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A V A N T - P R O P O SO n sait que la loi d u 30 juillet 1875 a d é c i d éd'introduire les notions é l é m e n t a i r e s de Pisciculturedans renseignement agricole et notammentdans les É c o l e s nationales, les F e r m e s - É c o l e s etles É c o l e s pratiques d'agriculture. E n 1879, M . leMinistre de l ' A g r i c u l t u r e confia ce soin à notreancien condisciple et vieil ami, M . Ghabot-Karlen,ancien directeur de la Pisciculture d'Enghien,ancien sous-directeur de l ' É t a b l i s s e m e n t d ' H u -ningue, collaborateur et a m i de Goste. Son dernierrapport de mars 1887, nous apprend que, de 1883à 1886, i l est parvenu à organiser l'enseignementt h é o r i q u e et pratique de la Pisciculture dans dixF e r m e s - É c o l e s o u É c o l e s pratiques d'agriculture(des d é p a r t e m e n t s de : la Meuse, la H a u t e - S a ô n e ,


VIAVANT-PROPOSla Haute-Marne, le Doubs, le R h ô n e , la G o r r è z e ,la Creuse, la Haute-Vienne, la Sarthe et le Finistère),o ù , au m o y e n d'une subvention annuelle de150 francs par É c o l e , soit 4,500 francs p o u r lestrois a n n é e s , on a produit et mis à l'eau 4 1 5 , 0 0 0alevins de S a l m o n i d é s .V o i c i donc la pisciculture des eaux cloucese n t r é e dans la voie industrielle; i l y a m ê m e plus,elle redevient à la m o d e ; car, pour nous, F r a n ­çais, surtout, i l y a, en toute chose, une mode,et rien ne réussit sans être a c c e p t é par elle. L apisciculture est devenue u n s p o r t à la p o r t é e detous, sport en a q u a r i u m , sport en viviers, sporten mares, en bassins, en é t a n g s , en lacs, enruisseaux, en rivières ; elle est devenue une indu s t r i e qui conviendrait aussi merveilleusementà la f e m m e que celle de la volaille, des abeilleso u des vers à soie. G o m m e d é l a s s e m e n t , elleintéresse l'esprit et les y e u x ; c o m m e p r o d u c t i o né c o n o m i q u e , elle a fait ses preuves.N é e en France au x v e siècle, puis o u b l i é e ;r e s s u s c i t é e , o u plutôt r é i n v e n t é e en 1848 par lep ê c h e u r des Vosges Joseph R é m i , et a p r è s unep é r i o d e (1850-1866) d'enthousiasme g é n é r a l , de


AVANT-PROPOSVIInouveau r e t o m b é e dans l'oubli, la voici renaissanteet, cette fois, bien viable, si T o n consentenfin à l u i accorder la proloction, si soigneusemento r g a n i s é e p o u r les F o r ê t s , et à laquelle lesE a u x n'ont pas u n droit moins légitime. C'est u ncurieux historique et bien souvent fait d é j à quecelui des d é b u t s , d u d é v e l o p p e m e n t , des p r o g r è sde la pisciculture en France et à l ' É t r a n g e r ; etnous pouvons bien confesser, en passant, que cen'est pas nous qui avons su en tirer le meilleurparti. L a Suisse, l'Allemagne, la Hollande, l ' A n ­gleterre et surtout les É t a t s - U n i s d ' A m é r i q u e ,l'ont mise en œ u v r e pour repeupler leurs eauxet a c c r o î t r e leurs revenus; a p r è s leur avoir ouvertla voie, ne les y suivrons-nous pas, tout au moins ?P o u r cela, ce n'est point trop de tous les effortsr é u n i s de l'Etat, des Conseils g é n é r a u x et m u n i ­cipaux, d u public et des particuliers. I l faudra,avant peu, revoir et modifier la législation et lesr è g l e m e n t s sur les eaux et la p è c h e , concilier lesintérêts, en apparence très o p p o s é s , de l'Industriem a n u f a c t u r i è r e , de la N a v i g a t i o n , de l ' A g r i ­culture et de la Pisciculture; i l faudra organiser,p o u r nos eaux d u D o m a i n e public, une surveil-


VIIIAVANT-PROPOSlance efficace; provoquer, d é v e l o p p e r , encouragerla formation de Syndicats d'exploitation et dep ê c h e ; propager et vulgariser l'enseignement dela pisciculture à tous les d e g r é s et dans toutesles classes sociales ; intéresser les uns à produire,les autres à conserver, o u au moins à respecter.L ' É c o l e primaire rurale, l'École normale primaire,la Ferme-Ecole, l'Ecole pratique d ' A g r i c u l t u r e ,le C o l l è g e , le L y c é e , l'École F o r e s t i è r e , l ' É c o l edes M i n e s , l'Ecole centrale des A r t s et M a n u ­factures , les É c o l e s nationales d ' A g r i c u l t u r e etl'Institut agronomique, doivent à leurs é l è v e sl'enseignement de cette industrie, n o n m o i n s ali-«mentaire que la Zootechnie, la Laiterie, la Brasserieo u l ' A v i c u l t u r e .Et, de m ê m e que la m o d e de la basse-cour aeu pour premier résultat la c r é a t i o n de centresc o m m e r c i a u x d ' é l e v a g e p o u r les reproducteurs(Gambais, Mantes, Crosne, H o u d a n , etc.), dem ê m e commencent à s'organiser, depuis quelquesa n n é e s , de grands é t a b l i s s e m e n t s p o u r la reproductiondes diverses e s p è c e s de poissons indigè n e s o u é t r a n g e r s (Andecy, Servagette, R e i m s ,Sedan Haybes-Givonne, Paris, etc.), ce q u i est


AVANT-PROPOSIXbien l'indice le plus certain de la vitalité de cettejeuneindustrie.M a i s encore faut-il savoir mettre en œ u v r e lesé l é m e n t s dont on dispose. L'agriculture s'est,j u s q u ' i c i , surtout p r o p a g é e par la tradition pratique,i r r a i s o n n é e , par la routine, en u n m o t ; ellevit c h é t i v e m e n t , mais elle vit. D e nos jours, uneindustrie nouvelle, et qui, par c o n s é q u e n t , n'apas encore de traditions, ne peut s'improviserqu'en rassemblant les observations, en les rapprochantp o u r en tirer une d é d u c t i o n qui devra êtreensuite é t u d i é e , contrôlée, e x p l i q u é e par lascience.D e m ê m e que toutes celles qui s'exercent surles êtres o r g a n i s é s , dans des m i l i e u x variables,l'industrie piscicole est très complexe; elle doits'éclairer de la Physique, de la Chimie, de laZoologie, de la Botanique, etc. ; elle doit é t u d i e rl'eau et les eaux ; le poisson, ses ennemis et sesparasites ; ses aliments v é g é t a u x et a n i m a u x ; sesm œ u r s , et les circonstances de sa reproduction ;les modifications de m i l i e u x qu'il peut physiologiquementsupporter pour une production plusé c o n o m i q u e ,etc.T o u t cela est récent, nouveau, incomplet en-


XAVANT-PROPOScore. Et i l nous a s e m b l é qu'il pouvait être utilede rassembler et de comparer les p r i n c i p a u x faitso b s e r v é s , d'indiquer les meilleures pratiques, lesp r o c é d é s et les appareils les plus avantageux etles plus p e r f e c t i o n n é s .Puisse ce travail, j u g é d é j à avec trop de bienveillanteindulgence par une savante C o m p a g n i e 1 ,contribuer au p r o g r è s et à l'extension de l'industriedes eaux, dont l'importance ne peut ques'accroître, dans ce temps de luttes a c h a r n é e spour l'existence matérielle.A. GORIN.Auxerre (Yonne), le 15 mars 1889.1La Société nationale et centrale d'Agriculture de France a décernéau présent travail et à un autre analogue sur la Pisciculture en eauxsalées, uue médaille d'or à l'effigie d'Olivier de Serres.


L A P I S C I C U L T U R EENE A U X D O U C E SL a pisciculture est l'industrie qui a pour but d'exploiterles eaux par la production, l'élevage ou l'engraissementdes Poissons, Crustacés, Mollusques,Annélides ou Zoophytes alimentaires ou industriels.Elle opère, soit dans les eaux salées, soit dans les eauxdouces. Elle comprend, logiquement, deux études fondamentales:celle des milieux, c'est-à-dire de l'eau, aupoint de sa constitution chimique et physique ; celledes êtres que nous voulons y faire vivre et y multiplier,c'est-à-dire la physiologie de leurs fonctions,leurs m œ u r s , leur régime, etc.C'est des eaux douces et de leurs habitants que nousnous occuperons ici 11Nous croyons pouvoir évaluer à 200.000 hectares, au moins, l'étenduedu domaine des eaux douces en Frauce, avec la division suivante :Nature des eaux Kilomètres courants Superf, en hectares.Cours d'eau navigables... 8.500 ) 29.750Rivières llottables 2.500 j 16.000 k. 5.6>5 43 875 h.Canaux de navigation 8.500 ) 8.500Petites rivières, ni navig. ni flot. 20.851 20.851Ruisseaux 120.000 j 12.000Lacs : » » 140.851 k. 20.000ÉJangs » » I 110.000^162.851 h.Total 206.726 h.soit 16.000 kilomètres, ou 43.875 hectares appartenant à l'État;


C H A P I T R E P R E M I E RLES EAUX DOUCESL'eau pure est unprotoxyde d'hydrogène (en poids,11,112 d'hydrogène et 88,888 d'oxygène; en volume,2 d'hydrogène et 1 d'oxygène). Les eaux, par suite deleur contact plus ou moins multiplié et prolongé avecl'air, peuvent encore y dissoudre certains gaz, dansdes proportions différentes, soit, au m a x i m u m , 32volumesd'oxygène et 68 d'azote. Cependant les eaux desource, à leur point d'émergence, les eaux provenantde la fonte des glaces ou des neiges ne renferment quepeu de gaz en dissolution. Enfin, durant leur trajetdans les profondeurs du sol, au milieu de leur lit, à lasurface, elles peuvent se charger encore de divers gaz :l'acide carbonique (les sources, à leur apparition, encontiennent une assez forte proportion — 0,50 à 4pour 100 — qu'elles perdent successivement et plus oumoins entièrement ; Les cours d'eau dont le lit reçoitdes matières organiques peuvent en contenir des quantitésvariables, suivant la pression atmosphérique, latempérature, etc); de l'hydrogène carboné ou gaz des• i140.851 kilom. ou 162.851 hectares appartenant aux particuliers. Leproduit moyen annuel de ces 206.736 hectares peut être actuellementévalué à 12 millions de francs, dont 950,000 pour l'État.


LES EAUX DOUCES 13marais, produit de la décomposition spontanée des débrisorganiques; de l'hydrogène sulfuré, provenant dumélange des eaux douces avec les eaux salées, dansles estuaires ou les lagunes.Pour être potable, c'est-à-dire propre à la consommationde l'homme et à l'existence des poissons, l'eaudoit renfermer en dissolution de 2 à 3 pour 100 envolume, d'air atmosphérique et 2 pour 1,000 au plusd'acide carbonique. Aussi, les eaux des sources nedeviennent-elles utilisables qu'après avoir séjournéou couru plus ou moins longtemps à la surface du solsous une épaisseur plus ou moins faible. Les eaux quirenferment une trop forte proportion d'acide carboniqueou d'autres gaz irrespirables, commel'hydrogènecarboné et sulfuré, font périr la plupart des espèces.Durant leur trajet souterrain, les sources, pendantleur cheminement dans leur lit, les cours d'eau, sechargent d'une proportion plus ou moins élevée desubstances minérales ou organiques solubles ; cessubstances, qui varient avec la nature des terrainstraversés ou lavés, sont principalement : la silice etl'alumine; les carbonates et sulfates de chaux; leschlorures de chaux, de magnésie et de soude ; les• sulfates de soude et dépotasse; le phosphate de chaux,les nitrates de soude, de potasse et de chaux; les matièresorganiques,etc.M . Weith, professeur de chimie à l'Université deZurich, dans un travail sur la composition chimiquedes eaux de la Suisse par rapport à leur faune, prétendque : l'abondance du poisson dans une eaudonnée est toujours en rapport direct avec la quantité


14LES EAUX DOUCES».de carbonate de chaux que cette eau renferme endissolution. « L'explication du fait est la suivante, ditM . Raveret Wattel : le carbonate de chaux existe enabondance au fond et sur les bords des lacs ; maiscomme il est insoluble, l'eau ne peut s'en emparer. Sicependant l'eau renferme de l'acide carbonique enabondance (du fait de la respiration des animaux quiy vivent), le carbonate insoluble est transformé enbicarbonate, lequel est facilement soluble dans l'eau.On peut donc, jusqu'à un certain point, au moyen del'analyse chimique, juger de la quantité de poissonsqu'une eau peut contenir *. » Cette observation peutêtrevraie pour des eaux qui reposent sur des terrainscalcaires; mais il y a des eaux poissonneuses dans desterrains siliceux, granitiques, argileux et m ê m etourbeux, et presque complètement dénuées de calcaire.On appelle eaux crues, celles qui renferment plus de3 d é c i g r a m m e s par litre de matières salines, lesquellessont principalement des sels calcaires (sulfate et carbonatede chaux et de magnésie). Ces eaux ne sontpas potables pour l'homme et sont peu favorables aupoisson. Le procédé hydrotimétrique permet de serendre très approximativement et très rapidementcompte de la proportion des sels dissous dans l'eau.Cependant, alors que l'on n'admet comme potablepour l'homme que celle qui mesure, au plus, 30° hydrotimétriques2, la pisciculture peut encore utiliser1Bapp. sur la situation de la Pisciculture à l'étranger, 1884, p. 2.2Chaque degré hydrotimétrique correspond à 5 milligr. 8 de chauxet quelquefois demagnésie.


LES EAUX DOUCES 13celles qui marquent, au m a x i m u m , 60° c'est-à-direqui renferment 348 milligrammes de matières salinespar litre. Le squelette des poissons comprenant danssa constitution, 5,5 pour 100 de carbonate et 48 pour100 de phosphate de chaux; le test de l'écrevisse étantformé de 43,5 pour 100 de carbonate et de 8,5 dephosphate de chaux, on comprend que la présence deces sels (2 grammes 5 de carbonate de chaux parhectolitre, pour les poissons, au m i n i m u m ;10 grammesau moins, pour l'écrevisse), est indispensable; mais,nous l'avons dit, cette proportion ne doit jamaisdépasser 35 grammes.Pendant les crues qui suivent les grandes pluies,les sources et les cours d'eau transportent en suspensiondes matières terreuses (sable, argile, carbonatede chaux, etc.) et des substances organiques (vase,limon, terreau, etc.) dérobées à leur fond et à leursrives. Ainsi, tandis que la Seine, à Paris, contient ensuspension,en moyenne, 0 kil. 300 de matières solidespar m è t r e cube, elle en charrie 0 kil. 740, en grandescrues; la Loire, à Tours, 0 kil. 157,5 et 0 kil. 467; leRhône, à Lyon, 0 kil. 151 et 1 kil. 032; le Rhin, àStrasbourg. 0 kil. 064 et 0 kil. 306; la Marne, à Charenton,0 kil. 048 et 0 kil. 513; le Doubs, à Besançon,2 kil. 130 et 7 kil. 500; la Saône, à Lyon, 0 kil. 048et 0 kil. 669; la Durance, 1 kil. 120 et 3 kil. 632; laVienne, 0 kil. 097 et 0 kil. 495 ; le Var, 2 kil. 260 et36 kil. 617 ; l'Elbe (Allemagne), 0 kil. 032 etO kil. 109 ; leGange (Hindoustan), 0 kil. 616 et 2 kil. 340; le Mississipi(États-Unis), 0 kil. 553 et 1 kil. 748; les eauxd'égouts de Paris, en moyenne, 1 kil. 862.


16 LES EA.UX DOUCESCe limon présente, dans chaque fleuve ou rivière,une composition différente : ainsi, celui de la Seine estformé de 87,29 pour 100 de matières terreuses et de8,09 pour 100 de matières organiques ; celui de la Loireprésente les proportions de 91,39 à 8,39 ; de la Gironde90,49 à 9,31; du Doubs, 92,99 à 0,58; de l'Ain, 77,5à 6; du N i l 92,77 à 6,90 pour 100; etc. L a surabondancetemporaire des matières terreuses ne nuit enrien aux poissons adultes, mais le dépôt, en maintsendroits du lit, des matières organiques, surtout sousu n climat chaud, peut déterminer, par suite de la fermentation,le dégagement de gaz délétères.L a traversée par un cours d'eau d'une agglomérationhumaine qui l'enrichit de détritus organiques,est, dans certaines limites, favorable au poisson ; maislorsque cette agglomération est, comme Paris, uneimmense ville qui y jette tous ses débris, le fleuve setrouve pollué et certaines espèces l'abandonnent. I l enest de m ê m e du voisinage de certaines usines qui déversentdans les ruisseaux, des eaux chargées de tannin,de chlore, d'acide sulfurique, etc., et y détruisenttoute la population aquatique de l'aval.Les eaux d'étangs, formées de l'écoulement despentes cultivées, sont en général plus troubles ; cellesdes bois, au contraire, plus limpides. Les cours d'eaunés et cheminant sur des terrains silicieux sont rarementtroublés et reprennent promptement leur pureté,comme la Loire ; ceux des terrains argileux oucalcaires deviennent et restent longtemps troublésaprès la moindre pluie, commela Marne.L a végétation spontanée du fond et des rives peut


LES EAUX DOUCES 17modifier favorablement l'aptitude des cours d'eau àl'entretien des poissons1. Les plantes submergées assurent,par leur respiration, la régénération de l'oxygèneet entretiennent l'aération de l'eau ; puis ellesfournissent le vivre et le couvert à une multitude depetits êtres formant une proie recherchée par lespoissons ; enfin, elles offrent à ceux-ci un abri contrela lumière trop vive ou la chaleur trop intense, unrefuge contre la poursuite de leurs ennemis, un asilepour la fraye, une protection pour les œufs agglomérés.Certaines plantes, comme le cresson de fontaine,Nasturtium officinale) sont un indice certain de laqualité des eaux pour le poisson et de leur convenancespéciale pour l'écrevisse.Les eaux ne doivent pas uniquement fournir auxbesoins de la respiration de leurs habitants, maisaussi aux nécessités de leur alimentation partielle,tout au moins et surtout pendant leur plus jeune âge.Il y a quelques rares espèces de poissons herbivores et1Les plantes les plus utiles pour réoxygéner l'eau et fournir auxpoissons un abri favorable contre la lumière, la chaleur, le froid, etc.en même temps que pour fournir directement ou indirectement àleur alimentation, sont : la Lentille d'eau (Lemna minor, gibba,trisulca, polyrhiza), la Fétuque flottante (Festuca fluilans), l'Acorearomatique (Acorus calamus), le Roseau commun à balais (Phragmitescommunis), le Nénuphar à fleurs blanche et jaune (Nymphœaalba, Nénuphar luteum), la Renouée amphibie (Polygonum amphibium),la Renoncule aquatique (Ranunculus aquatilis), les Cressonsde fontaine et de marais (Naslurtium officinale, palustre), l'Irisjaune {Iris psëudo acorus), la Véronique d'eau (Veronica beccabunga),etc. Celles à détruire sont : les Joncs (Scirpus lacustris), lesTypha latifolia ou Massette ; la Glycérie flottante (Glyceria fluitans);le Phalaris roseau, les Chara hispida, vulgaris et fragilis, le Nitellaalomerata, etc.


18 LES EAUX DOUCEScarnivores ; le plus grand nombre sont insectivoreset carnivores. A u x premières, les eaux de bonne qualitéoffrent des molécules organiques très atténuées,des Algues microscopiques, comme les Diatomées ouBacillariées et les Desmidiées, les Conferves, les L e m -nas, etc. ; d'autres, d'un développement plus considérable,comme le Chara hispiâa dans les eaux plus oumoins stagnantes et les Chara fragilis, gracilis, hyalina,dans les eaux vives. Enfin, les eaux, peuvententretenir une faunule plus ou moins riche en infusoires(microbes, ciliés, flagellés, etc), de dimensionsmicroscopiques, principale nourriture des alevins.Ainsi, M . Miquel a pu constater le nombre de m i ­crobes suivant, par litre : d'eau de pluie, 350; des eauxde la Vanne, à Paris, 620 ; de la Seine, à Paris, 12,000 ;des égouts de Paris, 200,000. Joignons-y, pour lesadultes, les larves d'un grand nombre de petits i n ­sectes aquatiques, comme le Cousin (Culex pipiens etannulatus), les É p h é m è r e s (Palîngenia, Chloé, Bœtis),les H é m é r o b e s (Perla chrysops), la Semblide de la boue(Semblis lutarius), etc. Enfin les insectes aériens quitombent souvent à la surface des eaux sur les bordsdesquelles ils passent une partie de leur existence,I l nous faut aussi considérer les eaux au point devue de leur t e m p é r a t u r e maxima, minima, moyenne,les e x t r ê m e s de chaud et de froid pouvant causer lamort de leurs habitants. On sait que les variationssaisonnières de t e m p é r a t u r e ne sont sensibles que jusqu'à25 m au plus de profondeur dans le sol, et s'ypropagent si lentement que, dans nos climats, le maxi m u m s'y produit en janvier et le m i n i m u m en juin,


LES EAUX DOUCES i9Les sources tout a fait superficielles sont donc sujettesà des variations de t e m p é r a t u r e qui s'étendent entre10 et 14° environ ; celles qui proviennent de profondeurscomprises entre 25 et 200 m , présentent à leurpoint d'émergence, la température moyenne du lieuavec des variations de 1 à 2°, en plus ou en moins.A partir de 200 m , leur température s'élève en raisondirecte de la profondeur dont elles proviennent etpeut atteindre jusqu'à 124° C. La température moyennede la plupart de nos sources est comprise entre+ 9 et + 14° C.Une fois parvenues au contact de l'air, les eauxtendent à se mettre en équilibre de température avecl'atmosphère ; cet équilibre est plus ou moins completà la surface, suivant que l'eau est stagnante ou couranteet que sa course est plus ou moins rapide, sacouche plus ou moins épaisse, sa densité plus ou moinsélevée. Pour les fleuves, la température de surface est,en moyenne annuelle, à peu de chose près celle du lieu,mais l'eau est un peu plus chaude que l'air en hiver,un peu plus froide en été, et cela dans des limitesd'amplitude plus restreintes que pour l'air atmosphérique.Ces variations de température s'abaissent ous'élèvent davantage dans les lacs et surtout dans lesétangs, suivant la hauteur de l'eau, l'activité de sonrenouvellement, l'abri des terrains environnants, de— 4 à — 10° ; et de + 25 à - f 28° C. Cette températurede surface décroît avec la profondeur de l'eau, s'élèveou s'abaisse d'avantage au milieu que sur les rives.L'eau distillée a son m a x i m u m de densité à la températurede -f- 4° C. Les eaux naturelles atteignent ce


20 LES EAUX DOUCESm a x i m u m à une t e m p é r a t u r e d'autant plus basse queleur densité est plus*considérable; c'est pourquoi l'eaude mer, dont la densité moyenne est de 1026, n'atteintson m a x i m u m de densité qu'à — 2° C.Dans l'épaisseur des étendues d'eau courante, lat e m p é r a t u r e n'est pas la m ê m e sur toute la hauteurni sur toute la surface: en général, tant que l'air atmosphériqueest au-dessus de — 0° C, l'eau est pluschaude à la surface qu'au fond, et sur les bords qu'aumilieu; c'est l'inverse, quand la t e m p é r a t u r e de l'airdescend au-dessous de 0° G. L'eau est fort mauvaiseconductrice du calorique: puis, la densité de sescouchesdiminuant à mesure que leur température s'élève ous'abaisse au-dessus ou au-dessous de + 4° C, elles sesuperposent par ordre de densité, les plus lourdes etles plus froides tombant au fond, les plus légères oules plus chaudes tendant vers la surface ; mais ces variationsdiurnes ou saisonnières ne paraissent pas sefaire sentir, dans les eaux stagnantes des grands lacs,à une profondeur de plus de 100 à 125 mètres. Le courantvertical de déplacement contribue à entreteniru ncertain équilibre de t e m p é r a t u r e et à aérer toutel'épaisseur de la couche. A partir de 100 à 125 mètresde profondeur jusqu'au fond, on rencontre donc,dansles grands lacs, une température sinon constante, dumoins peu variable, de + 4 à -f- 6° C; c'est dans cettezone que les poissons vont chercher, en hiver, u n abricontre les grandsfroids.Sitôtque le t h e r m o m è t r e descend au-dessous de 0°C,les eaux peuvent se congeler, leur t e m p é r a t u r e s'abaissanten raison inverse de leur profondeur et de


LES EAUX DOUCES 21leur courant. On sait que l'eau distillée commence àse cristalliser au-dessous de 0° C ; pour les eaux naturelles,le point de congélation oscille entre — 0°,5 et— 1°,5 C, suivant leur densité; pour l'eau de mer, iln'est qu'à — 2°,5, en supposant toujours la pressionatmosphérique de 0 m,7o ; la pression venant à diminuer,le point de congélation s'abaisse, et à l'inverse. Lescours d'eau qui ont une pente rapide se congèlent trèsrarement sur toute leur surface; ceux dont le coursest lent, dont le volume est peu considérable,peuventse congeler à la suite d'un abaissement de températurede — 2° à — 10° C. Les eaux stagnantes, peuprofondes, et de peu de superficie, comme les étangset les petits lacs se solidifient à une température de— 2° à — 6° ; pour les lacs vastes et profonds, commeceux de Genève et deLucerne, etc., il faudrait un froidsuffisamment prolongé de — 15 à — 25° C.Pour que le poisson soit à l'abri des grands froids quilui sont fatals, il lui faut donc en eau stagnante, desrefuges à 20 ou 25 m de profondeur. Dans nos étangs àfond plat (de 1 à 4 m de profondeur) une t e m p é r a t u r eprolongée de — 10 à — 1 2 ° , peut détruire tous les poissons,sauf l'Anguille et la Tanche qui trouvent unasiledans la vase. Si, d'un coté, la couche de glace qui seforme alors à la surface de l'eau, constitue un écranprotecteur, d'un autre, elle présente un danger sérieux :interceptant le contact de l'eau avec l'air, elleempêchel'aération, et le poisson peut périr asphyxié, si l'on nemet en œ u v r e certaines précautions. En hiver et àl'époque des grands froids, le poisson se réfugie instinctivementdans les plus grands fonds de son cantonne-


LES EAUX DOUCESment et y trouve, d'ordinaire, un abri suffisant. Quantaux maxima de température, les poissons qui les supportentle mieux sont la Carpe, dans les eaux limpides,la Loche et la Tanche, dans les eaux vaseuses ; la Truiteest exposée à périr dès que la t e m p é r a t u r e de l'eaus'élève à -f- 25° C ; le Saumon ne peut guère dépasser,au sud, le 40° latit. N . Relativement aux minima, ceuxqui les tolèrent le mieux sont : la Grémille ou Perchegoujonnière (Acerina cernua), l'Able rosse ou Ide melanotte(Idus melanotus), le Nase (Chondrostoma nasus)la Loche franche ou Dormille (Cobitis barbatula), leBrochet (Esox Lucius), le Saumon (Salmo Salar),l'Ombre Chevalier (Salmo umbla), l'Anguille ( M u r œ n aAnguilla), la Truite commune (Salar Ausonii), la CarpeCarassin,etc.L'altitude et le degré de pression atmosphérique quien résulte sont un point important dans l'étude deseaux, non point seulement par rapport à la t e m p é r a t u r emoyenne et à ses minima, mais encore à l'égard de lafonction respiratoire des poissons eux-mêmes. Il y a,enFrance, en Suisse, etc., des lacs situés à des altitudessupérieures à l,700 m (Lac noir ou de Lanaux, PyrénéesOrientales, 2,154 m — du mont Cenis. Savoie, l,913 m —Biancho,Grisons, Suisse, 2,230 m—Saint-Moritz, GrisonsSuisse, l,760 m ) qui restent couverts de glace pendant5 à 10 mois de l'année, et dans lesquels, sans doute,peu de poissons pourraient vivre ; mais, à des altitudesplus faibles, toutes les espèces ne tolèrent pas égalementla diminution de pression atmosphérique qui s'yproduit. Les Salmonidés (Truites, Ombres, etc.) sont-celles qui s'en accommodent le mieux, à condition


LES EAUX DOUCES 23d'être nés sur place ; aussi, pour empoissonner les lacsPavin (altit. l,194 m ) et Chauvet (1,200), a-t-on dû faireéclore sur place les œufs pondus et fécondés à unealtitudeinférieure.En résumé, on peut considérer comme utilisablespar la pisciculture d'eaux douces et l'élevage desdiverses espèces qui leur sont spéciales, toutes leseauxqui ne contiennent pas en dissolution une trop forteproportion de sels m i n é r a u x (sulfates de chaux, demagnésie et de soude ; chlorures de sodium, de magnésieet de chaux ; nitrates de potasse, de soude et de chaux;oxyde de fer ; acides basiques humique et tannique);toutes celles enfin qui ne sont pas souillées par des eauxd'égoutsou d'usines, ou situées à une altitude trop considérableet c o n s é q u e m m e n t exposées à unecongélationde trop longuedurée.


C H A P I T R E I ILESPOISSONSLes Poissons, destinés à vivre sous l'eau, diffèrentprincipalement des autres vertébrés par leurs organeset leurs fonctions de respiration, circulation, locomotionet reproduction. Ce sont des notions d'anatomie et dephysiologie que le pisciculteur doit nécessairementposséder.FIG.1, — Appareil branchial du Brochet.Les poumons, organe respiratoire des classes supérieures,sont ici remplacés par des branchies (fig. 1) :celles-ci consistent, en général, en des lames ou lamellesanalogues de forme aux dents d'un peigne, très vascu-


LES POISSONS 25laires, d'un rouge foncé, et logées dans une cavitécreusée latéralement sur la tête, en arrière des yeuxet de la bouche. Ces lamelles, ordinairement simples,quelquefois ramifiées en forme de panaches, sontfixées,par la base seulement, sur des petits os solides, arqués,que Ton appelle arcs Branchiaux. La cavité qui renfermeles branchies est recouverte, le plus souvent,par un battant faisan^ en quelque sorte, office de sou-FIG. 2. — Tète de Carpe.pape, attaché par la partie antéro-supérieure à l'oshyoïde ; c'est l'opercule ou ce que Ton nomme vulgairementet improprement les Ouïes (fig. 2). En général, oncompte, de chaque côté, quatres branchies (deux danschaque cavité) ; il y en a cinq dans les poissons cartilagineuxqui sont presque tous habitants de la mer,et sept dans la Lamproie (cartilagineux-cyclostomes).Le poisson déglutit l'eau et la fait passer dans la ca-A. CrOBIP, Pisciculture. 1*


26 LES POISSONSvité branchiale où elle se tamise entreles lamelles dontelle baigne la surface, puis, s'échappe au dehors parl'ouverture operculaire. L'animal ouvre et ferme alternativementla bouche, avalant et déglutissant sanscesse.de sorte que les branchies sont constamment baignéespar le liquide; les opercules se soulèvent et s'affaissentpar un semblable mouvement alternatif, maisnon synchronique. Pendant le passage de l'eau à traversles branchies, les lamelles s'emparent, par endosmose,d une partie de l'oxygène qui y est contenu en dissolutionet lui rendent, en échange par exosmose, unequantité équivalente d'acide carbonique, produit de lacombustioninterne.Les poissons ne consomment qu'une assez faiblequantité d'oxygène; cependant celle qui est dissoutedans l'eau ne suffit pas à certaines espèces quisont obligées de venir, de temps en temps, respirerà la surface ; tels sont la Carpe et la plupart des Cyprins.Les poissons qui, comme la Tanche, la Loche d'étang,l'Anguille, etc., vivent d'ordinaire dans la vase, peuvent,au contraire, se contenter d'une eau faiblementoxygénée ; la première résiste dans u n milieu ne renfermantqu'un millième de ce gaz en volume. E n général,les poissons tirés de l'eau meurent plus ou moinspromptement par asphyxie, leurs opercules neplus j ouer, leurs lamelles ne pouvant absorberpouvantl'oxygènede l'air ; quelques-uns pourtant, comme les Gobies, lesBlennies et surtout l'Anguille, peuvent vivre assezlongtemps hors de leur élémentnaturel.Le cœur, chez les poissons, est logé dans la cavitéthoracique qui est très petite et séparée de celle abdo-


LES POISSONS 27minale par un diaphragme, sous la gorge entre lesdeux branchies. Cefcœur est simple, c'est-à-dire qu'ilne se compose que d'une oreillette et d'un ventricule,et assez analogue au c œ u r droitou veineux des Mammifères ; lec œ u r gauche ou artériel est remplacépar un système de vaisseauxqui, après avoir porté lesang noir dans les branchies, le ramè n e n t hématosé dans la grandeartère dorsale chargée de le distribuerà toutes les parties ducorps (fig. 3). Le sang ne passedonc qu'une Ibis dans le cœur, cequi rend sa marche plus lente.Les globules colorés du sangsont de forme elliptique, variablesen diamètre suivant l'espèce,mais généralement plusgros que ceux des vertébrés supérieurs; la proportion du sangau volume comme au poids ducorps est notablement aussi plusfaible.L'appareil digestif des poissonsse compose : des organes buccaux(langue, dents etc.). de l'œsophageFIG. 3.— Schémade lacirculationdu sang dansles branchies.u, Veine branchiale (artèreépibranchiale) ; b, arceaubranchial (coupe transvers.tlr);c, branches de l'artèrebranchiale ; d, branches dela veine branchiale.de l'estomac et des intestins.L a bouche s'ouvre sur la tête, au point d'ordinairele plus saillant de son extrémité antérieure; elle est,le plus souvent, fendue horizontalement, limitée par


28 LES POISSONSdeux lèvres contractiles et rarement protractiles (familledes Ménides) ; la supérieure e3t fixe et l'inférieurepeut s'abaisser et se relever alternativement. L alangueFIG. 4. — Dents du Brochet.est épaisse et très peu mobile, tantôt lisse (Cyprins),tantôt hérissée de papilles cornées, osseuses, ou m ê m ePrf, Préfrontal; H. M, hyo-mandibulaire ; Op, operculum ; S.Op, sous-operculum;I.Op, inter-operculum ; Pr.Op, pré-operculum ; Brg, rayons brancbiosiques ;Sy, simplectiques ; Mt tmétaplerygoïde ; Pl. Parapalato-plenygoïde ; Qu, os quadrate; Ar, articulaire ; An, angulaire ; D, dentaire ; «S.Or, os sous-orbitaire.de véritables dents (fig. 4). Les mâchoires sont, presquetoujours armées de dents (elles manquent chez les Cy-


LES POISSONS 29prins qui sont herbivores, granivores et insectivores),ordinairement en forme de cônes ou de crochets et soudéesdans l'os lui-même. On trouve des dents encoreau palais (Perche), sur la langue (Brochet, Truite, Lamproie),au palais (Perche, Brochet, Truite, Eperlan,Chabot), sur le vomer (Perche, Truite, Lotte), sur lesarcs branchiaux (Brochet, Perche), dans le pharynxFia. 6. — Appareil digestif de la raie.O. cardia ; 5, estomac ; D, pylore ; aa\ appendice pylorique ; P, pancréas ;p, conduit pancréatique s'ouvrant dans un appendice pylorique (Claude Bernard).et presque jusqu'au pylore ou entrée de l'estomac(Cyprins, Perche) (fig. 5).E n effet, la plupart des poissons sont ichthyophages(Brochet, Perche, Sandre) ou vivent d œufs depoissons,d'insectes, de larves, de vers, de petits crustacés, demollusques, etc., comme la Lotte, le Rotengle, le Gar-


30 LES POISSONSdon, l'Ide, le Chevesne, la Vandoise, le Véron, les Corégones,les Truites, les Saumons, etc. ; le plus petitnombre vivent d'insectes, de végétaux ou de matièresvégétales (Carpes, Barbeau, Goujon, Tanche, Brème,Ables, Loches, etc.). Enfin dans les poissons, commechez les Mammifères, la disposition du systèmedentairepeut faire prévoir le régime.Il n y a point de glandes salivaires.L'œsophage est très court et très dilatable ; l'estomacn'est qu'une simple dilatation du tube digestif(Cyprins, Brochet, Anguille), m u n i d'appendices enforme de culs-de-sac ou c œ c u m s pyloriques (Perche,Salmonidés, etc.) en nombre variable, suivant, lesespèces, de deux à cent (fig. 6). La rate et le pancréasn'existent pas toujours.Enfin, nous ne devons pas passer sous silence lesbarbillons, organe annexe de la préhension, sortes detentacules membraneux placés, soit sur les mâchoiresinférieures ou supérieures, soit à leur commissure(4 chez le Barbeau et la Carpe, 6 chez la Loche franche,10 chez la Loche d'étang, etc.) et qui, lorsque le poissonstationne sur le fond, simulent de petits versdont s'approchent, confiants, les petits poissons, leslarves, les insectes, dont le rusé pécheur fait alors facilementcapture.Les deux glandes rénales (reins) sont volumineuseset occupent presque toute la partie supérieure del'abdomen, des deux côtés de la colonne vertébrale ;elles versent le produit de leur sécrétion, tantôt, maisrarement, dans une petite vessie rudimentaire, le plussouvent dans u n urèthre qui s'ouvre au dehors en


LKS POISSONS 31arrière tout près de l'anus et qui l'évacué à mesure etgoutte à goutte. C'est dans cette ouverture uréthralequ'aboutissent également le canal éjaculateur d u m à l eet l'oviducte de la femelle.L a circulation est relativement lente chez les poissons,par suite de la structure du c œ u r unique ; lacombustion interstitielle est c o n s é q u e m m e n t peu activeet la chaleur propre nécessairement peu élevée.Chez la Carpe et l'Anguille, le c œ u r n'a que 18 à 24contractions par minutes; les Salmonidés ont la circulationplus active et 25 à 40 contractions. Aussi la températuredu corps de la Carpe ne dépasse-t-elle pas deplus de 1° C environ, celle de l'eau qu'elle habite; maiselle ne prospère et surtout ne se reproduit que dansles eaux à température relativement élevée ; laplupartdes Salmonidés, au contraire, habitent des eaux trèsfroides dans lesquelles seulement ils peuvent se reproduire.Le froid engourdit les poissons comme la plupartdes autres animaux; il limite l'activité de leurs fonctionsde respiration et de circulation et parconséquentde celles de digestion et de locomotion ; il diminue lesdépenses du corps et réduit les recettes nécessairesdans une proportion identique. Il y a, pour la tolérancedu froid, des limites variables pour chaque espèceau-delà desquelles la mort arrive plus ou moinspromptement, par suite de l'arrêt de toutes les fonctions.L'abaissement de la température semble d'autantplus nuisible, qu'un courant plusactif renouvelle,autour du corps, l'eau qui s'empare de son faibleexcédent de chaleur ; aussi, dans ces conditions, est-il


32 LES POISSONSprudent, lorsqu'on le peut, d'interdire le renouvellementde l'eau dans les étangs, viviers, etc. Ce froidproduit encore un autre effet dommageable en congelantla surface et en e m p ê c h a n t la réoxygénationde l'eau ; là où, comme dans les étangs, les poissonssont nombreux par rapport au cube de l'eau, la mortpeut se produire par asphyxie, après un temps plusou moins prolongé, si Ton n'a soin de casser la glace,chaque jour, en des points multipliés, ou si l'on n'emploiedes moyens d'empêcher la congélation sur cesm ê m e spoints.Outre le c œ u r sanguin, on rencontre chez quelquespoissons et notamment chez l'Anguille, dans la régioncaudale, un c œ u r lymphatique, contractile,dépendantdes vaisseaux artériels et fonctionnant comme u nc œ u r accessoire, ce qui explique en partie la persistancede la vie chez cet animal et justifie la coutumedes pêcheurs qui, pour amener plus vite la mort, luifrappent violemment la queue sur une pierre ou surla pointe de leurssabots.Les quatre pieds des m a m m i f è r e s se transforment,chez l'oiseau, en deux ailes et deux pieds: chez lespoissons, en deux ou quatre nageoires : le membreantérieurou thoracique devient la nageoire pectorale ; lemembre postérieur ou abdominal, la nageoireventrale(fig. 7). Le squelette de ces organes de locomotion s'estplus ou moins sensiblement modifié et les doigts ontété remplacés par des rayons, tantôt osseux, tantôtcartilagineux, libres ou conjugués, simples ou r a m e ù x ,en nombres très variables suivant les espèces,variablesencore m ê m e , dans les individus.


LES POISSONS 33A ces nageoires pectorales et ventrales, véritablesmembres, organes actifs du mouvement, en nombrepair, une de chaque côté du corps, se joignent encore:un autre organe de propulsion situé à l'arrière, laqueue, la nageoire caudale, qui fait office de godille ;une, deux ou trois nageoires dorsales, impaires, c'esti-direplacées sur le grand axe du corps; enfin, uneFIG. 7. — L'Aproncommua.dernière nageoire impaire (quelquefois deux) placéeprès et en arrière de l'anus et, à cause de cela, nomméenageoire anale1De telle sorte que la formulepourrait à la rigueur et au m a x i m u m ; devenir :2. Pectorales.2. Ventrales.3. Dorsales.2. Anales.1. Caudale.1II y a encore de fausses nageoires (fausses dorsales, faussesinales, ou nageoires adipeuses) qui caractérisent les saumons et lesruites (t F. D) ; le thon (8 à 10 F. D — 8 F. A.), le maquereau comnun(5 F. D. — 5 F. A.), etc. Puis, les amhulacres, organes muscuairesservant à la demie reptation sur le fond, placés à un endroit/ariable, depuis la base do la mâchoire inférieure jusque un peu enirrière des pectorales ; il y en a trois paires dans le genre Trigle,ine dans le genre Rouget, etc.


34 LES POISSONSMais cette formule varie e x t r ê m e m e n t de famille àfamille, puis dans les genres et m ê m e dans les espèces ;on rencontre, en effet, à peu près toutes les combinaisons,depuis celle de la Lamproie (2 T) — i A — 1C)et de l'Anguille (2 P — 1 D — 1 A — \ C) jusqu'à cellede la Lotte ( 2 P — 2 V — 2 D 1 A - 1 C — )et du Merlan2 P _ 2 V — 3 D — 2 A — 1 C). Les Malacoptérygiensapodes ou Anguilliformes ont été improprement dotésdu premier de ces noms par Cuvier, car, s'ils n'ontFIG. 8. — La Barbue.point de ventrales, ils sont munis de pectorales, l'absencede membres postérieurs fait qu'ils rampent dansl'eau comme sur terre, plutôt qu'ils ne nagent(«g. 8).Les nageoires et la queue, organes actifs de lalocomotion,sont munies de muscles plus puissants parleur nombre et leur .combinaison que par leur déve-


LES POISSONS 33lopperaent ; les mouvements latéraux alternatifs ducorps sont unpuissantmoyen de propulsionen -avant, produisentdes changements plusou moins brusques dedirection en horizontalitéou en altitude, etaussi le saut en hauteurdans lequel excellentle requin(jusqu'à6 mètres au-dessus dela surface ou unehauteurégale à la longueurde son corps) etles Salmonidés (Saumon,6 à 10 fois lalongueurde son corps;T r u i t e , 8 à 12 fois,etc.)(fig. 9 et 10).Les organes reproducteursmâles secomposentessentiellementde deux testiculesappelés LaiteouLaitance, soit deuxglandes, deux grandssacs, partie glanduleux,partiemembraneux,présentant engénéral une forme co-FIG. 9. —Le Thon commun.


36 LES POISSONSnique et situés dans la partie inférieure de l'abdomenentre le diaphragme et l'anus. Ils sont quelquefois divisésen lobes, mais ils se réunissent toujours, à lapartie postérieure et versent au dehors le produit deleur sécrétion par un canal déférent qui aboutit dansl'urèthre et s'ouvre, avec lui, dans une petite fossetteappelée P o r egénital.FIG. 10. — JeuneSaumon.Dans les espèces ovovivipares et vivipares, où lafécondation s'opère par accouplement, on rencontreencore des réservoirs analogues aux vésicules sémicalesdes mammifères, permettant l'accumulation dusperme; une grosse glande comparable au corps deW o l f : u n pénis et des organes copulateurs à l'aidedesquels le mâle peut saisir et étreindre la femelle(Sélaciens).Le sperme ou produit de sécrétion des testicules, decouleur blanchâtre, laiteuse, de consistance plus oumoins fluide, composé d'alumine, de gélatine, de phosphatede chaux et de magnésie et d'un peu de chlo-


LES POISSONS 37rydrate d ammoniaque, renferma des spermatideslinéaires, cylindriques, avec une t/'to plus ou moinsallongée, se rapprochant assez, par la forme, de ceuxdes oiseaux et des reptiles, doués d'une extrême rapiditéde mouvements ondulatoires.Les organes reproducteurs de la femelle consistenten deux ovaires, soit deux glandes, deux grands sacsanalogues aux testicules du mâle, situés au m ê m e lieu;ces glandes sont renfermées dans un sac double, parfoissimple pourtant (Perche) et divisé, à F intérieur enplusieurs loges formées parles plis de la membraneenveloppante à la surface de laquelle adhèrent faiblementles œufs qui sont successivement sécrétés. L'enveloppeest entourée û son tour d'une couche musculaireassez épaisse 1 , dont la contraction produit l'expulsiondes œufs. Chaque sac ovarien se termine, enarrière par un oviducte et ces deux canaux se réunissentun peu plus loin, en un seul qui vient s'ouvrirdans l'urèthre, près du Pore p'nital. Parfois, les oviductesmanquent (Salmonidés Lamproie Anguille)et les œufs m û r s tombent dans la cavité abdominaleet sont expulsés par le m ê m e chemin.Chez les poissons où la fécondation est interne, etrésulte d'un accouplement (Sélaciens), on rencontreune sorte d'utérus et un e œ c u m spermatique analogueau vagin des mammifères. Enfin, chez certains poissonsinférieurs (Lophobranches) on trouve tantôt chezla femelle et tantôt chez le mâle, une p )cho marsupiale,dépression hémisphérique creusée sous l'abdomen,dans laquelle les œufs subissent une véritableincubation.A. GOUIN, PiM-icultuiv. *


3 LES POISSONSOn rencontre quelques cas assez nombreux d'Hermaphrodisme,chez la Carpe, la Perche, etc, c'est-àdireque les organes des deux sexes se constatent dansle m ê m e individu ; mais on ne dit pas si ces monstressont féconds, ce qui paraît peu probable,


C H A P I T R E I I ILA REPRODUCTION NATURELLEL'œuf des poissons, produit de sécrétion de l'ovaire,se compose de :1° Une enveloppe ou coque, membrane vitelline,e x t r ê m e m e n t mince d'ordinaire, perméable à l'eau etau sperme ; elle est formée d'une (Salmonidés, Loche,Barbeau, etc) ou de deux couches (la plupart des Cyprins,Perche, Grémille, Brochet, etc.) traverséesd'un grand nombre de canalicules très déliés formantcomme des pores ' La membrane vitelline est sécrétéepar le parenchymeovarien.2° La membrane vitelline présente encore, chez laplupart des poissons (Truite, Silure, Brochet, Perche,Grémille, tous les Cyprins) un canal infundibuliformeappelé micropyle dont la partie la plus mince, le col,se dirige vers l'intérieur de l'œuf, vers le point où seirouvela vésicule germinative.3° L'albumen ou blanc manque presque complète-1Celle double membrane est assez résistante pourtant,et le vilellustssez dur, pour que l'œuf de la Truite ne s'ëcrasc que sous un poidsle 6 kilos; la nature a sans doute cherché à préserver les œufs defaUnouides déposés dans les eaux des torrents, des chocs produitsRI les courants et les crues.


LA REPRODUCTION NATURELLEmeut, ou du moins, se trouve réduit à unefaible couche(Perche, Brochet, etc.).\° Le vitellus ou jaune consiste en un liquide jaunâtre,transparent, tenant en suspension des globulesgraisseux, et des globules vitellins; les premiers dominentdans l'œuf de la Truite, delaCorégone-Palée, etc.;les seconds dans celui de la Perche et du Brochet.5° Vers un point de la circonférence du vitellus, setrouve la vésicule germinative, ordinairementmultipleet analogue à celle de l'ovule des mamifères et de l'œufdesoiseaux.On nomme F r a y e chez les poissons, l'époque de laponte, époque variable selon les espèces et suivantles climats. On divise généralement, en effet, les poissonsadultes en poissons :1° de première saison (novembre à mars), Salmones,Lotte,etc;2° de seconde saison (février à mai), Brochet, etc;3° de troisième saison (avril à juin), Perche, etc ;4° de quatrième saison (de mai à août), Cyprins. Lesjeunes frayent parfois à des saisons plus précoces ouplustardives.Les lieux où les femelles déposent leurs œufs reçoiventle nom de Frayères. L a fraye est précédée decertains symptômes, plus ou moins apparents et analoguesà ceux dont l'ensemble porte chez les vertébréssupérieurs, les noms de Rut pour le mâle et deChalejtr pour la femelle. Tantôt il y a, mais chez lemâle seulement, changement de couleurs qui deviennentplus vives vVéron. Épinoche); tantôt, cette recolorationne porte que sur les nageoires pectorales


I A UKPRnDT'CTÎOX X A T r K K M . K(Nase, Chevesne, Porche, Ombre, ote,; d'autres fois, ily a apparition, sur la peau, de taches ou de verruresdiversement colorées' Brèmes. Rotengle, Meunier, etc.;;rarement, ces modifications de couleurs s'étendent àla femelle (Lump, ('j/clopferus lu m pu* ; enfin, chezle Saumon mâle, pendant la saison des amours, lamâchoire inférieure s'allonge et son extrémité setransforme en une sorte.de crochet cartilagineux quivient occuper, lors que les mâchoires sont fermées,*une profonde cavité située entre les os intermaxillairesde la mâchoire supérieure. La fraye terminée, ceprolongement disparaît. D a r w i n semble penser quecet appendice temporaire est un supplément d'armurepour la lutte qui doit établir la sélection; en m ô m etemps, le corps tout entier prend un ton orangé et desbandes de m ê m e couleur apparaissent sur les joues;les femelles, au contraire, revêtent une colorationplus foncée; le m ê m e prolongement maxillaire sedéveloppe sur la Truite mâle et quelques autresSalmones.Chez les femelles, l'approche de la ponte ne se manifesteguère que par le développement successif de l'abdomenqui se distend de plus en plus, tout en restantmou ; l'orifice anal et le pore génital sont fortementtuméfiés, deviennent saillants comme un bourrelethémorrhoïdal. Ce développement de l'ovaire dont tousles œufs augmentent presque simultanément de volumeen approchant de leur maturité, presse sur tous lesorganes internes et détermine un sentiment de gène,de douleur m ê m e , que la femelle cherche à soulagerpar l'expulsion de ces œufs. Dans ce but, elle met en


42 LA REPRODUCTION NATURELLEœ u v r e , des moyens mécaniques, c'est-à-dire qu'ellefrotte son abdomen sur le sable, le gravier, l'herbe, etles œufs s'échappent alors, soit isolément, soit parchapelets. Tantôt, tous les œufs parviennent simultané m e n t à maturité et la ponte s'effectue en très peud'heures (Carpe, Rotengle, Chevesne, etc.); d'autresfois, ils ne sont expulsés que successivement et à desintervalles plus ou moins éloignés, à mesure de leurmaturation (Goujon, Équille, Merlan, etc.; la frayedure de trois à six jours pour la Truite). Tantôt', lesœufs sont libres, indépendants les uns des autres (Salmonidés,Ésoces, Lotte, etc.); tantôt ils sont agglutinés,reliés en chapelet par une sorte de membrane(Cyprins, Perche, etc.). Les œ u f s libres des Salmonidés,pondus durant la saison froide, sont déposéssur le fond où ils sont abrités contre le3 minima det e m p é r a t u r e ; ceux des Cyprins, agglutinés et enguirlandéssur les herbes, pondus en saison chaude, sontdisposés non loin de la surface et y trouvent la températureélevée qui leur est nécessaire.Les femelles, dans chaque espèce, sont douées d'uninstinct qui leur fait choisir le milieule plus favorableà leurs œufs et les y déposent, les unes sur le fond, lesautres sur les grèves de la rive, celles-ci au milieu desherbes flottantes; certaines leur préparent u n véritablenid, comme l'Épinoche; d'aucunes, comme la"fruité lés déposent dans un sillon qu'à l'aide de leurqueue, elles ont creusé dans le sable du fond. .Quelquesespèces sont non seulement nidifiantes, mais encoreincubatrices, comme le Silure d'Europe (SilurusGlanis)et surtout le Macropode ou Paradisier de la Chine#


LA REPRODUCTION NATURELLE 43Macrojtotfits ce/iusfusi] et il est remarquable que. danse cas, de m ê m e que c'est le mâle de l'Épinoche quionstruit le nid, ce sont les mâles qui couvent leseufs, protègent et surveillent les alevins.Le nombre des œufs, dans la Classe des poissons,ht généralement considérable, presque toutes les esècesétant ichtyophages et les œufs, comme les indiidusjeunes et adultes étant exposés à de nombreuseshances de destruction : la nature, en effet, a toujoursu en vue la conservation de l'espèce et tout prévuour conserver l'équilibre dans le règne animal ; lorsqueharmonie est rompue, on peut être certain qu'elle nea été que par l'intervention del'homme.Voici le nombre moyen des œufs contenus dans l'oairedes femelles adultes et de poids moyen elleslêmesdans leur espèce:rochet in. 000crcho 250.000arpe commune .. 200.000arpcï carassin— 100.000irpe gibok 200.000inche 250.000indoise 30.000irbeau 10.000rème 100.000Gardon 30.000Lotie commune... 100.000Saumon commun 25.000Corégone Fera 25.000Corégone Lavaret. 30.000Truite commune.. 5.000Ombre chevalier.. 25.000Loche franche 60.000Une Carpe de 0 m ,30 de long contient 130,000 œufs ;? O'ViO, 230,000; de 045 f330,000; une Tanche del,500 en renferme 230,000; un Brochet de 1 kilog.•ntient de 80 à 100 grammes d'qpufs; une Perche dekilog. 200 grammes ; les Salmonidés contiennent de13,003 œufs par kilogramme de leur poids.


REPRODUCTIONN A I T R E LL KCes œufs, en effet, sont loin d'offrir tous le m ê m evolume : ceux de la Lotte et du Barbeau sont très petits(0 m ,0003 de diamètre) ; de la Carpe, du Chevesne,de la Bouvière, de la Loche, du Brochet, de la Perche,sont petits (0 m ,000,8) ; du Nase, de la Féra, assez gros(0 , u ,001,. v >) ; de la Brème, du Chabot, de la CorégoneGravenche, gros (0 m ,002); du Saumon, de l'Ombre chevalier,de l'Ombre commun, de laTruiteet engénéral,des Salmonidés, sont très gros(0 m ,005 à 0 m ,007).Les uns sont transparents (Brème, Brochet, Sau-• mon salvelin, Truite saumonée, etc.), les autres opaques(A.pron, Vandoise, Lotte, Saumon, etc.); ceuxdel'Àpron, de la Lotte, de la Vandoise, de l'Ablette spirling,sont blancs ou blanc jaunâtre; delà B r è m e communeet de la Bordelière, du Chevesne, de la Carpecarassin,de la Perche, de ride, du Chabot, de la Loche,d'un jaune-pâle; de l'Ombre chevalier, de la Corégonegravenche, d'un jaune clair; d e l à Truite commune,jaune d'ambre; du Barbeau, de l'Ombre commun, jauneorangé; du Saumon, jaune orangé v i f ; du Brochet,rouge verdàtre ; de la Brème, gris verdàtre; de laCarpe, de la Tanche, du Gardon blanc ou Rosse, duBrochet, du Silure, verdàtres ; du Goujon, bleuâtres,etc.etc.On croit que l'âge auquel mâle et femelle sont devenusaptes à se reproduire estle suivant: pour la Carpecarassin et la Truite commune, deux ans; pour laCarpe commune, la Carpe gibèle, ride, la Perche, troisans ; pour le Véron; quatre ans; pour le Barbeau, leSaumon, etc., de quatre à cinq ans.Il arrive parfois que l'expulsion des œ u f s ne peut


LÀ REPRODUCTION NATURELLEavoir lieu ; l'ovaire s'altère promptemcnt alors, larésorption ne peut s'en faire complètement et l'animalmeurt, le plus souvent. Cet accident se produit surtoutpour la Brème, lorsque la température s'abaissenotablement à l'époque de la fraye et aussi pour toutesles espèces placées en eaux trop froides ou trop vivespourleur constitution.Chaque espèce dispose ses œufs en des lieux appropriésà leur réussite : les uns en eaux rapides Barbeau,Lotte, Chevesne, Vandoise, Véron, les Salmonidés); d'autres en eau calme (Brochet, Ide, Brème,Gardon, Perche, Silure); quelques-uns en eau stagnante(Carpe, Tanche, Loche d'étang) : celles-ci aumilieu des herbes des Frayères ou sur les rives engazonnées(Carpe,Brème, Perche, Brochet) ; celles-làsur les pierres et cailloux du fond ou des talus (Barbeau,Nase, Corégones, Loche?, Chevesne, Ombres) ;quelqûes-unes dans le sable ou des graviers du fond(Saumon,Truites).Les œufs paraissent conserver assez longtempsleur vitalité, puisque l'on a pu extraire ceux de femellesmortes de froid ou d'accident depuis plusieursheures, les féconder et les voir éclore.Le rut des mâles coïncide, dans chaque espèce, avecla ponte des femelles. Tandis que la plupart de cellescifrayent en bandes (Brèmes, Barbeaux, Ablettes,Chevesnes, Carpes, Lottes, Rosses, etc.) ou isolément(Brochet, Chabot, Loche, Meunier,Salmonidés,Perche),les mâles les suivent au lieu de la fraye, pour verser surleurs œufs ou dans le voisinage, leur laitance, liqueurspermatiqueou fluidefécondant. Bien que, très probable-


4G LA REPRODUCTION NATURELLEment, chez les poissons à 1 état de nature comme chezles animaux qui leur sont supérieurs, le nombre desfemelles et des mâles soit à peu près égal, tantôt onvoit les mâles se presser nombreux autour de la. femelleen gestation (deux mâles par femelle pour laCarpe, la Tanche ; trois et parfois quatre pour laBrêm'e; six à dix pour le Véron), d'autres fois, lesmâles se montrent en nombre égal ou m ê m e inférieur àcelui des femelles (un mâle par femelle pour le Brochet,— un mâle pour deux femelles dans l'Ablettecommune, etc.). Chez le Gardon blanc ou MeunierRosse, et dans plusieurs autres espèces, on voit passerune première troupe de mâles, une seconde de femelleset une troisième de mâles encore.La liqueur spermatique renferme, nous l'avons dit,des spermatides qui paraissent être les agents directsde la fécondation. Ces animalcules n'ont qu'une duréed'existence très limitée : de 2 à 5 minutes, d'ans laCarpe, par exemple; d'autant plus longue que l'eauest plus tiède, d'autaht plus courte qu'elle est plusfroide.M . de Quatrefages a constaté, en 4853, que la vitalitédes spermatozoïdes était au m a x i m u m de :2' 10" dans la laitance du Barbeau.2. 30. dans celle de la Perche.3. » dans celle de la Carpe.3. 10. dans celle du Gardon.8. 10. dans celle du Brochet.Cependant, M. Biener put aller prendre de la lai-


LA REPRODUCTION N ATIR KLLK 17tance de truites de l'autre côté du lac de Constance,la recevoir pure dans un flacon hermétiquement bouchéet qu'il plongea dans l'eau prise à m ô m e celle ounageaient les mâles, et l'employer à féconder les œufsqui donnèrent 40 pour 100 à 1 eclosion ; la durée dutransport de la laitance avait été de 45 minutes aumoins. Dans une expérience (de Coste),sur 140 œufs,3 seulement furent fécondés après une demi-heure, etpas un seul après une heure *L a laitance, répandue dans l'eau, la trouble ennuages laiteux qui, plus denses qu'elle, tendent à descendrevers le fond, si l'eau est calme. Les mâles,d'ailleurs, l'expulsent par le m ê m e procédé que lesfemelles, leurs œufs, en frottant leur abdomen sur lesableou le gravier, sur les corps immergés, les herbesaquatiques ou celle des rives. La ponte effectuée, lespoissons sont affaiblis, languissants, maigres, leurchair est molle, peu nourrissante et de qualité inférieure.Que se passe-t-il pendant le contact de l'œuf et duZoosperme? Nul ne lésait au juste, pour les poissonsnon plus que pour les autres animaux. On supposeque l'animalcule pique l'œuf ou m ê m e s'y introduit(suivant quelques-uns, à travers le micropyle), transporteavec lui quelques particules du liquide, o.u biendevient lui-même l'axe embryonnaire. Or, l'œuf, aumoment de la fraye, est légèrement ridé ; au contactde l'eau, il se gonfle sensiblement en s'entourantd'une1E. Blanchard, Les Poissons d'eau douce, p. 113. — Cosîe, Hisi 9gênér. du développement des corps oy^aiiisés, t. II, p. 4\.


-48 LA REPRODUCTION NATURELLEenveloppe mucilagineuse très mince, à peine visible etdevenue très poreuse. Sans changer de couleur, s'ilétait transparent, il devient opaque, mais pourreprendre insensiblement- sa transparence première.A l'intérieur, on voit bientôt apparaître une petitetache circulaire de couleur gris-noirâtre dont ledéveloppement s'arrête là, s'il n'y a pas eu fécondation,mais qui, dans les œufs fécondés, s'accroîtassez rapidement. La loi d'une fécondation rapideaprès la ponte découle d'abord de la courte existencedes spermatozoaires, puis de la nécessité, pour eux,du p h é n o m è n e endosmotique de gonflement des œufsqui favorise leur pénétration. Durant les trois premiersjours qui suivent la ponte, les œufs fécondésaugmentent sensiblement de densité (5 pour 100 deleur poids initial) et absorbent de l'oxygène ; puis cemouvement d'accroissement en poids diminue et s'interrompt; à partir du moment où l'embryon apparaîttout formé dans l'œuf (époque variable selon l'espècezoologique), le poids absolu tend au contraire, à diminuer(Pli. Gauckler.). Cet embryon apparaît d'abordsous l'aspect d'une ligne blanchâtre formant un quartde cercle ; l'une des extrémités s'allonge insensiblement,c'estlaqueue ; l'autre se dilate simultanément,c'est la tête, sur laquelle ne tardent pas à se montrerdeux points noirs, les yeux, qui en occupent près desdeux tiers. L'embryon est a n i m é déjà de mouvementspropres, sa queue surtout, s'agite plus ou moins rapidement(fig. 11).La durée de l'incubation varie selon l'espèce d'abord,


LA REPRODUCTION NATURELLE 49puis suivant la t e m p é r a t u r e de l'eau ; elle est, enmoyenne, la suivante, pour:Le Maeropode de Chine.. G5 à 72 h. Le Silure d'Europe. . 12 à 14 j.L-H Cur|K- coin., nir-t^in, etc. 8 20 j . La Grémille 15 lBLe Rotengle 5 10 L'ombre commun... 2§ 30La Tanche 3 8 La Corégone Fera. .. 25 40L aUréino 8 10 La Truite commune. 40 G0La Perche 10 20 Le Saumon commun 4n 65Le barbeau 9 15 Le Saumon H-eusch. 35 02Le Brochet.. 10 18 L'Ombre chevalier.. 40 72FIG. 11 — Œufs et alevins de Saumon commun.«, i)\'wï de Saumon âpre» la Nvmxlation. do grandeur naturelle ; b, le même çm«w:i ;c. Saumon venant d'éelore. srru-M ; d, jeune Saumon, grandeur naturelle.Les praticiens ont constaté, à températures semblables,des différences de durée dans l'incubation quisemblent appeler l'attention et indiquer un inconnu


DO h \ REPRODUCTION NATURELLEque Ton ri a point encore dégagé ; témoin les chiffressuivants qui s'appliquent à la Truite:Tompératurode l'eauéDurée dePincubationSomme totaledechaleur reçaeNom des observateurs ot indications-f 2° C 9") jours 190° c. Bouchon Brandely V+ 2° 50 165 412 50 Koltz, 4° édition *.3+ 2 à -f 3° C 45 à 60 131 25 Carhounier .4- 3 Û » 85 255 » Bouchon-Brandely, ut suprà+ 4° » 75 300 — —+ 5° » 65 325 » •4- o° > 103 515 Koltz. ut suprà.+ W » 5S 330 » Bouchon-Brandely, ut suprà.-r- 7° » 45 315 » — —-|- 7° 50 73 547 50 Koltz, ut suprà.-h 6 à 8° 30 à 40 245 M Carbonnier, ut suprà.+ 10° » 47 470 » Kollz, ut suprà.-f- 12° 50 32 400 »Mais ce que nous avons toujours observé, c'est que,en général, les alevins, produits d'une longue incubationrelative résultant d'une basse température parrapport à leur espèce, sont infiniment plus vigoureuxque ceux provenus d'une rapide incubation en eauchaude.L'éclosion met fin à l'incubation ; elle se produitlorsque le développement fœtal est complet. Les mouvementsde téte et de queue qu'accomplit l'embryonpendant la dernière partie de sa gestation, usent sansdoute les membranes de l'œuf qui finissent, le momentvenu, par lui livrer passage en une ouverture. T a n t ô t1Bouchon-Brandely, Traité de Pisciculture pratique, p 317.- Koltz, Traité de Pisciculture pratique, p 143-144.3Carbonuier, Guide pratique du pisciculteur, p, 4^,


LA REPRODUCTION NATURELLE 51la tête ou la queue sortent seules par ce passage, et lejeune animal, retenu par sa vésicule ombilicale, doits'arrêter et attendre d'avoir repris ses forces pour sedélivrer complètement ; tantôt, c'est, au contraire, lavésicule qui apparaît la première et il faut une ou plusieursheures pour que le n o u v e a u - n é puisse agrandirl'ouverture, sortir de sa prison et se débarasser de lacoque de son œuf. A ce moment un jeune Saumon n'aque0 m ,01-5à0^,02 de longueur; leTruitton, O m ,042à0 016; le Carpillon, 0 m ,008à O m 012 à; le Barbillon,0 m ,005 à 0 m ,008.La vésicule ombilicale, vésicule vitelline, sac vitellin,' n'est autre que le feuillet muqueux du Blastodermeou feuillet interne de la membrane vitelline, contenantencore du vitellus qui pourvoira à la nutrition dujeune poisson durant la première période de sa vie extérieure.Chez les Salmonidés, elle ne se résorbe quelentement, rentrant peu à peu dans l'abdomen où elledevient une partie de l'intestin ; (fig. 42) chez la Truite,elle n'est complètement résorbée et l'abdomen n'estrefermé sur elle que trente-cinq ou cinquante joursaprès 1 eclosion ; chez les Cyprinides, la vésicule ombilicaleest renfermée dans l'abdomen dès âvant l'éclosion,mais elle n'en existe pas moins évidente par legonflement de cette région et elle est vide quinze àtrente jours après la naissance; de m ê m e chez le Brochetoù la résorption de son contenu est complète aprèsquinze à vingtjours.Lors de l'éclosion, l'alevin ou jeune poisson (saufpeut-être dans la Corégone Féra), est entraîné au fondde l'eau par le poids de sa vésicule ombilicale plus


LA RKPROM/CTION N V I T R K L L Kdense;il s'y traîne péniblement et y cherche de^ abrisJusqu'au moment oii la résorption do la vésicule est1. Suproh'tfuin ou /fy> ?/N argent eus sur un o-nf uV -.jumoii.FiO, 13. — Byssus ar^enleu?.ture; mais dès lors, c'est au monde extérieur qu'il vademander les éléments de son existence et de soncomplète, il ne cherche et n accepte point de nourri-développement.Tous les œufs fécondés, tous les alevins éclos u arri-


54 LA REPRODUCTION NATURELLEvent point pourtant à l'âge adulte \ car ils ont de nombreuxennemis, dans les règnes végétal et animal.FIG. H. — Dytique bordé, nageant etrespirant.110 pour 100 seulement des œufs de Truites ; 1,25 pour 100 seulementdes œufs de Carpes, arrivent à l'éclosion dans les eaux naturelles(Pb. Gauckler).


TA REPRODUCTION NATURELLE .).)Pour les œufs, ce sont:Dans le règne végétal, des Algues microscopiques,le Leptomitus clavatus (Confervées), le Mëridion circulantle Byssufi argenteus (fig. 13), le Trichotaumadcrmale; les S y n e d r a angustata, par cilla, acicularis,Vauchcriiv, Palea, Muscida ; le Diatoma puctinale, etle Saprolegniaferox, Y A c h l y a proliféra (DiatomacéesetBacillariées).Dans le règne animal, un grandnombre de mammifères, le Rat d'eau,la Loutre, etc. ; d'oiseaux, le Martin-Pêcheur, le Grèbe, la Macreuse, leCanard, etc. ; de reptiles, la Grenouille,le Triton, etc. ; d'insectes sous formeparfaite ou sous celle de larves, le Dytiquebordé (Dyticus marginalis) (fig.14) l'Hydrophile brun (Ilydrophiluspiceus); de crustacés, la crevette desruisseaux ou Puce d eau (Gammaruspulex). Enfin, un grand nombre.depoissons sont aussi friands d'œufs depoissons de toutes les espèces et m ê m eFIG.15. —Ergasilusgulatum, appendiculatum et p o l y m o r p h u m ; les Echi-Sieboldii.de la leur, que d'alevins ou d'adultes; la plupart despoissons, m ê m e la Carpe et le Chevesne, dévorent lesEnfin, les poissons jeunes ou adultes, ont leurs' jeunes, tout comme le Brochet, la Perche et les Salmonidés.parasitesinternes etexternes.Parmi les premiers, citons: pour l'Anguille, V Ascarislabiata; le Lyorhynchus denticidatus; les Distoma an-


LA II K PRODUCTION NATURELLEiwrhyticlms prnfans, atifjnslalus, clarahis et globulosus;le Tcuia mai-rtyfi*phala;\QBo(hryoccphahts claviceps,etc.Pour la Perche, le CucuUanus elegans ; Pour le Saumon,Y Ascaris cap^tlaria, Y Amplvisloma oxycephalum,les Disioma appendirtfhdinn et Laurcnlum; les 2?cWnorhynchnsProlens, globulosus, etc.AOlir-ros percarum. femelle. Actbw* percarum, mâle,Fia. 16-17. — L'Adhère des Perches.Parmi les parasites externes, nous nommerons: surl'Anguille. YErgasilvs gibbus ou Sieboldii (crustacés)(fig. 15 : sur la Perche, le X a ï s percarum (Annélides)etYAchtcre .Crustacés) (fig. 16 et 17; ; sur le Brochet, laCarpe, l'Épinoche et la plupart des poissons de rivière,


LÀ KKPRonrOTIoX NATURI LLi; :iTÏArgulm foliaceus (fig. 18, ; sur la Brème, le lïipfozoottparadoxtnn (Ilelminf lies) (fig. 19 etc.A ces causes déjà si nombreuses de destruction, joignonsles extrêmes de température, minima et maxima;ledébordement et le dessèchement des cours d'eau ; leursouillure par les grandes villes et les usines; la navigationà vapeur, la pèche et surtout le maraudage.Après cette é n u m é r a t i o n on s'expliquera peut-être enpartie, le dépeuplement de nos eaux.On rencontre, chez •quelques espèces depoissons, des métamorphosesassezanaloguesà celles qui seproduisent chez quelquesReptiles et Crustacés.Le premier âge dela Lamproie se passesous forme de larveoud'AmmOCaîte : l'A m- ^ 18. - LWrgule foliacc (irè* grossi).mocœte Lamprion ouChatouille devient, à l'âge de trois ans et après diversesmodifications, la Lamproie de Planer ou petite Lamproiede rivière; l'AmmocaHe rouge devient, au m ê m eâge, la grande Lamproie de rivière; l'Ammoc;ete vulgairese transforme peut être, à son tour, en Lamproiemarine.Ce que Ton a longtemps pris peur l'Orfe ((\t/i>rOr fus) n'est autre chose que l'hln ( M : * nn'ianuln^.L'alevin de Saumon se nomme t'an\ de leck^ion


58 LA REPRODUCTION NATURELLEjusqu'à 1 âge d'un an, Smolt du deuxième au troisièmeprintemps, Grilse à trois ans et S a u m o n à la quatrièmeannée seulement, et ces dénominations distinctes sontA. Tronc tabulaire portant le t&itfe d'avant en arrière ; /}, tronc va-culaire portantle sang en sens contraire; a. bouche; b, appendice lingui forme contenu dans lepharynx ; c. ouverture située à l'extrémité de cet appendice; ?nn, canal digestiftronqué en k ; o, appendices en forme de cœurs ; d, ovaires ; ee, oviductes ;/", utérus ; //, ouverture génitale externe ; p, œufs ; l, testicule; h. son canal spiralé, v, ventouses antérieures; », disques; j, ventouses postérieur; s ; languetted'après Nordmann).


LA RKPROIHV/riuX NATURELLEjustifiées par des différences de coloration, de m œ u r set m ê m e de structure extérieure qui n'ont été étudiéesque depuis peu ; nous savons que le mâle adulte, danscette espèce, acquiert durant la saison des amours,une sorte de bec temporaire, d'où quelques ichthyologuesavaient créé l'espèce du Saumon lîécard. D ureste, ces modifications communes aux Salmonidésjettent une grande confusion, encore aujourd'hui, dansla classification et la nomenclature des genres desTruites, des Corégones et m ê m e des Ombres.Nous n'avons étudié, jusqu'ici, que la reproductionovipare, qui est la règle générale dans la classe despoissons. Quelques espèces cependant, sont ovovivipares(quelques espèces exotiques ou marines, desPercoïdes, Labroïdes, Cyprinides, Raïdes, etc.). Enfin,quelques autres également marines ou étrangères,sont vivipares (Squales, Gobicïdes, Gadidés, etc.).Quant à l'Anguille, on ignore encore son mode dereproduction ; mais il y atout lieu de la supposer ovovivipare.L'incertitude tient sans doute à ce quelle nefraye qu'à lamer.U n trait de m œ u r s intéressant pour nous, ce sontles migrations opérées par les poissons d'eau douce,migrations bien moins étendues que pour les espècesmarines, et n ayant pour but à peu près exclusif queles besoins de la reproduction, l'instinct qui portechaque espèce à venir placer ses œufs dans le milieuqui leur est le plus favorable comme température,en vue de l'éclosion, et comme alimentation pourles jeunes. On nomme A n a d r o m e s les espèces qui remontentde la mer dans les fleuves (Saumon coin-


60 LA REPRODUCTION NATURELLEmun. Saumon du Danube, Truite de mer ou argentée,Alose, Finte, Eperlan, etc.) et Caladromes, celles quiquittent les eaux douces pour aller frayer en mer(Anguille).


62 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEPoissons des lacs : Truite commune, Ombres c o m m u net chevalier, Corégone-Lavaret ;Poissons d'étangs: Carpe commune, Tanche, Brème,Loche d'étang, Anguille.Enfin on a conseillé, tenté sur un grand nombre depoints et résolu sur plusieurs, l'acclimatation et lanaturalisation de plusieurs espèces étrangères, savoir:Pour les étangs : la Carpe Carassin ;Pour les lacs ; le Saumon Salvelin, la Truite desAlpes, les Corégones Houting, Fera, Palée et Marène;Pour les cours d'eau: Le Sandre, le Silure Glanis,les Saumons du Danube, Quinnat, du Sacremento,Setayo,etc.Ces tentatives d'acclimation sont la conséquencedudépeuplement de nos eaux, mais elles n'en sont pointle remède ; toutes les espèces emportées sont plus oumoins voraces, nos cours d'eau ne peuvent pas plusles nourrir que nos espèces indigènes, et, pussent-elless'y développer, les braconniers et maraudeurs n'épargneraientpas plus les unes que les autres. Noussommes dotés par la nature d'excellentes espèces, nousn'avons qu'à les installer convenablement, à leurfournirune alimentation convenable et à les protéger.D'un côté, les progrès de la culture font diminuer,chaque année, la superficie des étangs ; de l'autre, ledéfaut presque complet de police des eaux a fait abandonnerl'exploitation rationnelle de toutes celles qui,étant ouvertes n appartiennent pas à l'État ; après u nmouvement d'enthousiasme général (1850-1866) la pis-


DISTINCTIONS F/I CLASSIPIO VTIONS 63riculture doit se borner aux eaux fermées, lacs etétangs. Dans le* cours d'eau, deux mesures fondamentalesdoivent précéder l'organisation d'une industriesérieuse; ensemencement en poissons blancs,blanchaille.blanquet,menuise1; création d'une surveillancesérieuse pour protéger les produits contre le vol.A coup sûr, il faut conserver un certain équilibreentre les espèces voraces dont la chair est plus recherchéeet les espèces victimes qui sent indispensablespour produire les premières; mais encore, fautilchercher à faire prédominer les espèces meilleuressur celles qui sont de qualités moindres. Or. au pointde vue de l'estime qu'elles obtiennent pour la consommationde l'homme on peut classer les espèces entrois catégories :lrocatégorie : Saumon, Truites commune et Saumonée,Ombres commun et chevalier, Corégones Fera etLavaret, Silure, Lotte, Lamproie ;2 e catégorie : Perche, Brochet, Carpe, Tanche, Barbeau,Goujon,Anguilles;3° catégorie : Grémille, Brème, Vandoise, Chevesne,Nase, Rosse, Rotengie, Chabot, Ablette, Yéron, etc.Les uns comme les autres, les mangeurs comme lesmangés, peuvent et doivent être multipliés artificiellementet dans une proportion rigoureusement parallèle.Déposer des alevins de Saumons, de Truites, deCorégones dans des eaux dégarnies de blanchaille,1•Ou appelle ainsi les pelits poissons peu comestibles pour l'hommemais excellents pour la nourriture des poissons ichlhyoph;u:es à l'alimentationdesquels ils doivent pourvoir (Vandoise, Rosse, Hotengle,Bouvière, Nase, Ablettes, Néron, etc. ele).


Qi LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEc'est semer du froment dans un sol dénué d'engrais ;multiplier de bonnes espèces clans des eaux non surveillées,c'est planter des abricotiers et des pêchersdans un jardin ouvert à tous.Les procédés de la pisciculture artificielle sont deplusieurs ordres et tendent tantôt à seconder, tantôt àremplacer la nature:L'établissement de Frai/ères artificielles a pour but desolliciter la ponte des poissons dans les conditions quipeuvent lui être le plus favorables ;L a fécondation et l'incubation artificielles, d'obtenirune ponte plus fructueuse, des croisements ou deshybridations, des alevins en un mot, destinés à l'ensemencementdes eaux ;L a domestication et la stabulation du poisson en lieuxclos, d'obtenir une viande plus abondante, plus précoceou de meilleure qualité ; etc.Nous passerons brièvement en revue ces divers points.S, 2. — FRAYÈRES ARTIFICIELLESLes Cyprins, et, avec eux le Brochet et la Perche,pondent leurs œufs en chapelets sur les herbes aquatiquesou herbiers, sur les rives herbues ou sablonneusesen pente douce, de telle façon que le courantles roule ou les fasse flotter et les lave ; les Salmonespondent leurs œufs libres, indépendants, dans les eauxvives et fraîches, sur les fonds de sable ou de cailloux,près des sources. C'est en plaine, dans le cours moyendes rivières et ruisseaux, qu'il faut chercher les


FRAYKRKSARTÎKÏC1KLLKSfrayères des Cyprins: c'est dans leur cours supérieur,au pied des montagnes ou des collines, qu'il faut cherchercelles des Salmones. Rien n'est plus facile que dese procurer, sur les frayères naturelles, des reufs dela première catégorie, presque toujours fécondés aumoment où on les rencontre ; c'est ce que font, chaque,année, les Chinois d'abord, les riverains du lac Paladru— Caisse-lrnyi.' ai tiUcii'lU*.Cai~, .hu.s Unjello M.nt ^.,MVS 4-plantes aqualiqu- Armant lïam-ivol'.tprc- CcM


G6 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLE(curage, faucardage,etc.)ont ils, dans beaucoup de cas,fait disparaître les frayères naturelles des Cyprins.On peut venir en aide à la nature par les moyenssuivants :1° Pour les espèces qui pondent, sur les rives, leursœufs agglutinés, (Carpe, Tanche) on établit des rivesartificielles à l'exposition du Midi ou au moins de l'Est,c'est à dire que, sur divers points, on abat les rives enun talus à pente douce que l'on gazonne ; ou bien on yFIG. 21. — Frayère artificielle en place.installe des tables en bois dur que l'on fixe temporairementà l'aide de piquets et de cordages et dont onrecouvre la surface avec des plaques de gazon (fig. 20et 21. Si le courant est un peu rapide, on protège lafrayère, en amont, par un clayonnage (fig. 22). Lesfemelles viennent pondre sur ces berges artificielles,où il est aisé de recueillir les œufs, si on le désire ;2° Pour les poissons à œ u f s agglutinés qui frayent,non sur les rives, mais au large, sur les touffes de


68 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEplantes aquatiques (Brème, Perche, Gardon, Ide, Loched'étang, etc), on peut installer, soit verticalement, soithorizontalement, des claies-frayères formées d'uncadreen bois aux traverses duquel on entrelace des rameauxou brindilles de genévrier, de saule, de bruyère, debouleau, de petits paquets formés de tiges de jonc oude roseau, etc. Suivant l'intensité du courant, on disposeles clayonnàges, parallèlement, obliquement outransversalement au cours de l'eau ; on les amarre surle fond au moyen d'une corde tenant une grosse pierreet sur les rives d'amont par deux cordes et des piquetssi on les place horizontalement, par des pieux verticauxet des amarres en amont si on les place verticalement.En tous cas, les claies doivent être mises à l'eaudeux mois au moins avant la fraye, pour que les poissonsse familiarisent avec ces engins et aussi pour queles bois et les feuilles perdent leur tannin. M . Millet aencore imaginé des cages-frayères à double fond dontle supérieur consiste en un châssis de barreaux à clairevoiesur lequel la femelle, en se frottant, expulse sesœufs qui tombent sur la fine toile métallique galvaniséeformant le fond inférieur; le mâle vient y féconder lesœufs par le m ê m e procédé1;3° Pour les espèces qui frayent au fond, sur le sable,le gravier ou les cailloux (Barbeau, Nase, Loche, Lotte,Chevesne, etc.), on abat les rives en pente douce et l'ony dépose du sable, du gravier ou des cailloux, -jusqu'à1M. Coste avait constaté que durant l'incubation sur des treillismétalliques, il se produisait des phénomènes électro-chimiques quituaient l'embryon. M. Carbonnier a, paraît-il, trouvé le moyen, pardes procédés spéciaux de fabrication, de neutraliser ces phénomènes.


V Pi À Y K n ES A R Tï PIC lï K Lh K < f>02 mètres au moins, du bord ; o'e>t là que viendrontenrorefrayer le Lavaret et. l'Ombre;î° Pour ceux qui frayent sur -a Me, gravier et cnilloux,mais au milieu du courant, comme les Salnmnidesen général, l'apport de ces matériaux doit êtrefait dans le lit de l'eau, surune largeur et une longueurconvenables. Pour le Brochet, il faut des herbesplantéesdans la vase :.V Pour la Loche franche, on creuse, au milieu d'unruisseau d'eau vive à fond de cailloux, une fosse de2 , n ,.>0 de long sur l m ,i.)' de largeur et autant de profondeur;on garnit latéralement cette fosse à 0 m ,20 desbords de claies ou de planches percées de trous, quiforment une caisse sans fond. Dans le vide qui setrouve entre* les bords de la fosse et les parois de lacaisse, on tasse du fumier de mouton dans lequel il sedéveloppera une grande quantité de nourriture vivantequi engraisse la Loche et la porte à se multiplier(Gauckler).Ces différentes frayères peuvent être installées dansun bras, une anse ou une dérivation du cours d'eau,en les échelonnant de deux en deux kilomètres, depréférence aux abords dos maisons de gardes ou d'éclusiers.En un mot, on s'attache en tout et partout à suppléerou à seconder la nature en l'imitant le mieuxpossible, là oii l'homme a rendu ses précautions impuissantesou plus souvent encore, les a contrariées.Mais, encore une fois, ces frayères artificielles favorisent,tout comme les frayères naturelles, la multiplicationdes mauvaises comme des bonnes espèces, de


70 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEcelles que l'on veut multiplier comme de celles que Tonveut détruire, delà Carpe et du Brochet, de la Tancheet de la Perche, de la B r è m e et de F Ablette, etc.§ 3. — FÉCONDATION ARTIFICIELLEAussi, préfère-t-on généralement recourir à la fécondationartificielle, découverte en France, auxiv° siècle, par dom Pinchon, moine de l'abbaye deR é a u m e (aujourd'hui Moutier-Saint-Jean-Côte-d'Or) ;pratiquée de 1750 à 1760 par le comte de Goldstein, àHanovre; réinventée en 1757 par G.-L. Jacobi, unAllemandau service de la Prusse; appliquée industriellementen Allemagne depuis lors, en Angleterre, depuis1833, par John Schaw, lord Grey, Boccius, etc. ; enfininventée encore une fois de toutes pièces, en France,en 1842, par Joseph Remy, pêcheur à Saint-Amarin(Vosges).La pratique de la fécondation artificielle peut sedécomposer en cinq temps: le choix et la préparationdes producteurs ; \&ponte et la fécondation ; Yincubation;Yêclosion ; Y élevage et la dissémination.Le problème consiste à se procurer des mâles et d e /femelles adultes, en bonne santé, bien développés, enétat de chair, mais sans embonpoint. On captureradonc les sujets dont on a besoin, quelque temps avantla saison de la fraye, et on les déposera dans desviviers fermés, où on leur procurera l'eau, à la températureet en quantité voulue par chaque espèçe.Pour les Truites, il faut observer que le fond de


F K FONDATION ARTII ÎCtKLLF! 71ces viviers ne doit pas contenir de graviers et que lesparois doivent être lisses, sans quoi il serait difficiled'empêcher la ponte. Pour les Cyprins, il ne doit pointse rencontrer d'herbes dans le réservoir et les paroisen seront verticales. Enfin, il ne faut pas mélanger lessexes dans les viviers, ni y placer un trop grandnombre d'individus par rapport à leur superficie et àleur cube d'eau. Les Truites mâles et femelles nedoivent pas dépasser I kil. en poids, la Carpe. 1 kil. 500,le Saumon,5 à 6 kil., etc.On visite souvent le vivier-réservoir, afin d'examinerl'état des poissons et l'on suit attentivement lesprogrèsde leur maturité. Celle-ci se reconnaît aux indices suivants: Le ventre est mou, le pourtour du pore génitalest gonflé et présente un bourrelet rouge ; les œufscommencent à sortir dès que Ton place le poissondans uneposition oblique et surtout verticale; on sentles œufs se déplacer sous la pression du doigt. Tantque les œufs ne sortent pas aisément ; que Ton peut,par transparence, les apercevoir rangés en lignes;tant que le ventre reste ferme et résistant, le frai n'estpas mûr. Les s y m p t ô m e s sont en tout semblables chezle mâle: le pore génital est rouge et tuméfié, le ventremou, la liqueur s'échappe sous la plus faible pression.Le moment venu, on choisit dans le vivier un certainnombre de femelles et on les dépose dans unbaquet large et bas, rempli d'eau à la températurevoulue; on prend en m ê m e temp un nombre correspondantde mâles que l'on dépose dans un secondbaquet.Pour procéder à la fécondation des œufs libres, on


72 PISCICULTURE ARTIFICIELLEprépare des assiettes creuses en faïence, en porcelaineou en verre, des plats, des cuvettes plates, etc, remplisde O m ,Oo à 0 r a ,06 de hauteur d'eau à la température de+ 4 à -f- 7°c pour la Truite et le Saumon ; puis onsaisit1une femelle, derrière les ouïes, avec le pouceet l'index de la main gauche, tandis que la main droitemaintient la queue (fig. 23). Faisant sortir prestementFIG. 23. — Opération de la ponte artificielle.le poisson de l'eau, on le place au dessus du récipientet on le couche à moitié sur le flanc, l'anus touchantla surface de l'eau avec laquelle la partie antérieuredeson corps forme un angle d'environ 45°, par suite dela courbure en S qu'on lui imprime successivement.1Dans toutes ces manipulations, les mains doiven'. toujours êtremouillées, aûn de ne point enlever les raucosilés qui revêlent la peaude tous !es poissons et qui, mêlées à Peau, nuiraient à la fécondation.


FK('.oM)ATIoNÀftTlKICttiLU?En Angleterre, on agit plus logiquement en opérantsous l'eau. Les œufs, s'ils sont m û r s s'écoulent ainsid ' e u x - m ê m e s d'abord, puis à la fois sous la pressionlégère des lianes, entre le pouce et les autres doigtsde la main droite que l'on p r o m è n e des ouïes à l'anus.Parfois, les femelles tombent alors dans un état de contractionsspasmodiques qui retient les œufs; un changementde position,une immersion complèteqtquelqueslégères frictions opérées sous l'eau ne tardent pas àamener l'expulsion complète des œufs. (Gauckler.)Les œ u f s sains et m û r s sont transparents, sanstaches, et ne blanchissent pas l'eau qui les reçoit; lesœufs altérés ont des teintes louches et sont parfoisaffectés d'opacité; leur transparence n'est jamais parfaiteet ils troublent l'eau dans laquelle ils tombent;ces œufs doivent être rejetés. Parmi ceux qui ontbonne apparence, tous ne sontpas toujours fécondables.Pendant environ vingt jours, ces œufs stériles restentclairs et ne peuvent se distinguer des autres que parleur poids qui n'a pas a u g m e n t é ; après ce temps, ilsdeviennent opaques et se gâtent. (Coste, Gauckler.)Lorsqu'il s'agit de poissons délicats et à écailles facilementcaduques, ou de pièces d'assez fort poids etdouées d'une certaine puissance musculaire, il estprudent, afin d'éviter de les blesser et d'être plus sûrde les maintenir, de les saisir par l'intermédiaire d'unlinge de fine toile mouillée.Dans chaque vase, on ne dépose que la quantitéd'oeufs nécessaire pour en recouvrir le fond; on nedoit, dans aucun cas, les y accumuler en couches.Plus lourds que l'eau, ils tombent immédiatement au


74 LA PISCICtÎLTURK ARTIFICIELLEfond ; si l'eau a été souillée par les mucosités ou lesdéjections, on la remplace i m m é d i a t e m e n t par d'autrepluspure.On saisit alors un mâle, de la m ê m e façon que l'ona fait pour la femelle, et on fait jaillir quelquesgouttesde laitance dans le vase dont on agite doucement lecontenu avec la main, une barbe de plume ou mieuxencore avec la queue m ê m e du poisson. Cette eauprend alors une teinte opaline.U n seul mâle suffit pour féconder les œufs de 4,à 6femelles Salmonidés. Ces œufs restent fécondablespendant une heure environ après la çonte ; mais ilest bon de savoir que la vitalité des spermalides, surtoutlorsque la laitance est diluée dans l'eau, est trèscourte. L a température la plus favorable à leur longévitéest celle de 4 à 7° c. pour la Truite et le Saumon,et ils n'y persistent que pendant 8 à 10 minutes.Pourtant, les animalcules restent vivants pendant unou deux jours, si l'on conserve la laitance pure dansun flacon bien bouché et maintenu à la t e m p é r a t u r eindiquéeci-dessus.On laisse les œufs dans l'eau qui a reçu la laitance,en repos, pendant 8 à 10 minutes; après ce temps, onimprime au vase une seule secousse un peu forte, puison changer eau et on place les œufs dans un appareil àincubation.De l'observation plusieurs fois répétée que leschances de fécondation sont en raison inverse de lahauteur d'eau qui baigne les œufs, est découlée, sansdoute, la pratique de la Fécondation Russe ou fécondationsèche, imaginée en 1875, par Wrassky. pisci-


FECONDATION ARTIFICIELLE 75culteur à Nîkolsk. Il consiste à pratiquer la ponte artificielleà soc, c'est-à-dire dans un vase non remplid'eau, puis à verser de la laitance obtenue par le m ê m emoyen, sur la couche des œufs que l'on remue ensuitelégèrement et avec précautions, afin que tous en soientimprégnés. Après 15 à 45 minutes de ce contact, onajoute de l'eau, peu à peu, afin de laver les œufs quel'on place i m m é d i a t e m e n t dans les appareils à incubation.Lorsqu'on n'a que très peu de laitance, on larecueille dans un flacon, on y ajoute rapidement unpeu d'eau, on agite légèrement le tout pendant quelquessecondes, puis on arrose de ce liquide les œufspondus à sec; on remue et on lave enfin, ainsi quenous l'avons indiqué plus haut.L a fécondation dans l'eau exige une moins grandequantité de laitance ; elle donne, en moyenne, 80 à 85pour 100 d'œufs fécondés, mais produit une si forteproportion de mâles qu'il en peut résulter le dépeuplementdes rivières artificiellement empoissonnées(Beaumont, Fric, Gauckler). La fécondation à secexigeun plus grand nombre de mâles, donne, en moyenne,90 pour 100 d'œufs fécondés, mais produit surtoutdes femelles (16 mâles pour 100 femelles). (Gauckler).Qu'il s'agisse de fécondation sèche ou humide,on considère comme indispensable, lorsqu'il s'agitd'œufs de Salmonidés surtout, d'opérer une ou deuxheures avant ou après le coucher du soleil. (Chabot-Karlen).L a Fécondation des œufs adhérents s'opère exclusivementdans l'eau à la température de 18 à 20°Cpour les Carpes, 16 à 18° pour les Tanches, 14


76 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEà 16° pour la Perche, 12 à 14° pour le Chevesiie,ta Brème, le Barbeau, le Nase, etc. Cette questionde température a plus d'importance encore que lorsqu'onopère sur des œ u f s libres de Salmones. Ondispose d'abord, dans le récipient, des fragmentsde plantes aquatiques, des tiges de bruyères oude joncs, du chevelu de racines d'arbres débarrasséesde leur terre, etc., de façon à le remplir aux deux tiers ;on y verse l'eau de telle sorte que les brindilles ensoient recouvertes ; on fait couler un peu de laitancedans cette eau que l'on remue vivement ; on pratiquela ponte artificielle sur la femelle, en ayant soin dedisséminer les œufs régulièrement sur les branchages,nouvelle effusion de laitance ; nouvelle et légère agitationde l'eau, puis, repos pendant une à deux m i ­nutes ; après quoi on enlève les brindilles et les œufsqui y sont collés, pour les placer dans les bassins àéclosion.M . Rudolf Hessel, pisciculteur distingué d'Offenbourg,emploie pour la fécondation artificielle des œufsadhérents et en m ê m e temps pour l'incubation qui luisuccède, un appareil composé de cadres en boisblanc sur lesquels on tend une toile ou une mousselinequi reçoit les œufs ; ces cadres sont, au nombre detrois, placés dans une boîte flottante dont les côtéssont fermés de toile. Chaque cadre ( lmX O m ,30) peutrecevoir 20,000 œufs et chaque boîte c o n s é q u e m m e n t60,000.i Raverel-Waltel, Rapp, sur la sil. de la Piscic. à Vètrang. tp. 241-244.


FECONDATION ARTIFICIELLE 77La fécondation doit se pratiquer rapidement, car,les Spermatides de la Carpe ne vivent que 3 minutes,ceux de la Perche 1 minutes 40 secondes ; du Barbeau2 minutes 10 secondes; du Gardon 3 minutes 10 secondes;du Brochet 8 minutes 10 secondes, etc.La fécondation artificielle permet d'opérer des croisements(mélancre de variétés dans la m ê m e espèce)et des Hybridations (mélange d'espèces différentes^.Les croisements s'opèrent, sans doute, dans l'état denature, mais les variétés sont rares parmi les poissons.On croit que quelques hybridations s'opèrentaussi en liberté, entre individus d'espèces voisines, etTon a cru longtemps que la Truite saumonée était unhybride de la Truite commune et du Saumon ; onsait maintenant que ces deux espèces frayent à desépoques différentes. Mais la fécondation artificielle apermis d'opérer des hybridations assez nombreuses et,pour la plupart bien constatées, aussi intéressantes aupoint de vue pratique qu'au point de vue scientifique.Nous citerons entre autres l'hybridation de la Carpecommune 1 avec les Carpes Carassin et Gibèle et avecle Cyprin doré de la Chine ; de l'Ablette avec le Rotengle(Cuvier) ; du Saumon Ileusch avec plusieursautres Salmones (Koltz) ; du Saumoneau avec lesTruites et les Ombres (Gauckler); de la Truite communeavec la Truite saumonée et avec la Lotte (D rFraas) ; de l'Ombre Chevalier avec le Corégone Lavaret ;de la Carpe commune avec la Tanche (D r Nicklas) ;M . Chabot-Karlen ne considère pas comme impossible1De Ouatrefages, Académie des Sciences, mai 1853.


78 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEque cette dernière hybridation soit l'origine de laCarpe cuir ou Carpe miroir ; etc., etc. On ignore encoresi la plupart de ces hybrides sont féconds et surtoutsi leur fécondité est continue. D'après les expériencesdu D r JuliusKnoch (de Saint-Pétersbourg) danstout croisement (hybridation) entre deux espèces, lemâle doit être pris dans l'espèce la plus petite de taille :ainsi par exemple, Sterlet mâle et Esturgeon femelle,Truite mâle et Saumon femelle, etc.§ 4. — INCUBATION ARTIFICIELLELe troisième temps de la reproduction artificielleconsiste dans l'incubation. Les œ u f s fécondés, qu'ilssoient libres ou adhérents, doivent être, aussitôtaprès la fécondation terminée, déposés dans les appareilsd'incubation.Pour l'incubation des œufs de Salmonidés, on choisitun eau dont la température ne varie que dans les l i ­mites d e - f - 2 à + 7° C, non exposée à se congeler,mais ne dépassant pas ce m a x i m u m pendant la périodede l'incubation, animée d'un courant assez vif, à fondde gravier, limpide et non sédimenteuse ni limoneuse.C'est tantôt le lit d'un ruisseau, tantôt une rigole dedérivation que l'on embranche sur son cours.Les appareils consistent en caisses de Jacobi amélioréespar Coste, en boîtes flottantes, en auges de1Raveret-Wattel, Rapp. sur la situai, de la Piscic. à Vêlrang,,1884, p. 45,


IN < : r M A TI o N ARTIFICIELLEterre cuite vernissée, en corbeilles de toile métalliquegalvanisée,etc.Jacobi est l'inventeur de caisses à claire-voix, rectangulaires,de 2 à 3 mètres de long sur 0 m ,45 àO m ,60 de large et 0 r a ,35 à O"\40 de haut ; le fond supporteune couche de gravier pris en carrière ou passéau feu, s'il provient d'une rivière. Les deux petitesextrémités répondant à l'amont et à l'aval sont ferméesde toiles métalliques assez serrées pour interdireFia. 24. — Auge el claie de l'appareil de Coste.le passage aux insectes ; le couvercle, formé de deuxparties transversales et articulé à charnières, porteégalement une toile métallique. Cette caisse est imme r g é e dans une eau suffisamment vive, après quel'on a déposé les œufs sur son fond de gravier. Coste aamélioré cet instrument en y installant des traversesqui portent des claies chargées de baguettes de verre ;de telle sorte que la caisse peut abriter quatre foisplus d'œufs dans d^aussi bonnes conditions (fig. 2i).


80 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLE.1Pour faire éclore les jeunes Saumons, on se sert,en Hollande, d'appareils flottants. Les deux côtésopposés au courant sont garnis d'un treillis en cuivrerouge à neuf mailles par centimètre carré, on fixe lacaisse à des flotteurs et on crée des abris au moyen decloisons transversales en planches percées de trous deFIG. 25. — Caisse à incubation simple deCoste.0, m 0I de diamètre, pour rompre le courant en amont,on couvre ce réservoir d'un filet à mailles serrées,pour empêcher le poisson de sauter dehors. Au-dessusde l'appareil, on établit un plancher porté par unéchafaudage qui permet de soulever la caisse, del'examiner et de la nettoyer au besoin. Les jeunes


INf.rBATÏON ARTIFICIELLE SISaumons ne sont mis en liberté qu'au commencementde l'hiver. (Gauckler.)Joseph R é m y employait des auges circulaires en feré t a m é percées de trous. M . Rueff, dïlohenheim, lesfaisait confectionner en zinc et les munissait de flotteurs;M . Koltz les préférait en terre cuite vernie etles plaçait dans une caisse spéciale, afin de leur donnerplus de fixité. En quelque matière quelles soient,ces auges doivent être munies d'un double fond àclaire-voie ou à moitié remplies de gravier. Onreproche aux toiles métalliques de s'incruster facilementet de provoquer dès lors, l'apparition de confervesparasites ; aux boîtes métalliques ou en poterie,de 1 voir leurs trous rapidement obstrués, dans les eauxqui ne sont pas parfaitement limpides.Les paniers en osier à claire-voie sont peu coûteuxet excellents pour l'incubation, mais ils résistent malaux ravages* des rats d'eau et laissent pénétrer lesinsectes. Beaucoup de pisciculteurs préfèrent les corbeillesen toile métallique galvanisée à fond plat, quel'on place dans une rigole ou dans un ruisseau.Pour le cas où l'on voudrait faire incuber naturellementles œufs libres dans le cours d'eau à repeupler,Coste avait imaginé son incubateur simple (fig. 25), quel'on dispose parallèlement au courant et dans lequell'eau pénètre et s'écoule par des échancrures ménagéesdans les petits côtés.M . Coste avait employé dans ses études au Collègede France un appareil incubateur dit à courant conti n u é e son invention (fig. 2(1). Il se compose d'augesou de rigoles factices en poterie émaillée et disposées


82 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEen échelons sous un robinet qui livre à l'augette supérieurel'eau qui les parcourera toutes en cascadantdeTune à l'autre. « Ces augettes, dit M . Coste >>, ont( K 5 0 de long sur O M S de large et 0 r a ,10 de profondeur.Elles portent sur le côté à 0 m ,06 ou 0 r a ,07 d'unede leurs extrémités, une gouttière de décharge sur laface de l'extrémité opposée et au niveau du fond, untrou qui permet de les vider entièrement, et à l'intérieurà peu près vers le milieu de leur profondeur etde chaque côté deux petits supports saillants. Chaqueauge est garnie d'une claie, sur laquelle on étale lesœufs fécondés, que Ton veut faire éclore. Les barreauxde cette claie, formés par des baguettes deverre placées parallèlement, soit en long, soit enlarge, et écartées les unes des autres de 0 m ,002 à0 m ,003, sont maintenues à l'aide d'une très mincelame de plomb dans les entailles pratiquées sur lebord inférieur des pièces qui forment les extrémitésd'un encadrement en bois. » Les œufs de SaumonsTruites ou autres Salmonidés, au nombre de 1,000 à1,500 sont ainsi placés sous 0 m ,02, à 0 m ,03 d'épaisseurd'une eau qui se renouvelle constamment parla surface et dans le sens de la longueur des auges.M . Leroy, qui avait entrepris le repeuplement de labasse Loire et du lac de Grandlieu, avait perfectionnél'appareil de Coste en faisant tomber l'eau du robinetdans la première auge et de celle-ci dans toutes lesautres, d'une hauteur suffisante pour y établir un coupantplongeant capable de renouveler l'eau du fond et3'entraîner soit les corps et auges, soit les v é g é t a u xparasites, tout en lavant constamment les œufs.


84 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEA l'étranger on a presque partout remplacé cetappareil par ceux qui sont connus sous le nom deboîtes californiennes. Dans les boîtes californiennes,l'eau, au lieu d'arriver de haut en bas sur les œufs, yparvient de bas en haut.Le plus simple de ces appareils est le suivant : onprend un bocal de verre portant deux tubulures, l'uneen haut et l'autre en bas. L'eau arrive par la tubulureinférieure et ressort par celle du haut. A l'intérieurFIG. 27. —Appareil Von'd cm Borne (auge californienne perfectionnée).du vase on dispose des petits plateaux en fer galvanisé,sur lesquels sont placés les œufs.Les appareils basés sur ce principe sont très nombreux,très variés de forme 1 Je décrirai u n des plus* On trouvera la description d'un grand nombre d'appareils piscicolesdans un travail de M. Haveret-Wattel intitulé Rapport sur lasituation de la Pisciculture à l'étranger (extrait du Bulletin de laSoc. d'acclimatation, 1 $83-1884).


INCIIUTIONARTIFICIELLEsouvent employés, et qui a été imaginé par M . vondem Borne (fig. 27).Cet appareil se compose d'une caisse extérieure b enzinc, ayant ordinairement 0 r a ,40 de longueur, 0 m ,25 delargeur et 0 m ,25 de profondeur. Dans cette caisse peutse placer un second récipient c, ayant 0 m ,30 de longueur,0 m ,2:i de largeur et Q*,15 de profondeur.Le fond de ce deuxième compartiment est forméd'un treillage en fil de fer, assez serré (six fils parcentimètre). Les œufs fécondés sont placés sur ce treillage.L'eau qui alimente le premier compartiment pénètredans la deuxième caisse parle fond, et s'échappepar une ouverture latérale que présente la petite caisse.On place dans le deuxième compartiment, une troisièmepetite caisse à fond treillagé d ayant seulement0 m ,i0 de longueur, 0 m ,20 de largeur et 0 m ,10 de hauteur.Ce dernier compartiment ferme la caisse en dessuset e m p ê c h e les œufs et les alevins de s'échapper.Parfois on supprime cette dernière caisse, et on laremplace par un second appareil B, dont la dispositiongénérale est la m ê m e que celle de l'appareil A.Ces appareils présentent quelques avantagessérieux.Ainsi l'eau, en s'élevant, entraîne les poussières, netfoie1 pour ainsi dire automatiquement les œufs. Eneffet, dans les engins ordinaires, il fautconstammentsoigner, nettoyer les œufs en incubation.Nous citerons encore l'appareil appelé hicubateurdu Canada, dans lequel le renouvellement d'eau se faitaussi par le fond.Enfin M M . Fred. Mather et Ch. Bell ont inventéun appareil appelé Self-Picker yen forme d'entonnoir


86 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEdans lequel leau arrive par le fond et déverse par lesommet, en imprimant un mouvement constant auxœufs, qui ne peuvent cependant en sortir.FIG. 28.—Appareil à incubation avec renouvellement d'eau par le fond.Ces systèmes (fig. 28,29,30,31 et 32) paraissent trèsrationnels et très efficaces, mais ils dépensent quatreou cinq fois plus d'eau que l'appareil Coste.FIG.29.—Appareil à incubation avec renouvellement d'eau par le fond.L'incubation des œufs adhérents est beaucoup plus


INCUBATION ARTIFICIELLE HTsimple. Pour la Perche, le Barbeau, le Brochet, etc.on opère en eau courante, au moyen de paniers d'o-FJG.30.— Appareil à incubation avec renouvellement d'eau par le fond.sier de 0 m ,30 de longueur, 0 m ,10 de largeur et 0 m ,08 dehauteur; les paniers sont lestés et en m ê m e temps mu-FIG.31.— Appareil à incubation avec renouvellement d'eau par le fond.nis de flotteurs, afin qu'ils soient constamment maintenusà 0 m ,15 ou 0 m ,20 au-dessous de la surface; l in


88 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEcubatioii est assez courte pour qu'on n'ait guère àredouter les dégâts des rats et des insectes.Pour la Carpe et la Tanche, on opère en eau dormante.Des baquets ou des tonneaux sciés en deuxreçoivent les fascines sur lesquelles sont déposés lesœufs-et sont remplis d'eau que l'on ne renouvelleFIG.32.— Appareil à incubation avec renouvellement d'eau par le fond.point, mais dont on maintient le niveau en comblantla baisse produite par la vaporisation ; dans les tonneaux,on place quelques tiges ou branches fraîchesde plantes aquatiques. L'eau, au moment de la miseen train, doit déjà présenter la température de-}- 18 à


INCI TATION ARTIFICIELLE 80+ 22 n centigrades; les appareils sont exposés enplein soleil. L'éclosion est si rapide que l'eau n'a pointle temps de se corrompre, si on l a choisie suffisammentpure.L'incubation se termine par l'éclosion. Elle se produitplus ou moins régulièrement, mais dans unespace de temps qui ne varie guère que de 1 à 4 jourspour les œufs de la m ê m e espèce placés dans lesm ê m e s conditions. Lorsque l'incubation s'est faitedans des paniers en osier ou en toile métallique kclaire-voie, les alevins s'en échappent naturellementet spontanément dans les eaux qu'ils étaient destinésà peupler. Ceux qui ont été incubés en boîtes ferméespeuvent dès lors être mis en liberté dans le coursd'eau, ou mieux placés dans des bassins ou viviersoù on les retiendra plus ou moins longtemps.M.Gauckler, ancien Directeur d'IIuningue, avaitimaginé de réunir les deux installations d'incubationet d'élevage et créé les fossés d'élevage ou Fossésviviers.Une dérivation alimentée par un cours d'eauà travers un filtre de sable, de gravier et de cailloux,coule entre les rives à talus doux etengazonnés ; le fonden est garni de sable et de gravier et comporte desondulations transversales; de distance en distance,des ponts pleins, appuyés sur les deux berges, offrentà l'alevin des refuges contre la lumière, la chaleur etle froid. M . de la Blanchère a perfectionné encorece système : il donne au fossé une largeur de 3 mètres,une profondeur variant de 0°\50 à i mètre, et abat lesberges à 30° de pente ; le fond, les berges et les bords,sur une largeur de 2 mètres de chaque côté, sont


90 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLErecouverts d'une couche de gros sable et de caillouxroulés de la rivière voisine, sur 0 m ,*20 d'épaisseur.Dans le fossé, sur les talus, on n'empêche aucune végétationde se développer ; des ponts-abris en voletsmobiles sont, de distance en distance disposés sur cefossé, à 0 m ,20 de la surface de l'eau; enfin, le fosséest recouvert d'un réseau de fil de fer ou de cordesgoudronnées, afin de se préserver des déprédationsdes oiseaux aquatiques. Les appareils d'incubationsont placés en amont; les alevins éclos sont mis enliberté dans le fossé qui se trouve fermé en aval parun filtre semblable à celui placé en tête.Si l'on mettait en liberté immédiate les alevins nésd'incubation artificielle, il faudrait s'attendre à unemortalité considérable; si l'on préfère les élever encaptivité, il faut leur fournir la plus grande partie dela nourriture que réclame leurdéveloppement.Pour les Cyprins, les bassins d'alevinage sont desmares, de petits étangs à fond plat, que l'on surveillepour y détruire leurs ennemis ou les éloigner, maisqui n'exigent guère de dispositions spéciales.§ 5. — ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLEL'élevage constitue le quatrième temps de la piscicultureartificielle. Ce n'est qu'après résorption de lavésicule ombilicale que l'alevin commence à prendrede la nourriture et dès lors, il faut s'attacher â procurerà chaque espèce ses aliments préférés.Or, ces aliments sont de diverses natures; orga-


ÉLEVÀOK ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 01niques (végétaux ou animaux) et m i n é r a u x(carbonate.phosphate de chaux, etc.). Les uns sont vivants, lesautres sont morts et à l'état de débris; ceux-ri se reproduisenten liberté, ceux-là sont multipliés industriellement.Il y en a dont on ignore la nature, que Ton ne saitoù classer, végétaux ou animaux, parce qu'ils sont microscopiques; on les a baptisés des noms de germes,demicrobes, etc. Presque invisibles dans l'eau, ils s'ytrouvent presque toujours en telle quantité que l'onpeut voir de petits poissons vivre pendant des annéesdans un bocal dont on renouvelle l'eau limpide tousles trois ou quatre jours, et sans recevoir aucuneautre nourriture. Nombre de personnes en sont arrivéesà se figurer que les petits Cyprins pouvaient vivrepresque indéfiniment sans manger.C'est que l'apparence est trompeuse: on sait d'uncôté, que les poissons déglutissent l'eau et l'expulsentà travers l'espèce de filtre fourni par les rayons branchiaux;de m ê m e qu'elle est, chez les Palmipèdes,filtrée, à sa sortie, par les appendices lamellés qui garnissentlatéralementles mandibules. Ainsi se trouventarrêtés tous les animalcules, tous les corpuscules organiques(spores de cryptogames, filaments mycéliens,algues, bactéries, bacilles, vibrions, etc., que l'eautient en suspension: et, Dieu sait si les uns et lesautres sont nombreux quoique invisibles. Jugez-enpar les chiffres suivants qui indiquent le nombre desgermes vivants contenus dans un décimètre cube d'eau,chiffres qui paraissent aller croissant à mesure que.avec le temps, on perfectionne davantage les moyens


92 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEet les méthodes d'investigation, et ne laissent pas quede donner à réfléchir :Désignation de l'origine des eaux£ Ë B OS tS*=


ELEVAOK ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 0,1enfin) dans 1 étiologie moderne des maladies contagieuseset, d'après le D r Kock, dans leur transmissionparl'eau.Les Algues, végétaux cryptogames, cellulaires, d'organisationtrès simple et comme primitive,comprennen tun grand nombre d'espèces microscopiques, d'habitataquatique, et que l'on hésite çncore aujourd'hui, à séparerdes animaux infusoire- et à ranger dans le règnevégétal, et cela, à cause des mouvements propres dontsont animés les uns comme les autres. Telle l'Algue,dit Volvox, sorte de conlerveglobuleuse, qui donnerait,suivant quelques naturalistes, naissance à des infusoiresressemblant notablement aux Monades; plante inerte,elle produit des animalcules doués de mouvement d'oscillationou de reptation. C'est surtout dans la classedes Diatomacées, que ces exemples de mobilité nonéquivoque se présentent nombreux.Ces plantes habitent les eaux douces (fossés, ruisseaux,rivières, étangs), saumàtres ou salées; elles segroupent autour des pierres et des végétaux submergés,et les recouvrent, ainsi que la vase du fond, d'unecouche d'un brun roux plus ou moins foncé, Voici lesprincipaux genres des habitats qui nous intéressent:En eau douce : S


I l LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEdion (circulare); Coconeis (scutellum) ; Tabellaria (fenestrala); Pleurosigma (ballicum, angulatum, quadratu?n); A m p h o r a (venir icosa) ; Biddulphia (Balidjk) ;Odonilum (Harrissonii) ; Fragillaria (virescens); Epithemi a (turgida); Diatoma (grande) ; H u m a n t i d i u m (majus),etc.En eau salée : M i c r o m e g a (6) ; Schizoneura (15) ;H o m œ o c l a d i a (2) ; Berkeley a (1) ; Fragillaria (3) ; Diatoma(5) Biddulphia (4) ; Achnantes (4) ; Gomphonema(12) Exilaria (2) ; Sigmatella (1) ; Surirella (1) ; F r m -tulia ou Navicula (3), etc.Les Desmodiés représentent des corpuscules composésde deux moitiés, accolées l'une à l'autre et deformes très variées ; ces corpuscules sont isolés ouréunis en séries et formant des chapelets pourvusd'une enveloppe membraneuse remplie par un endochromevert. Elles n'ont point, comme les Diatomées,de mouvements propres, mais elles sont, comme elles,entourées d'une couche muqueuse. Elles se développenten grand nombre sur les objets s u b m e r g é s etparticulièrement sur ceux de leurs points les plusexposés à la lumière. Certaines espèces vivent engroupes agglomérés par le mucilage qui les recouvre ;elles sont toujours de couleur verte. M . de Brébissonles regardait comme presque exclusives aux eauxdouces;. M . Germain de Saint-Pierre en a observépourtant quelques espèces dans les lagunes s a u m â t r e sde laMéditerranée.Les confervacées sont des v é g é t a u x vésiculaires,filamenteux ou membraneux, de couleur olive, rougeou violette ; elles se reproduisent par spores et, quel-


ÈLEVACK ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 05quefois par une sorte de copulation d'individus distincts.Quelques-unes habitent les eaux douces, saumàtresou salées, d'autres vivent sur ou dans laneige,le plus grand nombre à la surface du sol ou sur lescorps solides, ('e sont le Protococcus xalinus et Y H œ -matococ< ns saiinus qui colorent en rouge ou en violetpendant l'été, la surface des eaux saumatres dans lesmarais salants ; c'est le Protococcus Atlavfi


96 LÀ PISCICULTURE ARTIFICIELLEOutre les ferments figurés, il y a encore des Corpusculespour la classification desquels on hésite entreles deux règnes organiques (Bactéries, Vibrions, etc.).Parmi les Infusoires définitivement classés dansjesanimaux Zoophytes, nous rencontrons successivement:Les Monadiens, à formes variables, mais trèssimples (sphérique, ovoïde ou cylindrique), nus, trèscontractiles, incolores et très transparents ; nous neciterons que le genre Monas (termo, atomus, lens,punctuntjDunalii, gultula,mica, uva, crepusculum,etc.) ; onles rencontre dans les eaux stagnantes,douces ou salées;Les Volvociens pourvus d'une enveloppe épaisse,gélatineuse, diaphane, ordinairement verte avec unpetit point rouge ; leur forme est celle d'une petitesphère creuse, remplie d'eau ; ils s'agglutinent enmasses d e O m m , 0 8 à 8 , n m , i de diamètre, et tourbillonnentà l'aide des appendices filiformes dont chacun d'euxest muni ; on les trouve dans les marais, à la surfacedes étangs, dans les eaux douces ou salées et corrompues,en j u i n et en septembre surtout, en novembredans quelques rivières ; on connaît les volvox lunula,globator, vegetans, g r a n u l u m , pilulla, socialis, m o r u m ;les uns sont asexués, les autres hermaphrodites, quelques-unsseulement sont sexués ;Les Eugléniens qui sont recouverts d'un t é g u m e n tcontractile, et peuvent ainsi revêtir toutes les formessont, comme les Volvox, le plus souvent de couleurverte avec un point rouge, ou plus rarement de couleurrouge; c'est cette couleur qu'ils donnent à l'eaulorsqu'ils s'y trouvent réunis en colonies nombreuses;


KLKVAOE KT ALIMENTATION ARTIFICIELLE 97l'espèce la plus commune est Y E n g l n n a Hridis, puiscelle l'Icnroneetrx acus, qui vivent dans l'eau douce ;Les Kéronicns qui sont pourvus de crochets oucirrhes et ont la bouche garnie de soies ou d'appendicessemblables à des cornes, vivent, les uns en eaudouce, les autres en eau salée ;Les Ervilliens ou Dystériens qui sont égalementmunis de cirrhes en crochets et d'une cuirasse membraneusepersistante, vivent, pour la plupart dansl'eau de mer ;De m ê m e les Trichodiens dont la bouche est a r m é ede cils en moustaches ;Les Haltériens dont les principaux genres (Hallerie,Trombidion, etc.) vivent à la mer;Les Trachéliens (Lacrymaria, Enchclis, \assnfa,etc.);les Vorticelliens [Yorticella, Cothuniia, etc.);Les Oxytrichiens (Emploies, etc.) ;Les Tintinniens (Tintiitnm, etc.);Les Paraméciens1:Les Kolpodiens ( Kolpodc Cyclidum Pleuroiu n m ,etc.)Les Stentoriens ;Les Noctiluques,etc.Les Infusoires Systolides rotateurs comprennent lesgenres Rolifer, Stephanoceros, Meyalotroque, I l y d a -tine yDiglene, Triarthra, N o t a m m a t a , Brachion, etc.,l Ou Q attribué à une espèce de celte famillo la coloration rouge ouviolette dos eaux saumàlres des étangs Languedociens; cet auimalculemonte, on effet, à la surface dnraut les beaux jours de l'ele, s'yétend en nappes plus ou moins larges puis redesceud au fond dès quesurviennent les pluies et le froid.À. GoD N. Pisciculture. • J *


98 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEqui vivent au milieu des plantes aquatiques et des végétaux,microscopiques comme eux, des eaux stagnantes; ils sont infiniment petits, car leur longueurest comprise entre 0 m m ,0015 et 0 m m ,00015. Les SystolidesTardigradescomprennent les genres Macrobiotes\E m y d i u m , etc. ; ce sont de petits vers épais, blancs ourougeàtres, longs deO m m ,5 à 0 m m ,8, pourvus de quatrepaires de pattes très courtes et armées de petits crochets.Ils vivent dans les eaux stagnantes, dans lestouffes de mousses, dans le sable des gouttières, etc.Rotiferes et Tardigrades jouissent de la merveilleusepropriété de recommencer àse nourrir et à se mouvoir,à vivre enfin, après qu'une dessiccation plus ou moinsprolongée avait suspendu leur vie extérieure.Entreles Infusoires et les Spongiaires, dans la classedes Rhizopodes, nous rencontrons encore des animalculesmicroscopiques, comme les Protéens, les Amibiens(Difflugies, Arcelles, etc.) que quelques naturalistesclassent parmi les Polypes Tuniciers. Nous y trouvonsles genres PlumateLle, Cristatelle, et Alcyonelle.Les Plumatelles sont de petits animaux aquatiquesqui sécrètent un tube membraneux fixé sur des corpssubmergés et dans lesquels ils vivent en se groupantpour former des colonies; libres dans leur enfance, cen'est que dans leur âge adulte qu'ils deviennent ainsisédentaires ; leur corps est presque transparent, leurtentacules sont disposés commeles barbes d'une plume;ils pondent des œufs nus et sans épines ; on les rencontre,dans les eaux stagnantes mais pures, fixéssurtout à la face inférieure des feuilles de N é n u p h a r .Les Cristatelles, vues à l'œil nu, resssemblent à des


ÉLKV.VftR ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 90moisissures; elles ont des tentacules disposés en panache;ces petits animaux membraneux,longs de0 m 00ienviron, sont réunis dans une enveloppe commune.de forme cylindrique, constituéede filaments vrilleux;cette tige est comme hérissée par les tentacules de seshabitants; leurs œufs sont recouverts de pointes cornéeset terminées en h a m e ç o n double ou m ê m e triple ;quoique vivant en colonie, les Cristatelles ne sont pasrigoureusement sédentaires: la colonie se déplacepour gravir les tiges des plantes, ramper dans l'eau,remonter sa surface afin d'y jouir de la lumière et delachaleur.Les Alcyonnelles sont encore des Polypes à tuyauxtubulaires, habitants des eaux stagnantes ; leur organisationest la m ê m e que celle des Plumatelles ; ellesn'en diffèrent que par leur forme arrondie et leurapparence spongieuse ; leurs œufs flottent abondantsà la surface ou sur les bords des eaux, à la fin de l'étéou au commencement de l'automne ; ils sont bruns,ovales, aplatis, longs de 0 m ,00i environ.Il est fort probable que la classe des Acalèphes, parles genres Méduse, E q u o r é e , Pélagie, Rhizostome,Physalie, Diphye, etc., contribue largement à l'alimentation,non seulement des adultes, mais aussi desalevins d'un grand nombre de nos espèces marines.Parmi les insectes, dans l'ordre des NévroptèresPlicipennes, se range le genre Phrygane, connu vulgairementsous le nom de Mouches papillionacées,parce que les quatre ailes de l'insecte parfait sontdépourvues de réticulations et portent des poils i m ­plantés comme les petites écailles de l'aile des Lépi-


100 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEdoptères. Ces petits animaux (flg.33) vivent surtout dansles endroits m a r é c a g e u x et sur le bord des eaux,volentle soir au-dessus des ruisseaux et sont souvent sinombreux que certaines espèces forment comme unenuée, au-dessus des rivières ; de m ê m eque tous les in-FIG. 33. — Les Phryganes, adultes et larves.sectes crépusculaires ou nocturnes, la lumière artificielleles attire. Pendant le jour, les Phryganes volentpeu ; elles quittent rarement le bord des eaux, setiennent sous les feuilles, surles troncs d'arbre ou encoresur les murs, les ailes repliées en toit. L'insecteparfait ne mange pas ; sa vie d'ailleurs est courte. Sa


LLEVAoR ET ALIMENT\TK)N ARTIFICIELLE 101larve est aquatique, pourvue de trois paires do patteset a le corps très mou. Pour se protéger, elle construitautour d'elle un étui ou fourreau cylindrique aumoyen de m a t é r i a u x un peu différents pour chaqueespèce, qu'elle dispose suivant une loi qui paraît régulière(brins de bois ou de paille, débris de feuilles, grainsde sable, petites coquilles, etc.); elle attache ce fourreauà son corps à l'aide de fils soyeux, et le traîneainsi avec elle, chaque fois qu'elle se déplace en rampantsur le fond. C'est ce que les pêcheurs nomment :Caret*, Chêne-fer, Chair faix, Porte-faix, porte-bois, etc.Avant de parvenir à l'état de Chrysalide, la larveferme sa maison, se tient immobile, et en sort quinzeou vingt jours plus tard, sous forme d'une nympheblanchâtre qui marche et nage très agilement, le plussouvent sur le dos ; après huit à dix jours de cetteexistence la nymphe sort de l'eau et se transformepresque instantanément en insecte parfait. La plupartdes poissons et notamment les Salmonés, Barbeaux,Gardons, etc., sont très friands des larves dePhryganes,lorsqu'elles sont débarrassées de leurs fourreaux.On connaît les espèces Phryganes striée {Phryganeastria fa), rhombique, poilue, etc.Plusieurs espèces voisines, les Rhyacophiles, les Ilydropsychés,etc., ont des m œ u r s presque identiques.Parmi les Névroptères Planipennes, citons, dans latribu des Hémérobius, le genre Semblide, dont le typeest la Semblide de la boue (Semblis lutarius) ou Sialisde la vase (fig. 34), d'un noir mat, avec les ailes d'unbrun clair, sillonnées de nervures noires. Sa larve vitdans l'eau, où elle nage très vite; elle est très corn-


102 LA PISCLLTURE ARTIFICIELLEmune dans les eaux vaseuses. La femelle pond en dehorsde l'eau, mais près des bords, sur les feuilles, lesroseaux, les pierres, etc.,des œufs allongés et serréslesuns contre les autres. L ï n s e c t e parfait ne vit quequelques jours. L a larve, pour se transformer enchrysalide,quitte l'eau et s'enfouit dans la terre sèche, aupied des arbres voisins de larive.Toujours dans les Névroptères, mais dans la fa-FIG. 34. — Le Sialis de la vase ; "adulte au vol, adulte au repos,grossis, larve nageant, larve prête à semétamorphoser.œufsmille des Subulicornes, sont placés les Ephémères,petits moucherons fort semblables aux Libellules, maisplus petits et à ailes triangulaires, à corps très mou,demi-transparent (fig.35 et36). A l'état parfait, ces petitsinsectes n'ont qu'une existence très courte ; leurseule fonction, durant cette période, consiste à se reproduire.Ils paraissent, le soir, au coucher du soleil,pendant les beauxjours d'été et d'automne, le long des


É L E V A O E E T A L I M E N T A T I O N A R T I F I C I E L L E 103Fig. 35.'— L'Éphémèrevulgaire,'mâle.FIG. 36. — Larve de l'Éphémère vulgaire.Éphémère adulte abandonnant la Subimago.


104 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLErivières, au-dessus des ruisseaux, s attroupant danslesairs, se formant par couples, puis se posant sur lesarbres ou les herbes, et, bientôt après, la femellelaisse tomber dans l'eau, les œufs en deux ou troispaquets qu'elle portait sous« l'abdomen. I l en naît deslarves très agiles, dont les unes, à corps cylindrique,sont fouisseuses (Éphémères proprement dits, Palingénies,etc.) ; les autres, à corps aplati, demeurent appliquéescontre les pierres (Bœtis, etc.). ; celles-ci, àcorps allongé et cylindrique, sont nageuses (CIoé,etc,) ;celles-là rampent sur le fond vaseux et chassent àl'embuscade. Ces larves dont l'existence a une duréede trois ans. sont, quoique à un moindre degré quel'insecte parfait, recherchées par la plupart des poissons.On connaît un grand nombre" d'espèces d'Éphémères(Commun, Jaune, Bordé, du soir, Horaire,Culiciforme,etc.).Si nous passons aux Diptères, dans la famille desNemocères et la tribu des Tipulides, s'offre à nous legenre Chironome, qui a pour type le Chironome ouChiron plumeux (Chironome seu Chiron plumosus),dont les larves d'un rouge sanguin habitent, enfamille,des demeures qu'elles construisent sans beaucoupd'art, au fond et principalement vers le bord des eaux.Ces larves, que l'on appelle vulgairement vers devase,sont tellement abondantes, et si recherchées de la plupartdes poissons que l'on en fait commerce, dans lesvilles, comme appâts, pour les pêcheurs. L'insecteparfait est, assez c o m m u n é m e n t appelé Cousin inerme,à cause de sa ressemblance avec le véritable cousin,dont il n'a, ni les m œ u r s ni le sanguinaireinstrument.


KLEYAïiE ET ALIMENTATION ARTIFICIEL LK 105Arrivant ensuite aux Diptères Muscides. nous noustrouvons en présence des diverses espèces de Musciesou mouches proprement dites \momhcs à viande, dorée,carnaxsih'e, etc.) dont les larves, qui ont recule nomgénéral dMs//W,/.v, constituent, pour la plupart despoissons, un friand régal, et sont, à cause de cela,employées comme amorces pour la pêche. Ce sont surtoutcelles delà Mouche carnassière (Musea carnaria)qui servent à cet usage. Pour s'en procurer, on dispose,dans une petite fosse, une couche de débris d'animaux,de 0 m ,20 à 0 m ,30 d'épaisseur, que l'on préservedu soleil en la recouvrant d'un peu de paille. En24 ou 48 heures, la ponte des mouches a peuplé toutela couche de larves grouillantes que l'on peut aisémentrecueillir et distribuer dans les rivières. En pleine eau,le moyen le plus simple consiste à fixer sur un piquetplanté dans le fond, une demi-sphère métallique, percéede trous, dans laquelle on dépose de petits morceauxde viande sur lesquels les mouches viennentpondre ; les larves s'y développent, pullulent, tombenten grand nombre et successivement à l'eau où leshabitants, aux aguets, en font promptement leur proie.Dans l'ordre des Hyménoptères, les larves des fourmis(noire, fuligineuse, mineuse, fauve, cendrée ^ etc.)déjà utilisées à la nourriture des jeunes de certainesespèces délicates d'oiseaux, sont aussi très volontiersacceptéees de la plupart de nos poissons d'eau douce.Dans l'ordre des Coléoptères, il en est de m ê m e dela larve du Ténébrion de la farine (Ténebriomolitor).Cet insecte long de 0 m ,15, d'un brun noirâtre en dessus,brun marron et luisant en dessous, est commu-


10G LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEnément nommé Cafard ; il pond dans les matières organiquespulvérulentes (farine, pain, biscuit, etc.) ; salarve cylindrique, cuirassée, jaune fauve, très lisse,munie de pattes, et connue sous le nom de ver defarine est employée pour nourrir les jeunes rossignolset autres oiseaux insectivores. U n grand nombred'espècesde poissons d'eau douce s'en montrent égalementgourmandes.Abordons maintenant la classe des Annélides. Parmiceux que l'on nomme assez improprement Terricoleset mieux Sètigères ou encore Chélopodes, nous signaleronsquelques espèces qui vivent en eau douce, et unplus grand nombre dans la mer ; quelques-unes seulement,comme les Lombrics, sont véritablement terricoles.Le genre Naïs, Naïde ou Naïade, se compose d'animauxvermiformes, à corps composé d'anneaux moinssaillants que chez les Lombrics, n'ayant aucune apparencede branchies, munis d'une bouche ronde terminalesans apppareil masticateur ; on remarque des pointsoculaires sur la tête et des appendicessétacés, simples,sur chaque articulation d'anneaux.Ces Annélides sontde petite taille, alternativement fîssipares, gemmipareset ovipares, très féconds, et vivent dans les eauxdouces de tous les pays. Ils sont communs en France.On les trouve toujours enfoncés dans la vase etlaissantsortir la partie antérieure de leur corps qu'ils remuentsans cesse. Parmi les espèces connues, nous citerons :la Naïs vermiculaire ( N a ï s vermicularis) longue de0 m ,004à 0 m ,005, que l'on trouve attachée sous les feuillesde la lentille d eau, dans les mares ; la Naïs filiforme


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 107(Nais filiformis), longue de 0 m ,0i:i, qui habite les petitesrivières de la Normandie, etc.Dans l'ordre des Annélide- Dorsibranches ouerrants,se trouve rangée la famille des Néréidiens et le genreNéréide, forme de vers marins au cou allongé, couvertde cirrhes et de soies de couleurs élégantes etirisées ; ils habitent sur les côtes, dans les creux derochers, dans les coquilles vides de mollusques, dansle sable ou la vase. Les pécheurs les recherchent pouramorcer leurs lignes.La Néréide Française (Xereîs Ga!li


108 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEl'Arénicole des pécheurs(Lumbricusmarinus), longue de0 m ,30 environ, de couleur rouge cendré, avec les branchiesd'un beau brun doré; elle répand lorsqu'on latouche une abondante liqueur jaune. Tous lespêcheursde nos côtesocéaniquesconnaissentlaetlarecherchentcommeappât.Ilsse laprocurenten creusant lagrève à maréebasse.au moyend'une bêche, àlaprofondeurd e O m , 3 0 à O m , 8 0là où l'animalaFie. 37. — Apus cancriformetrahi sa présencepar lescirconvolutionsde terre coloréequ'il a dégorgéessur lesable.Si nous passons maintenant à la classe desCrustacés,nous y rencontrons encore de nombreux petits êtres,non plus microscopiques, mais encore minuscules.Dans la division des Branchyopodes et la sectiondes Phyllopodes, sont placés les genres A p u s , L y m n a -die et Branchippe, habitants des eaux douces.Les Apus sont recouverts d'un testlibre, scutiforme;


É L E V A C K i/r A L I M E N T A T I O N A R T I F I C I E L L E 109ils sont pourvus de ï.\ à m paires de pattes-branchieset portent, en arrière de l'abdomen, deux appendicessétiformes et très allongés.L'Apus allongé ( \/>us pro^urtus) est long d'environO n ',o:> ; la 1(V de ses pattes branchies porte deux capsulesrenfermant les œufs; il habite les fossés, lesmares, les eaux douces dormantes, presque toujoursen sociétés très nombreuses; quelquefois, enlevés enmasses par les vents violents, on les a vu retombersous forme de pluie. Ils se nourissent surtout dejeunestêtards et servent à leur tour de nourriture à l'oiseauconnu sous le nom de 1 loche-Queue ou Lavandière(Moùaci/laalla).L'Apus prolongé (Aspidiophorus Apus) et l'A pus àqueue en filet [Aspidiophorus caucriformis) (fig. 37) ontles m ê m e s m œ u r s .A. GOUIN, Pisciculture. 4


H O LA PISCICULTURE ARTIFICIELLELe genre Lymnadie, caractérisé par un testbivalve,de forme cylindracée, le corps divisé en 20 ou 30 anneauxpourvus de 18 à 27 paires de pattes-branchies,ne nous offre guère que la Lymnadie d'Hermann( L y m n a d i a Hermanni), fréquente dans les marais de laforêt de Fontainebleau, ou elle nage renversée sur ledos ; son test a 0 m ,009 de longueur.Le genre Branchippe (fig. 37), reconnaissable à soncorps allongé, presque filiforme, à son abdomen relativementtrès développé, à ses deux yeux grands etportés chacun sur un pédoncule mobile, à un troi-FIG. 38. — Daphnie puce, mâle et femelle.sième œil sessile placé entre les deux pédoncules,enfin à sa tête a r m é e de quatre antennes, nous présentele Branchippe des étangs (BranchippusStagnalis)qui vit nombreux dans les pièces d'eau, les mares, etc;il nage renversé sur le dos et agite constamment sesnombreuses pattes ; la femelle fait plusieurs pontes de100 à 400 œufs chargés de conserver l'espèce, parceque, lorsque les sécheresses tarissent les flaques d'eau,les mares, les étangs, les adultes meurent, tandis queleurs œufs résistent à la chaleur et à la sécheresse*comme au froid et à l'humidité, et éclosent parlégions dès que le printemps reparait. Les Branchippes


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 111sontune proie recherchée des Grenouilles, Salamandres,Dytiques, etc., et de plusieurs poissons.Toujours dans la division des Branchiopodes, maisdans le groupe des Cladocères, signalons particulièrementles deux genres Daphnie et Polyphème.Le genre Daphnie se distingue par une très petitetaille (0 m ,002à 0 m .003.;, un œil unique, cinq paires depattes-branchiales, dont la première servant à la natationsuivant les uns, remplissant le rôle d'antenneselon d'autres, le corps revêtu d'une carapace bivalve.La Daphnie puce (Daphnia pulex) (fig. 38), vulgairementappelée Puced c a u , à cause de la rapiditéavec laquelleelle peut progresserpar bonds, dans l'eau,en tous sens, grâce àses deux bras ou pattesnatatoires, est decouleur rouge pâle. Cesanimaux agames viventdans les eaux sta­FIG. 39. — ChambreDaphnie,iucubalriee d'uiiegnantes des mares, des étangs, des fossés, des flaquesd'eauet passent l'hiver dans la vase. La femelle mesure,au m a x i m u m 0 m ,004 de long, et le mâle adulte, 0 m ,003.« D'après le professeur Claus, au printemps et en étéon ne rencontre guère, d'ordinaire, que des individusfemelles qui donnent naissance à une série de générationsParthénogènes. Les œufs pondus à cette époquesont les œufs d'été qui se développent rapidement dansune chambre incubatrice située sous le test dorsal


112 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLE(fig. 39). Après quelques jours, les œufs éclosent; lesjeunes Daphnies quittent leur berceau et ils ne tardentpas à produire des œufs à leur tour.En automne, lorsquele froid menace l'existence de ces petits êtres aquatiques,les femelles produisent les œufs d'hiver et assurentainsi la conservation de l'espèce. Ces œufs nepeuvent pas, comme ceux d'été, se développer sansl'intervention des mâles ; la fécondation est nécessaire ;aussi, voit-on apparaître les Daphnies mâles lorsqueles conditions biologiques deviennent défavorables. Lesœ u f s d'hiver mêlés à la vase, sont plus gros et plusrustiques que ceux d'été. Ils sont d'ailleurs protégéspar la chambre incubatrice qui s'est détachée avec euxdu dos de l'animal. Lorsque les froids de novembre sefont sentir, les Daphnies se réfugient au fonds desétangs ou des mares; là, ils résistent pendant quelquetemps au froid, puis périssent dans le courant de l'hiver.A u printemps suivant, quand la température s'estsuffisamment élevée, les œufs conservés dans la vasese développent, et éclosent vers la mi-avril, et bientôtles Crustacés issus de cette première génération pullulentdans les eaux bourbeuses »M . Lugrin, ammodiataire des produits de la pêchedu lac de Genève, avait fondé, de concert avec M . Roveray,à Gremat, commune de Thoiry, près Saint-Genis(Ain) un établissement pour l'élevage des Salmonidés.I l paraît avoir eu le premier, l'idée de faireservir les Daphnies à la nourriture de ses élèves. C'estdu moins ce que rapporte, dans une de ses charmantes1Claus, Traité de Zoologie, trad. par Moquin-Tandon.


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 113chroniques au journal Le Temps, M. CI. de Cherville,d'après lequel, non seulement les Salmonidés de toutâge se montrent très avides de ces petits crustacés,mais encore cette nourriture active leur développementet les entretient en santé, tout à la fois. LesTruites soumises à ce régime pèsent, à 15 mois, aum i n i m u m , 250 grammes: les plusbeaux sujets atteignentau poids de 500 à 600 grammes. La matière alimentaireétait donc trouvée. Malheureusement, l'élevage artificieldes Daphnies,quoiqu'il fût le plus souvent heureux,avait des irrégularités : les circonstances atmosphériquescontrariaient quelquefois la multiplication et,vu les proportions de rétablissement de Gremat, ilétait indispensable de la fixer. Ce fut le problème auquels'attaqua M . Lugrin, et il ne l'a pas résolu moins heureusementque les premiers. U n procédé qu'il adécouvert lui permet d'obtenir, absolument sans frais,des quantités pour ainsi dire illimitées de son élémentde nutrition. Applicable partout, en hiver comme enété, permettant de réaliser une économie considérabledans l'élevage du poisson, la découverte de M . Lugrinnous paraît de nature à assurer l'avenir de l'industriepiscicole.U n de nos plus intelligents pisciculteurs, M . Rivoiron,quihabite le hameau de Servagette (Isère) a établison élevage sur un petit ruisseau de 3 kilomètres delongueur, affluent du Guiers. Il a utilisé d'anciennesconstructions en maçonnerie, en les divisant en réservoirsdans lesquels il dépose ses alevins, ses élèves etses reproducteurs. Et il a eu l'heureuse idée d'employerà la nourriture des premiers, des cultures de Daphnies


114 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEopérées dans des bassins particuliers. Voici commentil opère: Il recueille, au commencement d'avril, de lavase dans les mares où ces crustacés étaient nombreuxà l'automne précédent; il la dépose dans les bassinsclos,mais à ciel ouvert, remplis d'une eau légèrement.purinée, dont il se borne à entretenir le niveau encompensantl'évaporation. De cinq ou six de ces bassinsformant ensemble de 30 à 50 mètres carrés, il retirejusqu'à 2 kilog de Daphnies par jour, qu'il distribue àses alevins d'un an, lesquels s'en montrent extrêmementavides.D'après un rapport de M . Chabot-Karlen à la sociéténationale d'agriculture de France, M . Rivoiron netarda pas à reconnaître le peu de convenance des bassinsbétonnés, il les creusa simplement dans un pré,sur les bords d'un ruisseau, donnant à chacun d'eux10 mètres de long, 2 mètres de large, et l œ ,50 de profondeur;dans chacun d'eux, il fait jeter un mètrecube de fumier de ferme frais, dans le courant de mars,et fait agiter l'eau tous les jours, jusqu'à ce qu'èlleprenne une teinte légèrement bistrée,sans se corrompre.On ensemence en Daphnies, dès les premiers joursd'avril. A la température de + 25° C chacune d'elleproduira tous les cinq jours, huit sujets, et commeJes générations se succèdent peu de jours après lanaissance, le produit d'un seul individu se chiffre parmilliards, au bout de 4 à 5 mois. La tolérance de cetorganisme réside entre — 6°C et -f- 32° C. On récoltede la fin d'avril à la fin de septembre, en promenant àla surface de l'eau un tamis de crin, sans secousses,ni agitation ; on lave sous u n filet d'eau claire et on


ÉLEVA G K ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE I 13distribue aux alevins. Chacun des bassins revient enconstruction et préparation, à 135 fr. et peut fournir.d'avril à septembre, 170 à 180 kilog. de Daphnies 1Brehm, ou plutôt son commentateur français, M . I I .E. Sauvage2, a constaté dans un assez long séjourauprès des lacs suisses, que les Cladocères et les Cyclopidesconstituent presque exclusivement la nourrituredes hôtes de ceseaux.Ouvrant un grandnombre de ces poissons,il a trouvéconstammentque le contenude leur estomacétait fprmé de cescrustacésmicroscopiques,sansmélanged'aucun autre alimentDans les eaux sa-. . ,r. . Fie 40. — Cypris brune.leeS, les LypriS parais-f (Antenne* antérieure*; a\ antennes postérieures;Sent être analOgUeS P* patte» ; pa, portion terminale et caudiformo_t.. de l'abdomen ; t\ valves de la carapace ; o, œil.aux Daphnies del eaudouce; elles appartiennent comme eux au groupe desCladocères. Elles s'en distinguent aisément néanmoinset par leurs m œ u r s et par leur apparence extérieure.Les Daphnies nagent par soubresauts, tandis que lesCypris semblent tourbillonner dans l'eau : d'ailleursles deux valves de leur carapace ne sont pas mobiles(fig. 40); elles laissent en dehors d'elles, la tête, au lieu1Chabot-Karlen, Afém. des Suc. d'agriculture, séance du 12 novembre1884.- Brehm et Sauvage .Merveilles de la Naturelles Poissons. Pari s,1835.


4H6 PISCICULTURE ARTIFICIELLEde la dépasser comme chez les Cypris; la premièrepaire d'antennes est rudimentaire, la seconde constitueune paire de longues nageoires bifurquées, il y ades mandibules, deux paires de mâchoires et six pairesFIG. 41. — Le Cyclope à quatre cornes, femelle très grossie et sesformes larvaires.de pattes lamelleuses, ce qui fait onze paires d'appendices,au lieu de sept que présententles Cypris11Ed. Périer, Les Explorations sous-mar. }p. 193.


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 117A u nombre des Crustacés Copépodes, il faut rangerencore les Cyclopides et les Cyclopes, chez lesquels lacarapace manque, dont les yeux sessiles, sont confondusen une seule masse au milieu du front ; les antennesde la première paire jouent le rôle de bras préhensiles ; lapartie postérieure du corps porte deux sacs ovigères.Leur corps piriforme est presque microscopique ; ilshabitent, les uns l'eau douce, les autres l'eau salée; ilsFia. 42. — La Crevette desruisseaux.muent avant chaque ponte et acquièrent avec 1 âgeune cinquième paire de pattes et comme une sorte dequeue. Le Cyclope à quatre cornes (Ci/clops quadricornis)(fig. 41), long à peinede0'",001,:idecouleur blancherougeâtre, brunâtre ou verdàtre, pullule dans les mareset les fossés d'eau doucede toute l'Europe, commedansles étangs, les lacs et les canaux, où il constitue,avecses congénères, une proie très recherchée des poissons.Toujours dans la classe des crustacés, mais dansl'ordredesAmphipodesetlafamilledesCrevettines,tribu


118 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEdes sauteurs, se range la Crevette de ruisseau (fig. 42)vulgairement appelée, elle aussi, pucecCeau(Gammarus,seu Cancer pulex). Longue de 0 m ,015, d'une couleurjaune rouille, elle nage toujours au fond de l'eau,couchée sur le côté, progressant par sauts rapides dusà la détente répétée des appendices de la queue. Ellehabite les eauxlimpides,les sources,les ruisseauxfrais,les filets d'eau des cressonnières, les tourbières, lespuits, et sa présence est m ê m e , et souvent à tort, considéréecomme un indice de qualité des eaux. Elle estun des plus redoutables ennemis des œufs de poissons,mais peut en revanche, servir à la nourriture économiquedes adultes. M . Sauvadon a indiqué, dès 1867,le moyen de les multiplier en grand nombre. Faire unfossé, en fouilles neuves, de 4 mètresde large ; creuserle milieu de ce fossé, à 1 m è t r e de profondeur et luidonner 1 mètre de large ; monter en pierres sèches lesdeux côtés ou seulement celui exposé au midi, à 0 r a ,70de hauteur, en laissant, autant que possible, entre lespierres, des cavités qui serviront plus tard, ainsi qu'onle verra ci-après. Mettre en talus le terrain qui restede chaque côté, en ayant soin de conserver une bergede terre ou de pierre de 0 m 10 de haut. Prendre ensuitele talus, de manière à avoir, sur les bords, 0 r a ,05 d'eau,et à arriver en pente sur les murs, des deux côtés, à0 m ,30 d'eau. Pour cette opération, il est indispensableque le fossé soit traversé par un petit courant d'eau,celle de rivière est préférable, étant toujours plusdouceet plus favorable que l'eau de source. Préparer ensuitele terrain des talus en l'ameublissant un peu afin d'ysemer ou d'y planter du cresson; empoissonnerensuite


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 119en crevettes. Les racines du cresson, qui poussentabondamment au fond de l'eau, leur servent de refugeet d'abri et leur offrent un endroit propice pour déposerleur fraiLes pêcheurs N o r v é g i e n s attribuent l'excellentePia 43. — Lo Cloporte d'eau douce ou Aselle aquatique.qualité de chair des diverses espèces de corégones quipeuplent leurs lacs à une nourriture, presque exclusivementcomposée de G a m m a r i d é s , lesquels foisonnentdans ces eaux 2 ; et il faut joindre encore, d'après Th.Huxley, un autre petit crustacé, le Mysis relicta3.* Sauvadon, Bullel.de la Société Zool. d'acclimat., décembre 1867,Raveret-Wattel, p. £0, ut suprx.:?puxley, LÉcveviste, p. 239.


120 TA PISCICULTURE ARTIFICIELLECitons encore dans le même groupe, un petit amphipodemarcheur, l'Aselle commune (Asella vulgarù), (fig.43),fréquente dans les eaux douces stagnantes,mais noncorrompues. Elle est longue de 0 m ,012 à 0 m ,015, brune,tachetée de gris et de jaunâtre en dessus, cendrée endessous. Elle habite le fond, sur lequel elle marchelentement.Elle passe l'hiver enfoncée dans la vase.Enfin, dans la classe des Arachnides, parmi lesacariens, n'oublions pas de citer le Ciron du fromageou Mite, le Tyrogliphus siro, qui vit dans la croûte dugruyère et de plusieurs autres espèces.Tels sont, quelques-uns, du moins,des petitsanimauxqui, vivants peuvent servir à l'alimentation des poissonsde différents âges et de diverses espèces.A l'Ecole de pisciculture de Clermond Ferrand,M . Rico donnait de temps en temps à ses alevins deSalmones (il n'y a guère qu'aux jeunes de cette famillequ'il soit nécessaire de fournir artificiellement de lanourriture) de deuxième âge, des Crevettes d'eau douceafin de compléter leur ration. M . de Bondt, au jardinzoologique d'Amsterdam, distribuait aux m ê m e s des lombricsou vers de terre hachés menus; mais il avaitexpérimentéque les larves de certains insectes et le cycïopsvulgaris ne pouvant vivre que dans des eaux peu renouvelées,plutôt chaudes que froides, plutôt troubléesqueclaires,ne devaient pas tarder à périr et leurs cadavres àaltérer l'eau,si on les transportait dans les eaux vives,et fraîches, ou les Salmones peuvent seulement prospérer.Coste avait r e c o m m a n d é et M . Carbonnier apratiqué avec succès, au contraire, l'emploi des Cythérés,Cypris, Cyclopes, etc. A Chalex (Vaud-Suisse),


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 121M . de Lo£s nourrissait ses jeunes Salmones avec desMites ou Girons du fromage et, après la résorption dela vésicule ombilicale, avec des Crevettes ou pucesd'eau douce. En Finlande, on emploie pour les jeunessaumons, les larves et nymphes de la mouche carnassière(Musca Sarcophaga seu Carnaria).Quant aux autres proies vivantes que Ton peut procurerou distribuer aux poissons de divers âges, nousciterons ; le frai de la grenouille commune (Bana rsntlenta,Batraciens anoures), la m ê m e à son premier ngeou Têtard, ou enfin la chair de ses adultes' ; le fraia été avantageusement utilisé, au collège de France,aussi bien que les Têtards et la chai^ de Grenouille, pourles alevins de Truites et Saumons au second et troisièmeâges. A Velp. près d'Arnheim (Hollande),M.Opten-Max nourrissait ses alevins de Saumons avecdes œufs d'Éperlans ou d'Aloses, très nombreux dansl'Yssel; M . Coste avait conseillé déjà, mais seulementdans les laboratoires de pisciculture,les œufs dePercheset de Brochets qui, en pleine eau, échappant aux poissonset éclosant pourraient devenir un grave dangerpour eux; il n en serait pas de m ê m e de ceux des Gardons,Chevesnes, etc., et autres petits Cyprins parfoistrès nombreux, dans certains ruisseaux et rivières.Les Moules comestibles [mytilm edulis) étaientavantageusement et économiquement mises en œ u v r epour la nourriture des Truitons par M . de Bondt, à• L'exemple de M. Sivard de Beaulieu indique qu'il faut être prudentquant à remploi des autres reptiles; il en effet, vu mourirles Truitons auxquels il distribuait de la chair do Tritons (Trilncrislalus) et de Salamandres terrestres (Salamandre miados


122 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEAmsterdam, où elles n'ont qu'uneinsignifiante valeur;il les donnait sorties de leurs valves fraîchementouvertes. A H o w i e t o w n (près de Stirling, Ecosse),Sir James Maitland Gibson ajoute des Moules à laviande de cheval qu'il distribue à ses Truites. A Nanteuil-en-Vallée(Charente), M . Desprès emploie descervelles, du sang et des Limaces. A Meilen (Zurich-Suisse), c'est un mélange de Limaces et d'Escargots,comme chez M . Massart, à Berne; ailleurs, ce sont desLymnées, des Planorbes, etc., pilées ou écrasées.Puis viennent les poissons vivants, cyprins de petitetaille comme le Vairon, ou jeunes alevins d'autresespèces communes. A Saint-Genest-l'Enfant, M . deFéligonde a établi, sur un ruisseau de 200 mètres delong et de 1 m è t r e de large, un bassin peuplé de poissonsblancs ; des frayères sont ménagées auxemplacementsles plus favorables et l'alevin en est consacré àl'alimentationdes Truites ; ainsi opère M . deBeaumontdans le Gers; les pêcheurs Finlandais multiplient, dansle m ê m e but, l'alevin de Gardon.L'alimentation par le mort, c'est-à-dire au moyendu corps ou des débris de corps des animaux morts outués, frais ou conservé, comprend:La chair des poissons frais, que l'on emploie, àZurich, de la façon suivante: on la pile avec soin, puison l'enveloppe dans u n linge de mousseline et l'on enextrait les parties les plus ténues, qui tombent dansl'eau où l'on agite ce nouet. A Meilen, pour les adulteson se contente de la couper en petits morceaux; dem ê m e à Berne et à Munich; à Amsterdam, on la piledans un instrument spécial. La viande de cheyal fraîçbÇ


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 123pilée ou hachée était employée à Clermont-Ferrandaprès avoir été délayée dans cent parties d'eauenviron;


124 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEmarie, dans un vase très étroit et, dès qu'il est cuit,c'est-à-dire quand il n'est plus rouge au milieu, leretirer, en veillant à ne pas le laisser trop cuire,car ildeviendrait trop sec et la Truite ne le mangerait plus.Prendre ensuite le sérum ou la partie du sang quireste liquide, la faire cuire de la m ê m e façon et, dèsque le milieu est coagulé, le retirer promptement, caril cuit beaucoup plus vite. Faire passer l'un aprèsl'autre, le sang rouge et le s é r u m au travers d'unepassoire, les mélanger avec soin, en salant un peu, etbien pétrir le tout, pour en former une pâtée qu'onverse ensuite dans de grands pots, en ayant soin de nepas laisser d'air à l'intérienr et de recouvrir le toutd'une couche d'eau saturée de sel de cuisine. Par cemoyen, on obtient une nourriture qui se conserve etque les Salmonidés mangent trèsbien.« C'est après bien des essais que je suis arrivé àemployer ce procédé, quia l'avantage de ne coûter quela cuisson. J'ai r e m a r q u é que le meilleur sang est celuide veau: celui de bœuf ou de mouton sont trop secs.Pour faire manger cette pâtée aux alevins, il suffit dela faire passer au travers d'une passoire plus ou moinsfine, suivant l'âge des poissons, ce qui donne un petitvermicelle assez engageant et trèsfacile à absorber. U nmorceau pris n'est jamais rejeté, ce qui arrive quelquefoisavec la viande hachée. Pour les Truites plusfortes, qui atteignent 0 m , 0 8 à 0 m , 1 0 , il faut prendre cettepâtée dans la main et en former des boulettes plus oumoins grosses, suivant la taille des poissons1-, »1A. d'Audeville, Bullet. de Piscic. prat., I e ' mars 1888, p. 49-50.


ELEVACE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 115Les débris de boucherie de tous genres (sauf lagraisse), peuvent être utilisés, comme à Berne: lesintestins de poissons vidés après la vente, comme àMunich, etc. etc. Les jaunes d'œufs crus, délayés dansde l'eau, ainsi quele faisait M . Rico, qu'on le pratiquaità Zurich, et qu'on l'emploie généralement pour lesalevins du premier âge ; ou cuits, très durcis et émiettésà la surface de l'eau, comme M . Massart, à Berne,pour ceux du second âge.La viande de cheval peut être salée dans le butd'assurer sa conservation et de régulariser l'approvisionnement.M . Rico avait constaté que, nonseulementles poissons la préféraient à toute autre, mais encoreque ceux qui en recevaient se développaient plus rapidement;M . Massart en faisait des salaisons pourl'hiver; les pisciculteurs allemands s'en sont généralementloués pour le Saumon Heusch. La viande depoissons subit parfois aussi la m ê m e préparation dansle m ê m e but; d'après M . Raveret Wattel, le Directeuractuel d'IIuningue se procurerait en Norwège, desSprats iclupea Sprrtftifs) salés, ù raison d'environ15 fr 50 les 100 kilog.; puis, les faisant légèrementdessaler, il les hache plus ou moins fin et les distribueaux Truitelles et Truitons, mélangés par moitié à dela viande fraîche. On considère généralement les alimentssalés, comme favorables au développement1et1On sait que, lorsque des alevins do Salmones du premier ;Woparaissent fatigués soit d'un transport, soit d'un rassemblement tropnombreux dans les auge lie* ou bassins, qu'ils restent en repos surle fond, il suflH de jeter un peu de sel de cuisine (quelques grains)dans l'eau, pour leur redounerde l'énergie.


126 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEà l'engraissement des Salmones, dont ils ne doiventjamais, pourtant composer la nourriture exclusive.Restent les matières végétales qui, associées auxsubstances animales jouent, sans doute un rôleàlafoishygiénique et économique. M . de Monicault, dansl'Ain, eût l'idée de faire confectionner une sorte depainavec les grains recueillis dans les granges et lesgreniers et n'eut qu'à se louer de cette pratique, pourles Cyprins de ses étangs. M . Massart mélange à lanourriture de ses Truitons quelques grains de maïscuits ; M . Bouchon-Brandely recommande pour l'alimentationéconomique des Salmones, l'addition auxaliments animaux, dans la proportion d'un tiers, degrains de maïs ou d'orge ou des pommes de terre, letout cuit et écrasé. C'est surtout d'une pâtée depommesde terre cuites que M . Rico nourrissait ses Carpes etCarpeaux. M.Hasler,au contraire, dit n'avoir point euà se féliciter d'un mélange de viande hachée et de pommesde terre cuites et pilées. Enfin à Cambo (près deBayonne), M . Onslow nourrissait ses alevins de Salmonesavec des viandes fraîches de boucherie ou depoissons, pilées avec du biscuit de marine.Ainsi deux modes d'alimentation bien t r a n c h é s : p a rle vivant, dont nous trouvons u n type parfait à S e r v a -gette (Isère), chez M . Rivoiron, et, p a r le mort, dontM . Desprès nous offre un intéressant spécimen, à Nanteuil-la-Yallée(Charente) ; le premier au moyen del'élevage parallèle des Salmonidés et des Daphnies;le second, par l'emploi des cervelles, du sang et deslimaces. I l est bien entendu que c'est à chaque éleveurà expérimenter et à choisir, suivant les conditions


É L E V A G E E T A L I M E N T A T I O N A R T I F I C I E L L E 127géographiques et économiques dans lesquelles il setrouve placé entre l'un et l'autre système : ici Crevettes,Daphnies, Cirons, Oyolopes,Larves de mouches,œufs et alevins de poissons blancs, etc.; là, Moules,viandes de boucherie, de cheval, de poissons, fraîchesou sal


LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEpoint alors sur la proie, mais, abrité derrière un caillou,il l'attend au passage ; ce n'est que six ou septjours plus tard, la résorption étant complète, qu'il sehasarde à s'élancer sur la victime qui passe à sa portéeet à la happer, tandis qu'elle est en mouvement. LesSalmones ne ramassent jamais leur nourriture sur lefond *La nourriture du premier âge consiste en cervelles,œufs, sang, viande fraîche très finement pilée et soigneusementtamisée, tout cela préparé ainsi que nousl'avons dit plus haut, réduit en molécules impalpablesd'abord et dont l'atténuation diminuera progressivementavecl'âge.Pour le second âge, ce sont les petites proies vivantes,comme les Daphnies, les Cirons, les larves demouches, les œufs des petits Cyprins, les viandesbroyées ou hachées, le vermicelle de sang cuit, etc.Pour le troisième âge, la viande encore, les alevinsde petits Cyprins, les limaçons et limaces hachées, lefrai de grenouilles, les têtards,etc.Enfin, pour les adultes, les m ê m e s aliments moinsfinement divisés, des alevins de Cyprins plus développés,des viandes hachées moins menu, des pâtées forméesd'un mélange de matières végétales et animales.Pendant le premier âge et ainsi que pour tous lesjeunes animaux, les repas doivent être plus fréquents,deux ou trois par jour; avec l'âge ils pourront s'éloigner,un par jour, un tous les deux jours, suivant1Voir Mém. de la Société nat. d'agric. de France, t. CXXX,1886, p. 109, rapp. de M. Chabot-Karlen,


ÉLEVAGE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 129le cas et les saisons. C'est au printemps que l'appétitdes poissons semble le plus développé, à la suitedu quasi-jeûne de l'hiver; il se calme après quelquesjours, puis se relève parallèlement aux chaleurs del'été, diminuant d'après une semblable progressionavec l'automne, s éteignant presque avec l'hiver.Enfin, il est d'observation que, pour les poissons,aussi bien que pour les autres animaux, la ration doitêtre composée d'éléments aussi variés quepossible,dansla gamme de ceux spéciaux à l'espèce; mais qu'il fautsoigneusement se garder de passer sans m é n a g e m e n t set transitions d'une formule de ration à uneautre.Durant le premier âge, il suffit,d'après M.Cauckler,d'une tasse pleine de nourriture pour 100,000 Truitons:pour 1,000 Truites de deux ans, il faut journellement1 kilog. 500 de viande; un an après, il enfaut 2 kilog. 500. On a expérimenté qu'il fallait 0 kilog.de poissons blancs ou 5 kilog. de viande de chevalpour produire 1 kilogramme de Truite Ce chiffreconcorde assez bien avec celui donné par M . d'Audeville,pisciculteur à Andecy-par-Baye (Marne), d'aprèslequel il faudrait de 5 à 10 kilog. de nourriture pourfabriquer \ kil. de truite; soit en moyenne, 7 à 8 kil.chaque kilog.de truite se vend couramment 5 francs 2M . Ilermann Uaak, directeur d'IIuningue a calculéquepayant la viande 0 fr. 20 le kilog. on peut réaliser unbénéfice d'environ 00 pour 100 : à 0 fr. 30. le produitde 40 pour 100 est encore très r é m u n é r a t e u r ; àO fr. 401Rlauchnrd, Les Poissons d'eau douce, p. 249.- D'Audevillc, Bultcl. de Piscic. praL, 1 e r octobre 1SS$, p. 218.


130 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEil n est plus que de 20 pour 100, sur lesquels il fautsolder les frais g é n é r a u x et d'exploitation *Nous sommes bien loin, on le voit, de la confessiondans laquelle M . Clavé, directeur des domaines duducd'Aumale, avouait n'avoir pu produire, à Chantilly,un kilogramme de Truite à un prix de revient inférieurde 50 francs2.A côté de l'importance de l'alimentation, il faut placerencore l'influence du logement, c'est-à-dire desbassins ou des espaces plus ou moins clos dans lesquelssont déposés ou maintenus les poissons. C'est surtoutdans le premier âge que, ici comme toujours, l'hygiènedu logement peut avoir les conséquences les plusfatales.Pour les Salmones, l'éclosion terminée, les claies enlevées,les bassines nettoyées, l'alevin peut être replacédans ces dernières jusqu'aux quelques joursqui précèdent l'entière résorption de la vésicule ombilicale,période durant laquelle il ne mange pas. Ace moment, il faut le déposer dans un local plusspacieux, que l'on nomme bassin d'alevinage. C'est leplus souvent une auge en bois blanc passé au coaltar,de 0 m ,30 à 0 m ,35 de largeur au fond et de 0 r a ,40 à0 m ,45 en haut, sur 0 m ,25 à 0 m ,30 de profondeur. On ydépose une épaisseur de 0 m ,10 environ de gros gravierpréalablement bouilli dans l'eau afin d'y détruire toutœuf d'insecte et toute graine de plante ; on peutdiviser l'auge, par des cloisons verticales de fin treil-1Raveret-Wattel, ut suprà, p. 14.Clavé, Rcv. des Deux


KLEVAOE ET ALIMENTATION ARTIFICIELLE 131lage métallique, en plusieurs compartiments et. on yrégie le niveau de l'eau courante à 0 m ,10 au-dessus dugravier, soit 0 m f()5 à 0 r a ,10 au-dessous du bord supérieur.On incline l'auge de façon à obtenir la vitessede courantnécessaire.On doit éviter avant tout l'encombrement, qui fatiguel'alevin et détermine une mortalité plus ou moinsélevée ; plus les alevins sont divisés, mieux ils se développentet plus ils ont d'énergie. Il faut doncd'abordFiO. 44-45. — Abris en terre cuite pourulevai.les diviser par âges d eclosion ; puis, successivementtrier parmi ces premières divisions, ceux qui sont lesplus développés et les grouper en les assortissant.Les bassins d'alevinage disposés en plein air, surun cours d'eau dérivé, réunissent des conditions aumoins aussi favorables, à la condition pourtant qu'ilssoient recouverts d'un treillage métallique à maillesassez fines pour empêcher les rats d'eau, les loutres,les chats, les oiseaux, etc., de les dépeupler. M . Koltzconseille d'y planter la peste d'eau (Elodea Canadensù)


LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEqui sert de retraite à l'alevin et contribue à son alimentation,tout en oxygénant l'eau. A défaut deplantes aquatiques, on y dispose des abris en terrecuite ou en pierres meulières entassées de façon àm é n a g e r des abris obscurs où le poisson puisse se retirerpour digérer et dormir (fig. 44 et 45).Bien entendu, à mesure que les alevins grossissent,il faut leur accorder plus d'espace, jusqu'au momentoù on les mettra en liberté complète.§ 6 . — DISSÉMINATIONCertains pisciculteurs, en effet, épargnent tous lessoins et frais de l'alimentation artificielle, en versantl'alevin dans le cours d'eau à repeupler, dès que lavésicule est résorbée, # Ils prétendent que le jeunepoisson, alors très vif et très agile, peut échapper àtous les dangers, m ê m e beaucoup mieux que lorsqu'ila atteint de plus fortes dimensions. Il prend en outrel'habitude de vivre dans les eaux où il doit croître etne souffre pas d'un changement d'eau et de nourritureet d'un transport dont les frais et les difficultés augmententavec l'âge. Ce système présente des résultatssatisfaisants, toutes les fois que l'on donne à chaqueeau le poisson qui lui convient, et que l'on diminueles chances aléatoires en détruisant le Brochet, laPerche et autres voraces qui y vivent... A part cesmesures préventives, on abandonne l'alevin aux soins


DISSÉMINATION 133prévoyants de la nature. Le lancement à l'eau se fait,si possible, en avril ou en mai1La dissémination , suivait qu'il s'agit d'œufs fécondésou d'alevins en état de se suffire par euxmêmes,peut former le troisième ou le cinquième tempsde la pisculture artificielle. Dansla pisciculture industrielle,on abandonne l'alevin à lui-même des qu'il estde taille et de force à trouver sa nourriture. Cependant,l'alimentationartificiellependant le jeuneâge retarde le développementde cet instinctet rend les a le vinsparesseux; au bout de peu dejours, pourtant, la plupartobéissentà la loi denécessité et deviennentindustrieux.Il s'agit donc detransporterles jeunespoissonsdu bassin d'élevage dansles eaux auxquelles ilssont destinés. On peut se servir de grands bocaux(fig. U>) d'une capacité' de plusieurs litres, à la seulecondition d'en renouveler l'eau souvent. Ces bocauxsont ordinairement installés dans des paniers à compartiments(fig. 17}. Pour l'alevin de Carpes (feuille oupose d'un an) on emploie simplement des tonneauxpercés, sur un point de leur circonférence, d'un trou1Koltz, Traité de Pisciculture prat., 4° édition, p. 1Ï7-14S.A. GOBIN, Pisciculture.


134 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEcarré de 0 m ,25; on place ces tonneaux, de roule, surune voiture; on les remplit d'eau aux deux tiers; ony met l'alevin, et l'on ferme l'ouverture avec un tamponde paille. Pendant le trajet, à des distances kilométriquesou à des intervalles de temps variablessuivant la saison, la température et la pression atmosphérique,mais qui ne sauraient jamais être tropFIG. 47. — Panier à compartiments destiné à recevoir les bocauxdetransport.courts, on change l'eau, ou bien, au moyen d'un souffletdont la tuyère est coiffée d'un tube en caoutchoucq\ie l'on introduit par l'ouverture supérieure jusqu'aufond, on insuffle de l'air, afin de réoxygénerl'eau.Pour les alevins, plus délicats, de Salmonidés, on faitusage d'appareils très divers. L'appareil de Bienner,l'un desmeilleurs, se compose d'un cylindre horizontal


DISSÉMINATION 135en tôle, de 0 r a ,60 à l m .30 de long sur 0-.35 à 0 m ,60 dediamètre, dont la partie supérieure porte un couvercleà charnières. Il présente un double fond formant réservoird'air ; les deux extrémités du cylindre sontformées d'une double cloison dans laquelle on peut,aubesoin, déposer de la glace. A la partie supérieure, estadaptée une petite pompe composée d'une boulecreuseen caoutchouc munie de deux ouvertures diamétralementopposées. Lorsqu'on bouche l'un de ces trousavec le doigt et que l'on presse alternativement sur laboule, elle envoie de l'air dans le faux fond d'où ils'échappe dans l'eau à travers de petites ouvertures.La boîte a dû être remplie, jusqu'aux deux tiers, avecde l'eau du bassin d'élevage et on y a déposé l'alevinà jeun depuis vingt-quatre heures. Si la températuredel'eau n'est qu'à + 4°c, on peut mettre mille alevins detrois mois, par 25 litres d'eau ; si elle est à + 6°, iln'en faut mettre que sept cents; à + de 8°, on n'endoit placer que cinq cents. Pendant le trajet, on aèrel'eau de temps en temps. A l'arrivée, on place le cylindredans l'eau que doivent désormais habiter les poissons,jusqu'à ce que son contenu soit mis en équilibrede température et on accélère ce moment en ajoutant,par petites quantités, de cette eau à celle du cylindre.Plus les poissons sont jeunes, à partir de la résorptionde la vésicule ombilicale, et plus leur transport estfacile. C'est en automne et au printemps qu'il est lemoinsdangereux.Lorsqu'on opère, en vue de peupler ou repeupler deseaux situées à une notable altitude, il est plus logiquede faire l'incubation et l'élevage sur place ; de m ê m e ,


136 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLElorsque la colonisation doit se faire à de grandes distances.Dans ces deux cas, ce sont les œufs fécondésque l'on transporte, ils sont doués d'une grande vitalitéet résistent bien à de longs parcours, lorsqu'ilssont traités avec soin ; enfin, leur transport est plusfacile et moins coûteux que celui de l'alevin. On peutchoisir, soit des œufs qui viennent d'être fécondéset qui devront être parvenus à destination avant lecinquième jour qui suit la fécondation, soit des œufse m b r y o n n é s parvenus à cette phase de développementFIG. 48.— Cadre pour le transport des œufs.où le corps est à peu près formé et les yeux s'aperçoiventdistinctement à travers la coque. Les œufs récemmentfécondés peuvent être placés, pour de courtstransports, entre deux toiles grossières et mouillées,tendues sur un simple cadre de bois blanc articulé etdont une partie se replie sur l'autre (fig. 48 et 49). Onles emballe, les uns ou les autres, dans des boîtesplates, en les éparpillant entre deux lits de moussehumide que l'on tasse assez pour éviter le ballottement.Ces boîtes sont chacune placée dans une seconde


DISSÉMINATION 137un pou plus grande, avec de la mousse sèche si Toncraint la gelée, humide si l'on redoute la chaleur.Ainsi emballés, les œufs peuvent supporter jusqu'àquinze jours de voyage. A l'arrivée, on place les boîtesdans le local à incubation et après quelques heures derepos, on les immerge dans les appareils jusqu'à ceque leur contenu ait pris la température de l'eau; onles ouvre alors, on les renverse doucement et on laveles œufs que l'on distribue et dispose dans les appareils.Quant aux œufs adhérents, on emballe les parcellesFia. 49. — Cadre pour le transport desœufs.de frayères qui les supportent dans des linges mouilléset on les place en boites ou en paniers, sur un litépais de plantes humides. Leur incubation étant d'uneplus courte durée, ils ne peuvent supporter sans dangersque des voyages plus restreints; d'autant plusque la ponte et la fécondation s'opèrent dans une saisonplus chaude. En cas de colonisation éloignée, il fautplacer les boîtes qui les contiennent dans une secondeboîte et placer, dans l'intervalle, de la glace pilée : letout est enfin protégé par un emballage en pailletresséeetserrée.


138 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLELe transport des alevins peut s'opérer dans des vasesde toutes formes (cylindriques et horizontales, cylindriqueset v ertica\es,coniques avec base inférieure,etc),pourvu que ces récipients répondent aux conditionssuivantes : 1" permettre l'accès de l'air à la surfacede l'eau, sans que celle-ci puisse être projetée audehorsparles chocs; 2° être pourvus d'un mode facile derenouvellement de l'air (soufflet, pompe à air, etc.)(fig. 50, 51, et 52).FIG. 50-51. — Vases pour le transport de l'alevin.Quant au transport des adultes, considérés commereproducteurs, c'est une opération rare dans la pratique,parce qu'elle est rarement nécessaire et qu'il estplus simple de faire voyager les œufs; parce qu'elle estcoûteuse, et enfin parce quelle est difficile. On place leou les poissons dans un récipient proportionné à leurtaille, m u n i d'un robinet près de son fond, et d'uneétroite ouverture supérieure, et on renouvelle l'eauaussi f r é q u e m m e n t que possible. L a Carpe et l'Anguille


DISSÉMINATION 139peuvent accomplir d'assez longs trajets, à la seule conditiond'être entourées de mousse humide et d'interposersous les ouïes de la première une rondelle depomme, afin d'en empêcher l'adhérence qui produiraitl'asphyxie.Sans être,à proprement dire sédentaires, les Cyprinsse cantonnent dans un cours d'eau et voyagent peu ;il faut donc repeupler, de distance en distance, et surtoute la longueur de la rivière. Les Salmones, au contraire,étant migrateurs et revenant, à 1 âge adulte,pondre à l'endroit ou ilssont nés, c'est-à-direversles sources, puis redescendantet quelques-unsm ê m e jusqu'à la mer, c'estprès des sources, auxtêtesde bassins, dans la partiesupérieure des affluents,qu'il faut déposerl'alevinderepeuplement.Pour le transportd'œufsà une distanceconsidérable,par exemple d'Amériqueen Europe, on sesert d'appareils disposésFIG. 52. — Vase pour le transportdel'alevin.de telle sorte que l'éclosionsoit retardée. A ceteffet, les œufs sont constamment arrosés par de l'eauayant la température de la glace en fusion. Ces appareilsà glace (fig. 53), retardant l'éclosion des œufs,sont employés dans quelques établissements de pisci-


140 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEculture. Il peut, en effet, y avoir intérêt à retardercette éclosion, par exemple pour pouvoir se pro-FIG. 53. — Appareil à glace pour retarder PéclosionTdes œufs.Eis, Glace; Eier, œufs; Schmelzwasser, eau de fusion.curer plus facilement la nourriture nécessaire auxalevins.§ 7. — CASTRATIONDe même que pour le bœuf, le mouton, le porc, lavolaille domestiques, la castration des poissons a pourbut de soustraire les individus aux pertes et aux fatiguesde la reproduction, de favoriser en eux la productionde la chair, et enfin d'obtenir celle-ci de qualitésupérieure. Une Carpe castrée serait l'analogue du


CASTRATION 141chapon ou fie la poularde et peut-être les fameux carpeauxdu Rhin doivent-ils la finesse de leur chair àleur impossibilité de sereproduire.La castration des poissons était déjà pratiquée enAngleterre, dans la première moitié du x v m e siècle,par un marchand de poissons n o m m é Samuel Tull,quid'abord fabricant de filets, était parvenu à une certaineaisance, en élevant et engraissant des poissons.Il opéra en présence de M . le chevalier Ilans Sloanequi communiqua ce fait à l'Académie des Sciences(l 742).M . Le Baron delà Tour d'Aiguës fit expérimenter cettepratique, et voici ce qu'il en dit, dans une lettreadressée à Duhamel du Monceau * :Il est très vrai que j'ai essayé la castration des poissons;rien n'est plus aisé et cette opération n'est pasplus difficile sur ces animaux et peut-être moins dangereuseque sur tous les autres. Car je puis vous assurerque sur plus de 200 carpes que j'ai fait opérer iln'en est pas mort quatre. Voici le détail del'opération :Il faut être muni de deux bistouris, un recourbé etcou pant par sa partie convexe, et un droit ; ce dernierdoitêtre terminé par un bouton réservé à la pointe; enoutre, d'un stylet ou fil d'argent assez fort, terminé àun de ses bouts par un petit bouton, et à cette extrémité,il doit former un petit crochet.


142 LA PISCICULTURE ARTIFICIELLEavec plus de facilités sur les carpes mâles que sur lesfemelles, parce que les vaisseaux spermatiques sontplus en état de résister.


C A S T R A T I O N 143plus promptement aux poissons qu'aux autres animaux.C'est, autant que je puis m'en souvenir, l'opérationallemande que je viens de décrire ; j'ai aussiessayé l'opération anglaise dont il est parlé dans lesmémoires de l'Académie, et j'ai eu des succès. Ellese fait en ouvrant le ventre du poisson par le côté,mais on ne peut pas si bien distinguer les trois conduits;de plus, à celle-ci, il serait difficile de recoudrela plaie ; c'est pourquoi ils se contentent d'introduiredans la plaie un morceau de feutre, pour empêcherl'eau d'entrer dans la capacité de l'abdomen.Voilà toute l'opération et, pouvu qu on parvienneà ne pas endommager le conduit de l'urine, on peutêtre assuré que le poisson guérira promptement; ilfaut rarement plus de trois semaines pour que laplaie soit bien cicatrisée, ce que j'ai r e m a r q u é dansceux que j'ai conservés ce temps en réservoir. -Les procédés de castration employés pour les animauxdos classes supérieures consistent, soit à enleverles organes de la reproduction (testicules, ovaires),soit à les mettre dans l'impossibilité de fonctionner(martelage torsion du cordon) ; ici on se contenteraitd'opérer une solution de continuité dans les canauxspermatiques du mâle (canaux déférents) et dans lesoviducfes de la femelle. Le testicule et l'ovaire sontils,par cela seul, mis hors d'état de fonctionner etse résorbent-ils plus ou moins complètement? celaest douteux, quoique possible. En tous cas, M. Puvis'i PUA IS, Des Étangs, p. 7ô, 1*20 a 129.


i U LA PISCICULTURE ARTIFICIELLErecommandait de pratiquer cette opération sur lesCarpes, Tanches, Brochets, Perches, etc. M . J . Carpentierdit avoir connu des éleveurs qui pratiquaient lacastration sur les Carpes pour les engraisser plusvite en les nourrissant de débris de pain, de haricots,de lentilles, de légumes cuits et de fruits avariés *.§ 8. — AVENIR DE LA PISCICULTUREToutes les opérations de la pisciculture artificielle,sont, on le voit, d'une grande simplicité; mais ellesne réussissent qu'à la condition d'une exactitude méticuleuse,d'une surveillance incessante, d'une adaptationrationnelle. Il en est à peu près ainsi pour toutesles industries qui s'exercent sur les êtres organisés,la magnanerie et les vers à soie, la basse-cour et lavolaille, les plantes de serre froide, tempérée ouchaude.Quant aux appareils et instruments, ils peuventêtre tous excellents ou défectueux, car ils ne valentque par celui qui les emploie, son intelligence, sonexactitude, son aptitude en un mot.Nous n'avons d'ailleurs parlé que de ceux qui peuvententrer dans la pratique industrielle. Les rigolesd'éclosion à courant factice continu, les piscines, lesaquariums sont des instruments d'étude scientifiqueet leur place se trouve daus les laboratoires où ilsont rendu et rendront encore de précieux services.1Carpenlier, La Pêche rationnée, p. 131. Paris, 1879.


AVENIR DE LA PISCICULTURE I i5L'industrie doit procéder plus simplement, plus économiquement; il faut la débarasser de tout ce qui peutla compliquer et baser ses pratiques sur l'applicationet l'observation des lois de la nature.On se rappelle sans doute que, de 1850 k 1864 environ,régna en France un indescriptible enthousiasmepour la pisciculture, sous l'impulsion de M M . le D rIlaxo, Milne Edwards, et surtout de M . Coste. L'établissementd'IIuningue fut fondé et on se disputaitvivement les œufs e m b r y o n n é s qu'il distribuait gratuitement; sur tous les points de la France, on tentale repeuplement des fleuves, rivières, canaux, ruisseauxet lacs, en Saumons, Truites, Ombles ; on introduisitparfois des espèces étrangères; on dépensa ainsibeaucoup d'efforts, de temps et d'argent. Puis, ce belenthousiasme disparut comme il était né. C'est qu'onn'avait oublié que deux points : multiplier dans lam ê m e proportion les poissons blancs qui devaient servirk l'alimentation de ceux qu'on voulait produire,après avoir détruit les poissons de proie qui pouvaientdétruire les nouveaux-venus ou tout au moins leurfaire concurrence; enfin, organiser une surveillanceefficiente pour assurer aux pisciculteurs la récolte deleurs produits, la récompense de leurs efforts. Pouravoir procédé illogiquement, on avait travailléimproductivement.Sur cent alevins éclos, quarante peutêtremouraient de faim ou étaient dévorés par lesPerches ou les Brochets, cinquante-cinq étaient volésdès qu'ils étaient comestibles et vendables, par lesbraconniers et maraudeurs, cinq à peine parvenaientk une fin légale. Dans la Seine-Inférieure, M . de Fol-A. GoniN, PisniMillure.


146 LA. PISCICULTURE ARTIFICIELLEleville s'occupe, depuis 1856, avec le plus grand zèle,du réempoissonnement de la rivière de la Saanne ; de1868 à 1878 notamment, il y a versé quatre cent vingtet un mille alevins de Truites ; le résultat obtenu neparait pas avoir été proportionné à ses soins 1 . Onpourrait constater le m ê m e résultat dans la plupartde nos cours d eau.Plus r é c e m m e n t encore, n'avons-nous pas v u l'administrationde l'agriculture organiser l'enseignementpiscicole et en m ê m e temps, avec une dépense totalede 4,500 francs, jeter dans nos cours d'eau plus dequatre cent mille alevins de Salmonidés. Qu'en adviendra-t-il,si on ne les préserve des braconniers derivières ?Il ne faut donc pas s'étonner si la pisciculture, abandonnantles eaux du domaine public s'était réfugiéedans les eaux fermées, c'est-à-dire dans les lacs etétangs. I l est vrai qu'elle avait fait des progrès asseznotables, notamment dans les départements du Puyde-Dôme,de l'Isère, de la Somme, l'Ariège, de Seineet-Marne,etc. Par ailleurs on a peut-être inconsidéré m e n t desséché de nombreux étangs pour les livrerà une agriculture déjà trop riche en superficie, parcequelle est trop pauvre en capitaux. Des étangs convenablementorganisés et bien administrés sont moinsdommageables à l'hygiène publique que nombre deprés m a r é c a g e u x et peuvent fournir un produit netégal à celui des meilleures terres.Le prix de la viande de boucherie tend sans cesse1L. Vaillant, Rapport offxc. sur VExposition univers., 1878.


A V K M H DK LA PlSCïcrLTTRKà s'élever ; la chair des poissons peut lui former unappoint ou un supplément. Dans chacune de ces catégories,il y a les viandes de luxe d'un prix élevé (filetde bœuf, gigot de mouton. Omble, Truite, Lamproie,Lotte, etc.) ; puis celles de consommation ordinaire(culotte de bœuf, côtelettes de mouton. Brochet, A n ­guille. Carpe, Tanche, Perche, etc. : et enfin cellesde qualité inférieure et à plus bas prix (le collier debœuf, le carré de mouton, le poisson blanc). Certes ledéveloppement de la pisciculture ne fera point baisserle prix de la viande de boucherie, mais il contribueraà l'empêcher de monter aussi rapidement.Dans une période de civilisation comme celle où noussommes parvenus, toute chute d'eau, si faible qu'ellesoit, devrait et pourrait être utilisée comme force motrice;tout cours d'eau, toute surface en eau devraitnourrir le m a x i m u m d'habitants aquatiques et comestiblesle mieux appropriés. Aucun des moyens indispensablesU l'obtention de ce résultat n'est à créer : ilsuffirait d'étudier et d'adopter ce qui s'est fait en A n ­gleterre, en Suisse, sur certains points de l'Allemagneet surtout aux États-Unis. Réviser la législation denos cours d'eau au point de vue de leur propriété, desintérêts combinés de l'industrie, de l'agriculture et dela pisciculture ; réviser les règlements sur la policedes cours d'eau et sur la pêche et pourvoir surtout àleur surveillance et à leur exécution ; favoriser etréglementer la constitution de syndicats communauxou privés, etc.


C H A P I T R E VL'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERS»§ 1 e r — POISSONS D ' É T A N G SLes poissons le plus généralement élevés dans lesétangs sont les Cyprins (Carpe, Tanche, Brème) laPerche, le Brochet, l'Anguille et quelquefois certainsSalmones (Truite, Corégone). Étudions donc successivementces diverses espèces :1° CYPRINIDES. — Ils sont zoologiquement caracté-.risés par leurs mâchoires dépourvues de dents ; leursouïes soutenues seulement par trois rayons plats;une seule nageoire dorsale ; les écailles généralementgrandes; une langue lisse; un palais revêtu d'unesubstance épaisse et molle, désignée sous le nom delangue de Carpe ; un pharynx garni de dents trèslarges ; un intestin court et sans c œ c u m pylorique ;unevessie natatoire à deux ou trois lobes. Ils habitentgénéralement les eaux douces, ont des m œ u r s sédentaires,se cantonnent dans des espaces à rayon assezrestreint, n'émigrent pas et frayent sur place. Ilsvivent presque tous de v é g é t a u x et de graines, d'insecteset de très petits poissons, quelques-uns m ê m edelimon.


nombreux, mais ceux d'étangs ou d'eaux stagnantes


150 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSse réduisent à la Carpe, la Tanche, la Brème et laLoched % étang.A. Carpe, Cyprinus Carpio (fig. 53). — Indigène dela Perse et de l'Asie Mineure, elle est acclimatée et naturaliséeen France depuis dix-huit siècles au moins.Elle habite la plupart de nos rivières (Rhin, Rhône.Seine, Loire, Moselle, Saône, Doubs, etc.) ; quelqueslacs de la Suisse (de Genève, de Constance, etc.) etestsurtoutmultipliéedans les étangs. Sa taille moyenneFIG. 54. — La Carpe Gibèle.est de 0,30 à 0 m ,35 de longueur sur 0 m 08 à 0*40 dehauteur; mais elle peut atteindre jusqu'à l m ,10 de longet aux poids de 12 à 14 et m ê m e jusqu'à 30 kilog.Les uns regardent comme des variétés de la Carpecommune, les autres comme des espèces distinctes :La Reine des Carpes ou Carpe jaune, Carpio rexcyprinorum, très belle et d'un développement trèsrapide ;


POISSONS D ' É T A N O S 131La Carpe cuir ou à miroir {Cyprinus Carpio nudus)qui manque d écailles sur tout ou partie du corps1:mais on est assez généralement d'accord pour considérercomme espècesdistinctes:La Carpe Gibèleou bossue (Cyprinus Gibelio) {fig.54)qui n'a pas de barbillons et porte la caudale taillée enFIG. 55. — Le Carassin.croissant; elle vit volontiers dans les marais et lestourbières ;La Carpe Polonaise ou Carassin (Cyprinus Carassius)(fig. 55). privée de barbillons aussi, à caudale coupéecarrément, naturalisée en Lorraine et qui résiste bien1Block et Nicklas la regardent comme n'étant que l'hybride facileà obtenir de la Carpe commune avec la Tanche vulgaire,


133 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSidans les pays froids et les étangs vaseux ; elle est trèsrustique et peut se contenter des plus petites mares ;mais elle ne dépasse guère 0 m , 25 à 0 m ,30 de longueur ;La Carpe Carreau ou de Kollar (Cyprinus Kollctrii),à barbillons très courts, est considérée cojnme unhybride de la Carpe commune et du Carassin.Quant au Carpeau que l'on pêche dans le Rhin, leRhône, la Saône, le Lay, la Sèvre Niortaise, etc., deformes plus courtes et ramassées que la Carpe et atteignantde grandes dimensions, on ignore s'il est unevariété ou doit constituer une espèce spéciale.L a Carpe fraye en troupes, de mai en août, alorsque l'eau atteint une température moyenne de 20 à22° C.L a femelle renferme, en moyenne, 100,000 œufs parlivre de son poids total. Ces œufs sont petits, verdâtreset s'agglutinent dans la ponte. Leur éclosionse produit après six à huit jours d'incubation dansune eau à -f- 20 à + 25° C ; à celle de + 18 à + 20°,on aperçoit déjà l'embryon au quatrième jour et l'éclosiona lieu du huitième au dixième. Elle est fécondede trois à quinze ans. D'après M . Biener, la Carpefrayerait deux fois par an dans le lac de Constance ;dans les eaux chaudes d'un réservoir d'Anzin-les-Mines,la fraye, d'après M . Sapin, seraitcontinuelle. L'adultepeut vivre durant un assez long temps, hors de l'eau,enveloppée dans un linge ou de la mousse humides,pourvu que l'on tienne les opercules ou ouïes légèrementsoulevées, au moyen d'un mince disque depomme. La Carpe est exposée à plusieurs maladies : la* Chabot-Karlen, Calend. du piscic, p.


POISSONS D'ÉTANGS 153mousse, due à des végétaux cryptogamiques qui sedéveloppent sur plusieurs parties du corps, fonttomberles écailles et a m è n e n t la mort ; diverses maladies depeau l'envahissent aussi, dans les eaux ombragées oùon la place'en trop grand nombre, etc.B. Tanche (Cyprinus Tinca) (fig. 56). — Elle habiteles eaux courantes, mais se plaît particulièrementdans les lacs et étangs à fonds herbus et vaseux. Sataille moyenne est de 0 m ,15 à 0 m ,20 de longueur ; elledépasse rarement 0 m ,50; son poids moyen de 0 kil. 400,peut atteindre à 3 et m ê m e 4 kil.Elle fraye en bandes de mai à juillet, dès quela températuremoyenne de l'eau est parvenue à 18 ou 20° C.La femelle renferme, en moyenne, 175,000 œufs parlivre de poids total. Ces œufs, plus petits que ceux dela Carpe, verdàtres et agglutinés comme eux, éclosentaprès six o u sept jours d'incubation à 20 ou 22° C.L'adulte vit presque aussi longtemps que la carpe,hors de l'eau.C. B r è m e (Cyprinus Brama)(f\g. 57). — Elle habitela plupart des rivières et des lacs d'Europe où lecourant n'est point trop vif et dont le fond est vaseuxet herbu. C'est, comme la Carpe et la Tanche, unpoisson d'étang. Sa taille moyenne est de 0 m , 3 5 à 0 r a ,40de long et son poids moyen de 0 kil. 700 à 0 kil. 900 ;Elle peut atteindre jusqu'à 0 œ ,60 de long et 3 kilog. depoids.Elle fraye en bandes et en trois périodes ; les plusgrosses d'abord ou les plus âgées, les plus petites oules plus jeunes en dernier lieu. Les œufs collants, sontdu diamètre d'une forte tête d'épingle et de couleur


154 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSgris verdàtre ; la femelle les dépose sur les roseaux etautres plantes de rives ; ils éclosent après huit à dixjours, à 18 ou 20° C.


P O I S S O N SD ' É T A N G SLa B r è m e Bordelière (Cyprinus Blicca) que Tonrencontre dans la plupart des rivières et lacs de l'Europeet particulièrement de la Savoie, a les m ê m e sm œ u r s , mais n'atteint qu'une taille plus faible.D. L o c h e d ' é t a n g (Cobilis fossilis). — C'est encoreun poisson des fonds vaseux (étangs, canaux). Elle a enmoyenne, 0 m ,30 à 0 m ,35 de longueur. Elle se tient dansla vase, m ê m e pendant le dessèchement et la gelée.« Elle avale sans cesse, dit Cuvier, de l'air qu'elle rendFia. 57. — La Brèmecommune.par l'anus, après l'avoir changé en acide carbonique,selon la belle observation de M . Ehrmann. » Elle portesix barbillons, dont quatre à la mâchoire inférieure etdeux à la supérieure.Elle fraye au printemps (avril,mai) ; ses œufs sontcollants,verdàtres et de grosseur moyenne; la femellelesdépose sur les plantes aquatiques ; mais M . Carbonnierpense qu'elle fraye sur le fond, près du canal d'amenéedes eaux, là pù le courant dépose un peu de gravier»


J56 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERS2° PERCOIDES.— Ils sont caractérisés par : des écaillesgénéralement dures ou âpres ; les ouïesbien fendues etsoutenues par cinq à sept rayons; la bouche grande;des dents, non seulement aux mâchoires, mais encoresur le vomer, presque toujours sur les palatins, surles arcs branchiaux et sur les pharyngiens ; les nageoirestoujours au nombre de sept ou huit, suivantqu'il y a une ou deux dorsales.Perche c o m m u n e (Perça fluviatilis). — C'est laseule espèce que nous fournisse cette famille ; on larencontre dans la plupart de nos rivières et des lacseton la place parfois, en petit nombre, dans les étangs.Elle se nourrit d'insectes, de frai de poissons et de petitspoissons. Sa taille moyenne est de 0 m ,30 à 0 m ,35 delong ; son poids moyen deO kil. 800 à 1 kil. 250; ellepeut atteindre jusqu'à 0 m ,50 de long et 5 kilog. depoids.Elle est très prolifique, fraye en avril-juin, dans lesendroits profonds; ses œufs sont petits, très durs,agglutinés en chapelets de 2 à 3 mètres de long ets'attachent aux racines, branches, herbes aquatiqueset flottent dans le courant ; ils éclosent huit à quatorzejours plustard.La Perche goujonnière, Perche bâtarde ou Grémille(Acerina cernua) habite la Seine, la Moselle, laMeuse, etc. et leurs affluents. Elle fraye enmars-mai,sur les pierres du fond. Sa taille moyenne est de 0 m ,20à 0 m ,25 de long sur 0, m 05 à 0, m 06 de haut. Elle est peuestiméedans la consommation.3° ESOCES. — Ils ont pour caractères distinctifs : lesmâchoires garnies de fortes dents ; les ouïes très lar-


P O I S S O N S D ' É T A N G S 157gement ouvertes; sept nageoires dont une dorsale placéeimmédiatement au-dessus de l'anale; les intestinscourts et sans co»cum pylorique; une vessie natatoire.Brochet c o m m u n [Km.r lurins). — C'est la seuleespèce que nous offre cette famille. Ce poisson de proiehabite à peu près toutes les eaux de la France et del'Europe, fleuves, rivières,ruisseaux, lacs, étangs,eauxcourantesou stagnantes, froides ou chaudes. Il estd'uneextrême voracité et il est a r m é d'une façon redoutable.Sa taille moyenne est d'environ 0 n \ 45 à 0 m ,50, de longet son poids de 2 kil à 2 kil 500; il peut atteindre jusqu'àl m ,40 de long et 40 kil. de poids. La femellefraye en février-avril et pond de 40 à 45.000 œufscollants, petits, transparents, d'un rouge verdàtre, soitsur le fond de sable, soit sur les plantes immergéesdans les eauxtranquilles et peu profondes ; ils éclosentde 8 à 12 jours après. Le Brochet se reproduit m ê m eenaquarium.4° M U R K N O Ï D E S . — Cette famille est reconnaissable àun corps cylindrique, long et grêle: à des écaillescomme encroûtées dans une peau épaisse et commehuileuse ; les ouïes petites, ouvertes en un seul trouplacé sous les nageoires pectorales ; point de c œ c u mpylorique, l'anus situé assez loin en arrière du corps.Cette famille nous fournit:A n g u i l l e commune ( M w u v n a rulgaris). — Ellehabiteà peu près toutes les eaux douces de France, de l'Europe,(excepté peut-être les affluents des mers Noireet d'Azof), on pourrait presque dire du globe. Sa taillemoyenne est de0 m ,50 à 0 m ,80 de long; son poids est de0 kil. 750 à 1 kil. 250 ; elle peut atteindre jusqu'à


158 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSl m ,50 de longueuret4 à 5 kilog. de poids. Elle vit d'insectes,de vers, de limaces, de frai de poisson, de petitspoissons, de grenouilles, d'écrevisses, de matières animalesen décomposition.Les pêcheursen distinguent quatre variétés : le Pimperneau(M. latirostris) ,\e Verniau (M.platycephala) y\eLong-bec (A/", acutirostris), et le Plat-bec ( M .allirostris).On ne sait rien d'absolument précis sur le mode dereproduction de l'Anguille; on p r é s u m e que toutescelles que l'on rencontre dans les eaux douces sontdes femelles dont les œufs, très nombreux (huit à dixmillions pour une femelle de taille moyenne) restentà l'état microscopique et ne peuvent se développer quelorsque l'animal a atteint sept à huit ans et est descendu,en septembre, soit à la mer, soit du moins,dans les embouchures maritimes. Le mâle vivrait exclusivementdans les eaux salées, on n'en trouveraitjamais en eau douce. Les femelles, pelotonnées engroupes, descendraient à la mer, en octobre et novembre; il y aurait accouplement par entrelacement ;la reproduction serait ovovivipare ou vivipare. Cequ'ily a de certain, c'est qu'au printemps (mars, avril), lesjeunes, que l'on appelle feuille ou montée, se présententen légions innombrables aux embouchures des fleuveset des rivières dont ils remontent le cours, d'affluentsen affluents, jusque dans les ruisseaux, les étangs etles lacs les plus élevés. Ces anguillettes, au momentoù elles apparaissent, ont l'aspect de fils gélatineuxdu diamètre d'une épingleà cheveux et d'une longueurde 0 m ,06 à 0 m ,07. Rien n'est plus facile que d'en recueillirà discrétion, aux embouchures de la Seine, de


CRÉATION D V N ÉTANGla Loire, de la Somme, de l'Orne, de la Charente, etc.L'Anguille femelle, après avoir frayé, disparait, soitqu'elle meure, soit qu'elle vive désormais en eauxsalées.L'Anguille vit surtout au fond, dans la vase ; mais.la nuit, elle émigré parfois, par terre, en rampant,pour aller à d'assez grandes distances, chercher deseaux préférées. L a disposition de son appareil respiratoirelui permet, en effet, de vivre longtemps horsdel'eau.5° S A L M O N E S . — Nous nous en occuperons spécialementun peu plus tard; citons seulement ici commepouvant vivre en étangs à eaux fraîches, pures, renouvelées,c'est-à-dire placés dans les m ê m e s conditionsque les lacs: la Truite commune et les Corégones Lavaret.Fera, Grande Marène, Palée, etc.S 2. — CRÉATION D'UN ÉTANGLes étangs sont des lacs artificiels, des amas d'eauplus ou moins considérables formés dans une dépressionde terrain, au moyen d'une levée ou chausséefaite de main d'hommes. Dans une vallée plus ou moinslarge et profonde, à pentes plus ou moins prononcées,traversée par un cours d'eau plus ou moins considérable,on établit un barrage en terre destiné à retenirl'eau, tout en lui m é n a g e a n t un passage en cas debesoin, ce qui exige certaines dispositions que nouspasserons brièvement en revue.L a vallée que l'on veut barrer pour y créer un


160 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSétang doit présenter une pente minima de 0,02 à0 m 04par m è t r e pour une longueur de 500 à 1000 mètres.Il va sans dire que cette vallée doit présenter deuxversants assez semblables vers son thalweg et, autantque faire se pourra, un resserrement,en aval, au pointoù l'on veut établir le barrage ; qu'enfin, le sol en seraimperméable (argileux argilo-siliceux , argilo-calcaire)et aussi le sous-sol. Lorsque c'est un petit coursd'eau qui alimentera le futur étang, il faudra avoirsoin de le munir de griltes, afin d'empêcher le poissond'en remonter le cours.L'extrémité d'amont, celle supérieure par laquellearrivent les eaux, s'appelle la queue. Dans le thalwegil faut ouvrir un chenal ou fossé cheminant d'un canald'amenée des eaux à la bonde ou vanne, c'est-à-diretraversant toute la longueur de l'étang; mais àquelques mètres avant d'arriver à la chaussée, ce biefs'élargit de façon à former un bassin ou réservoirauquel on donne le nom de poêle ou pêcherie ; cettepoêle doit être pavée à pierres sèches ou dallée deplanches ou enfin recouverte de 0 m ,20 à 0 m ,30 de sableou de gravier ; son fond doit être plus bas de 0 m ,50au moins que le reste de l'étang ; dans le sol de celuici,on pratique en outre un certain nombre de petitsfossés rayonnant vers la poêle, dans le but d'y amenerl'eau et les poissons au moment de la mise en pêche,La largeur du bief, le rayon de la poêle1serontproportionnésà l'importance du cours d'eau et à la su-1Environ 10 mètres carrés par hectare de superficie, de 1 à 10 hectares; 20 mètres carrés par hectare, de 10 à 20 hectares; 40 mètrescarrés par hectare pour un étang de 20 à 30 hectares ; etc.


CRÉATION î) T'N ÉTANG 161perfide de l'étang. La poêle se vide par un canal defuite qui traverse la chaussée et qui s'ouvre ou seferme à laide d'une bonde Pour que le poisson soitabrité du froid pendant l'hiver, du dèssèchementpendant l'été, il est indispensable que 1 étang offre,vers la chaussée, et sur une étendue plus ou moinsconsidérable, une hauteur d'eau d'au moins 3 m è t r e s ;C'est là que se réfugie le poisson contre le froid, lachaleur ou la baisse deseaux.L a chaussée, digue ou barrage est le plus souventtotalement ou partiellement construite avec lesterresprovenant du creusement de la poêle. Il ne fautl'établir que sur un sol naturellement ou artificiellementimperméable à l'eau, avec des terres imperméableset non mélangées de pierres. Sa largeur seraproportionnée à sa hauteur et à sa longueur, c'est-àdireau poids des eaux qu'elle aura à supporter ; sa •largeur à la base sera au moins triple de sa hauteur ;sa largeur au sommet, égale à cette m ê m e hauteur :son sommet doit s'élever de 0 r a ,50 au moins au-dessusdu niveau des plus hautes eaux ; du coté d'amont versl'eau, le talus aura 3 , n de base pour un de hauteur; enaval, du côté extérieur à l'étang, le talus aura 1 àr n ,;>° de base pour un de hauteur. Dans les vastesétangs, on protège le talus d'amont de la chausséecontre les vagues, soit par un revêtement en mottesde gazon, soit par des clayonnages, soit mieux encorepar un perré en pierres sèches. On peut encore, dansle m ê m e but, planter des saules nains ou en buisson,mais jamais d'arbres à haute tige qui, secoués par levent, ébranleraient les terres et prépareraient des


162 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSéboulements et des fuites. Vers l'une des extrémitésde la chaussée ou à chacune d'elles, on établit uneéchançrure pavée, dallée ou cimentée, qui servira dedéchargeoir ou déversoir pour l'évacuation des eauxsurabondantes; ce déversoir est muni, en amont,d'un gril destiné à empêcher la fuite du poison.La chaussée est traversé par deux canaux maçonnéspourvus chacun d'une bonde ; l'ensemble de cet appareild'évacuation s'appelle un thou. Une première bondeferme un premier canal voûté qui, en amont, affleurele fond de l'étang, et débouche en aval, en formantune chute d'environ 0 r a ,50. Une seconde bonde fermeun second canal également voûté qui, en amontaffleure le fond de la poêle et, en aval, le niveaumoyen du fossé d'évacuation. A son origine dansl'étang, chacun de ces canaux est couvert d'une dallede pierre percée d'un trou conique qui s'ouvre ou seferme au moyen d'un bouchon de bois ou bonde conique;ce bouchon, traversé par une tige verticale enbois ou en fer monte ou descend dans le cadre qui lemaintient pour ouvrir ou fermer plus ou moins complètementle trou percé dans la dalle. Le diamètre desbondes ne doit pas dépasser 0 m ,50 pour une m a n œ u v r efacile: si une ne suffit pas, on en établit deux au plus.Ces bondes permettent de se débarrasser plus rapidementdes eaux, à la suite des grandes pluies ou lorsqu'onse prépare à la pêche.On calcule, en général, que la dépense de créationd'un étang coûte de 100 à 400 francs par hectare, suivantsa superficie et la configuration du sol, la dépenseétant inversement proportionnelle à la surface.


EXPLOITATION DES ETANGS A CARPES 163« La valeur d'un étang dépend de la quantité et dela qualité des eaux qui l'alimentent, ainsi que de la naturedu sol sur lequel on l'établit. Si la quantité d'eaudont on dispose est suffisante, il faut en examiner latempérature, la pureté et la composition chimique,qui doivent répondre aux convenances des espèces quel'on veut élever. Il est indispensable, dans tous les cas.que l'eau soit suffisamment aérée pour fournir auxpoissons l'oxygène nécessaire à la respiration. De lanature du sol dépendent les herbes aquatiques qui végéterontdans l'eau, serviront elles-mêmes de pâtureaux poissons, ou produiront les insectes et autresanimalcules nécessaires à leur nourriture. Eau et soldoivent donc, avant tout, être étudiés et analysés.L'eau de rivière est généralement préférable à l'eau desource pour alimenter un é t a n g ; elle est plus aéréeet renferme plus de substances nutritives. U n fondsablonneux produit peu de nourriture pour les poissons,mais elle est excellente ; une marne saturéed'humus est très bonne; la tourbe m ê m e est utilisable,pendant que l'argile compacte et les fonds pierreuxdonnent le plus souvent de mauvais résultats * »^ 3. — EXPLOITATION DES ÉTANGS A CARPESDe tous les poissons connus, c'est la Carpe qui estle plus généralement cultivée en étangs, et ici commedans la plupart des industries bien conduites, on doitappliquer la division du travail ; de m ê m e que pour le\ Gauckler, £es Poissons d'eau douce et la pisciculture, p. 124-125,


164 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSgros et le menu bétail, les uns font naître, les autresélèvent et quelques uns engraissent. Nous distingueronsdonc les étangs à multiplication ou à feuille, les étangsà nourrain ou à empoissonnage, les étangs d'éleVage,enfin, les étangs d'hivernage ou réservoirs d'engraissementet de vente.A. É t a n g s à multiplication, à feuille à pose, ouforcières. — Ces étangs dans lesquels on fait frayer lesCarpes, réclament certaines dispositions particulières :leur profondeur ne doit pas dépasser u n m è t r e ; leursberges doivent être largement exposées au sud ; abattuesen pentes douces et gazonnées; du côté du nord,elles doivent être abritées par u n épais rideaud'arbreset taillées à environ 45° ; la poêle doit être entretenuenettede toute végétation ; enfin, on devra y maintenirl'eau invariablement au m ê m e niveau, surtoutpendantla fraye. Les eaux provenant de sources rapprochées,celles qui descendent des bois, celles qui ont traversédes marais, celles qui résultent de la fonte des neiges,sont particulièrement impropres à l'alimentation decesétangs.< Les reproducteurs sont placés dans l'étang dèsle printemps, afin de se familiariser avec ses dispositions.Pour remplir ces fonctions, on choisit de bellesCarpes du poids de 2 à 3 kilog., à corps allongé et àrobe brillante. Elles ne doivent pas servir plus d'unefois. Pour une surface de 75 ares, on choisit trois femelleset deux mâles adultes ; on y ajoute u n jeunemâle de 3 à 400 grammes, à titre d'excitateur. I I estfacile de distinguer les mâlesdes femelles parla formede l'anus, m ê m e en dehors de l'époque de fraye ; les


EXPLOITATION DES ÉTANGS A CARPES 163femelles ont l'anus convexe et gonflé vers l'extérieur,pendant que les mâles y présentent une concavité.L'expérience prouve qu'un excès de mâles est nuisible,parce qu'ils fatiguent les femelles et peuvent les empêcherde frayer. D'un autre coté, si le nombre desmâles est trop restreint et si l'on prend, par exemple,un mâle pour deux femelles, on obtient un excédentde Carpes femelles moins recherchées pour la consommation1 »La fraye commence dès que la température de l'eauest arrivée à une moyenne de-|-20 o C., elle se prolongependant plusieurs jours et l'éclosion a lieu après uneincubation de cinq à huit jours, suivant la température.Une Carpe de 1 kil. 500 à 2 kil. renferme de 200,000à 250,000 œufs, on compte, en moyenne, sur 2,000 à2,500 feuilles ou alevins par Carpe, soit I à 15 pour milleseulement 2La fraye a lieu, nous l'avons dit, en mai-août. Onpèche l'étang en mars ou avril de l'année suivante ;l'alevin, alors âgé de 11 mois environ, pèse en moyenne,4 à 8 grammes ; on l'appelle Seillée ou feuille de saule,lorsqu'il a de 3 à 5 centimètres de long, et Clou-poinglorsqu'il en a 3 à 8, Petit-Pénard, lorsqu'il en a 1 0 à l 2 .Il ne faut vider l'étang que très lentement, afin de nepas perdre d'alevins. Le plus souvent, on ne pêchel'étang qu'au mois d'octobre et l'alevin a alors environ* Gauckler, p. 139-140.* On met d'ordinalie 10 femelles et 20 màies par hectare d'étang dereproduction.


166 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSquinze mois; il a 16 à 20 centimètres de long (distanceentre œil et bat), pèse de 15 à 20 grammes et s'appelleGrand-Pénard. Dans ce pas, on le dépose dans l'étangàempoissonnage.L'étang à feuille doit être isolé, c'est à dire n'avoiraucune communication avec les autres étangs ni avecles ruisseauxpeuplés, dans la crainte que les Brochets,Perches ou autrescarnivores ne viennent à l'envahir.En effet, le Brochet remonte l'eau courante avec unemerveilleuse agilité et peut exécuter des sauts de plusde 0 m ,50 de hauteur verticale. Après la pêche, il fautlaisser l'étang en assec, jusqu'au printemps suivant,afin d'y détruire les alevins de Perche ou de Brochetqui auraient pu s'y introduire. C'est également en vuede protéger la feuille que l'on éloigne de l'étang les canardset les autres oiseaux aquatiques ; pendant la fraye,on se garde de laisser le bétail pâturer aux alentours,parcequ'il effrayerait le poisson. Enfin, durant l'hiver,il faut, comme sur les autres étangs et plus soigneusementencore, casser la glace et ménager, avec de lapaille ou du fumier, des ouvertures libres.B. É t a n g s à n o u r r a i n o u d'empoissonnage.— Cesont ceux dans lesquels on entrepose la feuille (grandet petit Pénard) jusqu'au jour où devenue Carpetteoupetite Carpe, elle sera mise dans l'étang d'élevage. Lesétangs à nourrain doivent avoir plus de profondeurque les Forcières, (2 m ,50 dans la poêle) et leurs talusseront autant que possible, verticaux, pour rendre lapêche impossible aux oiseauxd'eau.L a superficie comme le cube d'eau doivent être plusconsidérables relativement au nombre des*habitants;


EXPLOITATION DES ETANGS A CARPES 167l'alevin y entre âgé de 11 k 15 mois, long de 6 à 12centimètres, pesant de 10 à 20 grammes ; son poids s'ydécuplera, k peu près, en moyenne, un peu plus ou unpeu moins, suivant la nature et la qualité du fond etdeseaux.Dans les mauvais fonds, on met de 100 à 400 alevinspar hectare; dans les moyens, de 100 k 600; dansles très bons, de 600 k 800. Après un an, il mesurera10 à 16 centimètres et pèsera 100 k 150 grammes; ilaura alors de 23 à 27 mois. Si on y laisse l'alevin pendantdeux ans, il mesurera, à la fin delà seconde année,soit il 36 ou 39 mois, 15 k 20 centimètres et pèsera de\ k 500 grammes. Mais dans ce dernier cas, on auraajouté, avant le dernier hiver, de 15 à 20 kilog. deTanches adultes par mille d'alevins de Carpes et, aumois dé mai, de 16 à 20 Brochetons de la grosseur dudoigt, qui auront vécu de l'alevin des Tanches et pèserontchacun de 1 k 2 kilog. (Gaucker) '


168 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSensemence avec du grand Pénard et Ton récolte de laCarpe; enfin pour ceux exploités à quatre ans, onpeuple de m ô m e et on obtient des Carpes plus grandes.En France, la Carpe marchande doit peser au moins750 grammes; elle est alors âgée de trois à quatre ans.Si Ton doit pécher à deux ans, on met par hectare,500 Carpes de 40 à 50 grammes, 30 Tanches adultesou un seizième et autant de Brochetons ; à trois ans,350 Carpes, 22 Tanches et 22 Brochetons; à quatre ans250 Carpes, 15 Tanches et 15 Brochetons.L'alevin marchand a 12 à 14 centimètres de longentre œil et bat ; il est âgé de deux à trois ans. Le plusjeune, à longueur, grosseur et poids égaux, est celuique Ton doit choisir. I l doit être de taille aussi uniformeque possible, de forme générale allongée, c'està-direprésenter peu de hauteur relativement à saet avoir l'écaillé blanche. I l vaut mieux le prendretaillesurun fond médiocre que sur un fond riche, pour le transporterdans un étang dont les eaux lui seront plus favorables.On ne met jamais d'Anguilles, mais il s'entrouve presque toujours et souvent en trop grandnombre. De m ê m e pour la Perche. Le Brocheton, Lanceronou Poignard, ne doit avoir que 0 m ,15 à 0 m ,20 delong.U n mot sur ce mélange des espèces (Carpes, TanchesBrochets, Anguilles). L a Tanche adulte n'est introduiteici que pour produire de l'alevin qui servira depâture aux Brochetons ; les praticiens sont d'accordpour dire que la Tanche a, pour vivre et prospérer,besoin d'un bien plus grand espace que la Carpe, qu'ilfaut m ê m e plus de surface pour nourrir 100 Tanches


EXPLOITATION DES K TAN G S A CARPI> 169que pour engraisser 500 Carpes, que la Tanche, en unmot, épuise l'étang. Bienque ce fait d'observation s'expliquedifficilement, la Tanche trouvant sa nourrituredans les dépôts vaseux ou limoneux du fond et voyageantpfcu, il faut bien l'admettre jusqu'à preuve contraire.Quant au Brochet, petit ou gros, poissonpresque exclusivement ichthyophage, il lui faut consommer15 à 30 kilog. de poissons, pour augmenter, enpoids d'un kilogramme seulement ' ; puis, il ne fait pasla guerre aux alevins de Tanche seulement, mais aussiaux Carpes plus petites ou plus faibles, qu'il blesse souventà çioitié lorsqu'il ne les dévore pas. On dit quele Brochet à pour rôle de chasser la Carpe, de l'empêcherde frayer, de s'opposer à son stationnement dansla vase, de faire, en un mot,sa chair meilleure: « soit,mais vous chassez aussi l'argent de votre bourse, caren courant, la Carpemaigritet n'engraisse pas. » (Chabot-Karlen.)C'est agir à peu près comme celui qui,dans sa bergerie d'engraissement, enfermerait un loupafin de conserver ses brebis en bonne santé et pouraffiner leur viande. Nous estimons que rien ne sauraitêtre plus profitable que de séparer complètement1Le développement moyen du Brochet paraît cire le suivant, ontaille et en poids :AgeLongueurPoidsPoisson consommeUn an0 m ,170 k. 0170 k. 382,5Deux ansTrois ans0 260 420 1270 2402 7005 400Quatre ans...Cinq ans....Six ansDouzo anso m0 700 801 250 6001 0001 2503 50813 5u022 50028 12578 750A. GOBIN, Pisciculture.


170 ^EXPLOITATION DES ETANGS ET VlVlEftSchaque espèce de poissons dans les étangs ou dans lesrivières ; Carpes ici, Tanches là, Brochets ailleurs etavec du poisson blanc, Perches d'un autre côté etenfin Anguilles dans des pièces d'eau spéciales.D. A m é n a g e m e n t des é t a n g s à Carpes. — Ily a des étangs que l'on tient continuellement eneau,les péchant en automne, les remplissant et les réempoissonnantavant l'hiver ou au printemps; ce sontceux qui sont alimentés par un ruisseau important.Lorsque l'on pêche au printemps (carême), l'étangreste en assec depuis ce moment jusqu'à l'automne, etsouvent, on le laboure et on l'ensemence de grains,durant cet intervalle, afin d'en tirer une récolte. Lesétangs établis sur un bon fond, d'un assèchementfacile, alimentés par un cours d'eau régulier et d'unnotable débit, sont souvent laissés en assec pendantl'espace d'un an compris entre la pêche d'automne etle remplissage suivi 'du réempoissonnement en m ê m esaison de l'année suivante. Cette pratique est avantageuseà plusieurs égards; elle fait disparaître lesœufs de Brochet, Perche, B r è m e et les poissonsblancs qui tendent toujours à pulluler et dont onpeut ainsi régler le nombre à volonté; puis, la cultureremue le sol, l'aère, l'enrichit de détritus végétauxet animaux ; si bien que l'on a pu dire aupointde vue piscicole « qu'un bon assec et deux ans debonne eau valent trois ans. »(Chabot-Karlen.)Les soins à donner à l'étang consistent dans unesurveillance assidue qui s'attache à éloigner les braconniers,les oiseaux piscivores, les m a m m i f è r e sIchthyophages, etc ; à régulariser le régime des eaux


EXPLOITATION DES ETANGS A CARPES 171par le fonctionnement du déversoir, la m a n œ u v r e desvannes et bondes; à entretenir chaussée et talus, etc.Les deux périodes les plus critiques, pour les étangs àfond plat surtout, sont les grandes sécheresses del'été et les grands froids de l'hiver. Contre les premiers,il y a peu de choses à faire, mais le danger estfaible, si la poêle a reçu une profondeur suffisante. 11en est autrement de la congélation qui, recouvrant lasurface d'une croûte plus ou moins épaisse et permanente,s'oppose à la réoxygénation de l'eau et menaceses habitants d'asphyxie. On devra donc ouvrirà la scie, sur les bords surtout, et en assez grandnombre, des trous que l'on garnira de paille ou mieuxencore de fumier de cheval ou de mouton, afin demaintenir l'accès de l'air en empêchant la regélation.Mieux encore, lorsque l'étang n'a pas une surfacetrop étendue, on peut placer préventivement, de distanceen distance, à peu de distance des rives, desbottes de paille de seigle disposées verticalement etmaintenues par un piquet enfoncé dans le terrain :l'ensemble des tiges forme une infinité de conduitsd'air que la gelée ne peut obturer. M . Carbonnierpréfère à toutes les autres pratiques celle quiconsiste à soutirer un peu d'eau, par la bonde desétangs gelés; il s'établit ainsi un vide de 0 n \ \2 à0" 1 . 51 entre la surface inférieure de la glace et cellede l'eau, et ce vide est bientôt occupé par de l'air;c'est alors que l'on perce des trous dans la glace etqu'on y place des bouchons de paille qui seront enlevéspendant les heures les plus chaudes du jour.L'époque de la pêche varie (automne ou printemps),


172 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSselon l'avantage que présente le débouché par lavente à une époque plutôt qu'à l'autre, Dans lesétangs à fond plat, la pêche d'automne (octobre) estplus prudente, parce qu'on échappe aux périls de l'hiverqui, au contraire, dans l'étang en assec, détruisentplus sûrement les Brochetons, Perchettes, Dytiques,etc. E n m ê m e temps la pêche d'automne nuitmoins à la salubrité publique que celle de printemps.L'accroissement de la Carpe, en taille et en poids, esttrès variable. On en peut juger par les chiffres suivants:Aged'après M. Koltz.Poids Multipl.à un an 0 k. 008 j ^ ^à deux ans... 0 03*2 ià trois ans... 0 500 X 15.Gà quatre ans. 1 000 X 2d'après M. Gauckler LPoids Multipl.à un an 0 k. 012 /x^à deux ans... 0 145- \a trois ans... 0 500 X 3.43à quatre ans. 0 750 X 1.50Ces différences s'expliquent suffisamment par desdifférences dans la nature du sol et des eaux ; leschiffres de M . Koltz proviennent sans doute d'alevinsélevés en eau et en sol maigres, tandis que les Carpettesde trois ans vivaient sur d'excellents fonds ; 4e coëffi-(1) Dans le Doubs, M. de Jouffroy, indique les résultats suivantsProduction deNombrepoids par hectareAge du poisson, aa commencement, à la fin. Poids moyen. et par an.P° année 20.000 3.000 0 kil. 007 140 kil.2 e — 1.500 225 0 — 110 144 —3 e — 225 200 0 — 725 138 —c'est donc un poisson marchand obtenu sur 10.000 œufs pondus, àpeu près.


EXPLOITATION DES ÉTÀNOS A CARPES 173cipnt d'accroissement, dans toutes les espècesanimales,est d'autant plus faible qne Ton s'éloigne davantagede la naissance ; aussi, les chiffres de M . Gaucklernousparaissent-ils plus rapprochés de la vérité moyenne.Le développement de la Tanche suivrait, d'aprèsM . Gauckler, la progression suivante : à un an, 0 kil. 125 ;à trois ans, 1 kil. à I kil. 500 ; k six ou sept ans, 3 àA kil. Celui du Brochet, en taille, serait, d'aprèsM . Koltz ; à un an, 0 m ,25 à 0 r a ,30 de longueur entreœil et bat ; à 2 ans, 0 m ,36 à O m , 5 0 ; à trois ans, 0 m ,45 à0 m 60 ; à six ans, 0 m ,80 à 1 mètre ; à douze ans, l m ,30 àl r a ,50.Nous savons que les poissons cessent à peu prèscomplètement de manger, dès que la température del'eau descend près deO°C. ; plus l'eau devient chaude,relativement à l'espèce des poissons, et plus ceux-cimangent avidement; aussi est-ce durant l'été qu'ilsprennent la plus forte partie de leur développement;c'est pourquoi aussi les printemps et les étés nuageux,pluvieux et relativement froids, sont contraires à l'industriepiscicole.Ce que nous venons de décrire, c'est l'industrie courante,traditionnelle, dont le produit est évalué enmoyenne à 50 kilog.de poisson et k 10 ou 15 francs parhectare et par an dans la Sologne et la Bresse, parM M . de Morogues, de Marivaux, Puvis, etc. ; encorefaut-il en retrancher 10 k 12 francs de frais ; ce sontdes étangs aménagés k deux ans. ADampierre (Loiret)la moyenne de 136 hectares d'étangs, meilleurs queles précédents aménagés à trois ou à quatre ans, ontfourni, comme produit moyen, 57 fr. 62 à trois ans, et


174 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERS44 fr. 11 à quatre ans. M. Noirot évalue le produit desétangs de la Bresse et de la Sologne a m é n a g é s à deuxans d'eau et un an d'assec cultivé, à 66 fr. 66 par anou 200 francs par hectare pour les trois années, dontà déduire 8 fr. 33 pour entretien annuel. D'aprèsM . Eug. Tisserant, le domaine de Wittingau, propriétédu prince de Schwartzenberg, domaine qui renferme9,000 hectares d'étangs, livre au commerce, chaqueannée, 360,000 kil. de poissons de choix, soit environ40 kil. par hectare et par an. D'après M . de la Blanchère,un hectare d'étang bien conduit, empoissonné de500 Carpes, 50 Tanches et 50 Brochetons, pesant ensemble27 kil. et valant 40 fr. 50, devrait donner, aprèstrois ans, 1,048 kilog. de poisson valant 1,257 fr. 60,soit 405 fr. 70 de revenu par an ; il y a là peut-êtreun peu d'exagération, mais nous verrons, dans uninstant, que l'on peut atteindre presque la moitié dece produit et quadrupler en bien des circonstancesle revenu moyen ordinaire. D'ailleurs nous ajouteronsqu au dire de M . Raveret Wattel, dans la Haute-Sibérie, sur les terres du baron de Rothschild, desétangs ou plutôt de simples mares de 0 m ,60 à 1 mètrede profondeur, exploités par la production d'alevinsdont on trouve un débouché assuré, donnent un produitnet annuel de 150 marks par Morgen, ce qui correspondà 670 francs par hectare ; et qu'un produitnon moins élevé est obtenu, dans son domaine deBerneuchen, près Coslin (Néerlande) par M . M a x Vandem Borne. En Allemagne, les 200 hectares d'eauforméspar les soixante-seize lacs de Peitz, près Cottbus, fournissentla majeure partie des 250,000 kil. de Carpe


EXPLOITATION DES ETANGS A CARPES 175consommés annuellement à Berlin ; ils appartiennent àl'État, sont affermés 63,750 francs, soit 319 francs parhectare, et donnent un revenu brut de près de 100,000 fr.soit 500 francs par hectare.L'exploitation intensive des eaux, comme l'exploitationintensive du bétail et celle du sol, sont aujourd'huidevenues des nécessités économiques. Les produitsspontanés du sol ne suffisant plus à assurer unerémunération convenable des capitaux et du travail,il y faut joindre des procédés artificiels. « En juin 1854,dit M . le D r Lamy, je plaçai dans une mare viergede tout poisson et située au milieu d'un champ, unepoignée d'herbe sur laquelle étaient attachésquelquesœufs de Carpes que je venais de féconder. Deux ansaprès, on pécha dans ce trou, qui contenait à peinequelques tonnes d'eau, trois cent quarante Carpes dupoids moyen de 80 grammes ; or, à Ofr. 60 le kilog.(27 kil. 200 x 0 fr 60), ce trou aurait donc produit16 fr. 32. Il est inutile d'ajouter que les moutons venaientboire à cette mare deux fois par jour: or, rienne nourrit mieux le poisson que les déjections animales.Le fumier frais de cheval, de mouton et de porcconstitue, en effet, une excellente nourriture pour lesCyprins. D'après M . Gauckler, le fumier de six porcsà l'engrais suffit pour nourrir 300 kilog. de Carpes,pendant trois ou quatre mois. On peut aussi leur donnerles déchets végétaux de jardin et de ménage, de4Raveret Wallel. Rap. sur la situation de la pisçic. à l'étranger,p. 18.


176 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSl'orge ou du maïs gonflés ou même cuits, des résidusde malt de brasserie, des tourteaux de colza, du son,des pulpes de betteraves, du marc de raisin, etc; à cesmatières végétales plus ou moins azotées, il est bond'ajouter un peu de phosphate de chaux soluble, lorsqu'ellesn'en contiennent pas, surtout pour l'alevin.D'un autre côté, M . Horach, propriétaire en Bohême,nous apprend que lorsqu'il veut nourrir la feuille âgéede moins d'un an, il place dans le carpier des piquetssupportant de la viande enveloppée #de paille ; leslarves de mouches et autres insectes qui s'y développentet en tombent, constituent une excellente alimentationpourl'alevin.Enfin, M . Nanquette, directeur de la Ferme-Écoledes Hubeaudières (Indre-et-Loire), a fourni à la Commissionsénatoriale d'enquête sur le repeuplement deseaux (1879), u n intéressant exemple de piscicultureintensive ; un étang de 1 hectare 75 ares de superficiefut ensemencé de 2,000 alevins de Carpes, Tanches etBrochetons ; cet alevin fut payé à raison de 80 francsle mille, soit 160 francs. Deux ans après, cet étangmis en pêche fournit 2,226 kilog. de poisson (Carpes,Tanches, Brochets, Anguille, Blanchailles) vendu, sansfrais de pêche, 2,395 fr. 80. C'est donc 381 kilog. brutde poisson produit par hectare en deux ans, ou 191 kilog.500 par an; et en argent, 416 fr. 65par hectarepour deux ans ou 208 fr. 33 paran.I l est vrai que cet étang étant alimenté par un petitruisseau dont la source était prochaine et dont leseaux étaient pauvres en matières organiques, le propriétairefit déposer des viandes mortes (cadavres de


EXPLOITATION DES ETANGS A CARPES 177chevaux dépecés, viandes d'équarrissage, déchetsd'abattoir, etc.), on assez grande quantité, dansl'étang ; la dépense s'est élevée, pour valeur de sixanimaux morts, à 60 francs, mais le revenu netannuelpar hectare et par an s'est encore élevé à 189 fr. 25.L'auteur fait suivre ce rapport d'une fort intéressanteobservation pratique : « J'ajouterai, dit-il, quel'alternance du poisson à élever ou engraisser sembleaussi s'imposer et est peut-être un des éléments desuccès ; nos premières pêches (celle dont le résultatest indiqué plus haut est la cinquièmedepuis l'inaugurationdu système intensif) se composaient presqueexclusivement de Carpes ; l'introduction d'alevins deTanche en petite quantité a a m e n é la presque substitutionde cette espèce à l'autre et j'ai lieu de croireque, à son tour, dans les pêches ultérieures, l'alevinde Carpe va reprendre la priorité du nombre, toutesconditions de repeuplement égales d'ailleurs. » Cetteprédominance de la Tanche ne tiendrait-elle pas à ceque ce poisson fraie dans l'étang, étant plus tôt adulteque la Carpe et qu'une période d'assec ne vient pointdétruire ceux de ses alevins qui échappent à la pêche?Il ne serait pas étonnant que le Brochet se multipliâtdans une proportion parallèle, mais qu'il ne sauraitexcéder.U n fait non moins intéressant, mais qui paraît dûaux seules circonstances naturelles, nous est postérieurementrévélé par une communication deM . P. Zipcy, sous-directeur de la Ferme-Ecole de laHaute ;Vienne. « L'ensemencement des étangs, enLimousin, a lieu, dit-il, en hiver, avec de la feuille


178 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSdans sa deuxième année. Les Carpes pèsent alors, enmoyenne, 60 à 90 grammes et les Tanches de 30 à 40grammes. On met environ 500 à 600 tètes par hectare,Carpes, Tanches. Brochets, Perches, etc.; ces deuxdernières espèces dans des proportions très faibles;souvent, elles sont complètement exclues, et malgrécela, on en trouve toujours une assez grandequantitéà la pêche. Ces poissons trouvent, dans les étangs,une nourriture suffisante. Il n'y a donc qu'à semer età récolter. Le prix de la semence, quand on ne la produitpas soi-même, dans des étangs spéciaux, et lesfrais de pêche sont les seules dépenses que nécessitecette culture. C'est ordinairement en hiver qu'a lieula pêche. Deux ans après l'ensemencement, on videl'étang et on reçoit le poisson qui sort avec la dernièreeau, dans une fosse. On récolte en moyenne 400 kil.de poisson à l'hectare, qui, vendu à 1 fr. 20 le kil.,donne un bénéfice brut de 480 kil., soit 240 francs parhectare et par an. Les Carpes pèsent en moyenne800 grammes à 1 kil. et les Tanches 500 à 700 grammes.Tout r é c e m m e n t (mars 1889) M . Le Play entretenaitla Société Nationale d'Agriculture de France d'unnouveau système d'élevage de la Carpe, inauguré parun médecin et pisciculteur Hongrois, M . Dubisch,système qui met à profit l'observation que nousavonssignalée plus haut (p. 169) sur l'influence de la mise enculture du fond, mais qui paraît exiger desconditionsparticulières et assez rares, chez nous,4Le Moniteur de la pisciculture et de Vost. 3 a année, 1887, n° 3,mars, pp. 294-295.


EXPLOITATION DES ETANOS A CARPES 179M. Dubisch, en effet, a besoin d'étangs d'hiver etd'étangs d'été; les premiers sont destinés à recevoirle poisson d'octobre à mars ; ils doivent être assezprofonds pour abriter, contre les grands froids,les Carpes que l'on yaccumule en grandnombre et quiy passent la mauvaise saison dans l'engourdissementet le jeûne. Lesseconds,qui peuvent recevoir les carpesde mars à octobre, sont, au contraire, à fond plat,faciles à vider rapidement, de façon à pouvoir êtreaisément fumés, labourés et ensemencés ; les habitantsqu'on leur confie y trouvent en abondance des débrisvégétaux et animaux qui leur conviennent admirablement.Dès que la température a atteint 16° C, c'est-à-direvers la fin d'avril, on met, dans un bassin d'environdix ares de superficie, une m è r e Carpe avec un oudeux mâles. L a fraye a lieu de suite, on retire les reproducteurset, quelques jours après, on voit plus de100,000 alevins s'agiter dans cet étroit espace. A ubout de huit à dix jours, ils ont dévoré toute la nourriturequi se trouvait dans ce bassin et on les retirepour les répartir, à raison de 33,000 par hectare dansd'autres étangs plats et qui ont été cultivés pendantl'hiver et le printemps. Les Carpettes grossissent rapidementet atteignent en un mois une longueur dequelques centimètres, avec une perte en nombre de25 pour 100. Mais, après ce délai, elles ont épuisé lefond sur lequel elles se trouvent et il faut les transférer,à raison de 1,050 par hectare, dans d'autresétangs qui ont été a m é n a g é s comme les premiers :c'est donc 71 hectares pour recevoir les 75,000 sujets


180 LEXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERSrestant. Dans ces nouvelles conditions, les Carpettess'accroîtront rapidement encore et pèseront ensembleà l'automne 8 à 9,000 kilos, leur nombre s'étant réduità 71,000.A l'automne, on les transporte dans les bassinsd'hiver ; on met à sec les étangs d'élevage et on les.cultive jusqu'à l'année, suivante.A u printemps, on remet les carpes dans les étangsd'été, les faisant passer de l'un dans l'autrelorsquellesen ont épuisé les matières alimentaires ; l'accroissementen poids est encore notable, mais proportionnellementmoindre ; il faiblirait encore à la troisièmeannée. Aussi M . Dubisch considère-t-il qu'il y a avantageà vendre durant l'hiver de la seconde année.En résumé, l'élevage des produits d'unè m è r e carpe,poussé jusqu'à la fin de la seconde année, s'iève à68,000 sujets qui exigent 211 hectares d'étangs etproduisent 43,000 kilos de poisson. E n estimant celuicià un franc le kilog, ce serait un produit brut de43,000 fr, soit plus de 200 fr. par hectare.E n présence.de l'engouement qui vient d'acceuillircette nouveauté, nous objecterons bien timidementque ces nombreuses manipulations et ces fréquentstransports du poisson, doivent bien le fatiguer et nesont pas sans représenter quelques dépenses; avec unecandeur non moins naïve, nous nous demanderonsquelles plantes on peut bien ensemencer et, noussupposons aussi, récolter, dans les étangs d'été, entreoctobre et mars, ou, si l'on veut entre aoûtet mai pourquelques-uns ?E. É t a n g s o u viviers d'engraissement. —


EXPLOITATION DES ÉTANGS A CARPES 181Quelques personnes appliquent au poisson les pratiquesdont l'agriculteur tire un si utile parti avec le grosbétail, en l'engraissant. On sait que, par cette opérationzootechnique, tout le tissu musculaire acquiss'ajoute au squelette dont le poids ne se modifie passensiblement; que la qualité de la chair s'accroît trèsnotablement et que l'on bénéficie, non seulement del'augmentation de poids, mais aussi de l'élévation deprix du poids total. Ainsi, une Carpe de i kilog. 500se vendra à raison de i franc le kilog., 1 fr. 50; cellede 2 kilog. vaudra, à i fr. 25,2fr. 50; celle de 3 kilog.à i fr. 50. ï fr. 50; celle de î kilog. à 1 fr. 75, 7 fr. ;celle de 5 kilog. à 2 fr., 10 fr. ; etc. Celle de 10 kilog.vaudrait, au prix de 2 fr. 25, l'un. 22 fr. 50. U n Brochetde deux ans, mesurant 0 m ,50 de long, pesant4 kilog., se vend environ 6 francs, il lui faudra pourla consommationde sa troisième année, de 40 à 50 kil.de poisson blanc; à trois ans, il pèsera 5 kilog. 500 etvaudra environ 11 francs ; il y a donc une marge de5 francs pour représenter la valeur de la nourriture,les soins, etc., et ainsi de suite pour les autres années.Pour les poissons comme pour la volaille, les fruits,les légumes, etc., tout ce qui sort de l'ordinaire,comme poids ou qualité, acquiert une valeur exceptionnelle,des prix de faveur, et l'aisance toujourscroissante de la population ouvre, à ces extra de laproduction, des débouchés de plus en plus certains etavantageux.Seulement, de m ê m e que pour le bétail, l'engraissementne doit s'appliquer qu'à des poissons adultes,Carpes de trois à quatre ans. Brochets de quatre àA. GODIN, Pisciculture. 6


182 L'EXPLOITATION DES ETANGS A CARPEScinq ans. Bien entendu, les uns seront séparés desautres et suivront un régime différent. C'est d'ailleursle cas de leur appliquer à tous deux la pratique sisimple et si peu dangereuse de lacastration.A la Carpe, le régime que nous avons indiqué plushaut, du fumier, des boulettes d argile pétries avec del'orge cuite, des tourteaux, des pâtées de pomme deterre cuites et de farines de grains, etc., etc. A u Brochet,du poisson blanc élevé spécialement à son intention.Ce dévorant peut, en effet, transformer en viande trèsacceptable des poissons blancs qui, comme la Vandoise,la Tanche, la Brème, la plupart des Ables, sont à peinecomestibles. Il est vrai qu'il faut 15 à 30 kilos de poissonblanc pour produire un kilog. de Brochet ; maisc'est là un calcul à faire, suivant les conditions danslesquelles on setrouve.On sait que les poissons ne mangent guère quedurantsix à sept mois (Avril-Octobre) ; en dehors de cette période,il restent à peu près engourdis et perdent,durant l'hiver, de 1 à 3 pour 1 °/ 0de leur poids.La Carpe parait être le plus grand producteur deviande, après toutefois le Saumon Heusch ; le Brochetne vient que bien après elle, au point de vue économique,quoique son développement soit plus rapide,mais il lui est supérieur comme qualité de viande etcomme valeur vénale, tandis que le poisson blanc est,en général, de qualité très inférieure, d'une valeurpresque nulle et d'un prix de revient insignifiant. Ilpeut donc y avoir là matière à une industrie lucrative.


ÉTANGS A ANGUILLES 183S t. — ÉTANGS A ANGUILLE*Nous avons dit qu'on ne mêle que rarement l'Anguillettcà l'alevin d'empoissonnage. Cependant, dansles étangs où l'on peut craindre que la trop grandeabondance de frétin de Carpes ou de Tanches nuise audéveloppement de la masse du repeuplement, il est bond'introduire une certaine quantité» d é j e u n e s Anguilleset m ê m e d'Anguilles adultes qui dévoreront beaucoupde ce fretin, sans jamais s'attaquer, comme le Brochet,au gros poisson (Millet). Dans certaines conditions etdans certaines eaux, u n peuplement exclusif d'Anguilleset de Blanchaille est. d'un autre côté, le mode d'exploitationle plus avantageux VL'Anguille ( M u r œ n a Anguilla) appartient à l'ordredes Malacoptérygiens Apodes, dans lequel elle formela famille des Murénides. Elle est caractérisée par laforme allongée et cylindrique de son corps recouvertd'une peau épaisse et huileuse sur laquelle les écailles,très petites et comme enchâssées, sont à peine visibles;par des opercules petits et placés sous les nageoirespectorales; la dorsale et l'anale prolongées jusqu'à l'extrémitédu corps, où elles forment, par leur réunion,une caudale pointue; la mâchoire supérieure plus courteque l'inférieure; p a s d e c œ c u m s pyloriques: pas de ves-*1J M, lo baron de Washington entre autres, un des plus ardentspromoteurs de la pisciculture en Autriche, a introduit de grandesquantités de montée d'Anguilles dans ses éiangs où il n'y avait quedes Brochets et des Carpes ; ces poissons s'y sont déve oppés trèsrapidement et d'une manière étonnante, en acquérant une sa\eurdélicieuse. » (J. Pizzetta, (a Piscic. fluv. et maritime, p. 195.)


184 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERS•sie natoire; un c œ u r lymphatique dans la queue. Ellepeut atteindre jusqu'à l m ,30 et m ê m e l m ,50 de longueuret parfois l m ,80 et jusqu'au poids de 8 à 10 kilos.On en distingue cinq variétés au moins, d'après laforme de leur tête, le nombre des rayons aux ouïes,la couleur du corps et des nageoires, etc. ; savoir:L'Anguille commune, coureuse, de printemps, ouVerniaux ( M . A . mediorostris)> fleuves, rivières,canaux, lacs et étangs ; — L'Anguille large bec ouPimperneau (M. A . latirostris),fleuves rivières,canaux,lacs, étangs ; —L'Anguille plat bec, franche ou Lachenaux( M . A . platirostris), eaux saumâtres des lagunesLanguedociennes ; — L'Anguille long bec ou Pougaou( M . A . acutirostris), eaux saumâtres des lagunes Languedociennes,— L'Anguille à bec oblong ou guiseau( M . A . oblongirostris), embouchure de la Seine, coursd'eau des environs de Marseille, lac du Bourget, etc.L'Anguille passe, le plus souvent, le jour dans lavase où elle se pratique des trous, des galeries où l'onen rencontre plusieurs ensemble; la nuit, elle chasse,soit dans l'eau, soit sur terre. Dans l'eau, elle mangedu frai de poisson, du frétin, des vers, des larves, desmatières animales en décomposition; sur terre, elle faitsa proie de limaçons, de petits reptiles et parfois devégétaux. Capable de respirer longtemps dans l'air,-pourvu que son corps soit baigné de pluie ou de rosée,elle émigré f r é q u e m m e n t par terres en rampant sur l€gazon, pour fuir des eaux qui ne lui conviennent paset en chercher d'autres plus favorables; aussi, les•viviers où l'on veut la retenir doivent-ils avoir destalus verticaux et élevés, qu'elle ne puisse remonter ;


É T A N G S A A N G U I L L E S 185les bondes, vannes, déversoirs, doivent être munisde grillages métalliques, aussi bien que le ruisseaud'alimentation. Presque toutes les eaux lui conviennent,si elles sont sur fond vaseux et si elle vtrouve quelques retraites ombragées. Si on la metdans des eaux trop froides, sur un fond sableux, elleémigré, durant la nuit ou elle meure.Pour établir un étang à Anguilles, ou plus simplementun vivier, il faut d'abord disposer le réservoir oùon les veut tenir, en talus verticaux et suffisammentélevés, puis grillager toutes les issues par lesquelleselles pourraient fuir. On y dépose ensuite la montéeou Anguillette. Il est aisé de se procurer celle-ci, à l'embouchuremaritime de nos fleuves ou rivières (Seine,Loire, Somme, Orne, etc.). L'Anguillette, au momentoù elle s'y présente (mars-avril) a 0 m ,03 à 0 m ,05de long, et 0 œ ,005 à 0 m ,008 de tour; un litre en renfermede quatre à cinq mille et coûte environ 2 francs.Lorsqu'on les a capturées, il faut les laver à plusieursreprises, afin de les débarrasser des mucosités qui lesenveloppent, puis on les dépose sur un lit d'herbeshumides de marais, de 0 m ,0-» à 0 m ,06 d'épaisseur, dansdes paniers plats garnis de toiles ; par-dessus la couched'Anguillettes,on place, sur quatre petits croisillons enbois, un second lit d'herbes humides et enfin, la toilequi garnit le couvercle est cousue avec celle du fond,chaque panier contient de trois à quatre mille alevinset peut supporter vingt-quatre heures de voyage.A l'arrivée, on place les voyageuses dans le réservoiroù, pendant la première période de leur existence,elles doivent se nourrir d'infusoires ; plus tard, on


186 I / E X P L O I T A T I O N D E S É T A N G S E T V I V I E R Sleur donne des vers de terre, des larves d'insectes, desboulettes de sang caillé pétries avec du crottin de chevalet de la terre glaise ; plus tard encore, on leurdistribue du frai de grenouilles, des limaces, de petitscrustacés, des insectes, de la chair hachée et du fumierde moutons. On ne les extrait du réservoir pour lesporter dans l'étang que lorsqu'elles sont de force etd'âge à se nourrir de petits poissons, c'est-à-dire lorsqu'ellessont âgéesde dix-huit mois environ.L'étang que l'on veut garnir d'Anguilles a du êtreensemencé d'abord de poissons blancs (Ables, Gardon,Chevesne, Vérons,etc.) et surtout de Grenouilles. On yplace, à l'automne, ou mieux au printemps,de millecinqcents à deux mille Anguilles par hectare. Elles trouverontelles-mêmes la plus grande partie de leur nourriture,mais il sera bon de leur distribuer, de 'temps entemps, durant la belle saison, des déchets de boucherieou d'abattoir, des fumiers de bergerie ou de vacherie.L'alevin d'empoissonnement avait 0 m ,25 à 0 m ,30 delongueur et pesait de 70 à 80 grammes ; après la premièreannée d'étang, il mesurera 0 m ,40 à 0 m ,50 de longet pèsera 400 à 650 grammes ; après la deuxièmeannée, 0 m ,60 à 0 m ,70 et 1 kil. 250 à 1 kil. 500 ; après latroisième année, 0 m , 7 0 à 0 m ,80 et 1 kil. à 2 kilos; après1^ quatrième enfin, 0 m ,80 à 0 m ,90 et 2 kilos à 2 kil. 250.C'est à la fin de la deuxième année d'étang, les A n ­guilles ayant alors trois ans et demi à quatre ans déjà,qu'on aura le plus de profit à pêcher. Les Anguillesde 0 m ,60 à 0 m ,70 de long, du poids de 1 kil. 250 à1 kil. 500, vaudront 3 francs en moyenne, soit pour1,500, 4,500 francs par hectare.


ÉTANGS ET VIVIERS A TRUITES 1871 kilogramme environ do montée (3,500 alevins à peuprès), mis dans des tourbières de l'Aisne, produisit àM . Millet, après cinq années, plus de 2,500 kilos debelles Anguilles. M . le baron do Rivière rapporte que.dans un abreuvoir de 2 ares superficiels, isolé au milieude la Camargue, ne recevant d'autre eau que celledes pluies, l'un de ses pêcheurs prit un jour 325 kilosd'Anguilles, soit à raison de 16/250 kilos par hectare.Les Anguilles émigrant à la mer vers l'âge de cinq àsix ans et cette mare leur laissant toute liberté defuir par terre, on ne peut guère faire remonter à plusde six ans l'âge moyen de celles qui la peuplaient, eton aurait ainsi une production moyenne annuelle enpoids, de 2,708 kilos, et en comptant le kilogrammeà O fr. 40 seulement, une valeur annuelle de 1,083 fr. 20.D'après M . J. Pizzetta, un industriel avait, dès 1863,créé à (îonfreville et l'Orcher, près du Havre, uneanguillerie comprenant une soixantaine de bassins ouparcs, dont le plus grand nombre reçoivent les A n ­guilles depuis l'Anguillette démontée,jusqu'àl'Anguillede deux ou trois ans pêchée en Seine '.Depuis lors,onn'a plus entendu parler de cet établissement industriel.S 5. — ÉTANGS ET VIVIERS A TRUITES ET A CORÉGONESBien que la monographie succincte des principauxSalmones ne doive être traitée que dans le chapitresuivant, nous devons parler ici des espèces quipeuvent1Pizzetta, La Piscic. en France, pp. 193-194.


188 L ' E X P L O I T A T I O N D E S É T A N G S E T V I V I E R Sêtre élevées en viviers, à la condition d'y réunir diversesconditions.« Dans certaines parties de l'Autriche (le Tyrol, leVoralberg, la Haute-Autriche, etc.) la Truite est l'objetd'une culture tout à fait industrielle. L'élevage sefait dans des étangs où les poissons peuvent être parquésfacilement par âge. U n premier bassin (ou unepremière série de bassins, est affectée aux alevins quiy restent environ un an, soit depuis leur éclosion jusqu'auprintemps suivant .. A u bout d'un an, les jeunespoissons passent dans d'autres bassins... Une troisièmesérie de bassins reçoit les Truites de deux ans qui yaccomplissent leur troisième année et passent enfindans une quatrième division pour être livrées à lavente. Elles pèsent alors, en moyenne, 750 grammes;..Le passage des poissons d'une division dans une autrese fait dans le courant de mars { . » Pendant la premièreannée on nourrit les alevins, autant que possible, avecabondance d'insectes, larves de toute espèce, mollusques(jeunes lymnées, planorbes, etc.) et de petitscrustacés (Daphnies, Cyclopes, etc.) ; la viande hachéen'est employée que comme adjuvant. A la deuxièmeannée, on augmente les distributions de viande et ony ajoute le plus possible du poisson vivant (Ablettes,Brochetons, r é c e m m e n t éclos, etc.). Dans les troisièmeet quatrième années la nourriture consiste surtout enAblettes que l'on élève en quantités considérables,dans des bassins spéciaux ; la viande hachée continue1Raveret Wattel, Rapport sur la situation de la Piscicultureà rèlranger, pp. 239-240.


ÉTANGS ET VIVIERS A TRUITES 189à être employée quand le prix n'en est pas trop élevéet ne dépasse pas le prix de revient, d'ailleurs modiquedu poisson blanc 4 A Huningue, M . RaveretWattel a vu, dans un bassin dont la superficie n'atteignaitcertainement pas 25 mètres carrés, des métis(hybrides) de Truite et d'Omble chevalier qui s y trouvaienten rangs tellement pressés que, les yeuxfermés,on eut été sûr, en plongeant le bras dans l'eau, derencontrer au moins un ou deux poissons. C'était positivementde l'élevage en stabulation. M . Haack (leDirecteur) estimait à plus de 100 marks (1,225 fr.) lavaleur du contenu de ce bassin 2 C'était donc un produitbrut égal à 490,000 francs par hectare.Ces étangs à Truites peuvent être établis « dans unevallée ombragée, sur une eau claire et froide, un fondde sable ou de cailloux, placé sur de la glaise ou surune autre terre qui retienne les eaux, une sourceabondante ou un ruisseau qui, coulent sous des arbrestouffus et n'étant pas très éloigné de son origine,amène, m ê m e en été, une eau limpide et froide. Tl doitavoir des bords assez élevés pour que les Truites nepuissent s'élancer par-dessus ; de grands végétauxplantés assez près du bord pour que leur ombreentretiennela fraîcheur de l'eau ; des racines d'arbres oude grosses pierres, entre lesquelles les œufs puissentêtre déposés ; des fossés ou des digues pour prévenirles inondations des ravins ou des rivières boueuses;une profondeur de 3 mètres environ, sans laquelle lesi Raveret Watlel, Ibid, pp. 239-240.8Ravorel Wattel, lbid 9p. i5.


190 L EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSTruites ne trouveraient pas un abri contre l'orage,monteraient à la surface de l'eau lorsqu'il menacerait,y présenteraient souvent un grand nombre de tacheslivides et périraient bientôt. On empoissonne ordinairementles étangs à Truites avec soixante Truitespar arpent et on choisit le commencement de l'hivercomme l'époque la plus favorable pour faire cette opération.» (Baudrillart.)Ces viviers doivent donc indispensablementprésenterun fond de gros sable, de gravier ou de rochers ; ilsseront alimentés par des eaux vives, fraîches et pures,provenant de sources non voisines, mais non trèséloignées pourtant, de torrents ou de rivières ; les,rives en seront disposées en pente douce, seront accidentéesde caps et de baies, d'arbres et de rochers. Siles abris manquent par la disposition trop régulièredu fond, il y faudra créer des abris artificiels aumoyen de pierres plates ou de dalles reposant sur dessupports, des tuiles courbes posées la convexité enhaut; des tuyaux de drainage entiers ou fendus enlong, etc. Si les ombrages font défaut, on disposera,de place en place, des fascines plates amarrées parune corde lestée d'une pierre (Gauckler) ; mais lesarbres sont préférables en ce qu'ils attirent et retiennentnombre d'insectes dont les Salmones sont trèsfriands.I l est bien entendu que les viviers ont du être soigneusementpurgés de tous Brochets, Perches, A n ­guilles, Lottes, Epinoches, Vérons, Dytiques et autresdestructeurs de frai et d'alevin ; qu'on en a fait disparaîtreles joncs et roseaux, tandis qu'on y a installé


ÉTANGS KT VIVIERS A TRUITES 191le Cresson de fontaine, la Fétuque flottante, la Véroniquebecabunga, l'Iris jaune ou pseuclo-acorus, etc.Il faut pouvoir disposer de trois bassins dans lesquelson fait successivement passer l'alevin, suivantson âge, sa taille et sa force, tâchant autant quepossible de ne rassembler que des individus é g a u x etm ê m e de les diviser le plus possible.Le premier bassin sert à la fraye et à l'alevinage.Il ne doit pas contenir plus de (W>0 de hauteur d'eau.Si le fond n'est pas naturellement disposé de façon àce que les Truites y puissent frayer, on y établira desfrayères artificielles. On y jettera, au mois de septembre,quelques Truites mâles et femelles en nombreségaux, ou de l'alevin fécondé et éelos artificiellement.On nourrit les Truitons avec du lait raillé, des Lombricsbroyés, de la chair hachée très menu, des insecteset des larves. En Amérique, on plante dans levivier, des pieux supportant une corbeille en treillisgalvanisé, dans laquelle on dépose de la viande surlaquelle les mouches viennent pondre et d'où leslarves tombent successivement dans l'eau.Pour les Corégones (F< ; ra, Lavaret et surtout Marène,on sème des (eufs fécondés sur le fond, en les disséminantaussi régulièrement que possible et on les surveillecontre l'invasion du Byssus. Le mode d'alimentationest le m ê m e .À la fin de la première année, on fait passer lesélèves dans un second bassin où la hauteur d'eau estd'un mètre et qui est a m é n a g é comme le précédent. Ila du être préalablement et largement ensemencé d'alevinde poissons blancs et surtout de moules d'eau


492 L ' E X P L O I T A T I O N D E S É T A N G S ET VIVIERSdouce, de moules d'étang ou anodonte des Cygnes (Anodontescycneus)', demulettes des canards (Anodontes anatina),de moules des peintres (Uniopictorum), de planorbes,de lymnées d'étang et d'autres mollusques. Aces aliments naturels, on peut ajouter encore de lachair de poissons salés (harengs caqués), de la viandede cheval hachée très fin, surtout des moules de mer,si l'on est à proximité pour s'en procurer.A la fin de la seconde année,les alevins passent dans untroisième bassin où leur élevage se continue de même,mais avec une augmentation de rationsupplémentaire.On peut peupler en moyenne :Le l o r bassin 150 à 200 alevins par m. car:, soit 75 à lOOparm.cub.Le 2 e bassin 12 à 15 — — — 12 à 15 —Le 3° bassin 3 à 4 — — — 2 à 3 —Pour les Corégones et les Ombles, ces chiffres doiventêtre diminués d'un cinquième environ.A la fin de la première année, les Truitons pèseront100 à 150 grammes ; à la fin de la seconde, 200 à 250grammes ; à la fin de la troisième, de 500 à 1000grammes ; ils sont alors devenus marchands et le momentest venu de les livrer à la consommation. « Avecune alimentation d'eau de un m è t r e cube par heure,dit M . Gauckler, on peut élever 20 kilos de Truites ;la m ê m e eau peut servir dans un autre bassin, si ellepeut s'aérer au passage. •> {M. Carbonnier cite M. Royer-Desgenetles, propriétaire à Saint-1Maur-les-Fossés (Seine), comme étant parvenu à élever « un trèsgrand nombre de Truites, chaque année, dans un bassin contenant100 mètres cubes d'eau au plus et qu'alimentait la Marne par un simplepetit tube de 0 m 023 de diamètre. Leur croissance était aussi active làque dans les eaux libres; les sujets âgés de deux ans ne pesaientpas moins de 500 à 750 grammes. » {Guide prat. du piseic., p. 172.)


KTANOR ET VIVIKHS A TRUITES 103Les soins, outre la surveillance et l'alimentation artificielle,consistent à ne pas prodiguer la nourriturequi, lorsqu elle est descendue sur le fond sans avoirété happée au passage, fermente et infecte l'eau : ilne faut donc la distribuer que peu à peu. On peut encore« placer la nourriture dans une corbeille entreillis de fil de fer couverte, formant râtelier, etmaintenue immergée à la surface de l'eau. Les poissonsy viennent choisir les brides qui leur conviennent.Au-dessous de ce râtelier, on place sur le fond, unlarge plateau à bords relevés, destiné à recueillir lesmorceaux perdus, que l'on enlève de temps en temps.Dans les étangs de seconde et troisième années, cettedisposition n'est pas nécessaire ; quelques Ecrevissesqu'on y répand se chargeront de maintenir la propreté,sans nuire aux Truites (Gauckler^ » Nousn'avons pas besoin de répéter que les viviers doiventêtre garantis de la chaleur et du froid, contre lesdégâts des rats d'eau, loutres, etc; les abris mobilesles pièges de toute sorte, la surveillance enfin, sontdes moyensde garantie suffisants d'ordinaire.L'élevage des Truites, Corégones,Ombles en viviers,bien compris et bien pratiqué, peut donner de merveilleuxproduits bruts, de 1 à 2 francs par mètrecarré, soit 10 à 20,000 francs par hectare et par an.Les dépenses ne consistent que dans le loyer du sol;l'intérêt et l'amortissement des frais de création, lasurveillance et l'alimentation. L'élevage en lacs, aidéd'une exploitation rationnelle peut fournir aussi d'avantageuxprofits. En Ecosse, le Loch Leven qui mesure1,400 hectares, produit actuellement, par année


194 L'EXPLOITATION DES ETANGS ET VIVIERSmoyenne de 20 à 25,000 truites du poids moyen de500 grammes, soit 10 à 12 500 kilog. (ou 7 kilog.100à 8 kilog. 750 par hectare) et rapporte plus de75 000 francs soit 53 fr.50 par hectare


KTVNGS ET VIVIERS A ECREVISSES l'X\nombreux refuges, au moyen de pierres meulières entasséessur les bords; enfin les parois du vivier serontperpendiculaireset revêtus de pierres jointes à ciment.La culture des Ecrevisses nous paraît pouvoir parfaitementscconcilier avec celle du Cressonde fontaineet avec rélevage des Truites, dans des viviers pourvusde 0 n, ,.*iO à 0 m ,60 de hauteur d'eau. La plante comme lecrustaeé se plaisent dans des eaux de semblable nature,sur des fonds identiques et n'ont rien qui puisse s'exclure.Le Cresson augmente et régularise le produit duvivier, puisqu'il donne des récoltes dès la premièreannée, tandis qu'il faut attendre quatre à cinq ans, audébut, avant de faire la première pêche d'Écrevisses.On se procure l'ensemencement par la pêche et onpeuple de quelques individus mâles et femelles (unmaie pour deux femelles) de quatre ans. d'une longueurde 0 m ,10 à 0 r a ,12; dix reproducteurs suffisentpour 'M) mètres carrés de vivier. Ce peuplement se faiten avril. On place les crustacés dans un panier àclaire-voie, à travers les parois duquel ils ne puissentpasser et que l'on immerge durant six semaines oudeux mois, afin qu'ils s'acclimatent à la températureet i\ la nature des eaux ; le fond de ce panier est garnide gravier, de sable et de quelques grosses pierres àgéodes. Lorsque les Ecrevisses sont accoutumées à cemilieu nouveau pour elles, on leur rend la liberté;On nourrit les Ecrevisses de larves d'insectes qui sedéveloppent dans le fumier; de frais de grenouilles ;desang de bœuf frais ; de foie haché ; de petits crustacés ;d é j e u n e smollusques; de vers de terre; puis, plus tard,d'alevins de poisson blanc ; d'intestins de volailles ; plus


196 L'EXPLOITATION DES ÉTANGS ET VIVIERStard encore, de viande fraîche, de débris de boucherieou d'abattoir ; de matières végétales m ê m e (chara,etc.),La nourriture, quelle quelle soit, ne sera donnée quepar petites quantités à la fois, le soir, l'Écrevisseayanlsurtout des m œ u r s nocturnes, afin d'empêcher l'accumulationsur le fonds de matières putrescibles. Les canauxd'entrée et de sortie de l'eau seront munis de toilesmétalliques galvanisées, afin de rendre l'évasion impossible,car l'écrevisse émigré facilement du vivier oùelle ne trouve pas toutes ses convenances réunies.Le mâle de l'Écrevisse à pieds rouges peut atteindre,à l'âge de quinze à vingt ans, le poids de 100 à 12Cgrammes et, exceptionnellement, de 150 grammes; lafemelle celui de 75 à 80 et 100 grammes ; l'Écrevisse ipieds blancs ne dépasse pas, en moyenne, le mâle 60 i80 grammes, la femelle 45 à 55. L a première est marchande lorsqu'elle a atteint 0 m ,08 de longueur, de l'œià l'extrémité allongée de la queue; et la seconde, 0 m ,06l'une et l'autre ont alors de quatre à cinq ans d'âge.Voici du reste la proportion moyenne d'accroissèment des deux principales espèces :ACCROISSEMENT DES ÉCREVISSESÉcrevisses âgées rouges (Carboanier) blanches (Koltz)d'un mois Ogr. 15 Ogr. 0950 1 1000 0 80de 3 ans 10 00 7 0000 11 00de 5 ans 22 00 13 00de 6 ans 25 00 17 00de 7 ans 00 22 00de 8 ans 00 25 0000 29 00de 10 aus 50 00 29 00à 15 ans, les ecrevisses pèsent environ 75 00à 25 ans — — 100 ou 120 gr.(Koltz, Traité de pisciculture pratique, 4 e éd., p. 179.)


HT A NON ET VIVIERS A ECREVISSES 197M. Bouchon Brandely, quia visité en 187'* l'établissementd'élevage de M . Kùffer à Munich, dit que les bassinsréservés aux Ecrevisses et alimentés tantôt parl'eau de lïsar, tantôt par l'eau oie source, sont divisésen compartiments de 2 m ,50 de long sur i m ,50 de large,dont quelques-uns contenaient entassées, peut-êtreplus de G.000 Ecrevisses à pieds rouges, dontquelquesunes atteignaient et dépassaient m ê m e le poids de250 grammes. Les mâles étaient soigneusement séparésdes femelles. Malgré cet entassement (1,000 parmètre cube environ) la mortalité était très faible, paralt-il.Elles étaient nourries des intestins de poissonsvidés dans l'établissement. Ces viviers n'étaient, bienentendu, qu'un parc de dépôt et non d'élevage. 1Dans un vivier bien ensemencé, convenablementalimenté» d'eau et de vivres, on pourra pêcher enmoyenne, chaque année, de 15 à 20 Écrevisses marchandespar mètre carré, soit 7.500 à 10,000 francs devaleur annuelle par hectare en eau : si l'on y joint laeuh tire du Cresson, le produit brut s'accroîtra encorede8 à 10,000 francs et s'élèvera dès lors à 15,500 ou20,000 francs.1Bouchon HranuVly, Traité rte pisciculture pratique, pp. 1 2-107.


C H A P I T R E V IL'EXPLOITATION DESLACSNous savons que la France possède une superficie de20,000 hectares environ en lacs. Ceux-ci suivant leuraltitude, la nature de leurs eaux, les soins et l'intelligencedu propriétaire, sont peuplés de Brochets, dePerches, de Truites, de Carpes, Brèmes, Tanches, etc.La pêche ne s'en opère que partiellement à l'aide dedivers filets et la multiplication y est abandonnée àelle-même. Depuis une vingtaine d'années, on a surdivers points et notamment dans le Puy-de-Dôme,entrepris d'y multiplier les Salmones dont la chair està la fois plus délicate et plus recherchée.L a famille des Salmones ou Salmonidés est caractériséepar: une nageoire dorsale, deux pectorales, deuxabdominales, une anale et une caudale, plus unenageoire adipeuse formée d'un repli de peau contenantde la graisse,dépourvue de rayons et placée sur le dos,au-dessus du bord postérieur de l'anale. La bouche estgarnie de dents nombreuses et aiguës placées sur lesmaxillaires, le vomer, le palatin, la langue et les ospharyngiens ; ce qui signifie que les espèces de cettefamille sont toutes ichthyophages; les yeux sont placés


L EXPLOITATION DES LACS 100assez haut près du sommet do la tète; ils possèdent unevessie natatoire simple et allongée. Ce sont, en m ê m etemps, des nageurs rapides et énergiques, capablesde remonter tous les courants et d'exécuter, hors del'eau, des sauts prodigieux en hauteur.Ils n'habitent que les eaux vives,pures,claires,froidesbien qu'ils puissent être acclimatés dans des eauxmoins renouvelées et plus tièdes. Ils peuvent vivre,(sans doute parce qu'ils sont munis de vessie natatoire)à des altitudes considérables, (1,200 à 1,500 mètres)lorsqu'ils y sont nés; adultes, ils supportent mal unediminution notable dans la pression atmosphérique.Ils vivent d'insectes, d annélides (vers de terre ou lombrics),de poissons (Ablettes, Cardons, Loche, etc.),demollusques, etc. Les uns vivent dans les eaux saléeset n emigrent dans les eaux douces que pour frayer(Truite de mer); les autres passent une partie de leurexistence dans l'eau douce où ils sont nés, émigrentchaque année, pendant leur jeunesse, vers la mer, etdevenus adultes, habiteront désormais les eaux saléesne remontant dans les eaux douces que pour y frayerau printemps, (Saumon, Truite saumonée) : d'aucunshabitent constamment l'eau douce, mais en remontantle cours jusque vers les sources, afin d'y déposer leursœufs (Truite commune, Ombles, etc.): quelques-unsenfin, sont exclusivement sédentaires et frayent dansles lacs (Salvelin,Fera).Les Salmones, avec leur corps allongé et puissammentmusclé, sont, non pas seulement de rapidesnageurs mais encore de remarquables sauteurs.Dans leurs migrations ascensionnelles, les saumons


200 L'EXPLOITATION D E S L A C Sfranchissent des barrages de 6 mètres de hauteur (àLeixlif, en Irlande); on cite m ê m e des barrages plusélevés (7 à 8 mètres) qu'ils franchissent plus ou moinsheureusement. Si nous supposons que la taille du poissonsoit en moyenne de 1 mètre de long, à l'âge adultece serait un saut en hauteur égal à six ou huit foiscettelongueur;la Truite commune adulte n'a qu'environ0 m ,40de longueur moyenne et franchit des hauteurs de2 m ,50 à 3 m ,50 soit six à neuf fois sa taille. Pour sauter,les Salmones recourbent la queue, d'un côté, aussifortement que possible, puis, s'élançant en avant, ilsredressent brusquement la queue qui se détend commeun ressort en prenant un point d'appui latéral surl'eau; pendant le saut, ils ont soin de relever la têtedans la crainte qu'elle ne heurte le sol ou l'eau aumoment d e l à chute, et retombent sur l'un des flancs;lorsque le saut est m a n q u é , ils le recommencent etcelajusqu'à réussite ou épuisement de leurs forces.Les besoins et les progrès de la navigation, de l'industrie,de l'agriculture, ont a m e n é l'établissementsuccessif de barrages, d'écluses ou de retenues,sur ungrand nombre de cours d'eau navigables ou flottables,de ruisseaux et de torrents ; c'était fermer ces eauxauxpoissons Anadromes. Vers 1834, les échelles àSaumonsfurent imaginées, les uns disent par M . Smith deDeanston, propriétaire de grandes usines sur le Thiet,à Donne ^Cornté de Perth) ; les autres par M . Cooper,1D'après Milne-Edwards, on aurait constaté que le Saumon, dansles lacs, peut parcourir 8 mètres par seconde, 480 mètres par minuteou près de 29 kilomètres et même jusqu'à 32 et 40 kilomètres parheure.


L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C S 201propriétaire delapêcherie deBallisadare(comtédeGailowayj.Cesplansinclinés consistent en escaliers simplesou doubles, à chute continue ou alterne, qui font communiquerle bief inférieur avec le sommet de la chuteoudu déversoir; l'eau descend sur les degrés, en cascadesuniformes, en lames plus ou moins épaisses que lepoissonfranchit successivement et facilement. L'inclinaisonla plus favorable parait être celle du huitième dela base du plan, mais elle peut aller, à la rigueur, jusqu'aucinquième; la largeur des degrés simples doitêtre de l m .30 à l m #50, de chacun des degrés doubles oualternes deO r a ,80 à 0 m ,90En France, à la suite d'établissements de barragesdépourvus d'échelles à poissons ou munis d'appareilsde ce genre mal combinés, le Saumon avait abandonnécertaines rivières qui, autrefois, entretenaient de fructueusespêcheries : celle de Pontgibaud, sur la Sioule(Puy-de-Dôme), qui, en 1780, payait une redevancede 1,200 Saumons; celles de laDordogne, de la Vienne,de la Creuse, de l'Allier, de la Senioy, de la Moselle,du Blavet, du Lot, etc. Une loi du 31 mai 1865 avaitprescrit l'établissement d'échelles à poissons dans lescours d'eau publics ou privés, partout où le besoin enserait indiqué; mais, jusqu'à présent, elle a été rarementexécutée. « On étudie, en ce moment, un nouveausystème qui consiste à pratiquer, dans la partie mobiledes barrages, une ou plusieurs ouvèrtures entrele seuil et une barre d'appui sur laquelle reposent desaiguilles plus courtes que les autres. On a constaté» Voyez plus loin, p. 258.


202 L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C Sque les poissons parvenaient à franchir ces ouvertures(L. Vaillant.). » Si cet expédient réussit, il serait, à coupsûr, plus économique que les échelles ; mais il esturgent d'arriver à une conclusion dans l'un ou l'autresens.Les Salmones, en général, frayent en hiver ou aupremier printemps; le Saumon commun,denovembreii mai; la femelle dépose ses œufs, notablement plusgros que ceuxdes Cyprins et de couleur rose ou jauneorangé plus ou moins foncé, dans de petites fossesquelle creuse à l'aide de son ventre et de sa queue,ouvrant dans le sable et le gravier, de petits sillonsparallèles au courant. Lorsque le nid est achevé, lemâle, qui suit sa femelle avec assiduité, s'y couche àcôté d'elle ; tous deux battent l'eau de leur queue etles œufs de la femelle sont fécondés par la laitance dumâle, à mesure de leur émission ; la ponte se renouvelleà plusieurs reprises dans l'espace de quelquesheures, après quoi les femelles, aidées des mâles, recouvrentles œufs de gravier, les abandonnent au courantet s'éloignent. Les deux tiers au moins de cesœufs seront perdus, dévorés par les Écrevisses, lesAnguilles, les Chabots, les'Salmones e u x - m ê m e s . L'incubationvarie en durée avec l'espèce des poissons etla température de l'eau.Les principales espèces de la famille des Salmonesqui habitent surtout les lacs, sont :L e S a u m o n Salvelin (Salmo Salvelinus), le pluspetit des Saumons, car i l ne dépasse guère 0 m ,50à 0 m ,60 de long ; il est indigène des lacs de la Suède etde la X o r w è g e(Kœnigsee, Wildensée, Salzbourg, etc.).


L'EXPLOITATION DES LACS -203Son poids moyen varie de i kilog. 500 à 3 kilogs et aum a x i m u m \ et 5 kilogs. Il n'est pas migrateur et peutvivre, en France, jusquaux altitudes de 1000 r a IIfraye d'octobre à février; ses o>ufs transparents, decouleur jaune pâle, ont environ 0 r a ,005 de diamètre ;la femelle les dépose sur les bords caillouteux du rivageL a T r u i t e c o m m u n e (Salmo Fario ySalar Ausonii).On la trouve dans tous les cours d'eau de France etm ê m e d'Europe à eaux claires et froides, qui descendentde montagnes élevées et coulent sur un fondde sable et de gravier (Moselle, Meuse, Allier, Ain,Doubs, etc.), surtout en se rapprochant de leurssources ; dans les torrents des Alpes et des Pyrénées(Sorgue, gaves divers) ; enfin, dans la plupart des lacsà eaux limpides dont l'altitude ne dépasse pas l,000 m(de Genève, de Constance, de Lucerne, de Joux, deChàlin, des Rouges-Truites, etc.). Les couleurs quinuancent sa robe varient, non seulement avec l'âge4mais aussi avec la nature des eaux ; d'après le docteurTurck, les truites d'étang auraient la tête pluslongue et le corps plus effilé que celles des eaux vives ;celles de Plombières seraient plus brunes que celles dela Moselle ; plus la croissance du poisson a été rapide,plus sa teinte serait pâle ; plus lente, plus foncée.Elle se nourrit surtout d'infusoires, d'insectes (Diptères-mouchesde mai, névroptères, hémiptères, etc.)de petits crustacés et mollusques, d'annélides (lom-1Pendant le jeune âge, ses flancs sonl garnis de lâches transversalesqui s'effacent progressivement.


204 L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C Sbries) de frai de poissons et de petits poissons m ê m e ;elle ne mange que, le matin vers le lever du soleil, etle soir vers l'heure de son coucher. Adulte dès l'âge dedeux ans, elle pond alors de 200 à 500 œufs; à troisans, de 800 à 1,000 ; à quatre ou cinq ans, de 1,500à 2,000. Ces œufs, de la grosseur d'un grain de chènevis,d'unjauneclairambré, et translucides, éclosentaprès 100à 120 jours d'incubation naturelle ; larésorbtionde la vésicule ombilicale s'opère, chez l'alevin,du vingtième au trentième jour. E n dehors de la saisonde la fraye, ce poisson se cantonne et s'écarte peud'un rayon déterminé et assez restreint. Il chasse ense tenant immobile, la tête au courant. Pendant lemilieu du jour, il s'abrite du soleil entre les pierresou à l'ombre des arbres. Sa taille moyenne est deO m ,35à 0 m ,40 de long, sur 0 r a ,04 à O m , 0 6 de haut; son poidsmoyen est de 0 kilog. 500 à 0 kilog. 800 ; il peutatteindrejusqu'à 0 m ,60 et 0 m ,70, de longueur et 2 à 3 kilogs depoids. Sa viande est blanche et très fine.L a T r u i t e S a u m o n n é e (Salmo trutta), longtempsregardée comme un hybride du Saumon et de laTruite commune, est aujourd'hui regardée commeune espèce distincte ; elle émigré comme le Saumon,de l'eau douce à la mer et revient frayer en eau douce ; 'sa chair est jaune saumon pâle.L a Truite des Lacs (Trutta variabilis) ' habitepresque tous les lacs de l'Europe dont l'altitude nedépasse pas 1, 000 mètres. Commune surtout dans leBassin des Alpes, elle est de formes plus trapuesque la Truite commune et porte plus longtemps la l i ­vrée du jeune âge. Elle remonte dans les affluents


L ' E X P L O I T A T I O N DES LACS 203••lacs, pour y frayer, de novembre à mars; sesA. GOMN, Pisciculture.


206 L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C Sœufs sont à peu près semblables à ceux de la Truitecommune. Sa taille moyenne est de 0 m , 40 à 0 m , 50 delong et son poids moyen de 1 kil. à 1 kil. 500; ellepeut atteindre jusqu'à 0 m , 80 et 0 m , 90 de long et4 à 5 kilos de poids. Sa chair est rosée.L a Forelle ou Truite argentée (Fario argenleus)se rencontre dans les lacs d'Ecosse, de Genève, deConstance et quelquefois dans le haut Rhône,On trouve encore, dans les lacs de l'Ecosse et del'Irlande: les Truites Gillaroo ouGizzard (Trutta Gillaroo)et de Lochleven ( T. cœcifer) ; et en Algérie, laTruite à grandes taches (Truttamacrostigma).*Fig. 59. — Le Corégone Fera.L ' o m b l e o u o m b r e c o m m u n ou d'Auvergneappelée aussi Omble à écailles, (Thymallus vexillifer)se rencontre dans les rivières ombreuses des montagnesde l'Auvergne, de la Forêt-Noire, desArdennes,du Condroz Belge, etc ; il est commun dans les lacsde l'Auvergne qu'il quitte m o m e n t a n é m e n t , de marsà mai, pour aller frayer dans leurs affluents. Sesœufs jaunes sont de la grosseur d'un petit pois. Il ales m ê m e s m œ u r s et suit le m ê m e régime que la


L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C S 207Truite. Sa taille moyenne est de O m 25 à 0-,30 delong et son poids moyen est de 0 kil. 400 à 0 kil. 000.L ' O m b l e Chevalier [Salmo Vmhln) (fig. 58) estindigène du lac de Genève. Ses dimensions, poids etm œ u r s sont les m ê m e s que pour l'Omble commun,si ce n'est qu'il fraye de novembre à mars et que sesœufs sont un peu plus petits, sa chair est saumonnée.Il a été importé dans un assez grand nombre denos cours d'eau où on le retrouve accidentellement(Ardennes, Vosges, Sioule, Rhin, Moselle. Meuse,Chicrs, Doubs, Rhône. Sorgue, etc). Il est assez commu n dans l'Europe Septentrionale et en Angleterre;il habite les lacs de la Suisse, de l'Autriche, de laBavière des lies Britanniques. Il réside d'ordinairesur les grands fonds et n apparaît à la surface quedans la saison des amours. Il redoute la chaleur plusque le froid.L e C o r é g o n e Fera {(•ovegonm Fera) (fig. 59) estégalement un poisson de fond. On ne le rencontrespontané en France, que dans les lacs de Genève etdu Bourgef. Il a été introduit en 1804, dans le réservoirdes Settons ^ Yonne). Il fraye en novembre décembre;ses œufs sont très petits et légers; leur incubationdure de GO à 90 jours ; la vésicule ombilicalede l'alevin se résorbe après 15 k 20 jours. Il se nourritd'insectes, de vers, de petits crustacés et surtoutde petitsmollusques.L e C o r é g o n e L a v a r e t ou de W a r t m a n n (ÇoregonusLaearetus^ W a r t m a n a i ) (fig. 60) a les m ê m e sm œ u r s et le m ê m e habitat que la Féra; de m ê m equelle il a 0»,40 k 0 m ,50 de long et pèse de 1 kil. à


Î / E X P L O I T A T I O N I>F.S L A C S1 kil. 500; l'unet l'autre ne dépassent g u è r e o m 60 delong et 3 Kilos de poids.L e C o r é g o n e M a r ê n e ou grande Marène (Coregowtsmrtrma) parait < 4 , tre indigène du lac de Genève,d'où on f a transporté dans les lacs du Brandebourg.On peut l'acclimater en eaux d'étangs de profondeurmédiocre ; il y peut atteindre le poids de 3 à \ kilos.L e C o r é g o n e H o u t i n g {Corcgoau* oryrhynchns x serencontre dans les rivières du nord-est, de la Francequisont en communication avec le Rhin et la Meuse danslesquels il remonte de la mer du nord, dans le but defravor. à l'instar du Saumon et de la Truite de mer.L e C o r é g o n e P a l é e (C. P


210 L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C Smentaire, moins carnassière, moins difficile sur lanature des eaux, sera pense-t-on plus facile à propagerque le Corégone commun ou Féra, qui ne prospère,pense-t-on, que dans les eaux provenant des terrainsprimitifs 1Les pisciculteurs de l'Europe Septentrionale semblentse louer particulièrement de l'élevage de plusieurshybrides. M . Frantz Retenbacher, pisciculteurà Sulzbach près d'Ischl (Autriche), produit et élèvedes métis de Truite et de Salvelin (Omble Chevalier).« Avec beaucoup de pisciculteurs allemands, il considèrel'Omble Chevalier et les hybrides qu'on en obtientpar un croisement avec la Truite, comme s'accommodantmieux que celle-ci de la vie en bassins etcomme étant moins qu'elle sujets aux maladies causéespar le manque d'espace et l'usage d'une nourritureartificielle. Ces poissons, moins carnassiers quela Truite, sont aussi moins enclins à s'entredévorer,quand on laisse, dans un un m ê m e bassin, des sujetsd âges différents ... M . le professeur Rasch, de Christiania,recommande l'élevage des hybrides inféconds,de préférence aux espèces pures, parce qu'ilsse développent plus vite, M . Hanson, de Stavanger(côte ouest de la Norwège), s'est également fort bientrouvé du croisement, (hybridation) de la Truite ordinaireavec l'Omble Chevalier.2»Les lacs ne sont, en somme, que des étangs naturels,alimentés par des eaux ordinairement plus abondantes1Journal le Temps, 21 avril 1881.3Raveret Wattel, ul suprà, pp. 23-239.


L EXPLOITATION DES L A O 211plus vives pluspures ; c'est surtout dans les pays de montagneset aune altitude plus ou moins élevée qu'on lesrencontre, depuis 375 mètres (Lac de Genève; ou 475mètres (lac de Kan tiia. Ain / tjusqu'à M «M; mètres lacPavin, Puy-de-Dôme) et 2.875 mètres (lac du colMauron, Basses-Alpes). Quelques-uns sont traverséspar un fleuve M e Genève, Hhônojm u n erivière (deSaint-Point, Doubs) et sont les plus poissonneux;d'autres sont exclusivement alimentés par les eaux depluie ou de glaciers (de Olairvaux, Jura — de Gers,Haute-Savoie Tous ne sont pas utilisables pour lapisciculture, parce que les plus élevés sont, chaqueannée, recouverts d'une glace épaisse durant 6 à10 mois;ainsi, l'étang noir ou de Lanoux, situé sur lamontagne d'Olette ^Pyrénées-Orientales), à l'altitudede 2,151 mètres est gelé de septembre à juillet; le lacdcMontcenis, prèsde Tavernettes (Savoie)àraltitude de1,013 mèlresgèle durant cinq à six mois. L'altitudepeut être, jusqu'à un certain point, rendue tolérablepar une notable profondeur de l'eau.On sait, en effet, que la densité des coucbes d'eaudouce diminue à mesure que la température s'élèveau dessus ou descend au dessous de -f- 4° 17 C ; cescouches se superposent par ordre de densité, les pluslourdes tombant au fond, les plus légères montant àla surface. Les couches superficielles, échaufféesdurantle jour, rayonnent pendant la nuit, se refroidissent,descendent et sont remplacées pard'autrespluslégères.Les variations diurnes de température, aussi bien queles variations saisonnières, ne paraissent pas se fairesentir à une profondeur supérieure à 100 ou 125 mètres.


212 L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C SLe courant vertical de déplacement contribue à établirun certain équilibre relatif de température etaussiàrenouvelerl'aérationdesdiverses couches dans lesquellesil se produit. E n cas de gelée, la glace formée à lapartie supérieure préserve du refroidissement lescouches d'eau qu'elle recouvre comme d'un manteauprotecteur.1On rencontre donc, dans les lacs profonds, à 100ou 125 mètres de la surface, une zone à températureà peu près constante de -f- 4° 17 (soit 4 à 5° C), danslaquelle les poissons trouvent un abri contre le froid.Lorsque la surface est recouverte de glace, surtout sicette glace est en contact immédiat avec la surface del'eau, celle-ci ne s'aère que difficilement; mais on saitqu'à la température de + 4 à + 5° les poissons ne mangentpas, sont comme engourdis, font peu de mouvements,respirent peu c o n s é q u e m m e n t ; ils sont d'ailleurspeu nombreux, dans ces lacs élevés, relativementau cube d'eau. Telles sont les considérations quiexpliquent comment on trouve d'excellentes TruitesSaumonées dans le lac de Montcenis, qui à l'altitudede 1,913 mètres, reste gelé pendant cinq à six mois,mais présente des profondeurs de 150 à 250 mètres.Il faut observer pourtant que les seuls poissons munisde vessie natatoire, comme les Salmonidés, Cyprins,Esoces, Percoïdes, etc, peuvent vivres à des altitudesconsidérables, cet organe leur permettant de modifier* Il n'en est pas de même dans les fleuves et rivières où, dans lemême cas, toute l'épaisseur d'eau en mouvement prend la même température,et où l'on voit les glaçons se former sur la couche pluspaisible du fond.


L ' E X P L O I T A T I O N D E S T ACS 213•a densité de leur corps pour la mettre en harmoniea ver celle de l'eau. Encore, est-ce à la condition qu'ilssoient nés sur les lieux m ê m e ou qu'on les acclimategraduellement, s'ils sont adultes ; qu'enfin, si on lesimporte de lieux plus bas. ce sera sous forme dVeufsfécondés que l'on fera éclore à l'altitude ou l'on veutlesélever.L'exploitation deslacs est le plus souventabandonnéeaux lois et aux forces naturelles ; entre les espèces quiles ont spontanément peuplés, règne depuis longtempsla lutte pour l'existence, et l'équilibre s'estétablidans des termes plus ou moins favorables à nés vues,suivant que la nature des eaux, leur nutritivité, lesconditions atmosphériques, etc., favorisent davantagetelle ou telle espèce, les mangeurs ou les mangés.En pisciculture industrielle en effet, la solution duproblème consisterait dans l'imitation des procédés dela nature : faire la nourriture abondante pour entretenirle plus fort poids de poisson possible relativementau cube d'eau, multiplier l'alevin de poissons victimes,les mollusques,etc; réunir les conditionsles plus favoablesà la pullulation des insectes préférés ; faire artificiellement,en un mot, de l'alimentation naturelle. Lafécondation et l'incubation artificielles sont des expédients,ce ne sontpasdes systèmes; on peut y recourirdans des cas donnés, endehors desquels on doit faire oulaisser agir la nature bien secondée. L'alimentation artificiellese comprend dans les viviers, elle n'a plus deraison d'être dans les lacs. A u x petites surfaces, la piscicultureintensive; aux grandesétendues, lapiscicultureextensive. Ceci ne veut pas dire pourtant que l'on


C2H L ' E X P L O I T A T I O N D E S L A C Sdoive abandonner les lacs à e u x - m ê m e s ; il faut, bienentendu, les préserver du vol, de la gelée, de l'invasiondes oiseaux et des poissons de proie; il faut, nonmoins attentivement, étudier les variations qui sereproduisent dans le peuplement, de façon à être toujoursprêt à rétablir l'équilibre menacé ou rompu : lesdeux écueils seraient, en effet, l'épuisement du fondpar la multiplication exagérée du poisson blanc oudesavec exubérance ; après un certain temps, leursvictimes; la mort par inanition des voraces, par lemanque de proie.Les lacs, par la natures de leurs eaux vives et limpides,conviennent bien mieux encore aux Salmonesqu'aux Cyprins ; cependant, les Ablettes, la Vandoise,le Goujon, de m ê m e que la Perche et le Brochet, s'yplaisent et s'y multiplient volontiers. Comme les Salmonescroissent plus rapidement et plus économiquement,comme surtout, ils se vendent plus cher que leBrochet et la Perche, on supprime aussi complètementceux-ci que possible et on les remplace par les diversesespèces de Truites, Ombles, Corégones ou autres Salmonidés,à côté desquels on multiplie le poisson blanc,les mollusques, etc., indispensables à leur alimentation.Les lacs ne pouvant, d'ordinaire, être vidés, on nepeut les pêcher que partiellement aux filets ; il enrésulte, surtout quand l'eau aune notable profondeurque nombre de belles pièces échappent longtemps à lacapture, détruisent les autres espèces et se multiplientdescendantsmeurent de faim, leur nombre se limite et lablanchaille se multiplie à son tour, et ainsi de suite.


L EXPLOITATION DES LACS •2 iC'est ainsi que dans nos grandes forêts les essencesalternent entre elles, que le charme succède auhêtre, les résineux au feuillus, tantôt au profit, tantôtau détriment de celui qui les exploite. L'habileté suprême,dans l'exploitation des lacs consiste à maintenirsoigneusement un équilibre, une harmonie quiseuls peuvent assurer le produit. On y parvient parune surveillance vigilante, par des pêches intelligentespar des repeuplements logiques.


C H A P I T R E V I ILE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESCe qui fait le prix d'une denrée quelconque, c'est lerapport entre les besoins ou la demande et la productionou l'offre ; demande ou offre plus forte ou plusfaible font la hausse ou la baisse. Ce qui fait le profitd'une industrie c'est, ou la multiplication des produitsavec la stabilité des prix de vente, ou bien un ralentissementdans la production avec des prix plus élevés.U n excédent d'importation, un ralentissement dansl'exportation, consommation et production restantles mômes, déterminent également la baisse ou lahausse.Or, le prix de la viande de boucherie va toujourscroissant parce que la consommation s'élève avec l'aisancegénérale, et que la production ne peut s'accroîtredans la m ô m e mesure que les besoins. Leprix du kilog. de viande de bœuf, à Paris, étaiten 1854, de 1 fr. 10; il a été, en 1884, de 1 fr. 52, soit,en trente ans, une augmentation de plus de 48 pour 100,due en partie seulement à la diminution de valeur dusignemonétaire.S'il y a un moyen, sinon de faire diminuer le prixde la viande de boucherie, du moins de l'empêcher de


LE DÉPEUPLEMENT LES EAUX DOUCES 217croître dans une aussi rapide et régulière proportion.c'est évidemment, soit de réduire sa consommation,soit d'accroître la production, ou enfin de la remplacerpar de plus grandes quantités de viande d'autrenature, mais équivalentes, comme le gibier, lavolaille,le poisson, etc. Il est bon de savoir que la consommation,en viandes de toute nature, de Paris et de laFrance entière se décompose très approximativementcomme suit, de nos jours :NATURE DBS VIANDES PARIS LA FRANCEKspèco bovine (veau, varlie, bœuf).— ovine (mouton, chevreau).— porcine (porcelets, porcs).kilosU.710 ]1.1.3G0kilns12.630 |3.1 Si)lil.2n 1 ..»»ifli ;wo •2i.s:,(i M, «220 î.ssorj.n.ui3. KM»311.1)0(1Ainsi, la viande de boucherie fournit les trois quartsou 75 pour 100 de la consommation de Paris enviande et 83 pour 100 de la consommation de la France.Les autres viandes ne fournissent qu'un appoint de25 pour 100 à Paris et de 17 pour 100 à la France; etdans ces chiffres, nous constatons, à Paris,36 pour 100en volaille, 48 en gibier et 16 seulement en poissonsd'eau douce ou salée : pour la France, ces proportionsdeviennent 13,060. 1,510 et 63.530 pour 100.Cette consommation donne, en total, pour Paris (po-A. GoaiN, Pisciculture, 7


218 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESpulation de2,240,000 âmes), 28 963,200 kilg. de poissons,et pour la France (population de 38,000,000âmes), 117,800,000 kilog. Ces quantités se décomposenttrès approximativement comme il suit :ESPÈCESDE POISSONSTotalePARISpartêteetpar anLA FRANCEparTotale tête etpar anTOTAUXPoisson d'eaudoucePoisson d'eaude merkilos4.463.20024.500.000kilos2,00510,025kilos15.536.800102.263.200kilos0,4072,603kilos20.000.000126.763.200Totaux.. 28.963.200 12.030 117.800.000 3.100 146.763.200L a consommation d'un Parisien est donc, pour lepoisson d'eau douce, cinq fois plus élevée; pour lepoisson de mer, quatre fois, et, pour le poisson en général,de quatre fois et quart, que celle d'un autreFrançais moyen. Le produit de la pêche en poissonsfrais atteint 20,000,000 kilos pour l'eau douce et126,763,200 kilos, pour la mer, les embouchures et leslagunes. A ce dernier chiffre, il faudrait ajouter, annéemoyenne, 160 millions d'Huîtres, 350,000 kilos deMoules, 175,000 kilos d'autres Coquillages, 1,800,000Homards, Langoustes ou Crabes et 1,200,000 kilos deCrevettes roses et grises soit ensemble 3,525,000 kilos,les Huîtres mises à part.L a consommation de Paris en poisson d'eau douceest évaluée à 5,350,000 francs : celle en poisson de mer


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 219à 24,500.000 francs, ou ensemble 20,850,000 francs ;celle de la France peut êtreestiméeà 12.000,000 francspour l'eau douce et à 5.500,000 francs pour l'eau salée,ensemble 67,000,000 francs. Il faut joindre à ce chiffre1,400,000 francs pour les mollusques (Huîtres,Moules, etc.), 2.500,000 francs pour les Crustacés (Homards,Langoustes. Crevettes, etc.), 1,800.000 francspour les amendements marins, enfin 3 millions pour lapêche à pied, et nous arrivons à 78,500,000 francs pourle revenu moven annuel tiré de la mer. Ce sontlà des chiffres importants et qu'il nous semble utileet prudentd'étudier.M.deTolosan, en1788.n'évaluaitleproduitdelapêchefrançaise en eaux douces et salées qu'à 10 millions defrancs ; on pense qu'il était dans l'erreur et M .Arnouldcroit pouvoir doubler ce chiffre, pour la m ê m e époque,et il se trompe à son tour en n'évaluant qu'à 10 millionsle produit de la mer. Chaptal, en 1812. n'étaitpasdavantage dans le vrai en estimant à 20 millions lerevenu des rivières et marais en poissons et crustacés 1Dans les temps plus modernes, M . de Forcade d e l àRoquette portait ce chiffre à 14,480,000 francs,(en 1867); M . de la Blanchère enchérissant (en 1873)le portait à 19,544,000 francs; enfin M . Chabot Karlen(en 1882) le montait à 25 millions.Le produit en argent des pêches dans l'eau douces'est incontestablement accru depuis cinquante ans;est-ce parce que la récolte en poissons a a u g m e n t é ?Non, sans doute, puisque, dès 1850, le rapport d'une1Quoique la superficie en étangs fut alors relativement considérable.


220 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESCommission officielle recommandait au Ministre del'Agriculture et du Commerce l'emploi des procédés defécondation artificielle révélés par Gehin et R é m y pourrepeupler nos cours d'eau, dans un grand nombre desquelsil constate « la rareté croissante du poisson ».C'est d'ailleurs pour repeupler la Moselotte que les deuxpêcheurs de la Bresse, en 1842, réinventèrent la fécon-.dation artificielle que Boccius mit en œ u v r e ,à son tour,pour repeupler plusieurs rivières de la Grande-Bretagne.D'un autre côté, il est incontestable que, depuis cinquanteans, la superficie en eau a notablement diminué dufait du dessèchement d'un grand nombre d'étangs (Sologne,Brenne, Puisaye, la Double, Bresse, Forez, etc.).Tout au plus a-t-on ouvert quelques canaux de navigationet d'irrigation. La statistique officielle de 1836enregistrait comme superficie, en :Rivières, lacs, ruisseaux, canaux de navigation. 459-797 h. ) f i f iQ 9n 8 hEtangs, abreuvoirs, mares, canaux d'arrosage. 209.431 jooy.-^sn.La statistique non moins officielle, mais moins complètede 18-46, nous donne les chiffres que voici :Étangs 177.169 h. jAbreuvoirs, mares, cmaux d'irrigation... 17.373 > 206.814 li.Canaux de navigation 12 272 1Ces chiffres, que reproduit, sans variations, la statistiquede 1866, sembleraient indiquer que la surfaceoccupée par les rivières, lacs et ruisseaux est de447,525 hectares, ce qui nous semble dépasser toutevérité. Quant aux étangs, pour ne citer qu'un fait, le


LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 221département de l'Ain, où ils couvraient 22,000 hectaresen 1820, puis 18.854 en 1812 et 15,50\ en I8G9,n'en compte plus guère que 12,000 aujourd'hui. Et,partout ailleurs, les progrès do la culture et de l'hygiènepublique ont produit des résultats identiquesdont la stastistique officielle ne rend aucun compteAussi avons-nous cru pouvoir, actuellement, évaluerla surface en eaux douces à 200.726 hectares. (Voirchap. r r .)Ainsi, la superficie en eau aurait diminué de plus demoitié et le produit en argent a augmente d'un tiers,bien que l'on se soit plaint et que l'on se plaigne encore,chaque jour, du dépeuplement des coursd'eau.C'est donc que la consommation croissait et que lesprix s'élevaient, à mesure que la denrée se faisait plusrare.La consommation croissait: il est bien entendu que,de la fin du siècle dernier jusque vers 1830, la consommationen poisson avait diminué par suite de la suppressiond'un grand nombre de jours de diète maigreet d'une négligence croissante dans l'observation descarêmes religieux; mais, depuis 1840 environ, une>lus grande aisance, un plus grand désir de bien-êtreont fait de plus en plus rechercher la variété dans lerégime. Si les chemins de fer. en se multipliant,n'avaient fait pénétrer le poisson de mer dans les villesles plus reculées, il ne resterait plus, et depuis longtemps,ni une seule Truite, ni une seule Écrevisseàdans nos ruisseaux de montagnes, et toutes nosrivières seraient complètement désertes.


222 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESL a consommation moyenne annuelle des Parisiensen poissons d'eau douce a graduellement m o n t é :de 0 kil. 457 par tôle en 1804à 0 401 — — 1826puis à 0 408 — - 1851à... 0 655 — — 1853à 0 023 — — 1860à 1 460 — — 1869et à 2 005 — — 1884Soit une augmentation de 340 pour 100, par tête, etpar an, en quatre-vingts ans, en m ê m e temps que lapopulation passait de 580,000 à 2,240,000 habitants,croissant ainsi de 280 pour 100. Quant à la consommationabsolue, elle s'élevait de 265,000 à 4,463,200kilos.On admettait, au commencement du siècle, que chaquehabitant de Paris consommait, en moyenne, troisfois autant qu'un citoyen moyen du reste delaFrance;aujourd'hui, le Parisien consomme près de cinq foisautant que ses autres compatriotes. La consommationtotale du poisson d'eau douce aurait donc progresséde 4,625,500 kilos à 20,000,000 kilos environ, soit partête, 0 kil. 153 à 0 kil. 407.Voici, d'un autre côté, dans quelles proportionss'élevaient les prix d'après des documents statistiques:ESPÈCES DE POISSONS 1836 1884 AUGMENTATION0 fr. 80 le k.1 » —1 fr. 25 le k. i! 66 p. 0/0i 75 — :Brochet, Perche, Anguille.Truite, Saumon2 » —3 » —46 » -» 100 p. 0/0i


LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 223Soit une augmentation moyenne de valeur de80 pour 100 qui nous parait dépasser notablement la dépréciationdu signe monétaire.La denrée se fait plus rare: la superficie de nosétangs a diminué de 60,000 hectares environ et lemode de leur exploitation est resté exactement lem ê m e ; les eaux des fleuves et rivières navigables etflottables, dont la pêche est mise en adjudication parl'État ont été mieux administrées et surtout mieuxsurveillées,mais elles ne représentent m ê m e pas un produitd'un million de francs pour le fermage et de cinqmillions de kilos pour le fermier. Quant aux rivièresqui ne sont ni navigables ni flottables et aux ruisseaux,ils ont été livrés plus que jamais aux maraudeurs etbraconniers qui complétaient, à l'envi, l'œuvre dessécheresses et des inondations successives.L ' œ u v r e de dépeuplement de nos eaux a certes exigéplus d'intelligence, plus de travail et plus d'argent quen'en eût d e m a n d é leur surveillance et m ê m e leur repeuplement;et on peut dire que tout le monde y a prispart, m ê m e les meilleurs amis des poissons.Les maraudeurs ont, à coup sûr. joué le rôle le plusactif et organisé le braconnage du poisson en une lucrativeet peu périlleuse industrie qu'aucune indiscrètepolice ne venait gêner et de laquelle les plus honnêtesgens ne se faisaient souvent scrupule de se rendrecomplices par recel, en lui offrant un débouché. L'absencesuffisante, on pourrait presque dire complète,de police permet la pêche en toutes saisons, à touteheure de jour et de nuit, avec tous engins, de poissonset écrevisses de tous âges et de toutes dimensions,


224 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESm ê m e en temps de fraye. Il ne faut donc pas s'étonnersi les braconniers ont cherché à économiser leurspeines en accroissant leurs gains. On les a v u successivementmettre en œ u v r e : la chaux vive, le chlore,l'épuisement, la coque du Levant, la dynamite, etc 1 .Lorsque, par hasard, nos délinquants sont pris, dedeux choses l'une, ou bien ils sont insolvables, et passentalors en police correctionnelle où ils sont punisdequelques jours de prison, ou bien ils possèdent desbiens au soleil et alors l'Administration transige aveceux, supprimant ainsi la crainte de la prison et du casierjudiciaire.Et, notez bien que ce ne sont pas toujours et seulementles maraudeurs de profession, mais bien aussiles enfants envolés en école buissonnière, les petits1La plupart de ces manœuvres sont fort anciennes et Aristote en adécrit quelques-unes qui leur sont fort analogues : « Le Bouillon blanc(Phlomos ou Molène, Verbascum lhapsus) fait mourir les poissons.Beaucoup de pêcheurs s'en servent pour prendre les poissons dans lesrivières et les lacs; les Phéniciens l'emploient même à l'égard despoissons de la mer. Mais cela n'est pas le seul moyen usité pour lapèche, il en existe encore deux autres. Comme on a observé que,dans l'hiver, les poissons fuient les endroits profonds des rivières (?),parce que, en général, l'eau douce est froide, on creuse un canal horsdu fleuve, après on le couvre de pierres et d'herbes, on en fait commeune caverne qui communique avec le fleuve; lorsque la gelée survient,on pêche dans celte fosse avec .les nasses. L'autre moyen estemployé aussi bien en été qu'en hiver. On fait, au milieu du fleuve,une enceinte de menues branches et de pierres. On y laisse une entréedans laquelle on place une nasse et on y prend ensuite les poissons enôtant les pierres de l'enceinte. » {Hist. des anim., lib. VIII, cap. xx,trad. Apostolidès.) On sait que les habitants des îles de l'archipelemploient encore la molène pour capturer le poisson. Nos pêcheursfrançais connaissent également de très ancienne date les propriétésnarcotiques de celte plante qu'ils écrasent pour en jeter le jus dansun vivier, une mare ou un ruisseau.


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 225pâtres, les jeunes gens et m ê m e leurs parents ! '< Il estincontestable que la responsabilité de la ruine de no seaux revient, pour la plus large part, à nos populations.Dans la plupart de nos villages, le poisson estconsidéré comme un bien banal sur lequel chacun adroit de prise. Cueillir des noisettes dans le bois.cueillir une friture dans la rivière, pour le paysan,c'est tout un. Viennent une crue et des eaux jaunes,tout le pays sera sur les bords du cours d'eau, a r m équi d'un épervier, qui d'une trouble, qui d'un paniere m m a n c h é sur une fourche, raclant les fonds, fouillantles berges à tour de bras, ramassant non seulementles gros poissons, mais le plus mince frétin,n'épargnant rien. Tout cela se passe sous l'œil paterneldu garde champêtre et m ê m e du gendarme, nous enavons été témoin1>tCes voleurs trouvent toujours des complices directsou indirects: les complices directs, ce sont les maîtresd'hôtel, les restaurateurs, les particuliers e u x - m ê m e set non pas les moins instruits, les moins riches, ni lesmoins estimés, qui achètent, à beaux deniers, le produitdu vol. Les complices indirects, c'est l'Administrationelle-même, avec sa coupable insouciance. Amaintes reprises, M . Chabot Karlen. membre de laSociété Nationale d'Agriculture de France, a dénoncéà cette savante compagnie, en m ê m e temps qu'il lesdénonçait dans les journaux d'agriculture, les infractionspubliquement commises à la loi et aux règlements,dans les Halles Centrales de Paris, sous lesyeux1De Ctorville. Le Temps, n° du 3 janvier 1886.


226 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESde l'Autorité volontairement aveugle; il constatait queTon y mettait, chaque a n n é e , en vente, des Truitesœuvées de 200 grammes à 3 kil., à dos époques où lapêche est prohibée, et des poissons n ayant ni l'âge nila taille réglementaires. Dans le Tarn-et-Garonne, onavait dû faire, par hasard, un procès-verbal pourdélit de pêche : c'était contre un juge de paix!Une autre Administration, celle des Ponts etChaussées, n'apporte peut-être point à l'exécution desrèglements qui lui sont confiés, toute l'énergie et toutela surveillance désirables, notamment au point de vuedes barrages et des échelles à poissons. « En matière depisciculture, écrivait en 1878, un pêcheur de la Meuse,dans certains départements du Nord-Est, le service desEaux n'a d'autre préoccupation que de s'opposer à lapêche à la ligne dans les réserves, par la peur chimériquede la dégradation des ouvrages d'art. Bien quel'article 38 du cahier des charges du Droit de pêche,visé par l'Ingénieur en chef des ponts et Chaussées,prescrive des pratiques de pisciculture, les agents sebornent à frauder la loi et le bon sens et l'opinionpubliques, tantôt en autorisant des pêches d'épuisementdans le voisinage immédiat de la réserve, aumépris formel de l'article 17 du Décret du lOaoût 1875,tantôt en laissant installer le rouissage du lin et duchanvre, en pleine réserve, au mépris non moins formelde l'article 19 du m ê m e décret 1 »M . le marquis de Cherville, dans ses charmanteschroniques hebdomadaires au journal le Temps, m è n e* A. Hepp, le Nord-Est, V août 1878.


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 227la même campagne protectrice en faveur des poissons,depuis longtemps et confirme les m ê m e s faits : Nousconfessions, il va deux mois, écrivait-il le3 janvier 1886,que la répression annoncée du colportage de la Truiteet du Saumon, dont la pêche est interdite, nous inspiraitune médiocre confiance. Il nous asufïl d une promenadeà la halle pour acquérir la certitude que, cetteannée, comme les années précédentes, il ne manquaitpas plus d'accommodements avec la loi qu'avec le ciel. »Ainsi, voilà le Ministre de l'Agriculture qui, depuisquatre ans fait tous ses efforts pour organiser l'enseignementde la pisciculture en France, qui encouragela multiplication des alevins et contribue au repeuplementde nos cours d'eau; puis, voici les Préfetsdepoliceet de la Seine, qui, laissant violer les lois etrèglements, encouragent, par ce fait m ê m e , la destructiondu poisson. Gaspillage d'intelligence, detemps et d'argent !Certaines administrations municipales contribuentaussi à ce dépeuplement, mais inconsciemment et, onpourrait le dire, malgré elles. Voici la Seine qui, surson parcours de 800 kilomètres, balaie les détritus dedeux millions et demi d'habitants qui peuplent lesdix-sept villes, grandes ou petites, établies sur sesrives, sans compter ses affluents qui charient encoreles débris de consommation d'une population nombreuse4 Jusqu'ici, les eaux d'égoûtsde presque toutesnos villes, ce que les Anglais appellent le sewage, sont1La Marne seule arrose onze villes habitées par 85.000 âmes, surson trajet de 450 kilom. ; l'Oise sur 250 kilora., baigne dix villespeuplées de 54.000 habitants, etc.


228 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESdéversées dans le fleuve ou la rivière, qui les emportent:1a cité de Londres les emploie en irrigationsdans des terrains siliceux devenus très riches ; maiselle a dû adopter la doctrine du tout à tègoût, sansquoi le sewage ne présenterait pas une valeur fertilisanteassez élevée pour justifier son emploi dans laculture. Paris, avant peu sans doute, devra adopterce système, le seul praticable au point de vue de lapratique agricole et de l'hygiène publiqueEt non seulement les villes, les agglomérations humaines,mais aussi les fabriques, les usines, certainesindustries tout au moins, polluent les eaux pour lespoissons comme pour l'homme. « En aval des féculeries(dans la Plaine de Saint-Denis, près Paris) toutes lesherbes aquatiques disparaissent ; tous les mollusquespérissent. Les eaux déposent partout sur leur passagedes masses blanchâtres, poisseuses, sans consistance.Des grumeaux flottent dans le courant. L a surface secouvre d'écume ; l'eau exhale une forte odeur d'hydrogènesulfuré. L'examen microscopique montre queces masses blanchâtres et gluantes sont des Alguesou Conferves (appelées jadis Glairines, Barégines,Sulfuraires, Sulfuroses, Sulfurines, etc.), qui, lorsqueles travaux de féculerie ont cessé, périssent, se putréfient,remontent à la surface de la rivière et parleur décomposition, favorisent singulièrement le développementdes infusoires. »1Dès 1884, M. Georges Daremberg constatait, devant l'Académiedes Sciences, qu'un tiers des matières fécales de Paris vont à l'égoùt,et de l'égoût dans la Seine. Voyez Ogier, Projet de loi sur l'assainisïsèment de la Seine, et l'utilisation agricole des eaux d'égoût de laville de Parti. (Ann. d'Hyg. 1889. Tome XXf, p. 211 et 327.)


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES ±2\tDe m ê m e dans les eaux vannes des sucreries,M . Cloez a vu se développer une espèce de Conferveou d'Algue gélatineuse contenant une grande proportionde soufre, dont les débris altèrent l'eau desrivières et font périr les larves d'insectes, les Ecrevisses,les Poissons, et, d'une façon générale, tous lesanimauxaquatiques.« Les cours d'eau peuvent encore être souillés parcertains produits m i n é r a u xprovenant d'exploitationsminières. C'est ainsi que, dans le Puy-de-Dôme, unrapport du D r Nivet a constaté, il y a quelques annéesla souillure des eaux de la Sioule, au-dessous des Fonderiesde Pontgibaud, par le déversement des liquidesprovenant des laveries, des bassins de clarification etautres usines dépendant de l'exploitation de ces minesplombifères. Les eaux de cette rivière provoquent descoliques chez l'homme et chez les animaux, les chevaux,par exemple. Les vaches refusent d'y boire :celles qui y boivent deviennent malades, quelquesunesmeurent, d'autres avortent ou mettent bas un'fœtus mort. Les poissons, jadis très abondants dansce cours d'eau, ont diminué d'une façon notable, oum ê m e disparu. »« M . A. Gérardin a fait sur la purification des eauxde nombreuses recherches devenues classiques1qu'ila appliquées, près de Paris, sur la petite rivière du1A. Gérardin, Altération^ corruption et assainissement des rivicrcs.(Ann. dTfyg. Tome XLI1I, p. 5 et 261.) - Propriétés physiquesdes cau.r communes. Jhid. Tome XLVI, p. 1S3S.) — Allciation de laSeine en 1874-75, traitement des eaux d'ego nt. (Ibid. Tome XLVII,M " . )


230 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESCroult, qui de Gonesse à Saint-Denis, est particulièrementinfecte, en raison des eaux industriellesqu'elle reçoit. Le bétail refuse d'en boire ; les canardset les grenouilles fuient cette eau empestée.M . Gérardin, pour résoudre le problème de leur purificationà posé ce principe : il faut répandre leseaux très divisées sur un terrain préalablementdrainé.Le drainage est une condition indispensable ; il permetl'évacuation de l'eau et produit un appel d'air quidétruit, par oxydation, les matières organiques dissoutesdans l'eau, tandis que les matières solides sontretenues par le sol comme par un filtre. Quand le solest battu et non aéré, les eaux restent impures etsouillent les nappes souterraines, comme M . Marié-Davy l'a démontré n a g u è r e encore pour les puitscreusés autour du Père Lachaise, et en général pourles puits de l'intérieur de Paris. M . Gérardin a ainsiassaini l'eau du Croult et elle s'est peuplée de poissons,d'herbes vertes et de mollusques qui n'avaientpu y croître jusque-là. U n m è t r e carré de terraindrainé peut recevoir et oyxder par jour plus de*75 litres de liquide.4»A cette liste, il faudrait joindre celle de toutes lesindustries qui emploient en quantités appréciables lesacides, le chlore, le tannin, etc. (papeteries, blanchisseries,cartonneries, tanneries, etc.). « Les cours d'eausur lesquels se trouvent des teintureries, des sucreriesdes féculeries ou des fabriques de produits chimiques,sont absolument dépeuplés, et l'on cite certains dépar-1D r H. George, Hygiène rurale.


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 231tements, comme ceux de l'Aisne et du Nord, où iln'existe, pour ainsi dire, plus un seul poisson. Avecles procédés que la science met aujourd'hui à leur disposition,il serait facile aux propriétaires d'usinesd'épurer leurs résidus avant de les déverser dans lesrivières ; mais pour que les pouvoirs publics puissentles y obliger, il faudrait qu'ils en donnassent euxm ê m e sl'exemple et évitassent de contaminer les fleuves en yjetant leurs égoùts. De nombreuses réclamations ontdéjà été faites à ce sujet par les pêcheurs de la Seine,à propos de l'égoût d'Asnières \ mais elles sontjusqu'ici, restées sans résultats. Les poissons ont abandonnéle fleuve jusqu'à l'Eure, parce qu'ils n'ytrouvent plus l'oxygène nécessaire pour y vivre et lesSaumons ne se montrent plus dans la haute Seine,parce qu'ils sont arrêtés par les eaux empoisonnéesqu'ils rencontrent avantd'y arriver2>En 1886, M . Jousset de Bellesme, directeur de l'aquariumdu Trocadéro, et M . Jucherat, son préparateur,disent qne les pisciculteurs (ou mieux les pêcheurs),ont constaté depuis longtemps que le saumon indigène(commun-salmo salar) et m ê m e l'Alose ont cessé dese reproduire dans la basse Seine et ses affluents3.1En 1885, pourtant, la Compagnie des vidanges parisiennes, quiavait établi son dépotoir à Nanterre. fut condamnée à payer à neufadjudicataires de la pèche du lot situé immédiatement e \ aval de cetteville, une indemnité de 14.400 fr. pour les quatre années écouléesdepuis que leurs eaux vannes lancées dans le fleuve l'avaient polluéet écarté les poissons, portant conséquemment un notable dommagetant aux fermiers de la pèche qu'à la Fortune publique.» J. Clavé, Revue des Deux-Mondes, t. 1/X, pp. 602-603.1883.Jousset de Bellesme, Monit. des syndic, agric. u° 28, 7 novembre1886, p. 333.


232 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESDéjà, en 1864, M. P. Carbonnier écrivait 4 : « Jadis,un assez grand nombre de Saumons restaient dans laSeine ; aujourd'hui, on en prend à peine quelquescouples par an, entre Montereau et la mer. Dansl'Yonne, par la hauteur de Montereau, la pêche estmoins pauvre ; elle donne quelques centaines decouples par année. Somme toute, il est malheureusementtrop vrai que la migration des Saumons dansla Seine et dans ses aboutissants est bien moins grandequ'il y a quarante ans, car, au dire des pêcheurs decette époque, la pêche était dix fois plus abondante,soit au moment de la montée, soit au moment de ladescente 4 » Il est parfaitement évident que cette situationdu fleuve ne fera qu'empirer à mesure de l'accroissementde population, tant que l'on n v aura pascanalisé les eaux d'égouts jusqu'à la mer.Une cause complémentaire de destruction, ce sontles remorqueurs et autres bateaux à vapeur quisillonnent les fleuves, les bateaux à aubes surtout,qui détruisent un nombre considérable d'alevins, etm ê m e ceux à hélices dont le passage, élevant subitementle niveau de l'eau, chasse les œufs sur le rivageoù ils restent ensuite à sec. « L a circulation des bateauxavec les remous qu'ils produisent, le jeu desécluses et le faucardement des rivières ont aussipoureffet de détruire une partie des œufs de poisson déposésur les rives ou attachés aux herbes aquatiques.On ne peut guère éviter ces causes de destruction,puisque la navigation représente u n intérêt1Carbonnier, Guide pratique du pisciculteur, p. 165.


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 233supérieur à la pêche, mais on peut sensiblement enatténuer les effets, soit en retardant le fauchage desherbes Jusqu'après le moment du frai, soit en ménageantdes bras do rivières qu'on ne faucarderait pas etdans lesquels la pêche serait interdite 1Enfin, de ce que les poissons carnivores offrent laviande la plus délicate, il résulte que ce sont surtoutceux-là que l'on importe et multiplie, dans nos eaux,de préférence à tous les autres, et particulièrementles Salmones (Saumons. Truites, Ombres, Corégones,etc.), mais aussi le Sandre, le Silure, etc., tous dévorantsdes eaux qu'ils rendent de plus en plus désertesparce que l'on ne se préoccupe point de favoriser lamultiplication des poissons blancs, leurs victimes. U nforestier, qui est en m ê m e temps un chasseur, a confesséque le lièvre que l'on achète G francs à la hallea détruit pour plus de 20 francs de céréales, de fourrageset de bois ; le m ê m e avoue spontanément qu'ils'est fait pisciculteur, mais que le kilog. détruite qu'ileut pu vendre G francs, lui revenait à 50 francs. Heureusement,il en est de plus habiles, qui, se bornant àsuivre et seconder les lois naturelles, produisent despoissons avec profit.Et comment en pourrait-il aller autrement ? Tl estparfaitement inutile de porter des défenses dont on nepeut punir la violation, de faire des lois dont on nepeut surveiller l'exécution, d'édicter des règlementsdont tout le monde peut se rire impunément. Nonseulement cela est inutile, mais cela est m ê m e déplo-1J. Clavé, ut suprà, p. 603.


234 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESrable en ce que l'on provoque ainsi le mépris de la loiet de l'autorité, des administrations et de leurs agents.Les lois et règlements sur la pêche fluviale sont à peuprès parfaits, mais ils ne sont point exécutés, le plussouvent, faute du personnel nécessaire et faute aussid'impulsion suffisante. La surveillance s'exerce biensur les eaux du Domaine public, affermées ou concédées; elle est à peu près nulle sur les autres. Encorefaut-il, m ê m e quant au premières, exposer quelquesrestrictions : « Faute de surveillance, le braconnagedes eaux s'exerce sur la plus grande échelle,non seulement par des gens qui en font lemétier, mais m ê m e par les fermiers de pêche qui nese conforment pas aux règlements. Ces derniers netiennent, le plus souvent, aucun compte des prescriptionsrelatives aux dimensions des mailles des filetsou àl'époque pendant laquelle la pêche estinterdite S »>D'autres fois enfin, ce sont les conditions de repeuplementque l'Administration ne contraint pas assezénergiquement les adjudicataires à exécuter.Les garde pêches sont peu nombreux; leurs cantonnementss'étendent parfois sur 40 et m ê m e 50 kilomètres; ils sont peu payés et ne touchent que rarementune prime de capture, les délinquants de lapêche étant généralement insolvables, et l'administrationtransigeant d'ordinaire avec ceux qui peuventpayer. Notez bien que, à défaut d'une surveillance suffisante,on devrait punir les délits par une répressionénergique et par le rejet rigoureux des recours en* J. Clavé, ut anté,p. 602


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 235grâce et en remise de peines, afin d'inspirer, tout aumoins une rrainte salutaire ; et que, au contraire, onse montre souvent, pour ces braconniers, d'une paternelleindulgence.Il est hors de doute que la meilleure surveillanceest celle que les particuliers intéressés exercent oufont exercer pour leur propre compte; ainsi les gardesparticuliers des propriétaires de lacs, de viviers oud'étangs, des adjudicataires de pêche, etc. Il serait àsouhaiter que l'on pût former, en France, des syndicatsde pêcheurs qui pourraient organiser des sociétésde repression du maraudage comme les chasseurs enont formé contre le braconnage. L'exemple a déjà étédonné en 1876 par le syndicat des Pécheurs de laCanche, de la Ternoise et de leurs affluents, sous lenom de Société des Pêcheurs d'Hesdin, puis, en 1877par les Pêcheurs à la ligne de Boulogne-sur-Mer etpar plusieurs autres syndicats du Pas-de-Calais.Deux autres points faibles de la réglementation despêches fluviales sont l'attribution aux Préfets de l'ouvertureet de la fermeture de la pêche, puis celle dela Police de la pêche, au point de vue des interdictionspartielles et temporaires ou, en d'autres termes, de ladétermination des réserves.Pour fixer l'ouverture et la fermeture, le Préfetprend l'avis des Ingénieurs en chef et du Conseil général;la compétence de l'un et des autres, du derniersurtout, est souvent contestable, et, d'ordinaire, lesArrêtés Préfectoraux se reproduisent annuellementpar clichés, sans tenir compte des variations climaté-


236 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESriques, des besoins ou des ressources 4 . Pour ce quiest des réserves, nous pensons d'abord qu'elles ne sontpas suffisamment nombreuses : en 1876-84, dans leJura, elles ne s'étendaient qu'à 23 kilom. 360 mètresou 5 hectares 23, pour le Doubs, sur un cours afferméde 64 kilom. 392, soit moins d'un tiers en longueur, età peine un dixième de surface ; à 7,360 mètres sur84 kil. 902 mètres pour l'Ain 3; à 3,500 mètres sur18 kil. 900, de la Bienne ; nulle enfin pour la Loue.Puis, il nous apparaît que l'on est dans l'erreurlorsque l'on pense devoir faire passer les réservesd'unpoint sur un autre, sur le m ê m e cours d'eau, tous lescinq ou sept ans, durée ordinaire des amodiations. Quidit réserve ne dit pas seulement abri, refuge, maisaussi et surtout Frayère. Tous les cantonnementsd'une m ê m e rivière ne sont pas également favorablesà la multiplication de toutes les espèces de poissons ;aux unes il faut un lit sableux ou caillouteux, deseaux vives, pures, fraîches (Salmones, Barbeau,Alose, etc.); aux autres, des eaux tranquilles, desfonds vaseux et garnis de plantes (Brochet, Perche,Carpe, Tanche, etc.). Dans la première catégorie, serangent surtout les poissons à œufs libres ; dans laseconde, ceux à œufs agglutinants. Lorsque l'on aconstaté une bonne frayère pour ceux-ci ou pour ceux-1N'avons-nous pas vu lout récemment (1887-88), le Ministre desTravaux publics ayant pris une décision pour interdire, pendant lapériode prohibitive, le transporl des Saumons, le Conseil généralde la Loire-Inférieure et les syndicats de pêche de la Loire réclamerla liberté absolue de la pèche et du transport, alléguant que le Saumonne fraye que sur le littoral de la mer, au milieu des herbes marines !On ne saurait être ignorant avec une plus crâne désinvolture!!!


LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES ~2'Mlà, le bon sens veut qu'on l'établisse en réserve permanenteet qu'on la mette c o n s é q u e m m e n t en constanteinterdiction.Qyand à ceux qui veulent repeupler par la fécondationartificielle, nous les engageons à ne pointnégliger les fort intéressantes études faites parM . Bel grand, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées,chargé du service» de navigation de la Seine. « LesSaumons, dit-il, remontent la Seine et passent, sans yentrer, devant l'Eure. l'Oise, la Marne et le Loing.Tous quittent la Seine et entrent dans l'Yonne, àMontereau; ils passent, sans y entrer, devant laVanne, l'Armançon et le Serein. Tous quittent l'Yonnepour entrer dans la Cure; ils arrivent ainsi, par leplus court chemin, aux ruisseaux de granité danslesquels ils alevinent. »La Truite se trouve en abondance dans les ruisseauxdu granité, des calcaires oolitiques et de la craieblanche; jamais on n'en a vu dans les ruisseaux duLias, du terrain crétacé inférieur; elle ne se plait pasdans les terrains tertiaires. Ainsi, à l'aval de Nogentsur-Seine,la Seine reçoit, sur sa rive gauche, quelquesaflluents provenant de la craie blanche, l'Orvin notamment,qui sont remplis de Truites; deux ruisseauxnon moins limpides qui passent par Provins et quinaissent dans des sources é n o r m e s des terrains de laBrie, le Durtein et la Voul/ie, ne renferment pas uneseule Truite. La Carpe est rare dans les rivières àTruites.« L'écrevisse à pattes rouges n existe dans aucunerivière des terrains perméables à grandes sources; elle


238 L E DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESy est remplacée par l'Écrevisse à pattes blanches, bienmoins estimée { »L'Yonne prend sa source dans les terrains granitiquesdu Morvand (Nièvre); la Vanne, à Font-Vanne (Aube)dans le terrain crétacé; l'Armançon à Tugny (Côte d'Or)dans le terrain jurassique ; le Serein, à Beurey-Beaugay(Côte-d'Or) dans le m ê m e sol.De m ê m e , dans la Loire, les Saumons remontent laSèvre-Nantaise, la Vienne, puis la Creuse; l'Allier, laBèbre. l'Aix, le Lignon, l'Arroux et la Bourbince, quinaissent sur le terrain granitique. Dans la Garonne, ilsembranchent successivement la Dordogne, la Corrèzeet la Ceré. Ils pénètrent également dans les fleuves côtiersde la Bretagne, le Trieux,leGuer et le Leff, l'AberW r a c h et l'Aber Ildue, l'Odet, l'Aven, l'Ellé et l'Isole;le Scorff,le Blavet, etc. Ce serait peine, temps et argentperdus que de produire ou lâcher des alevins deSaumondans des ruisseaux, où ils ne remonteraient jamais plus.Ce n'est point en France seulement que s'est produitle dépeuplement des eaux douces, mais partout à peuprès, dans la vieille Europe, et m ê m e jusque dans leNouveau Monde. Il n'est pas sans intérêt de voir quellessolutions on a trouvées, à l'étranger, à ce problème derepeuplement.En Angleterre, le but principal de la production piscicoleest la multiplication du Saumon par les moyensnaturels et artificiels : c'est la seule viande de poissond'eau douce qui, avec la Truite des lacs écossais y soitvraiment estimée. C'est en 1842 que l'on c o m m e n ç a à or-1Belgrand, Comptes rend. Acad. des Sciences,30mars 1874,p.878,


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 239ganiser, en Irlande, une surveillance de la pêche qui en1861 et 62,s étendit à l'Écosse et à l'Angleterre.*, Le paysest divisé en districts ou associations (d'initiativeprivée)de pêche qui embrassent un ou plusieurs bassins derivières ayant leur embouchure dans la mer. Les propriétairesriverains, les concessionnaires du droit depèche et les pêcheurs forment ces associations qui subviennentaux frais de surveillance de la pêche et possèdentchacune un conseil électif. A la tête du servicese trouve une autorité supérieure, munie de pouvoirsétendus, chargée de diriger les associations d é p ê c h e ,de résoudre les difficultés susceptibles d'entraverl'action administrative, enfin d'éclairer le gouvernementsur les questions où il doit intervenir. Ce sontles commissaires-inspecteurs, fonctionnaires n o m m é spar les secrétaires d'État, touchant un traitement élevésur les fonds du Trésor Public et ayant dans leursattributionsla pêche fluviale et la pêche côtière, y compriscelle des Huitres. Ils ont pour auxiliaires les conseilsde conservateurs qui représentent les intérêts de lapêche d ans des circonscriptions déterminées4. »Les commissaires-inspecteurs sont chargés de déterminerles époques d'ouverture et de fermeture de lapêche, de fixer les dimensions des mailles de filets, defaire établir les échelles et ouvrir les barrages, enfinde dresser la statistique annuelle des pêches. Le conseildes conservateurs propose les mesures sur tous cessujets. Enfin, comme agents directs et subalternes,nous trouvons trois catégories : les garde-cotes,!Raveret Wattel, la Pisciculture à l'étranger, pp. 67-68.


240 LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESpayés par l'État; les agents de police des comtés, etenfin les garde-rivières, n o m m é s par le conseil desconservateurs et payés parles associations.En 1880, l'Angleterre et le pays de Galles possédaientquarante-quatre districts de pêche qui ont reçu304,526 francs dont 233,375 francs pour vente de licences,12,535 francs provenant d'amendes infligéespour délits de pêche, 14,700 francs de souscriptionsvolontaires, etc. Les dépenses montèrent à 281,165 francsdont 186,225 francs pour salaire des garde-rivières,11,450 francs pour frais de poursuite des contraventions,etc., soit une réserve de 23,361 francs. Lenombre des gardes était de trois cent soixante, dontdeux cent seize occupés seulement pendant les périodesd'interdiction de la pêche, et cent quarante-quatreemployés d'une manière permanente. Grâce à cetteorganisation, le produit annuel des seules pêcheries deSaumon s'élève actuellement à 2,500,000 francs pourl'Angleterre et à 7,500,000 francs pour l'Écosse.M. Clavé évalue le produit des pêcheries pour les IlesBritanniques à plus de 20 millions de francs par an,ce qui ferait supposer que le revenu de l'Irlande, àlui seul, égale celui de l'Angleterre et de l'Écosse 4C'est par erreur, sans doute, que M . Bouchon-Brandelya pu écrire : « L'Angleterre, l'Écosse et l'Irlandeproduisent maintenant, par an, pour plus de 100 millionsde francs de Saumons. » Ce chiffre pourrait être,en effet, très éloquent, mais il nous paraît malheureusementtrès aventuré.1Clavé, Revue des Deux-Mondes, 1883, p. 594.


LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES ï l iEn Angleterre, la pêche à la ligne est un sport, enhonneur parmi tous les autres. On compte, à Londres,quatre-vingts sociétés de pêcheurs à la ligne, comprenantensemble cinquante mille membres. En France,M . J. Carpentier, vice-président de la Société desPêcheurs de la Candie et de la Ternoise, évaluait àpeine, en 18751, le nombre des pêcheurs à la ligne à1 million ; et il demandait qu'on leur imposât un permiscoûtant de 10 à ÏM francs par an, au profit del'Etat, permis analogue à celui délivré aux chasseurs,et dont le revenu (10 à 15 millions de francs) serait employéà organiser une surveillance des eaux. E n A n ­gleterre, pays aristocratique, ce n'est qu'en 1878 quel'on c o m m e n ç a à se préoccuper de la protection à donneraux espèces communes ; en France, pays démocratique,on a peu fait pour le Saumon et on a vainementdépensé beaucoup d'argent et de soins pourmultiplier les autres Salmones.En Angleterre comme en France, il y a des maraudeursqui empoisonnent le poisson des cours d'eau, afinde s'en emparer. On y demande qu'une peine corporellesoit ajoutée à l'amende qui menace les délinquants; ons'yplaint également que les usines souillent les coursd'eaude leurs détritus délétères et des résidus de leurs fabriquesde porcelaines, mines, naphte, pétrole, etc.On a créé des syndicats de pêche et de surveillance,unmuséepiscicole(Kensingston),des laboratoiresd'éelosionet d'élevage à Keswick (Cumberland), Windsorittereks), llothbury (Northumberland), Stormonfield(Perth-Écosse), Hampton (Surrey), Tony-Urland surla Dee (Kirkucbright-Ecosse). Ugie(Aberdeen-Eeosse,,A. GOBIN, Pisciculture. 7*


212 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESLoch-Bora (Sutherland-É cosse), Howieton (Stirling-Écosse), etc. etc. ; ce dernier, le plus récent et aussile pins important comme le plus prospère. Enfin, lesinspecteurs des pêcheries ont officiellement émis l'opinionque la fécondation artificielle est inutile et quela reproduction naturelle peut seule assurer le repeuplementeffectif des cours d'eau, pourvu que les loissur la pêche soient strictement appliquées.En Allemagne, le poisson d'eau douce est généralementplus recherché que celui de la mer. On s'occupesurtout de la multiplication de la Truite, de la Carpe,de l'Anguille et de l'Écrevisse. On a fondé, en 1870,une grande association de pêche (le Deutsche Fischerei-Verein)qui a pour objet le repeuplement généraides eaux et le développement de l'industrie des pêchesen eaux douces et salées. Elle compte déjà plus demille membres qui payent ensemble 11,250 francs decotisations et reçoivent de l'État une subvention de25,000 francs ; cette société a déterminé déjà de précieusesmodifications aux lois destinées à assurer laprotection des poissons ; elle a fait une enquête fortintéressante sur l'état des cours d'eau et travaille activementet pratiquement à leur réempoissonnement.Outre quelques établissements publics (en particulierEttelbruch, dans le G r a n d - D u c h é de Luxembourg) etcent quarante-neuf établissements particuliers (notammentM . Kùffer, à Munich, pour le Saumon Heuch, laTruite, l'Ombre, l'Écrevisse, etc.) qui s'occupent deféconder et embryonner des œufs ou de produire desalevins, il y a des cours de pisciculture pratique dansles Écoles forestières et dans les Écoles pratiques


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 243d'agriculture. Enfin, le service de surveillance descours d'eau est organisé et exercé avec un soin et uneexactitude qui rendent pleinement efficaces les mesuresédictées pour assurer leur exploitation durable.Depuis longtemps déjà en Bavière, les lois sur la pècheétaient très sévères et les marchés publics très surveillés.La nouvelle législation allemande établit enprincipe que : La pêche ne peut rester libre, ni êtreexploitée par des propriétaires isolés. Tandis qu enFrance, dans les rivières qui sont ni flottables ni navigables,la pêche appartient aux riverains, en Allemagneelle est louée au profit de la commune et devient,par conséquent, une source de profit pour lelocataire, qui a tout intérêt à m é n a g e r le poisson et àen favoriser lamultiplicationEn Autriche, les eaux douces, qui couvrent unesuperficie de 853,000 hectares, étaient autrefois trèspoissonneuses ; elles ont été dépeuplées par l'abus dela pêche et le braconnage, au moyen de la dynamitesurtout ; puis par les barrages industriels, les eauxd é g o û t s des villes, les résidus des usines, etc., exactementcomme en France. L'empereur François-Joseph, en 1863, fit organiser, dans ses domaines, deslaboratoires de fécondation, d'éclosion et d'élevage ;il fit modifier et compléter les lois sur la pêche, réglerles rapports entre pisciculteurs, agriculteurs et industriels; il favorisa la création et aida de subventionsdes sociétés de pisciculture. A la suite de cetteinitiative intelligente on a successivement établi1J. Clavé, ul suprà, p. 596.


3 M LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESsoixante-dix laboratoires appartenant, les uns auxmunicipalités (jardin zoologique de Pesth, Schùstenhoffen,Prague, etc.), les autres à des sociétés(Salzbourg etc.), et quelques-uns à des particuliers( W i l d o n à M . le baron de Washington, Gratz à M . Pommer,Troppau à M . Gibner, etc.) En Autriche, lescours d'eau sont considérés comme propriété particulièredes riverains, qui se partagent le revenu proportionneldes pêches.En Hollande, sur l'initiative du roi Guillaume I I I(1858), on fit les premiers essais de fécondation artificielle;sur celle de M . Martin Jean de Bondt, onpoursuivit la réglementation internationale de lapèche dans le Rhin, on fonda le laboratoire de pisciculturedu jardin zoologique d'Amsterdam (1860) eton réempoissonna le Leck, la Meuse, l'Yssel, le Vechtlle Swarte, etc. Encouragée par ces succès, une sociétése fonda, en 1871, au capital de 420,000 francs, pourcréer à Velp, près d'Arnheim, un immense laboratoire,qui Lâche, chaque année, 300,000 alevins de Saumondans l'Yssel et reçoit de l'État une subvention annuellede 21,000 francs.La Suisse, riche en cours d'eau, en torrents et surtouten lacs 4 - fut une des premières à imiter laFranceet à s'approprier la découverte du pêcheur Remy.« Nulle part, en Suisse, le droit de pêcher n ë s t le1La Suisse possède en lacst f t138 600 h.— — en chemins, rochers, rivières etruisseaux 836.500 h.Sur une superficie totale de 4 138 900 hectares et pour une populationtotale de 2.846.102 habitants (1" décembre 1888). (Ann. deCInstUul agronomique, 8° année, 1886, p. 145.)


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES I Kdroit de l'Etat ; ce droit appartient très rarement auxparticuliers, quelquefois à la commune, le plus généralementau Canton 1 . » C'est donc le canton qui affermele droit à la pêche, soit à l'amiable, soit par adjudication,suivant un cahier des cbarges qui impose toujoursau concessionnaire l'obligation de verser, chaqueannée, dans son lot, un nombre déterminé d'alevinsd'espèces désignées ; qui détermine le mode de pêche,les engins à employer, etc. On a organisé de nombreusessociétés de pèche dont quelques-unes exploitenten commun plusieurs pêcheries (Aubonne, Arnon,Lavey, Thièle, etc.), et en outre vingt et un laboratoires,sociétaires ou cantonnaux pour la productiondes œufs e m b r y o n n é s et des alevins (Meilen, sur le lacde Z u r i c h ; Lauffen, sur le R h i n ; Neufchàtel, surl'Areuze ; Interlaken, sur l'Aar; Berne. Etmat-Kappelprès de Winterthur ; Aigle, dans le canton deVaud, etc. etc.La Rpssie elle-même avait vu notablement fléchir lerevenu de ses pêcheries ; après une série de recherchesstatistiques et d'études sérieuses, on y réforma d'abordla législation relative à l'exploitation des cours d'eau.Puis, à la suite d'essais et de contrôles opérés de 1854à 1857 pour le compte de l'État, M . Wladimir, Paulovitch,W r a s k y fonda, par association au capitalde2H),000 francs, sur la Peskowa, (entre les lacs dePestow et de Vélio) le laboratoire de Nikolsky (districtdeNovogorod), que l'Etat dota, en 1863, d'une subventionde 120,000 francs par an, somme à rembourser* Raveret-Waltel, ul anlè., p. 25.


24G LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCESpar la suite. Cet établissement appartient aujourd'huià l'État. Celui-ci a fondé encore, en 1860, le laboratoirede Survalki, sur la rivière Ganeza (gouvernementd'Augustowo-Pologne). Enfin, plusieurs riches particuliersont suivi cet exemple et fondé d'autres laboratoires(M. Zeumern, pour les Truites, dans le gouvernementde Saint-Pétersbourg ; M . C. Muszinski, sur lelac Metele, dans le gouvernement d'Augustowo, pourla Corégone de Baër, etc.) La seule Finlande compteceux de de Stokfors (Wiborg), d'Aborfors, de Tarnmerfors,de Swarta (Newland), pour la Carpe et lesSalmones, de Kroneborg (Ladoga), deKeksholm, etc.,et un grand nombre d'autres pour les poissons communsou à œufs agglutinants, Perche, B r è m e , etc.La Suède, qui possède 3,600,000hectares de lacs, ledouzième de sa superficie totale, constata, elle aussi,vers 1864, que le revenu de ses nombreuses pêcheriesbaissait sensiblement, par suite de l'abus des pêches etde l'usage d'engins destructeurs, le droit d é p ê c h e appartenantpresque toujours à chaque riverain. Il fallut,là aussi, recourir à la fécondation artificielle, réviseret compléter les lois et règlements sur la matière.En 1865, l'État crée le laboratoire d'Œstanback enNorland, auquel se joignirent bientôt une cinquantained'autres établissements fondés par des associations oupar des particuliers, dans le but de multiplier les Salmones.En m ê m e temps, on éclairait les populationssur leurs véritables intérêts. Surveillance et Enseignementfurent les deux moyens corrélativement mis ehœ u v r e . U n Intendant des pêches secondé par deux adjointspour le pays entier et par des inspecteurs pro-


LE DÉPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 247vinciaux, puis un instructeur ambulant de pisciculturechargé défaire des conférences sur les points oùl'Industrie piscicolejouitd'une plus hauteimportance.On compte aujourd'hui 51 établissements particuliersproduisant des œufs et alevins de Salmones. Parmiceux-ci, figurent surtout ceux fondés, dans la provincede Halland, par une société qui a affermé la plusgrandepartie des pêcheries de Saumons et recueille déjà lefruit de ses intelligents efforts. Outre l'Instructeurambulant, que nous avons dit êtreentretenu par l'État,il y en a encore plusieurs payés par des sociétéséconomiquesprovinciales qui ont fondé l'École de Pêcheursde Nornas (île de Wermdo), puis celle de Skepf>sta(Sudermanie). La Norwège, tombée dans lam ê m esituation„employa les m ê m e s moyens : réforme de lalégislation (1863), création de laboratoires(Ullern, surle Drammen ; Jœderen, sur le Figgen, etc.). C'est presqueexclusivement à la production des Salmones que l'ons'estintéressé.Quoique plus neuf et moins peuplé, le NouveauMonde n'a pas moins v u se produire les m ê m e s faitsque l'Ancien, l'homme étant à peu près partout aussiimprévoyant qu'.ignorant, en A m é r i q u e aussi bienqu'en Europe ; mais on n a pas été moins prompt etmoins ingénieux à réparer le mal.A u Canada, « le poisson, primitivement d'une abondanceprodigieuse, dans les rivières, s'est trouvé diminuerd'une manière véritablement inquiétante, en l'espacede peu d'années, par suite d'abus de pêche etsurtout par suite de l'établissement, d'innombrablesscieriesmécaniques qui ont élevé des barrages sur les


248 LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCEScours dëau, pour se procurer une force motrice et quiont empoisonné les rivières en y déversant des quantitésconsidérables de sciures de bois. Ce dernier inconvénientest « celui contre lequel l'Administration aeu le plus à lutter: malgré une surveillance active desusines.elle n'a pas encore réussi à le faire disparaître 1 . »Pour remédier au dépeuplement, on a organisé d'abordun service de surveillance des pêches ; il comprend uncommissaire général, un inspecteur spécial, un surintendantchargé de gérer sept laboratoires coloniaux,une centaine de garde pêches et environ 300 gardessubalternes, le tout sur un budget de 350,000 francs.On ne trouvera sans doute pas ce personnel exagéréen nombre, lorsqu'on saura que plus de 200,000 personnesdont 42,000 pêcheurs, vivent de la pêche fluvialeet maritime dont le revenu est évalué à 50 millionsde francs dont trois et demi pour le seulSaumon.Aucune nation ne s'est adonnée avec plus d'intelligenceet d'énergie au peuplement et au repeuplementde ses nombreux lacs et cours d ë a u que les États-Unis. C'est l'État de Massachussetts qui, dès 1856, entrepritles premiers essais de pisciculture, imité en1865, seulement par le Vermont, le New-Hampshire,le Connecticut et la Pensylvanie. M . Seth Green, zéléimitateur de l'Anglais Buckland, fonda, en 1864, unlaboratoire à N e w - Y o r c k ; en 1867, naissait celui deSouth-Hadley-Falls (Massachussets), etc. E n 1871, seformèrent l'association des pisciculteurs américains etla Commission Centrale des Pêcheries des États-Unis.1Baveret-Wattel, ni anlè, pp. 71-72.


LE H É P E1* PLE M EXT DES EAUX DOIXKS 240En cette mémo année, on organisa le service despéchas, qui comprend : Fil commissaire spécial de lapisciculture et des Pèches, avec un budget de 400.000 fr.pour études et n-peuplement ; trente-six Étatspossèdentun service officiel formé d'une commission de trois àcinq membres, chargés d'instruire les pécheurs et deservir d'auxiliaires au Commissaire général pour lesstatistiques et le repeuplement. Vingt,et un Etats possèdentdes laboratoires d'éclosion, gérés pour leurcompte et u leurs risques, dans le but de fournir desouifs e m b r v o n n é s et des alevins aux commissions dede repeuplement et aux particuliers. On s'y occupesurtout du Salmo Quinnat, du Salmo Sebago, de laTruite des lacs (Salmo fontiaalis), du Corégone blanc(Coregonus albus), de l'Alose (Alosa sapictissima), etc.A u x Etats-Unis, la législation sur la pêche diffèred'État à État. Dans les États du Nord, elle se rapproche,en général, plus ou moins de celle qui existe en A n ­gleterre. Presque partout le droit de pêche appartientaux riverains, m ê m e sur les plus grands fleuves, telsque le Mississipi, par exemple, mais seulement jusqu'aupoint oii la m a r é e se fait sentir et où commencele domaine maritime. Dans les Etats du Sud, au contraire,le droit de pêche dans les grands cours d ë a uappartient à l'État 1 >Si nous r é s u m o n s cet historique déjà bien abrégé,nous dirons que partout on a suivi la m ê m e marche :1° On a constaté la diminution du revenu des pêches ;2° On en a étudié les causes et les moyens d'y rémédier;1Ravorct-Watlel, ut suprà, p. "S.


' » w i j LU XJ lll II *-l X XJ A À .'lit. y X XJ l J • ' -» .1 . X « - V i » v » W v 'ïj ' »3° On a expérimenté les procédés de la piscicultureartificielle;4° On a fondé des laboratoires d'éclosion puis d'élevage;5° On a revu, modifié, amélioré, la législation surla propriété et l'exploitation des cours d ë a u ;6° On a organisé des associations de pêcheurs pourla surveillance et lëxploitation des pêcheries ;7° On a créé une administration chargée de dirigerles opérations de repeuplement, de préparer les mesuresutiles, d'assurer l'exécution des lois et règlementset de réprimer le maraudage;8° Enfin, on a organisé l'enseignement théorique etpratique de la pisciculture.En France, d'où est parti l'exemple par le mouvementde 1848 à 1860, on n'a, jusqu'ici, abouti à rien denotable, en pisciculture d ë a u douce, dans les eaux ouvertes,du moins. On a produit à grand renfort d'argentbeaucoup d'alevins que l'on a généreusementlancé dans les fleuves, rivières et ruisseaux, à la plusgrande joie et pour le plus grand profit des maraudeurscontre lesquels on ne sëtait nullement préoccupéd'installer une surveillance et une répressionefficaces. Une autre cause d'insuccès encore est trèsjudicieusement signalée, dans notre législation surla propriété des cours d ë a u par M . J. Clavé : « A u xtermes de la loi, dit-il, les cours inférieurs des fleuves,jusqu'à la limite de la salure des eaux, est du domainemaritime ; la pêche en est réservée, par conséquent,aux marins inscrits. Au-dessus, tant qu'ils sont flottablesou navigables, les cours d ë a u restent la pro-


LE DEPEUPLEMENT DES EAUX DOUCES 23Ïpriété de l'État qui les loue à son profit, par lots deplusieurs kilomètres de longueur ; plus haut encore,lorsqu'ils cessent d'être navigables ou flottables, ilsdeviennent la propriété des riverains qui, seuls, ontle droit d'y pêcher. La plupart n usent pas de ce droitet, le considérant comme peu important, ne s'opposentm ê m e pas au braconnage qu'on vient exercer dansleurs eaux. Si on jette de la chaux pour s'emparer dupoisson qui s y trouve, aucun d'eux ne s'en plaint,parce qu'aucun n'y a un intérêt suffisant ; aucun nonplus ne cherche à les repeupler, puisque aucun ne consentà faire un sacrifice quelconque dont il n'est passeul à profiter. Voilà donc, dans un m ê m e bassin,trois catégories de pêcheurs : les marins, les adjudicatairesde l'État et les propriétaires riverains, dont lesintérêts devraient être solidaires, et qui, précisément,loin de réunir leurs efforts en vue de la conservationet de la multiplication du poisson, agissent isolémentetcherchent à en prendre le plus possible au détriment lesuns des autres. Pour ce qui est des cours d ë a u flottablesou navigables, ils sont, avant tout, des voies de navigationet la pêche ne peut y être considérée que c o m m eune chose accessoire. Quelle que puisse être, au pointdevue de la production du poisson, l'utilité des herbesaquatiques, ou des courants plus ou moins rapides, iln en faudra pas moins faucher et canaliser les rivièreslorsque la navigabilité l'exigera; mais une fois qu'il adonné satisfaction à cet intérêt majeur, et dans les l i -mites où cet intérêt le permet, l'Etat doit prendre lesmesures nécessaires pour protéger le poisson et pour


252 LE DÉPEUPLEMENT DES E.VUX DOUCESfavoriser les associations entre pêcheurs' » Et le savantforestier poursuit en blâmant la mesure qui interditaux propriétaires riverains des cours d ë a usupérieurs d'y élever des barrages, de façon à empêcherla remonte du poisson. « Si cette faculté leurétait laissée, ajoute-t-il, ils seraient intéressés à enavoir et pourraient, soit isolément, soit en s associantexercer une surveillance efficace et se livrer aux procédésde pisciculture qu'ils jugeraient le plus avantageux.Pour les poissons sédentaires, cette appropriationpartielle des cours d ë a u ne représente aucuninconvénient ; quant aux poissons migrateurs, onpourrait en assurer la libre circulation en fixant àl'avance les dimensions des grils, de façon à permettreaux Saumons de les franchir et à la montée d'Anguillesde passer aux travers des barreaux.En résumé, la pêche de nos 43,875 hectares defleuves et rivières navigables et flottables, comprisles canaux, ne rapporte annuellement à l'État que850,000 francs environ, ou 40 fr. 33 par hectare; etnos 50,000 hectares de rivières non navigables ni flottables,a u g m e n t é s des ruisseaux ne produisent guèreque 1,500,000 francs ou 30 francs par hectare. Pources derniers, le produit est faible parce que le poissonn'y est ni entretenu, ni protégé; et on ne le surveillepas et on ne le protège pas parce qu'il est peu nombreux.Voilà le cercle dont il nous sera difficile desortir.En Angleterre, on estime que la surveillance suffit1Chvé. ul nnlè, pp. 604-GOo.


LE D KI • EI" I*L EM F. N T I>ES EAUX DOUCES 253à assurer le repeuplement et l'on a peut-être raison 1 ;mais il ne nous parait pas douteux que le réensemenceme n t a c c o m p a g n é d e l a p r o t e c t i o n économise singulièrementde temps et fournit plus de produits. Pour arriverà la formation de syndicats, il faudrait que l'État pûtgarantir aux pisciculteurs la récolte de leurs semailles,d'abord; puis, qu en second lieu, l'administrationéveillât et instruisit l'initiative particulière sur lesjH'oeédés, les dépenses et les résultats, qu'il donnât, enun mot, l'enseignement piscicole. Or, cet enseignementjusqu'ici ne s'est fait, pratiquement que par l'industrieprivée et théoriquement que par les livres ;tout au plus et depuis un an seulement la municipalitéde Paris a-t-elle établi au Trocadéro un cours depisciculture a n n e x é à l'aquarium qu elle y entretientdepuis 1879; d'un autre côté, grâce au zèle enthousiasted'un pisciculteur de la première heure, d'unancien collaborateur de Coste. M . Chabot-Karlen,quelques conférences théoriques et pratiques sontfaites, chaque année, dans une dizaine d'écoles pratiquesd'agriculture.1II ne faudrait pas oublier pourtant l'assertion d'un des praticiensles plus compétents, qui affirme que < II) p. 100 seulement des «eufsde Truiles et 1,2,'i seulement des o-ufs de Carpes arrivent à éclosiondans les eaux naturelles >>. (Gauckler, Les Poissons et la piscic.)A. ÛOBIN, Pisciculture. 8


C H A P I T R E V I I IL ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A UNos eaux courantes sont peuplées d'un grandnombre dëspèces de poissons qui ayant des m œ u r s spéciales,des habitats distincts, des exigencesparticulièrespeuvent fournir à chaque situation, à chaque natured'eaux, une population que nous pouvons aisément etavantageusement multiplier. Il y faut pourtant établirdeux grandes catégories : les poissons qui émigrentdes eaux douces aux eaux salées et inversement, etles poissons sédentaires des eaux douces.§ 1 er . — POISSONS MIGRATEURSParmi les poissons migrateurs, cëst-à-dire, ceuxqui, adultes, quittent la nier pour venir frayer dansnos cours d ë a u et qui, alevins, vont, chaque année,faire un voyage à la mer, nommons :L e S a u m o n c o m m u n (Salmo salar) que Ton rencontredans presque toutes les mers de l'hémisphèreboréal, entre 35 et 65° de latitude, sauf dans laMéditerranéeet la mer Noire; il est très c o m m u n dans les „parages des îles Britanniques, dans ceux du nord dest.


POISSONSMIGRATEURSÉtats-Unis, du Japon et du Kamtchatka ; cëst-à-diredans le canal de Saint-Georges, la Manche, la mer duNord, la Baltique, la mer d'Okhotsk, la mer de Béringet celle du Japon, de la mer de Baffin et celle d'Hudson,etc. Dans la mer, on croit qu'il se nourrit d'œufsde Harengs. d'Oursins, d'Astéries et autres échinodermes.Il devient adulte vers cinq à six ans et atteintalors î m ,20 de longueur moyenne sur 0 m ,18 de hauteur,et le poids de 5 à 7 kilos; mais il peut atteindrejusqu'à 1 m ,75 de long sur 0°\25 de haut et le poids de25 à 30 kilos.Le Saumon ne peut se reproduire qu'en eau douce;M . Millet a constaté que la présence du sel marin danslëau, m ê m e en très minime proportion, tuait les Spermatidesde la laitance et portait dans l'oeuf une perturbationmortelle. M . Hetting a pu faire vivre leSaumon exclusivement en eau salée, mais il ne s'y reproduitpas; on l'a fait vivre exclusivement aussi eneau douce, il s'y reproduit, mais s'accroît lentementet dans des proportions très restreintes.En hiver (novembre à février) les Saumons adultesremontent les rivières, stationnant un certain tempsà leur embouchure maritime, comme pour m é n a g e rune transition de l ë a u salée à l ë a u douce dans laquelleils cheminent hardiment ensuite. Mâle et femelle seréunissent par couple, choisissent, d'un communaccord, lëndroit le plus propice à leur fraye. Ils creusentalors, dans le sable ou le gravier du fond, dessillons dans lesquels la femelle dépose ses œufs que lemâle s'empresse d'imprégner de sa laitance; puis, tou sdeux recouvrent le précieux dépôt de gros sable ou de


256 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Ucailloux. La ponte se renouvelle à plusieurs repriseset dure huit à douze jours; la femelle pond, en mo- . •yenne, 17 à25,000 œufs. Les deux parents se retirentensuite dans une partie voisine de la rivière où l ë a usoitplus profonde; quinze à vingt jours plus tard, le«mâle redescend à la mer ; la femelle reste dans le voisinagede la frayère jusqu'après l'éclosion des œufs.L'incubation dure de quatre-vingt-dix-neuf à centquarante jours, suivant la température des eaux; larésorption de la vésicule ombilicale s'opère du 30 e au40 e jour qui suit ; l'alevin a alors 0 m ,03 de long et porterajusqu'à la fin de sa première année, le nom de Parr. Adouze mois, il a de 0 m ,10 à 0 m ,14 de long, prend lenomde Smolt, et la moitié d'entre eux environ, descendfaire, en mars-avril, un premier voyage à la mer; ilssuivent le courant, en troupes, se tenant près des rives;ils font une station de huit à douze jours dans l ë a usaumàtre de l'embouchure, puis entrent en mer, d'oùils reviennent deux mois après, en mai-juin, très notablementaccrus. Ceux qui n'ont point émigré à la finde la première année, le feront tous à la fin de laseconde ; les uns et les autres sont devenus Grilses(fig.61) et porteront ce nom jusqu'à la fin de leur troisièmeannée; c'est l'âge où leur chair est le plus délicate.Passé trois ans, ils deviennent des Saumoneaux(fig. 62), puis des Saumons.On a dit que le Saumon mâle peut être fécond, bienqu'il ait été exclusivement élevé en eau douce, maisque la femelle ne le peut devenir qu'après avoir séjournédans la mer : on sait par M . Z. Gerbe, qu'en1858, des Truites de 0 m .55 de long et, chose plus inté-


POISSONSMIGRATEURSrossante, dos Saumons de 0 m ,25 à 0 m ,35 fse reproduisirentdans le petit étang artificiel de Saint-Cucufa(domaine de Saint-CIoud) en eau presque dormante ;les expériences ultérieures de M . ffillet de Grandmontont mis hors de doute cette fécondité de la femelle.Km. Gl. — JeuneSaumon.FIG. G2. — Saumoneau.Le développement de l'alevin de Saumon en eaudouce est très lent. Le Smolt qui a vécu deux ans eneau douce ne mesure que 0 m ,20 environ de longueuret pèse à peu près 100 grammes; lorsqu'il revient dela mer, deux mois après, il a atteint 0 m ,55 de long et


258 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A U1 kil. 500 à 2 kilos de poids. Le Grilse parti avec 2 kil.à2kilo. 500depoids, en revienttrois mois après, l'ayantdoublé. Il est donc complètement illogique de chercherà séquestrer ce poisson dans des eaux fermées; d'autantplus qu'il revient toujours dans les eaux où il estn é et où il est aisé de le capturer.Quand un saumon veut remonter une rivière, on levoit, s'il est arrêté par un barrage, par une chute tropélevée, s'épuiser en vains efforts pour franchir l'obstacle,puis enfin laisser échapper ses œufs au hasard.Non seulement ces œufs sont perdus, mais les poissonsabandonnent bientôt les cours d ë a u qui leur présententainsi des obstacles infranchissables. Aussi voit-ondans notre pays, des rivières autrefois r e n o m m é e s parl'abondance des saumons, être complètement délaisséespar ces poissons.C'est pour obvier à ce grave inconvénient que l'ona eu l'idée d'employer des appareils destinés à permettreaux poissons de franchir facilement les chuteset les barrages 4 .L'invention des échelles à poissons remonte à 1828et est due à un Écossais du nom de Smith, qui imaginaun plan incliné muni de cloisons transversalesinterrompues, de manière à laisser une ouverture alternantavec la précédente. Le courant, forcé desuivre une sorte de lacet, se trouve ainsi affaibli et lespoissons le remontentfacilement.Depuis on a varié à l'infini la forme de ces échelles.M . Raveret-Wattel a décrit ces formes diverses avec1Voyez plus haut, p. 200.


POISSONS MIGRATEURS 250soin, et je ne saurais mieux faire que de renvoyer àce m é m o i r e les personnes qui désireraient avoir desdétails précis sur ce genre de construction1Jemecontenterai d'indiquer ici les principes généraux dela construction de ces appareils, et de donner uneidée de ceux que l'on emploie le plus fréquemment.La première condition à remplir lorsque l'on veutétablir une échelle, c'est de rendre l'entrée de l'appareild'un accès facile. Le poisson vient toujours seprésenter au point de la chute où la nappe d ë a u estla plus abondante, la plus vive, c'est là qu'il essayede franchir l'obstacle. C'est donc aussi près que possiblede ce point que devra être placée l'entrée del'échelle.Une autre condition est que le débit d ë a u de l'appareilsoit suffisant pour que le poisson s'y engagefacilement ; plus le courant qui débouche de l'échellesera violent, plus tôt le poisson le remarquera et s'yengagera volontiers. Enfin une condition nécessaireest que le parcours de l'échelle soit aussi facile quepossible, il faut donc que la vitesse du courant ne soitpasexcessive.Les chutes pour lesquelles l'établissement d'échellesdevient nécessaire peuvent avoir des hauteurs variables.Ce n'est pas tant en effet à l'élévation del'obstacle qu'à la manière dont l ë a u s'y déverse, etau volume d ë a u qui y coule que l'on doit prêter attention.U n saumon franchit aisément des chutes de* Itavoret-Waltol, Les Poissons migrateurs et les Échelles à Saumons.{Extrait du Bulletin de la Soc. d'Accl.) Paris, 1885.


260 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A U1 à 2 mètres, pourvu qu'il se trouve dans la chute unfilet d ë a u assez volumineux et que, à cet endroit,lëtat du fond ne s ë p p o s e pas au saut.Si l ë a u tombe verticalement sur un radier troplisse et si la tranche d ë a u qui recouvre le fond n'estpas assez épaisse, le poisson ne parvient pas à franchirla chute. Il en est de m ê m e lorsque la lame de déver*sèment est trop mince pour que le corps du poissonsoit bien immergé. On peut dire d'une manière .généraleque pour les hauteurs de 1 mètre à l m ,50 unsimple vannage estsuffisant.En France on a généralement adopté les systèmes à?Escaliers,cëst-à-dire une série de réservoirs carrés posésles uns au-dessus des autres comme autant d e g r a n d é scaisses. Le dernier de ces bassins communique deplain-pied avec le haut de la chute, et le premier setrouve au niveau de la partie inférieure du fleuve. Ilse forme ainsi une série de cascades. Ce système estloin d'être le meilleur ; la couche d ë a u n'est généralementpas assez épaisse. M . Coumes avait bien observéce fait. < En observant, dit-il, les allures du Saumonqui cherche à franchir les chutes, on voit que laforme des échelles qui lui convient mieux n'est pasune succession de cascades, mais plutôt une dérivationfortement inclinée sur laquelle lëxcès de vitesseque prendrait la nappe liquide se trouve modérée parl'interposition de cloisons. Car lorsque le poisson s'introduitdans un passage de cette sorte, où il ne se sentpas en sûreté, il veut le franchir, non pas en jouant etpar bonds successifs, mais avec la plus grande rapi-


POISSONS MIGRATEURS 261dité; aussi traverse-t-il le défilé comme une flèche ! . »Fio. 63. —Échelle à* Saumon à chutes en ligne droite.Le système de plans inclinés est celui adopté en An-1Coumes. Rapport sur la pisciculture, etc., en Angleterre, Ecosseet Irlande. Strasbourg, 1Ô63.


262 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Ugleterre et en Amérique. C'est en résumé une espècede couloir en pente, coupé par des cloisons transver-£Oa»cM?Om33ao5dc/:C3•si03— V)O -»C "OO>12•03C3C3Q.essales à ouvertures alternantes. Il a étéd'ailleurs modifiéde diverses façons. Tantôt les compartiments


POISSONS MIGRATEURS 263sont rectangulaires, tantôt ils sont plus ou moinsobliques; tantôt ils sont disposés sur une série rectiligne(fig. 63, 6'*) et à, l'instar des marches de nos escaliers;tantôt en séries brisées de petits bassins alternants(fig. 05); tantôt enfin, le passage-est simplementformé par une sorte de canal disposé obliquement surun plan incliné (fig. 66).Fio. 65. — Échcllo à Saumon. Passe diagonale à Bradford,sur laTamise.U n autre système d'échelle tout à fait différent deceux dont nous venons de parler a été inventé par lecolonel Marshall Mac-Donald, commisaire des pêcheriesde l'État de Virginie. L'inventeur a exposé le principedeson appareil dans une communication qui a étéfaite à l'Association américaine de pisciculture,en 1883 4 :1Raverel-Wattel, loc. cit., p. 81.


26i L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A U« Une échelle à poissons doit, pour être véritablementefficace, remplir certaines conditions que M . Ch.Atkins définit ainsi qu'il suit :« 1° Être facilement accessible pour le poisson;FIG. 66. — Échelle à Saumon en séries brisées de petits bassins alternants.Passe échelonnée à Ballisadare en Irlande. (Exemple d'unepasse réussie.)« 2° Déverser une quantité d ë a u suffisante pourattirer le poisson ;« 3° Ne présenter qu'un courant assez m o d é r é pourque le poisson puisse franchir l'appareil sans difficulté.!)A ces trois conditions j'en ajouterai une quatrième,


POISSONSMIGRATEURSsavoir: fournir au poisson un chemin aussi court etaussi direct que possible, et simuler, autant que faireso peut, le lit d'un ruisseau. L'attention des constructeurss ë s t portée principalement sur les différentsmoyens de m o d é r e r la rapidité du courant dans l'appareil.S'il était possible, au moyen d'un système deconstruction quelconque, que la totalité du volumed'eau d'une rivière se déversât par-dessus un barrageavec une si faible vitesse que le poisson le moins biendoué sous le rapport de la force musculaire pût remonterle courant sans difficulté, le barrage ne présenteraitplus d'inconvénients au point de vue de la reproductiondu poisson, les espèces migratrices n'étantplus arrêtées sur leur route, et pouvant gagner sansdifficulté les frayères naturelles.É v i d e m m e n t , dans la pratique, cette dispositionidéale ne peut être réalisée que dans des cas tout àfaits exceptionnels, attendu que les besoins des usinesou la considération de la dépense obligent forcémentà limiter les dimensions de l'échelle et le volume d ë a uque celle-ci débite. Mais plus nous nous rapprocheronsde ce type idéal d'échelle, plus près nous serons delàsolution du problème qui nous occupe, rendre le libremouvement aux poissons dans les cours d ë a u .Les conditions à remplir sont les suivantes :\° Déversement de l ë a u en ligne directe sans déviationspour ralentir le courant ;2° Volume d ë a u suffisant pour attirer le poisson ;


266 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D E A U3° Courant assez modéré pour que le poisson puisseremonter sans la moindre difficulté ;4° Pente aussi forte que possible afin de réduire lesfrais deconstruction.Deux moyens de résoudre le problème se présentèrentà mon esprit. Le premier était de modérer lavitesse du couranten l'utilisant comme force motrice;par exemple au moyen d'une modification de la turbineordinaire, obtenir un appareil servant à la fois depassage pour le poisson, et de moteur pour une usine.Je dus renoncer à cette idée. L'appareil eût été tropcompliqué et se fût trouvé d'un emploi fort limité.La seconde idée était plus pratique et reposait surle raisonnementsuivant:Si l'on obligeait chaque molécule d ë a u à suivre uneroute telle que, dans la dernière partie du trajet, sonmouvement se fit dans un sens contraire à celui deslois de la pesanteur, on pourrait l'amener en un pointinférieur à celui quëlle occupait, où elle se trouveraitavoir perdu, par suite du frottement et de sa courseascensionnelle finale, une partie de la vitesse quëlleaurait d'abord acquise en descendant. L a moléculeabandonnant son point d'arrivée, pour descendre denouveau en décrivant successivement une série detrajets semblables au premier, atteindrait finalementun niveau donné, inférieur à son point de départ primitif,sans quëlle soit à la fin de sa course animéed'une vitesse plus grande que celle quëlle aurait acquisedès le premier de ses trajets partiels. Trouverune disposition par suite de laquelle chaque moléculede la veine liquide qui traverse une échelle devrait


POISSONS MIOR.VTKIRS :>ii7suivre une telle route ce serait fournir la possibilitéd'avoir dans toute la longueur de l'échelle un courantmodéré et absolument uniforme.Comment ce problème a-t-il pu être résolu pratiquement?C'est coque nous allons essayer d'expliquer:KM;, in. Vu:. 68.Si dans un vase hémisphérique (fig. 07) nous placionsune bille en A et que nous l'abandonnions a.elle-même, cette bille en roulant passerait par A etviendrait s'arrêter en A" un peu au-dessous du borddu vase. La différence de niveau entre les positions Aet, A" marque ce que la bille a perdu de force d'impulsionpar suite du frottement et de la pesanteur dansson trajet de A' à A"Ki... 60.Si maintenant nous prenons un nombre quelconquede vases semblables au premier et que, les disposantsur un plan incliné (fig. 08), nous y fassions rouler unebille partant du point D, cette bille qui est obligée dedécrire toute une série de mouvements curvilignessuc-


268 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Ucessivement descendants ou ascendants, se rendra deD en C sans acquérir plus de vitesse dans tout ce trajetq u ë nroulant simplement de A en A" dans la premièreexpérience. Si au contraire elle avait roulé directementen descendant le plan incliné DC elle auraitacquis une vitesse considérable.Nous voyons donc qu'il est possible de faire descendreune molécule d'un niveau quelconque à unniveau inférieur donné, sans quëlle acquière, à beaucoupprès, autant de vitesse q u ë n tombant librementsous l'action d e l à pesanteur, ou en roulant sur unplanincliné.Faisons maintenant aux liquides l'application de» cesystème : Supposons une série de tubes courbes rangéscomme ci-dessus, et admettons que des dispositionssoient prises pour que la plus longue branche du tubele plus élevé soit constamment remplie d ë a u : leliquide s'échappant par la plus courte branche dechaque tube sëlèveraà une certaine hauteur, en raisonde la poussée qu'exerce la colonne d ë a u contenuedans l'autre branche plus longue ; puis il se déverseradans le tube suivant pour décrire u n trajet semblableau premier, et ainsi de suite jusqu'à la fin de la sérieoù il arrivera sans avoir acquis plus de vitesse qu'iln'en avait pris dès son parcours dans le premiertube («g. 69).Prenons maintenant un grand nombre de tubes analogues,mais ayant leurs deux branches rapprochéeset se touchant m ê m e ; coupons obliquement l'extrémitésupérieure de leur plus longue branche, de façonà permettre rentrée de lëau, groupons-les côte à côte


POISSONS MIOR.VTKrRS 269dans une position oblique sur un plan incliné constituantle fond d'une rigole, et nous aurons un appareildonnant la solution du problème proposé. Si en effetnous supposons une nappe d ë a u se déversant par larigole, le liquide remplira les tubes dans lesquels uncourant sëtablira. L ë a u , pénétrant dans chaque tubepar la branche laplus longuesortirapar la plus courteavec une vitessecorrespondant à ladifférence de niveauqui existe entrelesdeux orifices d'entréeet de sortie(fig. 70).On obtient ainsi,sur les côtés de la rigoleoù se trouventles branches courtesdes tubes, unCOUrant ascendant FIG. 70.—Théorie de lVchulleMac-Donald.s'atténuantjusquevers le milieu de la rigole, lequel est occupé par uneligne de remous, au delà existe un courant descendantqui se montre d'autant plus rapide qu'on se rapprochede l'autre bord de la rigole ; là enfin noustrouvons un courant descendant uniforme qui est dem ê m e vitesse que celui qui s'échappe de l'orifice inférieurdes tubes, si l'alimentation de ces derniers etleur capacité ont été convenablement réglés. C'est


270 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Uce courant toujours modéré et facile à remonter quisert de passage au poisson.Cette disposition théorique a été modifiée dans l'application,et les personnes qui désireraient être renseignéesà cet égard trouveront dans le livre de M . RaveretWattel les détails nécessaires.Quoi qu'il en soit, l'échelle de M . Mac-Donald(fig. 71) a donné d'excellents résultats partout où ellea été appliquée, et son installation coûte moins cherque celle des appareilsordinaires.En France, le nombre des échelles à poissons n'estpas considérable (cinquante-quatre environ) ; plusieurssont défectueuses; il y a cependant quelques échellesà plan incliné, par exemple celle qui a été construitedans le département de l'Aveyron sur le ruisseau delaDiège.D u temps de Duhamel du Monceau (1759) on citait,en France, deux grandes pêcheries à Saumons : l'unesur laSemoy, auprès de Charleville (Ardennes) appartenantà l'abbaye de la Val-Dieu, de l'ordre des Prémo n t r é s ; l'autre à Pont-du-Chàteau, sur l'Allier,appartenant à M . de Montboissier ; cette dernièrefournissait, année moyenne, de 4 à 5, 000 Saumonspesant de 5 à 15 kilos chacun, soit ensemble de 20 à75. 000 kilos.A mesure que le développement des grandes villeset la multiplication des usines ont souillé de plus enplus nos cours d ë a u de leurs détritus, le Saumon yest devenu plus rare (Seine, Loire, etc.); ailleurs, cesont des barrages dépourvus d'échelles qui sontvenusleur intercepter la route et rendre la remonte impos-


FIG. 71. — Échelle Mac-Donald,


2 1 2 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Ula Vilaine, la Sèvre Nantaise, la Charente, la Vienne,la plupart des petits cours d ë a u de la Bretagne, de laNormandie, de la Picardie, etc.L'accroissement du Saumon élevé en eaulibre paraîtêtrele suivant:1® année, Parr. 2° ann., Smolt. 3 e ann.,GriUo.Longueur du corps. 0 r a 102 à 0 m , 13 0 r a , 13àO m , 55 0 m ,55 à lPoids Ok.02 0U00 Ok.100 1k. 500 1 k.500 5k.m.En captivité, M. Coste a obtenu pour accroissementen longueur de corps, comme moyenne :à la naissance0 m ,018à six mois0 m ,070à un mois0 026à douze mois0 140à troii mois..,0 03^à vingt-huitmois0 390Nous estimons qu'à l'égardde ce poisson, il faudraitorganiser dans tous nos cours d ë a u la liberté de circulation(barrages à échelles) et la police de l'hygiène(égoûts-usines) et que nous le verrions dès lors abonderdans nos eaux comme autrefois et ainsi qu'il pulluleencore aujourd'hui dans celles de l'Ecosse, del'Irlande, de la Suède, de la Russie, etc. On pourraitencore, si l'on veut, aider le repeuplement, au début,par la fécondation et l'incubation artificielle; maisces procédés deviendraient bientôt inutiles.C'est le S a u m o n H e u m h ou Saumon du Danube(Salmo Hucho) qui remplace le Saumon c o m m u ndansla mer Caspienne, la mer Noire et leurs affluents. I lest particulièrement abondant dans le Danube et lesrivières qui s'y jettent. Il a les m ô m e s m œ u r s que le


POISSONS MIGRATEURS 273Saumon commun, mais il fraye en mars-mai; il atteintles m ê m e s poids et dimensions, mais sa croissanceest beaucoup plus rapide; il est moins insectivoreet plus icthyophage; enfin, sa viande, blanche,est moins délicate. M . Coste a constaté l'accroissementsuivant, en captivité :à la naissance....à un moisà Irois mois0m,0200 0320 065à six moisà douze moisà vingt-huit mois.0m,1500 27(1O 600On s'occupo, depuis quelques années, d'importer enFrance plusieurs espèces de Saumons de l'OcéanPacifique que l'on espère pouvoir naturaliser dans laMéditerranée en vue de peupler les cours d ë a u qui ydébouchent. Ce sont les Saumons: Setayo (SalmoS e ta yo) de l'Océan Atlantique, abondamment multipliépar l'ensemencement dans le Massachussetts ;le Saumon Quinnat (Salmo Qm'nnat) et le Saumond u Sacramento (Salmo Fontinalis), tous deux répandusen Californie et que l'on cherche à multiplierdans le reste des États-Unis; etc.La T r u i t e de m e r (Salmo Scheifermullcri), pluspetite que le Saumon commun, a les m ê m e s m œ u r s .sauf quelle est plus rapace. détruit les œufs du Saumo n et attaque les Saumoneaux. L à où elle semontre, en Angleterre, le Saumon tend à disparaître.L'Eperlan (Osmerus Eperlanus) habite l'OcéanAtlantique et la mer du Nord et remonte, au printemps(mai-juin) dans les embouchures maritimesdes fleuves et rivières, pour y frayer. Ses œufs sontjaunes et nombreux. Il vit de vers et de petits mol-


274 L'EXPLOITATION i)ES COURS D*EAUlusques. Sa taille moyenne est de 0 ,n ,08 à 0 m ,14 de long.Il constitue un mets très délicat. C'est encore unsalmonide.Dans la famille des Clupéides, nous citerons l'Alose(Alosa Vulgaris), indigène de l'Océan Atlantique, delàmer du Nord et d e l à Méditerranée, quëlle abandonneau printemps (avril-juin) pour remonter la Gironde, laLoire, la Seine, la Somme, la Moselle, la Meuse, leRhône, rilérault, etc., dans le but de frayer. Lesadultes, mâles et femelles, se rassemblent dans lesanses voisines des embouchures et, profitant des cruesqui rendent l ë a u trouble, s'y précipitent avec unevitesse inouïe remontant plus ou moins haut (90 kilomètresdans la Seine, 120 dans la Loire, 150 dans laGironde et la Dordogne, 180 dans 1 le Guadalquivir,etc., etc,). C'est au moment de cette remonte que Tonpêche ce poisson ; àla descente.il est maigre, épuisé,sachair est molle et sans saveur et d'ailleurs, il voyagealors isolément. L'Alose ne mange point en eau douce.La femelle dépose ses œufs nombreux, petits, trèslégers, libres, sur le gravier du fond, au milieu ducourant qui les p r o m è n e et les descend. Une femellepond, en moyenne, de 60, 000 à 100, 000 œufs. L'Alose,après un séjour d'environ deux mois dans l ë a udouce, retourne à la mer. Les mâles peuvent se reproduiredès la première année, les femelles dans laseconde seulement La taille moyenne du poissonadulte est de 0 m ,65 à 0 m ,70 de long sur 0 r a ,25 dehaut. Son poids varie de 2 à 3 kilos.A l ë m b o u c h u r e de la Seine, M . P. Vincent, avec lesencouragements du Ministère de l'Agriculture et du


POISSONSMIGRATEURSConseil général de la Seine-Inférieure, a ç o m m e n c é ,en 1888, le repeuplement du fleuve en Aloses.L ' A l o s e finte(.l/o.?a Fin ta* habite les m ê m e s eaux,mais n y remonte que plus tard (juin-juillet) ; elle estd é f o r m e plus allongée, atteint le m ê m e poids, mais sachair est moins délicate.On trouve, dans la mer Caspienne, l'Alose Pontique(Alosa Povtica) qui remonte dans le Volga etserait, d'après Pal las, plus grosse et meilleure que lanôtre. Enfin, aux États-Unis, on multiplie, dans d'énormesproportions, une Alose de l'Océan AtlantiqueVAlosa T y r a n n u s ; on estime que, non seulement lesrivières doivent en être peuplées, mais qu'elles doiventen recevoir la plus grande quantité qu'elles puissentcontenir ; car, s'il y en a plus qu'il n'est nécessairepour la consommation, en leur laissant le libre parcours,desfleuves, ces poissons descendront à la mer parmilliers, remplissant les baies, pullulant le long descôtes et y attirant nombre de gros poissonsmigrateurs.Dans la famille des Pétromyzonides, nous trouvonsla L a m p r o i e de rivière, Pricka ou Sept-œil(Pctromyzon FtnciatiUs\ qui habite l'Océan et la Manche,remonte dans les eaux douces pour y frayer,d'avril à juin, et se rencontre surtout dans la Garonne,la Loire, la Seine, la Moselle, dans quelqueslacs et m ê m e dans certains étangs; en Angleterre,dans la Tamise et plusieurs rivières de l'Ecosse et del'Irlande. Elle se nourrit de vers, d'insectes, d annélides,de frai de poisson et m ê m e de proies mortes.Elle pond dans les eaux courantes, entre les pierres,des quantités considérables d'œufs petits et dispersés


276 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Uen chapelets. Elle ne dépasse pas 0 m ,75 de longueur.r La grande L a m p r o i e ou Lamproie marine(Petromyzonmarinus), habite la Méditerranée et l'Océan, d'où,au printemps (mai-juin), elle remcfnte dans le Rhône,l'Hérault, l'Aude,la Loire,laSeine, etc., pour y frayer.Sa taille varie de 0 m ,80, à 1 m è t r e de long.Enfin, la Petite L a m p r o i e de r i v i è r e ou Sucet(Petromyzon Planeri) paraît vivre constamment dansl ë a u douce; elle n'atteintque 0 m ,20 àO m ,25 de longueur;on la trouve dans presque tous les cours d ë a u del'Europe à eaux limpides.Dans la famille des Sturoniens, l'Esturgeonc o m m u n (Acipenser Sturio) de l'Océan Atlantique, dela mer du Nord, de la Baltique, de l'Océan glacialm ê m e et de la Méditerranée, remonte, mais plus rarementqu'autrefois, dans les parties profondes de nosgrands fleuves (Rhin, Rhône, Loire, Garonne, Somme/Moselle, etc.) en avril-mai. Une femelle peut contenirde 10 à 100 kilos d'œufs, soit plusieurs millions ennombre. Les jeunes vivent en eau douce, jusqu'à cequ'ils soient devenus adultes; jeunes,ils se nourrissentde vers, d'insectes et peut-être de substancesvégétales;adultes, ils sont icthyophages. De m ê m e que le Satimon,l'Esturgeon revient pour frayer, dans les eauxoù il estnê.§ 2. — POISSONS SÉDENTAIRESLes poissons sédentaires des eaux douces courantesappartiennent pour le plus grand nombre à la familledes Cyprins ou Cyprinides. Nous connaissons déjà les


POISSONS SEDENTAIRES 277genres: Carpe, Tanche,Brême,et l'espèce Loche d'étang;ajoutons-y pour les eaux qui nous occupent:L a L o c h e franche ou Dormille. Moutelle. Barbotte{ÇobitU barbaluta, (fig 72), qui habite les fleuves,FIG.72. — La Loche franche.rivières et ruisseaux (Seine, Moselle. Meuse, etc.) àfond de sable, de pierre ou de cailloux, à eaux vives,claires et profondes du Nord et de l'Est de la France,de presque toute l'Europe et jusqu'en Suède. Elle n'aFIG. 73. — La Loche derivière.en moyenne que 0 m ,12 à 0 m .t5 de longueur; elle portesix barbillons à la mâchoire supérieure: sa peau estpointillée de brun sur un fond jaune. Elle fraye auprintemps, (avril-mai) et dépose ses œufs jaunes,A. GOBIN, Pisciculture 8*


278 L V . X P L O Ï T À ' T I O N DES COURS D ' E A Upetits, nombreux, sur le sable et entre les pierres. Onl'engraisse, dans les viviers, avec du sang caillé mêlé àdes matières végétales, (grains, farines, racines). Onla transporte difficilement vivante, car elle meurt peude temps après sa sortie de lëau. Elle redoute beaucoupla chaleuret les orages.La L o c h e de r i v i è r e ou Loche épineuse (Cobilistœnia) (fig. 73), moins commune que la Franche, vit dansles m ê m e s eaux. Elle est la plus petite des trois espèces( 0 m , 0 8 à 0 m , 1 0 de long), porte six barbillons, dontquatre à la mâchoire inférieure, et un aiguillonfourchu et mobile en avant des yeux. Elle a les m ê m e sm œ u r s que la Loche franche.Le Barbeau c o m m u n (Barbus fluviatilis) (fig 74)habite presque toutes les rivières de l'Europe Centraleet Méridionale, à eaux pures et vives, plusieurs lacset quelques étangs. I l porte quatre barbillons dontdeux à la lèvre supérieure et deux aux commissures.Sa longueur moyenne est de 0"*,35 a 0 m ,45 et jusqu'à0 m ,70 : son poids moyen est de 1 kil. 250 et peutatteindre j usqu a 10 kilos. I l vit en société et fraye entroupe (mai-juin). L a femelle, m é d i o c r e m e n t féconde,dépose ses œufs (10,000 environ) collants,de couleurorangé, du volume d'un grain de pavot ou de millet,sur les pierres du fond, dans les courants les plusrapides et les plus profonds. L a fraye dure deux outrois jours, elle est souvent difficile et parfois m ê m eiihpossible; les œufs sont alors résorbés en partie, maisl'animal en meurt souvent. Quelques jeunes femelles* frayent pour la première fois à la fin d'août, dans ladeuxième année de leur âge; les autres dans leur troi-


POISSONS SÉDENTAIRES 279sièmeseulement et au commencement de l'été. Le Barbeause nourrit de vers, d'insectes, de mollusques etde petits poissons. L'adulte ne vit pas plus de deux àtrois heures hors de lëau. L'alevin réussit difficilementencaptivité.FIG. 74. — Le barbeau commuu.Le Chevesne,Chevaisne, Chevanne, J u è n e ou Meunierblanc (Cyprinus leuciscus ou Squalius dobula). leplus grand des poissons blancs de nos climats, habite.en grand nombre, nos rivières du Nord et du Centrede la France, à eaux vives et à fond de gravier; il seplaît surtout près des cascades et des remous en eauprofonde, en aval desmoulins et autres usines hydrauliques.Il est très vorace et se nourrit non seulementde substances végétales, mais aussi de proies vivanteset de petits poissons. Sa longueur moyenne est de 0 m .30à 0 m ,40; son poids, de 1 kilog à 1 kilog 500; il peutatteindre jusqu'à 0 m ,65 delonget4 à 5 kilogs de poids.Il fraye d'avril en juin, par bandes, dans les courantsles plus rapides mais peu profonds; la femelle dépose


280 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Usur le sable, le gravier ou les pierres du fond, ses œufscollants, petits, vie couleur pâle et nombreux. Laponte se prolonge souvent, dans le m ê m e cours dëau,durant un mois; les œufs éclosent en 6 à 10 joursL a Vandoise c o m m u n e ou Meunier argenté (Leuciscusvulgaris ou Squalius leuciscus) (fig. 75) habite nosfleuves, rivières ou ruisseauxà eaux vives et limpides,du Centre et du Nord. C ë s t un poisson blanc depeu recherché pour la consommation. Sa taillesurface,moyenneFIG. 7o. — La Vandoise.est de 0 m ,20 à 0 i n ,25 ; son poids de 250 à 500 grammes.Elle fraye en troupes (mars-juin) et dépose ses œufsblanchâtres, très petits et agglutinés, sur le sable oule gravier du fond, dans les endroits où le courantest le plus rapide.Le Gardon blanc, Meunier rosse ou Vengeron(Leuciscusrutilus) (fig. 76) habite la plupart de nos coursd ë a u limpides à fond sablonneux ou marneux ; ilaime les eaux tranquilles et peu profondes, se tientprès des rives et vit en société. Use nourrit d'insectes,


POISSONS SKDKNTAIRKS ~>H\de vers et de détritus animaux. Il est peu recherchéde la consommation. Sa taille moyenne est -de 0 m ,20à 0"V2:>, son poids de 250 à 400 grammes; il peutFio.77. — Le Gardon rouge ou Koteugle.atteindre jusqu'à 0 m ,35 et 000 grammes. Il fraye enbandes, d'avril à juin, sur les plantes aquatiques


282 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Udu fond ou sur les berges pierreuses ; ses œufs trèspetits, très nombreux, jaunes, collants, éclosent rapidement.Le G a r d o n rouge ou Rotengle (Leuciscus erythrophtalmus)(fig. 77) habite les m ê m e s eaux et pratique lesm ê m e s m œ u r s .L e Nase (Chondrostoma nasus) (fig. 78), très commundans le Rhin et les rivières [d'Allemagne tributairesde le Baltique, s'est propagé, depuis l'ouverture ducanal de la Marne au Rhin, dans le bassin de la Seine;il y en a des variétés dans le Rhône, la Garonne, leLot, l'Aude, etc. I l vit et se reproduit volontiers dansles étangs dont le fond n'est pas trop, vaseux. Sa taillemoyenne est de 0 m ,12 à 0 m ,18. Il fraye en mars-mai,sur le gravier et les pierres du fond et des rives.Le G o u j o n fluviatile (Gobio fluviatilis) (fig. 79) serencontre dans la plupart de nos fleuves et rivières àeaux vives, à fond de sable ou de gravier (Seine, Loire,Somme, etc.). Les commissures de sa bouche portent


POISSONS SEDENTAIRES 283chacune un barbillon. Sa taille moyenne est de 0 m .12à () r a j:> de long sur 0 m ,03 à 0'\03:> de haut. Il vit ensociété. A u printemps (avril-juin), il remonte lescoursFIG. 7'.'. — Lo Goujon do rivièred ë a u en troupes nombreuses, pour frayer ; la ponte seprolonge souvent pendant un mois. La femelle dépose,pendant la nuit, ses œufs petits, blanchâtres, agglu-FIG. 80. — L'Ablelte commune.tinés, sur les pierres ; ils éclosent six à huit joursaprès.


284 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A UL'Ablette commune (Leuciscus Alburnus ou Alburnuslucidus) (fig. 80), habite presque tous nos coursd ë a u du Centre et du Nord, plus rarement du Midi.Sa taille moyenne est de 0 m ,12 à 0 m ,15 de long sur0 m ,04 à 0 m ,05 de haut. Elle recherche de préférenceles courants, les eaux agitées, près des ponts, desaqueducs, des chutes, des confluents ; elle se tient àmi-fond. tElle fraye en mai-juin, par bandes nombreuses,près du rivage, sur les plantes flottantes.C ë s t une excellente nourriture pour les Salmonidés,Perches, Brochets, etc., qui en sont très friands. Sesœufs de couleur blanc j a u n â t r e et très petits, doiventéclore dans des eaux à 14 ou 16° C.L'Ablette Spirling' ou Éperlan de Seine (Alburnusbipunctatus) se rencontre dans la Seine, la Meuse,les rivières et ruisseaux de la Lorraine et de la Bourgogneet dans le lac deGenève.h 1 Ablette Hachette (Alburnus dolobratus habite leRhin, la Moselle, la Meuse et leurs affluents, enFrance, en Belgique et dans l'Allemagne Septentrionale.M ê m e s m œ u r s que l'Ablette commune.Le V é r o n , Vairon ou Pinque (Phoxinus lœvis) serencontre dans presque tous, les cours d ë a u de la 1France à fond de sable et de gravier, surtout versleurs sources. Sa taille moyenne est de 0 m ,05 à 0 m ,08.ïl fraye en avril-juin ; ses œufs sont très petits et fortnombreux. I l se nourrit d'insectes et surtout d'œufsde poissons. C ë s t une excellente nourriture pour lesTruites, Perchés et Brochets.Dans la famille des Gadidés : La Lotte c o m m u n e ,Motelle ou Barbotte (Lota vulgaris) (fig. 81),estrépân-


286 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Udue dans presque tous les cours dëau de la France(Rhin, Meuse, Moselle, Rhône, Saône, Isère, Loire,Seine, Garonne, etc ) ; dans les lacs de Genève, deNeufchàtel, de Lucerne et du Bourget ; dans presquetoute l'Europe Septentrionale et Centrale; en Asie, etc.Elle aime les eaux vives, à fond de gravier, coulantentre des rives hautes et accidentées. Elle se nourritd'insectes, de vers et surtout de frai de poissons, dusien m ê m e et de jeunes ou petits poissons ; elle esttrès vorace et on l'accuse d'avoir détruit plusieursbonnes espèces, dans les lacs de la Suisse où elle aété introduite, il y a environ un siècle. Elle vit principalementsur la vase, où elle pêche en employant,comme amorce, le barbillon placé sous sa mâchoireinférieure. Sa taille moyenne est de 0 m ,45 à 0 , n ,50 delong sur 0 m ,07 à 0 m ,08 de haut et jusqu'à 1 mètre ;son poids, 1 kil. 500 à 2 kil. 500 et jusqu'à 5 kilos.Elle fraye en hiver (décembre-février) en troupesnombreuses,et dépose ses œufs blancs e x t r ê m e m e n t petitssur les rives plates et sableuses, en eau tranquille;jusqu^à présent, il ne semble pas que l'on ait réussi àla reproduire artificiellement.Dans la famille des Siluroïdes: le Silure c o m m u n ,Wells ou Lotte du Danube (Silurus glanû), originairede l'Europe orientale (fleuves, rivières, lacs et étangsde la Russie, de l'Autriche, rare en Allemagne et enSuisse) et que l'on a parfois conseillé d'acclimater enFrance, est d'un développement très lent, quoiqued'une voracité extrême, dévorant, non seulement lespoissons, mais aussi les petits m a m m i f è r e s et les oiseauxaquatiques dont il peut s'emparer. M , Coste le


P0I8SÔNS SÉDENTAIRES ' 287recommandait pour les Tourbières de la Picardie et deFIG. t*2. — Le Chabot do rivière.la Champagne. Nous pensons, en effet, que telle doit


288 L ' E X P L O I T A T I O N D E S C O U R S D ' E A Uêtre sa seule destination pour nous; mais, encore unefois, ceci suppose que l'on a ensemencé ces eaux, àson intention, de poissons blancs destinés à lui servirdenourriture. Sa taille moyenne est de l m ,50 et jusqu'à3 mètres de long ; son poids de 70 et jusqu'à 300 kilos.11 fraye en mai-juillet et la femelle dépose ses œufsverdàtres,de la grosseur d'un petits pois, dans la vase,près des rives ; ces œufs sont particulièrement recherchésde la plupart des poissons, ce qui limite heureusementle développement de cette espèce peu enviable.Dans la famille des Cottides : le Chabot c o m m u nou de rivière ou Caboche (Cottus gobio) (fig. 82), recounaissableà sa tête disproportionnée qui le fait ressemblerà un têtard, habite la plupart de nos rivières etruisseaux dont les eaux claires coulent sur le sable oule gravier, au nord comme au midi, (Ardennes,Meuse,Var, Alpes-Maritimes). Sa taille moyenne est de 0 m ,10à O m , 1 2 . Il se nourrit de substances végétales, d'insecteset principalement de larves de libellules, defrai de toutes les espèces et surtout de la sienne et dejeunes alevins. Il fraye en mars-mai, dans un nid quele mâle creuse entre les pierres et qu'il surveille duranttrente à quarante jours, cëst-à-dire jusqu'à l'éclosion ;lafemelle dépose dans ce nid ses œufs gros, jaunâtres,peu nombreux, groupés en pelottes. C ë s t un pauvremets pour l'homme, mais une proie très recherchéedela Truite, de la Perche et duBrochet.L a famille des Gastérostéides ne nous offre que lesEpinoches, A i g u i l l o n n é e ou grande Epinoche (Gasterosteusacculeatus). D e m i - a r m é e (G. semi-armatus),D e m i - c u i r a s s é e (G. semi-loricatus) et douze autres


K C R E V I N S K Sespèces que l'on ne peut que vouer à la destruction,attendu d'abord, que leur chai rn'a aucune valeur pourl'homme, qu'ensuite, ce poisson, protégé par ses dards,ne peut servir de proie aux ichtyophages, et enfinque, n'unis en bandes, ils attaquent et dévorent lespoissons adultes après avoir détruit leur frai.S 3. — ÉCREVISSESEn dehors des poissons,mais près d'eux, dans la classedes crustacés, nous ne pouvons passer sous silencel'Ecrevisse de r i v i è r e ou commune à pieds rouges(Astacus fluciatihs seu nobiiis) (fig. 83), dont nous avonsparlé déjà au point de vue de son élevage en viviers.Elle est spontanée dans quelques fleuves, beaucoupde rivières, la plupart des ruisseaux de nos montagnes,dans les pays granitiques ou calcaires surtout. Lesdeux espèces ou variétés indigènes (E. des torrents.Torrent lu,n ou saxatilis ; E. à pieds blançs, pallipes) serencontrent dans les eaux de presque toute l'Europecentrale, tantôt exclusivement (A. Torrentium en Allemagne,en Alsace, dans le Danube et le Necker, etc. ;A . pallipes, dans la vallée du Rhône, en Angleterre,etc.), tantôt commensales d'un m ê m e bassin et parfoisdes m ê m e s eaux (sur une grande partie de l'Europecentrale). Pour d'aucuns, ces variations de couleurdans les pattes et la carapace, noire, blanche, rouge,ne sont dues qu'à la nature des eaux. Tant y a-t-il que ,l'Ecrevisse pallipède a la partie interne et inférieuredes pinces de couleur blanc verdàtre et n atteint guèreque 0 m,i0 de longueur; tandis quel'EcrevissefluviatileA. QOBIN, Pisciculture. b


290 L EXPLOITATION DES GOÛRS D ' E A Uenp 21FIG. 83.— Écrevisse mâle, vue en dessous, pour montrer les organesde la reproduction.r1, pédoncule oculaire,appendice du l' anneau ; 2, antennules, appendices du 2" anneau; 3, antennes, appendices du 3" anneau ; 4. mandibules, appendices du4" anneau. Les premières (5), les secondes mâchoires (6j, et la première pattemâchoire(7), appendices des 5\ 6 e et 7 e anneaux, sont recouvertes par lesappendices8 et 9 ; 8, deuxième patte mâchoire, appendice du 9" anneau ; 10,nremière paire de pattes, appendice du 20 e anneau, transformée en pince ; 11 à 14,pattes, appendices des 11" à 14" anneaux; 15 à 19, fausses pattes abdominales,ou pattes natatoires, appendices des 15* à 19 eanneaux ; 20, nageoire caudale,apoenaice du 20' anneau, exopodite exp. et endopodite etip. ; 21, Telson portantP ouverture anale à sa partie antérieure, représentant d'après Mime-Edwards lfr21 e anneau.


ÉCREVISSES 291présente une coloration rouge plus ou moins étenduesur les pinces et les pattes ambulatoires et atteint lataille moyenne de 0 Œ ,15 en longueur; sa chair est plusestimée que celle d e l à première qui, en revanche, estbien plus rustique. L'Ecrevisse pallipède, abonde dansnos cours d'eau issus des montagnes des Ardennes, desVosges, du Jura, d'Auvergne, des Alpes et des Pyrénées;l'Ecrevisse fluviatile se rencontre surtout dans leRhin, la Meuse, la Mayenne, etc. On a constaté enoutre,la présence de la première dans beaucoup de lacs duJura et dans celui de Garde, en Italie, enfin, dans uncertain nombre d'étangs bourbeux; de la seconde,dansles lacs de Beresai et de Bologoé et m ê m e dans leseaux,peu salées il est vrai, de la Baltique 1 Quant à l'Ecrevissedes torrents, elle est très rare en France.En 1870, au printemps, et presque simultanément, enSuisse, dans une partie de l'Allemagne et dans tout leNord-Est de la France, s'est produite, une mortalitéterrible qui a décimé les Ecrevisses de la plupart denos cours d ë a u2. Les uns l'attribuent à des pluiesfroides survenues à l'époque de l'une des mues; lesautres à l'invasion d'un entozoaire du genre Distome,1Dans le déparlement de l'Allier, au dire de M"" Marie Alex. Dumas,la rivière dite la Bauder produit des écrevisses, mais pas de poissons:« Un caractère tout particulier à cette rivière, c'est de n'avoir ni poissonsni grenouilles, attendu qu'au-dessus de Bussère-la-Grae, dontelle a le malheur d'être voisine, des usines de schistes bituraeuxécoulent leurs résidus dans ses eaux; mais, en échange, les écrevisses,moins susceptibles que les carpes et les goujons, y pullulentdans chaque trou, sous chaque pierre, et grouillent en caressant leschênes, les peupliers et les vernes qui bordent cette rivière. » (MadameBenoit, t. I 'r, p. 6. Paris, 1869).* Voyez Urocchi, Traité de Zoologie agricole, Paris, 1886, p. 711.


292 L EXPLOITATION DES COURS D'EAUvulgairement appelé Douve (D r Harz, Zundel). Ce Distomevivrait dans les muscles du crustacé, à l'état deKyste, ou dans le tissu cellulaire,à l'état libre,sous formelarvée ; la forme parfaite ne se trouverait que danscertains poissons (Carpe, Tanche, Anguille). Par générationalternante, le Distome passerait du poisson aucrustacé et inversement, le premier expulsant les œufsde son parasite avec les fèces, le second les absorbantavec ses aliments; à peu près comme le c œ n u r e cérébralqui alterne du chien au mouton ; le téniasolium,de l'homme au porc, etc. Bref, la maladie qui dépeuplenos eaux serait une ilelminthose ou mieux une Distomatosedue à la multiplication du Distoma cirrhigeru m et quelquefois du Distoma isostomum. I l nous paraitassez surprenant que tandis que les poissons quiportent le parasite à l'état parfait, tendent vers la diminution,sa forme larvée se soit subitement multipliée defaçon à produire simultanément de semblables ravagesdans une région aussi étendue. D'autres l'attribuentplus vraisemblablement à un champignon parasite,dugenre Saprolégnia, et auquel on a donné le nom deMycosis astacina ; ses spores, transportés par l ë a u etintroduites dans l'organisme par les branchies, s'y développenten grand nombre, et plus rapidement encoreà l'extérieur, sur les parties molles des articulations dela queue et des pattes. Quelle q u ë n soit la cause, ce désastrene peut se réparer que par la prévoyance ; certainsConseils généraux ont voté des fonds pour le repeuplement,d'autres ont décidé l'interdiction absoluede la pêche des crustacés durant trois ans ; ce sont làd'excellentes mesures qui gagneraient à êtrecombinées.


KGRKV1SSKS 293L'Écrevisse parait apte à se reproduire dès l'âge dedeux à trois ans, suivant l'espèce ou la variété à laquelleelle appartient et surtout selon la nature des eaux. Lasaison des amours commence plus tôt pour l'Écrevisse.des torrents (octobre à décembre) que pour l'Écrevissenoble (novembre à janvier). La fécondation résulted'un accouplement : le mâle saisit la femelle à l'aidede sespinces, la retourne sur le dos et dépose la liqueurfécondante sur les bords de l'orifice externe des oviductesoù c M le se solidifie et prend un aspect vermiculaire.La ponte a lieu après un intervalle qui variede 10 à 15 jours. L'Ecrevisse des torrents, à trois ans,pond de 00 à 100 ouifs d'un brun rougeàtre, et 200à cinq ans ; l'Ecrevisse à pieds rouges pond jusqu'à250 ouifs à sa septième ou huitième année (Chabot-Karlen). La femelle, couchée sur le dos, replie en avantl'extrémité de son abdomen sur les derniers sternumsthoraciques, de manière à former une chambre oùs'ouvrent les oviductes. Les œufs passent dans cettechambre en une seule opération, qui a lieu d'ordinairependant la nuit, et sont plongés dans un mucusvisqueux et grisâtre qui baigne la chambre. Chaqueœuf, en sortant de l'oviducte, en avait entraîné déjàde la substance visqueuse qui s'étire en un court filamentdont l'extrémité s'attache à l'un des plus longspoils qui garnissent les pattes natatoires et, commecette matière durcit rapidement, l'œuf demeure attachéau membre par une sorte de pédoncule.Lorsque tous les œufs sont pondus, l'incubationcommence. C o m m e l e s œ u f s partagent les mouvementsdes pattes natatoires auxquelles ils sont attachés, ils


294 L'EXPLOITATION DES COURS D'EAUsont continuellement agités dans l ë a u et maintenusainsi aérés et propres, tandis que l ë m b r y o n se développedans leur intérieur. Ce développement est trèslent : l'accouplement a eu lieu en octobre-novembre ;Téclosion ne se produit q u ë n avril-juin. Les jeunesnaissent, à peu près semblables de formes aux adultes,si ce n ë s t que la tête est relativement beaucoup plusdéveloppée. Très petits, tout à fait transparents, ilsse cramponnent aux pattes natatoires de la m è r e et semettent à l'abri de son abdomen comme ils s'y trouvaientdurant l'incubation. Successivement devenusde plus en plus capables de se mouvoir, ils quittent cerefuge, s'en écartent de plus en plus, mais pour y reveniren cas de danger. A u bout de huit à dix jours,ils abandonnent la mère ; ils ont alors 0 m ,02 de longueuret se retirent dans quelque petit trou pour yopérer leur première mue (Z. Gerbe, Coste, Chantran,Huxley). Les jeunes qui n ë n t pas encore atteint lalongueur de 0, m 01, s'enfoncent dans le sol des rives,jusqu'à une profondeur qui dépasse parfois un mètre,et y passent leur première jeunesse(Gauckler).La Carapace chitinée qui recouvre le corps de l'Écrevisseest incapable de se prêter à son développement'en longueur et en diamètre ; elle tombe et se reproduit,se moulant cette fois sur les dimensions acquises;la nouvelle enveloppe est très molle d'abord et ne sedurcit que successivement ; aussi, jusqu'à ce quëllesoit devenue apte à le protéger, l'animal reste-t-il abritédans son refuge. On croit que ces mues successives seproduisent dans l'ordre suivant :L alrc, dix jours après l'éclosion ; les 2 e , 3 e , 4 e et 5 e à


ECRFVISSKS 295inten ailes de 20 à 25 jours; de septembre à la find'avril de l'année suivante, il ne s ë n produit pas ; la 6 ea lieu en mai de la seconde année, la 7" en juin et la8* en juillet. Pendant la troisième année, cinq mues(août, septembre, mai, juin et juillet) ; durant la quatrièmeannée, deux mues (juin, septembre) ; ensuitela femelle ne mue qu'une fois par an (août ou septembre)et le mâle, deux fois (juin ou juillet, août ouseptembre.) Tel est, du moins, le résultat des observationsde M . Chantran, sur l'Écrevisse àpieds rouges.D'après M . Carbonnier, les jeunes d'Écrevisses à piedsrouges ne muent que deux ou trois fois dans le courantde la première année, une fois seulement dans lemilieu de l'été ensuite et une fois par an et non pasm ê m e tous, dans la vieillesse. L'accroissement en longueuret en poids serait le suivant, pour l'Écrevisse àpieds rouges :Age : d'après M. Carbonnier.Long, du corps.(ira 0080 O:Ù\(I 07 o095(I 1-2(1m»1res âgées (1) . . f> •>d'après M. Soubeiran.Long, du corps. Poids.à la naissance, r » » » »à un an Om.05 Ok.Oul .5à deux ans. .. 0 07 0 OUl.oà (rois ans... 0 00 0 0U6.5à quatre ans. 0 11 0 017.5à cinq ans... 0 ll'o 0 018.5âgées 0 16 0 030.»très âgées 0 10 0 125.»D'après M . Huxley, l'Écrevisse anglaise à pieds1On dit que l'Écrevisse n'a atteint tout son développement qu'à15 ou 20 ans; le mâle pèse alors do 100 à 120 gr. ; à partir de cetâge, elle reste à peu près stationnaire. On trouve quelquesmâles dupoids de 150 à 160 gr. ; rarement la femelle dépasse celui de 80 à90 grammes.


2 % L'EXPLOITATION DES COURS D'EAUblancs (A. Torrentinm) arrivée à toute sa croissance,ne mesurerait que 0 m ,095, de 1 extrémité du rostre enavant, à l'extrémité de la queue étendue en arrière.Le plus gros spécimen mesurait 0 m ,108. Les mâlessont d'ordinaire un peu plus gros et, presque toujoursils ont les pinces plus longues et plus fortes que lesfemelles dont ils se distinguent encore par la moindrelargeur du thorax et des lames transversales (ousomites) de l'abdomen, improprement n o m m é laqueue.L'Écrevisse se nourrit de petits mollusques, delarvesde grenouilles (têtards), de larves d'insectes, de proiesanimales vivantes ou mortes, fraîches ou putréfiées etaussi de végétaux, particulièrement de jeunes pousseset feuilles de Chara, de carottes de jardin, etc. ; elledévore les escargots en entier, mollusque et coquille,celle-ci étant mise à contribution pour fournir le calcairede la Carapace. Elle ne sort de sa retraite, neclasse, ne mange, qu'entre le coucher et le lever dusoleil ; elle passe la journée cachée dans son trou, abritéesous les pierres ou entre les racines d'arbres ; elletraverse l'hiver dans un engourdissement complet dontelle ne sort qu'auprintemps.Ellea pour ennemis : parmilesmammifères, laLoutre,le Rat d ë a u , la Musaraigne ; parmi les oiseaux, le Héron,le Canard, le Râle d ë a u ; parmi les poissons, leBrochet, la Perche, la Truite, mais surtout l'Anguille;parmi les reptiles, les Tritons et les grenouilles quidévorent les jeunes ; parmi les Helminthesentozoaires,les Distoma cirrhigerum et Isostomum (Trématodes),YEchinorrhynchiis miliarïs (Acanthocéphales) ; parmi


K Cil E VISSES 297les crustacés parasites ectozoaires, les AstncohdeiïnHfvsi'h'i et Abilrftjardi, les Branchiobdella jtarasitira etAsfaci, etc. Dans le règne végétal, des Cryptogamesparasites encore peu étudiés envahissent sa carapace,s'y établissent, s y multiplient et produisent les maladiesappelées tantôt le blanc, la rouille, le rouge, suivantl'espèce m ê m e des cryptogames4Elle a surtoutenfin pour ennemi l'homme rapace et i m p r é v o y a n t 2 !Il semble que dans l'espèce Ecrevisse, les mâlessoient aux femelles dans la proportion de trois à quatrepour une: ce fait d'observation qui peut tenir soit aumode, soit à la saison de pèche, mérite d'autant plusde confirmation qu'il serait une des rares exceptionsde cette nature parmi les animaux sexués.L'Écrevisse à pieds rouges, pour être marchande,doit avoir, au minimum, 0 Œ ,08 de longueur ; celle àpattes blanches, 0 m 06 mesurés de l'extrémité de laqueue déployée à l'œil3. D'après M . H. E. Sauvage, leprix des Ecrevisses à pattes rouges et à pattes blanches,1Voyez Brehm el KuDckcl d'Herculaïs, les Merveilles dr la Xaturc:les Crustacés. Paris, 188b.' 2 Paris consoramail, en 183C, 4,000 kil. d'Écrevisses à patles rougesprovenant pour 3/8 du Rhin,pour 2/8 de la Meuse el de la Moselle,pour 2/8 de la Picardie, pour 1/8 de la Seine,au prix moyen de 4 fr.le kil., soit 16,000 fr. : plus 7,000 kil. d'Écrevi ?ses à pattesblanchesprovenant de Seine-et-Oise et d'Eure-et-Loir surtout, au prix moyende 2 fr. le kil., soit 13,000 fr. ; ou ensemble 11,000 kil. valant29,000 fr. En les portant au moyen de 80 gr., ces chiffres représenteraient,l'un dans l'autre, 137,^00 Kcrevisses vendues en moyenne3 fr. le cent, ou 3 centimes pièce.Actuellement, la consommation de la capitale est de 5 à 6millionsd'Écrevisses, valant envirou 400,010 fr. ; soit 7 fr. 30 le cent ou0 fr. 073 la pièce, plus du double.s Décret du 10 avril 1875, art. S.


298 L'EXPLOITATION DES COURS D'EAUà Paris, et au cent en nombre, aurait suivi la progressioncomparative que voici : en 1846, 19 fr. 05 et 3 fr. ;en 1851: 18 fr.06 et 2 fr. 72 ; 1853, 25fr.07 et 3 fr.43.Aujourd'hui, grâce d'un côté à d'énormes importationsd'Allemagne des premières, et d'un autre côté, àl'épidémie qui a dépeuplé tous nos cours d ë a u duN.-E.,le prix des Écrevisses de rivière a diminué, celui, aucontraire, des Écrevisses à pieds blancs a augmenté.§ 4 — AMÉNAGEMENT DES COURS D'EAU.Nous pouvons diviser les poissons des cours dëauen deux catégories: 1° Ceux alimentairespourl'homme(Carpe, Loche, Barbeau, Chevesne, Goujon, Lotte,Brochet, Perche, Anguille, etc. ; 2° Ceux à peu prèsexclusivement alimentaires pour les poissons de proie(Vandoise, Rosse, Botengle, Nase, Ablettes, Véron,Chabot,etc.Parmi les premiers, les Salmones, le Brochet, laPerche, et quelques cyprins, sont ichthyophages et cesont ceux qui parviennent aux plus fortes dimensionset dont la chair, relativement moins mélangée d'arétes,est la plus délicate. I l faut donc multiplier également,et dans une proportion identique et parallèle, les mangeurset les mangés, choisissant, bien entendu, chaqueespèce pour la nature des eaux dont on dispose; puis,il faut encore a m é n a g e r ,les fleuves, rivières, canauxou ruisseaux de telle façon que les diverses espècespuissent s'y développer dans les meilleures conditionset suivant les proportions d'un équilibre stable.


AMÉNAGEMENT DES COURS D ' K A U 290Il y a longtemps déjà que l'on se plaint de la dépopulationde nos cours d ë a u . A ce fait désastreux, onpeut assigner plusieurs causes :l°Le régime auquel sont soumis nos fleuves, rivièreset ruisseaux. Le déboisement et le dégazonnementdes pentes ont rendu irrégulier le débit des cours d ë a uqui offre des alternatives de plus en plus fréquentesd'assec ou dëtiage, de crues ou de débordements. Ony a remédié par l ë n d i g u e m e n t et la canalisation, maison a ainsi rendu le fond plus mobile et on a fait disparaîtreles herbes, frayères naturelles pour beaucoupd'espèces ; tantôt les crues rapides du printempsentraînent ou envasent les œ u f s , tantôt les sécheressesde lëté (1881) mettent les poissons à sec 1 ;2° Les progrès de la navigation, de l'industrie, dela civilisation en un mot, détruisent directement lepoisson. Le mouvement des vagues produites par lanavigation à vapeur disperse le frai déposé sur lesplantes qui garnissent les rives ; les œufs sont décollésdes herbes, projetés sur les berges et périssent ense desséchant (Gauckler;. » Les usines industriellesse multiplient de plus en plus sur les cours d ë a u ,utilisant une force mécanique moins dispendieuse quela vapeur; elles y établissent des barrages de retenue,des écluses, des dérivations ; elles y jettent leurs déjectionssolides et liquides (papeteries, tanneries, pro-4En 1881, les petites rivières et ruisseaux qui découlent des montagnesdu Jura (Bienne, Tacon, Ain, Drouvonant, Seille, Valière)étant très bas ou taris, les poissons ou écrevisses y périrent en grandepartie ou devinrent la proie d'une multitude de maraudeurs, et lesvoilà dépeuplés pour longtemps.


300 L EXPLOITATION DES COURS D EAUduits chimiques, etc., etc). La population toujourscroissante de nos villes presque toujours à chevalsur un cours d ë a u , le convertit en un estuaire où ellelance tous ses détritus, et dont les flots se trouventainsi de plus en plus dangereusement souillés pour lepoisson ;3° Le défaut presque complet de surveillance sur leseaux du domaine commun, a peut-être été, de toutesces causes, la plus efficace. L'Etat lait suffisammentsurveiller les eaux dont il tire un revenu par l'affermage: dans toutes celles qui ne lui appartiennent pas,l'absence de toute police, générale ou municipale,laisse le champ libre, à peu près toute l'année, le jouret la nuit, aux maraudeurs qui font profession de cebraconnage, aux pâtres, aux écoliers en rupture debancs, ù toute une population besoigneuseinconscienteou mal intentionnée qui pêche pour vendre ou senourrir, détruit pour pêcher ou tout simplement pourdétruire et anéantit plus de poissons encore quëlle n ë ncapture. En l'absence de police, le prix sans cessecroissantdu poisson, parallèlement à celui de la viande deboucherie, constitue un encouragement puissant àcette coupable industrie et accélère la démoralisationdes populations citadine et rurale;. 4° Ce n'est pas seulement la police relative au droitde propriété, qui fait défaut, mais aussi celle sur lapratique de la pêche (heures, engins) et la vente dupoisson. Les lois, les règlements sont faits et presqueparfaits ; mais il manque une organisation à l'aide delaquelle on puisse les faire respecter. J'ai v u pratiquer,en Loire, la pêche au feu, Tune des plus dé-


A M H N A < 1K MENT DES Cnl'Rs D ! VIsastreuses ; j'ai vu pkilier en toutes saisons et avectous les genres de filets ; j'ai vu capturer des jeuneset des adultes ; j'ai vu enfin les produits de ces délitsfrauduleux se vendre couramment sur les m a r c h é ssans aucune objection de la part de ceux chargés defaire exécuter les lois, décrets ou régi ments. Agentsde police, gendarmes, gardes champêtres, sont chargésde fonctions si multiples et si écrasantes qu'ilsn ont point le temps de s'occuper des cours d ë a u .Ils courent après les chasseurs, dressent des procèsverbauxaux braconniers et aux recéleurs, mais ilslaissent les pécheurs marauder dans une paix trop profonde.Avant de songer à faire de la pisciculture en eauxcourantes et ouvertes, il est logiquement indispensabled'améliorer le régime et la surveillance de ceseaux ; sans cela, mieux vaut s'abstenir.1° Le reboisement des montagnes, immense opérationque réclament depuis si longtemps les cultivateurs,les usiniers, les économistes, les hygiénistes.tous ceux enfin qui vivent par les eaux ou quis'occupent du bien-être de tous, ne serait pas moinsprofitable auxpisciculteurs;2° « Le curage de nos canaux, en enlevant lesplantes sur lesquelles bon nombre d'espèces fixentleurs œufs, nuit certainement à la propagation decelles-ci ; il serait à propos que l'administrationveillâtà ce que, en ces m ê m e s endroits (et dans les petitscours d ë a u ) le faucardage fut défendu ou tout aumoins réglementé pour obvier à cet inconvénient, ces


302 L EXPLOITATION DES COURS D'EAUdeux mesures, protection des adultes, facilité de reproduction,étant le complément l'une de l'autre; »3° Dans nos cours d ë a u navigables et flottables,conserver des réserves nombreuses et étendues : faireexécuter les conditions des cahiers des charges par lesadjudicataires, aussi bien à l'endroit de la taille despoissons capturés, qu'à celui des engins de pêche etdes clauses de réserves et de repeuplement. Amenerles grandes villes à employer leurs eaux d'égoûts, enirrigations, afin qu'elles ne détruisent ou ne chassentpas le poisson en souillant les eaux du cours d ë a uqui les traverse. Établir au plus tôt, partout où ellessont nécessaires, des échelles à poisson ou tout autremoyen analogue de communication facile de bief inférieurà bief supérieur ;4° Dans nos canaux, m ê m e s soins ; en outre, contre lavidange nécessitée parles réparations annuelles, organiser,à 10 mètres environ en aval de chaque écluse,une poêle analogue à celle des étangs, dans laquelle lepoisson de repeuplement se rassemblerait et où il seraitaisé de le pêcher alors pour le transporter dans unbassin de dépôt installé non loin d'une maisonéclusière(Gauckler) ;5° Après avoir a m é n a g é un cours d ë a u , cëst-à-direy avoir installé les dispositions les plus favorables auxespèces dont on veut le peupler (frayères, échelles, etc.),il faut l ë n s e m e n c e r d'abord en poissons blancs, créerl'alimentation sur place, avant d'y amenerles convives(Truites, Ombles, Perches, Brochets, etc., etc.). Le1L. Vaillant, Rapport offic. sur VExposition univ. de 1878,p.l8.


AMÉNAGEMENT DES COURS D EAU 303peuplent nt opéré, il ne reste plus qu'à surveiller etrétablir l'équilibre entre les espèces. Pour cela, on a ladestruction dos œufs pour ceux-ci, la surveillance desfrayères pour ceux-là, l'apport des œufs fécondés oudes alevins, les mises en réserves de divers cantons,les p'Vlios supplémentaires, etc.;G 0 Après avoir soigneusement et largement revisé lalégislation des eaux dans le but de déterminer aumieux des intérêts généraux les droits des usiniers,des irrdateurs et des pisciculteurs, il faudrait organisersur les cours d ë a u une police analogue à cellequi protège nos forêts, au moyen d'un personnel spécialembrigadé. Il serait non moins désirable que l'onencourageât et favorisât la constitution de syndicatsde pêche qui affermeraient un cours d ë a u . les eauxd'une commune ou d'un bassin et les exploiteraientsous des conditions déterminées de repeuplement, deréserves, de travaux d'aménagement, etc. ; on pourraits'en rapporter à eux pour organiser la stricte surveillanceutile à la protection de leurs produits.De 1848 à 1865, il y eut en France, un mouvementd'enthousiasme général pour la Pisciculture; on seplaignait du dépeuplement des cours d ë a u , on entrepritde les repeupler. Naturellement, on choisit dans ce butles meilleures espèces, celles ichtyophages, et, H u -ningue aidant, on versa dans le Doubs, la Loue, le Lezdans la plupart de nos rivières en un mot, des alevinsde Truites, Ombres, Corégones, Saumons, etc. Onopéra presque partout en dehors des lois de la logique.Celle-ci, en effet, eut c o m m a n d é de détruire d'abord,dans les eaux à repeupler tout autre ichtyophage que


301 L EXPLOITATION DES COURS D'EAUcelui qu'on y voulait multiplier; puis, de préparer dela nourriture pour les Salmones à venir en faisantpulluler le poisson blanc; enfin, les produits ensemencés,d'organiser une surveillance chargée de lespréserver du vol et de la destruction.On ne fit point toutes ces réflexions : Huningue fournissaitgratuitement des œufs fécondés ou des alevins,on les jetait dans les fleuves, rivières ou ruisseaux,plus ou moins près de la source, ici ou là et l'on pensaitavoir posé la base d'une merveilleuse production.Or. voici ce qui arriva: des alevins versés à lëau, lesuns, et cëst le grand nombre, furent dévorés par lesBrochets, les Perches, les Anguilles, les Loutres, lesIfats d ë a u . les Canards, etc. ; des survivants, la plupart,avant m ê m e d'avoir acquis la taille et le poidscomestibles, furent successivement happés par les pêcheurs-braconniers,à l'aide de tous les engins dontils disposent pour leur maraude de jour ou de nuit;quelquesrares échappés vinrent seuls et à longs intervalles,témoigner des succès que l'on eût pu atteindreen procédant plus logiquement. Toutle monde se lassade travailler pour le plus grand profit des voleurs eton ne pratiqua plus dorénavant que la pisciculture eneaux fermées et surveillées. Cëst là une conclusionfatale: tant que l'on n aura pas délimité et réparti l'usagedes eaux strictement et exactement entre lesdivers ayant droit; tant que l'on n aura point organiséune surveillance efficace, on ne fera rien dans les eauxcourantes du domaine commun, nul ne se souciant dedépenser pour autrui son temps et son argent.D'un côté, les conditions biologiques de nos cours


PRODUIT DK U EXPLOITATION 305d ë a u s'empirent chaque jour ; de l'autre, l'activité dévastatricede l'homme est de plus en plus e n c o u r a g é epar les hauts prix et n est réprimée par aucune policerégulière ; le dépeuplement s'accentue et le repeuplementdevient de moins en moins possible.S 5. — PRODUIT DE L'EXPLOITATION DESEAUXDOUCESOn peut dire que nos cours dëau navigables et flottablessont maintenant à peu près bien administrés,la loi du 31 mai 180:> en instituant les réservesque desdécrets ont organisées et en prescrivantl'établissementde passages à poissons (point resté encore presquepartout à l'état de lettre morte) a tracé la voie. Lesrésultats en sont déjà sensibles, puisque le produit dela location des pèches, dans les eaux du DomainePublic a suivi les progressions suivantes:186318711876580.nno fr.820.0008;i8,000 *Or, ces fermages portaient sur les longueurs kilométriquessuivantes :1.7011 kil000 kilIl est donc e x t r ê m e m e n t présumable que l'augmentationdes réserves accroîtrait le revenu dans de largesproportions. Vers 18oO,d'aprèsM.Jourdier, voici ce q u ë -


306 ï/EXPLOITATION DES COURS D'EAUtait le revenu par kilomètres de quelques cours d ë a u :Aisne 21 fr. Rhône 7 fr.Lot. 16 — Isère .. 5 —Donli »ïrne 10 — Urùrae 4 —Cher 9 — Durance 2 —Loire 8 —A la m ê m e époque,le Frère Ogérien indiquait le prixde fermage annuel de quelques rivières du Jura; c'étaient:le Doubs,171 fr. 16; l'Ain, 19 fr. 55; la Bienne,34 fr. 86 : la Loue, 105 fr. 25 ; moyenne 57 fr. 70. En 1876.ces chiffres étaient devenus : Doubs canalisé, 64 fr. 47 ;Doubs non canalisé, 177 fr. 92 ; Loue, 157 fr. 50; Ain,18 fr. 30 ; Bienne, 35 fr. 70 ; moyenne 105 fr. 33. A coupsûr, la valeur chaque jour plus élevée du poisson, contribueà augmenter le prix d'affermage, mais non dansd'aussi fortes proportions ; nous pensons que les 7,360mètres de réserve établis sur le Doubs ont dû y multiplierle poisson et stimuler les adjudicataires.Voici du reste, quel nous paraît être, actuellementle produit des eaux des Domaines Public et Privé:LONGUtRkilom.NATURE DES EAUX SUPERFICIEPRODUIT PARpar kil ! en poissonHECTAREen argentk * m. hect. fr. kil. fr.? J00!Rivières navigables... 29.750 25 10.200 7.142.V-IHI 5 625 50 28.570 20 3>fc.I'O J Canaux de navigation. 8.500 75 107 » 75 »Cours d'eau non navi­20.851 gables, ni flottables. 20.851 35 50 » 35.0312M.000 Ruisseaux 12 000 5 86 » 60 »20.000 i> 4-2.860 30 »» Etangs 110.000 » 57.140 40 i>m . m Superficie totale. '206.7261Produit totalj 10.258.856 12.218.78510.258.856 kit. ; 12.238.785 fr.


PRODUIT DE L'EXPLOITATIONCe produit d'environ 12 millions de francs se décomposeen :Produit en poisson de rivières navigables,.m.t. Duk.l— — — flottables... !»'. k.— — des canaux de navig.. !'.•.;'»


C H A P I T R E I XLES EAUX SAUMATRESSTATISTIQUE. —FAUNULE. — EXPLOITATIONOn nomme Eaux Saumâtres celles qui, résultantd'un mélange d'eaux douce et salée en proportionsvariables, suivant les heures du jour où les saisons del'année, sont, tantôt plus et tantôt moins salées quela mer. Aussi devons-nous distinguer : les embouchuresmaritimes de nos fleuves ; et les Lagunes ouétangs littoraux en communication plus*ou moinscontinue avec lamer.S 1 er . — EMBOUCHURES MARITIMES DES FLEUVESNos fleuves débouchent dans la mer avec une pentevariable, mais généralement assez faible parce que lessables et limons charriés par l ë a u douce, aussi bien queceux amenés par la mer, tendent à combler leur lit, etcela, d'autant plus que leur débit est moins considérable.Sur l'Océan, en effet, la marée, deux fois parvingt-quatre heures, retient d'abord, puis refoule l ë a udouce à une distance plus ou moins éloignée ; puis, aureflux cëst l ë a u douce qui refoule l ë a u salée ; en sorteque le lit du cours d ë a u est successivement alimenté, à


LA'.LNKS o r KTANGS LITTORAUX :UJOmarée basse, par l ë a u douce ; à mer étale par un m é ­lange d'eau douce et d ë a u salée; et enfin, à maréehaute, par de l ë a u salée. La distance à laquelle se faitsentir le flux varie avec la pente du fleuve,l'abondancede ses eaux, son étiage actuel, la configuration de sesrivçs et aussi la hauteur de la marée (marées de quadratureet de zyzygies). la direction et l'intensité duvent. Cette distance maximaest la suivante pour nosprincipaux fleuves et rivières :La Seine 12.") k. 700 La Dordogne 58 k. 200Le Blavei 15 » La Gironde. 102 »La Loire . l -3 L'Adour :ti) i ; \La Sevre-Niorlaise 21 Le Hhùne \\ »La Charente. 29 500Ces distances ont été déterminées par lëbservationdirecte et fixées par les Décrets de 18:).'] et 1850 quiplacent les riverains de ces régions sous le coup de l'Inscriptionmaritime, mais leur assurent, en revanche,le monopole de la pêche dans les eaux ressortissant duministère de la Marine.Nous estimons que lënsemble de nos cours d ë a uqui se jettent directement à la mer représente un trajetd ë n v i r o n 1,000 kilomètres soumis à l'action des marées; si nous leur attribuons, en moyenne une largeurde 150 mètres, sur ce trajet, ce sera une superficie de15.000 hectares.| 2. — LAGUNES OU ÉTANGS LITTORAUXLes Lagunes ou étangs littoraux ( de Lacuna, ital.fosse, mare) sont des lacs ou des étangs à fond plat oupeu profonds, séparés par des cordons de dunes ou des


310 LKS EAUX SAUMATRESbancs de sable de la mer avec laquelle ils ne sontq u ë ncommunication ou restreinte ou irrégulière ou dontils sont, parfois m ê m e complètement isolés. Quelquesunssont alimentés par un ou plusieurs petits coursd ë a u . Tous ces étangs sont situés dans le midi de laFrance (S.-E., Languedoc; S.-O., Gascogne); l'évaporationà laquelle leurs eaux sont soumises est très activeet, en été, leur salure augmente jusqu'à 12 et{ ¥ B ; en hiver, les eaux de pluie et celles que leura m è n e n t les affluents dont ils peuvent être pourvusen abaissent, au contraire, la salure jusqu'à 1°5 oum ê m e 1° B. La Florule, la Faunule des eaux doucesetsalées s'y succèdent donc tour à tour, sauf pourquelques rares espèces qui ont pu s'accommoder auxvariations de ce milieu.Nous avons établi déjà une distinction entre les lagunesdu S.-E. ou de la Méditerranée, et celles du S.-O.ou de l'Océan : leur mode de formation, en effet, a étédifférent comme différent aussi est leur régime.Les Etangs Saumâtres de la Méditerranéeproviennentdu comblement progressif du fond du golfe du Lionpar les salles et les limons du Rhône, comblementdont il est aisé de suivre la marche annuelle, aujourd'huiencore, sur certains points. Situés, actuellement,dans un rayon m a x i m u m de 12 kilomètres dulittoral, ils sont, les uns isolés au milieu des terres,parfois exploités comme Salins, et leur niveau tend àbaisser ; les autres, plus rapprochés de la mer, n ë nsont séparés que par des Lido ou cordons de duneshautes de 2 à G mètres au plus et communiquent avecelles soit par des ouvertures. permanentes appelées


LAGCNKS OU ÉTANftS LITTORAUX 311Graus, qui tendent à se combler et se ferment, pendantles tempêtes de l'hiver, si l'afflux des eaux doucesne vient les déboucher,soit par des ruptures violentesque la mer en furie pratique dans les digues. Leurprofondeur moyenne varie, suivant les saisons, de 1 à3 mètres; car nous en retrancherons les bassins deBerre (11,500hectares) et de Thau (5,141 hectares)quisont de véritables baies ou de petites mers intérieuresd'un régime tout autre. Il reste encore dans cetterégion, environ 40 étangs ou lagunes couvrant ensemble63,108 hectares et, avec dix autres étangscorses, 67,268 hectares.Les étangs saumâtres du littoral océanique résultentdu colmatage opéré par la mer, dans la baie triangulaireautrefois limitée par les collines Bordelaises (duN.-O. au S-.E.) et les collines Landaises (du N.-E. auS.-O.}. Mais, sur toute la rive occidentale de cetrianglequ'il avait comblé, l'Océan constiuisit par la suite unesuccession ininterrompue de dunes hautes (jusqu'à 80 m )et larges de 2 à 8 kilomètres à la base, qui s'opposentà l'écoulement vers la mer des eaux de pluie tombéessur ce bassin presque imperméable de 060,000 hectaresdes départements de la Gironde et des Landes. Si nousen défalquons le bassin d'Arcachon (14,660 hectares),analogue des étangs de Berre et de Thau, nous rencontronsencore 12 étangs peu profonds, en communicationtrès irrégulière et très indirecte avec la mer, àm a r é e basse seulement, parfois exposés à son flux, etdont l ë a u presque douce, ne pèse que 0° 5 à 1° B. Cesdouze étangs, plus insalubres encore que ceux duLanguedoc, recouvrent ensemble 17,755 hectares.


312 LES EAUX SAUMATRESEn récapitulant, nous constatons donc que le domainedes eaux saumâtres comprend :1° Embouchures maritimes 15.000 hectares.2° Etants saumâtres. — Littoral méditerranéenContinent 63.198 /A 7 0„ QCorse 4.070 jb 7'2° 8 ~Littoral océanique 17."553* Bassins de Berre, de Tliau et d'Arcacliot) 3o.10lEnsemble 135.124 hect.FiG.8i.—Anguille a large bec. FIG.85 - Anguille fine ou à bec moyen.LaFlorule des eaux saumâtres est peu complexe:lorsque ces eaux sont presque douces, on y rencontrela plupart des plantes de marais ou d'étangs de larégion méridionale de la France; lorsqu'elles sont Ï K .tablementsalées, on y trouve principalement le R u p p i amaritimn, ma spirahs, plante submergée, nageante,qui offre un refuge à de nombreux petits mollusqueset un abri aux poissons contre les rayons solaires, enm ê m e temps quelle contribue directement par'ses


LAGUNES or ÉTANGS LITTORAUX 313feuilles et indirectement par ses parasites, à l'alimentationde certaines espèces et notamment de celle desMuges. Dans les étangs méditerranéens, apparaît, enété, une autre algue, beaucoup plus petite, le Protororrusou H œ m a l o c o c c u s salinus, qui croit sur le fondet donne aux eaux, à la surface desquelles elle apparaît,une teinte d'un rouge violàtre.La Faunule ichtyologique de ces m ê m e s eaux n ë s tpas bien nombreuse non plus, à causede leur peu de profondeur et de leursvariations de salure et detempératureOn sait, d'ailleurs, qu'aucune espècede poisson, soit d ë a u douce, soit demer, ne se reproduit dans ces étangs* toujours exceptés, bien entendu, ceuxde Berre, de Thau et d'Arcachon,beaucoup plus profonds et plus vastes).Les espèces qui les visitent au printempset en automne n'y viennent quepour y chercher une nourriture plusspéciale ou plus abondante, et s'enfuient,dèsl'approche des grands froidsFIG.86.—Anguilleà long bec.ou des fortes chaleurs, vers les eauxplus profondes,plus chaudes ou plus modérées de la mer.Seule l'anguille y établit sademeurepermanente,depuispresque sa naissance jusqu'à son âge adulte et sa reproduction; née à la mer, elle y retourne pour s y multiplieret, sans doute, y mourir. On y en distingue desespèces ou variétés dites : Anguille line ou blanche ouà bec moyen ou \evma.ux(Angidlla7nedioros(ris)A3.\}\uscommune de toutes (fig.85); l'anguille Pougaou ou àlongA. GOBIN, Pisciculture. 9*


314 LES EAUX SAUMATRESbec (Anguilla acutiroslris) (fig.*86), qui vient ensuitecomme nombre, mais est moins estimée commepuis, dans l'étang de Thau et quelque peu dans lessaveur;autres,l'Anguille à large bec ou à bec plat ou Pimpernaux(Anguilla latirostris) (fig. 84) et enfin l'Anguille napolitaine,rouge ou acérine (Anguilla rubra), accidentelle.Parmi les poissons de la mer qui pénètrent dans lesétangs avec lesquels elle communique, il nous fautciter :Les'Muges (Mugil, famille des Mugilidés), capiton,FIG. 87. — Muge Capiton.céphale, doré, sauteur, labéon (Capito (fig. 87), cephalusauratus, salyens, chelo ; les Athérines, Atherina, familledes Athérinidés), Sauclet, Prêtre, Joël (hepsetus,presbyter,Boïeri) ; le Bar, Loup ou Loubine (Labrax lupus, familledes Percidés), que M . L . Vidal a pu domestiqueren viviers, à Port de Bouc; la Daurade (Chrysophrysaurata, famille des Sparoïdés) ; les Gobies ou Boulereaux(Gobius, famille des Gobioïdés), noir, réticulé,à quatre taches, bleue ou jozzo, coulon, blanche oubuhotte, céphalotte, rouge (niger, reticulatus, quadrimaculatus,Jozzo, colonianus, minutus, capito, cruen-


LAGUNES OL ÉTANGS LITTORAUX 315tatus) ; l'Esprot ou Melette ou Harengule (Harangulaspralus)at la Mélefto commune (Meletla mediterranea,famille des Clupéidés) ; les Labres, Merle, Pesquit,Girelle [ L a b r m . mn-ula, pesquit, vulgarist; les Crenilabresmélope. petite Tanche, à ventre blanc, Paon(Crenilabrus mclops, tinca, albiventris, paro, familledesLabroïdés) ; les Mulets [Mutins, famille des Mullidés);Surmulet, Rouget (Surmuletus, barbatus) ; les Rougets(Trigla, famille des Cottidés) commun ou grondin,morrude (Pini, rucullus) ; la Plie franche ou Carrelet(Platessa vulgaris) ; la Sole (Solea vulgaris, famille desPleuronectidés), et quelques autres encore.Parmi les Crustacés, é n u m é r o n s le Crabe enragé (Car*cinus manias,décapodes brachyoures) et la Chevrette ouCrevette grise (Crangon vulgaris,décapodes macroures).A u nombre des Mollusques, comptons l'Huitre (Ostreaedulis) sur certains points, la Moule comestible(Mytilusedulis), la Clovisse ( Tapes decussata),la BucardeSourdon (Cardium edule), etc.Dans les étangs de Berre et de Thau, pénètrent enoutre, au nombre des poissons : la Rascasse (Scorpœnaporcus, famille des Cottidés) ; le Bogue commun ( B o xvulgaris, Sparoïdés) ; l'Oblade commune (Oblafa melanura,Sparoïdés) ; l'Orphie ou aiguille de mer (Beloneacus, Scombrésocidés) ; l'Exocet (Exocetus volùans,Exocetidés) ; la Sardine (Clupea sardina, Clupéidés) ;les Mustèles ou Emissoles (Mustelus, Carcharidés) vulgaire,tachetée, rousse (Vulgaris, maculata, fusca) ; leTurbot (Rhumbus m a x i m u s ) -, les Soles Lascaris ettachetée (Solea Lascaris, maculata, Pleuronectidés);les Lepadogaster de Gouan et à deux taches [Lepado-


LKS EAUX SAUMATRES'f/asfvr Gouaniï, punclalus, Gobiésocidés) ; le Naucrateconducteur (Xaucrates ductor Scomberoïdès) ; lesSyngathes Typhle. vert, Phlégon (Syngmthits Typhle,riridis, pldegmi) ; les Hippocampes à court bec ettacheté (IItjpr>rn)npi*s brevirostris, gnttatus, Syngnathidés); le Branchiostome lubrique (Branchiostomalanceolalus), etc., etc.Dans le bassin d'Arcachon qui communique largementet en tous temps avec la mer et subit les mouvementsde ses marées, pénètrent presque tous les poissonslittoraux et sédentaires du golfe de Gascogne etsurtout les- Muges (MngU\, le Bar ou Loup (Labrax),la Daurade (Chrysophrys), le Carrelet (Platessa), leTurbot Mhumbus), l'alevin d'Anguille ou Civelle, etc.La pêche des embouchures maritimes est, commecelle de la mer, le monopole des inscrits de la marine;elle est surtout exercée par les vieillards aidés des enfantset des femmes. Elle donne lieu surtout à la capturedu Saumon, de l'Alose, de l'Éperlan, de la Lamproie,du Mulet ou Muge, du poisson blanc, etc. On peutestimer son produit à 500,000 francs environ, parannée moyenne, soit 33 francs par hectare, à peuprès. Ce produit, dans lequel la seule embouchurede la Seine entre pour 220,000 francs, celle de la G i ­ronde pour 120,000 francs, etc se confond dans lastatistique officielle des pêches maritimes, avec celuiobtenu en pleine mer et sur le littoral.Le produit de la pêche des Lagunes ou étangs saumâtresconsiste, pour la plus forte partie, en AnguillesMuges et Bars. Leur produit moyen (en dehors desBassins de Berre, Thau et Arcachon) peut être évalué


L U I U X K S o r K T A N G S L I T T O R A U X 317ù 1,200,000 francs, soit 14 fr. 20 par hectare, annéemoyenne. Quanta celui des trois grands lacs saumâtresque nous venons d'excepter, on peut l'estimer faisantabstraction de l'industrie des Huîtres et du poissonenvivier à Arcachon) à 700,000 francs soit 20 francs parhectare. Le produit brut de la lagune italienne deCommaccbio varie entre 12 et 25 francs par hectaresoit, pour 33,000 hectares, 306,000 à 825.000 francsLe revenu total de nos eaux saumâtres s'élèveraitdonc à 2,120.000 francs environ pour 135,000 hectaresou 17fr.80 pour chaque hectare, tandis qu'il est, enmoyenne, pour l ë a u douce de 38 fr. 17.Jusqu'à présent et sauf à Arcachon, où l'industriede l'élevage du poisson en viviers et des Huîtres enparcs s'est installée et développée depuis moins decinquante ans, on s'est à peu près contenté d'exploiterla production naturelle et spontanée des eaux saumâtres.Il y a pourtant, ce semble, de grands progrèsà réaliser partout :1° Débarrasser nos cours d ë a u des égoûts des villeset des usines qui les souillent et les interdisent auxespèces migratrices anadrômes ; les repeupler, par lestêtes de bassins, en Salmonidés migrateurs, pourlesquels on installera des échelles de remonte, et donton réglementera et surveillera la pêche, surtout versles embouchures et vers les sources ;2° A.néliorer, partout où cela sera possible, le régimede nos étangs littoraux en les mettant en communicationdirecte et permanente avec la mer. Lesétangs de Valcarès et de la Petite Camargue(Aramon,Malgai, Fourneau, Rolland, etc., ensemble 8,800 hec-


318 LES EAUX SAUMATREStares), par exemple, dans lesquels on pourrait jeterun bras du Rhône, du Petit Rhône, du R h ô n e mortou du canal de Sylveréal, pourraient être aménagés àl'instar de la Lagune de Commacchio. A u lieu decela, on s'est attaché à isoler le Valcarès de la merà l'aide de digues r é c e m m e n t construites ; il en estrésulté que, par suite de lëvaporation, son niveau abaissé de 0 m ,50 au-dessous de celui de la mer et que3a surface en eau a diminué de moitié ; inutile d'ajouterque l'on a ainsi accru l'insalubritéde la contrée;3° Enfin, on pourrait à Arcachon, développer davantageencore la culture de l'Huitre et de diversautres coquillages, comme aussi l'industrie des viviersà poissons; de m ê m e , dans la Méditerranée, devrait-onpoursuivre les études déjà faites par M . Léon Vidal, àPort-de-Bouc, sur l'élevage des Poissons, Crustacés etMollusques en bassins et viviers afin de créer une industriealimentaire, non pas semblable mais analogueà celle d'Arcachon ; études déjà reprises, quant auxPoissons, par M M . de Gasquet, à la presqu'île deGienset, pour les Huîtres, à Bregaillon, dans le port m ê m eée Toulon, par M . Malespine.Quant aux Mollusques, on sait qu'un certainnombred'entre eux, et non des moins précieux, affectionnentle voisinage de l ë a u douce, l'Huître, notamment. I lest, en effet, aisé d'observer que les bancs d'Huîtresnaturels, les anses, baies, parcs, où persiste et réussitl'élevage de ce mollusque, sont arrosés par un ouplusieurs cours d ë a u d'importance variable. Ainsi,les anciens bancs de la Rade de Brest (rivièred'Aulne),de la baie du mont Saint-Michel (la Sélune, le Coues-


LAOUNKS OU ÉTANGS LITTORAUX 319non), de la baie de Saint-Brieuc (le Gouet), le bassind'Arcachon (la Leyre), Marennes la Poudre;-, le golfedu Morbihan, rivières de Vannes, d'Auray, de Saint-Philibert, du Crach), Courseulles (la Seulle . Régne ville(la Sienne),etc.D'un autre coté, la Moule peut vivre en eau saumàtremais ce milieu ne lui parait pas des plus favorables;son développement y est plus lent, son engraissementplus difficile ; en un mot, elle préfère leseaux dont la salure marque environ 4° B. Quelquesautres mollusques i Clovisses, Peignes, Pétoncles. Bucardes,etc.) se montreraient peut-être plus accommodants.L'on sait déjà que la Clovisse (Tapes decussata\se plaît dans l'étang de Thau, non loin d une sourcesous-marine d ë a u douce (l'Abysse, que l'on regardecomme une bouche de l'Hérault) et quelle n'en a disparuqu'à la suite de pêchesexagérées.


C H A P I T R E XL'ACCLIMATATION DES POISSONS DE MER EN EAU DOUCEET DES POISSONS D'EAU DOUCE EN EAU SALÉEBrehm et sou commentateur M. Sauvage, expliquent,comme Darwin, par des accommodationssuccessives, la transition de certaines espèces de poissonsdans des milieux et des habitats tout différents:« Parfois, la mer fait encore sentir son influence assezloin de l'embouchure des grands fleuves, dans lesquelson trouve alors-des poissons marins, tels que des Requinsdans le Gange, des Raies armées dans l'Amazone;il est certain que cëst ainsi que des typesessentiellementmarins se sont acclimatés dans les eauxdouces... Par un p h é n o m è n e semblable, des espècesdes eaux douces se sont acclimatées dans les eauxsalées... D'autres fois encore, par suite de phénomènesgéologiques ayant fait cesser la communicationentre des lacs et la mer, certains poissons se sont accommodésà ces nouvelles conditions de milieu et sontrestées dans les eaux douces ' » Valenciennes et Guntherexpriment la m ê m eopinion.On connaît environ 2,280 espèces de poissons d ë a u1Brehm el Sauvage, Mervnlles de Iz Naître : LcsPcissonc. p. 4L


L ACCLIMATATION DIvS POISSONS 3-21douce et 2,750 espèces d ë a u salée et, sur ce nombretotal, on sait qu'il y en a plusieurs qui, dites A a a -rframes, quittent la mer au moment de la fraye, pourremonter les fleuves et s'y reproduire en eaux douces'Saumon, Truite de mer. Alose, fig. 88. etc.) et d'autresbeaucoup plus rares, qui, dites a la drames, quittentinversement les eaux douces pour aller se reproduiredans la mer (Anguille,. Certains poissons de merpeuvent donc se reproduire en eau douce; parmi lespoissons d ë a u douce, on ne connaît guère que l'anguillequi se reproduise en eau salée, encore pense-t-onavoir quelques bonnes raisons de la croire vivipare ouFIG. 88. — Alose commune.ovovivipare. M . Millet, dès 1853. a constaté que laprésence du sel marin, m ê m e en très minime proportion,portait dans l'œuf du Saumon ou de la Truite uneperturbation telle que les œufs fécondés perdaient leurfaculté reproductrice. L'observation a, d'un autre côtéappris à tous nos pècbeurs, qu'aucune espèce marinene se reproduit dans les lagunes ou étangs littoraux,ni aucune espèce d ë a u douce, dans les eaux saumâtres


322 L ACCLIMATATION DES POISSONSdes embouchures. Ce dernier point pourtant sembleraitmériter confirmation scientifique. On peut doncacclimater diverses espèces, plus nombreuses qu'on nele croit sans doute, dans des eaux différentes par leurdegré de salure de celles dans lesquelles elles ont jusqu'icivécu, maison ne saurait les y naturaliser qu'à lasuite d'uneaccommodationet d'unesélection séculairessansdoute.Ceux de nos poissons indigènes qui appartiennent àla section des anadrômes peuvent être divisés en deuxcatégories: les uns habitent d'ordinaire l ë a u salée, etremontent plus ou moins haut dans les fleuves pours'y reproduire, y séjournent plus ou moins longtempscomme alevins, font pourtant des fugues à la mer oùils retournent définitivement sitôt qu'ils sont devenusadultes, tels le Saumon commun, la Truite de mer,etc. Les autres, habitent constamment l ë a u douce etn ë m i g r e n t o u plutôt ne voyagent que de l ë m b o u c h u r evers la source, toujours pour se reproduire, mais sansjamais pénétrer dans la mer; tels la Truite de rivière,des lacs, l'Omble Chevalier, la Lotte commune, etc.Quant aux Catadrômes, nous l'avons dit. on n'y peutranger que l'Anguille, parmi nos espèces indigènes,l'Anguille avec ses trois variétés, Fine, Blanche ouVerniaux (Anguilla mediorostris); Pougaou, ou à longbec (Anguilla acuti seu longirostris) ; Pimperneau, àlarge bec ou à bec plat (Anguilla lati seu platirostris).Mais, outre les migrateurs dits Ana ou Catadrômes,de nombreuses espèces passent spontanément, irrégulièrement,avec plus ou moins de fréquence et durantdesintervalles plus ou moins prolongés, de l ë a u douce


POISSONS DE MER 323*Sans l ë a usalée ou inversement, soit pour fuir chaleurou froid, soit pour trouver une nourriture spéciale ouplus abondante. Ici encore, nous établirons deux divisions,d'après l'habitat ordinaire de l'espèce: poissonsde mer, poissons d ë a u douce, et nous procéderonspar familles dans r é n u m é r a t i o n succincte qui vasuivre.§ 1. — POISSONS DE MER« Les poissons de mer, dit Darwin, peuvent, avecquelques soins, être peu à peu habitués à vivre danslëau douce. » Les faits naturels, l'expérience desAnciens, celle des Modernes, le démontrent chaquejour.Les faits naturels : Les phénomènes géologiques quiont graduellement transformé des espaces d ë a u saléeen étangs d ë a u douce ou, au contraire, des lacs d ë a udouce en mers, ont été si lents et si insensibles, le plussouvent, que beaucoup d'espèces ont pu s'accommoderau nouveau milieu en se modifiant parallèlement à lui.Dureau de la Malle, G r i m m , et antérieurement Pallas,estiment comme tous les géographes modernes, queles mers Noire, Caspienne et d'Aral ont été autrefois(à l'époque Tertiaire) réunies en un seul et immensebassin d ë a u douce, entièrement clos ; que, à la suitede l'éruption volcanique des Iles Cyanées ou Symplégades,le Canal du Bosphore se forma, abaissant ainsile niveau de ces eaux qui se divisèrent en trois bassins;simultanément et par l'effet des m ê m e s causes


1im 1/ACCLIMATATION DKS POISSONSsans doute, un affaissement du sol Russe déterminaune invasion dos eaux de la mer Polaire dans le bassinde la mer Caspienne qui n'était déjà plus que trèsfaiblement reliée à la mer Noire. Si bien que, dans cetteCaspienne, dont les eaux présentent des degrés desalure très variables, depuis lëau.presque douce (versles embouchures du Volga, de l'Oural, du Kouma, del'Agrakham, du Samour, du K o u r et duTerech),jusqu'àla saturation (Golfe de Karabogaz) et tous les degrésintermédiaires, on rencontre à la fois des animaux(mammifères, poissons, mollusques, etc.), propres à lamer, comme une espèce de phoque (Phoca Caspica),l'Esturgeon sterlet, une espèce de Gobie, plusieursCardium, etc., en m ê m e temps que d'autres spécialesauxeaux douces, comme les Brèmes commune et Zerte,le Brochet, la Carpe, etc. Dans le lac Baï Kal (Sibérieméridionale) qui a une origine analogue, on trouveaussi et encore de nosjours, une autre espèce dePhoque(PhocaSibirica).Durant la seconde partie de l'époque glaciaire, laBaltique communiquait librement et largement avecl'Océan Glacial Arctique; le soulèvement graduel duNord de la Suède ou de la Finlande en a l'ait une merintérieure ne communiquant avec la mer du Nordquepar d'étroits canaux. Comme elle reçoit de nombreuxfleuves ou rivières' Tornea, Kalix, Lulea, Pitea, U m é a ,Sildout. Angermana, Indals, Dal, etc., sur la côteScandinave ; Kemi, Neva, Dwina, Niémen, Vistule,Oder, sur les côtes russes et allemandes), comme aussil'évaporation est très faible sous ce climat froid, seseaux sont presque douces (Salure de 0,30 à 1,91


P O I S S O N S ni épines, à quatrecornes. (Caftas Scorpio, hnhaïis, \ corn»s') : les TriplesRouget ou Grondin, Hirondelle, Goiimeau (Triglacuculus, hirnndo, guraardas) ; l'Espadon 'Xi/ihi/is Gladius; le Trachy p t è r e B o g m a r e ( T r w h y p h ' n a B a g m a r w ) ;e Zoarcès vivipare (Zaarces viriparas] ; le Gobie ouBoulereau noir ( Gobius uiger) ; le Cycloptère Lumps'Cyciopterus lumpus) ; la Baudroie (Lapbius pisratorius ;la Leiche Requin (Set/muas lichia), etc., qui viennentàcoup sur, de la mer Polaire; et, dans les parties lesmoins salées, le Gardon (Leuciscus radias, ; le Rotengle(Scardinius erytbrophlalmus) m Ae Brochet [Ksox lucius) ;la Perche (Perça fluvialilis) ; la B r è m e Zerte (AbramisWimba), le Pélèque (Pelecus eu lira fus) : etc., etc., espècesdes eçuix. douces, venues par les fleuves et r i ­vières. Gunther, qui confirme ce fait, ajoute pourtantque les espèces marines naturalisées dans la Baltiquey prennent moins de taille que leurs- congénères del'Océan glacial. Parmi les crustacés marins devenus,à la suite du m ê m e cataclysme et dans la m ê m e contrée,des animaux (Veau douce, Th. fjuxley cite encorele Mysis oculata de l'Océan glacial qui est devenu, dansles lacs de Suède et de N o r w è g e , le Mysis relicta, undes principaux aliments des Salmones qui les habitent.Le m ê m e auteur mentionne encore plusieurs espècesde P a l œ m o n , genre essentiellement marin qui se sontacclimatés dans les eaux douces du lac Erié, dansl'Ohio, les rivières de la Floride, du golfe du Mexique,des Antilles et du versant oriental de l'Amérique duA. GOBIN, PiscicuUuro. 10


326 L ACCLIMATATION DES POISSONSSud, du Brésil, du Chili, de Costa-Rica; de l'AfriqueOrientale (Nil supérieur), à Natal, Johanna, Maurice,Bourbon; dans le Gange, aux Moluques, aux Philippineset probablement ailleurs 1 Ces P a l œ m o n s acclimatésen eau douce et souvent appelés Cammarons,présentent notamment le Palœmon lacustris (Anchistiamigraloria) que l'on rencontre dans les fossés d ë a udouce et les canaux, entre Padoue et Venise, dans lelac de Garde, et dans les ruisseauxde la Dalmatie ; lePalœmon Niloticus, spécial au Nil ; etc.Il en est de m ê m e du Saumon des lacs, ou Saumond ë a u douce, forme naine ou simple variété du Saumoncommun {Salmo Salar). En Suède et en N o r w è g e ona, depuis un quart de siècle environ, introduit dansles lacs Mjossen, de Kingerige, de Siljan,de Vener,etc.privés de ce mmunication avec la mer, des alevins deSaumon commun qui, bien que restant forcément eneau douce, arrivent, à l'âge adulte, au poids de 4kilogs,et remontent, pour se reproduire, dans les coursdëau, affluents de ces lacs; on les nomme Saumonsargentés (Silfverlèx, Salmo lacustris, argentalus, Venella).On a recommencé, dans le ipême pays, la m ê m eexpérience de repeuplement par le Saumon en eauxdouces fermées, en 1857, dans un étang de Wefferstadt,à Lier, près de Drommen, puis en 1858 dans les deuxlacs de Siijevandère, près de Lourdal, dans leLourvig.Lëxpérience inverse, acclimatation du Saumon commu n exclusivement en eau salée, faite en Angleterrepar M . Hetting, dans deux lagunesen communicationl Huiley, L'Ecrevisse, p. 239.


POISSONS DE MERavec la mer et privées de cours d ë a u , fut interrompuepar unemalveillance, parait-il, et ne semble avoir étéreprise q u ë n N o r w è g e , à Ladejord, près Bergen, ipaissanssuccès.Depuis 45 à 50 ans, on trouve dans les lacs Américains(Maine et Canada) de Sebago, Sebec, Schoodicet le petit lac de Reed, des Saumons qui n émigrent,pour frayer, que des lacs m ê m e s aux cours d'eaux quis'y jettent, ayant perdu l'habitude de se rendre à lamer, par suite d'un séjour prolongé et continu eneau douce où ils furent emprisonnés par des travauxindustriels, digues et barrages. Agassiz les appelaitdes S a u m o n s démoralisés et en avait fait une espècespéciale ; on l'appelle en A m é r i q u e Saumon Sebago,Truite de Schoodic, Saumon deGlover, etc.Les essais des Anciens : Pline le naturaliste et Columellenous ont renseigné à ce sujet. Le premier, aprèsnous avoir signalé Sergius Orata comme l'inventeurdu parcage des huîtres, danç le petit port de Baies,près de Naples, "nous apprend que : « Hirrius imaginale premier unréservoir pour les Murènes ( M u r œ n a Ilelena)seulement. Lorsque César donna des festins aupeuple, à l'occasion de ses triomphes, Hirrius luifournit 6,000 Murènes qu'il lui prêta au poids ; il nevoulut en recevoir le prix ni en argent ni en aucuneautre valeur. Très peu de temps après, ses réservoirsfirent vendre sa maison quatre millions de sesterces...Dans le m ê m e siècle, Lucinius M u r é n a inventa lesréservoirs pour les autres poissons. Les Philippe, lesHortensius et toute la noblesse suivirent sonexemple,Luculius ouvrit m ê m e un canal aux eaux de la mer, fai-


328 L ACCLIMATATION DKS POISSONSsaut creuser une montagne, auprès de Naples, à plus defrais qu'il n avait bâti sa maison de campagne. Pompéel'appelait, à ce sujet, le Kercès Romain. Les poissonsde son réservoir furent vendus après sa mort, quatremillions de sesterces (850,000 fr.)- »< Nos ancêtres, dit Columelle, ont pratiqué ce goûtparticulier d'élevage jusqu'au point de transporter lespoissons de mer dans l'eau douce, et de prendre, pournourrirdes Mulets (Mule, Rouget-Surmulet) (fig. 89 jetdes Chiens de mer (grande Roussette, Scyllium catulus)les m ê m e s soins que nous prenons aujourd'hui pourélever des Murènes et des Bars. En effet, ces anciensdescendants de RomulusetdeNumanesecontentaientpas de peupler de poissons les viviers qu'ils avaientfait construire dans ce but, ils portaient laprévoyancejusqu'à remplir les lacs, formés par la nature,desemencesde poissons de mer qu'ils y jetaient. C ë s t ainsi que leslacs Velinus(Pie diLiiyo, Ombrât), Sabatinus (de Bracciatio,Etrurie , Volcinen^is (de Bols en a,Etrurie) de Ciminius'de Vico, Etrurie i, etc., sont parvenus à nousdonner en abondance, non seulement des Bars et desDaurades, mais encore toutes les autres sortes depoissons qui ont pu s'habituer à vivre dans l ë a udouce. »Et, après avoir indiqué la manière d'établir les réservoirs,notre Géoponique continue]:% On peut élever, dans les endroits limoneux, despoissons plats tels que la Sole, le Turbot, la Plie; ilssont encore très convenables pour les coquillages, les1Pane., f/ï*'. nal., lib. IX, cap. tO-61.


330 L ' A C C L I M A T A T I O N DES POISSONSMurex, les Huîtres et les Pourpres, ainsi que pour lesPétoncles, les Balanes et les Spondyles. Quand auxbassins sableux, on peut très bien, à la vérité, y éleverdes poissons plats, mais on y nourrira encore mieuxdes poissons de haute mer, tels que Daurades, Dentés(le Sargue vieille), Ombres (Ombrine commune), tantceux de Cartilage que ceux de notre pays, au lieu queces bassins sont moins propres aux coquillages. D'unautre côté, une mer rocheuse nourrit très bien lesespèces quëlle sert à dénommer, cëst-à-dire que l'onappelle Saxatiles, parce qu'elles se tiennent parmi lespierres telles que les vieilles (Labre-vieille, Cténolabre),les Tourds (Labre-tourd) et les Mélanures(01/la ta melanura). »Lëxpérience des modernes : elle résulte, tant d'observationssur les poissons dans l'état de liberté, quedans les essais directs d'acclimation en eaux douces.Ce sont ces faits que nous allons successivementrelateren procédant d'après la classification ichtyologique.Dans la famille des Perpidès, nous rencontrons leBar ou Loup (Labrax lupus), de l'Océan et de la Méditerranée.Nous savons déjà qu'il a été domestiqué enviviers par les Romains ; on le trouve encore pénétrants p o n t a n é m e n t dans les viviers d'Arcachon;M . Léon Vidal l'avait aussi domestiqué en étroitsviviers à Port-de-Bouc. On sait que ce poisson hantevolontiers, surtoutdans sa jeunesse, l'embouchure desfleuves, qu'il remonte assez haut. M . P. Joigneaux ditque : « Les eaux douces ne lui déplaisent pas, pourvuqu'elles soient fraîches, assez profondes et bordées deplantes aquatiques où il puisse frayer au printemps. »


POISSONS DK MER 331C ë s t une erreur, le Bar ne fraye q u ë n eau salée.Une espèce américaine, le Bar rayé ( L a b r a x lineattn)vit dans les eaux presque douces. Le genre marindes Apogons a fourni une espèce spéciale à l ë a udouce.Les Cottidés, presque tous marins (sauf le Chabotcommun) renferment le Cotte ou Chaboisseau à quatrecornes (Colins qnadricornis),àç 1 Océan Atlantique, quivit dans les grands lacs d ë a u douce de la Scandinavie(Brehm).C ë s t la famille des Sparoïdés qui nous offre la Daurade(Chrysophrys aurata), cetexcellent etmagnifiquepoisson que les Romains avaient déjà tenté de domestiquerdans les lacs de la campagne romaine, que Tonpèche dans nos étangs littoraux et dans les embouchuresmaritimes où sa chair gagne en délicatesse.Parmi les Mugdidés, le genre Muge ou Mulet nousfournit au moins six espèces (Capito, rephalus (fig. 90),auralus, saliens, labeo, chelo), toutes de l'Océan et de laMéditerranée,sauf le Muge doré,spécialàcettedernière.Duhamel du Monceau (1769), rapporte que: M . Poivre(1719-1780) ayant mis des Mulets (Muge-Mugil) pris àla mer, dans une rivière d ë a u douce et courante quitraversait son jardin, non seulement les poissons yont vécu, mais ils s'y sont multipliés (?, et y sontdevenus plus gros et meilleurs qu'ils n'étaient ausortir de la mer. » Selon Brehm, « des observationsfaites par Arnould sont semblables. Cet observateurplaça une quantité de petits Muges, d'un doigt delongueur, dans un étang d ë a u douce de trois acres desurface; peu d'années après, il péchait des ani-


332 L ACCLIMATATION DES POISSONSmaux pesant plus de 2 kilos, plus gros, plus gras,que des animaux du m ê m e «âge vivant à la mer.»En janvier 1803, M . René Caillaud informait la SociétéZoologique d'Acclimatation que, « mettant enpratique des données que contenait, à cet égard, unmémoire qu'il avait publié en 1860, sur son explorationdes rivages Vendéens, M . Bouché de Challans,et M . Labbé, de Luron, étaient parvenus à élever et àentretenir, dans des fossés ou des bassins d ë a u tout àfait douce, le Mugep//^7j vulgairement n o m m é Meuil,en Vendée, le Bar ou Lonbine et divers Plèuronectes,Limande, Plie et Carrelet. C ë s t au moyen du frai récoltésur les bords de la mer ou le long des coursd ë a u qui y communiquent, que Ton peuple leréservoir.Si ces poissons sont transportés avec soins et introduitsdans le nouvel élément en bonnes conditions,ils y semblent acquérir un développement et un engraissementplus prompts et plus considérables, qu'àla mer. La qualité delà chair gagne aussi, dit-on, à cechangement ; pour le Muge particulièrement, elle estplus tendre, plus savoureuse, plus délicate. » Quand àcette dernière opinion pourtant, elle est controverséepar celle de M . Racaud, maire u'Esnandes (Bassind'Arcachon), dans une lettre à M . P. Joigneaux, où ildit: « Le Mule d ë a u douce ne vaut pas celui de lamer. » En octobre delà m ê m e année 1863, M . Labbésignalaità M . Caillaud quatre nouveaux imitateurs,M M . Roy, Mercier, Gauducheau et Chauveau, toujoursdans la Vendée. Depuis lors, le silence s'est faitsur ce point, ce qui ne prouve pas pourtant, que l'industrieait étéabandonnée.


334 L ACCLIMATATION DES POISSONSLes naturalistes nous apprennent, d après les pêcheurs,que les Muges remontent, au printemps et àl'automne, dans la Loire et ses affluents (Maine,Mayenne, Sarthe, Loir, etc.) soit au moins à 125 kilomètres; dans la Charente, au-delà de Cognac, (85 kilomètres);dans l'Adour, jusqu au dessus de Dax(60 kilomètres) ; dansle Rhône, jusqu au-dessus d'Avignon(80 kilomètres), et de m ê m e dans la Gironde, laSeine, la Somme, le Var, etc. Cëst au printemps surtoutet en troupes énormes, que les Muges envahissentnos cours d ë a u , leurs légions se subdivisant en groupesde plus en plus petits, jusqu'à des détachements devingt à cinquante individus. Très remuants et trèsagiles, ils cherchent leur nourriture sur le fond, retournentles pierres, sucent les conferves et les algues,ingurgitent les particules animales, etc. Mais leurreproduction se fait en été (de mai à août) et exclusivementen eau salée. Les alevins, dès qu'ils ont atteint0 n , ,02 à 0 m ,0i de longueur, entrent, chaque jour, dansles rivières, avec la m a r é e et redescendent avec elle.Dans la famille des Athérinidês, le genre Athérinepresque tout entier, et en particulier le Roseré, leSauclet ou Mellet, de l'Océan et de la Méditerranée,et le Joël, spécial à cette dernière, remontent dans lesétangs littoraux du Languedoc, dans les canaux deVenise et dans la Lagune de Commacchio. On lestrouve nombreuses et associées aux Gobies dans leslacs de Garde, Majeur et de C ô m e où elles remontentpar le Pô, leMincio,l'Addaetle Tessin. Presque toutesles espèces de ce genre fréquentent les embouchuresmaritimes et y suivent les mouvements de la marée.


POISSONS DE MER 335U n Blenniidè, le Zoarcès vivipare, Anguille-Lotte,Anguille-mère, etc., de l'Océan glacial, de la mer duNord, de la Baltique, de la Manche, de l'Océan et de laMéditerranée, remonte assez f r é q u e m m e n t e neaudouce*et, par l'Elbe et la Sprée, jusqu'au près de Berlin.Les Gobioïdès nous offrent le genre-type des Gobiesou Boulereaux, dont dix-sept espèces hantent nosmers,et dont une saule la Gobie fluviale;, est franchementdes eaux douces, se retrouvent pourtant spontanément,avec les Athérines ou Mellets, dans les grandslacs de l'It die Septentrionale.Les Clupéidés vont nous fournir de nombreux émigrants,volontaires ou forcés. A u x Euts-Unis BenjaminFranklin ayant observé que, de deux rivièresqui gagnent parallèlement la mer, l'une était fréquentéepar des légions de Harengs qui venaient ydéposer leur frai, tandisquel'autreétaitcomplètementdélaissée par eux, transporta dans cette dernière desherbes aquatiques prises dans l'autre et recouvertesd'œufs fécondés; il vit les œufs éclore, les alevinscroître, parvenir à l'âge adulte et y revenir pondreensuite chaque année. Cette espèce de Hareng n ë s tpar celle qui fréquente notre littoral; elle entre régulièrement,dans les fleuves, au printemps, pour y frayercomme chez nous, les Aloses. Notre espèce indigènepourtant, le Hareng commun, remonte parfois jusqu'à120 kilomètres dans l'Oder; à des distances variablesdans le Tay, la Clyde, la Tamise et la plupart descours d ë a u de l'Ecosse et de l'Angleterre ; dans la r i ­vière de Volenhoven, en Hollande ; dans la Seine jusqu'àQuillebxMf, etc. Parlant des habitants que l'on


336 L ACCLIMATATION DES POISSONSpeut rassembler dans un aquarium d'eau douce, V a -lenciennesdit: Vous tirerez de la Haute Normandieles très petites Blanquettes (Harengule blanquette,menise ou menuise — harengula latula), qui peuventcomme les Harengs, s'habituer à vivre dans l ë a udouce. 11 y a longtemps qu'un célèbre physicien anglais,Mac Culloch, a réussi dans ces essais' •> L'Anchoisvulgaire habite, non seulement la Méditerranée, maisaussi l'Océan, la Baltique et la mer du Nord : il remontem ê m e l'Escaut jusqu'à l'embouchure du Iîuppel, et laSeine jusqu'à Quillebœuf ; on dit que, dans plusieursfleuves, il s'aventurejusqu'à plus de 100 kilomètres.La Morue vulgaire ou Cabillaud (familledes Gadidés),habitante des mers polaires, mais qui descend, au sud,jusqu'au 12° latit. N., cëst-à-dire dans des mers à saluretrès intense peut, d'après Yarrell, se domestiqueraisément dans de grands bassins d ë a u de mer, où onla nourrit de mollusques. Le docteur Jonathan Franklinen a vu non seulement prospérer dans un étangdu Comté de Galloway (Ecosse) en communicationavec la mer par un tunnel artificiel, mais encore ilaffirme qu'on était parvenu à les apprivoiser à l'instardes carpes de nos jardins publics. Son habitat pendantsix à sept mois de l'année, étant une eau dont la salurene dépasse pas 1.010, fait présumer qu'il ne seraitpas très difficile de l'acclimater en eau douce.Quant aux Pleuronectidés, la plupart d'entre eux,durant leur jeune âge surtout, fréquentent les eaux1Valencienncs, Bulletin de la Société d'acclimatation, avril 18ÙÎ,p. 179.


POISSONS DK MERsaumâtres ou m ô m e douces. Le Flet Picaud,ou Passerëaude rivière, delà mer du Nord, de la Manche et del'Atlantique, remonte parfois fort loin dans les fleuveset les rivières; on le pèche f r é q u e m m e n t dans la Tamise,à plusieurs milles au-dessus de Londres : on leprend d'après Yarrell, dans TAvon, au-dessus de Bath;selon Sehs-Lonchamp, dans l'Ourthe jusqu'à Liège etdans la Nèthe jusqu'à Waterloo. On le capture souvent,dans la Loire aux environs d'Angers; Ilolland aconstaté q u ë n 1818, un Flet fut péché à Metz, dans laMoselle; un autre naturaliste affirme que l'on en pritun autre, dans le m ê m e fieuve, en amont de Trêvesoù, en octobre 18'ri, on en pécha deux autres. U npêcheur de Mayence affirma m ê m e , à de Siebold, enavoir capturé un dans le Rhin, à sa traversée danscette ville (E. Blanchard). La Plie franche, ou Carrelet,des mers du Nord, de la Baltique et de l'Atlantique,remonte volontiers les fleuves dont le fond estsablonneux ou limoneux, tels que la Garonne, la Dordognejusqu'à Bergerac, l'Islejusqu'àCoutras, la Loirejusqu'à Angers, etc. La sole vulgaire remonte égalementen rivières et l'on estime que sa chair y devientplus ferme et meilleure. D'après le D r Jonathan Franklin,- Mac Culloch aurait fait de curieuses expériencessur la naturalisation ? des poissons de mer dans l ë a udouce. Des soles furent conservées, dit-il, dans del ë a u de rivière pendant plusieurs années et devinrentdeux fois plus charnues que celles que l'on pêche dansla mer. » La Limande remonte parfois la Loire jusqu'àOrléans et m é m e N ë v e r s , et de là, l'Allier jusqu'à Pont-Chàteau, près de Clermont-Ferrand, cëst-à-dire à


338 L ACCLIMATATION DES POISSONS450kilomètresdedistancedelamer. Le Turbot vulgaireremonte dans la Somme, jusqu un peu au-dessus dupoint de marée, mais il reste alors, ou plutôt il eslplus petit et sa chair est estimée moins ferme et moinsdélicate.Dans la famille des Carcharidès, le genre Requinnous présente une espèce commensale du Gange ; danscelle des Gymnodontés et dans le genre Tétraodon,nous citerons cinq ou six espèces (Psittacus, Fakalka,fluviatile, Niloticus, etc.) du Nord-Est de l'Afrique, duBrésil et des Indes occidentales, vivant exclusivementen eaux douces ; dans .celle des Pristidês, une scie(Pristis) spéciale au fleuve Cambodgien du Maï-Kang.Pénétrant dans la famille des Raïdés, nous voyonsune raie a r m é e (Trygon) qui remonte le fleuve desAmazones presque jusqu'à la frontière du Pérou ; etla Pastenague commune qui remonte souvent trèshaut dans la rivière duVar.Puis, dans celle des Acipenseridés, notons le genreA n a d r ô m e des Esturgeons; l'Esturgeon commun, hôtede la mer du Nord, de la Baltique, de la Manche et del'Océan, remonte pour frayer (de mars en mai), lesfleuves de la Russie d'Europe, de l'Angleterre et de laFrance. On en a capturé dans la Moselle, à Sierck ;dans la Meurthe, à Nancy ; dans la Loire, aux Pontsde Cé ; dans la Seine,à Paris ; dansl'Yonne, au-dessusde Sens ; dans le Rhône, jusqu'à Avignon, etc.Vers 1780, Frédéric le Grand avait fait transporterdes Esturgeons dans le Gorland-see, grand lac d ë a udouce de la Poméranie. «Ils y vivaient encore, en 1866,mais ne s'étaient pas reproduits dans l ë a u douce,


POISSONS DE MER 339l ë a u salée étant indispensable à ces animaux (Duméril).» N'avait-on pas, pendant longtemps, dit lam ê m e c h o s e du Saumon, que Ton a pourtant v u frayerdans le petit étang de Saint-Cucufa, à Saint-Cloud ?. Dans les Pétromyzonidés, rangeons deux migrateurs:La Lamproie marine de l'Océan, et de la Méditerranéequi remonte dans les rivières de l'Écosse etde l'Irlande, dans la Seine, la Loire jusqu'à Orléans,l'Hérault,leRhône, etc., au printemps ; et la Lamproiede rivière, des m ê m e s mers et pratiquant les m ê m e sm œ u r s , remontant dans tous les cours d ë a u de l'Europe,de l'Amérique du Nord, du Japon, etc.Sans doute, des observations plus attentives et desexpériences prolongées permettraient d'allonger trèsnotablement la liste de ces poissons marins devenantvolontairement ou forcément les hôtes de l ë a u douce.Rien déplus aisé, probablement que d'y naturaliserceux d'entre eux qui y remontent pour frayer. Quantà ceux qui, se reproduisant à la mer, ne remontent lesfleuves q u ë n gastronomes, en gourmands ou en flâneurs,les essais déjà tentés démontrent que l'on peutles y retenir et les y conserver plus ou moins longtemps,à charge de leur fournir les aliments requis,mais qu'il faudrait, vraisemblablement un long tempsavant de les y naturaliser, cëst à dire de les y voir sereproduire. La chair des uns semblerait s'améliorerpar ce changement, auquel perdrait celle des autres.Sous le rapport économique, l'expérience directe permettraitseule de déterminer quelles seraient les plusproductives, dans les eaux douces fermées, des espècesmarines oufluviatiles.


340 L ACCLIMATATION DKS POISSONSs; 2. — POISSONS D'EAU DOUCEPresque aussi nombreux sont les poissons qui, spontanément,par nécessité de reproduction (Anguille) ouplus simplement par recherche alimentaire, ou enfinpar caprice, passent de lëau douce en eau saumâtreet plus ou moins salée. Dans lënumération qui vasuivre, nous procéderons comme ci-dessus, par familles.Cëst celle des Cyprinidés qui nous fournira les plusnombreux spécimens groupés en genres. La Carpecommune descend volontiers en eau saumâtre. « Dansla Seine, dit Alph. Karr, on pèche des Carpes à Villequier(5 kilom. en aval de Caudebec), mais rarementau dessous, à moins quëlles n'y soient entraînées parles grosses eaux ; mais Ton sait que la marée se faitsentir jusque bien au dessus de Rouen 1 . » Brehm etson commentateur, M.E. Sauvage, constatent que « l'ontrouve la Carpe dans la mer Caspienne et dans sesaffluents, en quantité considérables, car elle s'accommodeparfaitement des eaux saumâtres2» Enfin,M . Raveret Wattel ajoute que * la Carpe, tenue eneau salée ou saumâtre, y prend un développementtout à fait exceptionnel 3 - »La Brème commune habite, avec la Carpe, les régionsles moins salées de la mer Caspienne ; la B r è m e Zerte1Alph. Karr, La pêche, p. 98.3Bivlnn ei Snnn^, Lan ) o'>ssous. p. 305.lîuvcn l-\Vïil!c!, La f>iscicul/ure à l'clranr/pv, p. 2H.


POISSONS 1) K.\r DOUCE 341(Abvamis Winiha) habite à la fois la Baltique, la merNoire, la Caspienne et les fleuves qui s'y jettent(Brehm et Sauvage). l i e n est de m ê m e du Pélèque(Pelectts rultrah's), de la Baltique et de la mer Noire,comme aussi de tous leurs affluents, et qui semble seplaire aussi bien dans les eaux douces que saumâtresou sabës. Le Rotengle 'Leuciscus eri/lhroj,h(almus) etle Gardon (L. rut Uns) sont encore au nombre des habitantsde la Baltique dans ses régions les moins salées.La Vandoise ou Dard, (L. arméniens) ne semble pasnon plus redouter l ë a u saumâtre. car on la pêchechaque jour, dans le port de Bayonne, à marée montante.Quanta L'Ablette commune Alburnus lucidusjon la rencontre en certaines régions de la Caspienne.aussi nombreuse que dans nos ruisseaux.Dans la famille des Percnlès, nous citerons la Perchecommune, que Ton rencontre, au moment du frai (février-mars),d'api è- Pallas, en un point de la mer Caspiennedit le Golfe amer, où les eaux sont très salées ;elle est fréquente aussi dans les parties les plus doucesde laBaltique,U n Esocidê, le Brochet, compère de la Perche,raccompagne, en effet, dans chacune de ces deuxstations. On le rencontre encore, d'après Pallas, surplusieurs points de l'Océan glacial, et jusque daus les,lagunes de la Vénétie, d'après Canestrini. On adit à tort, écrivait Carbonnier en 18CI, que le Brochetse tenait éloigné de l'embouchure des fleuves; quand,après la fraye, il survient des pluies d orage, il descenddans le courant, et il n'est pas rare d'en pêcher eneaux saumâtres. Nous avons assista cette année, à


342 L ACCLIMATATION DES POISSONSl'embouchure de l'Orne, à la pêche de plusieurs Brochetsqui ne paraissaient nullement se ressentir dumilieu dans lequel ils se trouvaient. Les pêcheursnousont affirmé qu'ils en prenaient en abondance, tous lesans, à la m ê m e époque, et que la finesse de leur goûtne laissait rien ù désirer *. »Dans les Gastérostcidès se placent les Epinoches qui,« appartenant essentiellement à la catégorie des poissonsd ë a u douce, fréquentent aussi les eaux saumâtres etquelquefois les rivages de la mer; mais ces différencesde séjour n'ont pas lieu, en général, pour les m ê m e sespèces ... Les Epinoches qui habitent le voisinage descôtes maritimes ne se rencontrent pa$ dansl'intérieurdes terres 2 .» Le genre a néanmoins fourni une espècemarine, l'Epinoche de mer (Spinachia vulgaris), d e l àMer du Nord et de la Baltique, qui descend parfoisjusque dans le Golfe deGascogne.A u nombre des Salmonidés, et en outre du Saumoncommun dont les m œ u r s migratrices sont bien connues,nous citerons, avec M . Raveret Wattel, « leBrook-trout d'Amérique (Salmo Fonlinalis) qui nedevient pas beaucoup plus long que le doigt, tant qu'ilreste confiné dans certains ruisseaux de montagnesoù il ne trouve pour nourriture que de raresinsectes,mais qui peut, si on lui donne accès dans l ë a u salée,vers la fin de l'hiver ou au printemps, acquérir, avecune rapidité surprenante, un poids d'une ou deuxlivres, tout en revêtant une belle livrée a r g e n t é e 3 ».213Carbonnier, Guide prat. depiscic, p. 130.Blanchard, Les poissons (Veau douce, p. 187.Raveret-Wattel, La Piscic. à l'étranger, p.234.


IMUSSONS D EAU DOUCE 351M . le Professeur I I . Rasch. de C hristiania, a établi,dans les fjords de Sandvigen et de Frédérick^tead(Norvvège; deux étangs, alimentés par un ruisseau etséparés par des digues, de la mer qui y produit sesmarées de 0 m ,30 ù 0 m ,40 de hauteur; il y déposedes alevins de Saumons communs et de Truites derivière, qui y prospèrent également; ces étangs ont30 et 109 hectares de superficie, avec une profondeurmaxima de 13 mètres.Enfin, bien que les Siluridés soient des poissons"d ë a u douce, quelques espèces fréquentent les eauxsaumâtres, ou m ê m e le voisinage immédiat des côtes.Il n ë s t pas jusqu'à l'Ecrevisse à pieds rouges, indigènedes cours d ë a u affluents de la Baltique, que lespécheurs Livoniens capturent dans la mer à unegrandedistance des côtes et r a m è n e n t dans leurs filets avecles poissons (Brehm et Sauvage). D'après Huxley,l'écrevisse à larges pieds (A. pachypus) se rencontreégalement dans la mer Caspienne et dans les eauxsaumâtresdes estuaires du Bug et du Dniester1C ë s t une observation curieuse et utile que leschances de facile acclimatation dans un milieu diffé- •rentsont en faveur des individus constituant desgenresdont telles espèces vivent en eau douce et telles eneau salée; et, si l'on y réfléchit on trouve là une confirmationde l'hypothèse d'après laquelle certaines espècesse seraient plus ou moins complètement accommodéesà un milieu différent de celui dans lequel ellesavaient auparavantvécu.1Huxley, L'Ecrcvisse Hp. 221.


344 L ACCLIMATATION DES POISSONSTout cela, à coup sûr, présente bien plus d'intérêtscientifique que d'importance pratique. Pourtant, ilserait possible q u ë n faisant périodiquement passercertaines espèces de l ë a u douce en eau salée etréciproquement, on en obtînt « n développementplus rapide et une chair plus délicate; comme il estaussi possible que, dans les étangs de nos contréeslittorales, les espèces marines donnassent un produitplus élevé, en argent, que les espèces fluviales. C ë s tlà une industrie presque nouvelle à forcé d ë t r e antiqueet qui pourrait tenter quelques-uns de nos pisciculteursplacés dans une situation où ils pourraientdisposer parallèlement des deux milieux.


C H A P I T R E X IFAVNULK DES POISSONS D ' E A L - DOCOKDK LA FRANCKS 1 er — ESPÈCES INDIGÈNESP e r c o ï d e s :1. Perche de rivière (Perça /!/


346 FAUNULE DES POISSONS D'EAU DOUCEfonde à fond sableux, surtout dans les montagnesde presque toute la France et l'Europetempérée.Joues c u i r a s s é e s :6. Epinoche aiguillonnée ou grande Epinoche (Gasterosteusaculeatus). — Sèine et presque tousles cours d ë a u à fond de sable vaseux au Nordde ce fleuve, surtout près des côtes de Normandieet de Picardie, quelques étangs. Pays-Bas,Belgique, Allemagne, Angleterre.7. E. argenté (G. Argentatissimus).— Environs d'Avignonet de Marseille.8. E. de Bâillon (G.Bailloni).— Environs d'Abbevillé.9. E. élégante (G. Elegans). — Départements dela Gironde et de laHaute-Garonne.10. E. à 4 épines (G. 4 Spinosus). — Départements duGard et de Maine-et-Loire.11. E. Nimoise (G. Nemausensis).— Départements duGard et de Maine-et-Loire.12. E. Bourguignonne (G.Burgundianus). — Départementde la Côte-d'Or. *13. Epinochette commune (Gasterosteûspungitius).—Seine, rivières et ruisseaux à eaux limpides duNord de la France,surtout près de leurs sources.14. E. à queue lisse (G. Leiurus). — Seine-Inférieure,Somme.15. E. Nëustrienne (G. Neustrianus). — Seine-Inférieure.16. E. demie-armée [G. S e m i - A r m a l u s ) . — BasseSeine, BasseSomme.


FAUNUUE DES POISSONS D'EAU DOUCE 34717. E. demie-cuirassée G. Semi-Lorïcatus). — BasseSeine, BasseSomme.18. E. \isse{G.Lœrî.s).—EnvironsdeParisetdeGisors.19. E. Lorraine (G. Lotharingus). — Département delaMeuse.20. E. à tète courte (G.Breviceps).—Environs deCaen.Cyprinoïdes:21. Carpe commune (Cyprinus carpio). — Toute laFrance, fleuves, rivières, lacs, étangs, canaux,plus ou moins profonds, à fond vaseux, àcours lent Suisse (lacs), Belgique, Pays-Bas, A l ­lemagne, Angleterre, Italie, Espagne,Portugal.22. Reine des Carpes (Cyprinus regina Carpium). —Carpe soleil, Carpe jaune. Variété de la Carpecommune.23. Carpe-cuir ou Carpe-miroir (Cyprinus Carpiospecularis). — Variété de la Carpe commune,ou m ê m e hybride de celle-ci avec la Tanche.— Viviers et étangs de Lorraine.24. Carpe gibèle ou bossue (Cyprinus gibelio). — Ea.uxdormantes, étangs, mares, tourbières, à fondglaiseux ou vaseux, de la Lorraine et de l'Alsace.Allemagne, Angleterre, Danemark,Italie.2o. Carpe Carassin (Cyprinus Carassius). — Etangsdu Nord-Est de la France (environs de L u n é -ville) à fond marneux ou vaseux ; communesdans le Nord de l'Allemagne, Autriche, Bohème,rare en Angleterre.26. Carpe Carreau ou de Kollar (Cyprinus Kollarii).— Étangs des environs de Metz. É t a n g de


348 FAUNULE DES POISSONS D'EAU DOUCESaint-Gratien près de Paris. Belgique, Allemagne.27. Carpe dorée ou Dorade de la Chine ou poissonrouge (Cyprinus auratus). — Naturalisé depuislongtemps dans un grand nombre de noscoursd ë a u de l'Est, du Nord et du Centre. Seine,Seille, Vallière, etc.28. Barbeau commun ou fluviatile (Barbusfluviatilis).—Presque tous les cours d ë a u de France à eauxpures, limpfdes et vives (Seine, Loire, etc.). Lacset étangs à eaux renouvelées, presque toutel'Europe tempérée et m ê m e méridionale. Allemagne,Angleterre, Suisse, Lombardie, etc.29. Barbeau méridional (Barbus merulùmalis.), —France méridionale, Hérault, Lez, Italie.30. Goujon commun (Gobio fluviatilis). — Presquetous nos fleuves et rivières à eaux vives, àfond de sable ou de gravier, Seine, Loire,Somme, etc.; presque toutes les rivières del'Europe septentrionale et tempérée.31. Tanche commune (Tinca vulgaris). — Presquetous les #cours d ë a u de France à eaux dormantesou courantes sur fond vaseux et herbeux.Etangs, mares, quelques lacs; presquetoutel'Europe.32 B r è m e cornmune (A bramis B r a m a ) . — Presque tousnos cours d ë a u assez profonds et tranquilles,rivières et lacs. La plupart des rivières et lacsde l'Europe.33. B r è m e Bordelière ou petite B r è m e , ou Hazelin(Abramis Blicca). — L a plupart des rivières de


PAÎ 7 M*LK DKS POISSONS D'K.VÎ' DOt'CK 349France (Rhône, Saône, Seine, Loire, Loir. etcieulimv. 10'


350 FAUNULE DES POISSONS D V - A U DOUCE43. Meunier Rosse ou Gardon blanc ou Vangeron(Leuciscus rutilus). — La plupart des coursdë a u du Centre et du Nord de la F r a n c e à eauxclaires et un peu vives, à fond sablonneux oumarneux ; quelquefois en eaux presque dormanteset surtout vers les embouchures maritimes;Savoie, Suisse, très commun dans toutel'EuropeCentrale.44. Rotengle ou Gardon rouge (L. erythrophtalmus).— M ô m e s eaux que le Meunier rosse.45. Gardon pâle (L. palleus). — Aussi commun dansles m ê m e s eaux que le Rosse ; est souvent confonduavec lui.46. Gardon de Sélys (L. Selysii). — Départements del'Est,Belgique.47. Ide mé\dinote(Idus melanotus).—Rivières du Nordde la France (Rhin,Meuse,Moselle, Somme, RI.).Assez rare partout, Allemagne Septentrionale.48. Ablette commune (Alburnus lucidus). — Tousles cours d ë a u de France, mais plutôt au Nordqu'au Midi. Seine, Loire, Allier, Vienne, Moselle;ruisseaux,etc.49. Ablette de la Gironde (A. Burdigalensis). — Garonne,Gironde.50. Ablette hachette ( A . dolobratus). — Rhin, Moselle,Meuse et affluents, Belgique, Allemagneseptentrionale.51. Ablette de Favre ( A . F abri). — R h ô n e vers A v i ­gnon.-52. Ablette mirandelle {A. Mirandella). — Lacs duBourget et de Genève.


FAUNULE DES POISSONS D EAU DOUCE 33Î53. Ablette de Savigny \A. Savignyi). — Environs. de Nice.54. Ablette spirling ou É p e r l a n de Seine. (Alburnusbipunctatus). — Seine, Loire. Orne, Somme,quelques fleuves et rivières du nord. Lac deGenève,etc.55. Nase ou nez (Chondrostoma nasus). — Rhin etses affluents de l'Alsace-Lorraine, Moselle,Meuse, RI, rivières des Ardennes, Seine.Yonne,Lot, quelques cours d ë a u de la Côte-d'Or, assezcommun dans la Somme.56. Véron ou Vairon ou Pinque (Phoxinus hr.ris). —Presque tous les cours d ë a u de la France, surfond de sable ou gravier, surtout vers leursource.57. Loche d ë t a n g ou Misgurn (Cobilis fossilis). —É t a n g s vaseux du Nord et de l'Est de la France.Assezrare.58. Loche franche ou Dormille (Cobitis barbatuld). —Petites rivièresàfond de pierres et de cailloux,à eaux vives claires et profondes du Nord delaFrance, presque toute l'Europe Centrale etMéridionale et jusqu au Nord de la Suède.59. Loche de rivière ou Loche épineuse (Cobitis taenia).— Rare partout, relativement assezcommune dans la Seine, l'Ain, le Doubs. laLoue, l'Yonne, etc.Esocides :60. Brochet c o m m u n (Esox lucius). — Presque tousles fleuves, rivières, ruisseaux, lacs et étangs


352 FAUNULE DES POISSONS D'EAU DOUCEde la France, comme de toute l'Europe CentraleetSeptentrionale.Salmonidés :01. Saumon commun (Salmo salar). — Presque toustous les fleuves, rivières et ruisseaux communiquantavec l'Océan, la Manche, lePas-de-Calais,et la mer du Nord (Seine, Loire, Allier, Garonne.Dordogne, etc.), fleuves et rivières del'Europe Centrale et Septentrionale. Limite auSud 40° latit. Nord.02. Truite S a u m o n é e (Salmo traita). — M ê m e seaux, m ê m e s lieux que la Truite commune(Rhin Moselle, Meuse, A i n , Doubs, Loire,Yonne,Seine).03. Truite commune ou de rivière (Trutta fario). —Tous les cours d ë a u de France à eaux claireset froides, surtout vers leurs sources ou enmontagnes. Lacsde montagnes, quelquesétangsrenouvelés. Ain, Doubs, Loue, Yonne, Seille,Valouze, Vallière, etc. Lacs de Chàlin, Clairvaux,Lucerne , Zug. Allemagne, Belgique,Angleterre,etc.64. Truite des lacs (Trutta variabilis). — Bassin lacustredes Alpes. Lacs du Bourget, d'Annecy,de Genève,etc.65. Truite à grandes taches [T. macrostigma). —Algérie : Oued el Abaïch Oued Zrour etquelques torrents des environs de Bougie.66. Truite de mer {Fario argentew)«— M ê m e s m œ u r set m ê m e s eaux que le Saumon commun.


F A r X I LK DKS POISSONS D HAÏ* DoTCK X'M67 Omble commun ou d'Auvergne. (Thymallus re.nl-Ufer — Rivières ombreuses des montagnesde l'Auvergne. Quelques rivières de l'Est de laFrance. Allemagne, Suisse, Italie, AmériqueSeptentrionale.68. Omble chevalier (Thymallus umbla), — Rivièresdes Ardennes et des Vosges. Rhin, Moselle,Meuse, Chiers, accidentellement dans le Rhône,la Loue, la Sorgue, etc. Lacs du Bourget, dePaladru, de Genève, Constance, etc. Suisse,Autriche.Grande-Bretagne.69. Corégone Lavaret (Cart garnis Larnreta.^ — Accidentellementdans l'Isère, le Drac, le Guier ;assez commun dans les lacs du Bourget(altit. 231 m ), de Sainte-Hélène ;altit. â W ) . d'Aiguebelle.(altit. 370'°!, de Genève, altit. 375 mImportée et acclimatée en Poméranie et enEcosse.70. Corégone Houting (C. oxyrrhynchus). — Rivièresdu N.-E. de la France communiquantavec le Rhin et la Meuse.71. Eperlan de mer ( O s m f r m eperlanus). — Embouchuremaritime de l'Océan. Habite la mer dontil remonte les fleuves et rivières Seine, Loire,Gironde, Somme, etc.). Allemagne, Angleterre,Océan. Mer du Nord, Baltique.Clupéïdes :72. Alose commune (Clupea alosa). — Embouchuresde la Seine, de la Loire, du Rhône, de la Gironde,de la Dordogne, de l'Adour, du Rhin,


354 FAUNULE DES POISSONS D ' E A U DOUCEde la Somme ; Yonne, Allier, Saône, Meuse,Moselle, Saverne,etc.73. Alose finte (Alosa finta). — M ê m e s mers et m ê m e scours d ë a u .G a d o ï d e s :74. Lotte commune ou de rivière (Lota vulgaris). —Fleuves et rivières de presque toute la France,mais rare. Isère, Saône, Moselle, Meuse, Rhin,Ain, Yonne, Doubs, etc. Lacs du Bourget, deGenève, de Lucerne, etc. Très commune dansl'Europe Centrale etSeptentrionale.M u r é n o ï d e s :75. Anguille commune (Anguilla murœna). — Presquetous les cours d ë a u , lacs et étangs de la Franceet del'Europe.Variétés : Pimperneau ou commune (latirostris),toutes les eaux douces.Fine ou long bec (acutirostris), lagunes s a u m â t r e sduLanguedoc.Franche ou Lachenaux (platiroslris), lagunessaumâtres du Languedoc.Verniaux ou coureuse (mediorostris), toutes leseauxdouces.Guiseau ou à bec oblong (oblongirostris), embouchurede la Seine, cours d ë a u des environs deMarseille, lac du Bourget,etc.Sturoniens :76. Esturgeon commun (Acipenser sturio). — Exceptionnellementdans la Seine, le Rhin, le R h ô n e ,


FAUNULE HES POISSONS D ' E A U DOUCE 335-la Loire, la Gironde, la Moselle, etc. Assezcommun dans le Volga, le Don, le Bug,l'Elbe, TOder, le Danube, le Pô, etc.P é t r o m y z o n i d e s :77. Lamproie de rivière (Pelromyzon fluviatilis). —Remonte dans la plupart de nos fleuves et quelques-unsde leurs affluents (Loire, Rhin et Mosellesurtout), dans quelques lacs et étangs.Abonde dans la Tamise, la Saverneetquelquesrivières de l'Ecosse et de l'Irlande.78. Petite Lamproie de rivière, Lamproie de Planerou Sucet (Petromizon Planer i\. — Ruisseaux etrivières, à eaux limpides. Loire et ses affluents.Cours d'eau de presque toute l'Europe.S 2. — POISSONS ÉTRANGERS DONT L'ACCLIMATATIONESTPROPOSÉEPercoïdes :Sandre ou Sandat (Lucioperca sandra). — Lacsd'Allemagne (Saxe, Prusse), de l'Autriche, dela Pologne et de la Russie (lac de Lubahn\rivières du Jaïck et de la Fisza, Danube, Elbe,Sprée, etc. — Importée en France en 1851.Perche noire (Perça nigrescem) ou Black-Bassd'Amérique à grande et à petite bouche. —Eaux de température moyenne.Perche argentée (Perça argentea) ouCalico-Bass,—vit en eaux froides et vaseuses: ne se reproduitq u ë n eaux à t e m p é r a t u r e moyenne.


350 FAUNULE DES POISSONS D'EAU DOUCEPharyngiensGourami de la Chine (Osphronemus olfax). —Originaire de la Chine, acclimaté à Java, àl'Ile de France, à Cayenne, en Australie (1864).Atteint 2 mètres de long. — Eaux chaudes. —Chairexcellente.L a b y r i n t h i f o r m e s :Macropode de la Chine ou Paradisier (Macropoilusparadisii). — Originaire de la Chine oùil vit dans les rizières et en viviers. — Introduiten France en 1869 par M . Simon.C y p r i n o ï d e s :Binny ou Barbeau du Nil (Cyprinus lepidotus). —Indigène du Nil, r e c o m m a n d é par Is. GeoffroySaint-IIilaire. — Longueur de 0 r a ,50à 1 mètre.Eauxchaudes.Fondule cyprinodonte(Fundula cyprinodonta). —Originaire de l'Amérique septent. — Eauxfroides et courantes, dormantes et tempérées.— Introduit en France en 1871.Siluroïdes :Silure d'Europe (Silurus Glanis). — Cours d ë a udu Nord de l'Europe, Allemagne, Danube,Volga, rare dans le Rhin, quelques lacs dela Suisse. — Importé en France en 1815.S a l m o n i d é s :Salvelin (Salmo s a l v e l i n u s ) . — A l l e m a g n e (Lacsde Kœnigsée, Wildensee, Salzburg, etc., jus-


K A Ï N I L E DES POISSONS D ^ A U DoCCE 357qu'à 2,000 m. d'altitude. — Introduit en Francepar M M . Coste et de Yibraye,en 1852.Saumon du Danubeou Ileusch 'Sahno H w l i o ) . —Mer Noire, mer Caspienne, Danube et sesaffluents. — Introduit en France par M . Costeen 1851.Saumon de Californie ou du Sacramento ouQuinnat S a l m o Quinnal). — Importé auxEtats-Unis en 1873, en France en 1875.Saumon des lacs ou d ë a u douce (Salmo larus/ris,var. du S a l m o salar). — Sous variétés: du lacVener (S. Venella), en Nonvège, des lacsSçhoodic. Seber etSebago(S. Sebago) de l'Amériquedu Nord.Truite arc-en-ciel (Salmo iridvus). truite des montagnesde Californie, truite de la rivière deMac-Cloud, Brook-trout d ' A m é r i q u e . —Importéeen France en 1880.Truite de fontaine [Sahno fontinaïh) d'Amérique.— Ruisseaux près des sources, torrents, etc.Truite des lacs, Truite variable, du lac de Genève,grande truite (Trutta lacuslris). — Originairedes lacs de la Suisse, jusqu'à l'altitude de1,500 mètres.Corégone commun, Lavaret, Féra (CorcgonusFera, Lavaretus). — Lacs de Suisse, de Bavière,d'Autriche, etc., suffisamment vastes etprofonds. — Chair délicate.Corégone blanc ou "White-fish (Coregonus albus).— Sédentaire des lacs de l'Amérique du Nord.Non carnassier. — Chair très bonne.


358 FAUNULE DES POISSONS D'EAU DOUCECorégone Oswego ou Black-Bass (Grystes salmoïdes).— De l'Amérique Septentrionale, dansle lac Oswego. — Chair très délicate.Sturoniens.Esturgeon Sterlet (Acipenser ruthenus). — Resteconstamment en eau douce; grands fleuves dela Russie, Volga surtout. — Acclimaté et naturalisédans plusieurslacs.§ 3. — POISSONS DOMESTIQUÉS EN CHINE.Cyprinidés.Ou-yu. Ophicéphale. — Ophieephalus niger.Yong-yu. — îlypophtahnichthys nobilis.Lien-yu. — Hypophtahnichthys molitrix.Tsin-yu. — Leucisus idellus.Tsao-yu. — Leuciscus Œthiops.Gourami (Osphronemus olfax). Pharyngiens labyrinthyformes.— Chair très délicate.Pharyngiens.Macropode paradisier (Macropodus Paradisii). — Introduiten France en 1869.


T A B L E D E S M A T I È R E SAVANT-PROPOSI-XCHAPITRE I e r . — Les eaux douces 12CHAPITRE II. — Les Poissoas 24CHAPITRE III. — La reproduction naturelle 39CHAPITRE IV. — Les procédés de la Pisciculture artificielle Glg 1 e r — Distinctions et classiûtions. 61g 2. — Frayères artificielles 64g 3. — Fécondation artificielle 70g 4. — Incubation artificielle 78g 5. — Élevage et alimentation artificielle 90g 6. — Dissémination et repeuplement 132g 7. — Castration des Poissons 140g 8. — Avenir de la Pisciculture 144CHAPITRE V. — L'Exploi'.ation des étangs 148g 1 e r — Poissons d'étangs 148g 2. — Création d'un étang 159g 3. — Exploitation des étangs à Carpes. 163A. — Etangs à multiplication, à feuilles, à poseou forcières 164B. — Étangs à nourrain ou d 1 empoissonnage . 166C. — Étangs d'élevage 167D. — Aménagement des étangs à Carpes 170E. — Étangs ou viviers d'engraissement 180g 4 — Étangs à Anguilles 183g 5. — Étangs et viviers à Truites et à Corégones 187g 6. — Étangs et viviers à Écrevisses. j.9iCHAPITRE VI. — L'exploitation des lacs 198


360 TABLE DES MATIERESCHAPITRE VII. — Le Dépeuplement des eaux douce3 216CHAPITRE VIII.— L'Exploitation des cours d'eau 254g T r — Poissons migrateurs 254g 2. — Poissons sédentaires 276g 3. — ^revisses «... 289g 4. — Aménagement des cours d'eau 298g 5. — Produit de l'exploitation des eaux douces 305CHAPITRE IX. — Les eaux saumâtres. Statistique, faunule, exploitation308glor— Embouchures maritimes 308g 2 — Lagunes ou étangs littoraux 309CHAPITRE X. — L'Acclimatation des Poissons de mer en eau douceet des Poissons d'eau douce en eau salée .... 320g 1 e r — Poissons de mer 323g 2. — Poissons d'eau douce 340 =CHAPITRE XI. — Faunule des Poissons d'eau douce de la France 345§ t** Espèces indigènes 345g 2. — Poissons étrangers dont l'acclimatation est proposée. 355g 3 — Poissons domestiqués en Chine 358Table des matières 359Tours, ionp. Deslis Frères, rue Gambetla, 6.


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