4<strong>Nouvelles</strong> <strong>de</strong> Chrétienté Nº 92Mars - avril 2005ÉPISCOPAT IVOIRIEN, OÙ EN ES-TU ARRIVÉ AVECNOTRE CÔTE D’IVOIRE ?Lettre ouverte aux évêques <strong>de</strong> Côte d’Ivoire•par le R.P. Jean-Jacques Marziac, missionnairePar manque <strong>de</strong> Foi et <strong>de</strong> Courage tu n’as pas voulu étudier, approfondir, enseigner la Doctrine Sociale <strong>de</strong> l’Eglise,qui n’est ni plus ni moins que la Royauté Sociale <strong>de</strong> Notre Seigneur Jésus-Christ.Que <strong>de</strong> fois, dirait le doux Sauveur, « n’ai-je pas voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses petitssous ses ailes et tu ne l’as pas voulu » (Matt. XXIII, 37). Et toi, tu n’as pas dit, ni fait ce qu’il fallait. Certes, tu asquelquefois dénoncé les abus que tout le mon<strong>de</strong> dénonce, mais jamais tu n’as osé attaquer le mal à la racine. C’est-àdireéclairer l’élite intellectuelle et politique <strong>de</strong> Côte d’Ivoire sur ce qui fait une nation chrétienne et civilisée… Nousen déplorons les conséquences, elles sont maintenant sous nos yeux : le pays coupé en <strong>de</strong>ux, la guerre civile latente,accompagnée <strong>de</strong> pillages, d’exactions, etc… Guerre civile, alors qu’au centre du pays se trouve cette merveilleusebasilique <strong>de</strong> Yamoussoukro, unique au mon<strong>de</strong>, dédiée à Notre-Dame <strong>de</strong> la Paix ! Quelle contradiction ! Je suis bienembarrassé, quand <strong>de</strong>s personnes m’écrivent ou me disent : « Alors, mon Père, votre Côte d’Ivoire ! C’est là le résultat<strong>de</strong> votre travail missionnaire ? » La réponse est simple et claire, mais elle fait mal…PREMIÈRE CERTITUDE : LA CÔTE D’IVOIRE A UNE MISSION À REMPLIRQui affirme cela ? Saint Paul et toute la tradition catholique. « Dieu, dit-il, a fait naître d’un seul tout le genrehumain ; il lui a donné le globe entier pour <strong>de</strong>meure,il a défini le temps <strong>de</strong> l’apparition <strong>de</strong>chaque peuple et lui a marqué le lieu <strong>de</strong> sonétablissement… L’Ordonnateur suprême a fixél’heure <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s nations, assigné leursfrontières, déterminé leur rôle, réglé leur duréeet leur part d’action dans l’œuvre générale…Dieu a donné les nations en héritage à sonFils, leur Ré<strong>de</strong>mpteur… Les nations sont voulues<strong>de</strong> Dieu et conçues dans votre grâce, Ô Jésus-Christ! A chacune d’elles vous avez donnéune vocation. En chacune d’elle vit une idéeprofon<strong>de</strong> qui vient <strong>de</strong> vous, qui est la trame <strong>de</strong>ses <strong>de</strong>stinées. » (Cardinal Pie, 3 e instruction synodale).Qui peut nier la mission particulièreLe prési<strong>de</strong>nt Houphouët-Boigny dans la basilique <strong>de</strong> Yamoussoukro<strong>de</strong> la Côte d’Ivoire avec sa situation géographiqueau centre <strong>de</strong> l’Ouest africain, son gouvernement<strong>de</strong> quarante ans <strong>de</strong> paix relative et saprospérité sous le Prési<strong>de</strong>nt Houphouët-Boigny, et surtout avec cette admirable basilique pouvant accueillir 18 000fidèles, « fantastique acte <strong>de</strong> Foi » - selon le journaliste <strong>de</strong> Paris Match -, phare <strong>de</strong> l’Afrique subtropicale catholique.DEUXIÈME CERTITUDE : NOTRE SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST EST ROI DE TOUTES LESNATIONSCette royauté s’étend aux nations en tant que nations. Les psaumes l’annoncent : « Tous les rois <strong>de</strong> la terre l’adoreront,toutes les nations le serviront. Les peuples marcheront dans sa lumière, les rois dans la splen<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> son lever » (cf. Ps 2 et Ps71). Le Nouveau Testament, ainsi que l’explique le Cardinal Pie, confirme cet enseignement : « Enten<strong>de</strong>z les <strong>de</strong>rniersmots que Notre-Seigneur adresse à ses apôtres avant <strong>de</strong> remonter au Ciel : Allez donc enseigner toutes les nations (Matt28,19). Jésus-Christ ne dit pas tous les hommes, tous les individus, toutes les familles, mais toutes les nations. Il nedit pas seulement : Baptisez les enfants, catéchisez les adultes, mariez les époux. Sans doute la mission qu’il leur confèrecomprend cela, mais elle comprend plus que cela : elle a un caractère public, social. »C’est l’enseignement <strong>de</strong> tous les Pères <strong>de</strong> l’Eglise, <strong>de</strong> tous les Papes, jusqu’à Vatican II. L’encyclique la plus récenteet la plus claire sur ce sujet fondamental est Quas Primas du pape Pie XI, avec ces passages très explicites :
•Lettre ouverte aux évêques ivoiriens« Est-ce qu’en outre la célébration universelle et annuelle <strong>de</strong> la fête du Christ-Roi ne semble pas être très convenable pour condamneret pour réparer en un sens la défection que le laïcisme a causée, entraînant <strong>de</strong> si pénibles malheurs pour la société ? En effet,plus les réunions internationales et les assemblées nationales accablent d’un indigne silence le nom très doux <strong>de</strong> notre Ré<strong>de</strong>mpteur,plus il faut l’acclamer et faire connaître les droits <strong>de</strong> la dignité et <strong>de</strong> la puissance royales du Christ. »« Aux états, la célébration annuelle <strong>de</strong> cette fête rappellera que les magistrats et les gouvernements sont tenus, tout comme les citoyens,<strong>de</strong> rendre au Christ un culte public et <strong>de</strong> lui obéir ; elle évoquera <strong>de</strong>vant eux la pensée <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier jugement où le Christ nonseulement expulsé <strong>de</strong> la vie publique, mais encore négligé ou ignoré avec dédain, vengera sévèrement <strong>de</strong> telles injustices, car sa royautéexige que l’état tout entier se règle sur les comman<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> Dieu et les principes chrétiens aussi bien dans la législation que dansla façon <strong>de</strong> rendre la justice et que dans la formation <strong>de</strong> la jeunesse à une doctrine saine et à une bonne discipline <strong>de</strong>s mœurs. »Si j’ai reproduit in extenso ces passages, c’est que je soupçonne que plusieurs <strong>de</strong>s évêques <strong>de</strong> Côte d’Ivoire les ontjamais lus ! Si non ils en parleraient.EST-CE UN JUGEMENT TÉMÉRAIRE ?Ô Épiscopat ivoirien, reconnais ton ignorance sur cette question gravissime ! En 1999, le 13 juin, donc six moisavant le coup d’Etat illégitime <strong>de</strong> décembre, tu as publié officiellement une brochure Le chrétien face à la politique. Sur204 paragraphes, pas une fois il n’est question <strong>de</strong> Royauté Sociale <strong>de</strong> Notre Seigneur Jésus-Christ, et tu ignores l’encycliqueQuas Primas !En revanche, tes paragraphes 51 et 52 sur le peuple souverain, le peuple au centre du pouvoir, sont une parfaitehérésie, condamnée maintes fois par l’Eglise ! Que fais-tu du « Omnis potestas a Deo » <strong>de</strong> Saint Paul ?Tu cites Alain Touraine, militant du P.S.U., homme <strong>de</strong> gauche ! Étonne-toi que six mois plus tard « le peuple souverain» fasse un coup d’Etat illégitime puisqu’il est « au centre du pouvoir » !Pourquoi pas un autre dans six mois ? Ainsi les gouvernements se renversent-ils les uns les autres. Ce qui est parfaitementcohérent avec le principe <strong>de</strong> la démocratie mo<strong>de</strong>rne.TROISIÈME CERTITUDE : LE BON CÔTÉ DE LA COLONISATION FRANÇAISECette certitu<strong>de</strong> n’a évi<strong>de</strong>mment pas la valeur <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières. Mais il faut l’affirmer. La France par ses missionnaires,ses professeurs, ses mé<strong>de</strong>cins, ses militaires, ses techniciens, et par la création <strong>de</strong> toute une infrastructured’hôpitaux, d’écoles, <strong>de</strong> ponts, <strong>de</strong> routes, etc., a fait <strong>de</strong> la Côte d’Ivoire l’un <strong>de</strong>s pays modèles <strong>de</strong> l’Afrique <strong>de</strong>l’Ouest. Tous les Africains cultivés, non désinformés ou manipulés par les idéologies socialo-marxistes ou mondialistes,le reconnaissent.QUATRIÈME CERTITUDE : LE MAUVAIS CÔTÉ DE LA COLONISATION FRANÇAISEBeaucoup ne l’ont pas vu, ne l’ont pas reconnu. Pourquoi ? Parce qu’ils n’ont pas su distinguer entre une Franced’avant 1789 et une France d’après 1789. Or, c’est cette France d’après 1789 qui est venue en Côte d’Ivoire en 1895,avec ses Droits <strong>de</strong> l’Homme, sa laïcité, sa démocratie mo<strong>de</strong>rne, etc…Avant 1789, la France, le royaume <strong>de</strong> France reconnaissait avant tout les Droits <strong>de</strong> Dieu. Le roi était sacré parl’évêque <strong>de</strong> Reims. Son fils aîné lui succédait. Il <strong>de</strong>vait être catholique et non excommunié. Le Royaume était officiellementcatholique et non laïc !Ainsi, pendant presque mille ans, la France, Fille aînée <strong>de</strong> l’Eglise était <strong>de</strong>venue l’une <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s nations,par le nombre <strong>de</strong> ses missionnaires à travers le mon<strong>de</strong>, par ses saints, ses gran<strong>de</strong>s familles, ses cathédrales, ses abbayes,sa littérature, ses universités, ses découvertes, etc… On parlait le français dans toutes les cours d’Europe.Au début <strong>de</strong> la colonisation, le Capitaine Binger, bien que protestant, avait compris cela. Il fit venir <strong>de</strong>s missionnairescatholiques, parce qu’il savait que dans les écoles <strong>de</strong>s Pères on apprenait aux enfants qu’ils ont un Père auCiel, Dieu ; un héritage, la vie éternelle. Il n’avait pas eu peur <strong>de</strong> faire une entorse aux faux principes <strong>de</strong> la laïcité républicaine…ÉPISCOPAT IVOIRIEN, OÙ EST TA FAUTE AUJOURD’HUI, EN CE TEMPS DE GUERRECIVILE LATENTE ?Sur le plan spirituel, tu te dissipes trop et tu ne pries pas assez. Tu ne médites pas suffisamment. Oserai-je te rappelerce que t’a dit le cardinal Joseph Tomko au cours <strong>de</strong> la visite ad limina apostolorum, à Rome le 25 août 1999, encorequatre mois avant le fameux coup d’Etat ? Voici : « C’est l’occasion <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r vivement <strong>de</strong> prendre<strong>de</strong>s dispositions disciplinaires à l’égard <strong>de</strong> vos prêtres dont la vie est un scandale public. Je me réfère à la vie <strong>de</strong> ces5