivité dansLa 2−x Sr x CuO 4 en fonction du dopage d’après [88].Ce dopage critique est similaire à celui déduit <strong>des</strong> mesures de neutron et d’effet Kerr. Maisces mesures de transport ne sont qu’un moyen indirect de mettre en évidence la criticalitépour les cuprates dopés aux trous. Des mesures d’oscillations quantiques de part et d’autredu point critique montrant un changement brutal de la surface de Fermi seraient une preuveindiscutable de la criticalité, comme c’est le cas pour les cuprates dopés aux électrons (voirchap. 6.7).A moins que la criticalité quantique dans ces composés soit plus furtive, comme la suggérérécemment Sachdev [191] qui a proposé un diagramme de phases unifié (fig. 6.24).Dans ce modèle, à haute température, les propriétés électroniques non liquide de Fermi122


Analogie avec les cuprates dopés aux électrons :Figure 6.24 – Diagramme de phases.(comme la dépendance linéaire de la résistivité autour du dopage optimum) sont influencéespar un point quantique critique x M situé autour du dopage optimum, qui marque une transitionavec une onde de densité de spin (SDW). En croisant T c , l’une <strong>des</strong> conséquences dela supraconductivité est de décaler ce point critique vers le régime sousdopé en x = x c .En appliquant un champ magnétique à basse température, la phase supraconductrice estdétruite et laisse place à la phase onde de densité de spin du coté sous-dopés du diagrammede phase. Cette théorie permet de réconcilier <strong>des</strong> mesures de neutron [192] et d’oscillationsquantiques dans les cuprates dopés aux trous.Dans les cuprates dopés aux électrons, le dopage critique déterminé par les mesures d’oscillationsquantiques [193] est x m = 0.165. Les mesures de neutron ne mettent en évidencel’existence d’un ordre magnétique à longue porté qu’à un dopage x < x s = 0.135. Le modèleprésenté par Sachdev apporte aussi une explication à ce phénomène.6.7 Analogie avec les cuprates dopés aux électrons :Très récemment, <strong>des</strong> oscillations quantiques ont été détectées par le groupe de M. Kartsovnikdans Nd 2−x Ce x CuO 4 [193], un cuprate dopé aux électrons. Les mesures ont étéeffectuées au HLD à Dresde. Le diagramme de phases schématique de ce composé estreprésenté sur la figure 6.25 a).Les trois flèches indiquent les trois dopages auxquels <strong>des</strong>oscillations quantiques ont été détectées.123


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Figure 6.25 – a) diagramme de phases en fonction de la température et du dopage deNd 2−x Ce x CuO 4 et b) transformé de Fourier pour trois différents dopages [193].Les mesures témoignent d’un changement de fréquence important sur une gamme dedopage étroite. La fréquence <strong>des</strong> oscillations quantiques change peu entre x = 0.15 (F=290 ± 10 T ) et x = 0.16 (F= 280 ± 15 T ). Cette fréquence correspond à une poche recouvrant1.1% de la première zone de Brillouin. Pour x = 0.17 la fréquence change radicalement(F= 10700 ± 400 T). Elle correspond à une surface de Fermi constituée d’une large orbiterecouvrant 40% de la première zone de Brillouin.Le diagramme de phases <strong>des</strong> cuprates dopés aux électrons est similaire à celui <strong>des</strong> cupratesdopés aux trous. A dopage nul, le composé est un isolant de Mott puis, quand augmentele dopage, un dôme supraconducteur apparaît et à beaucoup plus fort dopage, le composése comporte comme un liquide de Fermi. Une différence importante est que l’ordre antiferromagnétiquesemble persister jusqu’à plus fort dopage (x = 0.16) [194, 195] que dans lescuprates dopés aux trous. De récentes mesures de neutrons inélastiques remettent en causecette interprétation. En effet, elles révèlent la disparition de l’ordre antiferromagnétiqueautour de x = 0.135 et la présence de fluctuations de spin 2D antiferromagnétiques quisubsistent à plus fort dopage [196].Figure 6.26 – Coefficient de Hall en fonction de la température dans P r 2−x Ce x CuO 4−δ [197].124


Analogie avec les cuprates dopés aux électrons :Les mesures d’effet Hall montrent un changement de signe autour de x = 0.16 (fig. 6.26)dans P r 2−x Ce x CuO 4−δ [197]. L’effet Hall passe de négatif à positif quand on augmente ledopage. Cette mesure met en évidence la présence de poches de trous et d’électrons avec<strong>des</strong> mobilités différentes dans ces composés.Figure 6.27 – Surface de Fermi prédite pour un dopage de x = 0.15 en fonction de ∆ SDW[198]. Trait pointillé ∆ SDW = 0 eV, trait fin ∆ SDW = 0.2 eV, trait épais ∆ SDW = 0.4 eV.Un scénario basé sur une reconstruction de la surface de Fermi due à une onde densitéde spin au vecteur d’onde antiferromagnétique est susceptible d’expliquer l’évolutionde la surface de Fermi en fonction du dopage [198, 199]. La surface de Fermi calculée enchamp moyen pour différentes amplitu<strong>des</strong> du gap de l’onde de densité de spin (∆ SDW ) estreprésentée sur la figure 6.27. A dopage faible, ∆ SDW est grand et la surface de Fermi estconstituée d’une poche d’électron centrée en M(π, 0). Proche du dopage optimal, ∆ SDW adiminué et la surface de Fermi est constituée de poches de trous et d’électrons. Au <strong>des</strong>susdu dopage critique, l’onde de densité de spin antiferromagnétique n’existe plus (∆ SDW =0)et la surface de Fermi est constituée d’une large poche de trou centrée en X(π, π).Figure 6.28 – Mesures d’ARPES dans Nd 2−x Ce x CuO 4 à différents dopages [199].125


6. Evolution de la surface de Fermi en fonction du dopage :Le modèle de Lin et Millis reproduit avec un bon accord les mesures d’ARPES (voirfig. 6.28) [199] qui montrent un changement de la topologie de la surface de Fermi quandon augmente le dopage. La fréquence autour de 280 T mesurée à x = 0.15 et x = 0.16correspondrait à la petite poche de trou. Mais comme pour les cuprates dopés aux trous, ilreste à détecter une seconde fréquence correspondant à la poche d’électron.L’évolution de la surface de Fermi en fonction du dopage est similaire à celle observéedans les cuprates dopés aux trous. En effet, la surface de Fermi évolue radicalement avecle dopage et les mesures d’effet Hall du côté sous-dopé mettent en évidence la présencede plusieurs types de porteurs. Ces faits expérimentaux suggèrent la présence d’un pointcritique quantique autour de x = 0.16, mais la présence d’un ordre à longue portée dans lescuprates dopés aux électrons fait toujours débat dans la communauté.126


Chapitre 7ConclusionNos mesures ont révélé pour la première fois la présence d’oscillations quantiques del’aimantation <strong>des</strong> deux côtés du diagramme de phase <strong>des</strong> cuprates. Les mesures du côtésur-dopé montrent l’existence d’une large surface de Fermi constituée d’une large orbite detrou couvrant 65 % de la première zone de Brillouin en très bon accord avec les autresson<strong>des</strong> expérimentales (AMRO, ARPES, chaleur spécifique et effet Hall) et les calculs <strong>des</strong>tructure de bande. Ces mesures suggèrent qu’il n’y a pas de coexistence entre le pseudogapet le dôme supraconducteur du côté très sur-dopé du diagramme de phase.Nous avons aussi mesuré <strong>des</strong> oscillations quantiques du côté sous-dopé. Ces mesures ontmis en évidence une surface de Fermi contenant une ou plusieurs petites poches couvrant2 % de la première zone de Brillouin. La présence d’un battement sur ces oscillations a étéinterpréter comme une restauration de la cohérence selon l’axe c à très basse températuredu côté sous-dopé du diagramme de phase. Ces résultats expérimentaux vont dans le sensd’un état fondamental de type liquide de Fermi du côté sous-dopé. De plus, <strong>des</strong> mesuresd’effet Hall dans le même composé suggèrent la présence de poche d’électrons et de trous.La surface de Fermi évoluerait donc d’une large poche de trou du côté sur-dopé à unesurface de Fermi contenant une ou plusieurs petites poches d’électrons. Seule une reconstructionde la surface de Fermi due à la présence d’un ordre peut expliquer ce changementdrastique. Le pseudogap marquerait alors l’apparition d’une phase ordonnée en compétitionavec la supraconductivité. Cependant, aucune sonde expérimentale n’a révélé la présenced’un ordre pouvant induire une telle reconstruction de la surface de Fermi du côté sousdopé.Pour pouvoir conclure sur la nature du pseudogap, de plus amples investigations sontdonc nécessaires. La mesure d’une fréquence additionnelle permettrait de trancher entre lesdifférents scénarios de reconstruction et donnerait ainsi <strong>des</strong> informations cruciales sur lanature de cet ordre. Une étude détaillée de l’évolution de la surface de Fermi en fonction dudopage, déduit de mesures d’oscillations quantiques, permettrait de mettre en évidence laprésence d’un point quantique critique autour duquel un changement drastique de la surfacede Fermi interviendrait dans une petite gamme de dopage.127


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