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nSala John LanerSBD/FSP/USP


OEUVRESCOMPLÈTESDE BUFFON.COMPLÉMENT.TOME XII.


HISTOIREDES PROGRÈSDES SCIENCES NATURELLES,DEPUIS I789 JUSQU'A CE JOUR ,PARM. LE BARON G. CUV1ER,CONSEILLER D'L'TAT,SECRETAIRE PERPETUEL DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES,MEMBRE DE L'ACADEMIE FRANÇOISE,PROFESSEUR AU JARDIN DU ROI, ETC.TOME SECOND.PARIS.JI3SAIRÏE EïffCYCSiOSÉBÏSgiO'E DE SOSET,EUE HAUTEFEU1LLE , K°. 10 BIS;POURRAI FRÈRES, RUE DES PEXUS-APOCSTIKS, S 0 51534.


•vv*vv%\^ovv*'i'»^VWvt«a.vi^v\**vv*vv\vv\vvvvvi,vv\\a^vv*vvi.v»^AVERTISSEMENTDES ÉDITEURS.Le premier volume de cette Histoire des progrèsdes sciences naturelles, que nous avons mis au jourdepuis long-temps, comprend la période de 1789à 1808. La seconde période, qui embrasse les années1809 à 1827, étant beaucoup plus riche defaits et de découvertes nouvelles, formera trois volumesqui compléteront l'histoire des sciences naturellesjusqu'à nos jours. Ce sont les rapports queM. le baron Guvier est chargé de faire chaque annéeà l'Académie royale des Sciences, rapports quioffrent le tableau de toutes les découvertes nouvellesdont les sciences s'enrichissent, l'analyse detous les mémoires et de tous les ouvrages présentésà cette illustre compagnie, qui formeront l'histoirede cette seconde période. Ces rapports navoientpoint encore été publiés ni réunis en un corpsd'ouvrage. Ils font suite au tableau historique desprogrès des sciences naturelles fait par ordre duGouvernement par l'illustre secrétaire de l'Académiedes Sciences, et qui compose le premier volumeBUFFON. COMPLÉM. T. II.n


VIAVERTISSEMENT DES ÉDITEURS.de cet ouvrage. Le seul changement que nous noussommes permis d'y faire consiste à présenter chaquebranche des sciences naturelles séparément et desuite, pendant les dix-huit années qui formentcette seconde période, mais en conservant néanmoinsla division par année, de manière que l'onpuisse suivre graduellement les progrès de chacuned'elles, et assister en quelque sorte aux révolutionssuccessives qui en ont changé la face.Ce second volume contient YHistoire des progrèsde la Chimie, de la Physique, de la Météorologie, dela Minéralogie, et de la Géologie, depuis l'année 1809jusqu'à 1827.


•"*•''*'». •^w-i^w-\^wv"».-*-*. \ -v-v »HISTOIREDES PROGRÈSDES SCIENCES NATURELLES.SECONDE PÉRIODE.1809 à 1827.Toutes les sciences qui sont fondées sur des faitsont l'inappréciable avantage que chaque expérienceet chaque observation peuvent contribuer à leursprogrès. Il n'est véritablement point de découvertesinutiles pour les sciences physiques ; quelles quesoient les conséquences auxquelles on arrive, quelsque soient les résultats qu'on obtienne, dès qu'ilssont nouveaux,ils ontleurimportance: chaque faita une place déterminée qui ne peut être remplieque par lui seul, et l'on doit considérer l'édifice dessciences comme celui de la nature : tout y est infini,tout y est nécessaire. On peut dire plus : c'estquelquefois sans nuire essentiellement aux progrèsde la vérité que les hommes qui se livrent à sa recherches'égarent dans de fausses routes. On a vules découvertes les plus utiles naître des plus gravesBUFFON. COMPLÉM. T. II.'


2 SCIENCES PHYSIQUES.erreurs. Nous en trouvons des preuves récentes dansles travaux qui ont été faits pour combattre la chimiemoderne, et pour soutenir l'ancienne théoriede la combustion. La complication des phénomènesde cette science sera même cause que les preuves dece genre se multiplieront souvent encore: les faitsne se présentent pas toujours avec les mêmes caractères,on les étudie sous d'autres rapports, ils sontvus avec des yeux différents, et les résultats auxquelsils conduisent ne sont point semblables. C'estce que nous apercevons aujourd'hui d'une manièrebien évidente dans les discussions qui se sontélevées entre M. Davy, notre confrère Gay-Lussac,et M. Thénard.


PHYSIQUE,CHIMIE, ET MÉTÉOROLOGIE.ANNÉE 1809.Nous avons rendu compte, dans nos rapportsprécédents, de la découverte de M. Davy sur leschangements que la potasse et la soude éprouventpar l'action de la pile de Volta, et des procédés parlesquels MM. Gay-Lussac et Thénard opéroient ceschangements sans le secours de cet instrument.M. Davy croyoit que, dans ces expériences, lapotasse et la soude éprouvoient une désoxigénation,et qu'il en résultoit un véritable métal qui sedistinguoit sur-tout des autres substances de cegenre par une extrême affinité pour l'oxigène. Ilnommoit ces nouveaux métaux l'un potassium, etl'autre sodium. MM. Gay-Lussac et Thénard établissoientau contraire par plusieurs expériences ,mais sur-tout par les produits qu'on obtient en analysantla combinaison du potassium avec l'ammoniaque, que les changements de la potasse et de lasoude étoient dus à une combinaison particulièrede ces alcalis avec l'hydrogène. M. Davy, ayant ré-


4 PHYSIQUE, CHIMIE,pété les expériences sur lesquelles cette opinion estfondée, n'a point eu des résultats conformes à ceuxqui avoient été annoncés par les chimistes françois;ce qui a donné lieu à des observations de MM. Gay-Lussac et Thénard, dans lesquelles ils montrentque les différences qui se trouvent entre les résultatsdes expériences de M. Davy et les résultats desleurs tiennent à des causes qui ne peuvent pointinfluer sur les conséquences auxquelles ils sont arrivés.Au reste, dans l'une et dans l'autre hypothèse,il n'en résultoit pas moins pour la chimie, dela découverte de M. Davy, un réactif extrêmementpuissant, et qui devoit produire sur les autres corpsdes effets jusqu'alors ignorés.Cette nouvelle découverte donnoit donc lieu àdes expériences très différentes, mais qui conduisoientau même but; les unes avoient pour objet dereconnoître l'action de la pile sur les autres alcalis,sur les terres, et généralement sur toutes les substancessimples non métalliques, et qu'on pourroitsoupçonner être des oxides comme la potasse et lasoude. Le but des autres étoit de décomposer, aumoyen des nouveaux métaux, les substances oxigénéesou supposées telles, et sur-tout les acidesboracique, fluorique, et muriatique.Nous avons dit l'année dernière que MM. Gay-Lussac et Thénard étoient parvenus à opérer la dé-


ET MÉTÉOROLOGIE. 5composition du premier de ces acides, et à en reconnoîtrele radical. Depuis, leurs recherches se sontportées sur l'acide fluorique.Ils ont commencé par étudier les propriétés physiqueset chimiques de cet acide plus exactementqu'on ne l'avoit fait avant eux. L'affinité de l'eaupour ce gaz est extrême ; dès qu'on le mêle à d'autresquicontiennentquelques portions de ce liquide,il se forme de nombreuses vapeurs: cependant cegaz ne peut communiquer à l'eau sa force expansive;il ne peut se dissoudre ni en gazéifier la pluspetite quantité, et dans son état aériforme il estabsolument sec; mais il est impossible d'obtenir cetacide pur ; il retient toujours quelques portions descorps avec lesquels il a été en contact; et dans lestravaux que MM. Gay-Lussac et Thénard ont entreprissur cet acide, au moyen du potassium, ils sesont servis de préférence du gaz fluorique siliceux,comme ne contenant aucun corps étranger susceptiblede se décomposer et d'obscurcir les résultatsdes expériences. Dans l'action réciproque de cesdeux matières il y a une grande absorption d'acidefluorique, très peu de gaz hydrogène dégagé, ettransformation du métal en une matière solidedont la couleur est brun rougeâtre.MM. Gay-Lussac et Thénard regardent cettecombinaison nouvelle comme un composé de po-


6 PHYSIQUE, CHIMIE,tasse, de silice, et du radical de l'acide fluorique;mais ils n'ont pu isoler cette dernière substance.«Il paroît, disent nos auteurs (d'après beaucoupd'expériences que nous ne pouvons rapporter ici),que quand ce radical n'est combiné qu'avec la potasse,il peut décomposer l'eau comme les phosphures;mais que quand il est combiné avec lapotasse eit la silice, il ne la décompose pas, sansdoute par la raison que cette combinaison triple estinsoluble. >M. Davy a aussi fait des tentatives pour mettre ànu le radical fluorique, et il a obtenu des résultatsanalogues à ceux que nous venons de rapporter; ilattribue l'hydrogène produit dans la combinaisondu potassium avec le gaz à l'eau qu'il croyoit êtrecontenue dans cet acide, et que le métal avoit décomposé.L'acide muriatique a aussi été pour M. Davy, etpour MM. Gay-Lussac et Thénard, le sujet d'observationsnombreuses et intéressantes. Les uns et lesautres ont fait des essais infructueux pour décomposercet acide, et pour isoler le radical qu'on croiten former un des éléments. Mais MM. Gay-Lussacet Thénard ont reconnu que l'acide muriatique nepouvoit exister sans eau à l'état de gaz; qu'alors ilen contenoit le quart de son poids, et que l'eau seuleavoit la faculté de l'enlever à ses combinaisons se-


ET MÉTÉOROLOGIE. 7ches. Il est à remarquer que, dans toutes les expériencesfaites avec les métaux, l'eau, en se décomposant,a toujours produit une quantité d'oxideégale à celle dont avoit besoin l'acide pour se neutraliser;de sorte que, pour tout résultat, on obtenoitde l'hydrogène et un sel neutre. Les bornes dece rapport ne nous permettent pas de faire connoîtretoutes les expériences qui sont conten ues dans le travailde MM. Gay-Lussac et Thénard ; mais nous nedevons pas passer sous silence l'heureuse applicationque ces savants ont faite, à la décomposition dumuriate de soude, de l'affinité que l'acide muriatiquea pour l'eau : on sait que la soude entre commematière première dans plusieurs fabrications, etqu'il est très important de posséder un moyen simpleet direct de retirer cet alcali du sel commun.Quant à l'acide muriatique oxigéné, MM. Gay-Lussac et Thénard l'ont soumis à de nombreusesexpériences. « Elles doivent donner, disent ces chimistes,de la constitution de cet acide une idéetoute différente de celle qu'on setoit formée. Onl'avoit regardé comme le corps le plus facile à décomposer,et au contraire il résiste à Faction desagents les plus énergiques. On ne peut en retirerl'acide muriatique à l'état de gaz qu'au moyen del'eau ou de l'hydrogène. » Cet acide pèse 2.47 plusque l'air. Il contient la moitié de son volume de gaz


8 PHYSIQUE, CHIMIE,oxigène, et toute l'eau qu'il peut former avec l'hydrogèneest retenue par l'acide muriatique qu'ilrenferme. Cette eau fait le quart du poids de ce dernieracide.L'action du métal de la potasse sur les oxides etles sels métalliques, et sur les sels terreux et alcalins,a aussi fait pour MM. Gay-Lussac et Thénardle sujet d'un travail particulier, duquel il est résultéque tous les corps dans lesquels on connoît la présencede l'oxigène sont décomposés par ce métal ;que cette décomposition se fait presque toujoursavec dégagement de lumière et de chaleur ; que cedégagement est d'autant plus considérable que l'oxigèneest moins condensé, et que, par conséquent,ce pourroît être un moyen d'apprécier le degré decondensation de l'oxigène dans chaque corps. lAprès avoir opéré sur la potasse et sur la soude,à l'aide de la pile de Volta, les changements dontnous avons parlé plus haut, il étoit naturel de chercherà produire des effets analogues sur les autresalcalis et sur les terres. En effet M. Davy a entreprisde nombreuses expériences pour découvrir, suivantson système, les métaux de la baryte, de la strontiane,de la chaux, de la magnésie, de la silice, del'alumine, de la zircone, et de la glucine. Aprèsbeaucoup de tentatives infructueuses, il annoncequ'il est parvenu, avec le secours de la pile, à dés-


ET MÉTÉOROLOGIE.Qoxigéner les quatre premières de ces substances, età former des amalgames des nouveaux métaux quien résultent. Il pense que les quatre autres sontaussi des oxides métalliques ; mais ses expériences,commeil l'avoue, ne le prouvent point d'une manièreévidente.Un autre amalgame, produit par l'ammoniaque,a été découvert l'année dernière à Jéna par le docteurSchebeck. Il a fait en suite le su j et des recherch esde MM. Berzélius et Pontin à Stockholm, et deM. Davy en Angleterre; les uns et les autres se sontaccordés à reconnoître l'ammoniaque comme jouissantde toutes les propriétés d'oxide. A la températureordinaire cet amalgame a la consistance dubeurre, et au froid il cristallise en cubes; mais onn'a pu isoler le nouveau métal. MM. Gay-Lussac etThénard ont répété les expériences rapportées parles chimistes dont nous venons de parler, et ils enont reconnu l'exactitude. Mais cet amalgame, quin'avoit été formé que par l'action de la pile, les physiciensfrançois l'ont produit par l'action du métalet de la potasse, et ils ont reconnu qu'une légèreagitation suffisoit pour le décomposer. Par cettesimple action le mercure redevient coulant, et il sedégage de l'ammoniaque et de l'hydrogène dans laproportion de 28 à 23. Le mercure absorbe 3,47 ^eson volume de gaz hydrogène, et 4,22 de son vo-


IOPHYSIQUE, CHIMIE,lume de gaz ammoniaque pour passer à l'état d'amalgame,d'oùil résulte, disent nos auteurs, quedans cette combinaison le mercure augmente d'environ0.0007 e de son poids, tandis que, d'après lesexpériences de M. Davy,il n'augmentoit que d'un12000 e Ainsi la théorie par laquelle MM. Gay-Lussacet Thénard expliquent la formation du potassiums'applique à la formation de l'ammonium. Cenouveau métal n'est, suivant eux, que de l'ammoniaqueet de l'hydrogène. Enfin M. Davy a encoreporté ses recherches sur le soufre, le phosphore,la plombagine, le charbon, et le diamant. Les principalesexpériences relatives à ces deux premièressubstances ont été faites sur les gaz hydrogènes,sulfurés et phosphores, au moyen du potassium,et il conclut des résultats qu'il a obtenus que cesdeux corps inflammables sont des combinaisonsd'hydrogène, d'oxigène, et d'une base qui n'est poimconnue, et qui n'a point encore été mise à nu. Quanaux autres substances, il est conduit à regarder 1Îplombagine comme un alliage du fer avec un metaparticulier qui se retrouve dans le charbon combinà l'hydrogène, et dans le diamant à une petite partid'oxigène.Ces idées étoient trop contraires à celles qui soicommunément reçues pour ne pas exciter les r


ET MÉTÉOROLOGIE.ilsac et Thénard ont-ils fait sur le soufre et le phosphoreun travail très étendu ; et comme M. Davyavoit employé les bydrures dans ses expériences,les chimistes françois ont cherché d'abord à détermineravec exactitude les éléments de ces substances.Ils ont reconnu que le gaz hydrogène sulfurécontient un volume d'hydrogène égal au sien;que le gaz hydrogène phosphore en contient aumoins une fois et demie son volume, que le premierde ces gaz peut être absorbé par le potassium et lesodium, et que dans cette absorptionil se développeprécisément la même quantité d'hydrogène que lemétal seul en donneroit avec l'ammoniaque et avecl'eau ; enfin que le gaz hydrogène phosphore estdécomposé par le potassium et le sodium, en sorteque le phosphore se combine avec ce métal, et quel'hydrogène se dégage. Mais ces physiciens ne sesont point bornés à porter leurs recherches sur lessubstances que M. Davy avoit mises en usage; ilsont fait des expériences sur le gaz hydrogène arseniqué,et ils ont vu que ce gaz se comporte avec lesnouveaux métaux comme le gaz hydrogène phosphore,et que l'arsenic peut se combiner avec l'hydrogènede manière à former une hydrure solidequi a la forme de floconslégers, d'une couleurbrune. Ils concluent que le gaz hydrogène sulphuréet phosphore, ainsi que le soufre et le phosphore,


12 PHYSIQUE, CHIMIE,ne contiennent point d'oxigène, ou du moins queles expériences de M. Davy ne le démontrent point.Mais ils croient, comme onl'a déjà pensé, que lesoufre, et peut-être le phosphore, contiennent del'hydrogène.Nous ne nous permettrons point de prononcerentre les opinions de M. Davy et celles de MM. Gay-Lussac et Thénard; mais on ne manquera sans doutepas de remarquer, quoique cela ne puisse conduireà aucune conséquence fâcheuse pour la chimie moderne,que l'hydrogène, qui souvent dans la théoriede Staël n etoit pas autre chose que le phlogistique,donne lieu à des combinaisons qui ont tousles caractères des métaux.Outre les travaux dont nous venons de parler,nous devons à M. Gay-Lussac des observations surla combinaison des substances gazeuses les unesavec les autres, qui l'ont conduit à prouver que lesgaz, dans telles proportions qu'ils puissent se combiner,donnent toujours lieu à des composés dontles éléments sont entre eux dans des rapports trèssimples. Ainsi ioo parties de gaz oxigène saturentexactement 200 parties d'hydrogène; les gaz fluoriqueet muriatique mêlés avec le gaz ammoniacalsaturent de celui-ci un volume égal au leur, etforment des sels neutres, etc. Mais il observe quelorsqu'on considère les proportions en poids, on


ET MÉTÉOROLOGIE.i3n'obtient aucun rapport simple entre les élémentsd'une pareille combinaison. De plus il fait voir queles contractions apparentes qu'éprouvent les gaz ense combinant se font aussi dans des rapports trèssimples avec le volume primitif des gaz, ou seulementavec celui de l'un d'eux, et il fait remarquerensuite que la contraction apparente n'indiquepoint la contraction réelle qu'ont éprouvée les élémentsen se combinant.Ces observations ont été suivies d'un travail particuliersur la vapeur nitreuse et sur le gaz nitreuxconsidéré comme moyen eudiométrique. On y voitd'une manière bien évidente l'influence des quantitéssur le résultat des combinaisons. Si l'on mélange200 parties de gaz nitreux et 200 parties degaz oxigène, il se produit de l'acide nitrique, et 100parties d'oxigène restent libres. Si au contraire onfait un mélange de 100 parties d'oxigène et de 4oode gaz nitreux , il se fait une absorption de 4oo parties,qui produisent de l'acide nitreux, et 100 partiesde gaz nitreux restent libres. Ainsi on obtientde l'acide nitrique, ou de l'acide nitreux, suivantque l'un ou l'autre des gaz dont ces acides se composentdomine.Mais dans l'un et dans l'autre cas les absorptionssont toujours constantes. Ainsi l'acide nitrique estcomposé de 100 parties de gaz azote et de 200 de


l4PHYSIQUE, CHIMIE,gaz oxigène, ou de i oo de gaz oxigène et de 200 degaz nitreux. L'acide nitreux résulte de la combinaisonde 100 parties de gaz oxigène et de 3oo de gaznitreux. Et si l'on ajoute que le gaz nitreux est composéde parties égales de gaz oxigène et de gaz azote,comme M. Gay-Lussac l'a voit déjà démontré, onaura une histoire complète des combinaisons del'oxigène et de l'azote.M. Guyton de Morveau, dans une suite d'expérencessur le diamant et sur les substances qui contiennentdu carbone, a cherché à déterminer leuraction sur l'eau, à une température très élevée. L'eaua été décomposée par le diamant, et l'acide carboniquea été produit.M. Sage nous a fait part de ses recherches sur larevivification de l'argent par le mercure dans le nitrated'argent; sur un acétate d'ammoniaque retirédu bois par la distillation ; sur l'analyse de la pierrecalcaire nommée typographique ; sur la magnésiecontenue dans les coquilles, les madrépores, lapierre calcaire, et l'arragonite; sur une mine de ferarénacée; sur une pétrification inconnue et surl'analyse d'un bois pétrifié, cuivreux, et ferrugineux.Nous regrettons que les bornes de ce rapportne nous permettent pas d'entrer dans plus de détailssur ces nombreux travaux.Lorsque la chimie descend des corps bruts aux


ET MÉTÉOROLOGIE.i5corps organisés, les phénomènes qu'elle observesont plus compliqués et les résultats qu elle obtientsont plus obscurs. Aussi cette branche de la chimiea-t-elle été négligée jusqu'à ces derniers temps, etla plupart des observations et des découvertes dontelle s'est enrichie sont incontestablement dues auxtravaux de M. Fourcroy, de cet illustre confrèredont nous déplorons tous la perte aujourd'hui, et àceux de son célèbre ami M. Vauquelin.Ce dernier s'est occupé de l'analyse du tabac,dans la vue de reconnoître les principes qui caractérisentcette plante, et qui l'ont fait choisir pour lesusages auxquels elle est employée, et afin d'apprécierles modifications qu'elle éprouve par les différentespréparations qu'on lui fait subir pour en faire unobjet de commerce. Il résulte de ce travail que laplante du tabac à larges feuilles {nicotiana latifolia)contient une matière animale de nature albumineuse,du malate de chaux avec excès d'acide, del'acide acétique, du nitrate et du muriate de potasse,une matière rouge dont la nature est inconnue, dumuriate d'ammoniaque, et enfin un principe acreet volatil qui paroît être différent de tous ceux qu'ona déterminés dans le régne végétal. C'est ce principequi donne au tabac les qualités qu'on lui connoît;qn peut le séparer de la plante par la distillation,et l'employer séparément. Le tabac préparé a


|6 PHYSIQUE, CHIMIE,^présenté de plus que la plante sans préparationdu carbonate d'ammoniaque et du muriate dechaux.M. Vauquelin, pensant que le suc de la belladone,dont les effets sur l'économie animale sont si analoguesà ceux du tabac, contenoit le principe acrequ'il a découvert dans cette dernière plante, en afait l'analyse ; mais il n'y a trouvé qu'une substanceanimale, des sels à base de potasse, et unesubstance amère de laquelle le suc de la belladonereçoit ses propriétés narcotiques.A l'article Physiologie nous parlerons des expériencesque M/Vauquelin a faites avec ce suc surles animaux.M. Chevreul a présenté à l'Institut des expériencesfort étendues sur les matières végétales. Lesunes ont pour objet le principe amer produit parl'action de l'acide nitrique sur les matières organiséesqui contiennent de l'azote, et dont MM. Hausrnann,Welther, Proust, Fourcroy, et Vauquelin,s'étoient déjà occupés.M. Chevreul pense que cet amer est composé d'acidenitrique et d'une matière végétale huileuseou résineuse; et il attribue la propriété qu'a cettesubstance de détoner à la décomposition de l'acidenitrique, à la formation du gaz ammoniacal, del'acideprussique et du gaz hydrogène h u ileux, etc. etc. ;


ET MÉTÉOROLOGIE. 17ce qui est conforme à une partie des observationsde MM. Fourcroy et Vauquelin.Mais avec l'amer il se produit une matière résineuseet un acide volatil, sur lequel M. Chevreul afait plusieurs expériences, et qu'il regarde commene différant de l'amer que par une petite portiond'acide nitrique.Un second travail de M*. Chevreul a pour objetles subtances formées par l'action de l'acide nitriquesur les corps charbonneux ou résineux qui ont lapropriété de précipiter la gélatine. Les premièresobservations de ce genre avoient été faites en Angleterrepar M. Hatchett, et elles avoient conduit àregarder ces substances comme analogues au tannin.M. Chevreul pense que c'est une erreur, etqu'elles diffèrent entre elles non seulement suivantl'espèce d'acide et de matière avec lesquelleselles ont été préparées, mais encore suivant laquantité d'acide qui est entrée dans leur composition.Enfin, poursuivant toujours le même genre d'expériences,M. Chevreul a porté ses recherches surdifférents composés formés par la réaction de l'acidesulphurique sur le camphre. Ces travaux onttous obtenu l'approbation de l'Institut, qui en a ordonnél'insertion dans les mémoires des savantsétrangers.BUFFON. COMPLÉM. T. II.2


18 PHYSIQUE, CHIMIE,Chaque année nous avons pu présenter d'heureusesapplications de la chimie aux arts, et donnerainsi de nouvelles preuves des secours que nosbesoins et l'industrie peuvent tirer des sciences.M. Chaptal, à qui les fabriques doivent déjà tantde procédés utiles, nous a fait connoître d'intéressantesobservations sur la distillation des vins. Onvoit par l'histoire qu'il donne de cet art, par la descriptiondes appareils qui y étoient employés autrefoiset de ceux qui y sont employés aujourd'hui,que les procédés de la fabrication des eaux-de-vie sesont améliorés à mesure que les appareils de la chimiese perfectionnoient. Un des plus importants deceux qui existent dans le Midi n'est pour ainsidire que l'appareil de Voulf en grand. Les lois de1 evaporation, et les procédés au moyen desquels onchauffe les liquides par la vapeur, ont ingénieusementété combinés pour opérer la distillation desvins d'une manière économique; mais les observationsde M. Chaptal conduiront sans doute encoreà de nouveaux perfectionnements dans la fabricationdes eaux-de-vie, et contribueront à conserverà cette branche importante de notre commerce lasupériorité qu'elle a acquise.Le même membre a fait l'analyse de sept échantillonsde couleurs trouvés à Pompéia. Trois de cescouleurs n'étoient que des terres colorées naterei-


ET MÉTÉOROLOGIE. 19lement; l'une verdâtre, l'autre jaune, et la troisièmebrun rouge ; la quatrième étoit une pierre poncetrès légère et fort blanche. Une cinquième, quiavoit une belle teinte rose, a montré tous les caractèresd'une lacque, et M. Chaptal lui a trouvébeaucoup d'analogie avec la lacque de garance qu'ila fait connoître dans son traité sur la teinture ducoton.Les deux dernières étoient bleues ; l'une avoit uneteinte pâle, mais l'autre étoit intense et nourrie.L'analyse de ces deux couleurs a montré qu'ellesétoient dues à une combinaison d'oxide de cuivre,de chaux, et d'alumine, résultant d'un commencementde vitrification. M. Chaptal observe quecette couleur est fort supérieure, en éclat et en solidité,à notre cendre bleue, et que son prix étantbien inférieur à celui du bleu de cobalt et au prixde l'outre-mer, il seroit important de rechercher lesprocédés que les anciens employoient à sa fabrication.M. Sage s'est occupé des procédés les plus propresà préparer la chaux vive pour obtenir desmortiers solides, de la nature des différentes espècesde stucs, des moyens de donner le poli du marbreaux pierres artificielles, et enfin d'un procédé propreà réduire la cire blanche en une sorte de savon.Le même auteur, dans un mémoire, et MM. Guy-


2oPHYSIQUE, CHIMIE,ton et Vauquelin, dans un rapport, ont communiquédes observations sur les avantages et les inconvénientsqu'il y auroit à employer le zinc dans lacouverture des édifices; et, sur la demande du ministrede l'intérieur, la section de chimie a fait connoîtrequelles sont les fabriques qui peuvent êtrenuisibles à ceux qui habitent dans leur voisinage,et quelles seroient les mesures à prendre pour accorderl'intérêt des fabricants avec celui du public.IlaétéfaitunrapportsurunmémoiredeM.Tarry,relatif à la composition des encres à écrire et à leurperfectionnement. L'auteur est parvenu à composerune encre qui ne peut être détruite par les acidesni par les alcalis, et qui n'a que le léger inconvénientde laisser trop facilement déposer sa matière colorante.«La découverte de M. Tarry promet à lasociété, ditle rapporteur, un grand avantage, celuid'introduire l'usage d'une encre qui, n'étant pas susceptibled'être enlevée par les agents chimiquesactuellement connus, n'offrira plus aux fripons l'occasiond'altérer des titres, comme cela n'arrive quetrop souvent aujourd'hui. »Un autre rapport sur les turquoises artificiellesde M. de Sauviac fait espérer de voir bientôt en cepenre les produits de l'art imiter exactement ceuxde la nature.Enfin une commission, composée de plusieurs


ET MÉTÉOROLOGIE. 2 1membres de la première classe et de plusieurs membresde la quatrième, s'est occupée de retrouver unprocédé de. feu Bachelier pour la composition d'unbadigeon conservateur des bâtiments. On sait qu'àParis les édifices se couvrent très vite d'une teinted'un gris sale, et que ce premier changement estcause de la détérioration qu'on les voit bientôtéprouver après. Une petite araignée établit sa toiledans les creux qui se trouvent à la surface des pierres;ces toiles s'accumulent, se recouvrent les unesles autres, et avec la poussière qu'elles retiennentelles forment cette croûte terreuse dont nous venonsde parler, où les lichens prennent racine, etqui retient l'humidité à la surface des pierres; alorsles gelées occasionent des dégradations considérables,et obligent à ce grattage quifiniroit par êtrelui-même une véritable dégradation.11 s'agissoit donc de trouver un badigeon quiremplit les inégalités de la pierre sans faire épaisseurdans les angles, sans amortir les ressauts, etqui résistât aux pluies et à toutes les intempéries denos saisons. Feu Bachelier avoit fait des essais heureuxsur ce sujet. La commission y aidée des renseignementsde M. Bachelier fils,est parvenue à reretrouverla recette d'un badigeon qui a résisté pendantquarante ans aux épreuves qu'on lui a faitsubir, et qui donne l'espérance de pouvoir garantir


22 PHYSIQUE, CHIMIE,nos édifices des dégradations auxquelles ils ont étéexposés jusqu'à ce jour.ANNÉE 1810.Peu d'années ont été aussi fécondes que celle-cien travaux variés et importants sur les diversesbranches des sciences naturelles, et depuis les partiesles plus générales de la physique jusqu'à l'histoireparticulière des espèces des trois régnes lesdécouvertes de nos confrères, ou celles qui ont étésoumises à l'Institut par des savants étrangers àl'Institut, ont fourni de nouvelles richesses au systèmede nos connoissances.L'Institut avoit proposé un prix pour l'examendes circonstances et des causes des diverses phos^phorescences, c'est-à-dire de ces apparences lumineusesque certains corps manifestent, soit spontanément,soit lorsqu'ils sont frottés, légèrementchauffés, ou enfin dans toute autre circonstancedifférente de la combustion.Ce prix a été remporté par M. Dessaignes, principaldu collège de Vendôme; et son travail, couronnéà la séance publique de l'année dernière, aété suivi par des expériences du même genre quien ont beaucoup étendu les résultats.Ce physicien définit la phosphorescence « uneapparition de lumière durable ou fugitive, qui n'est


ET MÉTÉOROLOGIE. 23pas pourvue sensiblement de chaleur, et qui n'estsuivie d'aucune altération dans les corps inorganiques,» et il classe tous les phénomènes de laphosphorescence sous quatre genres, déterminéspar leurs causes occasionelles : i ° phosphorescencepar élévation de température ; 2° phosphorescencepar insolation; 3° phosphorescence par collision;4° phosphorescence spontanée.Tous les corps phosphorescents par élévation detempérature, jetés en poudre sur un support cha ud,s'illuminent, quelle que soit la faculté conductricede ce support pour le calorique, et l'intensité de lalumière qui s'échappe est en raison directe du degréde température; mais la durée de la phosphorescenceest toujours en raison inverse de cette température.Les dernières portions de lumière semblentêtre retenues par les corps avec plus de forceque les premières, et il y a une très grande différencesous ce rapport entre les diverses substances;les corps vitreux perdent très difficilement leurpropriété phosphorique, tandis que les métaux,leurs oxides phosphorescents, et les sels métalliques,la perdent très facilement. Aucun degré de chaleurne peut enlever la phosphorescence à la chaux, àla baryte,,à la strontiane, caustiques, faiblementéteintes, à la magnésie, à l'alumine, et à la silice.Dans certaines circonstances, dans un air humide


24 PHYSIQUE, CHIMIE,par exemple, quelques uns de ces corps peuventreprendre leur phosphorescence après l'avoir perdue,mais d'autres ne la reprennent jamais.Cette phosphorescence se présente sous des formesdifférentes; et, comme la lumière solaire, ellese décompose par le prisme : elle s'échappe de certainscorps par émanation paisible, et de quelquesautres par scintillation; sa couleur est bleue; maiselle est ordinairement souillée par ceux qui contiennentdu fer, et l'on peut l'épurer, dans ce derniercas, en enlevant à ces corps le métal qui changesa couleur.En général il a paru à M. Dessaignes que lescorps les plus phosphorescents sont ceux qui, dansleur composition, contiennent des principes qui ontdû passer de l'état gazeux ou liquide à l'état solide.Il étoit important de vérifier si cette phosphorescencepar élévation de température étoit due àla combustion : pour cet effet M. Dessaignes a faitses expériences dans l'air atmosphérique, dans l'oxigène,et dans le vide barométrique, et il n'a vu aucunedifférence dans l'intensité de la lumière pourles corps inorganiques ; mais la lumière des corpsorganisés s'est accrue dans l'oxigène : ce qui conduitl'auteur à penser qu'au moins une partie de laphosphorescence de ces derniers corps est due àune véritable combustion.


ET MÉTÉOROLOGIE. 26Mais l'élévation de la température ne rend pastous les corps lumineux, et ceux qui deviennentphosphorescents par cette cause perdent cette facultédans certaines circonstances. Quelle est doncla cause de l'inphosphorescence? Telle est la questionque se propose M. Dessaignes, et pour la solutionde laquelle il a renouvelé ses expériences eny faisant entrer des circonstances qu'il varioit selonles vues qu'il vouloit remplir. Ses recherches l'onconduit aux résultats suivants : i° Les produits obtenuspar la voie du feu ne sont point lumineux, àmoins que de l'état terreux ils n'aient passé à l'étatvitmux; 2 0 les corps pourvus d'une trop grandequantité d'eau de cristallisation ne donnent aucunelumière; 3° les corps capables d'être ramollis par lachaleur ne donnent également point de lumière, etdans ce cas sont les sels avec excès d'acide; exceptéles sels boraciques, qui ne se fondoient point audegré de chaleur des expériences; 4° l es corps etparticulièrement les sels qui se volatilisent ou sedécomposent à ce degré de chaleur sont inphosphorescents; 5° enfin les corps mélangés d'unegrande quantité d'oxide métallique sont aussi complètementténébreux.Cependant la plupart de ces corps peuvent redevenirlumineux lorsqu'on les humecte, quandils ont la faculté de se combiner avec l'eau et de la


26 PHYSIQUE, CHIMIE,solidifier à un certain point. Enfin cette facultépeut reparoître dans les corps qui l'ont perdue sion les fait changer d'état.M. Dessaignes conclut de ses expériences, dontnous n avons pu qulpdiquer les résultats, que laphosphorescence produite par l'élévation de températureest due à un fluide particulier qui estchassé par le calorique des corps, entre les moléculesdesquels il se trouve, et ce fluidelui paroîtêtre de nature électrique; il est conduit à cette idéeparceque toutes les circonstances qui favorisent ouqui détruisent l'accumulation du fluide électriquefavorisent ou détruisent absolument de la ntêmemanière relativement aux mêmes corps l'accumulationdu fluide phosphorique, et que l'électricitépeut être directement accumulée dans ces corps etles rendre lumineux.On savoit depuis long-temps que l'exposition decertains corps à la lumière les rendoit phosphorescents.Dufay et Beccaria avoient déjà fait quelquesrecherches sur les phénomènes de ce genre, et ilétoit résulté de celles du dernier l'opinion que laphosphorescence des corps exposés à la lumière venoitd'un dégagement de cette lumière qui s'y étoitintroduite par une sorte d'imbibition. L'expériencesur laquelle cette opinion étoit fondée a été reconnuede tout point inexacte par M. Dessaignes : les


ET MÉTÉOROLOGIE. 27phosphores qu'il a soumis aux différents rayons duprisme ont toujours donné la même lumière. Il ya plus, c'est que la phosphorescence produite parinsolation, bien loin d'être une émanation rayonnante,n'est réellement qu'une oscillation ; car quelquefréquentes que soient les insolations, la phosphorescencen'est point augmentée, et il suffit decouvrir de fumée un corps phosphorescent pour lerendre obscur. L'action de la lumière, comme cellede la chaleur, ne rend pas tous les corps phosphorescents,et ceux qui le deviennent ne le sont pastous au même degré. Le phosphore de Canton devientphosphorescent par la seule lumière de lalune, tandis que le quartz hyalin ne donne de lueurque par la lumière directe du soleil. En général lescorps liquides sont insensibles par ce mode d'excitation; et il en est de même du charbon, du carburede fer et des métaux, de la plupart des sulfures, desoxides métalliques*faits par la voie sèche, et en généralde tous les corps qui sont, comme les précédents,des conducteurs de l'électricité : mais lescorps idio-électriques peuvent devenir phosphorescentsà l'aide d'une vive lumière. Il est à remarquerque, sous le rapport de la phosphorescence,tous les corps se sont exactement conduits avecl'électricitécomme avec la lumière.La lueur produite par insolation a la même cou-


28 PHYSIQUE, CHIMIE,leur que celle que la chaleur fait naître, et elle peutêtre modifiée de même par les oxides métalliques.Les corps les plus lumineux par insolation nele sont plus par cette cause quand ils sont chauds:ils redeviennent phosphorescents à mesure qu'ilsse refroidissent; et quelques corps qui ont perdu lafaculté de luire par l'élévation de la températurepeuvent encore donner de la lumière au moyende l'insolation, ce que M. Dessaignes attribue à laquantité d'eau que ces corps retiennent; car l'eaujoue incontestablement un très grand rôle danstous les phénomènes de ce genre, comme le remarquefort bien M. Dessaignes en plusieurs endroits.L'on attribuôit presque généralement à unecombustion toute la lumière que répandent certainsde ces corps connus sous le nom de phosphores.M. Dessaignes, voulant approfondir cette opinion,a soumis ces corps à des expériences particulièresqui prouvent évidemment, selon lui, qu'ils doiventleur lumière à la même cause qui produit celle desautres, c'est-à-dire à une espèce de fluide électrique;car M. Dessaignes regarde la lumière produitepar irradiation et par électrisation commeétant la même que celle que donne l'élévation dela température : seulement dans les deux premierscas cette lumière n'éprouve que des vibrations


ET MÉTÉOROLOGIE. 29tandis que dans la dernière elle est véritablementexpulsée.La phosphorescence par collision a fait pourM. Dessaignes le sujet de plusieurs mémoires. Ilrésulte de l'ensemble de ces expériences cette loigénérale et bien remarquable que tous les corps,dans quelque état qu'ils soient, solides, liquides, ougazeux, dégagent de la lumière par la compression.Mais cette lumière est moins abondante lorsque lescorps ont déjà été rendus phosphorescents par lachaleur; et quelque nombreuses et fortes que soientles compressions auxquelles on soumet un corps,jamais on ne peut le priver entièrement par-là desa faculté phosphorique. Cette lumière semble àM. Dessaignes avoir une cause différente de cellequi est produite par la chaleur. « Elle paroît dépendre,dit-il, d'un fluide éminemment élastique,étroitement uni à tous les éléments de la matièregravitante. Ce fluide, source première de touteforce expansive, se refoule d'autant plus dans lesmolécules que leurs éléments constitutifs s'approchentde plus près, de sorte qu'il est plus éloignéde sa limite de compression dans les gaz que dansles corps vitreux; aussi faut-il un moindre effortdans ceux-ci pour les faire osciller, etc., etc. »Relativement à la phosphorescence spontanée,M. Dessaignes en distingue de deux sortes; les unes


3oPHYSIQUE, CHIMIE,sont passagères, les autres permanentes. Parmi lespremières on peut citer celle qui a eu lieu parl'union d'une certaine portion d'eau avec la chauxcaustique; et parmi les secondes celle du boispouri et d'autres substances organiques en putréfaction.Ce sont ces dernières qui occupent plusparticulièrement M. Dessaignes dans ce quatrièmegenre de phénomènes. Ses observations ont été faitessur des substances animales, de la chair des poissonsd'eau douce, des poissons de mer, et sur dessubstances végétales, des bois de différentes sortes.Ces substances ont offert séparément des caractèresparticuliers ; mais il résulte de l'ensemble de leursphénomènes que la phosphorescence des unes etdes autres est une espèce de combustion dans laquelleil se produit de l'eau et de l'acide carbonique;toutes les parties constituantes des muscles et dubois ne participent pas à la lumière que ces corpsproduisent : la partie ligneuse et la fibremusculairen'éprouvent dans ces changements aucune altérationessentielle, et la phosphorescence de ces corpsest due, dans le bois, à un principe glutineux quiservoit à réunir les fibresligneuses, et dans la chairà un principe gélatineux qui unissait les fibrescharnues.M. Dessaignes, s'appuyant sur les faits nombreuxde phosphorescence spontanée qu'il a recueillis,


ET MÉTÉOROLOGIE.3lcherche à expliquer la phosphorescence de la mer,qu'il croit être due à deux causes différentes : i ° à laprésence d'animalcules phosphoriques par l'émanationd'une matière lumineuse produite par cesanimalcules mêmes; 2° par la simple présence decette matière dissoute ou mélangée dans l'eau, etrésultante non seulement de ces êtres, mais encoredes mollusques, des poissons, etc., etc.Depuis la publication de son premier travail,M. Dessaignes a fait d'autres recherches du mêmegenre; il a tenté, par de nombreuses expériences,de déterminer l'influence des pointes sur la phosphorescence, soit par élévation de température,soit par insolation; et non seulement il a reconnuque les pointes ont sur le fluide phosphorique lamême influence que sur le fluideélectrique, mais,de plus, que des corps naturels qui ne diffèrententre eux que par leurs caractères résultant de l'agrétgationpeuvent différer à l'infini sous le rapportde leurs facultés phosphorescentes, etc., etc.Les productions subites de chaleur qui se manifestentdans une infinité de phénomènes chimiques, quoique plus connues que ne l'étoientcelles de lumière, ont encore besoin d'être déterminéesavec quelque précision.M. Sage a donné le résultat de ses recherches surles degrés de chaleur que produisent les acides mi-


32 PHYSIQUE, CHIMIE,néraux concentrés, en se combinant avec diversoxides métalliques, des terres, de l'eau, etc. : uol'acide sulfurique à 67 0 de l'aréomètre de Beaume,mêlé à un tiers d'eau, donnoit une températurede 8o°; de l'acide nitrique, marquant 45° à l'aréomètre,a donné, mêlé à l / 3 d'eau, 4 5°; et l' a cidemuriatique à 20 0 a donné, avec la même quantitéd'eau que dans les expériences précédentes, 22 0 ; leplus grand degré de chaleur obtenu avec l'acidesulfurique est celui qui est résulté du mélange decet acide avec les os incinérés : cette chaleur a étéde 160 0au-dessus de zéro. En général ces expériencesservent à faire présumer que la chaleurproduite dans les combinaisons des corps est d'autantplus forte que ces corps éprouvent plus decontraction. Il est fâcheux que M. Sage n'ait pointcherché à déterminer la pesanteur spécifique descorps qu'il combinoit avant et après l'expérience.La mesure absolue de la chaleur, dans les degrésélevés, pour lesquels on ne peut employer des substancesliquides, est toujours l'objet des recherchesdes savants.M. de Morveau, qui s'en occupe depuis tant d'années,et dont nous avons fait connoître les premierstravaux dans le premier volume de cette histoire,a communiqué à l'Institut une suite de tableauxqui peuvent être considérés comme le résumé de


ET MÉTÉOROLOGIE. 33ses nombreuses expériences. Le premier de ces tableauxprésente les degrés de chaleur de fusion etde vaporisation des différents corps corrigés et misen concordance avec les échelles pyrométriques etthermpmétriques les plus généralement admises.Un second tableau donne les dilatations des métauxdéterminées en concordance de ces mêmeséchelles pyrométriques et thermométriques, et expriméesen millionièmes pour ioo° centigrades.Dans un troisième tableau il indique les rapportsde la dilatabilité et de la fusibilité des métaux ; etenfin dans un quatrième il donne les degrés dechaleur indiqués par son pyrométre de platine, etleur correspondance avec le thermomètre centigrade,le pyromètre de Wedgwood, et les observationsde fusion jusque dans les plus hautes températures.Ces tableaux ont été accompagnés d'unmémoire explicatif contenant les détails des procédésemployés par l'auteur pour rectifier ses évaluations, lesquelles diffèrent essentiellement decelles qui avoient été données par Wedgwood; etcette différence vient principalement d'une erreurque ce célèbre physicien avoit commise en mesurantla fusibilité de l'argent, qui faisoit une desbases de ses calculs.Pour faciliter les expériences que les idées nou-RUFFON. COMPLÉM. T. II. 3


34 PHYSIQUE, CHIMIE,velles de la chimie rendoient nécessaires, le gouvernementa ordonné qu'il fût construit à l'École polytechniquedes piles galvaniques de diverses grandeurs,et une entre autres qui surpassât de beaucoupîtoutes celles que l'on avoit employées jusqu'ici, afinque l'on pût apprécier l'influence que le volume deces appareils exerce sur leurs effets.MM. Gay-Lussac et Thénard nous ont donnéune description de cette grande pile composée desix cents paires de disques carrés, de 3 décimètresde côté chacun, et des expériences qu'ils ont faitesavec elle et avec une autre dont les plaques étoientde 48 centimètres carrés de surface.Leurs premières recherches se sont portées surles causes qui font varier l'énergie de la pile. On attribuoitcette énergie ou à la conductibilité des matièresconstituantes de la pile, ou à l'action chimiquede ces matières, ou à ces deux causes réunies; pouréclaircir cette question les auteurs ont cherché uneespèce de galvanomètre, et ils .se sont arrêtés pourcela à la décomposition de l'eau dans un tube pendantun temps donné. Ils ont vu que, toutes choseségales d'ailleurs, la pile décomposoit d'autant plusd'eau, dans un même espace de temps, que toutesles substances qui entrent dans le cercle de la pilesont plus conductrices. Une pile de quatre-vingtspaires, montée avec un acide, décompose la po-


ET MÉTÉOROLOGIE. 35tasse, ce que ne peut faire la pile de six cents pairesmontée avec de l'eau. D'un autre côté le tube du galvanomètre,rempli d'eau seulement, donne quatreà cinq fois moins de gaz que lorsqu'il est remplid'acides affoiblis. En général les acides sont d'autantplus forts conducteurs qu'ils sont moins étendus,mais un mélange d'acide et de sel produit encoreplus d'effet que l'acide seul.Les acides sont meilleurs conducteurs que lesalcalis , et les alcalis sont meilleurs conducteursque les sels qui proviennent de ces mêmes acideset de ces mêmes alcalis employés comparativement.L'eau du galvanomètre chargée de sel est d'autantmoins bonne conductrice qu'elle s'éloigne davantagede la saturation.Il falloit savoir quelle étoit l'influence de la longueurdes filsplongés dans le galvanomètre ' ; 8 centimètresont décomposé moins d'eau que 4, mais2 centimètres en ont décomposé moins que 8.Les effets de la pile n'augmentent pas dans lemême rapport que le nombre des plaques; l'effetn'est double que lorsque le nombre est huit foisplus grand. En général les effets de la pile, mesuréspar la quantité de gaz qu'elle produit, s'éloignentpas.Je me sers de ce mot par commodité, les auteurs ne s'en servent3.\


'Mi PHYSIQUE, CHIMIE ,peu d'être proportionnels à la racine cubique dunombre des plaques.Les effets de deux piles, différentes par l'étenduedes surfaces de leurs plaques, sont proportionnelsà ces surfaces.La tension électrique de la pile dure plus queson action chimique. Cette différence vient de l'influenceinévitable de la durée du contact du condensateuravec lequel on recueille l'électricité pourla mesurer à la balance de Coulomb.Après avoir étudié les piles en elles-mêmes, pouren apprécier les effets, MM. Gay-Lussac et Thénardont porté leurs recherches sur l'action de la grandepile sur divers corps. La commotion qu'on reçoitde cette grande batterie est excessivement forte etdangereuse; mais elle n'est point sensible au milieud'une chaîne composée de quatre ou cinq personnes, elle ne l'est qu'aux extrémités de cettechaîne; ce qui prouve, contre l'opinion reçue, que,dans cette expérience faite avec des bouteilles deLeyde, ou de toute autre manière, la chaîne nefait pas l'effet de conducteur, et que chaque personnen'est chargée que par influence, c'est-à-direque le fluide électrique qui lui est naturel n'estque décomposé, et que la commotion ne vient quedu rétablissement des deux fluides qui le composent.


ET MÉTÉOROLOGIE. 37Parmi les découvertes auxquelles cet admirableinstrument de la pile a donné lieu, il en est peud'aussi intéressante pour la chimie générale que latransformation des alcalis en substances combustibleset d'un éclat métallique.On a vu précédemment que ces substancesétoient regardées par M. Davy, qui les a découvertes, comme des corps simples métalliques, etqu'au contraire MM. Gay-Lussac et Thénard, sefondant sur des expériences particulières dontnous avons fait mention, ne les considéroient quecomme des combinaisons des alcalis avec l'hydrogène,ou ce qu'on appelle des hydrures. Depuislors MM. Gay-Lussac et Thénard ont fait des recherchespour déterminer la quantité d'oxigèneque ces substances absorbent dans diverses circonstances; et ils ont observé, i° qu'en brûlant lepotassium dans du gaz oxigène, à l'aide de la chaleur,ce métal en absorbe près de trois fois autantqu'il lui en faut pour passer à l'état de potasse ;2° que le sodium, traité de la même manière, absorbeseulement une fois et demie autant d'oxigèneque pour passer à l'état de soude ; 3° que dans cesexpériences on peut substituer l'air atmosphériqueà l'oxigène sans changer le résultat; 4° qu'on faitvarier ces résultats en faisant varier la température,du moins pour le sodium, qui, à froid, n absorbeque


38 PHYSIQUE, CHIMIE,peu l'oxigène, tandis que le'potassium au contraires'oxide presque au même degré, quelle que soit latempérature; 5° enfin que dans ces combinaisonsil ne se dégage rien.Le potassium et le sodium chargés d'oxigène ontdes propriétés particulières, et entre autres celled'absorber l'eau avec avidité; mais par cette absorptionils sont décomposés, et il en résulte de la potasseou de la soude et beaucoup d'oxigène. Au resteces corps oxigénés sont ramenés à l'état alcalin partous les corps combustibles et par les acides, et plusieursde ces phénomènes ont lieu avec dégagementde lumière ; de sorte que tout concourt à prouverque la combinaison du potassium et du sodium,avec la quantité d'oxigène supérieure à celle dontces corps ont besoin pour passer à l'état d'alcalis,n'est point très intime, et. que cette quantité y estpresque à l'état gazeux.En supposant que le potassium et le sodium fussentdes hydrures, il résulteroit de ces expériencesque les sels formés avec ces corps, après qu'ils ontété combinés avec l'oxigène, contiendroient toutel'eau qui auroit dû se former par la combinaisonde cet oxigène avec l'hydrogène qui avoit fait passerles alcalis à l'état de potassium ou de sodium : or cerésultat n'est point conforme à d'autres expériencesdans lesquelles MM. Gay-Lussac et Thénard ont


ET MÉTÉOROLOGIE. 39cherché à déterminer la quantité d'eau contenuedans les alcalis et celle qui est dégagée dans leurcombinaison avec les acides. Ils ont trouvé que lapotasse, sur 100 parties, contient il\ parties d'eau;et la soude, 20 sur la même quantité; et ils ont vuque l'acide carbonique sec dégage une très grandequantité d'eau en se combinant avec les alcalis.« On peut même, disent-ils,par ce moyen ou par legaz acide sulfureux, rendre l'eau sensible dans 2milligrammes de soude ou de potasse. » Ce qui aconduit MM. Gay-Lussac et Thénard « à pencheren faveur de l'hypothèse qui consiste à regarderle potassium et le sodium comme des corps simples.»Depuis que l'on sait à quel point les proportionsdes principes constituants peuvent varier dans lescomposés, l'on est obligé d'examiner les sels sousce nouveau point de vue.M. Bérard, chimiste à Montpellier, a fait part àl'Institut de ses recherches sur la combinaison del'acide oxalique avec diverses bases, sujet qui avoitdéjà été traité en partie par MM. Wollaston etThomson.M. Bérard a commencé par déterminer exactementles proportions de l'oxalate de chaux, qu'il atrouvées être de 62 d'acide et de 38 de chaux. Il a


4oPHYSIQUE, CHIMIE,reconnu ensuite que 100 parties de cet acide cristallisécontenoient 27,3 d'eau.Ayant ces premiers éléments, il a combiné cetacide avec la potasse, et il a formé trois sels différents,un oxalate, composé de 100 parties de potasseet de 97,6 d'acide, un suroxalate contenant,sur 100 dépotasse, 192 d'acide, et un quadroxalatecomposé de 381 d'acide sur 100 d'alcali, lesquellesparties sont entre elles comme 1, 2, et l\. Ce résultatcurieux avoit déjà été trouvé par M. Wollaston.La soude, l'ammoniaque, la baryte, ont donnédes oxalates et des suroxalates, mais la strontiane,la magnésie n'ont pu former que des oxalates, et ilest à observer que le suroxalate de baryte a peu defixité, et qu'il suffit de le faire bouillir dans l'eaupour faire passer ce sel à l'état d'oxalate. Ce ne sontque les oxalates solubles qui peuvent se combineravec un excès d'acide, et devenir des suroxalates, etc'est à l'extrême solubilité du suroxalate de potasseque l'on doit de pouvoir former avec ce sel uu qua?droxaiate. ,fM. Berthollet nous a communiqué un procédépour former le muriate de mercure appelé mercuredoux. Il fait voir qu'en faisant passer le gazmuriatique oxigéné sur le mercure il se combinepromptement avec le métal, et forme avec lui dumuriate mercuriel ; et comme ce sel métallique a


ET MÉTÉOROLOGIE. 4 1une parfaite analogie avec les sels mercuriels produitspar les autres acides et le mercure au minimumd'oxidation, il en conclut que le mercure, en formantcette combinaison, a été réduit en oxide parl'oxigène de l'acide, et non point par celui de l'eauqu'on pourroit y supposer. Il a tiré cette conséquencede l'action de la chaux sur le gaz muriatiqueoxigéné : cette terre donne avec le gaz muriatiqueun composé dont la chaleur dégage une grandequantité d'oxigène, en laissant du muriate de chaux.En effet dans ce cas on ne peut attribuer l'oxigènequi se dégage qu'à la décomposition de l'acide, etnon à celle de l'eau.Jusqu'à présent on n avoit pas porté dans l'analysedes substances organisées la précision et l'exactitudeque l'on est parvenu à mettre dans l'analysedes corps inorganiques. L'action du feu, à un certaindegré sur ces substances, produit des combinaisonsdont il n'est point facile.de déterminer leséléments par les moyens ordinaires et par les procédésle plus généralement mis en usage ; unepartie desproduits gazeux n'étoit point recueillie et se perdoit.M. Berthollet a cherché à porter dans la déterminationdes principes qui entrent dans la compositiondes substances végétales toute la précision queles procédés de la chimie permettent. Pour cet effet


42 PHYSIQUE, CHIMIE,il a soumis chaque substance, autant privée d'eauque possible, à l'action de la chaleur, en faisant passerles produits qui s'en dégagent à travers un tubede porcelaine maintenu rouge, de sorte que tousles produits soient réduits en gaz; puis, après avoirmesuré et pesé ces gaz et les matières charbonneusesrestées abandonnées parles substances volatiles, ila fait l'analyse des unes et des autres. D'après cesprocédés on peut déduire les quantités de carbone,d'oxigène, d'hydrogène, et d'azote, qui entrent dansla composition des végétaux, ainsi que celle dessubstances solides qui demeurent confondues avecle charbon. Il ne reste qu'une incertitude, c'est cellede la proportion d'oxigène et d'hydrogène qui setrouvent encore dans les plantes après leur dessiccationcombinés à l'état d'eau. Dans son premiermémoire M. Berthollet n'a encore donné que l'analysedu sucre et de l'acide oxalique; il se proposede poursuivre ses expériences.MM. Gay-Lussac et Thénard ont aussi porté leursrecherches sur l'analyse des substances organisées;mais en admettant le principe de M, Berthollet, qui,comme nous venons de le voir, conduit à réduireen gaz- toutes les substances qui peuvent passer à cetétat, ils ont suivi un autre procédé qui consiste àmélanger les substances qu'on veut analyser avecune quantité connue de muriate suroxigéné de po-


ET MÉTÉOROLOGIE.4^tasse, et à faire brûler ce mélange dans un appareilpropre à recueillir les gaz qui se dégagent. Cet appareilest formé d'un tube de verre fermé par unbout, et portant à l'autre un robinet qui empêchetoute communication entre l'intérieur du tube etl'air extérieur ; la douille de ce robinet est pourvued'un petit creux propre à contenir les matières qu'onveut analyser. A ce premier tube en est soudé unsecond, d'une dimension plus petite, destiné à recueillirles gaz qui doivent se dégager par la combustiondes substances.L'appareil ainsi disposé, et le mélange de la substanceà analyser étant fait avec le muriate suroxigénéde potasse, on chauffe, et lorsque l'instrumentcommence à prendra une température rouge, il ya une vive inflammation, et en même temps il seproduit de l'eau, de l'acide carbonique, du gaz oxigène, et du gaz azote, si la substance analysée contientde ce dernier. En faisant usage de ce moyenMM. Gay-Lussac et Thénard ont trouvé que le sucre,l'amidon, la gomme arabique, le sucre de lait, contenoientdu carbone, de l'oxigène, et de l'hydrogène,et que ces deux derniers principes étoientjustement dans des proportions convenables pourformer de l'eau ; que les substances inflammables,telles que la résine de pin, la résine copale, la cire,l'huile d'olive, contiennent plus d'hydrogène qu'il


44 PHYSIQUE, CHIMIE,n'en faut pour saturer leur oxigène, et enfin queles acides végétaux contiennent plus d'oxigène qu'iln'en faut pour saturer leur hydrogène.D'après ces résultats MM. Gay-Lussac et Thénardproposent de diviser en trois classes toutes lessubstances végétales, i° celles dans lesquelles l'oxigèneet l'hydrogène sont dans des proportions convenablespour former de l'eau ; 2° celles qui contiennentde l'hydrogène en excès, comparativementaux précédents; 3° celles qui contiennent un excèsd'oxigène.Les essais qu'ils ont faits avec leur appareil surles substances animales les ont conduits aux résultatssuivants : la fibrine,l'albumine, la gélatine, etla matière caséeuse, contiennent du carbone et del'oxigène, de l'hydrogène et de l'azote, dans lesproportions exactement nécessaires pour former del'eau et de l'ammoniaque. Ces substances pou rroientdonc être comparées au sucre, à l'amidon, et à # lagomme, tandis que les graisses chargées d'un excèsd'hydrogène seroient analogues aux résines, et lesacides animaux analogues aux acides végétaux.M. Vauquelin a fait des travaux plus particuliersd'analyse végétale pour déterminer les différencesqui se trouvent entre les principes constituants dusucre de canne, de la gomme, et du sucre de lait,et ses expériences qu'il poursuit l'ont déjà conduit


ET MÉTÉOROLOGIE. 45à ce résultat intéressant que la gomme et le sucrede lait diffèrent du sucre de canne, en ce que lapremière contient de l'azote , et le second une matièreanimale.«Au reste, dit M. Vauquelin, les différencesentre le sucre ordinaire, le sucre de lait, et lagomme, ne consistent pas seulement dans la présenceou dans l'absence de l'azote, elles tiennentencore aux rapports variés des autres éléments deces matières ; et c'est ce qui nous reste à déterminerpar des expériences maintenant commencées. »M. Guyton a présenté à l'Institut quelques observationsrelatives à l'art de la verrerie. La premièrea pour objet la séparation des verres de densité différentepar la liquation ; du verre dont le fondantétoit du plomb, se trouvant au fond d'un creuset,ne se mêla point à du verre ordinaire dont le creusetavoit été rempli malgré la fusion complète desmatières. La seconde est relative à des essais decreuset-moule pour le recuit des grandes massesde verre. On essaya sans succès de former ces creusetsavec de la pierre calcaire ; la matière ne présentaqu'une masse criblée de grosses bulles : formés avecde l'argile à pots, ces creusets donnèrent un verreparfaitement affiné; mais comme leur retrait n'étoitpoint semblable à celui du verre, et que celui-ci


46 PHYSIQUE, CHIMIE,adhéroit à leurs parois, le refroidissement occasioiiadans la masse vitreuse des fissures qui sedirigeoient du centre à la circonférence. La troisièmeobservation consiste dans la coloration duverre en rouge parle cuivre. On ignoroit le moyende donner aux matières vitreuses une couleur rougefixe avec le cuivre. Un hasard a fait voir à M. Guytonque cette coloration pouvoit avoir lieu et êtrede la plus grande fixité,et des expériences qu'il atentées l'ont convaincu delà réalité de sa conjecture.A cette occasion M. Sage a fait part de ses expériencespour colorer en rouge, au moyen du cuivre,le verre de phosphate de chaux ou des os, et a montrédes cristaux de verre, provenant du fond descreusets de la manufacture de bouteilles de Sèvres,qui avoient quelque ressemblance avec des prismeshexaèdres.La quatrième observation de M. Guyton a pourobjet l'altération que le verre éprouve par l'actiond'une grande chaleur long-temps continuée. Danscette altération le verre se dévitrifie, prend une couleurblanche, laiteuse, et la demi-transparence desagates. C'est proprement la matière connue sous lenom de porcelaine de Réaumur; mais ce «avantattribuoit l'opacité et la blancheur du verre aux matièresdont il l'entouroit. On a reconnu depuis quela présence de ces matières n'est point nécessaire


ET MÉTÉOROLOGIE. 47et q ue la chaleur seule est suffisante ; mais quelquesphysiciens attribuoient ces effets à une espèce deprécipitation d'une portion des matières constituantesdu verre. M. Guyton, par des raisons qu'ilseroit trop long de rapporter ici, et qui paroissentfondées, attribue cette dévitrification à la vaporisationde quelques unes de ces portions de matières.On croyoit pouvoir conclure de quelques observationsparticulières que les feux des volcans n'agissoientpas comme ceux de nos fourneaux. MaisM. Guyton a fait voir, par des expériences directes,que cette opinion n'étoit point fondée; et il a eu l'avantagede convaincre lé célèbre minéralogiste Dolomieu,qui en avoit été l'auteur.On sait que l'on est parvenu par des moyenssimples à extraire du muriate de soude la soudedont les arts ont besoin, et qui se tiroit autrefois del'étranger. Cette fabrication présentoit cependantun inconvénient; c'étoit la quantité de gaz acidesquisevolatilisoient, et qui communiquoient à l'airdes propriétés très malfaisantes. Les manufacturiersont donc été obligés de chercher les moyens d'empêcherque ces gaz ne se répandissent dans l'atmosphère;et entre plusieurs moyens offerts pour arriverà ce but on doit distinguer celui qui a été imaginépar M. Pelletan fils.Il consiste à faire circuler le gaz


48 PHYSIQUE, CHIMIE,acide muriatique dans de longs tuyaux horizontauxgarnis de pierres calcaires qui l'absorbent.Dufay avoit annoncé que le bismuth pouvoit servircomme le plomb à la coupellation. M. Sage amontré par des expériences que ce premier métalne peut point remplacer le plomb avec avantage,parcequ'il emporte, en passant à l'état de verre, uneportion d'argent avec lui.ANNÉE 1811.On sait, depuis Blak et Wilke, que les corps nese vaporisent qu'en absorbant une grande quantitéde chaleur, et que toute évaporation refroidit d'autantplus le corps d'où elle émane qu'elle est plusaccélérée ; d'autre part l'on sait que la pression del'atmosphère ralentit l'évaporation, et que ce changementd'état s'opère dans le vide d'autant pluspromptement que ce vide est plus parfait.M. Leslie, membre de la Société royale de Londres,a imaginé d'augmenter encore l'effet de la suppressionde l'air, en plaçant sous le récipient de la machinepneumatique des corps très avides d'humidité,qui, s'emparant de la vapeur à mesure qu'ellese forme, en multiplient indéfiniment la production; etil est parvenu, par cette méthode, à unrefroidissement si rapide et si violent que l'eau segèle en quelques minutes, quelque temps qu'il fasse.


ET MÉTÉOROLOGIE. 49C'est un moyen d'avoir à volonté de la glace presquesans autre frais que le feu nécessaire pour dessécherde nouveau le corps avide d'humidité que l'on a employé.L'acide vitriolique très concentré, et le muriatede chaux, sont les absorbants les plus commodespour cet usage.Deux jeunes chimistes, MM. Clément et DésOrmes,se sont occupés de déterminer les limites de ceprocédé, et le degré d'économie où l'on peut le porter;et, par le calcul de la quantité de caloriquecontenue dans la vapeur de l'eau et de la quantitéde charbon nécessaire pour produire une quantitéde vapeur donnée, ils ont reconnu qu'il ne fautqu'un peu plus d'une partie de charbon pour rétablirdans son premier état l'absorbant qui a servi àgeler 5oo parties d'eau. Ainsi 100 livres de glacene coûteroient qu'une livre et quelques onces decharbon.On peut augmenter l'effet en empêchant qu'il nepénétre du calorique du dehors, et il suffit pourcela de rendre le récipient peu conducteur de lachaleur, en le faisant par exemple de deux lamesde métal poli, séparées par une couche d'air.On tire encore de cette accélération de l'évaporationpar le vide, augmentée par la présence des absorbants,un avantage plus évident quand il s'agitBUFFON. COMPLÉM. T. II. 4


o PHYSIQUE, CHIMIE,seulement de dessécher des substances humides,parcequ'on évite alors de leur faire subir l'action dufeu qui les altère toujours plus ou moins.Notre confrère, feu M. de Montgolfier, avoit déjàimaginé de dessécher complètement des sucs deplantes, etnotammenfrle jus de raisin, par la pompepneumatique ; et s'étoit assuré qu'en délayant cedernier jus dans l'eau, après qu'il avoit été desséché,l'on pouvoit encore le faire fermenter et en obtenirde très bon vin. Mais il en coûtoit trop de travail,au lieu que l'addition d'un absorbant suppléeà l'action continuée de la pompe.Cependant il faut empêcher que ces sucs ne gèlent,inconvénient qui ne seroit pas moins fâcheuxque ceux qui peuvent résulter du feu. MM. Clémentet Désormes ont trouvé un moyen fort simple d'yparer. Ils enveloppent le vase qui contient le suc àévaporer avec la matière absorbante ; ainsi le calorique,qui se dégage de la vapeur au moment oùelle est absorbée, retourne au suc qu'on évapore,et cette circulation fournit à ce qu'exige la nouvellevapeur.On peut employer ce procédé avec beaucoupd'économie, si l'on commence par réduire le suc àl'état de sirop, au moyen d'un ventilateur qui estaussi de l'invention de M. de Montgolfier, et queMM. Clément et Désormes ont décrit dans les An-


ET MÉTÉOROLOGIE.5lnales de Chimie (octobre 1810). La pompe pneumatiquene s'applique qu'au moment où ce ventilateurne produit plus d'effet.Chacun comprend de quelle utilité peut être,pour les usages domestiques, et sur-tout pour lamarine et pour les armées, ce nouvel art de conserverdans leur intégrité les substances alimentairesen diminuant beaucoup leur poids, et de transportersous un petit volume, dans des régions éloignées,la matière fermentescible qui doit donner le vin etl'alcohol.Les mêmes physiciens proposent d'appliquerl'évaporation dans le vide à la dessication de la poudrequi, se faisant sans feu, se feroit sans danger.Ils se sont aussi occupés de l'évaporation ordinairepar le moyen du feii, et ont trouvé un moyende doubler les effets d'une quantité donnée de combustiblesur un liquide aqueux, tel qu'une dissolutionsaline. Il ne s'agit que de recueillir la vapeurd'une première portion du liquide, et de la contraindreà passer au travers d'une seconde portion.Cette vapeur très échauffée donne une grande partiede son calorique au nouveau liquide qu'elle traverse,et fait déjà la moitié de la besogne.Mais de tous les arts celui qui a retiré des découvertesmodernes sur la chaleur et sur la vaporisationles avantages les plus étonnants, c'est celui du4-


52 PHYSIQUE, CHIMIE,distillateur d'eau-de-vie ; le procédé que nous venonsd'indiquer n'est même qu'une imitation deceux qui ont donné une partie de ces avantages.Cette révolution, qui exerce déjà l'influence laplus salutaire sur la prospérité de nos départementsméridionaux, est due à feu Edouard Adam, distillateurde Montpellier.Le fonds de son procédé consiste à faire chaufferune grande partie du vin mis en distillation par lavapeur d'eau-de-vie qui s'élève de la chaudière, età faire passer cette vapeur par une série de vaisseauxbaignés en partie par de l'eau froide, qui luifait déposer ses parties aqueuses, en sorte que leseul esprit-de-vin bien pur se condense dans le dernierréfrigérant.De cette manière, au lieu de chauffer d'abordpour obtenir de l'eau-de-vie à 19 degrés, d'où l'ontiroit ensuite par des chauffes successives les esprits-de-vinde différentes forces, l'on a tout d'uncoup l'esprit-de-vin au degré que l'on veut. De plusl'ancien alambic ne recevoit que deux chauffes parjour, et celui d'Adam en reçoit huit; ce dernierextrait un sixième de plus d'esprit de la même quantitéde vin ; il économise deux cinquièmes de combustibleet trois quarts de main-d'œuvre ; enfin l'esprit-de-vinqu'il fournit n'a jamais de goût d'empyreume.


ET MÉTÉOROLOGIE. 53Il n'est pas étonnant qu'avec de tels avantagesce procédé ait été si promptement adopté par lesdistillateurs : une ruine infaillible eût été le partagede ceux qui se seroient opiniâtres à suivre l'ancienneméthode.M. Duportal, chimiste de Montpellier, en a présentéà l'Institut une description fort exacte qui aété imprimée, et où il indique aussi les perfectionnementsqu'y a portés M. Isaac Bérard.Il est essentiel de remarquer ici que l'idée pri^mitive de chauffer par la vapeur appartient à M. lecomtedeRumfort, associé étranger de l'Institut, quila publiée à Londres, en 1798. C'est ainsi qu'unesimple proposition générale, qui ne paroît d'abordqu'une vérité abstraite et sans usages, peut enrichirdes provinces entières.M. le comte de Rumfort, qui a fait en physiqueun si grand nombre de ces découvertes utiles, etqui a sur-tout fait son étude des avantages de toutgenre que nous retirons du feu, a présenté cetteannée à l'Institut plusieurs recherches sur la lumière.Après avoir décrit diverses nouvelles formes delampes propres à décorer les appartements, et àservir de bougeoirs, de lanternes, et de veilleuses,sans aucun des inconvénients que les lampes usitéesconservent encore dans ces circonstances, il a


54 PHYSIQUE, CHIMIE,cherché à résoudre ce grand problème, sur lequelles physiciens sont divisés depuis plus d'un siècle,celui de savoir si la lumière est une substance quiémane des corps lumineux , ou un mouvement imprimépar ces corps à un fluide d'ailleurs imperceptibleet répandu dans l'espace.Comme une quantité donnée d'une espèce donnéede combustible dégage toujours en se brûlantune même quantité de chaleur, elle devroit aussi,s'est dit M. le comte deRumfort, dégager une mêmequantité de lumière, si la lumière y étoit contenuede la même façon que la chaleur; car ceux mêmequi ne considèrent pas la chaleur comme une substanceconviennent que c'est une force , une quantitéde mouvement qui peut être concentrée dansun corps, et qui s'en dégage en même quantitéqu'elle y a été mise, comme un ressort se débande.Au contraire, si la lumière n'est qu'un mouvementimprimé à l'étherparles vibrations des corpsqui brûlent, sa quantité pourra être proportionnelle,non pas à la quantité de ce corps qui auraété brûlé, mais à la vivacité avec laquelle la combustions'en sera faite, et sur-tout au temps quechacune de ses particules sera restée échauffée audegré convenable pour ébranler celles de l'éther.Ayant fait ses expériences d'après ces idées, soitavec des lampes, soit avec des bougies , il a trouve


ET MÉTÉOROLOGIE. 55que la chaleur, dégagée dans un temps donné,étoit toujours proportionnelle à la quantité d'huileou de cire brûlée, tandis que la quantité de lumièrefournie dans le même temps varioit à un degréétonnant, et dépendoit sur-tout de la grandeur dela flamme, grandeur qui retarde son refroidissement: une petite mèche de veilleuse, par exemple,donne seize fois moins de lumière qu'une bougiecommune, en brûlant autant de cire, et en échauffantla même quantité d'eau au même degré.Ainsi tout ce qui peut maintenir la chaleur dela flamme contribue à augmenter la lumière, etl'on peut arriver à des résultats vraiment surprenants.M. le comte de Rumfort, qui avoit reconnu pardes expériences plus anciennes que toute flammeest transparente pour une autre flamme, a combinéses deux découvertes ; et, ayant construit des lampesoù plusieurs mèches plates, placées parallèlementles unes aux autres, se garantissent mutuellementcontre le froid,il leur à fait produire unelumière égale à quarante bougies; et il pense quel'intensité où l'on pourroit arriver n'a pas de terme,ce qui peut devenir de la plus grande importancepour les fanaux; car jusqu'iciil n'avoitpas été possibled'en porter la lumière au-delà de certaineslimites, parcequ'en agrandissant trop les mèches à


56 PHYSIQUE, CHIMIE,double courant d'air, leur lumière diminuoit envertu de causes que les expériences dont nous venonsde rendre compte expliquent facilement.Ce que nous avons dit ci-dessus du refroidissementdes corps par l'évaporation est un cas particulierde cette loi, que tout corps qui se dilateabsorbe de la chaleur, tandis qu'il en dégage en secondensant. Cette loi souffre cependant quelquesexceptions, et il en est qui sont connues et expliquéesdepuis long-temps ; telles que celle du nitre,qui garde en beaucoup de circonstances, en secondensant, une grande proportion de chaleurdont les effets sont assez sensibles lors de la combustionde la poudre ; mais il y a aussi de ces exceptionsqui tiennent à des causes plus obscures ; telleest celle que M. Thillaye, professeur au Lycée impérial, a fait connoître.Le mélange de l'esprit-de-vin avec l'eau est toujoursaccompagné d'une élévation dans la température, et il s'y fait généralement une condensationplus forte qu'elle ne devroit être d'après la densitéproportionnelle des deux fluides, condensationd'après laquelle on explique cette chaleur.Mais M. Thillaye a trouvé que, lorsque l'alcoholest foible, loin que le mélange se condense, il seraréfie, et que cependant la chaleur se manifestecomme à l'ordinaire. Il a construit des tables de ses


ET MÉTÉOROLOGIE. 57expériences, d'après lesquelles on voit que l'alcohol,à 0,9544 de densité, commence à donner dela raréfaction. Le maximum de l'effet se montrequand l'alcohol est à 0,9688 , et qu'on le mêle avecune fois et demie son poids d'eau ; et l'élévation detempérature est encore de deux degrés.Le cas contraire, celui des condensations sansdégagement de chaleur, produit les matières détonantes,dont la plus connue, comme nous venonsde le dire, est la poudre à canon. L'une des plusterribles est cette espèce de poudre où l'on substitueau nitre le muriate oxygéné de potasse ; mais elleest aussi l'une des plus dangereuses, car elle détonepar la simple percussion, et même par lefrottement. Cependant on a imaginé d'en faireusage pour amorcer.les fusils, parceque n'ayant pasbesoin d'étincelle, elle ne manque jamais son effet,et même un arquebusier, M. Page, a inventé desplatines appropriées à cet usage; mais comme leplus léger frottement l'enflamme, il est dangereuxmême de l'employer ainsi.MM. Bottée et Gengembre ont cherché unepoudre qui conservât la faculté de détoner par lechoc, sans exposer au danger d'une explosion spontanée; et, après avoir fait de nombreux essais, ilsen ont trouvé une qui remplit toutes les conditionsdésirables. Elle se compose de cinquante-quatre


58 PHYSIQUE, CHIMIE,parties sur cent de muriate suroxygéné, de vingtet une de nitre ordinaire, ou nitrate de potasse;de dix-huit de soufre, et de sept de poudre de lycopode.Elle exige le choc des corps les plus durs ; et,ce qui est le plus particulier, la partie seule qui reçoitle choc détonne; les parties voisines ne fontque s'enflammer par communication, mais ellesne produisent aucune explosion, en sorte que cettepoudre est absolument sans danger : elle a donc del'importance, puisqu'elle rend facile l'usage d'unprocédé qui en a lui-même.Les recherches des chimistes sur les moyens desuppléer aux denrées exotiques continuent avectout le zèle que les invitations du gouvernementsont faites pour inspirer.Notre confrère M. Deyeux a publié une instructionsur les précautions à prendre dans la culturede la betterave, pour la rendre plus abondante enmatière sucrée. M. Zanetti a présenté des expériencessur la qualité sucrante du suc de maïs.M. Deslonchamps, médecin à Paris, en a fait surles effets du suc .de pavot des jardins, comparés àceux de l'opium d'orient ; il les a trouvés semblablespour le suc obtenu par l'incision des capsules,deux fois plus foibles pour celui qui résulte de leurexpression, et quatre fois pour l'extrait des feuilleset des tiges ; le premier seul a l'odeur vireuse dont


ET MÉTÉOROLOGIE. 59on croit que dépendent les mauvais effets del'opium.M. Chevreul, aide-naturaliste au Muséum d'histoirenaturelle, a travaillé sur le pastel, pour éclairerceux qui essaieront de lui faire reprendre dansla teinture la place que l'indigo lui avoit enlevée ;ou plutôt il a fait de cette plante intéressante l'objetde recherches encore plus générales, et propres àperfectionner toutes les méthodes d'analyse végétale.Il a fait voir que la fécule du pastel est composéede ciré, et d'une combinaison d'une résineverte, d'une matière végéto-animale, et d'un indigoà l'état de désoxiclation, mais qui peut aisémentreprendre de l'oxigène. Le suc filtrélui a encoredonné des substances dont le nombre et la variétésont faits pour étonner, et d'où l'on peut conclureque quelques unes de celles qu'on a regardées jusqu'icicomme des principes immédiats des végétauxse laissent encore diviser, sans décomposition, enprincipes plus simples.Le même chimiste a présenté un travail analoguesur le bois de campêche ; il y trouve quinze principesdifférents, dont le plus remarquable est celuiqu'il a nommé campechium, et auquel ce bois doitsa propriété tinctoriale. Ce principe est brun-rouge,sans saveur et sans odeur; il cristallise, donne à ladistillation les mêmes éléments que les substances


60 PHYSIQUE, CHIMIE,animales, se combine avec tous les acides et toutesles bases salifiables, et forme avec les premières deces substances des combinaisons rouges ou jaunes,selon la quantité d'acide employée ; et avec lesautres des combinaisons bleues-violettes, et celaavec tant de facilité qu'on peut l'employer avec plusde sûreté que le sirop de violette pour reconnoîtreles alcalis ; mais l'oxide d'étain au maximum fait exceptionà cette règle; il agit sur le campechiumcomme un acide, et le rougit, tandis que l'hydro-rgène sulfuré qui, dans tant d'autres circonstances,se comporte comme les acides, décolore le campechium.On n'avoit encore appliqué la théorie des affinirtés qu'à la décomposition réciproque des sels solubles: il restoit à savoir si les sels insolubles ne sontpas susceptibles aussi d'échanger leurs principesavec certains sels solubles. M. Dulong a examinécette question d'une manière générale dans un mémoireprésenté à l'Institut, et qui est la premièreproduction de ce jeune chimiste. Il y traite d'aborden particulier de l'action des carbonates et des souscarbonatesde potasse et de soude sur tous les selsinsolubles ; et il parvient à ce résultat remarquable,que tous les sels insolubles sont décomposés parlesdeux carbonates précédents, mais que l'échangemutuel de leurs principes ne peut se faire complé-


ET MÉTÉOROLOGIE.6ltement dans aucun cas ; et réciproquement, quetous les sels solubles, dont l'acide peut former unsel insoluble avec la base des carbonates insolubles,sont décomposés par ceux-ci, jusqu'à ce que la décompositionait atteint une certaine limite qui nepeutplusêtre dépassée : en sorte quedans des circonstancesidentiques il se produit des combinaisonsabsolument opposées. M. Dulong observe qu'iln'existe peut-être aucun fait qui soit plus évidemmenten contradiction avec la théorie des affinitésde Bergman. Il fonde l'explication qu'il donne deces phénomènes, en apparence contradictoires, surles changements qui surviennent pendant le coursde la décomposition dans le degré de saturationde l'alcali, qui est toujours en excès, et fait unenouvelle application du principe si bien établi parM. Berthollet sur l'influence de la masse dans lesphénomènes chimiques. Enfin il déduit de cettethéorie un moyen de prévoir quels sont les selssolubles susceptibles de décomposer un sel insolubledonné.Le célèbre Scheele découvrit en 1780 que lebleu de Prusse n'est qu'une combinaison du feravec un acide particulier que les chimistes ontnommé depuis acide prussique. On ne l'avoit encoreobtenu que mêlé de beaucoup d'eau. M. Gay-Lussac, en décomposant le prussiate de mercure par


62 PHYSIQUE, CHIMIE,l'acide muriatique à l'aide de la chaleur, en recevantle produit dans des flaconsentourés de glace,et en le rectifiant sur du carbonate et du muriatede chaux, est parvenu à donner à l'acide prussiquela plus grande concentration. Dans cet état cetacide jouit de propriétés remarquables. Son odeurest presque impossible à supporter; et, ce qui estplus curieux, il entre en ébullition à 26 degrés, etse congèle à 1 5 ; intervalle si peu considérable que,quand on en met une goutte sur une feuille de papier,l'évaporation d'une partie produit assez defroid pour congeler le reste.M. Boullay, pharmacien de Paris, à qui l'on doitla découverte d'un éther phosphorique, en a aussiformé un avec de l'alcohol et de l'acide arsenique;mais il faut employer pour cela beaucoup de cesdeux substances. Les propriétés de cet éther sontsemblables à celles de l'éther sulphurique ou ordinaire, et la théorie de sa formation est la même.M. Chrétien, médecin de Montpellier, ayant faitconnoître dans les préparations d'or des propriétéstrès remarquables contre les maladies syphilitiqueset lymphatiques-, l'attention des chimistes s'est portéesur ce métal, et MM. Vauquelin, Duportal, etPelletier, ont examiné de nouveau ses dissolutions,pour acquérir des connoissances plus précises del'état où il se trouve dans les préparations pharma-


ET MÉTÉOROLOGIE. 63ceutiques. Néanmoins il restoit encore beaucoupd'incertitude sur ce sujet, parceque les propriétéschimiques de plusieurs des combinaisons de l'orsont très fugitives.M. Oberkampf le fils a présenté cette année àl'Institut un premier essai de ses travaux en chimie, dans lequel il fait disparoître plusieurs de cesincertitudes. Il a produit des sulfures et des phosphuresd'or, et montré que les différences étonnantes,observées dans Faction des alcalis sur lesdissolutions d'or, tiennent à la proportion de l'alcali: s'il y en a assez, le précipité est noir, et c'estun véritable oxide d'or;s'il n'y en a pas suffisamment,le précipité est jaune, et c'est un muriateavec excès d'oxide ; la différence de proportion del'acide ne produit pas des effets moins variés; enfin,dans la précipitation par l'oxide d'étain, lesrésultats diffèrent encore beaucoup, selon la proportionde l'oxide. M. Oberkampf a déterminé laquantité d'oxigène que contient l'oxide d'or, et quiest telle que sur 100 parties il y en a 90,9 d'or, et9,1 d'oxigène.Nos confrères MM. Thénard et Gay-Lussac ontfait imprimer cette année leurs Recherches physicochimiques,où ils ont recueilli tous les mémoiresqu'ils ont lus à l'Institut jusqu a cette époque, et unassez grand nombre d'autres, tous plus où moins


64 PHYSIQUE, CHIMIEimportants pour les sciences que ces jeunes chimistescultivent avec tant d'éclat.MM. Bouillon-La-Grange etVogel ont publié unetraduction françoise du Dictionnaire de Chimie deM. Klaproth, associé étranger de l'Institut; ouvragequi offre en peu de volumes toutes les notions essentiellesde la chimie, exposées avec autant de clartéque de solidité, et d'après les découvertes les plusnouvelles.Depuis 1 que les chutes des pierres de l'atmosphèresont un phénomène reconnu, on l'observesouvent. Le général comte Dorsenne a adresséd'Espagne à l'Institut une de ces pierres tombée enCatalogne. M. Pictet, correspondant, nous a donnédes détails sur deux autres, dont l'une est tombéesur un vaisseau, cas jusqu'à présent unique dansl'histoire de ces chutes.M. Sage, à l'occasion des trombes qui ont exercécette année leurs ravages, l'une près de Montmédy,le 2 3 avril, l'autre à Moyaux, près de Lisieux,le 2 mai, a rappelé, dans un mémoire historique,les circonstances de plusieurs phénomènes de cegenre observés en différents temps.


ET MÉTÉOROLOGIE. 65ANNÉE 1812.Chacun sait que la chaleu r est l'un des principauinstruments de la chimie et l'une des plus grandesforces qui agissent dans ses phénomènes; on peutla considérer en elle-même, dans ses effets, ou dansses sources.M. le comte de Rumfort, constamment occupédes sciences dans leurs rapports avec les besoins dela société, a traité cette année de la chaleur sous cedernier point de vue, et a cherché avec beaucoupde soin à déterminerquelle quantitéil s'en développedans la combustion de chaque substance.Pour arriver à ce but il falîoit d'abord avoir unmoyen général de mesurer exactement ces quantitésde chaleur ; et quand on réfléchit à la complicationdu phénomène de la combustion, l'on sent aisémentcombien de difficultés dévoient arrêter M. de Rumfortdans ses tentatives. Ce n'est qu'après vingt ansde travaux qu'il est parvenu à les vaincre.Son idée principale étoit de mesurer la quantitéd'eau qui passe d'un degré fixe à un autre égalementfixe par la combustion d'une quantité bien déterminéede chaque substance.L'appareil qu'il a imaginé pour cela consiste enun récipient prismatique et horizontal de cuivre,où l'on a pratiqué deux goulots: l'un près d'uneBUFFON. COMPLÉM. T. II. 5


66 PHYSIQUE, CHIMIE,extrémité, pour recevoir un thermomètre; l'autreau milieu de la partie supérieure, par lequel onverse l'eau, et que l'on ferme par un bouchon. Dansl'intérieur du récipient est une espèce de serpentinde forme aplatie qui en couvre tout le fond sans letoucher, et qui doit recevoir les produits aériformesde la combustion par le moyen d'un tuyau verticalsoudé à son orifice. Ce serpentin revient trois foissur lui-même, et son autre extrémité traverse horizontalementla paroi verticale du récipient qui luiest contigu. La bonté de tout l'appareil dépendessentiellement de la forme plate du serpentin, quidoit exactement transmettre au liquide contenudans le récipient toutes les portions de la chaleurqu'il reçoit lui-même du corps qui brûle.Cependant le récipient, une fois devenu pluschaud que l'air environnant, devoit perdre du caloriquequ'il auroit reçu ; et l'azote de l'air qui auroitservi à la combustion, se trouvant avec les autresproduits dans le serpentin, devoit aussi en garderune portion.Pour remédier à ces deux causes d'erreur M. deRumfort a eu l'idée aussi simple qu'efficace de commencertoutes ses expériences à un degré déterminéau-dessous de l'air en vironnant, et de les faire cesserquand l'eau du récipient étoit arrivée à autant dedegrés au-dessus; de sorte que dans le commen-


ET MÉTÉOROLOGIE, 67cernent l'air environnant et l'azote fournissent àl'eau précisément autant de calorique qu'ils lui enreprennent ensuite.Le réservoir cylindrique du thermomètre a précisémentla même hauteur que le récipient, ensorte qu'il indique exactement la chaleur moyennede toute la masse de l'eau.M. de Rumfort, muni de cet appareil, a doncbrûlé successivement différents combustibles, maisen prenant des précautions telles que leur combustionfût complète, c'est-à-dire qu'ils ne laissassentaucun résidu, et ne donnassent ni fumée ni odeur ;car il considéroit avec raison la plus légère odeurcomme la preuve qu'une partie de combustibles'étoit vaporisée sans brûler. Il a trouvé ainsi qu'unelivre de chaque substance faisoit passer de la températurede la glace fondante à celle de l'eau bouillante, savoir :La cire blancheL'huile d'oliveL'huile de colzaL'alcoholL'éther sulfurique ....Le naphteLe suif.o,4632 livres d'eau.9o4^9 id.9^073 id.67/170 id.8o3o4 id.73376 id.83687 id.Ce qui est très remarquable c'est qu'en admettantles analyses de ces substances faites par Lavoi-5.


68 PHYSIQUE, CHIMIE,sier, Cruickshansk,MM. deSaussure, Gay-Lussac,et Thénard, et en calculant la chaleur qui auroitété produite par l'hydrogène et le carbone quientrent dans leur composition si on les eût brûlésséparément, on arrive à très peu près aux mêmesrésultats.Nous ne pourrions faire sentir tout le mérite deces recherches qu'en rapportant les nombreux calculsde l'auteur; et c'est ce que la nature de notretravail ne comporte pas.Muni de ces connoissances préalables, M. deRumfort est passé à la détermination de la quantitéde chaleur développée par la combustion des différentsbois; mais ici le problème devenoit pluscompliqué. Une haute température produit denombreux changements sur le bois; une partie deses éléments est expulsée , une autre contracte descombinaisons nouvelles: il falloit donc examinerd'abord la structure des bois, la gravité spécifiquede leurs parties solides, la quantité de liquides etde fluidesélastiques qu'ils contiennent dans leursdivers états, enfin ce qu'ils fournissent de charbon.Après les avoir exactement desséchés dans uneétuve, M. de Rumfort est arrivé à ce résultat singulierque la pesanteur spécifique de la matièresolide qui fait la charpente du bois est à-peu-près lamême dans tous les arbres; il a reconnu par le


ET MÉTÉOROLOGIE. 69même moyen que la partie ligneuse dans le chêneen pleine végétation ne fait pas quatre dixièmes dutotal : l'air en fait un quart, et le reste est de la sève.Les bois légers ont encore beaucoup moins de partiessolides ; maisil y a des variations selon les saisonset l'âge des arbres. Le bois sec ordinaire contientencore près d'un quart de son poids d'eau, etil n'y en a jamais moins d'un dixième dans les plusvieilles poutres placées depuis des siècles dans descharpentes.Par des expériences exactes de carbonisationM. de Rumfort a trouvé que tous les bois absolumentsecs donnent de 42 à 43 centièmes de charbon; d'oùil a conclu que la matière propre du boisest identique dans tous les arbres. Cette perte quele bois le plus sec éprouve encore quand on le carbonise,la quantité absolue de carbone déterminéepar MM. Thénard et Gay-Lussac à 52 ou 53 centièmes,les matières qui se déposent sur les vases,enfin ce fait que le bois trop desséché, trop rapprochéde l'état de charbon, développe moins dechaleur, lui font juger qu'il existe autour de la fibrecharbonneuse proprement dite, ou du squelette dubois (comme l'auteur l'appelle), une autre substancequ'il compare à quelques égards aux muscles,et qu'il nomme chair végétale. C'est sur cette enveloppeque se porte la première atteinte du feu,


70 PHYSIQUE, CHIMIE,parcequ'elle contient de l'hydrogène qui la rendplus inflammable, et qui contribue beaucoup à lachaleur donnée par chaque bois.Des nombreuses expériences et des calculs compliquésde M. de Rumfort est résulté enfin une tablede la quantité d'eau que les divers bois, selon leurplus ou moins de dessèchement, peuvent faire passerrespectivement de la température de la glacefondante à celle de l'eau bouillante, table où l'onvoit que le tilleul est le bois qui donne le plus dechaleur, et le chêne celui qui en donne le moins.Il résulte encore de ses analyses que la perte dechaleur inévitable dans la carbonisation du bois estde plus de 42 pour cent, mais qu'elle est de plusde 64 par les procédés ordinaires des charbonniers,parcequ'ils forment beaucoup d'acide pyroligneuxqui consomme cette grande j^roportion de carbone;enfin que tout le charbon fourni par une quantitéd'un bois quelconque ne donne pas plus de chaleurque le tiers de la même quantité brûlé à l'état debois.M. de Rumfort croit encore avoir reconnu dansle cours de ses expériences ce fait important pourla chimie, que le carbone peut s'unir à l'oxygèneet former avec lui de l'acide carbonique à une températurebeaucoup plus basse que celle où il brûlevisiblement.


ET MÉTÉOROLOGIE. 71La difficulté de suivre ici le savant physiciendans ses calculs compliqués sur la plus grande intensitéde chaleur qu'il est possible de produire, etsur la quantité de chaleur produite par la condensationde la vapeur de l'eau et de l'alcohol, nousoblige à n'en citer que les principaux résultats. Ilétablit par exemple que la température de l'eau àl'instant où elle se forme par la combinaison del'oxygène et de l'hydrogène est huit fois plus élevéeque celle du fer chauffé au point de paroître rougeen plein jour, et que l'eau bouillante, en passantà l'état de vapeur, rend latents io4o degrés dechaleur, ou, ce qui revient au même, que cettequantité se développe quand la vapeur d'eau secondense.Selon les mêmes expériences la capacité de lavapeur d'eau pour la chaleur diminue avec sa température; et des phénomènes relatifs à la vapeurd'alcohol on peut conclure que l'hydrogène et l'oxygènequi entrent dans la composition de ce liquiden'y sont point à l'état d'eau.L'institut avoit proposé pour sujet de l'un de sesprix de physique la détermination de la capacitédes gaz oxygène, acide carbonique, et hydrogène,pour la chaleur.Ce prix vient d'être décerné à un mémoire deMM. François Delà roche et Bérard. Ces deux phy-


72 PHYSIQUE, CHIMIE,sîciens ne se sont pas bornés à résoudre la questionproposée : embrassant la matière sous un point devue général, ils ont examiné encore d'autres gaz, etont aussi cherché à déterminer la capacité de lavapeur aqueuse et celle de l'air sous des pressionsdifférentes; ils ont trouvé, entre autres résultatsintéressants, que la capacité d'une masse donnéed'air augmente avec son volume. Ramenant enfintoutes les capacités à celle de l'eau, les auteurs ontdressé la table suivante, comme résultat définitifde leur travail :Capacité de l'eau. i ,0000Air atmosphérique 0,2669Gaz hydrogène 3,2936Gaz acide carbonique...... .. 0,2210Gaz oxygèneo,236iGaz azote .. 0,2^54Gaz oxyde d'azote 0,2369Gaz oléfiant.. .... 0,420^Gaz oxyde de carbone.. .. 0,2884Vapeur aqueuse 0,8470La chaleur pénétre tous les corps ; elle contribueessentiellement à leur dilatation, et on l'en exprimeen quelque sorte chaque fois qu'on les réduit, parune opération quelconque, à des dimensions pluspetites.Ainsi l'on sait, par les expériences faites à Lyonil y a dix ans par M. Mollet, que l'air comprimé


ET MÉTÉOROLOGIE. 73subitement développe de la chaleur, et que cettechaleur est accompagnée de lumière. Ce phénomènea donné lieu d'imaginer l'instrument commodeque l'on appelle briquet à piston.M. Dessaignes, habile physicien de Vendôme,dans un mémoire dont nous avons rendu compte,ayant soumis différents gaz à la même opération,obtint des effets semblables, et l'on en conclut avecune apparence de raison qu'ils dévoient se reproduiredans tous les fluidesaériformes; mais M. deSaissy, médecin de Lyon, ayant répété les expériencesde M. Dessaignes, n'est parvenu à rendrelumineux que le gaz oxygène, le gaz acide muriatique, et l'air commun : le premier des trois estcelui qui lui a donné le plus de lumière ; après luivient l'acide muriatique: l'air commun en a donnéle moins. Les autres gaz ne sont devenus lumineuxqu'autant que l'on y a ajouté deux centièmesd'oxygène.M. de Saissy conclut de là que les fluidesaériformesn'ont la propriété de dégager de la lumièrepar la compression que lorsqu'ils contiennent dugaz oxygène libre ou foiblement combiné ; il penseque ce fait, une fois bien constaté, pourra donnerune nouvelle probabilité à l'opinion que la chaleuret la lumière sont des substances différentes.La doctrine de M. le comte Berthollet sur les


74 PHYSIQUE, CHIMIE,actions diverses qui influent dans les résultats définitifsdes phénomènes chimiques repose entreautres sur ce fait, à-peu-près général, qu'un alcaliqui décompose une combinaison saline ne fait quelui enlever la portion d'acide qui lui donnoit sasolubilité, et qu'aussitôt que cette combinaison estdevenue insoluble elle se précipite en conservantle reste de son acide et même en prenant souventune portion de l'alcali qui agit sur elle; ensorte que le précipité est presque toujours plus oumoins composé. Cependant M. Toboalda avoit annoncéque les alcalis purs précipitent du muriatesuroxygéné de mercure, vulgairement appelé sublimécorrosif, un oxyde de mercure dépouillé detout acide. M. Berthollet, voulant vérifier cetteexpérience, a trouvé que ce précipité n'est purqu'autant que l'on mef dans la dissolution de sublimécorrosif plus d'alcali qu'il n'en faut pour enenlever tout l'acide muriatique. Dans le cas contrairele précipité conserve toujours une portiond'acide qui varie selon les circonstances. L'espècede l'alcali est indifférente; mais quand la potasse,par exemple, est complètement saturée d'acidecarbonique, elle ne décompose point le muriatemercuriel. Au contraire, si l'on emploie un souscarbonatede potasse, c'est-à-dire une potasse imparfaitementsaturée, ce sous-carbonate agit jusqu'à


ET MÉTÉOROLOGIE. 7 5ce qu'il ait perdu la potasse qu'il avoit en excès;mais, dans ce cas, le précipité retient à-la-fois del'acide muriatique et de la potasse.Les alcalis produisent les mêmes effets sur le nitratede peroxyde de mercure, et des expériencesfaites sur du sulfate d'alumine ont encore donnédes résultats analogues, c'est-à-dire qu'elles ont concouruà confirmer la loi établie par M. Berthollet.Le même savant avoit fait il y a long-temps desexpériences pourreconnoître les proportions d'oxygèneet 'd'acide muriatique qui constituent l'acidemuriatique oxygéné; mais M. Ghenevix ayant obtenudepuis d'autres résultats, M. Berthollet estrevenu sur ce sujet. Il a reconnu que la lumièrequ'il avoit d'abord employée comme agent principaln'enlève qu'une certaine proportion d'oxygèneà l'acide, quoiqu'elle le ramène par-là à un état oùson action sur les réactifs diffère peu de celle del'acide muriatique simple. Il en conclut que cet étatest un premier degré d'oxygénation de la base muriatique;et, décomposant l'acide oxygéné parfaitpar le moyen de l'ammoniaque, il y a trouvé2 3,64 d'oxygène sur 100, au lieu de 9,41 qu'avoitdonné sa première analyse.Dans un de ses précédents mémoires M. Bertholletavoit fait connoître des faits d'où l'on pouvoitaisément conclure qu'il existoit des gaz hydro-


-6 PHYSIQUE, CHIMIE,gènes carbures, mais il avoit négligé de tirer cetteconclusion.L'analyse que M. de Saussure a faite du gazoléfianta mis cette vérité dans tout son jour en démontrantqu'en effet ce gaz ne contient point d'oxygène,et qu'il est un véritable gaz hydrogène carburécomposé, sur ioo parties, de 86 de carbone et de14 d'hydrogène.M. Dalton, en traitant le même sujet dans saChimie philosophique, a cherché à établir que lacombinaison de l'hydrogène avec le carbone se faitseulement dans deux proportions fixes. Par l'uneon a le gazoléfiant, et par l'autre le gaz inflammabledes marais ; il considère les gaz nommés par M. Berthollethydrogènes oxycarburés comme des mélangesde gaz hydrogène carboné, de gaz oxyde decarbone, et d'hydrogène.Selon M. Dalton le gaz oléfiant qu'on soumet àla chaleur ou à l'action de l'étincelle électrique passeà l'état de gaz des marais en déposant la moitié deson charbon, et le gaz des marais soumis aux mêmesactions se décompose entièrement ; et si avant d'êtrearrivé à cette entière décomposition on obtient ungaz particulier, ce gaz est un mélange d'hydrogèneavec le gaz carburé des marais. ;M. Berthollet a répété ces expériences avec l'électricité,mais elles ne l'ont point conduit aux résul-


ET MÉTÉOROLOGIE. 77tats annoncés par M. Dalton : une partie seulementdu gaz a été décomposée, et celle qui est restée indécomposéea résisté à la plus forte action de l'électricité.M. Berthollet conclut aussi, contrel'opinionde M. Dalton, que la petite quantité d'azote qui setrouve dans le gaz des marais fait une partie constituantede cette combinaison; car ce gaz, recueillidans des marais à des époques très éloignées, a toujoursdonné la même quantité d'azote.Enfin M. Berthollet, ayant soumis à l'action dela chaleur le gaz oléfiant, n'a pas obtenu davantageles résultats annoncés par M. Dalton ; et, bien loinde n'avoir trouvé que deux combinaisons entre legaz hydrogène et le carbone,il a vu au contraireque ces substances peuvent s'unir dans des proportionsindéfiniment variables, selon le plus ou moinsde chaleur qu'on leur a fait éprouver.M. Berthollet a aussi exposé au feu le gaz oxycarburé,et a obtenu des résultats analogues à ceuxdont il vient d'être question. Ce gaz a déposé ducharbon, et sa légèreté spécifique a augmenté. Dugaz oxyde de carbone a été exposé dans un tube incandescentà Faction de l'hydrogène sans éprouverde décomposition; ce qui est opposé à l'idée deM. Dalton, qui regarde le gaz oxycarburé commeun mélange de gaz oxyde de carbone et de gaz hydrogènecarburé: car, pour expliquer cette expé-


78 PHYSIQUE, CHIMIE,rience par l'hypothèse de M. Dalton, il faudraitattribuer tous les changements que la chaleuropèredans le gaz oxycarburé au gaz hydrogène carburéqu'il contiendroit ; ce qui est fort difficile, M. Bertholletayant prouvé par une expérience directeque l'hydrogène n'a aucune action sur le charbon.M. Thénard a fait sur le gaz ammoniac des expériencesbien singulières et à-peu-près inexplicablesdans l'état actuel de la chimie.Si l'on expose ce fluidebien pur à une hautechaleur dans un tube de porcelaine bien imperméable,il s'en décompose à peine quelques parcelles; au contraire la décomposition va très vite sil'on met dans ce même tube du fer, du cuivre, del'argent, de l'or, ou du platine : ces métaux éprouventun changement dans leurs qualités physiques;mais ils n'augmentent ni ne diminuent de poids,n'enlèvent ni ne cèdent au gaz rien de pondérable.Le fer possède cette propriété au plus haut degré;les métaux différents des cinq que nous avons citésn'en jouissent point du tout. Le gaz décomposé parce singulier moyen donne toujours trois partiesd'hydrogène contre une d'azote. Le soufre et lecharbon le décomposent aussi, mais en formantavec ses éléments de nouvelles combinaisons; cequi rentre dans les phénomènes ordinaires.Un métal ne peut se dissoudre dans un acide sans


ET MÉTÉOROLOGIE. 79être oxydé, et c'est tantôt à l'acide même, tantôt àl'eau, qu'il prend l'oxygène nécessaire: mais il arriveaussi quelquefois qu'une dissolution saturée d'unmétal dans un acide,si elle est aidée par la chaleur,peut encore dissoudre une nouvelle portion demétal ; et c'est ce que M. Proust a découvert pour lenitrate de plomb. Dans ce cas est-ce l'acide ou l'oxydemétallique de la dissolution qui fournit l'oxygèneà cette nouvelle portion de métal? M. Proust, etM. Thomson, qui a répété ses expériences, ontpensé que l'oxygène vient de l'oxyde ; d'où il résulteraitque la totalité du plomb ainsi dissous auroitproportionnellement moins d'oxygène, ou, en d'autrestermes, qu'il serait moins oxidé que celui quientre dans une dissolution faite à froid, et qui estconnu sous le nom d'oxyde jaune.Mais M. Chevreul, aide naturaliste au Muséumd'histoirenaturelle, ayant examiné de nouveau cettequestion, a trouvé qu'il se dégage du gaz nitreuxquand on dissout ainsi de nouveau plomb ; ce quine peut se faire sans que l'acide nitrique perde deson oxygène: d'où ce chimiste conclut que c'estl'acide qui fournit l'oxygène au nouveau plomb, etque la dissolution définitive n'est plus un nitrate,mais bien un nitrite, c'est-à-dire que l'acide est à unmoindre degré d'oxydation.Une propriété remarquable qui sert à distinguer


8oPHYSIQUE, CHIMIE,les nitrites de plomb des nitrates, c'est de formerdans les nitrates de cuivre un précipité composéd'une certaine quantité d'hydrate de cuivre et deplomb.D'après ces expériences M. Chevreul rend àl'oxyde jaune de plomb son rang de protoxyde,c'est-à-dire de celui où il entre le moins d'oxygène.Le travail de ce chimiste l'a conduit à examinerd'une manière générale les sels que forme le plombavec l'acide nitrique ; et il a prouvé q u'il peut existerdeux nitrates et deux nitrites, dont l'un, dans chaqueespèce, contient deux fois plus d'oxyde que l'autre.Il soupçonne même qu'il existe un troisième nitritecontenant quatre fois moins d'oxyde que lepremier.Les corps poreux absorbent des gaz dans diversesproportions, et le charbon est un de ceux qui enabsorbent le plus. La connoissance précise des limitesde cette absorption étant fort importantedans les opérations de la chimie, M. de Saussures'en est occupé récemment avec beaucoup de soinet de succès.Tous les charbons n'ont pas cette propriété aumême degré, et tous les gaz ne se laissent point absorberen même quantité. Le même charbon absorberaquatre-vingt-dix fois son volume de gaz ammoniacet à peine 1,75 de gaz hydrogène.


ET MÉTÉOROLOGIE.8lM. Thénard a répété ces expériences avec quelquesvariations, et en a obtenu à-peu-près les mêmesrésultats, dontil a dressé une table. Il a observé,ainsi que M. de Saussure, et comme M. de Rumfortl'a aussi remarqué dans d'autres expériences, quele gaz oxygène se change en acide carbonique,quoique la température soit peu élevée. Le gaz nitreuxse décompose en partie, et dégage du gaz acidecarbonique et de l'azote. Mais l'hydrogène sulfuréest le gaz dont l'absorption offre les phénomènesles plus intéressants : il se détruit en peu de temps,et donne de l'eau, du soufre, et assez de caloriquepour que le charbon s'échauffe beaucoup.M. Lampadius, chimiste et physicien allemand,en distillant des pyrites martiales avec du charbon,avoit obtenu une substance liquide et volatile dontla nature étoit encore douteuse.M. Lampadius lui-même et feu M. Amédée Bertholletla considéraient comme un composé desoufre et d'hydrogène, MM. Clément et Desormescomme une combinaison de soufre et de charbon.M. Clusel, préparateur de chimie à l'École polytechnique,ayant voulu fixerles opinions sur lanature de cette substance, a d'abord essayé de ladécomposer en la faisant passer sur des lames decuivre dans des tubes chauffés : mais ce moyen neBUFFON. COMPLÉM. T. II. 6


82 PHYSIQUE, CHIMIE,lui ayant pas entièrement réussi, il a cherché à enopérer l'analyse par la pile de Volta; et après denombreuses tentatives, des précautions délicateset multipliées, et un emploi savant de l'action chimiquedes différents corps, il a cru y reconnoître,sur i oo parties, près de Sg de soufre, 29 de charbon,6 d'hydrogène, et 7 d'azote: mais il trou voit dansses produits plus de soufre et de charbon qu'il n'enavoit mis en expérience.M. Thénard a repris le premier moyen de M. Clusel,qui, étant beaucoup moins compliqué, promettoitdes résultats plus décisifs; et en faisantpasser avec plus de lenteur le liquide de Lampadiussur le cuivre dans des tubes chauffés, il lui en a faitéprouver plus profondément l'action, et il l'a complètementdécomposé en 85 ou 86 centièmes desoufre et 14 ou 15 centièmes de charbon, sans azoteni hydrogène.On a vu dans les rapports précédents que M. Delaroches'étoit occupé de résoudre par de nouvellesexpériences les phénomènes que les animaux présententlorsqu'on les expose à une haute température.Il fitvoir que l'évaporation cutanée et pulmonaireétoit une des causes qui empêchoient les animauxde prendre complètement la température qui lesenvironnoit, mais qu'ils ne conservoient pas abso-


ET MÉTÉOROLOGIE. 83lument la leur, comme on l'avoit dit, et qu'ils s'échauffoientaussi par degrés.Cependant on observa que si la température ducorps animal s'élevoit comme celle des milieux environnants,et que leur respiration continuât d'agircomme auparavant, ils dévoient arriver à une chaleurbien plus élevée encore, parcequ'à celle dumilieu ils dévoient joindre celle qui est produitepar la respiration.M. Delaroche a donc voulu examiner la différenceque le résultat de la respiration ou , en d'autrestermes, l'absorption de l'oxygène peut éprouverdans un air plus ou moins échauffé, et ill'a trouvéesi foible qu'il est difficile d'en rien conclure ; elle estdans le rapport de 5 à 6.M. Delaroche a pensé qu'il n'y avoit aucune connexionnécessaire entre la fréquence des mouvementsrespiratoires et l'activité des phénomèneschimiques de la respiration ; car dans l'air chaudles mouvements de la poitrine étoient très accélérés.Une remarque intéressante est celle que les animauxà sang froid montrent une différence beaucoupplus marquée que les autres, et que la chaleuraugmente sensiblement l'activité de leur respiration;fait qui peut aider à expliquer plusieurs desphénomènes de leur économie.o.


84 PHYSIQUE, CHIMIE,Les calculs qui se forment quelquefois dans lavésicule du fiel,et qui ont été jusqu'à présent sirebelles aux secours de l'art, sont composés d'ordinairede cette substance nommée adipocire par leschimistes, parcequ'elle tient par ses caractères à lacire et au suif: mais il paroît qu'ils sont aussi sujetsà varier dans leur nature; car M. Orfila, docteuren médecine, en a analysé de tout différents, oùil n'existoit point d adipocire, mais du principejaune, une résine verte, et une petite quantité decette matière découverte par M. Thénard et nomméepar lui picromel, parcequ'elle donne une saveurdoux-amer.M. Vauquelin, continuant ses recherches surles principes des végétaux, a soumis à de nombreusesexpériences le daphne alpina, arbuste connupar l'excessive âcreté de son écorce, que l'on emploieen médecine comme rubéfiant, et dont l'extrait,combiné à des corps gras, forme une pommadequi remplace en beaucoup de cas celle decantharides.En traitant cette écorce par l'alcohol et par l'eau,il y a reconnu deux principes nouveaux et très remarquablespar leurs caractères.Le premier, que M. Vauquelin nomme principeacre, est de nature huileuse ou résineuse; ne devenantvolatile qu'à une chaleur supérieure à celle de


ET MÉTÉOROLOGIE. 85l'alcohol bouillant, il ne s'élève point avec ce liquide,mais on peut le distiller avec l'eau.Le second principe, nommé amer, se dissoutdans l'eau bouillante, et donne par le refroidissementdes cristaux blancs et en forme d'aiguilles.L écorce du daphne a fourni en outre, commecelle de beaucoup d'autres plantes, une résineverte, un principe colorant jaune, une matièrebrune qui contenoit de l'azote, puisqu'elledonnoitde l'ammoniaque, enfin des sels à base de potassede fer et de chaux.M. Vauquelin termine son mémoire par cetteobservation importante, que les substances végétalesacres et caustiques sont huileuses ou résineuses,et ne contiennent point d'acide développé,en quoi elles ressemblent aux plantes vénéneuses ;d'où il conclut qu'il faut se défier des plantes quine sont point acides.Réaumur a annoncé il y a plus d'un siècle quecertaines dents fossiles prennent une teinte bleuâtreplus ou moins semblable à celle de la turquoise,quand on les expose avec précaution à une chaleurgraduée. M. Sage, ayant reconnu qu'on obtient del'acide prussique en torréfiant un mélange de potasseet de la substance gélatineuse des dents, etque le barreau aimanté tire du fer de la poudre desdents calcinées, pense que cette couleur bleue des


86 PHYSIQUE, CHIMIE,turquoises occidentales est due à un véritable bleude Prusse.ANNÉE 1813.On a vu, dans notre analyse de 1811, comment,en accélérant l'évaporation par le vide et par la présenced'un corps très absorbant, M. Leslie, d'Edimbourg,étoit parvenu à faire congeler l'eau en toutesaison. Ce physicien a imaginé depuis un appareilqui a été montré à l'Institut par M. Pictet, son correspondant,et où l'on peut à volonté, et instantanément,faire congeler l'eau ou lui rendre sa liquidité.Pour cet effet on place de l'eau sous la clochepneumatique, dans un vase dont le couvercle selève ou s'abaisse au moyen d'une tige qui traversele haut de la cloche ; lorsqu'on découvre cette eau,cédant à l'action des causes qui la vaporisent, ellese gèle; et quand on la recouvre, la chaleur environnantela rend en peu d'instants à son premierétat.Notre confrère M. Gay-Lussac, qui a répété devantl'Institut l'expérience de M. Leslie, a rappelcun fait bien connu, qui rentre dans le même ordre,c'est le froid qui se produit dans certaines machinesd'où on laisse échapper de l'air condensé ; il a prouvequ'en toute saison il suffit que l'air ait été condens


ET MÉTÉOROLOGIE. 8pourrait s'en procurer aisément ainsi dans les pajchauds, en condensant l'air au moyen d'une chutd'eau.On peut, en employant des corps plus évaporablés que l'eau, arriver à des degrés de froid véritablement étonnants, et à faire geler non seuleménle vif argent, mais l'esprit-de-vin le plus pur; c'esà quoi est parvenu M. Hutton, d'Edimbourg, qua remarqué à cette occasion que , dans l'alcohol 1


88 PHYSIQUE, CHIMIE,guoit. Quand on intercepte le contact de l'air parune couche d'huile, par exemple, la cristallisationse retarde comme lorsqu'on supprime sa pressionen faisant le vide; tandis qu'au contraire la pressiond'une colonne de mercure n'accélère en rien cettecristallisation. Une dissolution qui traverse du mercuredont l'air a été chassé par l'ébullition necristallise point ; et si elle traverse du mercureordinaire, elle se prend aussitôt. Des secousses,l'introduction d'un petit cristal, et beaucoup d'autrescauses, déterminent la cristallisation , quelleque soit la pression. Ainsi M. Gay-Lussac conclutque ce n'est point par sa pression que l'air diminuele pouvoir dissolvant de l'eau. Il s'est assuré aussique ce n'est point en absorbant de l'air que l'eauperd de ce pouvoir; mais il pense que c'est un phénomèneplus ou moins analogue à celui de l'eaupure, qui, comme on sait, reste liquide à quelquesdegrés au-dessous de son vrai point de congélationtoutes les fois que l'on peut empêcher qu'elle nesoit agitée, et qui se prend aussitôt qu'on lui imprimele plus léger choc.La source la plus évidente de chaleur sur le globeconsiste dans les rayons du soleil; mais on a remarquédepuis long-temps que ces rayons divisés parle prisme ne donnent pas tous une chaleur égale,et M. Herschel, le célèbre astronome, reconnut, il


ET MÉTÉOROLOGIE. 89y a quelques années, que leur pouvoir d'échaufferva en augmentant du violet au rouge ; il assuremême qu'en dehors du spectre il se trouve encoredes rayons qui, sans être lumineux , jouissent d'unpouvoir échauffant plus fort que celui des rayonsrouges. MM. Ritter, Bœckman et Wollaston, annoncèrent,peu de temps après, que le pouvoirdes rayons lumineux, pour opérer certains changementschimiques, est distribué dans un ordreinverse, et s'exerce sur-tout dans le rayon violet eten dehors de ce rayon.M. Bérard, jeune chimiste de Montpellier, qui arépété avec beaucoup de délicatesse et de précisionces deux genres d'expériences, en a reconnu l'exactitudeà plusieurs égards; il a même trouvé que lepouvoir chimique de la lumière va en diminuantà mesure qu'on se rapproche du milieu du spectre.et qu'il s'évanouit au-delà. Mais, selon lui, c'est àl'extrémité du rayon rouge que réside le maximumdu pouvoir échauffant, et en dehors du spectreildiminue. M. Bérard a constaté encore que ces propriétésappartiennent à la lumière réfléchie par lesglaces, et à celle qui a été divisée par le spath d'Islande,comme à la lumière directe.On n'a pas obtenu des résultats aussi décisifs surle pouvoir d'aimanter le fer, attribué au rayon violetpar M. Morichini, savant chimiste romain. Quoi-


90 PHYSIQUE, CHIMIE,que les aiguilles exposées à ce rayon aient paru s'aimanterdans certaines expériences, elles n'ont pointéprouvé cet effet dans une infinité d'autres, sansque l'on puisse jusqu'à présent se rendre comptedes raisons de cette différence, car, dans les deuxcas, on avoit soigneusement éloigné toutes les au trèscauses connues pour pouvoir produire l'aimantation.Il est vrai que l'été de 1813 n'a pas favorisé cegenre de recherches à cause de son peu de sérénité.De tous les phénomènes que la chaleur présente,la dilatation qu'elle produit dans les corps est celuidont les lois se laissent le plus naturellement exprimerpar des formules mathématiques; et la connaissancede ces lois, qui fait une partie essentiellede la physique, est encore très importante dans unefoule d'expériences chimiques. M.Biots'en est beaucoupoccupé, et, prenant pour terme de comparaisonla dilatation du mercure, il trouve que ladilatation vraie des autres liquides peut toujoursse rendre par la somme de cette dilatation, de soncarré, et de son. cube, en multipliant chacun deces trois termes par un coefficient particulier, qu'ilfaut déterminer pour chaque liquide, mais qui,une fois déterminé, reste le même à tous les degrés.Gomme la substance du thermomètre qui contientle liquide qu'on observe se dilate aussi, la dilatationapparente est différente de la vraie ; néanmoins


ET MÉTÉOROLOGIE. 91M. Biot montre qu'elle se fait selon une loi semblable.Il calcule ensuite, après les expériences deM. Deluc, les coefficients convenables pour huitdes liquides dont il est le plus nécessaire de bienconnoître les lois, et fait voir que, ces coefficientsune fois obtenus, sa formule donne la dilatationde chaque degré aussi bien que l'expérience. Enfinil en a fait l'application aux dilatations combinéesdu vase et du liquide, et a fait voir que l'on peutdémêler les effets qui appartiennent au liquide et àson enveloppe, et apprécier leur influence avec assezd'exactitude pour retrouver, parle seul calcul, tousles résultats observés ; en sorte que le calcul pourradésormais dispenser, dans une infinité de cas, del'observation immédiate, et que l'on pourra faireentrer avec confiance ses données dans les élémentsdes phénomènes. C'est un avantage d'autant plusgrand que ces sortes de recherches sont d'une délicatesseexcessive, et que, si l'on n'y met la plusgrande attention, une foule de causes aisées à reconnoître,et presque impossibles à écarter, y troublentcontinuellement l'observateur.C'est ce qu'a fait observer M. Charles dans unebelle suite d'expériences qu'il a faites avec un instrumentde son invention, pour rendre sensible etmesurable le maximum de dilatation de l'eau, etqui, se trouvant répondre exactement aux formules


92 PHYSIQUE, CHIMIE,de M. Biot, ajoutent à la confiance qu'on leur doit,et achèvent de faire voir qu'elles pourront être employéesavec sûreté.Il existe depuis long-temps une discussion entreles chimistes sur le moment où l'alcohol se formedans le vin : le plus grand nombre pensoit autrefoisque l'alcohol ou esprit-de-vin étoit un produit essentielde la fermentation ; mais M. Fabbroni, correspondantde l'Institut, a soutenu une opinioncontraire. Selon lui ce n'est qu'accidentellementet lorsqu'elle excite trop de chaleur que la fermentationengendre de l'alcohol, mais dans les vins ordinaireson ne produit l'alcohol que par la chaleurqu'on leur imprime pour les distiller ; et la principalepreuve qu'il en donne c'est qu'on ne peut pas leretirer de ces vins par la potasse, quoiqu'elle y fassereconnoître la moindre parcelle d'alcohol qu'on yauroit introduite exprès.M. Gay-Lussac a cherché à faire revenir à l'opinionancienne, en faisant voir que la potasse démontreaussi l'alcohol naturel au vin, quand on ledébarrasse auparavant par la litharge des principesqui l'y enveloppoient et s'opposoient à saséparation, et que l'on peut obtenir ce liquide spiritueuxen distillant le vin à une température dequinze degrés, laquelle est inférieure de beaucoupà celle de la fermentation ordinaire.


ET MÉTÉOROLOGIE.g3Cependant on pou voit craindre que M. Gay-Lussacn'eût opéré sur des vins où la fermentation auroitprimitivement développé de l'alcohol, commeil convient lui-même qu'elle le fait quelquefois ; ousur des vins dans lesquels des marchands infidèlesauroient mis de l'eau-de-vie. Pour prévenir cetteobjection il a fait lui-même du vin avec des raisins,et en a conduit la fermentation. Il y a trouvé del'alcohol comme dans tout autre.M. Gay-Lussac a aussi fait voir que l'on peut obtenirl'alcohol absolu de Richter en employant lachaux vive, ou mieux encore.la baryte au lieu demuriate de chaux.Le savon est, comme chacun sait, la combinaisond'un alcali avec un corps gras ; mais on n avoitpoint assez examiné quelle altération le corps graséprouve dans cette union.M. Chevreul, aide naturaliste au Muséum d'histoirenaturelle, s'est occupé de cette recherche et aété conduit à plusieurs observations nouvelles etcurieuses. Ainsi le savon de potasse et de graisse deporc dissous dans l'eau laisse un dépôt nacré qui,séparé des substances salines qu'il contient encore,donne une matière douée de propriétés fort particulièreset que M. Chevreul a nommée margarine,à cause de sa couleur de perle. Insoluble dans l'eau,cette matière se dissout abondamment dans l'ai-


94 PHYSIQUE, CHIMIE,cohol chaud ; elle fond à 56° et cristallise par le refroidissementen aiguilles du blanc le plus pur:elle se combine à la potasse, et reprend alors le caractèredu dépôt nacré; son affinité avec cet alcaliest plus grande que celle de l'acide carboniquequ'elle chasse de son carbonate de potasse, quandon l'aide de l'ébullition : elle enlève aussi la potasseau tournesol, qu'elle fait passer à la couleur rouge.On conçoit que les combinaisons qui se trouventordinairement dans la nature sont celles à qui lagrande affinité de leurs principes donne une certainestabilité, et que des circonstances peu communesont seules le pouvoir de disjoindre ; tandisque celles qui n'ont pas cette propriété ne peuventêtre que des productions momentanées dû hasard,ou des tentatives des chimistes ; et plus les combinaisonsque ceux-ci découvrent se multiplient, pluscelles qui leur restent à trouver doivent être fugitiveset sujettes à être détruites par la moindre causeétrangère : c'est ce qui a occasioné les accidentsdont l'histoire de la chimie offre tant d'exemples,et contre lesquels on doit prendre d'autant plus deprécautions que les recherches dont on s'occupesont plus élevées et plus difficiles.M. Dulong, professeur de chimie à Alfbrt, apensé devenir l'année dernière une de ces victimesdu zèle pour la science; mais son danger a été ré-


ET MÉTÉOROLOGIE.gScompensé par une belle découverte, celle d'unecombinaison de l'azote avec l'acide oxymuriatique,qui présente les propriétés les pi us singulières. Pourl'obtenir il faut présenter à l'acide oxymuriatique,ou au chlorine, comme l'appellent aujourd'hui leschimistes anglois, de l'azote, non point à l'état degaz, mais à une combinaison quelconque, dans unsel ammoniacal par exemple, pourvu que l'acidede ce sel ne soit pas assez volatil pour être déplacépar l'oxymuriatique. M. Dulong fait passer un courantde gaz oxymuriatique dans une dissolution d'untel sel, et il obtient une sorte d'huile d'un jaunefauve, plus pesante que l'eau , même salée, qui s'évaporepromptement à l'air, et qui détone par lachaleur, à l'air libre, avec un bruit plus fort quecelui d'un mousquet. Le cuivre la décompose ens'emparant de l'acide et en dégage l'azote, d'où l'onvoit assez quels en sont les principes. Mais ce qui enrend l'étude effrayante, c'est que la moindre parcelleque l'on en met en contact avec une substancecombustible, avec le phosphore par exemple, produitune explosion violente, et brise tous les appareils.C'est un nouvel exemple, et, à ce qu'il paraît,le plus énergique de tous, de ces combinaisons oùle calorique, qui tenoit les éléments à l'état de gaz,reste avec eux lorsqu'ils se réduisent à l'état liquideou solide, circonstance que l'acide oxymuriatique


96 PHYSIQUE, CHIMIE,offre plus souvent qu'aucun autre. M. Dulong seproposoit de déterminer la proportion des deuxprincipes de cette nouvelle matière, et sa manièred'agir sur d'autres corps, et notamment sur les métaux;mais les accidents que ce jeune chimiste aéprouvés à deux reprises, et dont le secondl'a privéd'un œil, ont dû retenir son ardeur de savoir; et parl'intérêt même des sciences qu'il peut encore si bienservir, l'Institut l'a engagé à porter sur d'autres objetsla sagacité dont il a fait preuve.Cette même substance a pensé priver la chimiede l'un de ses plus illustres soutiens, M. le chevalierHumphry Davy, secrétaire de la Société royale,qui, jeune encore, a déjà fait des découvertes nombreuseset brillantes, et particulièrement celle dela métallisation des alcalis et des terres, qui ouvreun nouveau champ à tant de branches de sciencesnaturelles.Une matière également bien remarquable estcelle qui s'est offerte récemment à M. Courtois,salpêtrier à Paris. MM. Clément et Desormes l'ontmontrée à l'Institut, et M. Gay-Lussac a fait surelle des expériences instructives. On la retire deseaux-mères de la soude du varech par l'acide sulfuriqueet la distillation. Refroidie et condensée,elle a le grenu, le brillant et la couleur grisâtre,de la plombagine. Tant qu'elle n'a pas été purifiée,


ET MÉTÉOROLOGIE. 97elle se fond à soixante-dix degrés de chaleur; maisquand onl'a purifiée en la dissolvant en excès parla potasse et en la distillant, elle ne fond qu'à unechaleur beaucoup plus forte. Sa propriété la plusfrappante est de s'élever en une vapeur ou plutôten un gaz du plus beau violet, parfaitement homogèneet transparent. La chaleur rouge, l'oxygène,ni le charbon, n'agissent sur elle ; elle s'unit auxmétaux et à leurs oxydes, et ces combinaisons sedissolvent dans l'eau : avec l'ammoniaque elle produitune poudre fulminante; l'hydrogène sulfuréla décolore, et en forme un acide puissant, d'oùon la précipite de nouveau par l'acide oxymuriatique,le sulfurique, ou le nitrique. En un mot,sa manière de se comporter avec les réactifs esttellement comparable à celle de l'acide oxymuriatique,ou chlorine, que l'on peut lui adapter demême une double théorie, c'est-à-dire que l'onpeut considérer la nouvelle substance comme unecombinaison d'un acide particulier et indécomposableavec une quantité surabondante d'oxygène ;ou, d'après la nouvelle manière de voir de M. Davy,la regarder, ainsi que le chlorine, comme une substancesimple, qui donnerpit un acide en se combinantavac l'hydrogène. Dans le premier systèmeil faut supposer, comme on le fait aussi par rapportà l'acide oxymuriatique, que l'hydrogène s'unit àBUFFON. COMFLÉM. T. II. 7


y8PHYSIQUE, CHIMIE,l'oxygène surabondant, et forme avec lui de l'eauqu'aucun moyen ne peut, enlever à l'acide ainsidésoxygéné. En effet ce qui a engagé M. Davy àchanger la théorie reçue de l'acide oxymuriatiquec'est que l'hydrogène le réduit en acide muriatiqueordinaire, sans que l'on puisse saisir l'eau que cethydrogène auroit dû former, si, comme on lecroyoit, il n'a voit fait qu'enlever l'oxygène à l'acideoxymuriatique. M. Davy applique une théorie analogueet fondée sur les mêmes raisons aux composésfluoriques.Ce savant chimiste, nommé tout récemmentcorrespondant de l'Institut, lui a présenté un mémoiresur cette même substance, où il insiste surses rapports avec l'acide oxymuriatique, et sur lesmotifs qui l'engagent à les regarder l'un et l'autrecomme des corps simples, capables aussi bien quel'oxygène de brûler et d'acidifier les substances combustibles.Ainsi lorsque la nouvelle matière ( quel'on paroît être convenu de nommer iode d'aprèsla couleur de son gaz) se combine avec le potassiumou métal de la potasse, il se montre une belleflamme bleue, mais il ne se développe aucun gaz;si au contraire on dissout le potassium dans l'acided'iode,il se développe de l'hydrogène; etil en estde même des autres métaux. M. Davy attribue laformation de cet acide par le phosphore à l'humi-


ET MÉTÉOROLOGIE. 90dite qui adhère toujours à l'iode, et qui se décompose;iln'est d'ailleurs parvenu par aucun procédéà retirer de l'oxygène de l'iode, ni de son acide, nià faire agir l'oxygène sur l'un ou sur l'autre, ni àles faire agir eux-mêmes sur le carbone, ni à décomposerl'iode par la pile: mais l'iode, comme lechlorine, forme avec les alcalis des composés ternaires;savoir, d'iode, du métal de l'alcali, et d'oxygène,lesquels détonent avec le carbone, et pourrontêtre employés aux mêmes usages que le nitre.La poudre détonante que MM. Clément et Desormesont obtenue de l'iode par l'ammoniaque est,selon M. Davy, un composé d'iode et d'azote, ensorte que ce serait l'analogue de cette matière terribleproduite par M. Dulong en combinant l'azoteau chlorine.Un autre fabricant, éclairé par les lumières dela chimie, M. Tassaert, a fait une remarque quipeut devenir importante pour les arts : ayant construitdepuis quelque temp le sol de ses fours àsoude avec du grès,il a observé en le démolissantune matière bleue que l'on n'y voyoit point quandils étoient faits en brique, et dans laquelle M.Vauquelina trouvé presque tous les principes et toutesles propriétés de l'outremer; en sorte que notresavant confrère ne désespère point qu'en suivantcette indication l'on ne puisse parvenir quelque


IOOPHYSIQUE, CHIMIE,jour à imiter la nature dans la formation de cettecouleur précieuse. M.Pelletan fils a fait remarquerà ce sujet qu'il se manifeste, en beaucoup de circonstances, dans la fabrication de la soude, unbleu plus ou moins intense que la calcination nedétruit point, et que cette couleur apparoît principalementlorsque du fer se trouve en contact avecde la soude non encore entièrement débarrasséed'acide sulfurique.Le platine brut, tel qu'on l'apporte du Pérou,est un corps très composé ; outre le platine pur,métal noble, plus pesant, et aussi inaltérable quel'or, il contient du fer, du cuivre, du mercure; etles recherches successives de MM. Wollaston, Tennant,Descostils, Fourcroy, et Vauquelin, y ontdémontré, depuis dix ans, la présence de quatremétaux distincts de tous ceux que l'on connoissoitauparavant: on les a nommés palladium, rhodium,osmium, et iridium.M. Vauquelin a repris cette année l'étude de cessubstances, et a lu un mémoire sur les méthodes lesplus convenables pour obtenir le palladium et lerhodium dans leur état de pureté.Après avoir précipité la plus grande partie duplatine de sa dissolution nitro-muriatique par l'ammoniaque,il met dans le résidu des lames de ferqui en précipitent les autres métaux ; employant


ET MÉTÉOROLOGIE.loisuccessivement à froid l'acide nitrique et le muriatique;et sublimant ensuite, il enlève au précipitéla plus grande partie du cuivre, du mercure, et deY osmium, qui le forment, ainsi que du fer qui s'ytro u ve mêlé.Un peu du platine restant, d u palladium,et même du rhodium, est aussi enlevé par ces acides,parcequ'il s'en est précipité à l'état d'oxyde, car àl'état métallique ils nauraient pu être dissous; d'unautre côté il reste encore du cuivre et du fer dansle précipité, parcequ'ils y sont unis intimement auxautres métaux, et protégés par eux. Pour enlevertous les restes de platine, M. Vauquelin dissout denouveau par l'acide nitro-muriatique, et précipitepar l'ammoniaque; il obtient alors un sel de platined'un jaune assez pur. Evaporant le résidu jusqu'àsiccité, et le traitant par l'eau, il reste un sel rougeencore en grande partie formé de platine, et la liqueurse trouve ainsi à-peu-près débarrassée dece métal. On étend alors la solution aqueuse, on yajoute un peu d'acide, on y verse assez d'ammoniaquepour ne pas saturer entièrement, on agite-,et l'on voit paroître à l'instant une grande quantitéd'aiguilles brillantes et d'un beau rose. C'est unmuriate d'ammoni§que et de palladium, qu'il suffitde chauffer au rouge pour avoir le palladium. S'ils'y est joint un peu de fer et de rhodium, on l'endébarrasse par la digestion dans l'eau légèrement


102 PHYSIQUE, CHIMIE,aiguisée d'acide muriatique. Le résidu de la liqueurcontient le rhodium et quelques restes de palladium,de cuivre, et de fer : pour avoir le premier on faitcristalliser, on broie les cristaux, on les débarrasse,par des lotions répétées d'alcohol, des sels de cuivre,de fer, et même de palladium. Celui de platine,s'ilen reste encore quelque parcelle, se sépare en dissolvantdans l'eau légèrement aiguisée d'acide muriatique.Enfin, par une dernière évaporation, ilreste le sel de rhodium d'un rouge magnifique, qu'ilsuffit de chauffer au rouge pour avoir ce métal.On ne pouvoit arriver par une méthode plusingénieuse ni plus simple à séparer tant de substancesdiverses et retenues ensemble par des lienssi puissants. On voit qu'elle se fonde principalementsur ce que le muriate d'ammoniaque et depalladium est insoluble dans l'eau, même acidulée,et qu'il se précipite aussitôt qu'il se forme, et sur ceque l'alcohol, qui dissout le muriate de cuivre et celuide fer, ne dissout point le muriate d'ammoniaqueet de rhodium.Pendant que M. Vauquelin étudioit ainsi deuxdes métaux unis au platine, M. Laugier, son collègueau Muséum d'histoire lfcturelle, s'occupoitd'un troisième et peut-être du plus curieux de tous,Yosmium, dont l'oxyde se volatilise à la chaleur del'eau bouillante, ne donne aucune couleur à l'eau


ET MÉTÉOROLOGIE.io3distillée, n'en diffère même point à l'œil, mais répandune odeur piquante, et agit sur le nerf olfactifde manière à altérer pour plusieurs jours le sensde l'odorat. Ces propriétés et d'autres non moinssingulières faisoient regretter aux chimistes qu'ilfût si difficile d'obtenir ce métal en quantité un peuconsidérable, et M. Laugier a satisfait à leur vœujusqu'à un certain point. Quand on a dissous leplatine dans l'acide nitro-muriatique, il reste unepoudre noire composée d'iridium et d'osmium, etjusqu'à présent c'étoit cette poudre seulement quifournissoit de Yosmium aux chimistes : mais M. Laugiers'étant aperçu que l'acide qui a servi à dissoudrele platine, et que l'on en sépare de nouveau parla distillation, répand une forte odeur dosmium, asupposé qu'il contenoit de ce métal, et il a trouvéen effet qu'en saturant l'acide par des alcalis caustiques,mais sur-tout par la chaux, et en distillant lemélange on obtient à peu de frais une dissolutionchargée d'une quantité notable d'osmium, qui auparavantétoit entièrement perdue.Nous avons parlé en 1808 des essais heureuxque l'on a faits dans les mines des environs de Liègepour en obtenir en grand le zinc à l'état malléable,et de l'avantage que l'on pourrait en tirer pourremplacer le plomb dans les couvertures, et dansquelques autres de ses emplois. On auroit voulu


Io4PHYSIQUE, CHIMIE,aussi pouvoir le substituer au cuivre étamé danslequel on prépare les aliments, et à l'étain qui sertpour les mesures des liquides ; mais MM. les ministresde l'intérieur et de l'administration de laguerre ayant consulté l'Institut à ce sujet, les sectionsde chimie et de médecine ont trouvé que lezinc est trop dissoluble par les acides les plus légers,par les graisses, et même par l'eau pure, et que lessels qu'il forme sont trop acres, et dans certains casexcitent trop les intestins, pour qu'on puisse employerce métal sans inconvénients à ces diversgenres de service. M. Sage a fait en son particulierdes expériences qui lui ont donné à.connoître quel'eau distillée tenue dans des vases de zinc y prendune saveur styptique très marquée, et que des sucsde fruits cuits dans ces mêmes vases en dissolventune partie et forment des sels assez abondants quien rendent le goût désagréable ; ce qui est d'autantplus fâcheux que les mines dont il est question necontiennent point d'arsenic comme il y en a dansquelques autres, et que sous ce rapport il n'y avoitrien à en redouter. On en a eu une nouvelle preuvedans l'analyse que M. Sage a faite de cette mine etqu'il a lue à l'Istitut.MM. Vauquelin et Thénard ont donné une analysede l'eau minérale de Provins, d'où il résultequ'elle contient par litre:


ET MÉTÉOROLOGIE. IODCarbonate de chaux... o,554Fer oxydé. 0,076Magnésieo,o35Manganèse 0,017Silice. 0,026Sel marin. .. ... 0,042Acide carbonique, 27 pouces 8 / I0 ,et une quantité inappréciable de muriate de chauxet de matière grasse, mais que l'acide sulfurique,que l'on y avoit soupçonné, n'y existe point dutout.M. Thénard a fait paroître le premier volumed'un Traité élémentaire de Chimie où cette sciencequi fait journellement tant de progrès, et à quiM. Thénard lui-même en a fait faire de si grands,se trouve exposée dans son état du moment. L'auteury range les faits d'après le degré de simplicitédes corps auxquels ils appartiennent; après y avoirparlé des agents impondérables, il traite de l'oxygèneet de la théorie de la combustion, et passeensuite aux corps combustibles, à leurs combinaisonsentre eux, et à celles qu'ils contractent un àun avec l'oxygène. Ces dernières se divisent, selonleurs propriétés, en oxydes et en acides; et les acidesfluorique et muriatique y sont rangés d'aprèsles idées ordinaires qui en font des corps oxygénés.C'est à eux que s'arrête cette première partie d'un


IOÔPHYSIQUE, CHIMIE,ouvrage que la marche rapide de la science a rendunécessaire sitôt après d'autres bons ouvrages sur lemême sujet, et dont on ne peut que désirer vivementla prompte terminaison.ANNÉE 18.14.Les événements mémorables dont cette capitalea été le théâtre, loin d'y troubler les recherchesscientifiques, ont donné de nouvelles preuves durespect que les sciences inspirent, et de l'heureuseinfluence qu'elles ont acquise sur tous les peupleset sur les hommes de toutes les classes. D'innombrablesarmées,venues des extrémités de l'Europe,ont visité nos monuments, ont parcouru nos collections,et ont examiné chaque objet avec curiosité,sans qu'aucun dommage soit résulté, mêmedune imprudence. Des amis des sciences, enrôlésdans cette grande croisade entreprise en partiepour le rétablissement de la liberté de penser etd'écrire, eurent à peine déposé leurs armes, qu'ilsvinrent s'informer de nos travaux, y prendre part,nous instruire de ce qui s'étoit fait chez eux. Lessouverains étrangers se sont en quelque sorte disputéà qui donnerait les marques les plus éclatantesde son intérêt pour les progrès des connoissances,et à qui prouveroit le mieux que leur cause étoitcelle des lumières et de l'humanité. Nos princes


ET MÉTÉOROLOGIE.IOTont témoigné hautement, leur satisfaction sur l'étatde prospérité et de vie où ils ont trouvé nos établissements; et le roi leur a non seulement accordé sonauguste protection, mais il a déjà prouvé par le faitavec quelle noble libéralité il se propose d'en accroîtrel'activité et d'en étendre l'importance. Il estimpossible que sous de si heureux auspices les travauxde l'esprit ne prennent un nouvel essor, etque le rétablissement des communications entre lespeuples, et l'émulation qui en sera la suite, ne fassentbientôt produire aux sciences de nouvellesmerveilles. Les recherches de cette année font déjàconnoître cette reprise d'énergie; elles font mieuxencore : il y régne manifestement, en plusieurspoints, cette hésitation, ce besoin de solutions plusclaires où les hommes qui ont étudié la marche dessciences voient toujours les précurseurs nécessairesdes grandes découvertes.Ainsi l'une des plus curieuses substances dévoiléesdans ces derniers temps estl'iocfe, cette matièresi long-temps cachée dans le varec, qui s'élève, parla chaleur, en une vapeur d'un beau violet, et qui,se comportant avec les autres corps d'une manièreanalogue à celle du chlore, ou de ce qu'on appéloitci-devant gaz muriatique oxygéné, a donné unenouvelle force aux idées que l'hydrogène sulfuré


lo8PHYSIQUE, CHIMIE,avoit fait naître, et sur la voie desquelles ont avoitété remis par le chlore; idées qui tendent à introduiredans la théorie chimique cette modificationimportante, que l'oxygène n'est pas à beaucoupprès le seul principe capable d'opérer l'acidification.En effet M. Berthollet avoit montré, il y a prèsde trente ans, que l'hydrogène sulfuré, où il n'entrepoint d'oxygène, a toutes les propriétés des acides,et les chimistes allemands avoient fort insistésur ce fait pour combattre une partie de la théoriefrançoise. MM. Thénard et Gay-Lussac firent, aucommencement de 1809, des expériences d'où il résultaitqu'il est impossible d'extraire l'oxygène de ceque l'on appelle communément acide muriatiqueoxygéné, et que, pour continuer à croire qu'il yexiste, il faut supposer que dans tous les cas où cetacide se convertit en acide muriatique ordinaire ilse forme de l'eau qui s'unit indissolublement à l'acideproduit, ou du moins que les éléments de l'eauy entrent comme parties intégrantes ; tandis qu'enregardant le soi-disant acide muriatique oxygénécomme une substance simple dont la combinaisonavec l'hydrogène donneroit l'acide muriatique ordinaire,on est dispensé de cette supposition. Mais,tout en énonçant ces deux manières de voir, nosdeux chimistes s'en tinrent à la première, qui étoit


ET MÉTÉOROLOGIE. 109plus analogue à ce qui se passe dans le grand nombredes acidifications.M. Davy, qui avoit été conduit aux mêmes conclusions,mit plus de hardiesse dans son choix; iladopta décidément la deuxième théorie, et donnaen conséquence à l'acide muriatique oxygéné unnom particulier, celui de chlore, duquelil dérivaceux des deux autres acides dans lesquels il entre.L'un (le muriatique), où il est en combinaison avecl'hydrogène, fut appelé hydrochlorique; l'autre (lesuroxygéné), qui résulte de sa combinaison avecl'oxygène, reçut le nomdacide chlorique.Bientôt les expériences sur l'acide nommé jusqu'icifluorique donnèrent lieu de penser, et ce futM. Ampère, nouvellement nommé membre de lasection de géométrie, qui eut le premier cette idée,que sa composition est analogue à celle de l'hydrochlorique,c'est-à-dire qu'il est composé d hydrogèneet d'un corps simple d'une nature particulière,que l'on dut alors désigner par le nom defluoré.Ainsi la propriété d'acidifier l'hydrogène ou dedevenir acide par son moyen fut reconnue admissibledans trois substances : le soufre, le chlore,et le fluoré. L'iode en est venu offrir une quatrième.Nous avons dit, dans notre analyse des travaux


I IOPHYSIQUE, CHIMIE,de l'année dernière, que l'iode avoit été découvertpar M. Courtois. Cet habile fabricant paraît l'avoirobtenu dès la finde 1811, mais il ne l'avoit communiquéqu'à M. Clément, son ami, qui lui-mêmene le fitconnoître au public que vers la finde 1813.Cependant ce retard fut bientôt réparé ; et en peude jours M. Gay-Lussac et M. Davy eurent constatéles principales propriétés de cette substance, etspécialement l'analogie suivie qu'elle présente avecle" chlore, et les deux acides qu'elle forme comme lechlore avec l'oxygène et avec l'hydrogène. M. Davyprésenta cette analogie comme un nouvel appuipour la théorie qu'il avoit adoptée.Depuis lors on s'est occupé de l'iode avec l'intérêtdont il est digne. M. Colin a examiné ses combinaisonsavec le mercure et l'ammoniaque, et reconnuqu'il se forme de l'acide iodique ou unecombinaison d'iode et d'oxygène toutes les foisqu'on traite l'iode avec des oxydes où l'oxygène estfoiblement condensé. Il a bien expliqué la générationde la poudre fulminante d'iode, découverte,ainsi que l'iode lui-même, par M. Courtois. Le gazammoniacal est absorbé par l'iode, et forme aveclui un liquide visqueux, lequel mis dans l'eauchange de nature : l'hydrogène d'une partie del'ammoniaque forme, avec une partie de l'iode, del'acide hydriodique, qui se combine avec le reste


ET MÉTÉOROLOGIE.II Ide l'alcali, et l'azote de cette première portion d'ammoniaqueforme avec l'autre partie de l'iode lapoudre fulminante.Le même M. Colin a travaillé avec M. GauthierClaubry à déterminer la manière dont l'iode secomporte avec les substances organiques. Ces deuxjeunes chimistes ont constaté que les substances oùl'oxygène et l'hydrogène sont dans les mêmes proproportionsque dans l'eau se mêlent simplementà l'iode ; que celles oùil y a plus d'oxigène s'y combinentintimement; mais que ni les uns ni les autresne l'altèrent tant qu'on n'emploie pas unechaleur capable de les décomposer; au contrairecelles où l'hydrogène abonde convertissent l'iodeen acide hydriodique, etil en arrive autant auxpremières quand on les échauffe assez pour dégagerleur hydrogène. Ces expériences leur ont j>résentéplusieurs phénomènes curieux ; un mélange d'iodeet d'amidon trituré prend une couleur rouge,bleue, ou noire, selon que l'iode y est plus abondant,etc.Mais celui qui a travaillé sur l'iode avec le plusde soin et d'étendue c'est notre confrère M. Gay-Lussac, dont l'ouvrage a été imprimé dans le.sJnnalesde Chimie. Il y considère l'iode lui-même,ainsi que ses combinaisons et celles de ses deuxacides avec les divers corps, ou ce que, d'après les


I 12PHYSIQUE, CHIMIE,règles reçues de la nommenclature chimique, ondevra nommer les iodures, les iodates, et les hydriodales.A l'occasion de l'iode, il revient sur le chlore,et donne plusieurs remarques nouvelles sur sescombinaisons, qui n'avoient pas toutes été appréciéesavec justesse; puis, considérant l'acide prussiquecomme essentiellement formé d'azote, d'hydrogène,et de carbone, il conclut que l'azote doit»aussi être ajouté à la liste des substances qui peuventproduire des acides sans oxygène, ce qui l'amèneà regarder l'acidité et l'alcalinité comme despropriétés intrinsèques de certains corps et decertaines combinaisons, sans rapport nécessaireavec leur composition, tels que nous pouvons lesdécouvrir, et ce qui le rapproche par conséquentdes idées de Winterl et de quelques chimistes allemands.Ce mémoire est rempli d'ailleurs de recherchesdélicates et d'indications ingénieuses dont ilne nous est pas possible de rendre compte, maisqui ne manqueront pas de donner un nouvel essorà la partie de la chimie la plus profonde et la plusimportante.Notre respectable confrère M. Sage, qui, malgréson âge et ses infirmités, prend toujours un vif intérêtaux nouveaux faits chimiques, s'est aussi occupéde l'iode et du varec, d'où on le tire. Il aremarqué l'altération que l'iode fait éprouver aux


ET MÉTÉOROLOGIE.Il3vases d'argent où on le chauffe. Le varec lui a donné,par la distillation à feu nu'des produits analoguesà ceux des animaux, et en le macérant dans l'acidenitrique affoibli il a obtenu un réseau cartilagineuxsemblable à celui que laissent les os et lesmadrépores quand ils ont été privés de leurs partiesterreuses. M. Sage voudrait conclure de cesdeux faits que les fucus sont des polypiers.Le même chimiste a présenté aussi une noticesur les avantages de la réduction de la galène parle feu, où il assure que l'on obtient ainsi beaucoupplus de plomb que par les méthodes ordinaires.M. Théodore de Saussure, correspondant, quiavoit lu en 1807 à l'Institut, sur la composition del'alcohol et de l'acide sulfurique, un mémoire dontnous avons rendu compte dans le temps, et d'oùil résultait que l'éther est plus chargé de carboneet d'hydrogène que l'alcohol, a repris l'année dernièrecet objet important de recherches, et, y appliquantdes procédés à-la-fois plus simples et plusrigoureux, il est arrivé à un résultat plus précis.En faisant passer ces deux liquides par un tube deporcelaine incandescent, il a obtenu de l'eau et ungaz dont l'analyse n'offrait aucune difficulté ; et ila reconnu ainsi que l'alcohol et l'éther sont forméschacun d'une proportion de carbone et d'hydrogèneidentique, et dans le,même rapport où ilsBUFFON. COMPLÉM. T. II.tf


I l 4PHYSIQUE, CHIMIE,sont dans le gaz oléfiant, mais combinés avec desproportions différentes* d'eau réduite à ses éléments.Dans l'alcohol les éléments de l'eau forment letiers du total, et dans l'éther ils en forment le cinquième;en sorte que l'action de l'acide sulfuriquesur l'alcohol, pour produire l'éther, ne consisteroitqu'à enlever une portion de son eau, et que cemême acide, en plus grande quantité, produiraitle gaz oléfiant, en enlevan t la totalité de cette mêmeeau.Les résultats analytiques de M. de Saussure s'accordentavec ceux qu'a obtenus feu M. le comte deRumfort sur la quantité de chaleur produite parla combustion de l'alcohol et de l'éther.Une des grandes difficultés de l'analyse des substancesorganiques consiste en ce que la chimiene dispose que d'un petit nombre de réactifs propresà en séparer les principes immédiats sans lesdétruire. M. Chevreul, aide-chimiste au Muséumd'histoire naturelle, a cherché à multiplier les partisque l'on peut en tirer, en les employant à desdegrés de chaleur très divers, et en fesant varierainsi leurs forces dissolvantes.Pour cet effet il a imaginé une machine, qu'ilappelle digesteur-distillatoire, et qui consiste en unemarmite de papin, fermée par une soupape que


ET MÉTÉOROLOGIE. I I 5maintient un ressort : la force du ressort, que l'onchange à volonté, détermine le degré de chaleurque le liquide doit recevoir pour s'échapper. Onrecueille successivement le produit de chaque degréau moyen d'un tuyau qui conduit dans unrécipient. La matière solide que l'on examine estretenue dans le digesteur par un diaphragme mobile,qui peut aussi la comprimer et en entraînertout le liquide restant.M. Chevreul a opéré sur le liège par sa méthode ;ill'a soumis vingt fois à l'action de l'eau et cinquanteà celle de l'alcohol, et après avoir détaché ainsi desmatières très diverses , il lui est resté un tissu cellulairequ'il nomme subérine, et qui, traité parl'acide nitrique, se convertit en acide subérique.Parmi ces matières retirées du liège il en est une qu'ilcroit nouvelle et qu'il nomme cérine, parcequ'elle aplusieurs des propriétés de la cire.Le même chimiste a appliqué sa méthode au'succin ou ambre jaune, et reconnu que l'acidesuccinique y existe tout formé.Il a aussi continué ses recherches sur la Saponificationdont nous avons donné l'analyse l'annéedernière, et en comparant la graisse naturelle àcelle qui a été saponifiée, il a conclu que les propriétésde cette dernière ne viennent point de l'éliminationni de l'acquisition de quelques substances,•8.


I 16PHYSIQUE, CHIMIE,mais d'un nouveau mode de combinaison occasionépar l'action de l'alcali, et qui donne à lagraisse une analogie avec les acides, indépendantede toute oxygénation.M. Pelletier, fils de notre défunt confrère, a faitl'examen des matières colorantes que l'on retire dubois de santal et de l'orcanette, et que l'on regardoitjusqu'ici comme de simples résines. La premièrejoint à la plupart des propriétés des résines cellesd'être dissoluble dans l'acide acétique, même trèsfoible, de se comporter alors avec la gélatine commeles substances dites astringentes, de donner de l'acideoxaliqne par l'acide nitrique : elle montre encorequelques autres caractères qui paroissent devoir enfaire un nouveau principe végétal. La matière retiréede l'orcanette se dissout dans l'éther, l'alcohol,et tous les corps gras. Par l'acide nitrique elledonne de l'acide oxalique et une matière amère;les alcalis et l'eau lui font changer diversement decouleurs ; en un mot l'ensemble de ces phénomèneslui donne aussi un titre, selon M. Pelletier,à prendre un rang particulier parmi les principesimmédiats des végétaux.Nous avons vu dans le temps que le platine brut,tel qu'on le retire de sa mine, contient plusieurssubstances étrangères, et entre autres quatre métauxparticuliers, qu'on a nouvellement distingués;


ET MÉTÉOROLOGIE. 117et nous avons exposé l'année dernière par quelsmoyens M. Vauquelin est parvenu à séparer de ladissolution du platine, dans l'acide nitro-muriatique,et à obtenir dans leur état de pureté deux deces nouveaux métaux appelés palladium et rhodium,qui se dissolvent en même temps que le platine.Nous avons dit aussi comment M. Laugier, s'étantaperçu que cette dissolution contient une quantiténotable d'un troisième métal remarquable parsa volatilité, qui lui a fait donner le nom dosmium,avoit indiqué une manière facile de le recueillir.Il restoit à examiner une poudre noire qui ne sedissout point dans l'acide nitro-muriatique, et quipar conséquent forme le résidu de la dissolution duplatine. Elle se compose principalement de ce mêmeosmium, et d'un quatrième nouveau métal, queles couleurs vives et variées de ses combinaisons ontfait nommer iridium.Ces deux métaux y sont unis à du chrome, à du fer,àdu titane, à delà silice,et même à un peu d'alumine;et la difficulté étoit de les séparer nettement de cemélange, et de les obtenir complètement isolés.C'est à quoi M. Vauquelin a réussi, mais par desopérations pénibles et compliquées.De simples lavages divisent cette poudre noireen deux parties; l'une plus déliée, plus brillante,contient plus d'iridium et d'osmium, et presque


IlSPHYSIQUE, CHIMIE,pas de chrome; l'autre, plus brune et plus grossière,contient moins des deux premiers métaux etplus des autres. Comme celle-ci est la pVus difficileà analyser, nous nous bornerons à ce qui laregarde.M. Vauquelin la triture d'abord avec le doublede son poids de nitrate de potasse, l'oxygène de l'acideoxyde l'iridium et l'osmium , qui se combinentavec la potasse devenue libre. La chaleur fait sortirensuite une grande partie de l'acide et de l'osmium,qu'on reçoit dans de l'eau de chaux ; le résidu dé-rlayé et saturé par l'acide nitrique donne un précipitéd'iridium, de titane, de fer, d'alumine, et d'unpeu d'oxyde de chrome; et il^reste une liqueur composéede potasse unie à de l'acide de chrome et à del'osmium. On en sépare ce dernier, en ajoutant del'acide nitrique, en distillant et en recevant l'osmiumdans un flacon entouré de glace; on versedans l'eau quil'a reçu un peu d'acide muriatique,et on y place une lame de zinc, qui précipite l'osmium.Pour l'avoir bien pur on le lave avec de l'eauun peu aiguisée d'acide sulfurique.Il faut ensuite retirer le chrome ; pour cet effeton fait évaporer, on redissout dans l'eau, on filtrepour avoir la silice qui peut rester, on verse du nitratede mercure au minimum, qui produit unprécipité de chrômate de mercure au minimum,


ET MÉTÉOROLOGIE. 119lequel séché et calciné donne de l'oxyde vert dechrome. Reste le premier précipité d'iridium, detitane, de fer, de chrome et d'alumine. Il y a encoreun peu d'osmium qu'on enlève en traitantpar l'acide muriatique, distillant et précipitant parle zinc, comme la première fois. S'il reste des partiesnon dissoutes on les triturera avec le nitre,comme dans le commencement ; et on observe queplus on répète cette opération, plus les dissolutionsmuriatiques deviennent bleues, parcequ elles contiennentde moins en moins de fer et de titane,qui, comme plus faciles à dissoudre, sont d'abordsaisis par l'acide, et laissent une plus grande proportiond'iridium.Or l'iridium a cette propriété qu'à cet étatd'oxydation où ses dissolutions dans les acides sontrouges il ne précipite que par le muriate d'ammoniaque,et sous forme de sel triple. On l'amènedonc à cet état en faisant bouillir sa dissolution muriatiqueavec de l'acide nitrique; on neutralise laliqueur par de l'ammoniaque; lebullition en précipitele fer et le titane; on précipite ensuite l'iridiumpar le muriate d'ammoniaque ; et le sel triple qu'onobtient donne, par une chaleur rouge, l'iridiummétallique très pur.. Ce métal, si difficile à retirer du singulier alliagequi le cachoit à tous les yeux, a des propriétés re-


120 PHYSIQUE, CHIMIE,marquables. Sa couleur et son éclat ressemblentassez à ceux du platine; il est plus difficile à fondre,insoluble dans les acides simples, difficilement solubledans le nitro-muriatique; mais la potasse etle nitre l'oxvdent, et se combinent avec lui en unepoussière noire qui donne des dissolutions bleues ;avec l'acide nitro-muriatique bouillant il donneune dissolution rouge; ses dissolutions bleues ellesmêmesdeviennent rouges par l'ébullition ; mais lesbleues et les rouges sont décolorées par le sulfate defer, l'hydrogène sulfuré, le fer, le zinc, et l'étain;elles reprennent leur couleur par l'acide muriatiqueoxygéné ; c'est l'iridium qui colore en rouge lesderniers précipités de sel triple de platine, tandisque les premiers, où il n'entre point, sont jaunes.Les propriétés de l'osmium ne sont pas si aiséesà constater, à cause de sa facilité à s'oxyder et à sevolatiliser aussitôt. Son oxyde est blanc et très caustique; il répand une odeur insupportable : flexibleet fusible comme la cire, dès qu'il touche une matièreanimale il la noircit. Sa dissolution dans l'eaudevient bleue par la noix de galle, etc.M. Mongez, membre de la classe de littératureancienne, nous a lu un mémoire sur le bronze desanciens, où il prouve, d'après les expériences deM. Darcet, que ce n'est point par la trempe oul'immersion dans l'eau froide que le bronze se dur-


ET MÉTÉOROLOGIE. 121cit, comme il arrive à l'acier; mais qu'il obtient aucontraire sa dureté lorsqu'après avoir été rougi onle laisse refroidir lentement à l'air. M. Darceta tiréparti de cette propriété pour faire des cymbales,instrument, qui ne se fabriquoit jusqu'à présentqu'en Turquie, et, à ce qu'on prétend , par un seulouvrier de Constantinople, qui en a le secret.ANNÉE 1815.Nous avons parlé depuis deux ans de ces acidessans oxygène, ou, comme on les appelle maintenant,de ces hydracides qui sont venus faire unebrèche si considérable à l'imposant édifice de lathéorie chimique de Lavoisier. Les travaux deM. Gay-Lussac ont constaté cette année qu'il y ena un de plus à ranger dans cette classe, celui queM. de Morveau avoit appelé acide prussique, parcequ'ilentre dans la composition du bleu de Prusse,et que son radical n'étant pas connu il n'étoit paspossible alors d'en dériver sa dénomination.Les expériences de Marcgrave, de Bergman, et deScheele, ne permettoient pas de douter que dansle bleu de Prusse le fer ne fût uni avec une substancequi jouoit le rôle d'un acide : cependantM. Berthollet avoit soupçonné depuis long-tempsqu'il n'entrait point dV>xygèïte, mais seulement ducarbone, de l'azote, et de l'hydrogène, dans sa


122 PHYSIQUE, CHIMIE,composition ; et c'est ce soupçon que M. Gay-Lussacvient de changer en certitude.En décomposant avec des précautions qu'il indiquele prussiate de mercure par l'acide hydrochlorique(autrement muriatique), il obtient l'acideprussique pur; et nous avons déjà parlé clans unde nos rapports précédents des propriétés singulièresqu'il lui a reconnues dans cet état, et principalementde son extrême volatilité. Brûlant ensuitela vapeur de cet acide par l'oxygène et l'étincelleélectrique, il obtient des quantités déterminéesd'eau, d'acide carbonique, et d'azote; il défalquel'oxygène consommé dans la production des deuxpremières de ces substances, et il arrive à cette conclusionqu'un volume de vapeur d'acide prussiquerésulte de la combinaison et de la concentrationd'un volume de vapeur de carbone, d'un demi-volumed'azote, et d'un demi-volume d'hydrogène,ou, en exprimant ces volumes en poids d'après la «densité de chacune de ces vapeurs, que cent partiesd'acide contiennent4,43g de carbone,51,71 d'azote,3,go d'hydrogène.Ainsi l'acide prussique renferme plus d'azote etmoins d'hydrogène que les autres substances ani-^


ET MÉTÉOROLOGIE. 123maies, dont il se distingue sur-tout par l'absencetotale d'oxygène.C'est le premier hydracide connu dont le radicalsoit décomposante; et ce radical M. Gay-Lussac estaussi parvenu à l'obtenir débarrassé de son hydrogène.Ne pouvant conserver cette épithéte de prussique,qui ne tient qu'à un accident, il lui a donnéle nom de cyanogène (c'est-à-dire produisant du bleu).L'acide prussique prendra donc désormais la dénominationdhydrocyanique, ses combinaisons avecles bases celle dhydrocyanates, et les combinaisonsde son radical celle de cyanures.Nous voudrions pouvoir rendre compte des expériencesaussi nombreuses que délicates par lesquellesM. Gay-Lussac a rapporté à l'une ou àl'autre de ces classes les divers produits de l'actionde l'acide prussique sur les corps , et toutes lespropriétés qu'il y a fait connoître ; mais l'espacene nous le permet pas. Qu'il nous suffise de direque le bleu de Prusse en particulier lui paroît plutôtun cyanure de fer qui auroit retenu de l'eauqu'un hydrocyanate, ou, comme on le disoit autrefois,un prussiate.Ce cyanogène, considéré isolément, a offert luimêmedes propriétés fort remarquables; c'est unfluide élastique permanent dont la densité est àcelle de l'air comme i ,8064 à 1, d'une odeur parti-


124 PHYSIQUE, CHIMIE,culièreet très vive, qui donne à l'eau une saveur piquante,et brûle avec une flamme purpurine. L'eauen absorbequatre fois son volume, et l'alcohol vingttroisfois. Son analyse directe a donné le même résultatquecelle de l'acide hydrocyanique, c'est-à-direun volume de vapeur de carbone pour un demivolumed'azote.M. Gay-Lussac a aussi présenté à l'Académie desmémoires sur le froid qui résulte de l'évaporation,et sur l'évaporation dans l'air à différents degrés detempérature et de pression, où il exprime par uneformule les résultats de l'expérience. Il a fait suivrele dernier d'un mémoire sur l'hygrométrie, qui enoffre les conséquences immédiates; mais ces ouvragesn'ayant point encore acquis à son gré cetteprécision et cet ordre qu'il est accoutumé de donnerà tout ce qu'il publie, l'auteur a cru devoir endifférer l'impression.M. Dulong, professeur d'Alfort, a présenté surl'acide oxalique quelques expériences qui, sans formerencore un ensemble complet, ouvrent cepen*dant des vues intéressantes pour la science. En saturantcet acide de baryte, de strontiane, ou dechaux, l'on obtient des sels qui représentent toujoursl'acide employé, même après qu'on les a exposésà une chaleur supérieure à celle de l'eaubouillante; mais avec de l'oxyde de plomb ou dezinc


ET MÉTÉOROLOGIE. 125on perd toujours vingt pour cent de l'acide par ladessiccation. En poussant ensuite au feu ces oxalatesmétalliques desséchés, il ne se montre pointd'eau; mais on obtient de l'acide carbonique, dugaz oxyde de carbone, et il reste des oxydes des métauxemployés, dont celui de plomb offre des propriétésparticulières. Les oxalates de cuivre, d'argent,et de mercure, donnent au contraire toujoursde l'eau dans leur décomposition, quelque desséchésqu'ils aient été, en même temps que de l'acidecarbonique, et le résidu est à l'état métallique. Il ya détonation pour l'oxalate d'argent, et l'on saitd'ailleurs qu'il détone par le choc aussi bien queles oxalates de mercure.Quant aux oxalates de baryte, de strontiane, etde chaux,ils donnent, en se décomposant parlachaleur, de l'huile empyreumatique, de l'eau, del'oxyde de carbone, de l'hydrogène carboné, del'acidecarbonique, et il reste un mélange de souscarbonateet de charbon.On pourrait expliquer ces phénomènes de deuxmanières.Ou l'acide oxalique serait composé seulement decarbone et d'oxygène dans des proportions intermédiairesentre celles de l'acide carbonique et del'oxyde de carbone, mais il contiendrait de Feauque certains oxalates, comme ceux de plomb et de


t26PHYSIQUE, CHIMIE,zinc, abandonneroicnt par le dessèchement, tandisque les autres la retiendraient ; ou bien il seraitcomposé d'acide carbonique et d'hydrogène. Cedernier avec l'oxygène de l'oxyde formerait de l'eauque ces premiers oxalates laisseraient encore échapper,et il ne resteroit alors que l'acide carboniqueet le métal, combinaison nouvelle en chimie; caron y regardoit comme un principe général que lesmétaux ne peuvent s'unir avec les acides qu'aprèsavoir été oxydés. M. Dulong, qui penche pour cettedernière explication, pense donc que ces oxalatesde plomb et de zinc desséchés ne sont pas devraisoxalates; et il propose de leur donner, ainsi qu'auxcombinaisons du même genre qu'on pourrait découvrir,le nom de carbonides. Quant aux oxalatesqui ne donnent point d'eau par le dessèchement,ils contiendroient l'acide oxalique dans son intégrité; et, comme d'après sa composition on lenommerait désormais hydrocarbonique, les selsmêmes s'appelleraient hydrocarbonates.M. Dulong est conduit par l'analogie à des conclusionstrès générales, par lesquelles il fait rentrersous les mêmes lois non seulement les acides ordinaires,mais encore les hydracides ; mais nous enrendrons un compte plus détaillé lorsque luimêmeaura remis les mémoires plus étendus qu'ilpromet.


ET MÉTÉOROLOGIE. 127L'action chimique de la lumière solaire sur lescorps est digne de toute l'attention des savants parson influence sur la plupart des phénomènes de lanature vivante, et cependant elle a été peu examinéejusqu'ici. M. Vogel vient d'ajouter quelques expériencesà celles que l'on possédoit à cet égard.L'ammoniaque et le phosphore, qui n'agissent pointl'un sur l'autre dans l'obscurité, dégagent à la lumièresolaire du gaz hydrogène phosphore, et déposentune poudre noire composée de phosphoreet d'ammoniaque intimement combinés. Il en està-peu-près de même du phosphore avec la potasse.L'action des divers rayons n'est pas toujours semblable; les rouges ne produisent pas d'effet sur unedissolution de sublimé corrosif dans l'éther, tandisque les bleus et la lumière complète y opèrent unedécomposition mutuelle. Les muriates métalliquestrès oxydés sont ramenés par la même voie au minimumd'oxydation.Nous avons dit quelques mots les deux annéesprécédentes des recherches de M. Chevreul, sur lesavon et sur ce qui se passe lors de la saponification.Cet habile expérimentateur a reconnu que factionde la potasse produit entre les éléments de la graissede nouveaux modes de combinaisons d'où résultentdes substances qui n'y existoient pas toutes forméesauparavant, et dont deux, la margarine et une sorte


128 PHYSIQUE, CHIMIE ,d'huile ou de graisse fluide,acquièrent toutes lespropriétés des acides. L'auteur, poursuivant sontravail, s'est assuré que les mêmes effets sont produitspar la soude, les terres alcalines, et diversoxydes métalliques, et queles substances résultantessont en même proportion, de quelque agent qu'onse soit servi : la magnésie et l'alumine se bornentau contraire à contracter avec la graisse une certaineunion, mais sans en répartir ainsi les élémentsen divers composés. La quantité d'alcali nécessairepour convertir en savon une quantité donnée degraisse est précisément celle qui peut saturer lamargarine et l'huile que cette graisse produit. Notrelaborieux chimiste a terminé ses mémoires sur cettematière en assignant la capacité de saturation de lamargarine et de la graisse fluide,et en faisant connoîtreles propriétés de plusieurs nouvelles combinaisonssavonneuses qu'il a produites par le jeudes affinités doubles, en mêlant une dissolutionchaude de gFaisse fluideet de potasse avec différentssels terreux ou métalliques. Il est parvenu ainsià rendre les savons, dont l'étude avoit été négligéejusqu'à présent, presque aussi connus que les selsdont les chimistes se sont le plus occupés.Fourcroy avoit fait connoître sous le nom dadipocireune substance que l'on sépare, par le moyendes acides, de la matière grasse dans laquelle se


ET MÉTÉOROLOGIE. 129convertissent les corps des animaux enfouis dansla terre, et il l'avoit regardée comme identique aveccelle que l'on retire à l'état cristallin des calculs biliairesde l'homme, et avec le spermacéti ou blancde baleine qui se trouve en grande abondance danscertaines cavités de la tête du cachalot.M. Chevreul, conduit par ses recherches sur lescorps gras à examiner ces matières, a trouvé quecelle des calculs biliaires ne donne point de savon,tandis que le spermacéti en fournit aussi aisémentque la graisse, mais en s'altérant un peu autrement,dans d'autres proportions, et avec des propriétésparticulières. Le gras des cadavres est bien pluscompo^p que ne le croyoit Fourcroy, et l'on y trouvedifférents corps gras combinés avec l'ammoniaque,la potasse, et la chaux. C'est une graisse qui a déjàsubi l'action des alcalis.Chacun a pu observer une excrétion résineused'un jaune orangé qui sort des crevasses de l'écorcedes bûches de hêtre exposées à l'humidité, sousformes de lames ou de filets contournés comme duvermicel. M. Bidault de Villiers a fait sur cettematière quelques expériences chimiques. Il s'endissout une partie dans l'eau, une autre dans l'alcohol,et le résidu a plusieurs des propriétés dugluten. L'acide nitrique la convertit en acide oxalique,en matière jaune amère très abondante, etBUFFON. COMPLF.M. T. II 9


! i 0 PHYSIQUE, CHIMIE,en un corps gras, mais n'y produit aucun acidemuqueux. Elle donne au feu beaucoup de carbonated'ammoniaque et une huile fétide ; en sorteque les commissaires de l'Académie ont dû la regardercomme tenant de près à la nature des substancesanimales. Il sera intéressant de faire des recherchessur les causes de sa production.Une des époques où la chimie se soit montréeplus brillante et plus utile a été sans contredit celleoù la France, séparée pendant vingt ans des contréesdont les productions étoient devenues depuissi longtemps pour nous de véritables besoins, aété obligée d'y suppléer par des produits de son sol.Les arts connus ont été perfectionnés; ^es artsnouveaux ont été créés. Nous avons vu successivementextraire là soude du sel marin, former detoutes pièces l'alun et la couperose, rendre fixesdescouleurs que l'on regardoit comme faux teint, l'indigodu pastel remplacer celui de l'anil, la garancesuppléer à la cochenille, et le sucre de betteravetenir lieu de celui de canne.Ce dernier article, le plus important de tous, n'apas perdu à beaucoup près son intérêt dans les circonstancesactuelles. Il est vrai que beaucoup defabriques sont tombées: mais celles qui ont été dirigéesavec intelligence subsistent et prospèrent encore;et, selon M. le comte Chaptal, leur produit


ET MÉTÉOROLOGIE.i3lpourra toujours rivaliser avec le sucre des colonies.Ce savant chimiste donne une preuve sans répliquede son assertion, puisqu'il continue de fabriqueravec profit : il est vrai que dans tous les détails dela culture, de la récolte, et de la préparation, ainsique dans l'emploi des divers déchets, il s'est éclairédes lumières de la science et de celles de l'expérience, au point de ne rien rejeter qui puisse servir,et d'employer à d'autres usages tout Ce qu'il est obligéde rejeter. Il a décrit ses procédés d'une manièreassez claire pour qu'ils puissent être saisis par tousles fabricants, et nous devons espérer que son ouvrageaidera à conserver à la France une industrieprécieuse, et dont mille événements pourraientfaire de nouveau une industrie nécessaire.Le troisième volume de la Chimie élémentaire deM. Thénard a paru. Ce savant professeur y traiteavec le plus grand détail et d'après les découvertesles plus modernes, parmi lesquelles il en est un sigrand nombre que la science lui doit, des principesimmédiats des corps organisés, des diversproduits de leurs décompositions, et de leurs emploisdans les arts. Le quatrième, qui est sous presse,terminera l'ouvrage.ANNÉE 1816.On sait que les divers corps, et spécialement lesy-


l32PHYSIQUE, CHIMIE,divers liquides, se dilatent par la chaleur selon desproportions très différentes.M. Gay-Lussac a cherché à découvrir quelqueloi qui indiquât la règle de ces rapports ; pour ceteffet, au lieu de comparer les dilatations des diversliquides au-dessus et au-dessous d'une températureuniforme pour tous , il est parti d'un point variablequant à la température, mais uniforme quantà la cohésion des molécules ; du point où chaqueliquide entre en ébullition sous une pression donnée, et parmi ceux qu'il a essayés il en a trouvédeux qui, à partir de ce point, se dilatent également;ce sont l'alcohol et le sulfure de carbone quibouillent, le premier à 78° 4^ le second à 46° 60,tandis que d'autres liquides ne présentent pas àcet égard la même ressemblance. Cherchant alorsles autres analogies des deux liquides en question ,M. Gay-Lussac a reconnu qu'ils se ressemblent encoreen ce point qu'un même volume de chacund'eux, à la température qui le fait bouillir, donne,sous la même pression, un même volume de vapeur,ou, en d'autres termes, que les densités deleurs vapeurs sont entre elles comme celles desliquides à leurs températures respectives d'ébullition.M. Gay-Lussac promet de donner suite à ses expériences,et de présenter bientôt, des recherches


ET MÉTÉOROLOGIE.l33plus complètes sur la dilatation des liquides et surleur capacité pour le calorique, comparées à cellesde leurs vapeurs.Parmi les questions délicates dont s'occupe aujourd'huila chimie, on doit ranger principalementcelle des proportions selon lesquelles les élémentspeuvent s'unir pour former les combinaisons desdivers degrés. On a cru remarquer dans ces dernierstemps qu'il y avoit certaines limites affectéesde préférence par la nature, et exprimées par destermes généralement simples; et, d'après les recherchesde M. Gay-Lussac, cela est sur-tout vrai pourles combinaisons des gaz, quand on a égard nonpas à leur poids absolu, mais à leur volume sousune pression égale.Ces sortes de recherches sont sujettes à de grandesdifficultés, parcequ'il n'est pas toujours possibled'obtenir les combinaisons isolées, et que, lorsqu'onveut les extraire des sels dont elles font partie, ellesse décomposent ou s'altèrent par le mélange desautres principes de ces sels, ou de l'eau qui y entrepresque toujours.C'est ainsi que l'on peut expliquer les différencesnotables des résultats de MM. Davy, Dalton, et Gay-Lussac, touchant les combinaisons de l'azote et del'oxygène.Des expériences présentées cette année à l'Aca-


I 34PHYSIQUE, CHIMIE,demie par M. Gay-Lussac il résulterait que le gaznitreux contient un volume d'azote et un volumeégal d'oxygène sans condensation; que dans certainescirconstances il se forme une combinaisond'un volume d'azote contre un volume et demid'oxygène, à laquelle M. Gay-Lussac donne le nomd acide pernitreux ; que l'acide nitreux ordinaire secompose d'un volume d'azote contre deux volumesd'oxygène; enfin qu'il y a dans l'acide nitrique unvolume d'azote et deux volumes et demi d'oxygène.Parmi ces différentes variétés, si l'on peut s'exprimerainsi, des oxydes ou acides qui ont l'azotepour radical, il s'en trouve une que l'on obtient dela distillation du nitrate neutre de plomb préalablementdesséché. C'est un liquide très volatil, decouleur orangée. M. Gay-Lussac le regardoit commel'acide nitreux dont les éléments seroient maintenuspar l'action de l'eau qui en feroit partie; maisM. Dulong s'est assuré, par des procédés d'analysefort exacts, qu'il ne contient point d'eau , et lenomme par cette raison acide nitreux anhydre. Sonrésultat a été confirmé par la synthèse. Un volumede gaz nitreux, et un peu plus de deux volumes degaz oxygène, soumis à un froid artificiel de vingtdegrés, donnent cet acide qui entre autres propriétéschange de couleur non seulement par son mé-


ET MÉTÉOROLOGIE. I 35lange avec l'eau, mais par la chaleur ; incolore à 20 0au-dessous de zéro,il devient orangé à 15° au-dessus,et presque rouge à 28 0 , Quatre parties de gaznitreux et une partie de gaz oxygène, condensésde même par le froid, ont donné un liquide d'unvert foncé beaucoup plus volatil que le précédent •>que M. Dulong regarde comme un simple mélanged'acide nitreux et d'un autre acide où la proportiondu gaz nitreux serait beaucoup plus forte.M. Dulong a examiné aussi les proportions selonlesquelles l'oxygène se combine avec le phosphorepour former des acides. Avant lui on n'en admettoitque deux ; ses recherches lui font penser qu'il enexiste quatre. Celle où il entre le moins d'oxygènes'obtient en jetant dans l'eau un phosphore alcalin ;il se dégage de l'hydrogène phosphuré, et i'oxygènede l'eau forme avec le phosphore restant unacide qui reste combiné avec l'alcali, et qu'on enexpulse par l'acide sulfurique. M. Dulong le nommehypophosphoreux, maisil croit que son radical secompose en partie d'hydrogène.Un second acide, auquel M. Dulong transfère lenom de phosphoreux, s'obtient au moyen de la décompositionde l'eau par la combinaison de chlore *et de phosphore au minimum, décomposition d'oùil résulte deux acides, savoir l'hydrochloriquc oumuriatique, et celui dont nous parlons. M. Dulong


1 36 PHYSIQUE, CHIMIE,le juge composé de 100 parties de phosphore et deprès de 75 d'oxygène.Le troisième acide est celui qui se produit par lacombustion lente du phosphore dans l'air. Il sedécompose lorsqu'on le sature en acide phosphoriqueet en acide phosphoreux, et donne à-la-foisdes phosphites plus solubles et des phosphates quile sont moins. Toutefois M. Dulong ne le regardepas comme un simple mélange, mais plutôt commeune combinaison de ces deux acides, qui auroitquelque ressemblance avec les combinaisons salines,et où l'acide phosphoreux ferait fonction debase. D'après cette opinion il propose de le nommerphosphatique pour rappeler l'analogie qu'il auroitavec les phosphates.Le dernier terme de l'oxygénation est l'acidephosphorique : la proportion du phosphore à l'oxygèney est de 100 à 124. On l'obtient de la combustionvive du phosphore, ou de la décompositionde l'eau par le chlorure de phosphore au maximum,et encore de plusieurs autres manières. H est identiqueavec celui qu'on retire des os des animaux.Trois chimistes hollandois, MM. Van-Marum,Deyman, et Paëts-Van-Troostwick, firentconnoîtreen 1796 un gaz composé d'hydrogène et de carbone,qu'ils nommèrent gaz oléfiant, par la raison que sapropriété la plus singulière étoit de former un li-


ET MÉTÉOROLOGIE. I 37quide huileux par son mélange avec le gaz muriatiqueoxygéné. D'après la théorie que l'on avoitalors sur le gaz acide muriatique oxygéné, on devoitcroire que son oxygène s'unissoit à l'hydrogènecarhoné, et donnoit ainsi une sorte d'huile; maisaujourd'hui que l'on est venu à regarder ce gazcomme un corps simple, auquel M. Davy a donnéle nom de chlore, on est obligé de chercher uneautre explication. MM. Robiquet et Colin s'en sontoccupés. Ils ont reconnu qu'en faisant arriver lentementdans un ballon un volume de gaz oléfiantet deux volumes de chlore, ils se convertissent entièrementet sans résidu en liquide huileux, lequel,décomposé par le feu, donne 4e l'hydrogène nonsaturé de carbone, un dépôt de carbone, et beaucoupde gaz muriatique, c'est-à-dire, d'après lathéorie nouvelle, de gazhydrochlorique : le chloreentre donc en substance dans le liquide huileux.Mais y est-il comme chlore et uni directement àl'hydrogène surcarboné, ou biens'y trou ve-t-il uni àl'hydrogène et comme acide hydrochlorique, ou,autrement, muriatique? C'est à la première de cesconclusions que les auteurs sont conduits par desinductions tirées de la pesanteur spécifique descomposants et du composé, tandis que l'éther muriatique,qui a de nombreux rapports avec ce liquidehuileux, leur paroît au contraire formé de l'union


I 38 PHYSIQUE, CHIMIE,du gaz hydrochlorique avec l'hydrogène carboné.M. Chevreul continue toujours de travailler avecle même zèle à son Histoire chimique des corps gras.Nous avons dit d'après lui, dans le temps, commentla graisse de porc se compose de deux principes,l'un plus consistant, l'autre plus liquide ; commentl'action des alcalis en altère la combinaison, ensépare un principe nouveau analogue au corpsdoux de Scheele, et y occasione la formation dedeux autres princi pes de nature acide, avec lesquelsl'alcali se combine pour former le savon ; nous avonsexposé l'affinité diverse des alcalis et des terres avecces deux acides, et les capacités de saturation deces derniers; enfin nous avons rendu compte del'examen comparatif fait par M. Chevreul de diverscorps plus ou moins analogues à la graisse, tels quele calcul biliaire, le spermacéti, l'adipocire des cadavreset des différences essentielles qui les caractérisent.Dans un mémoire présenté à l'Académiecette année ce laborieux chimiste a commencé'àrechercher les causes auxquelles sont dues les consistances,les odeurs, et les couleurs particulièresà quelques huiles et à quelques graisses; et il s'estoccupé des graisses d'homme, de bœuf, de mouton,de jaguar, et d'oie. Les variétés de consistancetiennent à la proportion des deux principes générauxdes corps gras; mais les autres différences


ET MÉTÉOROLOGIE.I 3gdépendent de principes particuliers et étrangers.M. Chevreul propose un système de nomenclatureanalogue au reste de la nomenclature chimique,tant pour les principes qu'il a découverts que pourleurs combinaisons salines. Les deux principes dela graisse devront se nommer stéatine et élàine, d'aprèsles mots grecs qui signifient suif et huile. Sonprincipe acide le plus consistant, ou sa margarine,sera l'acide margarique; l'autre l'acide élaïque. Lespermacéti aura le nom de cétine, etc. Sans douteces noms chargeront la mémoire; mais c'est uninconvénient inséparable des progrès de la science,et des périphrases qui alongeroient le discours sansle rendre plus clair auraient des inconvénients nonmoins graves.ANNÉE 1817.Les physiciens, savent aujourd'hui, par les travauxd'un grand nombre de leurs plus ingénieuxprédécesseurs, que les effets de la distribution de lachaleur dans l'intérieur des eorps Solides se rapportentà trois qualités variables selon les corps,mais déterminables et fixes pour chacun d'eux :leur capacité pour le calorique, c'est-à-dire la quaiïtitéqu'il en faut à chacun pour passer d'un degréde chaleur à un autre ; leur conductibilité intérieure,c'est-à-dire le plus ou moins de facilité


l4oPHYSIQUE, CHIMIE.avec laquelle la chaleur parvient à s'y distribuerégalement; et leur conductibilité extérieure, c'està-direle plus ou le moins de facilité avec laquelleils se mettent à l'unisson de chaleur avec l'air oules corps environnants.La première de ces qualités est appréciée depuislong-temps pour chaque corps; la troisième dépendbeaucoup de l'état de la surface; et il est nécessaire,dans une théorie exacte, de la distinguersoigneusement de la seconde, qui tient sans douteà la disposition mutuelle des molécules des corps.Feu M. de Rumfort avait fait de nombreuses expériencessur la conducibilité extérieure d'un mêmecorps, selon qu'il est plus ou moins poli, ou revêtude diverses enveloppes.M. Desprets vient d'en faire pour comparer celledes corps différents dans des états de surface semblablespour tous. Il emploie des sphères assez petitespour que leur conducibilité intérieure n'influepoint trop sur l'extérieure; ses thermomètres ontleur réservoir au milieu de chaque sphère, et lessurfaces sont ou simplement polies, ou enduitesd'un vernis et d'un nombre de couches de ce vernis,reconnu par l'expérience le plus favorable aurefroidissement.M. Desprets a rédigé ainsi une table des tempsque mettent à se refroidir, au même degré, les prin-


ET MÉTÉOROLOGIE.l4lcipaux métaux employés dans les arts; et en combinantconvenablement cette table avec celle descapacités, il obtient celle de la conducibilité extérieure;c'est le plomb qui la possède au plus hautdegré, ensuite la fonte, puis le fer, letain, le zinc,et enfin le laiton.Les bains du Mont-Dor, près Clermont, fournissentune eau à l\i ou 43° centigrades de température,contenant quelques matières salines, maisexhalant sur-tout une grande quantité d'acide carbonique.On observe de très grandes différencesdans leur action sur ceux qui les prennent et dansle malaise qu'occasione leur vapeur; et lorsque ceseffets sont beaucoup plus marqués qu'à l'ordinaire,que les bains sont ce qu'on appelle soufrés, on peutêtre assuré quùn orage est prochain, et qu'il serad'autant plus violent que ces signes précurseursont été plus manifestes. >M. Bertrand, médecin de ces eaux, attribué cesphénomènes à l'électricité qui, dans ses communicationsde la terre à l'atmosphère, ou réciproquement,doit, selon lui, suivre de préférence les ramificationstortueuses des eaux minérales; mais lessignes d'électricité qu'il a obtenus n'ont pas paruassez constants ni assez évidents pour servir depreuve à son hypothèse, et l'on n'a peut-être besoin


l42PHYSIQUE, CHIMIE,de recourir qu'au plus ou moins de différence dechaleur au dedans et au dehors du bain, et à laplus ou moins grande abondance d'acide carboniquerésultant de la plus ou moins grande difficultéque l'état de l'atmosphère extérieure opposeà sa dissipation.Chacun sait que les alcalis fixes s'unissent ausoufre, et forment avec lui cette combinaison à laquellesa couleur a fait donner très anciennementle nom de foie de soufre, et que la nouvelle chimieplace dans la classe générale des sulfures; mais depuisque l'on a appris, par les brillantes expériencesde M. Davy, que les alcalis fixes ne sont autre choseque des oxydes métalliques, il devenoit intéressantde savoir s'ils entrent dans le sulfure comme oxydeou comme métal, c'est-à-dire s'ils conservent ous'ils perdent, en y entrant, l'oxygène auquel ilssont unis.M. Vauquelin avoit présenté des motifs plausiblesd'adopter la première de ces opinions pourle sulfure fait à une haute température; et M. Gay-Lussac vient en quelque sorte de la démontrerEn effet M. Vauquelin avoit fait observer que lesulfure fait à une haute température, lorsqu'on ledissout dans l'eau, donne du sulfate, dont l'acidesulfurique contient précisément autant d'oxygène


ET MÉTÉOROLOGIE. I 43que la potasse employée ; et si cet acide existoit dansle sulfure avant la dissolution",il ne peut avoir prisson oxygène qu'à la potasse; mais on pourroit objecterqu'il ne se forme qu'au moment de la dissolutionet en décomposant l'eau.C'est à quoi répond maintenant M. Gay-Lussac.En formant le sulfure à une température douceon n'obtient point de sulfate lors de la dissolution,mais seulement de l'hyposulfite. La simple dissolutiondans l'eau ne produit donc pas de l'acidesulfurique, et,s'il y en a, il a dû se former en mêmetemps que le sulfure, et dans un moment ou la potasseseule avoit de l'oxygène à lui fournir.L'oxyde noir de manganèse, traité à chaud avecde la potasse caustique, se fond en une matièreverte, dont la dissolution, d'abord de la même couleur,passe ensuite au bleu, au violet, et au rouge.Scheele, qui a le premier observé ces variations,avoit donné à la combinaison qui les présente lenom de caméléon minéral.M. Chevreul a remarqué qu elle peut passer partoutes les teintes des anneaux colorés, et que Ion yproduit alternativement les diverses nuances, soiten ajoutant petit à petit de l'eau, de l'acide carbonique,de la potasse, etc., soit en mêlant, dans diversesproportions, les deux couleurs extrêmes; on


l44PHYSIQUE, CHIMIE,peut enlever toute couleur par certains acides, etc.MM. Chevillot et Edwards, s'étant occupés decette singulière substance, ont constaté d'abordqu'il ne peut se former de caméléon sans le concoursde l'air; qu'il s'en forme dans l'oxygène plusaisément que dans l'air, et qu'il absorbe de l'oxygèneen se formant plus que ne ferait la potasseseule. Variant ensuite les proportions des composants,ils ont vu que le caméléon est d'un vert d'autantplus clair et plus pur qu'on y a employé moinsde manganèse et plus de potasse, et qu'en augmentantle premier composant et diminuant l'autrejusqu'à ce qu'ils soient en parties égales, onarriveà faire immédiatement du caméléon rouge, qui,dissout et évaporé, donne de beaux cristaux comparablesau carmin, inaltérables à l'air, et capablesde colorer une grande quantité d'eau. L'alcali y estparfaitement neutralisé. Ces chimistes se proposentde suivre ces expériences, et espèrent en déduireles causes des phénomènes remarquables qu'offrele caméléon minéral.La médecine emploie tous les jours des racines,des graines, ou d'autres parties de plantes et d'animauxauxquelles on a reconnu une action bienmarquée sur l'économie animale, et des vertus précieusescontre diverses maladies; mais ces vertus


ET MJÉTÉOROLOGIE. 1 4 5n'appartient pas à la totalité des principes immédiatsqui composent les substances, elles sont aucontraire ordinairement l'apanage exclusif de l'und'entre eux; et lorsque la chimie parvient à discernerce principe privilégiéet à découvrir les moyensde l'extraire, elle rend à la médecine un serviced'autant plus grand que souvent les autres principesauxquels il est uni affaiblissent son action,et produisent même des inconvénients qui restreignentl'usage de la substance dans laquelle ilentre. *•Ainsi l'on connoît depuis long-temps le pouvoirde l'ipécacuanha pour exciter le vomissement, etles heureux effets de ce remède sur les suites de ladyssenterie; l'on sait aussi, par les travaux récentsde M. de Candolle, que les racines employées enpharmacie, sous le nom dipécacuanha, proviennentde plantes assez diverses et dont la forcé n'estpas toujours égale; savoir, d'un psychotria, d'uncalicocca, et d'une violette; mais il s'agissait de déterminerauquel des principes immédiats de cesracines appartient la vertu qui les a rendues si précieuses,ce qui seul pouvoit donner les moyensd'assigner avec précision leurs degrés respectifs depuissance, et de fixer les meilleures méthodes deles préparer pour leur emploi en médecine. C'estce que MM. Magendie et Pelletier ont essayé deBUITON. COMPLÉM. T. II.IO


l46 PHYSIQUE, CHIMIE,faire par une analyse chimique très soignée, et pardes expériences sur les animaux et sur les hommes.Après avoir enlevé, par l'éther,«une matière huileuse,d'une odeur désagréable, ils traitent l'ipécacuanhapar l'alcohol, et en obtiennent de la cire etune substance particulière qu'ils séparent de cettecire au moyen de l'eau. Le résidu ne contient plusque de la gomme, de l'amidon, et du ligneux.C'est à la substance dissoluble dans l'alcohol etdans l'eau qu'appartient le pouvoir de faire vomir;ce qui l'a fait nommer émétine. Elle se présentesous forme d'écaillés transparentes, brun rougeâtre,presque sans odeur j légèrement acres etamères; elle est déliquescente à l'air,; et offre plusieursautres caractères qui paraissent lui être particuliers.A dose convenable de 2 à 4 grains elle ales effets de ï'ipécacuanha, mais non pas son odeurnauséabonde, qui réside dans la matière huileuse.Le vomissement qu'elle occasione est suivi defortes envies de dormir. A dose plus élevée, de 6 à12 grains par exemple, elle a fait périr les chiens ,après des vomissements violents et plusieurs heuresd'un assoupissement profond.La racine d'ipécacuanha brun(psychotrkt emeticâ)contient 16 centièmes d'émétine; mais la partie ligneuseintérieure de la même racine n'en possèdequ'un peu plus d'un centième'. Il y ena« 14 een-


ET MÉTÉOROLOGIE. î 47tièmes dàh$ l'écorcé d'ipécacuahha gris (calliëoccaipecacuanha) et 5 dans la totalité de la racine d'ipécacuanhablanc (viola emetica).L'opium, ou le suc de tête de pavots, dont l'ùsàgeest devenu si général dans la médecine niôderne,est aussi un compose de plusieurs principes;et, malgré les nombreux travaux dontil a été l'objet,M. Sertùrner, pharmacien d'Eimbeck, eii Hanovre,y a découvert récemment un acide, et, cequi est plus extraordinaire, un alcali nouveau, oudu moins une substance qui a toutes lés propriétésgénérales des bases sâlifiables. C'est à elle qu'ilattribue lé pouvoir somnifère et vénéneux de l'bpiûm,et il lui à donné, par cette raison; le nomde morphine. Amère, cristalli&iblé, fusible à là éhaleùr,)peu solùble dans l'eau même bouillante, maisbeaucoup dans l'alcohol et dans l'éther, elle formé,avec la plupart des acides, dés sels neutres remarquables,dont elle est précipitée par l'ammoniaque;elle se résout au feû en oxygène, en carboné, èûhydrogène, et peut-être en un peu d'azote': L'acideauqiiél elle est unie dans l'opium a reçu deM. Sertùrner le nom dé mèconiqut; mais ce chimisten'a pas eu le loisir d'en faire un examert assezapprofondi.M. Robiquet a repris et vérifié les découvertes de


I 48 PHYSIQUE,.CHIMIE,M. Sertùrner par rapport à ces deux substances;il a reconnu que l'acide méconique est très solubledans l'alcohol et dans l'eau ; qu'il forme des sels diversementsolubles avec les alcalis; qu'il donne ausulfate de cuivre une belle couleur d'émeraude, etc. ;mais M. Robiquet s est assuré, contre l'opinion deM. Sertùrner, que le sel essentiel extrait de l'opiumpar M. Derône en 1813 n'est pas la morphine,ni une combinaison de la morphine avecl'acide méconique; c'est, selon lui, une troisièmesubstance qui existe dans l'opium en même tempsque ces deux-là.M. Sertùrner avoit éprouvé de la morphine dissoutedans l'alcohol des effets délétères assez violents;mais quand on la donne seule elle agit peu.M. Orfila en a fait prendre sans effet à des chiens,à une dose où l'extrait aqueux d'opium auroit produitun empoisonnement violent. Tous les sels solublesde morphine agissent au contraire avec lamême intensité que l'opium, et en déterminant lesmêmes symptômes, tandis que l'opium dont on aséparé la morphine perd son efficacité.C'est donc la morphine qu'il faut tâcher de retrouverdans les végétaux indigènes, si l'on veut ydécouvrir quelque succédané de l'opium.M. Sage a publié, dans le courant de l'année,quatre mémoires sur l'eau de mer; il y admet un


ET MÉTÉOROLOGIE. 149gaz particulier, auquel il donne le nom de gaz neplunien,oléagineux, alcalin, et inodore, qui, selon lui,doit empêcher que la distillation ne puisse extrairede l'eau de mer une boisson salubré. On saura bientôtà quoi s'en tenir, d'après les expériences que lecapitaine Freycinet a été chargé de faire dans legrand voyage qu'il a entrepris.ANNÉE 1818.La chimie s'est enrichie cette année de deuxnouvelles substances doublement intéressantes, ence que l'une est à-la-fois métallique et alcaline, c'està-direque son oxyde est un nouvel alcali fixe,et ence que l'autre est métallique et acidifiable, et enmême temps plus analogue au soufre qu'à aucuneautre matière.On doit la première à M. Arfvedson, jeune chimistesuédois, élève de M. Berzélius. Ill'a découvertedans une pierre nommée pétalite, où il n'en a trouvéque de 3 à 5 centièmes ; mais il en a reconnu ensuitejusqu'à 8 centièmes dans une autre pierre appeléetriphane.Cette substance donne, avec la plupart des acides,des sels très fusibles; son carbonate en fusionattaque le platine presque aussi fortement que lesnitratesdes autres alcalis, et se dissout difficilement;son muriate est très déliquescent; son sulfate cris-


1 5o PHYSIQUE, CHIMIE,taljise sans eau de saturation. La capacité de cetalcali pour saturer les acides est plus grande quecelle d'aucun, autre, et il entre en plus grande quantitédans les sels qu'il forme avec eux.L'auteur de la découverte a donné à sa nouvellesubstance le nom de litfiion, pour rappeler qu'ellea été découverte dans une pierre, taudis que lesdeux autres alcalis fixes ont été d'abord tirés desvégétaux.^a seconde substance a étç découverte pf) r M. Berzéliuslvii-même dqns, une fabrique d'acide sulfurjquede Falim en Suéde. Il se dépose au fond de lachambre où j'on brûle c|u soufre retiré des pyritesune masse raugeâtre,qui n'es^elle-raçme en grandepartie que p"u soufre, mais qui donne en brûlantune odeur acre de raifort. Cette odeur étant l'unç^es. caractères d'un métal découvert depuis quelquesannées par M. Klaproth, et nommé tellure,on pouvqit croire qu'elle étoit çjue au mélange dece métal avec Je soufre. Cependant M, JBerzéliu^ etM. Gahn, qui examinèrent d'abord cette matièrerouge, nepurenten retirer de tellure. Lepren^ierenemporta à Stpç^hplnai poiir l'examiner de plus près,et il y trouva une substance très volatile, trps aisémentréductible, et ne se laissant point précipiterpa,r les alcalis. Sa couleur est grise, avec un grandéçla.t ; elle est dure, friable, et sa cassure ressemble


ET MÉTÉOROLOGIE.l5tà celle du soufre. Sa pesanteur spécifique estde3.6.Elle donne une poudre rouge par la trituration , seramollit à la température de l'eau bouillante, sefond un peu au-dessus, et reste quelque temps, àmesure qu'elle se refroidit, molle, pétrissable, etfilante comme de la cire d'Espagne. A un peu plusde chaleur encore elle bout et se sublime en un gazjaunâtre, et se fixe en forme de fleursd'un beaurouge,qui cependant ne sont point oxydées. Dansl'air elle s'évapore en fumée rouge, ou brûle avecune flamme bleue, et en donnant une si forte odeurde raifort qu un 5o e de grain suffirait pour empesterle plus vaste appartement.M. Berzélius a donné à cette substance le nomde sélénium, d'après le nom grec de la lune, et pourrappeler le rapport qu'elle a avec le tellure ; rapportqui pourrait au reste ne tenir qu'à la présencemême du sélénium dans les tellures examinés jusqu'àprésent.Les nouvelles de ces découvertes ayant été annoncéesà l'Académie par M. Gillet-Laumont, etbientôt après par une lettre de M. Berzélius luimêmeadressée à M. Berthollet, M. Vauquelin s'occupaaussitôt de vérifier ce qui concernoit l'alcali ;et ses observations ajoutèrent quelques détails àcelles qu avoit données M. Arfvedson. QuoiqueM. Vauquelin n'ait eu qu'une petite quantité de


l52PHYSIQUE, CHIMIE,pétalite à sa disposition, il y a trouvé jusqu'à 7pour cent de lithion.M. Berzélius a suivi avec tout le soin qu'elle méritoitsa belle découverte du sélénium. Il a soumissa substance à la plupart des agents de la chimie, etreconnu comment ils se comportent avec elle; et,étant venu à Paris cette année, il a donné lui-mêmeson travail avec le plus grand détail dans les Annalesde Chimie. Sous tous les rapports il montredans le sélénium une sorte d'intermédiaire entreles substances combustibles et les substances métalliques.Il en fait sur-tout une comparaison, d'une part,avec le soufre et le tellurium, de l'autre, avec lechlore, le fluor, et l'iode ; substances que beaucoupde chimistes ont voulu placer, dans ces dernierstemps, dans la même classe que le soufre, parcequ'ellcsdonneraient, comme le soufre, des acidesen se combinant avec l'hydrogène. On peut se rappelerce que nous avons dit à ce sujet dans nos analysesde 1813 et de 1814, en rendant compte de lanouvelle théorie de M. le chevalier Davy, sur lesacides qu'il croit formés sans oxygène.M. Berzélius trouvant que les combinaisons, soitdu soufre, soit du tellurium, soit du sélénium, avecles métaux et les substances combustibles, ont entreelles une grande analogie; et trouvant d'un au-


ET MÉTÉOROLOGIE. I 53tre côté que les combinaisons de l'iode et du chloreavec les mêmes matières sont aussi très analoguesentre elles et avec celles des acides oxygénés, maisne ressemblent point du tout aux précédentes; cesavant chimiste en conclut que ce sont deux ordresbien distincts de substances, et il laisse entrevoirpar-là qu'il ne regarde pas encore comme démontréela théorie de M. Davy.Ce sélénium est singulièrement peu abondant;5oo livres de soufre brûlé à la fabrique de Falunn'en donnent qu'un tiers de gramme. Combien doitilêtre- en proportion moins considérable encoredans la pyrite d'où ce soufre est extrait ! M. Berzéliusl'atrouvé depuis formant environ le quart d'unminerai d'argent et de cuivre extrêmement rare,que l'on avoit regardé, à cause de son odeur, commeun minerai de tellure, et que l'on tiroit autrefoisd'une mine maintenant abandonnée de la provincede Smolande en Suéde. Il ena trouvé aussiquelques parcelles combinées avec du cuivre sansargent.Plus on réfléchit sur ces éléments chimiques,qui seroient ainsi jetés comme au hasard par lanature en petites parcelles de si peu d'effet dansl'univers que l'art le plus délicat, la science la plusprofonde suffisent à peine pour les mettre au jour,plus on est porté à croire qu'une science plus pro-


1 54 PHYSIQUE, CHIMIE,fonde encore leur arrachera bientôt leur qualitéd'éléments.M. Gay-Lussac a fait eu 1811 sur le principe colorantdu bleu de Prusse, ou ce que l'on tiomnaedepuis quelque temps Yacide prussique, des recherchesqui ont fait reconnoître à cette substance, dansson état de pureté, des propriétés fort remarquables,et jusqu'alors entièrement ignorées; telles,entre autres, que la petitesse de l'intervalle quisépare pour elle le point de la congélation et celuide l'évaporation, et son épouvantable influence surl'économie animale. Ce savant chimiste, continuantses recherches sur cet important sujet, a découvert,en 1814•> que ce principe est un hydracide, c'est-àdireun de ces corps semblables aux acides quantà leur action extérieure, mais où l'on ne peut démontrerla présence de l'oxygène, et qui paraissentrésulter de la combinaison de l'hydrogène avec unradical. L'acide prussique est même le premierhydracide dont on connoisse le radical quant àses éléments, et M. Gay-Lussac a trouvé qu'il secompose de carbone et d'azote en proportions peudifférentes. Il a nommé ce radical cyanogène, etl'acide qu'il fournit hydrocyanique, à cause de sapropriété de teindre l'oxyde de fer en bleu. Nousavons annoncé toutes ces découvertes dans nosanalyses de 1811 et de i8i4>


ET MÉTÉOROLOGIE. 1 55M. Vauquelin a travaillé de nouveau sur cettematière en suivant, commeil le dit avec sa modes^tieordinaire, la route que M. Gay-Lussac lui avoitfrayée; mais cette route avoit des embranchementsqui ne pouvoient échapper à un homme tel queM. Vauquelin.Le cyanogène gazeux se dissout dans environquatre fois et çlemie son volume d'eau, et lui donneime odeur et une saveur très piquante, niais sansla colorer. Après quelques jours cette dissolutionse teint en jaune, puis en brun, dépose une matièrebrune, prend l'odeur d'acide hydrocyanique,et développeMe l'amnioniaque quand on y met dela potasse. Cependant elle ne peut encore donnerde bleu de Prusse. Des expériences ultérieuresmontrent qu'elle contient de l'hydrocyanate, ducarbqnated'ammoniaque,et de l'ammoniaque combinéeavec un troisième acide que M. Vauquelinnomme cyanique, sans avoir absolument déterminéla composition de son radical.Il y a donc décomposition de l'eau : son hydrogènes'unit à une partie du cyanogène pour formerde l'acide hydrocyanique; une autre partie s'unità cle l'azote du cyauogènc pour foi mer l'ammoniaque;l'oxygène de çet(e rnême eau avec une partiedu çarbçm£î du cyaRQgène forme de j'açide carbo*-nique. Le troisième acide résulte de quelque coin-


I 56PHYSIQUE, CHIMIE,binaison du même genre ; etil reste cependantencore du carbone et de l'azote que cet oxygène nesuffit pas pour convertir en acide, et qui donnentla matière brune du dépôt.Les oxydes alcalins produisent des effets semblables,mais bien plus rapidement.Une multitude d'autres applications du cyanogèneaux oxydes, aux métaux,aux substances combustibles,ont donné à M. Vauquelin des résultatsnon moins curieux. La question la plus intéressantequ'elles pouvoient résoudre étoit de savoir si le bleude Prusse est un cyanure ou un hydrocyanate,c'està-direune combinaison de l'oxyde de fer avec le cyanogène, ou bien avec son hydracide. M. Vauquelinayant constaté que l'eau imprégnée de cyanogènepeut dissoudre le fer sans le changer en bleu dePrusse, et sans qu'il y ait dégagement d'hydrogène,mais en laissant du bleu de Prusse dans la portionnon dissoute, et que l'acide hydrocyânique convertitle fer ou son oxyde en bleu sans le secours ni desalcalis ni des acides; il en conclut, contre l'opinionde M. Gay-Lussac, que le bleu de Prusse est unhydrocyanate, et que, lorsqu'on expose du fer àl'eau imprégnée de cyanogène, il s'y forme à-la-foisde l'acide cyanique qui dissout une partie du fer, etde l'acide hydrocyânique qui en convertit une autreen bleu.


ET MÉTÉOROLOGIE. I 57Il établit même une règle générale, laquelle seroitque les métaux qui, comme le fer, peuvent décomposerl'eau à la température ordinaire forment deshydrocyanates; et que ceux qui n'ont pas cette faculté,comme l'argent et le mercure, ne formentque des cyanures.Tout le monde sait que la plupart des acides résultentdes combinaisons del'oxygène avec certainessubstances auxquelles on a donné le nom de radicaux,et que, suivant qu'il entre dans la combinaisonune quantité plus ou moins grande d'oxygène,l'acide formé est différent en propriétés, et prenddes noms auxquels les chimistes modernes ontdonné une certaine régularité, en indiquant ledegré d'oxygénation par le moyen de la terminaison.C'est ainsi que l'azote produit, par des additionssuccessives d'oxygène, le gaz nitreux, l'acide nitreux,l'acide nitrique; et nous avons parlé, dansnotre analyse de 1816, de combinaisons encoredifférentes dans leurs proportions découvertes parMM. Gay-Lussac et Dulong.M. Thénard vient de faire des expériences d'oùil résulte que plusieurs acides peuvent admettre desproportions d'oxygène bien supérieures à celle quel'on regardoit jusqu'à présent comme constituantleur état le plus oxygéné. En dissolvant avec pré-


l 58PHYSIQUE, CHIMIE,caution de la baryte surôxVdéè par de l'acide nitrique,et eh la précipitant par lacidè sulfurique, sonexcès d'oxy^ènè reste uni au premier acide qui devientainsi de l'acide nitrique oxygéné. Pdr desmoyens que M. Thénard indiqué on peut le concentrerassez pour qu'il donne par la chaleur onzefois son Volume d'oxVgènë; et, d'après lés calculsde ce savant chimiste, il seroit unfe combinaisond'un volume d'azote contre trois volumes d'oxygène.L'acide hydrochlorifcjiië s'oxygène par le même procédé, et prend alors dés propriétés singulières. Appliquéà l'oxyde d'argent, il forme dé l'eau et urichlorure, et sort oxygène devenant libre produitune effervescence aussi vive que si l'on versôit Unacide sur uri carbonate alcalin.L'acide sulfurique, le fluorique, peuvent êtreoxygénés dé même, et ou peut suroxygéner éricoretous ces acides une ou plusieurs fois 1 . Il en est auxquelsM. Thénard a ajouté de cette nianière jusqu'àsept et même jusqu'à quinze dosés successives d'oxygène.Ha contraint ainsi de l'acide hydrochloriquéà en absorber jusqu'à trente fois son voluriie. fliénn'égale alors l'effervescence qu'y occasione le contactde l'oxydé d'argent. Par le moyen de ces acidesainsi surchargés d'oxygène, et par des procédésanalogues, on peut aussi suroxygéner des terres èides oxydes métalliques. M. Thénard à même sur-


ET MÉTÉOROLOGIE.l5goxygéné l'eau en versarit peu à peu de l'eau debaryte dans de l'acide sulfurique oxygéné; l'acidesulfurique s'unit à la baryte, se précipite avec elle,et laisse à l'eau son excès d'oxygène. Ainsi oxygénéel'eau dans le vide se congelé ou s'évapore sans perdreson oxygène; il s'y concentre au contraire aupoint qu'elle en a absorbé jusqu'à quarante ou cinquantefois son volume : mais l'ébullition le lui enlève; le charbon, l'argent, l'oxyde d'argent, et ceuxde plusieurs autres métaux, le font jaillir avec unevive effervescence;et, ce qui est singulier, un pas'sage si rapide à l'état de gaz d'une quantité considérablede matière, loin de produire du froid,échauffe la liqueur à un degré très sensible. M. Thénardsoupçonne qu'il y a quelque chose d'électriquedans ce phénomène.On sait aujourd'hui, par les célèbres expériencesgalvaniques de M. le chevalier Davy, que les alcalisfixes ne sont autre chose que des oxydes de métauxexcessivement combustibles; et par celles deMM. Thénard et Gay-Lussac que l'on peut lesramener à l'état métallique au moyen du carboneet d'une très haute température. Nous avons parléde ces grandes découvertes dans notre analysede 1808.fM. Vauquelin, ayant réduit dernièrement del'antimoine par des flux alcalins, s'est aperçu que


160 PHYSIQUE, CHIMIE,ce métal, mis dans l'eau, donnoit une grande quantitéde gaz hydrogène, et que l'eau devenoit alcaline.D'autres métaux, réduits de la même manière,lui ont offert le même phénomène. Il en a concluqu'une partie de l'alcali qu'il avoit employé s'étoitpendant l'opération combinée à l'antimoine sousforme métallique, et décomposoit l'eau pour revenirà l'état d'oxyde; mais il a été obligé d'en conclureaussi que la présence d'un métal est favorable à laréduction de l'alcali: car, autrement, l'alcali n'auraitpu prendre la forme métallique par une chaleursi foible.Nous avons parlé l'année dernière des expériencesde MM. Ghevillot et Edouard sur cettesingulière combinaison d'oxyde de manganèse etde potasse, que l'on a nommée caméléon minéral àcause de sa facilité à prendre successivement descouleurs diverses.Ces jeunes chimistes ont donné suite à leur travail;ils ont reconnu que la soude, la baryte, et lastrontiane, peuvent donner, comme la potasse,différentes sortes de caméléons en s'unissant àl'oxyde de manganèse et en absorbant de l'oxygène.Mais, s'attachant principalement à l'espèce de caméléonde potasse dans lequel l'alcali est parfaitementneutralisé, celle qui est d'une belle couleurrouge, ils ont observé que les corps très combus-


ET MÉTÉOROLOGIE.l6ltibles agissent sur elle avec heaucoup d'énergie;qu'ils la décomposent, et s'enflamment souventavec une forte détonation : le phosphore en produitmême une par le simple choc. D'un autre côté cecaméléon rouge, exposé au feu, se décompose, etdonne de l'oxygène, de l'oxyde noir de manganèse,et du caméléon vert dans lequel la potasse domine.Ils concluent de ces faits que l'intervention del'oxygène dans la formation du caméléon a pourrésultat d'oxyder davantage le manganèse et de leconvertir en un véritable acide: en sorte que lecaméléon seroit un manganésiate de potasse; lecaméléon rouge, en particulier, en seroit un manganésiateparfaitement neutre, et le vert un manganésiateavec excès d'alcali. Cependant ils n'ont puparvenir à. isoler cet acide, dont ils admettentl'existence ; mais ils ont fait des expériences nombreusesqui leur paraissent confirmer leur opinionénoncée dès l'année dernière que le caméléon vertne diffère du rouge que par plus d'alcali.Soit que l'on verse des acides sur du caméléonvert, ou de l'alcali sur du rouge, on le fait passerégalement d'une couleur à l'autre; mais l'ébullitionet l'agitation peuvent aussi dégager l'excès de potassedu caméléon vert et le changer en rouge. Plusieursacides versés en excès décomposent tout lecaméléon en s'emparant de la potasse, en dégageantBUFFON. COMPI.ÉM. T. II.' I


162 PHYSIQUE, CHIMIE,de l'oxygène, et en précipitant le manganèse à l'étatd'oxyde noir. Le sucre, les gommes, et d'autressubstances capables d'enlever l'oxygène, décomposentégalement le caméléon, et l'exposition à l'airproduit un effet semblable; ce que les auteurs attribuentaux corpuscules étrangers qui flottent dansl'atmosphère, et qui, en tombant dans la dissolution,lui enlèvent aussi une partie de l'oxygène quilui est essentiel.Le cobalt et le nickel sont deux demi-métauxqu'il est très difficile d'obtenir purs, et sur-tout deséparer entièrement l'un de l'autre ; cependantcette préparation est nécessaire pour une déterminationexacte de leurs propriétés. M.Laugier, ayantsuivi les méthodes le plus récemment publiées pourparvenir à cet objet, a trouvé encore dans le nickeldes traces non équivoques de cobalt. Pour s'en débarrasseril dissout le mélange dans l'ammoniaque,et précipite par l'acide oxalique ; il redissout l'oxalatede nickel et de cobalt obtenu par cette opérationdans l'ammoniaque concentrée, et expose ladissolution à l'air. A mesure que l'ammoniaques'exhale, il se dépose de l'oxâlate de nickel mêléd'ammoniaque. Par des cristallisations répétées ondépouille le liquide de tout son nickel ; il n'y restequ'une combinaison d'oxalate de cobalt et d'ammoniaque,que l'on réduit aisément. Le peu de


ET MÉTÉOROLOGIE. I 63cobalt qui est demeuré dans le précipité de nickels'en sépare par quelques dissolutions successivesdans l'ammoniaque: ainsi la même opération donneles deux métaux à l'état de pureté.Le sucre de lait traité par l'acide nitrique donneun acide dont Scheele fitla découverte, et qui depuisa été nommé acide mucique, parcequ'il se produitégalement par l'action de l'acide nitrique surles gommes et mucilages. Quand on expose cetacide à la chaleur, il se sublime une matière salinebrune très odorante, brûlant avec flamme sur lescharbons , et dissoluble dans l'eau et l'alcohol.Tromsdorf, qui a fait un examen particulier decette matière sublimée, crut y trouver de l'acidesuccinique, du pyrotartarique, de l'acétique, etdiverses autres substances ; mais M. Houtou-Labillardière,s'étant aperçu, à la lecture du travail deTromsdorf, qu'il attribuoit à son acide succiniquedes caractères fort différents de ceux que cet acideoffre réellement, a cru devoir reprendre ces recherches.lia lu à l'Académie un mémoire où il prouve quece prétendu acide succinique est un acide nouveau,auquel il donne le nom de pyromucique. Quand onl'a débarrassé de l'huile et de l'acide acétique quis'y mêlent, il cristallise aisément, est blanc, inodore,d'une saveur acide assez forte, fond à i3o degrés11.


1 64 PHYSIQUE, CHIMIE,centigrades, se volatilise au-delà de cette température,n'attire point l'humidité, se dissout dans l'eaubouillanteen plus grande abondance que dans l'eaufroide; et en le résolvant en ses parties constituanteson en obtient environ neuf volumes devapeur de carbone, trois d'hydrogène, et deuxd'oxygène. M. Houtou-Labillardière décrit avec soinles combinaisons de cet acide avec diverses basessalifiables, et tous les phénomènes qu'il rapporteviennent à l'appui de l'assertion de ce jeune et habilechimiste.M. Chevreul a fait de nouvelles et importantesadditions à ses recherches sur les corps gras, dontnous avons déjà plusieurs fois entretenu nos lecteurs.Après avoir reconnu que la matière du calculbiliaire, qu'il nomme cholesterine, ne forme pointde savon avec les alcalis, ce qui la distingue essentiellementdes graisses, il avoit cru s'apercevoir quele spermacéti, auquel il a donné le nom de cétine,se réduisoit, par l'action des alcalis, en un acideanalogue à l'un des deux que ces mêmes alcalisproduisent dans les graisses, savoir à celui qu'il aappelé margarique, mais que cet acide du spermacétiavoit une capacité de saturation beaucoupmoindre. Il avoit donc jugé nécessaire de donnerà cet acide un nom particulier, et l'avoit appelécétique. Des expériences plus suivies l'ont convaincu


ET MÉTÉOROLOGIE.l65que ce n'est autre chose que de l'acide margarique,dont les propriétés sont masquées par un reste desubstance grasse non acide. Mais de l'huile de dauphintraitée par la méthode de M. Chevreul, c'està-direconvertie en savon par les alcalis, lui a réellementdonné, outre les deux acides que fournissenttoutes les graisses, un acide d'une troisièmesorte, qu'il nomme délphinique; ce que ne fait pasl'huile de poisson ordinaire du commerce.Il est à remarquer que l'oxygène ne peut se démontrerdans ces nouveaux acides ternaires tirésdes graisses, et qu'ils sont à l'égard des acides végétauxordinaires, tels que l'acétique, l'oxalique, etc.,ce que sont, dans le règne minéral, les hydracidesde M. Davy à l'égard des acides minéraux anciennementconnus, le nitrique, le sulfurique, etc.La cochenille, cet insecte singulier qui par lamatière colorante qu'il fournit est devenu un articlesi important de commerce, n avoit point étéencore étudiée par les chimistes avec l'attentiondont elle est digne. MM. Pelletier et Caventou enont fait l'objet de leurs expériences : ils ont reconnuque la matière colorante si remarquable qui en faitla partie principale y est mêlée à une matière animaleparticulière, à une graisse semblable à lagraisse ordinaire et à différents sels. Après avoirenlevé la graisse par l'éther et traité le résidu par


166 PHYSIQUE, CHIMIE.l'alcohol bouillant, ils laissent refroidir ou lentementévaporer l'alcohol, et obtiennent ainsi la matièrecolorante, mêlée seulement encore d'un peude graisse et de substance animale, qu'on en sépareen dissolvant encore par l'alcohol à froid qui laissela matière animale, et en mêlant à la dissolution del'éther qui en précipite la matière colorante dansun grand état de pureté. Chacun sait qu'elle est duplus beau rouge, et les chimistes dont nous parlonslui donnent le nom de carminé. Elle se fond à 5o°,se boursoufle ensuite, et se décompose sans donnerd'ammoniaque; elle est très soluble dans l'eau, peudans l'alcohol, et point dans l'éther sans l'intermèdede la graisse. Les acides la font passer successivementdu cramoisi au rouge vif et au jaune ; lesalcalis au cont raire,et en général tous les prato.xydes,la font tourner au violet; l'alumine l'enlève à l'eau.Ces expériences expliquent plusieurs des procédésde l'art du teinturier et de celui du fabricant decouleurs, et particulièrement ce qui se passe dansla teinture en écarlate et dans la fabrication ducarmin et de la laque.La laque n'est formée que de carminé et d'alumiue;elle a la couleur naturelle de la carminé, quiest le cramoisi. Le carmin est un couiposé triple dematière animale, de carminé, et d'acide qui enrehausse la teinte ; c'est l'action de l'acide muriatique


ET MÉTÉOROLOGIE. 167qui convertit le cramoisi de la cochenille en bellecouleur d'écarlate.Les causes les plus apparentes des phénomènesatmosphériques, la densité de l'air, son humidité,sa chaleur, et son électricité, sembleroient devoirprincipalement dépendrede l'action du soleil: maisl'irrégularité de leurs effets dans nos climats prouveassez qu'elles éprouvent encore d'autres influences,et qu'elles se compliquent avec des causes encoreinconnues ; et c'est ce qui fait que jusqu'à nos joursla météorologie semble être de toutes les branchesde la physique celle qui s'est le moins rapprochéede ce degré de certitude qui pourroit la faire considérercomme une science positive.M. de Humboldt fait remarquer que, si Ion peutespérer d'en jamais déterminer les lois, c'est enl'étudiant dans les climats où ces phénomènes offrentle plus de simplicité et de régularité ; et c'estincontestablement la zone torride qui doit à ce titrefixer le choix de l'observateur.Déjà c'est entre les tropiques qu'il a été possiblede reconnoître les lois des petites variations horaires du baromètre; c'est dans la zone torride quela sécheresse et les pluies, que la direction des ventsdans chaque saison, sont soumis à des règles invariables.


1 68 PHYSIQUE, CHIMIE,M. de Humboldt a porté son attention sur lerapport de la déclinaison du soleil avec le commencementdes pluies dans la partie nord de la zone.A mesure que le soleil s'approche du parallèle d'unlieu, les brises du nord y sont remplacées par descalmes ou des vents du sud-est. La transparence del'air diminue; l'inégale réfringence de ses couchesfait scintiller les étoiles à 20 0 au-dessus de l'horizon.Bientôt les vapeurs s'amassent en nuages; l'électricitépositive ne se manifeste plus constamment dansJe bas de l'atmosphère; le tonnerre se fait entendre;des ondées se succèdent pendant le jour; le calmede la nuit n'est interrompu que par des vents impétueuxdu sud-est.M. de Humboldt explique ces faits par le plus oumoins d'inégalité qui se trouve entre cette partiede la zone torride et la zone tempérée voisine.Lorsque le soleil est au midi de l'équateur, c'estl'hiver de l'hémisphère boréal. L'air de la zonetempérée est le plus différent qu'il soit possible decelui de la zone torride. Il s'y écoule sans cesse enbrise fraîche et uniforme qui reporte l'air chaud ethumide dans le haut de l'atmosphère, d'où il retournevers cette même zone tempérée, y rétablitl'équilibre, y dépose l'humidité: aussi la chaleurmoyenne est-elle .toujours moindre de 5 à 6° dansle temps de sécheresse que dans le temps des pluies ;


ET MÉTÉOROLOGIE. 169mais les vents de sud-est n'agissent point commeceux d u nord, parcequ'ils viennent d'un hémisphèrebeaucoup plus aquatique, et sur lequel Je courantd'air supérieur ne se disperse pas de la même manièreque dans l'hémisphère boréal.M. Moreau de Jonnès a communiqué quelquesdétails extraits de sa correspondance sur le coup devent qui a causé tant de dégâts aux Antilles le 21septembre dernier; il a été précédé d'un calmeplat : le vent est passé par le nord au nord-ouest, etc'est de ce point qu'il a soufflé avec violence. M. deJonnès remarque à ce sujet que l'année précédentele coup de vent du 20 octobre venoit du sud-est, etqu'il existe entre ces deux points un espace de 90 0au sud et au nord d'où il ne souffle jamais de courantd'air. L'agitation de l'air a été suivie d'un rasde marée violent qui a entraîné des navires; maison n'a observé aucun mouvement extraordinairedans le baromètre. Une remarque assez triste c'estque l'effet communément attribué à ces ouragansd'assainir l'air des pays qu'ils dévastent ne s'est pasvérifié dans cette occasion, et que la fièvre jaunen a pas cesse u exercer ses ravages.Le même observateur a donné aussi une noticedes tremblements de terre éprouvés aux Antillescette année, et qui ont eu cela de remarquablequ'ils ont affecté une sorte de périodicité. Il y en a


17° PHYSIQUE, CHIMIE,eu huit depuis le mois de décembre jusqu'au moisde mai, un chaque mois, excepté en avril, où il yen a eu deux, et tous entre neuf et onze heures dusoir.ANNÉE 1819.Le séjour que M. Berzélius, savant chimiste suédois,correspondant de notre Académie, et nouvellementnommé secrétaire-perpétuel de celle deStockholm, a fait à Paris pendant une partie decette année nous a valu une traduction françoisede son intéressant ouvrage sur la Théorie des proportionschimiques et sur [influence chimique de l'éleclri^cité, ouvrage où il cherche à fixerles idées sur lesdeux points fondamentaux de la doctrine chimieque; savoir, la disposition relative des particulesélémentaires des corps, lorsqu'elles sont arrivées àune combinaison fixe, et la force impulsive qui lesconduit à cet état, ou qui les contraint à en changeret à se réunir en combinaisons nouvelles, soitentre elles, soit avec des particules d'autres espèces.L'auteur part des lois récemment reconnues parles chimistes sur les proportions d'après lesquellesse font les combinaisons diverses des mêmes substances.Il étoit si naturel de croire que l'identité dans lesqualités chimiques de chaque substance composée


ET MÉTÉOROLOGIE. 171tient à l'identité d'espèce et de proportion des élémentsqui la composent que cette opinion avoit étéadoptée bien avant que l'on pût en donner despreuves rigoureuses. On fut même long-temps sanschercher ses preuves, parceque l'on se contentoitde cet aperçu vague et général.Cependant les expériences de Bergman sur laprécipitation des métaux les uns par les autres,celles de Wenzel, et sur-tout celles de Richter surla décomposition mutuelle de différents sels pardouble affinité, commencèrent à donner de la précisionà cette manière de concevoir la.compositiondes corps ; elles prouvèrent que certains oxydesque certains sels neutres, n'arrivent à un état fixe etcaractérisé que par des proportions fixes de leursparties constituantes; mais un peu plus tard laplupart des chimistes, exclusivement, occupés desdiscussions que la nouvelle théorie de la combustionavoit occasionées, négligèrent ce genre de recherches.M. Berthollet fut le premier parmi nous qui s'enoccupa sérieusement dans son célèbre ouvrage dela Statique chimique. Il reconnut bien le principequi résultoit des expériences de Wenzel et de Richter,que les acides et les bases salifiables possèdent,chacun dans son espèce, des capacités constantesde saturation, et que si une base, par exemple, sa-


172 PHYSIQUE, CHIMIE,ture deux fois plus d'un certain acide que ne faitune autre base, elle saturera aussi deux fois plus detout autre acide, et réciproquement. Mais M. Bertholletne pensa point que deux substances dussenttoujours s'unir d'après des proportions fixes : « Si cesproportions sont fixes dans certains cas, disoit-il,c'est qu'il survient des circonstances qui interrompentl'action chimique, telles que la tendance à sesolidifier ou à prendre la forme gazeuse; hors delà cette action continue à combiner les corps, etrien n'empêche qu'elle ne les tienne unis dans toutesles proportions imaginables. »Il s'éleva, à ce sujet, une discussion animée entrece savant chimiste et un autre de nos confrères,M. Proust. Ce dernier soutint qu'il n'en est ainsique pour les simples solutions, telles que cellesd'un sel neutre dans l'eau, mais que les vraies combinaisonsentre deux mêmes substances n'ont lieuque dans des proportions fixes ; que si le contrairesemble quelquefois résulter des analyses, l'illusionvient d'un mélange qui se fait de l'excédant de l'undes éléments avec la masse véritablement combinée;mélange très différent d'une combinaison proprementdite, et qui s'en laisse aisément distinguer. Ilalla même jusqu'à soutenir que chaque métal nepouvoit se combiner qu'en deux proportions avecl'oxygène; proposition trop exclusive, et qui fut


ET MÉTÉOROLOGIE.in3combattue, en même temps que celle de M. Berthollet,par M. Thénard.Les idées de M. Dalton sur la manière dont lesmolécules peuvent se combiner ayant excité enAngleterre à des recherches encore plus précises,les belles expériences de M. Wollaston établirent enquelque sorte d'une manière définitive, non seulementque les diverses combinaisons caractériséesentre des substances données ont lieu dans desproportions fixes, mais que les quantités de l'une,qui peuvent s'unir successivement à l'autre pourformer ces combinaisons, se laissent exprimer pardes nombres entiers et par des nombrs assez petits.Peu de temps après, M. Gay-Lussac prouva quetous les gaz se combinent en volume dans des rapportssimples, et de telle manière, que leur contractionapparente est aussi en rapport simple avecleur volume primitif. Si les volumes sont en rapportssimples, il en est de même des poids. D'uneautre part, comme on peut gazéifier plusieurs liquideset plusieurs solides, et qu'on les gazéifieraittous en les exposant à une chaleur assez forte, il esttout naturel de penser que les lois de compositions'appliquent aussi à ces sortes de corps. Ainsi de ladécouverte de M. Gay-Lussac l'on pourroit concluretoute cette doctrine des proportions multiples.M. Berzélius, qui a beaucoup contribué par


3y4PHYSIQUE, CHIMIE,ses propres expériences, à augmenter le nombredes faits sur lesquels repose maintenant cette doctrine,a cherché, dans l'ouvrage dont nous rendonscompte, à en conclure une théorie, ou, ce qui revientau même, à les représenter par une théorie;car dans ces matières les théories ne peuvent êtreque la représentation des faits recueillis.Adoptant à cet effet le langage de la philosophiecorpusculaire, il suppose les substances homogènesformées d'atomes ou de particules de matières,non pas, sans doute, absolument ou métaphysiquementindivisibles, mais sur lesquelles aucune forcemécanique ne pourroit produire de division ultérieure.Lorsque les forces chimiques sont égalementimpuissantes, l'atome est ce que M. Berzélius appellesimple; ce qui veut dire que c'est non seulementune particule de matière insécable h intriturable^mais encore indécomposable pour nous danstoute l'étendue du mot. Des atomes chimiquementsimples, mais d'espèces diverses, en se combinantensemble forment des atomes composés.Dans le régne inorganique, le premier ordre decomposition ne résulte que de l'union d'atomes dedeux espèces; dans le régne organique au contraireil y en a toujours au moins trois. Les atomes composésdu premier ordre s'unissent à leur tour en


ET MÉTÉOROLOGIE. 175atomes composés du second, et ceux-ci en atomesdu troisième et même du quatrième; mais la tendancedes atomes à s'unir diminue à mesure queleur composition augmente. Il lui faut même pourcontinuer d'agir, passé un certain degré de composition,des circonstances dont l'homme n'est pas lemaître; et bien que la uature ait formé autrefoiset forme peut-être encore dans les entrailles duglobe des minéraux d'une composition extrêmementcompliquée, et cependant chimiquement homogènes, nous ne sommes en état de rien produirede semblable dans les opérations rapides denos laboratoires.On comprend que cette manière de se représenterles éléments des corps, ces atomes divers,supposés d'ailleurs, chacun dans leur espèce, defigures et de grandeurs semblables, se groupantdeux à deux, trois à trois, en un mot, formant desréunions dans lesquelles ils entrent en nombre déterminépar l'espace qu'ils peuvent occuper d'aprèsleur figure,s'accorde assez bien avec la règle desproportions multiples, et en donne même une sorted'explication générale ; mais on comprend aussi quela règle des proportions multiples elle-même, etpar conséquent la théorie qui s'y rapporte, dépendde la détermination de l'atome simple, laquelle nepeut avoir lieu sans quelque mélange d'hypothèse.


1-6 PHYSIQUE, CHIMIE,En effet on prend pour base de cette déterminationcelle de toutes les combinaisons connues où l'élémentdont on veut déterminer l'atome simpleexiste dans la moindre qualité relative ; et l'ontrouve généralement alors que les quantités additionnellesde cette substance qui produisent descomposés fixes ont lieu d'après la règle des multiplespar nombres entiers. Dans quelques cas rares,où l'on rencontre des nombres fractionnaires, onest obligé, pour ne pas faire d'exception à la règle,d'admettre qu'il existe des combinaisons inconnues,où la substance fractionnaire se trouve enquantité encore plus petite que dans aucune decelles qu'on connoît* On établit ainsi un atomehypothétique dont les diverses combinaisons fixesrentrent en effet alors clans les multiples par nombresentiers. Parmi les combinaisons que le gazazote forme avec l'oxygène, par exen/iple, il y en a,telles que l'acide nitreux et l'acide nitrique, où ilentre pour i '/ 2 et 2 '/ 2 ; mais si l'azote étoit uncorps composé, qui contînt déjà moitié de sonvolume d'oxigène, ces nombres fractionnaires sechangeroient dans les nombres entiers 4 et 6. Orpour ce cas particulier on est bien autorisé, à beaucoupd'égards, à admettre cette composition: carplusieurs autres expériences, et nommément cellespar lesquelles on décompose l'ammoniaque au


ET MÉTÉOROLOGIE. 177moyen de la pile galvanique, semblent annoncerque l'azote est, comme les alcalis fixes, un oxydemétallique.Du moment où l'on est convenu de la combinaisondans laquelle on doit trouver l'atome simplede chaque substance, et en admettant qu'ils sonttous de même volume, il est aisé de déterminerla pesanteur relative des atomes de chaque espèce,et même celle des atomes composés.M. Berzélius en a dressé une table, où il prendpour unité l'atome d'oxygène, et dans le langagede laquelle il ne lui est pas difficile de traduiretoutes les analyses connues. Presque par-tout iltrouve alors des confirmations de la règle des proportionsmultiples.Dans le reste de son livre M. Berzélius chercheà se rendre compte des causes qui rapprochent lesatomes ou qui les séparent, c'est-à-dire qu'il essaiede remonter au principe même de l'action chimique.Il n'est personne aujourd'hui qui ne sache quetoute la chimie se laisse ramener aux affinités, dontla plus puissante, la plus importante, est celle quiproduit la combustion. Chacun sait également quela théorie de Lavoisier, qui domine depuis trenteans, attribue toute combustion à une combinaisonde l'oxygène avec les corps; et la chaleur qui s'ynCJFFON. COMPLÉM. T. II. I 2,


178 PHYSIQUE, CHIMIE,produit au dégagement du calorique latent quimain ton oit cet oxygène à l'état de gaz avant sa combinaison: explication qui, pour être parfaitementjuste, exigeroit que le produit de la combinaisoneût perdu précisément autant de calorique latentqu'il s'en seroit manifesté sous forme libre.Or il s'en faut beaucoup que l'expérience soitconforme à ce calcul.Dans plusieurs combustions la chaleur qui semanifeste, et celle qui reste latente dans le produitde la combustion, forment ensemble une quantitétrès supérieure à celle que contenoient et l'oxy-«gène et le corps brûlé. Il arrive même quelquefois,comme dans la combustion du gaz hydrogène, quele produit de la combustion, c'est-à-dire l'eau, contientà lui seul presque le double du calorique latentque possédoient à la-fois les deux gaz dontl'union la compose. Cette combustion, d'après l'explicationreçue, auroit donc dû produire du froid;et cependant chacun sait qu'elle développe uneimmense quantité de chaleur.M. Berzélius rapproche ces phénomènes d'unemultitude d'autres dans lesquels une combinaisonchimique quelconque produit une chaleur considérable,sans qu'il y ait fixation d'aucun gaz, niaucun changement d'état, ou aucune autre descauses que l'on rçconnoît aujourd'hui comme pro-


ET MÉTÉOROLOGIE. 179près à mettre en liberté quelques parties de caloriquelatent. La magnésie, par exemple, en s'unissantà l'acide sulfurique concentré, s'échauffesouvent au rouge; l'union du soufre avec les métauxproduit du feu, aussi bien que celle des métauxet que celle du soufre lui-même avec l'oxygène.La théorie de Lavoisier admettoit aussi l'oxygénationcomme la cause générale de la productiondes acides ; et à ce sujet M. Berzélius rappelle, ce quebeaucoup d'expériences prouvent maintenant, quel'oxygénation non seulement n'est pas nécessairepour produire des acides, mais qu'avec un grandnombre de corps elle donne au lieu d'acides desbases salifiables; qu'avec un seul et même corpselle peut donner, soit un a*cide, soit une base, selonla quantité d'oxygène qui se fixe.On ne peut donc se dispenser, selon lui, de rechercher,soit pour la production de la chaleurdans les expériences de chimie, soit pour l'acidité,des causes plus générales et d'un ordre plus élevéque celles qui ne tiendroient qu'à la fixation-del'oxygène; causes dans la dépendance desquellesles combustions et les acidifications par l'oxygèneretomberaient ellesrmêmes comme des cas particuliers.C'est par la découverte de l'action chimique del'électricité, découverte à laquelle M. Berzélius a


180 PHYSIQUE, CHIMIE,eu lui-même tant de part, qu'il croit avoir été conduità reconnoître ces causes. La pile galvaniquerésout, comme on sait, toute combinaison chimiqueen ses éléments, en repoussant l'un d'euxvers le pôle positif, et l'autre vers le pôle opposé.L'oxygène, les acides, les corps qui agissent commeeux, vont se dégager vers le pôle positif; c'est lepôle négatif qui les repousse : ils se comportentdonc, au moment où ils se dégagent, comme s'ilsétoient électrisés négativement. M. Berzélius appelleces substances électro-négatives. C'est l'inversepour l'hydrogène, pour les alcalis, pour les basessalifiables, que M. Berzélius nomme électro-positives.Assez généralement ces effets se marquent d'autantmieux dans chaque substance que ses affinités sontplus énergiques dans le sens de la classe à laquelleelle appartient; et comme un même oxyde peutjouer alternativement le rôle d'acide ou d'alcali,selon les corps à l'action desquels on l'expose, demême une substance peut être électro-positive parrapport à une autre, et électro-négative par rapportà une troisième. L'oxygène, dont les affinités sontsi générales et si fortes, est aussi le corps dont laqualité électro-chimique est le plus marquée; et ilse montre électro-négatif par rapport à tous lesautres corps.Pour expliquer cette disposition constante à


ET MÉTÉOROLOGIE.l8lprendre un caractère électrique déterminé, M. Berzéliusa recours à un phénomène observé il y aquelque temps par M. Erman, et que l'on peutappeler une partialité électrique. Il arrive quelquefoisque la polarisation dé l'électricité se fait d'unemanière inégale, et que l'un des pôles l'emporte surl'autre.C'est de cette supériorité d'un pôle sur l'autredans les molécules de cette unipolarité, comme lanomme M. Berzélius, que dépendroient et leur manièrede se comporter par rapport à la pile et leurtendance à s'unir entre elles, c'est-à-dire leur actionchimique.Ainsi la combinaison, ou en d'autres termes laneutralisation mutuelle des agents chimiques, neseroit pas seulement analogue, ressemblante à celledes deux électricités : selon M. Berzélius, elle en seroitun effet direct; la chaleur, l'ignition que lacombinaison produit, seroient de même nature quecelles que produisent l'éclair ou la commotion électrique,et ce qu'on appelle affinité chimique plusforte ne seroit qu'une intensité plus grande de polarisation.Dans les corps oxygénés le caractère électrochimiquedépend d'ordinaire du radical, et nonpas de l'oxygène; et voilà pourquoi l'oxygénationne produit pas nécessairement des acides ; voilà


182 PHYSIQUE, CHIMIE,pourquoi même avec certains radicaux, tels queceux dé la potasse et de la soude, le plus haut degréd'oxygénation n'arriverait pas jusqu'à l'acidité;enfin voilà pourquoi il existe des combinaisons trèsintimes de substances qui se comportent réciproquementcomme feroient des acides et des bases,bien que ni l'une ni l'autre ne montre séparémentles qualités ordinaires d'un acide.Il y a dans cette manière de voir quelque ressemblanceavec les idées que feu Winterl, chimistehongrois, avoit mises en avant vers le commencementde ce siècle, dans ses Prolusiones chimiœseculi XIX; mais Winterl ne s'appuyoit que d'expériencesfausses ou de spéculations métaphysiquesvagues ^ et qui n étoient pas de nature a lui concilierlés suffrages des hommes accoutumés à une marcherigoureuse dans les sciences;M. Berzélius a établi sur dès principes dont nousvenons de rendre compte une classification descorps chimiques, à laquelle il a adapté en mêmetemps une nomenclature perfectionnée. Ce travailassez difficile pour les corps simples rte l'étoit pasautant pour les corps composés.On sait que la nomenclature chimique françoise,devenue aujourd'hui à-peU-près universelle, représentoitla composition des corps telle qu'on la supposoità l'époque où l'on en créa les dénominations.


ET MÉTÉOROLOGIE. 1 83Depuis lors les découvertes chimiques ont apportéde grands changements aux idées reçues. Des corpsque l'on croyoit simples se sont trouvés composés ;d'autres, dans lesquels on ne distinguoit entre leséléments qu'une ou deux variations de proportions,que l'on désignoit parla terminaison, ont offert desproportions nombreuses, toutes très caractérisées,très fixes, dignes de porter des noms particuliers :ainsi les substantifs et les terminaisons adjectivesont dû être multipliés. Il a fallu trouver pour lessels des dénominations qui indiquassent non seulementl'espèce de leur acide et de leur base, ledegré d'oxygénation de l'un et de l'autre, mais encoreleur proportion mutuelle. Des moyens semblablesont dû être imaginés pour les combinaisonsdes corps combustibles.M. Thomson avoit déjà entrepris un semblabletravail; M. Berzélius en présente un nouvel essaiqui lui paroît plus méthodique: il fait remarquercependant que, lorsque le nombre respectif desatomes de chaque élément sera connu, on y trouverapour les composés Un principe de nomenclatureencore plus simple et plus rigoureux.M. Berzélius a fait une application plus importanteen(*ore de ses principes à la classification dèsminéraux.La silice et différents oxydés une fois considérés


1&/ÎPHYSIQUE, CHIMIE,comme participant au rôle des acides, toutes lescombinaisons terreuses viennent comme d'ellesmêmesse ranger dans la classe des sels; et, d'unautre côté, les lois des proportions multiples viennentdonner une sorte de régulateur et de pierrede touche aux analyses rainéralogiques, en aidantà distinguer les parties essentielles d'un minéral desmélanges accidentels qui troublent sa pureté..M. Berzélius divise les substances qui composentla masse du globe en celles qui sont formées, suivantla loi de la nature inorganique, de l'union deplusieurs composés binaires, et en celles qui se formentde composés ternaires, suivant la loi de lanature organique. Toutes les circonstances accessoiressemblent en effet prouver que les substancesde cette dernière classe doivent leur origine à lavie.La liste des substances chimiquement simplescomprend trais ordres : l'oxygène, les corps combustiblesnon métalliques, au nombre de huit,et les métaux actuellement au nombre de quarante-deux,y compris ceux des alcalis et ceux des.terres.M. Berzélius range toutes ces substances d'aprèsleur degré d'intensité électro-négative, en jorte quechacune d'elles est électro-négative par rapport àcelles qui sont au-dessous, et électro-positive par


ET MÉTÉOROLOGIE.l85rapport à celles qui sont au-dessus dans la liste.Elles deviennent les chefs d'autant de familles minéralogiquesque l'on peut former, soit en prenanttoutes les combinaisons dans lesquelles celle quel'on fait chef de famille joue le rôle de base, c'est-àdireoù elle est électro-positive, ou celles dans lesquelleselle joue le rôle d'acide ou électro-négatif.L'auteur a fait connoître sa méthode dans un secondouvrage, qu'il a également fait traduire enfrançois pendant son séjour à Paris sous le titre deNouveau système de Minéralogie; et il y donne, outreses vues générales et son tableau méthodique, quelqueséchantillons de la manière dont il se proposede traiter chacune des familles.De pareils écrits, quelque peu étendus qu'ilssoient, prennent une grande importance lorsqu'ilsouvrent une carrière aussi nouvelle, et qui peut deveniraussi féconde. C'est pourquoi nous avons crude notre devoir d'en donner l'analyse avec quelquedétail,MM. Gay-Lussac et Weîther viennent d'ajouterà la liste des substances dues aux diverses combinaisonsque les éléments peuvent produire, ensuivant la règle des proportions multiples.Ils ont découvert un acide formé par l'union dusoufre et de l'oxygène, et cependant différent et de


I 86PHYSIQUE, CHIMIE,l'acide sulfurique et de l'acide sulfureux entre lesquelsil est intermédiaire. Aussi ces chimistes lenomment-ils acide hypo-sulfurique, et ses sels hyposulfates.Il se forme quand on fait passer du gaz acidesulfureux dans de l'eau qui tient en suspension duperoxyde de manganèse. On obtient ainsi du sulfateet de l'hypo-sulfate de manganèse; on décomposeces sels par la baryte, et l'on a de l'hypo-sulfatede baryte, qui est un sel soluble, enfin on faitpasser dans la solution de l'acide carbonique quis'unit à la baryte et se précipite avec elle.Cet acide est inodore; le vide, la chaleur, le décomposenten acide sulfureux et en sulfurique; sessels, avec la baryte, la chaux, etc., sont solubles.La chaleur en dégage de l'acide sulfureux, et lesconvertit en sulfates neutres. Son analyse donnedeux proportions de soufre, cinq d'oxygène, et unecertaine portion d'eau qui paroît essentielle à sonexistence.Ainsi le soufre, avec une proportion d'oxygène,donne l'acide hypo-sulfureux ; avec deux le sulfureux; avec deux et demi Phypo-sulfurique ; avectrois le sulfurique.Nous avons annoncé, dans notre analyse de fannéedernière, les ingénieux procédés par lesquelsM. Thénard est parvenu à augmenter considéra-


ET MÉTÉOROLOGIE. 187blement la quantité d'oxygène que les acides et l'eaupeuvent absorber. Les résultats de cet habile chimistesont principalement intéressants en ce quiconcerne l'oxygénation de l'eau. En multipliant lesprécautions et les opérations délicates, il a fait absorberà ce liquide six cent seize fois son volume degaz oxygène, et à l'en saturer ainsi entièrement.L'eau, dans cet état; contient une quantité d'oxygènedouble de celle qui entre essentiellement danssa composition. Elle est de près de moitié plus denseque l'eau ordinaire; et quand on en verse dans celleci, bien qu'elle s'y dissolve aisément, on la voit d'abordcouler au travers comme une sorte de sirop;elle attaqué l'épidémie, le blanchit, et cause des picotements;la peau même seroit détruite par uncontact prolongé : au goût elle produit une sensationqui se rapproche de celle de l'émétique; chaquegoutte jetée sur l'oxydé d'argent sec éprouve uneviolente explosion, avec dégagement de chaleur etde lumière; beaucoup d'autres oxydes, divers métaux,lorsqu'ils sont très divisés, produisent deseffets analogues : il y a toujours alors dégagementde l'oxygène ajouté à l'eau ; et quelquefois une partiede cet oxygène se combine avec le métal, lorsquecelui-ci est aisément oxydable. Plusieurs matièresanimales, entre autres la fibrineet le parenchymede quelques viscères, possèdent, comme les métaux


188 PHYSIQUE, CHIMIE,nobles, la faculté de dégager l'oxygène de l'eau sanséprouver d'altération, sur-tout quand l'eau oxigén'éeest étendue d'eau ordinaire.Cette dernière observation n'appartient pas seulementà la chimie ordinaire ; elle est d'une grandeimportance pour la physiologie, puisqu'on y voitdes solides, tels qu'il en existe beaucoup dans lescorps animés, agir sur un liquide par leur seulcontact, et le transformer en des produits nouveaux, sans en rien absorber, sans lui rien céder,sans éprouver, en un mot, aucun changement dansleur propre nature. Un esprit exercé aperçoit surle-champtoute l'analogie de ce phénomène avecceux des sécrétions, lesquels embrassent pour ainsidire l'économie vivante tout entière.Nous avons parlé, dans notre analyse de 1817,de la nouvelle base salifiable ou alcaline découvertedans l'opium par M. Sertùrner, et à laquellece chimiste a donné le nom de morphine, parcequec'est par elle que l'opium exerce sa vertu soporifique.MM. Pelletier et Caventou , jeunes chimistesqui se livrent avec un zèle soutenu à reconnoîtreceux des principes immédiats des substances pharmaceutiquesdans lesquels résident leurs propriétésmédicales, ont découvert cette année deux


ET MÉTÉOROLOGIE. 189autres matières du même genre, et qui doivent égalementêtre placées dans la liste des alcalis.La première, qu'ils ont appelée strychnine, a ététrouvée d'abord dans la fève de saint Ignace, fruitd'une espèce du genre strychnos; et nos chimistesl'ont reconnue ensuite dans la noix vomique, quiest une autre espèce de ce genre, ainsi que dans lebois d'une troisième espèce, nommée communémentbois de couleuvre. On l'obtient en traitant cesmatières par l'alcohol bouillant, et en précipitantpar la potasse caustique, ou même en laissant refroidirl'alcohol après l'avoir étendu d'eau, et l'abandonnantà lui-même. Elle se montre sous formede cristal en petites écailles. Elle est presque insolubledans l'eau froide, très soluble dans l'alcohol ;sa saveur est d'une amertume excessive ; elle ramèneau bleu les sucs végétaux rougis par les acides, etjouit de toutes les propriétés générales des alcalis.Sa décomposition donne de l'oxygène, de l'hydrogène,et du carbone; on n'a pu y découvrir d'azote.Dans les végétaux dont nous parlons elle se trouveunie à un acide particulier, comme la morphinel'est dans l'opium.MM. Pelletier et Caventou ont décrit avec soinles sels neutres que la strychnine forme avec diversacides ; mais ils se sont attachés sur-tout à observerson action sur l'économie animale. Cette action est


190 PHYSIQUE, CHIMIE,de même nature que celle de la noix vomique, maisportée à une intensité épouvantable: les plus petitesquantités avalées ou insérées sous la peau tuent enpeu de minutes, avec tétanos et convulsions. Cesont les mêmes effets que ceux du suc dupas, autrestrychnos célèbre par l'usage qu'en font les habitantsde Java pour empoisonner leurs armes, etsur lequel MM. Leschenaud, Magendie, et Delile,ont fait, en 1811, des expériences que nous avonsrapportées dans le temps.La seconde de ces substances, de nature alcaline,découverte par MM. Pelletier et Caventou, s'extraitde l'angusture (brucea antidyssenterica). L'action dece végétal ressemblant beaucoup à celle de la noixvomique, nos jeunes chimistes y recherchoient lastrychnine; mais la substance qu'ils en retirèrentse trouva un peu différente. Elle se dissout beaucoupplus aisément dans l'eau ; sa saveur amère estmêlée d'âcreté; son énergie est moindre. Nos chimistesont nommé ce nouvel alcali brucine; et lesexpériences qu'ils ont faites sur les sels neutres dansla composition desquels il entre ne sont pas moinsexactes ni moins remarquables que celles qu'ils ontfaites sur la strychnine.Nous regrettons de ne pouvoir les mettre en détailsous les yeux de nos lecteurs ; mais nous feronsdu moins remarquer combien ce nouveau genre


ET MÉTÉOROLOGIE. 191d'alcalis produits par la végétation, et composésd'oxygène, d'hydrogène, et de carbone, est uneacquisition importante pour la chimie, même sousle rapport de sa théorie générale. On voit par-làque la nature peut arriver à des effets semblablespar des* moyens les plus opposés. La potasse, lasoude, la baryte, peut-être toutes les bases saïifiablesminérales, sont des oxydes métalliques; l'ammoniaqueest une combinaison d'hydrogène et d'azote ;et voici maintenant des bases saïifiables où il n'entreni azote ni métal, mais seulement de l'hydrogène,du carboné, et de l'oxygène, les mêmes élémentsqui entrent, sans doute en d'autres proportions,dans vingt autres genres de principes végétaux quin'ont nulle ressemblance avec les alcalis.Aux trois espèces bien constatées, la morphine,la strychnine, et la brucine, il faudra ajouter encorele principe extrait de la coque du Levant parM. Boullai, et celui que M. Vauquelin avoit aperçudans le bois-joli (daphne mezereum) ; car on doit direici que M. Vauquelin est le premier qui ait euquelque soupçon d'une substance de cette nature,et que,s'il avoit un peu plus insisté sur la penséequ'il conçut alors, ce seroit encore à son nom quese rattacherait cette nouvelle classe de composés.M. Chevreul continue avec une constance inab


192 PHYSIQUE, CHIMIE,térable ses longues recherches sur les corps gras.Cette année il a examiné le beurre de vache.En le tenant fondu à une température de 60 degrés,on en sépare encore des portions analogues aupetit-lait ; la partie supérieure, qui est d'une transparenceparfaite, est le vrai beurre à l'état de*pureté;il se coagule à 32 degrés. L'alcohol en dissoutun peu, et prend quelquefois alors un caractèreacide. La saponification le change, comme la graissede porc, mais dans des proportions un peu différentes,en acide margarique, en acide oléique, eten principe doux. Ce savon a de plus une odeurdésagréable et tenace qui lui est particulière, etdont on peut enlever le principe par des lavages.M. Chevreul y a reconnu deux acides spéciaux.De la nombreuse suite d'expériences qu'il a recueilliesM. Chevreul arrive déjà à une sorte declassification des divers corps gras. Les uns, commela cholesterine, n'éprouvent point de changementpar l'action des alcalis; d'autres, comme la cétine,n'en sont acidifiés qu'en partie; d'autres, tels quela stéatine etl'élaïne, sont transformés en principedoux, en acide margarique, et en acide oléique.Enfin il en est comme le beurre et l'huile de dauphin,qui donnent en outre des acides volatils.On a observé plusieurs fois dans les Alpes de la


ET MÉTÉOROLOGIE.ig3neigé teinte d'un rouge plus ou moins vif, et l'on abeaucoup varié sur les causes qui lui donnent cettecouleur.Ce phénomène s'étant reproduit sur les côtesseptentrionales de la Baie-de-Baffin, visitée l'annéedernière parles An glois sous les ordres du capitaineRoss, on a rapporté en Europe une certaine quantitéd'eau provenant de cette neige. Elle étoit teinted'un rouge foncé: on y voyoit au microscope depetits globules de cette couleur; et M. Decandolle,qui en a présenté un flacon à l'Académie,l'a soumiseà des expériences d'où il croit pouvoir conclure quesa couleur est due à une matière animale.ANNÉE 1820.M. Moreau de Jonnès, qui considère les Antillessous tous les rapports, a occupé cette année l'Académiede plusieurs objets relatifs à la météorologiede ces îles,En prenant un terme moyen de six ans, on trouvequ'à la Martinique et à la Guadeloupe le nombredes jours de pluie est de 23o,*dont 35 ou 4° depluies excessives. Ce nombre est à celui des joursde pluie qui ont lieu à Paris comme 5 à 3. Sil'on faisoit entrer toutes les Antilles dans la comparaison,leur nombre de jours de pluie seroit àcelui de Paris comme 7 à 4- La quantité moyenneBUFFON. COMPLÉM. T. II.l3


194 PHYSIQUE, CHIMIE,d'eau à la Guadeloupe et à la Martinique est de216 centimètres (80 pouces), distribuée assez irrégulièremententre les diverses régions et entre lesdivers mois de l'année. Il pleut davantage dansles parties élevées, ce que M. de Jonnès attribuemoins à l'élévation en elle-même qu'au voisinagedes forêts. C'est sous le vent de leurs montagnesqu'il tombe le plus de pluie, parceque ces montagnesne sont point assez élevées pour intercepterles nuages.La Martinique a éprouvé le 16 octobre un tremblementde terre plus remarquable par sa duréeque par sa force, et qui est arrivé au milieu d'uncoup de vent violent. Il n'a point causé d'accident;mais l'on a pu s'assurer à cette occasion que la fièvrejaune ne vient point, comme on l'a dit assez souvent,de vapeurs qui s'exhalent lors des tremblements deterre.Sainte-Lucie, qui est séparée de la Martiniquepar un canal très profond et de sept lieues de largeur,a participé à ce tremblement. En même tempsdes pluies abondantes, qui avoient duré pendantles trois jours précédents, ont produit de grandséboulements, fait glisser le long des pentes desterrains entiers avec les cannes dont ils étoientplantés, et détaché d'énormes blocs de basalte dontla chute a fait périr plusieurs individus.


ET MÉTÉOROLOGIE.ig5Quoique le nombre des pierres tombées de l'atmosphèresoit assez grand, et que l'on ait constatéce phénomène avec assez de soin pour en mettrehors de doute la réalité, les observations de détailque ces pierres ont offertes ne suffisent point encorepour qu'on puisse assigner exactement toutes lescirconstances qui accompagnent leur chute.M, Fleurieu de Bellevue, ayant eu occasion d'examinercelles qui tombèrent au mois de juin 1819dans les environs de Jonzac, département de laCharente4nférieure, a présenté à l'Académie unmémoire où, après les avoir décrites avec beaucoupde détails et rapporté tout ce que l'on a observé aumoment où elles ont paru, il cherche à expliquerles faits intéressants qu'il rapporte; ce qui le conduità combattre quelques unes des idées théoriquesdes physiciens qui se sont lé plus occupés de cettematière.Le ciel étoit serein et le soleil levé depuis deuxheures lorsqu'on entendit plusieurs détonationsqui partaient d'un météore lumineux de formeirrégulière, mais alongée, qui parcourait rapidementune ligne droite du N. N. O. au S. S. E., etqui paroissoit élevé de 5o à 6o° au-dessus de l'horizon.Au même instant une chute de pierres eutlieu dans un espace de plusieurs milliers de toises.L'une de ces pierres pesoit six livres, et toutesi3.


196 PHYSIQUE, CHIMIE,avoient des formes plus ou moins angulaires. Leurpesanteur spécifique étoit un peu moindre que celledes autres pierres météoriques, et elles en différaientencore par l'absence de nikel, comme M. Laugier,qui en a fait l'analyse, l'a constaté. Elles secomposent d'une agrégation cristalline de deuxsubstances, l'une généralement d'un blanc mat etfort tendre, l'autre d'un gris verdâtre, opaque, plusdure, et en moindre quantité que la première, danslaquelle elle est assez uniformément disséminée.On n'y aperçoit aucune parcelle de fer, et elles nesont que très peu attirables à l'aimant. Leurs caractèressont donc les mêmes que ceux de l'aérolithetombée à Stannern en Moravie, et elles lui ressemblentencore par la couche vitreuse et brillante dontelles sont revêtues. Cette espèce de vernis présentemême des particularités importantes qui font naîtrequelques idées sur le mouvement dont ces pierresétoient animées dans leur chute ; ce sont des striesqui paraissent naître d'un point commun, s'étendreen divergeant, et s'arrêter sur les bords d'une desplus larges faces, nommée par M. Fleurieu grandeface ou face inférieure, où elles se réunissent pourformer une arête uniforme et saillante. On croiraitvoir un liquide épais qui s'est desséché après avoircoulé le long des pentes que les faces obliques de lapierre lui présentoient, et après s'être arrêté où ces


ET MÉTÉOROLOGIE. 197faces s'arrêtoient elles-mêmes. C'est principalementsur ce fait que M. Fleurieu s'appuie pour établirla direction du mouvement de ces pierres. Il pense,i° que la croûte qui les enveloppe nà pu prendresa disposition que lorsqu'elles étoient en mouvement;2 0 que ce mouvement étoit simple; 3° qu'ilétoit perpendiculaire à la grande face.Examinant ensuite l'origine de ces pierres, il estconduit à combattre l'idée de M. Chadni, qui supposeque les aérolithes éprouvent en parcourantnotre atmosphère un degré plus ou moins grandde fusion ; celle de M. Léman, qui attribue les effetsdu feu que leur croûte vitreuse démontre à la combustiondes substances combustibles qu'ils contiennent;et celle de M. Isarn , qui suppose lesaérolithes produites par la condensation subite decertains gaz. Il pense que ces corps arrivent sur laterre dans toute leur intégrité ; que le feu qui lesaccompagne résulte de l'inflammation de l'atmosphèredont ils sont environnés ; qu'ils éclatent parl'action inégale de ce feu ; que le nombre des détonationsqui accompagnent ordinairement leurchute prouve qu'ils ne se divisent que successivementpar l'effet de causes extérieures, et non pointpar une cause unique et centrale, et que chaqueportion de l'aérolithe, éprouvant à son tour l'effet.du feu, se vitrifie à sa surface; d'où résultent ces


198 PHYSIQUE, CHIMIE,stries dont nous avons rapporté l'explication plushaut.Nous avons entretenu plusieurs fois nos lecteursdes belles découvertes de M. Gay-Lussac sur l'acidedu bleu de Prusse et sur ses combinaisons. Ce sujetintéressant est loin d'être épuisé, et chaque jourilenrichit la chimie de vérités nouvelles.Un chimiste anglois, M. Porrett, adécouvertquele sel connu sous le nom de prussiate triple de potasse,que l'on regardoit comme composé d'acide prussique,d'oxyde de fer, et de potasse, est réellementune combinaison binaire formée de potasse et d'unacide particulier qui renferme les éléments de l'acideprussique et de l'oxyde de fer; acide dont lesaffinités énergiques enlèvent le peroxyde de fer auxacides les plus puissants pour donner immédiatementle bleu de Prusse.M. Robiquet est parvenu par un procédé nouveauà obtenir pur et à l'état solide cet acide, queM. Porrett n'avoit eu que dissous dans beaucoupd'eau : en effet l'acide hydrochlorique concentrédécompose le bleu de Prusse en retenant le fer, etlaisse précipiter l'acide de M. Porrett sous formede poussière blanche, que l'on purifie encore parde nouveaux lavages avec l'acide hydrochlorique.Les expériences multipliées et ingénieuses aux-


ET MÉTÉOROLOGIE. 199quelles M. Robiquet a soumis cet acide de M. Porrettont prouvé qu'il ne contient pas d'oxygène, etque le fer y est par conséquent à l'état métallique ;l'auteur le considère comme formé d'acide hydrocyâniqueet de cyanure de fer, et c'est son unionavec le peroxyde de fer qui est le bleu de Prusse.MM. Pelletier et Caventou, continuant leurs recherchessur l'analyse végétale, ont fait une découvertede la plus grande importance : c'est celle duprincipe fébrifuge du quinquina, qui appartient àcette nouvelle classe d'alcalis végétaux composésd'oxygène, d'hydrogène, et de carbone, dont riousavons déjà annoncé cinq espécesdans notre analysede l'année dernière. Ce principe avoit été aperçupar M. Gomès, chimiste portugais, qui cependantn'en avoit pas reconnu la nature alcaline; il setrouve dans la matière colorante du quinquina unià un acide qui le rend soluble. En lavant cettematière avec de l'eau légèrement alcalisée qui s'emparede l'acide, on fait précipiter le principe fébrifuge,qui ne conserve plus qu'un peu de matièregrasse, dont on le délivre en le dissolvant dans l'acidehydrochlorique foible et en précipitant par unalcali. On peut aussi traiter immédiatement la matièrecolorante par l'acide hydrochlorique et précipiterpar la magnésie. Les auteurs nomment ce


200 PHYSIQUE, CHIMIE,principe cinchonine. Il est blanc, cristallin, amercomme le quinquina sans en avoir la qualité astringente,indissoluble dans l'alcohol et dans l'eau, maisfoiblement dissoluble dans l'éther; il forme des selssolubles avec la plupart des acides, si ce n'est aveclegallique, l'oxalique, et le carbonique.La cinchonine existe dans le quinquina gris; lequinquina jaune contient un principe très semblable,bien qu'avec de petites différences, et queles auteurs ont nommé quinine; enfin le quinquinarouge les contient tous deux dans une proportionconsidérable.On conçoit aisément toute l'importance d'unesemblable découverte, sur-tout pour la recherched'un succédané de quinquina dans les végétauxindigènes; le mémoire de MM. Pelletier etCaventouoffre d'ailleurs plusieurs autres résultats intéressants,sur-tout relativement à deux matières colorantesrouges qui se trouvent dans le quinquina, etdont l'une estsoluble dans l'eau et l'autre insoluble.Les mêmes chimistes ont examiné divers végétauxde la famille des colchiques très employés enmédecine, tels que le veratrum album, le veratrumsabadilla, et le colchique vulgaire lui-même, et ils yont trouvé une septième substance alcaline composée,qu'ils ont appelée véralrine.


ET MÉTÉOROLOGIE. 201Elle est blanche, acre, et à petite dose produitdes éternuments et des vomissements violents.Elle fond à la chaleur, et prend par le refroidissementl'apparence de la cire. Sa décomposition nedonne point d'azote ; elle a peu de faculté saturante,et elle donne avec les acides des sels noncristallisâmes.Les plantes d'où on l'a tirée fournissent d'ailleursd'autres substaiices intéressantes à connoître, maispour le détail desquelles nous sommes obligés derenvoyer à l'ouvrage même, qui est imprimé dansles Annales de Chimie.M. Gay-Lussac a donné communication d'unprocédé qui empêche les toiles sinon de brûler, dumoins de jeter une grande flamme en brûlant, cequi peut avoir de grands avantages pour les décorationsdes théâtres et arrêter une infinité d'incendies.Il consiste à les enduire de sels neutres trèsfusibles, tels que le phosphate d'ammoniaque et leborate de soude.M. Goldsmith a fait connoître un procédé parlequel on applique sur le verre des espèces de dendritesmétalliques qui ne sont pas sans agrément.On place sur le verre quelques grains de limaillede fer et de cuivre, sur chacun desquels on verse


202 PHYSIQUE, CHIMIE,une goutte de nitrate d'argent. L'argent se précipiteà l'état métallique ; en même temps le fer et le cuivres'oxydent, et on arrange selon l'effet qu'on veutproduire les ramifications de ces différentes matièresau moyen d'une petite tige de bois. Enfin onexpose le verre au-dessus d'une bougie, qui en évaporantla liqueur noircit le dessous de la plaque, etrelève ainsi l'éclat des dendrites appliquées à la faceopposée.ANNÉE 1821.M. Moreau de Jonnès, toujours occupé de Y Histoirephysique des Antilles, a présenté de grandessuites d'observations sur leur climat, et paticulièrementsur leur température. Les variations journalièresen sont renfermées d'ordinaire dans uneéchelle de dix degrés, et leur terme moyen est decinq. Les variations annuelles ne donnent pas plusde vingt degrés de différence ; et à la Martiniqueelles n'en donnent pas quinze. La plus grande chaleurn'y surpasse point celle du milieu de la Russie;du reste les causes des variations, soit régulières,soit irrégulières, les époques de leur maximum etde leur minimum, sont à-peu-près les mêmes qu'ailleurs;mais comme les causes irrégulières, tellesque les vents, les mouvements des flots,les nuages,les pluies subites, ont une grande activité, les mu-


ET MÉTÉOROLOGIE.2o3tations, quoique peu étendues, y sont fréquenteset rapides; en sorte que leur action sur le corpsvivant ne laisse pas que d'être violente. L'auteurdécrit une partie de ses effets, et entre aussi dansde grands détails sur les relations relatives aux différenteshauteurs, ainsi ique sur la température descaves, des puits, et des sources.Une bouteille vide jetée à la mer par les 5° 12' delatitude sud, et par les 26 0 6o ; de longitude, à l'ouestde Paris, a été portée en dix mois par les courantsentre la Martinique et Sainte-Lucie; ce qui fait conclureà M. Moreau de Jonnès qu'il existe un grandcourant qui vient du sud de la ligne, et qui pénétrejusque dans la mer des Antilles, au travers de cesnombreux détroits qui séparent les îles du vent; etc'est ainsi qu'il conçoit que des plantes propres àl'Afrique se trouvent aussi dans les îles, où leursgraines auront été portées par la mer.Les tremblements de terre ont. aussi été étudiésdans ces îles par M. de Jonnès. Us tiennent en généralà des causes d'une nature volcanique ; bien quesouvent la terre tremble sans qu'il y ait d'éruption,chaque éruption est accompagnée d'un tremblement.Leur propagation a lieu quelquefois à desdistances immenses et de la manière la plus rapide.Celui qui renversa Lisbonne, en 1756, se fitsentirmoins de huit heures après; à la Martinique et à la


2û4PHYSIQUE, CHIMIE,Barbade, qui en sont à plus de onze cents lieues,pqr des mouvements subits des eaux de la mer;c'est une vitesse six fois plus grande que celle duvent le plus violent. Mais d'autres foiscette propagationse trouve restreinte par des circonstancesinconnues, et le mouvement n'affecte qu'une île ouun petit nombre d'entre elles. Le désastre de Venezuela,en 1812, dans lequel cinq villes considérablesfurent détruites, ne fut pas ressenti dans lesîles. Ces tremblements de terre des Antilles sontaussi désastreux que ceux d'aucune autre contrée,et plusieurs de ceux qu'elles ont éprouvés ne l'ontcédé qu'aux horribles catastrophes de Lisbonne etde Messine. Ils sont moitié moins communs à laMartinique, dont les volcans sont depuis longtempséteints, qu'à la Guadeloupe, où les foyerssouterrains conservent encore quelque activité. Niles saisons, ni l'heure du jour, ni les phases de lalune, n'ont de rapports appréciables avec ces terriblesphénomènes, et le baromètre n'en est pasnon plus affecté. C'est le plus souvent d'un ouraganque le tremblement de terre est accompagné,et avec qui il s'unit pour le malheur des habitants;mais une augmentation d'électricité s'y manifesteaussi presque toujours, et ils sont généralementannoncés par le mugissement des bestiaux, parl'inquiétude des animaux domestiques, et dans les


ET MÉTÉOROLOGIE.2o5hommes par cette sorte de malaise qui, en JEurope,précède les orages dans les personnes nerveuses.Parmi les pierres tombées de l'atmosphère, depuisle petit nombre d'années que les physicienss'occupent sérieusement de ce phénomène, il n'enest point qui approche de celle qui est tombée dansle département deTArdèche, le i5 juin 1821 Letemps étoit serein. Cette chute fut annoncée parune détonation qui dura vingt minutes, et qui futentendue à huit et dix lieues de distance, au pointd'y faire croire qu'elle provenoit de quelque tremblementde terre. La pierre s'étoit enfoncée àcinq pieds dans le sol, et pesoit 92 kilogrammes(1841iv.); à côté d'elle en étoit une de même nature,mais beaucoup plus petite, d'un kilogramme etdemi. Malheureusement les paysans qui recueillirentles morceaux brisèrent le premier en plusieurspièces. Ils sont du reste semblables pour l'essentielà toutes les autres aérolithes. M. le préfet de l'Ardécheet quelques amis des sciences ont envoyé àl'Académie des échantillons de ces pierres, qui ontété analysés et déposés au Cabinet du roi.Nous avons parlé plusieurs fois, depuis sept ouhuit ans, des études de M. Chevreul sur les corps


206 PHYSIQUE, CHIMIE,gras, et particulièrement du beau résultat de sesrecherches sur la saponification ou sur la formationdu savon; opération qui ne consiste pas seulementdans l'union de l'alcali avec la graisse ou avec deuxde ses principes immédiats, la stéatine ou l'élaïne,mais où les éléments primitifs de ces principes, pourpouvoir contracter cette union, se combinent entreeux d'une manière nouvelle, et forment des composésqui n'existoient pas auparavant, savoir, unprincipe doux, et les acides que M. Chevreul anommés margarique et oléique.L'auteur a fait, cette année, un grand travailpour déterminer avec précision les détails de cettemétamorphose, et savoir dans quelle proportionles éléments primitifs, l'oxygène, le carbone, l'hydrogène,se trouvent avant et après l'opération, soitdans la graisse entière, soit dans ses principes immédiats.Il a employé pour cet effet les beaux procédésimaginés par M. Gay-Lussac pour analyserradicalement les substances organiques, en les brûlantpar le peroxyde de cuivre.Le soin avec lequel il indique toutes les précau»tions que ces procédés exigent donne l'idée la plusavantageuse de l'emploi qu'il en a fait.La graisse d'homme et celle de porc, prises enmasse, donnent à-peu-près les mêmes proportionsd'oxygène, de carbone, et d'hydrogène ; mais celle


ET MÉTÉOROLOGIE. 207de mouton a moins d'oxygène. Dans toutes les troisle carbone est à l'hydrogène à-peu-près comme dixà dix-huit en volume; ce qui approche de leur rapportdans l'hydrogène percarburé.L'analyse particulière des deux principes immédiats,la stéatine et Maine, donne encore à-peu-prèsle même rapport pour la première, mais il est plusfoible dans la seconde.La somme des poids de la graisse sapoijifiée etdu principe doux, qui sont le résultat de la saponification,est plus forte que le poids de la graisse employée;ce qui prouve que dans l'opératiort il s'estfixé de l'eau.Il y a moitié plus d'oxygène dans l'acide margariquede l'homme et du porc que dans celui dumouton; en sorte que M. Chevreul propose d'appelerce dernier acide margareux. Les acides oléiquesde ces espèces ont plus d'oxygène que leursacides margariques respectifs ; et leur compositionpourrait être représentée par l'hydrogène percarburé,plus l'oxyde de carbone.De ces analyses comparatives il résulte que, dansl'action des alcalis sur les graisses, la plus grandepartie du carbone et de l'hydrogène, en proportiontrès rapprochée de celle où ils sont dans l'hydrogènepercarburé, retient une portion d'oxygène pourconstituer les acides margarique et oléique, tandis


208 PHYSIQUE, CHIMIE,que le reste de l'hydrogène et du carbone, avec uneportion d'oxygène égale à la moitié de ce qu'il faudraitpour brûler l'hydrogène, forme le principedoux en fixant une certaine quantité d'eau.Ici, comme dans plusieurs autres phénomèneschimiques, c'est la forte affinité de l'alcali pour lesacides qui provoque cette rupture d'équilibre dansles éléments de la graisse, et les oblige de se réunirde mapière à former des acides. Aussi toutes lesbases saïifiables douées d'une certaine énergie, labaryte, la chaux, et même des oxydes métalliques,sont-elles capables de produire la saponification;et, moyennant certaines précautions, M. Chevreulest parvenu à la produire aussi par la magnésie etl'ammoniaque, qui s'y étoient long-temps refusées.C'est une opération inverse de la dissolusiôn du feret du zinc dans l'acide sulfurique étendu d'eau, dissolutionoù la forte affinité de l'acide pour des basessaïifiables détermine la formation de ces bases parl'union de l'oxygène de l'eau avec le métal.Lorsque les alcalis sont à l'état de sous-carbonate,c'est-à-dire lorsqu'ils ne sont point saturés par l'acidecarbonique, ils n'agissent que par une de leursportions, laquelle, pour s'unir aux acides qui seforment, commence par céder son propre acidecarbonique à l'autre portion; et ce surplus d'acidesaturé se change en carbonate. L'adipocire, ou


ET MÉTÉOROLOGIE. 209cette célèbre matière blanche et savonneuse, découvertepar Fourcroy, et dans laquelle se convertissentles cadavres ensevelis dans des lieux humides,est due, selon l'auteur, à l'action du sous-carbonated'ammoniaque, produit de la putréfaction sur lapartie grasse du cadavre.De savants chimistes avoient cru reconnoître quel'alcohol et l'éther pouvoient convertir en partietoute substance animale azotée en adipocire; maisM. Chevreul prouve que relativement à la fibrinecette opinion n'est pas exacte, et que l'adipocire,qui s'y trouvoit toute formée, en est simplementextraite. On peut l'en retirer au moyen de l'eau ; etaprès qu'elle a été enlevée la fibrinen'en donneplus à l'acide nitrique.Nous avons dit précédemment par quelle analysesoignée M. Chevreul a enseigné à distinguer cetteadipocire du blanc de baleine et des calculs biliairesque Fourcroy avoit long-temps cru être des substancesidentiques avec elle. Le principe du blancde baleine, ou la matière nommée cétine, donnepar la saponification beaucoup d'acide margarique,un peu d'un acide assez semblable à loléique, et uncorps gras particulier. La cholestérine ou le principedes calculs biliaires, à cause d'un excès de carbone,ne produit point d'acide margarique quandon l'expose à l'action des alcalis. L'auteur vient en-BUFFON. COMPLÉM. T. II.l4


2IOPHYSIQUE, CHIMIE,core de découvrir une substance de ce genre dansla fibrinedesséchée. Elle se dissout par l'alcohol etpar l'éther, dont elle se sépare sous forme de lameset d'aiguilles ; elle se fond à la chaleur de l'eau bouillante,n'est ni acide ni alcaline, et, ce qui est surtoutremarquable, ne subit aucune altération parune longue ébullition dans une solution alcoholiquede potasse. Cette substance existe aussi dansle sang d'homme et de bœuf, et M. Chevreul luitrouve de l'analogie avec la matière grasse du cerveau.M. Chevreul, s'élevant à des considérations généralessur la nature des substances organiques,pense qu'au lieu de les regarder comme composéesde trois ou quatre principes élémentaires ou primitifs,il faudrait se les représenter comme résultantesde la combinaison de deux principes plus oumoins composés, et unis entre eux comme un acideà un alcali, ou comme un comburant à un combustible,à-peu-près à la manière dont M. Gay-Lussaca représenté l'éther sulfurique comme de l'hydrogènepercarburé uni à de l'eau.Ces observations ont beaucoup d'importance, eten acquerront davantage à mesure qu'elles dirigerontles regards vers les effets de cette loi chimiquepar laquelle une substance énergique est en étatd'amener, en quelque sorte de force, la formation


ET MÉTÉOROLOGIE. 211de substances opposées avec lesquelles elle puisses'unir. Il n'est guère douteux que non seulementla chimie générale, mais encore la physiologie descorps vivants, n'en puisse tirer beaucoup dé lumières.Le même savant et laborieux chimiste, M. Chevreul,a fait sUr l'influence mutuelle de l'eau et deplusieurs substances azotées des expériences quirie deviendront pas moins fécondes. C'est l'eau quidonne aux tendrons frais leur souplesse et leur éclatnacré. Les tendrons desséchés reprennent ces propriétésaprès quelques heures de séjour dans l'eau.Le tissu jaune élastique qui forme plusieurs ligamentsdu corps animal reprend aussi par ce moyenson élasticité après plusieurs années dé dessèchement.L'expression mécanique del'eàû produit surces substances des effets fort analogues à ceux dudessèchement.M. Chevreul pensé que cette eau est retenue dansl'intérieur des organes par des forces analogues àcelles qui font monter les liquides dans les tubescapillaires; il présume qu'elle joue un grand rôledans l'état de vie, et appuie sa conjecture Sur lesexpériences où M. Edwards à fait voir que les poissonsmis à sec périssent par la seule transs'ùdationde l'eau nécessaire au jeu de leurs organes.i4.


2 1 2 PHYSIQUE, CHIMIE,ANNKI, 1822.Une pierre météorique est encore tombée cetteannée en France, aux environs d'Épinal, et plusieursfragments en ont été déposés au Muséumd'histoire naturelle. Sa chute a offert tous les phénomènesaccoutumés.Celle dont nous parlâmes l'année dernière, etqui tomba le i 5 juin 1821 à Juvenas, départementde l'Ardéche, a été analysée par M. Vauquelin etpar M. Laugier. Elle diffère des autres seulementen ce que le nickel y manque, et qu'elle contientune petite quantité de potasse qui vient d'un peude feldspath disséminé dans sa masse. Les pierres deJonzac et de Lontola lui ressemblent sous ce rapportet sous d'autres; elles manquent de nickel,mais contiennent du chrome, peu de soufre, peude magnésie, et au contraire beaucoup de chaux etd'alumine.Un globe de feu vu à Sens et à quinze lieues auxenvirons avec une détonation qui ressembloit à unviolent coup de canon , et dont M. Thénard a communiquéla relation à l'Académie, pouvoit aussifaire croire à une chute d'aérolithes ; mais, quelquerecherche que l'on ait faite, il n'en a été recueilliaucun.M. Moreau de Jonnès a rendu compte d'un nié-


ET MÉTÉOROLOGIE.2l3téore lumineux vu à la Martinique le I er septembreà huit heures dû soir. D'une grandeur considérable,il se mou voit rapidement vers l'est, produisant unbruit semblable au roulement du tonnerre, et aéclaté avec une détonation violente. On peut croireque c'étoit une aérolithe, ce qui seroit le premierphénomène de cette espèce dans l'archipel des Antilles: malheureusementil n'en a point été recueillide produits; et, en fût-il tombé, il seroit difficilequ'on espérât les découvrir dans une île profondémentdécoupée par la mer, et plus qu'à moitié couvertede forêts.Dans la même île il y a eu un tremblement deterre le i er août à huit heures du matin ; cetoit lepremier depuis près de deux ans.M. Moreau de Jonnès a réuni toutes les noticesqu'il a présentées à l'Académie depuis plusieursannées, et, les enrichissant de grands développements, en a composé une Histoire physique des Antillesdont le premier volume a paru. L'auteur ytraite de la structure géologique de ces îles, de leurclimat, et des minéraux particuliers qu'elles renferment.On y pourra remarquer des chapitrespleins d'intérêt sur les variations locales de leurtempérature, sur l'état hygrométrique de leur atmosphère,et sur les ouragans qui les dévastent sicruellement. L'auteur parlera dans un autre vo~


2 l 4 PHYSIQUE, CHIMIE,lu me de leurs végétaux et de leurs animaux , et il adéjà préludé à ce travail par un mémoire sur lenombre des plantes de la flore caraïbe, et sur la proportionnumérique des familles qui la composent.La multitude et la diversité de ces plantes sontd'autant plus étonnantes qu'elles contrastent avecle petit nombre des animaux, et que les courantsde ces mers, étant à-peu-près invariables, ont dûapporter toujours les mêmes graines ; mais la forcede la végétation est si grande que tout ce qui arriveréussit et se propage. Elle oppose même de grand?obstacles aux travaux des agriculteurs; et encoreaujourd'hui, après deux siècles d'efforts, l'emplacementdes villes et les champs cultivés n'occupentque l'intervalle pratiqué péniblement entre lesgrandes forêts des montagnes et les palétuviers desrivages. Le feu seul peut détruire momentanémentces forêts épaisses qui renaissent pour peu que leterrain soit négligé. Les sentiers peu fréquentéssont bientôt envahis par des arbustes ; chaque annéeon est obligé d'extirper les végétaux qui couvrentles glacis des forteresses; pour peu qu'une habitationsoit abandonnée, une forêt en occupe promptementles cours et les toits et en cache les murs.Souvent, pendant la saison des pluies, il sort desagarics et d'autres champignons des parois des appartements.M. Moreau de Jonnès a observé jus-


ET MÉTÉOROLOGIE. 21 5qu'à mille huit cent vingt-trois espèces de végétauxphanérogames dans l'archipel caraïbe, et il estimequ'il peut s'y trouver six cents cryptogames. Luimêmeareconnu plus de centsoixaiiteespèces de fougères.L'auteur se livre à de grands développementspour déterminer quelles proportions prennent dansce nombre les principales familles de végétaux,dans la vue d'étendre ainsi, en ce qui concerne cesîles, les belles recherches de M. de Humboldt surla distribution géographique des familles végétales.Lorsque l'on met en contact avec le chlore, soitde l'alcohol, soit de l'éther sulfurique, soit del'hydrogène percarboné, on obtient des composésliquides dont l'analyse n'a point encore été faitecomplètement.Le produit du troisième de ces rapprochementsdécouvert par les chimistes hollandois, et particulièrementétudié par MM. Robiquet et Colin, passoitpour être composé de parties égales en volumede chlore et d'hydrogène percarboné, et cette déterminationétoit fondée sur ce que la densité duliquide est égale à celle des deux gaz.Quant au produit de l'action mutuelle du chloreet de l'alcohol, on ne se faisoit point d'idée arrêtéede sa composition.M. Despretz a présenté à l'Académie des expé-


2l6PHYSIQUE, CHIMIE,riences qui prouvent qu'il doit être formé d'unvolume de chlore et de deux volumes d'hydrogènepercarboné.L'éther sulfurique traité par le chlore donnedeux liquides d'apparence huileuse et de densitédifférente, et l'un et l'autre moins volatils que leliquide produit par le chlore et l'alcohol.M. Despretz a aussi essayé d'en faire l'analyse ; etsans être encore extrêmement satisfait de ses résultats,il conclut qu'un de ces deux liquides, aumoins, est un nouveau composé de chlore et d'hydrogènepercarboné : cette conclusion ne sera confirméeque par une analyse complète, lorsqu'elleaura pu être faite avec rigueur.Danscette recherche M. Despretz a fait quelquesobservations intéressantes en mettant en contactde l'hydrogène percarboné avec les chlorures desoufre et d'iode.Le chlorure d'iode ainsi traité lui a donné unliquide incolore d'odeur et de saveur agréables,qui se congèle à o du thermomètre en lames cristallines;et lorsque la quantité du gaz percarbonéa augmenté, il s'est formé un solide blanc et cristallin.Le chlorure de soufre ne donne avec le gaz enquestion qu'une seule substance visqueuse , plusfixe que l'eau, difficilement combustible, et d'uneodeur désagréable.


ET MÉTÉOROLOGIE. 217Ces observations mettent sur la voie de recherchesultérieures qui compléteront sans doute l'histoirede toutes ces transformations.Depuis les travaux de Crawfurd et de Lavoisierles physiologistes ont fait revivre les opinions avancéesdès le dix-septième siècle par Mayow et parWillis, et ont attribué généralement la chaleur animaleà la fixation de l'oxygène absorbé pendant larespiration, ou, en d'autres termes, à l'espèce decombustion qui a lieu dans cet acte. En effet, dansles belles expériences de Lavoisier et de M. de Laplace,le charbon faisoit fondre en se brûlant plusde quatre-vingt-seize fois son poids de glace ; et laliquéfaction de même genre que produisoit un animalà sang chaud répondoit à la quantité d'acideCarbonique que sa respiration produisoit, ou plutôtà celle de l'oxygène que sa respiration combinoitavec le carbone de son sang, sauf un légerexcédant que les auteurs attribuoient à la combustiond'une partie de son hydrogène.Cependant ces expériences avoient cette caused'incertitude , qu'on avoit mesuré l'effet calorifiquesur un animal, et l'absorption de l'oxygènesur un autre; tandis que depuis l'on s'est assuréque l'état des animaux , le plus ou moins de puretéou de chaleur de l'air où ils respirent, produisentdes différences très considérables.


2l8PHYSIQUE, CHIMIE,Pour donner à ces recherches toute la rigueurdontelles sont susceptibles, M. Dulong, que l'Académievient récemment d'acquérir, s'est servi d'unappareil où l'on mesure tout-à-la-fois et sur le mêmeindividu la chaleur produite et l'oxygène absorbé.Il emploie le calorimètre à eau , de l'invention deM. de Rumfort, dont nous avons parlé en 1814, etoù l'eau en commençant l'opération est autant audessousde la température atmosphérique qu'elleest au-dessus en finissant. Il enferme l'animal dansune boîte de métal doublée d'une cage d'osier, etplongée dans l'eau du calorimètre, mais où cetteeau ne peut pénétrer, tandis que l'on y renouvellel'air à volonté au moyen d'un gazomètre à pressionconstante ; et cet air, dont on ménage le courant defaçon que l'absorption ne passe pas cinq centièmes,ressort, après avoir été respiré, par des tuyaux quitransmettent sa chaleur à l'eau qu'ils traversent, etqui le portent dans un autre gazomètre où unelame de Uége, enveloppée de taffetas imperméable,le sépare de la surface de l'eau et empêche qu'ellen'absorbe son acide. On ménage à volonté la pressiondans chacun des deux gazomètres ; et l'on peutfacilement, et à chaque instant, déterminer le volume,la température, et la composition, soit del'air que l'on donne à respirer, soit de celui qui sortaprès avoir été respiré.


ET MÉTÉOROLOGIE. 219Quartd l'eau du calorimètre a acquis autant dedegrés au-dessus de l'atmosphère qu'elle en avoitau-dessous en commençant à faire respirer l'animal, il ne reste qu'à analyser l'air expiré et à comparerla chaleur acquise par l'eau à la quantité d'oxygènequi a été absorbée.M- Dulong a trouvé que le volume de l'acide carboniqueproduit étoit toujours moindre que celuide l'oxygène absorbé ; d'un tiers dans des oiseaux etdes quadrupèdes carnassiers, d'un dixième dans lesherbivores.Il à observé encore qu'il y avoit toujours exhalaisond'azoté, et si forte que dans les herbivores levolume de l'air expiré surpassoit celui de l'air inspiré,malgré la diminution de volume du gaz acidecarbonique.Enfin il a trouvé que la portion de chaleur correspondanteà celle de l'acide produit ne fait guèreque moitié'de la chaleur totaje dpiinée par l'anima;!dans les carnassiers , et va à peine aux trois quartsdans les herbivores ; que si on prend pour base 1gquantité d'oxygène absorbé , au lieu de la quantitéd'acide carbonique produit, supposant qu'une partiede cet oxygène a été em ployée à former de l'eau,on trouve une différence en plus, rnajs qui n'équivautjamais, à un cinquième près, à la chaleurproduite par l'animal.


220 PHYSIQUE, CHIMIE,En supposant exactes les évaluations de MM. Lavoisieret de Laplace, sur la chaleur donnée par lecarbone et l'hydrogène, il ne reste pour apprécierparfaitement les résultats de M. Dulong qu'à s'assurerque la combustion de ces substances, lorsqu'ellesfont partie de certains composés, donne lamême chaleur que lorsqu'on les brûle séparémentet isolées ; mais l'incertitude qui pourrait subsisterà cet égard n'iroit pas jusqu'à la proportion quenous venons d'annoncer, et il n'est guère douteuxqu'il n'y ait à chercher encore usie autre cause quela fixation de l'oxygène pour expliquer la totalité dela chaleur animale.ANNÉE 1823.M. Vauquelin a présenté un travail sur les combinaisonsde l'acide acétique avec le cuivre, si connuesdans le commerce sous les noms de verdet etde vert-de-gris, ou plutôt verdet gris. Il résulte desçs expériences que ces combinaisons se présententdans trois proportions différentes : i° un sous-acétateinsoluble dans l'eau, mais qui, plongé dans celiquide, s'y décompose à froid, et s'y convertit enperoxyde et en acétate; 2° un acétate neutre dontla solution ne se décompose point à froid, mais parl'ébullition , et se change alors en peroxyde et ensur-acétate; et enfin 3° un sur-acétate dont la dis-


ET MÉTÉOROLOGIE. 22 1solution ne se décompose ni à froid ni à chaud, etqu'on ne peut obtenir cristallisé qu'en le laissantévaporer à froid ou dans le vide. Le verdet gris ducommerce est un mélange, ordinairement en proportionségales, d'acétate et de sous-acétate.Une grande et utile découverte est celle qui vientd'avoir lieu dans le département de la Meurthe,d'immenses dépôts souterrains de sel gemme. Lessondages déjà faits et l'exploitation commencée fontconnoître leur étendue sur plus de trente lieuescarrées, et leur profondeur de plus de trois centspieds, ainsi que les diverses couches dont ils se composent.On y trouve du sel blanc, des sels gris diversementmélangés, et du sel coloré en rouge parle fer.L'Académie, à la demande du gouvernement, afait analyser ces produits par sa section de chimie,dont M. Darcet a été le rapporteur.La pureté en est extraordinaire : le sel blanc necontient au plus que sept millièmes de substancesétrangères; mais il y en a aussi d'absolument pur.Les variétés les moins pures de sel gris ne contiennentque cinq centièmes d'argile bitumineuse,d'oxyde de fer, et de sulfate de soude, de chaux etde magnésie. Le sel rouge est coloré par deux centièmesd'oxyde de fer.Aucun de ces sels étrangers n'étant déliquescent,


222 PHYSIQUE, CHIMIE,le sel gris conviendra aux salaisons ; tous les arts quiemploient le sel pourront en faire usagé. Le sel blancoffrira pour la table une denrée plus pure que celled'aucune autre saline ; et le consommateur y trouverad'autant plus de bénéfice qu'il n'attire pointl'humidité de l'air.L'argent et le mercure fulminant sont des substancesque l'on ne connoît que trop depuis que,répandues dans lé Commerce à cause de l'usagequ'on en fait pour arnôrcër les arrtiéS à feu, ellesont Causé tant d'accidents funestes. On les formeen rapprochant l'argent ou le mercure de l'acidenitrique et de l'alcohol. Ce3 trois Substances, dontdeux sont composées, réagissent les unes sur lesautres, et le composé définitif que l'on obtient détoneavec violence par la chaleur ou par un chocléger. Mais en quoi consiste-t-il? quels élémerits descorps employés à le former y sont-ils restés? commentet dans quelles proportions s'y sont-ils combinés?Le docteur Liebig, jeune chimiste-allemand, s'estoccupé de ce problème. En mettant de la potassedans la dissolution de mercure fulminant il a précipitéde l'oxyde de mercure, et obtenu, par l'évaporation, un sel cristallisable et fulminant dans unmoindre degré que le premier : toutes les bases al-


ET MÉTÉOROLOGIE. 223câlines en ont agi de même. Ainsi la propriété defulminer appartient non pas au mercure, mais à unecombinaison qui peut s'unir avec diverses bases,en les neutralisant plus ou moins complètement,comme ferait un acide.Il en estdemêmepour l'argent fulminant ;oilpeuten précipiter une grande partie de l'argent en y substituantun alcali ou un autre oxyde métallique.M. Jiiebig, après avoir employé comme base l'eaude chaux et l'avoir reprise par l'acide nitrique, estparvenu à isoler, à peu de chose près, le principequ'il soupçonnoit, etl'a vu se précipiter sous formede poudre blanche soluble dans l'eau bouillante,rougissant la teinture de tournesol; en un mot denature manifestement acide, mais se distinguantpar la propriété de détoner, dontil jouit au plushaut degré.M. Liebig a tenté l'analyse de cet acide, et a pensépayer cher son zèle pour la science; car les détonationsont lieu même dans l'eau, et au moindre choc.Il a réussi enfin , en le mêlant de beaucoup de magnésie, à le décomposer sans accident. Les produitssont un reste du métal par l'intermède duquel onl'avoit formé, du gaz acide carbonique, de l'ammoniaqueet de l'eau. C'est la composition la pluscomplexe que la chimie ait encore créée, puisqu'elleoffre une substance métallique et les éléments or-


224 PHYSIQUE, CHIMIE,dinaires des matières animales, savoir : de l'oxygène,de l'hydrogène, et de l'azote. Mais il restoit à savoircomment ces éléments y sont combinés entre eux ;si l'ammoniaque et l'eau y sont toutes formées; si lemétal y est à l'état d'oxyde, et de quel oxyde , etc.De nouvelles expériences faites cette année parl'auteur et par M. Gay-Lussac nous ont apprisque cet acide, qu'on avoit d'abord nommé fulminique,lorsqu'on le débarrasse du reste de métalqu'il contient, est de l'acide cyanique, c'est-à-direune combinaison de l'oxygène avec cette combinaisond'azote et de carbone qui a été nommée cyanogène.M. Dœbereimer, professeur à Jéna, est l'auteurd'une observation bien curieuse sur la propriétédont jouit le platine précipité de sa solution nitromuriatique(ce qui lui donne une forme et uneconsistance spongieuse), sur la propriété qu'il a,disons-nous, lorsqu'on fait passer sur lui un mélanged'oxygène et d'hydrogène, d'opérer la combinaisonde ces deux gaz et de produire une chaleurqui le porte lui-même au rouge. MM. Thénardet Dulong ont répété et vérifié ces expériences. Ilsont reconnu de plus que le palladium et le rhodiumjouissent de cette propriété comme le platine à latempérature ordinaire ; que l'iridium s'échauffe for-


ET MÉTÉOROLOGIE. 225tement à cette même température ; que l'osmiumrougit, mais seulement quand onl'a un peu échaufféd'avance; enfin que pour donner au nickel et aucobalt la propriété de produire la combinaison ilfaut les chauffer à 3oo degrés ; ils ont de même reconnuque, dans cet état, le platine, à la tempé^rature ordinaire, décompose le protoxyde d'azote.M. Chevreul, qui par sa découverte des acidesqui se produisent lors de la saponification a faitfaire de si grands pas à la théorie de cette opérationet ouvert un nouveau champ à l'étude des substancesorganiques, a continué ses recherches et déterminéles caractères de plusieurs de ces acides, quivarient selon les diverses graisses avec lesquelles lasaponification se fait, et qui sont les principes desodeurs des savons formés avec ces graisses et d'unepartie de ces graisses elles-mêmes. Le beurre enfournit deux, le butirique et le caprique; la graissede dauphin un, le phocénique; et la graisse de moutonun autre, le hircique. Ils sont tous incolores,plus légers que l'eau, mais de moins d'un dixième,diversement odorants , et donnent une saveur brûlante.Le caprique se solidifié à 15 degrés au-dessusde o ; les autres sont encore liquides à 9. Ils varientdavantage par leurs capacités de saturation et lespropriétés de leurs sels.BUFFON. COMPLKM. T. II.l5


2^6PHYSIQUE, CHIMIE,Le nombre des alcalis ou bases saïifiables organiqueset composées de plusieurs principes combustiblesou gazeux augmente rapidement, sur-toutdepuis les recherches de MM. Pelletier et Caventou ;et les propriétés remarquables dont ces substancessont douées rendoient intéressant de connoître lescompositions distinctives de chacune d'elles.MM. Pelletier et Dumas leur ont appliqué la méthoded'analyse imaginée par M. Gay-Lussac, quiconsiste à en brûler une quantité déterminée avecune quantité, également déterminée, d'oxyde decuivre, et à recueillir les produits. Par les proportionsde leurs éléments ces substances ressemblentbeaucoup aux résines ; elles ont un peu d'azote depi us ; on doute même qu'il y en ait dans la morphine ;la caféine seule en contient jusqu'à un cinquième,et plus, de son poids. La plupart ont une capacitéde saturation (une alcalinité) à-peu-près proportionnelleà leur quantité d'azote ; mais la morphineen a plus que n'indiquerait l'excessivementpetite quantité de ce principe qu'elle paraît contenir.Ces expériences, faites avec toutes les précautionsqui pou voient en rendre les résultats rigoureux etprécis, conduisent à des vues importantes, et quiintéressent toute la chimie organique non moinsque la matière médicale.


ET MÉTÉOROLOGIE. 227Une espèce particulière et très rare de calcul dela vessie, découverte par M. Wollaston, et nomméepar lui oxyde urique, s'est retrouvée pour la premièrefois en France, dans le calcul d'un chien. M. Lassaigne,préparateur de chimie à l'École vétérinaire,en a donné la description et les propriétés caractéristiques.Il l'a trouvée composée de 36 parties decarbone, 34 d'azote, 17 d'oxygène, et 12 d'hydrogène.Le dahlia, grande et belle plante dont nos parterresont été récemment enrichis, a des racinestubéreuses comme le topinambour, qui est de lamême famille qu'elle. M. Payen a cherché si cesbulbes ne contiendraient pas aussi un principe alimentairede bonne qualité, et pour cet effet il en afait l'analyse. Il en a retiré un sucre incristallisable ;un arôme ressemblant à celui de la vanille; unehuile volatile ; une huile fixe;plusieurs sels à basede chaux ; et une substance nouvelle qu'il a nomméedahline, et dont les bulbes de dahlia contiennentun dixième de leur poids : elle a de l'analogie avecl'amidon et la gélatine, mais elle en diffère sur-toutpar la propriété de se précipiter en masse grenue,lorsque l'eau qui la tient en dissolution est évaporéejusqu'à former une pellicule. Sa pesanteur spécifiqueest de 13 56 ; l'acide sulfurique la convertit eni5.


2?.8 PHYSIQUE, CHIMIE,sucre incristallisable, plus sapide que celui qui provientde l'amidon.ANNÉE 1824.A la suite de la gelée qui fitpérir tant d'oliviersdans l'hiver dei82iài822,le ministère de l'intérieur,désirant connoître si le climat de la Franceou de quelques unes de ses parties avoit subi deschangements, et les causes auxquelles ils pou voientêtre dus, demanda aux préfets des mémoires surl'étendue des défrichements qui ont eu lieu dansles forêts depuis 1819, et sur l'influence que l'opinionde leurs départements attribue au déboisementdes montagnes relativement à la température,à la diminution des eaux, à la force et à la fréquencedes vents.On a obtenu successivement des réponses decinquante-six de ces magistrats; et, comme on pouvoits'y attendre, les questions y sont traitées sousdes points de vue fort divers, et les résultats n'ensont pas toujours bien concluants. Cependant ilparaît certain, par des documents écrits, par lesouvenir des vieillards, que dans des lieux où l'oncultivoit autrefois l'olivier, la vigne, le châtaignier,et d'autres végétaux sensibles à la gelée, cette culturene s'est pas maintenue ou est même devenueimpossible.


ET MÉTÉOROLOGIE. 229Des défrichements n'ont pas été aussi générauxqu'on s'est plu à le répandre. Dans trente-quatredépartements qui possédoient ensemble 3,43g,g4-3hectares de bois, il n'en a été arraché que 204,0,92 ;mais ce n'est pas d'après l'étendue seule, mais parla nature des bois supprimés que les effets de cesdéfrichementsdoiventêtrejugés: les forêts d'arbresrésineux, les plus importantes comme abris, ontdiminué plus généralement ; les futaies de chênes,de hêtres, de nos montagnes de second ordre, ontpresque toutes été transformées en taillis, et il faudraitdes lojs sévères et exécutées pendant un sièclepour que les grands arbres propres aux constructionsciviles et navales redevinssent aussi abondantsqu'ils l'étoient en 1789.Ce n'est au reste que dans quatorze départementsque l'on a pensé que le déboisement des montagnesa causé le refroidissement de l'air ou du sol ; l'opinioncontraire a été exprimée dans trente-neuf. Ona reconnu dans trente-deux que les hivers sontmoins froids et plus longs, et les étés plus courts etmoins chauds qu'il y a soixante ans ; dans vingt-unautres on ne regarde pas ce fait comme constant.Dans vingt-sept départements on est persuadé queles vents sont devenus plus violents, et dans vingtsixon soutient le contraire.La dénudation des montagnes n'est m ise en dou té


23oPHYSIQUE, CHIMIE,dans aucune des réponses, et il y a aussi beaucoupd'accord sur ses conséquences actuelles et futures.L'une des plus généralement reconnues est la diminutiondes sources, parceque l'eau des pluies, aulieu de s'infiltrer dans le sol avec lenteur, s'écoulerapidement, et entraîne les terres que les bois etles herbes ne retiennent plus ; toutefois, sur cepoint même, il s'en faut beaucoup que les rapportssoient unanimes. Il n'y a que vingt-huit départementsoù l'on affirme la diminution des eaux permanentes,et que vingtcinq où l'on ait reconnu queles inondations sont plus fréquentes qu«en 1789.Nous ne parlerons pas des autres articles de météorologie,tels que la neige, la grêle, etc., sur lesquelsles réponses ont été encore plus vagues et pluscontradictoires. Les données fournies par ce premiertravail ne peuvent être considérées que commeun essai encore assez imparfait ; et pour arriver àquelque chose de plus positif, il seroit nécessairede poser des questions plus précises et de traceravec plus de rigueur la méthode à suivre pour lesrésoudre.Néanmoins les mémoires fournis à l'Académiecontiennent des renseignements précieux sur lastatistique de plusieurs parties de la France, etsous ce rapport au moins leur utilité ne peut êtreméconnue.


ET MÉTÉOROLOGIE. 23 1M. Moreau de Jonnès, qui a soin d'entretenirl'Académie de tous les phénomènes remarquablesqui se manifestent aux Antilles, lui a fait part dedeux tremblements de terre arrivés dans ces îles,et qui ont été assez forts pour exciter l'effroi parmila population.Le premier a eu lieu le 11 novembre, à cinqheures quarante-cinq minutes du matin.Le deuxième s'est fait sentir à la Martinique lei3 décembre suivant, aune heure du matin.Chacun de ces tremblements a consisté en deuxsecousses ; celles du premier ont été les plus forteset les plus prolongées.Il n'est personne un peu au fait des travaux deschimistes qui ne connoisse les grandes discussionsauxquelles ils se sont livrés dans ces derniers tempssur les causes et le mode précis des combinaisons,et particulièrement sur la question de savoir si ellesse font en toutes proportions et pour ainsi dire entoutes nuances, ou si elles n'ont lieu que dans certainesproportions fixes qui puissent s'exprimer pardes nombres entiers et assez petits.Cette dernière opinion semble prévaloir aujourd'hui, malgré la longue opposition que lui a montréece grand chimiste feu M. Berthollet; cependantl'opinion contraire a encore des défenseurs, et


232 PHYSIQUE, CHIMIE,M. Longchamp a essayé de l'appuyer par de nouveauxarguments.Il les cherché dans l'analyse de l'acide phosphoriqueetdesessels,genres de substances qui offrentde grandes difficultés, puisque deux chimistes aussicélèbres que MM. Davy et Berzélius sont arrivés àleur sujet à des résultats très différents.Il a d'abord acidifié le phosphore par l'acide nitrique, et saturé l'acide phosphorique par la chauxcaustique. L'augmentation de poids de cette dernièresubstance lui fait connoître la quantité d'acidephosphorique correspondante au phosphore employé,et par conséquent la quantité d'oxygène quientre dans l'acide phosphorique; mais ce procédédonne des résultats fort discordants. Les écarts sontmoins considérables quand on emploie l'oxyde decuivre au lieu de la chaux.Quant aux phosphates, l'auteur commence pardéterminer la quantité d'acide que contient le phosphated'ammoniaque cristallisé en le calcinant avecun excès de carbonate de chaux; calculant ensuiteles proportions des phosphates qui se formentquand on calcine avec celui d'ammoniaque les différentssels à base de baryte, de soude, ou de chaux,il en déduit la quantité d'acide phosphorique queprennent les divers alcalis, et il arrive pour chaquebase à des proportions très variables et peu d'accord


ET MÉTÉOROLOGIE. 233avec la théorie des combinaisons fixeset à proportionssimples. La même conclusion se déduit selonlui des opérations dans lesquelles on décomposeles sels solubles de chaux et de baryte par le phosphatede soude cristallisé; mais les commissairesde l'Académie ont fait observer que dans ces selsliquéfiés par la chaleur il manque la circonstancela plus essentielle pour produire des proportionsfixes, la cristallisation: le terme où s'arrête la décompositionvarierait probablement encore avec latempérature.Nous avons parlé dans le temps des belles découvertesde l'iode et du cyanogène, deux substancesdont l'une est jusqu'à présent indécomposable - etse distingue éminemment par la couleur violettede sa vapeur, et dont l'autre, formée d'une combi^naison de carbone et d'azote, donne, en s'unissantà l'hydrogène, le principe colorant du bleu dePrusse. Ces substances peuvent s'unir quand onles présente l'une à l'autre à l'état de gaz naissant,ce qui arrive quand on chauffe un mélange de deuxparties de cyanure de mercure et d'une partied'iode; il se produit alors du prot-iodure de mercureet du cyanure d'iode. Cette dernière combi-*naison, qui est très volatile, s'élève sous la formed'une fumée épaisse, et se condense en aiguilles


234 PHYSIQUE, CHIMIE,extrêmement légères. Elle a une odeur très piquante,une saveur des plus caustiques, mais neparticipe en rien des caractères des acides ni desalcalis. Elle se dissout dans l'eau et dans l'alcohol,mais n'éprouve aucune action du chlore ni de l'acidesulfureux quand ils sont à l'état sec : au contrairel'acide sulfureux liquide et les alcalis l'attaquent,et il en résulte divers composés.M. Serullas, qui a le premier produit et étudiécette combinaison remarquable, n*a pu encore endéterminer les proportions que d'une manière approximative;il y trouve 82,8 sur 102 d'iode, et17,2 de cyanogène.Les accusations d'empoisonnement dont les tribunauxont retenti l'année dernière ont tourné lesefforts de plusieurs chimistes vers la recherche desmarques auxquelles on peut reconnoître dans lesintestins la présence de quelques uns des poisonsnouvellement découverts. Si malheureusement lesprogrès des sciences fournissent quelquefois aucrime des instruments nouveaux, ils donnent engénéral aussi les moyens d'en prévenir les effets, oudu moins ceux d'en apprécier les causes et d'assurerla punition des auteurs.C'est avec i'intention de remplir cette espèce dedevoir imposé en quelque sorte aux chimistes par


ET MÉTÉOROLOGIE. 235leurs propres découvertes que M. Lassaigne a cherchéà saisir dans une masse alimentaire les moindrestraces de morphine ou d'acide hydrocyânique.Pour la morphine, il traite les matières qui lacontiennent par l'alcohol : après que l'alcohol adissous ce qu'il peut dissoudre, il l'évaporé, et traitele résidu par l'eau pure; il laisse évaporer cette eauspontanément, et si elle recèle de l'acétate demorphine cette substance délétère se cristallise enprismes divergents, que l'on reconnoît à leur saveuramère, à leur décomposition par l'ammoniaque,au dégagement d'acide acétique qu'y produit l'acidesulfurique, enfin à la couleur rouge orangée qu'yfait naître le contact de l'acide nitrique.Quand c'est dans un corps solide que l'on soupçonnela présence du poison, il faut le faire bouillirdans l'eau et opérer sur la décoction comme il vientd'être dit.Si la matière étoit alcaline, il faudrait ajouter àleau et à l'alcohol une petite quantité d'acide acétiquepour rétablir l'acétate de morphine qui auroitpu être décomposée.M. Lassaigne a retrouvé par ce procédé cettesubstance vénéneuse dans les vomissements, dansl'estomac, et dans les intestins d'animaux mortsaprès en avoir pris seulement 12 et 18 grains. Lesmatières vomies en contiennent même des quan-


236 PHYSIQUE, CHIMIE,tités considérables, mais il ne paroît point qu'il enpasse dans le sang, et même on n'en a plus retrouvéde traces dans celui des chiens et des chevaux, dansles veines desquels on en avoit injecté, et quiavoient survécu à l'opération; en sorte que dansles cas où l'animal résiste à l'action du poison lamorphine se décompose ou est expulsée de quelquemanière.Pour mettre encore plus de précision dans sesprocédés, etcraignantquequelquematière animaledont on n'aurait pu entièrement débarrasser lamorphine ne contribuât à la couleur orangée qu'yproduit l'acide nitrique, il est parvenu à supprimercette cause d'incertitude en versant dans la solutionaqueuse de l'extrait alcoholique de sous-acétate deplomb, qui précipite les matières animales, maisnon l'acétate de morphine.M. Dublanc, pharmacien à Paris, a trouvé unprocédé très utile pour reconnoître les plus foiblestraces de morphine quand c'est dans de l'eau pureque cet alcali ou quelqu'un de ses sels est en dissolution,mais qui n'a pas le même avantage lorsqu'elleest mêlée à des matières animales comme elle l'esttoujours dans les intestins. Ce moyen est fondé surl'indissolubilité de la combinaison que la morphineforme avec le tannin. Une dissolution d'acétate demorphine, qui en contient seulement un quinze-


ET MÉTÉOROLOGIE. 237millième, est sensiblement troublée par l'infusionalcoholique de noix de galle saturée à froid. L'auteurcroyoit pouvoir distinguer les tannâtes demorphine de ceux des matières animales, parcequeles premiers seroient plus solubles dans l'alcohol;mais à l'expérience cette propriété ne s'est pas trouvéeleur être aussi exclusivement propre qu'il lecroyoit, en sorte que son moyen pourrait conduireà des erreurs funestes pour des accusés innocents.L'acide hydro-cyanique ou prussique, délétèreà si petite dose, et que des scélérats savoient employerbien long-temps avant que les chimistes eneussent constaté la nature, étoit plus difficile à reconnoîtreque la morphine. Cependant M. Lassaigneest parvenu aussi à en saisir de bien foiblestraces.Cet acide a la propriété, lorsqu'on verse du persulfatede fer dans sa dissolution saturée de potasse,de produire une belle couleur bleue, qui, lorsquela proportion de l'acide hydrocyânique est trèsfoible, ne se montre qu'après quelques heures ; cequi donneroit déjà la possibilité de le découvrirdans un liquide où il n'y en auroit qu'un dix-millième: mais une autre de ses propriétés permetd'arriver encore à une précision double, et d'ensaisir jusqu'à un vingt-millième. C'est celle que luia découverte M. Vauquelin de former avec le deu-


238 PHYSIQUE, CHIMIE,toxyde de cuivre hydraté un composé jaunâtre quidevient blanc par l'addition de l'eau chaude, et quiest parfaitement insoluble dans ce liquide.Pour appliquer cette propriété à la solution duproblème, on alcalise légèrement par la potasse leliquide qu'on éprouve ; on y verse quelques gouttesde sulfate de cuivre, et ensuite assez d'acide hydrochlorique( muriatique ) pour redissoudre l'excèsd'oxyde de cuivre précipité par l'alcali. Si le liquidecontient de l'acide hydrocyânique, il prend un aspectlaiteux qui disparaît souvent au bout de quelquesheures.Ainsi les signes de poison que donne le sulfatede fer disparaissent avec le temps, et le temps développeceux que fournit le sulfate de cuivre; enconséquence il sera toujours avantageux d'employercomparativement les deux méthodes.M. Lassaigne, par leur moyen, a retrouvé l'acidedans les intestins d'animaux qui en étoient mortsdepuis dix-huit et même quarante-huit heures;mais les autres organes, le cerveau, la moelle épinière,le cceur, malgré l'odeur qu'ils répandoient,n'en offroient aucune trace.On sait en effet que les corps empoisonnés parl'acide hydrocyânique, sur-tout leur cerveau et leurmoelle épinière, répandent une odeur d'amandesamères, et que cette odeur peut mettre sur la voie


ET MÉTÉOROLOGIE.23gde ce genre d'empoisonnement. Mais ce premierindice ne suffit point, car M. Itard a observé quedans certaines maladies inflammatoires il se développeune odeur semblable.Il s'agira d'examiner si, dans ces circonstances,c'est de l'acide hydrocyânique qui se produit parl'effet même de la maladie; alors les moyens d'enreconnoître la présence, loin de servir la justice,ne pourraient que l'égarer en lui signalant le crimelorsque la nature seule auroit agi. >Quand on traite par l'acide nitrique ou par l'alcoholles substances organiques où il entre de l'azote,ou même quand on les laisse dans la terrehumide ou sous l'eau, on en obtient une matièregrasse, et Gest une question assez importante desavoir si cette matière y préexistoit, ou si elle estproduite par les opérations auxquelles on les soumet.M. Chevreul, que son grand travail sur les matièresgrasses, en général, conduisoit naturellementà désirer une solution de cette question, a fait denombreuses expériences dans l'espoir de se la procurer.En soumettant des parties égales de tendonsd'un animal à l'action de l'alcohol, à celle de l'acidenitrique, ou à celle de l'acide hydrochlorique, il en aobtenu des quantités égales d'une graisse semblable


24oPHYSIQUE, CHIMIE,à celle de l'animal auquel les tendons avoient appartenu; en les exposant sous l'eau pendant un anonenretiredel'adipocireforméed'acide margariqueet oléique, en quantité correspondante à la proportionde graisse que fournissentl'alcohol et les acides ;enfin en les dissolvant par la potasse, la liqueur déposedes submargarates de potasse, comme si l'ony avoit dissous de la graisse.Le tissu jaune élastique qui forme certains ligamentsa offert les mêmes phénomènes, si cen'est que la proportion de la graisse y est plusabondante.La fibrine du sang donne aussi une matièregrasse, mais d'une autre nature, formant avec del'eau une sorte d'émulsion, et, ce qui est très remarquable,présentant les mêmes caractères, lesmêmes propriétés que celle qu'on extrait du cerveauet des nerfs.De ces expériences M. Chevreul conclut que lesmatières grasses font partie constituante des substancesd'où on les extrait.Les enfants nouveau-nés sont sujets à une maladiepresque toujours fatale à ceux qu'elle atteint, etqui consiste en une induration et une colorationen jaune de la peau. Lorsqu'on incise la peau desenfants morts de cette maladie, il s'en écoule un


ET MÉTÉOROLOGIE.2/[lliquide que M. Chevreul a trouvé formé d'albumine,d'un principe colorant orangé, et d'un autreprincipe colorant vert; et examinant le sérum deleur sang, il y a reconnu une composition chimiquesemblable. L'un et l'autre de ces liquides, abandonnéà lui-même, se prend en partie en une geléemembraneuse, et les principes colorants demeurentdans les portions qui restent liquides. C'està cette disposition du sérum du sang à se coagulerque M. Chevreul attribue la cause directe de la maladie.M. Payen, qui avoit présenté l'année dernière àl'Académie une analyse des racines de dahlia, s'estoccupé plus récemment de celle du topinambour.Il y a trouvé une huile analogue à celle de l'artichaut,et qui contribue à la ressemblance de la saveurde ces deux végétaux ; elle ressemble encoreplus à celle de l'orge, et se compose de deux principesgras, dont l'un forme un savon soluble avecla potasse, et l'autre un savon presque insoluble.Ces tubercules contiennent de plus une huile volatile; le principe nommé dahline, qui se dissout dansl'eau bouillante et se précipite par le refroidissementen une matière grenue qui forme avec les acidessulfurique et phosphorique un sirop très sucré ; lafungine, sorte de substance ligneuse signalée dansBUFFON. COMPLÉM. T. II.1 G


242 PHYSIQUE, CHIMIE,les champignons par M. Biaconnot; une matièregélatineuse; un sucre.cristallisable, mais qui fermenteaisément et founit de l'eau-de-vie analogueà celle de grain ; enfin l'acide gallique, auquel probablementle topinambourdoit, comme l'artichaut,la propriété de bleuir à l'air qu«and il est cuit.Selon M. Payen, la quantité de matière sucréeferoit le cinquième du tubercule, bien que la saveuren soit moins douce que celle de la betterave ou dela canne. Si cette assertion se vérifie, le topinambourseroit le végétal qui donnerait le plus d'eau-de-vie,propriété de nature à attirer l'attention des cultivateurs,d'autant que sa tige a aussi l'avantage de donnerbeaucoup de potasse, et que sa feuille nourritbien les moutons.On emploie avec avantage le charbon pour décolorerles sirops et autres solutions que l'on veutrendre plus limpides; et les substances charbonneusesminérales,telles que les empelites, les schistesbitumineux, jouissent de ce pouvoir dans laproportion du charbon qu'elles contiennent: maisM. Payen, ayant essayé à cet égard certains charbonsfossiles mêlés de pyrites, trouvés dans la plainede Grenelle,s'aperçut queles sirops en étoient brunisau lieu d'en être décolorés; ce ne fut qu'aprèsavoir été traités par un grand excès d'acide hydro-


ET MÉTÉOROLOGIE. 243chlorique et par l'eau bouillante que le résidu calcinéreprit ses propriétés naturelles. M. Payencherche la cause de cette différence dans le protosulfureformé par la calcination de la pyrite, et quel'on enlève par l'acide hydrochlorique.On a beaucoup parlé pendant quelque temps decertains grès trouvés dans la forêt de Fontainebleau,et qui offraient une ressemblance extérieure, maisassez grossière, avec un corps humain et une têtede cheval encore revêtus de leur chair et non réduitsen squelette, comme le sont toujours les restesfossiles ou pétrifiés d'animaux; et l'on avoit annoncéque l'analyse chimique confirmoit la suppositionque c'étoient en effet des corps qui avoienteu vie.MM. Vauquelin et Thénard se sont donné lapeine de répéter cette atialyse sur des fragmentspris de divers points de ces pierres figurées; ilsn'ont trouvé de phosphate de chaux que dans lefragment pris à la partie que l'on considéroit commeune main, et sa proportion n etoit que d'un oudeux centièmes; le reste de la masse n etoit forméque de grès, mais donnoit à la distillation quelquepeu de produits acides et ammoniacaux, quine paroissent venir que des matières dont la surfaceétoit enduite. Les parties du rocher qui en-16.


244 PHYSIQUE, CHIMIE,touroient ces concrétions donnoient les mêmesproduits. Quelques personnes ont conjecturé quecette portion minime de phosphate de chaux trouvéedans un seul point pou voit venir de ce quedes abeilles maçonnes avoient fait leur nid danscette partie.Une des applications les plus utiles que l'on aitfaites dans ces derniers temps des connoissanceschimiques à l'économie publique et domestiqueest bien celle de l'éclairage par le gaz hydrogène,retiré de la distillation de la houille ou de l'huile;mais quelques explosions arrivées dans des endroitsfermés où il s'étoit introduit de ce gaz, et où il s'étoitmêlé à l'air atmosphérique dans la proportionnécessaire à la détonation, avoient inspiré descraintes contre lesquelles il convenoit de rassurerle public, et qu'il importoit sur-tout d'empêcher dese réaliser. L'Académie a été chargée de s'occuperd'un objet aussi intéressant, et c'est d'après le rapportqu'elle a soumis au gouvernement qu'a étérendue l'ordonnance royale qui fixe les précautionsà suivre dans la disposition des ateliers oùl'on produit le gaz et où on le débarrasse des principesqui nuiraient à son emploi, des réservoirsoù on l'emmagasine, et des tuyaux par lesquelson le conduit aux différents points où il doit êtreconsommé.


ET MÉTÉOROLOGIE. 2/}5On est parti dans ce travail du fait que le gazhydrogène seul peut bien brûler comme toute autresubstance combustible, mais non pas détoner; etque, pour qu'il puisse s'y faire une explosion, il estnécessaire qu'il soit mêlé d'air atmosphérique clansune proportion au moins quadruple de la sienne,mais qui ne soit pas plus que dodécuple.Il est physiquement impossible, à moins quetous les employés d'une usine ne conspirent pourun pareil forfait, que cette proportion se réalisedans le réservoir, et ce n'est que dans le lieu oùaboutissent les conduits et où s'ouvrent les robinetsqu'elle pourroit avoir lieu ; mais dans ces endroitsmême il faudroit qu'il n'y eût aucune ouverture,aucun courant d'air pour qu'il pût s'y accumulerune quantité de ce mélange détonant, suffisantepour produire des effets considérables.Nous n'entrerons pas dans le détail des précautionsprescrites relativement aux autres partiesde l'opération, attendu qu'elles sont suffisammentconnues du public par l'ordonnance qui les concerne.Il se forme sur l'eau minérale de Vichy une matièreverte dont M. Vauquelin a cherché à reconnoîtrela nature. Etendue sur le papier, elle devientbleue à l'air: l'alcali caustique fait disparaître sa


246 PHYSIQUE, CHIMIE,couleur ; mais l'acide nitrique affoibli la restitue, etaprès quelque temps la change en rose. Il précipitede sa dissolution alcaline des floconsverts, qu'unléger excès d'acide rend bleus, et qui se comportentà-peu-près comme l'alumine. Le chlore et l'acidenitrique concentré changent le vert en jaune. Il seproduit dans cette matière de l'acide acétique et desacétates de soude et de potasse. Tous ses élémentssont si compliqués et leur nature est tellement fugaceque ce seroit une vaine tentative que de vouloiren imiter la combinaison ; aussi M. Vauquelinest-il bien éloigné d'accorder ce que quelques chimistesprétendent, que l'art de fabriquer les eauxminérales est devenu un émule parfait de la nature.ANNÉE 1825.M. Moreau de Jonnès a lu une notice sur lesderniers tremblements de terre qui ont eu lieu auxAntilles.Le 3 octobre 1824 il y en a eu un à la Martinique,à une heure du matin, de deux secousses assez fortespour éveiller les habitants des villes de Saint-Pierreet du Fort-Royal.Le 3o novembre 1824, à trois heures trenteminutes après midi, après plusieurs jours d'unechaleur extraordinaire qui cessa subitement, il y


ET MÉTÉOROLOGIE. 247eut une secousse très violente accompagnée d'unbruit très grand. Des pluies diluviales commencèrentimmédiatement, quoiqu'on fûtdans la saisonsèche; et il y eut un raz de marée très fort.Le i3 janvier 1825, à une heure trente minutesdu matin, deux secousses se firentsentira Saint-Pierre; la température étoit demeurée très élevéejusqu'au moment de ce phénomène.Le 26 août l'ouragan qui a dévasté la Guadeloupe,et dont on ne connoît que trop les affreux détails,se fitsentir à la Martinique, mais sans y causer degrands ravages. Le vent souffla fortement dès sixheures du matin; une pluie prodigieuse qui tombajusqu'à deux heures après midi sembla diminuersa violence. Il y eut de grands débordements detoutes les rivières.Les beaux résultats obtenus par M. Chevreul deses recherches sur les corps gras ont excité les chimistesà examiner ces corps sous d'autres rapportset par d'autres moyens.M. Dupuy et MM. de Bussy et Le Canu y ontappliqué l'action de la chaleur. On avoit cru jusqu'àprésent que la distillation les transformoit en eau ,en acide carbonique, en acide acétique ou sébacique,en charbon, et en huile altérée et très odorante;mais M. Dupuy a obtenu par la distillation


248 PHYSIQUE, CHIMIE,lente des huiles de pavot et de lin un produit solidequi ne rentrait dans aucun de ceux que nous venonsde nommer; et MM. de Bussy et Le Canu, ayantpoussé l'examen plus loin, ont constaté qu'outreces produits on en obtient plusieurs autres, et surtoutces acides que M. Chevreul a nommés margariqueet oléique. En opérant sur le suif on retire plusdes trois dixièmes de son poids d'acide margarique,et les auteurs ont cru cette observation susceptibled'applications assez utiles pour se l'approprier parun brevet d'invention. Ils pensent qu'il se passequelque chose de semblable dans la distillation dusuccin, et que l'acide succinique est produit parl'opération même.On savoit, par les expériences de Priestley et dequelques autres physiciens, que les charbons faitsavec le même bois, mais à divers degrés de température,n'ont pas les mêmes propriétés physiques;que celui qui a été chauffé très fortement, parexemple, devient un bien meilleur conducteur del'électricité que celui qui a été fait à un feu doux.M. Cheuvreusse, professeur de chimie à l'Écoleroyale d'artillerie de Metz, a repris ce sujet, et l'atraité d'une manière beaucoup plus étendue. Nonseulement il a refait avec beaucoup de précision lesexpériences relatives à la qualité conductrice de


ET MÉTÉOROLOGIE. 246l'électricité, mais il a reconnu et constaté des propriétéstoutes semblables relativement au calorique: le charbon fortement chauffé en est un bonconducteur; ce n'est que le charbon fait à une bassetempérature qui le conduit mal ; et l'on se trompoitbeaucoup lorsque, pour empêcher le refroidissementd'un appareil, on se contentoit de l'envelopperde charbon sans distinguer de quelle manièrece charbon avoit été fait.Il sera aisé à l'avenir d'éviter cette faute en essayantauparavant le charbon relativement à l'électricité,puisque la faculté delà conduire est concomitanteà celle de conduire le calorique.La propriété hygrométrique du charbon est enraison inverse. Moins il a été chauffé, plus il absorbed'eau; ets'il a été préparé avec un bois tendre,s'ilest en morceaux et non en poudre, sa faculté absorbantese renforce encore. La combustibilité ducharbon, qui est sa qualité la plus importante pourles arts, ne peut manquer de dépendre aussi beaucoupdu mode de carbonisation; mais l'auteur réservece sujet pour un autre mémoire, dans lequelil examinera également l'influence de la températuresur les propriétés chimiques du charbon.Il sera intéressant de rechercher de quelle façonla chaleur produit ces diversités, et si c'est par leplus ou moins de dissipation de l'hydrogène, par


25oPHYSIQUE, CHIMIE,une réaction des sels contenus dans le charbon, ouseulement par une autre disposition des moléculescharbonneuses.La production de l'alcohol, ou ce que l'on nommefermentation vineuse, s'établit dans un mélange dematière sucrée et d'eau par le moyen d'agents d'unenature particulière, connus sous le nom de levures;mais on savoit aussi que le gluten pouvoit y exciterce genre de mouvement, et M. Seguin a découvertla même propriété dans l'albumine.M. Collin vient d'établir par des expériences suiviesque toutes les matières animales peuventproduire le même effet; mais elles n'agissent quefoiblement, au bout d'un temps assez long, et à unetempérature de 26 degrés et plus, tandis que lalevure de bière produit son effet presque instantanémentet à la température de 10 degrés. Cependant,lorsque cette première fermentation est amenéepar une matière animale quelconque, il seforme un dépôt beaucoup plus actif, et qui a quelquefoistous les caractères de la levure ordinaire.On soupçonne même que l'action des matièresanimales pourroit bien n'être pas immédiate, maisprovenir de ce qu'en se décomposant elles auroientproduit de la levure.M. Collin, ayant observé que la pile galvanique


ET MÉTÉOROLOGIE.25 laccélère beaucoup la fermentation, croit que c'està l'aide de l'électricité que les matières animalesexercent leur action.ANNÉE 1826.M. Moreau de Jonnès a communiqué à l'Académiela notice des tremblements de terre qui ont eulieu aux Antilles en 1826.Le premier s'est fait sentir à la Martinique le7 janvier, à sept heures du matin; il s'est formé dedeux secousses consécutives ; la dernière a été trèsviolente.Le second a eu lieu le 2 mai, à minuit trente-cinqminutes; le mouvement d'oscillation du sol a étélong et assez fort.Le dernier tremblement de terre est arrivé le12 août, à cinq heures du matin. On n'a ressentiau Fort-Royal qu'une seule secousse très prolongée.Des vents de nord de la plus grande force ontcommencé à souffler en janvier 1826 dans la merdes Antilles, et leur domination a duré plus dedeux mois et demi. Ils ont tellement abaissé la températureque l'Archipel a éprouvé un hiver singulièrementfroid.Nous avons parlé l'année dernière des expé-


- 252 PHYSIQUE, CHIMIE,riences de MM. de Bussy et Le Canu sur la distillationdes corps gras, qui leur ont fait connoître quel'on obtient par ce moyen, comme par la saponification,les acides margarique et oléique. Cette annéeils ont généralisé leurs observations, et sontarrivés à ce résultat remarquable que les corps gras- susceptibles d'être changés en savon par les alcalissont aussi ceux qui donnent des acides par la distillation,et que ceux qui ne peu vent être saponifiésne donnent point d'acides par cette voie.Dans un travail particulier sur l'huile de ricinils ont reconnu qu'elle donne des acides, et mêmequ'elle en donne de trois sortes, et en la saponifiantils les ont retrouvés; mais les acides leur ont parudifférer de ceux de tous les autres corps gras. Lepremier, qu'ils nomment riciniqua, est fusible à22 0 au-dessus de la congélation de l'eau ; un autre,qu'ils appellent stéaro-ricinique, se cristalliseen bellespaillettes, et ne se fond qu'à 13o° ; le troisième, qu'ilsappellent oléo-ricinique, demeure au contraire liquideà plusieurs degrés au-dessous du point de lacongélation de l'eau. Les acides sont volatils, plusou moins solubles dans l'alcohol, et complètementinsolubles dans l'eau. Ils forment avec diversesbases, sur-toutavec la magnésieet l'oxyde de plomb,des sels dont les caractères sont très distincts. L'h uilede ricin, qui ne donne ni acide oléique ni acide


ET MÉTÉOROLOGIE. 253margarique, ne contient donc ni oléine ni stéarine,et elle est d'une nature particulière.En effet, soit qu'on la distille ou qu'on la convertisseen savon, elle donne des résultats qui lui sontpropres. Lorsqu'on l'a distillée par exemple aprèsque les huiles volatiles et les acides ont passé dansle récipient, il reste dans la cornue un acide solideéquivalant aux deux tiers de son poids, blanc jaunâtre,boursouflé, semblable à de la mie de pain,qui brûle aisément sans se fondre, qui n'est solubleque dans les alcalis, et qui forme avec eux une sortede savon. Les auteurs croient qu'on pourroit entirer un vernis propre à être employé sur les tôlesqui doivent subir une assez fortechaleur.On se souvient de la découverte de l'iode faite en1813 dans le varécparM. Courtois, et des propriétésremarquables que MM. Gay-Lussac et Humphry-Davy ont reconnues à cette substance.M. Balard, préparateur de la faculté des sciencesde Montpellier, en traitant par le chlore la lessivedes cendres de fucus et l'eau-mère des salines, eten y ajoutant de la solution d'amidon, comme onle fait pour y reconnoître l'iode, s'aperçut qu'outrela matière bleue produite par l'union de l'iode etde la solution d'amidon il se montrait une matièred'une odeur vive et d'un jaune orangé d'autant plus


?54 PHYSIQUE, CHIMIE,intense que le liquide qu'il observoit étoit plus concentré.En versant sur le mélange de l'acide sulfuriqueétendu d'eau, enfin en recueillant encore lesvapeurs qui se dégagent, ses propriétés semblentannoncer un principe particulier. On peut obtenirséparément cette matière, soit en distillant l'eaumèreaprès l'action du chlore et en condensant parle froid les vapeurs rutilantes qu'elle fournit, soitpar un procédé plus compliqué mais plus productif,en l'enlevant à l'eau par l'éther, à l'éther par la potasse,en mêlant cette potasse avec du peroxyde demanganèse. En masse elle paraît d'un rouge foncé;sa liquidité se conserve jusqu'à 18 0 au-dessous dupoint de congélation ; elle est très volatile, et boutà 47°; son odeur ressemble beaucoup à celle duchlore; sa densité est triple de celle de l'eau; dissolubledans l'eau, dans l'alcohol,dans l'éther, elledétruit les couleurs comme le chlore, et se comportede même avec l'hydrogène et avec l'oxygène, avecles oxydes alcalins. Combinée avec le gaz hydrogènepercarburé, elle produit un liquide oléagineuxd'une odeur éthérée très suave.L'auteur lui a donné le nom de brème, tiré dePpwftoç, mauvaise odeur. Il l'a soumise à des essaisanalogues à ceux que M. Gay-Lussac a faits surl'iode.M. Dumas a obtenu des composés dans lesquels


ET MÉTÉOROLOGIE. 255entre cette substance, et de nature assez semblableà ceux que l'on obtient de l'iode, entre autres desbrômites métalliques et des hydrobrômates alcalins.M. Sérullas, continuant à suivre la même marche,a obtenu de l'hydrocarbure de brome et de l'étherhydrobrômique.M. Liebig a retiré cette même substance de l'eaumèrede quelques salines d'Allemagne, et en a aussifait l'objet de quelques expériences.En i8i3, à l'époque où M. Gros entreprit dedécorer la coupole de Sainte-Geneviève de la magnifiquecomposition dans laquelleil a déployé untalent si admirable, MM. Thénard et Darcet furentconsultés sur la méthode à suivre pour fixer lapeinture à l'huile sur la pierre et préserver deschefs-d'œuvre d'une prompte destruction : ils jugèrentque le moyen le plus sûr étoit de faire pénétrerdans la pierre un corps gras liquéfié par lachaleur, qui en se refroidissant remplirait tous lespores et offrirait au pinceau de l'artiste un fond dela même nature que les couleurs qu'il avoit à y appliquer.Il composèrent cet enduit d'une partie decire jaune et de trois parties d'huile cuite avec undixième de son poids de litharge. On chauffa successivementet fortement toutes les parties de lacoupole au moyen d'un grand réchaud de doreur,


256 PHYSIQUE, CHIMIE, *et l'on y appliqua le mélange chauffé lui-même à latempérature de l'eau bouillante. A mesure que lapremière couche s'imbiboit, elle étoit remplacéepar une autre, jusqu'à ce que la pierre refusât d'enabsorber: les murs une fois bien imprégnés, bienunis, et bien secs, furent recouverts de blanc deplomb délayé dans l'huile, et c'est sur cette coucheblanche que le grand peintre a exercé ses pinceaux.Onze années d'épreuve ont prouvé que les vues deces chimistes avoient été heureuses : leur enduit nemet pas seulement la peinture à l'abri de l'humidité,il prévient encore l'embu, ou cette inégalité d'éclatqui est occasionée par le plus ou moins d'absorptionde l'huile, et il dispense ainsi le peintre devernir son tableau. On a préparé de même les quatrependentifs de la coupole inférieure qui doivent êtrepeints par M. Gérard. L'enduit les a pénétrés à troiset quatre millimètres et demi,Ce procédé peut être employé sur le plâtre commesur la pierre, et il le préserve même, lorsqu'il estexposé au-dehors, de l'action de l'air et de l'humidité.Un bas-relief en plâtre enduit à moitié de lacomposition de MM. Thénard et Darcet a été exposépendant très long-temps sous des gouttières;tout ce qui étoit enduit s'est conservé, tandis que lereste a été rongé, dissous, et que les figures y sontdevenues méconnoissables.


ET MÉTÉOROLOGIE.2^7On a parfaitement assaini par des enduits semblablesdes appartements au rez-de-chaussée que lesalpêtre avoit rendus inhabitables même en été ; ony a employé de la résine au lieu de cire, ce qui rendle mélange beaucoup inoins cher.En mêlant à l'enduit des savons métalliques onpeut donner au plâtre telle couleur que l'on veut.Il n'est pas douteux que l'on pourra s'en servir pourdes statues de plâtre, et les rendre presque aussiinaltérables par les éléments que si elles étoient demarbre ou de bronze.Une des industries les plus profitables qui aientété données à la France par les chimistes est celled'extraire la soude du sel marin: toutes nos fabriquesde savon, nos verreries, obligées autrefoisd'importer pour beaucoup de millions de soudetirée de plantes marines qui croissent sur les côtesd'Espagne, l'obtiennent maintenant de fabriquesplacées à côté d'elles et qui exploitent le produitinépuisable de nos mers.A la vérité l'impôt dont est chargé le sel qui seconsomme dans l'intérieur auroit anéanti cette industriedès sa naissance, puisque le sel lui-mêmeavant toute préparation auroit été plus cher que lasoude étrangère; aussi le gouvernement livre-t-ildepuis long-temps en franchise aux fabricants deBUFFON. COMPT,F,M. T. II. 17


»58 PHYSIQUE, CHIMIE,soude les sels qui leur sont nécessaires: on comprendque des hommes peu délicats ont dû êtretentés d'abuser de cet avantage ; l'énormité de l'impôtfait qu'il y a plus de profit à revendre en fraudece sel qu'à l'employer à sa destination ; et l'administrationauroit voulu obtenir un moyen qui, sansempêcher que le sel qu'elle livre ne fournît de lasoude, le rendît cependant impossible à détournerpour la consommation ordinaire, et la dispensâtainsi de la surveillance qu'elle est obligée d'exercersur ceux auxquels ellel'a livré.il y avoit une autre question fort intéressantepour l'art de la verrerie.On peut employer pour faire le verre le sulfatede soude résultant de la première opération quel'on fait sur le sel marin au moyen de l'acide sulfurique,et sans avoir besoin de décomposer ce sulfateet d'en extraire la soude, extraction qui exigedes travaux compliqués et beaucoup de combustibleet de main-d'œuvre. L'économie s'élèverait à 70 pourcent de la dépense que le fabricant de verre faitmaintenant pour se procurer la soude pure, et ladiminution de prix qui en résulteroit pour le verrede vitre iroit à 3o pour cent; mais le sulfate desoude peut aisément être converti en sel marin aumoyen de muriate de chaux, et il s'agissoit encore


ET MÉTÉOROLOGIE. 259de savoir si l'impôt sur le sel ne rendroit pas cetteconversion plus lucrative que l'emploi du sulfatedans la verrerie.Les calculs de MM. Thénard et Darcet ont prouvéque le profit seroit trop peu considérable pour tenterles fabricants, tandis que la permission accordéedepuis long-temps aux fabricants de souded'exporter le sulfate donnoit aux verriers étrangersun grand avantage sur les nôtres. Le seul moyenavantageux de fraude auroit été que les fabricantsde soude eussent livré au commerce du sulfate desoude qui auroit contenu encore une quantité notablede sel marin en nature. Mais il est aisé deconstater ce fait en décomposant jusqu'à une certaineproportion le sulfate de soude par le muriatede chaux, et en essayant le résidu par le sulfate debaryte. Les commissaires de l'Académie ont indiquédes moyens précis de s'assurer qu'il n'y restepas un dixième de sel, proportion dans laquelle lafraude ne seroit plus profitable.Sur ce rapport le gouvernement a accordé auxfabricants de verre des facilités que l'on réclamoitpour eux.Une troisième question de chimie, qui intéressoitbeaucoup le commerce dans ses rapports avec lefisc, étoit de déterminer par des moyens sûrs les'7-


:>.6oPHYSIQUE, CHIMIE,proportions respectives de laine et de fil, de cotonou de soie, qui entrent dans les étoffes mêlées deces substances ; le motif de cet intérêt est pris de laloi des douanes qui accorde des primes très différentesà l'exportation des tissus de laine pure oumélangés des autres substances.S'il ne s'agissoit que d'étoffes blanches et composéesd'une part de laine, et de l'autre de fil ou decoton, l'ébullition prolongée dans la soude caustiqueen dissolvant toute la laine donneroit unmoyen simple de résoudre le problème; mais lasoie, matière animale, se dissout comme la lainedans les alcalis caustiques, et le coton ou le fildeviennentsolubles lorsqu'ils ont été teints par certainsprocédés.On n'a donc point encore découvert de procédéqui réponde à tous les cas.Lors de la reconstruction du théâtre del'Odéonaprès son dernier incendie, l'administration exigea,pour retarder ou amoindrir les effets d'un nouvelaccident, que le théâtre fût séparé de la salle parun gros mur qui n'auroit d'ouverture que celle dela scène; et l'on avoit proposé de compléter cettemesure au moyen d'un rideau de tôle que l'onpourroit baisser au moment où soit le théâtre, soitla salle, prendroit feu. L'on espéroit de pouvoir


ET MÉTÉOROLOGIE. 261préserver ainsi l'une des deux moitiés du bâtiment ;mais M. Darcet fitobserver que ce rideau prendraitbientôt une chaleur rouge, qu'il deviendroit ainsilui-même un moyen de propager l'incendie, qu'enmême temps il empêcherait de jeter de l'eau de lapartie intacte de l'édifice dans la partie enflammée ;enfin, et sur-tout, qu'il empêcherait un courantd'air qui se manifeste d'ordinaire quand c'est lethéâtre qui prend feu de la salle vers le théâtre, etqui en refoulant les flammes du côté où elles ontcommencé est très favorable soit à la sortie desspectateurs, soit même à la préservation de la salle.11 proposa d'y substituer un rideau de toile métalliquequi, sans avoir aucun de ces inconvénients,suffirait pour empêcher les flammèches et les débrisenflammés de tomber d'une partie de l'édifice dans.l'autre.Cette mesure, adoptée en partie dans le temps àl'Odéon, vient de l'être complètement au théâtre dela Nouveauté, et il est à désirer qu'elle le soit bientôtdans toutes les salles de spectacle. Dans le casoù un incendie éclaterait de manière à ce que l'ondésespérât de sauver la partie incendiée, M. Darcetrecommande d'y ouvrir à l'air autant d'issues qu'ilsera possible,afin de déterminer plus puissammentle courant dont il attend un effet si favorable pourla partie opposée.


MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE.ANNÉE 1809.M. Guyton nous a fait connoître une nouvelleforme cristalline du diamant. On sait que celles queprésente le plus souvent cette pierre précieuse sontl'octaèdre régulier et le dodécaèdre à faces rhomboidales.La variété que notre confrère a découverteest formée de deux demi-sphéroïdes dont la positionretournée, imparfaitement terminée à l'une de sesextrémités, présente de l'autre des angles rentrantstrès prononcés qui caractérisent la forme nomméehémitrope par M. Haùy.Le même membre, ayant porté ses recherchessur la ténacité des métaux, a été conduit à de nouvellesexpériences sur la diminution de pesanteurspécifique du plomb par l'écrouissement constatéepar Muschembroeck, et dont la cause étoit restéeinconnue. Des flans de ce métal ont été frappés enviroles; et lorsque les coins et les viroles étoientassez justes pour qu'il ne pût s'échapper aucunebavure, et pour que le plomb ne pût pas obéir à lafacilité qu'il a de se ramollir, onl'a vu, comme tousles autres métaux, augmenter de"pesanteur spécifiquepar cette opération.


MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE. 263M. Sage a fait part à l'Institut de ses recherchessur l'émeri et sur les substances qui pourroient lesuppléer dans le polissage. Il résulte de ses observationsque la chrysolithe de volcans pulvérisée peutremplacer l'émeri ; tous les artistes qui l'ont employéeont été satisfaits des effets qu'ils en ontobtenus.Les observations d'où la géologie peut tirer lesplus grands résultats sont sans contredit celles quiont pour objet les animaux fossiles, mais particulièrementles animaux terrestres. M. Cuvier a continuéles travaux qu'il a entrepris sur cette importantematière. Il a terminé conjointement avecM. Brongniart la géographie minéralogique desenvirons de Paris, dont il a déjà été donné unaperçu dans le rapport des travaux de l'Institut faitl'année dernière. Il a ensuite porté ses recherchessur les brèches osseuses des côtes de la Méditerranée.Ces roches singulières, qui se trouvent à Gibraltar,près de Terruel en Aragon, à Cette, à Antibes,à Nice, près de Pise, en Corse, sur les côtesde la Dalmatie, et dans l'île de Cérigo, ont été forméesdans des fissures du calcaire compacte quiconstitue le sol principal de ces divers lieux, et ellessont toutes composées des mêmes éléments: c'estun ciment de couleur rouge de brique qui lie con


264 MINÉRALOGIEfusément de nombreux fragments d'os et de débrisdu calcaire où ces brèches sont renfermées. Les oscontenus dans ces rochers appartiennent tous à desanimaux herbivores la plupart connus, et mêmeencore existants sur les lieux ; ils sont mélangés àdes coquilles de terre ou d'eau douce: ce qui porteraità penser que ces brèches sont postérieuresau dernier séjour de la mer sur nos continents,mais fort anciennes cependant relativement à nous,puisque rien n'annonce qu'il se forme encore aujourd'huide ces brèches, et que même quelquesunes, comme celles de Corse, renferment des animauxinconnus.Les terrains d'alluvion contiennent aussi des osde rongeurs ; on en a découvert dans les tourbièresde la vallée de la Somme avec des bois de cerf et destêtes de bœuf, et dans les environs d'Azof, près dela mer Noire. Ces os ont appartenu à des espèces decastors : les premiers ressemblent assez à ceux ducastor commun; les autres, qui forment une têtecomplète, proviennent d'une espèce beaucoup plusgrande que celle que nous connoissons ; et M. Fischer,qui a découvert cet animal, lui donne le nomde trogontherium, que M. Cuvier adopte commenom spécifique.Des débris de rongeurs ont aussi été trouvés dansles schistes. On en a décrit de trois espèces. M. Cu-


ET GÉOLOGIE.2Ô5vier en a vu la figured'une que quelques auteursregardoient comme ayant appartenu à un cochond'Inde,et d'autres à un putois. M. Cuvier a bienreconnu sur ce dessin les caractères d'un rongeur;mais il n'a pu en déterminer le genre, et conséquemmentl'espèce.Parmi les os fossiles de ruminants trouvés dansles terrains meubles M. Cuvier a reconnu une espèced'élan différente de celle que nous connoissonsaujourd'hui. Les débris de.cet animal ont été recueillisen Irlande, en Angleterre, près du Rhin,et aux environs de Paris, dans des lits de marne peuprofonds, et qui paroissent avoir été déposés dansl'eau douce. D'autres bois, découverts abondammentaux environs d'Étampes clans du sable surmontépar du calcaire d'eau douce, ont montrél'existence d'une petite espèce de renne qui paroîtne plus se trouver actuellement. M. Cuvier a deplus observé des restes de bois de chevreuil, dedaim, et de cerf, qui ne lui ont point paru différeressentiellement des bois de nos espèces connues.« Rien, dit l'auteur, n'est plus abondant: les alluvionsrécentes en ont toutes fourni; et, si l'on netrouve pas sur ces bois fossiles beaucoup de témoignages,c'est que ne se montrant qu'à de très petitesprofondeurs ils n'ont rien présenté d'assez remarquablepour être notés. »


266 MINÉRALOGIEDans les fossiles de ruminants à cornes creusesil a reconnu des crânes d'aurochs découverts surles bords du Rhin, sur les bords de la Vistule, dansles environs de Cracovie, en Hollande, et dansl'Amérique septentrionale : seulement ces crânessurpassent en grandeur ceux de l'aurochs; mais,comme l'observe M. Cuvier, cette différence pourraitbien être due à l'abondance de nourriturequavoient autrefois ces animaux lorsqu'ils disposoientà leur gré des vastes forêts et des gras pâturagesde la France et de l'Allemagne.Il existe une autre sorte de crâne fossile qui nediffère du crâne de nos bœufs domestiques que parune taille plus grande et par des cornes autrementdirigées. Ces crânes ont été trouvés dans la valléede la Somme, en Souabe, en Prusse, en Angleterre,en Italie. «-Si l'on se rappelle, dit M. Cuvier, queles anciens distinguoient en Gaule et en Germaniedeux sortes de bœufs sauvages, l'urus et le bison,ne sera-t-on pas tenté de croire que l'une des deuxétoit celle de cet article, qui, après avoir fourninos bœufs domestiques, aura été extirpée dans sonétat sauvage, tandis que l'autre, qui n'a pu êtredomptée, subsiste encore en très petit nombre dansles seules forêts de la Lithuanie? »On rencontre aussi dans les terrains meubles desos de chevaux et de sangliers : les premiers accom-


ET GÉOLOGIE. 267pagnent presque toujours les éléphants fossiles, etse sont trouvés avec les mastodontes, les tigres, leshyènes, et les autres os fossiles découverts dans lesterrains d'alluvions ; mais il n'a point été possiblede reconnoître si ces os appartenoientà une espècede cheval différente de notre espèce domestique.Les os de sangliers ont été tirés pour la plupart destourbières , et n'offrent aucun caractère qui lesdistingue des os du sanglier commun.On a encore trouvé d'autres os que M. Cuvier areconnus avoir appartenu à une espèce inconnuede lamantin : ils ont été découverts dans les couchesde calcaire marin grossier qui bordent les rives duLayon dans les environs d'Angers, et ils étoientmêlés à d'autres os, dont les uns paraissent provenird'une grande espèce de phoque et les autres d'undauphin.Les squelettes de trois espèces de quadrupèdesovipares fossiles, conservés dans des schistes calcaires, ont aussi fait l'objet des recherches deM. Cuvier.Le premier a été trouvé dans les schistes d'Oeningen,situés sur la rivedroite du Rhin, à sa sortiedu lac de Constance. Il avoit été décrit et figurécomme le squelette d'un homme antédiluvien; maiscette erreur avoit été réfutée. M. Cuvier a recherchéle genre auquel il appartenoit, et il a prouvé par


268 MINÉRALOGIEune suite d'observations ostéologiques que ce reptileavoit de l'analogie avec les salamandres, et qu'ildevoit entrer dans le genre protée.Le second, trouvé également dans les schistesd'Oeningen, paroît avoir appartenu au genre crapaudet se rapprocher du bufo calamita.Le troisième et le plus singulier, qui a été découvertdans les carrières de l'Altmuhl, près d'Aichstedtet de Pappenheim en Franconie, et qui avoit étédécrit et figuré par Colini dans les Mémoires del'Académie de Manheim, est regardé par M. Cuviercomme ayant appartenu à une espèce de saurien.La longueur de son cou, celle de sa tête, son longbec armé de dents aiguës, ses longs bras, indiquentque cet animal se nourrissoit d'insectes, et qu'il lesattrapoit au vol ; enfin la grandeur de ses orbitesdoit faire supposer qu'il avoit de très grands yeux,et qu'il étoit un animal nocturne. Il n'existe actuellementsur le globe aucun reptile connu des naturalistesqui ait le moindre rapport avec cet habitantde l'ancien monde.M. Cuvier a publié en outre un supplément à sesmémoires sur les fossiles de Montmartre, dans lequelil donne la figureet la description d'un ornitholithebeaucoup plus complet que ceux qui ontété publiés jusqu'à présent. Il est probable qu'ilappartenoit à la classe des gallinacés, et l'espèce


ET GÉOLOGIE. 269de ce pays-ci avec laquelle il a le plus de ressemblancepar la grandeur est la caille commune.M. Sage nous a donné la description de quelquescarpolithés ou fruits pétrifiés. L'un étoit une amandede noix devenue calcaire, et trouvée à Lons-le-Saulnier; un autre paroît avoir été le fruit d'unmuscadier sauvage qui croît à Madagascar et dansquelques unes des Moluques, sa substance étoitaussi devenue calcaire ; le troisième paroît avoirappartenu à un genre voisin du durion, il s'esttransformé en jaspe. A ces faits nouveaux M. Sagejoint quelques unes des observations qui avoientdéjà été faites surles carpolithes,etil conclutquelesfruits pétrifiés qu'on trouve dans nos climats sontexotiques. Il entre de plus dans des détails chimiquesau moyen desquels il explique comment cespétrifications se sont opérées.ANNÉE 1810.MM. Brongniart et Cuvier, dans leur travail généralsur les terrains qui environnent Paris, dontnous avons rendu compte il y a deux ans, avoientdécouvert autour de cette ville des couches trèsétendues de pierres, qui ne recèlent que des coquillesd'eau douce, et qui paraissent avoir été déposéesdans des lacs et des étangs, tandis que l'oncroyoit jusqu'à présent que tous les terrains secon-


iyoMINÉRALOGIEdaires avoient été formés dans le sein des mers; unepartie de ces couches est même séparée de l'autrepar des bancs marins intermédiaires, ce qui sembleraitprouver que la mer a fait une irruption surles continents qu'elle avoit précédemment abandonnés,et confirmerait les traditions de déluge siuniversellement répandues parmi les peuples.M. Brongniart étendan t ses recherches a reconnuce terrain formé dans l'eau douce en beaucoup delieux de France très éloignés de Paris; il a présentéles caractères minéralogiques qui le distinguent,et les caractères zoologiques des coquilles qu'il recèle;il a fait voir qu'un grand nombre de ces coquilles, quoique appartenant à des genres connuset certainement d'eau douce, sont cependant d'espècesinconnues; et comme il se trouvoit dans lenombre quelques coquilles dont les analogues ontété rapportées jusqu'à présent à des genres marins,il a fait voir que c'étoit faute d'attention qu'on lesavoit laissées dans ces genres, et que les coquillesconnues qui portent les mêmes caractères viventau moins aux embouchures des fleuves. Enfincomme dans un très petit nombre de lieux quelquescoquilles véritablement marines sont mêléesà des coquilles d'eau douce, M. Brongniart a montréque c'est toujours au plan de réunion des deuxterrains que ce phénomène arrive, et il n'y a rien


ET GÉOLOGIE.27 Id'étonnant qu'immédiatement après les révolutionsqui changèrent la nature des eaux les derniersrestes de la mer aient pu être mélangés avec lespremiers produits de l'eau douce, ou réciproquement.Ce mémoire établit d'une manière invincible unfait entièrement nouveau pour l'histoire du globe.M. Cuvierl'a appuyé par un autre mémoire surles os fossiles de reptiles et de poissons des carrièresà plâtre des environs de Paris. Ses recherches, quiterminent le travail qu'il continue depuis dix oudouze ans sur les ossements dont nos plâtrières sontremplies, lui ont appris que, parmi les nombreuxquadrupèdes de genres inconnus qui ont fournices os, il y avoit aussi une espèce de ces tortuesmolles, appelées depuis peu trionyx, par M. Geoffroy,et qui vivent toutes dans les rivières; deuxautres espèces de tortues d'eau douce ordinaire;une sorte de petit crocodile, et quatre espèces depoissons, dont trois sont certainement de genresqui vivent dans l'eau douce, et dont le quatrièmepourroit aussi très bien y avoir vécu. On n'a jamaistrouvé aucun débris de reptile ni de poisson distinctementmarins.Or sur les bancs de gypse et de marne qui recèlentces ossements, et où l'on trouve aussi des coquillesd'eau douce et des troncs pétrifiés de pal-


272 MINÉRALOGIEmiers, reposent des bancs considérables remplisd'une quantité innombrable de produits de la mer;et sur ceux-ci l'on trouve d'autres bancs d'eaudouce, mais dont les os et les coquilles ne sont pasles mêmes que dans les bancs inférieurs. Il est impossibled'avoir des indices plus manifestes et plusclairs d'une révolution.De toutes les pierres formées dans l'eau doucela plus remarquable est celle que l'on appelle marbrede Châleau-Landon, et dont on construit l'arc detriomphe de l'Etoile. M. Brongniart y a reconnules caractères minéralogiques de cette formation,et, en y regardant de près, il a fini par y en trouverles coquilles.En Auvergne, M. Brongniart a observé Je terraind'eau douce recouvert par les produits des volcanséteints, si nombreux dans ce pays-là.En Alsace et auprès d'Orléans, MM. Hammer etBigot de Morogues ont trouvé dans ce terrain lesossements des mêmes genres de quadrupèdes queM. Cuvier a déterminés aux environs de Paris.MM. Sage et de Cubières ont rappelé l'attentionde l'Institut sur un fait particulier de géologie, dontbeaucoup de savants se sont déjà occupés, et qui adonné lieu à des conjectures sans nombre.Il s'agit d'un petit temple auprès de Pouzzoles,dont il reste trois colonnes, percées toutes les trois à


ET GÉOLOGIE. 273la même hauteur, et à trente pieds au-dessus du niveauactuel de la mer, par des dails ou pholades,sorte de coquillages qui savent pénétrer dans l'épaisseurdes pierres plongées sous l'eau.Ces colonnes ont^elles été tirées d'une carrièreplacée pendant quelque temps sous les eaux? Maispourquoi auroit-on choisi des pierres cariées, etcomment les trous seraient-ils tellement de niveau?Le temple a-t-il été successivement abaissé et relevé,dans ce terrain volcanique sujet à tant de mouvementsirréguliers, de manière à rester quelquetemps baigné par la mer? Mais comment après desemblables secousses ces colonnes seraient-elles restéesdebout?Enfin les éruptions volcaniques n'ont-elles pointproduit quelque digue qui, retenant les eaux, auraenfermé pendant un temps ce temple dans un petitlac, et qui, s'étant rompue, aura rendu le terrain àsa sécheresse naturelle?Il y a des difficultés à toutes ces explications. Laplus grande, relativement aux deux dernières, estde savoir comment de telles révolutions ont pu avoirlieu depuis la construction du temple sans laisserde traces dans la mémoire des hommes; car l'onparle bien d'une éruption arrivée en i528, où seforma la colline appelée encore aujourd'hui Monte-Nuovo, et où la mer envahit une partie du rivage;BUFFON. COMPLF.M. T. II.l8


:*74 MINÉRALOGIEmais on ne fait pas mention de deux révolutionssuccessives.M. de Cubières a trouvé près de ce temple desfragments d'une variété particulière de marbre,dontil a lu à l'Institut la description et l'analyse;ilest blanc, demi-transparent, reçoit un beau poli,se dissout difficilement par l'acide nitrique, laissejaillir des étincelles par le choc, et contient 22 centièmesde magnésie.M. de Cubières, qui le nomme marbre grec magnésien,pense que c'est celui don t les anciens se servoientpour construire les temples sans fenêtres, où l'on nerecevoit le jour que par la transparence des murs.M. Sage a donné des expériences propres à faireconnoître la composition de la plombagine, ou dece minéral avec lequel on fabrique les crayons anglpis.Selon ce chimiste, elle ne contiendroit pointde fer, mais seulement une matière charbonneuse,mêlée d'un dixième d'alumine, et le cinder ou charbonfossile de Saint-Symphorien, près de Lyon, seroit,de tous les minéraux connus, celui qui s'enapprocherait le plus.M. Daubuisson, ingénieur des mines, ayant présentéà l'Institut un mémoire sur certaines combinaisonsnaturelles de l'oxyde de fer avec l'eau,M. Sage a rappelé diverses analyses, où il avoitprouvé que l'hématite brune et l'ocre ou bol jaune


ET GÉOLOGIE. 275contiennent,l'une 1 2 centièmes, l'autre un dixièmede leur poids-d'eau.Le même M. Daubuisson a fait connoître un gisementsingulier d'une mine de plomb. C'est unecouche très étendue de galène ou plomb sulfuré,coft tenue dans un terrain coqUillier de formationque cet ingénieur regarde comme récente, tandisque les matières métalliques sont plus ordinairementdanslesterrainsd'ancienneformation.M. Daubuissona observé cette mine près de Tarnowitz, enSilésie. Pour connoître réellement l'âge des couchescalcaires qui la renferment, il faudrait déterminerles espèces de coquilles qui les remplissent.ANNÉE 1811.Feu M. Abildgaard, professeur à Copenhague, adécouvert, il y a quelques années, une combinaisond'alumine et d'acide fluorique, inconnue jusqu'alorsdes minéralogistes. M. Bruun-Neergardt,gentilhomme de la chambre du roi de Danemarck,a présenté une note historique sur cette substancetrès rare, originaire de Groenland : il décrit desmorceaux où elle est entourée d'autres minérauxqui font présumer le genre de terrain qui la récèle.M. Leliévre, membre de l'Institut, a donné uneautre note sur la découverte d'un corindon gris,qu'il a faite dans quelques morceaux de roches gra-,8


276 MINÉRALOGIEnitiques qui lui ont été envoyés de Piémont parM. Muthuon , ingénieur des mines.M. Brongniart, correspondant, a complété ladescription minéralogique des environs de Paris,qu'il avoit entreprise avec M. Cuvier, par un nivellementdes principales hauteurs du canton qu'il adécrit. On en trouvera les résultats dans l'ouvrageque ces deux naturalistes viennent de publier encommun sur ce sujet, et qui entrera aussi dansla collection des recherches sur les ossements fossilesque M. Cuvier doit mettre au jour d'ici à quelquesmois.M. Dauxion-Lavaysse, ancien colon de Sainte-Lucie, a présenté une description géologique de laTrinidad et des autres îles voisines de l'embouchurede l'Orénoque. Ces dernières sont basses, et souventinondées par le fleuve dont elles paraissentdes alluvions. La Trinidad a un lac qui produitbeaucoup de bitume, et vers la côte méridionale lamer vomit aussi de cette substance en deux endroits.Deux monticules voisins ont de petits cratères, et répandent des vapeurs sulfureuses. On ytrouve du soufre, de l'alun, et du vitriol cristallises.Dans une autre partie de l'île est une mine deplombagine et de charbon de terre. Du reste la Trinidadressemble tellement à la partie voisine ducontinent, par la nature de ses roches, qu'il y a


ET GÉOLOGIE. 277tout lieu de croire, suivant M. Lavaysse, qu'elle y atenu autrefois. Tout y est schiste gris ou argile ; lecalcaire et le gypse, si abondants aux Antilles, ysont fort rares.ANNÉE 1812.Les dépouilles fossiles des corps organisés occupenttoujours les naturalistes.M. Traullé, d'Abbeville, a présenté à l'Institut latête pétrifiée d'un petit cétacé qui paroît avoirappartenu au genre de la baleine, et que l'on a déterréedans les fouilles du bassin d'Anvers ; M. lecomte Dej ea n, sénateur, en a adressé u ne semblable,et du même lieu, à l'administration du Muséumd'histoire naturelle. On y a trouvé aussi une grandequantité de vertèbres d'animaux de la même classe,et beaucoup de coquilles.M. Traullé a encore présenté une portion de mâchoireinférieure de rhinocéros, trouvée dans lessablonnières de la vallée de la Somme, dans les environsd'Abbeville.M. Daudebart deFérussac, jeune militaire, transportésuccessivement par les devoirs de son étatdans les parties les plus opposées de l'Europe, a profitéde ses moments de loisir pour en observer lesfossiles ; et comme il a fait une étude particulièredes coquilles de terre et d'eau douce, il s'est atta-


2-]SMINERALOGIEché de préférence à cette sorte de terrain découverteaux environs de Paris par MM. Brongniart etCuvier, laquelle ne contenant que des coquillesd'eau douce a paru à ces naturalistes ne point devoirson origine à la mer, comme la plupart desautres terrains secondaires.M. de Férussac a trouvé des terrains semblables,renfermant les mêmes coquilles et composés desmêmes substances, dans le midi de la France, dansplusieurs provinces d'Espagne, en Allemagne, etjusqu'au fond delà Silésie; en sorte qu'il n'est guèredouteux qu'il ne s'en soit formé par-tout.«M. de Férussac, pour donner plus de précisionà ses observations, s'est occupé des coquilles ellesmêmes,en a déterminé les espèces avec beaucoupde rigueur, et a donné de bonnes observations surles variations qu'elles peuvent subir, et plusieursidées heureuses sur les caractères qui peuvent endistinguer les genres.M. Cuvier vient de mettre au jour, en quatrevolumes in-4°, avec beaucoup de planches, \e Recueilde tous ses mémoires sur les Ossements Fossilesde quadrupèdes. Il en décrit soixante-dix-huitespèces, dont quarante-neuf sont bien certaine^ment aujourd'hui inconnues des naturalistes, etdont seize ou dix-huit sont enco.ee douteuses. Lesautres os trouvés dans des terrains récents parois-


• * • ' • • •ET GÉOLOGIE. 279sent appartenir à des animaux connus. Dans undiscours préliminaire l'auteur expose la méthodequ'il a suivie et les résultats qu'il a obtenus. Il luiparoît suivre des faits qu'il a constatés que la terrea éprouvé plusieurs grandes et subites révolutions,dont la dernière, qui ne remonte pas au-delà decinq ou six m ille ans, a détruit les pays habités alorspar les espèces actuellement vivantes, et offert pourhabitation aux foiblesrestes de ces espèces des continentsqui avoient déjà été habités par d'autresêtres qu'une révolution précédente avoit abymés, etqui reparurent dans leur état actuel lors de cettedernière révolution.ANNÉE 1813.La méthode de l'observation positive devient deplus en plus dominante en géologie, et l'on acquiertchaque jour des notions plus précises sur les terrainsqui composent les divers pays, sur les loisgénérales de leur superposition, et sur les corpsorganisés dont ils renferment des restes.Les couches pierreuses qui ne recèlent, que descoquilles d'eau douce, dont MM. Cuvier et Brongniartont découvert une si grande étendue auxenvirons de Paris, et que MM. Brongniart, Omaliusde Halloy, Marcel de Serres, Daudebart de Férussac,etc., ont retrouvées dans une infinité d'autres


280 MINÉRALOGIEcontrées, ont particulièrement excité l'attention, etont engagé les naturalistes à faire des recherchespour distinguer les coquilles d'eau douce de cellesdes eaux saumâtres et des eaux salées. MM. de Férussacet Marcel de Serres ont donné chacun unmémoire sur cette question. Les espèces seules, ditle premier, peuvent être alléguées en preuve, etnon les genres, car la plupart des genres ont desespèces marines et fluviatiles; les variétés même nesont pas indifférentes à étudier, car la même espèce,d'après les observations de l'auteur, change quelquefoisde forme au point de devenir méconnoissablepour quiconque n'auroit pas observé ses différentspassages, et la difficulté augmente quand ils'agit de déterminer les coquilles à l'état fossile, oùl'épiderme, les poils, et tous les autres caractèresde peu de solidité ont disparu.Il est des espèces, sur-tout parmi les operculées,qui vivent dans les deux eaux, et que l'on trouve enconséquence plus abondamment vers l'embouchuredes fleuves; et l'on observe parmi les fossiles destraces de cette habitude, car nos bancs d'eau doucecontiennent en certains endroits une espèce depotamide, genre qui a coutume de se tenir ainsi versles embouchures.M. Marcel de Serres a visité exprès les étangs d'eausaumâtre des bords de la Méditerranée pour exa-


ET GÉOLOGIE. 281miner les coquilles qui les habitent ; il y a observédes paludines fort semblables à celles qui formentde grands bancs aux environs de Mayence, où l'ontrouve avec elles plusieurs coquilles marines. Ungéologiste, qui avoit confondu ces paludines avecun des bulimes de nos terrains d'eau douce, enavoit conclu que ces derniers sont aussi marins queles autres ; mais M. de Serres relève cette méprise,et montre qu'il s'agit non seulement d'espèces, maisde genres différents.Cet observateur a recherché les limites de cesvoyages des animaux et des plantes de l'eau saléevers l'eau douce, et réciproquement: il a reconnuqu'aucun animal ni même aucune plante ne résisteà une salure de huit degrés; il a distingué,soit parmi les animaux, soit parmi les plantes, lesespèces qui ne se plaisent aux bords de la mer qu'àcause du sable qui s'y trouve, et qui peuvent vivreaussi dans d'autres endroits sablonneux; celles quin'y sont attirées et retenues que par le sel, et quivivent très bien près ou dans les lacs ou étangssalés de l'intérieur des terres; et enfin celles qui ontbesoin de la mer telle qu'elle est, et s'en écartentpeu.Ces observations prouvent qu'il n'est pas toujoursfacile de décider si une coquille est marine ou d'eaudouce: mais elles n'infirment en rien le fait des


'(SaMINÉRALOGIEcouches immenses où il n'existe que des coquillesbien reconnues pour être d'eau douce ; elles expliquentmême comment l'on trouve aussi de ces coquilleséparses dans des bancs marins.M. de Serres range les lignites ou bois bitumiuisésparmi les fossiles qui sont le plus souventmêlés de coquilles de terre et d'eau douce; ce quiachève de rendre vraisemblable que ces bois ont crûdans les lieux mêmes où ils sont aujourd'hui enfouis,et s'accorde avec tous les autres faits quimontrent que la surface actuelle du globe étoit àsec et peuplée d'animaux et de végétaux terrestresavant la dernière irruption des mers.Deux jeunes et habiles naturalistes, MM. Desmaretset Léman, ont retrouvé dans les terrainsd'eau douce de nos environs jusqu'à des coquillesde ces petits entomostracés qu'on a nommés cypris,et jusqu'à des graines du genre de plante connusous le nom de chara. Avant eux on prenoit cesgraines pour des coquilles, et on leur avoit imposéle nom de gyrogonites.Le système géologique dés environs de Paris, quia fait l'objet principal des observations et des découvertesde MM. Brongniart et Cuvier, est aujourd'huiétudié avec une grande attention par beaucoupde savants naturalistes. MM. de Tristan etBigot deMorogues en ont décrit avec soin les parties


ET GÉOLOGIE. 283qui avoisinent la Loire; et M. Omalius de Halloy,ingénieur des mines, en s'aidant de leurs rechercheset de celles qu'avoit faites plus anciennement"notre confrère M. Desmarets , s'est occupé d'entracer exactement toutes les limites et d'en dresserune carte. Les couches de ce système, déposées surla craie, représentent un trapèze irrégulier et curvilignedont le côté méridional, parallèle à la Loire,longe cette rivière au sud depuis Çosne jusqu'audessousde Blois; le côté oriental passe près desvilles de Montargis, de Nemours, deMontereau , deVillenoxe, de Sézanne, d'Épernay, de Laon, deCrépy, de La Fère; le côté septentrional près decelles de Chauny, de Noyon, de Gompiègne, deClermont, deBeaumont, deChaumont, et de Gisors;enfin le côté occidental descend par Mantes,Houdan, Épernon, Auneau, et longe le Loir jusqu'auprèsde Vendôme, d'où il va rejoindre la Loireà Blois. Tout cet espace est entouré de craie; et lacraie, dans laquelle M. de Halloy a reconnu troismodifications bien distinctes, est entourée ellemême,excepté vers la mer, d'un calcaire compacteplus ancien qu'elle qui forme une grande partie duBèrri, de la Bourgogne, et de la Lorraine jusqu'auxVosges, et qui reparaît au-delà de la Forêt-Noire,jusqu'en Franconie et en Hesse. Les formations dusystème de Paris étendent sur cette craie diverses


284 MINÉRALOGIEramifications; et l'agriculture, l'industrie, toutesles ressources de chaque lieu, sont souvent déterminéespar l'ordre géologique de son sol. M. deHalloy n'a pas mis moins de courage que de sagacitéà recueillir les matériaux de son travail, car il aparcouru tout ce pays à pied, visitant les lieux lesplus inaccessibles quand il pouvoit en espérerquelque instruction, et ne se laissant effrayer ni parle mauvais temps ni par les mauvais gîtes.M. Brongniart, correspondant de l'Institut, avisité une partie de la Fran ce également fort intéressantepour la géologie, celle qui forme aujourd'huile département de la Manche; et M. de Halloy,qui s'y est rendu après lui, a confirmé et complétéune partie de ses observations. De la descriptionque M. Brongniart donne des roches de ce payset de leur position mutuelle, il résulte que ce quel'on y regardoit comme des granités proprementdits appartient à cet autre genre de roche nommésyénile par M. Werner, et caractérisé par l'amphibolequi entre dans sa composition aussi bien quepar sa formation beaucoup plus récente que celledu vrai granité. Ces syénites de la Manche reposentsur des schistes et sur d'autres roches bien postérieuresau granité; il paroît même qu'en certainsendroits elles ont sous elles du calcaire contenantdes débris de corps organisés, fait qui seroit ana-,


ET GÉOLOGIE. 285logue à ceux que M. de Buch a observés en Norwége,et d'où l'on pourrait conclure qu'il y a encore eudes précipitations de roches cristallisées après lamanifestation de la vie dans les eaux qui enveloppoientanciennement le globe.M. Brongniart, qui s'occupe d'un traité généralde géologie, a présenté le plan d'après lequel il sepropose d'y distribuer les roches, c'est-à-dire cesagrégations de minéraux qui composent la croûteactuelle du globe telle que nous la connoissons. Yappliquant les principes reconnus aujourd'hui partous les naturalistes, il veut que les bases et les détailsde toute sa méthode reposent sur des caractèrespris dans les roches mêmes et qu'elles portentavec elles, et il rejette tous ceux que l'on pourroitprendre de leur position mutuelle sur le globe,laquelle appartient à leur histoire mais non pas àleur division systématique ; il» sépare des roches etlaisse avec les minéraux simples les matières minéralesqui paroissent simples à l'œil nu, et dontl'hétérogénéité ne se manifeste que par des lavageset d'autres opérations qui, sans pouvoir être appeléesdes analyses chimiques, altèrent cependantl'apparence et le tissu de ces matières : tels sont lesschistes, l'argile, etc. Les roches ainsi réduites,ou, comme s'exprime M. Brongniart, les rochesmélangées, se subdivisent en cristallisées et en agré-


286 MINÉRALOGIEgées; les premières ont leurs parties en proportionsà-peu-près égales, ou bien l'une de ces parties ydomine sur les autres : dans le premier cas on établitles genres selon les substances essentielles, c'est-àdirequi s'y trouvent constamment; dans le secondselon la base, c'est-à-dire la substance dominante:et dans l'un et l'autre cas le nombre des substancescomposantes et la structure résultante de leur moded'union serventà distinguer les espèces. Les rochesagrégées se divisent selon que le ciment qui lesunit est plus ou moins apparent, et selon la naturede ce ciment et celle des grains qu'il empâte.Dans ce travail si important pour servir de baseà l'histoire proprement dite des roches l'auteur aconservé presque par-tout les noms que leur a donnésM. Haùy dans l'arrangement qu'il en a fait auMuséum d'histoire naturelle.M. Brongniart a aussi donné connoissanceà l'Institutde la division qu'il croit devoir établir entreles roches considérées par rapport aux époques deleurs formations et aux restes de corps organisésqu'elles renferment, et qui sont les indices lesmieux marqués de ces époques. Au-dessous de tousles autres se trouvent les terrains granitiques sanscorps organisés, les plus anciens que nous connoissions; les terrains qui les recouvrent ne contiennentencore des débris d'êtres organisés qu'en petit nom-


ET GÉOLOGIE. 287bre et presque tous de la classe des zoophytes; unetroisième série, celle des terrains syénitiques, n'enprésente plus, comme si leur production avoit étémomentanément interrompue ; dans la quatrièmecommencent à paroître les coquilles, et principalementcelles que l'on a appelées cornes dammon,et qui appartiennent à la famille des sèches; lescinquième et sixième classes de terrains se caractérisentpar les gryphites et les cérites, qui dominentparmi leurs coquilles. Enfin il est des terrainsdont la distribution est tellement irrégulière qu'onne peut les classer dans l'ordre des temps; ce sontles roches trappéenn es d'une part, et de l'autre cellesqui résultent des éjections des volcans. Dans tousces groupes sont mêlés des terrains de transport,produits des mouvements violents qu'occasionoientles révolutions successives, et indicateurs assezjustes du moment où chacune a commencé.ANNÉE 1814.Les chutes de pierres de l'atmosphère, depuisqu'on est averti de leur réalité, s'observent si souventque ce qu'elles auront bientôt de plus étonnantsera la longue incrédulité où l'on a été à leurégard. Encore cette année il y en a eu une très remarquabledans le département de Lot-et-Garonne,le 5 de septembre, comme à l'ordinaire par un


288 MINÉRALOGIEbeau temps, avec une forte explosion et un nuageblanchâtre. Le nombre des pierres a été considérable; on dit qu'il y en avoit une du poids de dixhuitlivres. Elles se sont dispersées sur à-peu-prèsune lieue de rayon. Leurs caractères extérieurs etleur composition sont absolument comme dans lesautres pierres de même origine; seulement leur cassurea des teintes un peu moins marbrées. Des rapportsfort bien faits, par deux habiles observateursd'Agen, MM. de Saint-Amans et Lamouroux, adresséspar le préfet du département, n'ont rien laisséà désirer sur les détails du phénomène.M. le comte Berthollet a présenté à l'Institut, dela part de M. Tennant, une des pierres tombées enIrlande l'année dernière, et qui ressemblent à toutesles autres, excepté qu'elles contiennent un peu plusde fer.On sait, et nous avons eu plusieurs fois nousmêmesl'occasion de dire dans nos rapports, que lapierre nommée arragonite fournissoit la plus forteobjection que l'on pût faire contre l'emploi de lacristallisation dans la classification des minéraux,parceque les chimistes n'a voient pu trouver aucunedifférence de composition entre cette arragonite etle spath calcaire ordinaire ou carbonate de chaux,quoique leurs formes cristallines fussent essentiellementdistinctes. Cette objection paroît levée au-


ET GÉOLOGIE. 289jourd'hui. M. Stromeyer, professeur de chimie àGottingen, a découvert la présence constante detrois centièmes de strontiane dans l'arragonite, etil n'y en a point dans le spath calcaire. M. Laugier,professeur au Muséum d'histoire naturelle, a répétécette analyse, et en a obtenu le même résultat.Il reste à savoir comment l'addition d'une si petitequantité de matière composante peut changer aussicomplètement la forme de la molécule primitived'un minéral.On avoit retiré, il y a plus de cent ans, des carrièresd'OEningen, près du lac de Constance, unsquelette pétrifié, que Scheuchzer, naturaliste deZurich, avoit pris pour celui d'un homme, et qu'ilavoit fait graver sous le nom d homme témoin du déluge.Des naturalistes plus récents avoient cru y voirun poisson. M. Cuvier, d'après la simple inspectionde l'estampe publiée par Scheuchzer, l'a voit jugéd'une espèce inconnue et gigantesque de salamandre.Ayant fait un voyage à Harlem , où ce fossilecélèbre est déposé dans le muséum de Teiler, etayant obtenu de M. Vanmarum, correspondant del'Institut et directeur de ce muséum, la permissionde creuser la pierre pour mettre à nu les parties dusquelette qui s'y trou voient encore enveloppées,M. Cuvier a découvert des pattes avec leurs os ,leurs doigts, de petites côtes, des dents le long desBUFFON. COMPLÉM. T. II. 19


290 MINÉRALOGIEdeux larges mâchoires, en un mot toutes les particscaractéristiques qui ne peuvent plus permettreà personne de douter que ce squelette n'ait en effetappartenu à une salamandre. Il a fait voir à l'Institutle dessin de ce fossile ainsi Complètement mis àdécouvert, qu'il doit adresser avec sa description àl'Académie de Harlem.Le même membre a fait voir une tête récemmentdégagée du gypse de Montmartre de l'espèce d'animalperdu qu'il a nommée palœotherium médium.Cette tête étoit complète, et confirmoit tout ce quel'on avoit pu conclure jusqu'ici d'après des fragmentsisolés.M. de Humboldt, associé étranger, a communiquél'histoire vraiment étonnante du volcan de Jorullo,qui s'ouvrit en 1759, au Mexique, SUr unplateau uni, bien cultivé, où couloient deux rivièresd'eau froide, et où, de mémoire d'homme,il ne s'étoit pas même fait entendre un bruit souterrain.La catastrophe fut annoncée quelques moisd'avance par des secousses et des mugissements quidurèrent quinze ou vingt jours. Il y eut ensuite unepluie de cendres et des mugissements plus violentsqui déterminèrent les habitants à la fuite. Desflammes s'élevèrent sur une étendue de plus d'unedemi-lieue carrée ; des fragments de roche furentlancés à de grandes hauteurs ; la croûte du terrain


ET GÉOLOGIE. 291s'élevoit et s'abaissoit comme les ondes ; il en sortitune multitude innombrable de petits cônes de sixà neuf pieds qui hérissèrent la surface du plateaucomme des ampoules, et qui subsistent encore; ils'éleva enfin dans la direction du S. S. E. au N. N. E.une suite de six collines, dont la principale, quiconserve encore aujourd'hui un cratère enflammé,n'a pas moins de 1600 pieds de hauteur. Ces effrayantesopérations de la nature durèrent depuisle mois de septembre 1 769 jusqu'au moisde févriersuivant. Des témoins oculaires attestent que lebruit égaloit celui qu'auraient pu produire des milliersde pièces de canon, et qu'il fut accompagnéd'une Ghaleur brûlante, dont une partie se conserveencore à présent ; car M. de Humboldt atrouvé la chaleur du sol de 20 degrés supérieure àcelle de l'atmosphère. Tous les matins des milliersde filets defumée s'élèvent des cônes et des crevassesde ce grand plateau ; les deux rivières ne roulentplus que de l'eau chaude imprégnée d'hydrogènesulfuré, et la végétation ne fait que de renaître surce terrain bouleversé.Ce volcan est à 46 lieues de la mer, et à une distanceà-peu-près pareille du volcan actif le plus voisin; et à cette occasion, M. de Humboldt remarqueque plusieurs volcans du Nouveau-Monde sontaussi éloignés de la mer que celui-là; tandis que•y-


292 MINÉRALOGIEdans l'ancien on n'en connoît aucun qui s'en éloigneà plus de douze lieues , et que la plupart sontsur ses bords. Ce savant voyageur nous apprendaussi que tous les grands volcans du Mexique setrouvent non seulement à-peu-près sur une mêmeligne transversale à la direction des Cordilières,mais encore, à quelques minutes près, sous lemême parallèle, comme s'ils avoient tous été soulevéssur une crevasse souterraine qui aboutiroitd'une mer à l'autre. Il s'est assuré de tous ces faitspar des mesures et des déterminations de positionaussi exactes que pénibles. Le public en verra toutle détail dans la continuation du célèbre ouvrageoù M. de Humboldt a consigné les résultats de songrand voyage en Amérique.ANNÉE 1815.Entre les questions que les savants occupés de lathéorie de la terre agitent ordinairement il en estpeu de plus difficile ni qui ait occasioné des disputesplus longues et plus opiniâtres que celle del'origine des basaltes et des vakes, sortes de rochesque les uns considèrent comme des produitsd'anciens volcans, tandis que d'autres les regardentcomme déposés dans le liquide général où se sontformées les roches ordinaires, et comme analoguesaux trapps des terrains primitifs.


ET GÉOLOGIE.2g3M. Gordier, inspecteur-divisionnaire des mineset correspondant de l'Académie, ayant porté aussison attention sur ce grand problème, a imaginé,pour le résoudre, des moyens entièrement nouveaux.Ses premières réflexions lui firentapercevoir quela plus grande difficulté pour comparer les matièresd'une nature contestée, avec celles dont l'origine,soit volcanique ou non volcanique, est incontestable,tient à ce queles unes et les autres se comporsent souvent de particules tellement mélangées,réduites en pâte d'apparence tellement homogène,qu'il est impossible àl'œil de les discerner. La chimiene peut venir ici au secours des sens, parcequ'elleconfond toutes ces particules dans ses analyses, etne donne en résultat que la liste totale de leurs élémentsprimitifs, au lieu de distinguer ceux quiappartiennent à chacune de leurs espèces.M. Cordier imagina donc un nouveau moded'analyse mécanique, qui consiste à réduire d'aborden parcelles les espèces minérales dont onpeut soupçonner l'existence dans les roches quel'on veut examiner; à bien déterminer les caractèresphysiques de ces parcelles et leur manière dese comporter au chalumeau; à pulvériser ensuiteles roches dont on fait l'objet de son étude ; à tirer,au moyen du vannage ou du lavage, les diverses


294 MINÉRALOGIEsortes de particules que cette pulvérisation a détachéesles unes des autres, et à les soumettre auxmêmes épreuves que l'on a fait subir aux parcellesde substances bien connues.C'est, comme on voit, une sorte de minéralogiemiscroscopique dont M. Cordier a tiré un excellentparti. Les pâtes pierreuses, reconnues pour des laves,et historiquement constatées pour telles, sesont fort bien prêtées à cette nouvelle analyse : leursparticules se sont assez aisément séparées; elles nelui ont offert qu'un petit nombre de combinaisons,dans lesquelles dominoient tantôt le feldspath,tantôt le pyroxène, et où ils s'allioient en diversesproportions au fer titane; à ces trois éléments constantsse mêloient, mais d'une manière moins générale,l'amphibole, l'amphigène, le mica, le péridot,et le fer oligiste.Les pâtes basaltiques d'une origine plus ou meinscontestée n'ont pas été plus difficiles à diviser dansleurs parties constituantes, et ces parties ne se sontpas trouvées différentes.Toutes ces pâtes anciennesou modernes, reconnues ou non pour des laves,sont donc, selon l'auteur, des granités microscopiquesdans lesquels l'uniformité du tissu entrelacén'est interrompue que par de très petits vides, unpeu moins rares dans certaines laves que dansd'autres, et qui paroissent, à l'œil nu, des masses


ET GÉOLOGIE. 295homogènes où dominent, soit les caractères dupyroxène, soit ceux du feldspath, et qui ne peuventplus alors être distinguées qu'en deux sortes.Une partie des scories qui accompaguent leslaves pierreuses, et qui sont les premiers produitsde la coagulation des matières en fusion, se composeaussi de grains'divers, mais plus fins, moinsrégulièrement entrelacés, et cependant des mêmesespèces que les masses qu'elles recouvrent; uneautre partie plus altérée par l'action du feu se rapprochedavantage de l'état vitrifié : d'autres enfinsont complètement à cet état, mais il leur restetoujours assez de traces de leur origine pour qu'onne puisse les méconnoître. Elles se rapportent toujoursà l'un des deux ordres principaux de combinaisons,reconnus parmi les laves pierreuses.M. Gordier cherche à expliquer, par la différenced'état des scories, ce phénomène qui a frappé plusieursvoyageurs, que certains courants de lavesrestent éternellement stériles, tandis que d'autresse parent promptement de la plus belle végétation.C'est que les premiers, plus vitrifiés que les autres,se décomposent moins aisément.L'auteur examine aussi les obsidiennes ou verresvolcaniques; et, en comparant toutes les nuancesde leur plus ou moins de vitrification, il y trouvetoujours quelques traces de ce pyroxène ou de ce


296 MINÉRALOGIEfeldspath, principes dominants des deux ordresde lave, et les obsidiennes qui fondent en verrenoir lui ont montré des transitions parfaites jusquaubasalte le plus dense; en un mot, les obsidiennes,les scories, les laves, les basaltes, ne diffèrentpoint en composition, mais seulement parles accidents de leur tissu. Il n'est pas jusqu'auxsables et cendres volcaniques où l'on ne retrouve,par le lavage, les mêmes matériaux dont l'agrégationforme les laves voisines. M. Gordier a suivices matériaux dans les diverses substances aprèsqu'elles ont été altérées par le temps, et les y a dégagésdes substances nouvelles qui les ont enveloppésou qui se sont infiltrées dans leurs intervalles; enun mot il n'a négligé l'examen d'aucune des modificationsdes produits volcaniques vrais ou contestés,et il n'a trouvé nulle part ses régies généralesen défaut ; mais lorsqu'il est passé enfin à ces trapps,à ces cornéennes, à ces pétrosilex, en un mot, àces anciennes roches auxquelles on avoit voulurapporter les basaltes, il n'y a plus reconnu au-7cun de ces caractères si marqués qui établissententre les laves et les basaltes des rapports incontestables.La masse de ces anciennes roches n'a point devides apparents ; à peine y aperçoit-on des grains,et ils ne diffèrent point entre eux pour la couleur;


ET GÉOLOGIE. 297on ne peut pas les isoler ni en faire l'analyse mécanique.Par conséquent, si une partie de ces rochesse compose de matériaux hétérogènes, il n'est paspossible de déterminer les espèces rninéralogiquesauxquelles ces matériaux appartiennent.Leur analyse chimique donne aussi d'autres résultats,sur-tout parcequ'elle n'y montre aucunetrace de fer titane.Ainsi l'analogie prétendue entre les trapps et lesbasalte^ ne supporterait pas un examen rigoureux.Quant à l'origine des laves, et aux^ causes de leurfusion, M. Gordier ne se permet aucune conjecture ;mais, considérant leur masse comme coagulée parune cristallisation instantanée, il résout aisément leproblème particulier long-temps débattu : si lescristaux renfermés dans les laves ont été enlevéstout formés aux entrailles de la terre, et enveloppéspar elle, ou s'ils se sont formés après coup dansleurs vides, ou enfin s'ils ont cristallisé au mêmeinstant que le reste de leur masse s'est durci ; et l'oncomprend aisément que c'est ce dernier parti qu'iladopte.Il termine ce grand et beau travail par une énumérationméthodique des basaltes et des produitsdes volcans, rangés d'après leurs matériaux d'agrégation,et sous les bannières des deux substancesqui y prédominent, le feldspath et le pyroxène.


298 MINÉRALOGIECette nature si mystérieuse des volcans, ces foyersimmenses de chaleur, loin de toutes les conditionsqui entretiennent la chaleur à la surface de la terre,seront long-temps encore un des grands objets de lacuriosité des physiciens, et exciteront leurs effortstant qu'il leur restera quelque espoir de succès. Unjeune minéralogiste,aussi zélé qu'instruit, M. Mesnardde La Groye, d'Angers, ayant eu occasion en1812 et 1813 d'observer de près plusieurs des phénomènesdu Vésuve, en a dressé un journal d'uneexactitude singulière, qu'il a entremêlé de beaucoupd'idées et de suppositions originales.Depuis l'énorme diminution que le cône du volcana éprouvée en 1794, où il s'affaissa de plus de4oo pieds, toutes les éruptions se sont faites parson sommet, ce qui paroît les avoir empêchéesd'être aussi abondantes et aussi destructives quecelles qui perçoient ses flancs. Le fond du cratères'est relevé, et il ne seroit pas impossible qu'il vîntà se remplir : d'où M. de La Groye tire cette conclusion,qu'il ne faudrait pas toujours refuser àune montagne la qualification de volcanique, parcequ'ellen'auroit pas de cratère.Les coulées de laves sont d'autant moins abondantesqu'il y a un plus grand nombre de scorieset de lapillis lancés par l'éruption. Tout le cône estcouvertde ces petites pierres qui y sont bientôt alté-


ET GÉOLOGIE. 299rées par les vapeurs acides, et prennent ces couleursvives et variées qui les font prendre de loinpour des gazons en fleur, et qui ont du moinsdonné à croire, même à des naturalistes, que lecratère est rempli de soufre; ce qui est si peu vraiqu'il est même rare d'y sentir des vapeurs sulfureuses: il s'y élève au contraire de fortes et continuellesexhalaisons d'acide muriatique, et le selmarin y est par-tout en concrétion..M. Mesnard de La Groye prend de là occasion dediviser les volcans en deux classes ; ceux où le soufrejoue un rôle essentiel, et ceux où domine l'acidemuriatique. C'est parmi ces derniers qu'ilrange le Vésuve.Il fait aussi remarquer les fumées continuellesqui s'élèvent des coulées de laves, et qui y annoncentune grande humidité : elles sont en effet purementaqueuses. On ne voit point de flammes, maisles sables et les pierres embrasés, et la réverbérationdu foyer intérieur sur les vapeurs qui ensortent, produisent cette illusion. La lave marchelentement; ses bords refroidis lui forment un canal,et la tiennent élevée au-dessusdu terrain toutecouverte de scories ; il est d'une difficulté extrêmede voir sa partie fluide. On sait d'ailleurs que sachaleur n'a rien qui approche de celle du verrefondu ; car lorsqu'elle enveloppe des troncs d'ar-


3ooMINÉRALOGIEbres, elle ne les carbonne pas jusqu'au centre.Aussi M. de La Groye croit-il que la lave doit sa fluiditéà quelque principe qui se consume par le faitmême de la fusion, et que c'est à cela que tient ladifficulté de refondre celle qui est refroidie. Lapleine masse, la partie non boursouflée en scories,a l'aspect tout pierreux ; c'est ce que les Allemandsappellent graustein. L'auteur compare les périodesde la fusion des laves à ceux par où passent les selsqui fondent après s'être boursouflés ; il rapportedes faits curieux sur la prodigieuse durée de leurchaleur, et en conclut qu'elles portent en ellesmêmesle principe de leur échauffement, et qu'ellesn'ont pas simplement une chaleur communiquée.A toutes ces remarques, M. de La Groye joint unerelation fort détaillée de la grande éruption deI8I3, qui produisit une infinité de lapillis et decendre, mais dont les laves n'arrivèrent pas jusqu'auxterrains cultivés.Après avoir étudié avec tant de soin les volcansbrûlants, M. de La Groye a voulu aussi se rendrecompte des motifs que l'on peut avoir pour rangerdiverses montagnes parmi les volcans éteints, et ilen a visité une que de Saussure et d'autres grandsgéologistes avoient déjà placée dans cette classe,mais où les neptunistes obstinés trouveraient encorebien des prétextes pour appuyer leurs doutes.


ET GÉOLOGIE.3oiC'est la montagne de Beaulieu, à trois lieues environd'Aix en Provence. Les inégalités du sol quil'environne représentent des traînées comparablesaux courants de laves; son étendue est de 1200 toisesde longueur sur 6 à 700 de largeur, son élévationmoyenne au - dessus de la mer de 200 ; ce qui l'entoureest calcaire à une distance indéfinie : vers l'estsont les buttes basaltiques, qui semblent former lenoyau *de tout le système ; mais dans la partie basaltiquemême il y a aussi des coquilles marines etbeaucoup de calcaire. Les amygdaloïdes et les basaltesen sont recouverts en plusieurs endroits ; end'autres, leurs fragments en sont empâtés, et composentavec ce calcaire une sorte de brèche; il asouvent pénétré dans les cellules des amygdaloïdes.Cependant la roche principale est le grùnsteinsecondaire des Allemands, composé de feldspathet de pyroxène, quelquefois en si gros grains qu'ilressemble à du granit. Il forme une longue traînée,et l'on passe de cette roche par des intermédiairescomparables à des trapps proprement dits jusqu'aubasalte ordinaire contenant du péridot, et dont deSaussure a vu quelques parties divisées en prismes.Il y a aussi de la vake qui sert de base à l'amygdaloïde,et qui, lorsque ces cellules sont vides,ressemble tout-à-fait à une lave poreuse, mais oùelles sont le plus souvent remplies de calcaire,


3o2MINÉRALOGIEcomme dans le mandelstein des Allemands. Ontrouve enfin un tuf basaltique rempli de petits galetscalcaires et contenant des pyroxènes, des péridots,des micas, et ces autres espèces minérales sicommunes dans les laves. M. Mesnard voit à Beau-?lieu jusqu'à un enfoncement qui lui paroît un restede cratère. Enfin l'auteur, après avoir donné quelquesraisonnements généraux contre les objectionsdes neptunistes, conclut que cette montagrfe est leproduit d'une éruption sous-marine, et que la meroù elle s'est faite a continué Ion g-temps après à déposerdu calcaire. De Saussure avoit déjà paru favorableà cette opinion ; M. Faujas l'a regardée commeincontestable, et M. Mesnard croit y voir un moyende concilier toutes les opinions sur les prétendustrapps secondaires, objets de si longs débats.Parmi ces nombreux débris d'organisations inconnuesqui remplissent les couches de la terre,ilse trouve des empreintes d'animaux d'une singulièreforme, composés d'une sorte de corcelet etd'un abdomen formé de plusieurs segments, dontchacun est divisé en trois lobes. Les naturalistesleur ont donné les noms dentomolithes et de trilobites;mais ils ne les avoient pas assez distingués entreeux, et ne s'étoient pas occupés de déterminer àquel ordre de couche chaque espèce appartient.M. Brongniart, correspondant et directeur de la


ET GÉOLOGIE.3o3manufacture de Sèvres, que l'Institut vient d'acquérirau nombre de ses membres pour sa sectionde minéralogie, à la place de feu M. Desmarets, aprésenté un travail sur ce sujet, où, d'après unecomparaison exacte des échantillons qu'il s'est procurés,ainsi que les auteurs précédents, il montraqu'il existe au moins sept espèces de ces trilobites;que leurs formes principales sont assez différentespour les répartir dans quatre genres, lesquels doiventtous être rangés dans la classe des crustacés,et dans l'ordre de ceux dont les branchies sont à découvert.La plupart de ces trilobites appartiennentaux plus anciens, c'est-à-dire aux plus profonds, desterrains qui recèlent des dépouilles animales; ilsdoivent doncavoirétédu nombre des premiers êtresvivants ; et en effet à mesure qu'on approche de lasurface on trouve des crustacés plus semblables àceux que la mer nourrit aujourd'hui ; mais les trilobitesdisparoissent entièrement.M. Gillet-Laumont, membre du conseil désmines et correspondant de l'Institut, a fait voirdes agates où de petits cercles blanchâtres, disposésen quinconce, simuloient quelque pétrification dela classe des polypiers ; mais ils étoient le produitde l'artifice. M.Laumont, qui avoit remarqué précédemmentque des coups, ménagés d'une certainemanière, détachoient d'un bloc de grès des cônes


3o4MINÉRALOGIEtrès réguliers, a appliqué des coups pareils à desagates, et y a produit de même des fissuresconiquesdont la coupe a offert des cercles entièrement semblablesàceux qui avoient d'abord fait illusion.M. Cordier a publié un mémoire sur les minesde houille de France, et sur les progrès que leurexploitation a faits depuis vingt-cinq ans. Il prouveque dans cet intervalle les produits ont plus quequadruplé. Cet ouvrage, très important pour l'administration, est accompagné d'une carte qui désignel'étendue de nos terrains houillers, les fossesprincipales qui s'y exploitent, et la direction de leursdivers débouchés : il a été inséré dans le Journal desMines.Il est encore tombé cette année des pierres del'atmosphère aux environs de Langres, avec toutesles circonstances accoutumées. M. Pistollet, médecinde cette ville, en a recueilli; elles ressemblenten tout aux autres pierres de même origine,excepté que leur cassure est peut-être un peu plusblanche.M. Vauquelin, qui avoit été chargé l'année dernièred'examiner les aérolithes d'Agen, a présentéquelques réflexions sur l'état où se trouvent lesprincipaux éléments de ces sortes de pierres. Unepartie de la silice lui paroît y être en combinaisonavec la magnésie ; il y a du soufre uni au fer, car il


ET GÉOLOGIE.3o5donne du gaz hydrogène sulfuré en se dissolvantdans les acides; quant au chrome, il paroît êtreisolé, et se montre quelquefois en molécules assezgrosses pour éloigner toute idée de combinaison.ANNÉE 1816.Le Groenland a fourni, depuis quelques années,une pierre en petits cristaux dodécaèdres d'un vertcéladon, que l'on a nommée sodalithe, parcequ'ellecontient près d'un quart de son poids de soude unieavec de la silice et de l'alumine.M. le comte Dunin-Borkowsky, gentilhommegallicien et minéralogiste aussi zélé qu'instruit, adécouvert une variété incolore et en gros prismesde cette même pierre, dans cette partie de la pentedu Vésuve appelée Fosso-Grande, si célèbre par lenombre et la variété des minéraux qu'elle a offertsaux collecteurs. La composition de ceux-ci, fortanalogue à celle du verre, auroit pu frapper dansdes cristaux rejetés par un volcan, s'ils n étoientaccompagnés d'une multitude d'autres espèces quin'ont rien de commun avec le verre, et si les sodalithesdu Groenland ne se trouvoient pas dans desterrains où l'on n'aperçoit nulle trace de feux souterrains.La géologie, dansda forme scientifique à laquelleelle s'est élevée dans ces derniers temps, a moinsBUFFON. COMPI.ÉM. T. II. 20


3o6MINÉRALOGIEpour objet d'imaginer, comme autrefois, des systèmessur les états par où le globe a passé, que dedécrire exactement son état actuel, et la positionrelative des masses qui composent son écorce. Onsait que, sous ce dernier rapport, on a-distinguéces masses en primitives, c'est-à-dire, dans lesquelleson ne voit point de traces de corps organisés, et que l'on croit antérieures à la vie ; et en secondaires,qui toutes sont plus ou moins rempliesdes débris de ces corps, et qui doivent en conséquenceavoir été formées depuis qu'ils existent. Cesmasses sont en outre généralement différentes parleur nature et par les matières qui les composent;l'on a cru même Ion g-temps que ces matières s'étoientsuccédé et remplacées d'une manière égalementtranchée ; en sorte qu'aucune de cellesqui se déposoient avant l'existence des corps organisésne se seroit déposée depuis, et réciproquement.C'étoitlà une assertion prématurée que desobservationsplus exactes ont démentie. On s'est aperçuqu'entre ces deux genres de terrains il en existe demélangés, en quelque sorte, où d'anciennes matièresse reproduisent après que des matières nouvellesse sont montrées ; où quelques corps organiséssont recouverts par des masses de la même natureque celles qu'on croyoit avoir cessé de se déposer


ET GÉOLOGIE.3o7depuis que la vie s'étoit montrée sur le globe. Cesmonuments du passage d'un état de chose à un autreont été appelés terrains de transition.Il n'est pas toujours facile de les reconnoître pourtels; et M. Brochant, dans un mémoire publié il ya quelque temps, avoit eu besoin de toute sa sagacitépour rappeler à cette classe intermédiaire lesplus grandes portions de la valjée de Tarentaise,d'autant que l'on n'avoit point découvert alors quelquescoquilles dont l'existence dans ces roches aconfirmé, de la manière la plus flatteuse,les conjectureset les raisonnements de ce savant géologiste.Il a étendu depuis ce genre de recherches, etles a portées principalement, cette année, sur lesgypses anciens qui se trouvent en abondance danscertaines parties des Alpes, et dont tous les voyageursqui traversent le Mont-Cénis ne peuvent manquerde remarquer d'énormes masses. Après avoirdécrit, avec une scrupuleuse exactitude, toutes lescirconstances de leur gisement, et avoir souventcontourné les montagnes, sur les flancsdesquellesils se présentent, l'auteur montre leurs rapports desituation et de nature avec les terrains de transition,et prouve que l'on doit les ranger dans cette classe.Les terrains primitifs eux-mêmes ne sont pastoujours faciles à caractériser : l'irrégularité de leur20.


3o8MINÉRALOGIEposition,Ténormité des espaces où il faut quelquefoispoursuivre leurs rapports, et les variationsnuancées de leur composition, offrent de grandesdifficultés. Ainsi M. Brochant a reconnu, par delongs voyages et de pénibles examens, que les hautescimes des Alpes, depuis le Mont-Cénis jusqu'auSaint-Gothard, et notamment le Mont-Blanc, nesont point, comme on l'avoit cru, de granit proprementdit, mais d'une variété plus cristalline et plusabondante en feldspath , d'une roche talqueuse etfeldspathique qui domine dans une assez grandepartie des Alpes, et qui contient souvent des mineraismétalliques en couches ; il s'est assuré, en mêmetemps, qu'un véritable terrain de granit régne surla bordure méridionale de la chaîne; et, d'aprèsl'analogie, il regarde comme très vraisemblableque ce terrain granitique supporte le terrain talqueux; d'où il conclut que les hautes cimes des Alpesne sont point la partie relativement la plus anciennede ces montagnes. -Nous avons rendu compte, dans le temps, d'unedisposition fort analogue, découverte dans les Pyrénéespar M. Ramond.L'on doit toutefois remarquer que la primordialitédu granit, parmi les roches connues, souffredes exceptions. M. de Buch a constaté en Norwégeque des granits, évidemment reconnoissables pour


ET GÉOLOGIE.3o9tels, sont superposés à des terrains que l'on croyoitplus modernes, et même à des terrains à pétrifications.Ce fait a été observé également en Saxe etjusque dans le Caucase.M. de Bonnard, ingénieur des mines de France,qui, par une singularité honorable pour nous; adonné à la géologie la première description complètede l'Ertzgeburg, de cette province de Saxequi est en quelque sorte la patrie de la géologie;M. de Bonnard s'est attaché, dans cet ouvrage, àdéterminer les lieux où le granit est inférieur auxautres terrains, et*ceux où il est supérieur à quelquesuns. On ne peut douter, d'après ses recherches,que le granit de Dohna ne soit dans ce dernier cas,ainsi que l'avoient annoncé des observateurs saxons ;mais, en d'autres endroits, et sur-tout près de Freyberg,on s'est trop empressé de conclure la supérioritédu granit, de quelques irrégularités dans laforme de ses masses, dont les parties saillantes sefont quelquefois jour au travers des roches qui lerecouvrent. Il paroît, au reste, que la chaîne quisépare la Saxe de la Bohême a aussi les granits d'uncôté de sa crête, du côté méridional.Cet écrit de M. de Bonnard contient beaucoupd'autres détails précieux sur la nature et la positiondes terrains de la province célèbre qu'il a étudiée,ainsi que sur les riches filons métalliques qui la par


3lOMINÉRALOGIEcourent dans tous les sens, et sur lesquels l'industriedes mineurs s'exerce depuis si long-temps. Sous cesrapports, il est d'un égal intérêt pour la géologieet pour l'art de l'exploitation des mines.M. Héron de Villefosse, aujourd'hui associé librede l'Académie, a rendu à ce même art un biengrand service, par son ouvrage intitulé de la RichesseMinérale. Le premier volume, qui avoit pour objetl'administration des mines, imprimé dès 181 o, estconnu et apprécié depuis long-temps. Le second,où il est traité de leur exploitation, a été présenté enmanuscrit à l'Académie. L'auteur y réunit, à toutesles directions que donnent les sciences nombreusesd'où dérive la théorie, une immense quantité defaits pratiques qu'il a recueillis dans ses voyages etdans l'exercice de ses fonctions, en sorte que lespréceptes y sont appuyés d'exemples qui n'ont riend'imaginaire, mais qui sont tous réalisésen quelqueslieux. Un magnifique atlas offre à l'œil tout ce queces exemples ont de sensible : on y voit des cartesgéologiques de Hartzwald et de la Saxe, les pays lesplus célèbres par l'ancienneté de leurs mines; desplans et des coupes de toutes les manières d'être duminerai dans le sein de la terre, ainsi que des voiesque l'art a su ouvrir pour l'en retirer, et des mécaniquesde tous genres que l'on emploie à cet effet;et presque tous ces matériaux sont inédits et ras-


ET GÉOLOGIE.3l lsemblés sur les lieux par l'auteur. On ne peut mettreen doute la grande utilité d'un tel ouvrage pourun pays où l'art dontil traite est encore si peu florissant.La découverte si importante en géologie, faitepar MM. Brongniart et Cuvier, de certaines couchespierreuses qui ne contiennent que des coquillagesde terre et d'eau douce, et qui ne ne peuvent parconséquent avoir été forméesdans la mer commeles autres couches coquillières, a excité de nombreusesrecherches dans toute l'Europe. Nous avonsrendu, compte dans le temps de celles de MM. Marcelde Serres et Daudebart de Férussac sur lesterrains d'eau douce de diverses contrées de France,d'Espagne et d'Allemagne; on en a fait d'analogueset fort étendues en Angleterre. Cette année, M. Beudant,professeur à Marseille, a considéré cette matièresous un nouveau rapport. Comme on trouveen quelques endroits des coquilles d'eau douce mêléesà des coquilles marines,il a cherché à découvrirpar l'expérience jusqu'à quel point les mollusquesd'eau douce peuvent s'habituer à vivre dansl'eau salée, et réciproquement jusqu'à quel pointles mollusques marins peuvent supporter l'eaudouce. Il a trouvé que tous ces animaux meurentpromptement quand on change subitement leurséjour, mais qu'en augmentant par degrés la salure


.il 2MINÉRALOGIEde l'eau pour les uns, et eu la diminuant par degréspour.les autres, on les habitue, pour la plupart,à vivre dans une eau qui ne leur est pas naturelle.Quelques espèces résistent cependant à cestentatives, et ne supportent point de variationsdans l'eau qu'elles habitent.La nature indiquoit d'avance ces résultats; certaineshuîtres, certaines cérites, la moule commune,remontent assez haut dans les fleuves,et l'on voitquelques limnées dans des endroits où l'eau participebeaucoup de la salure de la mer.M. Marcel de Serres a donné la suite de ses premièresrecherches sur ces terrains d'eau douce,dont nous avons rendu compte dans notre analysede 1813. 11 a fait connoître principalement, cetteannée, une forrination de ce genre, qu'il regardecomme plus nouvelle que toutes-les autres, et qu'ila découverte dans sept lieux différents des environsde Montpellier. Ses observations se rattachent enpartie à celles de M. Beudant : il distingue les espècesdes environs de Montpellier en celles qui neparoissent pouvoir vivre que dans les eaux douces;celles qui peuvent subsister dans des eaux saumâtres,dont le maximum est de 2° 75 ; enfin celles àqui les eaux marines paroissent nécessaires. Il expliquepar-là quelques mélanges fort rares des débrisde ces êtres.


El GÉOLOGIE.3l3Le terrain qu'il décrit se compose d'abord enquelque sorte de deux étages renfermant des coquillesdifférentes. Le supérieur en contient deterrestres en même temps que d'aquatiques. La formationnouvelle est appliquée à la surface de terrainsdivers, et principalement sur le haut des collinesou des plateaux. On y voit beaucoup de coquillesterrestres et d'empreintes de végétaux parfaitementsemblables aux espèces qui vivent actuellement surle même sol.A mesure que l'on approfondit en Europe les méthodesd'observation géologique, il se trouve desnaturalistes zélés qui les appliquent aux pays pluséloignés, et qui y retrouvent la nature fidèleauxmêmes lois.Nous avons parlé plusieurs fois des immensestravaux de M. de Humboldt sur la structure et l'élévationrespective des montagnes des deux Amériques.Ce savant voyageur a semblé préluder à destravaux non moins importants par un tableau desrésultats obtenus dans l'Inde, sur la hauteur de diverspics de cette immense chaîne connue des anciens.sousle nom d'Imaùs, et où les Indous ontplacé les principaux faits de leur mythologie.D'après les mesures trigonométriques de M. Webb,ingénieur anglois, quatre de ces pics seraient plusélevés que le Chimboraço, et l'un d'eux, la plus


3l4MINÉRALOGIEhaute montagne connuej usqu'à cejour sur le globe,auroit 4oi 3 toises, ou 7821 mètres; et même, selond'autres calculs, 4201 toises, ou 8187 mètres.M. de Humboldt fait dans ce mémoire un usageheureux des lois de la géographie végétale, poursuppléer aux mesures de hauteur de certains plateauxque l'on n'a point encore pu prendre immédiatement;et, lorsque telle ou telle plante se cultivedans un lieu, il détermine, d'après la latitude,quelle hauteur le plateau sur lequel celieu se trouvene peut avoir dépassée. Ce sera un sujet curieux devérification pour les voyageurs, qui, d'après les nombreuxrapports qui s'établissent, vont sans doutede plus en plus visiter ces vallées et ces montagnesde l'Imaùs, ce Thibet, ce Boutan , ce Népaul, lescontrées les plus intéressantes peut-être du mondepour l'histoire du genre humain, si comme toutl'annonce c'est de là que notre race est descendue.Dans un espace plus borné, M. Moreau de Jonnès,nommé depuis peu correspondant, n'a paslaissé que de faire des observations utiles. Il a présentéà l'Académie une carte géologique d'une partiede la Martinique où sont marquées avec ungrand soin les hauteurs des montagnes et des collinesqui la hérissent, et principalement du volcanéteint qui paroît avoir donné naissance à ces inégalitésqu'il domine.


ET GÉOLOGIE. 3 I 5L'auteur a étendu ses recherches à la géologied'une grande partie des Antilles. Des pics volcaniquesoccupent les centres élevés de ces îles, et senomment mornes ; les crêtes de laves qui en sontdécoulées s'appellent barres, et l'on désigne parla dénomination de plainiers les plateaux qu'ellesont formés en s'étalant à leur partie inférieure.Les îles où il ne se trouve qu'un pic et un seulsystème de déjections, telles que Saba, Nièves,Saint-Vincent, sont plus petites, moins importantespour l'agriculture. Elles n'ont point de bons ports,parceque ces ports ne sont que l'extrémité des valléeslaissées entre deux ou plusieurs systèmes, telsqu'il s'en voit à la Guadeloupe, à la Martinique, àla Dominique, à Sainte-Lucie, à la Grenade, etc. ;laMartinique, en particulier, paroît devoir son origineà six foyers volcaniques , et montre encore sixpics auxquels tout son terrain se rapporte. C'est latopographie et la minéralogie exactes de l'un dessix, celui de la montagne Pelée, que nous donneM. de Jonnès. Il croit cette nature volcanique sigénérale qu'il suppose qu'elle sert de base même àcelles des Antilles, qui n'offrent à l'extérieur quedes calcaires manifestement coquilliers, telles quela Barbade et la grande terre de la Guadeloupe. LaGuadeloupe proprement dite est formée de quatresystèmes d'éruption, un desquels, la Soufrière, a


3l6MINÉRALOGIEconservé encore quelque activité. M. de Jonnès endonne aussi une description soignée dans une statistiquegénérale de cette île.ANNÉE 1817.Les minéraux, considérés sous un point de vuegénéral, n'occupent essentiellement que les naturalistes; mais les rapports particuliers d'un grandnombre de leurs espèces avec les besoins et les agrémentsde la société sont pour ainsi dire infinis. Lesmoins importants de leurs usages, ceux qui n'intéressentque la vanité, produisent encore dans lecommerce et dans les relations mutuelles des peuplesdes mouvements que la politique étudie, etque la philosophie ne doit pas dédaigner, car elle entire toujours quelque profit. Le plus puéril de tousles luxes est bien ^certainement celui des pierresprécieuses, et cependant nous lui devons la premièreconnoissance de contrées éloignées, et plusieursfaits de physique dignes de toute notre attention.M. Haûy, dont les travaux ont donné à lagrande minéralogie une face si nouvelle en la soumettantaux procédés d'une physique délicate etaux calculs d'une géométrie rigoureuse, a vouluque ces minéralogistes pratiques, qui ne s'occupentque des minéraux de luxe, participassent aussi auxprogrès de la science. Il vient de publier un traité


ET GÉOLOGIE. 3 I 7des caractères physiques des pierres précieuses,où il donne les moyens les plus sûrs d'en distinguerles espèces, malgré les altérations que l'artleur a fait subir en les taillant, en les chauffant,ou de toute autre manière; et ce qui étoit plus difficile,malgré toutes les diversités de couleur et detransparence que la nature leur imprime. Ce ne sontlà que des accidents ; l'essence de chaque espèce consistedans laforme de sa molécule intégrante, dans ladisposition de ses lames, et dans la nature de seséléments ; mais on ne pourrait constater ces caractèresdans une gemme sans la détruire ; on est doncréduit à ceux qui dérivent des premiers et en sonten quelque sorte les indicateurs; savoir, à la dureté,à la pesanteur spécifique, à la double réfraction,et à l'électrisation, soit par le frottement, soitpar la chaleur. C'est sur ceux-là que M. Haùy insistedans un ouvrage qui sera également avantageuxet à ceux qui travaillent les pierres précieuseset à ceux qui aiment à s'en parer.Nous avons parlé plusieurs fois de la grandequestion élevée entre les cristallographes et les chimistes,sur la préférence que méritent les caractèresofferts par leurs sciences respectives pour ladistinction de minéraux, et nous avons cité quelquesexemples de substances dont la composition


)l8 MINÉRALOGIEchimique varie à un degré étonnant, quoique leurforme cristalline et plusieurs de leurs propriétésphysiques restent les mêmes. On en est réduit àcroire que dans ces sortes de cas il se fait un mélangepurement mécanique, une interposition desubstances étrangères entre les molécules du véritablecristal, lesquelles conservent leurs rapportscomme si ces matières hétérogènes n'étoient passurvenues ; mais dans cette hypothèse on est obligéde reconnoître un fait bien extraordinaire : c'est lapuissance prédominante dont certaines substancesjouissent, et en vertu de laquelle elles en contraignentd'autres à se plier à leurs formes, à se soumettreà leurs lois, quoique ces autres substancesaient aussi des formes et des lois cristallines qui leursont propres, et qu'elles eutrent dans le mélange(si l'on veut l'appeler ainsi) en quantité incomparablementplus grande que celle à laquelle ellessont ainsi obligées d'obéir.C'est ce que M. Beudant vient de constater pardes expériences très exactes qu'il a soumises à l'Académie.Après avoir reconnu que deux sels s'unissent rarementdans les mêmes cristaux, à moins d'avoirun principe commun, il a mêlé différents sulfatespour déterminer lequel l'emporterait sur les autres.Le sulfate de fer exerce un pouvoir, on oseroit


ET GÉOLOGIE. 3 I 9dire un despotisme, tout-à-fait étonnant. Il suffit,par exemple, que dans une dissolution de sulfatede fer et de sulfate de cuivre il y ait un dixième du,,premier pour que la totalité cristallise sous la formequi lui est propre, et pour que celle du sulfate decuivre ne s'y montre nullement. Avec du sulfate dezinc il faut un dixième et demi de sulfate de ferpour dominer ; enfin, si l'on mélange un quart desulfate de zinc et trois quarts de sulfate de cuivre,il suffira d'y ajouter deux à trois centièmes de sulfatede fer pour que le tout cristallise comme sic'étoit du sulfate de fer pur.Pour montrer à quel point ce résultat est faitpour étonner il suffit de se rappeler que la moléculeintégrante du sulfate de cuivre est un parallélipipédeobliquangleirrégulier; que celle du sulfatede fer est un rhomboïde aigu; que M. Haùy soupçonnecelle du sulfate de zinc d'être un octaèdre régulier,et que les formes secondaires ordinaires deces trois substances ne se ressemblent pas plus queleurs éléments mécaniques. Comment ce petit nombrede molécules rhomboïdales se rangent-elles facetteà facette pour former le cristal général sansêtre troublées dans leur tactique ordinaire par cenombre prodigieusement supérieur de moléculestout autrement figurées? comment celles-ci peuvent-ellesêtre contraintes de se presser, desempi-


320 MINÉRALOGIE1er dans les vastes intervalles des premières, sansaucun ordre relatif à l'attraction de leurs propresfacettes? Il y a certainement là des mystères dignesde toutes les recherches des physiciens, et d'un ordrebien au-dessus de la question de savoir si l'ondoit classer les minéraux par leur analyse ou parleur forme.M. Leliévre, qui avoit trouvé en 1786 clans unemine de plomb des Pyrénées une substance d'unaspect particulier, qui lui parut d'abord une sortede calcédoine, en a donné l'analyse faite par M. Berthier,ingénieur des mines, qui y a reconnu 44?5d'alumine, i5 de silice, et 4o,5 d'eau. En conséquence,M. Leliévre la nomme alumine hydratéesilicifère. Sa cassure est un peu résineuse; elle happeà la langue ; roussie au feu , elle devient friable, etperd 4o pour 100 de son poids ; elle ne fond pas auchalumeau ; les acides nitrique et sulfurique la convertissenten magma salin.On avoit déjà remarqué plusieurs ressemblancesentre les aérolithes et cette célèbre masse de fernatif, observée à la surface de la terre en Sibériepar feu Pallas ; M. Laugier vient d'en compléterl'ensemble dans l'analyse qu'il a donnée d'un fragmentde cette masse. Non seulement il y a retrouvé


ET GÉOLOGIE. 32 1le nickel; mais le chrome, dont il a le premier découvertl'existence dans les aérolithes, s'est aussioffert à lui, ainsi que le soufre.Il se fait en quelques endroits de l'Italie et de laSicile des éruptions d'une vase argileuse et froide,qui sort de terre, s'élève et coule à-peu-près commela lave ; et l'on a donné à cette espèce de volcans lesnoms desalsa, de gorgogli, et dé bollitori. C'est del'un d'eux, situé à Sassuolo dans le Modenois, queparoissent être sorties de violentes déjections, accompagnéesde flammes et de tremblements deterre, dont Pline fait mention. Des auteurs beaucoupplus modernes parlent aussi de flammes, deboue , et de pierres lancées à de grandes hauteurs.Mais Spallanzani, qui en a donné dans ses voyagesune description fort étendue, l'a trouvé beaucoupplus tranquille; et M. Mesnard La Groye, qui l'avisité encore plus récemment, l'aurait presque méprisé,si des phénomènes singuliers de la naturepouvoient jamais paroître méprisables à un physicien.Un petit tertre de terre argileuse est percéd'une ouverture assez étroite, remplie d'une vasemolle, sur laquelle on voit quelques filets de pétrole.Il s'en exhale continuellement des bulles d'ungaz inflammable, qui est un hydrogène carbonémêlé d'acide carbonique, et il s'en dégage des on-BUFFON. COMPLÉM. T. II. 21


322 MINÉRALOGIEdes d'une eau salée. Tout autour de cette petitebouche, un grand cercle stérile et salé est le vestigedes anciennes éruptions, et montre qu'elles ont dûêtre considérables. Mais elles n'arrivent que detemps en temps, comme celles des volcans ordinaires.L'auteur compare cette salze avec deux ou troisautres qu'il a vues dans les environs ; avec celle deMacaluba en Sicile, qu'a décrite Dolomieu ; avecune autre plus grande de Crimée, dont a parléPallas; et en général avec toutes celles dont il atrouvé des traces dans les différents auteurs. Sansprétendre assigner la cause de ces phénomènes remarquables,M. Mesnard La Groye se borne à faireremarquer qu'ils sont toujours placés dans le. voisinagedes sources de pétrole, des fontaines ardentes, des feux naturels, et près de la limite dudernier calcaire marin. Au reste il dit, ce que l'ojnvoit assez, que les salzes ne supportent aucunecomparaison réelle avec les véritables volcans.Les cavernes dont un si grand nombre de montagnessont creusées appartiennent aussi aux phénomènesremarquables qui occupent le géologisté*M. de Humboldt, qui avoit observé depuis longtempscelles des chaînes calcaires d'une partie del'Allemagne, n'a pu manquer de porter son atten-


ET GÉOLOGIE. 323tion sur celles de la grande chaîne porphyritique etvolcanique.des Andes. Ce qui, dans les premières,appartient à l'action des eaux semble avoir étéquelquefois dans les autres l'effet d'émanations gazeuses.On voit de ces cavernes auprès de Quito,assez étendues pour servir de refuge et comme decaravanserais aux voyageurs. Elles sont généralementpeu profondes, et tapissées de soufre. L'énormegrandeur de leurs ouvertures les fait distingueraisément de celles qu'offrent les tuffavolcaniques en Italie, aux Canaries, et même dansles Andes.ANNÉE 1818.M. Beudant continue à enrichir la cristallographiede recherches aussi neuves qu'intéressantes.Nous avons vu, l'année dernière, comment, dansses expériences, un principe salin d'une certaineespèce imprime quelquefois sa forme cristalline àun mélange dont il ne fait pas à beaucoup près laplus grande partie.Il s'est occupé cette année d'une question quin'importe pas moins à la science des cristaux ; c'estcelle des causes qui déterminent un sel dont lesmolécules primitives et le noyau ont une formeconstante à revêtir, par l'accumulation de ces moléculesselon des lois diverses, des formes seconai.


324 MINÉRALOGIEdaires si variées que leur nombre étonne quelquefoisl'imagination.Ayant remarqué que les formes secondairesd'une même substance sont le plus souvent lesmêmes dans les mêmes gisements, et dans les lieuxoù elles se trouvent associées de la même manièreà d'autres minéraux, il a jugé que ces formes secondairesdoivent être déterminées par les circonstancesau milieu desquelles se fait la cristallisation.On savoit depuis long-temps, par les expériencesde Rome de Lille, et par celles de Fourcroy et deM. Vauquelin, que la présence de l'urée déterminele sel marin à prendre la forme secondaire octaèdre,tandis que dans l'eau pure il cristallise en cubessemblables à ses molécules constituantes. Elle produitun effet inverse sur le muriate d'ammoniac,qui cristallise en octaèdre dans l'eau pure ; elle lefait cristalliser en cube.Un peu plus ou un peu moins de base dans l'alunlui imprime des formes secondaires cubiquesou octaédriques ; et ce stfnt si bien des formes secondairesqu'un cristal octaèdre d'alun, plongédans une solution plus riche en base, s'y enveloppede couches qui lui donneront en définitive la formed'un cube.Partant de ces premiers faits, M. Beudant a traité


ET GÉOLOGIE. 325la question en grand, et a soumis la cristallisationdes sels à l'épreuve de toutes les circonstances qu'ila crues capables d'influer sur elle ; savoir, i ° les circonstancesextérieures et générales, telles que lachaleur, le poids de l'atmosphère, le plus ou moinsde rapidité de l'évaporation, le volume de la solution,la forme du vase, etc. ;2° Les riiélanges mécaniques qui troublent la solutionen s'y trouvant, soit en simple suspension,soit en précipité sans cohérence, soit sous forme dedépôt gélatineux ;3° Ce qu'il appelle les mélanges chimiques existantsdans les mêmes solutions ;4° Enfin les variations entre les proportions desprincipes constituants de la substance cristallisée.Les circonstances du premier genre n'exercentpoint d'action, si ce n'est sur la grandeur et lanetteté des cristaux. Il en est de même des petitesquantités de matière qui peuvent rester en suspensionpermanente dans un liquide. Mais on ne peutpas en dire autant des précipités et des mélangeschimiques.Les cristaux qui se forment au milieu d'un précipitésans cohérence, d'une bouillie déposée aufond du liquide, entraînent toujours une partieplus ou moins considérable des molécules de cedépôt, et perdent alors ordinairement toutes les


32ÔMINÉRALOGIEpetites facettes additionnelles qui auroient pu modifierleur forme dominante. Cette forme arrive àplus de simplicité lorsqu'elle auroit dû être compliquée; mais les substances qui auroient sans celadonné des cristaux simples continuent de les donner,et ne reçoivent point de modification.Dans un dépôt gélatineux les cristaux sont rarementgroupés, mais presque toujours isolés * d'unenetteté et d'une régularité remarquables; et ils neprauvent d'autres variations que celle qui résulte del'intervention chimique de la substance du dépôt.Les variations sont assez nombreuses dans lescristaux qui se forment dans un mélange chimique,c'est-à-dire dans une solution d'une autre substance,même lorsque cette substance ne peut s'unir aveceux. Les phénomènes rapportés plus haut s'y répètentde diverses façons : du sel marin qui cristallisedans une solution de borax prend des tronca>turesaux angles solides de ses cubes ; l'alun dansl'acide muriatique prend une forme que M. Beudantn'a jamais obtenue autrement.Si la dissolution peut s'unir en une portion quelconqueau cristal d'une autre substance qui s'yforme, et que néanmoins ce cristal détermine, parsa plus grande énergie, la forme de la moléculeconstituante, ainsi que nous l'avons vu l'annéedernière pour le cas du sulfate de fer,la matière de


ET GÉOLOGIE. 327la solution exerce aussi à son tour quelque influencesûr la forme secondaire, et cette influence consistele plus souvent à la simplifier en faisant disparaîtreles surfaces additionnelles.Ainsi 3o ou 4o centièmes de sulfate de cuivre sesoumettent encore à la cristallisation rhomboédriquedu sulfate de fer, mais en réduisant au purrhomboïde, sans aucune troncature ni sur les anglesni sur les arêtes:Un peu d'acétate de cuivre ramène à cette formeun sulfate de fer, quelque disposé qu'il soit à se compliquerde surfaces additionnelles.D'autres mélanges simplifient un peu moins:ainsi le sulfate d'alumine ramène celui de fer à unrhomboèdre tronqué aux angles latéraux, ou à ceque M. Haùy nomme variété unitaire; et mêmequand on trouve dans le commerce de la couperosede cette variété, ce qui est assez commun, on peutêtre sûr, selon M. Beudant, qu'elle contient de l'alumine.Enfin les proportions de la base à l'acide, oudans les sels doubles des deux bases entre elles,produisent a ussi des effets très sensibles sur la formesecondaire sans altérer le moins du monde la fqrmeprimitive. C'est ce que nous avons vu plus hautpour l'alun, et ce que M. Beudant a constaté surpu sieurs autres sels.-


328 MINÉRALOGIEL'auteur de ces recherches en fait des applicationsingénieuses aux phénomènes de diverses substancesminérales cristallisées, sur lesquelles nousne pouvons pas faire d'expériences directes dansl'état actuel de la science; et il y fait remarquer degrandes analogies : les cristaux mélangés de substancesétrangères sont en général plus simples ; onen voit même dans l'espèce de l'axinite, ou schorlviolet du Dauphiné, dont une extrémité mélangéede chlorite est réduite à la forme primitive, tandisque l'autre, plus pure, est variée de plusieurs fa-.cettes produites par divers décroissements.On trouve assez abondamment dans un ravindu Mont-Dor en Auvergne des fragments d'unebrèche que sa dureté et ses autres qualités extérieuresfaisoient regarder comme siliceuse, et à laquelleles minéralogistes n'avoient donné d'attentionqu'à cause de quelques parcelles de soufre quise voient quelquefois dans ses petites cavités.M. Cordier l'ayant soumise à des épreuves variéess'aperçut qu'elle donnoit par la chaleur unequantité notable d'acide sulfurique; et, d'après cetteindication importante, il procéda à une analysecomplète, d'où il résulte que cette pierre contientenviron 28 centièmes de silice, 27 d'acide sulfurique,3i d'alumine, 6 de potasse, et un peu d'eauet de fer. C'est à peu de chose près la composition


ET GÉOLOGIE. 329de la pierre célèbre de la Tolfa qui donne l'alun deRome. Et en effet en traitant la brèche du Mont-Dor suivant les procédés en usage à la Tolfa, c'està-direen la concassant, la torréfiant, et l'exposantà l'air humide, on a obtenu de 10 à 20 pour centd'un alun très pur; elle en donne même sans latorréfier, et par la simple exposition dans un lieuhumide.D'après des recherches faites sur les lieux parM. Ramond, il est probable qu'avec un peu desoin l'on découvrirait, dans la partie moyenne duMont-Dor, les couches dont les fragments éparsdans ce ravin se sont détachés,et que l'on pourroity ouvrir des carrières dont l'exploitation ne seroitpas sans avantage.M. Cordier regarde ces sortes de pierres commeune espèce minéralogique dont l'essence consisteraitdans la présence de l'acide, de l'alumine, et dela potasse. La silice y est moins essentielle, car ilexiste à Montrone en Toscane des carrières d'unepierre qui n'en contient point, mais qui a tous lesautres principes constituants, et donne les mêmesproduits que celle de la Tolfa. Les variétés de cetteespèce, où il entre delà silice, se distinguent aisémentpar la gelée quelles forment quand on lestraite successivement par la potasse caustique etl'acide hydrochlorique étendu dans l'eau.


33oMINÉRALOGIEM. Cordier y rapporte plusieurs pierres volcaniquesdésignées vaguement jusqu'ici, par les géologistes,sous la dénomination générale de lavesaltérées.Des paysans du département du Lot, conduitspar l'appât de prétendus trésors que l'on disoitavoir été enfouis autrefois par les Anglois danscertaines cavernes des environs de Breugue, ontpénétré dans ces cavités, et, ayant creusé et élargiquelques crevasses qui se trouvoient dans leurprofondeur, ont découvert un dépôt d'ossements,dont les uns appartenoient à des chevaux, les autresà des rhinocéros de la même espèce dontil ya en si grande quantité des ossements fossiles enSibérie, en Allemagne, et en Angleterre; les troi


ET GÉOLOGIE.33 ICaroline du nord. Au milieu d'une colline d'unsable très fin,entremêlé de petites pierres de quartzet de nombreuses parcelles de mica argenté, setrouve une veine de pierres disposées si régulièrementque les habitants, qui l'ont remarquée depuislongtemps, lui donnent le nom de mur naturel, etque des naturalistes ont même prétendu depuisquelque temps que c'étoit un véritable mur quipou voit avoir été construit à des époques reculéespar quelque peuple aujourd'hui inconnu. Lespierres ont généralement quatre arêtes, sont aminciesà l'une de leurs extrémités, et ont une petiteentaille au-dessous du sommet: elles sont rangéeshorizontalement. L'espèce de mur qu'elles formenta environ 18 pouces d'épaisseur ; sa hauteur à l'endroitoù il est à découvert est de 6 à 9 pieds: maisonl'a suivi en creusant jusqu'à 12 et 18 pieds dansle sol, et on a déjà reconnu qu'il s'étend à plus de3oo pieds en longueur. Une sorte de ciment argileuxremplit les intervalles des pierres, et les enduità l'extérieur, et chacune d'elles est revêtue d'unecouche de terre ocracée et sablonneuse.M. de Beau vois en a rapporté quelques unes,qui, examinées par les minéralogistes de l'Académie,ont offert la plupart des caractères des basaltes;mais comme il n'a encore été observé dansles États-Unis aucune trace ni de basaltes ni de vol-


332 MINÉRALOGIEcans, et comme le terrain environnant est généralementprimitif, il seroit possible que ce prétendumur ne fût qu'une couche de trapp, roche amphiboliquetrès semblable à certains basaltes.Nous avons parlé en 1816 du travail entreprispar M. Moreau de Jonnès pour déterminer la naturegéologique des Antilles, des idées généralesqu'il s'en fait, et des descriptions particulières relativesà la Martinique et à la Guadeloupe, qu'il aprésentées à l'Académie. Il a continué la rédactionde ce travail, et a lu un mémoire sur le Vauclain,l'un des monts les plus remarquables de la Martinique,non qu'il soit le plus élevé, mais parcequec'est celui qui sert de point de reconnoissance etqui annonce cette île aux navigateurs. Il n'a pointla forme d'un cône creusé à son sommet, mais celled'un prisme couché ou d'une immense arête basaltique, et M. de Jonnès le regarde comme unepartie deTorle et du bord d'un très grand cratèredont il croit avoir reconnu tout le pourtour. Lefond de ce cratère est aujourd'hui une vallée aussifertile que bien cultivée.Le même auteur a donné une description géologiquede la Guadeloupe. Il a reconnu que l'île occidentale,où il y a une solfatare en activité, et dontla surface est d'environ soixante-sept lieues carrées,doit son origine à des éruptions parties de quatre


ET GÉOLOGIE. 333grands foyers volcaniques sous-marins, et que l'îleorientale, connue sous le nom de Grande-Terre, estformée d'une base volcanique recouverte par unegrande stratification de calcaire coquillier. A laMartinique les quartiers situés à l'orient sont égalementrecouverts par des lits de calcaire marin soitcoquillier, soit coralin.La seconde partie de la Richesse minérale deM. Héron de Villefosse, qui avoit été présentée enmanuscrit à l'Académie en 1816, a paru impriméecette année avec l'atlas. Cet ouvrage a justifié lejugement qu'en avoit porté la compagnie, et estdevenu le guide indispensable de tous ceux quis'occupent de l'administration des mines et de leurexploitation.ANNÉE 1819.La branche la plus intéressante, mais peut-êtrela plus difficile de la connoissance des minéraux,celle qui depuis Pallas, de Saussure et Werner occupele plus généralement l'attention des naturalistes,c'est la position respective des substancesminérales dans les masses qui forment l'écorce duglobe. En effet c'est dans leur superposition seulementque l'on peut retrouver les traces de leurhistoire et les monuments de leur chronologie.Déjà elle nous offre des faits généraux bien consta-


334 MINÉRALOGIEtés, d'où se laisse déduire une première classificationdes terrains d'après leur plus ou moins d'an-.cienneté; mais lorsque I'OB veut fixerles limites dechacune de ces classes principales, et sur-tout lorsqu'ils'agit de distribuer d'après l'ordre de superpositionles espèces particulières de terrains quiappartiennent à chaque classe, il s'en faut de beaucoupque les faits recueillis soient assez précis etassez nombreux. Souvent toute apparence d'ordreéchappe à l'observateur, et ce n'est qu'après desrecherches pénibles et des combinaisons délicatesqu'il parvient à renouer le fil qui s'étoit brisé dansses mains.On peut très bien juger de cet état de la sciencedans un ouvrage que M. de Bonnard, ingénieur enchef des mines, a présenté à l'Académie, et qu'il aintitulé Aperçu géognostique des terrains. C'est unexposé des diverses roches connues, des positionsoù chacune d'elles se rencontre, du plus ou moinsd'étendue qu'elles occupent, et des fossiles quecontiennent leurs lits. L'auteur a mis à profit lesobservations les plus récentes des autres géolo-igistes, et celles qu'il a faites lui-même dans denombreux voyages. Il seroit bien difficile d'analyserici un ouvrage qui n'est lui-même qu'une analysefort concentrée. Nous en présenterons seulement lesrésultats principaux. On y voit qu'à l'époque reculée


ET GÉOLOGIE. 335où se formoient les terrains primordiaux le liquidedéposoit quelquefois encore, à deux et trois reprises,les mêmes substances qu'il avoit déposéesd'abord. Les irrégularités, les répétitions des roches,deviennent plus fréquentes à la seconde époque,lorsqu'il se dépose aussi des bancs composés desdébris des roches primitives, et lorsque les rochesqui domineront à l'époque troisième commencentà se montrer. A mesure qu'on avance vers les tempsrécents les roches deviennent moins caractérisées,ou plutôt les minéralogistes, donnant moins d'attentionà leurs différences, ne les distinguent plusd'une manière aussi claire. Il arrive enfin unequatrième époque où il ne se forme plus de cescouches générales qui embrassent presque tout leglobe, mais seulement des dépôts partiels qui semblents'être précipités dans des bassins séparés lesuns des autres.,»? M. de Bonnard fait connoître les roches qui appartiennentà chacune de ces grandes classes, nonplus par ordre de formation, parcequeles retours,lés répétitions, lui auroient donné trop de difficultés,mais d'après leur nature minéralogique,ce qui s'écarte peut-être un peu de son plan pri-rmitif : mais la géognosie en est là ; le temps seulet les efforts d'observateurs doués de génie peuventdécouvrir des lois qui permettront à la mé-


336 MINÉRALOGIEthode de descendre jusqu'aux lits les plus particuliers.M. Brongniart a montré par un exemple curieuxqu'en effet les mêmes lits, contenant des fossilesde même nature, se trouvent quelquefois sur lespoints de la terre les plus éloignés avec des circonstancesdont la similitude va jusqu'à la minutie.M. Hozack, médecin et naturaliste américain,avoit adressé à l'Académie une empreinte de cetteespèce singulière de crustacé inconnue aujourd'huidans les mers, et qui se rencontre assez fréquemmentpétrifiée, à laquelle on a donné le nomde trilohite.M. Brongniart, qui avoit fait depuis long-tempsune étude particulière de ce genre de fossiles, avoitmontré que tous les terrains où il existe appartiennentà la classe dite des terrains de sédimentsanciens, et que les différences spécifiques qu'ilprésentesont en rapport avec le plus ou moins d'anciennetédes dépôts qui composent ces terrains.Ce que l'on a observé sur les trilobites d'Amériqueest en accord parfait avec le résultat des observationsfaites dans l'ancien monde.M. Rigollot, membre de l'académie d'Amiens, aadressé des observations sur un genre de fossile


ET GÉOLOGIE. 337plus commun, sur des dents d'éléphants et de rhinocérosdéterrées à la porte d'Amiens dans descouches de gravier. La vallée de la Somme, commebeaucoup d'autres, est remplie de ces sortes dedébris organiques ; et déjà plusieurs fois nous.avonseu occasion d'en parler d'après les recherches deM; Traullé, correspondant de l'Institut à Abbeville.Nous devons à M. Brochant un traité élémentairesur la cristallisation, que l'auteur a inséré dans leDictionnaire des Sciences naturelles. Tous les faits quecette partie importante de l'histoire des minérauxdoit aux longues et savantes recherches de M. Haùysur les formes des cristaux et sur la manière dontcelles de chaque espèce peuvent être ramenées àune forme primitive constante sont exposés danscet ouvrage avec méthode et clarté. L'auteur y ajoint les résultats des nouvelles expériences deM. Beudant sur les causes extérieures et intérieuresqui peuvent déterminer dans chaque espèce la productiond'une forme secondaire plutôt que d'uneautre.M. Sage, accable par des infirmités cruelles etnombreuses, ne cesse cependant de donner au publicquelques produits de sa plume.L'Académie a reçu de lui cette année une bra-BDFFON. COMPLÉM. T. II. 22


338 MINÉRALOGIEchure sur ses découvertes minéralogiques, et unouvrage qu'il a intitulé : Mélanges historiques et physiques.ANNÉE 1820.M. Cordier, dans un mémoire dont nous avonsrendu compte l'année dernière, nous a appris quela pierre d'alun compacte ne se trouve pas seulementà la Tolfa et dans quelques endroits de l'Italieet de la Hongrie, mais qu'on la rencontre dans plusieursvolcans brûlants, et dans les volcans éteintsde l'Auvergne ; il a de plus établi cette pierrecomme une espèce minéralogique caractérisée.Cette année le même minéralogiste en a décrit lescristaux d'après jrte beaux échantillons de la Tolfaqui lui ont été communiqués par M. le chevalier de "Parga, conseiller d'état du roi d'Espagne.Ces cristaux n'excèdent pas trois millimètres.Leur forme primitive est un rhomboèdre de 89 0 etde 91 0 d'angles, en sorte qu'à l'œil on la confondraitavec un cube. Il est sous-divisible dans lesens d'un plan perpendiculaire à l'axe. Outre laforme primitive on en connoît.une variété tronquéepar les sommets, et dont la troncature peutaller jusqu'à convertir le cristal en une lame hexagone.Leur pesanteur spécifique est de 2,7 517 ; leuranalyse a donné : „


ET GÉOLOGIE.33gAcide sulfurique .. 35,263Alumine 39,533Potasse... ..... .. 10,377Eau14^27M. Beudant, qui a examiné sur place en Hongriedes roches de la même nature, les a vues au milieud'autres roches auxquelles elles passent insensiblement,et qui lui ont paru résulter de la décompositiondes pierres ponces, et d'une nouvelle combinaisonde leurs éléments. Elles renferment souventdes débris organiques.Les roches appelées serpentines ou gabbro desItaliens, et dans les derniers temps ophiolithes, etces autres roches que les Italiens nomment granitoneet auxquelles on vient de donner le nom d'euphotides,forment, soit chacune à part, soit associéesl'une à l'autre, des étendues considérables deterrain, et les géologistejs les plus habiles avoientpensé jusqu'à présent qu'elles s'enfonçoient toujourssous les roches calcaires qui les avoisinent, etappartenoient en conséquence à des formationsplus anciennes ; on les rapportait sinon aux terrainsprimordiaux, du moins aux premiers terrainsde transition.M. Brongniart, qui a beaucoup étudié la positionde ces roches dans son dernier voyage d ? Italie, croit22.


34oMINÉRALOGIEen avoir reconnu des couches bien postérieures atous les terrains de transition.Il les a vues distinctement en trois lieux différentsde la crête des Apennins; savoir, au-dessusde la Spezzia, au-dessus de Prato, et entre Florenceet Bologne, reposant sur des jaspes et sur des bancsde différents calcaires de sédiment et d'agrégation,tels que le calcaire compacte, à grain fingris brun,traversé de veines spathiques, qui forme en certainsendroits une grande partie de la masse desApennins; le calcaire solide, d'apparence grenueet micacée d'un gris bleuâtre, appelé pietra serenapar les Florentins ; et cet autre calcaire grenu et micacé,de texture schisteuse, nommé macigno ou bardellone.On voit quelquefois entre les lits de ces pierresdes noyaux de silex, toujours étrangers aux anciensterrains de transition ; mais ils ne renferment pointcomme ces derniers des métaux ni des dntracites;si on les compare au contraire avec ceux qu'on ap*pelle alpins, et qui sont certainement plus modernesque les terrains de transition, on trouve qu'ils ontavec eux la plus grande ressemblance; ainsi les couchesd'ophiolithes placées sur les pierres de naturealpine sont elles-mêmes nécessairement plus modernesque les terrains de transition.A la vérité M. Brongniart a remarqué en quel-


ET GÉOLOGIE.34lques endroits, notamment au JVfonte-Ramazzo, audessusde Gênes, que l'ophiolithe y repose immédiatementsur des terrains talqueux et schisteuxanciens, mais il pense qu'en ces endroits les calcairesqui devraient s'interposer sont venus à manquer.Il a observé en ce même lieu que le marbre célèbredans les arts sous le nom de vert de mer, et quise compose de calcaire et de serpentine, appartientaux terrains ophiolithiques.L'auteur nous fait aussi connoître dans le coursde son mémoire que les émanations du gaz hydro^gène qui entretient les feux si célèbres de Pietra^Mala, entre Florence et Bologne , et ceux de Rarigazzo,entre Pistoia et Modène, sortent du calcairearénacé; mais les autres vapeurs, non moins re-rmarquables, d'une chaleur excessive, et qui portentl'acide boracique dans les petits lacs des environsde Volterre, traversent le calcaire compacte.Quant à l'opinion qui fait le principal objet deson travail, elle est tellement différente de celle detous les géologistes qui ont jusqu'à présent visitél'Italie que M. Brongniart se demande s'il n'y auroitpas en ce pays deux formations ophiolithiques.Il est sur-tout porté à le penser d'après une descriptiontrès explicite donnée par M. Brocchi du promontoired'Argentaro près d'Orbitello, où il paroî-


34^MINÉRALOGIE•trait que la serpentine est bien certainement sousle calcaire.Les géologistes avoient d'abord porté leur attentionsur les grandes masses pierreuses qui formenten quelque sorte l'ossature ou la charpente duglobe : les grandes chaînes granitiques ou schisteuses,les couches de marbres salins, les montagnescalcaires d'une grande étendue, avoientété lesobjets de leurs études ; mais pendant long-tempsils avoient négligé les terrains plus modernes quiforment nos plaines et nos collines inférieures; onpeut même avancer qu'il y a vingt ans les détails deces terrains, les lois de leur composition, étoientà-peu-près inconnus; on les considérait comme desdépôts de transports locaux et très limités, qui méritaientà peine que l'on s'en occupât, tandis qu'enréalité ils offrent à l'esprit autant et plus de sujetsd'observations, de méditations, et même de découvertes,que les terrains primordiaux et ceux qui lesaccompagnent immédiatement. Les recherches faitesaux environs de Paris par MM. Cuvier et Brftngniart,celles que d'autres savants ont faites en diversesparties de l'Angleterre, ont commencé àouvrir cette nouvelle mine; on a vu que de certainessuccessions d'êtres organisés, des bancs correspondantsde pierres diverses, remplissent dans


ET GÉOLOGIE. 343un ordre déterminé des espaces infiniment plusconsidérables qu'on ne l'avoit pensé ; on s'est convaincuque l'histoire des hommes elle-même étoitintéressée à ces traces des révolutions qui ont précédéimmédiatement l'établissement des peuples ; eton s est livré avec ardeur à une branche entièrementnouvelle de faits.M. Prévost, élève de M. Brongniart, a étudiédans cette vue les environs de Vienne en Autriche,et il y a retrouvé plusieurs des circonstances les plusimportantes reconnues dans nos environs.Le bassin de Paris, renfermé dans une grandeexcavation de la craie, se compose de trois formationsprincipales : une calcaire d'origine marine,placée inférieurement, et qui donne nos pierres àbâtir ; une intermédiaire, principalement gypseuse,et qui ne renferme que des produits de la terre etde l'eau douce; enfin une supérieure de nature sableusede nouveau produite par la mer, et recouverteencore par une dernière couche de terraind'eau douce.Le fond du bassin de Vienne, appuyé sur la baseseptentrionale des Alpes, n'est pas de craie, maisde ce calcaire compacte que l'on a,nommé alpin, etfort inférieur à la craie, recouvert de cette espècede poudingue nommée en Suisse nagelflue ; les terrainstertiaires marins qui remplissent ce bassin


344 MINÉRALOGIEsont comme les nôtres recouverts de terrains d'eaudouce, mais notre formation gypseuse y manque,et ils ressemblent par leurs coquilles non pas ànotre calcaire marin inférieur, mais au supérieur;et à cette occasion M. Prévost, ayant comparé descoquilles de nos deux terrains d'origine marine, ya remarqué des différences plus considérables quene les avoient aperçues MM. Brongniart et Cuvierdans leur premier travail.Mais des coquilles auxquelles celles des environsde Vienne ressemblent encore plus qu'à celles deParis, ce sont celles qui remplissent les couches descollines du pied de l'Apennin, et que M. Brocchi asi bien fait connoître dans son bel ouvrage intitulé: Conchiologia subapennina 7M. Prévost a retrouvé aussi les mêmes coquillesdans beaucoup de terrains superficiels du midi dela France.ANNÉE 1821. tM. Cuvier donne une édition nouvelle et entièrementrefond ue de son Histoire des Ossements Fossiles.Le premier volume a paru il y a six mois ; le secondet le troisième paraîtront sous peu de jours. Quelquesunes des découvertes nouvelles qui entrentdans ces trois volumes ont été communiquées parl'auteur à l'Académie. Teldes'sonf sur-tout une nou-


ET GÉOLOGIE. 345velle et très petite espèce d'hippopotame fossile, ettrois espèces nouvelles de rhinocéros fossiles. Unede ces espèces a des dents incisives, comme tous lesrhinocéros d'Asie, une autre réunit à ce caractèrecelui d'être tout au plus égale au sanglier pour lataille.M. Cuvier a recueilli aussi plusieurs espèces fossilesde tapirs d'une très grande taille, et jusqu'àsix ou huit espèces d'un genre inconnu, voisin destapirs, et qu'il nommé lophiodon.Dans son troisième volume, qui traite des anhmaux enfouis dans les gypses des environs de Paris,M. Cuvier ajoutant tous les morceaux qui lui ontété apportés depuis sa première édition , et lesprésentant dans un ordre plus méthodique qu'iln avoit pu le faire d'abord, restitue quinze espècesdes genres perdus, qu'il a désignés depuis longtempssous les noms danoplotherium et de palœotherium;il fait connoître deux autres genres de pachydermesdifférents des premiers, et qu'il nommechœropotame et adapis. Ces mêmes carrières de gypselui ont fourni plusieurs espèces de carnassiers, deuxrongeurs, et jusqu'à huit ou dix espèces d'oiseaux.Sn sait combien les oiseaux sont rares parmi lesfossiles, et même que ce n'est qu'à Montmartrequ'il en avoit été trouvé d'incontestables. M. Cuvieren a recueilli en effet qui ne laissent aucun doute,


346 MINÉRALOGIEet un entre autres qui présente toutes ses parties,le bec, les ailes, le sternum, le bassin, et les piedsparfaitement reconnoissables.On vient aussi d'en découvrir en Auvergne; etM. le comte de Chabrol, préfet de la Seine, en adonné au Muséum d'histoire naturelle des échantillonsdont les caractères sont parfaitement assurés.Le même troisième volume contiendra la descriptiond'un genre de pachydermes entièrementinconnu et fort remarquable, qui vient d'être trouvédans les lignites de la Ligurie.Ainsi le catalogue de ces animaux qui habitaientautrefois la surface de la terre, et que les révolutionsdu globe ont détruits, s'étend et s'enrichitchaque jour, et il devient de plus en plus vraisemblableque cette ancienne population du monden'était ni moins belle ni moins variée que celle quil'occupe aujourd'hui.On ne peut espérer de retrouver les traces descatastrophes qui ont frappé tant d'êtres considérablesque par une étude approfondie des coucheset des bancs qui recèlent les débris de ces êtres.C'est à quoi MM. Brongniart et Cuvier ont donné,comme on sait, une grande attention dans le rayonqui se trouvoit à portée de leurs observations.Leur Description Géologique des environs de Pa-


ET, GÉOLOGIE. 347ris reparaît augmentée de beaucoup de faits nouveaux,et M. Brongniart y a sur-tout ajouté untravail d'un grand intérêt.C'est une comparaison des couches de nos environsavec les couches analogues des autres pays ;comparaison d'où il résulte que la plupart de noscouches s'étendent infiniment plus loin qu'on nel'avoit cru, et en conservant toujours leurs caractères,et, qui plus est, les débris des mêmes espèces,soit d'animaux vertébrés, soit de coquilles.C'est ainsi que dans la partie de ce travail quiconcerne la craie ,.et queM. Brongniart a lue à l'Académie, il retrouve les mêmes coquilles, et dansle même ordre de superposition , en France, enSuisse, en Angleterre, en Allemagne, en Pologne,et jusqu'en Amérique.Dans une autre partie de son travail, il fait connoîtreles rapports des terrains calcaires et trappéensqui occupent le pied méridional des Alpes de Lombardie,avec notre calcaire grossier inférieur. Laposition relative de ces terrains, que M. Brongniarta étudiés en cinq endroits différents, est lamême ; on y trouve les mêmes débris organiques ; etil n'est pas jusqu'aux couches de nature trappéenne,auxquelles M. Brongniart ne trouve de l'analogieavec les crains de terre verte si abondamment répandusdans cette partie de nos bancs calcaires.


348 MINÉRALOGIELes recherches de ce savant minéralogiste surl'argile plastique qui recouvre, la craie , et sur leslignites ou bois fossiles qu'elle contient, ne sont pasmoins dignes de remarque. Ces lignites qui contiennentl'ambre jaune ont été déposés dans l'eau'douce; et par-tout où ils se montrent, c'est avec descoquilles d'eau douce; en sorte que ce grand phénomènede l'envahissement de la mer sur des paysauparavant peuplés d'animaux et de végétaux terrestresn'est plus sujet à contestation pour aucunecontrée. Dans la nôtre il est certain qu'il a eu lieuau moins à trois époques distinctes. C'est à la secondede ces époques que furent submergés lespalœotherium,et les autres quadrupèdes enfouis aujourd'huidans nos gypses, ainsi que les palmierset les autres végétaux qui les ombrageoient ou lesnourrissoient.L'histoire de ces végétaux elle-même étoit intéressanteà faire. M. Adolphe Brongniart, digne filsd'un homme dont les travaux ont si fort avancé lagéologie, s'en est occupé. Il a été obligé de chercheraux végétaux des caractères distinctifs, tirés des partiesqu'ils conservent dans l'état fossile, et qui sontsouvent fort différentes de celles que les botanistesétudient le plus; et il est ainsi parvenu non seulementà étendre ce que MM. de Schlotheim et deSternberg avoient déjà donné sur les végétaux fos-


ET GÉOLOGIE. 349siles en général, mais à déterminer particulièrementplusieurs des espèces de nos couches. Ces espècesne diffèrent pas moins que les animaux des végétauxqui couvrent aujourd'hui la surface du pays.M. de Férussac, qui s'est tant occupé de l'histoiredes coquilles de terre et d'eau douce, a cherché denouveau à l'appliquer à l'histoire des révolutionsdû globe. Il a lu à l'Académie une suite de mémoiresgéologiques sur les terrains qu'il appelle tertiaires,particulièrement sur les dépôts de cette espèce decharbon de terre qu'on a nommée lignite, et surles coquilles fluviatiles qui les accompagnent. Il ydécrit ces terrains tels qu'on les observe dans lesdivers bassins des rivières de France, en Angleterre,en Italie, dans les Alpes, et croit pouvoir tirer lesrésultats suivants des faits observés par lui ou parles autres géologues.Selon lui, toutes ces sortes de formations sont locales.La succession des divers dépôts-marins oud'eau douce est le plus souvent différente dans desbassins contigus. Les débris de l'ancienne végétationdu globe couvrent des parties considérables desa surface; on en trouve à toutes les hauteurs età toutes les latitudes. Cette dernière observationprouve qu'à des élévations ou à un degré de températurequi ne permettent plus aujourd'hui à la végétationde se développer, elle était autrefois très


35oMINÉRALOGIEforte. Ses débris montrent qu'elle étoit analogue àcelle qui couvre aujourd'hui la zoneoù nous vivons ;tandis que les débris des végétaux renfermés dansles parties basses de notre sol sont au contraireanalogues à la végétation actuelle de la zone torride.M. de Férussac en conclut que la température de lasurface de la terre a notablement changé; qu'il y aeu un refoulement de la végétation des parties élevéesvers les parties moyennes, et de celles-ci versles parties basses. Comme la plupart des géologistesdu dernier siècle, il rapporte l'anéantissement desraces d'animaux perdues aux mêmes causes qui ontfait changer la végétation, c'est-à-dire à l'abaissementde la température et à celui des eaux, bienque l'on sache aujourd'hui que les animaux, telsque les mammouths que l'on croyoit naturels de lazone torride, ont au contraire très bien pu supporterle froid, à cause de la laineet des longs poilsdont ils étoient revêtus.On avoit trouvé, il y a quelques années/ à laGuadeloupe, dans un endroit que recouvre la hautemarée, des squelettes humains incrustés dans uneroche calcaire; et l'on avoit prétendu en faire unargument contre la proposition assez généralementreçue en géologie, qu'il n'existe point, sur nos continentsactuels, d'os humains à l'état fossile. M. Moreaude Jonnès, qui a examiné les lieux, a fait voir


ET GÉOLOGIE. 35 1que la roche qui contient ces squelettes est d'originetrès moderne, et formée à cet endroit, commeen beaucoup d'autres points du rivage, par l'agglutinationdes fragments de madrépores, et d'autresparcelles calcaires que la mer y rejette.Ces squelettes n'appartiennent donc point à cetordre d'ossements fossiles qui remplit en si grandeabondance les couches régulières et étendues duglobe, et ils rentrent dans les phénomènes locauxetaccidentels que les causes actuellement agissantescontinuent de produire.*.» "ANNÉE 1822.L'Académie a eu le malheur de perdre l'un deses plus illustres membres, M. Haûy, au momentoù il étoit occupé de publier une nouvelle éditionde son célèbre ouvrage sur les minéraux : mais lepublic n'en sera pas privé ; tout le manuscrit étoitpréparé, et l'impression s'achève sous les yeux deM. Delafosse, l'un des élèves les plus distingués deM. Haùy, et celui qu'il avoit choisi depuis longtempspour le seconder dans les détails de cettegrande entreprise.On a déjà deux volumes qui embrassent toute lathéorie mathématique de la cristallisation, et troisautres sur la minéralogie proprement dite; le quatrièmeet dernier reste seul à paraître.


352 MINÉRALOGIEC'est en portant à ce degré de perfection un ou-*vrage depuis long-temps admiré du monde savantque cet homme de génie a terminé une carrière siféconde pour le développement de l'une des branchesles plus importantes et les plus difficiles dessciences naturelles.Les matériaux les plus utiles à la géologie sontles descriptions spéciales et topographiques desdivers pays, où l'on note avec soin l'ordre dans lequelles bancs qui composent leur sol se succèdent,soit dans une superposition horizontale, soit ens'appuyant obliquement les uns sur les autres. Cedernier genre de succession, propre aux bancs plusanciens, se voit plus facilement qu'ailleurs le longdes bords escarpés de la mer, où l'on en suit horizontalementun beaucoup plus grand nombre quel'on ne pouvoit faire par des percements verticaux,puisque l'on y voit successivement sortir en quelquesorte de dessous terre des couches qui dans d'autreslieux sont enfoncées à une grande profondeur. Pénétréde cette vue, M. Constant Prévost, naturalistehabile, élève de M. Brongniart, a suivi les falaisesde la Picardie et de la Normandie, depuis Calais j usqu aCherbourg.Aux deux extrémités de cette ligne, de^près dequatre-vingts lieues, on reconnoît les mêmes roches


ET GÉOLOGIE. 353et des roches qui appartiennent aux terrains primordiaux,et forment comme les bords de l'immensebassin dans lequel se sont déposés les bancsdes terrains postérieurs.C'est vers Dieppe que paroît être le milieu de cebassin, et que l'on ne voit à jour que les bancs lesplus superficiels, qui sont presque horizontaux.Des deux côtés se relèvent obliquement les bancsintermédiaires.M. Prévost a présenté un tableau de cette coupe,où une enluminure ingénieuse montre les grandesdivisions de terrain avec leurs caractères générauxet leurs dernières subdivisions, et par conséquenttous les faits de détail qui en composent l'histoire.Dans cette série le calcaire coquillier le plus ancienest celui que caractérisent les huîtres dites gryphées,et que l'on retrouve identique au pied duJura. Après luj vient le calcaire nommé lias par lesAnglois, et ensuite le calcaire oolithique. C'est entreles bancs de ce dernier qu'est interposée cette marneargileuse qui contient une espèce remarquable etinconnue de fossile appelée ichthyosaurus, l'un desreptiles qui aient vécu le plus anciennement sur leglobe. La pierre de Portland et les pierres de Caen,si connues par leur facilité à se tailler et leur emploien architecture, appartiennent à ce calcaire oolithique.Sur lui repose la craie avec ses bancs deBUFFON. COMPLF.M. T. IIî3


354 MINÉRALOGIEsilex ; mais un fait très remarquable, et que M. Prévostparoît avoir constaté, c'est qu'on observe enabondance dans certains oolithes des coquillesnommées cérites, et d'autres très communes aussidans le calcaire grossier, terrain supérieur à lacraie, et qui est séparé par toute l'immense épaisseurde celle-ci du terrain oolithique, tandis quela craie ellemême n'en offre aucune trace. Ontrouve aussi dans l'oolithe des ossements de poissonset de reptiles, et nommément d'un crocodileinconnu. Il y a encore une et même deux autresespèces de crocodiles dans les marnes bleuâtres,placées entre le calcaire oolithique et la craie, qu'ilne faut pas confondre avec celles que l'on voit entrel'oolithe et le calcaire à gryphées. Sur la craie sevoient quelques lambeaux de nos terrains des environsde Paris, et sur-tout de notre terrain d'eaudouce inférieur et des lignites qui en forment souventune grande partie.C'est ainsi que M. Prévost arrive à lier par unesuccession non interrompue les anciens terrainsdits primitifs, ou antérieurs à la vie, avec nos terrainsrécents des environs de Paris, décrits avectant de détails par MM. Brongniart et Cuvier ; maissur ces derniers terrains eux-mêmes M. Prévost afait encore des observations intéressantes.Ceux de transport, situés à l'est de la rivière de


ET GÉOLOGIE. 355Dive, ne lui ont montré que des débris des silex dela craie et de ses couches lés plus profondes, tandisqu'à l'ouest ils ne lui ont offert que des fragmentsroulés de quartz et de grès appartenant aux couchesde transition du Cotentin, qui'sont encore de beaucoupinférieures à la craie. Ces divers débris neviennent pas cependant de la profondeur, mais ilss'expliquent par la première observation de l'auteur,celle qu'à mesure qu'on se porte vers les extrémitésdu bassin on y rencontre les terrains plusanciens et plus profonds qui se relèvent et qui embrassentles terrains plus récents et plus superficiels.C'est des crêtes redressées de ces terrainsanciens que leurs débris ont pu être roulés sur lesterrains modernes qui forment des plaines moinsélevées.Ce résultat général des observations de M. Prévostest accompagné de plusieurs faits de détail dontles conséquences intéressent toutela géologie. Ainsiil a vu dans la craie des silex en couches continueset fort étendues, dont quelques parties paroissentavoir été rompues et déplacées, et d'autres fléchieset diversement courbées ; ce qui annonce qu'à unecertaine époque elles ont été dans un état de mollesse.Il a constaté que les belles carrières de Caen.depuis si long-temps célèbres, appartiennent aux23.


356 MINÉRALOGIEcouches supérieures du calcaire oolithique. Il avérifié à Valognes des dépôts que M. de Gervilleavoit déjà fait connoître, et qui contiennent pêlemêledes coquilles d'âges très différents ; mais il avu aussi que ces dépôts sont dans des vallées étroitesou de longues cavités placées entre des bancs presqueverticaux de roches primitives, et que les coquillesy sont dans un ordre inverse de leur anciennetéet avec toutes les marques d'un transportviolent et lointain, sans y être recouvertes paraucune roche.M. Beudant, savant minéralogiste, dont nousavons eu plusieurs fois occasion de citer les travaux,et qui vient d'être nommé professeur à la facultédes sciences de Paris, a fait par ordre du roi, en1818, un voyage en Hongrie, l'un des pays del'Europe les plus intéressants par rapport aux nombreuxproduits du régne minéral qu'il recèle, aussibien que par leur disposition géologique, dont onn'avoit point encore de connoissance suffisante. Ila présenté à l'Académie le résultat de ses observations,qu'il a fait imprimer depuis en trois volumesin-4° Il importoit sur-tout de tracer dans ce paysla limite encore incertaine entre les terrains à mined'or et les terrains dits de trachyte, et présumés dela plus ancienne origine volcanique. A cet effet


ET GÉOLOGIE. 357M. Beudant a fait de Schemnitz le centre d'excursionsqu'il a dirigées en divers sens, et qu'il a mêmeportées jusqu'aux mines dé sel de Wieliczka en Galicie.Des frontières de la Transylvanie il est revenupar Pesth et le sud-ouest du lac Balaton, où il aobservé de vastes terrains basaltiques. Une grandecarte de tout ce royaume, deux cartes particulièresdes environs de Schemnitz et de ceux du lac Balaton,et dix-sept planches de coupes, représententce qu'il a pu déterminer sur la disposition géologiquedes terrains. Quant à la Transylvanie et auBannat, l'auteur n'a pu en parler que d'après d'autresminéralogistes.Il fait voir que le terrain à mine d'or, formé d'unesyénite ou grùnstein porphyritique, appartient à lasérie des terrains de transition, ou tout au plus auxderniers terrain s. primitifs; et il le juge d'après lescouches subordonnées qu'il renferme d'une natureétrangère aux volcans, bien qu'il soit souvent recouvertpar des terrains volcaniques, et qu'il contiennedes pyroxènes et des feldspath vitreux forlsemblables à ceux des trachytes. Quant à ces derniersterrains l'auteur en donne une descriptiontrès détaillée, et distingue avec le plus grand soirleurs différentes variétés, ainsi que toutes les substancesqu'ils enveloppent et les couches forméesdes amas de leurs débris.


358 MINÉRALOGIELes variétés se succèdent ou plutôt se circonscriventdans un ordre assez déterminé, et sontcirconscrites à leur tour par les couches de leursdébris de manière à former des groupes de montagnesqui ont chacune un centre et des irradiations:c'est dans les couches de débris ou lesconglomérats que sont situées les roches d'où setire l'alun, et que sont enchâssées en quelques endroitsces belles opales si célèbres en bijouterie.Dans ceux de ces conglomérats qui sont formés desdébris des roches les plus poreuses, les plus semblablesà la pierre ponce, se trouvent des boischangés en opale, des impressions végétales, et descoquilles, dont plusieurs ressemblent à celles denos pierres calcaires.Ce qui est plus extraordinaire c'est que les rochestrachytiques contiennent quelquefois en amas irréguliersdé l'argent sulfuré contenant de l'or.Ces terrains de trachytes ne sont jamais recouvertsque par des terrains tertiaires analogues àceux de nos environs : ainsi leur formation est relativementassez récente.M. Beudant partage l'opinion de ceux qui attribuentà ces terrains trachytiques une origine ignée ;mais il regarde comme assez probable qu'ils sontdus à des éruptions sous-marines. En Hongrie ilssont constamment séparés des basaltes.


ET GÉOLOGIE.35gPlusieurs autres observations et discussions dansle détail desquelles il nous est impossible d'entreiajoutent un grand prix à cet ouvrage, qui a paruaux commissaires de l'Académie se distinguer d'unemanière éminente de la plupart de ceux du mêmegenre.L'importance des débris fossiles de corps organisés,considérés comme des monuments des catastrophesdu globe, s'étend aujourd'hui à toute;les classes.M. Desmarets s'est occupé de celle des crustacéset a présenté à l'Académie un ouvrage, imprimedepuis, où il traite des écrevisses et des crabes trouvésà l'état de pétrification. Comme tous les naturaliste;qui s'occupent des fossiles, M, Desmarets a étfobligé de découvrir des caractères distinctifs qupussent se retrouver dans des individus mutilés, eremplacer ceux que les naturalistes ont coutume d(tirer et tirent aisément des individus entiers, mai;qui par leur nature ont dû presque toujours disparoître dans les fossiles. Il a donc étudié le test de ce:animaux, et a cherché à y distinguer par des dénominations précises les divers compartiments qui eioccupent la surface, et les sillons qui les séparentaussi bien qu'à déterminer les rapports du nombreet de la courbure de ces compartiments et de ce


36oMINÉRALOGIEsillons avec les genres et les sous-genres, ou divisionset subdivisions naturelles de ces animaux;idée d'autant plus heureuse que ces compartimentscorrespondent avec assez de constance à des viscèresdifférents dont les volumes relatifs influent surl'étendue de ces compartiments, en sorte que leplus ou moins de grandeur de ces derniers estdans un rapport intime avec la nature de chaqueanimal.Un sillon en forme d'H majuscule placé sur lemilieu du test des crabes et des écrevisses, et dontles branches se subdivisent dans diverses directions,partage ce test en trois régions médianes placées àla suite l'une de l'autre, et en trois divisions latéralesde chaque côté, auxquelles M. Desmarets donnedes noms d'après les organes qu'elles recouvrent;et c'est d'après leurs proportions et leurs positionsrelatives, jointes à la forme générale, qu'il reconnoîtses genres et ses sous-genres.U a décrit ainsi jusqu'à trente-quatre espèces decrustacés fossiles, appartenant à des subdivisionszoologiques différentes et enfouis dans des terrainsde différentes formations. Les plus anciens se trouventdans les schistes de calcaire argileux de la valléede rAltmùhl, et nommément dans les carrières dePappenheim. Il y en a même une espèce à lonpuequeue que l'on ne peut rapporter à aucun des sous-


ET GÉOLOGIE.36lgenres connus aujourd'hui, et l'on y en voit une delimule ou crabe des Moluques, genre maintenantétranger à l'Europe : mais on n'y a encore découvertaucun crabe proprement dit, ou à queue courte etrepliée; ces crabes deviennent au contraire fortcommuns dans les couches supérieures. La série deces animaux commence en quelque sorte où finitcelle des trilobites, dont nous avons parlé d'aprèsM. Brongniart dans notre analyse de 1819.Elle se continue ensuite dans les terrains plusrécents; car il existe des crustacés fossiles dans lescouches argileuses inférieures à la craie, dans lecalcaire grossier, et jusque dans les derniers terrainsd'eau douce.A cet ouvrage, qui est imprimé avec celui deM. Brongniart sur les trilobites, sont jointes debelles planches lithographiées, où l'auteur a eu l'attentionde compléter chaque figure par le rapprochementd'individus mutilés différemment, maisdont l'identité d'espèce ne restoit pas douteuse.Le travail de M. Adolphe Brongniart sur les végétauxfossiles, dont nous avons parlé l'année dernière,a aussi été publié avec des lithographies trèsdélicates. Cet art, en se perfectionnant, devientchaque jour plus utile aux sciences naturelles, quiont tant besoin de moyens peu dispendieux de représenterles formes, objet principal de leur étude.


362 MINÉRALOGIEM. Latreille a communiqué un mémoire deM. Germar sur un de ces crustacés fossiles. C'estune espèce de cymothoa, genre voisin des cloportes,qui devoit vivre dans des cavités de roches à la manièrede quelques espèces vivantes découvertes depuispeu sur les côtes d'Angleterre. On l'a trouvédans un schiste bitumineux de Saxe.M. Brongniart a.découvert auprès de Coulommiersune pierre analogue à celle que l'on nommevulgairement écume de mer, et composée de 24 partiesde magnésie, 54 de silice, 20 d'eau, et de 1ou 2 d'alumine. Un examen attentif des couchesentre lesquelles elle étoit placée et des coquilles quis'y rencontroient lui a fait reconnoître que son gisementest dans ce terrain d'eau douce, mélangé decalcaire et de silice, qui dans nos environs est interposéentre deux formations marines. D'après cetteindication il l'a retrouvée en plusieurs autres pointsdu bassin de Paris; et il s'est assuré que dans plusieurspays éloignés, près de Madrid, en Piémont,et ailleurs, des pierres de même nature se trouventdans des gisements très analogues.C'est ainsi que les lois géologiques prennentchaque jour plus de généralité.On le voit plus que jamais dans l'immense travaildont M. Brongniart vient d'enrichir la description


ET GÉOLOGIE. 363géologique des environs de Paris, qui lui est communeavec M. Cuvier. Dans ce travail additionnel,entièrement propre à M. Brongniart, ce savantgéologiste suit les terrains analogues à ceux de Parisdans tous les pays où il a été possible de les observer,et fait voir qu'ils s'étendent sans modification bienimportante à dé très grandes distances.Il a communiqué à l'Académie l'article qui regardeles terrains d'eau douce, et principalementceux de la Suisse et de l'Italie. L'auteur y rapporteces schistes d'OEningen, près du lac de Constance,si célèbres par les innombrables poissons dont ilsrecèlent les restes, et qui appartiennent en effettous à des genres de lacs ou de rivières. Ce gîte depétrifications se rapporte d'ailleurs à cet immensedépôt de psammites ou de cailloux et sables roulésconnu en Suisse sous le nom de nagelflue, etM. Brongniart le regarde comme d'une époque à-peu-près contemporaine, peut-être même postérieureà celle des gypses de nos environs.Les carrières de travertin, pierre si utile en Italiepour les constructions, appartiennent égalementaux terrains d'eau douce ; et il n'est en général, dansce pays, presque aucune petite vallée où l'on n'endécouvre quelque dépôt : en sorte que cet ordre deformation, qui étoit à peine soupçonné il y a vingtans, bien que son influence sur les hypothèses


364 MINÉRALOGIEgéologiques dût être si puissante, se trou vera, grâceaux travaux de M. Brongniart, l'un des plus répandusà la surface actuelle du globe.Les découvertes d'animaux terrestres détruitspar les révolutions du globe, et qui ne peuventêtre connus que par leurs débris, se multiplientchaque jour.M. Cuvier, qui vient de publier le quatrièmevolume de son grand ouvrage sur ce sujet, en acommuniqué quelques articles à l'Académie avantleur impression.Il lui a fait voir par exemple des os et des dentsd'un quadrupède de genre inconnu, découvert parM. Lafin de Turin dans les lignites de Cadibona,près de Savone, et qui étoit voisin des sangliers etdes hippopotames. On en trouve de deux espècesdifférentes par la grandeur, et l'on vient aussi d'endécouvrir dans quelques endroits de la France desespèces analogues.M. Cuvier a nommé ce genre anthracotherium.Le même naturaliste, ayant constaté que des osfossiles d'une espèce voisine du renne se déterrenten divers endroits de la France, a dû s'occuper desavoir sur quoi repose l'opinion assez répanduequ'il existoit des rennes dans les Pyrénées au douzièmesiècle. Il a reconnu que cette opinion, mise


ET GÉOLOGIE. 365en avant par Buffon, ne venoit que d'une citationtronquée d'un passage du Traité sur la chasse ducomte de Foix Gaston III, surnommé Phébus; et,ayant vérifié dans les manuscrits du temps ce passageque les imprimés rendent d'une manière inintelligible,il s'est assuré que Gaston n'y parle quedes rennes qu'il avoit vus dans ses voyages en Norwégeet en Suéde.Depuis long-temps on connoissoit différentesespèces fossiles de crocodiles. On en a découvertencore une nouvelle l'année dernière dans ce calcaireoolithique des environs de Caen, dont nousvenons de parler d'après M. Prévost. Un savant naturalistede cette ville, M. Lamouroux, en a adresséune notice et plusieurs fragments intéressants; etpar les soins de l'Académie des sciences et belleslettresde Caen il en a été envoyé des modèles enplâtre au Muséum d'histoire naturelle, d'aprèslesquels M. Cuvier sera en état d'en donner unehistoire complète dans le cinquième volume de sonouvrage.Des missionnaires ont rapporté d'Afrique à Londresune tête de rhinocéros à deux cornes, d'unetrès grande taille, et remarquable par la forme grêleet excessivement alongée de sa défense antérieure :d'après un examen superficiel on l'avoit crue semblableà ces têtes de rhinocéros fossiles communes


366 MINÉRALOGIEen Sibérie, en Allemagne, et en Angleterre; ce qui,eu prouvant que ces dernières n'étoient pas d'uneespèce éteinte, auroit donné des motifs de douterde l'extinction de plusieurs autres animaux fossiles.M. Cuvier, par une comparaison plus soignée, amontré au contraire que cette tête africaine ressemble,à la grandeur près, qui venoitsans doutede l'âge, à toutes celles de l'espèce bicorne d'Afrique, et qu'elle diffère des rhinocéros fossiles autantqu'aucune autre tête de rhinocéros vivants.ANNÉE 1823.M. Cuvier, qui a publié cette année le quatrièmeet la première partie du cinquième volume de ladeuxième édition de ses Recherches sur les animauxfossiles, a communiqué à l'Académie plusieurs desarticles nouveaux qui entrent dans cet ouvrage. Ila fait voir entre autres les débris d'une espèce inconnuede crocodile , dont quelques squelettes ontété retirés des carrières de pierre calcaire oolithiquedes environs de Caen ; et des têtes de cétacésd'un genre différent de ceux qui existent aujourd'hui,déterrées sur la plage de Provence et lors del'excavation du bassin d'Anvers.Une seule phalange, trouvée dans une sablonnièredu pays deDarmstadt, lui adonné la preuve


ET GÉOLOGIE. 367de l'ancienne existence d'un quadrupède du genredes pangolins, mais d'une taille gigantesque.On parloit depuis long-temps de squelettes humainsincrustés dans un rocher de la côte de laGuadeloupe, et dont un avoit été déposé au Muséumbritannique. Le ministre de la marine ayantbien voulu donner des ordres pour en faire apporterun autre au Cabinet du roi, M. Cuvierl'a présentéà l'Académie, et a fait voir, par les coquillesterrestres et marines toutes semblables à celles dela côte environnante, ainsi que par la situationdans laquelle sont ces squelettes, que la pierre quiles enveloppe est d'origine moderne, et le produitde quelques sources incrustantes qui coulent verscet endroit.11 a aussi lu un mémoire sur des têtes humainesd'une épaisseur monstrueuse et d'une dureté excessive,qui ont passé aux yeux de quelques auteurspour des pétrifications, et même pour des restesd'une ancienne race de géants : l'une d'elles, trouvéeen Champagne, est célèbre depuis long-temps,et a été gravée plusieurs fois ; l'autre a été tiréed'un ossuaire. M. Cuvier a établi que toutes deuxsont des têtes défigurées par une maladie des osque l'on nomme la maladie éburnée, et qu'elles viennentmême assez probablement d'enfants à l'âge oùils changeoient de dents. Aucun de ces faits ne peut


368 MINÉRALOGIEdonc être cité comme preuve qu'il existerait desossements humains dans les couches anciennes etrégulières.Deux jeunes naturalistes partis depuis peu pourl'Amérique méridionale, M. Boussingault, François, et M. Rivera, Péruvien, ont déjà communiquéplusieurs observations des plus intéressantes.Ils ont reconnu , à 20 lieues nord-est de Santa-Fé, une aérolithe pesant 1 5oo livres, qui avoit ététrouvée en 1810 sur une colline de grès par unejeune fille,sans que l'on ait rien su de sa chute ;mais on voit encore l'excavation qu'elle a formée,et plusieurs fragments setrouvoient aux environs.Le grain de cette masse est fin ; elle n'a point lacroûte vitrifiée ordinaire aux aérolithes. Son analysea donné 91,41 de fer, et 8,59 de nickel.Ces mêmes naturalistes ont adressé au Muséumd'histoire naturelle des ossements de mastodonte àdents étroites, trouvés près de Bogota, et qui ajoutentà nos connoissances sur cet animal perdu.Le principal besoin de la géologie consiste dansla détermination positive de l'ordre dans lequel lesdivers terrains se superposent les uns aux autres,et l'on ne peut arriver à la connoissance des lois généralesde cette superposition que par des descrip-


ET GÉOLOGIE.36gtions exactes des contrées dans lesquelles il estpossible d'en apercevoir un certain nombre dansleur ordre naturel.M. Bertrand Roux, négociant et natu ralisteéclairé,delà ville du Puy-en-Vèlay, a entrepris de faire connoître,sous ces rapports, les environs de sa demeure,et il en a fait l'objet d'un ouvrage considérable, où toutes les couches sont décrites, leursrapports de position indiqués, et leurs hauteurs,ainsi que les différentes inégalités du terrain, mesuréesau baromètre.La ville même du Puy est au centre d'un bassinentouré de montagnes assez hautes, et dont la Loirene s'échappe que par une gorge étroite. Les noyauxde ces montagnes sont granitiques, et de trois variétéscaractérisées en partie par leur plus ou moinsde consistance, et que l'on distingue de loin au plusou moins d'escarpement de leurs cimes et de leurstalus; mais une grande partie de leurs crêtes sonthérissées de volcans, très reconnoissables, bienqu'éteints long-temps avant les époques historiques.Dans cette enceinte, comme dans le fond d'un vase,sont déposés les terrains postérieurs : d'abord quelquesdépôts épars de psammites formés des débrisdu granité, dans l'un desquels il y a déjà des restesde végétaux ; ensuite, et tout d'un coup, des terrainstertiaires, des couches puissantes d'argile, desBUFFOM, COMPLÉM. T. II.^4


37" MINÉRALOGIEmarnes en lits nombreux, sans corps organisés, quel'auteur croit analogues à nos argiles plastiques desenvirons de Paris; et, sous elles, des terraiils deplus de cent mètres d'épaisseur, qui ne contiennentque les coquillages de l'eau douce, des restesde tortues, ou des ossements d'animaux terrestresaujourd'hui inconnus, et nommément des palœotherium,si communs dans nos plâtrières de Paris,et d'un genre voisin nommé anthracotherium parM. Cuvier.C'est sur ce fond de bassin ainsi constitué quese sont répandues les déjections des volcans, etqu'elles ont formé des pics, des collines, et desplateaux. M. Roux les divise en deux sortes: lesplus anciennes ont le feldspath pour base, et composentdes terrains que M. Roux nomme trachytiqueslorsque le feldspath est lamelleux, et phonolithiquesquandil est compacte ; les autres, oùabonde le pyroxène, comprennent des laves basaltiquesde diverses époques, des scories, et descendres.Ceux-ci sont incontestablement plus récents queles terrains tertiaires, qu'ils recouvrent en plusieursendroits d'une manière évidente. On les voit quelquefoiss'étendre aussi sur les trachytes ; ce quiprouve l'antériorité de ces derniers. M. Roux croitque les trachytes eux-mêmes sont, aussi bien que


ET GÉOLOGIE. 37 1les laves et les basaltes, plus récents que les terrainstertiaires. Il ne lésa pas vus cependant superposés àces terrains ; mais il tire sa conclusion principalementde ce fait que les terrains tertiaires ne contiennentpoint de débris de trachytes, mais seulementceux des granités.Ces trachytes se sont principalement déposés lelong de la chaîne orientale, de celle qui sépare leVelay du Vivarais, et dont la cime principale estconnue sous le nom de Mézin; leurs contexturessont uniformes, et ils doivent s'être déposés dansun temps assez court, tandis que les laves et lesbasaltes diffèrent entre eux par la structure et parles époques des éruptions qui les ont produits. Lesdernières de ces éruptions sont au reste déjà trèsanciennes ; car les élévations qu'elles ont forméesavoient déjà eu le temps d'être dégradées et escarpées,comme elles le sont aujourd'hui, dès le tempsoù les Romains firent dans ces environs leurs premièresroutes et leurs premières constructions.La chaîne de l'ouest est celle où ont brûlé lesvolcans, principalement les plus modernes : elleen offre au moins cent ; mais, à l'exception de deuxou trois, leurs cratères sont presque effacés aujourd'hui.Une des élévations volcaniques les plus remarquablesdu Velay est la Roche Rouge, pic basailli^ue24.


372 MINÉRALOGIEisolé, fortnoir, entièrement entouré de granité, etque M. Roux regarde comme ayant été soulevé debas en haut, et offrant des traces d'une anciennebouche volcanique.A ces descriptions, dont nous abrégeons à regretl'extrait, M. Roux joint des conjectures plus oumoins ingénieuses sur les causes qui ont amené tantde modifications diverses : elles ajoutent à l'intérêtd'un ouvrage dont la publication fera connoîtreune des contrées de l'intérieur de la France lesplus intéressantes sous le rapport de l'histoire naturelle,aussi bien que delà singularité des sites etde la beauté des paysages.Parmi les bancs nombreux qui forment les terrainsdes environs de Paris, il en est un composéprincipalement d'argile que l'on exploite en diversendroits pour en fabriquer des poteries plus oumoins belles. On l'a nommé par cette raison argileplastique. Son origine est déjà ancienne, car il estsurmonté parles immenses massifs de pierre à bâtir,de plâtre, de sable, et de grès, qui forment toutes noscollines ; et la craie seule, dans nos environs, estau-dessous de lui. On y trouve divers corps étrangers,et entre autres des bois réduits en charbon,qui, dans plusieurs lieux, sont encore utiles commecombustibles, et que l'on a nommés lignites. Des


ET GÉOLOGIE. 37!grains de succin et d'ambre jaune sont fréquem-rment au milieu de ces lignites ; et même tout rendvraisemblable que l'ambre jaune des bords de laBaltique, si célèbre dès les temps les plus reculés,appartient à cette formation, dont l'étendue estconsidérable, et que l'on a déjà suivie très loin deParis et jusqu'en Angleterre.Un jeune physicien, M. Bequerel, a particulièrementétudié des couches de cet argile que quelquesfouilles venoient de mettre à découvert prèsd'Auteuil. Il y a recueilli des minéraux peu communsdans une semblable position, du phosphatede chaux en noyaux oblongs, du sulfate de strontianeen cristallisations particulières. Il a trouvéaussi des lignites avec du bel ambre jaune, et detrès petits cristaux de sulfure de zinc sur ces lignites.Tous les corps organisés y sont de terre oud'eau douce, et dans le nombre sont sur-tout quelquesfragments d'os de crocodiles. Les observationsfaites sur cette argile en d'autres lieux n'ont donnéaussi que des restes d'animaux de l'eau douce, etcependant elle est recouverte de deux formationsmarines très considérables. Aussi les range-t-on aunombre des monuments et des preuves des invasionsrépétées de la mer sur les continents.Ces terrains placés sur la craie, et qui remplis-1


374 MINERALOGIEsent presque seuls le bassin où est situé Paris, appartiennentaux dernières époques des révolutionsdu globe, et cependant ils se sont déposés sur desétendues très vastes, et recouvrent, dans une infinitéde lieux souvent très éloignés, les terrains plusanciens : s'ils sont masqués et peu reconnoissablesdans quelques cantons par l'interposition de quelqueformation locale, ou par des déplacementsoccasionés par des catastrophes particulières, c'està la sagacité du géologiste à les démêler dans cescirconstances accidentelles , et à rechercher lescauses qui ont pu les modifier ainsi.M. Brongniart, qui a tant contribué à en éclaircirl'histoire, a trouvé moyen de les reconnoître dansle Vicentin, pays où tout ce qui les accompagneétoit fait pour dérouter un observateur moinsexercé.Il a observé dans les collines qui bordent le valde Néra un calcaire contenant les mêmes coquillesque le nôtre, alternant quatre fois avec une brècheen petits fragments de cornéenne, et surmonté pardes basaltes. Mais ces collines ne forment pas, àbeaucoup près, la masse de la montagne. Celle-ciappartient à l'ordre bien plus ancien de couchesque l'on a nommées terrains du Jura, et les collinessont seulement appuyées contre ses flancs.Des dispositions analogues se sont montrées dans


ET GÉOLOGIE. 375le val de Ronça. A Montechio-Maggiore, lieu célèbrepar les nombreuses espèces minéralogiquesque renferment ses amygdaloïdes, les basaltes etles brèches de cornéenne dominent; le calcaire n'yest qu'en indice; ses coquilles sont aussi enveloppéesdans la pâte des brèches, mais non pas dansles fragments de basalte et d'amygdaloïde que cettepâte enveloppe. On y trouve çà et là des lignites ; àMonterViale ces lignites offrent même quelquespoissons fossiles.Cette indication a conduit M. Brongniart à fixerla position géologique des célèbres carrières deMonte-Bolca , où sont déposées des quantités siétonnantes de ces poissons. Sous divers lits de basalte,de brèche, et de calcaire, sont deux bancsde cesichtyolithes séparés par un calcaire coquilliercontenant des nummulithes et d'autres coquilles.Tous les poissons appartiennent à des genres marins;le second de ces bancs contient, outre lespoissons, des lignites et des plantes la plupart terrestresou d'eau douce.A Montechio-Maggiore ce sont les couches trappéennesqui dominent; à Bolca, au contraire, c'estle calcaire, et de beaucoup; mais, sauf la proportion, la ressemblance de ces lieux et de nombred'autres du voisinage est très grande; et leur calcaire,par sa nature, par les coquilles, les silex , et


376 MINÉRALOGIEles autres objets qu'il renferme, ressemble aussibeaucoup au calcaire grossier de nos environs, àcelui qui repose sur la craie et qui supporte legypse.Les roches trappéennes forment la différence essentielle;encore retrouveroit-on plusieurs de leurséléments dans notre chlorique et notre argile plastique.Les collines du pied de l'Appennin ressemblentau contraire bien davantage à celles de notre calcaireet de notre grès supérieurs aux gypses.M. Prévost l'avait remarqué dans un mémoire surles environs de Vienne, dont nous avons donnél'extrait il y a quelques années, et M. Brongniartl'a confirmé par l'examen scrupuleux qu'il a fait dela colline de la Superga près Turin.Ce qui est pi us extraordinaire, c'est qu'un terrainet des coquilles très semblables se retrouvent ausommet de la montagne des Diablerets, au-dessusde Bex, non seulement à plus de trois mille mètresde hauteur, mais surmontés par des bancs de naturealpine, et d'origine très ancienne. M. Brongniartproduit une coupe de cette partie de lamontagne, qui semble prouver que c'est un dépôtformé dans un creux ou dans un repli ancien deces bancs.Il a retrouvé jusque dans les montagnes d'auprès


ET GÉOLOGIE. 377de Glaris des couches qui, d'après les coquilles etles subtances qui les composent, lui ont paru devoirse rapporter à nos terrains de sédiment supérieurs.M. de Buch a examiné, sous le rapport géologique,une contrée voisine du Vicentin, le Tyrolméridional ; il y a trouve en grande masse ces terrainsporphyriques ou plutôt pyroxéniques qu'ilcroit soulevés par l'action du feu, ou, comme ils'exprime, apposés aux calcaires voisins, mais nondéposés de la même manière qu'eux : ces terrainsen se soulevant ont tantôt percé, tantôt soulevéavec eux, les porphyres rouges, les grès rouges, etles dolomies ou calcaires magnésiens qui les surmontaient,et les ont rompus et désordonnés demanière qu'il est impossible aujourd'hui de lesramener au même niveau. M. de Buch, qui avoitdéjà appliqué cette manière de voir aux montagnesde l'Auvergne, croit pouvoir l'étendre à laplus grande partie des Alpes, au moins des Alpescalcaires; et il a découvert dans plusieurs endroitsle porphyre pyroxénique demeuré caché ailleurs,mais qui a été par-tout la cause des soulèvements.N'observant dans ces cantons les masses de dolomieque fendillées en sens divers, ou creusées de cavernes,et placées sur le porphyre pyroxénique etau niveau du calcaire ordinaire des Alpes, M. de


378 MINÉRALOGIEBuch croit que cette pierre est une transformationdu calcaire pénétré par la magnésie que le porphyrey a introduite. En un mot elle n'en est qu'un accident.Vouloir distinguer une formation de calcairemagnésien ou de dolomie, ce seroit, suivantM. de Buch, comme si l'on proposoit de faire uneespèce d'un chêne qui auroit des galles et une autrede celui qui n'en auroit pas.Les naturalistes viennent d'obtenir un puissantsecours pour apprendre à bien connoître l'Auvergne, ce pays classique pour l'étude des anciens volcans,et de toutes ces masses soulevées et travailléespar les feux souterrains.M. Desmarets, le fils, a publié la carte à laquellefeu son père avoit travaillé presque pendant toutesa vie, et où il a marqué la nature de chaque pic,les cratères des différentes époques, les courantsde laves descendus de chacun d'eux, les basaltesqu'elles ont déposés, enfin toutes les modificationsimprimées à ce pays par l'action successive de cesmystérieux foyers, et celles que leurs produits euxmêmesont éprouvées avec le temps de la part desagents actuels. C'est un service important que cejeune naturaliste a rendu à la science, non moinsqu'un tribut naturel de respect dont il s'est acquitéenvers la mémoire de son père.


ET GÉOLOGIE. 379M. Bory de Saint-Vincent a posé une base essentiellepour la géologie de l'Espagne, en décrivantavec netteté la géographie physique de ce pays, enfixant la direction et la hauteur des différents étagesde ses montagnes, la pente de ses plaines, et le coursde ses fleuves. Ce travail exécuté avec soin, et accompagnéd'une carte, a paru dans le Guide duvoyageur en Espagne, publié par l'auteur en unvolume in-8°On voit que la géologie positive, celle qui s'occupede constater l'état des couches, fait chaquejours de nouveaux pas. Nous aurions pu en donnerbien d'autres preuvess'il nous eût été permis d'exposertous ceux que lui ont fait faire les savantsétrangers à l'Académie; mais on en trouvera le résultat,et en même temps le tableau le plus brillantet le plus exact de l'état actuel de la science, dansl'ouvrage que vient de publier l'un de nos confrères,qui a lui-même contribué plus qu'aucun autre àses progrès. M. de Humboldt, dans son Essai géognostiquesur le gisement des roches dans les deuxhémisphères, a embrassé d'un coup d'œil leur ordreet leur succession dans toutes les parties dumonde connu, et personne n'a voit encore mieuxmontré, par l'uniformité des produits, la généralitédes causes qui ont agi autrefois sur le globe avec


38oMINÉRALOGIEtant de puissance, et dont la nature est aujourd'huipour ses habitants une énigme si attrayante et siobscure.ANNÉE 1824.M. Leschenault de La Tour avoit recueilli auxIndes quelques minéraux dont les caractères extérieursn'étoient pas assez évidents pour que l'on pûtassigner leurs genres et leurs espèces. M. Laugieren a fait l'analyse. Le premier, venu de Bombay,nommé bombite par M. de Bournon, composé desilice avec protoxyde de fer, alumine, magnésie,chaux en petite quantité, charbon, et trace desoufre, a été reconnu pour une vraie pierre detouche. Le second, originaire de Geylan, qui nes'est fondu qu'avec 1200 parties de potasse et enquatre traitements, se compose de 65 parties d'alumine,16 y, d'oxyde de fer, 13 de magnésie, 2 desilice, 3 de chaux, et une trace de manganèse. C'està-peu-près l'analyse de la ceylanite, telle que l'avoitfaite feu Collet Descoltils; et par conséquent cettepierre, comme la ceylanite, est un spinelle.Le troisième, venu aussi de Ceylan, est le plusremarquable par sa composition compliquée et laréunion de deux métaux rares. Il est d'un brunnoirâtre à cassure vitreuse, se boursoufle au feu,est attaqué par les acides et les alcalis, et a donné


ET GÉOLOGIE.38là l'analyse 36 parties d'oxyde de cerium, 19 d'oxydede fer, 8 d'oxyde de titane, 8 de chaux, 6 d'alumine,1,2 d'oxyde de manganèse, et 11 d'eau. Néanmoinsil a semblé n'avoir perdu qu'un 10 e de son poids;mais c'est que le cerium, qui n'était qu'à l'état deprotoxyde, en s'oxydant plus complètement a compensépar son augmentation de poids l'eau qui s'étoitperdue.On peut le regarder comme une variété de céritetitanifère.C'est principalement par l'étude scrupuleuse dela superposition et des rapports des terrains dansles cantons particuliers que la géologie s'est perfectionnéedans ces derniers temps, et qu'elle peutespérer de procurer un caractère de démonstrationà ses lois générales. L'exemple heureux donné parquelques recherches de ce genre est aujourd'huiapprécié et suivi dans toute l'Europe.M. de Bonnard, ingénieur au corps royal desmines, a présenté à l'Académie un ouvrage qui contientl'examen le plus approfondi d'une contrée dela France très remarquable parle contact presqueimmédiat où des calcaires d'une formation très secondaire, les oolithes du Jura, s'y trouvent avec legranité, le plus ancien des terrains primitifs con-


382 MINÉRALOGIEnus: ce sont les environs d'Avalon en Bourgogne.A la surface des parties élevées se montre un calcairecompacte qui paroît être le même que celuiqui sert à la lithographie; au-dessous est l'oolitheavec les coquilles qu'il contient d'ordinaire, et lesmarnes blanches qui l'accompagnent toujours ;puis un calcaire entièrement composé d'entroquesou tiges d'encrinites, que suivent des lits de calcairemarneux remplis d'ammonites et de l'espèce de gryphitenommée gryphœa cymbium. A celui-là succèdele vrai calcaire à gryphées, caractérisé par l'abondancedu gryphœa cymbium. Il se trouve dans lamême position en Angleterre, en Normandie, dansle midi de la France, en Allemagne, et sur-toutdans la longue chaîne du Jura. Ici, comme partout,il repose sur un autre calcaire plus fin,plusgris, moins marneux, qui comprend le terrainnommé aux environs de Gottingen muschel-kalk,et le calcaire alpin dit en Allemagne zechstein. Jusqu'àcette profondeur l'analogie se soutient, et lesbancs sont dans l'ordre généralement reconnu;mais, en pénétrant plus bas, on ne découvre pointle grès à pierre de taille, ou quaader-sand-stein desAllemands, ni un autre calcaire coquillier qui estordinairement sous ce grès, ou du moins l'un etl'autre ne sont représentés que très imparfaitement.Une plus grande différence encore c'est qu'entre


ET GÉOLOGIE. 383des roches calcaires et le granité on ne trouve, enbancs distincts, qu'une roche arénacée composéede grains de quartz et de feldspath, mêlés de calcaire,de baryte, de galène, roche que M. de Bonnardrapporte aux psammites.11 manque donc dans cette partie de la Bourgognebeaucoup de formations, et toutefois il enreste des vestiges, que M. de Bonnard est parvenu,à force d'observations et de sagacité, à saisir et àfaire connoître. Leurs parties constituantes y existent,mais dans un mélange presque complet, aulieu d'y être, comme ailleurs, en bancs distincts etsuperposés les uns aux autres; les mêmes partiesmétalliques, les mêmes débris organiques qui sontd'ordinaire enveloppés par ces couches manquantes,se rencontrent dans les parties inférieures dupsammite.M. Palassou, qui a passé sa longue vie à observerles Pyrénées, et à qui l'on devoit déjà sur ces montagnestrois volumes pleins défaits importants pourla géologie , vient d'en publier un quatrième, oùila rassemblé, comme en un dernier faisceau, différentsdétails qui lui avoient échappé jusque-là. Ily décrit la bande calcaire qui se prolonge au pieddes Pyrénées depuis l'Océan jusqu'à la Méditerranée; il y fixe la position et la hauteur d'uu assez


384 MINÉRALOGIEgrand nombre de pics; y décrit, d'après l'abbé Pouuel,divers volcans éteints de la Catalogne, et yprésente un tableau des innombrables défrichementsfaits dans ces contrées depuis des époquesconnues, sans vouloir en conclure, comme tantde personnes paroissent disposées à le faire, qu'ilsont eu une influence sensible sur les variations del'atmosphère.M. Palassou parle aussi d'une famille anciennementétablie à Visos, et dont la taille étoit d'unegrandeur démesurée, au pointqu'onrépugnoitdansce pays à s'allier avec elle, et que les individus quimouraient n'étaient point placés dans le cimetièrecommun. On les nommoit les Proussons: le dernierest mort en 1777; il n'avoit que 6 pieds; mais onprétend que l'on a déterré dans les tombeaux deses ancêtres des tibia de 20 à 24 pouces.La seconde partie du cinquième tome, qui terminel'ouvrage de M. Cuvier sur les ossements fossiles,a paru cette année, et l'auteur, avant de lalivrerai! public, en a soumis plusieurs chapitres àl'Académie; il lui a présenté sur-tout des échantillonsnombreux et considérables de deux genres extraordinairesde reptiles, découverts dans les falaisesde l'Angleterre, et décrits par les géologistesanglois, mais dont on a trouvé aussi quelques


ET GÉOLOGIE. 385échantillons en France et en Allemagne. L'un estcelui de l'ichthyosaurus, qui réunit à un corps delézard une grande tête assez semblable à celle d'uncrocodile du Gange, et quatre pattes courtes etcomprimées, qui rappellent les nageoires des cétacés;on en a déjà recueilli les os de cinq ou sixespèces dont les tailles varient depuis 3 pieds jusqu'à25.L'autre a été nommé plesiosaurus; il a aussi laforme d'un lézard, et des pattes en forme de nageoires;mais sa tête est petite, et, ce dont on neconnoît pas d'autre exemple, portée sur un coumince presque aussi long que le corps, et composéde trente et quelques vertèbres, nombre supérieurmême à celui des vertèbres du cou du cygne.Ces animaux, que l'on ne peut comparer mêmede loin, à rien de ce que nous connoissons aujourd'huià l'état de vie, sont incrustés dans des bancsd'un ordre de terrains fort anciens, qui fait partiede ceux que l'on a nommés calcaires du Jura.L'ouvrage de M. Cuvier contient l'histoire de plu-'sieurs autres reptiles de ces mêmes terrains, tousremarquables par leur taille, ou par quelques caractèressinguliers; quelques uns par exemple votaientprobablement comme le dragon, mais aumoyen d'un de leurs doigts très prolongé qui devoitsoutenir une membrane. Leurs os n'y sont point ac-BUFFON. COMPLÉM. T. II. 25


386 MINÉRALOGIEcompagnes d'ossements de quadrupèdes vivipares;en sorte qu'à l'époque de la formation de ces terrainsla classe des reptiles devoit être infinimentplus nombreuse et plus puissante qu'aujourd'hui,tandis que celle des quadrupèdes vivipares ou mammifères,si elle existait, était réduite à quelquespetites espèces fort peu multipliées.Dans les longues recherches sur lesquelles M. Cuviera fondé son ouvrage il ne lui est jamais arrivéde trouver d'ossements fossiles de singes ni d'aucunsquadrumanes ; mais, tout nouvellement, M. lecomte de Bournon, minéralogiste, célèbre par sesouvrages et par la belle collection qui en a fourniles bases,. lui a fait connoître une vraie chauvesourisdans la pierre à plâtre de Montmartre.M. de Férussac à communiqué à l'Académie l'extraitd'un travail, dontil s'occupe, sur la géographiedes mollusques, et sur-tout des coquillages, animauxqui, par leur organisation, offrent des faits plusconcluants pour la détermination des lois qui ontprésidé à la distribution de la vie sur le globe qu'aucunde ceux des autres classes.Il résulte des faits les plus généraux de leur répartition, tels que M. de Férussac les énonce, qu'onpeut reconnoître à la surface de la terre des centresou des bassins de productions semblables, équiva-


ET GÉOLOGIE. 387lentes, ou différentes, suivant les lieux. L'animalisationlui paroît navoir dépendu pour les formesque de certaines conditions relatives à la nature dusol, à son plus ou moins d'élévation, à l'état del'air et des eaux , de telle sorte que certains genreset même certaines espèces se reproduisoient à degrandes distances et jusque sur des continents opposés,d'après l'influence des localités, et sans qu'onait lieu de soupçonner qu'elles y soient arrivées parvoie de diffusion, en partant d'un centre uniqueou de plusieurs centres de productions distinctes.Ces résultats lui semblent prouver que la loi généralede la répartition des espèces repose sur l'analogiedes stations, c'est-à-dire des circonstances influentesdans lesquelles les espèces semblables ouéquivalentes sont appelées à remplir un rôle analogue; ces deux termes , l'analogie de station et dedestination, étant corrélatifs et dans une dépendancemutuelle.L'examen de la répartition des espèces fossilesdans les différentes couches des diverses contréesfournit, selon M. de Férussac, des faits et des conclusionsanalogues touchant l'état ancien de la viesur le globe, et conduit l'auteur à des hypothèsesdifférentes à plusieurs égards de celles qui ont prévaluavant lui en géologie. Il admet trois grandesépoques pour chaque partie de la surface terrestre ;


388 MINÉRALOGIEi ° l'époque antérieure à l'existence de la vie ; époquecommune à-la-fois à toute cette surface, et où l'empirede l'incandescence primitive ne permit pas àla vie de s'établir ; 2° celle où le sol étoit couvertpar les eaux, mais où l'action du feu central avoitencore beaucoup trop d'énergie pour permettre àla vie terrestre de se développer; 3° l'époque où lesol fut libre. Entre ces deux dernières époquesM. de Férussac trouve souvent des résultats d'uneépoque intermédiaire, celle où la surface terrestreétoit encore en combat avec l'élément aqueux, etoù les eaux tendoient à se mettre en équilibre ; c'estalors, dit-il, que l'on reconnoît dans les bassins,les vallées, des alternats et des mélanges de productionsmarines, fluviatiles, ou terrestres, souventrecouvertes par des productions volcaniques.On sent, ajoute-t-il, qu'à ces diverses périodes géologiquesles conditions de la vie n'étaient pas lesmêmes : à mesure que ces conditions changèrent,certaines espèces s'anéantirent, et d'autres les remplacèrentavec une nouvelle destination ; mais lacontinuation de certaines races dans des dépôts dediverses époques prouve, suivant l'auteur, que leschangements eurent lieu d'une manière graduelleet pour chaque espèce, selon que les conditionsd'existence furent plus ou moins étendues ou restreintespour elle, circonstances qui règlent encore


ET GÉOLOGIE.38gaujourd'hui, selon M. de Férussac, les limites del'extension de celles qui peuplent la terre.L'examen des faits lui paroît montrer que l'abaissementde la température à la surface terrestre arefoulé la vie des contrées septentrionales vers lemidi, et des hautes sommités vers les plaine.s ; demanière que l'analogie des stations entre les tempsanciens et l'époque actuelle s'établit en raison del'abaissement des latitudes et du décroissement d'élévationau-dessus du sol, ce qui explique l'analogiede l'antique végétation et des races primitives denos contrées avec celles des contrées équatoriales.M. de Férussac conclut de tous les faits qu'il a rapportéssur les espèces fossiles, i° que l'analogie destation et de destination, c'est-à-dire des conditionsd'existence et du rôle à remplir, fut, à toutes lesépoques et comme aujourd'hui, la loi générale dela distribution des espèces sur le globe, 2° que leschangements que la vie a éprouvés ont été graduels,qu'elle n'a point été renouvelée, que les races n'ontpoint été modifiées; mais qu'à mesure que les conditionsd'existence changeoient et qu'il s'en formoitde nouvelles, de nouvelles espèces ont remplacécelles qui n'avoient plus de rôle à remplir, et celajusqu'à l'époque où, pour chaque partie de la surfacesuccessivement, l'équilibre entre les causesinfluentes a été établi. M. de Férussac avoit déjà


390 MINÉRALOGIEproposé plusieurs de ces résultats,il y a quelquesannées, dans une suite de mémoires qu'il lut alors àl'Académie, et dont nous avons rendu compte; il està croire cependant qu'il n'étend pas ses conclusionsau-delà des classes d'êtres organisés sur lesquellesses observations ont porté, car il seroit difficile d'enfaire l'application aux quadrupèdes vivipares, dontles débris osseux offrent souvent sur les mêmespoints des restes d'animaux semblables à ceux quivivent dans le nord pêle-mêle avec d'autres dontles analogues paroissent aujourd'hui confinés dansla zone torride.ANNÉE 1825.Nous avons parlé diverses fois de l'iode, substanced'une nature fort particulière, découverte dans lesvarecs par M. Courtois, et dont la propriété la plusremarquable est que sa vapeur prend une couleurpourpre. On ne l'avoit trouvée d'abord que dansquelques végétaux et quelques mollusques marins.M. Cantu en a trouvé des traces dans l'eau minéraled'x\sti, et tout récemment M. Vauquelin vient dela découvrir dans un minerai d'argent du Mexique,nommé argent vierge de serpentine, et qui contientde l'argent, du soufre, du plomb, et du carbonatede chaux. L'auteur est disposé à croire que l'iode yest spécialement combiné avec l'argent. Cela est


ET GÉOLOGIE.3g Id'autant plus vraisemblable que l'iode, comme lechlore, a beaucoup d'action sur l'argent, et qu'onenlève à ce minerai une certaine quantité d'iodated'argent par la simple ébullition avec l'ammoniaque.On rencontre aux environs de Freyberg un mineraide fer que l'on nomme, à cause de son apparence,^résinite. L'analyse qu'en avoit faite feuM. Klaproth le faisoit considérer comme un sulfatede fer peroxyde; mais M. Laugier, qui en a faitl'objet de nouvelles recherches, y a découvert, indépendammentde l'eau et de l'acide sulfurique, laprésence de l'acide arsénique. Le résultat de sesexpériences est que 100 parties de ce minerai encontiennent 35 de peroxyde de fer, 20 d'acide arsénique,14 d'acide sulfurique, et 3o d'eau ; ce qui nelaisse qu'un centième de perte. M. Stromeyer deGoettingen,quis'étoitoccupédesoncôtédelamêmeanalysé, mais dont M. Laugier ne connoissoit pasle travail, étoit arrivé à des résultats tout semblables.Nous avons bien des fois rapporté les analysesfaites par les chimistes des pierres tombées de l'atmosphère; mais on n'en avoit pas encore donné unexamen suffisant sous le rapport purement minéralogique.


3g2MINÉRALOGIEM. de Humboldt a communiqué à l'Académiedes observations faites par M. Gustave Rose de Berlinsur un grand échantillon de l'aérolithe de Juvenas.Ce savant minéralogiste est parvenu à enséparer des cristaux, dont il a mesuré les anglesavec le goniomètre à réflexion. Un de ces cristauxest la variété dioctaèdre, fig.9, de la Minéralogiede Haùy. Ce même tissu renferme des cristaux hémitropesmicroscopiques qui paroissent être dufeldspath à base de soude, c'est-à-dire de l'albite.M. Rose a examiné également, à la prière de M. deHumboldt, l'aérolithe de Pallas et les trachytesrecueillis au Chimboraço et sur d'autres volcans desAndes. Il a reconnu que l'olivine de la masse dePallas est parfaitement cristallisée, et que les trachytesdes Andes sont en partie des mélanges depyroxène et d'albite, comme l'aréolithe de Juvenaset peut-être celles de Jonzac et de Stannern, dontles tissus n'ont pas encore été assez examinés minéralogiquementpar les moyens de la trituration, dumicroscope, et du goniomètre à réflexion.On commence à découvrir de ces pierres quiparoissent être tombées anciennement, et qui sontrestées isolées dans des endroits peu fréquentés.M. deHumboldt a présentée l'Académie, au nomde MM. Noggerath et Bischof, professeurs de chimieet de minéralogie à l'université de Bonn , un


ET GÉOLOGIE.3g3échantillon d'une masse du poids de 34oo livres,trouvée à Bitbourg, près de Trêves, au haut d'unecolline. Elle renferme du nickel et du soufre, maispas de chrome ni de carbone.M. de Humboldt a aussi communiqué à l'Académiedes échantillons de séléniures découvertspar M. Zinke dans des filons du Harz oriental, etque M. Henri Rose à Berlin a analysés récemment.Ces minerais sont des combinaisons de séléniumavec le plomb, le cobalt»,le mercure, et l'or.Il existe dans les Andes de Mérida un lac nomméLaguna del Urao, d'où les Indiens retirent des massessalines confusément cristallisées. MM. Rivero etBoussingaud, voyageurs dont nous avons plusieursfois annoncé les travaux, en ont fait l'analyse, etont trouvé que c'est un mélange de carbonate et debicarbonate de soude entièrement semblable à celuides lacs de natron d'Egypte, tel qu'il a été analysépar Klaproth. Ses éléments sont dans la proportionde 0,39 d'acide carbonique, o,4i de soude,0,19 d'eau.Depuis que les géologistes se sont aperçus de lanécessité de connoître les faits avant de vouloir lesexpliquer, on s'attache de toute part à décrire lasuperposition des terrains dans les différents can-


3g4MINÉRALOGIEtons, et à examiner s il est possible de les ramenerà des règles générales.M. Basterot a étudié sous ce rapport une grandepartie du sud-ouest de la France, et a commencé àprésenter ses observations à l'Académie. Il a traitéd'abord des coquilles qui se trouvent à l'état fossiledans les diverses couches dont ces terrains se composent,et qui sont en effet l'un des moyens les plusefficaces d'en éclaircir l'histoire; mais l'auteur faitremarquer que cette partit de l'histoire naturellevient à peine de naître. Dans l'édition du Systemanaturœ, publiée en 1789 par M. Gmelin, il n'y aencore que cinquante-trois espèces de coquillesfossiles; et M. Basterot, qui a fait un catalogue decelles qui ont été décrites dans ces derniers tempsou qu'il a vues dans les cabinets, les porte à plusde deux mille cinq cents.L'auteur a remarqué dans la répartition de cesdébris une loi qui paroît générale : c'est que plusles couches qui les recèlent sont anciennes, et plusla ressemblance des coquilles et des autres êtresorganisés s'étend à de grandes distances; dans lescouches superficielles, au contraire, les différencesse multiplient avec les distances, et l'on ne trouveque peu de coquilles qui soient communes à desbassins très éloignés.Ainsi M. Basterot a recueilli dans les sables des


ET GÉOLOGIE.3g5Landes, aux environs de Bordeaux et de Dax, troiscent trente espèces, dont cent dix environ ne sesont encore trouvées que dans cette circonscription,mais dont on retrouve quatre-vingt-onze dansles terrains d'Italie, soixante-six dans ceux des environsde Paris, vingt-quatre dans ceux de l'Angleterre,et dix-huit seulement autour de Vienne enAutriche.L'action des mers actuelles jette sur l'un desbords de ce bassin des Landes des dunes de sablequi s'avancent lentement vers l'intérieur des terres:mais le dépôt est très borné et fort différent dugrand dépôt qui recouvre la surface du pays ; carparmi les trois cent trente coquilles fossiles il n'yen a que quarante-cinq auxquelles on puisse trouverquelque analogie avec celles des mers voisines,même en y comprenant la Méditerranée.Ce travail de M. Basterot a été imprimé dans lerecueil entrepris par de jeunes etzélés naturalistes,et dont il a déjà paru six ou sept volu>mes sous letitre d Annales des sciences naturelles. Il y est accompagnéde plusieurs planches lithographiées, où lesespèces nouvelles sont représentées avec beaucoupd'exactitude, et qui contribueront avec celles quedonne M. Deshayes sur les coquilles des environsde Paris, avec le grand ouvrage de M. Brocchi surcelles d'Italie, et avec les planches de plusieurs


396 MINÉRALOGIEmémoires dé MM. Brongniart, Prévost, de Férus-sac, à former bientôt un corps très complet sur laf-i^conchiologie fossile. |$ (fiM. le comte Fossombroni, premier ministre du j'jgrand-duc de Toscane, qui a rendu de si grandsservices à son pays en desséchant par les procédés j]les plus ingénieux une contrée que la stagnationde la Chiane ou du Clanis avoit depuis des sièclesrendue inhabitable, y a fait en même temps desobservations d'un grand intérêt pour cette partie |jtde la géologie qui traite -des changements que la 1surface de la terre a éprouvés depuis les tempshistoriques. Le monde savant les connoît par le 11grand ouvrage sur le val de Chiane que M. Fossombronia publié en 1789, et dont il vient de .donner une nouvelle édition. D'un passage de Strabon,où il est dit qu'avant d'arriver d'Arezzo à Pisel'Arno se divise en trois branches, l'auteur avoit'SI)conclu que dans l'antiquité l'Arno donnoit un bras ,qui aboutissoit à la Chiane ou au Clanis, et quicouloit du nord au midi vers le Tibre, au lieuqu'aujourd'hui la Chiane coule du midi au nord ettombe dans l'Arno. Pour expliquer ce changementdans le cours des eaux il suppose qu'ensuite leurcommunication a été interrompue, et qu'il y a euentre les deux rivières, pendant un certain temps,


ET GÉOLOGIE. 397un espace plus ou moins marécageux, mais quel'Arno s'étant graduellement abaissé en creusanttoujours davantage le terrain, la Chiane, rompantles obstacles qui les séparoient, s'y est réunie denouveau dans une autre direction, et qu'au lieud'en recevoir une partie des eaux elle lui a porté lessiennes.M. Fossombroni a été assez heureux pour trouverune carte du treizième siècle, dans laquelle le coursde la Chiane est encore marqué comme se dirigeantdu nord au midi ; ce qui a donné une pleine confirmationà sa conjecture.Il a fait connoître ce document important dansun mémoire particulier qui est inséré parmi ceuxde la société italienne de Modéne, et qui est à-la-foisune pièce pleine d'intérêt pour l'histoire et pour lagéologie.M. de Humboldt, toujours occupé de comparersous un grand nombre de rapports les principaleschaînes de montagnes du globe, a présenté desprofils de plusieurs de ces chaînes tracés d'après laméthode graphique qu'il a employée le premierdans son grand ouvrage sur l'Amérique, et les aaccompagnés de détails sur les dimensions de ceschaînes, leur composition géognostique, et les phénomènesmétéorologiques qu'elles présentent. Il a


3g8MINÉRALOGIEpris sur-tout beaucoup de peine pour arriver àquelque certitude relativement à l'excessive hauteurde quelques unes des cimes de l'Himalaya. L'uned'elles, le pic de Jawahir, surpasse de 676 taiseslesommet le plus élevé des Andes; etil en existe unautre encore plus élevé, nommé par les indigènesDhaujalagiri, ce qui signifie exactement Mont-Rlanc.Deux opérations différentes lui assignent, à douzetoises près, la hauteur prodigieuse de 4^90 toises.En comparant les sommets les plus élevés desmontagnes de l'Europe, de l'Amérique, et de l'Asie,on trouve qu'ils sont comme les nombres 10, i4,18,24.En comparant la hauteur moyenne des crêteson trouve que dans presque toutes les chaînes elleest à celle des sommets comme 1 à 1 8 / IO , ou comme1 à 2. Dans les Pyrénées la différence est beaucoupmoindre, et même la hauteur moyenne de la crêtedes hautes Pyrénées est supérieure à celle des hautesAlpes, tandis que les sommets delà première chaînesont loin d'atteindre ceux de la seconde. La proportionde la crête aux sommets n'est donc dans lesPyrénées que de 1 à 1 */ x .D'après les recherches exposées clans ce mémoirela hauteur moyenne des continents au-dessus duniveau des mers est limitée entre 120 et 160 mètres.La chaîne de l'Himalaya ne diffère pas moins de


ET GÉOLOGIE. 399celle des Andes par la nature rninéralogique de sesmasses que par son élévation. Dans les Andes dominentles porphyres ou les trachytes et les phonolithesdu terrain basaltique, toutes roches qui paroissentsoulevées ou altérées par le feu. On les voitpercer dans un point seulement les roches appeléescommunément primitives. Celles-ci dominent aucontraire dans l'Himalaya : il se compose de granité,de gneiss, de mica-schiste avec disthène, et de cesampbibolithes que l'on désigne vulgairement parle nom de grûnstein primitif. Les environs du lacMahasarowar et du glacier des sources du Gange yoffrent une ressemblance frappante avec la constitutiongéognostique des Alpes aux environs duSaint-Gothard.Les neiges perpétuelles commencent sur le Chim -boraço à la hauteur du Mont-Blanc, ou à 2,460 toises; mais sur la pente boréale de l'Himalaya ellesne commencent qu'à i4o toisesplus haut : circonstancequi tient au rayonnement de la chaleur desplateaux élevés de l'Asie, ainsi que nous l'avons ditd'après l'auteur dans notre analyse de 1821.Quant aux végétaux, M. de Humboldt fait remarquerqu'il ne faut pas trop généraliser l'analogieentre ceux des terrains voisins des neiges perpétuellesdans la zone torride et dans les régions circumpolaires.La distribution plus égale de tempe-


4ooMINÉRALOGIErature pendant le cours de l'année rend les premiersplus semblables à ceux des pays tempérés;les formes des plantes alpines du Chimboraço et del'Antizana ont une physionomie en quelque sorteeuropéenne.ANNÉE 1826.M. Karsten, membre du conseil des mines dePrusse, et correspondant de l'Académie, a publiésur les combustibles minéraux un ouvrage d'unegrande importance, dont il a été présenté un extraità l'Académie par M. Héron.de Villefosse, l'unde nos académiciens libres.Ces combustibles sont connus sous les noms debois fossile, de lignite, de houille, d'anthracite, etde graphite, selon qu'ils s'éloignent davantage deleur état primitif, qui paroît avoir été le bois, etque par une décomposition progressive ils s'ap^prochent plus ou moins complètement de l'état decharbon pur. Dans chacun de ces genres, danscelui de la houille sur-tout, il y a encore de grandesvariétés pour la quantité du carbone que chaquesortefcpeut contenir, et pour celles de l'hydrogène,de l'oxygène, et des terres qui s'y trouvent unies;et de là résultent des différences de la plus grandeimportance dans la pratique. La chaleur qu'unehouille peut fournir est d'autant plus grande que


ET GÉOLOGIE. 4° !le carbone y domine davantage; mais la facilité aveclaquelle on l'allume, la flamme qu'elle donne, legaz propre à l'éclairage que l'on peut en tirer, sontdans une raison contraire ; c'est en général la proportionde l'hydrogène qui en est la mesure. Deces différentes proportions résultent aussi des différencesdans le coke, c'est-à-dire dans la houillecarbonisée, qui prend tantôt une forme pulvérulente,tantôt une forme boursouflée, et tantôt uneforme compacte; et l'on comprend encore que, selonles différents usages que l'on veut faire de cecoke, il est bon de choisir la houille qui le donnesous la forme convenable. Enfin ce qui importeraitpar-dessus tout dans la connoissance de cesminéraux ce seroit de pouvoir juger d'avance, etd'après leur aspect extérieur, de leur composition etdes qualités qu'ils manifesteront, soit dans les préparationsauxquelles on les soumettra, soit dans lesemplois que l'on sera dans le cas d'en faire.C'est à tracer ces règles que M. Karsten a consacréson travail : il décrit chaque sorte de ces diverscombustibles, fait connoître la forme que prennentleurs cokes, et leurs analyses soit avant, soit aprèsla carbonisation ; ce qui lui donne les moyens d'indiquerle parti le plus avantageux que l'on peut tirerde chaque sorte.M. de Villefosse a mis d'autant plus d'intérêt àBUFFON. COMPLÉM. T. II.2 °


4o2MINÉRALOGIEfaire connoître cet ouvrage à la France que dans laprodigieuse activité que prennent nos ateliers etnos fabriques, dans celle que les mines de houillevont recevoir des grandes entreprises destinées àfaciliter le transport de ce minéral, il devient chaquejour plus intéressant pour les consommateurs d'enapprécier sûrement les diverses qualités.M. le comte Andréossy, académicien libre, s'estoccupé d'un travail qui intéresse à-la-fois la géologie, la géographie, l'hydraulique, et l'art des fortifications; ce sont les dépressions que la surface duglobe éprouve entre les chaînes des montagnes, ouen travers de .leurs crêtes, seuls passages par lesquelspuissent être conduits les canaux artificielset points principaux que l'ingénieur doit prendreen considération dans les ouvrages destinés à ladéfense d'un pays.Il trouve que ces dépressions, considérées topographiquement, sont toujours comprises entrequatre cours d'eau opposés deux à deux, qui seréunissent latéralement aussi deux à deux pour serendre par un cours commun dans leurs récipientsrespectifs, sans toutefois qu'elles donnent origineà ces cours d'eau : différentes en cela des cols, quisont aussi des dépressions dans le faîte d'une chaîneprincipale, mais à l'origine de deux cours d'eau


ET GÉOLOGIE. 4°3opposés ; et ce caractère les fait reconnoître aisémentsur les cartes où les rivières sont bien indiquées.Ces dépressions sont limitées dans l'espace par unecourbe concave dont le point le plus bas est enmême temps le point le plus élevé d'une courbe convexeperpendiculaire à la première, et le point oùces deux courbes se rencontrent est le point de partagedes canaux navigables. Tel est le Valdieu, entreles Vosges et le Jura, où le passage du canal duRhône au Rhin pou voit se faire par la ligne la pluscourte et avec le plus petit nombre d'écluses. Offranten même temps la communication la plus directeentre le débouché du Rhin à Baie, et l'intérieurde la France, cette dépression devqjt fixer l'attentiondes ingénieurs j et c'est avec une grande prévoyanceque Vauban y avoit placé la forteresse deBelfort, et que l'on s'occupe aujourd'hui d'en agrandiret d'en renforcer la citadelle.Le fond de la mer a ses dépressions comme lasurface des continents, et tel est le fond du détroitdu Pas-de-Calais. Le point qui correspond à la profondeurde seize brasses en fait le seuil ; à partir delà dans les deux directions la mer devient à-la-foisplus profonde et plus large; et si les eaux s'abaissoientde soixante-deux brasses, on auroit à découvertentre la France et l'Angleterre une dépressionsemblable à celle qui sépare les Vosges et le Jura.26.


4o4MINÉRALOGIELes rivières qui maintenant se jettent de part etd'autre dans cette mer se réuniroient deux à deuxen suivant les lignes de la plus grande pente dansun canal commun : les unes, telles que la Stoureet l'Aa, coulant vers le nord ; et les deux autres, leRother et le Vimereu, vers le sud.Si au contraire les eaux s'élevoient de deux centsmètres, et de manière à recouvrir la dépression quel'on observe entre la montagne Noire, qui est unebranche des Cévennes, et le revers de la chaînesecondaire des Pyrénées, dépression où est le pointde partage du canal de Languedoc, elle deviendraitun détroit maritime plus ou moins semblableà celui de Cal«is.L'auteur, après ces considérations purement topographiques,traite des dépressions sous le pointde vue minéralogique. Ayant examiné avec M. Daubuissoncelle où est le point de partage du canalde Languedoc, et qui est formée par des branchesdes Cévennes et des Pyrénées, il a trouvé du côtédes Cévennes des granits, des gneiss, des marbressalins, des schistes, etc.; du côté des Pyrénées, desgrès à pâte calcaire, des marnes arénacées, despoudingues à pâte marneuse; et dans l'intervalledéprimé, des terrains de sédiment ou mollassescontenant du calcaire commun.La dépression d'entre les Vosges et le Jura lui a


ET GÉOLOGIE.4° Joffert des phénomènes analogues : du côté desVosges sont des porphyres , des grauvakes , desgrès rouges ; du côté du Jura, des calcaires de différentessortes; et le calcaire oolithique du Juraforme encore le seuil de la dépression, et y est superposéaux terrains des Vosges.M. Andréossy conclut de ces circonstances queces dépressions de la surface du globe ont été produitespar des courants qui ont agi dans deux sensdifférents ; et il considère l'ensemble des coursd'eau du globe comme l'image du ruissellement deseaux à l'époque où les continents ayant été mis à découvert,elles se précipitèrent vers leur récipientcommun. Il se propose au reste de reproduire etd'étendre ses considérations dans un ouvrage généralsur les inégalités de la surface de la terre,ouvrage que des occupations obligées l'ont souventforcé d'interrompre, mais auquel il compte bientôtmettre la dernière main. Les géologistes ne l'attendrontpas avec une moindre impatience que lesgéographes et les ingénieurs.FIN DU SECOND VOLUME DE COMPLÉMENT.


TABLE ANALYTIQUEDES MATIÈRESCONTENUES DANS CE VOLUME.Avertissement des éditeurs.. .... .... Page vSECONDE PÉRIODE DE 1809 A 1827.IntroductioniPHYSIQUE, CHIMIE , ET MÉTÉOROLOGIE.ANNÉE 1809. — Décomposition de l'acide fluorique par MM.Gay-Lussac et Thénard, page 5.—Tentatives de MM. Gay-Lussac, Thénard, et Davy, pour décomposer l'acide muriatique, 6.— Expériences de MM. Gay-Lussac et Thénardsur l'acide muriatique oxygéné, 7. — Action du_potassiumsur les oxydes et sels métalliques, 8.— Combinaison desgaz en composés dont les rapports sont simples ( M. Gay-Lussac), 12. — Vapeur îiitreuse et gaz nitreux considéréscomme moyens eudiométriques, i3. — Expériences sur lediamant et les substances qui contiennent du carbone(M. Guyton de Morveau), 5 i4-—Analyse du tabac (M. Vauquelin),i5. — Idem de la belladone, 16. — Principe amerproduit par l'action de l'acide nitrique sur les matières organiquesazotées (M. Chevreul), ib. — Substances forméespar l'action de l'acide nitrique sur les corps charbonneuxou résineux (idem), 17. — Piéaction de l'acide sulfuriquesur le camphre (idem ), ibid. —Distillation des vins


4o8TABLE ANALYTIQUE.(M. Chaptal), 18. — Analyse de sept échantillons de couleurstrouvés à Pompéia (idem), ibid. — Préparation desmortiers solides (M. Sage), 19. — Zinc employé pour couvrirles édifices (MM. Sage, Guyton, et Vauquelin), 20.— Composition des encres à écrire, et leur perfectionnement(M. Tarry ), ibid. — Badigeon conservateur des bâtiments,21.ANNÉE 1810. — Circonstances et causes des diverses phosphorescences,page 22. — Prix remporté sur ce sujet parM. Dessaignes, ibid. — Production subite de chaleur dansles différents phénomènes chimiques (M. Sage), 3i ; etM. Guyton de Morveau, 32.—Très grande pile galvaniqueconstruite à l'École Polytechnique, 34-—Expériences aveccette pile (MM. Gay-Lussac et Thénard), ibid. — Potassiumet sodium, 37. — Combinaisons de l'acide oxalique( M. Bérard), 3g.—Procédés pour former le mercure doux( M. Berthollet ), 4o- — Analyse des substances végétales(idem),4i; et MM. Gay-Lussac et Thénard, l\i.— Divisiondes substances végétales en trois classes (idem), l\l\.— Substances animales (idem), ibid. — Principes constituantsdu sucre, de la gomme, et du sucre de lait (M. Vauquelin), ib.—Observations sur l'art de la verrerie (M. Guyton),45.— Extraction de la soude du sel marin, 47-ANNÉE 181 I. — Évaporation des liquides favorisée par lescorps très avides d'humidité, tels que l'acide sulfurique concentréet le muriate de chaux (M. Leslie), page 48; etMM. Clément et Desormes, 49- — Application de ce procédéau dessèchement et à la conservation des substances végétales,5o; à la dessiccation de la poudre à canon, 5i. —Évaporation au moyen du feu, ibid.— Application à ladistillation des eaux-de-vie (M. Duportal), 52.—Nou-


TABLE ANALYTIQUE. 4°9velles formes de lampes (M. le comte de Rumfort), 53. —Poudre détonnante avec le muriate oxygéné de potasse,5j.—Emploi de cette même poudre modifiée pour amorcerles fusils (MM. Bottée et Gengembre), ibid. — Substancesindigènes substituées aux denrées exotiques, 58. — Betteraves, ibid. — Suc de maïs, ibid. — Suc de pavot, ibid. —Pastel, 5Q. — Analyse du bois de campêche (M. Chevreul ),ibid. — Recherches de M. Dulong sur la décompositionréciproque des sels insolubles , 60. — Acide prussique(M. Gay-Lussac), 6r.—Éther arsénique (M. Boullay), ibid.— Préparations d'or (MM. Vauquelin, Duportal, Oberkampffils ), 62. — Recherches physico - chimiques deMM. Gay-Lussac et Thénard, 63. — Aérolithe tombée enCatalogne, 64.ANNÉE 1812. — Recherches sur les sources de la chaleur( M. de Rumfort ), page 65. — Capacité des gaz oxygène,acide carbonique, et hydrogène , pour la chaleur ; prixremporté sur cette question par MM. Delaroche et Bérard,y t. — Briquet à piston, 72. — Décomposition des sels parles alcalis (M. Berthollet), 73. — Sur l'acide muriatiqueoxygéné, par le même, 75. — Combinaison de l'hydrogèneavec le carbone ( M. Dalton ), 76 ; et M. Berthollet,ibid. — Expériences de M. Thénard sur le gaz ammoniac,78.— Dissolution du plomb par la chaleur dans une dissolutionacide déjà saturée (MM. Proust, Thomson, Chevreul),ibid. — Absorption des gaz par le charbon (M. deSaussure), 80; et M. Thénard, 81. — Substance obtenuepar la distillation des pyrites martiales avec le charbon(MM. Lampadius, Amédée, Berthollet, Clément et Desormes, Clusel et Thénard), ibid. — Action de l'air échauffésur l'absorption de l'oxygène pendant l'acte de la respiration( M. Delaroche ), 83.— Analyse des calculs biliaires


4lOTABLE ANALYTIQUE.par M. Orfila, 84. — Analyse du daphne atpina par M. Vauquelin,ibid.ANNÉE I8I3. — Moyens propres à favoriser l'évaporation(MM. Leslie, Gay-Lussac, Hutton, Configliacchi), page 86.—Pouvoir chimique des rayons du prisme solaire ( M. Bérard),89.—Dilatation des corps par la chaleur (M. Biot),90. — Instrument inventé à cet effet (M. Charles), 91. —Formation de l'alcohol dans le vin (MM. Fabbroni, Gay-Lussac), 92.—Altération des corps gras dans l'acte de lasaponification (M. Chevreul), g3. — Combinaison de l'azoteavec l'acide oxymuriatique ( M. Dulong ), 94 ; etM. Davy, 96.—Découverte de l'iode (M. Courtois), ibid. ;et MM. Clément, Desormes et Gay-Lussac, Davy, 98. —Matière bleue trouvée dans les fours à soude, et ayant lespropriétés de l'outremer ( MM. Tassaert et Vauquelin ), 99.— Méthode d'obtenir le palladium et le rhodium à l'étatde pureté (M. Vauquelin)^ 100. —Sur Yosmium, parM. Laugier; sur le zinc, par M. Sage, io3. — Analyse del'eau minérale de Provins, par MM. Vauquelin et Thénard,104.ANNÉE 1814.—Acides sans oxygène, page 107.—Chlore, acidehydrochlorique, acide chlorique(M. Davy), 109.— Fluoré(M. Ampère), ibid. —Nouvelles recherches sur l'iode(MM. Colin, Gauthier-Claubry, Gay-Lussac, et Sage),109 et suiv. — Sur l'éther sulfurique, par M. Th. de Saussure,n3. —Digesteur distillatoire de M. Chevreul, 114-— Analyse du liège, par le même, 115. — Suite des recherchessur la saponification, par le même, ibid.— Principescolorants du santal et de l'orcanette (M. Pelletier),116. — Iridium, 117. — Sur le bronze des anciens, parM. Mongez, 120.


TABLE ANALYTIQUE. 4 11ANNÉE I8I5. — Recherches de M. Gay-Lussac sur Pacide dubleu de Prusse, qu'il nomme acide hydrocyânique, et surson radical le cyanogène, page 121. — Froid qui résultede l'évaporation (M.Gay-Lussac), 124.—Expériences surl'acide oxalique (M. Dulong), ibid.—Action chimique dela lumière solaire (M. Vogel), 126.— Suite des recherchessur la saponification, par M. Chevreul, 127.—Excrétionrésineuse du hêtre (M. Bidault de Villiers), 129. — Sucrede betterave (M. Chaptal), i3o.ANNÉE 1816.—Loi de la dilatation des liquides (M. Gay-Lussac), page i3o. — Sur les proportions fixes (MM. Gay-Lussac, Dulong), i33.—Acide hypophosphoreux, i35.—Acide phosphatique, i36 et suiv. — Histoire chimique descorps gras, par M. Chevreul, i38.ANNÉE 1817.— Recherches sur la conducibilité des corpsdifférents dans des états de surface semblables pour le calorique,par M. Despretz, page i4o.—'Sur les causes dela variation dans les eaux du Mont-Dor, par M. Bertrand,i4i.—De l'état des métaux dans les sulfures (MM. Vauquelinet Gay-Lussac), 142.—Caméléon minéral (M. Chevreul),i43. — Analyse de la racine d'ipécacuanha, et découvertede l'émétique ( MM. Pelletier et Magendie), i45.— Analyse de l'opium, morphine , et acide méconique(M. Sertuerner), 147; et MM. Robiquet et Orfila, 48.ANNÉE 1818.—Découverte du lithion (M. Arfvedson), p. i4g.— Sélénium (M. Berzélius), i5o. — Recherches sur lecyanogène, par M. Vauquelin, i55. — Oxygénation desacides, par M. Thénard, I6J. — Sur le caméléon minéral(MM. Chevillot et Edouard), 160.— Sur le cobalt et lenickel, par M. Laugier, 162.—Acide pyromucique (M. Hou-


4 12 TABLE ANALYTIQUE.tou La Billardière), i63. — Suite des recherches sur lescorps gras (M. Chevreul), i64- — Analyse de la cochenille(MM. Pelletier et Caventou), i65. — Considérations surles causes des variations atmosphériques, par M. de Humboldt,167. — Coup de vent et tremblement de terre auxAntilles (M. Moreau de Jonnès), 169.ANNÉE 1819. — Théorie des proportions chimiques, etinfluence chimique de l'électricité, par M. Berzélius,page 170. — Acide hyposulfurique de MM. Gay-Lussacet Welther, i85. — Eau oxygénée (M. Thénard), 186.—Strychnine découverte dans la fève Saint-Ignace et la noixvomique, par MM. Pelletier et Caventou, 188.—Brucinetrouvée par les mêmes dans la fausse angusture, 190.—Suite des recherches de M. Chevreul sur les corps gras,191.— Neige rouge, 192.ANNÉE 1820. — Observations météorologiques sur les Antilles,par M. Moreau de Jonnès, page 193. — Aérolithede Jonzac (M. Fleurieu de Bellevue), 195— Sur le prussiatetriple de potasse, par MM. Porret et Robiquet, 198.— Analyse chimique des quinquina , par MM. Pelletier etCaventou, 199. — Découverte de la vératrine dans lesplantes de la famille des colchicacées, 200. — Moyenpour rendre les toiles incombustibles, par M. Gay-Lussac,201. — Procédé pour appliquer sur le verre des espècesde dentrites, par M. Goldsmith, ibid.ANNÉE 182I. — Suite des observations météorologiques surles Antilles, par M. Moreau de Jonnès, page 202.—Aérolithedu département de l'Ardéche, 2o5. —Suite desrecherches sur les corps gras, par M. Chevreul, ibid.—Influence mutuelle de l'eau et de plusieurs substancesazotées, par M. Chevreul ,211.


TABLE ANALYTIQUE.4^ANNÉE 1822 Aérolithe des environs d'Épinal, page 212.— Expérience de M. Despretz sur le produit de l'actionmutuelle du chlore et de l'alcohol, 215. — Sur les causesde la chaleur animale, par M. Dulong, 217.ANNÉE 1823.— Observations sur le vert-de-gris, par M. Vauquelin,page 220.— Sel gemme découvert dans le départementde la Meurthe, 221. — Sur la nature des élémentsconstituants du mercure et de l'argent fulminants, parM. Liebig, 222. — Sur les propriétés du platine précipitéde sa solution nitro-muriatique, 224.— Suite des recherchesde M. Chevreul sur les corps gras, 225.—Proportiondes éléments constituans des alcalis organiques, parMM. Pelletier et Dumas, 226. — Calcul d'oxyde urique,par M. Lassaigne, 227. — Analyse des racines de Dahlia,par M. Payen, ibid.ANNÉE 182/1. — Observations sur les changements qu'aéprouvés le climat de la France, page 228. — Argumentscontre la théorie des proportions fixes,par M. Longchamp,23i. — Observations sur le cyanure d'iode, parM. Serullas, 233. —Moyen de découvrir les moindrestraces de morphine ou d'acide hydrocyânique, parM. Lassaigne, 234-—Idem, par M. Dublanc, 236.—Suitedes travaux de M. Chevreul, sur les corps gras, 239. —Analyse du liquide qui s'écoule de la peau des enfantsattaqués d'induration du tissu cellulaire, par M. Chevreul,240. — Analyse de la racine de topinambour, parM. Payen, 241. — Sur l'emploi du charbon minéral pourdécolorer les liquides, par le même, 242.— Analyse dugrès anthropomorphe trouvé à Moret, 243. — Éclairagepar le gaz hydrogène, 244- — Analyse de la matière vertequi se forme sur l'eau de Vichy, par M. Vauquelin, 245,


4l 4TABLE ANALYTIQUE.ANNÉE 1825. — Suite des observations météorologiques deM. Moreau de Jonnès sur les Antilles, page 246. — Emploide la chaleur pour reconnoître la nature des corpsgras, par MM. Debussy et Le Canu, 247. — Sur les propriétésconductrices et hygrométriques du charbon, parM. Cheuvreusse, 248. — Propriété de former de l'alcoholreconnu dans l'albumine, par M. Seguin, et dans toutesles matières animales, par M. Collin, 25o.ANNÉE 1826. — Suite des travaux de MM. Debussy et LeCanu, sur les corps gras, page 251. — Découverte dubrome, nouveau principe, par M. Balard, 253. — Moyende préserver les murs de l'humidité, par MM. Darcet etThénard, 255.—Sur l'extraction de la soude du sel marin,257. — Emploi du sulfate de soude dans la fabricationdu verre, 258.MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE.ANNÉE 1809. — Nouvelle forme cristalline du diamant, parM. Guyton de Morveau, page 262. — Géographie minéralogiquedes environs de Paris, par MM. Cuvier etBrongniart, 2Ô3. — Description des animaux fossiles deces terrains, 264. — Carpolithes ou fruits pétrifiés, parM. Sage, 269.ANNÉE 1810.—'Recherches sur les terrains d'eau douce,par M. Brongniart, page 270. — Os fossiles de reptiles etde poissons des carrières à plâtre des environs de Paris,par M. Cuvier, 27c. — Marbre de Château-Landon, 272.— Sur les pholades des colonnes du temple de Pouzzoles,par MM. Sage et de Cubières, ibid.— Sur la composition


TABLE ANALYTIQUE./±l5de la plombagine, par M. Sage, 274Gisement singulierd'une mine de plomb, par M. Daubuisson, 275.ANNÉE 181 I. — Combinaison d'alumine et d'acide fluoriquedécouverte par M. Abildgaard, page 275. — Corindongris, par M. Leliévre, ibid.—Description géologiquede la Trinidad et des autres îles voisines de l'embouchurede l'Orénoque, par M. Dauxion-Lavaysse, 276.ANNÉE 1812. — Tête de cétacé fossile, tirée du bassin d'Anverspar M. Traullé, page 277. — Sur le terrain d'eau d ouce,par M. de Férussac, ibid.—Histoire des ossements fossilesde quadrupèdes, par M. Cuvier, 278.ANNÉE I8I3. — Recherches sur les coquilles des terrainsd'eau douce , par MM. Daudebard de Férussac et Marcelde Serres, page 280. —Coquilles de Cypris et gyrogonitestrouvées dans le terrain d'eau douce des environs deParis, par MM. Léman et Desmarets, 282. — Systèmegéologique des environs de Paris, observé dans d'autres^parties de la France; et carte, représentant ses limites,ibid. — Description géologique du département de laManche , par M. Brongniart, 284. — Distribution méthodiquedes roches, par le même, 285.ANNÉE 1814. —: Pierres tombées de l'atmosphère, page 287.— Analyse de l'arragonite, par MM. Stromeyer et Laugier,288. — Squelette fossile de Salamandre gigantesque,considéré comme appartenant à l'espèce humaine (M. Cuvier), 289. — Sur le volcan de Jorullo, par M. de Humboldt,290.ANNÉE 1815. — Sur l'origine des basaltes et des Vakes, par


4 I 6 TABLE ANALYTIQUE.M. Cordier, page 292. — Sur le Vésuve, par M. Ménard deLa Groye,298.— Sur la nature des rochers delà montagnede Beaulieu, près Aix en Provence, par le même, 3oo.—Sur les entomolithes et les trilobites, par M. Brongniart,3o2.— Sur les prétendues empreintes de polypiers, observéesdans certaines agates , par M. Gilet de Laumont, 3o3.Sur les mines de houilles de France, par M. Cordier, 3o4-Aérolithes des environs de Langres, ibid. — Leur analyse,par M. Vauquelin, ibid.ANNÉE 1816. — Variété incolore de Ja sodalithe observéepar M. le comte Dunin-Borkowsky, page 3o5. — Sur lesterrains de transition, par M. Brochant, 3o6. — Descriptiongéologique de l'Ertzgeburg, par M. de Bonnard, 3og.— De la richesse minérale par M. Héron de Villefosse,310.— Expériences propres à constater jusqu'à quel pointdes mollusques d'eau douce peuvent vivre dans les eauxsalées et vice versa, par M. Beudant, 3i 1. — Sur les mollusquesdes terrains d'eau douce, par M. Marcel de Serres,312. — Sur la hauteur de quelques montagnes de l'Inde,par M. de Humboldt, 3i3.ANNÉE 1817.— Sur les caractères des pierres précieuses,par M. Haùy, page 316. — Sur l'altération que subissentles formes cristallines des minéraux par le mélange decertaines substances, par M. Beudant, 317. —Sur l'aluminehydratée silicifère, par M. Leliévre, 320. — Analogieentre les aérolithes et la masse de fer natif observéeen Sibérie, constatée par l'analyse chimique, par M. Laugier,32o. — Sur les éruptions de vase argileuse froidequi ont lieu en Italie, 321. — Sur les cavernes des chaînescalcaires, par M. de Humboldt, 322.ANNÉE 1818. — Sur les causes des formes secondaires des


TABLE ANALYTIQUE. 4*7cristaux, par M. Beudant, page 323.—Analyse d'unebrèche contenant de l'acide sulfurique, de la silice, del'alumine, et analogue à la pierre d'alun de la Tolfa, parM. Cordier, 328. — Dépôt d'ossements fossiles découvertdans le département du Lot, ibid. — Sur un mur naturelobservé dans le comté de Rowan, dans la Caroline dunord, par M. Palisot de Beauvois, 33o.— Mémoire géologiquesur le Vauclain, l'une des montagnes de la Martinique,par M. Moreau de Jonnès, 332.— Descriptiongéologique de la Guadeloupe, par le même, ibid.ANNÉE 1819. — Aperçu géognostique des terrains, parM. de Bonnard, page 334-—Sur la nature des terrains oùexistent les trilobites, par M. Brongniart, 336. — Dentsd'éléphants et de rhinocéros déterrées près Amiens, parM. Rigollot, ibid. — Traité de la cristallisation , parM. Brochant, 337.ANNÉE 1820. — Description des cristaux de la pierre d'alunde la Tolfa, par M. Cordier, page 338.—Sur lesophiolitheset les euphotides, par M. Brongniart, 33g.— Sur lesémanations de gaz enflammé à Pietra-Mala, 34i. —Étude géologique des environs de Vienne en Autriche,par M. Constant Prévost, 343.ANNÉE 1821.— Histoire générale des ossements fossiles, parM. Cuvier, page 344- — Description géologique des environsde Paris, par M. Brongniart, 346. — Végétauxfossiles, par M. Adolphe Brongniart, 348. —Sur lesterrains tertiaires, par M. de Férussac, 34g. — Squeletteshumains incrustés dans une roche calcaire, trouvés à laGuadeloupe, par M. Moreau de Jonnès, 35o.ANNÉE 1822. — Observations géologiques sur les falaises deBUFFON. COMPI.ÉM. T. II. 27


4l8TABLE ANALYTIQUE.la Normandie et de la Picardie, par M. Constant Prévost,page 352. —Description géologique de la Hongrie, parM. Beudant, 356. — Histoire des crustacés fossiles, parM. Desmarets, 35g. — Sur une espèce de crustacé fossiledu genre Crmothoa, par M. Germar, 362. — Pierre analogueà Y écume de mer, découverte près de Coulommiers,par M. Brongniart, ibid. — Sur les terrains analogues àceux de Paris, par le même, ibid. — Nouveaux genresd'animaux fossiles, par M. Cuvier, 364-ANNÉE 1823. — Nouvelles recherches sur les ossements fossiles, par M. Cuvier, page 366. — Aérolithe observé prèsde Santa-Fé de Bogota, par MM. Rivero et Boussingault,368. — Description géologique du Puy-en-Vélay, parM. Bertrand-Roux, 369. — Sur les substances contenuesdans les couches d'argile plastique d'Auteuil, par M. Becquerel, 373. — Observations sur les terrains supérieurs àla craie du Vicentin, par M. Brongniart, 374. — Examengéologique du Tyrol méridional, par M. de Buch, 377.—Carte géologique de l'Auvergne, par M. Desmarets, 3*j8.— Essai géognostique sur le gisement des roches dans lesdeux hémisphères, par M. de Humboldt, 379.ANNÉE 1824. — Analyse de quelques minéraux de l'Inde,par M. Laugier, page 38o. — Description géologique d'Avalonen Bourgogne, par M. de Bonnard, 38i.— Histoiregéologique des Pyrénées, par M. Palasson, 383. — Suitede l'histoire des ossements fossiles, par M. Cuvier, 384-— Géographie des mollusques, par M. de Férussac, 386.ANNÉE 1823. — Iode trouvée dans l'eau minérale d'Asti, parM. Cantu, et dans l'argent vierge de Serpentine, parM. Vauquelin, page 390. — Analyse du fer résinite, par


TABLE ANALYTIQUE. 4'9M. Laugier, 391.—Examen minéralogique de l'aérolithede Juvénas, par M. Rose de Berlin, 392.—Analyse desmasses salines retirées de la lagune del urao dans lesAndes de Merida, par MM. Rivero et Boussingault, 3g3.— Description géologique du sud-ouest de la France, parM. Basterot, 3g4.— Des changements que la surface dela terre a éprouvés depuis les temps historiques, par M. lecomte Fossombroni, 3g6.— Sur les chaînes de montagnesde l'Amérique méridionale, par M. de Humboldt, 397.ANNÉE 1826. — Sur les combustibles minéraux, par M. deKarsten, page 4oo. — Sur les dépressions de la surface duglobe dans les chaînes de montagnes, par M. le comteAndréossy, 402.FIN DE LA TABLE.


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