20.07.2015 Views

Compendium - Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès ...

Compendium - Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès ...

Compendium - Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Colloque International de Dakar8-11 novembre 2010Forces de Défense et de Sécuritéau Cœur de la Sécurité Humaine<strong>Compendium</strong> des ContributionsCoordination et réalisationManfred RosenbergerMbaye CisséConception graphiqueDax-Barrouil<strong>le</strong>t Imprimerie25 Rue de la Croix Blanche40100 DaxImprimé sous <strong>le</strong>s presses deDax-Barrouil<strong>le</strong>t Imprimerieen 1800 exemplairesDépôt légal : juil<strong>le</strong>t 2011Droits de reproductionLa reproduction et/ou la traduction dansd’autres langues sont autorisées à lacondition de mentionner l’auteur de l’artic<strong>le</strong>et l’édition origina<strong>le</strong> du compendiumImages : tout droit réservéIllustration de couvertureà partir de photos sous licenceEMGA/DIRPA, Dakar


Préface du Ministre d’État,Ministre des Forces ArméesChers <strong>le</strong>cteurs,DIRPAForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLe colloque international des Forces de Défense et de Sécurité (FDS),organisé du 8 au 11 novembre 2010, par l’Etat-major général des arméessénégalaises, en partenariat avec la <strong>Fondation</strong> <strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold <strong>Mayer</strong><strong>pour</strong> <strong>le</strong> Progrès de l’Homme (FPH), la <strong>Fondation</strong> Konrad Adenauer et <strong>le</strong>Bureau des Nations Unies <strong>pour</strong> l’Afrique de l’Ouest, a été un riche momentde rencontres et d’échanges autour des préoccupations qui conditionnent<strong>le</strong> devenir de toute la sous région ouest africaine, voire du continent.En effet, <strong>le</strong>s réf<strong>le</strong>xions de qualité produites par <strong>le</strong>s différents intervenantsautour du rô<strong>le</strong> et de la place des FDS dans la promotion de la sécuritéhumaine continuent encore de meub<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s débats de plusieurs participants,encore sous <strong>le</strong> charme de l’étendue et de la profondeur desdiscussions. En effet, qu’il s’agisse des relations entre FDS et Etat de droit,des interactions entre el<strong>le</strong>s et la nation ou de la réforme du secteur de lasécurité en Afrique de l’Ouest, <strong>le</strong> colloque international a défriché deshorizons nouveaux et jeté des perspectives enrichissantes.Cette publication, qui s’inscrit dans <strong>le</strong> prolongement de la rencontre deDakar, constitue un jalon important sur la route qui mène à la pérennisationdes acquis du colloque. Car, ne perdons pas de vue que ce travail deréf<strong>le</strong>xion profonde n’avait pas <strong>pour</strong> seu<strong>le</strong> ambition d’affiner <strong>le</strong>s stratégiesdes FDS de la sous région face aux mutations géostratégiques survenuesau cours de ces dernières décennies, parmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s l’émergence d’unnouveau paradigme centré sur la sécurité humaine. Au-delà, il visait, sansnul doute, à fonder une nouvel<strong>le</strong> relation civilo-militaire forte, bâtie sur <strong>le</strong>respect de l’Etat de droit, l’interaction positive entre populations civi<strong>le</strong>s etFDS et enfin, l’implication active de ces dernières dans <strong>le</strong> développementsocio-économique de la nation.C’est donc un nouveau point de départ qui s’offre à tous, <strong>pour</strong> inscrire <strong>le</strong>débat de Dakar dans la durée, en intégrant ses recommandations <strong>le</strong>s pluspertinentes dans <strong>le</strong> vécu de nos FDS, seu<strong>le</strong> voie d’arriver progressivementet sûrement à des relations militaires apaisées dans l’espace de la CEDEAO.Le Ministre d’EtatBécaye DIOP,Ministre des Forces ArméesSénégalaises3


SommaireTROISIÈME PARTIE : INTERVENTIONS EN ATELIERSI - ATELIERS SUR LES RELATIONS DES FDS AVEC LA NATIONATELIER 1 : Nature et Identité des FDS et <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong> démocratique3.1 Richard PETRIS, Directeur Eco<strong>le</strong> de la Paix, France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1433.2 Général (ER) Hugues de COURTIVRON, Membre du Réseauinternational de la FPH, France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1483.3 Jörg-Dietrich NACKMAYR, consultant historien, Al<strong>le</strong>magne . . . . . . . . . . . . . . . 159ATELIER 2 : Sécurité humaine, Relations civilo-militaires et Maintien de lʼOrdre.3.4 Contrô<strong>le</strong>ur général de police Pascal L. SEUDIE, Cameroun. . . . . . . . . . . . . . . 1683.5 Commandant Jean S. BIAGUI , Ministère des Forces Armées, Sénégal . . . . . 1823.6 Général (ER ) John THOMAS, Membre du réseau des experts de la FPH,Grande Bretagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192ATELIER 3 : Place de la communication et des médias dans la consolidationdu lien FDS-Nation3.7 Général de brigade Benoît ROYAL, Direction des Ressources HumainesArmée de Terre, France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2013.8 Lieutenant-colonel Gatta BA, Spécialiste en communication, Ministère desForces Armées, Sénégal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206II - ATELIERS SUR LA RÉFORME DU SECTEUR DE SÉCURITEATELIER 4 : Quel modè<strong>le</strong> dʼarmée <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest ?3.9 Professeur Philippe Biyoya MAKUTU, Directeur CEPAC, UniversitéLubumbashi, RD Congo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2163.10 Colonel Birame DIOP, Directeur de AISST, Sénégal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221ATELIER 5 : Les défis de la formation éthique et de la reconversion post-conflit3.11 Général de brigade Franz Xaver PFRENGLE, Commandant desEco<strong>le</strong>s dʼOfficiers de lʼArmée de terre, Dresde, Al<strong>le</strong>magne . . . . . . . . . . . . . . . 2253.12 Hamadi KONTE, Aumônier militaire du culte musulman, Armée de Terre,France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2283.13 Professeur Thomas R. Elßner, Professeur dʼEthique et Aumônier militairecatholique, Al<strong>le</strong>magne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2353.14 Dr Amadou Oury BA, UCAD, Sénégal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240QUATRIÈME PARTIE : SÉANCE DE CLÔTUREMadame <strong>le</strong> Professeur Amsatou Sow SIDIBE,Présidente de la commission scientifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2455


Les Organisateurs du ColloqueLʻorganisation généra<strong>le</strong> du congrès international était assurée par lʼEtat MajorGénéral des Armées Sénégalaises. Dirigé par un général, ayant <strong>le</strong> titre etlʼappellation de Chef dʼEtat Major général des Armées (CEMGA), il est notammentchargé de la coordination interarmées, de veil<strong>le</strong>r à lʼaptitude opérationnel<strong>le</strong>des armées à remplir <strong>le</strong>ur mission, de lʼapplication des règ<strong>le</strong>ments dʼemploiet de manœuvre, de lʼinstruction et du perfectionnement des personnels dʼactiveet de réserve ainsi que de la gestion et de la formation des personnels.La <strong>Fondation</strong> <strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold <strong>Mayer</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Progrès de lʼHomme (FPH) estintervenue comme partenaire et co-organisateur. <strong>Fondation</strong> indépendante dedroit suisse créée en 1982 par l'exécutrice testamentaire de <strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold<strong>Mayer</strong>, Made<strong>le</strong>ine Calame, à partir du patrimoine légué par celui-ci, son but estde soutenir des recherches et actions qui concourent, de manière significativeet innovante, aux progrès des hommes par la science et <strong>le</strong> développement social.La <strong>Fondation</strong> travail<strong>le</strong> depuis plus dʼune décennie à bâtir un nouveau typede dialogue entre civils et militaires. El<strong>le</strong> lʼa fait, et continuera à <strong>le</strong> faire, parcequʼel<strong>le</strong> est persuadée que ce dialogue est essentiel à lʼinstauration dʼune communautémondia<strong>le</strong> responsab<strong>le</strong>, pluriel<strong>le</strong> et solidaire.Le Bureau des Nations Unies <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest est <strong>le</strong> premier bureau politiquerégional de lʼONU consacré à la résolution des conflits, la médiation et laconsolidation de la paix.LʼUNOWA favorise une approche régiona<strong>le</strong> <strong>pour</strong> lutter contre <strong>le</strong>s menaces transfrontalièreset transversa<strong>le</strong>s qui pèsent sur la paix et la sécurité dans la sousrégionet en particulier, lʼinstabilité liée aux é<strong>le</strong>ctions, <strong>le</strong>s défis de la réforme dusecteur de la sécurité, <strong>le</strong>s activités terroristes et la criminalité organisée transnationa<strong>le</strong>y compris <strong>le</strong> trafic de stupéfiants. UNOWA promeut la bonne gouvernanceet lʼétat de droit ainsi que <strong>le</strong>s droits de lʼhomme et la question du genre.Le Représentant spécial du Secrétaire général <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest présideéga<strong>le</strong>ment la Commission Mixte Cameroun-Nigeria (CMCN) qui a été créée <strong>pour</strong>faciliter la mise en œuvre de la décision de la Cour Internationa<strong>le</strong> de Justice(CIJ) relative à délimitation de la frontière entre <strong>le</strong>s deux pays.Lʻaction de la Konrad-Adenauer-Stiftung est guidée par <strong>le</strong>s principes qui ont inspirél'œuvre du premier chancelier al<strong>le</strong>mand. Fondée en 1956, el<strong>le</strong> met en œuvredes mesures d'éducation civique et politique et élabore des bases scientifiquesservant à l'action politique. El<strong>le</strong> soutient l'intégration européenne, l'entente internationa<strong>le</strong>et promeut la coopération en matière de politique de développement.Dans une vision moderne du patriotisme et de lʼEurope, lʼAssociation CivismeDéfense Armée Nation (CiDAN) invite à promouvoir <strong>le</strong> dévouement envers lacol<strong>le</strong>ctivité, ainsi que <strong>le</strong>s liens entre la société civi<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s armées.Nous remercions l’Ambassade de la République Fédéra<strong>le</strong> d’Al<strong>le</strong>magneet l’Ambassade de la République Française à Dakar de <strong>le</strong>ur soutien,notamment de l’organisation d’une réception conjointe <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s participantsau colloque à la Résidence de son Excél<strong>le</strong>nce l'Ambassadeur d’Al<strong>le</strong>magne,Monsieur Christian Clages.6


Présentation du colloqueCONTEXTE ET JUSTIFICATIONDepuis 1960, date de son accession à l’indépendance, <strong>le</strong> Sénégal se distingue, enAfrique, par la richesse de ses expériences dédiées à l’édification d’un Etat moderneet stab<strong>le</strong>. Cette exigence, portée en général par toutes <strong>le</strong>s institutions que <strong>le</strong>Sénégal indépendant s’est efforcé de mettre sur pied, s’est traduite au niveau desForces de Défense et deSécurité (FDS) en général, et des Armées en particulier, parl’appropriation précoce du concept d’un lien armée-nation solide, compriscomme l’interaction positive des militaires avec l’environnement civil.C’est ainsi que depuis plusieurs décennies, <strong>le</strong>s FDS se sont illustrées, en sus de<strong>le</strong>urs missions régaliennes de défense du sanctuaire national, dans un nombre variéd’actions de développement exclusivement consacrées au bien-être des populations.En garnison, comme sur <strong>le</strong>s théâtres d’opérations intérieurs et extérieurs, <strong>le</strong>sFDS ont toujours apporté aux populations une assistance appréciab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong>s domainesvitaux tels que la santé et l’éducation.Mieux, el<strong>le</strong>s ont parfois directement entrepris, en véritab<strong>le</strong>s agents de développement,des actions d’envergure au profit des col<strong>le</strong>ctivités loca<strong>le</strong>s, grâce à lapolyva<strong>le</strong>nce des unités du génie militaire (construction de pistes, de ponts, deforages, actions de désenclavement terrestre et fluvial etc..).L’année 2010, qui correspondait au cinquantenaire de l’indépendance de la plupartdes pays d’Afrique francophone, survenait à un moment où <strong>le</strong>s relations civilo-miltairescontinuaient à polariser l’attention. Si dans la plupart des pays de l’Afrique del’Ouest, des efforts considérab<strong>le</strong>s ont été constatés, il subsistent, hélas, des foyersde tension alimentés par une vio<strong>le</strong>nce régulière entre FDS et populations civi<strong>le</strong>s.Cependant, malgré cette poussée sporadique et souvent meurtrière de la vio<strong>le</strong>nce,<strong>le</strong>s défenseurs des droits de l’homme ne désespèrent pas de voir éclore un nouve<strong>le</strong>nvironnement marqué par la prééminence du concept de sécurité humaine, environnementdans <strong>le</strong>quel la sauvegarde des droits de la personne dans <strong>le</strong>s domaineséconomique, alimentaire, sanitaire, environnemental, physique, communautaire etpolitique (protection des libertés et des droits humains fondamentaux) serait largementgarantie.OBJET DU COLLOQUELa volonté des organisateurs était en premier lieu de partager cette expériencefaite de plusieurs décennies de relations civilo-militaires apaisées, avec <strong>le</strong>s frèresd’armes de la sous-région. A ce titre, <strong>le</strong> colloque international de Dakar offrait unmoment d’échanges autour de la place et du rô<strong>le</strong> des FDS dans la promotion dela sécurité humaine.A travers ces échanges, l’objectif recherché était d’approfondir <strong>le</strong>s relations civilomilitairesafin d’instaurer un nouveau sty<strong>le</strong> de dialogue entre civils et militaires <strong>pour</strong>renforcer <strong>le</strong>s fondements éthiques et la stabilité des institutions républicaines.Les experts internationauxen audience privée chez <strong>le</strong>Président de la RépubliqueMaître Abdoulaye WadeForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARSéance dʼOuverture so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> présidée par sonExcel<strong>le</strong>nce Maître Abdoulaye Wade : mot debienvenue du général Abdoulaye Fall (CEMGA)Madame <strong>le</strong> Professeur Amsatou Sow Sidibé, Présidentede la Commission Scientifique du ColloqueLes participants de haut rang dans la sal<strong>le</strong> deconférences de lʼHôtel Meridien Président7


Présentation du colloqueColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumainePanel dʼexpertsinternationauxen sal<strong>le</strong> de plénièreà lʼHôtel Radisson BluLes participants en séance plénièreLe Colloque était structuré autour des thèmes et des sous-thèmes suivants :THEME 1 : Etat de droit et Forces de Défense et de Sécurité (FDS)1.1 Le Contrô<strong>le</strong> démocratique des FDS par <strong>le</strong>s institutions1.2 Maintien de lʼordre et sécurité humaineTHEME 2 : Relations des FDS avec la Nation2.1 L´armée, émanation de la nation2.2 Contribution des FDS aux opérations multinationa<strong>le</strong>s et humanitaires2.3 Relations civilo-militaires dans <strong>le</strong>s situations dʼurgence2.4 Place de la communication et des médias dans la consolidation dulien FDS - NationTHEME 3 : Réforme du Secteur de Sécurité (RSS)3.1 De l´approche militaire à une approche globa<strong>le</strong> de la sécuritéhumaine3.2 Quel modè<strong>le</strong> d´armée <strong>pour</strong> l´Afrique de l´Ouest ?3.3 Ethique et déontologie : <strong>le</strong> défi de la formation3.4 Reconversion et intégration post conflit des membres des FDS.Panel en atelierRemerciements mérités des délégations étrangèresLe Colloque était conduit alternativement en séances plénières et en ateliers. Lesdifférents panels étaient animés par des experts de haut niveau venant de divershorizons. Le nombre et la répartition des séances étaient élaborés par une commissionscientifique constituée de représentants des différents organismes partenairesqui ont organisé cette importante rencontre internationa<strong>le</strong>.Le forum avait regroupé environ cent cinquante experts et invités étrangers comprenanttoutes <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité des pays de la CEDEAO,lʼUnion africaine, <strong>le</strong> Bureau des Nations Unies en Afrique de lʼOuest, <strong>le</strong>s expertsinternationaux de haut niveau, <strong>le</strong>s universitaires ainsi que des organisations de lasociété civi<strong>le</strong>. Le reste de lʼauditoire était fourni par <strong>le</strong>s forces de défense et de sécuritédu Sénégal (Armées, Gendarmerie, Police, Sapeurs pompiers, Douanes,Eaux et forêts, Administration pénitentiaire, etc.).Ce dialogue salutaire ne doit pas rester un exercice solitaire entre pays africains.Il sʼinscrit dans <strong>le</strong> processus dʼinstauration dʼun nouveau dialogue entre militaireset société civi<strong>le</strong> au travers des réseaux animés par <strong>le</strong>s <strong>Fondation</strong>s <strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold<strong>Mayer</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Progrès de lʼHomme (FPH) et Konrad Adenauer (Al<strong>le</strong>magne).En effet, <strong>pour</strong>suivant <strong>le</strong>s réf<strong>le</strong>xions sur <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des Forces armées et <strong>le</strong>ur intégrationdans <strong>le</strong>s sociétés civi<strong>le</strong>s modernes, lʼorganisation du Colloque de Dakar 2010,en partenariat avec <strong>le</strong>s FDS et de nombreuses autres institutions, a permis defournir <strong>le</strong>s bases <strong>pour</strong> une coopération plus étroite entre <strong>le</strong>s différents acteurs dusecteur sécuritaire et la société en général.8


PREMIÈRE PARTIESéance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureLundi 8 Novembre 2010Centre de Conférences Hôtel Meridien Président1.1 Mot de bienvenue du Général Abdoulaye FALL, Chef d’Etat-majorGénéral des ArméesRésumé : In his welcome speech, General Abdoulaye FALL thanks the Presidentof the Republic of Senegal for the great honour made by presiding himselfover the opening of the international colloqium. He welcomes all participants toSenegal. He says that the engagement of the participants and contributors of thecolloquium qualifies the highest interest towards the questions of security anddefence in general, especially with a closer look on Western Africa, and also inrelationship to the fiftieth anniversary of the independence of Senegal. In addition,FALL lines out the fact that the work of the CEDEAO had a very high impact onpeace and sub-regional stability in the recent years. He expresses the wish thatthe mix of representatives of science and of the armed forces may be a goodopportunity to build up new connections and relationships for the profit of the subregionof Western Africa and also, on a larger sca<strong>le</strong>, for the entire Africancontinent. He is convinced that the encounters during the colloquium would <strong>le</strong>adto powerful recommendations on how a future development of civil-militaryrelations could be shaped successfully.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARMonsieur <strong>le</strong> Président de la République, Mesdames et Messieurs,Honorab<strong>le</strong>s invités,Quʼil me soit permis, avant tout, de vous transmettre <strong>le</strong>s remerciements <strong>le</strong>splus cha<strong>le</strong>ureux de lʼensemb<strong>le</strong> des Forces de défense et de Sécurité <strong>pour</strong>lʼhonneur que vous nous faites de présider personnel<strong>le</strong>ment lʼouverturedu colloque. Votre soutien permanent à toutes nos initiatives, ainsi quelʼengagement du Ministre dʼEtat, Ministre des Forces armées à nos côtés,constituent une source de motivation supplémentaire.Je voudrais, en notre nom à tous, vous renouve<strong>le</strong>r toute notre gratitude etnotre loyauté.Mesdames et Messieurs, chers participants au colloque,Je vous souhaite la bienvenue au Sénégal. Lʼhonneur que nous ressentonsde vous compter parmi nous, malgré un emploi du temps chargé, està la hauteur de notre volonté de faire de votre séjour un momentdʼéchange enrichissant à tout point de vue.Votre engagement marque lʼintérêt que vous accordez aux questions desécurité en général, et à lʼAfrique de lʼOuest en particulier dont <strong>le</strong>s effortssoutenus en matière dʼintégration suscitent aujourdʼhui beaucoup dʼespoir,surtout en cette année de célébra tion du cinquantenaire.En effet, la commémoration du cinquantenaire de lʼindépendance du Sénéga<strong>le</strong>t de la plupart des pays africains représente une bel<strong>le</strong> opportunitéde remonter <strong>le</strong> parcours de nos Etats respectifs, mais surtout, de sʼinterrogersur la contribution des différents segments de la nation à lʼédification9


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineABDOULAYE FALLest Général de Corps dʼArmée et lʼactuelChef dʼEtat-major Général desArmées sénégalaises (CEMGA).Diplômé de l'Académie roya<strong>le</strong> militairede Meknès au Maroc en 1975 et brevetéde lʼÉco<strong>le</strong> supérieure de guerrede la République fédéra<strong>le</strong> dʼAl<strong>le</strong>magneen 1994 il est Commandant en Secondde la Force expéditionnaire du Sénéga<strong>le</strong>n 1998, lors de lʼopération GABOUen Guinée-Bissau. De 1999 à 2001, ilsert comme attaché militaire au Ro -yau me du Maroc.De mars 2004 au 2 avril 2006, il a étécommandant de la Force de lʼOpé -ration des Nations Unies en Côted'Ivoire (ONUCI) et de 2001 à 2003, ila occupé la fonction du Chef dʼEtatmajorparticulier du Président de laRépublique (Sénégal) Abdoulaye Wade.En 2006, il est nommé Chef d'État-Major Général des Armées (CEMGA).Le Général Fall est titulaire deplusieurs décorations nationa<strong>le</strong>s etétrangères dont la Légion d'honneur.dʼensemb<strong>le</strong>s humains homogènes et tournés vers <strong>le</strong>ur épanouissementsocio-économique.Fidè<strong>le</strong>s à <strong>le</strong>urs traditions républicaines, <strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécuritédu Sénégal ont pensé que <strong>le</strong> moment était venu dʼamplifier <strong>le</strong> concept arméenationqui a toujours structuré <strong>le</strong>ur action. Au moment où <strong>le</strong>s changementsgéostratégiques survenus dans <strong>le</strong> monde interpel<strong>le</strong>nt de plus en plus <strong>le</strong>s décideursà tous <strong>le</strong>s niveaux, il nous semblait uti<strong>le</strong> de faire face, dans une démarcheprospective, à ce nouveau paradigme que <strong>le</strong>s analystes déclinentsous <strong>le</strong> concept de la sécurité humaine.Cette volonté a rencontré, fort heureusement, cel<strong>le</strong> de partenaires engagésparmi <strong>le</strong>squels la <strong>Fondation</strong> <strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold <strong>Mayer</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Progrès delʼHomme, la <strong>Fondation</strong> Konrad Adenauer et <strong>le</strong> Bureau des Nations Unies <strong>pour</strong>lʼAfrique de lʼOuest. Ces organisations ont porté ensemb<strong>le</strong> <strong>le</strong> projet depuis <strong>le</strong>séminaire préparatoire de Strasbourg en septembre 2009.La rencontre de ce matin est <strong>le</strong> fruit dʼun travail de douze mois, mené de façonméthodique et magistra<strong>le</strong> par la commission scientifique dirigée par Madame<strong>le</strong> Professeur Amsatou Sow SIDIBE, à qui jʼadresse mes sincères remerciements.Ainsi, grâce à lʼengagement de tous, <strong>le</strong> colloque des Forces de Défenseet de Sécurité démarre ces travaux ce matin avec un panel departicipants riche et varié.Cʼest <strong>le</strong> lieu éga<strong>le</strong>ment de remercier <strong>le</strong>s officiels de la CEDEAO, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur engagementrésolu dans la recherche de la paix et de la stabilité sous- régiona<strong>le</strong>par la transformation qualitative des outils de défense de lʼAfrique de lʼOuest.Il est heureux de constater que la dynamique dʼintégration quʼel<strong>le</strong> ne cesse destimu<strong>le</strong>r porte ses fruits dʼannée en année, et la présence massive des arméessœurs en est une bel<strong>le</strong> illustration.Nos partenaires au développement ne sont pas en reste, notamment laFrance et <strong>le</strong>s Etats-Unis dʼAmérique, toujours à nos cotés dans la recherchede solution aux problèmes de sécurité col<strong>le</strong>ctive.Leur participation effective à nos travaux, est la preuve que la comp<strong>le</strong>xité desquestions sécuritaires appel<strong>le</strong> la mise en œuvre dʼune synergie sans laquel<strong>le</strong>,aucune solution durab<strong>le</strong> nʼest possib<strong>le</strong>.Enfin, la mobilisation exceptionnel<strong>le</strong> des universitaires africains et européens,des centres de recherche et de formation, lʼimplication active des organisationsde la société civi<strong>le</strong> et des experts de haut rang dʼAfrique et dʼEurope,apportent une touche particulière au colloque.Cette interaction, que nous espérons positive, entre <strong>le</strong>s « hommes de scienceet <strong>le</strong>s hommes en uniforme », est une occasion de scel<strong>le</strong>r de nouvel<strong>le</strong>salliances au bénéfice exclusif de notre sous-région, voire de lʼAfrique touteentière.A tous, <strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécurité du Sénégal, souhaitent la bienvenueet renouvel<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>ur gratitude <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur présence à cette rencontre.Nous sommes persuadés quʼel<strong>le</strong> sera fructueuse et débouchera sur desrecommandations fortes, susceptib<strong>le</strong>s dʼinscrire <strong>le</strong>s relations civilo-militairesdans un cyc<strong>le</strong> dynamique dʼéchanges, synonyme de paix, de stabilité et deprospérité <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest.Je vous remercie de votre aimab<strong>le</strong> attention.10


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouverture1.2 Introduction au Colloque par Madame <strong>le</strong> Professeur Amsatou SowSIDIBE, Présidente de la commission scientifiqueRésumé : In her introduction to the colloquium, Mrs. Professor Amsatou SowSIDIBE notices that today, the sacredness of the human being is now the focusof all preoccupations. For instance, recent changes have brought new chal<strong>le</strong>ngesin social, economic, environmental and political issues, <strong>le</strong>ading to new underlyingobjectives of all miss ions of security and defence forces. From now on, the forceswill take a part in the responsibility of guarantee ing the global security of individuals,formerly known as „human security“. Today they must guarantee the mattersof civil, political and economical rights, but also social and cultural rights andthe so-cal<strong>le</strong>d rights of solidarity. In her speech, Professor SIDIBE names threeessential e<strong>le</strong>ments that should be unified for the new orientation of the forces ofsecurity and defence: know<strong>le</strong>dge, know-how and self-confidence, which alltogether <strong>le</strong>ad to a stab<strong>le</strong> attitude towards new missions. She also states that ethicmatters and human rights should be the basic fundament of the civil- militaryrelationship and that these common values should always be taught to the youngergeneration. Finally, she calls to continue this process of taking the armedforces out of the caserns to participate in future developments, the research of theefficiency of human rights and the basic matters of freedom.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARExcel<strong>le</strong>nce, Monsieur <strong>le</strong> Président de la RépubliqueMesdames, Messieurs, Honorab<strong>le</strong>s invitésLa sacralité de la personne humaine met aujourdʼhui lʼhomme au centre despréoccupations. Cette évolution est à lʼorigine de mutations observées chez diversacteurs qui, aujourdʼhui, font face à de nouveaux défis économiques, sociaux,alimentaires, environnementaux, politiques etc…. Cʼest dans ce contexte que <strong>le</strong>sforces de défense et de sécurité (armée, gendarmerie, police, et autres forcesparamilitaires) naguère confinées dans <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> traditionnel de défense et deprotection du territoire national, celui dʼun Etat allié, ou de sa population, doiventadopter une nouvel<strong>le</strong> posture dans lʼaccomplissement de <strong>le</strong>ur mission régalienne.Désormais, <strong>le</strong>s forces de défenses et de sécurité sont impliquées dans lasécurité globa<strong>le</strong> des individus, autrement appelée sécurité humaine. En tantquʼactrices, <strong>le</strong>s forces de défenses et de sécurité sont invitées à garantir laréalité des droits civils et politiques, des droits économiques, sociaux etculturels, des droits dits de solidarité, à savoir <strong>le</strong> développement, <strong>le</strong> droit à unenvironnement sain, la paix.Dès 1994, <strong>le</strong> rapport mondial sur <strong>le</strong> développement humain soulignait que <strong>le</strong>temps était venu de passer dʼune conception de la sécurité en termes deconflits entre <strong>le</strong>s pays au sujet de <strong>le</strong>ur intégrité territoria<strong>le</strong>, à une conceptionqui prenne en compte lʼinsécurité qui naît des inquiétudes de la vie quotidienne<strong>pour</strong> la plupart des habitants du monde confrontés aux vio<strong>le</strong>nces, à lafaim, aux maladies, à la détérioration de lʼenvironnement etc…Le même souci est observé dans lʼespace CEDEAO où <strong>le</strong> projet de code deconduite <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Forces Armées et services de sécurité des Etats membres,sʼattè<strong>le</strong> à mettre fin aux rapports conflictuels entre <strong>le</strong>s civils et <strong>le</strong>s forcesarmées et servies de sécurité, dans un environnement démocratique, desécurité des personnes et des biens, de paix et de stabilité.Ce projet de code de conduite réaffirme lʼattachement des forces de défenseet de sécurité aux principes de la démocratie, des droits humains, tels quedéfinis par la Charte des Nations Unies, la Déclaration Universel<strong>le</strong> des droitshumains de 1948 et la Charte Africaine des droits de lʼHomme et des Peup<strong>le</strong>s.COMPOSITION DE LA COMMISSIONSCIENTIFIQUE DU COLLOQUEPrésidente : Madame <strong>le</strong> ProfesseurAmsatou Sow SIDIBE, Présidente delʼInstitut des Droits de lʼHomme et de laPaix (IDHP- UCAD)Vice Président : Colonel (e.r.) ManfredRosenberger, <strong>Fondation</strong> <strong>Char<strong>le</strong>s</strong>Leopold <strong>Mayer</strong>, FPHMembres : Colonel Meissa NIANG,Ministere des Forces ArméesColonel Moctar SOW, Gendarmerienationa<strong>le</strong>Colonel (ER) Tidiane DIOP, IDHPLt Colonel Mbaye CISSE, EMGAStephan GEHROLD, <strong>Fondation</strong>Konrad AdenauerDjibril Badiane, ONDHFatou Kama Marone, RADDHOOuppa D. LOPPY, AMNESTYINTERNATIONALIbrahima TOUNKARA, CICRAmadou Oury BA, Faculté de Lettreset Sciences humaines de lʼUCADBabacar DIALLO, Directeur duCentre dʼEtudes Diplomatiques etStratégiquesDentiste Lt Colonel Pape MousséNDIAYE, EMGA.Commandant Jean S. BIAGUI, MFA11


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineUn déplacement de lʼattention des forces de défense et de sécurité, de lʼEtat,vers <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>s, est ainsi souhaité car la sécurité des droits humains et deslibertés fondamenta<strong>le</strong>s est une condition de paix, de développement et dʼépanouissementdes personnes.Au demeurant, <strong>le</strong> concept de forces de défense et de sécurité –Nation impliqueune projection des forces de défense et de sécurité vers des activitésconsacrées au bien être des populations.Cʼest donc une obligation de protéger qui pèse sur <strong>le</strong>s forces de défense etde sécurité. Cette obligation, traduite en terme de responsabilité, est sansdoute politique et mora<strong>le</strong>. Mais il serait intéressant de sʼinterroger sur uneéventuel<strong>le</strong> responsabilité juridique, <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité étantlʼémanation de lʼEtat, principal acteur de la réalisation des droits humains etdes libertés fondamenta<strong>le</strong>s.Excel<strong>le</strong>nce, Monsieur <strong>le</strong> Président de la République, Mesdames, Messieurs,La nouvel<strong>le</strong> orientation de lʼaction des forces de défense et de sécurité supposela réunion de trois éléments essentiels : <strong>le</strong> savoir, <strong>le</strong> savoir faire et <strong>le</strong> savoirêtre qui confèrent une aptitude à faire face aux niveaux défis. Sʼagissantdu premier point, <strong>le</strong> savoir, nous ne pouvons quʼêtre fiers de nos forces dedéfense et de sécurité dont <strong>le</strong>s connaissances et la culture généra<strong>le</strong> ne sontplus à démontrer. Mais la nouvel<strong>le</strong> orientation nécessite aussi un savoir faireet un savoir être. A ce niveau aussi, nul doute que nos forces de défense etde sécurité connus <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur esprit et <strong>le</strong>ur comportement républicains, sontdes exemp<strong>le</strong>s surtout <strong>pour</strong> la jeunesse. Simp<strong>le</strong>ment, la perfection, dit-onhabituel<strong>le</strong>ment, nʼest pas de ce monde. El<strong>le</strong> est une quête permanente. Il nʼestsans doute pas inuti<strong>le</strong> de rappe<strong>le</strong>r lʼimportance de va<strong>le</strong>urs tel<strong>le</strong>s que lʼéthique,la déontologie, <strong>le</strong> respect de la dignité humaine, de lʼintégrité corporel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>refus de la corruption, etc… Le rapprochement entre civils et militaires induitnécessairement à la fois un renforcement de capacités, en particulier enmatière de droits humains, et <strong>le</strong> respect de codes de conduite. Nous nousfélicitons de ce que se souci soit déjà pris en compte par <strong>le</strong>s autorités militairesqui envoient des cadres des forces de défense et de sécurité suivre desenseignements à lʼInstitut des Droits de lʼHomme et de la Paix que jʼai lʼhonneurde diriger. La formation est une condition nécessaire <strong>pour</strong> la réussite dela mission des forces de défense et de sécurité.Mais lʼefficience de la mission des forces de défense et de sécurité dépendaussi de la prise en compte de lʼéquilibre des genres, en particulier en appliquantla résolution 1325 des Nations Unies, qui demande aux Etats dʼimpliquerau plus haut niveau, <strong>le</strong>s femmes dans la prévention, la résolution des conflitset la consolidation de la paix. Un effort a été fait par nos forces de défense etde sécurité avec lʼintégration de femmes dans toutes <strong>le</strong>s composantes de cesforces. Seu<strong>le</strong>ment cet effort mérite dʼêtre <strong>pour</strong>suivi quantitativement et qualitativementen mettant <strong>le</strong>s femmes aux instances décisionnel<strong>le</strong>s.12


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureExcel<strong>le</strong>nce Monsieur <strong>le</strong> Président de la République, Mesdames, Messieurs,Nous attendons de ce colloque des échanges fructueux sur <strong>le</strong>s relations entreForce de défense et de sécurité et <strong>le</strong>s populations civi<strong>le</strong>s. Lʼun des principauxrésultats attendus est <strong>le</strong> tracé des jalons, dʼun dialogue fécond, de relationsapaisées, dʼune confiance mutuel<strong>le</strong>, entre <strong>le</strong>s segments dʼune même entité :<strong>le</strong> peup<strong>le</strong>.Pour ce faire, trois thèmes seront débattus.Le premier thème : « Etat de droit et forces de sécurité et de défense » répondà deux préoccupations : cel<strong>le</strong> du « contrô<strong>le</strong> démocratique des armées » subordonnéesaux institutions civi<strong>le</strong>s et cel<strong>le</strong> de « maintien de lʼordre ». Cette secondequestion suscite un débat dʼidées entre forces de défense et de sécuritédʼune part et société civi<strong>le</strong> de lʼautre. Il sʼagit alors de savoir comment, par unjeu dʼéquilibre, préserver <strong>le</strong>s libertés individuel<strong>le</strong>s, va<strong>le</strong>urs essentiel<strong>le</strong> de larépublique, tout en évitant de bascu<strong>le</strong>r dans <strong>le</strong> désordre ou dans <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>sde la rue publique, synonyme de non-droit, de vio<strong>le</strong>nce, de chaos.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLe second grand thème du colloque « <strong>le</strong>s relations forces de défense et de sécurité-nation» sʼarticu<strong>le</strong> autour de deux idées. La première rappel<strong>le</strong> que lʼarméeest une émanation de la nation. Il est dès lors important de sʼinterrogersur lʼancrage des armées africaines, et sur <strong>le</strong>s voies et moyens <strong>pour</strong> instaurerdes relations apaisées entre forces de défense et de sécurité et populationscivi<strong>le</strong>s.Ces relations apaisées peuvent être facilitées par la contribution des forces dedéfense et de sécurité à la gestion des confits intra étatiques producteurs dedésastres humanitaires.Mais, sur <strong>le</strong> terrain, la présence dʼautres forces, particulièrement <strong>le</strong>s ONG,soulève la problématique dʼune cohabitation entre des corps dont lʼexpériencenʼest peut être pas identique. Le rô<strong>le</strong> de la coopération militaire internationa<strong>le</strong>sera bien entendu visité.Enfin, <strong>le</strong> troisième grand thème « la réforme du secteur de sécurité » présentelʼapproche globa<strong>le</strong> de la sécurité humaine, en repoussant <strong>le</strong>s frontières de lasécurité vers de nouveaux horizons et en la recentrant autour de lʼHomme. Ilsera question de faire une synthèse de la sécurité humaine, et dʼexplorer <strong>le</strong>svoies et moyens de sa matérialisation sur <strong>le</strong> terrain.En nous faisant lʼhonneur de présider la cérémonie officiel<strong>le</strong> de ce colloque,vous venez dʼinaugurer dʼune nouvel<strong>le</strong> ère dans lʼHistoire des forces de défenseet de sécurité implantées dans lʼespace CEDEAO. En <strong>le</strong>s invitant à évoluerau cœur de la sécurité humaine, vous <strong>le</strong>s exhorter à sortir de <strong>le</strong>urscasernes, <strong>pour</strong> ensemb<strong>le</strong> avec <strong>le</strong>s populations, participer non seu<strong>le</strong>ment auxefforts de développement, mais aussi de recherche de lʼeffectivité des droitshumains et des libertés fondamenta<strong>le</strong>s.Excel<strong>le</strong>nce Monsieur <strong>le</strong> Président de la République, Mesdames, Messieurs,Cet évènement fera date il car coïncide avec <strong>le</strong> cinquantenaire de notre accessionà la souveraineté internationa<strong>le</strong>.Je vous remercie de votre aimab<strong>le</strong> attention.Madame AMSATOU SOW SIDIBEest professeur titulaire des universités,agrégée en Droit, Directrice de lʼInstitut desDroits de lʼHomme et de la Paix à UniversitéCheikh-Anta-Diop de Dakar et présidentedu Mouvement Citoyen Car/Lenen.13


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine1.3 Allocution d’ouverture par Monsieur Said DJINNIT, ReprésentantSpécial du Secrétaire Général des Nations Unies <strong>pour</strong> l’Afrique de l’OuestLES FORCES DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ SONT AU CŒURDE LA SÉCURITÉ HUMAINERésumé : In his opening speech, Ambassador Said DJINNIT, High Representativeof the Secretary General of the United Nations in Western Africa, praises thewell-known ro<strong>le</strong> of the security and defence forces of Senegal, which was alwaysdesignated to the defence of the constitutional state and the values of the republic.But he also warns that the stability and welfare of the who<strong>le</strong> region of WesternAfrica has always been fragi<strong>le</strong> due to the political, economical and socialsituation of its different countries. He lines out the fact that several countries ofthe region suffer from political tensions during e<strong>le</strong>ctoral campaigns, such as GuineaBissau, Guinea, the Ivory Coast and Niger. Incontestably, the region has alsobeen very successful in different fields of activity. Many organisations have contributedto the protection of the individual rights, but even beyond that, to the differentaspects of these rights, like the political, physical, economic, alimentaryand sanitary situations. Concluding his speech, Ambassador DJINNIT stressesthat formation and education will be the basis for a good civil-military relationshipin the near future. To emphasize his statement, he names the examp<strong>le</strong> ofthe work done by the Peacekeeping School (EMP) in Bamako and the Kofi AnnanEducation Centre (KAIPTC) in Accra.Mesdames, Messieurs, Honorab<strong>le</strong>s invitésJe vous remercie de lʼhonneur qui mʼest fait de prendre part à cette cérémonieplacée sous <strong>le</strong> Haut patronage de Monsieur <strong>le</strong> Président de la République.Je suis heureux de participer à ce Forum consacré au rô<strong>le</strong> des Forces de Défenseet de sécurité dans la sécurité humaine et de souligner lʼengagementdes Nations Unies dans ce domaine.Mais permettez-moi, tout dʼabord, de me réjouir de ce que ce Forum se tiennedans ce pays où la paix et la stabilité qui font la fierté non seu<strong>le</strong>ment de toutes<strong>le</strong>s Sénégalaises et de tous <strong>le</strong>s Sénégalais mais éga<strong>le</strong>ment de tous <strong>le</strong>s africains,qui y sont attachés comme à un bien commun. Cʼest lʼoccasion <strong>pour</strong>moi de rendre un hommage mérité aux Forces de Défense et de Sécurité sénégalaises<strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur professionnalisme bien connu ainsi que <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur attachementà lʼEtat de droit et aux va<strong>le</strong>urs républicaines qui font dʼel<strong>le</strong>s unexemp<strong>le</strong> que nous souhaitons voir suivi ail<strong>le</strong>urs dans la sous-région et enAfrique. Cʼest aussi <strong>le</strong> lieu dʼexprimer à Monsieur <strong>le</strong> Président de la République,au nom des Nations Unies, toute notre appréciation et notre gratitude<strong>pour</strong> la contribution inestimab<strong>le</strong> de ses Forces de Défense et de Sécurité aumaintien de la paix en Afrique et dans <strong>le</strong> monde.Le Forum qui nous rassemb<strong>le</strong> aujourdʼhui se tient alors que lʼAfrique delʼOuest demeure une source de préoccupation compte tenu de la fragilité dela situation politique, économique et socia<strong>le</strong> de ses pays, avec <strong>le</strong>s risquesquʼel<strong>le</strong> représente <strong>pour</strong> la paix, la sécurité et la stabilité régiona<strong>le</strong>. En effet, lasous-région nʼa pas été épargnée par des incidents de vio<strong>le</strong>nce qui ont malheureusemententrainé des violations graves des droits de lʼhomme et en particulier,des vio<strong>le</strong>nces faites aux femmes.Comme vous <strong>le</strong> savez, des pays de la sous-région traversent actuel<strong>le</strong>ment desmoments de tension liée en particulier à la compétition é<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>. Les Forcesde Défense et de Sécurité qui se trouvent au cœur de ces tensions, ont un rô<strong>le</strong>déterminant dans lʼissue de ces crises. Je pense notamment à la Guinée Bissauet la Guinée, voisines du Sénégal, ainsi quʼà la Côte dʼIvoire et au Niger.14


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureNos vœux fervents accompagnent <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s dirigeants de la Guinée au<strong>le</strong>ndemain du deuxième tour de lʼé<strong>le</strong>ction présidentiel<strong>le</strong> ainsi que ceux de laCôte dʼIvoire qui se prépare au deuxième tour de lʼé<strong>le</strong>ction présidentiel<strong>le</strong>.Je saisis cette occasion <strong>pour</strong> réitérer mes félicitations au peup<strong>le</strong> et aux dirigeantsguinéens <strong>pour</strong> la tenue du scrutin du 7 novembre dans des conditionspacifiques. Je <strong>le</strong>s exhorte, une fois de plus, au nom des Nations Unies, à restercalme et sereins dans lʼattente de la proclamation des résultats provisoirespar la Commission E<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong> Nationa<strong>le</strong> Indépendante et des résultats définitifspar la Cour suprême. Je réitère éga<strong>le</strong>ment lʼappel lancé par la communauté internationa<strong>le</strong>aux Forces de Défense et de Sécurité de Guinée <strong>pour</strong> quʼel<strong>le</strong>s sʼacquittentde <strong>le</strong>ur mission de sécurisation du processus é<strong>le</strong>ctoral, conformémentaux directives données par <strong>le</strong> Président de la transition lors de son discours àla nation du 6 novembre 2010, dans <strong>le</strong> respect des droits humains.Mesdames et Messieurs,Nul doute que lʼAfrique de lʼOuest a enregistré des succès remarquab<strong>le</strong>s aucours des dernières années dans bien des domaines, notamment en matièrede paix et de sécurité. Néanmoins, ces progrès méritent dʼêtre pérennisés parlʼéradication des causes profondes des crises et conflits dans la sous-région<strong>pour</strong> éviter que des soubresauts périodiques ne se transforment en instabilitéchronique.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARUn des défis a re<strong>le</strong>ver <strong>pour</strong> parvenir à consolider <strong>le</strong>s acquis en matière depaix et de sécurité sera de veil<strong>le</strong>r à ce que <strong>le</strong>s missions des Forces de Défenseet de Sécurité prennent davantage en compte la sécurité et la protectiondes citoyens comme un impératif catégorique et assumenteffectivement <strong>le</strong> respect et la protection des droits de lʼhomme, avec son corollairequi est lʼégalité du genre.Des efforts remarquab<strong>le</strong>s ont été faits dans la plupart des pays dʼAfrique delʼOuest, où <strong>le</strong>s défenseurs des droits de lʼhomme se battent au quotidien <strong>pour</strong>promouvoir lʼémergence dʼun environnement axé autour de la sauvegardedes droits de la personne dans tous <strong>le</strong>s domaines, non seu<strong>le</strong>ment politique etphysique, mais aussi économique, alimentaire et sanitaire. Cependant, ceconcept de la sécurité humaine est battu en brèche par la précarité de la situationpolitique, socia<strong>le</strong>, économique et environnementa<strong>le</strong> des pays de lasous-région. Il est éga<strong>le</strong>ment mis à mal par des incidents de vio<strong>le</strong>nce où <strong>le</strong>sForces de Défense et de Sécurité se sont, bien souvent, illustrées par descomportements irresponsab<strong>le</strong>s et contraires aux va<strong>le</strong>urs essentiel<strong>le</strong>s de <strong>le</strong>urcorps dʼorigine. Cette région, peut-être plus que toute autre région du continent,a besoin dʼinitiatives <strong>pour</strong> promouvoir la sécurité humaine, y compris àtravers une réforme profonde du secteur de défense et de sécurité dans <strong>le</strong>spays concernés. LʼOrganisation des Nations Unies <strong>pour</strong> sa part, est déterminéeà se joindre aux organisations sous-régiona<strong>le</strong>s, notamment la CEDEAO,<strong>pour</strong> soutenir toutes <strong>le</strong>s initiatives qui peuvent être prises dans ce sens.Dans cette perspective, il est évident quʼil conviendra dʼétablir un cadre stratégiqueet normatif <strong>pour</strong> guider <strong>le</strong>s réformes nécessaires. A cet égard, je tiensà saluer <strong>le</strong> travail entrepris depuis plus dʼun an par la CEDEAO <strong>pour</strong> élaborerun cadre politique régional en matière de gouvernance du secteur de lasécurité. Les Nations Unies sont prêtes à soutenir la Commission de laCEDEAO en vue de finaliser ce cadre et son Plan dʼAction. Les Nations Uniessont éga<strong>le</strong>ment à la disposition des Etats <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s aider à initier et mettre enœuvre une tel<strong>le</strong> reforme en valorisant des modè<strong>le</strong>s endogènes de lʼAfrique delʼouest <strong>pour</strong> guider <strong>le</strong>s transformations nécessaires du secteur de la sécurité,15


PREMIÈRE PARTIE : Séance so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> d’ouvertureColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainedans <strong>le</strong> respect de la sécurité humaine. Je voudrais citer ici lʼexemp<strong>le</strong> récentde la Mission conjointe CEDEAO/UA/ONU dʼévaluation du secteur de lasécurité en Guinée, dirigée par <strong>le</strong> Général Lamine Cissé, qui a soumis unrapport qui a été validé par <strong>le</strong>s différentes instances du pays.Ce rapport a été présenté au Président de la transition, <strong>le</strong> Général Konaté, <strong>le</strong>4 mai à Conakry et constitue désormais la base de lʼengagement de laréforme du secteur de la sécurité en Guinée dans <strong>le</strong>s semaines et <strong>le</strong>s mois àvenir, avec <strong>le</strong> soutien de la communauté internationa<strong>le</strong>. Ce cadre prévoit, entreautres, un vo<strong>le</strong>t sur <strong>le</strong> dialogue civilo-militaire qui est une dimension importantede lʼœuvre de réconciliation en Guinée.Les Nations Unies sont éga<strong>le</strong>ment disposées à appuyer <strong>le</strong>s efforts visant àconcevoir et à mettre en œuvre un cursus de formation des Forces de Défenseet de sécurité. Les Eco<strong>le</strong>s assurant lʼinstruction des forces destinées aux opérationsmultinationa<strong>le</strong>s de paix, en particulier lʼEco<strong>le</strong> de Maintien de la Paix(lʼEMP) à Bamako et <strong>le</strong> Centre de formation Kofi Annan sur <strong>le</strong>s Opérations demaintien de la paix (KAIPTC) à Accra, <strong>pour</strong>raient contribuer à mener cetteaction de formation en inscrivant ces modu<strong>le</strong>s comme une des priorités de<strong>le</strong>urs programmes dʼenseignement.Permettez-moi de conclure en félicitant <strong>le</strong>s initiateurs de ce Forum. Grâce àla qualité des intervenants retenus, à lʼexpérience remarquab<strong>le</strong> des cadresmilitaires et civils du Sénégal, je ne doute pas que ces assises conduiront àune redéfinition du dialogue entre citoyens et Forces de Défense et de Sécuritédans lʼAfrique de lʼouest en particulier. Je tiens à remercier <strong>le</strong>s autorités duSénégal <strong>pour</strong> avoir accepté dʼaccueillir cette rencontre dans une atmosphèrehospitalière et cha<strong>le</strong>ureuse qui est si caractéristique de ce pays.Je vous remercie de votre attention.SAID DJINNITAmbassadeur, de nationalité algérien -ne, a été nommé en février 2008 par<strong>le</strong> Secrétaire Général des NationsUnies Ban Ki-moon comme son ReprésentantSpécial et Chef du Bureau<strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest (UNOWA).Avant cette nomination il a occupé <strong>le</strong>sfonctions de Commissaire de lʼUnionafricaine <strong>pour</strong> la paix et la sécurité. Il aéga<strong>le</strong>ment travaillé à différents niveauxau sein de lʼOrganisation de lʼUnité africaine(maintenant Union afri caine),notamment comme Secrétaire généraladjoint aux Affaires politiques.16


DEUXIÈME PARTIEInterventions en séancesplénièresSÉANCE PLÉNIÈRE N° ILundi 8 novembre 2010 - Après-midiThème de la séance :État de Droit et Forces de Sécurité et de DéfensePANEL 1 « <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratique des armées »2.1 Intervention du Dr. Alain FOGUE TEDOM, Directeur CAPED,CamerounForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARRésumé : The intervention of Dr. Alain FOGUE TEDOM with the tit<strong>le</strong> “From thedifficulty of a start of application of the parliamentary control of the Forcesof Defence and Security in sub-Saharan Africa” is structured into three parts.The first part treats the deep political changes that will have to take place in orderto prepare a possib<strong>le</strong> control by the parliaments. The second part is dedicated tothe interdependence between democracy and the construction of a true peace inAfrica, whi<strong>le</strong> the third part focuses on the parliamentary control as a mortgage ofdemocratic transparency in matters of security.In his intervention, Dr. Alain FOGUE TEDOM ref<strong>le</strong>cts about the impact of the nationaldysfunctions of the African mind set in matters of security and peace, as wellas on the hegemony of armed forces in political business as source of insecurity.He also analyses the prob<strong>le</strong>ms of African armies in general. He lines out that democracyis the fundamental e<strong>le</strong>ment of an efficient and enduring peace and talksabout the major ro<strong>le</strong> that the African Union should play during this process. Finally,he characterises the different components that are needed for a successful politicaltransition towards a strong parliament enab<strong>le</strong>d to control the armed forces,such as the influence of the political will, the constitutional and <strong>le</strong>gal tools andalso basic e<strong>le</strong>ments like human resources.IntroductionLe contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire des Forces de Défenses et de Sécurité est un indicateurpertinent du niveau de démocratisation dans un Etat. Aujourdʼhui enAfrique, et notamment en Afrique sub-saharienne, malgré deux décennies deprocessus démocratique, en raison de la trajectoire historique et politique despays de cette région, cette pratique peine encore à entrer dans <strong>le</strong>s mœurs.Après avoir exposé <strong>le</strong>s raisons du retard des Etats africains au sud du Saharaà sʼapproprier <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire des FDS (I), cette étude démontrelʼinterdépendance entre démocratie et construction dʼune paix véritab<strong>le</strong> enAfrique (II) avant de rappe<strong>le</strong>r que cette pratique politique est un gage de latransparence démocratique dans <strong>le</strong>s questions de sécurité (III).I. Des mutations politiques profondes à opérerLʼurgence des mutations politiques à opérer <strong>pour</strong> parvenir à une gestion transparentedu secteur de la sécurité en Afrique se mesure à lʼaune des ma<strong>le</strong>ntendus17


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine1Voir CONAC (Gérard), «Portrait du chef delʼEtat », in Pouvoirs n°25, Paris, 1983. pp.121–130.2Voir <strong>le</strong> commentaire de Jean GICQUEL sur laConstitution camerounaise du 2 juin 1972, inDroit constitutionnel et institutions politiques,1987. pp. 47–472.3Ce constat est vérifiab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> cas duCameroun. La Constitution du 2 juin 1972consacre au président, au côté duquellʼAssemblée nationa<strong>le</strong> nʼest quʼun instrument,<strong>le</strong> primat de toute la vie politique du pays.Lʼapplication de cette Constitution a fait deson initiateur, <strong>le</strong> Président Ahmadou AHIDJO,un despote.Voir GAILLARD (Philippe), Ahmadou AHIDJO,Patriote et despote, bâtisseur de lʼEtatcamerounais ; JA livres, Col. Destin, Paris,1994, 255p.4Voir - CONAC (Gérard), dir., LʼAfrique en transitionvers <strong>le</strong> pluralisme politique, Paris, Economica,1993, 516p ;« Afrique : chef dʼEtat : un métier à risque, unetrentaine de dirigeants tués en quarante ans», in LʼAutre Afrique n°84 du 28 avril au 4 mai1999, 10–17.5Au Cameroun par exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Ordonnancesde mars 1962 autorisaient la détention administrativeillimitée <strong>pour</strong> propagation de faussesnouvel<strong>le</strong>s et commentaires tendancieux ; ilspermettaient aux tribunaux militaires de sesaisir des affaires politiques. Cf. PhilippeGAILLARD, Ahmadou Ahidjo, Patriote etdespote, bâtisseur de lʼEtat camerounais,Jalivres, CoL. Destins, Paris, 1994, 255p.et susceptibilités engendrés autour de cette question sensib<strong>le</strong> par <strong>le</strong>s dysfonctionnementsde lʼEtat (A). Afin que ces mutations permettent effectivementdʼaboutir à un contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire des Forces de Défense et deSécurité (FDS) efficace et transparent, el<strong>le</strong>s doivent prendre en compte laréf<strong>le</strong>xion sur lʼarmée et la problématique de la paix en Afrique (B).A : L’impact des dysfonctionnements étatiques sur la pensée africaine enmatière de sécuritéCertes, comme plusieurs autres organisations internationa<strong>le</strong>s, lʼUnion Africaineest parvenue à la conclusion sans équivoque selon laquel<strong>le</strong>, cʼest <strong>le</strong> déficitdémocratique qui empêche la construction dʼune paix véritab<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> continent.Cependant, il importe que ses Etats membres sʼapproprient cette conclusion etla matérialise. Ceci passe par des mutations politiques de fond. Lʼhistoire politiquede lʼAfrique et notamment cel<strong>le</strong> du rapport de ses systèmes de gouvernementavec la pratique effective de la démocratie, démontre que de tel<strong>le</strong>smutations devront être portées par une volonté politique réformatrice forte.+ Une structuration du pouvoir à revoirAu <strong>le</strong>ndemain de lʼinterruption bruta<strong>le</strong> du pluralisme politique et de lʼexpériencedémocratique en Afrique dans <strong>le</strong>s années 1970, la plupart des jeunesEtats africains adoptent <strong>le</strong> présidentialisme comme système politique. Leprésidentialisme africain organise de façon pyramida<strong>le</strong> <strong>le</strong> pouvoir. Il fait dupouvoir exécutif, et surtout du président, <strong>le</strong> centre de gravité de toute la viepublique. Généra<strong>le</strong>ment confondu au système politique lui–même 1 , <strong>le</strong> chef delʼEtat jouit en Afrique dʼune liberté constitutionnel<strong>le</strong> 2 et politique qui lʼincite audespotisme 3 . En lʼabsence de démocratie et donc de toute perspectivedʼalternance politique démocratique, ce dernier, constitutionnel<strong>le</strong>ment, seulvéritab<strong>le</strong> détenteur de tous <strong>le</strong>s pouvoirs, devient la principa<strong>le</strong> cib<strong>le</strong> de tous <strong>le</strong>sconspirateurs. Cʼest, entre autres raisons, <strong>pour</strong> conjurer ce destin tragique duprésident africain 4 que la plupart des régimes africains vont reprendre à <strong>le</strong>urcompte la politique sécuritaire déjà mise en œuvre sous lʼadministrationcolonia<strong>le</strong>.Persuadés de la difficulté, voire de lʼimpossibilité de parvenir au pouvoir à lasuite dʼune alternance politique démocratique, certains adversaires politiquesdu président africain, <strong>le</strong>s plus résolus, vont se convaincre que seu<strong>le</strong> une prisedu pouvoir par <strong>le</strong>s armes peut mettre un terme à son régime. De son côté, enpermanence sous la menace dʼun coup dʼEtat, celui-ci va sʼenfermer dansune attitude défensive, incompatib<strong>le</strong> avec <strong>le</strong> débat public sur la sécuriténationa<strong>le</strong>. Cʼest cette attitude qui explique la dérive sécuritaire des régimesafricains qui aboutit à la confusion quʼils entretiennent entre <strong>le</strong>ur surviepolitique et la sécurité de lʼEtat. Le résultat de cette situation a conduit àl'élaboration d'arsenaux juridiques liberticides 5 derrière <strong>le</strong>squels ces régimestentent de se réfugier.+ Pondérer <strong>le</strong> pouvoir monarchique du président en matière de sécuritéArmé dʼarsenaux politico–juridiques assez dissuasifs, <strong>le</strong> président africain estparvenu à se réserver <strong>le</strong>s prérogatives sur <strong>le</strong>s questions de sécurité. Aidé parquelques-uns de ses très proches collaborateurs, avec <strong>le</strong> concours et lʼassistancetechnique de la puissance ou des puissances étrangères qui exercentune certaine tutel<strong>le</strong> politique sur son pouvoir, il organise seul et arrête de façonautoritaire <strong>le</strong>s contours de la sécurité nationa<strong>le</strong>.La sécurité nationa<strong>le</strong> repose en principe sur deux piliers : <strong>le</strong> maintien de lʼordreet la protection des libertés individuel<strong>le</strong>s. Aussi, était – il hasardeux <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s18


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresrégimes africains à la légitimité politique contestée, de laisser se développerautour de ce sujet très sensib<strong>le</strong> un débat public démocratique. Un tel débatrisque, en effet, de mettre à jour <strong>le</strong>urs insuffisances démocratiques et doncde <strong>le</strong>s fragiliser.Tout pouvoir qui ne jouit pas dʼune réel<strong>le</strong> légitimité politique, et qui nʼincarnepas la volonté populaire exprimée librement par des moyens démocratiques,est contraint de réduire son action politique à sa propre survie. Pris dans unelogique sécuritaire, il recourt fréquemment à lʼintimidation et à la répressionpolitique <strong>pour</strong> étouffer toute velléité contestataire et soumettre ses adversaires.Lʼinconvénient de cette dérive autoritaire est que, paradoxa<strong>le</strong>ment, laterreur et la peur quʼel<strong>le</strong> répand, loin de susciter lʼadhésion, renforcent plutôtla défiance et persuadent ses adversaires politiques que, seul <strong>le</strong> recours auxarmes peut conduire à lʼalternance. Cʼest ce que démontrent lʼexamen deconflits politiques africains récents tels, <strong>le</strong> drame rwandais de 1994 6 et lachute, en mai 1997, du régime zaïrois 7 etc.B : L’armée et la problématique de la paix en AfriqueEn raison de la trajectoire historique des Etats africains qui vient dʼêtreprésentée, de son impact sur la structuration du pouvoir au profit de lʼexécutifet notamment du président, lʼinsuffisance de légitimité politique de cedernier et de lʼadoption dʼun mode de gouvernement non démocratique, entrelʼexécutif, et plus précisément son chef, et lʼarmée, il sʼest instauré une relationqui a dévoyé cette dernière.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR+ L’hégémonie militaire dans <strong>le</strong> champ politique est source d’insécuritéDans <strong>le</strong>s réf<strong>le</strong>xions sur la paix en Afrique lʼon a tendance à conférer, sansaucun regard critique, aux armées africaines un rô<strong>le</strong> nob<strong>le</strong>, constructif. Ladynamique internationa<strong>le</strong> autour de la création dʼune capacité africaine demaintien de la paix démarrée en novembre 1995 avec la publication du rapportdu Secrétaire des Nations Unies intitulé « Amélioration de la capacité deprévention des conflits et du maintien de la paix en Afrique 8 » conforte cettethèse. Pourtant, en raison des pratiques de certaines dʼentre el<strong>le</strong>s, dans denombreux cas, el<strong>le</strong>s constituent une des causes importantes de lʼinsécuritésur ce continent. En effet, <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> négatif des armées africaines dans <strong>le</strong> développementde lʼinsécurité nʼest pas toujours assez souligné 9 .Dans un Etat moderne, lʼarmée est soumise aux lois ; el<strong>le</strong> se caractérise parsa discipline et sa neutralité politique. El<strong>le</strong> y est placée sous lʼautorité deresponsab<strong>le</strong>s jouissant de la légitimité politique. El<strong>le</strong> a <strong>pour</strong> rô<strong>le</strong> essentiel ladéfense du territoire national et la protection des citoyens contre <strong>le</strong>séventuel<strong>le</strong>s agressions extérieures. Dans la plupart des Etats africains parcontre, en raison dʼune histoire politique agitée qui a conduit pendant plusieursdécennies à lʼinstauration du monopartisme et des régimes autoritaires,nombreuses sont <strong>le</strong>s armées qui en raison de <strong>le</strong>ur imbrication avec <strong>le</strong>srégimes politiques nʼont pas bien compris <strong>le</strong>urs missions.En effet, à force dʼêtre sollicitée par des régimes en manque de légitimitépolitique <strong>pour</strong> assurer <strong>le</strong>ur survie, en Afrique, lʼarmée a fini par être dévoyée 10 .El<strong>le</strong> y est confinée dans des tâches de maintien de lʼordre. Il arrive aussiquʼel<strong>le</strong> soit chargée de la police politique du pouvoir.Pour pallier <strong>le</strong>ur insuffisante légitimité politique, de nombreux régimes civilsafricains ont laissé lʼhégémonie militaire sʼenraciner dans la gestion desaffaires publiques. Une alliance objective sʼest en effet instaurée entre eux et<strong>le</strong>s militaires <strong>pour</strong> la conservation du pouvoir. La multiplication de coups6Voir « La tragédie du Rwanda », in Problèmespolitiques et sociaux n° 752, La DocumentationFrançaise, 28 juil<strong>le</strong>t 1995, 78p.7Voir NʼGANDA N. K. A (Honoré), Ainsi sonne <strong>le</strong> glas! Les derniers jours du maréchal MOBUTU, Paris,Gideppe, 1998, 447p.8Cité par Anato<strong>le</strong> AYISSI N., « Agenda <strong>pour</strong> ladiplomatie préventive en Afrique. Réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>projet dʼune force permanente sous – régiona<strong>le</strong> demaintien de la paix» in Sécurité et stratégie n°54,Institut Roya<strong>le</strong> Supérieur de Défense, Bruxel<strong>le</strong>s,Centre dʼEtudes de Défense, septembre 1997,Bruxel<strong>le</strong>s, p. 14.9Voir : - BANGOURA (Dominique), « Le facteur militaireet la sécurité en Afrique : un problème national,régional et international » De 1960 à nos jours.Thèse de Doctorat dʼEtat en Science politiqueoption Défense soutenue en octobre 1987 àlʼuniversité de Strasbourg III sous la Direction duProfesseur Yves JEANCLOS, 429p ;+ « lʼAfrique otage des militaires »,in LʼAutre Afrique n°67, du 11 au 17 novembre1998, pp. 10 – 17 ;+ « Le Kivu au bord dʼune nouvel<strong>le</strong> explosion »,in LʼAutre Afrique n° 51 du 27 mai au 9 juin 1998,pp. 10 – 15 ;+ « Quand la paix se fait aux dépens des civils »,in LʼAutre Afrique n°92 du 7 au 20 juil<strong>le</strong>t 1999, pp.10–19 ;+ « Côte dʼIvoire : Lʼordre kaki », in Jeune AfriqueEconomie n°317 du 2 au 15 octobre 2000,pp. 54–56.10Voir NʼGBANDA N (Honoré). Ainsi sonne <strong>le</strong> glas !Les derniers jours du maréchal Mobutu, Op. Cit.Pp. 42 – 66.11Voir GAUTRON (Jean-C), «La problématique descoups dʼEtat militaires », in Les Armées africaines,pp. 119 – 131.19


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine12Ibid.13BANGOURA (Dominique), «La collaboration entrecivils et militaires en régime civil et <strong>le</strong> problème desforces paramilitaires » in Les Armées africaines,Institut dʼEtudes Stratégiques, Paris, Economica,1986, pp. 103–110.14Voir - ATANGANA (Bruno), « La persistance descoups dʼEtats en Afrique sub- saharienne ;dynamique politiques et stratégiques desinterventions armées dans <strong>le</strong> jeu politique (1990-2010), Université de Yaoundé II, Soa, 2010, thèseen cours de rédaction, p3.+ KOUNOU (Michel), « Coups dʼEtat, régimesmilitaires et développement démocratique au suddu Sahara (de 1963 à 2004) : Bilan et perspectives», in Revue africaine dʼEtudes Politiques etStratégiques N°3, 2003, pp. 133 – 175.15Voir : - « Armées : nationa<strong>le</strong>s ou ethniques ? » inLʼAutre Afrique n°67, Op. Cit. Pp. 14–15 ;+ « Ange Félix PATASSE se confie au Messager », inMessager n° 1264 du 14 septembre 2001 ; etc+ Honoré NʼGBANDA, Les derniers jours dumaréchal Mobutu, Op. Cit. pp. 42 - 66 ;+ Co<strong>le</strong>tte BRAECMAN et al. Kabila prend <strong>le</strong> pouvoir,Les prémices dʼune chute – La campagnevictorieuse de lʼAFDL – Le Congo dʼaujourdʼhui,Bruxel<strong>le</strong>s, GRIP, Comp<strong>le</strong>xes, 180p ;+ François SOUDAN, «Cameroun : Biya et lʼarmée »in Jeune Afrique LʼIntelligent n° 2099 du 3 au 9 avril2001, pp. 10 – 12.16Ibid.17Voir Isidore NDAYWEL è NZIEM, «Du Congo desrebellions au Zaïre des pillages », in CahiersdʼEtudes africaines, 150–152, XXXVIII 2 – 4, 1998,pp. 417 – 439.18Voir VERSCHAVE (François-Xavier) «My taylor isrich », in La Françafrique, Le plus long scanda<strong>le</strong>de la République, Stock, 1998, p. 223.dʼEtats militaires 11 a permis une accélération du contrô<strong>le</strong> des militairesafricains sur <strong>le</strong> pouvoir politique. Dans ce contexte politique, lorsquʼel<strong>le</strong> nʼestpas el<strong>le</strong>- même au pouvoir, lʼarmée se met au service du régime civil aveczè<strong>le</strong>, y compris en semant la terreur parmi la population 12 . Devant ce pactenon républicain et antidémocratique unissant <strong>le</strong>s armées et <strong>le</strong>s pouvoirs enAfrique Noire, lʼopinion publique se trouve dans lʼincapacité dʼimposer démocratiquementses vues 13 .Un examen de lʼévolution politique des pays dʼAfrique Noire depuis 1960 ànos jours confirme cette hégémonie militaire sur la vie politique du continent.En effet, entre 1963 et 2010, <strong>le</strong> continent a connu environ 100 coups dʼEtatou tentatives de coups dʼEtat 14 . Un tel record laisse penser quʼen Afrique lavolonté des militaires structure la vie politique au même titre quʼun artic<strong>le</strong> dela Constitution dans un système démocratique.+ Les maux des armées africainesLa dérive ethniciste 15 , lʼaffairisme 16 , lʼindiscipline, <strong>le</strong> clientélisme et une tropforte politisation sont autant de maux dont souffrent <strong>le</strong>s armées africaines,<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s partagent en commun une indiscipline face à la déontologieprofessionnel<strong>le</strong>. Les scènes de pillages 17 auxquel<strong>le</strong>s el<strong>le</strong>s se livrent régulièrementtout comme <strong>le</strong>s rackets 18 quʼel<strong>le</strong>s pratiquent sur <strong>le</strong>s populations civi<strong>le</strong>saussi bien en temps de paix quʼen temps de guerre civi<strong>le</strong> confirment ce déficitde discipline. Placées en situation de conflits, el<strong>le</strong>s révè<strong>le</strong>nt un manque deformation, dʼencadrement 19 et surtout de moyens matériels.Cependant, dans <strong>le</strong> cadre dʼune réforme de fond, <strong>le</strong> défi majeur des arméesafricaines reste celui de la diffusion des va<strong>le</strong>urs Républicaines. La réussitedʼune tel<strong>le</strong> entreprise suppose que <strong>le</strong>s problèmes que soulèvent <strong>le</strong>s antagonismes,parfois artificiel<strong>le</strong>ment construits par <strong>le</strong> pouvoir politique, soient préalab<strong>le</strong>mentrésolus.Dans de nombreux pays du continent en effet, à force dʼêtre instrumentaliséepar <strong>le</strong>s dirigeants politiques, lʼarmée est parcourue par dʼinnombrab<strong>le</strong>sdivisions qui sont de nature clanique, ethnique ou politique. Néanmoins, <strong>le</strong>clivage ethnico–politique est celui qui a <strong>le</strong> plus dévoyé <strong>le</strong>s armées africaines.Il est à la base du développement de forces spécia<strong>le</strong>s paramilitaires dontlʼutilisation politique met constamment à lʼépreuve la dimension républicaineet nationa<strong>le</strong> des armées africaines. En effet, ces forces spécia<strong>le</strong>s, qui dans<strong>le</strong>urs pratiques assument <strong>le</strong> même rô<strong>le</strong> que celui dʼune police politique, sontgénéra<strong>le</strong>ment directement placées sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> politique, administratif etopérationnel du président. El<strong>le</strong>s sont mieux équipées, mieux payées quelʼensemb<strong>le</strong> des forces armées nationa<strong>le</strong>s et bénéficient dʼun meil<strong>le</strong>urencadrement. En retour, el<strong>le</strong>s sont entièrement au service du président, desa famil<strong>le</strong> et de son pouvoir. Leur existence et <strong>le</strong>urs missions, généra<strong>le</strong>mentfondées sur une autonomie dʼaction par rapport à la hiérarchie militaireinstitutionnel<strong>le</strong>, constituent un obstac<strong>le</strong> majeur <strong>pour</strong> <strong>le</strong> bon dérou<strong>le</strong>ment deprocessus démocratique en Afrique.En analysant la corrélation entre la politique sécuritaire et <strong>le</strong> développementdes gardes présidentiel<strong>le</strong>s dans de nombreux pays, on observe que cesforces spécia<strong>le</strong>s et paramilitaires qui sʼapparentent à des milices 20 , sʼestimentau-dessus des lois. El<strong>le</strong>s manifestent un excès de zè<strong>le</strong> dans la défense dupouvoir quʼel<strong>le</strong>s servent 21 .Les nombreux avantages financiers et matériels ainsi que la protectionpolitique dont jouissent ces forces sont à la base des frustrations de lʼarméenationa<strong>le</strong> dans de nombreux pays du continent. La modernité, même relative,de <strong>le</strong>urs moyens matériels contraste avec <strong>le</strong> délabrement, quelquefois20


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresorganisé par <strong>le</strong> pouvoir 22 , de lʼarmée. Cʼest cette situation antagonique qui acréé et entretenu la jalousie qui, dans <strong>le</strong> cas de la RCA par exemp<strong>le</strong>, a souventopposé <strong>le</strong>s forces spécia<strong>le</strong>s aux éléments de lʼarmée nationa<strong>le</strong> depuis 1963.Les mutineries qui ont agité ce pays entre 1996 et 1997, <strong>le</strong>s deux tentativesde coups dʼEtat des 28 mai et 2 novembre 2001, et du 25 octobre 2002 illustrentcette situation.II.De l’interdépendance entre démocratie et constructiond’une paix véritab<strong>le</strong> en AfriqueToute réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s possibilités dʼun contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire réel sur <strong>le</strong>s FSDqui ne reformu<strong>le</strong> pas la problématique de la paix (A) et nʼinterroge pas la placede la démocratie dans la construction de cel<strong>le</strong>- ci (B) est condamnée à ramerà contre courant mais surtout, à perpétuer des pratiques et des schémas dontdoit justement sʼéloigner <strong>le</strong> continent sʼil veut sʼarrimer à la modernité politiquesans laquel<strong>le</strong> son développement économique ne peut se réaliser.A : de la nécessité de reformu<strong>le</strong>r la problématique de la paix en AfriqueLa problématique de la sécurité est au cœur de tous <strong>le</strong>s débats sur lʼhistoirede lʼAfrique indépendante, de son niveau de développement et ses perspectivespolitiques, économiques, socia<strong>le</strong>s, diplomatique, culturel<strong>le</strong>s etc.En effet, à cause des innombrab<strong>le</strong>s conflits internes et de <strong>le</strong>urs conséquences,en termes de développement et de consolidation des institutions, qui jalonnentla laborieuse construction de ses Etats, depuis lʼavènement de lʼUnion Africaine(UA), il est apparu de façon claire que la problématique la plus structurante<strong>pour</strong> son insertion dans la modernité politique et économique est cel<strong>le</strong>relative à la sécurité.Plus dʼune décennie après lʼanalyse des dirigeants africains qui avait conduitau constat dʼéchec de lʼOrganisation de lʼUnité Africaine de lʼAfricaine (OUA)sur <strong>le</strong>s questions spécifiques de la sécurité et de la paix puis à la création delʼUA, malgré plusieurs initiatives sous régiona<strong>le</strong>s, régiona<strong>le</strong>s et internationa<strong>le</strong>s<strong>le</strong> continent africain connaît de nombreuses crises et conflits (la RDC, la RCA,<strong>le</strong> Niger, la Guinée etc.) qui continuent dʼhypothéquer son avenir.A lʼanalyse, il se dégage que la problématique de la sécurité et de la paix enAfrique est jusquʼici abordée dans <strong>le</strong>s conflits africains à partir dʼune hypothèsecontestab<strong>le</strong> 23 .Cette hypothèse postu<strong>le</strong> quʼen Afrique, la paix est un acquis qui ne demandequʼà être préservé. Ceci est faux car, la situation politique et socia<strong>le</strong> des Etatsafricains montre que, mis à part des cas exceptionnel<strong>le</strong>ment rares commecelui du Botswana, <strong>le</strong>s facteurs constitutifs dʼun environnement pacifique etpaisib<strong>le</strong> restent encore à réunir. Depuis <strong>le</strong>s indépendances africaines en effet,toutes <strong>le</strong>s réformes politiques, socia<strong>le</strong>s et économiques qui auraient pucontribuer à la construction de la paix en Afrique ont été sacrifiées sur lʼautelde la stabilité dictée par la défense des intérêts des anciennes puissancesimpéria<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s enjeux de la guerre froide. Ainsi, au lieu de construire dessociétés démocratiques, seu<strong>le</strong>s susceptib<strong>le</strong>s de favoriser lʼémergence dʼunenvironnement libre et pacifique, <strong>le</strong>s régimes africains ont plutôt fait <strong>le</strong> choixdʼappliquer une politique sécuritaire aux effets dévastateurs <strong>pour</strong> la paix.Dans sa conception et dans sa mise en application, cette politique a, dès <strong>le</strong>spremières années des indépendances africaines, été lʼœuvre aussi bien desresponsab<strong>le</strong>s politiques africains que des puissances occidenta<strong>le</strong>s 24 .Cette approche ignore ou occulte lʼimportance de la démocratie dans laconstruction de la paix et de la sécurité.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR19Lʼintervention des troupes de lʼECOMOG au Liberiaet en Sierra Leone a mis en lumière lʼaffairisme denombreux responsab<strong>le</strong>s militaires des payschargés de rétablir la paix dans ces deux pays. El<strong>le</strong>a aussi dévoilé <strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>sses de la capacitéopérationnel<strong>le</strong> des armées participantes àlʼopération. Que ce soit au Liberia ou en SierraLeone, on a vu des rebel<strong>le</strong>s sans véritab<strong>le</strong>formation ni entraînement mettre en difficulté <strong>le</strong>scasques blancs ouest - africains conduits par lapuissante armée nigériane.20Voir YENGO (Patrice), ««Chacun aura sa part » :Les fondements historiques de la (re)production dela «guerre» à Brazzavil<strong>le</strong> », in Cahiers dʼEtudesafricaines, 150 – 152, XXXVIII – 2 – 4, 1998, pp.471 – 503.21Nous pensons ici aux excès de la gardeprésidentiel<strong>le</strong> au Burkina Faso, à ceux de la DSPsous <strong>le</strong> régime MOBUTU au Zaïre etc.22Voir : - NʼGBANDA N. (Honoré), «Lʼarmée deMobutu », in Les Derniers jours du MaréchalMOBUTU, Op. Cit. PP. 42 – 59 ;+ BANGOURA (Dominique), «La collaboration entrecivils et militaire en régime civil et <strong>le</strong> problème desforces paramilitaires, in Les Armées africaines, Op.Cit. Pp. 109 – 110 ;+ PEAN (Pierre), «La garde présidentiel<strong>le</strong>», inAffaires africaines, Op. Cit. Pp. 150 – 165.23Alain FOGUE TEDOM, Enjeux géostratégiques etconflits politiques en Afrique Noire, Paris,LʼHarmattan, Col. Défense, Stratégie & RelationsInternationa<strong>le</strong>s, nov. 2008, pp.241 – 243.24Voir VERSCHAVE(François-Xavier), La françafrique,<strong>le</strong> plus long scanda<strong>le</strong> de la République, Paris,Stock, 1998, 379p ;+ Kamina une épine au cœur de lʼAfrique » in AfriqueAsie n°397, 6 au 19 avr 1987, pp. 14–19.21


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineB : La démocratie : <strong>le</strong> fondement d’une paix effective et durab<strong>le</strong>+ Une conception établieDès sa création en 1949, lʼOrganisation du Traité de lʼAtlantique Nord (OTAN)avait bien cerné lʼinterdépendance entre la démocratie et la construction de lapaix. Dès 1991, après la chute du mur de Berlin et lʼeffondrement du Pacte deVarsovie qui réunissait <strong>le</strong>s pays placés sous la tutel<strong>le</strong> de Moscou, face à lademande de plusieurs pays de lʼEurope Centra<strong>le</strong> et Orienta<strong>le</strong> qui souhaitentintégrer lʼorganisation, des exigences démocratiques sont brandies 25 .Lors de la signature de la « Charte de Paris » en octobre 1990, la Conférence<strong>pour</strong> la Sécurité en Europe (CSCE) <strong>le</strong>s trente quatre Etats européens présentsavaient à lʼunanimité proclamés lʼinteraction entre la démocratie et la constructionde la paix sur <strong>le</strong>ur continent. Après que cette structure ait changé dedénomination en 1994 <strong>pour</strong> devenir Organisation <strong>pour</strong> la Sécurité et la Coopérationen Europe (OSCE), <strong>le</strong>s dirigeants européens réunis au sommet deLisbonne <strong>le</strong>s 5 et 6 décembre 1996 ont une fois de plus réitéré cette analyse.Depuis 1995, dans ses conclusions au sujet de « la diplomatie préventive, larésolution des conflits et <strong>le</strong> maintien de la paix en Afrique » présentées à lasuite du rapport du Secrétaire Général des Nations Unies sur « Améliorationde la capacité de prévention des conflits et du maintien de la paix en Afrique»publié <strong>le</strong> 1 er novembre de la même année, <strong>le</strong> Conseil de lʼUnion Européenneétait parvenu à lʼanalyse suivante en quatre points 26 :– <strong>le</strong>s problèmes économiques ne suffisent pas à expliquer <strong>le</strong> développementdes conflits en Afrique;– il est nécessaire <strong>pour</strong> lʼUnion de «contribuer à la création (en Afrique)dʼEtats stab<strong>le</strong>s, pacifiques, démocratiques et prospères, respectueux desdroits de lʼhomme » ;– il existe une interdépendance entre Etats stab<strong>le</strong>s, démocratie, prospéritéet respect des droits de lʼhomme ;– la promotion de la démocratie et du respect des droits de lʼhomme nʼestpas incompatib<strong>le</strong> avec la recherche dʼun développement durab<strong>le</strong>.Au terme de cette analyse, lʼUnion Européenne (UE), constatait quʼen AfriqueNoire, <strong>le</strong>s exigences démocratiques indispensab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> la constructiondʼEtats stab<strong>le</strong>s, prospères et pacifiques ont toujours été sacrifiées sur lʼautelde la stabilité économique et politique. Pour el<strong>le</strong> cette situation explique <strong>le</strong>sdérives autoritaires, lʼinexistence de lʼEtat de droit et lʼabsence dʼalternancepolitique pacifique quʼon déplore fréquemment dans <strong>le</strong>s pays africains et quientretiennent la pandémie des conflits.+ L’option démocratique l’Union AfricaineLʼ«Acte» qui crée lʼU.A. <strong>pour</strong>suit plusieurs objectifs dont <strong>le</strong>s principaux restentla lutte contre lʼinsécurité et la recherche de la stabilité politique et économiquedu continent. Son examen montre que <strong>le</strong>s dirigeants africains reconnaissentenfin que sans la démocratisation du continent, <strong>le</strong>urs efforts de développementtant économique que social sont dʼavance voués à lʼéchec.25La situation politique particulière de la Turquie nefragilise pas cette analyse.26Cf. - Conseil, lʼUnion Européenne et <strong>le</strong> problèmedes conflits africains : <strong>le</strong> rétablissement de la paix,la prévention des crises et au – delà, Commissionde Communautés Européennes, SEC(96) 332 final,Bruxel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> 06.03.1996, 3P.Cette conclusion politique est révolutionnaire à plus dʼun titre. En effet,lʼimportance ainsi accordée à la démocratie dans la réf<strong>le</strong>xion portant sur la recherchede solutions à lʼépineuse question de la sécurité qui pénalise de façonstructurel<strong>le</strong> <strong>le</strong> développement économique du continent était ignorée par lʼO.U.A.Lʼancrage démocratique de lʼ«Acte» met un terme définitif au débat récurrentsur la nécessité ou pas <strong>pour</strong> lʼAfrique dʼadopter <strong>le</strong> mode de gouvernementdémocratique. En effet lʼ«Acte» consacre la victoire de la thèse selon laquel<strong>le</strong>,22


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièressans lʼinstauration de régimes démocratiques sur <strong>le</strong> continent africain, laconstruction de la paix, la quête de la stabilité politique et du développementdurab<strong>le</strong> y sont irréalisab<strong>le</strong>s. Il instaure une approche progressiste et rejettedéfinitivement certains arguments traditionnel<strong>le</strong>ment avancés <strong>pour</strong> justifierlʼimmobilisme et lʼarchaïsme politique sur <strong>le</strong> continent noir. Parmi <strong>le</strong>s argu -ments ainsi rejetés figure celui selon <strong>le</strong>quel, au regard de ses importantsproblèmes de développement économique, la démocratisation de lʼAfriquenʼest ni une nécessité ni une urgence. Au début des années 1990, nombreuxsont <strong>le</strong>s régimes africains et <strong>le</strong>urs soutiens occidentaux qui, <strong>pour</strong> essayer debriser lʼélan démocratique qui parcourt lʼensemb<strong>le</strong> du continent, recourent àce curieux raisonnement.Lʼengagement démocratique de lʼU.A. est sans équivoque et est omniprésenttant dans <strong>le</strong> préambu<strong>le</strong> de lʼ«Acte» que dans ses objectifs et ses principes.Dès son préambu<strong>le</strong>, la «nécessité dʼinstaurer un partenariat entre <strong>le</strong>sgouvernements et toutes <strong>le</strong>s composantes de la société civi<strong>le</strong>(…) » estaffirmée. Puis, dans ses objectifs (art. 3), lʼU.A. veut « promouvoir <strong>le</strong>s principeset <strong>le</strong>s institutions démocratiques, la participation populaire et la bonnegouvernance » (al.g) et « protéger <strong>le</strong>s droits de lʻhomme et des peup<strong>le</strong>sconformément à la Charte africaine des droits de lʼhomme et des peup<strong>le</strong>s etaux autres instruments pertinents relatifs aux droits de lʼhomme » (al.h).Dans ses principes (art. 4) lʼorganisation panafricaine énonce éga<strong>le</strong>ment sonengagement démocratique, notamment à travers sa volonté de rejeter«lʼimpunité, (<strong>le</strong>s) assassinats politiques (…) » (al. n). El<strong>le</strong> prend enfin position<strong>pour</strong> la « condamnation et <strong>le</strong> rejet des changements anticonstitutionnels degouvernements » (al.p).Au total, en réponse aux problèmes politiques qui entravent la constructionde la paix, et face à lʼabsence de régimes politiques stab<strong>le</strong>s pouvant assurerà lʼAfrique un développement économique durab<strong>le</strong>, lʼUnion Africaine engage<strong>le</strong> continent à une réforme démocratique profonde.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDe façon plus précise, abordant <strong>le</strong> drame des conflits, après avoir clairementreconnu que « <strong>le</strong> fléau des conflits en Afrique constitue un obstac<strong>le</strong> audéveloppement socio–économique (…)», <strong>le</strong>s dirigeants africains ont admisque <strong>le</strong> déficit démocratique est à la base de lʼinsécurité en Afrique.Aussi, ont –ils dès la présentation des objectifs de lʼorganisation dans lʼActeconstitutif affirmé, notamment dans ses alinéas f, g et h, <strong>le</strong>ur volonté de« promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité sur <strong>le</strong> continent » à travers ladéfense des « principes et (des) institutions démocratiques, (…)».Au niveau de ses Principes, lʼ«Acte», à travers plusieurs artic<strong>le</strong>s, trace <strong>le</strong>chemin que doit emprunter lʼU.A. en matière de prévention, gestion etrèg<strong>le</strong>ment des conflits. Sʼagissant des conflits internes qui sont ceux <strong>le</strong>s plusnombreux et dont <strong>le</strong>s conséquences sur <strong>le</strong> développement sont incontestab<strong>le</strong>s,il est recommandé entre autres :– la condamnation et <strong>le</strong> rejet des changements anticonstitutionnels degouvernements (al.p) ;– <strong>le</strong> respect des principes démocratiques, des droits de lʼhomme, de lʼétat dedroit et de la bonne gouvernance (al.m).Au terme de lʼanalyse supra, il se dégage quʼau niveau de lʼanalyse, lʼAfriquedispose dʼassez dʼéléments, tirés des expériences pratiques venues dʼail<strong>le</strong>ursmais éga<strong>le</strong>ment ceux résultant désormais de sa propre réf<strong>le</strong>xion, <strong>pour</strong> seconvaincre de façon irréversib<strong>le</strong> que la démocratie est un facteur irremplaçab<strong>le</strong><strong>pour</strong> ses efforts en faveur dʼune paix et dʼune sécurité réel<strong>le</strong>s et durab<strong>le</strong>s.23


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineIII. Le contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire comme gage de la transparencedémocratique dans <strong>le</strong>s questions de sécuritéLa volonté de monopo<strong>le</strong> de lʼexécutif doit être surmontée(A) et quelquesautres préalab<strong>le</strong>s remplis (B) afin que <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire, gage de latransparence démocratique sur <strong>le</strong>s actions des FDS, puisse être efficace.A - La volonté de monopo<strong>le</strong> de l’exécutifLes questions de sécurité ne relèvent pas uniquement du domaine militaire,el<strong>le</strong>s sʼétendent à lʼensemb<strong>le</strong> des forces de défense et de sécurité.Les forces de défense et de sécurité renvoient à lʼArmée et aux organismesparamilitaires à caractère public cʼest-à-dire, <strong>le</strong>s formations qui reçoivent uneinitiation aux tactiques militaires, un équipement de type militaire et qui sontsusceptib<strong>le</strong>s dʼêtre mobilisées, sous commandement militaire en temps deguerre, que sont : la gendarmerie, <strong>le</strong>s services de douane, <strong>le</strong>s gardesfrontières, <strong>le</strong>s gardes chasse etc. Ces formations sont généra<strong>le</strong>ment appelées<strong>le</strong>s « Autres organismes militarisés de lʼEtat », (AOME).Outre lʼArmée et <strong>le</strong>s organismes paramilitaires à caractère public, <strong>le</strong>s forcesde défense et de sécurité comprennent éga<strong>le</strong>ment la police et <strong>le</strong>s servicessecrets et de renseignement.Chacune de ces composantes des FDS est en charge de tâches et missionsassez sensib<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s se joue quelquefois la survie même des lʼEtatet cel<strong>le</strong>s des institutions. Plus généra<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s FDS ont <strong>pour</strong> missionessentiel<strong>le</strong> de veil<strong>le</strong>r sur <strong>le</strong>s intérêts vitaux de la nation et <strong>le</strong> cas échéant, de<strong>le</strong>s défendre y compris par la force.En raison de lʼimportance de <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> dans la préservation de la sécurité et dela défense par tous <strong>le</strong>s moyens du sanctuaire nationa<strong>le</strong> et dans la garantie dela liberté dʼaction de lʼEtat dans au niveau national quʼinternational, et delʼhyper puissance de lʼexécutif dans <strong>le</strong>s systèmes de gouvernement africains,de façon mécanique, <strong>le</strong>s questions de défense et de sécurité sont généra<strong>le</strong>mentperçues, à tort, comme re<strong>le</strong>vant uniquement du gouvernement.Cette erreur dʼappréciation sʼest enracinée à partir dʼun oubli révélateur desdysfonctionnements 27 que donnent à voir <strong>le</strong>s pratiques politiques dans denombreux pays africains. Cet oubli est relatif à lʼimportance et à lʼétenduedes pouvoirs de contrô<strong>le</strong> du par<strong>le</strong>ment en démocratie. Quelque soit <strong>le</strong>système politique considéré, <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment nʼest – il pas lʼinstitution à traverslaquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> exerce sa souveraineté ?27Maurice KAMTO, « La crise de lʼEtat et réinventionde lʼEtat en Afrique », in lʼAfrique dans un mondeen mutation ; Dynamiques internes ;marginalisation international ? Yaoundé, Afredit,2010, pp. 51 - 113Sʼil est incontestab<strong>le</strong> quʼil revient au gouvernement de disposer des FDS entemps de paix comme en temps de guerre, il est constant que <strong>le</strong> niveau depratique démocratique dʼune société se mesure entre autre à lʼaune de lacapacité du par<strong>le</strong>ment à exercer p<strong>le</strong>inement son droit de contrô<strong>le</strong> sur lʼexécutifdans la définition de la politique nationa<strong>le</strong> de sécurité, la préparation des traitéset accords divers en matière de sécurité ainsi que dans son utilisation des FDS.Le fonctionnement des par<strong>le</strong>ments africains nʼéchappe pas aux nombreuxdysfonctionnements de lʼEtat. Dans plusieurs cas, malgré <strong>le</strong>ur représentationpluraliste, ils restent sous la tutel<strong>le</strong> politique du pouvoir exécutif et par conséquentne peuvent jouer efficacement <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> de contrô<strong>le</strong> démocratique dusecteur de la sécurité. Malgré cette réalité, il est important dʼexaminer <strong>le</strong>sconditions dʼun contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire effectif et efficace en matière de sécuritéet de défense, un secteur où, en Afrique probab<strong>le</strong>ment plus quʼail<strong>le</strong>urs,lʼexécutif tient à conserver une liberté dʼinitiative et dʼaction, quitte à tenterdʼignorer <strong>le</strong> principe de la séparation des pouvoirs.24


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresB - Les préalab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> un contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire effectif et efficacedes FDSPlusieurs pré-conditions doivent être remplies afin que <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentairedes FDS soit possib<strong>le</strong> et surtout efficace.+ La volonté politiqueEn raison de lʼhistoire et de la trajectoire politique des Etats africains, peuaprès <strong>le</strong>s indépendances, des régimes autoritaires se sont installés à travers<strong>le</strong> continent. Ils ont développé un conservatisme politique et une certainefrilosité en matière de sécurité que même <strong>le</strong>s vingt ans de processus dedémocratisation nʼont pas encore tota<strong>le</strong>ment ébranlé. Si on se réfère uniquementaux pouvoirs constitutionnels et légaux, dans de nombreux pays africains,<strong>le</strong> Par<strong>le</strong>ment peut, en vertu de son pouvoir sur <strong>le</strong> gouvernement maiséga<strong>le</strong>ment, parce quʼil est lʼinstance où sʼexprime la volonté col<strong>le</strong>ctive dupeup<strong>le</strong>, procéder au contrô<strong>le</strong> de lʼaction gouvernementa<strong>le</strong> dans ce domaine.Cette possibilité est mise à mal par la pratique du pouvoir dans de nombreuxsystème politiques du continent. Depuis <strong>le</strong> vent de démocratisation qui a souffléen Afrique au début des années 1990, pratiquement tous <strong>le</strong>s régimes enplace en Afrique se présentent comme démocratiques. Outre <strong>le</strong>urs efforts afindʼêtre perçus comme tels, ils ont, <strong>pour</strong> beaucoup, adopté des constitutions etdes lois dʼessence démocratique. Malheureusement, <strong>le</strong>urs pratiques ne suiventpas toujours <strong>le</strong>ur désir dʼapparaître démocratique.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDans ce contexte, afin dʼarrimer <strong>le</strong>s discours et <strong>le</strong>s postures sur la pratiqueeffective de la démocratie <strong>le</strong>s dirigeants doivent rompre <strong>le</strong> conservatisme etsurtout faire montre de volonté politique forte. En effet, même lorsque <strong>le</strong>contexte politique et <strong>le</strong> fonctionnement des institutions peuvent semb<strong>le</strong>rfavorab<strong>le</strong> au contrô<strong>le</strong> du secteur de la sécurité par <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment et quʼen pluscelui –ci dispose dʼun savoir-faire et de la ressource humaine nécessaire, trèssouvent ce qui fait défaut cʼest la volonté politique.Alors que lʼune des missions essentiel<strong>le</strong>s des par<strong>le</strong>mentaires est de procéderà un examen critique des intentions et des actions de lʼexécutif, on constateque lorsquʼil sʼagit des questions de sécurité, des pesanteurs tel<strong>le</strong>s : la disciplinedu parti, la confidentialité, <strong>le</strong> relatif intérêt des é<strong>le</strong>cteurs <strong>pour</strong> ces questions dèslors quʼils ne concernent pas <strong>le</strong>ur sécurité immédiate et quotidienne, <strong>le</strong> ref<strong>le</strong>xeconservateur de lʼexécutif et notamment de la volonté de contrô<strong>le</strong> sans partagedu président, etc contraignent très souvent ces derniers à ne pas montrer unengouement particulier à exiger des explications franches au gouvernement.En clair, face au tabou qui, en raison de lʼévolution historique et politique despays africains, entoure <strong>le</strong>s questions de sécurité, nonobstant <strong>le</strong>s dispositionsconstitutionnel<strong>le</strong>s et léga<strong>le</strong>s, la transparence dans lʼélaboration des budgetsmilitaires et <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratique des forces militaires nʼest réel<strong>le</strong>mentenvisageab<strong>le</strong> quʼà condition quʼil y ait une volonté politique affirmée.Quoiquʼil sʼagisse ici du contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire du secteur de la sécurité, ilfaut reconnaître que cette volonté politique concomitamment doit être impulséepar lʼexécutif et <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> produire lʼeffet escompté. En effet, dansdes systèmes politiques où, malgré <strong>le</strong> choix officiel de lʼoption démocratiquela pratique dévoi<strong>le</strong> des ref<strong>le</strong>xes autoritaires, sans lʼadhésion du gouvernementet plus précisément du chef de lʼexécutif qui habituel<strong>le</strong>ment garde la hautemain sur toutes <strong>le</strong>s questions re<strong>le</strong>vant de la sécurité, la volonté politique despar<strong>le</strong>mentaires ne peut pas suffire à soumettre <strong>le</strong> secteur de la sécurité auxexigences démocratiques.25


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineDans <strong>le</strong> secteur de la sécurité, <strong>le</strong> bilan de cinquante ans dʼindépendance faitdʼopacité, de contrô<strong>le</strong> sans partage de toutes <strong>le</strong>s initiatives et actions par <strong>le</strong>seul président de la république, de réserve révérencieuse des par<strong>le</strong>mentaires,dʼabsence dʼinitiative en matière de contrô<strong>le</strong> du par<strong>le</strong>ment présente un continenten proie à une insécurité presque structurel<strong>le</strong> 28 . Ce bilan peu élogieux deprès de cent coups dʼEtats ou tentatives de coups dʼEtat et de nombreusesguerres civi<strong>le</strong>s devrait aider à susciter la volonté politique nécessaire <strong>pour</strong>quʼen Afrique, au-delà des proclamations politiques, lʼon puisse introduire dela transparence dans <strong>le</strong> fonctionnement dʼun secteur, qui lorsquʼil connaît desdérapages, affecte de façon décisive tous <strong>le</strong>s efforts de développement. Si lavolonté politique est forte, el<strong>le</strong> va influencer positivement la qualité desrapports entre lʼexécutif et <strong>le</strong> législatif sur ces questions dont <strong>le</strong> caractèresensib<strong>le</strong> est incontestab<strong>le</strong> et où généra<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> premier se distingue par savolonté dʼobstruction du second.Cʼest el<strong>le</strong> seu<strong>le</strong> qui <strong>pour</strong>rait amener <strong>le</strong> gouvernement à ne pas confiner tactiquementet en permanence ces questions dans <strong>le</strong> registre de lʼurgence avec<strong>pour</strong> objectif de neutraliser lʼaction de contrô<strong>le</strong> du par<strong>le</strong>ment. Cʼest éga<strong>le</strong>mentel<strong>le</strong> qui peut créer <strong>le</strong>s mesures de confiance entre <strong>le</strong> gouvernement et <strong>le</strong>par<strong>le</strong>ment et à terme, instaurer entre <strong>le</strong>s membres des deux institutions undialogue susceptib<strong>le</strong> dʼasseoir la transparence et donc <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratiquedans <strong>le</strong> secteur de la sécurité.+ Les dispositions constitutionnel<strong>le</strong>s et léga<strong>le</strong>sPour être efficace, outre la volonté politique, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire desforces de défense et de sécurité doit être organisé par la constitution et <strong>le</strong>slois. Ainsi, si la constitution réserve au pouvoir exécutif la gestion et lʼorganisationdu secteur de la sécurité, el<strong>le</strong> doit éga<strong>le</strong>ment préciser que lʼexécutifdoit rendre compte au par<strong>le</strong>ment. Dans cette approche, avec une volontépolitique affirmée, on peut envisager dʼinscrire <strong>le</strong>s pouvoirs par<strong>le</strong>mentairessur <strong>le</strong> secteur de la sécurité dans la constitution. Ceci aurait lʼavantage dʼéviterque <strong>le</strong> gouvernement fasse faci<strong>le</strong>ment obstruction à la mise en exergue despouvoirs de contrô<strong>le</strong> du par<strong>le</strong>ment. En plus des dispositions constitutionnel<strong>le</strong>s,à travers <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s et procédures par<strong>le</strong>mentaires 29 , des lois particulièresvisant à instaurer la transparence dans <strong>le</strong> secteur de la sécurité à partir dʼuncontrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire efficace peuvent être adoptées.+ La ressource humaine28Voir - ATANGANA (Bruno), « La persistance descoups dʼEtats en Afrique sub- saharienne;dynamique politiques et stratégiques desinterventions armées dans <strong>le</strong> jeu politique (1990-2010), Université de Yaoundé II, Soa, 2010, thèseen cours de rédaction, p3.+ KOUNOU (Michel), « Coups dʼEtat, régimes militaireset développement démocratique au sud duSahara (de 1963 à 2004) : Bilan et perspectives »,in Revue africaine dʼEtudes Politiques etStratégiques N°3, 2003, pp. 133 – 175.29Voir « Les conditions dʼun contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaireefficace », in Guide pratique à lʼusage despar<strong>le</strong>mentaires n°5, Contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire dusecteur de la sécurité ; Principes, mécanisme etpratiques, Genève, Centre <strong>pour</strong> <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong>démocratique des forces armées (DCAF), UnionInterpar<strong>le</strong>mentaire, 2003, p76.Outre la volonté politique qui doit prédisposer lʼexécutif à sʼaccommoder ducontrô<strong>le</strong> des par<strong>le</strong>mentaires dʼune part et préparer ces derniers à considérerquʼil nʼy a pas de domaine réservé <strong>pour</strong> lʼexercice de <strong>le</strong>urs pouvoirs decensure de lʼexécutif dʼautre part, <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment a éga<strong>le</strong>ment besoin de disposerdʼun savoir – faire <strong>pour</strong> jouer efficacement son rô<strong>le</strong>. Le savoir – faire dupar<strong>le</strong>ment pose <strong>le</strong> problème de la qualification de son personnel dans undomaine où lʼessentiel de la compétence nationa<strong>le</strong> se retrouve sous la tutel<strong>le</strong>de lʼexécutif. Le par<strong>le</strong>ment doit en la matière gérer <strong>le</strong> handicap du mandantde ses membres qui nʼest pas permanent. En effet, à cause de cette réalitépolitique, la formation dʼune équipe compétente de par<strong>le</strong>mentaires sur <strong>le</strong>squestions de défense est chaque fois menacée par la fin des mandants deceux de ses membres ayant développé un savoir – faire.Afin de surmonter cet obstac<strong>le</strong> qui nʼest pas des moindre, <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment et plusprécisément, sa commission spécialisée doit en plus de sʼouvrir à toutes <strong>le</strong>sactivités de réf<strong>le</strong>xions nationa<strong>le</strong>s ou internationa<strong>le</strong>s relatives aux questionsde sécurité mettre en place une équipe de spécialistes <strong>pour</strong> la conseil<strong>le</strong>r.26


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresLʼidéal <strong>pour</strong>rait être dʼobtenir du gouvernement la création dʼun bureau deliaison sécuritaire permanent en plus de lʼéquipe de conseil<strong>le</strong>rs travaillantdirectement <strong>pour</strong> <strong>le</strong> compte de la commission en charge des questions desécurité.Au total, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire des FDS en Afrique doit être pensé à partirde la trajectoire historique et politique de lʼEtat mais surtout des régimesconsidérés. Il doit être précédé dʼune doub<strong>le</strong> réf<strong>le</strong>xion sur lʼarmée et laproblématique de la paix et sur la place de la démocratie dans la constructionde la paix. Sa mise en pratique est conditionnée par quelques pré -conditionsparmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s : la volonté politique concomitante des responsab<strong>le</strong>sde lʼexécutif et des par<strong>le</strong>mentaires eux – mêmes, lʼorganisation des pouvoirsconstitutionnels et légaux, et <strong>le</strong> développement dʼun savoir – faire par<strong>le</strong>mentaire.Sur ce dernier point, <strong>le</strong> par<strong>le</strong>ment doit faire preuve de volontarisme <strong>pour</strong>comb<strong>le</strong>r ses insuffisances par rapport à lʼexécutif dans un secteur où, la technicitéet <strong>le</strong>s contraintes liées à la confidentialité, combinées au handicap dumandat de ses membres, sont des obstac<strong>le</strong>s quʼil doit surmonter en permanence.Ces pré- conditions remplies, lʼaction du par<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong>des FDS ne se cantonnera pas uniquement à lʼutilisation que <strong>le</strong> gouvernementfait dʼel<strong>le</strong>s mais el<strong>le</strong> devra sʼétendre à : la définition de la politiquenationa<strong>le</strong> en matière de sécurité ; lʼélaboration du budget de la sécurité et àla cohabitation entre <strong>le</strong>s exigences de la politique nationa<strong>le</strong> de sécurité et <strong>le</strong>sengagements internationaux de lʼEtat.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDr. Alain FOGUE TEDOM,est directeur du Centre dʼEtudes Stratégiques<strong>pour</strong> la Promotion de la Paix et duDéveloppement (CAPED) et enseigne lagéopolitique, la géostratégie et la stratégieà lʼUniversité de Yaoundé II et dans <strong>le</strong>sinstitutions militaires des Forces ArméesCamerounaises. En 1996 il obtient sa Maîtrisede Sociologie, Option Science Politi -que à lʼUniversité de Strasbourg. Sonmémoire de D.E.A., présenté en 1997 àInstitut dʼÉtudes Politiques de Strasbourg aété présé<strong>le</strong>ctionné <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Prix Scientifiquede lʼInstitut des Hautes Études de DéfenseNationa<strong>le</strong> (IHEDN) de Paris en 1998. EnDécembre 2002 il obtient son doctoratNouveau Régime en Science Politique(Thèse : «Histoire diplo matique, extraversionétatique et conflits politiques enAfrique Noire. Approche stratégique desconflits africains et analyse des enjeux autourde la sécurité en Afrique Noire. ») àlʼInstitut dʼÉtudes Politiques de lʼUniversitéRobert Schuman de Strasbourg.27


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineDCAF – Democratic Control ofArmed Forces un centre <strong>pour</strong> lasécurité, <strong>le</strong> développement etlʼétat de droitDCAF est une fondation internationa<strong>le</strong>créée en 2000 à lʼinitiative de la Confé dération suisse en tant que « Centre <strong>pour</strong> <strong>le</strong>contrô<strong>le</strong> démocratique des forces armées– Genève ». Le DCAF contribue à renforcerla gouvernance du secteur de lasécurité (GSS) par <strong>le</strong> biais de la réformedu secteur de la sécurité (RSS).Sous lʼégide du DCAF, lʼEquipe internationa<strong>le</strong>de conseil au secteur de la sécuritéaccompagne la communauté internationa<strong>le</strong>dans son action <strong>pour</strong> contribuer à lʼaméliorationde la sécurité et la justice, principa<strong>le</strong>mentdans <strong>le</strong>s Etats fragi<strong>le</strong>s ou affaiblispar un conflit. Pour ce faire, lʼéquipe travail<strong>le</strong>en collaboration avec un groupedʼEtats membres et dʼinstitutions afin dʼélaboreret de promouvoir des principes et desbonnes pratiques en matière de RSS. Deplus, ISSAT aide ses membres à renforcer<strong>le</strong>ur capacité à soutenir <strong>le</strong>s processus deréforme de la sécurité et de la justice, tantnationaux que régionaux..2.2 Intervention du Général (e.r.) Marc Caron, Directeur AdjointISSAT/DCAF GenèveSSR AND THE DEFENCE SECTOR :A SECURITY & DEVELOPMENT PERSPECTIVEBy Marc Caron, Mark Downesand Wil<strong>le</strong>m Oosterveld, ISSAT OfficeRésumé : L'intervention du Général Marc CARON traite de „La Réforme du Secteurde Sécurité (RSS) : Une perspective de sécurité et de développement“. Dansson introduction, il constate l'effet positif d'une réforme intégra<strong>le</strong> du secteur dedéfense dans <strong>le</strong>s pays menacés ou bien déjà affectés par des conflits armés. Unsystème de sécurité basé sur <strong>le</strong>s principes démocratiques et opérant sous <strong>le</strong>contrô<strong>le</strong> des autorités civi<strong>le</strong>s est capab<strong>le</strong> de prévenir de nouveaux conflits armés.Le Général CARON, en définissant la notion de RSS, constate que ces dernierstemps <strong>le</strong> terme de la sécurité a progressivement changé sa signification. Alorsque, dans <strong>le</strong> passé, seul <strong>le</strong>s acteurs traditionnels comme l'armée ont garanti la sécurité,ce sont aujourd'hui éga<strong>le</strong>ment un nombre d'acteurs non-étatiques et nongouvernementauxqui ont une influence majeure et qui font partie de la nouvel<strong>le</strong>agenda de sécurité. Ensuite, <strong>le</strong> contenu d'une réforme de sécurité est discuté.Pour de nombreuses raisons, une réforme du secteur de sécurité aurait des effetspositifs sur la juridiction et sur <strong>le</strong>s forces de sécurité du pays concerné. Lesrelations du secteur de sécurité avec <strong>le</strong>s autres domaines dʼétat sont expliquées,tout comme l'évaluation des institutions de sécurité. Enfin, <strong>le</strong> Général CARONdonne son point de vue sur <strong>le</strong>s conséquences à en tirer : Les questions de sécuritéont été trop focalisées sur <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de l'Etat, il y a un besoin <strong>pour</strong> une meil<strong>le</strong>urecompréhension du contexte sécuritaire et une reconnaissance des biais techniques.Le secteur de sécurité doit être pris en compte par <strong>le</strong>s institutions politiqueet une meil<strong>le</strong>ure coordination entre <strong>le</strong>s partenaires de la réforme RSS est nécessaire.Dans des situations post-conflit, une évaluation réaliste de la situationet une transparence maxima<strong>le</strong> des mesures imposées sont la base <strong>pour</strong> rétablirla confiance dans <strong>le</strong>s systèmes de sécurité.IntroductionRecent work by the international community has focused on the chal<strong>le</strong>nge ofinsecurity and conflict as a barrier to political, economic and social developmentand the positive ro<strong>le</strong> that the integrated reform of a countryʼs securitysystem can play in stabilising fragi<strong>le</strong>, conflict-prone or conflict affected states.By helping to reduce the risk of vio<strong>le</strong>nt conflict, an accountab<strong>le</strong> and efficientsecurity system, operating under civilian control within a democratic contextthus creates an enabling environment for development to occur.Security sector reform or SSR as it is known is at the forefront of efforts tohelp prevent conflict and build peace. It should be noted however that SSR isnot just an issue for developing countries, but is on the agenda of every governmentacross the world. Security sector reform is about ensuring that acountryʼs security and justice services are both effective and accountab<strong>le</strong>. Itis about viewing security and justice as basic public services; as such theyshould be viewed as public goods by Governments and populations alike. Effortsneed to be made to demystify and mainstream justice and security objectivesas core public service delivery issues and to subject them to the28


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresscrutiny and debate we subject other development concerns to.As such human security should feature as an objective in any security sectorinitiative. In practice, this means comp<strong>le</strong>menting activities which focus on thecapacity and accountability of formal public institutions (like parliamentaryoversight of the defence ministry) with efforts to engage and support civil societyand ordinary peop<strong>le</strong> more broadly. Efforts to help peop<strong>le</strong> understand thero<strong>le</strong> of their security sectors and to help develop trust in them is integral to drivingchange in the security system.In this paper, we will focus in particular on the linkages between defence reform,security sector reform and their contribution to broader development.The purpose is to highlight key princip<strong>le</strong>s for consideration and discussion duringthe conference.1. What is SSR ?The concept of SSRAlthough there is no consensus on a precise definition of what constitutesSSR, there are some authoritative descriptions. One is from the UN Secretary-General, who described it in a report (2008) as “a process of assessment, reviewand imp<strong>le</strong>mentation as well as monitoring and evaluation <strong>le</strong>d by nationalauthorities that has as its goal the enhancement of effective and accountab<strong>le</strong>security for the State and its peop<strong>le</strong>s without discrimination and with full respectfor human rights and the ru<strong>le</strong> of law.” Another comes from the OECDʼsDAC Handbook on SSR (2008). It speaks of SSR as “the transformation of the“security system” which includes all the actors, their ro<strong>le</strong>s, responsibilities andactions, so that it is managed and operated in a manner that is more consistentwith democratic norms and sound princip<strong>le</strong>s of good governance, andthus contributes to a well-functioning security framework.”Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARFigure 1 :New concepts of security29


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineRecent years have seen a shift from a traditional understanding of security tothe so-cal<strong>le</strong>d new security agenda that recognises that a wide range of stateand non-state actors can be providers of security or in some cases the purveyorsof insecurity. This new agenda also takes a broad view of security, understandingnational security not only in military terms but also in terms ofpolitical, social, economic and environmental security. It is in this respect thatsecurity should be understood in the context of SSR—as a concept that doesnot merely look at protection of the state, but takes protection and well-beingof its peop<strong>le</strong> as the starting point.The introduction of this new concept helped to make security issues part of thelarger development agenda. This was the reason why security issues did notfeature among the Mil<strong>le</strong>nnium Development Goals (MDGs). The link betweensecurity and development has become more mainstream, having been highlightedfor instance in the UNʼs 2005 report In Larger Freedom (2005), whichsaid that “we will not enjoy development without security, we will not enjoysecurity without development.”Goals of SSRThe ultimate goal of SSR is to make security and justice institutions contributeto fostering stab<strong>le</strong> social and economic conditions that enab<strong>le</strong> development.For examp<strong>le</strong>, SSR serves to make security institutions serve the causesof domestic peace and security, promote inclusion and participation of marginalizedgroups in society and help improve public management procedures.SSR is therefore aimed at evaluating and enhancing the ability of security andjustice providers to deliver these services. The main criteria for evaluation areeffectiveness and accountability. The first criterion looks at an institutionʼscapacity, e.g. in terms of physical and financial resources. The second criterionfocuses on whether there are proper procedures in place to guide an institutionʼswork in terms of cooperation with other security and justice providersas well as to ensure sufficient oversight by stakeholders in society. Concreteexamp<strong>le</strong>s in this vein are Codes of Conduct –which can make a real differenceonly when imp<strong>le</strong>mented in practice- as well as reporting mechanisms toparliamentary committees, the auditor-general or ombudsman.At a practical <strong>le</strong>vel, it is important to recognize that the enhancement ofeffectiveness and accountability in SSR projects be pursued hand-in-hand,since creating effective institutions without developing proper accountabilitymechanisms could potentially <strong>le</strong>ad to unduly strengthening state institutionsvis-à-vis the peop<strong>le</strong>—defeating the purpose of SSR. For examp<strong>le</strong>, developinga highly effective army without internal disciplinary mechanisms could <strong>le</strong>ad tosoldiers committing human rights violations with impunity.Why Security Sector Reform (SSR) ?◗ SSR enhances the security and protection of individuals and their property,which is not only an achievement in itself but also promotes their socialinclusion and improves the conditions for economic development.◗ Where the security sector is a source of conflict, SSR helps to transform thesector into an instrument of conflict prevention and management, whichcontributes to development and paves the way for other develop mentactivities.30


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières◗ SSR promotes greater participation of marginalised and disenfranchisedpeop<strong>le</strong> in the decision-making related to the security sector and its reform,enhances their involvement in the oversight of the security sector, andincreases access to security and justice.◗ SSR may also <strong>le</strong>ad to a more effective allocation of resources, and betterbudgetary management, which could in turn make more resources avail -ab<strong>le</strong> for other development activities.Based on Brzoska 2003, 24-27Key Characteristics of SSRAll SSR projects are characterized by a number of aspects. Apart fromeffectiveness and accountability as the criteria for enhancing institutions, SSRprojects should be furthermore be premised on the notion of local ownershipand take into account the political, holistic and technical nature of reformprocesses.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARFigure 2 :The key characteristics of SSR1. Need for local ownershipLocal ownership means that “the reform of security [and justice] policies,institutions and activities in a given country must be designed, managed andimp<strong>le</strong>mented by local actors rather than external actors” (Nathan 2007, 4).However, local ownership is not synonymous with government ownership.Rather, it implies a peop<strong>le</strong>-centred approach involving all re<strong>le</strong>vant stakeholdersincluding the beneficiaries of security services. In this regard, it shouldaim at civic empowerment, through using participatory approaches in a gender-sensitivefashion. In the context of defence reform, this could mean forinstance that citizensʼ views are solicited on a broad sca<strong>le</strong> to inform a nationalreview of the ro<strong>le</strong> of the armed forces, as was done in South Africa in thelate 1990s. In general, local ownership helps make SSR sustainab<strong>le</strong> andstrengthens the sense of responsibility felt by local stakeholders to make it asuccess. In addition, it helps to create a basis of trust between stakeholdersto make reforms sustainab<strong>le</strong> and lasting.31


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières4. Technical NatureEven if the political nature of SSR programmes is a given, in practice it ismostly the technical nature of SSR that dominates activities on a day-to-daybasis. In the context of defence reform, this entails for instance the training ofsoldiers to adapt to a new military doctrine. Some of the skills that may be requiredfrom imp<strong>le</strong>menters include substantive know<strong>le</strong>dge and experience,technical expertise in areas such as budgeting, strategy management andplanning, training, etc as well as experience in change and strategy management.One common pitfall to avoid is to focus unduly on substantive know<strong>le</strong>dgeat the expense of the more practical kinds of expertise and experiencerequired. In SSR, an appropriate balance needs to be struck between expertswith more political and those with more practical or technical skills. Together,they can develop coherent programmes focused on supporting a process thatcan deliver sustainab<strong>le</strong> results.2. Defence ReformFor many reasons, reform or improvement of defence institutions could havea great impact on a countryʼs security and justice infrastructure and have greatdevelopmental benefits. One is because the defence forces play a <strong>le</strong>adershipro<strong>le</strong> in protecting the constitutional order, giving them the responsibility tocreate a stab<strong>le</strong> environment that allows society to flourish. It is therefore importantthat the army is seen as an impartial and non-political institution—onethat fulfils its duties in accordance with its mandate not just at home, but also,if cal<strong>le</strong>d upon, in peacekeeping missions abroad.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAt the same time, whi<strong>le</strong> defence reform is a key component for encouragingdevelopment and growth, a country also has to contend with other priorities,e.g education and health provision. This is one more reason why it is importantthat the constitutional mandate of the armed forces is defined in such asway as to ensure that they also perform the tasks for which they are equipped,<strong>le</strong>aving the maintenance of domestic security for instance to the police. Whatis more, a c<strong>le</strong>arly defined and limited mandate of the army also <strong>le</strong>ads to costefficiencies that could have large benefits in terms of financing societal needselsewhere—thus contributing to broader human security.A - Defence Reform in practice1. Entry PointsGuiding princip<strong>le</strong>s for a reform process can be derived for examp<strong>le</strong> from acountryʼs constitution or its national security policy or strategy (NSP or NSS)document. A constitution normally spells out the ro<strong>le</strong> of the army, circumscribingits authority and stressing its position as guardian of the constitution. ANSP/NSS can help to frame a reform process through providing an overviewof the general security environment –both internal and external- and settingout the parametres for what is required of the defence forces to ensure adequateprotection of the country.Entry points and opportunities for defence reform could occur at various instances.One could be at the time of a statutory defence review. Another couldbe at the time of political transformations, e.g. in the context of a transition towardsdemocracy (South Africa, post-communist states). Other opportunitiescould occur as a result of a rethinking of the need for military resources againstpriorities elsewhere in a national budget, or as a result of social or attitudinal33


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainechanges. Reform efforts can be aimed at different <strong>le</strong>vels. For instance, it can entailadjusting the armyʼs constitutional mandate or laws that govern its conduct.At another <strong>le</strong>vel, it could focus at changing institutional structures, enhancing itsfunctioning and effectiveness.2. Relations with other sectorsAs the most powerful security actor and often largest employer in a country,the military maintains important links to other actors within the security sector,but can at times also be in competition with such other actors, for instanceover their statutory ro<strong>le</strong>s (“turf batt<strong>le</strong>s”) or financial and physical resources.In many developed and developing countries, tasks with respect to securingpeace and stability at home are often divided between the police, special (paramilitary)armed forces and the military. The point of reference in this regardis normally the constitutional framework, which should ideally speaking <strong>le</strong>aveno room for ambiguity. As such, the use of force by domestic security providersshould always be as minimal and proportional as is necessary. As a result,at the domestic <strong>le</strong>vel, the police forces should normally have the primaryresponsibility for enforcing the law.Other actors within the security sector with which the military interacts at anoperational <strong>le</strong>vel include the intelligence services and border management.Given the nature of their special tasks, it is important that the tasks of theserelated actors are c<strong>le</strong>arly demarcated from those of the army whi<strong>le</strong> simultaneouslyensuring that they can coordinate their activities in a proper fashion.Finally, it is important to highlight the linkages between the military and oversightbodies. Such accountability mechanisms can work on the inside as disciplinarytools or from the outside for the exercise of civilian control. As a ru<strong>le</strong>,internal disciplinary mechanisms for service personnel should provide certainminimum <strong>le</strong>gal protections. At the <strong>le</strong>vel of national politics, the head of statecan be the commander-in-chief of the army (as art. 43 of the Senega<strong>le</strong>seconstitution stipulates for instance), whi<strong>le</strong> parliament acts as the main oversightbody vis-à-vis the executive, holding the purse strings as well. As such,a well-designed set of checks and balances provides the best means to ensuringaccountability. The media and civil society organizations could play importantsubsidiary ro<strong>le</strong>s in this context. Finally, it is important for the sake ofoversight purposes that there are no serious gaps or overlaps between securityinstitutions in terms of esponsibilities for the maintenance of security.3. Evaluating Defence InstitutionsOnce it has been decided that some form of reform in the defence sector isneeded, a proper assessment needs to be undertaken in order to determinewhere reform is needed and in what shape. Taking local ownership as a basis,the first step in such a process would be to make a stakeholder analysis inorder to determine who would be affected by reforms and in what way, as wellas who would potentially be supportive or not. Such an evaluation will help toidentify where activities to improve the sector should be aimed at and howthey could or will impact on related security actors.Another part of an assessment is to analyse institutions. A useful tool for identifyingstrengths and weaknesses against the stated SSR objectives of effectivenessand accountability is the Capacity and Integrity Framework (CIF, seeillustrated below). This tool can be used to examine the performance of insti-34


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièrestutions at the individual, organizational and external <strong>le</strong>vel. The CIF examinesfor instance individual or organisational capacities and links these to certainintegrity criteria, which should ensure that the individual or organisation is notsimply capab<strong>le</strong> of exercising its statutory functions, but does so within a <strong>le</strong>galand disciplinary framework. For instance, the CIF could be used to assesswhether the military intelligence agency is sufficiently equipped for its tasks(i.e. is well-structured and resourced), but also sticks to its mandate in respectingits constitutional ro<strong>le</strong> as well as citizensʼ rights, operating in an accountab<strong>le</strong>manner.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARFigure 4 :The Capacity and Integrity Framework (CIF),applied to defence institutions4. Chal<strong>le</strong>ngesInevitably, undertaking SSR in the defence sector presents various chal<strong>le</strong>nges,especially when viewed from a development point of view. The first is thesimp<strong>le</strong> fact that military organisations are invariably very large and powerfulinstitutions and therefore by their very nature not easily amenab<strong>le</strong> to change.In addition, the militaryʼs notion of what constitutes security can be at variancewith prevailing notions in the SSR community, which is understandab<strong>le</strong> giventhe nature of security threats that defence forces have traditionally dealt with.As a result, it may be not be easy to get the military to change its habits andcustoms. Consequently, changes in theory can often only become practicalreality once behavior of individuals and/or groups has demonstrably beenaltered.These chal<strong>le</strong>nges, daunting as they are, are not the only ones however. Forone, the nature of the military as a guardian of a stateʼs sovereign authoritycould also make it resistant to change, especially if these are deemed too radical.What is more, the fact that the military is a very sizab<strong>le</strong> organisationmakes that SSR programmes often need to be undertaken on a large sca<strong>le</strong>,aiming at improving effectiveness, efficiency and oversight simultaneously:not an easy task under any circumstance. In this respect, it should also benoted that reform could be resisted because it implies “right-sizing” (often,downsizing) of the army in accordance with a constitutional mandate or anewly adopted security strategy.35


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3. Defense Reform in Post-Conflict Situations: SSR and DDRA special case of security and justice reform in relation to the military takesplace in post-conflict situations. In these situations, SSR is mostly not a questionof imp<strong>le</strong>menting partial reforms, but often requires a who<strong>le</strong>sa<strong>le</strong> reorganisationof the army. Invariably, the military has become a bloated institution thatcould easily have abused its powers, whose members could have engaged inhuman rights violations and the societal trust in which is very low. The firststeps in an SSR process in this context are taken up by what is cal<strong>le</strong>d Disarmament,Demobilisation, and Reintegration (DDR).In the immediate aftermath of a conflict, the first concrete points of concern areusually disarmament and demobilisation—bringing the size of the armedforces gradually back to a peacetime <strong>le</strong>vel, as was the case in Sierra Leoneafter 1999 for instance. Whi<strong>le</strong> a laudab<strong>le</strong> aim, this cannot be undertaken withoutregard to the possibility of outbreaks of post-war vio<strong>le</strong>nce. Indeed, thepropensity for such vio<strong>le</strong>nce could be quite high, also due to the wide availabilityof small arms 30 .The next steps include a process of demilitarization of society as a who<strong>le</strong> aswell as the re-integration of former soldiers and combatants into society. Thesesteps could be fraught with danger, in particular also from a socio-economicpoint of view. Many soldiers who lose their job therewith also lose their livelihoods,and might therefore be reluctant to give up their arms. Even so, manyfighters arguably had a better income in wartime, given that their ranks andweapons gave them the opportunity to engage in racketeering and extortionto augment their incomes.4. Support for Defense reformSupport at the global <strong>le</strong>velAt the multilateral <strong>le</strong>vel, the United Nations has been very active in SSR anddefence reform matters, mostly as a standard-setting organisation through reportsby the Secretary-General, the General Assembly and the Security Council..At the practical <strong>le</strong>vel, it has been engaged through the Department ofPeacekeeping Operations (DPKO) and its newly-established SSR Unit withinDPKOʼs Office of Ru<strong>le</strong> of Law and Security Institutions. Generally, the UN hasapproached defence issues from the DDR ang<strong>le</strong>. The UN Development Programme(UNDP) and its Bureau for Crisis Prevention and Recovery (BCPR)have also been active in the field of SSR, having deployed activities in thefields of DDR, SALW and mine action.Support at the regional <strong>le</strong>vel30See Mark Downes and Robert Muggah, “BreathingRoom: Interim Stabilization and Security SectorReform in the Post-War Period”Due to its sensitive nature, regional organisations have sometimes been reluctantto come to support defence reform, and have only started to do so therecent past. In general, these organisations have been instrumental in creatingpolicy frameworks for translating norms developed into UN fora to nationalcontexts.In Africa, activities by regional organizations like ECOWAS and the AU havebeen piecemeal though significant. ECOWAS has so far managed to appointa Nigerian general in order to assist in reforms in Sierra Leone, and the organisationʼsChiefs of Defence Staff have developed and adopted a Code ofConduct for Armed and Security Forces as well as a Conflict Prevention Strategy(ECPS). The African Union (AU) has been developing its own policy on36


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresSSR since 2007, in recognition of the fact that whi<strong>le</strong> many African countrieshad the intention to downsize their armies since the 1990s, defence expenseshave largely gone up, and not much progress has been achieved in reformingthe security sector. Many countries have been undergoing some form of SSRfor many years, but the AU is now becoming serious about making it a prioritymatter in the context of its ro<strong>le</strong> to promote peace and security on the continent.The OSCE has de facto been active in SSR initiatives, most notably throughthe elaboration of a Code of Conduct on Politico-Military Aspects of Security,but has not yet developed a full-f<strong>le</strong>dged SSR policy. Still, the OSCE Code ofConduct has become a reference point in setting a framework for defence reformand in that sense, can be compared with ECOWASʼ own Code ofConduct for Armed and Security Forces.The European Union developed its SSR policy since 2000 in the context of theEuropean Security and Defence Policy, ESDP. It also laid down some defensetasks in the Treaty of the European Union (TEU), known as the Petersbergtasks to support peacekeeping operations, which was supp<strong>le</strong>mented by a EuropeanSecurity Strategy in 2003. Other EU initiatives include the developmentof a military capability and a focus on defence reform in the memberstates whi<strong>le</strong> in 2005, a European Defense Agency (EDA) was established.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARWith respect to defence reform, the most prominent player has been the NorthAtlantic Treaty Organisation (NATO). Since the end of the Cold War, NATOhas been involved in rethinking security strategies for its members and howto reform their defense forces accordingly, focusing more on peace operationsrather than the protection of the Allianceʼs territory. Particular initiatives in thisregard include the Partnership for Peace (PfP) and the creation of Allied CommandTransformation (2002).5. Emerging LessonsGeneral <strong>le</strong>ssons1. Support has been too state-centricEspecially with respect to defence reform, SSR programmes have been toostate-centred; an approach which carries serious risks. First of all, a too heavyfocus on the military not only <strong>le</strong>ads to excluding other <strong>le</strong>gitimate stakeholders,but also creates the risk of improving efficiency at the expense of oversightmechanisms. In post-conflict situations in specific, this could <strong>le</strong>ad to a strengtheningof the grip of the authorities on the state and society, and thus runcounter to the broader goal of promoting the well-being of society and its citizens.In addition, a lack of input from civil society could <strong>le</strong>ad to the armedforces lacking <strong>le</strong>gitimacy in the eyes of citizens. This could complicate thearmyʼs duty to fulfill its constitutional mandate-something which the guardianof the constitution cannot afford to <strong>le</strong>t happen.2. Need for better understanding of contextAs was noted before, many international SSR support staff have a good backgroundin security and justice issues, but often lack specific know<strong>le</strong>dge aboutlocal history, politics and socio-economic conditions. Given the sensitivity ofdefence reform and for the sake of nurturing local ownership, it is particularlyimportant that amp<strong>le</strong> time is taken to get a feel and understanding for political37


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineconditions and dynamics (an inception period) which is imperative for obtaininglocal commitment. In particular, it is important to get to understand the relationshipbetween the army, the overnment and society at large, and howpower relations are structured. In other situations, advisors have been put onteams who are former military or police officers, but who lack a solid understandingof security and justice reform. For these reasons and other, there is ac<strong>le</strong>ar need for more and better SSR training in general.3. Recognition of technical bias and need to become more politicalFollowing from the previous point is that for SSR to be successful in the longrun, there is a need to engage with the politics of reform, even if within the developmentcommunity, there has been a tendency to eschew this aspect.Once more, the reason for engaging stakeholders at the political <strong>le</strong>vel is notonly because SSR and defence reform are by definition sensitive issues, butalso because of the need to establish local ownership, without which SSR interventionscannot succeed.4. Better Coordination between SSR partnersIn the context of SSR programmes, and in particular when it concerns largesca<strong>le</strong>project involving the military, there is a strong need for better coordinationand cooperation between SSR facilitators and local stakeholders, as wellas between SSR facilitators. Guidelines for coordination are contained in the2005 Paris Declaration on Aid Effectiveness and the 2008 Accra Agenda forAction. The enumerated criteria include a need for alignment between objective,harmonization through sharing information and avoiding duplication aswell as donors and recipients making each other mutually accountab<strong>le</strong>. TheAccra Agenda adds notions such as predictability and conditionality. A goodexamp<strong>le</strong> in the defence context is the 2006 “Afghanistan Compact”, whichcommitted donors and local stakeholders to aligning support to the countryʼspriorities and national strategy31.Lessons related to post-conflict situations1. Need for a realistic assessment of the situationDue to the myriad issues that call for attention in post-conflict situations, it iseasy to become too impatient in beginning to restore security and justice infrastructures.However, given the enormous chal<strong>le</strong>nges that are faced and thecorresponding lack of resources, it is important to ensure that reconstructiontakes place at a measured pace with which all stakeholders are comfortab<strong>le</strong>.2. Promote transparency as a trust-building measure31OECD DAC Handbook on SSR, p. 244In the wake of a conflict, there is an urgent need –and demand- for state institutionsto re-assert themselves. In order to inculcate a sense of trustworthinessand visibility, there are various measures that can be taken. One is tocreate reliab<strong>le</strong> databases through audits, censuses and surveys. Such informationis not just useful for governance purposes, but can also serve to makean inventory of citizensʼ needs. Another measure is to promote formality thoroughthe use of transparent se<strong>le</strong>ction and promotion procedures, and c<strong>le</strong>arbudget procedures. These will help create a sense that the authorities treattheir employees in a non-discriminatory manner. An additional confidencebuildingmeasure would be to enhance visibility through the use of ID cards,badges and uniforms. These measures –like the ones above- are very useful38


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresif not critical especially for the armed forces, for they help not only to make thepresence of a provider of protection felt among the peop<strong>le</strong>, but also to generatea sense of confidence between the army and citizens. Since the restorationof trust in the armed forces is often a high priority in post-conflict situations(in particular if army members have been involved in human rights violations),it is key that the imp<strong>le</strong>mentation of confidence-building measures such as listedabove not be neg<strong>le</strong>cted.CONCLUSIONThe sing<strong>le</strong> most important point of this paper has been that whi<strong>le</strong> defencereform is a very comp<strong>le</strong>x issue in particular when seen from a security anddevelopment perspective, it is only in the context of such a perspective thatreform of the defence sector can be successful. Pursuing reform in this fashioncan enab<strong>le</strong> the armed forces to play a conducive ro<strong>le</strong> in promoting the peop<strong>le</strong>ʼswell-being and contribute to human security, <strong>le</strong>ading to a more productiveenvironment for a country to grow and develop.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARMarc CARON,est général de corps dʼarmée à la retraite,ancien Chef dʼEtat-major de lʼArmée deterre canadienne de 2003 à 2006. En2006, il a servi lʼorganisation des NationsUnies. Dʼavril à novembre 2008 il fut <strong>le</strong>conseil<strong>le</strong>r principal du chef de mission dela Mission des Nations Unies au Congo,Monuc. Il travail<strong>le</strong> aujourdʼhui <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Centre<strong>pour</strong> <strong>le</strong> Contrô<strong>le</strong> Démocratique desForces Armées de Genève (DCAF), ausein de son Équipe Internationa<strong>le</strong> deConseil dans <strong>le</strong> Sécteur de Sécurité(ISSAT).39


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSÉANCE PLÉNIÈRE N° ILundi 8 novembre 2010 - Après-midiThème de la séance :État de Droit et Forces de Sécurité et de DéfensePANEL 2 « MAINTIEN DE L’ORDRE ET SÉCURITÉ HUMAINE »2.3 Intervention du Général de Division Abdoulaye FALL, Haut Commandantde la Gendarmerie Nationa<strong>le</strong> et directeur de la justicemilitaire du SénégalMaintenance of Order and Human security“ is the tit<strong>le</strong> of Division GeneralAbdoulaye FALL's contribution to the second panel of the colloquium. Inthe first part of his intervention, he shows the coherence of constitutionalstate (ru<strong>le</strong> of law) and maintenance of order. He says that the actualconcept of human security can only prosper in a well-determined environment,which is the constitutional state. He states that public order canonly line in the civic liberties in questions of maintenance of order; libertyhas to be the ru<strong>le</strong> and any restriction and has to remain an exception. Inthe second part, General FALL analyses the contribution of maintenanceof order to human security. He says that maintaining order is not forciblythe synonym for a restrictive power. It can provide the administrative authoritieswith tools to act in favour of the interest of the population. Furthermore,he talks about the larger sca<strong>le</strong> of maintaining order, when thetransnational dimension is affected. The ro<strong>le</strong> of the United Nations in thisdimension is deeply analysed and finally, the last part is dedicated to theAfrican perspectives, c<strong>le</strong>arly stating that many African states have committedvio<strong>le</strong>nt actions against their populations during the first 40 yearsafter their independence. To regain their credibility, General FALL advisesto the security and armed forces of the different states to engage in a veritab<strong>le</strong>competition to reform the security and defence sectors.MAINTIEN DE L’ORDRE ET SÉCURITÉ HUMAINE« En dépit de sa simplicité, <strong>le</strong> concept de sécurité humainedevrait révolutionner la société au XXI e sièc<strong>le</strong> »(PNUD, Rapport mondial sur <strong>le</strong> développement humain 1994)Partie intégrante des forces armées, lagendarmerie est une force instituée <strong>pour</strong>veil<strong>le</strong>r à la sûreté publique et assurer <strong>le</strong>maintien de lʼordre et lʼexécution des lois etrèg<strong>le</strong>ments.Une surveillance continue, préventive et répressive,constitue lʼessence de son service.Le service de la gendarmerie aessentiel<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> objet dʼassurer lʼactiondirecte de la police administrative, judiciaireet militaire. El<strong>le</strong> est éga<strong>le</strong>mentchargée dʼaccomplir des missions de défensenationa<strong>le</strong> et de prêter son concoursaux autorités judiciaires, administratives etmilitaires ainsi quʼà tous <strong>le</strong>s départementsministériels.Cʼest avec un réel plaisir, et une fierté légitime, que jʼai accueilli lʼopportunitéqui mʼest offerte de prononcer une communication sur un thème aussi actuelque «<strong>le</strong> maintien de lʼordre et la sécurité humaine ».Ce sentiment décou<strong>le</strong>, dʼabord du fait que <strong>le</strong> maintien de lʼordre, qui relève delʼEtat, est une prérogative confiée aux forces de sécurité, toutes catégories ettous statuts confondus. Il vise à assurer une mission de sécurité généra<strong>le</strong> permettantune vie harmonieuse entre toutes <strong>le</strong>s composantes de la société. Cemaintien de lʼordre public, qui constitue notre raison dʼêtre fondamenta<strong>le</strong>, estmalheureusement mal connu. Il est souvent associé ou assimilé à larépression, à la vio<strong>le</strong>nce ou à la violation des libertés individuel<strong>le</strong>s.Je mʼefforcerai, en conséquence, à vulgariser <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> éminemment proactif etimportant des forces chargées du maintien de lʼordre. A cet égard, je souhaite40


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresque mon intervention participe à dissiper tous <strong>le</strong>s ma<strong>le</strong>ntendus, tout au moinsà atténuer certaines incompréhensions.El<strong>le</strong> devra ensuite me permettre de démontrer, quʼau-delà des apparences, lasécurité humaine et <strong>le</strong> maintien de lʼordre, entretiennent depuis toujours desrapports étroits.El<strong>le</strong> sera, enfin, lʼoccasion de dire, comme dʼautres lʼont déjà fait, que <strong>le</strong>s mutationsintervenues dans la géopolitique africaine, et sur tout lʼoekoumène,doivent nécessairement inciter à une nouvel<strong>le</strong> approche, plus adaptée et pluslarge, de lʼobjet de la sécurité dont lʼhomme, en tant quʼindividu, reste lʼélémentcentral.Le concept de maintien de lʼordre sera abordé, ici, suivant une approche holistiquequi permet de traiter <strong>le</strong> thème sous un ang<strong>le</strong> beaucoup plus exhaustif.Cette démarche a <strong>pour</strong> but de mieux montrer la véritab<strong>le</strong> dimension dumaintien de lʼordre dont la mise en oeuvre des moyens dédiés permet dʼassurerla protection de lʼinté grité du territoire, la sauvegarde de la paix publiqueet la sécurité personnes et des biens.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARPour sa part, <strong>le</strong> concept de sécurité humaine est apparu <strong>pour</strong> la première foisdans <strong>le</strong> rapport du PNUD sur <strong>le</strong> développement humain en 1994, en cestermes « En dépit de sa simplicité, <strong>le</strong> concept de sécurité humaine devraitrévolutionner la société au XXI e ». Il se décline en domaines dʼintérêt (économique,sanitaire, sécuritaire, personnel, politique, socioculturel etc.) et chercheà replacer lʼindividu au coeur des préoccupations sécuritaires des Etats et dela communauté internationa<strong>le</strong>. Il englobe donc de nouvel<strong>le</strong>s orientations liéesà lʼaction des pouvoirs publics et des organisations internationa<strong>le</strong>s, imposéespar lʼévolution de la société.Dès lors, il ressort de lʼanalyse de ces deux notions consubstantiel<strong>le</strong>s, quʼil estplus loisib<strong>le</strong> de dégager <strong>le</strong> lien dʼinterdépendance - du reste très étroit - quiapparaît, à lʼévidence, entre <strong>le</strong>s missions de maintien de lʼordre public, dans<strong>le</strong>ur sens <strong>le</strong> plus large, et la réalisation de la sécurité humaine par <strong>le</strong>s pouvoirspublics, au profit des populations.Concrètement, il faut chercher à déterminer comment <strong>le</strong> maintien de lʼordredoit exercer sa fonction régalienne et sociéta<strong>le</strong>, tout en respectant lʼintérêtcol<strong>le</strong>ctif et <strong>le</strong>s libertés individuel<strong>le</strong>s.Pour <strong>le</strong>ver cette interrogation, je me propose dʼanalyser avec vous, en premierlieu la finalité du maintien de lʼordre, dans un Etat démocratique. Ensuite,jʼessayerai de définir la contribution de ce maintien de lʼordre à la sécuritéhumaine, à lʼéchel<strong>le</strong> nationa<strong>le</strong>. Enfin, je tenterai de faire une sorte deprospection de la dimension internationa<strong>le</strong> du maintien de lʼordre et de dégagerdes perspectives dʼévolution en matière de sécurité humaine, sur la scèneafricaine.I - ÉTAT DE DROIT ET MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLICLe secrétaire général de lʼOrganisation des Nations Unies, Ban Ki-Moon a affirméque « Nous devons concentrer nos actions sur des stratégies au cœurdesquel<strong>le</strong>s se trouve l'individu (…), mettre l'être humain à l'abri du besoin, <strong>le</strong>libérer de la peur, lui offrir la liberté de vivre dignement (…), c'est ça la sécuritéhumaine ».Je dirai, <strong>pour</strong> ma part, que cette conception de la sécurité humaine ne peutprospérer que dans un environnement bien déterminé : lʼEtat de droit.Pour quʼil y ait Etat de droit, il faut un Etat qui organise et garantit <strong>le</strong> respect41


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainedu droit en général, et plus particulièrement celui des droits de lʼhomme. Ceconcept a subi au fil des années, et au contact des faits, plusieurs évolutionsavant de connaître lʼuniversalité qui <strong>le</strong> caractérise.Aujourdʼhui, il sert même de baromètre <strong>pour</strong> mettre en cause la légitimité detel ou tel régime politique. Après <strong>le</strong>s drames qui ont secoué au cours des annéesquatre vingt dix (90) la Yougoslavie, la Somalie et <strong>le</strong> Rwanda, <strong>pour</strong> neciter que <strong>le</strong>s cas <strong>le</strong>s plus médiatisés, il est devenu indiscutab<strong>le</strong> que seul lʼEtatde droit peut offrir des opportunités <strong>pour</strong> jugu<strong>le</strong>r ou atténuer <strong>le</strong>s crises récurrentesqui menacent la sécurité des populations. Cʼest dire que <strong>le</strong> maintien delʼordre reste une action indispensab<strong>le</strong> à lʼexistence de lʼEtat.Aussi, peut-on sʼinterroger sur sa fonction et son objet au sein dʼun Etat de droit.11- Fonction et objet de l’ordre public dans l’État de droitLes principes du maintien de lʼordre dans lʼEtat de droit font lʼobjet de la résolution34/169, de lʼAssemblée généra<strong>le</strong> des Nations Unies du 17 décembre1979, qui fixe un code de conduite <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s de lʼapplication deslois des Nations Unies.Lʼordre public étant un fondement essentiel de lʼEtat de droit, il répond au besoinde sécurité et contribue à la sauvegarde des institutions en tant que facteurde stabilité et de développement. Maintenir lʼordre est une mission depolice administrative qui appartient au service public. Il sʼagit dʼune notion quicouvre un spectre très vaste et dont lʼapplication est souvent considérée, àtort, comme un frein à la notion de liberté. Mais <strong>le</strong> maintien de lʼordre a plutôtun rô<strong>le</strong> dʼharmonie et dʼéquilibre, lʼordre public est dʼune importance socia<strong>le</strong>particulière qui justifie <strong>le</strong>s mesures qui sont prises <strong>pour</strong> <strong>le</strong> protéger de tous<strong>le</strong>s dangers qui <strong>pour</strong>raient <strong>le</strong> menacer.De nos jours, <strong>le</strong>s mutations sociéta<strong>le</strong>s ont considérab<strong>le</strong>ment diversifié et renducomp<strong>le</strong>xe cette notion ainsi que lʼensemb<strong>le</strong> des menaces qui sʼy rattachent. Maisen tout état de cause, <strong>le</strong> maintien de lʼordre a été conçu <strong>pour</strong> préserver <strong>le</strong> bonordre, afin de ne pas troub<strong>le</strong>r, dʼune part, la tranquillité et <strong>le</strong> repos des habitants.Dʼautre part, son action vise à protéger la col<strong>le</strong>ctivité et <strong>le</strong>s individus contre <strong>le</strong>sdangers qui <strong>pour</strong>raient compromettre la plénitude de <strong>le</strong>ur sécurité.En dʼautres termes, <strong>le</strong>s nécessités impérieuses de la paix publique peuventamener lʼEtat à déplacer, <strong>le</strong> cas échéant, <strong>le</strong> point dʼéquilibre entre la liberté etlʼordre en faveur des forces de police.La troisième fonction classique du maintien de lʼordre public concerne la salubritépublique. La sauvegarde de la santé publique peut justifier éga<strong>le</strong>mentdes mesures dʼhygiène publique, imposées à la vie quotidienne des individusou de la col<strong>le</strong>ctivité, dans lʼintérêt général.Toutefois, force est de reconnaître que la notion de maintien de lʼordre publicsʼest étendue à de nouveaux domaines tout aussi dignes dʼintérêt. En effet,lʼordre public revêt, entre autres, un caractère éthique mais surtout moral.Dans son application, la protection de lʼordre moral peut porter atteinte parfoisaux libertés.Quʼen est-il alors de la protection des droits individuels au maintien de lʼordre ?12- Maintien de l’ordre public, libertés publiques et droits individuelsAu Sénégal, <strong>le</strong>s libertés individuel<strong>le</strong>s sont inscrites dans la Constitution. Ce quioblige lʼEtat à faire observer fermement <strong>le</strong>ur respect.En matière de maintien de lʼordre, « la liberté est la règ<strong>le</strong>, et la restrictionlʼexception ». Lʼordre public encadre simp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s libertés. LʼEtat reste42


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièrescependant <strong>le</strong> principal dispensateur de sécurité et la loi est son outil parexcel<strong>le</strong>nce. Du rapport qu'ilaura à la loi, l'homme tire son appréciation de sesdroits et de ses devoirs vis-à-vis de lʼEtat, cʼest-à-dire de son rapport à toutes<strong>le</strong>s formes d'autorité. La législation sur <strong>le</strong> maintien de lʼordre limite parfois <strong>le</strong>slibertés des individus, dans <strong>le</strong> but dʼassurer <strong>le</strong>ur protection par rapport à dʼautresindividus, mais aussi par rapport à lʼautorité publique.En effet, la seu<strong>le</strong> justification du maintien de lʼordre se situe dans la nécessitéde concilier lʼexercice des libertés individuel<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s exigences de la vie ensociété. Le maintien de lʼordre doit, en conséquence, garantir <strong>le</strong> respect et <strong>le</strong>sdroits fondamentaux de la personne humaine.LʼEtat assure ainsi la protection de la liberté individuel<strong>le</strong> de chacun de sesmembres, bien entendu, ces derniers tenus de respecter la loi. Par contre, sicomme <strong>le</strong> stipu<strong>le</strong> la déclaration des Droits de l'homme, « la liberté consiste àpouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. », il est du devoir de la Républiquede limiter la liberté de ceux qui mettent en péril la société. Cette vision rejointdu reste cel<strong>le</strong> de Montesquieu qui, dans L'Esprit des Lois, écrit que : "Laliberté est <strong>le</strong> droit de faire tout ce que <strong>le</strong>s lois permettent".Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAussi, assurer la sécurité humaine consiste-t-il, dʼune certaine façon, à protéger<strong>le</strong>s libertés vita<strong>le</strong>s - ces libertés et ces droits élémentaires- qui devraient caractériserchaque vie humaine. Autrement dit, il sʼagit de prémunir <strong>le</strong>s personnescontre <strong>le</strong>s situations et <strong>le</strong>s actions qui mettent en péril ces acquis fondamentaux.Tout compte fait, nous constatons que <strong>le</strong> maintien de lʼordre garantit <strong>le</strong> développementde lʼesprit de citoyenneté et vise lʼépanouissement intégral delʼhomme. Il contribue donc à faire de la sécurité humaine une réalité immuab<strong>le</strong>.Cependant, sʼil est établi que <strong>le</strong> concept moderne de sécurité humaine nepeut être envisagé que dans un Etat de droit, quel<strong>le</strong> sera la contribution dumaintien de lʼordre à la promotion de la sécurité humaine ?II – CONTRIBUTION DU MAINTIEN DE L’ORDREÀ LA SÉCURITÉ HUMAINELe maintien de lʼordre public nʼest pas forcément synonyme de pouvoirs restrictifs.Il peut en effet être extensif, en donnant aux autorités administratives <strong>le</strong>smoyens dʼagir en faveur de lʼintérêt des populations. La sécurité de lʼhomme etdu citoyen est au coeur des principes du maintien de lʼordre dont lʼaction vise,comme la sécurité humaine, à libérer lʼhomme de la peur et du besoin.Ainsi apparaît, dans <strong>le</strong> maintien de lʼordre, la centralité de lʼhomme.21- La question centra<strong>le</strong> de l’homme et <strong>le</strong>s garanties21.1 – Le respect de la personne humaineLe respect de la personne humaine est un principe général et fondamentalinscrit dans la constitution. Dans <strong>le</strong> préambu<strong>le</strong> de notre loi fondamenta<strong>le</strong>, <strong>le</strong>Sénégal affirme son adhésion à la Déclaration des Droits de l'Homme et duCitoyen de 1789, et aux instruments internationaux adoptés par l'Organisationdes Nations Unies et l'Union Africaine. Il sʼagit notamment de la DéclarationUniversel<strong>le</strong> des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, de la Conventionsur l'élimination de toutes <strong>le</strong>s formes de discrimination à l'égard des femmesdu 18 décembre 1979, de la Convention relative aux Droits de lʼEnfant du 20novembre 1989. Notre pays adhère aussi à la Charte Africaine des Droits del'Homme et des Peup<strong>le</strong>s du 27 juin 1981 qui stipu<strong>le</strong> dans son artic<strong>le</strong> 7 que «43


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainela personne humaine est sacrée. El<strong>le</strong> est inviolab<strong>le</strong> ... L'Etat a l'obligation dela respecter et de la protéger ».Ainsi, lʼexercice des missions de maintien de lʼordre implique lʼapplication derèg<strong>le</strong>s déontologiques claires et rigoureuses parmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s :- <strong>le</strong> respect des garanties fondamenta<strong>le</strong>s de la personne humaine (liberté individuel<strong>le</strong>,domici<strong>le</strong>, propriété consacrée …Art 88 et suivants du Décret 74-571 du 06 juin 1974 règ<strong>le</strong>mentant lʼemploi et <strong>le</strong> service de la gendarmerie),- la préservation des droits des victimes et des justiciab<strong>le</strong>s ; à cette fin sʼimposenotamment lʼobligation du respect de la présomption dʼinnocence et dela dignité humaine au cours des enquêtes.A ce sujet, si <strong>le</strong> pouvoir public porte atteinte aux droits d'une personne, cel<strong>le</strong>cia libre accès aux voies judiciaires <strong>pour</strong> obtenir réparation.Tout cela préfigure des garanties dʼun maintien de lʼordre à visage humain.21.2 – Les garanties d’un maintien de l’ordre respectueux des droitsdu citoyenEn effet, lʼapplication des mesures contraignantes mises en oeuvre dans <strong>le</strong>cadre du maintien de lʼordre est menée sous <strong>le</strong>s auspices des trois organesprincipaux, législatif, exécutif et judiciaire, aux fins de prévenir <strong>le</strong>s abus.Lʼapplication de la loi doit conférer une équité nécessaire entre <strong>le</strong>s individusau sein de la société.Le respect de la personne humaine est une des composantes essentiel<strong>le</strong>s delʼordre public. En conséquence, <strong>le</strong> maintien de lʼordre sʼinterdit tout acte, toutcomportement de nature à porter atteinte à la dignité humaine.Aussi, dans lʼexercice de ses attributions en matière de maintien de lʼordre, lagendarmerie sénégalaise fait-el<strong>le</strong> de ce caractère fondamental un principeéthique quʼel<strong>le</strong> respecte et fait appliquer dans <strong>le</strong> cadre de ses prérogatives de police.Ainsi, <strong>le</strong>s artic<strong>le</strong>s 77 à87 du Code de Procédure Péna<strong>le</strong> confèrent aux forcesde gendarmerie <strong>le</strong> pouvoir de faire usage de la force, dʼemployer <strong>le</strong>s armes danscertains cas et de fouil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s individus et <strong>le</strong>urs domici<strong>le</strong>s, entre autres.En retour, <strong>le</strong>s militaires de la gendarmerie sont soumis au respect strict deslois et règ<strong>le</strong>ments dans lʼexercice de <strong>le</strong>urs fonctions, sous peine de sanctionsdisciplinaires et statutaires, sans préjudice des sanctions péna<strong>le</strong>s éventuel<strong>le</strong>s.Cʼest dire que des dispositions léga<strong>le</strong>s et rég<strong>le</strong>mentaires pertinentes sontprises au Sénégal <strong>pour</strong> que force reste à la loi tout en sauvegardant <strong>le</strong>s libertésindividuel<strong>le</strong>s.21.3 – L’encadrement juridique au maintien de l’ordreAu Sénégal, la connaissance précise, par <strong>le</strong>s personnels chargés dʼassurer lasécurité, de <strong>le</strong>urs responsabilités disciplinaires et péna<strong>le</strong>s dans lʼexercice de <strong>le</strong>urtravail ne fait aucun doute. La période ou la vacuité en matière de textes favorisait<strong>le</strong>s situations équivoques nʼexiste plus. Aucun agent de la force publique nepeut plus invoquer la méconnaissance des textes de loi relatifs à lʼenvironnementjuridique de notre action. Nul ne peut se prévaloir non plus de bénéficier dela couverture de ses chefs hiérarchiques lorsquʼil se trouve devant des situationsviolant manifestement <strong>le</strong>s dispositions que nous avons évoquées supra.Faire des personnels des forces armées et de sécurité des citoyens respectueuxdes droits fondamentaux et profondément humanistes, a été de tout temps unepréoccupation de lʼEtat sénégalais, en général et de la hiérarchie en particulier.Les cas de violations des dispositions rég<strong>le</strong>mentaires notés dans <strong>le</strong> passé ont été44


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresjugés dans <strong>le</strong> respect des droits de toutes <strong>le</strong>s parties et sanctionnées, <strong>le</strong> caséchéant, par des peines disciplinaires, statutaires ou péna<strong>le</strong>s.De plus, aucune des circonstances prévues dans <strong>le</strong> cas des régimes dʼexception,lʼétat dʼurgence et lʼétat de siège, ne peut justifier de dérogations sice nʼest expressément prévu par la loi.Par ail<strong>le</strong>urs si <strong>le</strong>s libertés fondamenta<strong>le</strong>s sont rigoureusement protégées parla loi interne sénégalaise, la communauté internationa<strong>le</strong> développe éga<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s mêmes mécanismes de protection des libertés partout ou la paix et la sécuritésont menacées, dʼoù la transnationalité du maintien de lʼordre.III - MAINTIEN DE L’ORDRE ET SÉCURITÉ TRANSNATIONALEPour <strong>le</strong> Secrétaire général des Nations Unies, la sécurité humaine est laraison d'être des Nations Unies. Lʼorganisation doit continuer de l'intégrer dansses actions. Cʼest <strong>pour</strong>quoi, il a déclaré quʼ: «Au lieu d'ajouter une couche autravail de l'ONU, la sécurité humaine offre un cadre qui permet de renforcernos actions, de motiver notre travail, de revitaliser nos partenariats ». Ban Ki-Moon a aussi souligné que des progrès significatifs avaient été réalisés <strong>pour</strong>'intégrer p<strong>le</strong>inement ce concept aux opérations de l'ONU.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDe fait, pendant que <strong>le</strong>s manifestations deviennent de plus en plus vio<strong>le</strong>ntes,souvent infiltrées par des casseurs ou des extrémistes entraînés et souventmieux équipés que <strong>le</strong>s forces de sécurité, se pose <strong>le</strong> problème de lʼexercicedu maintien de lʼordre et du respect des va<strong>le</strong>urs universel<strong>le</strong>s.31 - Exercice du maintien de l’ordre et respect des va<strong>le</strong>urs universel<strong>le</strong>sTout <strong>le</strong> monde sʼaccorde aujourdʼhui sur la nécessité de mettre fin aux actesviolant certaines va<strong>le</strong>urs universel<strong>le</strong>s. Les auteurs de violations massives desdroits de lʼhomme, dans <strong>le</strong> cadre du maintien de lʼordre, ne sauraient échapperà la justice, quelque soit <strong>le</strong>ur pays dʼorigine. La Cour Péna<strong>le</strong> Internationa<strong>le</strong>a défini, à présent, un catalogue de normes péna<strong>le</strong>s prescrivant à tous <strong>le</strong>sEtats du monde et à <strong>le</strong>urs gouvernements, lʼapplication de règ<strong>le</strong>s universel<strong>le</strong>sdans <strong>le</strong> domaine des droits de lʼhomme et des droits civiques, notammentdans lʼexercice du maintien de lʼordre.La création de la Cour Péna<strong>le</strong> Internationa<strong>le</strong>, à la HAYE, constitue une étapedécisive vers cet objectif qui transcende <strong>le</strong>s frontières des Etats. Désormais, laCPI peut intervenir directement si des violations alléguées lors dʼopérations demaintien de lʼordre, ou de guerre, ne font pas lʼobjet de <strong>pour</strong>suite par <strong>le</strong>sjuridictions des pays concernés. Cette nouvel<strong>le</strong> donne appel<strong>le</strong>, dès lors, à uneréf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s principes du maintien de lʼordre sur <strong>le</strong>s théâtres internationaux.32 - Exercice du maintien de l’ordre et coopération internationa<strong>le</strong>Si comme lʼaffirme Didier BIGO (Maître de conférences à lʼIEP de Paris), « lamondialisation de la sécurité est la seu<strong>le</strong> réponse possib<strong>le</strong> à la mondialisationde lʼinsécurité ….», il va sʼen dire que <strong>le</strong> maintien de lʼordre a désormais desimplications qui dépassent <strong>le</strong>s frontières des Etats. Ce nouveau paradigme est<strong>le</strong> fruit de lʼuniversalité des va<strong>le</strong>urs, et de lʼapparition du rô<strong>le</strong> prépondérantque jouent <strong>le</strong>s organisations internationa<strong>le</strong>s en matière dʼinfluence sur <strong>le</strong> devoirde solidarité des Etats <strong>pour</strong> la protection des individus, sans distinction aucune.La charte des Nations unies prévoit dans son chapitre VI, la compétencedu conseil de Sécurité <strong>pour</strong> rég<strong>le</strong>r tout différend dont <strong>le</strong> développement estsusceptib<strong>le</strong> de menacer la paix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s. Les actions delʼONU dépassent désormais, <strong>le</strong> cadre des recommandations <strong>pour</strong> passer àdes actes concrets, lorsque <strong>le</strong>s circonstances lʼexigent.En cas de menace ou de rupture de la paix, lʼONU peut employer des moyens45


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainepacifiques et / ou des moyens comportant <strong>le</strong> recours à la force. Il sʼagit doncdʼimposer, aux contrevenants à lʼordre international, des contraintes commela rupture des relations diplomatiques, ou lʼinterruption complète ou partiel<strong>le</strong>des relations économiques, conformément à lʼartic<strong>le</strong> 41 de la charte et <strong>le</strong> recoursà lʼusage de la force, aux termes de lʼartic<strong>le</strong> 42 de la dite charte, si detel<strong>le</strong>s mesures sʼavèrent insuffisantes.Les forces de défense et de sécurité du Sénégal sont particulièrement impliquéesdans la gestion de ces problèmes aujourdʼhui. Leur contribution à larestauration de la paix, de lʼEtat de droit et à la reconstruction des pays enconflit en Afrique et dans <strong>le</strong> monde est fort appréciée.Quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s perspectives, aujourdʼhui, sur <strong>le</strong> plan africain ?33 - Perspectives africainesDurant <strong>le</strong>s quatre premières décennies qui ont suivi <strong>le</strong>ur accession à lʼindépendance,beaucoup dʼEtats africains se sont particulièrement distingués dansdes actions vio<strong>le</strong>ntes à lʼencontre de <strong>le</strong>urs propres citoyens. Aujourdʼhui encore,au moment de la célébration du cinquantenaire de lʼaccession à la souverainetéde la plupart de nos Etats, il convient de reconnaître que la façon deconduire <strong>le</strong>s actions de maintien de lʼordre dans certains pays continue toujoursdʼêtre un sujet de préoccupation <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s défenseurs des droits de lʼhomme.Il est en effet constaté et admis, quʼaujourdʼhui, <strong>le</strong> maintien de lʼordre est particulièrementcomp<strong>le</strong>xe et diffici<strong>le</strong>. Il est devenu une affaire de professionnels.Il nʼest pas exagéré de dire quʼil est plus faci<strong>le</strong> de mener une action de combatquʼune action de maintien de lʼordre, car il sʼagit dans <strong>le</strong> premier cas decombattre un ennemi identifié qui mène une action de guerre et qui cherchedes gages. Dans <strong>le</strong> second cas, il sʼagit de gérer des citoyens qui revendiquentun avantage ou qui défendent une cause, parfois avec vio<strong>le</strong>nce, et dontil faut assurer <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> social. Ici, <strong>le</strong>s forces chargées du maintien de lʼordredoivent accepter de prendre des coups sans en donner, ou de repousser<strong>le</strong> plus longtemps possib<strong>le</strong> lʼusage de la force.Pour notre part, nous pensons que <strong>le</strong>s forces de sécurité et de défense africaines,<strong>pour</strong> rester crédib<strong>le</strong>s, doivent re<strong>le</strong>ver <strong>le</strong> défi, avec <strong>le</strong> concours desEtats, de la reforme du secteur de sécurité.Ce défi passe nécessairement par un redimensionnement des forces, <strong>le</strong>urspécialisation, <strong>le</strong>ur formation, <strong>le</strong>ur entraînement et <strong>le</strong>ur équipement.1° La réforme du secteur de la sécurité et la spécialisation desforces chargées du maintien de l’ordreLʼexercice du maintien de lʼordre est, je lʼai dit plus haut, un métier de professionnelsqui ne doit plus être confié à nʼimporte quel<strong>le</strong> force, fût-el<strong>le</strong> une forcede police ou de gendarmerie non spécialisée, encore moins une unité militairede combat.En effet, il est constaté que la majorité des violations massives des droits delʼhomme sont généra<strong>le</strong>ment liées à lʼemploi de forces inadaptées au maintiende lʼordre.Aussi, <strong>le</strong>s Etats africains ont-ils lʼobligation de concevoir un nouveau systèmede sécurité adapté aux réalités actuel<strong>le</strong>s, de lʼorganiser en tenant compte desrisques et menaces du moment et aux évolutions futures.46


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresIl sʼagira dʼabord de prendre en compte quatre facteurs déterminants :- La nouvel<strong>le</strong> politique africaine fondée sur lʼavènement de blocs homogènes(CEDEAO,CEMAC,ETC…)- Lʼéloignement de conflits interétatiques ;- Lʼémergence dʼune sécurité intérieure de plus en plus préoccupante ;- La revendication, par des populations de plus en plus exigeantes, de <strong>le</strong>ursdroits <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur sécurité.Une fois ce secteur réformé, il sʼagira ensuite de <strong>le</strong> doter de moyens conséquentsen rapport avec <strong>le</strong>s objectifs attendus. Une grande partie des budgetsde sécurité devrait être consacrée à la génération de moyens dédiés à la sécuritéintérieure.Cʼest ainsi quʼil sera possib<strong>le</strong> de créer des unités de police (police et gendarmerie)adaptées et capab<strong>le</strong>s de bien prendre en compte la sécurité intérieure.Dès lors, <strong>le</strong>ur formation, <strong>le</strong>ur entraînement et <strong>le</strong>ur équipement devraient êtrelʼultime défi à re<strong>le</strong>ver.2°) La formation, <strong>le</strong> perfectionnement des équipements et destechniques d’interventionForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLa formation des unités dédiées au maintien de lʼordre est une phase crucia<strong>le</strong>dans la prise en compte de la préservation de la sécurité humaine. Il sʼagit, audelàde la formation technique et tactique classique, de mettre lʼaccent surlʼaspect professionnel, mais éga<strong>le</strong>ment de consacrer une place conséquenteau droit international humanitaire.Comment <strong>pour</strong>rait-on mener cette formation ?La mutualisation des structures de formation au niveau régional me paraît êtreun axe à privilégier. En effet, <strong>pour</strong> garantir lʼinteropérabilité des forces en attentedans <strong>le</strong>s différentes régions africaines, il est indispensab<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s différentescomposantes portent <strong>le</strong>s mêmes va<strong>le</strong>urs éthiques et déontologiques.En effet, seu<strong>le</strong> cette commune vision <strong>pour</strong>rait permettre dʼassurer <strong>le</strong> respectde la personne humaine sur <strong>le</strong>s théâtres internationaux. Cela est une préoccupationmajeure de la communauté internationa<strong>le</strong>.Le Sénégal, qui abrite un Centre de Perfectionnement de la Gendarmerie Mobi<strong>le</strong>,est prêt à mettre cette structure à la disposition de la CEDEAO, <strong>pour</strong> partageravec <strong>le</strong>s forces de police des pays amis, <strong>le</strong>s savoir-faire qui y sontdispensés.En définitive, nous nous sommes efforcés de démontrer que <strong>le</strong> maintien delʼordre doit être lʼ« ultima ratio regum » (<strong>le</strong> dernier argument des rois) <strong>pour</strong> lapréservation des intérêts de lʼEtat sur <strong>le</strong> plan intérieur. A cette fin, il assure defaçon irremplaçab<strong>le</strong> lʼéquilibre nécessaire entre <strong>le</strong>s aspirations naturel<strong>le</strong>s et individuel<strong>le</strong>sdes citoyens et la nécessité de sauvegarder lʼintérêt général, afindʼéviter <strong>le</strong>s conflits et lʼinstabilité.Il a éga<strong>le</strong>ment une fonction promotionnel<strong>le</strong> en faveur de la paix socia<strong>le</strong>, de lasécurité, des droits naturels et donc de la sécurité humaine. Le rô<strong>le</strong> des forcesde sécurité est avant tout dʼaccompagner lʼaction de lʼEtat, dans la recherchedʼune réponse adaptée à la nature des menaces qui caractérisent la sociétécontemporaine.Nos forces doivent contribuer à répondre aux défis sécuritaires des Etats, enmettant en œuvre des moyens modernes et efficaces, <strong>pour</strong> la protection desindividus, des communautés et de <strong>le</strong>urs biens. Le maintien de lʼordre consti-47


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainetue une voie privilégiée <strong>pour</strong> arriver à cet objectif majeur, à tous points de vue.Cependant, quelque soit <strong>le</strong> degré de développement et dʼexercice des libertés,lʼordre public devra être sauvegardé, car « force doit rester à la loi ». Cʼestdu reste, parce quʼon veut sauvegarder <strong>le</strong>s libertés quʼil faut <strong>le</strong>s protéger.Je ne saurai terminer sans dire que si <strong>le</strong> concept de sécurité humaine estnouveau, son contenu est très ancien. Il est même lʼessence du service de lagendarmerie.En effet, lorsque <strong>le</strong> commandant de la brigade de Ourossogui, de retour dʼunevisite de secteur rend compte de lʼapparition dʼune épizootie, de la pénuriedʼeau dans certaines localités de sa circonscription, de la mort en massedʼoiseaux ou de lʼeffondrement dʼun pont empêchant <strong>le</strong>s populations de seravitail<strong>le</strong>r en denrées de première nécessité, nʼassure-t-il pas une mission desécurité humaine ?Je vous remercie de votre aimab<strong>le</strong> attention.Le Général de divisionAbdoulaye Fal<strong>le</strong>st actuel<strong>le</strong>ment Haut Commandant dela Gendarmerie et directeur de la justicemilitaire de la République du Sénégal. Auparavantil a exercé <strong>le</strong>s fonctions de Chefd'état-major particulier du président et deGouverneur militaire du Palaisde la République.48


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2.4 Intervention de Monsieur Daniel Hel<strong>le</strong>, Conseil<strong>le</strong>r diplomatique auComité International de la Croix Rouge (CICR), Genève/SuisseRésumé : In his intervention, Daniel HELLE, diplomatic consultant of the InternationalCommittee of the Red Cross, talks about the concept of human securityand about the different types of threats against human security. In his analysis, DanielHELLE names three different types of engagement of the Red Cross. Thefirst one is the service in armed conflicts inside or between states. Today, this sectoris relatively well defined and regulated by norms. The second type of scenariois actions of armed forces outside of armed conflicts. Examp<strong>le</strong>s for this kind ofsituation could be the deployment of armed forces in line with massive political demonstrations,social revolts or in order to encounter the actions of criminal gangs.The third type of service is a scenario where different groups of the populationbatt<strong>le</strong> against each other, outside of armed conflicts and without any armed forcedinflicted into the conflict. This could be, for examp<strong>le</strong>, a fight to gain control onwater supply stations, but also the possib<strong>le</strong> conflicts during an e<strong>le</strong>ctoral campaignin the run-up to e<strong>le</strong>ctions. In 2009 alone, the Red Cross was involved in 101 missionsof conflicts of the two last categories in 65 different countries.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLE DÉFI DE LA SECURITE HUMAINE : PERMETTRE AU GENSDE VIVRE A L’ABRI DE LA PEUR ET DU BESOINMerci, MON GÉNÉRAL, d'avoir invité <strong>le</strong> Comité International de la Croix-Rouge (CICR) à assister à cet évènement important.Alors que la perspective traditionnel<strong>le</strong> des forces de défense et de sécurité estde veil<strong>le</strong>r à la sécurité de l'état, <strong>le</strong> concept de la sécurité humaine prendcomme point de départ la sécurité de l'individu contre diverses formes demenaces. Les avis divergent sur la teneur précise qu'il devrait prendre. Pourcertains acteurs, il s'agit avant tout de préserver l'individu des menacessécuritaires, à savoir permettre aux gens de pouvoir vivre à l'abri de la peur.Cel<strong>le</strong>-ci peut être engendrée par <strong>le</strong>s conflits armés, internationaux ou noninternationaux,mais éga<strong>le</strong>ment par l'abus de pouvoir ou la criminalité. Pourd'autres acteurs, il est tout aussi important de protéger l'individu contre <strong>le</strong>smenaces à sa sécurité matériel<strong>le</strong>, donc de <strong>le</strong> mettre à l'abri du besoin, de lapauvreté, de la maladie, de l'analphabétisme ou autre. Comme nous <strong>le</strong> verronsci-après, <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité peuvent avoir une influencedécisive dans <strong>le</strong>s deux domaines.Sans entrer dans une analyse approfondie sur <strong>le</strong>s relations entre la sécuritéterritoria<strong>le</strong>, la sécurité nationa<strong>le</strong> et la sécurité humaine, il est évident qu'i<strong>le</strong>xiste de nombreux liens entre la sécurité publique et la sécurité humaine.Par exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s forces armées ont la tâche de préserver l'intégrité territoria<strong>le</strong>en évitant la guerre, ce qui contribue naturel<strong>le</strong>ment à la sécurité humaine. Entemps de paix, il importe d'éviter que la société ne se trouve dans une situationde non-droit dans laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s individus sont exposés à l'arbitraire ou à lavio<strong>le</strong>nce, d'origine publique ou privée. En cas de conflits armés, il est impératifd'épargner <strong>le</strong>s civils des souffrances de la guerre. Ce sont là desdomaines où <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité peuvent jouer un rô<strong>le</strong> depremier ordre, en bien comme en mal. En bien s'ils s'acquittent de <strong>le</strong>ursobligations de manière adéquate, en mal s'ils font preuve d'abus de pouvoirou restent passifs quand la situation exige <strong>le</strong>ur implication <strong>pour</strong> protéger <strong>le</strong>spersonnes vulnérab<strong>le</strong>s.Si <strong>le</strong>s forces armées peuvent occasionnel<strong>le</strong>ment contribuer éga<strong>le</strong>ment à lasécurité humaine au sens large, par exemp<strong>le</strong> en cas de catastrophe naturel<strong>le</strong>,en mettant à disposition des moyens logistiques, en réparant un pont ou uneLe ICRC est représenté au Sénégal parune délégation régiona<strong>le</strong> qui, venant enappui aux autorités nationa<strong>le</strong>s, sʼattache àdiffuser <strong>le</strong> plus largement possib<strong>le</strong> <strong>le</strong> droitinternational humanitaire (DIH) auprès desforces armées et des autres porteursd'armes ainsi que dans <strong>le</strong>s universités. Ilsoutient par ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong>s efforts des autoritésde ces pays en <strong>le</strong>ur offrant son expertise<strong>pour</strong> la ratification et la mise en œuvrenationa<strong>le</strong> des traités de DIH.La délégation régiona<strong>le</strong> soutient éga<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s activités des Sociétés nationa<strong>le</strong>s de laCroix-Rouge du Cap-Vert, de la Gambie,de la Guinée-Bissau et du Sénégal dans<strong>le</strong>urs activités au profit des populations <strong>le</strong>splus vulnérab<strong>le</strong>s.49


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineroute, l'objet de cette intervention est plus limitée. Nous allons ainsi examiner<strong>le</strong>s outils à la disposition des Etats <strong>pour</strong> minimiser la vio<strong>le</strong>nce, puis voir deplus près <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> que peuvent jouer <strong>le</strong>s forces armées à cet égard.Dans ce cadre, nous verrons éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de soutien que peut jouer <strong>le</strong> CICR.Sur <strong>le</strong> plan analytique, il convient de distinguer trois contextes différents, enfonction du cadre juridique qui est applicab<strong>le</strong> <strong>pour</strong> jugu<strong>le</strong>r la vio<strong>le</strong>nce armée:Le premier est celui des conflits armés, alors que <strong>le</strong>s deux autres sont des situationsde vio<strong>le</strong>nce en dehors des conflits armées. En 2009, <strong>le</strong> CICR étaitactif dans 101 tel<strong>le</strong>s "autres situations de vio<strong>le</strong>nce", dans 65 pays.Le premier contexte, celui des conflits armés, est relativement bienrèg<strong>le</strong>menté sur <strong>le</strong> plan normatif, notamment par <strong>le</strong> droit international humanitaire.Ce corps de droit s'applique tant <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s conflits armés internationauxque <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s conflits internes, et il est juridiquement contraignant tant <strong>pour</strong> <strong>le</strong>sEtats que <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s acteurs non-Etatiques. Le vrai défi ici est donc d'assurerson application dans la pratique.Pour un Gouvernement, il est important d'assurer que <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de basesoient connues par toute la population, afin qu'el<strong>le</strong>s puissent être appliquéesen cas de conflit. Il s'agit en premier lieu des règ<strong>le</strong>s et principes visant à assurerque <strong>le</strong>s personnes ne prenant pas une part active aux hostilités soienttraités humainement, respectés et protégés. Dans la mesure du possib<strong>le</strong>, <strong>le</strong>scivils doivent être préservés des conséquences du conflit armé, qu'il s'agissede la conduite des hostilités, de l'approvisionnement en vivres ou du maintiendes services publics. Il importe éga<strong>le</strong>ment de permettre aux organisations humanitairesde travail<strong>le</strong>r <strong>pour</strong> alléger <strong>le</strong>s souffrances. Il convient de rappe<strong>le</strong>rque <strong>le</strong> DIH ne s'applique pas seu<strong>le</strong>ment aux forces armées, mais peut éga<strong>le</strong>mentdicter <strong>le</strong> comportement d'un policier, d'un juge, d'un directeur d'hôpital,ou d'un fonctionnaire des services sociaux. Ces autorités doivent doncéga<strong>le</strong>ment connaître <strong>le</strong>s normes pertinentes, et se préparer à pouvoir agir enconnaissance, par exemp<strong>le</strong> <strong>pour</strong> nourrir et procurer un abri à une populationdéplacée par <strong>le</strong> conflit.Vous connaissez déjà bien <strong>le</strong> droit humanitaire, et ne je vais donc pas élaborersur la teneur de ces normes. Je rappel<strong>le</strong> cependant l'importance d'assurerque tous <strong>le</strong>s membres des forces armées soient informés des règ<strong>le</strong>spertinentes, chacun à son niveau, selon ses responsabilités. Il ne suffit pasnon plus de se contenter d'informer de l'existence des normes internationa<strong>le</strong>s: <strong>pour</strong> une véritab<strong>le</strong> intégration du droit, <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s doivent être reflétées dans<strong>le</strong> droit interne, et traduites dans <strong>le</strong>s doctrines, procédures ou ordres militaires.Ensuite, une formation pratique est primordia<strong>le</strong>, à tous <strong>le</strong>s niveaux. En outre,il doit exister des mécanismes <strong>pour</strong> veil<strong>le</strong>r à ce que <strong>le</strong>s normes soient appliquées,qui incluent un système de sanction en cas de non-respect. Chacunede ces questions constituent des défis importants.Rappelons que <strong>le</strong> CICR, qui a <strong>pour</strong> mandat notamment de promouvoir <strong>le</strong> DIH,peut offrir un soutien aux Etats et à <strong>le</strong>urs forces armées dans ces domaines.En outre, en cas de conflit, <strong>le</strong> CICR, en plus de ses activités d'assistance humanitaire,cherche à établir un dialogue confidentiel avec toutes <strong>le</strong>s parties auconflit. Il peut ainsi <strong>le</strong>ur faire part de ses préoccupations humanitaires et formu<strong>le</strong>rdes recommandations <strong>pour</strong> améliorer la situation.Le deuxième contexte est celui ou <strong>le</strong>s forces de sécurité agissent endehors du conflit armé. On peut imaginer des situations où <strong>le</strong>s agents de l'Etatsont déployées <strong>pour</strong> répondre à une manifestation politique de grande amp<strong>le</strong>ur,des troub<strong>le</strong>s sociaux, ou encore <strong>pour</strong> réprimer la criminalité liée aux gangs.50


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresLa décision d'employer <strong>le</strong>s forces armées relève de la souveraineté des Etats.Il est de la responsabilité des Etats d'assurer que ses agents de sécurité respectent<strong>le</strong> droit applicab<strong>le</strong>, en l'occurrence <strong>le</strong>s droits de l'homme et <strong>le</strong> droit national.Cela peut représenter un défi particulier lorsque <strong>le</strong>s forces armées sontappelées en renfort <strong>pour</strong> maintenir l'ordre public, car il s'agit là d'une missionqui est fondamenta<strong>le</strong>ment différente de cel<strong>le</strong> de vaincre un ennemi. Pour neciter que quelques différences, à titre illustratif : durant <strong>le</strong> combat, <strong>le</strong>s militairessont vêtus en attirail de camouflage, alors que <strong>le</strong> policier adopte uneposture très visib<strong>le</strong>, voir intimidante <strong>pour</strong> réaliser sa mission sans devoir faireusage de la force. Les militaires usent de la force <strong>pour</strong> affaiblir l'ennemi, alorsque <strong>le</strong>s policiers ne doivent l'utiliser qu'en dernier recours, et alors au strict minimum.Ainsi, <strong>le</strong>s policiers tirent norma<strong>le</strong>ment à la vertica<strong>le</strong>, en sommation,alors que dans une situation de combat <strong>le</strong>s militaires tirent horizonta<strong>le</strong>ment,<strong>pour</strong> viser l'ennemi.En termes de sécurité humaine, des dérapages peuvent faci<strong>le</strong>ment mettre <strong>le</strong>spopulations en danger plutôt que de <strong>le</strong>s protéger; en termes d'accomplissementde la mission, <strong>le</strong>s tensions publiques peuvent faci<strong>le</strong>ment se trouver aggravées,et <strong>le</strong>s frustrations peuvent se diriger contre <strong>le</strong>s forces de l'ordre. Il estdonc évident que si <strong>le</strong>s forces militaires ne sont pas formées, entraînées etéquipées <strong>pour</strong> des opérations de maintien de l'ordre, <strong>le</strong>ur implication <strong>pour</strong>raitavoir des conséquences non souhaitées. Dans de tels cas, l'appel aux forcesarmées <strong>pour</strong> assurer l'ordre public devrait se limiter à ce qui est nécessaire<strong>pour</strong> rétablir l'ordre. De plus <strong>le</strong> choix des unités employées devrait se porteren priorité sur cel<strong>le</strong>s ayant reçu <strong>le</strong>s préparatifs requis.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDans de nombreux pays, <strong>le</strong> CICR partage son expertise avec <strong>le</strong>s forces de sécurité<strong>pour</strong> la révision des procédures opérationnel<strong>le</strong>s et de la formation <strong>pour</strong>assurer une conformité avec <strong>le</strong>s normes juridiques pertinentes. Il maintientéga<strong>le</strong>ment un dialogue confidentiel sur des questions humanitaires, tel quel'usage de la force. La visite de détenus est souvent une composante importantede notre réponse opérationnel<strong>le</strong>, visant à éviter la détention arbitraire, <strong>le</strong>smauvais traitements ou encore <strong>le</strong>s disparitions.Le troisième contexte, éga<strong>le</strong>ment en dehors du conflit armé, est celuiou des groupes de population s'affrontent, sans que <strong>le</strong>s forces de sécuritéde l'Etat ne soient l'acteur prédominant. Il s'agit là de situations très diverses.Sur <strong>le</strong> plan local, il peut s'agir de lutte entre communautés <strong>pour</strong> un point d'eauou <strong>pour</strong> l'accès à la terre. Sur <strong>le</strong> plan national, on peut penser à des contextesé<strong>le</strong>ctoraux particulièrement tendus. De tel<strong>le</strong>s situations peuvent éga<strong>le</strong>mentengendrer beaucoup de vio<strong>le</strong>nce, avec des b<strong>le</strong>ssés par centaines ou par milliers,avec des déplacements de populations importants.Le DIH ne s'applique pas à de tel<strong>le</strong>s situations, puisqu'il ne s'agit pas d'unconflit armé. Les droits de l'homme ne s'appliquent pas non plus aux agissementsdes acteurs privés. Le régime juridique applicab<strong>le</strong> est donc parfois <strong>le</strong>droit international pénal (dans la pratique uniquement lors de génocides oud'actes de terrorisme) et <strong>le</strong> droit national. Alors que <strong>le</strong> DIH admet l'utilisationde la force à condition qu'el<strong>le</strong> soit dirigée contre des objectifs militaires, et que<strong>le</strong>s droits de l'homme règ<strong>le</strong>mentent l'utilisation de la force, nous n'avons aucunerèg<strong>le</strong> limitant l'utilisation de la force dans <strong>le</strong> cas de figure nous occupantici, puisque l'usage de la force el<strong>le</strong>-même est interdite.Le CICR n'interviendra donc en général pas sur une base juridique, mais feraappel au sens d'humanité des porteurs d'armes, <strong>le</strong>ur demandant de respecter <strong>le</strong>personnel médical ou d'épargner <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s. Il collabore souvent avec la SociétéNationa<strong>le</strong> de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge, qui a éga<strong>le</strong>ment un rô<strong>le</strong>51


DEUXIÈME PARTIE – Interventions En Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineimportant dans de tel<strong>le</strong>s situations, par exemp<strong>le</strong> <strong>pour</strong> la mettre en mesure dedispenser des premiers secours à travers <strong>le</strong> pays en cas de besoin.Sous l'ang<strong>le</strong> de la sécurité humaine, <strong>le</strong>s communautés doivent percevoir qu'i<strong>le</strong>xiste des alternatives au recours à la vio<strong>le</strong>nce <strong>pour</strong> défendre <strong>le</strong>urs droits.Les Gouvernements devraient donc assurer qu'il existe des tribunaux oud'autres mécanismes <strong>pour</strong> résoudre des litiges, et favoriser la reprise rapided'une vie norma<strong>le</strong> après <strong>le</strong>s crises. Le CICR ne peut que jouer un rô<strong>le</strong> limitéà cet égard, par exemp<strong>le</strong> en réhabilitant un système d'irrigation d'eau <strong>pour</strong> faciliterla reprise de l'agriculture, en facilitant l'accès à la santé ou <strong>le</strong> retour despopulations déplacées. Dans <strong>le</strong> cadre scolaire, en appui aux Gouvernementsde plusieurs pays à travers <strong>le</strong> monde, <strong>le</strong> CICR a éga<strong>le</strong>ment contribué àsensibiliser et influencer <strong>le</strong>s jeunes sur <strong>le</strong>s problèmes engendrés par lavio<strong>le</strong>nce et <strong>le</strong>ur faire prendre conscience de <strong>le</strong>ur responsabilité individuel<strong>le</strong> àcet égard. Nous cherchons actuel<strong>le</strong>ment à adapter ce modu<strong>le</strong> <strong>pour</strong> mieuxrépondre à la vio<strong>le</strong>nce urbaine.Sous l'ang<strong>le</strong> de la sécurité humaine, <strong>le</strong> problème <strong>pour</strong>rait être caractérisécomme une "absence d'Etat". Dans cette situation, la population vit dans unétat de peur et <strong>le</strong>s victimes se trouvent à la merci de <strong>le</strong>urs agresseurs, sansrecours adéquat aux forces de l'ordre. Une tel<strong>le</strong> insécurité aura bien souvent desrépercussions socio-économiques, avec un manque d'investissements et dedéveloppement, <strong>le</strong> départ de personnes qualifiées et autres ressources humaines,avec <strong>pour</strong> effet des problèmes tels qu'une pauvreté généralisée, desconditions de vie insalubres et un taux de mortalité é<strong>le</strong>vé parmi <strong>le</strong>s enfants.C'est <strong>pour</strong>quoi <strong>le</strong>s forces de sécurité doivent assurer une présence effectiveet se comporter en conformité avec <strong>le</strong>s normes internationa<strong>le</strong>s pertinentes. Ence qui concerne <strong>le</strong>s forces armées, cel<strong>le</strong>s-ci devraient être prêtes à faire demême, au cas où <strong>le</strong>ur appui soit sollicité.En conclusion, il est nécessaire :- d'assurer un meil<strong>le</strong>ur respect des corps de droit existants,- de renforcer <strong>le</strong>s lois et procédures nationa<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> traduire <strong>le</strong>s obligationsinternationa<strong>le</strong>s en réalité sur <strong>le</strong> terrain,- de former et entraîner <strong>le</strong>s forces armées et <strong>le</strong>s forces de sécurité,- de soutenir l'action des organisations humanitaires, afin qu'el<strong>le</strong>s puissentavoir accès aux personnes concernées.Daniel Hel<strong>le</strong>est Conseil<strong>le</strong>r Diplomatique au siège duComité international de la Croix-Rouge(CICR) à Genève au sein de la "Divisiondes organisations multilatéra<strong>le</strong>s, de la doctrineet de l'action humanitaire".Auparavant, il occupait <strong>le</strong>s fonctions deChef Adjoint dans la Délégation du CICRen Guinée et cel<strong>le</strong> auprès des NationsUnies à New York. Il a éga<strong>le</strong>ment travaillécomme Conseil<strong>le</strong>r Juridique dans laDélégation du CICR en Iraq et au siège.Avant de rejoindre <strong>le</strong> CICR, Daniel Hel<strong>le</strong> atravaillé comme Expert Associé au Bureaudu Haut Commissaire <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Droits del'Homme des Nations Unies et commeConseil<strong>le</strong>r Juridique auprès de l'InstitutNorvégien <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Droits de l'Homme àOslo.Il s'agit là d'un impératif humanitaire.Dans <strong>le</strong> cadre de son mandat, <strong>le</strong> CICR est prêt à soutenir de tels efforts.52


DEUXIÈME PARTIE – Interventions En Séances PlénièresSÉANCE PLÉNIÈRE N° IIMardi 9 novembre 2010 - MatinThème de la séance : <strong>le</strong>s relations des FDS avec la nationPANEL 3 « L’ARMÉE, ÉMANATION DE LA NATION »2.5 Intervention du Professeur Mathurin C. HOUNGNIKPO, Centred'Etudes Strategiques Africaines, National Defense University,Washington/DC, Etats-UnisRésumé : In his intervention, Professor Houngnikpo defends his point of view thatthe defence and security forces - like other institutions of the state - must start undertakinga process of democratization and finally concede the control of their activitiesto the Civilians. He underlines the fact that, whi<strong>le</strong> most African countries arece<strong>le</strong>brating the fiftieth anniversary of their independence, opinions on the performanceof African states are ming<strong>le</strong>d at best if not downright negative. Many Africansexpress their "annoyance" by several ways. Hope and euphoria of the 1960shave gradually been replaced by disillusionment and in some cases even anger,just as did the democratic renewal of the 1990s.Contrary to the exemp<strong>le</strong> of Ghanaian democratic e<strong>le</strong>ctions, where the results wereendorsed by the various protagonists, albeit some false notes, and some other encouragingcases, there are more and more cases of distress such as Ivory Coast,Kenya, Mauritania, Guinea and Niger, where the armed forces once again have seenthe need to "take their responsibilities".Since 1999, when OAU prohibited taking power by force, not <strong>le</strong>ss than 33 coupsand attempted coups d'Etat took place on the continent without thereby empoweredbodies have managed to restore " <strong>le</strong>gality and constitutional order”.Before this background, Prof Houngnikpo raises the issue of the ro<strong>le</strong> of the army,which should be “the emanation of nation” in the political process in Africa. Ro<strong>le</strong>sand missions of the security forces, including armed forces, must consider the typeand nature of threats faced by African countries and have to take into account thesubsistance expences for their armed forces and its impact on other requirementsof society. Given the vital ro<strong>le</strong> of armed forces within society, the pace of progresstowards democracy in Africa is directly linked to the speed and depth of acceptingdemocratic values and adopting recommendations by the African military. For ProfessorHoungnikpo, the essential questions are: which army against which threats?Which army to which society? What type of army with which means.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARL’ARMÉE, ÉMANATION DE LA NATIONDans <strong>le</strong> cadre du processus de formation de lʼÉtat dans lʼAfrique postcolonia<strong>le</strong>,<strong>le</strong>s forces armées ont été établies comme élément manifeste de dispositifde lʼÉtat, <strong>le</strong>ur mission principa<strong>le</strong> étant la défense de la nation contre touteagression externe. En dʼautres termes, la principa<strong>le</strong> raison dʼêtre de lʼétablissementdʼune armée était la défense territoria<strong>le</strong> de lʼétat. Par la suite, <strong>le</strong>sforces armées étaient censées se transformer en forces nationalistes et nonpartisanesdont la loyauté appartenait avant tout à lʼétat. Malheureusement,lʼère postcolonia<strong>le</strong> en Afrique a vu se produire un dérapage des forces arméespar rapport à cette philosophie dans de nombreux états africains : depuislʼavènement de lʼère de « lʼindépendance politique », <strong>le</strong>s forces armées deplusieurs États africains se sont divisées en factions, en groupes ethniques eten forces partisanes loya<strong>le</strong>s à toute une gamme dʼintérêts particuliers divers,au détriment de la société toute entière. Lʼune des conséquences de cetteréalité est la détermination par <strong>le</strong>s forces armées que <strong>le</strong>ur fonction premièreest de « débarrasser la société des politiciens irrécupérab<strong>le</strong>s ».Le Centre dʼétudes stratégiques delʼAfrique soutient <strong>le</strong>s politiques étrangèreset de sécurité des Etats Unis en renforçant<strong>le</strong>s capacités stratégiques des Etats africainsà identifier et résoudre <strong>le</strong>s problèmesde sécurité de façon à promouvoir la coopérationentre civils et militaires, <strong>le</strong> respectdes va<strong>le</strong>urs démocratiques, ainsi que desauvegarder <strong>le</strong>s droits humains.53


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine32Voir Dominique Bangoura, « Les armées africainesface au défi démocratique » disponib<strong>le</strong> surhttp://www.afrology.com/soc/armees_afrique.htmlDans <strong>le</strong> sillage de ce qui a été perçu comme un échec de lʼengagement affirmé desdirigeants civils envers <strong>le</strong>s objectifs de la modernisation et du développementrapides, plusieurs officiers des forces armées africaines se sont lancés dans une« mission » <strong>pour</strong> mettre un terme à la pauvreté, à lʼanalphabétisme et à la maladie.Dans <strong>le</strong> cadre dʼune transformation spectaculaire, <strong>le</strong>s forces armées africaines,perçues comme « faib<strong>le</strong>s et fragi<strong>le</strong>s », sont devenues des forces politiques puissantes.La fréquence des coups dʼÉtats militaires, tant réels que supposés, donnelʼimpression que <strong>le</strong> continent souffre dʼune culture politique permissive. Lorsquʼel<strong>le</strong>sne sont pas directement au pouvoir, <strong>le</strong>s forces armées africaines sont devenuesune sorte dʼéminence grise tirant <strong>le</strong>s ficel<strong>le</strong>s dans lʼombre, sé<strong>le</strong>ctionnantde manière absolue qui gouverne et selon quel<strong>le</strong>s modalités.Alors que la plupart des pays africains viennent de célébrer <strong>le</strong> cinquantième anniversairede <strong>le</strong>ur indépendance, <strong>le</strong>s avis sur la performance des États africainssont mitigés au mieux sinon plutôt négatifs. Beaucoup dʼAfricains expriment<strong>le</strong>ur ras-<strong>le</strong>-bol de plusieurs manières. Lʼespoir et lʼeuphorie des années 1960 ontété progressivement remplacés par la désillusion et la colère dans certains cas,tout comme <strong>le</strong> renouveau démocratique des années 1990. En face de lʼexemp<strong>le</strong>ghanéen dʼé<strong>le</strong>ctions démocratiques, certes avec quelques couacs, maisdont <strong>le</strong>s résultats ont été acceptés par <strong>le</strong>s différents protagonistes, et dequelques autres cas encourageants, se trouvent des cas de détresse commela Côte dʼIvoire, <strong>le</strong> Kénya, La Mauritanie, la Guinée et <strong>le</strong> Niger où lʼarmée a, unefois encore, jugé uti<strong>le</strong> de « prendre ses responsabilités ». Alors quʼen 1999,lʼOUA interdisait la prise de pouvoir par <strong>le</strong>s armes, pas moins de 33 putschs ettentatives de coups dʼEtat se sont produits sur <strong>le</strong> continent sans que <strong>pour</strong> autant<strong>le</strong>s instances habilitées aient réussi à restaurer « la légalité et lʼordre constitutionnel». Ceci pose la problématique du rô<strong>le</strong> de lʼarmée, qui devrait êtrelʼémanation de la nation, dans <strong>le</strong> processus politique en Afrique.Alors que lʼAfrique progresse, <strong>le</strong> débat ne manquera pas de se concentrer notammentsur <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s missions des forces de sécurité, y compris <strong>le</strong>sforces armées, particulièrement au vu du type et de la nature des menacesauxquel<strong>le</strong>s sont confrontés <strong>le</strong>s pays africains, ainsi que sur la compositiondes forces de sécurité et sur <strong>le</strong> coût de lʼentretien des forces armées et sonimpact sur <strong>le</strong>s autres exigences de la société. Étant donné <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> vital desforces armées au sein de la société, <strong>le</strong> rythme du progrès vers la démocratieen Afrique est lié directement à la célérité et à la profondeur de lʼadoption desva<strong>le</strong>urs démocratiques par <strong>le</strong>s militaires africains. Il sʼagira essentiel<strong>le</strong>mentde sʼassurer que lʼarmée en particulier, ou <strong>le</strong>s forces de sécurité de façon généra<strong>le</strong>,sont sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> civil afin quʼel<strong>le</strong> ne devienne un force contre laquel<strong>le</strong>il faudra protéger <strong>le</strong>s citoyens quʼel<strong>le</strong> est censé protéger.À partir du début des années 1990, <strong>le</strong>s armées africaines sont confrontéesaux processus démocratiques. Deux types de comportement apparaissent,selon que <strong>le</strong>s officiers se montrent favorab<strong>le</strong>s ou défavorab<strong>le</strong>s au changement.Se pose alors la problématique globa<strong>le</strong> de lʼarmée : quel<strong>le</strong> armée faceà quel<strong>le</strong>s menaces ? Quel<strong>le</strong> armée <strong>pour</strong> quel<strong>le</strong> société ? Quel type dʼarméeavec quels moyens 32 ?I. Armée en tant qu’émanation de la nation, mais instrument du pouvoirAlors que la démocratie a ravivé quelque espoir sur <strong>le</strong> continent, son futur dépenddu contrô<strong>le</strong> civil ou démocratique de lʼarmée, <strong>le</strong>quel, selon Welch, signifieque « <strong>le</strong> gouvernement, dirigé par un civil, prend <strong>le</strong>s décisions-clé que<strong>le</strong>s forces armées sont supposées exécuter de manière loya<strong>le</strong>, efficace, etsans remise en question, dans <strong>le</strong> cadre de <strong>le</strong>urs capacités professionnel<strong>le</strong>s ».Ainsi, bien que lʼarmée exerce une influence sur des éléments directementliés à son fonctionnement, el<strong>le</strong> agit selon des principes définis et acceptés54


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresconstitutionnel<strong>le</strong>ment, suivant une hiérarchie reconnue au sommet de laquel<strong>le</strong><strong>le</strong> pouvoir repose entre <strong>le</strong>s mains du gouvernement. À cause de son importancedans la vie politique africaine, lʼarmée détient la clé dʼune démocratiedurab<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> continent. Tout comme <strong>le</strong>s autres institutions dʼÉtat, lʼarmée doitsʼembarquer dans <strong>le</strong> processus de démocratisation et enfin concéder auxcivils la surveillance de ses activités. Le contrô<strong>le</strong> militaire traditionnel des civilsne peut se <strong>pour</strong>suivre si la démocratie doit se stabiliser. La question desrelations civilo-militaires, résolue avec succès dans <strong>le</strong>s démocraties occidenta<strong>le</strong>s,reste taboue en Afrique. Mais avec grand espoir, el<strong>le</strong> se retrouve aucentre du développement politique et économique du continent. Contrairementà la sagesse conventionnel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s processus constitutionnels sont insuffisants<strong>pour</strong> mener à une transition ou à une consolidation démocratique sans uneamélioration des relations civilo-militaires.Les armées en Afrique constituent et resteront des acteurs politiques cruciaux.Selon William Gutteridge, « la question nʼest pas de savoir si <strong>le</strong>s armées vontparticiper à la politique mais plutôt de savoir dans quel<strong>le</strong> mesure et par quelsmoyens ». Welch et Smith ont éga<strong>le</strong>ment saisi pertinemment <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> et la placedes forces armées dans la société en avançant que « <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> politique delʼarmée nʼest point une question de oui ou non, mais de combien et de quel<strong>le</strong>sorte ». Son rô<strong>le</strong> dans la défense et la <strong>pour</strong>suite des fragi<strong>le</strong>s démocratiesafricaines est donc capital : <strong>le</strong>s armées africaines sont des alliées vita<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>tout individu, État ou organisation en faveur dʼun gouvernement ouvert.De façon généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s forces armées représentent <strong>le</strong>s différentes organisationset moyens militaires quʼun État consacre à la mise en œuvre de sa politiquede défense. Leur mission première est dʼassurer la sécurité de lʼÉtat,la défense de ses intérêts et la protection de ses populations et territoires visà-visdʼune menace extérieure. El<strong>le</strong>s peuvent éga<strong>le</strong>ment recevoir des missionsde maintien de la paix, dans un cadre international. Cet attribut de lʼÉtatdécou<strong>le</strong> de la nation qui seu<strong>le</strong> détient la légitimité. Dʼaprès Max Weber dansLe Savant et <strong>le</strong> politique, « lʼÉtat est une entreprise politique à caractère institutionneldont la direction administrative revendique avec succès dans l'applicationde ses règ<strong>le</strong>ments <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> de la contrainte physique légitimesur un territoire donné », cʼest-à-dire quʼil est <strong>le</strong> seul à pouvoir faire respecter<strong>le</strong>s lois à travers lʼarmée, la justice et la police.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLʼusage des armes a été organisé par lʼhomme au sein des armées, cʼest-àdiredʼensemb<strong>le</strong>s dʼindividus réunis sous un commandement militaire en vuedʼopérations déterminées et au service dʼun État. En principe, une armée nesert que <strong>le</strong>s intérêts dʼun État et des citoyens. Dès lors quʼel<strong>le</strong> sert <strong>le</strong>s intérêtsdʼune personne privée ou dʼun groupe dʼindividus, on ne par<strong>le</strong> plus dʼarméemais de simp<strong>le</strong> milice privée. Lʼarmée est lʼun des éléments constitutifs delʼÉtat et incarne, avec la police, la puissance publique dont il est <strong>le</strong> détenteurexclusif. La plupart des États modernes se sont construits dʼabord sur laconquête du monopo<strong>le</strong> militaire avant de sʼoctroyer <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> politique.Cʼest surtout dans lʼEurope des 19è et 20è sièc<strong>le</strong>s que <strong>le</strong> lien armée-nation sʼestétabli. Dans tout appareil dʼÉtat, lʼarmée est bien lʼinstitution dont lʼanalyse et lacompréhension relèvent par excel<strong>le</strong>nce de lʼanalyse géopolitique, cʼest-à-dire dela démarche qui permet de mieux comprendre <strong>le</strong>s rivalités de pouvoirs sur desterritoires. Cʼest en effet principa<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>urs armées que <strong>le</strong>s États se disputentdes contrées ou exercent <strong>le</strong>ur domination à lʼextérieur de <strong>le</strong>urs frontières.Quant à la nation, cʼest une idée fondamenta<strong>le</strong>ment géopolitique puisquʼil nʼestpas de nation sans territoire et, <strong>pour</strong> ce qui est des rivalités de pouvoirs, il nʼestpas de nation qui, au cours de son histoire, nʼait pas eu à subir ou à combattrequelque pouvoir étranger. Pour toute nation sʼest posée (ou se pose encore), àtel ou tel moment de son histoire, la question fondamenta<strong>le</strong> de son indépen-33Voir Bangoura, op. cit55


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainedance et de la défense de son territoire contre des forces extérieures qui prétendentlui imposer <strong>le</strong>urs pouvoirs. Aussi <strong>pour</strong> toute nation (ou presque toute)dont el<strong>le</strong> émane, lʼarmée a-t-el<strong>le</strong> une grande importance tout autant matériel<strong>le</strong>que symbolique, même si el<strong>le</strong> se retrouve au service du pouvoir.En théorie, la mission des armées classiques africaines nʼest pas différente, audépart, de cel<strong>le</strong> des armées française et britannique, du fait dʼune certaine filiation.Tout au plus, <strong>le</strong>s armées africaines insistent davantage sur <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> desymbo<strong>le</strong> de la souveraineté de lʼÉtat, avec un drapeau, une devise, un hymnenational où État et armée apparaissent comme intimement liés. Hormis cecontexte, la mission première dʼune armée est la défense nationa<strong>le</strong>. Sa missionseconde, cel<strong>le</strong> du maintien de lʼordre, ne lui est pas spécifique puisquʼel<strong>le</strong>relève en priorité des forces de sécurité (police, gendarmerie) et quʼel<strong>le</strong> nʼestmise en œuvre que si cel<strong>le</strong>s-ci sont débordées. Encore faut-il préciser quʼenprincipe, toute armée ne peut utiliser la force que de manière hiérarchisée, structurée,coordonnée, cʼest-à-dire dans <strong>le</strong> respect des règ<strong>le</strong>s établies 33 .Dans la pratique cependant, force est de constater que très vite, <strong>le</strong>s armées africainesne respectent pas ces missions et exercent des fonctions qui <strong>le</strong>s éloignentde <strong>le</strong>ur raison dʼêtre. El<strong>le</strong>s sont rapidement orientées par <strong>le</strong>s nouveaux chefsdʼÉtat vers une fonction politique, contrairement au principe de neutralité. La plupartdes présidents, quʼils soient civils ou militaires, <strong>le</strong>s utilisent <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur accessionet <strong>le</strong>ur maintien au pouvoir. Dans <strong>le</strong>s régimes civils, tantôt lʼarmée devient uninstrument du pouvoir, tantôt el<strong>le</strong> se voit concurrencée par des forces paramilitaires(gardes présidentiel<strong>le</strong>s, milices politiques) ou par des forces de lʼordre plusproches du pouvoir. Dans <strong>le</strong>s régimes militaires, la cooptation des officiers supérieursà la tête de lʼÉtat et des instances du parti unique se généralise. Lʼillégalitéet lʼillégitimité du pouvoir – en raison des coups dʼÉtat et des é<strong>le</strong>ctions tronquées– font que <strong>le</strong>s régimes en place sʼappuient sur des forces politiques et militaires<strong>pour</strong> dominer et assurer <strong>le</strong>ur longévité 34 .II. Interventions politique et économique de l’armée africaine34Daniel Bourmaud, La politique en Afrique, ParisMontchrestien, 1997, pp.89-98.35Voir Zaki Laidi, Les Contraintes dʼune Rivalité (<strong>le</strong>sSuperpuissances et lʼAfrique, 1960-1985). Paris :Découverte, 1986 ; aussi Ahmadou Kourouma, EnAttendant <strong>le</strong> Vote des Bêtes Sauvages. Paris :Seuil, 1998.36Voir Cé<strong>le</strong>stin Monga, Anthropologie de la Colère :Société Civi<strong>le</strong> et Démocratie en Afrique Noire.Paris : LʼHarmattan, 1994.37Voir Jean-François Bayart, « La Revanche desSociétés Africaines. » Politique Africaine 11(Septembre 1983), pp. 95-127.38Voir Maurice Kamto, Pouvoir et Droit en AfriqueNoire : Essai sur <strong>le</strong>s Fondements du Constitutionnalismedans <strong>le</strong>s États dʼAfrique Noire Francophone.Paris : LGDJ, 1987.39Cathérine Coquery-Vidrovitch, « Trente AnnéesPerdues ou Étapes d"une Longue Évolution ? »Afrique Contemporaine vol. 164, no. 4 (1992,Numéro Spécial), pp. 8-9.Jusquʼau début des années quatre-vingt-dix, <strong>le</strong> pessimisme battait encore sonp<strong>le</strong>in sur <strong>le</strong> continent africain. Il a fallu attendre <strong>le</strong> vent du changement venudʼEurope de lʼEst <strong>pour</strong> que <strong>le</strong> continent Noir retrouve une lueur dʼespoir. Eneffet, la guerre froide qui avait, jusque-là, permis aux puissances de resterpendant longtemps indifférentes aux crimes et malversations politiques des<strong>le</strong>aders Africains 35 , a perdu son ardeur. En sus de la dévaluation stratégiquedu continent, des contraintes économiques et <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s conditionnalités delʼaide internationa<strong>le</strong> ont généré un nouvel environnement sur <strong>le</strong> continent.Profitant de ces nouvel<strong>le</strong>s données, <strong>le</strong>s Africains ont renouvelé <strong>le</strong>urs revendicationspolitiques, qui cette fois-ci ont produit des résultats tangib<strong>le</strong>s. Danstoute lʼAfrique, <strong>le</strong>s dirigeants politiques ont compris quʼil fallait changer <strong>le</strong>schoses, ou tout au moins en donner lʼimpression. Désormais la transparenceest devenue un mot qui a trouvé sa place dans <strong>le</strong> <strong>le</strong>xique politique africain. Devantla ténacité des peup<strong>le</strong>s, la persévérance de la société civi<strong>le</strong> 36 , et aussigrâce à la volonté politique de la société militaire dans certains pays, <strong>le</strong>s gouvernantsqui jusque-là faisaient comme bon <strong>le</strong>ur semblait, doivent dorénavant,et parfois malgré eux, rendre compte aux gouvernés. Il y a eu un réveildes peup<strong>le</strong>s africains et <strong>le</strong>s écarts flagrants de conduite des responsab<strong>le</strong>spolitiques ne seront plus tolérés 37 . Toutefois, lʼamp<strong>le</strong>ur et lʼefficacité desmesures dʼouverture politique prises ça et là ne seront évaluées quʼen tenantcompte des réalités sur <strong>le</strong> terrain. Déjà, lʼeuphorie initia<strong>le</strong> sʼest apaisée, car ladémocratie en el<strong>le</strong>-même nʼest pas une panacée et <strong>le</strong>s Africains devrontredoub<strong>le</strong>r dʼeffort et innover dans tous <strong>le</strong>s domaines <strong>pour</strong> libérer <strong>le</strong>ur continent.À lʼaube des indépendances africaines, la puissance colonia<strong>le</strong> avait pris56


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresquelques dispositions <strong>pour</strong> que <strong>le</strong>s anciennes colonies deviennent des démocraties,ou plutôt des pseudo-démocraties. Ainsi <strong>le</strong>s premiers régimes delʼAfrique post-colonia<strong>le</strong> avaient une coloration pluraliste. Mais, cʼétait un simulacre,en surface, parce quʼen profondeur lʼapprentissage de la démocratienʼavait pas été fait. Très tôt, la tendance au parti unique au nom de lʼuniténationa<strong>le</strong> prendra <strong>le</strong> dessus. Il y a eu une sacralisation du pouvoir qui répondplus à un accaparement du pouvoir de lʼÉtat nouveau quʼà une résurgence dumodè<strong>le</strong> traditionnel. À tort, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>aders nationalistes devenus présidents oupremiers ministres voulaient désormais diriger <strong>le</strong>s pays africains dʼune mainde fer, instaurant ainsi des régimes autoritaires. Aucune contestation ou dissensionnʼétait tolérée. Puisque la priorité était accordée à la construction dunouvel État, qui exigeait lʼapport de tous <strong>le</strong>s fils du pays, il était demandé auxcitoyens des nouveaux États de taire <strong>le</strong>urs divergences 39 .Lʼinévitab<strong>le</strong> conséquence fut la naissance dʼun pouvoir autoritaire et absolu. Etcomme un pouvoir absolu corrompt absolument, la plupart des premiers régimesafricains ont connu <strong>le</strong>s premiers errements de la faillite politique. Ayant découvert<strong>le</strong> goût du pouvoir, <strong>le</strong>s anciens combattants ont rapidement perdu <strong>le</strong>ur ferveurnationaliste. Bien que quelques-uns parmi eux se battaient comme ils pouvaient<strong>pour</strong> sortir <strong>le</strong>ur pays de lʼornière de la pauvreté, la plupart pensaient plus à euxmêmesquʼaux peup<strong>le</strong>s quʼils étaient censés libérer du joug colonial. Tout étaitjoué dès la première décennie des indépendances. Il devenait de plus en plus clairque <strong>le</strong> <strong>le</strong>adership africain ne pouvait pas gérer <strong>le</strong> quotidien de son continent. Quece soit <strong>le</strong>s dictatures civi<strong>le</strong>s ou <strong>le</strong>s régimes militaires qui <strong>le</strong>s ont remplacées, cespouvoirs excessifs que Huntington qualifie à juste titre dʼÉtats prétoriens 40 , ont lamentab<strong>le</strong>mentéchoué dans la mission qui était la <strong>le</strong>ur.Un État démocratique libéral remplit son rô<strong>le</strong> protecteur au sein de la communautépolitique en instituant un État de droit que lʼon fait respecter par lapunition. Pour préserver son autorité, lʼÉtat doit protéger ses citoyens desmenaces étrangères, par <strong>le</strong> biais en particulier dʼune institution militaire efficace.Paradoxa<strong>le</strong>ment, lʼarmée est bien souvent cette même menace dont<strong>le</strong>s citoyens cherchent à se protéger. Alors quʼil est important dʼavoir unearmée assez forte <strong>pour</strong> protéger lʼÉtat, <strong>le</strong>s forces armées ne peuvent pas restersans contrô<strong>le</strong> de lʼÉtat. Libérée des restrictions imposées par l État, lʼarméepeut très bien <strong>pour</strong>suivre ses propres intérêts et désirs, et constituer une menaceinterne <strong>pour</strong> <strong>le</strong> pouvoir souverain. Inversement, lʼarmée ne peut pas nonplus être entièrement dominée par lʼÉtat car el<strong>le</strong> <strong>pour</strong>rait être alors amenée àsuivre <strong>le</strong> pouvoir civil dans ses passions, sapant ainsi la puissance militaire etpar conséquent la sécurité.Ce di<strong>le</strong>mme peut se résoudre en réformant tout <strong>le</strong> secteur de la sécurité en lʼadaptantau nouveau concept de sécurité : la sécurité humaine. La sécurité concerneà la fois la perception du bien-être individuel et col<strong>le</strong>ctif, ainsi que lʼassurance demaintenir des va<strong>le</strong>urs fondamenta<strong>le</strong>s à la façon dont <strong>le</strong>s communautés se définissentel<strong>le</strong>s-mêmes. Bien que la tradition weberienne attribue à lʼÉtat <strong>le</strong> droitdʼexercer une force contraignante maintenant lʼordre et calmant <strong>le</strong>s discordes,<strong>le</strong>s agences ou <strong>le</strong>s bureaucraties nationa<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong>s que lʼorgane militaire peuventaccomplir des actes vio<strong>le</strong>nts <strong>pour</strong> <strong>le</strong> compte de lʼÉtat ou du peup<strong>le</strong>.Pendant des sièc<strong>le</strong>s, la sécurité sʼest définie en termes de menaces politicomilitairesstrictement dans <strong>le</strong> domaine de lʼappareil de sécurité. De nos jours,un nouveau concept émerge, celui de sécurité humaine en réponse aux défisdu monde actuel. Les politiques et <strong>le</strong>s institutions doivent réagir à des insécuritésgrandissantes de manière plus forte et plus organisée. De toute évidence,lʼÉtat continue dʼêtre <strong>le</strong> premier responsab<strong>le</strong> de la sécurité. Cependant,étant donné que <strong>le</strong>s défis sécuritaires deviennent plus comp<strong>le</strong>xes et que denouveaux acteurs tentent de jouer un rô<strong>le</strong>, nous devons opérer un change-Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR40Voir Samuel P. Huntington, Political Order in ChangingSocieties. New Haven : Ya<strong>le</strong> University Press,1968.57


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainement de paradigme. Le point de convergence doit sʼétendre de la sécuritédʼÉtat ou de régime à la sécurité du peup<strong>le</strong>, la sécurité humaine. La sécuritéhumaine implique de protéger <strong>le</strong>s libertés vita<strong>le</strong>s. Cela veut dire quʼil convientde protéger <strong>le</strong>s gens contre des menaces et situations critiques et croissantes,et construire à partir de <strong>le</strong>urs forces vives et de <strong>le</strong>urs aspirations. Cela veutdire éga<strong>le</strong>ment créer des systèmes donnant aux gens <strong>le</strong>s piliers de la survie,de la dignité et de la subsistance. La sécurité humaine relie différentes sortesde libertés : être libre du besoin, de la peur, être libre dʼagir selon son gré.Les rô<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s missions des organismes de sécurité ne sont pas appréciés dela même manière par toutes <strong>le</strong>s couches de la société. De plus, la plupart desattributs fortement souhaités dans <strong>le</strong> cadre d'une force armée efficace (sacapacité coercitive, sa structure bien définie, sa discipline, son bon ordre, sonefficacité, etc.) peuvent éga<strong>le</strong>ment se transformer en menaces à lʼencontre dela société. En lʼabsence dʼinstitutions permettant de contrebalancer la situation,il y a toujours une crainte que <strong>le</strong>s forces armées utilisent <strong>le</strong>ur pouvoir (ou quece pouvoir <strong>pour</strong>rait être utilisé par un autre segment de la société) <strong>pour</strong> perturberlʼordre social et politique, et donc fragiliser <strong>le</strong> bien-être de la société.Pendant longtemps, il y a eu en Afrique une confusion entre mission dedéfense et de sécurité et un détournement des forces armées de <strong>le</strong>ur missionpremière, du fait du pouvoir politique 41 . Dʼune part <strong>le</strong>s forces armées sont éloignéesde <strong>le</strong>urs préoccupations de défense – dʼoù <strong>le</strong>ur incompétence –, dʼautrepart el<strong>le</strong>s sont amenées à exercer des tâches de sécurité en réalitérépressives, à lʼencontre des forces politiques et socia<strong>le</strong>s supposées ou ditesdʼopposition. Ainsi, la principa<strong>le</strong> menace au regard de ces régimes politiquesréside non pas aux frontières, mais plutôt à lʼintérieur du pays 42 . La fonctiondʼintégration socia<strong>le</strong>, qui consiste à recruter dans un même creuset <strong>le</strong>s filsprovenant de toutes <strong>le</strong>s régions et de toutes <strong>le</strong>s ethnies du pays, nʼest pas appliquée,<strong>pour</strong> des raisons politiques et parfois économiques. Les dirigeantspréfèrent sé<strong>le</strong>ctionner des troupes politiquement fiab<strong>le</strong>s, très souvent de <strong>le</strong>urgroupe ethnique, quʼils peuvent manipu<strong>le</strong>r et contrô<strong>le</strong>r.Pour la plupart des pays africains, la participation de lʼarmée au monde politiquea constitué lʼaspect prédominant des relations civilo-militaires. Lʼarméea été <strong>le</strong> principal élément imprévisib<strong>le</strong> au sein du contexte politique dans detrès nombreux pays africains, dont la plupart ont été sous régime militaire directpendant une bonne partie des années qui ont suivi lʼindépendance audébut des années 1960. Les coups dʼÉtat militaires ont éga<strong>le</strong>ment constituéla méthode la plus souvent utilisée <strong>pour</strong> changer de régime en Afrique (plusdʼune centaine depuis 1963). Selon une étude, seuls cinq pays dans toute larégion nʼont pas connu de participation militaire en politique, directe ou indirecte.Dans <strong>le</strong>s cas où lʼarmée a évité toute participation directe, <strong>le</strong>s liensétroits entre lʼarmée et <strong>le</strong> pouvoir exécutif ont favorisé lʼimage des relationsentre lʼarmée et la politique nationa<strong>le</strong>.41Voir Bangoura, op. cit.42Ibid.43Voir Bangoura, op. cit.Sur <strong>le</strong> plan du développement économique, <strong>le</strong>s armées africaines ont aussijoué un rô<strong>le</strong> appréciab<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong>s années 1950, de nombreux chercheurs ontexprimé <strong>le</strong> point de vue, à partir des expériences de lʼAmérique latine et desBalkans, que <strong>le</strong>s forces armées étaient <strong>le</strong>s dépositaires de va<strong>le</strong>urs essentiel<strong>le</strong>mentautoritaires, sinon réactionnaires, et étaient par conséquent des entitésincompétentes sur <strong>le</strong> plan administratif. Toutefois, dans <strong>le</strong>s années 1960,cette conception a énormément évolué. De nombreux analystes sont désormaisplutôt disposés à voir l'armée comme une force dynamique, capab<strong>le</strong> nonseu<strong>le</strong>ment de moderniser <strong>le</strong>s sociétés traditionnel<strong>le</strong>s, mais aussi de maintenirla stabilité et la maîtrise du communisme. Les partisans de la théorie de lamodernisation ont soutenu que la charge politique sur <strong>le</strong>s institutions de lʼÉtatest allégée considérab<strong>le</strong>ment lorsque <strong>le</strong> dynamisme de base <strong>pour</strong> la trans-58


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresformation économique est fourni par une classe autonome dʼentreprises horsde lʼÉtat. Bien que lʼÉtat joue souvent un rô<strong>le</strong> important de facilitation, parexemp<strong>le</strong> en créant un climat de protection des industries naissantes, la stimulationde la croissance économique nʼest pas une fonction gouvernementa<strong>le</strong>.Même en lʼabsence dʼinstitutions démocratiques, une transformationsocio-économique de la société rura<strong>le</strong> agraire vers un modè<strong>le</strong> plus urbaniséeet commercia<strong>le</strong> est nécessaire <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s pays africains à sortir de <strong>le</strong>ur pauvreté.Entreprendre une mission aussi délicate exige que <strong>le</strong>s dirigeants unifient<strong>le</strong>ur peup<strong>le</strong>, permettent aux institutions gouvernementa<strong>le</strong>s de répondreefficacement aux besoins de la population, et assurent une répartition adéquatede la richesse, la puissance et la propriété.Selon plusieurs chercheurs, <strong>le</strong> segment de la société <strong>le</strong> plus qualifié <strong>pour</strong> cettetâche est l'armée en raison de sa forte volonté et de discipline. Cʼest ainsi quedans beaucoup de pays du Tiers-Monde en général et en Afrique en particulier,lʼarmée sʼest embarquée dans la voie de modernisation et de dévelop pement.Toutefois, la fonction économique des armées africaines nʼest pas comparab<strong>le</strong> àcel<strong>le</strong> des armées occidenta<strong>le</strong>s liées aux industries dʼarmement, à lʼexception desarmées égyptienne et sud-africaine, notamment du temps de la guerre froide 43 .Par ail<strong>le</strong>urs, des expériences de services civiques ont été tentées ici et là sur <strong>le</strong>continent avec des résultats mitigés. Dʼinspiration israélienne et française, fondéesau départ sur lʼidée dʼintégration nationa<strong>le</strong> et de solidarité, ces formes dʼenrô<strong>le</strong>mentde la jeunesse dans des travaux à vocation économique et socia<strong>le</strong> neproduisent pas <strong>le</strong>s effets escomptés, faute de volonté politique et de préparation.En outre, <strong>le</strong> vieux principe consistant à confier à lʼarmée des tâches extra-militaires– comme la construction de routes et de ponts, lʼagriculture, lʼé<strong>le</strong>vage, la formationet lʼéducation – connaît plus ou moins de succès.Cette pratique, qui peut être profitab<strong>le</strong> à lʼarmée en temps de paix, peut aussise révé<strong>le</strong>r dangereuse si <strong>le</strong>s militaires sʼéloignent trop de <strong>le</strong>ur activité professionnel<strong>le</strong>.Confier des tâches civi<strong>le</strong>s à des militaires dans un pays en développementpeut être une nécessité à un moment donné. Mais el<strong>le</strong> nʼest passans danger <strong>pour</strong> lʼinstitution militaire qui se civilianise et peut se prétendre indispensab<strong>le</strong>,au point de vouloir prendre <strong>le</strong>s rênes du pouvoir 44 . Cette pratiquepose aussi de sérieux problèmes en ce qui concerne lʼattribution desmarchés. Alors que certains Etats ont vu <strong>le</strong>s avantages du régime militaire, larécolte est bien maigre. À la place de malversations de tout genre que <strong>le</strong>s dictaturescivi<strong>le</strong>s exhibent, <strong>le</strong>s Africains ont connu <strong>le</strong>s dures réalités de la dictaturemilitaire. Bien que <strong>le</strong>s gouvernements militaires aient lʼavantage que <strong>le</strong>ursdécisions peuvent être exécutées rapidement sans la lourdeur administrative,<strong>le</strong> régime militaire nʼa vraiment pas aidé <strong>le</strong> continent puisque <strong>le</strong>s frustrationspolitiques et <strong>le</strong>s problèmes économiques ont fini par avoir raison des régimesmilitaires. En réalité, malgré <strong>le</strong>ur bonne volonté parfois, <strong>le</strong>s forces arméesnʼont jamais su résoudre <strong>le</strong>ur déficit de légitimité.III. La Légitimité et <strong>le</strong> gouvernement militaireLʼargument très souvent avancé est que lʼéchec des régimes civils offre <strong>le</strong>motif et lʼoccasion dʼune ingérence des militaires, un point de vue adopté pardʼéminents écrivains sur <strong>le</strong>s relations civilo-militaires, comme Finer, Nordlingeret Crouch. Selon Crouch, il est souvent avancé que lʼingérence de lʼarméeen politique ne se produit que lorsque <strong>le</strong>s gouvernements civils se révè<strong>le</strong>nt incapab<strong>le</strong>sde gouverner de manière efficace. Rares, voire introuvab<strong>le</strong>s, sont <strong>le</strong>scas où lʼarmée prend <strong>le</strong> pouvoir simp<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> répondre à ses propres ambitions.Même lorsque lʼarmée a déjà une orientation politique et que ses officiersont des ambitions politiques, lʼingérence des militaires suit en générallʼéchec des gouvernements civils à préserver la stabilité politique et à réaliserForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR44Ibid.45Voir Harold Crouch, “Patrimonialism and MilitaryRu<strong>le</strong> in Indonesia” (Patrimonialisme et gouvernementmilitaire en Indonésie), World Politics, vol. 31,no. 4 (1979), pp. 571-87.46Ibid.59


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine47Jacques Van Doorn, “The Military and the Crisis ofLegitimacy” (Lʼarmée et la crise de légitimité), dansGwyn Harries-Jenkins et Jacques Van Doorn, TheMilitary and the Prob<strong>le</strong>m of Legitimacy (Lʼarmée et<strong>le</strong> problème de la légitimité), Londres, R-U: Sage,1976, p. 19.48Ibid.49Voir Sunil Dasgupta, “Civil-Military Relations andDemocracy in Pakistan” (Les relations civilo-militaireset la démocratie au Pakistan), The FridayTimes, Lahore, 21 décembre 2001.50Ibid.51Ibid.52Ibid.une croissance satisfaisante 45 . Cet échec mène à une perte de légitimité, cequi <strong>le</strong>s expose alors à un changement vio<strong>le</strong>nt. Lʼéchec des régimes civils offredonc non seu<strong>le</strong>ment un motif, mais aussi lʼopportunité dʼingérence. À lʼinverse,un gouvernement civil fort et efficace, qui réussit à conserver sa légitimité,semb<strong>le</strong> virtuel<strong>le</strong>ment à lʼabri de toute possibilité de coup dʼÉtat militaire 46 .Pour autant que lʼarmée puisse utiliser cette excuse, rien, ni preuve empirique, niargument conceptuel, ne permet de suggérer que <strong>le</strong>s gouvernements militairesont jamais réussi à remplir <strong>le</strong>s tâches quʼils sʼétaient attribuées, y compris assurerla sécurité (ni améliorer <strong>le</strong>ur légitimité). Lʼutilisation de la force donne <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ursrésultats lorsquʼel<strong>le</strong> sʼallie à des initiatives politiques ; la <strong>pour</strong>suite de butspolitiques doit guider lʼaction armée. Un gouvernement qui, dans <strong>le</strong>s faits, est uninstrument de coercition, aussi bénin soit-il, devient un gouvernement à politiqueunique : lʼutilisation de la force et la menace dʼutilisation de la force. Même si <strong>le</strong>smanquements des élites politiques sapent <strong>le</strong>s transitions démocratiques, <strong>le</strong>s dirigeantsmilitaires ne sont en rien des témoins innocents. Méprisant <strong>le</strong>s dirigeantscivils et impatients de recouvrer <strong>le</strong> pouvoir absolu, <strong>le</strong>s dirigeants militaires ont jouéun rô<strong>le</strong> actif dans la subversion du processus démocratique.Dans son livre, Praetorianism : Government without Authority (Le Prétorianisme:<strong>le</strong> gouvernement sans autorité), David Rapoport explique comment <strong>le</strong>s institutionsmilitaires jouent un rô<strong>le</strong> dominateur sans avoir acquis ni soutien public suffisantni confiance politique. Dʼaprès van Doorn, des termes tels quʼautorité, consensus,conformité, nature officiel<strong>le</strong>, <strong>pour</strong>raient être synonymes de légitimité ence quʼils indiquent, dʼune manière ou dʼune autre, une démarche normativevis-à-vis de lʼordre politique et de ceux qui en sont investis ou, plus généra<strong>le</strong>ment,vis-à-vis des structures du pouvoir au sein de systèmes sociaux 47 . I<strong>le</strong>xiste invariab<strong>le</strong>ment deux parties : lʼune se disant légitime dans <strong>le</strong> sens dudroit dʼexercer lʼautorité, de demander des sacrifices et dʼêtre reconnue, etlʼautre, acceptant ce droit et montrant quʼel<strong>le</strong> est prête à reconnaître <strong>le</strong>s revendicationsde légitimité de lʼautre. La légitimité inclut donc une orientationnormative et évaluative. Toutefois, la partie exigeant la légitimité doit éga<strong>le</strong>menten posséder <strong>le</strong>s capacités nécessaires, alors que la partie qui lʼaccordedoit démontrer, par ses actions ou son soutien, que reconnaître la légitimitérelève de bien plus que des mots qui soutiennent lʼidée 48 .Dasgupta maintient quʼil existe une norme de référence absolue dans <strong>le</strong>srelations civilo-militaires : <strong>le</strong> principe selon <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s civils ont <strong>le</strong> droit dʼavoirtort. Lʼargument régulièrement avancé par <strong>le</strong>s défenseurs dʼun gouvernementmilitaire est que <strong>le</strong>s dirigeants civils nʼont pas rempli <strong>le</strong>urs fonctions dʼassurerla sécurité, <strong>le</strong> développement économique et, peut-être même, la cohésionsocia<strong>le</strong>. Un tel échec total invite <strong>le</strong>s militaires à prendre <strong>le</strong> pouvoir <strong>pour</strong>remédier à des décennies dʼincompétence civi<strong>le</strong> 49 .Dʼaprès Dasgupta, <strong>le</strong> concept de statut dʼÉtat moderne et de gouvernanceprocède de deux niveaux consécutifs de mandats. Le premier est accordé par<strong>le</strong> peup<strong>le</strong> aux dirigeants élus, probab<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong> biais dʼé<strong>le</strong>ctions libres etéquitab<strong>le</strong>s. C'est une attribution de mandat très large, cʼest-à-dire que <strong>le</strong>peup<strong>le</strong> accorde aux dirigeants élus <strong>le</strong> pouvoir de prendre des décisions enson nom 50 . Le deuxième acte de mandat est accordé par <strong>le</strong>s représentantsélus aux institutions bureaucratiques spécialisées tel<strong>le</strong>s que lʼarmée. Cʼest unmandat bien défini appelé « mandat administratif » qui exige que <strong>le</strong> mandatairesuive <strong>le</strong>s consignes du mandant, dans ce cas, <strong>le</strong>s dirigeants civils,bonnes et mauvaises décisions 51 . Les militaires prennent <strong>le</strong> pouvoir enarguant quʼils enfreignent temporairement <strong>le</strong> deuxième ordre du mandat <strong>pour</strong>pouvoir protéger <strong>le</strong> premier. Lʼargument des officiers militaires repose surlʼallégation que <strong>le</strong>s dirigeants civils ont trahi la confiance qui <strong>le</strong>ur a été accordéepar <strong>le</strong> public et quʼil est nécessaire de rompre éga<strong>le</strong>ment la relation60


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresadministrative secondaire <strong>pour</strong> pouvoir restaurer cette relation primaire 52 .Malheureusement, une injustice nʼen répare pas nécessairement une autre,et <strong>le</strong>s militaires nʼont jamais su quand sortir, perdant ainsi progressivementtoute légitimité quʼils avaient pu acquérir. Un régime quelconque nʼest pasautomatiquement imbu de légitimité juste parce quʼune certaine forme deconstitution a été adoptée par référendum ou parce que <strong>le</strong> droit internationa<strong>le</strong>n reconnaît la légitimité. La légitimité politique doit, dans un certain sens,être « méritée » par <strong>le</strong>s régimes, et toutes <strong>le</strong>s sociétés ne considèrent pasnécessairement la démocratie procédura<strong>le</strong> comme une va<strong>le</strong>ur essentiel<strong>le</strong>.Lʼexpérimentation de lʼarmée avec la politique en Afrique exige dʼimposer uncertain type de contrô<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s forces de la défense et de la sécurité.CONCLUSIONMême si <strong>le</strong>s preuves empiriques ne semb<strong>le</strong>nt pas suffisantes <strong>pour</strong> faire la distinctionentre <strong>le</strong>s performances des gouvernements militaires et civils, la participation delʼarmée dans <strong>le</strong> monde politique influence nettement <strong>le</strong>s relations civilo-militaires.Ces effets varient dans une certaine mesure dʼun pays à lʼautre. Cependant, enrèg<strong>le</strong> généra<strong>le</strong>, on associe malheureusement la participation militaire dans <strong>le</strong> mondepolitique aux troub<strong>le</strong>s que de nombreux pays ont endurés depuis lʼindépendance.Ainsi, il nʼest pas surprenant que lʼarmée soit associée à la répression politique etaux violations endémiques des droits de lʼhomme qui ont caractérisé lʼAfrique dans<strong>le</strong>s années 1970 et 1980. Lʼarmée a éga<strong>le</strong>ment été mêlée à certains des problèmespolitiques diffici<strong>le</strong>s qui ont provoqué des dissensions civi<strong>le</strong>s dans de nombreux paysafricains ; ironie du sort : cʼest parfois à lʼarmée que lʼon fait appel <strong>pour</strong> jugu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>stroub<strong>le</strong>s qui en résultent. De la même manière, <strong>le</strong>s résultats peu brillants de nombreuseséconomies africaines au cours de la même période sont éga<strong>le</strong>ment associésà lʼarmée, soit parce que cel<strong>le</strong>-ci (en tant quʼadministrateur) était accuséedʼincurie économique, soit parce quʼel<strong>le</strong> détournait <strong>le</strong>s ressources prévues initia<strong>le</strong>ment<strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement <strong>pour</strong> répondre à des impératifs en matière de sécuritéet <strong>pour</strong> satisfaire <strong>le</strong>urs désirs personnels.Les relations civilo-militaires dans de nombreux pays africains ont donc été tendues,perpétuant une brouil<strong>le</strong> entre lʼarmée et la société qui prend ses racines dans lʼère colonia<strong>le</strong>.Il existe une forte méfiance et, dans <strong>le</strong>s cas extrêmes, même du mépris <strong>pour</strong>lʼarmée dans de nombreuses couches de la société. Certains considèrent que lʼarméeconsomme une part beaucoup trop importante des ressources nationa<strong>le</strong>s au détrimentdu développement économique et social. Pour sa part, lʼarmée a autant de mépris<strong>pour</strong> lʼautorité civi<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s politiciens, qui sont perçus comme des gens corrompus,inefficaces, comme des partisans, etc. Cʼest en partie à cause de ce mépris que dansde nombreux pays, lʼarmée a cultivé une image dʼel<strong>le</strong>-même, cel<strong>le</strong> qui sauve la sociétéde ses politiciens corrompus et antipatriotiques. Indépendamment de la validitéde cette image, el<strong>le</strong> tend à engendrer <strong>le</strong> manque de respect <strong>pour</strong> lʼautorité civi<strong>le</strong>. Dans<strong>le</strong>s cas où lʼarmée a supplanté <strong>le</strong> gouvernement civil, il nʼétait en fait pas question dedépendance ou même de respect <strong>pour</strong> lʼautorité civi<strong>le</strong>. Au sein de lʼarmée el<strong>le</strong>-même,il y eut un déclin du professionnalisme que lʼon peut partiel<strong>le</strong>ment expliquer par laparticipation de lʼarmée dans <strong>le</strong> monde politique. Et à son tour, la baisse du professionnalismea causé du tort aux relations civilo-militaires.Alors que <strong>le</strong>s pays africains effectuent la transition vers une gouvernance démo -cra ti que, lʼétat de <strong>le</strong>urs relations civilo-militaires risque de devenir un problème plusimportant. Si ce nʼest pas géré correctement, un déséquilibre dans <strong>le</strong>s relationscivilo-militaires risquerait dʼaffaiblir la transition politique et la consolidation démocratique.Il est donc primordial de commencer à réfléchir aux relations civilo-militairesdans un nouveau contexte, et dʼeffectuer une réévaluation radica<strong>le</strong> nonseu<strong>le</strong>ment de la manière dont <strong>le</strong>s relations civilo-militaires sont agencées, maisaussi des missions, des rô<strong>le</strong>s et de lʼappareil militaire et celui de la sécurité.Lʼarmée en tant quʼémanation de la nation doit revenir à sa mission fondamenta<strong>le</strong>qui est de contribuer à lʼamélioration de la nation.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARMathurin C. Houngnikpoest professeur titulaire de la chaire des RelationsCivilo-Militaires du Centre dʼétudesstratégiques de lʼAfrique (CESA) de la NationalDefense University, Fort McNair,Washington/DC.À ce titre, <strong>le</strong> Dr. Houngnikpo est chargé desuperviser lʼélaboration des programmesacadémiques et des cyc<strong>le</strong>s dʼétudes duCESA dans <strong>le</strong> domaine des relations civilomilitaires,en particulier, lʼhistoire militairede lʼAfrique, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratique civildu secteur de la sécurité, et <strong>le</strong>s questionsrelatives à lʼimputabilité, la transparence etla bonne gouvernance.61


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine2.6 Intervention du Professeur Kossi Mawuli AGOKLA, Centre régional desNations Unies <strong>pour</strong> la paix et <strong>le</strong> désarmement en Afrique (UNREC),Lomé/Togo« L’ARMÉE, ÉMANATION DE LA NATION :ENTRE QUASI-IMPOSSIBILITÉ ET VOLONTARISME »Résumé : The intervention of Professor Kossi Mawuli AGOKLA sees the armedforces jammed between quasi-impossibility and voluntarism“. His contribution wasstructured in two main parts; the first one treats the prob<strong>le</strong>m of misbehaviour ofparts of the security and defence forces against the population in several Africancountries. A basic e<strong>le</strong>ment of all this is the disrespect of the constitutional state.The second part of the intervention is dedicated to voluntarism inside of an armyand the emanation of a nation. Professor AGOKLA starts with the thesis of a necessaryre-foundation of the African state. Several measures taken in the recentpast could <strong>le</strong>ad the armies in Africa towards a basic respect of the values of ademocratic state. Also a reform of the security sector should contribute to a bettercivil-military relationship in the near future of the sub-region. Finally, the securityand armed forces could even be integrated into the future development ofgeneral welfare within the means of the constitutions.I - L’ÉTAT DES LIEUX DES NICHES DE L’INCIVISME DE L’INSTITUTIONDE DÉFENSE ET DE SECURITÉ AU SEIN DE LA POPULATIONPlutôt que de se fondre dans la nation, lʼarmée sʼen est pendant longtemps, négativementsingularisée. Lʼexplication la plus admise <strong>pour</strong> ce fâcheux constatreste, sans doute, la situation de monolithisme politique dans laquel<strong>le</strong> évoluaientla plupart des régimes politiques africains. Il en a résulté <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s institutionschevil<strong>le</strong>s-ouvrières de ces régimes comme <strong>le</strong>s forces armées, une quasi-obligation« de regarder dans la même direction ». Les aspects quelques ci-après,dénotent de cette situation de défaillance de lʼarmée-nation.L'Assemblé généra<strong>le</strong> a mandaté l'UNRECde fournir aux Etats Membres de la régionafricaine, sur <strong>le</strong>ur demande, un appui fonctionnel<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s initiatives qu'ils prendrontet <strong>le</strong>s autres efforts qu'ils feront en vue demener dans la région une action de paix,de limitation des armements et de désarmement(resolution A/Res/40/151/G).De plus, l'UNREC a été mandaté <strong>pour</strong>travail<strong>le</strong>r en coopération avec l'Union africaine,institution ayant succédé à l'Or ga -nisation de l'unité africaine, ainsi que decoordonner la mise en œuvre d'activitésrégiona<strong>le</strong>s en Afrique pouvant mener à lapaix, au contrô<strong>le</strong> des armements et audésarmement.A- La défaillance dans <strong>le</strong>s missions de sécurité :– La particularité de la fonction régalienne de défense et de sécurité : en rapportavec <strong>le</strong>s analyses introductives, la sécurité en place dans <strong>le</strong>s Etats africainsfut plus une sécurité des régimes plutôt quʼun service public de lasécurité des citoyens : lʼarmée a malheureusement, souvent été au centrede cette sécurité, tant el<strong>le</strong> était <strong>le</strong> pilier des régimes en place ;– Les violations des droits de lʼhomme plutôt que la sécurité humaine découlantde nombreux dérapages voire des crimes gravissimes imputab<strong>le</strong>sparfois à lʼarmée, vont creuser <strong>le</strong> fossé entre la population africaine et sonarmée.B- L’ethnicisation de l’institution de défense et de sécurité– Lʼarmée et <strong>le</strong>s forces de lʼordre ne sont pas <strong>le</strong> miroir des composantes dela population, par <strong>le</strong>s procédés assez sé<strong>le</strong>ctifs et discriminatoires de recrutementet de promotion, toutes choses qui offusquent plus dʼun.C- Les diffici<strong>le</strong>s relations civilo-militairesIl est de notoriété quʼen Afrique et <strong>pour</strong> lʼessentiel, <strong>le</strong>s civils et militaires développentréciproquement entre eux de la méfiance.– La perception des civils par <strong>le</strong>s militaires : <strong>le</strong>s militaires reprochent notammentaux civils la faillite dans la gestion des affaires publiques, <strong>le</strong> manque62


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresdʼégards à lʼendroit de lʼinstitution de défense et de sécurité etc.– La perception des militaires par <strong>le</strong>s civils : <strong>le</strong>s civils, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur part, reprochentaux militaires lʼimmixtion intempestive dans la vie politique), <strong>le</strong> positionnement(soutien) partisan par rapport aux régimes en place, ce quifausse <strong>le</strong> jeu politique, annihi<strong>le</strong> <strong>le</strong>s perspectives dʼalternance démocratique;La fragilisation et la déstabilisation des institutions à travers <strong>le</strong>s coupsdʼEtat et <strong>le</strong>s vio<strong>le</strong>nces post é<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>s dont une bonne partie <strong>le</strong>ur est imputéeà lʼarmée et aux forces de lʼordre finit de projeter de lʼarmée africaineune image autre que cel<strong>le</strong> dʼune armée-nation.– Lʼethnicisassion de lʼarmée ; comme déjà souligné à travers <strong>le</strong>s processusde recrutement et de carrière des éléments des forces armées, il y a biensouvent une très forte ethnicisation de lʼinstitution de défense autour delʼappartenance ethnique du chef de lʼEtat, chef suprême des armées.– Conséquences : Il y a la survenance de tensions et crises récurrentes(vio<strong>le</strong>nces post-é<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>s notamment), imputab<strong>le</strong>s à lʼinstitution dedéfense (et bien souvent aussi aux civils).Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARD- Le non-respect de l’Etat de droit– Le non-respect du principe de légalité, fondement de l’Etat de droitPresque un peu partout, on aura remarqué notamment au plan judiciaire,une quasi-impunité, une sorte de carapace juridictionnel<strong>le</strong> à lʼendroit desforces armées, dans des situations où cel<strong>le</strong>s-ci <strong>pour</strong>tant devraient répondrede nombre de faits dʼune certaine illégalité simp<strong>le</strong> ou manifeste. Cʼest dire,au moment où lʼère de la bonne gouvernance est en train de rimer avec <strong>le</strong>principe de légalité, que <strong>le</strong>s victimes des faits sus mentionnés et affectésaux forces de défense, vont se trouver dans des situations de déni de justice,dʼautant plus quʼintenter des actions en justice était loin dʼêtre unechose admise en pratique. Lʼimmunité juridictionnel<strong>le</strong> de fait des arméesne passe pas au sein de la population et cela va à lʼencontre de la sécuritéhumaine recherchée ;– Le défaut de redevabilité de l’institution de défense et de sécurité : ilne sʼagit de rien dʼautre que de la quasi-impossibilité de procéder à uncontrô<strong>le</strong> administratif ou par<strong>le</strong>mentaire de lʼaction des forces armées (<strong>le</strong>vo<strong>le</strong>t judiciaire a été déjà abordé). Il nʼétait de secret <strong>pour</strong> personne que <strong>le</strong>contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire du secteur de la sécurité, principa<strong>le</strong>ment des forcesarmées, avait de la peine à sʼéclore malgré <strong>le</strong>s nombreux programmes deréforme du secteur de la sécurité qui étaient consacrés à cette préoccupation(absence de contrô<strong>le</strong> effectif).CONCLUSIONA titre intérimaire, on peut se permettre dʼavancer que la mise en œuvre défaillantedes missions dont el<strong>le</strong>s sont investies, une composante socia<strong>le</strong>mentdiscriminatoire, des relations diffici<strong>le</strong>s avec <strong>le</strong>s populations civi<strong>le</strong>s, une évolutiondans une ambiance de culture de quasi- impunité… autant dʼéléments quipermettent dʼillustrer sans partie pris la diffici<strong>le</strong> insertion de lʼinstitution de défenseau sein de la société.63


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineII -LE VOLONTARISME DANS LA QUÊTE D’UNE ARMÉE, ÉMANATIONDE LA NATIONComment intégrer <strong>le</strong> soldat citoyen à son peup<strong>le</strong> en ayant à lʼesprit <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>aupeu reluisant précédemment décrit ? Pour y répondre, des voies vont être dégagées<strong>pour</strong> offrir à lʼinstitution de défense des possibilités de se réhabiliterpar rapport au reste de la nation.A - La refondation de l’Etat africain– L’apport des conférences nationa<strong>le</strong>s : <strong>le</strong>s conférences nationa<strong>le</strong>s desannées 1990-1991 vont impulser <strong>le</strong> néo constitutionnalisme, porte dʼentréedu libéralisme démocratique qui concerne aussi de premier chef <strong>le</strong>s arméesafricaines.– La désobéissance civi<strong>le</strong> légitime contre tout corps qui entreprendrait uncoup dʼEtat ou qui exercerait <strong>le</strong> pouvoir de manière tyrannique : cette prescriptionest impérativement affirmée, avec va<strong>le</strong>ur constitutionnel<strong>le</strong>, commeun paravent contre <strong>le</strong>s interventions indésirab<strong>le</strong>s des armées dans la vie politiqueen contradiction avec <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs républicaines auxquel<strong>le</strong>s ces arméessont désormais tenues plus que par <strong>le</strong> passé (Préambu<strong>le</strong> de la Const.Togolaise, du Mali, du Tchad, du Congo etc.)– La criminalisation de l’intervention des militaires : cette disposition vientcompléter cel<strong>le</strong> qui précède <strong>pour</strong> offrir un cadre de répression des actionsdes militaires contre lʼordre constitutionnel établi (Art. 166 de la Const. duBurkina Faso, Art. 18 al. 4 Const. RCA, Madagascar…).B - Le néo cadre légal et rég<strong>le</strong>mentaire de l’institution de défenseet de sécurité- Une répartition des compétences en matière de défense/sécurité est désormaisétablie, sur fond de bonne gouvernance démocratique, la loi régissant<strong>le</strong>s principes dʼorganisation de la défense (à lʼexclusion du Togo) : i<strong>le</strong>st question de faire en sorte que désormais, lʼarmée ne soit que <strong>le</strong> bras dela nation, jamais la tête (mise en garde <strong>pour</strong> que lʼarmée ne sʼélève pas audessusde la place qui est léga<strong>le</strong>ment la sienne).C - Affirmation du caractère républicain de l’institution de défense etde sécurité– La prééminence de l’autorité civi<strong>le</strong> sur l’institution de défense et desécurité est réaffirmée avec force : lʼarmée africaine, comme toute autre,est subordonnée à lʼautorité civi<strong>le</strong>. Un peu partout <strong>le</strong>s constitutions néo-libéra<strong>le</strong>sréaffirment que <strong>le</strong>s forces armées et de sécurité sont au service dela nation, quʼel<strong>le</strong>s sont soumises à la légalité républicaine et au pouvoir civilléga<strong>le</strong>ment institué. De la sorte, lʼarmée se met de plus en plus sur la rampede son insertion au sein de la nation.– Réaffirmation de l’apolitisme et de la neutralité de l’armée : encore unefois, ce sont <strong>le</strong>s dispositions constitutionnel<strong>le</strong>s qui sont porteuses de cettevertu des armées africaines : Art. 162 Al. 1 er Const. du Congo) ;– L’encadrement rigoureux du mandat é<strong>le</strong>ctif des militaires est notamment,dans son affirmation, une façon de réhabiliter <strong>le</strong>s militaires au sein dela nation : la fonction présidentiel<strong>le</strong> et cel<strong>le</strong>s deʼ députation en particuliersont concernées : art. 47 de la Const. de Djibouti, Art. 52 Const. du Togo) ;à contrario, la reconnaissance du droit de vote des militaires est prononcée(Au Sénégal et au Togo notamment) ;64


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières– La démocratisation de la conscription, devoir de tous <strong>le</strong>s citoyens (Art.16 Const. du Maroc, art. 22 Const. du Mali) : lʼobjectif est de stabiliser <strong>le</strong>srelations civilo-militaires, de cimenter la cohésion nationa<strong>le</strong> entre ses composantesmajeures que sont <strong>le</strong>s civi<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s militaires.D- Les mesures de réforme du secteur de la sécurité- La réforme du secteur de la sécurité : lʼexigence dʼappropriation de la bonnegouvernance démocratique, sous lʼang<strong>le</strong> holistique, est une préoccupationmajeure <strong>pour</strong> lʼinstitution de défense et de sécurité : la promotion de relationsde confiance entre <strong>le</strong>s civils et <strong>le</strong>s militaires, la redéfinition des missionsau sein de cette institution de défense dans un contexte démocratique,la professionnalisation de la sécurisation des processus é<strong>le</strong>ctoraux etc. vontêtre au centre de bien des programmes mis en chantier par des institutionsnationa<strong>le</strong>s, internationa<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s partenaires en développement etc.- Lʼapplication de la spécialisation fonctionnel<strong>le</strong> des composantes des forcesarmées et de sécurité notamment en matière de maintien de lʼordre oùcertaines populations ont une peur b<strong>le</strong>ue de lʼintervention des militaires dans<strong>le</strong>s opérations de maintien de lʼordre comme à lʼoccasion des consultationsé<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>s, tant cel<strong>le</strong>s-ci se sont bien souvent illustrées de manièrenégative;- La sécurisation des processus é<strong>le</strong>ctoraux : en rapport avec ce qui précède,la sécurisation des processus é<strong>le</strong>ctoraux dans <strong>le</strong> cadre du maintien de lʼordre,de plus en plus professionnalisée par <strong>le</strong>s forces de lʼordre et non pluspar <strong>le</strong>s militaires sʼimpose de plus en plus (Togo, Guinée, Niger…)- Des campagnes de promotion de relations de confiance entre <strong>le</strong>s civils et <strong>le</strong>smilitaires sont dʼactualité <strong>pour</strong> que <strong>le</strong>s armées soient au couer de la nation(affiches, spots...) : civils et militaires sont, ensemb<strong>le</strong>, mis à contribution <strong>pour</strong>bâtir une société solidaire (Togo, Libéria etc).Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARE - Le concours des forces armées et de sécurité au développementéconomique et socialUn concours à des tâches dʼintérêt public formel<strong>le</strong>ment prescrit (Art. 1 er Const.du Gabon, Art. 194 du Tchad…). De ce point de vue, il faut faire remarquer que<strong>le</strong>s armées africaines sʼillustrent assez positivement dans la réalisation de travauxdʼutilité publique, <strong>pour</strong> la col<strong>le</strong>ctivité. Leur dotation en matériel de géniecivi<strong>le</strong>, bien souvent de bonne qualité, <strong>le</strong>s y prédispose. Il arrive même que <strong>le</strong>sforces armées se voient attribuer des marchés publics <strong>pour</strong> la réalisation detravaux publics. Les dispositions des Codes de conduite incitent aussi à cetype dʼintervention de la part de lʼinstitution de défense.Ce concours des forces armées aux tâches de développement national, toutcomme <strong>le</strong>ur participation efficiente aux secours dʼurgence, mériteraient dʼêtredavantage reconnus du public mais il se trouve quʼen la matière, <strong>le</strong>s forces arméessoient une grande muette.Kossi Mawuli Agokla,de nationalité togolaise, est <strong>le</strong> Coordon -nateur du Programme de réforme du secteurde la sécurité en Afrique (ASSEREP)auprès du Centre régional des NationsUnies <strong>pour</strong> la paix et <strong>le</strong> désarmement enAfrique (UNREC) basé à Lomé (Togo). Ancienfonctionnaire international à lʼex OUA,à la CEDEAO et à la commission de lʼUE-MOA, il a éga<strong>le</strong>ment occupé de hautesfonctions dans lʼadministration togolaisenotamment comme secrétaire général desdépartements ministériels et plus récem -ment en qualité de conseil<strong>le</strong>r du Premierministre en charge des reformes institutionnel<strong>le</strong>s.Il a mis en œuvre un peu partouten Afrique (avec lʼASSN, DCAF,UNOWA, CEDEAO etc.) des chantiersrelatifs à la RSS et impliquant notamment<strong>le</strong>s forces armées et forces de sécurité.Il est un des co-auteurs de la publicationde lʼOIF sur « La réforme des systèmes desécurité et de justice en Afrique franco -phone» paru à Paris en mars 2010 et dontun certain nombre dʼexemplaires ont étémis à la disposition des participants.65


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSÉANCE PLÉNIÈRE N° IIMardi 9 novembre 2010 - MatinThème de la séance : <strong>le</strong>s relations des FDS avec la nationPANEL 4 « CONTRIBUTION DES FDS AUX OPÉRATIONSMULTINATIONALES ET HUMANITAIRES »2.7 Intervention du Général de Brigade Hassan LAI, Commandant de laForce Africaine en Attente de la CEDEAO, NigeriaRésumé : Lʼintervention du Général de Brigade Hassan LAI avec <strong>le</strong> titre «Lacontribution des forces de défense et de sécurité aux opérations multinationa<strong>le</strong>set humanitaires : perspectives de L'ECOWAS» débute avec la constatation quela fin de la guerre froide a suscité un nouveau débat sur <strong>le</strong> futur développementdes relations internationa<strong>le</strong>s, car el<strong>le</strong> offrait la perspective d'un monde en paixbasé sur <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> du capitalisme occidental. La contribution des forces de défenseet de sécurité aux missions multinationa<strong>le</strong>s et humanitaires du XXI ème sièc<strong>le</strong>est discutée sous différents aspects. Après sa définition des notions de forcesde défense et forces de sécurité et des explications sur <strong>le</strong>s missions humanitaireset multinationa<strong>le</strong>s, il décrit <strong>le</strong>s principes de base des droits humanitaires internationaux.Dans la deuxième partie de l'intervention, il analyse l'environnement desécurité et <strong>le</strong>s risques. Le Général LAI analyse notamment la prise de pouvoir anticonstitutionnel<strong>le</strong>,la prolifération de petites armes et des armes légères, <strong>le</strong> terrorismeglobal et transnational, <strong>le</strong> crime organisé transnational, <strong>le</strong> changementdu climat, <strong>le</strong> trafic de drogues et la piraterie maritime. Le troisième chapitre del'intervention traite <strong>le</strong> sujet d'un encadrement rendant des opérations multinationa<strong>le</strong>shumanitaires possib<strong>le</strong>. La légitimation par <strong>le</strong>s Nations unies et par la CE-DEAO est nécessaire, <strong>le</strong> commandement et la stratégie des opérationshumanitaires multinationa<strong>le</strong>s devront éga<strong>le</strong>ment suivre des règ<strong>le</strong>s bien précises.Ensuite, <strong>le</strong>s intérêts communs et <strong>le</strong>s défis qui doivent être affrontés dans <strong>le</strong> cadredes missions humanitaires multinationa<strong>le</strong>s sont adressés. Dans sa conclusion, <strong>le</strong>général énumère <strong>le</strong>s conditions décisives qui doivent être réunies <strong>pour</strong> garantir <strong>le</strong>succès d'une opération humanitaire.THE CONTRIBUTION OF DEFENCE AND SECURITY FORCESTO MULTINATIONAL AND HUMANITARIAN OPERATIONSECOWAS PERSPECTIVESIntroductionForce en attente de la CEDEAOThe end of Cold War brought with it a renewed debate on the future of internationalrelations as it signal<strong>le</strong>d the emergence of a new, peaceful world basedupon the model of Western Capitalism. Derived very much from traditional liberaltheory, this scenario saw military activity as undesirab<strong>le</strong> and as a distractionfor the main preoccupation of wealth creation within and betweencapitalist societies. Therefore, according to this scenario, a new and unprecedentedopportunity now exists to develop a global consensus on the desirabilityof liberal democracy and the market economy that, in the longer term,would render conflict between nations an anachronism. 166


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresBy this consensus however, some use of military force might continue butwould mainly be confined to small ʻbushfireʼ such as the conflict in Somalia,itself a sad echo of the Cold War, whi<strong>le</strong> the vast majority of states wouldenjoy stability and prosperity. A massive peace dividend would be availab<strong>le</strong>for civil purposes, and the military would be re<strong>le</strong>gated to a minor ro<strong>le</strong>.In big contrast to the liberal optimists, neo-realists see the 1990s as aninter-war rather than a post-war period. The collapse of the Soviet Unionhas <strong>le</strong>d to the creation of a multi-polar rather than a bi-polar world in whichthe underlying rivalries between nations-states continue. Indeed, the potentialfor conflict has been increased by the emergence of new states inthe former Soviet Union and elsewhere and by the growing economic andmilitary powers in the developing world. Military conflict could even developbetween current allies such as Japan and the USA because of intensifyingeconomic competition. 2The neo-realists further assert that due to the recent political changes, ratherthan <strong>le</strong>ading towards the eradication of war and the re<strong>le</strong>ase of resources forpeaceful purposes, it will have a reverse effect. Any cuts in military spendingseen as a result of the end of the Cold War are temporary phenomenon, anda reorientation of military capabilities will be required to face the new threats,with emphasis on maintaining the West word technological advantage.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARA hybrid of these two points characterises a third approach. This holds thateffectively, there will be zones of peace and zones of turmoil, with economicand military cooperation between the advanced industrial societies in thezone of peace. However, the zone of turmoil will be by far the larger, includinghighly militarised states prepared to use force as well as states subjectto intra-state conflict through civil war and religious fundamen talism. 3At its extreme, this view postulates a future of resource competition, the breakdownof nation-states, and environmental degradation affecting billions of peop<strong>le</strong>at a time of rapid population growth outside the zone of peace. Accordingto the hybrid viewpoint, the West (developed economy) will need to maintainmilitary capabilities against renegade states or to apply intervention at the subnational<strong>le</strong>vel, should its interests be threatened directly or as a result ofpotential spill-over from localised conflicts. Here, any e<strong>le</strong>ments of liberal optimismon the benefits to Western societies through economic cooperation aresubsumed under the implications for military planning. The West would needexpanded operational capabilities across a broader spectrum than conventionalwarfare, in terms of simp<strong>le</strong> peacekeeping but also of special operationsand covert warfare.True to this view, there are peacekeeping and related operations around theglobe in which the West is decisively involved. Coming home at the sub-regional<strong>le</strong>vel, member states of the West African sub-region have contributedin a multinational manner to peacekeeping and humanitarian operations inwar torn countries as in Liberia, Sierra Leone, Guinea Bissau and CotedʼIvoire. This paper would look at the ro<strong>le</strong> of the defence forces as it portendsto humanitarian operations in such conflict.67


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineAIMThe aim of this paper is to discuss the contribution of defence and securityforces to multinational and humanitarian operations in the 21st century.SCOPE1. The presentation will cover the following:2. Conceptual Discourse3. Security Environment and Threats: An Overview.4. Enabling Framework for Multinational Humanitarian Operations.5. Strategy for Multinational Humanitarian Operations.6. Chal<strong>le</strong>nges in Multinational Humanitarian Operations.CONCEPTUAL DISCOURSEDEFENCE FORCESDefence or armed forces generally refer to the members of the army, navy andair force. They are also known as and cal<strong>le</strong>d military. The military profession isrelatively modern, but the art of warfare and the business of soldiering are as oldas recorded history. The military according to Friedrich Engels is described as;“the organised association of armed men (women) maintained by the state forthe purpose of defensive and offensive warfare.” 4 This definition does notprovide an exhaustive account of all the purposes for keeping a military force bythe state in a fast changing world. This is because nowadays, the military ofmost states are usually engaged in many operations other than war.In this regard, the term military in a democratic nation would mean, the nationalinstitution primarily tasked by the constitution with the management ofvio<strong>le</strong>nce either in internal defence or against external aggression. It is for thesustenance of internal cohesion and stability; or for the attainment of any othernational objectives as may be determined by the appropriate <strong>le</strong>gal authority.A close look at the postulation shows that unlike in the past when the mainpurpose of the military in society was essentially the employment of force toproduce successful outcomes in war, nowadays, the military have well definedpeace and war time functions. With the growing changes in the environmentin which states operate, the ro<strong>le</strong> of the military has been expanded to accommodatethe nob<strong>le</strong> duties of managing varied and comp<strong>le</strong>x chal<strong>le</strong>nges. Suchchal<strong>le</strong>nges include peacekeeping operations, humanitarian operations arisingfrom conflicts, and natural or manmade disasters like flood, earthquake, landslide,air crashes among others.Also, today the military is frequently cal<strong>le</strong>d upon to assist in the maintenance ofinternal security, law and order. As a result, the ro<strong>le</strong> of the military has now becomemore central to societal good and wellbeing than it ever was. Therefore,the idea and ro<strong>le</strong> of the military in modern society has moved from a restrictedunderstanding as a war-fighting organisation to the broader notion of employmentof joint components for war, internal stabilisation and peace building.Whi<strong>le</strong> the primary responsibility of the military is to fight and win wars, asecondary responsibility is to support the civil authority in humanitarian andpeace building operations. In extreme cases where internal conflicts, naturalor manmade disasters threaten national security or the established order, themilitary may be cal<strong>le</strong>d in as a last resort where the primary agencies chargedwith such responsibilities can no longer cope. Against this consideration, themilitary should be ab<strong>le</strong> to generate highly trained and combat ready forces to68


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresundertake a number of varied tasks in 3 c<strong>le</strong>arly distinguishab<strong>le</strong> situations,namely; in peacetime, during crisis and in war.For these reasons, the military as an institution of the state is a rich repositoryof all kinds of professions – engineers, doctors, communication informationsystem experts, lawyers, architects, journalists, nurses etc which could readilybe deployed to support in humanitarian operations. In spite of its varied composition,the military institution is characterised by tradition, procedures andthe possession of core technical competencies by its personnel imbued withdisciplined character to win the nationʼs war should deterrence fail. These attributesdistinguish the military, as a profession whose hallmark is the managementof vio<strong>le</strong>nce to achieve national objectives, from all other professions.SECURITY FORCESSecurity forces which sometimes include the military, generally refers to paramilitaryorganisations that are trained and armed to perform specific securityduties within the state. These include security of individual, communities, orthe state. Security had always been focused on military matters in the periodof the cold war until the 1980s. By the early 1990s, the concept of security hasgone beyond military considerations to a view which includes security ofhuman, resources, property and environmental security. Today in mostcountries, you have security forces apart from the military, organisations suchas the Police, Gendarmes, Intelligence Services, Immigration, Customs, CivilDefence Corps, Prison Wardens, Road Safety Corps, Forest Guards, DrugEnforcement Agency Fire Service, Border Guards etc.These security forces or organisations have their respective mandates andmodus operandi according to the Act or <strong>le</strong>gal instrument establishing them.Although they have different ro<strong>le</strong>s and responsibilities, they are part of thesystem for ensuring national security albeit the well being of the nation. Becauseof the peculiar needs and structure of individual countries of the WestAfrican sub-region, it may be difficult to discern the ro<strong>le</strong> of these agencies inspecific terms. For examp<strong>le</strong>, Gendarme which is a core force in most of theFrancophone countries does not exist in the Anglophone countries. However,security forces globally are known to be involved in combating threats tointernal security issues as it affects lives and property, and other cross cuttingincidences like disaster management, anti-drug trafficking, anti-terrorist, smallarms and light weapon proliferation, trans-border crime etc.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARMULTINATIONAL OPERATIONSHumanitarian operation involves multinational and multidisciplinary components.The military with its hierarchical structure of command and expertise ofvarious discipline such as special forces, engineers, medical, aircraft, ships,vehic<strong>le</strong>s, communication, etc are capab<strong>le</strong> of conducting a variety of contributionto humanitarian operations. Likewise the police, the para-military and securityagencies have their unique way to contribute in humanitarian operations.Significantly too, are the various civilian organisations like the ICRC, MSA,OCHA, UNHCR, NGOs, PVOs, etc, who most times are the first to reach thescene before they could be supported by the defence and security forceswhen the situation becomes overwhelming, difficult or unbearably threatening.Experience has shown that in most humanitarian operations, there are inherentchal<strong>le</strong>nges based on princip<strong>le</strong>s, mandate or ignorance because of theirvarious nationalities, background modus operandi. Whereas, the cardinalobjective and efforts of all the organs and agencies in the theatre should aimat a common goal or end-state, that is in providing relief, restoration of humandignity, security and sustain development.69


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineHUMANITARIAN OPERATIONSHumanitarian operations connote support or aid given to non-belligerents impactedby hostilities or during a disaster. It is done without discrimination to allin need. Aside in disaster situation, humanitarian operation is often conductedin a combat situation, with the consent of belligerents to do so and sometimeswithout such consent. The support is intended to sustain dignified life, strengthenlocal institutional, efforts to relieve suffering and build self-reliance and toassure that the first step is taken towards reconstruction, rehabilitation anddevelopment.PRINCIPLES OF INTERNATIONAL HUMANITARIAN LAWThe princip<strong>le</strong>s of international humanitarian law make a distinction betweencombatants and non-combatants in protecting the non-combatants fromarmed attacks. Recently however, military forces have become increasinglyinvolved in operations other than war including provision of relief and servicesto the local population. At the same time, due to the changing nature of moderncomp<strong>le</strong>x emergencies, the humanitarian community has faced increasedoperational chal<strong>le</strong>nges as well as greater risks and threats for theirworkers in the field. This has often compel<strong>le</strong>d some of them to seek the protectionof military forces on a case-by-case basis. Thus practical realities onthe ground have gradually necessitated various forms of civil military cooperation,coordination and collaboration for humanitarian operations.These developments, together with cases of military interventions for ʻhumanitarianʼpurposes, have <strong>le</strong>d to an erosion of the separation between the humanitarianand the military space, and threaten to blur the fundamentaldistinction between these two domains. It also raises significant concerns associatedwith the application of humanitarian princip<strong>le</strong>s and policies as well asoperational issues. Furthermore, these developments necessitate increasedcommunication, coordination and understanding between humanitarian agenciesand the military to require know<strong>le</strong>dge of each otherʼs mandates, capacitiesand limitations.SECURITY ENVIRONMENT AND THREATS: AN OVERVIEWWhether viewed from the regional, continental or international <strong>le</strong>vels, thereare some major security threats and vulnerabilities that impact on WestAfricaʼs security. In a sense, these threats may be considered as emanatingfrom the external environment. Sometimes they can originate from, transitthrough or be directed to West African territory. These threats are many andvaried but we may samp<strong>le</strong> just a few of them.UNCONSTITUTIONAL ASCENDANCY TO POWERA p<strong>le</strong>thora of undemocratic ascendancy to power through military interventionor e<strong>le</strong>ctoral fraud is a situation that poses threat to security in West Africa. Withinthe boundaries of individual countries, the general trends are aggravatedby factors prominent amongst are: 5- Non-democratic and exclusive governance.- Inequitab<strong>le</strong> access to power and resources.- Discrimination on the basis of sex, religion, ethnic origin and socio-economicstatus.- Absence or abandonment of moral or ethical restraint against use of powerand management of public resources.70


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresSMALL ARMS AND LIGHT WEAPONS PROLIFERATIONThe prob<strong>le</strong>m of ethno-communal and religious conflicts in West Africa is thechal<strong>le</strong>nge of small arms and light weapons (SALWs) proliferation. Easy proliferationand circulation of SALWs is both a contributory factor and a consequenceof recurrent conflicts in the sub region. Although the exact number ofSALWs in the sub region is not yet known, the frequent use of these arms andweapons in conflict areas suggests that there is a large quantity of arms incirculation. The high rate of il<strong>le</strong>gal procurement and use of weapons is givingcause for serious concern to security and law enforcement agencies in Nigeriafor examp<strong>le</strong>.The quantity of arms surrendered during the disarmament and demobilisationphase of the Amnesty programme for the Niger Delta militants by the YarʼAduaadministration in 2009 gave an idea of the quantum of SALWs proliferation in thecountry. The Amnesty initiative saw over 15, 000 militants surrender at the expirationof the disarmament and demobilisation phase of the amnesty period.Weapons recovered during the disarmament process included 2,760 assortedguns, 287, 445 ammunitions of different calibre, 18 gun-boats, 763 dynamites,1,090 dynamite caps, 3, 155 magazines and several other military accessorieslike dynamite cab<strong>le</strong>s, bul<strong>le</strong>t-proof jackets and jack-knives. 6 It is believed that thearms surrendered are only a small fraction of what the militants are holding. Expectedly,the easy availability and circulation of these arms could explain thereported increase in the <strong>le</strong>vel of vio<strong>le</strong>nt crimes across the country. These armsand weapons must be mopped up to reduce the incidence of vio<strong>le</strong>nt conflictsand crime plaguing Nigeria at large. Aware of the chal<strong>le</strong>nges the SALWs proliferationposes to security, the Nigerian government had established an ExpertTechnical Panel to work out the modalities for establishing a National Commissionin line with the ECOWAS Convention on SALWS. When this commissionbecomes functional, it is expected that it would contribute to the reduction of il<strong>le</strong>galarms penetration and circulation in the country. At the sub regional <strong>le</strong>vel,the existence of ECOWAS Small Arms Protocol which most members statesare signatory to it is a welcome development.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARGLOBAL/TRANSNATIONAL TERRORISMThe global reach of international terror networks like al Qaeda and the changingsecurity environment occasioned by the emergence of more franchiseterror groups such as the al Qaeda in Arabian Peninsula (AQAP) and al Qaedain the land of Islamic Maghreb (AQIM) has raised the bar in terms of the <strong>le</strong>velof attention terrorism receives at high-profi<strong>le</strong>d security desks, both nationallyand internationally. The threat of growing transnational terrorism in West Africais a key issue that is now receiving attention at security desks, particularlyagainst the backdrop of the increasing reach of the AQIM.In particular, there are concerns about the growing operational reach of theAlgeria-based al-Qaeda in the Islamic Maghreb (AQIM), whose fighters are nowactive in large tracts of the central Sahara and its southern fringe, the Sahel.Although the AQIM seems presently preoccupied with facilitating the undergroundeconomic activities in the sub-region to finance its strategic objectives, theWest African region remain a ferti<strong>le</strong> ground for imp<strong>le</strong>menting acts of internationalterrorism. 7 West Africa, which is characterised by porous borders, and ineffectualnational security systems, is very vulnerab<strong>le</strong> to transnational terrorism.In this regard there has been a growing apprehension among Western diplomatsthat a West African al-Qaeda s<strong>le</strong>eper cell may launch attacks on Westerninterests in countries they reside. Indeed, the presence of AQIM operatingacross the Sahara Desert in Mauritania, Morocco, Mali, Niger and Nigeriaʼs71


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineporous borders has sharpened such fears. Owing to the perceived ideologicallinkage being drawn between al-Qaeda and radical/militant forms of politicalIslam, there is growing apprehension about the vulnerability of West Africa toterrorist infiltration and attack. This would require a collaborative and coordinatedeffort by member states defence and security forces to col<strong>le</strong>ctively engagethe al-Qaeda threats before it metamorphose into a humanitarian crisis.TRANSNATIONAL ORGANISED CRIMETransnational organized criminal groups are at the centre of many of theseissues and are putting up effective resistance to state control. According tothe United Nations Office on Drug and Crime (UNODC), transnational organizedcrime is attracting increased attention because whereas in the past theprob<strong>le</strong>m was mostly national (mafia, mobsters, cartels, triads), now, as a resultof globalization, it poses a threat to international security. 8In the wake of this realisation, international organisations and states havebegun to pay more attention to the nature, trend and impact of transnationalorganised crime. There are reports documenting the expansion and preva<strong>le</strong>nceof organised crimes in Africa in the last five years, with particular emphasis ontransnational criminal activities in West Africa. 9 The thinking is that the verystructure of West African economies, based on exploitation of natural resources,coup<strong>le</strong>d with a patrimonial conception of the State, contribute in creatingan enabling environment within which disrespect for existing laws andusing institutional prerogatives for private goals are not only justified, but consideredas an indicator of power. All such factors also attract unscrupulous economicoperators, facilitate the establishing and development of local andtransnational criminal networks, and promote the rooting of a cultural modelunder which money can buy everything including impunity, political power, socialconsideration and respectability. 10Some countries are often paraded as the poster child of these transnationalorganised crimes. They are often viewed as lying in the ʻthree-spotʼ continuumof transnational crime: origin, transit route and destination state. These transnationalcriminal networks in those countries include, but not limited to drugtrafficking, money laundering, human trafficking, counterfeiting, email scamming(yahoo-yahoo), and advanced free fraud. It is important to state that theinvolvement of some citizens in these crimes damages their countriesʼ reputation.This is a security chal<strong>le</strong>nge that has to be fought and defeated. Alreadyunder the initiative of US the militaries of the West African sub region are developingcommunication network tagged “African Endeavour.” This could beexpanded to include other security agencies in evolving ways and means ofcombating cybercrimes.CLIMATE CHANGEThere is emerging consensus among development practitioners, scientists,policy-makers, governments and other scholars that climate change is the biggestcontemporary chal<strong>le</strong>nge facing humanity in the 21st century. The climatechange phenomenon is undoubtedly a global concern, and for the foreseeab<strong>le</strong>future, it will continue to receive attention from individuals, communities,organizations, and states.Africa, particularly the sub-Saharan region, is likely to be negatively impacted byclimate variability and change. The Intergovernmental Panel on Climate Change(IPCC) has found that Africa is already experiencing the negative effects of climatechange and will experience greater changes in future. 11 Africaʼs vulnerabilityarises from a combination of many factors, including extreme poverty, a72


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièreshigh rate of population increase, frequent natural disasters such as droughtsand floods, and agricultural systems (both crop and livestock production) thatdepend heavily on rainfall. Africaʼs high vulnerability to the negative impacts ofclimate variability and change is also attributed to its low adaptive capacity. 12The predicted effects of climate change “over the coming decades includeextreme weather events, droughts, flooding, rising sea <strong>le</strong>vels that could affectcountries with coastal boundaries (Nigeria – Senegal), changes in habitatsand increased spread of life-threatening diseases such as malaria”. 13 Most oralmost all of West African countries are vulnerab<strong>le</strong> to the adverse consequencesof climatic change, with notab<strong>le</strong> security implications.Climate change implicates national security in West Africa by creating newenvironmental stressors or amplifying the frequency, intensity, magnitude andnature of existing environmental changes which serve or would serve as thepathways for the transmission of the de<strong>le</strong>terious consequences on individuals,communities or regions in the country. 14 Some of the environmental changesthat climate change is set to exacerbate in West Africa, include, but are notlimited to, desertification, deforestation, soil erosion, coastal erosions/flooding,and biodiversity dep<strong>le</strong>tion.Apart from the above-mentioned environmental trends, climate change impactson West African statesʼ security by exacerbating the effects of other vulnerabilitieslike poverty and disease. For instance, agriculture is the mainsource of food, industrial raw materials and employment (about 70 per cent)in some member statesʼ. However, agricultural productivity in the Sahel countriesis highly vulnerab<strong>le</strong> to climate change because it depends heavily onrainfall. Hence, the shifts in rainfall patterns in various parts of the countriesdue to climate change have <strong>le</strong>d to crop and livestock failures, compoundingfood insecurity and worsening poverty. Also, changes in temperature and humidityprovide or extend favourab<strong>le</strong> habitat for insects such as mosquitoes,tsetse fly, tick and other pests in areas where they hitherto existed. Consequently,there has been reported increase in the preva<strong>le</strong>nce or outbreak of diseasessuch as malaria, cerebral-spinal meningitis, and heat strokes in thesub region. Indeed, climate – induced drought has caused food insecurityand unfavourab<strong>le</strong> living conditions in some parts of the affected countries forcingtheir nationals to emigrate.Firstly, effort should be geared towards putting in place early warning mechanismto be ab<strong>le</strong> to mitigate disaster risk. Luckily in the West African sub region,there is a logistics base in Sierra Leone and a humanitarian base in Mali forPSO and humanitarian operation. However, the logistics bases need to befully equipped with assorted relief materials and re<strong>le</strong>vant tools as well ascapacity building of all the agencies and stakeholders in a collaborative mannerto be ab<strong>le</strong> to meet the chal<strong>le</strong>nges of humanitarian operation in the field.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDRUG TRAFFICKINGDrug trafficking through the West African sub-region has been on the increasein the last six years. This is shown in the incidence of seizures that have beenmade on the illicit drugs. Within the period 2003 – 2010, hundreds of metrictons of cocaine bound for Europe via West Africa have either been impoundedor have successfully sca<strong>le</strong>d through to their destinations. 15Drug trafficking is a security threat considering that proceeds from drugs couldbe used to finance political instability or terrorism. Others include increase incrime, health insecurity, corruption, and insurgency etc. Drug abuse as a resultof trafficking has been linked to some of the conflicts in West Africaʼs civilwars. They have been used for recruitment of young boys as foot soldiers.According to the UNODC annual report of 2008 :73


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineYoung children tote machine guns almost larger than themselves. They submitto warlords in order to survive. Part of their initiation involves taking drugs.This blunts their fear and pain and makes them ever more dependent on theirmasters. They <strong>le</strong>arn to wield more deadly weapons with indifference, transformedfrom innocent children into drug crazed kil<strong>le</strong>rs 16From observation, the factors that have made West Africa vulnerab<strong>le</strong> to drugtrafficking are many, but the prominent ones are as a result of lack of stringentmonitoring by government agencies as it is being done in Europe and theAmerica. The unprotected geographical coasts of the sub-region are another.Other factors are weak institutions and porous borders, shift of cocaine marketfrom North America to Europe, poverty and non-independent institutionalstructures. With a formidab<strong>le</strong> coastal guard, aggressive border patrol by thedefence and security forces (securing the sea, land and air borders), good intelligencenetwork sharing as well as stringent monitoring agencies, the menaceof drug trafficking would be ameliorated.MARITIME PIRACYPiracy and armed robbery in the sub region territorial waters, sea ports and anchoragesis another key feature of the West African security environment. Thefrequency of pirate attacks on ships within the Gulf of Guinea territorial watershas not only increased in recent times, but also has serious implications forsocio-economic development and national security. 17 According to the InternationalMaritime Bureau (IMB), about half of the 30 deaths recorded in pirateattacks around the world between 1 January and 30 June 2004, occurredin Nigerian territorial waters. 18 The situation has indeed worsened since 2004.Statistics re<strong>le</strong>ased by the IMB indicate that Nigeria had the second highestnumber of piratical attacks by pirates in 2008, and continues to be viewed asanother high risk area after the Somali coast in Africa. 19Maritime piracy should be a matter of security concern to all countries of the subregion with coastal borders. Coastal guard with a joint operation centre need to beestablished to monitor and protect the coast areas of the West Africa from piracy.ENABLING FRAMEWORK FOR MULTINATIONALHUMANITARIAN OPERATIONSINTERNATIONAL HUMAN RIGHTSThe globally acceptab<strong>le</strong> human rights princip<strong>le</strong> is based on the concept thatevery country has an obligation to respect the Human Rights of its citizensand that other countries and the international community have a right, andresponsibility to protect, if states do not adhere to this obligation. InternationalHuman Rights law consists of the body of ru<strong>le</strong>s, procedures and institutionsdeveloped to imp<strong>le</strong>ment this concept and to promote respect for HumanRights in all countries on a worldwide basis.HUMAN RIGHTS DEFINEDAccording to the UN Department of Peacekeeping Operations (UNDPKO)Standard Generic Training Modu<strong>le</strong> (STGM), Human Rights are “Legal entit<strong>le</strong>mentswhich protect individuals and groups against actions and omissionswhich interfere with fundamental freedoms and dignity.” 20 Human Rights maybe grouped into three categories :Category AThe right to be free from government violation of the integrity of the person toinclude:74


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières(1) Torture(2) Cruel, inhuman, or degrading treatment or punishment(3) Arbitrary arrest or imprisonment.(4) Denial of fair public trial(5) Invasion of home.Category BThe right to the fulfilment of such vital needs as(1) food,(2) shelter,(3) health care,(4) education.Category CThe right to enjoy civil and political liberties such as:(1) Freedom of thought, of religion, and of assembly(2) Freedom of speech.(3) Freedom of the press.(4) Freedom of movement both within and outside of oneʼs own country.(5) Freedom to take part in ones government.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARUN CHARTER AND HUMAN RIGHTSMember states now recognise that Human Rights are of international concern.This means that one countryʼs treatment of its own citizens is a <strong>le</strong>gitimateconcern of other countries. By agreeing in the UN Charter to cooperate in promotionof Human Rights, member states have given the UN extensive <strong>le</strong>galauthority to define and <strong>le</strong>gislate those rights. Consequently, UN practice overthe years has clarified the scope of the obligations of member states to promoteHuman Rights, both expanding them and crating organisations designedto ensure membersʼ compliance. Thus :a. Now, countries engaging in a pattern of gross violations of internationalHuman Rights are in violation of the UN Charter because they have fai<strong>le</strong>dto uphold their p<strong>le</strong>dge to promote universal respect for and observance ofHuman Rights.b. UN investigations reveal Human Rights abuses and UN resolution call onspecific states to cease violating the Charter.c. Gross violations of Human Rights now play a significant ro<strong>le</strong> in determiningwhether a particular conflict constitutes a threat to international peaceand security, thus triggering a possib<strong>le</strong> Chapter VII peace mission. This isone of the tasks that can be undertaken by the ECOWAS Standby Force(ESF) in Artic<strong>le</strong> 22 of ECOWAS Protocol Relating to the Mechanism forConflict Prevention, Management, Resolution, Peacekeeping and Securityof December 1999. 21d. The ʻnation buildingʼ phase of a peace operation now seeks to institutionalisethose values embodied in the universal Declaration of Human Rights by cratinggovernment, judicial, and security mechanism that will protect those rights.ECOWAS MANDATE AND LEGITIMACY FOR CONFLICT PREVENTIONThe Protocol Relating to the Mechanism for Conflict Prevention, Management,Resolution, Peacekeeping and Security of December 199922 constitutes themost comprehensive normative framework for confronting the threats to peaceand security in the region on a more permanent basis. This is by boosting theconflict prevention capabilities when they occur and to engage more effectivelyin post-conflicts reconstruction in places where peace has been restored.75


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineBeyond <strong>le</strong>gal instruments and guidelines, however, the unacceptab<strong>le</strong> <strong>le</strong>vels ofdeprivation in West Africa, as well as the destructive nature and spill over effectsof contemporary regionalises internal upheaval, place specific moral obligationon ECOWAS Member States to act. Thus, ECOWAS is imbued withthe necessary supranational powers (acting on behalf of and in conjunctionwith Member States; AU and UN), as well as the <strong>le</strong>gitimacy to intervene toprotect human security in three distinctive ways, namely : 23a. The responsibility to prevent – actions taken to address the direct rootcauses of intra and inter-state conflicts that put populations at risk.b. The responsibility to react – actions taken response to grave and compellinghumanitarian disasters.c. The responsibility to rebuild – actions taken to ensure recovery, reconstruction,rehabilitation and reconciliation in the aftermath of vio<strong>le</strong>nt conflicts,humanitarian or natural disasters.CONDUCT OF MULTINATIONAL HUMANITARIANOPERATIONSDEFENCE FORCES IN SUPPORT OF HUMAN RIGHTSPROTECTIONThe military component of peace operation is more numerous and deployedmore extensively than the mission Human Rights Component. Peace operatorsperform the following functions in support of Human Rights protection: 24a. Observation and monitoring of the actions of armed forces and the civilianpopulation in the mission area.b. Reporting possib<strong>le</strong> violations to other mission components for analysis andaction.c. Providing a positive examp<strong>le</strong> of Human Rights respect to local military authority,police and civilians.d. Chapter VII, states that “should the UNSC consider that (measures not involvingforce) would be inadequate or have provide to be inadequate, itmay take such action by air, sea, or land forces as may be necessary tomaintain or restore international peace and security.During the past decades, vast changes have occurred in the geo-political landscapeand the nature and types of conflicts in which military forces have been involved.Whi<strong>le</strong> the threat of conventional war remains, military forces have beenmore frequently deployed to operations other than war, and in particular PSO,which are situations that require great restraint in the use of force now a vogue.Most PSO today constitute a combination of Chapter VII robust use of forceand a host of international social services that engage, first in humanitarian aidand then in massive efforts at nation building. These missions are directlyand irretrievably lined to the international interest and concern for HumanRights. Peace operations not only have an inherent duty to protect HumanRights whi<strong>le</strong> deployed, in accordance with the ru<strong>le</strong> of law, but, more so, arefinding themselves embracing duties in which they first restore the governmentstructures that protect human rights and then engage in a significanteducation and action programme to institutionalise those rights as part of thenation building peace operation mission. In the context of PSO, the followingactivities are carried out: Conflict Prevention, Peace-making, Peacekeeping,Humanitarian Aid, Peace Enforcement, and Peace Building.76


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresDISASTER MANAGEMENTDisaster is a common reality of natural and manmade events. It manifests inthe form of flood, drought, earthquake, sandstorm, wildfire, storm, sea or airetc. On the other hand, disaster management is operational activities whichexist for dealing with disaster. It encompasses the classical management functionsof planning, organising, staffing, <strong>le</strong>ading and controlling. It also involvesmany organisations which must work together to prevent, prepare for, andrespond to and speedy recovery from effects of disasters. 25Disasters and their impact on human lives and the environment may vary insca<strong>le</strong> and peop<strong>le</strong> are increasingly relying on their governments, national andinternational agencies and communities to prevent them or mitigate theireffects. Where the physical destruction may be confined to a particular area,the disaster victims and the socio-economic impact on the entire nation couldbe significant enough to warrant relief and rehabilitation by the nationalgovernment. Sometimes, the occurrence may be so pronounced to be tagg -ed a national disaster which could also be referred to as a national emergency,requiring international support.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARIn the recent history, there are myriads of disasters of monumental magnitudethat occurred which curried international sympathy as they were being broadcastin the media. They include: the flood in Mozambique, New Or<strong>le</strong>ans inUSA, the Tsunami of Indonesia, and the earthquakes/flood in Pakistan, China,Haiti, and Chi<strong>le</strong>. Others are ship wrecks, air and rail disasters. Coming hometo the West African sub-region, we witnessed the floods in Burkina Faso,Ghana, Nigeria, Niger, Benin and the drought in Niger.As earlier mentioned, a wide range of forces can cause disasters and theseforces could either be natural or man-made or a combination of both. Thedivision between natural and man-made disaster is to some extent an oversimplification,as many disasters are caused by a combination of both typesof forces, whi<strong>le</strong> defence and security forces are employed for speedy andeffective mitigation when their states are threatened by the disaster.A classical model of defence forces involvement in disaster management wasdemonstrated when the earthquake of 7.9 magnitudes on the Richter sca<strong>le</strong>devastated Sichuan province of China on 16 May 2008. The China Peop<strong>le</strong>sLiberation Army (CPLA) mobilised and sent the first team to the disaster zonewithin 14 minutes of the incident and shortly thereafter, a total of 113,080 soldiersand armed police were mobilised by rail road and on foot to carry out themassive rescue operation.26 Helicopters were used to drop relief suppliesafter two days of rain immediately the quake that prevented flights and soldierswere repeatedly shown on te<strong>le</strong>vision, sometimes using their bare hands to digout buried survivors in areas unreachab<strong>le</strong> by heavy equipment due to blockedroads. To this effect, Lt Gen Ma of CPLA said, “We feel our troops should beab<strong>le</strong> to quickly respond to any danger, including carrying out diversified militaryoperations. So, in peaceful times our troops are prepared to respond tonatural disaster.” 27There is a serious concern among ecologists about the likelihood of earthquakesand floods of monumental proportion in the near future in places thathave been identified with the history of volcanic tendency or lying along suchfault lines. This is as a result of the on-going climatic and associateddevelopment globally. So is the case with floods along the coastal towns dueto melting of ice in the polar region. Early warning mechanism should beenhanced as well as preparedness for eventuality.77


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineREFERENCES1. Fukuyama, F. The End of History and the lastMan. (Penguin, London,1992).2. Huntington, S. The Clash of Civilisationsʼ (ForeignAffairs, Summer, Vol.72, No.3, 1993).3. Singer, M and Wildaysky, A. The Real WorldOrder: Zones of Peace and Zones of Turmoil.(Chatham House, USA 1993).4. Lai, HM, Nigerian Army in National Development:Chal<strong>le</strong>nges and Prospects. Paper Presented atthe National Defence Col<strong>le</strong>ge, Nigeria in 2008.5. Major General Garuba, CA (Edt). Capacity Buildingfor Crisis Management in Africa. (GabumoPublishing Company Ltd, Lagos, 1998).6. Istifanus S. Zabadi, ʻCrisis Management in Nigeriaʼ,Paper presented to the Participants of ExecutiveIntelligence Management Course 2 (EIMC)at the Institute for Security Studies, Lower UsumaDam, Bwari - Abuja, 6th January 2010, p.17.7. For a detai<strong>le</strong>d analysis of the threat of AQIMin West Africa, see C. Nna-Emeka Okereke,ʻal-Qaeda in the Islamic Maghreb (AQIM) and theQuestion of Security in West Africa, African J ournalfor the Prevention and Combating of Terrorism,Volume 1, Number 1, (June 2010), pp. 61- 81.8. United Nations Office on Drug and Crime -UNODC Crime and Instability: Case Studies ofTransnational Threats (New York, UNODC,2010), p.iii.9. See for instance, UNODC Crime and Instability:Case Studies of Transnational Threats. NewYork, UNODC, 2010); Kwesi Aning, “ OrganizedCrime in West Africa: Options for EU Engagement”(Stockholm: International Institute forDemocracy and E<strong>le</strong>ctoral Assistance, 2009).STRATEGY FOR MULTINATIONAL HUMANITARIAN OPERATIONSSTRATEGYStrategies are often conceived as ʻgame plansʼ for achieving desired goalswith limited means and as the linking of ends and means. It is a process thattells how finite resources will be employed to accomplish declared objectives. 28Variab<strong>le</strong>s that affect strategy formulation include: global factors, national interest,considered to be the highest objective; long-term goals, such as freedomof the seas or open market, versus short term aims.PEACE SUPPORT OR DISASTER MANAGEMENTPSO or disaster management are engaged by several different actors bothcivil, police, military with different mandates, means and methods. These operationsare carried out in international environment with actors from differentcountries and different cultural backgrounds. We have seen such operationsin war torn areas as DR Congo, Rwanda, Darfur, Somalia etc.ECOWAS SUBREGIONAL LEVELAt the sub regional <strong>le</strong>vel, an ECOWAS Standby Force (ESF) is being developedas part of the architecture for peace and security in ECOWAS. The strategyfor this arrangement is to have forces (military, police and civilians) welltrained with the right kind of resources on standby in their respective countriesready to deploy when required. The missions this force is prepared to undertakeunder Artic<strong>le</strong> 22 of the Protocol are: 29a. observation and Monitoring.b. Peacekeeping and Restoration of Peace.c. Humanitarian Intervention in support of Humanitarian Disaster.d. Enforcement of Sanctions, including Embargo.e. Preventive Deployment.f. Peacebuilding, Disarmament and Demobilitation.g. Policing Activities, including the Control of Fraud, and OrganisedCrime.h. Any other Operations as may be mandated by the Mediation and Security Council.DEFENCE AND SECURITY ROLES IN MULTINATIONALHUMINATARIAN OPERATIONSInfantry/Special Forcesa. Observer missionb. Protection of IDPs/Refugees campsc. Search and Rescue operationsd. Assist in supply of relief materia<strong>le</strong>. Escorts duties of VIPs and displaced personsf. Assist in disarmament, demobilisationGendarmerie/Policea. Assist in maintenance of ru<strong>le</strong> of lawb. Escort dutiesc. Protection of IDP/Refugees campd. Investigation dutiese. Observer missionf. Crowd dispersalg. Training of policeh. Arrest of wanted person(s)78


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresEngineersa. Humanitarian demining.b. Assist in construction of IDP camp.c. Assist in quick impact project.d. Establishment of water point.e. Assist in minor bridging.f. Assist in maintenance or improvement of roads.g. Assist in crossing water obstac<strong>le</strong>.Medicalsa. Provision of mobi<strong>le</strong> hospital.b. Dental and ophthalmology care.c. Health and hygiene supervision.d. First Aid treatment.e. Collaboration with other health/medical agenciesSupply and Transporta. Support of vehic<strong>le</strong> to lift IDPs and supply of relief material.b. Provision of water supply.c. Strategic lift of troops, material, stores and resupply.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCommunication, information Systemsa. Provision of communication within the mission area.b. Link other agencies with the military net for coordination.c. Assist in establishing local network services.Naval Forcesa. Support in transporting relief materials.b. Evacuation of refugees.c. Coastal patrol and enforcement of embargo.d. Strategic lift of troops, material and resupply.e. Medical evacuation.Air Forcesa. Aerial or ground resupply.b. Evacuation of refugees/IDPs.c. Strategic lift of troops, material and resupply.d. Medical evacuation.COMMON GOALWhat all operations have in common is the strive towards a common goal inconflict or disaster area. In such operations therefore, defence and securityforces need to look at strategy that utilises non-<strong>le</strong>thal technologies and warfareas an adjunct to conventional war. This requires changes to military doctrineand the incorporation of non-<strong>le</strong>thal weaponry in training, developmentand acquisition system. Reality in the field shows that most armed forces ofthe region are tailored towards conventional warfare. They lacked that equipment,resources and expertise that could be brought to provide relief speedilyand win hearts and minds of the help<strong>le</strong>ss victims and to support in bringingabout sustain development instead of engendering destruction of collateralmagnitude. It will also be necessary to formulate joint, multi-service systemsacross military services in a coordinated, collaborated and coherent mannerin the sub region in the interest of humanitarian operations.10. Amado Philip de Andrés “West Africa underAttack: Drugs, Organized Crime and Terrorism asthe New Threats to Global Security”, UNISCIDiscussion Papers, No. 16 (2008), p.204.11. Van Wyk: IPCC. Summary for Policymakers.Working Group II Fourth Assessment Report(Geneva: IPCC Secretariat, 2007).12. D. A. Mwiturubani, and J. van Wyk “Introduction”,in Donald Anthony Mwiturubani and Jo-Ansie vanWyk (eds.) Climate Change and NaturalResource Conflicts in Africa, ISS Monograph169, 2010, p.x.13. Jackie Cilliers, “Climate change, Population Pressureand Conflict in Africa” ISS Occasional Paper,No. 178, June 2009, p.1.14. Gerald E. Ezirim and Freedom C. Onuoha, “ClimateChange and National Security: Exploring theTheoretical and Empirical Connections in Nigeria”,Journal of International Politics and DevelopmentStudies Vol.4, No.1 (2008), pp.89 – 108.15. Regions in the country p.39.16. Ibid, p.40.17. Freedom C. Onuoha, and Habiba I Hassan, “NationalSecurity Implications of Sea Piracy in NigeriaʼsTerritorial Waters”, Nigerian Army QuarterlyJournal Vol.5, No.1, (2009), pp.1-28.18.IRIN, ʻNigeria: Piracy report says Nigerian watersthe most deadlyʼ, 27 July 2004 http://www.irinnews.org/report.aspx?reportid=50843(Accessed12 October 2008).79


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine19. IMB, Piracy and Armed Robbery against ShipsReport for the Period 1 January – 31 December2008 (London: ICC IMB, 2009) p.24.20. UN Department of Peacekeeping Operationʼs(DPKO) Standard Generic Training Modu<strong>le</strong>Human Rights.21. ECOWAS Protocol in Relation to Conflict Prevention,Management, Resolution, Peacekeepingand Security of December 1999.22. Ibid.23. ECOWAS Conflict Prevention Framework,(Regulation MSC/REC. 1/O1/08), ECOWASCommission, Abuja, Nigeria January 2008).24. Defence Institute for International <strong>le</strong>gal Studies.Peacekeeping for Decision Makers – An ExecutiveSeminar for Nigeria, 2006.25. Humanitarian Assistance in Mozambique in theContext of the UN Peacekeepiing Operation,.Unpublished Transcript 1995.26. US Herald Magazine, 2008.27. Ibid.28. Armed Forces Journal International, May 1995.29. ECOWAS Protocol. Op Cit.30. Prendergast, J. Frontline Diplomacy – HumanitarianAid and Conflict in Africa.(Boulder: LynneRinner Publisher, 1996).31. Natsios, A. US Foreign policy and the Four Horsemenof the Apocalypse: Humanitarian Relief inComp<strong>le</strong>x Emergences. (West Point: Praeger,1997).32. Authorʼs Experiences in UNPROFOR in formerYugoslavia 1994/95.CHALLENGES IN MULTINATIONAL HUMANITARIANOPERATIONSUnder the framework of actions by the General Assembly and the UN SecurityCouncil (UNSC) regarding procedures of military PSO, it is important to recognisethat international control of conflict embraces a wider horizon than apurely military aspect. Thus, it is not simply a military responsibility but combinedoperation encompassing all the agencies that have a contribution tomake to the peaceful containment and ultimate sett<strong>le</strong>ment of a conflict, theestablishment of normalcy, promotion of stability and the rehabilitation of communitylife.In a multinational peacekeeping or disaster management operations, humanitarianaid can threaten the chances for a successful outcome by having unintendedpolitical and military effects. When the objective of the peacekeepingis so<strong>le</strong>ly to provide that aid, the peacekeepers are given the task of doing nothingto help correct the political and military conditions that brought about thehumanitarian disaster that made the aid necessary. In any event, it should berecognised that despite the best of humanitarian intentions, aid always has apolitical and military impact. It will inevitably have profound effects on thechances of success for peacekeeping, whether the operation is multifunctionalor limited to protective engagement. Whi<strong>le</strong> designed to save lives, humanitarianaid can, if it fuels the conflict and prolongs the war, ultimately costmore lives than it saves. It would be better to admit that humanitarian assistancewithout political effects is impossib<strong>le</strong> so that the impacts of these effectscan be more carefully considered. As Prendergast observed in his book onhumanitarian aid and conflict in Africa:Humanitarian aid will continue to be utilised as an instrument of war and willcontinue to fuel conflict. It is incumbent upon those providing the aid to minimisethis phenomenon and to consciously and strategically enhance aids ro<strong>le</strong>in the peace building process. 30How then, can such aid efforts be organised to do no harm ? Natsios describespart of the prob<strong>le</strong>m :NGOs, some of which have developed philosophical approaches to reliefand development, guard their autonomy with such energy that they sometimesseem to be suggesting that autonomy is a form of strategy. It isnot. In fact, it is one reason why international responses to emergencieshave been so chaotic. 31Further, experience in the field has shown that in the course of dischargingthese functions, various chal<strong>le</strong>nges which include the following are encountered: 32a. Duplication of Ro<strong>le</strong>s – OCHA vs Humanitarian coordination.b. Conflict between Process and Work – Military versus Civilian.c. Subjecting Humanitarian Activities to Military C<strong>le</strong>arance – Political authority,below political expediency and military influence.d. Budgeting and Source of Funds.e. Multip<strong>le</strong> reporting and supervisory channels.f Inter-relations between staff.g. Interoperability between various components.h. Civil Military Coordination80


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresCONCLUSIONIt is c<strong>le</strong>ar from the discussion so far that the multinational humanitarian operationschal<strong>le</strong>nges identified have implications for policy and this need to beaddressed strategically. If we are to change the behaviour of participants ina conflict in order to reduce the <strong>le</strong>vel of vio<strong>le</strong>nce and return their society tonormalcy and marginal-<strong>le</strong>vel self-sufficiency, we must use every <strong>le</strong>vel of influenceavailab<strong>le</strong> to policy makers to encourage more responsib<strong>le</strong> behaviour.Absent of a coherent strategy, the contestants will manipulate the outside stakeholdersworking in the crisis, playing one off against another, to achievetheir political and military objectives.Accordingly, a unified strategy must be designed and imp<strong>le</strong>mented in a coherentmanner. The security defence and security forces and all stakeholders ineach country must cover such important issues like capacity building, provisionof adequate facilities, joint training exercises, and professionalization.Thoughtfully conceived and creatively managed, international personnel –military and humanitarian alike, can represent a bridge across the divides ofethnic groups and ideology, race and religion, and class. To achieve their fullpotential, however, military assets, no <strong>le</strong>ss than humanitarian resources themselves,need to serve effective strategies not only of relief and rehabilitation,but also of conflict preventions and conflict resolution development and peace.The ECOWAS centres of excel<strong>le</strong>nce: National Defence Col<strong>le</strong>ge (NDC), Abuja-Nigeria, Kofi Annan International Peacekeeping Training Centre (KAIPTC),Accra-Ghana and Eco<strong>le</strong> Maintien de la Paix Alion Bondin Beye (EMPABB),Dakar-Mali are significant institutions that could bring about the desired standardand <strong>le</strong>vel field playing in multinational and humanitarian operations.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDue to the different organisational structures or culture, the degree to whichcoordination can be applied in any PSO or disaster management will vary.Cooperation and coordination with actors from different organisations needsto be hand<strong>le</strong>d in a f<strong>le</strong>xib<strong>le</strong> manner. The processes of coordination need to beopen-minded and f<strong>le</strong>xib<strong>le</strong> in order to provide incentives for effective collaborationthroughout an operation. There are four main types of inter-organisationalinteraction – coherence; coordination and cooperation, collaboration;and coexistence – all of which might be applicab<strong>le</strong> in conflict or disaster area.Finally, the following are steps or actions if taken would encourage synergy ofeffort and ensure success in multinational humanitarian operations :a. Doctrine - C<strong>le</strong>arly spelt ro<strong>le</strong>s and capabilities of each component.b. Planning – Integrated mission planning process.c. Security – Uniform security standard training.d. Training – Provision of adequate training for capacity and capabilityand integrated traininge. Operations – Joint operating centres, crisis management teams,joint mission analysis centre.f. Logistics – Sustain support of forces and integrated support services,joint logistics centre, joint movement coordination cell.HASSAN LAI,is a Brigadier General from the NigerianArmy. He was Director of Staff at the NationalDefence Col<strong>le</strong>ge, Nigeria, before hissecondment to ECOWAS Commission asthe Chief of Staff, ECOWAS StandbyForce. He has attended various coursesboth in Nigeria and in overseas. They includejunior and senior staff course at theArmed Forces Command and Staff Col<strong>le</strong>ge(AFCSC), Jaji Nigeria. He is a graduateof Airborne and Infantry OfficersAdvanced Course at School of Infantry,Fort Benning, Georgia USA and an alumniof National Defence Col<strong>le</strong>ge, Islamabad,Pakistan. Brig Gen Lai holds a masters degreein Defence and Strategic Studies. Heis the author of many publications includingthe “Infantryman in the Regiment”, “Ref<strong>le</strong>ctionof a Soldier” and “A Si<strong>le</strong>nt Voice inthe Land”.81


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine2.8 Intervention du Général de brigade Olivier PAULUS, Commandantdes Forces Françaises du Cap Vert, FranceRésumé : The intervention of General Olivier PAULUS treats the cooperation andimportant ro<strong>le</strong> of the French armed forces in the development of a prosperouscivil-military relationship in the former French colonies of Western Africa. He linesout that especially the cooperation in Senegal and with Senega<strong>le</strong>se armed forcesis a living illustration for this engagement. Four converging factors are being statedas main pillars of the structural and operational cooperation: historical, human,technical and political factors. The historical factor is mainly related to the creationof the Senega<strong>le</strong>se army in 1960 by soldiers issued directly from the Frencharmy. The human factor mainly consists of the existing fraternity between theFrench and the Senega<strong>le</strong>se army. This fraternity has already been sea<strong>le</strong>d on thebatt<strong>le</strong>fields of the two World Wars, in Vietnam and Cambodia as well as in Algeria.The technical factor is based on the quality of conception and of execution ofthe cooperation in security and defence matters as well as in equipement. And finally,the political factor consists of the numerous agreements signed by theheads of state in Senegal and in France by their respective governments.La Place et <strong>le</strong> Rô<strong>le</strong> de la Coopération Militaire dans<strong>le</strong> Concept de Sécurité HumaineMessieurs <strong>le</strong>s officiers généraux, officiers, sous-officiers, gradés et militairesMesdames, messieursEn poste depuis maintenant 27 mois à Dakar comme général commandant <strong>le</strong>sforces françaises stationnées au Sénégal au titre des accords en matière decoopération et de défense signés en 1974 entre la France et <strong>le</strong> Sénégal,accords actuel<strong>le</strong>ment en renégociation, je compte parmi <strong>le</strong>s différentesmissions qui mʼont été assignées, cel<strong>le</strong> de mettre en œuvre une coopérationmilitaire opérationnel<strong>le</strong>. Ce mot opérationnel<strong>le</strong> a un sens particulier sur<strong>le</strong>quel je reviendrai, en partenariat avec <strong>le</strong>s forces armées sénégalaises.Invité à participer à ce congrès international dédié aux forces de défense etde sécurité sous <strong>le</strong> prisme de la sécurité humaine, je me suis interrogé sur laplace et <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de la coopération militaire dans ce processus.En dʼautres termes ou reformulé, il sʼagirait alors de répondre à la question« de lʼutilité de la coopération militaire entre deux forces armées de pays amis<strong>pour</strong> contribuer à un meil<strong>le</strong>ur dialogue entre FDS et société civi<strong>le</strong> et au renforcementde la sécurité humaine ».Souhaitant y répondre, je suis passé du statut de participant à celui dʼintervenanten mʼappuyant sur mon expérience actuel<strong>le</strong> de commandant de forcece qui me fait lʼhonneur et <strong>le</strong> plaisir dʼêtre ici avec vous ce matin.Insigne du 23 ième bataillon dʼinfanterie demarine stationné à Dakar (Sénégal) commeélément des Forces Françaises du Cap VertJe me propose donc en trente minutes de faire lʼillustration de cette contributionde la coopération militaire opérationnel<strong>le</strong> franco-sénégalaise à un meil<strong>le</strong>urdialogue entre FDS et société civi<strong>le</strong> et au renforcement de la sécurité humaineau travers de lʼanalyse de quatre facteurs que sont <strong>le</strong>s facteurs historique, humain,technique et politique.Avant dʼaborder ces différents facteurs, il me faut vous préciser <strong>le</strong> terme decoopération militaire opérationnel<strong>le</strong>.82


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresEn effet dans <strong>le</strong> système français, la coopération militaire se partage :+ en une composante dite structurel<strong>le</strong> conduite par des militaires français,dits coopérants militaires techniques, portant la tenue militaire du payshôte, en lʼoccurrence ici la tenue sénégalaise et œuvrant directement ausein et dans <strong>le</strong>s emprises des forces armées de ce pays, donc <strong>pour</strong>nous du Sénégal ;Ils forment la mission de coopération de sécurité et de défense inséréeau sein de lʼambassade de France, donc re<strong>le</strong>vant du ministère desaffaires étrangères et européenne. Sa vocation est la formation et <strong>le</strong>conseil ;+ et dʼune autre composante dite opérationnel<strong>le</strong> conduite par des militairesfrançais en uniforme français appartenant à une force et œuvrantau côté des forces armées du pays hôte, soit <strong>le</strong> Sénégal <strong>pour</strong> ce quime concerne.Leur vocation est lʼinstruction et lʼentraînement. La force que je commanderelève de cette coopération militaire opérationnel<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCes deux dimensions sont complémentaires. Leur addition est <strong>le</strong>ur forceet la coordination se fait tout naturel<strong>le</strong>ment entre <strong>le</strong> chef de mission desécurité et de défense et <strong>le</strong> général commandant la force.Cette coopération militaire opérationnel<strong>le</strong> des forces françaises stationnées auSénégal avec <strong>le</strong>s forces armées sénégalaises sʼexercent selon trois axes :- <strong>le</strong>s DIO ;- <strong>le</strong>s grandes manœuvres annuel<strong>le</strong>s ;- et la coopération déconcentrée.Après ces quelques explications indispensab<strong>le</strong>s à une bonne compréhensionde ce quʼest la coopération militaire opérationnel<strong>le</strong>, label France, revenonsaux facteurs évoqués précédemment.Tout d’abord <strong>le</strong> facteur historiqueIl résulte de la création de la toute jeune armée sénégalaise dès <strong>le</strong> <strong>le</strong>ndemainde lʼindépendance du Sénégal <strong>le</strong> 4 avril 1960. Lʼarmée française passe <strong>le</strong>flambeau à lʼarmée sénégalaise. LʼEtat sénégalais souhaite <strong>le</strong> maintien dʼuneprésence militaire française. Une coopération militaire est mise sur pied quicompte en 1962 plus de mil<strong>le</strong> cadres.Au même moment, <strong>le</strong> premier plan dʼarmement de lʼarmée sénégalaise estarrêté à 2500 militaires dont une importante partie est issue de lʼarmée française.Concernant <strong>le</strong>s cadres et notamment <strong>le</strong>s officiers, il faut mentionner <strong>le</strong> rô<strong>le</strong>joué par lʼéco<strong>le</strong> de formation des officiers ressortissants des territoires dʼoutre-mer(EFORTOM) qui, de 1958 à 1965, formera huit promotions dʼofficiersafricains totalisant 293 lieutenants dont 57 sénégalais.Ainsi dʼentrée de jeu, il y a partage de culture, de langue, de formation etdʼexpérience entre soldats et cadres sénégalais et français, autant dʼéléments quifacilitent lʼacquisition et <strong>le</strong> transfert du savoir-faire et du savoir-être, contributeursdirects à une formation de militaires sénégalais p<strong>le</strong>inement citoyen et républi -cain à lʼimage de <strong>le</strong>urs frères dʼarmes français.83


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineCette osmose, fruit dʼune histoire partagée et promue par la coopération militairefranco-sénégalais, qui depuis 1960 perdure et sʼadapte, explique dèslors <strong>pour</strong>quoi <strong>le</strong>s forces armées sénégalaises ont acquis et mis en pratiquetout autant <strong>le</strong> dialogue FDS-société civi<strong>le</strong> que lʼappropriation de ce nouveauconcept de sécurité humaine.En dʼautres termes, cette coopération militaire opérationnel<strong>le</strong> franco-sénégalaise,qui compte aujourdʼhui cinquante années de partenariat, est bien contributricede ce dialogue civilo-militaire et de prise en compte de la sécuritéhumaine.Regardons maintenant <strong>le</strong> facteur humainIl sʼinscrit dans une fraternité dʼarmes et un compagnonnage réels, séculaireset profonds qui existe entre soldats français et sénégalais. Ce nʼest pas uneclause de sty<strong>le</strong>. Cʼest un fait.Cette fraternité dʼarmes construite pas à pas dans <strong>le</strong>s conquêtes colonia<strong>le</strong>s,puis dans <strong>le</strong> développement des colonies, a trouvé son scel<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>schamps de batail<strong>le</strong> des deux guerres mondia<strong>le</strong>s et des conflits indochinois etalgériens.El<strong>le</strong> perdure depuis lʼindépendance à la fois :- dans <strong>le</strong> cadre des engagements de contingents français et sénégalais côteà côte dans <strong>le</strong>s opérations de maintien de la paix ou de gestion de crise, citonstout simp<strong>le</strong>ment la présence de ces contingents français et sénégalaisau Liban sud au titre de la FINUL et en Côte dʼIvoire sous mandat delʼONUCI et avec la force Licorne ;- mais aussi dans <strong>le</strong> cadre de cette coopération militaire franco-sénégalaisequi nʼa jamais cessé de se faire depuis 1960 et qui, aujourdʼhui, est toujoursactive avec une mission de coopération de sécurité et de défense forte de21 officiers et sous-officiers et avec une force, <strong>le</strong>s FFCV stationnées au Sénégal,armées par 1200 militaires.Ce bilan est reconnu de part et d’autreCette fraternité dʼarmes, dont <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> <strong>le</strong> plus fort est la geste des tirail<strong>le</strong>urssénégalais, a été reconnue et magnifiée par SEM Maître Abdoulaye Wade,chef de lʼEtat sénégalais lui-même lorsquʼil décida en 2005 dʼériger une journéenationa<strong>le</strong> consacrée au tirail<strong>le</strong>ur sénégalais. El<strong>le</strong> sera fêtée <strong>pour</strong> cetteannées 2010, <strong>le</strong> 4 décembre.Ce facteur humain, partage fraternel entre soldats, compagnon dʼarmes depuisdeux sièc<strong>le</strong>s, est rendu vivant par cette coopération militaire opérationnel<strong>le</strong>franco-sénégalaise. Lʼimpact sur la capacité des FAS à dialoguer avec<strong>le</strong>s acteurs civils, tout comme sur la prise en compte du concept de sécuritéhumaine, est patent.3 ème facteur, <strong>le</strong> facteur techniquePar facteur technique, il faut entendre <strong>le</strong>s qualités de conception et dʼexécutionde cette coopération militaire franco-sénégalaise qui ont permis, par undialogue partagé, récurrent et amical, de sʼadapter sans cesse aux évolutionset aux demandes des FAS à travers la construction de projets élaborés ensemb<strong>le</strong>et répondant aux enjeux de sécurité dʼaujourdʼhui comme celui de lamontée en puissance de lʼarchitecture africaine de paix et de sécurité vouludepuis <strong>le</strong> début des années 2000 par lʼUnion africaine.Pour la coopération militaire structurel<strong>le</strong>, ce sont des projets régis par desconventions bilatéra<strong>le</strong>s au profit des trois années, du service de santé militaire84


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièreset de la gendarmerie nationa<strong>le</strong> sénégalaise et fondés principa<strong>le</strong>ment sur laformation (ce sont <strong>le</strong>s deux ENVR, que sont lʼEAI de Thiès et <strong>le</strong> cours dʼapplicationdes officiers de gendarmerie de Ouakam ou encore lʼattribution destages et de bourses <strong>pour</strong> des cursus dans <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s centres de formationmilitaire français), sur <strong>le</strong> conseil de haut niveau au sein des états-majorsdécisionnels et la modernisation des équipements.Pour la coopération militaire opérationnel<strong>le</strong>, ce sont <strong>le</strong>s trois axes évoqués endébut dʼexposé avec tout récemment, à titre dʼexemp<strong>le</strong>, une instruction spécifiquedédiée aux opérations amphibies <strong>pour</strong> préparer <strong>le</strong> grand exercice multinationalEmerald Move 2010 qui vient de démarrer ici au Sénégal à Dakarla semaine dernière.De fait, cette volonté conjointe dʼadapter en permanence la mise en œuvre decette coopération militaire franco-sénégalaise fait de cette coopération un outilperformant et efficient qui contribue là-encore à une très bonne appropriationpar <strong>le</strong>s FAS du dialogue avec la société civi<strong>le</strong> et du concept de sécurité humaine.Attachons-nous maintenant au dernier facteur, peut-être <strong>le</strong> plus important,<strong>le</strong> facteur politique, car il est celui qui ordonne et valide la coopérationmilitaire franco-sénégalaiseForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREn effet, cette coopération militaire résulte du choix et de la décision des deuxchefs dʼEtat, traduits in fine par la signature dʼaccords de coopération militaire.Cʼest bien ce cadre politique qui a autorisé et autorise toujours <strong>le</strong>s deux forcesarmées à œuvrer ensemb<strong>le</strong> de façon significative. Nous <strong>le</strong> vivons actuel<strong>le</strong>mentavec <strong>le</strong> renégociation voulus par la France et <strong>le</strong> Sénégal des accords dedéfense de 1974.Sur ce dossier, ce sont bien <strong>le</strong>s deux présidents qui fixent lʼobjectif politiqueet <strong>le</strong>s effets finaux à atteindre.Les accords sont en bonne voieAinsi, la coopération militaire franco-sénégalaise va connaître une évolutionmajeure avec une volonté partagée dʼavoir un outil rénové et adapté à la nouvel<strong>le</strong>donne sécuritaire dʼaujourdʼhui.A lʼété 2011, la force dʼaujourdʼhui sera dissoute. El<strong>le</strong> laissera la place à un nouveaudispositif tota<strong>le</strong>ment dévolu à cette coopération militaire opérationnel<strong>le</strong>.Le facteur politique, qui conduit cette transformation, est bien un élément c<strong>le</strong>fde la <strong>pour</strong>suite de cette coopération militaire franco-sénégalaise qui a fait sespreuves et qui, par sa particularité historique et humaine est, dʼévidence, unparamètre pertinent et performant <strong>pour</strong> chaque acteur dans la recherche dʼundialogue FDS-Société civi<strong>le</strong> toujours plus dʼactualité et toujours plus attendueet dʼune meil<strong>le</strong>ure prise en compte du nouveau concept de sécurité humaine.Pour conclure, et au regard des facteurs mis en avant, je vous transmets maconviction que la coopération militaire franco-sénégalaise exemplaire, et pouvantservir dʼexemp<strong>le</strong>, est réel<strong>le</strong>ment contributrice, sur la base dʼune culture,dʼune expérience et de savoir-faire partagés, à un meil<strong>le</strong>ur dialogue entre forcesarmées et société civi<strong>le</strong> et à lʼappropriation du concept de sécurité humaine.Merci de votre attention.Olivier PAULUSest Général de brigade de lʼArmée de TerreFrançaise, Commandant <strong>le</strong>s Forces Françaisesdu Cap Vert. Issu de lʼEco<strong>le</strong> spécia<strong>le</strong>militaire de Saint-Cyr 1978-1980 (pro mo tionGénéral Rol<strong>le</strong>t). Officier dʼinfanterie demarine, il a principa<strong>le</strong>ment servi dans la 9 eDivision dʼinfanterie de marine et la 9 e Brigadelégère blindée de marine, avec <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>sil a participé à plusieurs opérationsextérieures.Avant de prendre <strong>le</strong> commandement desForces françaises du Cap-Vert, il occupait<strong>le</strong>s fonctions de chef dʼétat-major à laDirec tion du renseignement militaire.85


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSÉANCE PLÉNIÈRE N° IIIMardi 9 novembre 2010 - Après-midiThème de la séance : la réforme du secteur de sécuritéPANEL 5 « APPROCHE GLOBALE DE LA SÉCURITÉ HUMAINE »2.9 Intervention du Général (e.r.) Henry MEDINA URIBE, ColombieRésumé : Colombian Army General (ret.) Henry MEDINA URIBE's interventionhas the tit<strong>le</strong> „From a military combat towards an „integral action“: Colombia's visionto put an end to armed conflicts“. General MEDINA URIBE presents the fundamentalchanges of the ro<strong>le</strong> of the Colombian army in the society which havetaken place in the last few years. After a very vio<strong>le</strong>nt second half of the 20th century,in order to bring back a substantial peace process to the country, the Colombiangovernment has recently comp<strong>le</strong>tely rebuilt its security and defencepolicy. This <strong>le</strong>ad to a significant reduction of reversive acts throughout the who<strong>le</strong>country. The main sources causing vio<strong>le</strong>nces in Colombia are corruption, impunity,concentrated possession of estate and abusive cultivation of soils as well asunemployment and poverty. All these sources have created various different fieldsof vio<strong>le</strong>ntly acting groups throughout the country: drug traffickers, subversive <strong>le</strong>ftwingmovements, delinquent right-wing alliances, known as auto defence or paramilitarygroups, and also transnational criminal cells. Due to the desperatesituation of the country in the end of the 20th century, Colombia has started anew way, the so-cal<strong>le</strong>d intergral action to reduce the influence of terrorist and criminalgroups. This means that nowadays, several pointed and concerted political,economical, social and military measures were taken in order to demoralise terroristmovements and to strengthen the basic structures of the state.To regain enduring peace, Colombia has to get from the vicious circ<strong>le</strong> to the virtuouscirc<strong>le</strong>, that is to say from insecurity and insurrection to security and prosperity.General MEDINA URIBE names five main axes on which the civil societyin Colombia needs to be reformed: forethought and prevention, control and protectionby the police, an efficient justice, helping victims and vulnerab<strong>le</strong> populations,and living together in peace.D’un combat militaire vers une « action intégra<strong>le</strong> » : la visionde la Colombie <strong>pour</strong> mettre un terme au conflit arméeIntroductionASOCACI est l'association des anciensauditeurs de lʼEco<strong>le</strong> Supérieure de Guerreet de lʼInstitut des Hautes Etudes sur la DéfenseNationa<strong>le</strong> de Colombie. Créée en1974 el<strong>le</strong> a <strong>pour</strong> but de contribuer à la définitiondes concepts nationaux sur <strong>le</strong> rô<strong>le</strong>et la place des forces de défense et desécurité colombiennes. ASOCACI agitaussi comme un centre de recherche et deréf<strong>le</strong>xion au profit de lʼenseignementsupérieur et <strong>pour</strong> la promotion des principesde lʼéthique militaire.La Colombie est un pays secoué depuis près dʼun demi-sièc<strong>le</strong> par différentesformes de vio<strong>le</strong>nce. Pour parvenir à la paix, <strong>le</strong>s gouvernements de cette périodeont tenté plusieurs méthodes, allant du dialogue avec participation de la communautéinternationa<strong>le</strong> à lʼaction répressive, engagée et tota<strong>le</strong> des forces militaireset de la police nationa<strong>le</strong>. Malgré tous ces efforts et stratégies, la paix necesse de se dérober.Lʼorigine de cette dernière phase de vio<strong>le</strong>nce, née dans <strong>le</strong>s années 60 du sièc<strong>le</strong>dernier, se trouve dans <strong>le</strong>s mouvements paysans qui estimaient que <strong>le</strong>urs droitsétaient violés et furent incités à la lutte armée par <strong>le</strong>s idées socialistes et <strong>le</strong>parrainage des régimes communistes. On a pensé que la dissolution de lʼUnionsoviétique, <strong>le</strong>s effets de la glasnost et la chute du mur de Berlin apporteraient lasolution à ce conflit. Cependant, lʼapparition du narcotrafic, venant aggraver etfinancer <strong>le</strong> conflit et attiser des situations nocives dʼordre sociopolitique, en adécidé autrement.86


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresAu cours des dernières années, <strong>le</strong> gouvernement a mis en œuvre sa politiquede Sécurité Démocratique, caractérisée par une autorité accrue de lʼexécutif, unrenforcement des forces militaires et un contrô<strong>le</strong> redoublé du territoire national.Cette politique a été positive dans la mesure où el<strong>le</strong> a réduit <strong>le</strong>s mouvementssubversifs à un tiers de ce quʼils étaient, annulé toute possibilité que ceux-ciarrivent au pouvoir par des moyens vio<strong>le</strong>nts dans <strong>le</strong> moyen terme et mis auxarrêts <strong>le</strong>s <strong>le</strong>aders principaux des groupes paramilitaires. Cela nʼa pas <strong>pour</strong> autantconduit à une pacification tota<strong>le</strong> du pays.Avec <strong>le</strong> nouveau gouvernement en place depuis août 2010 arrive une nouvel<strong>le</strong>vision du conflit armé, de ses causes et des stratégies <strong>pour</strong> <strong>le</strong> surmonter. Lesnouvel<strong>le</strong>s politiques sont accompagnées dʼune mise en pratique des recommandationsque <strong>le</strong>s Forces armées de Colombie présentent depuis quelque dixannées sous lʼappellation « Action intégra<strong>le</strong> ». Cette dernière consiste à menerde front une action écrasante par lʼappareil militaire <strong>pour</strong> combattre et vaincre <strong>le</strong>sorganisations criminel<strong>le</strong>s, et une action coordonnée de lʼÉtat dans <strong>le</strong>s champséconomique, politique et social <strong>pour</strong> réduire <strong>le</strong>s facteurs qui génèrent la vio<strong>le</strong>nceet réaliser de meil<strong>le</strong>urs niveaux dʼéquité, de gouvernance, de démocratie, dejustice, de qualité de vie et de développement durab<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR« Action intégra<strong>le</strong> » place <strong>le</strong> conflit dans un contexte plus large que celuistrictement militaire et cherche des solutions justes et durab<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>temps. Sa mise en œuvre engage et coordonne toutes <strong>le</strong>s institutions et organismesdʼÉtat <strong>pour</strong> peser positivement dans <strong>le</strong>s champs politique, économique,social et militaire et neutraliser réel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s différents types de menaces contrela société.Le texte que je soumets <strong>pour</strong> votre considération esquisse, depuis ma perspective,<strong>le</strong>s grandes lignes de la politique de sécurité de mon pays au cours de ladernière décennie, dans lʼespoir quʼel<strong>le</strong>s constitueront un point de vue uti<strong>le</strong> <strong>pour</strong><strong>le</strong>s militaires de lʼAfrique occidenta<strong>le</strong> et de manière généra<strong>le</strong>, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s militairesdes Forces de sécurité et de défense du Sénégal et <strong>le</strong>s participants de cet importantcolloque international.1 - UNE NOUVELLE VISIONOn peut situer <strong>le</strong> cas colombien dans <strong>le</strong> cadre de ce que <strong>le</strong> Colonel Lind appel<strong>le</strong><strong>le</strong>s « guerres de quatrième génération » 53 . Dans ce contexte, <strong>le</strong>s buts de laguerre ne sont pas ceux du passé ; <strong>le</strong>s objectifs sont immatériels et visent à gagnerlʼopinion et la volonté des populations des territoires où se dérou<strong>le</strong> un conflit.Dans ce scénario, la gestion du conflit armé quitte lʼéminemment militaire et denouvel<strong>le</strong>s menaces ajoutent une grande comp<strong>le</strong>xité à son traitement et solution.Pour cette raison, <strong>le</strong>s indicateurs de victoire ne se limitent pas à la conquête dʼunterritoire, au nombre de morts et de b<strong>le</strong>ssés chez <strong>le</strong>s ennemis comparé à celuioccasionné par lʼennemi ou à la capacité de dommages ; ils comprennentéga<strong>le</strong>ment la légitimité acquise par <strong>le</strong>s actions militaires au quotidien. Dans cecontexte, <strong>le</strong>s aspects sociaux et économiques constituent un élément trèssensib<strong>le</strong> parmi <strong>le</strong>s facteurs et <strong>le</strong>s agents générateurs de vio<strong>le</strong>nce en Colombie.Parmi <strong>le</strong>s facteurs qui génèrent de la vio<strong>le</strong>nce nous avons la corruption,lʼimpunité, la concentration foncière et <strong>le</strong> mauvais usage des terres, et <strong>le</strong>s tauxde chômage et indices de pauvreté importants. Parmi <strong>le</strong>s agents qui reproduisentune ambiance de vio<strong>le</strong>nce nous avons <strong>le</strong> trafic de stupéfiants, <strong>le</strong>smouvements subversifs de gauche, <strong>le</strong>s groupes délinquants de lʼextrême droiteconnus dʼautodéfense ou paramilitaires, la délinquance ordinaire et <strong>le</strong>s effets ducrime transnational. Tout cela constitue un amalgame dʼeffets pervers dans la vienorma<strong>le</strong> de la société, et <strong>pour</strong> <strong>le</strong> traiter, <strong>le</strong>s mesures strictement militaires ne sontpas suffisantes.53William S. Lind, Colonel Keith Nightenga<strong>le</strong> (USA),Captain John F. Schmitt (USMC), Colonel JosephW. Sutton (USA), Lieutenant Colonel Gary I.Wilson (USMCR) (October 1989). "The ChangingFace of War: Into the Fourth Generation".Marine Corps Gazette.87


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineCet objectif représente un grand défi <strong>pour</strong> <strong>le</strong> gouvernement. La premièreétape est de réussir à faire approuver des lois qui conduisent à modifier lastructure de la propriété foncière, rendre à ses propriétaires légitimes <strong>le</strong>sterres usurpées par la vio<strong>le</strong>nce, modifier <strong>le</strong> régime juridique, acquérir de meil<strong>le</strong>ursinstruments <strong>pour</strong> lutter contre la corruption, réparer <strong>le</strong>s dommages auxvictimes provoqués par un demi sièc<strong>le</strong> de vio<strong>le</strong>nce, redistribuer <strong>le</strong>s bénéficesproduits par la vente des ressources naturel<strong>le</strong>s et améliorer <strong>le</strong>s systèmes desanté et dʼéducation.Une fois établies <strong>le</strong>s normes qui permettront une action coordonnée, systémiqueet synergique des différentes entités étatiques, lʼaction des forces militairessera plus efficace et la paix sera viab<strong>le</strong>. Voilà <strong>le</strong> cœur de lʼActionintégra<strong>le</strong> sur laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s Forces militaires sont engagées, à savoir que <strong>le</strong> théâtredʼopérations est <strong>le</strong> « terrain humain » et non géographique, où <strong>le</strong> p<strong>le</strong>in respectde la population civi<strong>le</strong> est <strong>le</strong> facteur déterminant de la victoire 54 . Partagercette nouvel<strong>le</strong> vision, <strong>pour</strong> tous <strong>le</strong>s membres des Forces militaires et de laPolice nationa<strong>le</strong> de la Colombie est un effort sans fin impliquant de nouvel<strong>le</strong>sattitudes qui engagent toutes <strong>le</strong>urs capacités, depuis <strong>le</strong> renforcement des directivespédagogiques et culturel<strong>le</strong>s jusquʼà la révision des aspects doctrinaux,opérationnels et tactiques.2 - CHAMPS OPÉRATOIRES DE L’ACTION INTÉGRALELʼobjectif de lʼAction intégra<strong>le</strong> est de « réussir la fusion effective des forces etdes efforts de tous <strong>le</strong>s secteurs publics et privés <strong>pour</strong> obtenir <strong>le</strong> soutien et lʼintégrationdes stratégies tendant a éliminer la volonté de lutte et la capacité dedommages des narcoterroristes, <strong>le</strong>s démoraliser et <strong>le</strong>s obliger à se soumettreaux autorités légitimes ou aux processus que lʼÉtat <strong>le</strong>ur proposera, tout celatraduit en meil<strong>le</strong>ures conditions <strong>pour</strong> <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> colombien et <strong>le</strong>s institutions ».Lʼexécution effective de lʼAction intégra<strong>le</strong> permettra <strong>le</strong> « développement et lacoordination permanente et simultanée des actions politiques, économiques,socia<strong>le</strong>s et militaires visant à renforcer <strong>le</strong>s structures fondamenta<strong>le</strong>s de lʼÉtatet à garantir la défense et la protection des droits et libertés de la société,<strong>pour</strong> que <strong>le</strong>s habitants de la Colombie, pouvant pratiquer <strong>le</strong>ur liberté dans lalimite de <strong>le</strong>urs droits et devoirs constitutionnels, puissent jouir p<strong>le</strong>inementdʼune paix digne, juste et durab<strong>le</strong> qui <strong>le</strong>ur permette de se développer et desʼépanouir en tant quʼêtres humains ».Tel<strong>le</strong> quʼel<strong>le</strong> est conçue, lʼAction intégra<strong>le</strong> se constitue sur <strong>le</strong> pont qui relie <strong>le</strong>contrô<strong>le</strong> du territoire, principa<strong>le</strong>ment sous responsabilité militaire, et la consolidationde lʼÉtat, tâche éminemment civi<strong>le</strong> aux mains du pouvoir politique.El<strong>le</strong> se développe sur trois Champs opérationnels.L’Action intégra<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> est un instrument des Forces militaires en soutienà ses opérations militaires. El<strong>le</strong> contribue au renforcement de sa légitimitéen renforçant son image et en aidant à casser la volonté de lutte des groupesarmés illégaux. Pour la réussite de lʼAction intégra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s commandants auxdifférents niveaux de la hiérarchie militaire et dans <strong>le</strong>s zones géographiquessous <strong>le</strong>ur juridiction devront être des <strong>le</strong>aders intégraux jouant un rô<strong>le</strong> dʼorientationau sein de la communauté quʼils servent.LʼAction intégra<strong>le</strong> coordonnée conjugue <strong>le</strong>s affaires civi<strong>le</strong>s, la coopération -civils-militaires, <strong>le</strong>s affaires gouvernementa<strong>le</strong>s et <strong>le</strong> soutien à la population laplus vulnérab<strong>le</strong>.54Instrucciones genera<strong>le</strong>s sobre la Doctrina de laAcción Integral. FUERZAS MILITARES DECOLOMBIA. Comando General.2009LʼAction intégra<strong>le</strong> résolutive réalise la coordination permanente et simultanéedes actions politiques, socia<strong>le</strong>s, économiques et militaires en consolidant saprésence dans <strong>le</strong>s zones sensib<strong>le</strong>s de la topographie nationa<strong>le</strong>.88


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresEnsemb<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s trois champs dʼaction contribuent à la protection des droits etlibertés de la société, à la p<strong>le</strong>ine jouissance dʼune paix digne, juste et durab<strong>le</strong>et au développement équitab<strong>le</strong> et durab<strong>le</strong>.3 - LES PROBLÈMES : LEURS CAUSES ET LEURS EFFETSLes dernières décennies du sièc<strong>le</strong> passé se caractérisent par un processusgrandissant dʼinsécurité qui a déchaîné une série de situations indésirab<strong>le</strong>s etfreiné <strong>le</strong> développement et lʼamélioration de la qualité de vie de ses habitants.Aujourdʼhui <strong>le</strong> pays voit de manière plus rationnel<strong>le</strong> ses propres réalités etcel<strong>le</strong>s de son environnement, ce qui permet de construire une meil<strong>le</strong>ure visionde son avenir.LʼAction intégra<strong>le</strong> implique, dans son application, lʼanalyse des causes quigénèrent <strong>le</strong>s conflits, des effets de ces derniers et des actions nécessaires<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s corriger. Pour cela, un bon instrument est la Méthode du CadreLogique. Le tab<strong>le</strong>au ci-dessous résume <strong>le</strong> travail que nous avons réalisé avecla participation conjointe de plusieurs instances du gouvernement national,où lʼaccent est mis sur <strong>le</strong>s aspects qui concernent la sécurité.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLa synthèse de ce travail est montrée dans <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au qui suit :Une analyse attentive de tous ces aspects permit <strong>le</strong> diagnostic général denotre situation et la perception des changements profonds que <strong>le</strong> pays doitréaliser sous la direction des plus hautes sphères du gouvernement. Demême, el<strong>le</strong> permit de clarifier que lʼaction des Forces militaires est indispensab<strong>le</strong>mais insuffisante <strong>pour</strong> résoudre de manière pérenne <strong>le</strong> conflit armécolombien. La situation que nous nous proposons de corriger nʼayant pas decause militaire, la solution ne peut se trouver exclusivement dans la fonctionrépressive des armes.4 - DU CERCLE VICIEUX AU CERCLE VERTUEUXLe processus dʼanalyse des situations que nous vivons, <strong>le</strong>s facteurs qui <strong>le</strong>sconditionnent et <strong>le</strong>s changements structurels que nous avons à mettre enœuvre <strong>pour</strong> modifier <strong>le</strong>s tendances ont mené <strong>le</strong> Commandement des Forces89


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainearmées et <strong>le</strong> Gouvernement national à poser <strong>le</strong> « cerc<strong>le</strong> vicieux » qui décritnotre réalité synthétiquement et invite à la modifier, comme <strong>le</strong> montre <strong>le</strong>schéma suivant :Le cerc<strong>le</strong> vicieux : Insécurité-InsurrectionLes efforts réalisés depuis dix ans et <strong>le</strong>s projections du gouvernement actuelsont orientés à remplacer <strong>le</strong>s caractéristiques du « cerc<strong>le</strong> vicieux » par cel<strong>le</strong>sdʼun « cerc<strong>le</strong> vertueux » qui permette de nous approcher des objectifs désirab<strong>le</strong>sde sécurité et prospérité démocratique.Le cerc<strong>le</strong> “vertueux” : Sécurité-prospéritéLe gouvernement du président Juan Manuel Santos, qui dirige <strong>le</strong> pays depuis<strong>le</strong> 7 août 2010, a formulé <strong>le</strong>s changements dʼordre juridique nécessaires et <strong>le</strong>sa soumis au Congrès de la République <strong>pour</strong> approbation. Ces changements,dont <strong>le</strong>s grandes lignes sont présentées dans lʼintroduction de ce texte, per-90


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresmettront et favoriseront des modifications profondes dans lʼorganisation delʼÉtat et dans <strong>le</strong>s normes qui gouvernent <strong>le</strong>s relations entre <strong>le</strong>s différents membresde la société colombienne. En combinaison avec ce qui précède et dans<strong>le</strong> cadre de la politique de l'Action intégra<strong>le</strong>, il est proposé de réaliser des actionssur <strong>le</strong> terrain de la sécurité qui renforcent la politique de sécurité démocratiqueavancée avec succès par <strong>le</strong> gouvernement antérieur, élargissent <strong>le</strong>sefforts dans <strong>le</strong> domaine de la sécurité civi<strong>le</strong> et mettent lʼaccent sur des actionsqui modifieraient la culture de permissivité et motiverait une culture deprévoyance, de soin et de solidarité.Ces changements dans la culture citoyenne seront mise en œuvre à partirdes 5 axes suivants :+ Prévoyance et prévention+ Contrô<strong>le</strong> et protection policière+ Justice effective+ Aide aux victimes et aux populations vulnérab<strong>le</strong>s+ Vivre ensemb<strong>le</strong> dans la paixCe qui est pertinent dans cette nouvel<strong>le</strong> stratégie, du point de vue des étatmajorsresponsab<strong>le</strong>s de la sécurité, de la coexistence pacifique et de la défensenationa<strong>le</strong>, est que lʼaccent nʼest pas sur la défense de lʼÉtat sinon surla défense du citoyen, de la personne humaine, qui est <strong>le</strong> cœur et la raisondʼêtre de lʼÉtat.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes propos exprimés dans ce texte sont <strong>le</strong> regard individuel dʼun général dela réserve active de lʼArmée colombienne. Ces opinions nʼengagent aucuneorganisation publique ou privée et ne sont que la vision particulière dʼun processusintéressant, avancé depuis dix ans par un pays qui cherche à mettrefin à un conflit armé interne dont <strong>le</strong>s racines sont anciennes et qui est sous lʼinfluencede lʼenvironnement mondial. Son analyse peut présenter une utilité etun intérêt <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s pays dʼAfrique de lʼOuest ou de toute autre région ayant dessituations similaires.Je saisis cette occasion <strong>pour</strong> féliciter <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> du Sénégal, célébrer avec luiun demi sièc<strong>le</strong> de vie indépendante, et lui souhaiter un avenir dans uncontexte de démocratie, dʼéquité et de développement durab<strong>le</strong>.Henry MEDINA URIBE,est général de division de lʼArmée de terrecolombienne à la retraite. De formationéconomiste, avec des Masters en sciencesdʼentreprise obtenus en Europe et auxEtats-Unis. Parmi ses nombreuses fonctionsde responsabilité au cours de sacarrière militaire, on trouve notamment :Secrétaire dʼEtat à la Défense, Directeurde lʼEco<strong>le</strong> supérieure de guerre colombienne,Chef de la Division plans du Ministèrede la Défense, Attaché de défenseauprès lʼAmbassade de Colombie auCanada, Inspecteur général de lʼArmée deTerre colombienne et Directeur de lʼadministrationde lʼAT, commandant de la briga -de logistique et Commandant du Bataillonde Soutien au combat.91


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine2.10 Intervention de Babacar DIALLO, Directeur du Centre d'EtudesDiplomatiques et Stratégiques, Senegal.Résumé : The communication of Dr. Babcar DIALLO places itself in the overallafrican context of the persistence of poverty, of a very high <strong>le</strong>vel of youth unemployment,of rapid population growth and inadequate social and educational policieswhich, until now, didn t managed to overcome the endemic scourges thathinder development and constitute a permanent threat to human security . Hesuggests a mechanism for very early prevention of potential crises and viru<strong>le</strong>nt socialdetrimental to peace and security including unemployment and id<strong>le</strong>ness ofyoung peop<strong>le</strong> in cities and suburbs are teeming the root cause.With his communication he aims to awake the public and policy makers from theirdogmatic slumber. He wants them to realize the evidence that there is no use togive speeches on reaching the mil<strong>le</strong>nnium goals for development if the youngpeop<strong>le</strong>, potential players to create resources and incarnation of the destinies ofthe African states, are <strong>le</strong>ft to themselves without education. Without qualificationthere will be no way to find work and to escape unemployment and precariousness,what means that there is no road into an income generating activity for <strong>le</strong>avingthe vicious cerc<strong>le</strong> and the distress of poverty.Dr. DIALLO calls for more awareness and practical work, overwhelmingly and ona large sca<strong>le</strong>, against youth unemployment by training, by qualification and bytheir social and professional integration, what objectively would prevent potentialvio<strong>le</strong>nt explosions and social revolts. This would really mean to build sustainab<strong>le</strong>peace by a comprehensive approach to Human Security.RENFORCER LE LIEN NATIONFORCES DE DEFENSE ET DE SÉCURITÉPAR LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF CIVILO-MILITAIREDE MOBILISATION DES JEUNES POUR L’ORIENTATION,LA FORMATION, LA QUALIFICATION ET L’EMPLOICONTEXTE GÉOPOLITIQUELes premières années du sièc<strong>le</strong> qui se sont installées, ont vu sʼamplifier, demanière exponentiel<strong>le</strong> et dans des conditions dramatiques, <strong>le</strong>s flux migratoiresdʼimportants contingents humains du Sud vers <strong>le</strong> Nord.Antenne Régiona<strong>le</strong> de DakarLe Centre dʼEtudes Diplomatiques et Strategiques,seul organisme de formationdoté du statut consultatif auprès des NationsUnies, a mis sur pied ses différentsprogrammes de formation tant en françaisqu'en anglais, dans <strong>le</strong> but de permettre auxdiplomates, aux fonctionnaires internationauxet aux dirigeants de suivre des formationsdiplomantes de troisième cyc<strong>le</strong>compatib<strong>le</strong>s avec <strong>le</strong>s responsabilités qui<strong>le</strong>ur incombent.Les insoutenab<strong>le</strong>s images de fournées humaines sur de frê<strong>le</strong>s embarcationsà lʼassaut de lʼEurope à travers la Méditerranée et lʼAtlantique, ou encorecel<strong>le</strong>s de corps sans vie sur des rivages ou dans <strong>le</strong> désert du Sahara, témoignentdes grandes équations existentiel<strong>le</strong>s que posent <strong>le</strong>s flux migratoirescontemporains qui fuient la misère quʼils vivent en Afrique <strong>pour</strong> al<strong>le</strong>r à la recherchedʼun hypothétique eldorado.Cette situation est dʼautant plus préoccupante que, depuis des décennies, <strong>le</strong>spays Européens ont proclamé la fin de lʼimmigration massive, sʼappliquantdavantage à la contrô<strong>le</strong>r voire la réprimer, surtout quand el<strong>le</strong> est considéréecomme « illéga<strong>le</strong> ».Lʼaccélération et la massification des migrations vers <strong>le</strong> Nord, sʼexpliquent par laconjonction de multip<strong>le</strong>s facteurs dont <strong>le</strong>s plus importants sont : la persistancede la pauvreté, un niveau très é<strong>le</strong>vé du chômage des jeunes, une démographiegalopante et des politiques socia<strong>le</strong>s et éducatives inadaptées qui, jusquʼàprésent, nʼont pas réussi à vaincre <strong>le</strong>s grands fléaux endémiques qui entraventDéveloppement et constituant un danger permanent la sécurité humaine.92


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresOBJECTIF DE LA COMMUNICATIONCʼest dans ce contexte global que sʼinscrit cette communication qui proposeun mécanisme très en amont <strong>pour</strong> la prévention de potentiel<strong>le</strong>s et viru<strong>le</strong>ntescrises socia<strong>le</strong>s attentatoires à la paix et à la sécurité dont <strong>le</strong> chômage et <strong>le</strong>désœuvrement des jeunes dans <strong>le</strong>s grandes vil<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s grouillantes banlieuesseront la cause profonde.Cette communication doit éveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s pouvoir publics et <strong>le</strong>s décideurs de <strong>le</strong>ursommeil dogmatique.Ils doivent se rendre compte à lʼévidence quʼil ne sert à rien de faire des discourssur lʼatteinte des objectifs du millénium <strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement si <strong>le</strong>sjeunes, acteurs potentiels de <strong>le</strong> création des ressources et incarnation delʼavenir des Etats africains sont laissés à eux-mêmes sans formation, sansqualification, donc sans aucun moyen de trouver du travail <strong>pour</strong> échapper auchômage et à la précarité en sʼinsérant dans une activité génératrice derevenues <strong>pour</strong> sortir des arcanes et des affres de la pauvreté.Prendre conscience dʼune tel<strong>le</strong> réalité et œuvrer concrètement, massivementet sur une large échel<strong>le</strong> contre <strong>le</strong> chômage des jeunes par <strong>le</strong>ur formation, <strong>le</strong>urqualification et <strong>le</strong>ur insertion socia<strong>le</strong> et professionnel<strong>le</strong>, cʼest objectivementprévenir de potentiel<strong>le</strong>s explosions et révoltes socia<strong>le</strong>s, cʼest donc construire lapaix de manière permanente par une approche globa<strong>le</strong> de la sécurité humaine.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCONSTATLe chômage et <strong>le</strong> désœuvrement des jeunes constituent <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s paysafricains, la plus grande menace socia<strong>le</strong> de ce début du 21 ème sièc<strong>le</strong>, en ce qu'il est une bombe a retardement et a destruction massive qui peut exploser atout moment et sur nʼimporte quel point du continent.Sans formation, sans qualification et sans emploi, <strong>le</strong>s jeunes, hommes oufemmes sont à la merci de la pauvreté qui constitue <strong>le</strong> terreau <strong>le</strong> plus féconddes crises socia<strong>le</strong>s, <strong>pour</strong> <strong>le</strong> recrutement des futures terroristes, des narcotrafiquantset de lʼémergence de toutes <strong>le</strong>s formes de vio<strong>le</strong>nces, de criminalité,de manipulations politiques de toute sorte.Qui plus est, dans des pays où tout est à construire, où on a besoin de toutes<strong>le</strong>s ressources humaines, cʼest un véritab<strong>le</strong> paradoxe que dʼy observer autantde chômage, de désœuvrements.UN IMPÉRATIFCe doit être un impératif catégorique <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s états africains dans toutes <strong>le</strong>sCommunautés Economiques Régiona<strong>le</strong>s de la sous-région de prendreconscience de lʼamp<strong>le</strong>ur et de lʼimportance du danger qui se profi<strong>le</strong> <strong>pour</strong> renverserradica<strong>le</strong>ment la tendance en mettant en œuvre des alternatives nouvel<strong>le</strong>sdans <strong>le</strong> cadre dʼune stratégie globa<strong>le</strong>, experte et durab<strong>le</strong> de mobilisationdes jeunes <strong>pour</strong> la formation, la qualification et lʼemploi.Si une tel<strong>le</strong> opération était mise en œuvre, par son amp<strong>le</strong>ur, par ses multip<strong>le</strong>seffets Co-latéraux, el<strong>le</strong> impacterait positivement <strong>le</strong> développement économiqueet social de toutes <strong>le</strong>s pays parce que sʼattaquant aux causesstructurel<strong>le</strong>s du chômage, source de la pauvreté en inhibant toutes velléitésde révolte, de soulèvement et de vio<strong>le</strong>nce préjudiciab<strong>le</strong>s à la stabilité socia<strong>le</strong>à la paix et a la sécurité.93


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumainePARTIES PRENANTESCette action de mobilisation passe par la construction dans tous <strong>le</strong>s pays africains,dʼun large partenariat entre :- <strong>le</strong>s Etats et tout particulièrement <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité- <strong>le</strong>s Comités nationaux olympiques et sportifs,- <strong>le</strong>s Associations de jeunes et de femmes,- <strong>le</strong>s organismes de formations et dʼinsertion dont la création sera encouragé- <strong>le</strong>s entreprises, <strong>le</strong> patronat, <strong>le</strong>s syndicats,- <strong>le</strong>s organisations internationa<strong>le</strong>s, notamment <strong>le</strong>s Communautés EconomiquesRégiona<strong>le</strong>s (UEMOA , CEDEAO, CEMAC, SADEC, UMA, IGAD)etc… et <strong>le</strong>s partenaires au développement en particulier <strong>le</strong>s Agences deCoopération <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Développement.CONDITIONS D’ÉLIGIBILITÉLes jeunes qui sont accueillis dans ce dispositif bénéficieront dʼune indemnitéforfaitaire mensuel<strong>le</strong> de stage, à déterminer, et auront <strong>le</strong> statut de stagiairede la Formation professionnel<strong>le</strong>.Ils ne seront plus considérés comme chômeurs et devront, comme des salariés,se rendre tous <strong>le</strong>s jours au Centre de Formation correspondant au(x)métier(s) dans <strong>le</strong>(s)quel(s) ils souhaitent obtenir une qualification et un emploiau terme de lʼaction de mobilisation sur projet professionnel.Seuls <strong>le</strong>s jeunes sans formation et sans qualification qui sont âgés de 18 à 30ans au moins et qui ne sont dans aucun dispositif de formation sont concernéspar ce projet.FINANCEMENT DU DISPOSITIFPour <strong>le</strong> financement de ce projet, Il sera fait appel :− au budget de lʼEtat concerné,− à la solidarité nationa<strong>le</strong>,− à la coopération bilatéra<strong>le</strong>, multilatéra<strong>le</strong> ,− au soutien des organisations internationa<strong>le</strong>s,− et aux autres formes de coopération tel<strong>le</strong> que la coopération décentralisée.En tout état de cause, <strong>le</strong> traitement du chômage des jeunes qui constitue uneréponse à la demande socia<strong>le</strong> et politique hardie de lutte contre la précarité etla prévention de toutes <strong>le</strong>s velléités attentatoires à la sécurité humaine a un coûtcertes mais nʼa pas de prix. Il importe donc que <strong>le</strong> pouvoirs publics des pays africainsen prennent conscience <strong>pour</strong> ne pas fragiliser <strong>le</strong>s Institutions et <strong>le</strong>s basespolitiques <strong>le</strong>ur gouvernance qui est censée conduire <strong>le</strong>s populations en touttemps et en tout lieu vers la satisfaction de <strong>le</strong>urs besoins létaux.IMPORTANCE DU PROJETCʼest un investissement absolument nécessaire dont la finalité ultime, audelàde la réel<strong>le</strong> prise en charge de la sécurité humaine et de la protection despopulations contre toutes <strong>le</strong>s menaces et tous <strong>le</strong>s risques nouveaux, constitueun gage structurel <strong>pour</strong> la préservation de la paix socia<strong>le</strong> et un vecteurorienté <strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement économique et social de nos pays.Contribuer a la mise en œuvre d un tel dispositif de mobilisation, dʼorientation,de formation et dʼ insertion <strong>pour</strong> lʼ emploi des jeunes, cʼ est concrètementœuvrer <strong>pour</strong> la défense de la paix et de la sécurité en Afrique en prévenantnotamment <strong>le</strong> détournement dont notre jeunesse <strong>pour</strong>rait être victime du faitdes agents recruteurs <strong>pour</strong> alimenter la horde des narcotrafiquants et des apprentisterroristes.94


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresMODE OPÉRATOIREDans tous <strong>le</strong>s pays de la sous-région , la guidance de ce dispositif seraitconfiée aux forces de défense et de sécurité, qui <strong>le</strong> mettraient à profit <strong>pour</strong>renforcer <strong>le</strong> lien armée –nation en sʼimpliquant activement , en relation avec<strong>le</strong>s acteurs civils de la formation professionnel<strong>le</strong> et de lʼinsertion socia<strong>le</strong> danscette nouvel<strong>le</strong> dynamique qui donnera de nouvel<strong>le</strong>s raisons dʼespérer à nospopulations.Nous indiquons ci-dessous <strong>le</strong> diagramme du dispositif que nous proposons<strong>pour</strong> la mobilisation des jeunes <strong>pour</strong> la formation la qualification et l emploicontre <strong>le</strong> chômage.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCONCLUSIONIl nʼest pas juste dʼaffirmer quʼen ce qui concerne <strong>le</strong> chômage des jeunes riennʼa été fait. On peut même dire que beaucoup a été fait, mais de manière« isolée et anarchique ordonnées », en dehors de toute planification stratégiqueet opérationnel<strong>le</strong> adossée a une gestion axée sur <strong>le</strong>s résultats et intégrantlʼamp<strong>le</strong>ur du phénomène ainsi que la menace permanente quʼilreprésente <strong>pour</strong> la paix socia<strong>le</strong> et la stabilité des Institutions des pays delʼAfrique de lʼOuest.95


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineIl est devenu urgent que <strong>le</strong>s décideurs des pays africains comprennent quʼilsont <strong>le</strong> devoir de résoudre <strong>le</strong>s problèmes qui se posent à nos sociétés, entreautres, <strong>le</strong> chômage des jeunes dont <strong>le</strong>s solutions multidimensionnel<strong>le</strong>s <strong>pour</strong><strong>le</strong> résoudre, existent.Il importe juste que <strong>le</strong>s Pouvoirs Publics africains comprennent que <strong>le</strong>urdétermination à lutter contre <strong>le</strong> chômage et <strong>le</strong> sous emploi des jeunes est enpartie considérab<strong>le</strong>ment annihilée par lʼinadéquation des structures existanteset surtout par <strong>le</strong> manque de capacité et dʼexpertise des acteurs qui sont chargésde <strong>le</strong>s animer.Mettre en place dans nos pays un véritab<strong>le</strong> dispositif de formation et dʼinsertion<strong>pour</strong> lutter contre <strong>le</strong> chômage des jeunes par la formation et la qualification,<strong>pour</strong> offrir à chacun une qualification, un emploi salarié ou une activitéformel<strong>le</strong> génératrice de revenus, tel est <strong>le</strong> défi qui doit être re<strong>le</strong>vé <strong>pour</strong>permettre à la grande majorité dʼaccéder à un minimum de ressources afindʼéchapper au désoeuvrement, <strong>pour</strong> se mettre à lʼabri de la pauvreté quiconstitue <strong>le</strong> terreau <strong>le</strong> plus fécond des crises socia<strong>le</strong>s, de lʼémergence detoutes <strong>le</strong>s formes de vio<strong>le</strong>nce, de criminalité et de manipulation politiquepoliticienne.Nous sommes à la disposition des décideurs, des Pouvoirs Publics, de tous<strong>le</strong>s Partenaires au développement tant sur <strong>le</strong> plan bilatéral que sur <strong>le</strong> planmultilatéral <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s aider à sʼapproprier du dispositif que nous proposons quidʼaprès notre expérience en la matière constitue un atout stratégique de toutpremier plan <strong>pour</strong> lutter contre <strong>le</strong>s conséquences désastreuses et inhumainesde la précarité socia<strong>le</strong> et <strong>pour</strong> prévenir <strong>le</strong>s potentiel<strong>le</strong>s conflictualités quipeuvent en décou<strong>le</strong>r.Babacar DIALLOoccupe actuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s fonctions de -Directeur Général du Centre dʼEtudes Diplomatiqueset Stratégiques de Dakar,lʼAntenne régiona<strong>le</strong> Afrique du CEDS deParis. Il est par ail<strong>le</strong>urs fondateur delʼEco<strong>le</strong> Panafricaine dʼIntelligence Econo -mique de Dakar dont il assure la Direction.Stratégiste, Polémologue, Enseignant,Formateur et chercheur pluridisciplinaire,expert-consultant international, M. Dialloest titulaire de plusieurs titres universitairesen Histoire, en Science Politique et enScience de Gestion et dʼad mi nistration desEntreprises, en Diplomatie et en Stratégie.96


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2.11 Intervention du Docteur Eustache Akono ATANGANE, Docteur enSécurité Internationa<strong>le</strong> et Défense, Cameroun.“D’une Approche Militaire à une Approche Globa<strong>le</strong>de la Sécurité Humaine”Résumé : Dr. E. Akono ATAGNANE analyses in his contribution the transformationof security from a purely military oriented term towards a more and morehuman oriented concept. Whi<strong>le</strong> during the last three centuries, the different nationalstates had created and maintained their own armies in order to be ab<strong>le</strong> todefend their national territories, this old concept has been slowly transformedsince the 1980's and above all the 1990's. Since then, the concept is more andmore reoriented towards the human being in the focus of the efforts. This is relatedto the recent changes in threat scenarios.Dr. ATAGNANE states that most of the recent conflicts like in Rwanda, Yugoslaviaand Timor were not taking place on an international <strong>le</strong>vel but they were concentratedinside the states and caused mainly civilian victims. Therefore, the newhuman security concept had to respond to new conflict scenarios such as economical,social, humanitarian and ecological matters. The United Nations Programfor development has classified human security into seven specific threat scenarios- economic, alimentary, sanitary, environmental and personal security, thesecurity of communities and political security. Later on, he names and analysesthe basic characteristics of human security: it should be focussed on the individualperson, should be multi-sectorial, holistic, specified to the context and orientedtowards prevention. Dr. ATAGNANE also treats the critics on human security andspecific African initiatives in order to guarantee human security. This last part ofthe intervention is detai<strong>le</strong>d summary of the activities of the African Unity Organisationand today the African Union regarding human security.IntroductionLʼordre international était et reste encore largement centré sur <strong>le</strong>s États considéréscomme <strong>le</strong>s principaux acteurs de la scène internationa<strong>le</strong>. Le concept de sécuritérenvoie dʼabord à la sécurité nationa<strong>le</strong> dʼun État, défini par un territoire biendélimité, une population et par un pouvoir organisé sʼexerçant à lʼintérieur de cetteassiette territoria<strong>le</strong>. Porter atteinte à la sécurité dʼun État revient à menacer sonintégrité territoria<strong>le</strong> ou à déstabiliser <strong>le</strong> pouvoir qui sʼy exerce. A ce concept de sécurité,il faut associer <strong>le</strong>s notions de souveraineté et de non ingérence 55 . La sécuritéou lʼinsécurité sur <strong>le</strong> plan international se définissait et se définit encore enpartie par lʼabsence ou la présence de menaces militaires à la paix mondia<strong>le</strong>.Ainsi, pendant la guerre froide, <strong>le</strong> concept de sécurité étatique ou militaire,<strong>pour</strong> la quasi-totalité de la communauté, correspondait <strong>le</strong> mieux au système,puisquʼil offrait des réponses adaptées aux menaces à la sécurité susceptib<strong>le</strong>sde surgir entre <strong>le</strong>s deux blocs dominants.Depuis la fin de lʼordre bipolaire, et surtout la recrudescence des conflits prémodernes,la sécurité nʼest plus associée exclusivement à la souveraineté,mais aussi au développement humain et à la protection des personnes contretoutes <strong>le</strong>s formes de vio<strong>le</strong>nce. On sʼest rendu compte que <strong>le</strong>s questions sécuritairesne renvoient plus exclusivement à des menaces dʼordre militaire,mais touchent à des causalités relatives à la pauvreté, à lʼenvironnement, àlʼordre politique interne des États, etc.. La sécurité nʼimplique plus seu<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s rapports entre lʼextérieur et lʼintérieur, lʼextérieur étant considéré commeune source potentiel<strong>le</strong> et omniprésente de menaces, mais touche davantageau cadre domestique des États, soit quand <strong>le</strong> mal développement ou la malgouvernance causent des privations importantes chez <strong>le</strong>s populations du pointde vue de lʼaccès aux biens de base, soit quand cʼest lʼÉtat lui-même qui estForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREn tant quʼuniversité de sciences socia<strong>le</strong>s,lʼUY2 sʼest donnée <strong>pour</strong> mission stratégiquedʼêtre une ingénierie des connaissanceset des services. Être un pô<strong>le</strong>dʼélaboration, de modélisation et dʼexpérimentationdes savoirs mis au service de lasociété, produire <strong>le</strong>s agents du changementstructurel de la société, tel est lʼenjeuconstant <strong>pour</strong> notre institution.97


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainesource de violations massives des droits de ses propres citoyens. Raisons<strong>pour</strong> <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s plusieurs théoriciens des études de sécurité ont jugé nécessairede revoir <strong>le</strong> concept de sécurité 56 . Dans ce contexte, <strong>le</strong>s concepts desécurité humaine et de sécurité globa<strong>le</strong>, réussirent au débat de la révisionconceptuel<strong>le</strong> de la sécurité.Lʼanalyse théorique des concepts de sécurité est donc une étape nécessairedans la recherche dʼune situation sécuritaire souhaitée. Il aurait été intéressantde passer en revue <strong>le</strong>s autres concepts de sécurité depuis la fin de la Guerrefroide. Mais, nous avons retenu <strong>le</strong>s concepts de sécurité militaire et de sécuritéhumaine parce que ces deux concepts de sécurité semb<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s plus répandusdans <strong>le</strong>s milieux académiques, politiques et militaires. Cet exercice estdʼautant plus nécessaire que <strong>le</strong>s acteurs des relations internationa<strong>le</strong>s, ensʼemparant de ce concept, lui donnent une signification <strong>le</strong> plus souvent controversée,alors quʼils <strong>le</strong> proposent comme une véritab<strong>le</strong> alternative des enjeuxde la paix, de la sécurité et de la coopération internationa<strong>le</strong>s, en prenant <strong>le</strong>sindividus comme <strong>le</strong> principal point de référence.A cet effet, nous allons analyser lʼévolution du concept de sécurité de lasécurité militaire à la sécurité humaine et voir enfin <strong>le</strong>s initiatives africaines<strong>pour</strong> garantir la sécurité humaine.ÉVOLUTION DU CONCEPT DE SÉCURITÉDE LA SÉCURITÉ MILITAIRELes dimensions militaires figurent depuis toujours au centre des préoccupationsde sécurité parce quʼel<strong>le</strong>s se rapportent à lʼessence même dʼune structureinternationa<strong>le</strong> fondées sur lʼÉtat 57 . Quʼil sʼagisse de souveraineté, deprotection territoria<strong>le</strong> ou dʼapplication des lois, lʼÉtat demeure la référenceincontournab<strong>le</strong>. Il se définit par ses trois éléments constitutifs : une population,un territoire et un gouvernement. En lʼabsence de contrô<strong>le</strong> effectif du territoire,la souveraineté étatique nʼest pas reconnue sur <strong>le</strong> plan juridique (voir Pa<strong>le</strong>stine).Dans <strong>le</strong> domaine militaire, la sécurité est ainsi orientée en fonction desÉtats car ceux-ci ont <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> de lʼusage légitime de la force.55- Principe consacré par la Charte des Nationsunies, artic<strong>le</strong> 2, al.7.56Parmi ces auteurs, on peut citer: Barry Buzan,Haftendorn Helga, Kolpdziej Edward A., Nye etLynn-Jones Sean , Walt Kenneth N., Waever O<strong>le</strong>,etc….57- Spanier (John) et Wendzel (Robert), GamesNations Play, pp. 43-60, Washington,Congressional Quarterly Press, 9e éd. 1996.58David (<strong>Char<strong>le</strong>s</strong>-Philippe), LA GUERRE ET LA PAIX,Approches contemporaines de la sécurité et de lastratégie, p.66, Paris, Presses de Sciences Po.,2000, 524 pages.Deux raisons fondamenta<strong>le</strong>s expliquent cette situation :1. En se dotant dʼarmées nationa<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s États-nations ont construit un systèmeinternational qui, depuis plus de trois cents ans, fait reposer la sécuritésur la défense de territoire, des populations et des ressourcesconsidérées comme indispensab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur survie. En lʼabsence dʼuneautorité supérieure, donc en condition anarchique, <strong>le</strong>s États doiventcomposer ou sʼaffronter entre eux <strong>pour</strong> gérer cette sécurité ;2. LʼÉtat reste la principa<strong>le</strong> unité de référence dont <strong>le</strong>s frontières, lʼautoritépolitique et <strong>le</strong> mode de fonctionnement sont définis par <strong>le</strong>s acteurs desécurité. Même si <strong>le</strong>s dimensions internes et externes à lʼÉtat font conséquemmentlʼobjet de fréquentes contestations sécuritaires.LʼÉtat maintient ses fonctions régaliennes sur <strong>le</strong> plan militaire par la force.Pour Walt, rares sont des États, sans forces armées qui vivent en relative sécurité.Il trouve que la sécurité correspond tout simp<strong>le</strong>ment au phénomène dela guerre. Pour simplifier à lʼextrême, <strong>Char<strong>le</strong>s</strong>-Philippe David trouve quʼ « ilserait possib<strong>le</strong> d’affirmer que, sur <strong>le</strong> plan militaire, la stratégie d’un État reposesur l’équation Menaces X Sécurité X Puissance » 58 .Quoique <strong>le</strong>s menaces et <strong>le</strong>s ennemis aient considérab<strong>le</strong>ment changé, lʼÉtatconserve intact son appareil militaire et sa volonté dʼaffirmer sa souveraineté.Dans <strong>le</strong> secteur militaire « l’État est encore (l’acteur) <strong>le</strong> plus important » 59 . Ilconstitue lʼobjet de référence premier chaque fois quʼil est question de menacesinternes ou externes. En outre, <strong>le</strong>s forces armées sont toujours nationa<strong>le</strong>s,et diffici<strong>le</strong>ment intégrab<strong>le</strong>s au sein dʼinstitutions internationa<strong>le</strong>s. Les98


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresgouvernements et <strong>le</strong>urs appareils militaires demeurent propriétaires des instrumentsqui, ultimement, décident de la survie des États.En somme, <strong>le</strong> système westphalien et lʼÉtat figurent toujours au centre desconsidérations militaires de la sécurité, et entretiennent une relation aux ramificationsdéterminantes <strong>pour</strong> la stabilité internationa<strong>le</strong>. Les réalistes et <strong>le</strong>s libérauxjugent important de préserver ce fondement, idéalistes et critiques estimentquʼil est remis en question par des changements significatifs dans <strong>le</strong>s normes.... VERS LA SÉCURITÉ HUMAINELe débat sur la définition de la notion de sécurité est apparu au début des annéesquatre-vingt <strong>pour</strong> sʼintensifier tout au long des années quatre-vingt-dix. Ila pris forme dans <strong>le</strong> cadre de la remise en question des études stratégiques quienfermait la notion de sécurité dans la sphère strictement militaire. Les étudesdites de sécurité, par opposition aux études stratégiques, se développèrentalors sur la base dʼun questionnement entourant <strong>le</strong>s possibilités dʼélargissementet dʼapprofondissement du concept de sécurité : soit élargir <strong>le</strong> concept àdʼautres menaces que la menace exclusivement militaro-étatique et approfondir<strong>le</strong> référent de la sécurité à dʼautres objets que lʼÉtat. Plusieurs auteurslancèrent et alimentèrent ce débat ; <strong>le</strong>urs travaux ont retenu largement lʼattentiondans <strong>le</strong> domaine des études stratégiques et des études de sécurité.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARPendant longtemps, la paix a été essentiel<strong>le</strong>ment considérée comme absencede guerre et la sécurité internationa<strong>le</strong> comme synonyme dʼabsence dʼune menacede nature militaire. Dès lors, il suffisait quʼil nʼy ait pas dʼaffrontementarmé <strong>pour</strong> que lʼon se considérât en paix.Cette conception de la paix et de la sécurité internationa<strong>le</strong>s a été pendant 45ans adoptée par lʼONU. Le système de sécurité col<strong>le</strong>ctive mis en place par laCharte de San Francisco reposait sur lʼidée que la menace à la paix ne peutêtre quʼune menace de guerre ou dʼagression armée.Ce faisant, lʼintroduction de la notion de “sécurité humaine” constitue une rupturedans la mesure où, en devenant “humaine”, la sécurité englobe éga<strong>le</strong>mentlʼabsence de dangers non militaires. Á lʼorigine de cette évolution, il y a<strong>le</strong> constat, depuis <strong>le</strong>s années 90 avec la fin de la guerre froide, que <strong>le</strong> véritab<strong>le</strong>danger que court <strong>le</strong> monde nʼest plus vraiment une grande guerre, mettanten cause deux ou plusieurs armées nationa<strong>le</strong>s, mais plutôt des conflits pluslocalisés, limités à un pays ou à une région du monde. De plus, ces conflitssont la plupart du temps des conflits armés non internationaux, au mieux desguerres civi<strong>le</strong>s, aux motivations ethniques ou séparatistes (Rwanda, ex-Yougoslavie,Kosovo, Timor, etc.) dont la plupart des victimes sont des civils.De cette réalité, <strong>le</strong> Conseil de sécurité, lors de sa réunion du 31 décembre 1992,au niveau des chefs dʼÉtat et de gouvernement, va redéfinir la paix et la sécuritéinternationa<strong>le</strong>s ; il constate que : « La paix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s ne décou<strong>le</strong>ntpas seu<strong>le</strong>ment de l’absence de guerre et de conflits armés. D’autres menacesde nature non militaire trouvent <strong>le</strong>urs sources dans l’instabilité qui existe dans <strong>le</strong>sdomaines économique, social, humanitaire et écologique ».Il en décou<strong>le</strong> que la notion de “sécurité humaine” signifie que la sécurité nʼestplus envisagée au seul niveau des États, mais quʼel<strong>le</strong> concerne aussi des individuset des groupes au sein de lʼÉtat. Lorsque de tels groupes sont victimesde violations massives des droits de lʼhomme, on considère quʼil y amenace contre la paix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s (condition dʼune interventionde lʼONU à travers <strong>le</strong> Conseil de sécurité).En parallè<strong>le</strong> à ces rapports, <strong>le</strong> discours sur <strong>le</strong> concept de « sécurité » a aussiconnu une importante évolution au cours des années 1980-1990. Au conceptétroit de sécurité nationa<strong>le</strong>, on a lʼémergence dʼune conception large de la sécurité: la sécurité humaine.59Buzan (Barry), Waever (O<strong>le</strong>) et De Wilde (Jaap),Security : A New Framework for Analysis, p.49,Boulder (Col.), Lynne Rienner, 1998.99


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLe Programme des Nations Unies sur <strong>le</strong> Développement (PNUD) définit la sécuritéhumaine dans <strong>le</strong> rapport mondial sur <strong>le</strong> développement humain de 1994en ces termes : « Depuis trop longtemps <strong>le</strong>s questions de sécurité sont réduitesaux menaces contre l’intégrité territoria<strong>le</strong> des pays... sécurité de l’emploi,du revenu, sécurité sanitaire, sécurité de l’environnement, sécurité faceà la criminalité : tel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s formes que revêt aujourd’hui la problématiquede la sécurité humaine dans <strong>le</strong> monde » 60 .Le Rapport de 1994 introduit un nouveau concept de sécurité humaine, quiassimi<strong>le</strong> la sécurité aux personnes et non aux territoires, au développement et nonaux armes. Il examine <strong>le</strong>s différentes préoccupations liées à la sécurité humaine,à lʼéchel<strong>le</strong> nationa<strong>le</strong> et mondia<strong>le</strong>. Ce Rapport cherche à aborder ces préoccupationsà travers un nouveau paradigme de développement humain durab<strong>le</strong>, basésur <strong>le</strong>s dividendes de la paix potentiels, sur une nouvel<strong>le</strong> forme de coopération<strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement et sur un système dʼinstitutions mondia<strong>le</strong>s restructuré.Le constat du PNUD sʼinscrit dans <strong>le</strong> courant de pensée qui a suivi la chute dumur de Berlin et même avant. Certains spécialistes académiques proposent deréexaminer <strong>le</strong> concept de sécurité à la lumière de ces bou<strong>le</strong>versements et dedépasser lʼidée classique et restreinte de sécurité nationa<strong>le</strong>. « ... (Ils) tendent àélargir la sécurité à des dimensions non-militaires, allant de lʼimmigration à lʼéconomieen passant par la protection de lʼenvironnement. Certaines institutions internationa<strong>le</strong>set un grand nombre dʼÉtats emboîtent <strong>le</strong> pas et diffusent desdiscours visant une approche moins étriquée de la défense, jusquʼen 1990 cantonnéedans <strong>le</strong> militaire. La va<strong>le</strong>ur centra<strong>le</strong> devient de plus en plus lʼindividu luimême,au-delà de son appartenance à un État en particulier ».On commence alors à par<strong>le</strong>r de sécurité humaine. Boutros Boutros-Ghali et KofiAnnan ont largement participé à lʼextension de ce concept en insistant sur <strong>le</strong> rô<strong>le</strong>fondamental de lʼONU dans la protection de la dignité humaine. Au <strong>le</strong>ndemain delʼintervention de lʼOTAN contre la Serbie, en juin 1999, Kofi Anan déclarait au que:« l’être humain est au centre de tout. Le concept même de souveraineté nationa<strong>le</strong>a été conçu <strong>pour</strong> protéger l’individu, qui est la raison d’être de l’État, et non l’inverse.Il n’est plus acceptab<strong>le</strong> de voir des gouvernements flouer <strong>le</strong>s droits de <strong>le</strong>urscitoyens sous prétexte de souveraineté » 61 . Lutter <strong>pour</strong> lʼintégrité de la personneconstitue <strong>le</strong> but <strong>le</strong> plus légitime de nos jours. Cette perception de la sécurité semb<strong>le</strong>prendre <strong>le</strong> contre pied de lʼapproche classique focalisé sur la sécurité de lʼÉtaten termes de capacité militaire et de sauvegarde territoria<strong>le</strong>.Dorénavant, ce qui prime, cʼest mettre <strong>le</strong>s individus à lʼabri de la peur et des vulnérabilitésdont ils peuvent faire lʼobjet, tant du point de vue économique, politique,social, culturel ou environnemental. Ainsi, lʼentrée dans <strong>le</strong> XXI ème sièc<strong>le</strong> rimeraitavec nouveau discours sécuritaire. Le monde de souverainetés sʼeffilochant, unmonde fondé sur la reconnaissance croissante de lʼindividu sʼancrerait de manièresignificative à la fois dans <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s actions des politiques 62 .... A LA SECURITE HUMAINE60Programme des Nations Unies <strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement,1994, Rapport mondial sur <strong>le</strong> développementhumain 1994, Un agenda <strong>pour</strong> <strong>le</strong> sommet social,New York, Oxford University Press. Voir plus particulièrement<strong>le</strong> chapitre II « Nouvel<strong>le</strong>s dimensionsde la sécurité humaine ».61Le Monde, juin 199962Frédéric Ramel, Sécurité humaine : un concept<strong>pour</strong> penser <strong>le</strong> XXI ème sièc<strong>le</strong> ?, Centre LyonnaisdʼÉtudes de Sécurité Internationa<strong>le</strong> et de Défense(CLESID), http://c<strong>le</strong>sid.univ-lyon3.fr/publications/ -sechumaine.html www.securitehumaine.ch -- op.cit, pp. 26-34.Le concept de sécurité humaine révè<strong>le</strong> en fait une nouvel<strong>le</strong> manière de concevoirla « sécurité » au sein des sociétés politiques (États, organisations internationa<strong>le</strong>s).La « sécurité », cʼest à la fois lʼabsence de danger et <strong>le</strong> sentimentdʼune certaine quiétude. Le qualificatif « humaine » traduit un élargissementdu concept de sécurité à lʼêtre humain qui sʼappréhende désormais soit dansun sens large, soit dans un sens restreint.1- <strong>le</strong> concept appréhendé dans son sens largeDans une acception large, qui inspire la plupart des définitions du concept desécurité humaine, celui-ci repose sur trois éléments fondamentaux: la portée100


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresde la sécurité humaine, lʼimportance des liens de causalité entre ses différentescomposantes, et lʼaccent mis sur lʼessentiel vital des personnes. Cette approchetrouve son illustration à travers <strong>le</strong> concept de sécurité humaine préconisé par<strong>le</strong> Programme des Nations Unies <strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement (PNUD) et par la Commissionsur la sécurité humaine. Selon <strong>le</strong> Rapport mondial sur <strong>le</strong> développementhumain intitulé : «Nouvel<strong>le</strong>s dimensions de la sécurité humaine » qui est considérécomme étant la première initiative importante visant à exposer <strong>le</strong> conceptde sécurité humaine, celui-ci est décrit comme ayant « deux aspects principaux: dʼune part, la protection contre <strong>le</strong>s menaces chroniques, tel<strong>le</strong>s que la famine,la maladie et la répression et, dʼautre part, la protection contre toutévénement brutal susceptib<strong>le</strong> de perturber la vie quotidienne ». Dans cette définitiondu PNUD, la sécurité humaine est classée en sept grandes rubriquesauxquel<strong>le</strong>s correspondent des types spécifiques de menaces :3. la sécurité économique qui recouvre lʼaccès à lʼemploi et aux ressources,est menacée par la pauvreté ;4. la sécurité alimentaire, signifiant lʼaccès matériel et économique à la nourriture<strong>pour</strong> tous et à tous moments, est confrontée à la menace de la faimet de la famine ;5. la sécurité sanitaire et lʼaccès aux soins médicaux et à de meil<strong>le</strong>ures conditionssanitaires a à faire face aux b<strong>le</strong>ssures et maladies ;6. la sécurité environnementa<strong>le</strong> affronte <strong>le</strong>s menaces de pollution, de dégradationde lʼenvironnement mettant en danger la survie des personnes et delʼépuisement des ressources ;7. la sécurité personnel<strong>le</strong> est contrariée par des menaces qui peuvent prendreplusieurs formes: des menaces exercées par lʼÉtat, des États étrangers,dʼautres groupes de personnes (tensions ethniques), des menacesà lʼencontre des femmes ou des enfants en raison de <strong>le</strong>ur vulnérabilité etde <strong>le</strong>ur dépendance.8. la sécurité de la communauté qui signifie que la plupart des personnes tirent<strong>le</strong>ur sécurité de <strong>le</strong>ur appartenance à un groupe social (famil<strong>le</strong>, communauté,organisation, groupement holistique, groupe ethnique, etc.), peut être menacéepar des tensions survenant souvent entre ces groupes en raison dela concurrence <strong>pour</strong> lʼaccès limité aux opportunités et aux ressources9. la sécurité politique qui doit garantir <strong>le</strong> respect des droits et libertés fondamentaux,est menacée par lʼarbitraire et la répression.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCette classification établie par <strong>le</strong> PNUD est importante en ce quʼel<strong>le</strong> fixe deslimites très larges, qui tranchent par rapport aux tentatives passées deconceptualisation du concept de sécurité. El<strong>le</strong> oblige, en outre, <strong>le</strong>s autres définitionsde la sécurité humaine à justifier <strong>le</strong>urs restrictions par rapport à cepoint de départ. Par ail<strong>le</strong>urs, cette proposition de définition du PNUD sous entendlʼexistence de sous systèmes interdépendants de la sécurité humainequi entretiennent entre eux des interactions comp<strong>le</strong>xes dont <strong>le</strong>s rapports garantissentlʼéquilibre et la pérennité du système lui-même. Ainsi, selon cetteprésentation, si la causalité du troub<strong>le</strong> pouvant menacer lʼéquilibre du systèmeest un élément important, alors <strong>le</strong>s lignes de clivage du système doiventêtre définies aussi largement que possib<strong>le</strong> <strong>pour</strong> tenir compte de toutes <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>spossib<strong>le</strong>s. Pour comprendre <strong>le</strong>s rapports de causalité et prendre desmesures adaptées, il importe alors de reconnaître lʼinterdépendance des composantesde la sécurité humaine, quel<strong>le</strong> que soit la définition retenue.Mais ce qui constitue <strong>le</strong> cœur même de lʼacception au sens large de la sécuritéhumaine réside dans <strong>le</strong> primat accordé à « lʼessentiel vital des personnes»;un élément fondamental qui permet de distinguer la sécurité humaine du développementhumain. Alors que celui-ci est lié au bien être, la sécurité humaine,quant à el<strong>le</strong>, sʼappréhende davantage dans <strong>le</strong>s situations dʼurgence.Cʼest ce quʼa souligné la « Commission sur la sécurité humaine » 64 , créée en101


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainejanvier 2001 à lʼinitiative du gouvernement japonais, en réponse à lʼappel lancélors du Sommet <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Millénaire par <strong>le</strong> Secrétaire général des Nations Unies,Kofi Annan. Selon la Commission, « la sécurité humaine consiste à protégerlʼessentiel vital de tout être humain contre <strong>le</strong>s menaces <strong>le</strong>s plus graves et <strong>le</strong>splus répandues ». Cette définition présente lʼavantage de respecter <strong>le</strong> senslarge de la sécurité humaine, tout en la distinguant clairement des notions plusgénéra<strong>le</strong>s de bien-être et de développement. En considérant « tout être humain»comme lʼobjet référent, el<strong>le</strong> se concentre non seu<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s personnesmais précise aussi <strong>le</strong> caractère universel de son mandat.Les expressions «essentiel vital» et «menaces <strong>le</strong>s plus graves et <strong>le</strong>s plus répandues»permettent de préciser ce qui constitue une menace <strong>pour</strong> la sécuritéhumaine et dʼinscrire une notion de gravité dans ce concept. Aux yeux de la Commissionsur la sécurité humaine, « lʼessentiel vital» est un niveau minimal de survie.La référence aux « menaces <strong>le</strong>s plus graves et <strong>le</strong>s plus répandues», quant àel<strong>le</strong>, indique à la fois la gravité et lʼurgence. Les menaces potentiel<strong>le</strong>s étant illimitées,seu<strong>le</strong>s donc <strong>le</strong>s plus graves, cel<strong>le</strong>s qui prennent des vies ou <strong>le</strong>s menacentgravement, peuvent être retenues. Mais ce seuil est aussi fondamental lorsquʼilsʼagit de cerner <strong>le</strong>s menaces dans <strong>le</strong> cadre de la sécurité humaine.Aussi, <strong>pour</strong> la Commission, au lieu de dresser une liste de menaces, il seraitplus judicieux de fixer des critères dont <strong>le</strong> dépassement signifie quʼun problèmedevient une menace <strong>pour</strong> la sécurité humaine. Par conséquent, mêmesi <strong>le</strong>s institutions ne peuvent protéger <strong>le</strong>s personnes contre tous <strong>le</strong>s fléaux,el<strong>le</strong>s devraient au moins sʼattaquer à ceux qui prennent des vies inuti<strong>le</strong>ment.2- <strong>le</strong> concept appréhendé dans son sens restreint64En sʼinterrogeant sur deux grands thèmes :lʼinsécurité humaine résultant des conflits et dela vio<strong>le</strong>nce dʼune part, <strong>le</strong>s liens entre la sécuritéet <strong>le</strong> développement dʼautre part, la missionconférée à la Commission sur la sécurité humaineconsistait à élaborer un concept de la sécuritéhumaine pouvant servir dʼoutil opérationnel <strong>pour</strong> <strong>le</strong>développement et la mise en œuvre des politiques.Sur cette base, il fut demandé à la Commission deproposer un programme de recommandationsconcrètes <strong>pour</strong> répondre aux menaces <strong>le</strong>s pluscritiques et <strong>le</strong>s plus répandues pesant sur lasécurité humaine.Lʼinterprétation restreinte du concept de sécurité humaine se focalise sur <strong>le</strong>s menacesvio<strong>le</strong>ntes qui pèsent sur <strong>le</strong>s personnes. La conception de la sécurité humaineau sens étroit connaît el<strong>le</strong>-même trois autres variantes. La première visantuniquement à assurer lʼintégrité physique de lʼindividu contre toute forme de vio<strong>le</strong>nce,quʼel<strong>le</strong> résulte ou non dʼun conflit. Les atteintes graves contre <strong>le</strong>s droits desindividus nʼengendrant pas de vio<strong>le</strong>nce, généra<strong>le</strong>ment incluses dans <strong>le</strong> concept desécurité humaine au sens étroit, ne sont donc pas prises en compte.La deuxième variante consiste à lier <strong>le</strong>s menaces à des situations conflictuel<strong>le</strong>s.Cette approche concerne <strong>le</strong>s menaces liées aux mines anti-personnel<strong>le</strong>s, à laproli fération des armes légères, à la protection des civils dans <strong>le</strong>s situationsde conflits armés (enfants-soldats, personnes déplacées dans <strong>le</strong>ur proprepays, sécurité des camps de réfugiés), au respect du droit humanitaire par<strong>le</strong>s acteurs non étatiques, et aux sanctions internationa<strong>le</strong>s ciblées afin dʼéviterde faire souffrir la population civi<strong>le</strong>.Enfin, la troisième variante, prend en considération <strong>le</strong>s menaces indépendantesà un conflit, mais qui sont <strong>pour</strong> autant déstabilisantes <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s individus. Lasécurité humaine, ici, se rapporte à des menaces tel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s atteintes à lasécurité publique, <strong>le</strong> terrorisme, la cybercriminalité, <strong>le</strong> trafic dʼêtres humains, <strong>le</strong>sdrogues illicites et <strong>le</strong> blanchiment dʼargent. Des menaces doivent être contrariéesessentiel<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>s ressources diplomatiques, <strong>le</strong>s méthodes depersuasion économique, <strong>le</strong> renseignement et <strong>le</strong>s technologies de lʼinformation.Mais lʼargument fort dans <strong>le</strong> sens dʼune définition restreinte de la sécurité humaineréside tout simp<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> nombre dʼinitiatives internationa<strong>le</strong>s fondées sur sesparamètres ayant été couronnées de succès. En fait, la plupart des avancées majeuresréalisées au nom de la sécurité humaine se fondaient sur cette définition restreinte.Ainsi, <strong>le</strong> Traité dʼinterdiction des mines, la Cour péna<strong>le</strong> internationa<strong>le</strong>, demême que <strong>le</strong>s dernières initiatives internationa<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s enfants soldats, <strong>le</strong>s armeslégères et <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des acteurs non étatiques dans <strong>le</strong>s conflits, ont été engagés selonlʼinterprétation restreinte du principe de sécurité humaine.102


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresLES PRINCIPALES CARACTERISTIQUESDE LA SÉCURITÉ HUMAINELa sécurité humaine réunit <strong>le</strong>s « éléments humains » de la sécurité, des droitset du développement. A ce titre el<strong>le</strong> représente un concept interdisciplinaire quicomporte <strong>le</strong>s caractéristiques suivantes :1 - Centré sur la personne,2 - multisectoriel,3 - holistique,4 - spécifique au contexte et5 - Orienté vers la prévention.En tant que concept centré sur la personne, la sécurité humaine place lʼindividuau centre de lʼanalyse. Par conséquent, la sécurité humaine considèreune large gamme de conditions qui menacent la survie, <strong>le</strong>s moyens dʼexistenceet la dignité et el<strong>le</strong> identifie <strong>le</strong> seuil au-dessous duquel la vie humaineest menacée de façon intolérab<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLa sécurité humaine est aussi fondée sur une compréhension multisectoriel<strong>le</strong> desinsécurités. El<strong>le</strong> représente une compréhension globa<strong>le</strong> des menaces, y compris<strong>le</strong>s causes dʼinsécurité liées par exemp<strong>le</strong> à la sécurité économique, alimentaire,sanitaire, de lʼenvironnement, personnel<strong>le</strong>, de la communauté et politique.En outre, la sécurité humaine souligne lʼinterdépendance entre <strong>le</strong>s différentesmenaces et entre <strong>le</strong>s réponses dans <strong>le</strong> cadre de lʼapproche de ces insécurités.Les menaces à la sécurité humaine se renforcent mutuel<strong>le</strong>ment et sontliées de deux manières. Premièrement, el<strong>le</strong>s sont liées par un effet dʼentraînementdans <strong>le</strong> sens où <strong>le</strong>s menaces se nourrissent <strong>le</strong>s unes des autres. Parexemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s conflits vio<strong>le</strong>nts peuvent déboucher sur la privation et la pauvretéqui à <strong>le</strong>ur tour peuvent entraîner lʼépuisement des ressources, des maladiesinfectieuses, des déficits éducatifs, etc.Deuxièmement, <strong>le</strong>s menaces au sein dʼun pays ou dʼune région donnée peuventsʼétendre à une région plus large et avoir des externalités négatives <strong>pour</strong>la sécurité régiona<strong>le</strong> et internationa<strong>le</strong>.Cette interdépendance a des implications importantes <strong>pour</strong> lʼélaboration depolitiques étant donné quʼel<strong>le</strong> implique que <strong>le</strong>s insécurités humaines ne peuventpas être abordées de façon isolée par des réponses fractionnées et indépendantes.En revanche, la sécurité humaine comprend des approches holistiques quimettent lʼaccent sur <strong>le</strong> besoin de réponses coopératives et multisectoriel<strong>le</strong>s quimettent en commun <strong>le</strong>s agendas des acteurs de la sécurité, du développementet des droits de la personne.Par ail<strong>le</strong>urs, en tant que concept spécifique au contexte, la sécurité humainereconnaît que <strong>le</strong>s insécurités varient considérab<strong>le</strong>ment selon <strong>le</strong>s différentessituations et el<strong>le</strong> avance donc des solutions contextualisées en réponse auxsituations spécifiques abordées. Enfin, en abordant <strong>le</strong>s risques et <strong>le</strong>s causespremières des insécurités, la sécurité humaine est orientée vers la préventionet introduit une approche doub<strong>le</strong> de la protection et de lʼautonomisation.En somme, <strong>pour</strong> une meil<strong>le</strong>ure garantie de la sécurité de la personnehumaine, <strong>le</strong>s États doivent mener une politique concertée <strong>pour</strong> plus d'efficacitéet harmoniser <strong>le</strong>urs positions sur <strong>le</strong>s grands problèmes qui constituentune menace <strong>pour</strong> cette sécurité.103


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineEN QUOI LE CONCEPT DE SÉCURITÉ HUMAINE DIFFERE-T-ILDES APPROCHES TRADITIONNELLES DE LA SÉCURITÉ, DUDÉVELOPPEMENT HUMAIN ET DES DROITS DE L’HOMME ?La sécurité humaine complète la sécurité de lʼÉtat et contribue même à sonexercice. Cependant on sʼinterroge souvent sur <strong>le</strong>s différences fondamenta<strong>le</strong>sentre ces concepts. Les plus importantes de ces dernières sont <strong>le</strong>s suivantes:Si la sécurité de lʼÉtat se concentre sur <strong>le</strong>s menaces dirigées contre lʼÉtat,notamment sous forme dʼattaques militaires, la sécurité humaine attire lʼattentionsur une large gamme de menaces auxquel<strong>le</strong>s font face <strong>le</strong>s individuset <strong>le</strong>s col<strong>le</strong>ctivités. El<strong>le</strong> met lʼaccent sur <strong>le</strong>s causes premières de lʼinsécuritéet avance des solutions centrées sur la personne, impulsées loca<strong>le</strong>ment, complèteset durab<strong>le</strong>s. De ce fait, el<strong>le</strong> implique une gamme plus large dʼacteurs.Toutefois, la sécurité humaine ne vise pas à supplanter la sécurité de lʼÉtat.Comme lʼécrit Barry Buzan : « l’État est irréversib<strong>le</strong>. Il n’existe aucun moyen derevenir en arrière et, par conséquent, la sécurité des individus est inextricab<strong>le</strong>mentliée à cel<strong>le</strong> de l’État » 65 . El<strong>le</strong>s ont plutôt une relation complémentaire : « la sécuritéhumaine et la sécurité de lʼÉtat sont donc deux notions qui se renforcent mutuel<strong>le</strong>mentet dépendent lʼune de lʼautre. Sans sécurité humaine, la sécurité delʼÉtat ne peut être assurée et vice versa. En somme, on ne peut pas mener uneréf<strong>le</strong>xion sur la stratégie ou la sécurité sans une réf<strong>le</strong>xion sur lʼÉtat. Car, lʼÉtat demeurela forme dʼorganisation politique appréciée et convoitée 66 .Toutefois, à lʼobjectif de la « croissance avec équité » du développement humain,la sécurité humaine ajoute la dimension importante de « récession avec sécurité ».La sécurité humaine reconnaît que comme suite aux récessions liées aux conflits,crises économiques et financières, maladies et catastrophes naturel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s individussont confrontés à des insécurités et privations soudaines. Ces dernières nonseu<strong>le</strong>ment effacent des années de développement, mais créent aussi des conditionsdans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s griefs peuvent donner lieu à des tensions croissantes.Aussi, outre lʼaccent mis sur <strong>le</strong> bien-être humain, la sécurité humaine est guidéepar des va<strong>le</strong>urs liées à la sécurité, la stabilité et la durabilité des gains dedéve loppement.Enfin, <strong>le</strong>s graves violations des droits de lʼhomme se traduisent trop souvent pardes conflits, des déplacements et une souffrance humaine massive. A cet égard,la sécurité humaine met en évidence lʼuniversalité et la primauté dʼune série dedroits et de libertés qui sʼavèrent essentiels à la vie humaine. La sécurité humainene fait pas de distinction entre différents types de droits de lʼhomme (droits civi ques,politiques, économiques, sociaux et culturels). El<strong>le</strong> aborde ainsi <strong>le</strong>s violations etmenaces de façon multidimensionnel<strong>le</strong> et intégra<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> introduit un cadre pratique<strong>pour</strong> identifier <strong>le</strong>s droits spécifiques remis en cause dans une situation dʼinsécuritédonnée et <strong>pour</strong> évaluer <strong>le</strong>s arrangements institutionnels et de gouvernancerequis <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur exercice et maintien.65Buzan Barry, Peop<strong>le</strong>, States and Fear. An Agendafor International Security Studies in the Post-ColdWar Era, p. 39, Boulder (Col.), Lynne Rienner,2e éd. 1991.66Boniface Pascal, « La prolifération étatique »,Commentaire, 84, hiver 1999, pp. 975-986.LES CRITIQUES A LA SECURITE HUMAINE1 - Subjectivité du conceptQuelques critiques dénoncent <strong>le</strong> fait qu'il y a un grand degré de subjectivité endéfinissant ce qui constitue une menace de sécurité, absence de seuil audessusduquel l'insécurité constitue une vraie menace de sécurité. Le PNUDdéfinit <strong>le</strong>s sept types <strong>le</strong>s menaces concernées sous <strong>le</strong> paradigme de sécuritéhumaine 67 ; il y a un manque davantage d'explication dans quel<strong>le</strong>s circonstancessont ces questions peuvent être sécurisées ou résolues avec lacoopération globa<strong>le</strong>. Par exemp<strong>le</strong>, à quel niveau la perte de sécurité peut êtreconsidérée comme une menace <strong>pour</strong> une nation par <strong>le</strong> PNUD?104


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2 - Absence de consensus sur la définitionIl reste peu clair si <strong>le</strong> concept de la sécurité humaine peut servir de guide pratique.Bien que l'idée généra<strong>le</strong> soit que la sécurité humaine déca<strong>le</strong>rait <strong>le</strong> foyerde l'état-centré une approche personne-centrée à la sécurité, <strong>le</strong> fait est celuicomme « <strong>le</strong> développement soutenab<strong>le</strong> », sécurité humaine manque d'unedéfinition précise. Actuel<strong>le</strong>ment, il y a au moins quatre versions différentes (laversion du PNUD, la version japonaise, la version canadienne et la version del'UE). L'anomalie principa<strong>le</strong> parmi <strong>le</strong>s définitions est si adopter un conceptétroit ou large de sécurité humaine. La définition étroite, éga<strong>le</strong>ment connuesous <strong>le</strong> nom de lʼ « absence de crainte », limite la portée de la sécurité humaineaux conflits vio<strong>le</strong>nts tandis que la large définition, habituel<strong>le</strong>ment désignéesous <strong>le</strong> nom de « absence de va<strong>le</strong>ur » l'approche inclut <strong>le</strong>s questionssocio-économiques tel<strong>le</strong>s que la pauvreté et <strong>le</strong>s maladies dans l'ordre du jourhumain de sécurité.D'une part, <strong>le</strong>s adversaires de l'approche « absence de crainte » arguent dufait qu'el<strong>le</strong> ne détermine pas <strong>le</strong>s causes des menaces de sécurité par conséquentqu'el<strong>le</strong> est inefficient en augmentant la sécurité humaine. Ces causessont principa<strong>le</strong>ment des conditions vivantes insupportab<strong>le</strong>s comme lapauvreté extrême et prolongée, ou <strong>le</strong> manque de ressources de base tel<strong>le</strong>sque l'eau et la nourriture. En d'autres termes, cette approche traite <strong>le</strong>s « symptômes» des actes vio<strong>le</strong>nts, mais ne traite pas la « maladie » des menaceshumaines de sécurité. D'autre part, la large définition entoure trop de questionsliées aux droits de l'homme et au développement.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCes questions sont habituel<strong>le</strong>ment reliées et impliquent des rapports causalscompliqués et en outre el<strong>le</strong> exige une coopération étendue entre différentssecteurs, rendant <strong>le</strong> concept de sécurité humaine encore plus dur <strong>pour</strong> êtreopérationnalisé.Puisqu'il n'y a aucun consensus sur <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s de la pensée déterminent<strong>le</strong> centre principal du paradigme de sécurité humaine, quelques critiquessuggèrent de combiner <strong>le</strong>s deux éco<strong>le</strong>s des pensées en définissant <strong>le</strong>smenaces à mettre dans lʼordre du jour de la sécurité humaine. De tel<strong>le</strong>sanomalies peuvent gêner la coopération internationa<strong>le</strong>.Le manque d'une définition précise n'est pas <strong>le</strong> seul facteur qui obstrue lacoopération internationa<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s avocats humains de sécurité ont échoué à cejour <strong>pour</strong> assigner des rô<strong>le</strong>s spécifiques à différents acteurs dans l'arène internationa<strong>le</strong>.Dans l'approche traditionnel<strong>le</strong> de sécurité, lʼÉtat est responsab<strong>le</strong>de protéger son territoire et ses citoyens, tandis que dans l'approche humainede sécurité <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s ne sont pas encore bien déterminés.Malgré ces critiques et ces ambigüités conceptuel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s États africains se sont efforcés,à travers <strong>le</strong>s différentes organisations régiona<strong>le</strong> et sous-régiona<strong>le</strong> dʼadapter<strong>le</strong>urs stratégies à la nouvel<strong>le</strong> donne conceptuel<strong>le</strong> de sécurité humaine.INITIATIVES AFRICAINES POUR GARANTIR LA SÉCURITÉ HUMAINELors de la création de l'OUA, <strong>le</strong>s dirigeants africains avaient mis l'accent surla sécurité nationa<strong>le</strong> en accordant la primauté à la souveraineté nationa<strong>le</strong>, àl'intégrité territoria<strong>le</strong> et au principe de non intervention. Ainsi, lʼorganisationpanafricaine considérait <strong>le</strong>s conflits intra-étatiques comme re<strong>le</strong>vant des affairesintérieures. Quatre décennies durant, el<strong>le</strong> nʼa été qu'un observateur impuissantdes atrocités de guerres menées en Afrique par alliés interposéspendant la guerre froide. Implicitement, une culture d'impunité et d'indifférencea été instaurée sous-tendue par la politique de non intervention. Il s'en estsuivi que la sécurité des États était liée à la survie des régimes en place ;67Le PNUD, dresse la liste des menaces qui pèsentsur la sécurité humaine classées en sept grandesrubriques: sécurité économique, sécuritéalimentaire, sécurité sanitaire, sécurité del'environnement, sécurité personnel<strong>le</strong>, sécurité dela communauté, sécurité politique, pp. 26-34.105


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainealors que la sécurité des populations nʼétait pas trop prise en considération.Avec la fin de la guerre froide, <strong>le</strong> « désengagement » annoncé des puissancesoccidenta<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> stabilisateur du continent, et surtout la recrudescencedes conflits, lʼOUA va procéder à une réorientation stratégique afin dejouer un rô<strong>le</strong> de premier plan dans la gestion de <strong>le</strong>urs conflits.1 - La réorientation stratégique de l’OUAPrenant en compte la dimension régiona<strong>le</strong> des conflits vio<strong>le</strong>nts en Afrique, desdécideurs africains ont entrepris dʼétablir un système de sécurité à lʼéchel<strong>le</strong> ducontinent qui intègre <strong>le</strong>s questions de conflit, de paix et de sécurité. Ces initiativesconcernent surtout <strong>le</strong> deuxième vo<strong>le</strong>t de lʼagenda sur la sécurité humaineet la mise en place dʼun cadre stratégique et opérationnel <strong>pour</strong> la paix et la sécuritéà lʼéchel<strong>le</strong> de toute lʼAfrique en réponse à des événements spécifiques.Ainsi, la Conférence sur la sécurité, la stabilité, <strong>le</strong> développement et la coopérationen Afrique de 1991 (CSSDCA) 68 fut lʼun des premiers forums de discussionsur <strong>le</strong>s questions de sécurité à lʼéchel<strong>le</strong> continenta<strong>le</strong>.Le document final de la réunion recommandait aux Chefs dʼÉtats et degouvernements africains une série de principes et de mesures politiques enfaveur de la médiation, la conciliation et lʼarbitrage, <strong>le</strong> maintien de la paix, <strong>le</strong>rétablissement de la confiance, <strong>le</strong>s pactes de non-agression, la baisse desdépenses militaires et la création dʼun Conseil africain des sages <strong>pour</strong> la paix.Il encourageait éga<strong>le</strong>ment à lʼélaboration de stratégies de développementgloba<strong>le</strong>s et intégrées traitant à la fois des questions de sécurité, de stabilité,de développement et de coopération.Au sommet de Lomé en 2000, lʼAssemblée des chefs dʼÉtats et de gouverne -ments reconnaissait que « la sécurité de chacun des pays africains estinséparab<strong>le</strong>ment liée à cel<strong>le</strong> dʼautres pays africains et à cel<strong>le</strong> du continentafricain dans son ensemb<strong>le</strong> ». LʼAssemblée sʼengagea éga<strong>le</strong>ment à établiravant 2005 un cadre qui permette de traduire et codifier en lois nationa<strong>le</strong>s <strong>le</strong>concept de sécurité humaine de la Déclaration so<strong>le</strong>nnel<strong>le</strong> de la CSSDCA, afinde restaurer la confiance et dʼétablir des cadres collaboratifs de sécurité auxniveaux national, régional et continental. Des principes-directeurs, des engagementset un certain nombre dʼindicateurs de performance furent mis enplace <strong>pour</strong> mesurer <strong>le</strong>s progrès accomplis dans cette direction.Des initiatives et des institutions œuvrant <strong>pour</strong> la paix et la sécurité furentcréées comme la CSSDCA, <strong>le</strong> Centre de gestion des conflits et <strong>le</strong> Fonds <strong>pour</strong>la paix de lʼOUA, <strong>le</strong> Mécanisme africain dʼévaluation au sein du NEPAD etdes organisations sous-régiona<strong>le</strong>s traitant des questions de sécurité.68CSSDCA:http://www.iss.co.za/AF/RegOrg/unity_to_union/pdfs/oau/cssdca.pdf.69Kent V., Malan M., “The African Standby Force.Progress and Prospects, African Security Review,n° 12, p. 3, 2003.Aussi, dans la « Déclaration sur la situation politique et socio-économiqueen Afrique et <strong>le</strong>s changements fondamentaux qui se produisent actuel<strong>le</strong>mentdans <strong>le</strong> monde » AHG/Décl./(XXVI), <strong>le</strong>s Chefs dʼÉtat se sont engagésà «œuvrer conjointement en vue du règ<strong>le</strong>ment rapide de tous <strong>le</strong>s conflitsque connait <strong>le</strong> continent » en donnant à lʼOUA <strong>le</strong>s moyens adéquats <strong>pour</strong> réduire<strong>le</strong>s tensions et rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s conflits en Afrique, afin de créer <strong>le</strong>s conditionsde paix, de stabilité et de justice socia<strong>le</strong>. Au 29e sommet des Chefs dʼÉtatet de gouvernement tenu au Caire <strong>le</strong> 29 juin 1993, lʼOUA adopta la Déclarationde prévention, de gestion et de règ<strong>le</strong>ment des conflits en Afrique, quia servi de cadre <strong>pour</strong> lʼaction de la future politique africaine de défense etde sécurité. A sa suite, <strong>le</strong> Protoco<strong>le</strong> instituant <strong>le</strong> Conseil de Paix et de Sécuritéchargé du maintien de la stabilité, de la promotion de la diplomatiepréventive et de la gestion des catastrophes et de lʼaction humanitaire delʼUnion Africaine.106


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2 - La prise en considération de la sécurité humaine par l’UnionAfricaineLa re-conceptualisation de la sécurité figure parmi <strong>le</strong>s éléments qui ont milité enfaveur de la mise en place du nouveau mécanisme de paix et de sécurité à lafaveur de la création de l'Union africaine (UA). C'est ce qui ressort de quelquesdispositions de l'Acte constitutif de l'UA, signé <strong>le</strong> 11 juil<strong>le</strong>t 2000 à Lomé au Togo.Aux termes de l'artic<strong>le</strong> 4(h), l'UA s'est octroyée <strong>le</strong> droit «d'intervenir dans un Étatmembre en vertu de la décision de la Conférence portant sur <strong>le</strong>s circonstancesgraves, à savoir <strong>le</strong>s crimes de guerre, <strong>le</strong> génocide et <strong>le</strong>s crimes contre l'humanité.L'UA intervient aussi dans des cas de «menaces contre l'ordre légitime ».Cet interventionnisme de l'UA a été observé au Burundi, au Darfour, auxComores et en Somalie. Lʼartic<strong>le</strong> 4 (j), stipu<strong>le</strong> qu'un État membre a <strong>le</strong> droit de demanderl'intervention de l'UA, laquel<strong>le</strong> peut s'obtenir à la majorité des 2/3, selon<strong>le</strong>s exigences de la Conférence des chefs d'État.Jusquʼà ce jour, <strong>le</strong>s États africains ont soutenu la coopération militaire par <strong>le</strong>biais dʼorganisations sous-régiona<strong>le</strong>s déjà en place, comme la CEDEAO et laSADC. Le mode dʼinteraction entre <strong>le</strong> Conseil de paix et de sécurité de lʼUAet <strong>le</strong>s mécanismes sous-régionaux en place reste encore à définir. Lesstructures subsidiaires qui renforcent <strong>le</strong>s complémentarités et évitent <strong>le</strong>sredondances entre <strong>le</strong>s divers systèmes de paix et de sécurité devraient êtrerenforcées afin dʼadapter <strong>le</strong>s structures sous-régiona<strong>le</strong>s en place à un cadrecohérent de paix et de sécurité à lʼéchel<strong>le</strong> de lʼUnion africaine.Les 53 États membres de lʼUnion africaine ont approuvé en février 2004 lacréation dʼune force militaire dʼappoint, prête à intervenir <strong>pour</strong> prévenir lʼéruptionde guerres civi<strong>le</strong>s ou la perpétration de génocides. Cette force doit êtrecomposée de troupes des membres-clés de lʼUnion africaine et opèrera sousla direction du Conseil de paix et de sécurité de lʼUA. Un président africain lʼadécrite comme une réponse col<strong>le</strong>ctive aux menaces, internes comme externes,partout sur <strong>le</strong> continent. La force appuiera sur <strong>le</strong>s capacités régiona<strong>le</strong>s existantes,notamment du Kenya, dʼAfrique du Sud, dʼÉgypte et du Nigeria. Lesmodalités de sa mise en œuvre en Afrique de lʼOuest restent à déterminer 69 .La réussite de la mission du Conseil de paix et de sécurité dépend surtout dela volonté politique et des moyens mis à sa disposition, non seu<strong>le</strong>ment parlʼaide des pays occidentaux mais surtout de lʼengagement des pays africains.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCONCLUSIONLa sécurité humaine est de nos jours, un concept qui suscite beaucoup d'intérêtsau sein de la communauté internationa<strong>le</strong> et des chercheurs. Certes ils n'ont pasune même perception de la notion mais ils s'accordent sur la nécessité d'axer lasécurité sur la personne humaine. Toutefois, il ressort que la sécurité humaineest un défi <strong>pour</strong> tous <strong>le</strong>s pays malgré <strong>le</strong>ur niveau de développement et <strong>le</strong>urs différencesculturel<strong>le</strong>s. De surcroit sa protection ne saurait être assurée efficacementpar <strong>le</strong>s États seuls. Cʼest la raison <strong>pour</strong> laquel<strong>le</strong> une collaboration estnécessaire entre tous <strong>le</strong>s acteurs (États, acteurs locaux, OI, ONG…).En outre, <strong>le</strong>s États doivent s'impliquer davantage <strong>pour</strong> la mise en œuvre decette nouvel<strong>le</strong> forme de sécurité. Ils doivent tout d'abord s'approprier <strong>le</strong>concept et s'engager fermement dans sa protection en étant de ferventsdéfenseurs des droits et libertés fondamentaux. Seul cet engagement desÉtats peut permettre de promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité sur <strong>le</strong>continent et dans <strong>le</strong> monde.La protection de la sécurité de lʼHumain apparaît donc comme une passerel<strong>le</strong><strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement durab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> rayonnement autrement du continent africain.Eustache AKONO ATANGANEa fait son doctorat en Sécurité Inte rna tio -na<strong>le</strong> et Défense à lʼUniversité Jean Moulin,Lyon 3 (France). Aujourdʼhui il enseigne <strong>le</strong>sSciences Politiques et Relations Inter -nationa<strong>le</strong>s à lʼUniversité Yaoundé II auCameroun où il est aussi <strong>le</strong> Chef du Servicede la recherche. Secrétaire permanent duCentre de Recherche d'Études Politiqueset Stratégiques (CREPS) et Professeurinvité à lʼUniversité Officiel<strong>le</strong> de Bukavu(République Démocratique du Congo) etauteur de nombreuses publications.107


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSÉANCE PLÉNIÈRE N° IVMercredi 10 novembre 2010 - MatinThème de la séance : la réforme du secteur de sécuritéPANEL 6 « QUEL MODÈLE D’ARMÉE POUR L’AFRIQUE DE L’OUEST »2.12 Intervention du Général de corps d’armée Abdoulaye FALL, Chefd’état-major général des armées, SénégalQuel(s) modè<strong>le</strong>(s) d’Armée(s) <strong>pour</strong> l’Afrique de l’OuestRésumé : The intervention of General Abdoulaye FALL treats the question whichkind of army was needed for Western Africa. The first part is dedicated to thedevelopment of the armed forces in Western Africa since their independence,especially of the Swenega<strong>le</strong>se Forces, who ce<strong>le</strong>brated their 50th anniversary thatyear. General FALL states that the process of maturing has been particularlydifficult for the security and armed forces in the entire sub-region. The difficultpast is now being replaced by a future with new threats and therefore the differentstates and international communities are urged to redefine their securityconcept immediately. The devastating inner conflicts of Liberia and Sierra Leoneduring the 1990's have been a sad examp<strong>le</strong> for the need of change of type ofarmies. In the future, the armies should be an important agent for developmentand stability of the countries and the who<strong>le</strong> sub-region. General FALL names themain criteria for a new archetype of a Western African army. It should adhere totwo main conditions: being an agent for development, stability and nationalcohesion internally, and an agent for solidarity and peace outside the borders ofthe home country. The last part of the intervention is dedicated to the maine<strong>le</strong>ments promoting the change towards a modern army. A good and profoundformation plays a basic and important ro<strong>le</strong> in this process of change. The missionsof the army in development matters could be numerous; one main field is theservice dedicated to the health of the civil population and providing aid for thedevelopment of a prosperous economy and stab<strong>le</strong> social conditions. Anotherbasic pillar for the modern armies of Western Africa will be the participation ininternational humanitarian missions, to be seen as agents for peace and internationalsolidarity.Mesdames, Messieurs,Chef d’Etat-major Généraldes Armées SénégalaisesLʼannée 2010 a marqué la célébration du cinquantenaire de lʼaccession à la souveraineténationa<strong>le</strong> et internationa<strong>le</strong> de la plupart des Etats africains, particulièrementceux francophones de lʼAfrique de lʼOuest. El<strong>le</strong> correspond éga<strong>le</strong>ment aucinquantenaire de <strong>le</strong>urs forces de défense et de sécurité (FDS) car dans lʼaffirmationde cette indépendance, la création dʼune armée a été considérée commelʼun des symbo<strong>le</strong>s de lʼeffectivité de la souveraineté et de la reconnaissance desnouveaux Etats sur la scène politique internationa<strong>le</strong>.A lʼheure du bilan qui inéluctab<strong>le</strong>ment accompagne de tel<strong>le</strong>s commémorations,il est donc opportun de revisiter la trajectoire suivie par <strong>le</strong>s FDS en Afrique delʼOuest et <strong>le</strong>ur impact sur nos Etats au cours de ces cinquante dernières années.Ceci passe tout dʼabord par un examen critique de <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> dans la période immédiatepost indépendance qui a modelé <strong>le</strong>ur image dans la sous-région. Ensuite,il conviendra dʼanalyser <strong>le</strong>s ruptures dans lʼenvironnement national etinternational qui ont modifié chez <strong>le</strong>s citoyens <strong>le</strong>ur perception du concept de sécurité<strong>pour</strong> enfin déterminer un modè<strong>le</strong> dʼarmée qui répond <strong>le</strong> mieux à lʼéventaildes besoins actuels de nos sociétés.108


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières1 - Les forces de défense et de sécurité en Afrique de l’Ouest :une maturation diffici<strong>le</strong>Bâties sous <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> légué par la puissance colonia<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s jeunes armées ontété fortement façonnées dans lʼapproche de <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> dans la société par cet héritageet <strong>le</strong> contexte international de lʼépoque, marqué par la Guerre froide. Aussi,la fonction « coercitive » ou « répressive » a été, dans cette période incertaine,un de <strong>le</strong>urs principaux attributs. Cette capacité de coercition visait à satisfairelʼune des missions fondamenta<strong>le</strong>s de lʼArmée, à savoir la protection du jeuneEtat contre tout agresseur externe ; la répression étant réservée à usage interneaux fins de sauvegarder <strong>le</strong>s régimes politiques nouvel<strong>le</strong>ment établis.En outre, dans lʼentreprise dʼédification nationa<strong>le</strong>, lʼArmée, suivant la volontédes autorités politiques, a eu vocation à favoriser, par la diversité de sa compositionet sa représentativité, lʼémergence dʼune conscience nationa<strong>le</strong> et lacohésion de sociétés fragi<strong>le</strong>s.Dès lors, <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>s dévolus aux forces de défense et de sécurité (FDS) <strong>le</strong>s ontplacées au cœur de lʼappareil dʼEtat à tel point quʼel<strong>le</strong>s furent progressivementconsidérées comme lʼunique institution organisée et disciplinée avec <strong>le</strong>scapacités nécessaires de consolider <strong>le</strong>s nations nouvel<strong>le</strong>ment indépendantes.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARIl nʼest pas donc surprenant que cette immixtion accrue dans la sphère politiqueait profondément bou<strong>le</strong>versé la nature des relations civilo-militaires classiques,fondées sur <strong>le</strong> sacro-saint principe de la subordination du militaire àlʼautorité civi<strong>le</strong>. A lʼopposé, <strong>le</strong> paradigme dominant, qui émerge dès <strong>le</strong> milieudes années 60, est la prise de contrô<strong>le</strong> du pouvoir politique par <strong>le</strong>s FDS. Cʼestlʼépoque des coups dʼEtat et des régimes militaires avec une organisation politiquebasée sur <strong>le</strong> parti unique et lʼexercice par <strong>le</strong>s armées de fonctions administrativeset économiques traditionnel<strong>le</strong>ment dévolues à dʼautres corps delʼEtat, aux associations politiques et aux groupes économiques, et la militarisationdu traitement des problèmes dʼordre public.Ces facteurs expliquent la perception globa<strong>le</strong>ment négative de lʼArmée de lapart des populations et de la société civi<strong>le</strong>, soumis à un niveau de vio<strong>le</strong>nceconsidérab<strong>le</strong> et parallè<strong>le</strong>ment un affaiblissement interne de lʼinstitution militaire,minée par <strong>le</strong> factionnalisme et lʼeffondrement de lʼautorité (successionde coups dʼétat militaire) et contesté par lʼémergence dʼautres acteurs armés(mouvements armés sécessionnistes, etc.).Ce tab<strong>le</strong>au succinct reflète parfaitement la situation en Afrique de lʼOuest dans<strong>le</strong>s années 60 à 80, à lʼexception notab<strong>le</strong> du Sénégal et de la Côte dʼIvoire.Le paradigme dominant perdure jusquʼau début des années 90 lorsquʼunemutation géopolitique majeure, la fin de la Guerre froide, change radica<strong>le</strong>ment<strong>le</strong> paysage politique international. Orphelines de <strong>le</strong>urs soutiens et de <strong>le</strong>ursjustifications dʼordre idéologique, frappées par <strong>le</strong> dur contexte économiquede pays sous perfusion des institutions internationa<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s Armées se trouventbruta<strong>le</strong>ment confrontées à des interrogations sur <strong>le</strong>ur place dans une sociétéaspirant à la démocratie et davantage de liberté. La réponse se trouve alorsdans des processus de démocratisation, quoiquʼimparfaits, qui conduisent auretour progressif des militaires dans <strong>le</strong>urs casernes.2 - Ruptures et nouvel<strong>le</strong>s menaces : vers une redéfinition du conceptsécuritéAujourdʼhui, en dépit de quelques reculs, il est largement accepté que lʼexercicedu pouvoir par une autorité civi<strong>le</strong> léga<strong>le</strong>ment élue doit être la norme dansnos régimes politiques. Toutefois, lʼavènement de régimes démocratiques nʼapas partout entraîné la baisse de la vio<strong>le</strong>nce entre <strong>le</strong>s forces de sécurité et <strong>le</strong>s109


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainepo pulations. Au contraire, <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité ont été considérées,dans certaines circonstances, comme des vecteurs dʼinstabilité oupire la principa<strong>le</strong> source dʼinsécurité.Parallè<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s menaces ont considérab<strong>le</strong>ment évolué. Alors que <strong>le</strong> spectrede la guerre inter étatique planait sur <strong>le</strong>s jeunes Etats en raison de divergencesidéologiques ou de revendications territoria<strong>le</strong>s, il est apparu très vitequʼel<strong>le</strong> ne constituait pas la principa<strong>le</strong> menace. Les conflits internes ont rapidementoccupé lʼessentiel de <strong>le</strong>urs ressources, soit dans <strong>le</strong> cadre du maintiende lʼordre ou du rétablissement de lʼautorité de lʼEtat dans des territoirescontestés par des mouvements armés. La décennie sanglante des années90 en Afrique de lʼOuest, notamment avec <strong>le</strong>s conflits meurtriers au Libéria eten Sierra Léone, témoigne de cette situation et de la déliquescence desforces de sécurité dans certains pays. Lʼinstabilité chronique qui sʼinstal<strong>le</strong>, estexacerbée par lʼémergence de menaces plus diffuses, souvent du fait dʼacteursnon étatiques : terroristes, bandes armées, trafiquants de drogue,dʼarmes, de personnes etc.Alors quʼel<strong>le</strong>s étaient organisées de manière classique, dans <strong>le</strong>ur formation, <strong>le</strong>urdoctrine et <strong>le</strong>ur équipement, <strong>pour</strong> mener la batail<strong>le</strong> conventionnel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s FDS seretrouvent désarmées face à ces menaces asymétriques qui ont une résonanceinternationa<strong>le</strong> et appel<strong>le</strong>nt donc des solutions dépassant <strong>le</strong> territoire et <strong>le</strong>s capacitésdʼun seul Etat. Il en résulte, en partie, la montée en puissance des organisationsde sécurité col<strong>le</strong>ctive <strong>pour</strong> prendre en compte la dimension régiona<strong>le</strong>des crises. Les projets dʼintégration politique et économique, déjà initiés, connaissentaussi une mise en œuvre accélérée (CEDEAO, UA).La compréhension de ces phénomènes a poussé à une réf<strong>le</strong>xion globa<strong>le</strong> surlʼorigine de ces menaces et <strong>le</strong>s conditions favorisant <strong>le</strong>ur développement. Desproblématiques tel<strong>le</strong>s que la pauvreté, <strong>le</strong> chômage massif des jeunes, lʼéducation,<strong>le</strong>s maladies, lʼenvironnement, traditionnel<strong>le</strong>ment non associées à lasécurité, sont davantage prises en considération dans la prévention ou la résolutiondes crises. La corrélation entre sécurité et développement devientbien établie. Tout ceci aboutit à lʼémergence du concept de sécurité humaine,plus englobant que celui de défense, car prenant en compte outre la sécuritéphysique de lʼEtat, cel<strong>le</strong> du citoyen <strong>pour</strong> quʼil soit libre de la peur « free fromfear » mais éga<strong>le</strong>ment la satisfaction de ses droits politiques, sociaux et économiquesafin quʼil soit à lʼabri du besoin « free from need ».Les Armées sont donc interpellées par ces nouveaux défis, très comp<strong>le</strong>xes, dansun contexte de ressources budgétaires très limitées dans chacun de nos pays.Au vu des besoins de base pressants des populations, la question, certes provocatrice,peut se poser sur lʼutilité de consacrer des ressources financières àlʼentretien dʼune force militaire. En autres termes, <strong>le</strong>s FDS sont mises au défi dedémontrer de quel<strong>le</strong> manière el<strong>le</strong>s peuvent être rentab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> la société.Un nouveau modè<strong>le</strong> d’armée en Afrique de l’Ouest, agent dedéveloppement et de la stabilitéPréalab<strong>le</strong>sTout modè<strong>le</strong> dʼarmée réaliste doit partir dʼune appréciation des réalités économiquesdans la plupart de nos pays, à savoir la faib<strong>le</strong>sse des ressources disponib<strong>le</strong>s,dʼoù des choix cornéliens sur <strong>le</strong>s priorités à mettre en avant. Il sʼagira demettre en œuvre une forme de principe de juste suffisance, c'est-à-dire, de bâtirdes outils de défense à la mesure des capacités et des ambitions des pays dela sous-région. Il faudra peut être même envisager que <strong>le</strong>s FDS soient appeléesà faire plus avec moins de ressources.110


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresIl est éga<strong>le</strong>ment nécessaire de <strong>le</strong>ver toute équivoque et inquiétude sur lʼexpansiondu rô<strong>le</strong> de lʼArmée dans des secteurs dʼactivité du ressort dʼautres acteurs.Les FDS ne peuvent avoir vocation à se substituer par exemp<strong>le</strong> àlʼEducation nationa<strong>le</strong> ou au secteur public ou privé dans lʼaccomplissement de<strong>le</strong>urs fonctions traditionnel<strong>le</strong>s.Critères <strong>pour</strong> un nouveau modè<strong>le</strong> d’armée en Afrique de l’OuestNos Etats ont tous un projet politique, économique et social inscrit dans destextes fondateurs, constitutions et autres textes juridiques majeurs, qui fixentnotre philosophie politique (architecture institutionnel<strong>le</strong>, obligations internationa<strong>le</strong>s,etc.) et une certaine vision de lʼordre économique et social (accès àla santé, lʼéducation, éradication de la pauvreté, égalité des citoyens, genre,etc.). Ce projet ne peut être réalisé sans lʼinstauration dʼun environnement desécurité favorab<strong>le</strong>. Les FDS doivent y <strong>pour</strong>voir par lʼexercice de la missionrégalienne de défense de lʼintégrité du territoire et de protection des personneset des biens qui demeure <strong>le</strong>ur principa<strong>le</strong> raison dʼêtre. La responsabilitéde protéger <strong>le</strong>s populations implique <strong>le</strong> respect scrupu<strong>le</strong>ux des droitsdes citoyens et des règ<strong>le</strong>s internationa<strong>le</strong>s des droits de lʼHomme, et <strong>le</strong> devoirdʼassistance en cas de calamités naturel<strong>le</strong>s et autres catastrophes.Du point de vue politique, <strong>le</strong> respect des principes de droit garantissant lʼapplicationde ces textes doit être au cœur de lʼaction des FDS. Le premier fondementen est lʼacceptation sans réserve du contrô<strong>le</strong> démocratique des forcesarmées. Il comporte aussi bien la subordination au pouvoir exécutif que la supervisiondes FDS par la représentation nationa<strong>le</strong>. La notion dʼarmée républicaine,assujettie à un pouvoir civil légitime et légal, prend tout son sensdans un tel cadre. A lʼextérieur, el<strong>le</strong> doit prolonger lʼaction diplomatique delʼEtat, en participant à la satisfaction des ses engagements internationaux,notamment en ce qui concerne lʼintégration en matière de défense et de sécurité,et la solidarité internationa<strong>le</strong>.Ce projet pose éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s impératifs sécuritaires à atteindre. Il fixe ainsi <strong>le</strong>cadre général qui doit orienter lʼélaboration dʼune stratégie nationa<strong>le</strong> ou dʼunepolitique globa<strong>le</strong> de sécurité. La définition dʼun tel<strong>le</strong> politique doit être une exigence<strong>pour</strong> toutes <strong>le</strong>s FDS car el<strong>le</strong> permet de garantir la cohérence entre <strong>le</strong>smenaces, <strong>le</strong>s missions, <strong>le</strong> cadre dʼintervention et <strong>le</strong>s capacités à détenir. El<strong>le</strong>participe à une claire définition du rô<strong>le</strong> de chacune de forces de sécurité et desmécanismes de coopération. Ainsi, lʼécueil de la militarisation du règ<strong>le</strong>mentdes troub<strong>le</strong>s à lʼordre public, qui ont tant participé à écorner lʼimage desArmées en Afrique, <strong>pour</strong>rait être surmonté.Sur <strong>le</strong> plan économique, <strong>le</strong>s FDS ouest-africaines doivent mettre à profit <strong>le</strong>savantages comparatifs quʼel<strong>le</strong>s détiennent. Il sʼagit dʼune part de la présencedʼune ressource humaine de qualité à tous <strong>le</strong>s niveaux de conception et dʼexécution,disponib<strong>le</strong> et disciplinée, et dʼautre part de la détention dʼéquipementspolyva<strong>le</strong>nts. El<strong>le</strong>s peuvent, par ce biais, participer à lʼexécution de lʼagenda dedéveloppement arrêté par lʼautorité politique.Du point de vue social, <strong>le</strong>s FDS doivent continuer à être un des creusets de laNation. Au même titre que lʼEducation nationa<strong>le</strong>, el<strong>le</strong>s sont un canal par <strong>le</strong>quel<strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs de citoyenneté peuvent être promues. Par <strong>le</strong> recrutement universel,el<strong>le</strong>s constituent lʼun des lieux de brassage privilégiés au niveau de la société.Leur légitimité aux yeux des populations passe donc impérativement par la représentativitéde tous <strong>le</strong>s segments de la société en <strong>le</strong>ur sein, indifféremment delʼappartenance géographique, du genre, de la confession religieuse, etc.Il est uti<strong>le</strong> dʼinsister particulièrement sur <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> économique et social des FDScar ce sont ces questions qui sont au cœur des problématiques dʼintérêt vitalForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR111


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s citoyens. Lʼimpact des FDS dans ces domaines est crucial <strong>pour</strong> mode<strong>le</strong>r<strong>le</strong> prisme sous <strong>le</strong>quel el<strong>le</strong>s sont vues en Afrique de lʼOuest car cʼest àces deux aspects que se mesurent <strong>le</strong> plus concrètement lʼeffectivité et laqualité du lien Armée-Nation, « compris comme lʼinteraction positive des militairesavec lʼenvironnement civil ».En résumé, <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> d’armée esquissé devrait réunir <strong>le</strong>s conditionssuivantes :- Agent de développement, de la stabilité et de la cohésion nationa<strong>le</strong> en interne ;- Agent de la solidarité et de la paix hors des frontières.Leviers du changement : <strong>le</strong> cas des forces de défense et desécurité au SénégalUn certain nombre de <strong>le</strong>viers peuvent être actionnés <strong>pour</strong> remplir ces conditions.Lʼexemp<strong>le</strong> des forces armées sénégalaises, à travers <strong>le</strong> concept Armée-Nation, fournit des indications sur <strong>le</strong>s axes dʼeffort à privilégier <strong>pour</strong> laparticipation des FDS à la sécurité humaine. Il sʼagit dʼune option volontariste,établie dès <strong>le</strong>s indépendances. Le président SENGHOR, en 1963, sʼexprimaiten ces termes, dans un artic<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> thème Armée et Nation :« Nous apprécions la participation active et directe de l’Armée dans <strong>le</strong> développementdu pays à travers la mise à disposition d’une main d’œuvre quine coûte rien à l’Etat. Ces unités, dans <strong>le</strong>urs travaux, seront associées à destechniciens bien formés, ayant la maîtrise des machines <strong>le</strong>s plus modernes denotre époque. Notre Armée de l’Air assure <strong>le</strong> transport vers <strong>le</strong>s zones <strong>le</strong>s plusdiffici<strong>le</strong>s d’accès et <strong>le</strong>s évacuations médica<strong>le</strong>s d’urgence. La Marine surveil<strong>le</strong><strong>le</strong> littoral, <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>uves et protège nos ressources halieutiques ».Plusieurs aspects sont à souligner dans cette déclaration : <strong>le</strong>s avantages queconfèrent aux FDS <strong>le</strong>urs ressources humaines, à travers <strong>le</strong> vo<strong>le</strong>t main dʼœuvreet formation, et <strong>le</strong>urs capacités matériel<strong>le</strong>s, avec <strong>le</strong>s équipements, et la naturedes missions quʼel<strong>le</strong>s peuvent entreprendre au bénéfice de la population.Le rô<strong>le</strong> de la FormationLa formation professionnel<strong>le</strong>, mora<strong>le</strong> et éthique doit être érigée en priorité<strong>pour</strong> forger notre modè<strong>le</strong> dʼarmée.La formation professionnel<strong>le</strong> couvre aussi bien la formation militaire que lʼapprentissagedʼun métier. Sʼagissant du premier point, il permet de donner <strong>le</strong>ssavoir-faire techniques nécessaires à lʼexercice du métier de soldat. Pour <strong>le</strong>deuxième point, il sʼagit de préparer la réinsertion socia<strong>le</strong> des jeunes militaireset de participer à la lutte contre <strong>le</strong> chômage qui frappe la jeunesse. Par exemp<strong>le</strong>,dans <strong>le</strong>s forces armées sénégalaises, <strong>le</strong> programme de la Formation deQualification à un Emploi (F.Q.E), qui offre une formation dans 15 métiers, àchacun des militaires du contingent retournant dans son foyer, assure unetel<strong>le</strong> fonction. Les FDS peuvent ainsi remplir <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> de formation tout en assurant<strong>le</strong>ur mission de promotion socia<strong>le</strong> de <strong>le</strong>ur personnel.La formation civique, mora<strong>le</strong> et éthique a <strong>pour</strong> objet de renforcer la connaissancechez <strong>le</strong> militaire de ses obligations. Sous ce registre, <strong>le</strong> principe de subordinationà lʼautorité civi<strong>le</strong> et du service exclusif à lʼEtat doit êtreconstamment rappelé dans <strong>le</strong>s cursus de formation et appliqué de manièreexemplaire dans nos rapports à lʼautorité. Il en est de même du respect desinstitutions et des restrictions statutaires qui doivent sʼappliquer au soldat, àsavoir la neutralité politique et <strong>le</strong> devoir de réserve, <strong>pour</strong> éviter son interventionou <strong>le</strong> détournement de la force en dehors de son champ de compétence.Lʼélaboration dʼun Statut du Militaire peut permettre de clarifier <strong>le</strong>s droits et112


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresobligations liés à la spécificité du métier militaire aussi bien <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s membresdes forces de sécurité que <strong>pour</strong> lʼenvironnement extérieur.Quant à la formation mora<strong>le</strong> et éthique, el<strong>le</strong> doit particulièrement développerla conscience du militaire <strong>pour</strong> des rapports apaisés avec <strong>le</strong>s citoyens. Lʼaccentsera mis sur <strong>le</strong> respect des droits de lʼHomme et la responsabilité de protectionque <strong>le</strong>s soldats ont envers eux. Des manuels comme <strong>le</strong>s codesdʼéthique ou de conduite du Soldat, regroupant des règ<strong>le</strong>s simp<strong>le</strong>s de comportementet de savoir-être, sont appropriés <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur vulgarisation. Cette formationpeut se faire en partenariat avec la société civi<strong>le</strong>, qui est une partieprenante dans ces questions, et avec laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s FDS <strong>pour</strong>raient trouveravantage à rechercher une meil<strong>le</strong>ure compréhension mutuel<strong>le</strong>.Missions de l’armée en tant qu’agent du développementA nouveau, il convient dʼinsister quʼil ne sʼagit pas dʼorganiser <strong>le</strong>s FDS enstructure de développement et dʼassistance mais de profiter de capacités existanteset dʼériger des organisations spécifiques <strong>pour</strong> appuyer ces missions.Dans ce cadre, <strong>le</strong>s FDS peuvent être soit un instrument clé ou, par nécessité,avoir <strong>le</strong> <strong>le</strong>ad dans la réalisation de certaines tâches.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLe premier <strong>le</strong>vier de mise en œuvre est celui de la ressource humaine dequalité associée à un équipement spécialisé. Au Sénégal, <strong>le</strong> Service de Santéet <strong>le</strong> Génie militaire en sont <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures illustrations. Ces entités permettentà lʼautorité politique de pouvoir assigner aux FDS de grandes tâches socia<strong>le</strong>set économiques.Dans <strong>le</strong> domaine de la santé, 80% des activités préventives et curatives du Servicede Santé des Armées (SSA) sont dédiées aux populations, et près de 59%de ses personnels servent en position hors cadre. Le SSA assume une véritab<strong>le</strong>mission de service public en assurant aux populations civi<strong>le</strong>s, souvent dans <strong>le</strong>szones <strong>le</strong>s plus reculées, la continuité des soins, et en participant aux grandescampagnes de prévention ou de lutte contre <strong>le</strong>s grandes endémies.Quant au Génie militaire, il a été lʼinstrument privilégié de la participation desArmées au développement économique et social de notre pays. Il a joué unrô<strong>le</strong> majeur dans <strong>le</strong> désenclavement des zones <strong>le</strong>s plus reculées du territoireet a, à son actif, de nombreuses réalisations dans <strong>le</strong> domaine des travaux publicset hydro agrico<strong>le</strong>s, des infrastructures à caractère social, de la protectioncivi<strong>le</strong> et de lʼenvironnement. Ce bilan se traduit, entre autres, par plus de centcinquante (150) kilomètres de routes bitumées, plus de mil<strong>le</strong> (1 000) kilomètresde pistes latéritiques, soixante quinze (75) kilomètres de digues, plus detrois mil<strong>le</strong> (3 000) hectares aménagées etc., depuis 1962.Dʼautres exemp<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>raient être cités. Le rô<strong>le</strong> de la Marine dans la protectionde notre zone maritime et de nos ressources halieutiques contribue directementà la sauvegarde de notre principa<strong>le</strong> source de revenus. Lʼexistencede ces capacités a donc un impact direct sur la croissance économique denotre pays.Le deuxième <strong>le</strong>vier est la réforme de lʼorganisation avec la mise en place destructures militaires à impact économique et social.LʼAgence de Réinsertion socia<strong>le</strong> des Militaires (ARSM) mise sur pied au seindes armées sénégalaises vise un tel objectif en lançant dʼimportants programmesagro-industriels qui permettent de réinsérer <strong>le</strong>s militaires à la retraitemais éga<strong>le</strong>ment de contribuer à lʼatteinte des objectifs <strong>pour</strong>suivis par lʼEtat enmatière dʼ autosuffisance alimentaire.Dans <strong>le</strong> domaine de lʼassistance, la constitution de structures dʼappui à113


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainelʼautorité civi<strong>le</strong>, plus particulièrement dans <strong>le</strong>s cas de calamités naturel<strong>le</strong>s(inondations, sinistres) et de catastrophes industriel<strong>le</strong>s, peut être sourcedʼefficacité. Les moyens de lʼadministration civi<strong>le</strong> étant limités, <strong>le</strong>s FDS sontsystématiquement appelées à jouer un rô<strong>le</strong> important dans la maitrise de cesincidents. Afin de pouvoir apporter une réponse immédiate et coordonnée, <strong>le</strong>sArmées sénégalaises ont créé des détachements de réaction aux situationsdʼurgence (DERESU), équipés et entrainés, qui <strong>pour</strong>raient être mis àdisposition sur lʼensemb<strong>le</strong> du territoire dans de courts préavis. Il sʼagit dʼunexemp<strong>le</strong> concret de la prise en charge par <strong>le</strong>s FDS de préoccupationsquotidiennes des populations.Dans <strong>le</strong> contexte financier diffici<strong>le</strong> de nos pays, <strong>le</strong>s missions socia<strong>le</strong>s etéconomiques des Armées sont appelées à croître. Le modè<strong>le</strong> dʼarmée àétablir devrait donc p<strong>le</strong>inement prendre la mesure dʼune tel<strong>le</strong> entreprise danssa politique de formation et dʼacquisition de capacités.Missions en tant qu’agent de la paix et de la solidarité internationa<strong>le</strong>La plupart de nos Etats appel<strong>le</strong>nt de <strong>le</strong>urs vœux une intégration plus étroitede nos politiques, en particulier dans <strong>le</strong>s domaines de la défense et de lasécurité. Les FDS sont au premier plan dans la réalisation de ces objectifs depolitique étrangère. Lʼanalyse de notre environnement sécuritaire et <strong>le</strong>caractère transnational des menaces montrent que <strong>le</strong> premier système dedéfense de nos Etats ne réside plus aux frontières, qui perdent progres -sivement de <strong>le</strong>ur importance politique, mais plutôt dans la stabilité du voisinet même au delà.Aussi, la participation active aux structures et missions organisées par <strong>le</strong>sinstitutions de sécurité régiona<strong>le</strong> (CEDEAO) ou internationa<strong>le</strong>s (UA, ONU)doit être une mission première des FDS. Pour <strong>le</strong> cas de lʼAfrique de lʼOuest,la contribution à la Force en attente constitue un des paramètres majeurs àprendre en compte dans lʼorganisation et lʼéquipement de nos forces.ABDOULAYE FALLest Général de Corps dʼArmée et lʼactuelChef dʼEtat-major Général desArmées sénégalaises (CEMGA).Diplômé de l'Académie roya<strong>le</strong> militairede Meknès au Maroc en 1975 et brevetéde lʼÉco<strong>le</strong> supérieure de guerrede la République fédéra<strong>le</strong> dʼAl<strong>le</strong>magneen 1994 il est Commandant en Secondde la Force expéditionnaire du Sénéga<strong>le</strong>n 1998, lors de lʼopération GABOUen Guinée-Bissau. De 1999 à 2001, ilsert comme attaché militaire au Ro -yau me du Maroc.De mars 2004 au 2 avril 2006, il a étécommandant de la Force de lʼOpé -ration des Nations Unies en Côted'Ivoire (ONUCI) et de 2001 à 2003, ila occupé la fonction du Chef dʼEtatmajorparticulier du Président de laRépublique (Sénégal) Abdoulaye Wade.En 2006, il est nommé Chef d'État-Major Général des Armées (CEMGA).Le Général Fall est titulaire deplusieurs décorations nationa<strong>le</strong>s etétrangères dont la Légion d'honneur.En conclusion, cet exposé sur <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> dʼarmée en Afrique de lʼOuest sʼestattaché à montrer <strong>le</strong> retour sur investissement que <strong>le</strong>s FDS peuvent réaliserau profit de la société, en occultant à dessein <strong>le</strong>s missions classiques de défenseet de sécurité. Il sʼagissait surtout de présenter lʼimpact positif quʼel<strong>le</strong>s<strong>pour</strong>raient avoir sur <strong>le</strong>s problématiques centra<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> <strong>le</strong> développement denos pays et la réduction de la pauvreté, et donc dans la promotion de la sécuritéhumaine.Les engagements à respecter <strong>pour</strong> éviter un retour à lʼimage négative desFDS demeurent un défi <strong>pour</strong> la plupart de nos armées et de nos Etats. Unedes voies de succès porte sur lʼeffort à mener en direction non du militaire entant que membre des FDS mais du soldat en tant que citoyen soumis auxmêmes difficultés que ses compatriotes tout en subissant des sujétionslourdes liées à son état. En ce sens, lʼamélioration de <strong>le</strong>urs conditions socia<strong>le</strong>sdoit être une priorité du Commandement, ce qui participerait assurément àrenforcer <strong>le</strong>ur efficacité dans <strong>le</strong>ur vocation à garantir la sécurité et <strong>le</strong> bien-êtredes populations.114


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2.13 Intervention du Général Pierre M. JOANA, Conseil<strong>le</strong>r Spécial Paixet Sécurité en Afrique auprès de l'Union EuropéenneRésumé : In his intervention, General Pierre M. JOANA, Counselor at the EuropeanUnion, designs his image for an archetype of a western African army. In thebeginning, he points out that in the entire sub-region of western Africa, only theCape Verde Islands and Senegal never experienced a coup initiated by the armedforces or a so-cal<strong>le</strong>d „military democracy“. In the following part, General JOANApresents some basic caracteristics of the western African armies. The biggest differencesbetween them are the french, respectively anglo-saxon backgroundsdue to their different colonial influences. These differences are c<strong>le</strong>arly visib<strong>le</strong>, notonly as far as their uniforms and ceremonies are concerned, also the attitudes andrelations of command are basically different.The next part of his intervention is dedicated to the different types of missions afuture western African army might face. The main caracteristics of an archetypearmed forces model for western Africa are the following: A professional army, buta symbol of national cohesion. An army whose commanders will keep an importantro<strong>le</strong> in politics, until e<strong>le</strong>cted civilian politicians may occupy all mandates. Itshould be an army that is more adapted to the reality of the strategic situation ofthe different states. The following tasks should be fulfil<strong>le</strong>d in order to set up moderndemocratic armed forces in western Africa: Control and identification of thetroops, guidelines for the functions to proceed, a formation plan for the personnel,an equipment plan, a garrison plan and infrastructure policy etc. Many african armiesstill have not engaged these necessary reforms or revisions. This workneeds to be done to be ab<strong>le</strong> to have a solid ground for a stab<strong>le</strong> structure.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARQuel(s) modè<strong>le</strong>(s) d’Armée(s) <strong>pour</strong> l’Afrique de l’Ouest (2)Quel modè<strong>le</strong> dʼarmée <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼOuest ? Cette question peut paraîtresurprenante dans la mesure où une armée est dʼabord adaptée aux besoins dedéfense dʼun pays, en fonction de sa posture politique et de son environnementstratégique, et non à ceux dʼun ensemb<strong>le</strong> régional. Alors que cette question sepose réel<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> lʼUnion Européenne, sans vraiment trouver de réponse, laposerait-on par exemp<strong>le</strong> <strong>pour</strong> lʼAmérique Centra<strong>le</strong> ?Pourtant <strong>le</strong> fait de la poser nʼest pas anodin. Cʼest peut être parce que lʼAfriquede lʼOuest mérite que lʼon sʼinterroge dans ce sens. Cʼest peut-être parce que <strong>le</strong>smilitaires de lʼAfrique de lʼOuest, héritiers d'une longue tradition de courage, ontjoué depuis <strong>le</strong>s indépendances un rô<strong>le</strong> assez particulier dans la vie des Etats :seuls <strong>le</strong> Sénégal et <strong>le</strong> Cap Vert nʼont connu ni coup dʼétat militaire, ni « démocratiemilitaire ». Mais cʼest peut-être aussi parce que la période historique danslaquel<strong>le</strong> nous nous trouvons, après toutes ces turbu<strong>le</strong>nces, est marquée parlʼémergence de classes politiques de grande qualité, lʼapparition - grâce à lʼeffortdʼéducation des populations et à une vraie liberté de la presse - de véritab<strong>le</strong>s sociétéscivi<strong>le</strong>s pas uniquement constituée de notab<strong>le</strong>s ou dʼune petite élite, la finde lʼinstrumentalisation des Etats africains au profit de la luttes des blocs, etenfin lʼarrivée dans <strong>le</strong>s postes de commandement de lʼarmée dʼun nouveau typedʼofficiers, formés à la fois en Afrique, et <strong>pour</strong> nombre d'entre eux, dans despays non africains très divers.Ces armées ont beaucoup de caractéristiques communes, et quelques différences.Issues de forces de sécurité de l'époque colonia<strong>le</strong>, el<strong>le</strong>s ont connu une évolutionsouvent bou<strong>le</strong>versée depuis cinquante ans, par une histoire si agitéequ'il est nécessaire de se demander maintenant <strong>pour</strong> quoi sont faites <strong>le</strong>s arméesd'Afrique de l'Ouest d'aujourd'hui.A partir de cette analyse, nous tenterons de définir de quel modè<strong>le</strong> d'armée adésormais besoin l'Afrique de l'Ouest.Etat-major de l’UnionEuropéenne115


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineQuelques caractéristiques des armées d’Afrique de l’Ouest :Il existe, dans <strong>le</strong>s armées de lʼ Afrique de l'ouest un héritage colonial en termed'organisation, de traditions, de traits identitaires, qui font qu'en fait, il y a beaucoupde différences entre <strong>le</strong>s armées issues de culture francophone (pays dedroit romain) et <strong>le</strong>s armées issues de culture anglo-saxonne (common law).Les différences sont bien entendu visib<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>s uniformes, <strong>le</strong>s cérémoniaux,<strong>le</strong>s attitudes, <strong>le</strong>s relations de commandement. Ces différences sontsurtout très importantes en raison de lʼexistence au sein des armées francophonesde ce que <strong>le</strong>s anglo-saxons considèrent comme une anomalie, laGendarmerie, alors que <strong>le</strong>s francophones la considèrent comme une granderichesse et la marque de l'engagement des armées auprès des populations.Mais, au-delà de cette différence juridique fondamenta<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s caractéristiquescommunes des armées d'Afrique de l'ouest sont <strong>le</strong>s plus nombreuses.Ces armées, hormis <strong>le</strong> Nigeria, sont des armées essentiel<strong>le</strong>ment terrestres,souvent <strong>pour</strong> des raisons financières, mais aussi parce quʼel<strong>le</strong>s sont héritièresdʼune longue tradition de contrô<strong>le</strong> du territoire et des populations.Ces armées, essentiel<strong>le</strong>ment « de terre », sont généra<strong>le</strong>ment peu riches.Lʼexamen des budgets de la défense, souvent considérés comme trop é<strong>le</strong>véspar rapport aux ressources de lʼEtat, montre que <strong>le</strong> ratio budget/effectif militairen'atteint pas 1200 $/ homme/an <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s moins riches et dépassediffici<strong>le</strong>ment 20 000 $ <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s mieux dotés (autour de 150 000 $ <strong>pour</strong> des arméeseuropéennes). La conséquence est dʼavoir des militaires pas assezpayés et mal équipés. Aussi, <strong>le</strong> fonctionnement interne des armées, ainsi d'ail<strong>le</strong>ursque des autres forces de sécurité en temps de paix ou de guerre, se caractérisesouvent par des processus dʼinformalisation, voire parfois decriminalisation.Ces armées sont aussi des armées de métier. La conscription, qui a joué en Europeun des facteurs essentiels de la construction des Nations nʼest ici pas possib<strong>le</strong>,à la fois <strong>pour</strong> des raisons économiques et stratégiques. Ces armées sontgénéra<strong>le</strong>ment respectées et souvent craintes par <strong>le</strong>urs propres concitoyens.Ces armées jouent éga<strong>le</strong>ment un rô<strong>le</strong> politique très important dans la vie de<strong>le</strong>urs pays. Les militaires dʼAfrique de lʼOuest sont des personnages reconnuscomme importants, y compris par <strong>le</strong> peup<strong>le</strong>. De nombreux chefs d'état del'Afrique de l'Ouest sont issus de l'armée, souvent à lʼissue de coups dʼétat,puis parfois, réélus démocratiquement. Il est bien évident, dans ces conditions,que lʼarmée dʼun pays où <strong>le</strong> chef de lʼEtat est issu de ses rangs joue unrô<strong>le</strong> politique important. En cas de divisions internes, <strong>le</strong>s militaires se voientcomme la seu<strong>le</strong> institution dont dépend lʼunité et la cohésion du pays.Ensuite plusieurs armées doivent gérer des processus de sortie de conflits internes,en intégrant des éléments "rebel<strong>le</strong>s", ce qui est un défi considérab<strong>le</strong>,moins en termes de réconciliation, quʼen terme dʼorganisation, car cela contribueà diminuer encore <strong>le</strong> ratio ressources/effectifs, appauvrit globa<strong>le</strong>ment lʼarmée,et pose des problèmes de formation et de relations de commandement.Enfin, ces armées sont désormais confrontées à des problèmes de répartitiondes rô<strong>le</strong>s avec <strong>le</strong>s autres « corps habillés » face à des menaces nouvel<strong>le</strong>s<strong>pour</strong> <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s el<strong>le</strong>s sont rarement adaptées : conflits asymétriques, luttescontre des groupes armés illégaux, lutte antiterroriste, participation à la luttecontre <strong>le</strong>s trafics dʼarmes, de drogue et dʼêtres humains. Bien que cela ne soitpas écrit dans <strong>le</strong>s constitutions, on constate que souvent, <strong>le</strong>s chefs militairesqui ont la prééminence sur <strong>le</strong>s autres corps habillés.116


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresDes armées <strong>pour</strong> quoi faire ?A partir de ce constat, il serait intéressant de se poser un certain nombre dequestions simp<strong>le</strong>s et de voir si la réalité quotidienne et la tradition africainepermettent dʼy répondre autrement quʼen appliquant <strong>le</strong>s principes prônés par<strong>le</strong>s grandes institutions internationa<strong>le</strong>s.La première question est de savoir si, en l'absence de véritab<strong>le</strong> conscription,<strong>le</strong>s armées ont un rô<strong>le</strong> à jouer dans la constitution et <strong>le</strong> maintien d'une cohésionnationa<strong>le</strong>? Ont-el<strong>le</strong>s un rô<strong>le</strong> majeur dans l'éducation des citoyens?Selon moi, la réponse est oui car lʼarmée est lʼorganisation la plus observéepar la population. Cela ne peut jouer que sous réserve de compter dans sesrangs une reproduction la plus exacte possib<strong>le</strong> de la diversité nationa<strong>le</strong> entermes dʼethnies, et de ne pas être concurrencée par une garde républicaineou présidentiel<strong>le</strong> mono ethnique, qui souvent devient un contre pouvoir militaire,comme ce fut très souvent <strong>le</strong> cas dans <strong>le</strong> passé. Faut-il <strong>pour</strong> autant quelʼarmée se voit confier une mission de formation professionnel<strong>le</strong>, de productionou de construction ? La réponse nʼest pas évidente et dépend essentiel<strong>le</strong>mentdu niveau de développement du pays et des ressources qui peuventy être consacrées.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLa seconde de ces questions est de savoir si <strong>le</strong> fait que lʼarmée soit dépositaireà la fois du symbo<strong>le</strong> et des moyens de la coercition au nom du pouvoirnational, lui confère un pouvoir politique ?On serait tenté de répondre définitivement non, mais ce serait faire fi de laréalité. Je pense que <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> politique joué par <strong>le</strong>s militaires ne doit pas sʼévaluerdans lʼabsolu. Sʼil est important, cʼest aussi parce que <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> politiquejoué par <strong>le</strong>s autorités civi<strong>le</strong>s nʼest pas toujours à la hauteur de ce quʼil devraitêtre, et parce que ces dernières abandonnent parfois un espace assez importantaux militaires. Il suffit de constater <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> que tiennent <strong>le</strong>s militairesAfricains dans la diplomatie nationa<strong>le</strong> ou internationa<strong>le</strong>. Ce qui est plus inquiétant,cʼest quʼen Afrique de lʼOuest en particulier, des chefs militaires sesont souvent sentis obligés de « servir dʼintermédiaire ou d'arbitre » <strong>pour</strong> intervenirdans la vie politique et se substituer à titre transitoire « à un pouvoirdevenu autocratique et abusif, en ayant <strong>le</strong> soutien de la population, surtout si<strong>le</strong> sang nʼa pas trop coulé, alors que la communauté internationa<strong>le</strong> et interafricainene sʼattache plus quʼà faire mol<strong>le</strong>ment pression, <strong>pour</strong> que ceshommes en uniforme ne sʼéternisent pas au pouvoir » 70 . Il y a véritab<strong>le</strong>mentlà une problématique à rég<strong>le</strong>r, et des efforts à faire de la part des militaires,mais peut-être aussi d'avantage, des politiques civils.La troisième question tourne autour du rô<strong>le</strong> des armées dans la sécuritéintérieure des états.Les armées détiennent en général la plupart des moyens et des effectifs quenécessitent la gestion des menaces actuel<strong>le</strong>s qui concernent l'Afrique del'ouest.Cette menace, ce sont <strong>le</strong>s activités des trafiquants, liés aux producteurs etexportateurs de drogue d'Amérique Centra<strong>le</strong> et du Sud, qui utilisent à la foisdes moyens de transport maritime et aérien <strong>pour</strong> livrer <strong>le</strong>urs produits dansdes pays de la région, puis <strong>le</strong>s exporter vers <strong>le</strong> nord, avec la complicité degroupes armés illégaux.Cette menace, ce sont ces groupes armés illégaux, eux-mêmes, aux motivationsplus économiques que politiques, souvent bien équipés et armés, mieuxpayés que <strong>le</strong>s forces de sécurité loca<strong>le</strong>s, évoluant soit en bordure maritime,soit dans des zones forestières, soit dans des espaces désertiques. L'histoirerécente démontre <strong>le</strong>s dégâts qu'ils peuvent commettre.70Hebdomadaire Afrique Asie –Avril 2010.117


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineCette menace ce sont aussi, et depuis peu de temps, des groupes terroristesévoluant dans de vastes espaces désertiques.Face à ces menaces, faut-il renforcer <strong>le</strong>s moyens des forces de sécuritéintérieure; police, gendarmerie, douanes? Faut-il envisager une implicationplus grande des armées ? Si oui comment organiser <strong>le</strong>s relations entre <strong>le</strong>sarmées et <strong>le</strong>s autres "corps habillés"?La quatrième question est cel<strong>le</strong> de la mission principa<strong>le</strong> des armées.Traditionnel<strong>le</strong>ment, il s'agit de faire face à une menace externe. Or, depuisquelques années, on voit bien que <strong>le</strong>s conflits conventionnels entre Etats africainsne constituent pas la principa<strong>le</strong> source de conflits. Les guerres sont plussouvent des guerres civi<strong>le</strong>s, même si, comme ce fut <strong>le</strong> cas en République Démocratiquedu Congo, el<strong>le</strong>s conduisent tous <strong>le</strong>s pays voisins à s'y impliquer.C'est plus la faib<strong>le</strong>sse des armées qui conduit à la guerre civi<strong>le</strong>, car mal entraînées,mal équipées, mal payées el<strong>le</strong>s deviennent indisciplinées et prêtes à toutes<strong>le</strong>s aventures. D'où l'intérêt de conduire de véritab<strong>le</strong>s analyses sur <strong>le</strong>s besoinsen sécurité du pays sans succomber aux sirènes des marchands de canons,toujours prêts à vendre des équipements coûteux, peu adaptés à une menacemal évaluée, dont la charge budgétaire accroît la paupérisation des soldats, quideviennent par là la principa<strong>le</strong> source d'insécurité.La cinquième question est cel<strong>le</strong> de la participation des armées à des opérationsmultinationa<strong>le</strong>s. Dans ce domaine, deux logiques apparaissent.La première, qui devrait être la seu<strong>le</strong>, consiste à considérer que beaucoup desconflits africains peuvent être résolus par une approche régiona<strong>le</strong> ou continenta<strong>le</strong>(CEDEAO, UA), et qu'il faut donc que chaque Etat se prépare à participeraux systèmes de sécurité col<strong>le</strong>ctive africains. Cette logique peut d'ail<strong>le</strong>urs êtreétendu aux autres conflits dans <strong>le</strong> monde sous responsabilité des Nations Unies.Dans ce cas, il s'agira de développer de nouveaux savoir faire individuels, etpeut-être adapter l'organisation d'une partie de l'armée.Une autre logique consiste à envoyer dans des opérations multinationa<strong>le</strong>s unepartie des forces armées, soit <strong>pour</strong> éloigner des soldats turbu<strong>le</strong>nts ou gérer dessur effectifs, soit <strong>pour</strong> améliorer <strong>le</strong>s revenus des participants et compenser ainsi<strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>sses budgétaires. Dans ce cas on cherchera davantage à y envoyerdes individus que des capacités militaires, <strong>le</strong> but étant surtout de distraire <strong>le</strong>s militairesdes affaires intérieures, et de <strong>le</strong>s faire payer par d'autres.Enfin, la dernière question qu'il faut se poser est cel<strong>le</strong> de savoir si la répartitiondes forces armées (Terre - Air - Mer - Gendarmerie - Service Civique), ainsi que<strong>le</strong>ur "sty<strong>le</strong>" et <strong>le</strong>urs savoir faire, sont vraiment adaptés <strong>pour</strong> répondre aux cinqquestions précédentes.La réponse est d'autant plus délicate, que la mise en œuvre de ce qu'el<strong>le</strong>contient, se traduit immanquab<strong>le</strong>ment par des coûts, <strong>le</strong>squels sont immédiatementconsidérés comme inacceptab<strong>le</strong>s par <strong>le</strong> ministère des finances, et interprétéspar <strong>le</strong>s bail<strong>le</strong>urs comme un signe de militarisation du pays ! La dernièrepartie de cette intervention tentera donc de répondre à la question: quel modè<strong>le</strong>d'armée <strong>pour</strong> l'Afrique de l'Ouest ?Quel modè<strong>le</strong> d'armée: une tentative de descriptionEn première approche, et au vu de ce qui a été décrit précédemment, on peutconsidérer que <strong>le</strong>s armées d'Afrique de l'Ouest doivent désormais faire effort surla mobilité qui permet de mieux contrô<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s vastes espaces terrestres, mari-118


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièrestimes et aériens, trop largement incontrôlés (l'Afrique de l'ouest est une vastezone de terres coincée entre deux océans: l'un d'eau au sud et à l'ouest, l'autrede sab<strong>le</strong> au nord.. El<strong>le</strong>s doivent aussi calcu<strong>le</strong>r au plus juste <strong>le</strong>ur ressource humaine<strong>pour</strong> mieux payer <strong>le</strong>urs soldats. El<strong>le</strong>s doivent enfin faire évoluer <strong>le</strong>ur formationvers plus de coopération avec <strong>le</strong>s autres services publics intérieurs,etplus d'aptitude à agir dans un cadre international.L'utopie étant nécessaire <strong>pour</strong> faire de grandes choses, une armée d'Afrique del'Ouest, avec quelques variantes prenant en compte <strong>le</strong>s spécificités de chaquepays <strong>pour</strong>rait être comme suit : Une armée professionnel<strong>le</strong>, mais symbo<strong>le</strong> de la cohésion nationa<strong>le</strong>: cel<strong>le</strong> quiest capab<strong>le</strong> d' éduquer, de réunir des citoyens venus de tout <strong>le</strong> pays, sanspouvoir bénéficier du relais de la conscription qui aurait pu contribuer à laconstruction de la Nation. Cette armée, qui est bien acceptée et ne souffrepas de l'antimilitarisme latent des sociétés européennes, doit se concentrersur son rô<strong>le</strong> de protection du peup<strong>le</strong>, et éviter de se transformer en "mercenairesde la sécurité internationa<strong>le</strong>", même si comme nous <strong>le</strong> verrons plusloin, l'ouverture à des systèmes de sécurité col<strong>le</strong>ctive est nécessaire. Il fautéviter, comme cela est désormais malheureusement <strong>le</strong> cas en Europe, quepar <strong>le</strong> biais de "lʼinternationalisation des engagements, …<strong>le</strong>s soldats soientperçus au moins autant comme soldats de lʼOTAN, de lʼUnion Européenne,ou des Nations Unies que comme soldats français" 71 .Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARPour que cette armée joue son rô<strong>le</strong> d'exemp<strong>le</strong>, il y a un impératif. Il faut que<strong>le</strong> pays consente <strong>le</strong>s efforts financiers nécessaires, <strong>pour</strong> que ses militaires nesoient pas contraints à se "débrouil<strong>le</strong>r" <strong>pour</strong> survivre, eux et <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s, età donner d'avantage l'image d'une armée de prédation, ou de trafics, qued'une armée protectrice. Il y a donc là des critères à satisfaire, et en particuliercelui du coût global minimum acceptab<strong>le</strong> d'un soldat, en deçà duquel cedernier devient plus dangereux à son pays qu'uti<strong>le</strong>. Une armée dont <strong>le</strong>s chefs continueront longtemps à jouer un rô<strong>le</strong> politiqueimportant, au moins jusqu'à ce que des civils élus occupent tous <strong>le</strong>s postespolitiques. Mais <strong>le</strong>s militaires devront s'attacher à agir au profit de la démocratie,sans être tentés par <strong>le</strong> "coup d'état sauveur de la démocratie", ce quiimplique que l'armée n'est pas seu<strong>le</strong> à devoir évoluer, mais bien l'ensemb<strong>le</strong>de la classe politique. Si l'on reprend la thèse du "sauvetage de la démocratie",c'est que quelqu'un a mis en danger la démocratie. Dans ce domaine,mais ce n'est pas l'objet de ce papier, il conviendra de faire davantage effort,sur <strong>le</strong> caractère démocratique des é<strong>le</strong>ctions (c'est en très bonne voie), maissurtout sur <strong>le</strong> caractère démocratique de l'exercice du pouvoir. En échange,il faut que <strong>le</strong>s militaires acceptent la frustration d'être de moins en moinsincontournab<strong>le</strong>s. Une armée plus adaptée à la réalité de la situation stratégique des Etats :diminution des risques de conflits interétatiques, vastes zones géographiquesnon contrôlées (l'océan au sud, <strong>le</strong> désert au nord), qui nécessitent d'autresmodes d'action et probab<strong>le</strong>ment un rééquilibrage des forces. Ainsi, l'améliorationdes capacités de contrô<strong>le</strong> des zones côtières par la marine est àrechercher, de même que la capacité de surveillance aérienne et que la capacitéd'action dans la profondeur de l'espace terrestre. A l'inverse une revues'impose de tout ce qui concerne l'affrontement conventionnel frontal. Une armée dont l'implication éventuel<strong>le</strong> dans la sécurité intérieure, face à destrafiquants, des rebel<strong>le</strong>s, des groupes armés illégaux ou des terroristes,nécessite une redéfinition claire des rô<strong>le</strong>s respectifs des "corps habillés"(police, douanes, justice), en fonction de la tradition culturel<strong>le</strong> des forces de71Général de la Pres<strong>le</strong> dans "Le soldat aujourdʼhui.Place dans la Nation".119


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainesécurité (gendarmerie ou non). Ceci est un impératif au risque de voir sedévelopper des forces de sécurité aux missions et attributions floues, auxéquipements de plus en plus comparab<strong>le</strong>s, ce qui est générateur de compétitionsinuti<strong>le</strong>s et de dépenses superflues (voir en particulier la place des"gardes républicaines ou présidentiel<strong>le</strong>s" ou cel<strong>le</strong>s des "unités spécia<strong>le</strong>s d'intervention"de toutes origines). Une répartition claire des responsabilités enmatière de renseignement intérieur s'impose éga<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> plus d'efficacitéet davantage de démocratie. Une armée de mieux en mieux préparée <strong>pour</strong> agir dans <strong>le</strong> cadre d'uneforce régiona<strong>le</strong> africaine (ECOWAS Standby Brigade). Dans ce domainede gros progrès sont en cours et la période actuel<strong>le</strong> présente uneopportunité qu'il faut saisir. En effet, <strong>pour</strong> la première fois depuis <strong>le</strong>s indépendances,<strong>le</strong>s Africains et l'ensemb<strong>le</strong> de <strong>le</strong>urs partenaires travail<strong>le</strong>nt aumême projet d'opérationnalisation de l'Architecture Africaine de Paix et deSécurité 72 . Des moyens financiers importants y sont consacrés par <strong>le</strong>s partenaires73 au titre de l'amélioration des capacités ("capacity building"). Ainsi,l'UE envisage un soutien financier et technique aux centres de formationà vocation régiona<strong>le</strong> et continenta<strong>le</strong>, en complément de ce que font <strong>le</strong>scoopérations bilatéra<strong>le</strong>s. De même, <strong>le</strong> cyc<strong>le</strong> d'entraînement Amani Africa,dérivé du projet français RECAMP 74 , permet de d'entraîner <strong>le</strong>s structurespaix et sécurité de l'UA et des organisations Régiona<strong>le</strong>s. Son dérou<strong>le</strong>mentest suivi avec attention par l'ONU et <strong>le</strong>s autres partenaires, qui attendentses conclusions <strong>pour</strong> ajuster <strong>le</strong>ur propre politique de "capacity building".Les exercices organisés par la CEDEAO sont prometteurs, plaçant cetteorganisation régiona<strong>le</strong> au premier rang dans <strong>le</strong> domaine de l'APSA. Desefforts restent encore à faire <strong>pour</strong> la compréhension mutuel<strong>le</strong> entre arméesde la région, en raison de la présence de l'anglais et du français. Il fautd'ail<strong>le</strong>urs constater, et <strong>le</strong> Chef d'état major général Nigérian <strong>le</strong> reconnaissaitbien 75 , que <strong>le</strong>s plus gros efforts de bilinguisme sont plutôt à faire par<strong>le</strong>s anglophones.72plus connue sous l'acronyme anglo-saxon d'APSA.73L'union Européenne, dans <strong>le</strong> cadre de sonpartenariat stratégique Paix et Sécurité, consacreau profit de la CEDEAO, environ 55 millions d' €<strong>pour</strong> <strong>le</strong> capacity building.74L'exercice Amani Africa est un exercice ayant <strong>pour</strong>but d'entraîner <strong>le</strong>s structures de paix et de sécuritéde l'APSA à concevoir et à conduire une opérationde maintien de la paix en Afrique. C' est uneproposition Européenne, dérivée du cyc<strong>le</strong> RE-CAMP (Renforcement des Capacités Africaines deMaintien de la Paix) mené par la France. L'exercicede commandement final, après deux ans et demide travail en commun, s'est déroulé en octobre2010.75"English speaking West Africans must <strong>le</strong>arn tospeak French. The French speaking West Africansare better at <strong>le</strong>arning English than we are at<strong>le</strong>arning French. This has to change. We need towork together to have e<strong>le</strong>ments of communicationin place.” Air Chief Marshal Paul Dike (05/03/2010).76Il y a environ 35 000 Africains impliqués dans desopérations des Nation Unies dans <strong>le</strong> monde, dont25 en Afrique dans 7 OMP différentes.Environ 8000 Africains sont engagés dans desopérations de paix sous l'égide de l'UA (AMISOM),ou d'une organisation régiona<strong>le</strong> (MICOPAX).77Centre Africain d'Etude et de Recherche sur <strong>le</strong>Terrorisme (Alger) .78ECOWAS Standby Force.79ECOWAS Small Arms Unit par exemp<strong>le</strong>. Une armée capab<strong>le</strong> de participer à des opérations des Nations Unies enAfrique ou ail<strong>le</strong>urs dans <strong>le</strong> monde. Il faut cependant que <strong>le</strong>s arméesd'Afrique ne se laissent pas "contaminer" par <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> et <strong>le</strong> standing delʼONU, qui est de nature a faire disparaître certaines des qualités essentiel<strong>le</strong>sdes armées africaines – rusticité, proximité des populations, courage– dans <strong>le</strong> confort prudent des préfabriqués et des per diem de l'ONU,qui peuvent représenter, <strong>pour</strong> certaines armées africaines, jusquʼà plus dedix fois la solde mensuel<strong>le</strong> de lʼarmée concernée. Certains Etats africainssemb<strong>le</strong>nt <strong>pour</strong>tant avoir fait <strong>le</strong> choix exclusif des Nations Unies, alors quela majorité des Etats de la CEDEAO contribuent, ou ont contribué, auxdeux types de forces 76 . Une armée qui sʼouvre sur lʼAfrique et <strong>le</strong> monde. Il est à ce titre regrettab<strong>le</strong>que par manque de moyens financiers, certains pays soient sous représentésvoire absents, lorsqu'il s'agit de détacher des officiers auprès dʼorganisationsrégiona<strong>le</strong>s ou continenta<strong>le</strong>s, alors que tant de possibilités existent :CAERT 77 , ESF 78 , structures PS CEDEAO, a<strong>le</strong>rte précoce, SALW 79 , etc.Même si cela peut paraître cynique, il y a en effet beaucoup à apprendre, etbeaucoup de confiance mutuel<strong>le</strong> à gagner, en participant, avec dʼautres africains,au règ<strong>le</strong>ment de problèmes qui ne concernent pas directement <strong>le</strong> pays.LʼEurope a par exemp<strong>le</strong> beaucoup appris et a beaucoup progressé en matièrede coopération et de confiance à lʼoccasion des crises auxquel<strong>le</strong>s el<strong>le</strong> a participédans <strong>le</strong>s Balkans (la Macédoine a été la première opération), puis120


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresensuite en Afrique, au Moyen Orient, en Afghanistan ou en Georgie. Il y adésormais beaucoup d'expériences à partager, ce que l'exercice Amani Africas'est proposé de faire. Une armée dont <strong>le</strong> format corresponde à l'indispensab<strong>le</strong> compromis entre lanécessité de consacrer <strong>le</strong> plus de ressources possib<strong>le</strong>s au développement etcel<strong>le</strong> de procurer aux citoyens la "prestation de sécurité et d'espoir" quʼilsattendent de lʼEtat. Ce compromis est très diffici<strong>le</strong> à trouver car si <strong>le</strong>s forcesarmées sont trop faib<strong>le</strong>s el<strong>le</strong>s nʼassurent pas cette prestation. Si el<strong>le</strong>s coûtenttrop cher el<strong>le</strong>s compromettent <strong>le</strong> développement, mais si el<strong>le</strong>s sont tropmisérab<strong>le</strong>s, el<strong>le</strong>s représentent <strong>le</strong> plus grand danger : peu motivées el<strong>le</strong>s sontincapab<strong>le</strong>s de défendre <strong>le</strong> pays et constituent même une menace sur lasécurité intérieure. Le réglage est délicat et nécessite une réf<strong>le</strong>xion apaiséeloin du corporatisme, des revendications triba<strong>le</strong>s et des arrières penséespolitiques. Une armée qui n'hésite pas, avant même toute crise, à lancer sa part de réformedu système de sécurité. Cette réforme, après définition du format général, passepar la mise à plat des problèmes organiques <strong>le</strong>s plus austères :Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR- maîtrise et identification des effectifs- inventaires des fonctions à remplir- plan de formation des personnels- plan d'équipement- plan de stationnement et politique des infrastructures- réforme de l'administration- gestion des rémunérations- gestion des ressources humaines- prise en compte des spécificités culturel<strong>le</strong>s, <strong>pour</strong> éviter d'adopter unsystème "venu d'ail<strong>le</strong>urs". Les soldats africains sont en effet parmi <strong>le</strong>s pluscourageux et <strong>le</strong>s plus rustiques du monde. Les relations de commandemententre chefs et subordonnés n'ont que peu de rapports avec <strong>le</strong>s relationsqui préva<strong>le</strong>nt dans des armées européennes ou américaines, car el<strong>le</strong>sprennent en compte d'autres réalités et préoccupations. Ceci ne peut pasêtre ignoré et laissé dans <strong>le</strong>s "pratiques non officiel<strong>le</strong>s".- etc…Beaucoup d'armées africaines n'ont pas effectué cette démarche de réforme,ou de revue, généra<strong>le</strong>ment réalisée lorsqu'il est trop tard et qu'il faut toutreconstruire. Cela est <strong>pour</strong>tant déjà nécessaire <strong>pour</strong> plusieurs armées de larégion.121


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineCONCLUSIONA la question "quel modè<strong>le</strong> d'armée <strong>pour</strong> l'Afrique de l'Ouest", la réponsedevrait être: <strong>pour</strong> l'instant, plusieurs armées tournées vers des objectifsde paix et de sécurité communs.Il s'agit donc, petit à petit, et <strong>pour</strong> chaque Etat, d'évoluer d'une armée "<strong>pour</strong>faire la guerre" en cas d'agression du pays, vers une armée "suffisante" parrapport aux ressources que l'Etat peut y consacrer, capab<strong>le</strong> de prendre encompte sa part des nouvel<strong>le</strong>s menaces intérieures, en coopération avec <strong>le</strong>sautres "corps habillés", creuset de la cohésion nationa<strong>le</strong> et principal défenseurde la démocratie et du peup<strong>le</strong>, jouant un rô<strong>le</strong> politique moins important,sous réserve que <strong>le</strong>s politiques jouent <strong>le</strong> jeu, et aptes à s'intégrer dans unsystème de sécurité col<strong>le</strong>ctive africain, régional ou continental, et à participerà des OMP des Nations Unies.C'est dans <strong>le</strong>s deux derniers vo<strong>le</strong>ts (sécurité col<strong>le</strong>ctive et ONU) que <strong>le</strong>s progrès<strong>le</strong>s plus importants ont été faits, et que <strong>le</strong>s bénéfices sont <strong>le</strong>s plus évidents.Le premier bénéfice lié à l'amélioration des capacités col<strong>le</strong>ctives en matièrede sécurité, au niveau régional, est probab<strong>le</strong>ment l'augmentation de laconfiance réciproque entre <strong>le</strong>s différents acteurs concernés. Or la confianceest probab<strong>le</strong>ment la première garantie de paix.L'Europe a beaucoup travaillé sur ces notions et a développé des capacitéscivi<strong>le</strong>s et militaires à la disposition de sa Politique de Sécurité et de DéfenseCommune. Les difficultés <strong>pour</strong> y parvenir sont grandes, tant est lourd <strong>le</strong> passéde l'Europe, auquel d'ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong>s armées africaines ont payé <strong>le</strong>ur tribut, et tantsont comp<strong>le</strong>xes <strong>le</strong>s chevauchements de divers types de solidarité avec des intérêtsnationaux et des objectifs européens.Je pense que l'Afrique peut s'inspirer de cette aventure, en évitant de reproduirenos erreurs ou des schémas mal adaptés. Le partenariat Paix et Sécuritéavec l'Afrique a été conçu <strong>pour</strong> permettre ces échanges, et l'UE yconsacre près d'un milliard d' €uros, qui ne seront jamais aussi rentab<strong>le</strong>s ques'ils viennent en appui d'une vraie politique africaine, animée par <strong>le</strong>s EtatsAfricains et bien coordonnée avec l'ensemb<strong>le</strong> des partenaires extérieurs, donten premier lieu <strong>le</strong>s Etats Membres de l'Union européenne.Pierre-Michel JOANA,est Général de division de lʼArmée de TerreFrançaise à la retraite. Conseil<strong>le</strong>r spécialPaix et Sécurité en Afrique auprès duSecrétaire Général du Conseil de l'UnionEuropéenne (Direction généra<strong>le</strong> des affai -res extérieures et politico militaires).Il est notamment chargé de coordonner, ausein du Secrétariat général du Conseil, <strong>le</strong>sactivités relatives au renforcement descapacités africaines en matière de prévention,de gestion et de résolution de conflits,en collaboration avec la Commission euro -péenne, <strong>le</strong>s partenaires africains et <strong>le</strong>s acteursinternationaux.122


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2.14 Intervention du Colonel Adama MBAYE, Chef de la division Maintiende la Paix, Adjoint au Commissaire en charge des Affaires politiques,de la paix et de la securite à la CEDEAO, Sénégal.Résumé : In his intervention, General Pierre M. JOANA, Counselor at the EuropeanUnion, designs his image for an archetype of a western African army. In thebeginning, he points out that in the entire sub-region of western Africa, only theCape Verde Islands and Senegal never experienced a coup initiated by the armedforces or a so-cal<strong>le</strong>d „military democracy“. In the following part, General JOANApresents some basic caracteristics of the western African armies. The biggest differencesbetween them are the french, respectively anglo-saxon backgroundsdue to their different colonial influences. These differences are c<strong>le</strong>arly visib<strong>le</strong>, notonly as far as their uniforms and ceremonies are concerned, also the attitudes andrelations of command are basically different.The next part of his intervention is dedicated to the different types of missions afuture western African army might face. The main caracteristics of an archetypearmed forces model for western Africa are the following: A professional army, buta symbol of national cohesion. An army whose commanders will keep an importantro<strong>le</strong> in politics, until e<strong>le</strong>cted civilian politicians may occupy all mandates. Itshould be an army that is more adapted to the reality of the strategic situation ofthe different states. The following tasks should be fulfil<strong>le</strong>d in order to set up moderndemocratic armed forces in western Africa: Control and identification of thetroops, guidelines for the functions to proceed, a formation plan for the personnel,an equipment plan, a garrison plan and infrastructure policy etc. Many african armiesstill have not engaged these necessary reforms or revisions. This workneeds to be done to be ab<strong>le</strong> to have a solid ground for a stab<strong>le</strong> structure.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARQuel(s) modè<strong>le</strong>(s) d’Armée(s) <strong>pour</strong> l’Afrique de l’Ouest (3)Le sujet tel quʼil a été rédigé initia<strong>le</strong>ment, omettant de mettre ʻʼmodè<strong>le</strong>ʼʼ au pluriel,<strong>pour</strong>rait sous entendre quʼun seul modè<strong>le</strong> dʼarmée est possib<strong>le</strong> et applicab<strong>le</strong><strong>pour</strong> tous <strong>le</strong>s Etats membres de la CEDEAO. Il apparait impensab<strong>le</strong> depouvoir proposer un tel modè<strong>le</strong> qui alors ne tiendrait pas compte des spécificitésnationa<strong>le</strong>s. La CEDEAO dont lʼaction principa<strong>le</strong> est lʼintégration régiona<strong>le</strong>se doit néanmoins de proposer des directions dans tous <strong>le</strong>s domainesdont celui de la défense.La CEDEAO a depuis longtemps rédigé des textes relatifs au domaine paixet sécurité ; ces textes contiennent tous <strong>le</strong>s critères et principes qui selon laCEDEAO doivent guider la mise sur pied, la refondation ou <strong>le</strong> fonctionnementdʼune armée ouest africaine. Ces principes sont prépondérants sur <strong>le</strong>s critèresnationaux qui sont néanmoins et absolument à prendre en compte.La CEDEAO est donc en mesure de vous offrir sa vision dʼun creuset communà lʼensemb<strong>le</strong> des forces armées ouest africaines dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s particularitésnationa<strong>le</strong>s sont éga<strong>le</strong>ment présentes.Le sujet sera volontairement limité aux forces militaires mais tous <strong>le</strong>s principesqui seront évoqués sont tout à fait applicab<strong>le</strong>s, et doivent être appliquésaux forces de sécurité.Cette vision de la CEDEAO sʼest bâtie à partir de lʼhistoire de notre région etgrâce à 35 années dʼexpérience. Lʼhistoire, cʼest essentiel<strong>le</strong>ment la créationdes forces armées des Etats Membres soit sur <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> de lʼex colonisateurCommunauté Économiquedes Etats de l’Afriquede l’Ouest123


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineou dʼune guerre dʼindépendance et, <strong>le</strong>ur mise en avant par <strong>le</strong> pouvoir en placeou par el<strong>le</strong>-même, se posant alors comme <strong>le</strong> dernier et <strong>le</strong> premier rempart dupays. Ces armées nʼont conceptuel<strong>le</strong>ment que peu évolué au cours des 50dernières années.Lʼexpérience, cʼest cel<strong>le</strong> accumulée par <strong>le</strong>s institutions de la CEDEAO qui aconnu dans son espace de nombreuses crises et guerres. La CEDEAO est avanttout une Communauté économique et non de défense et cʼest souvent dans ladou<strong>le</strong>ur que cette expérience a été acquise. Les fruits de cette expérience sontentre autres, <strong>pour</strong> <strong>le</strong> domaine paix et sécurité, <strong>le</strong>s nombreux textes qui conceptualisentla vision de la CEDEAO.Ces textes sont :- <strong>le</strong>s traités de non agression (1978) et dʼassistance mutuel<strong>le</strong> en matière de défense(1981) ;- <strong>le</strong> traité révisé de 1993 qui expose <strong>le</strong>s conditions et actions nécessaires à lasécurité régiona<strong>le</strong> (art 58) et donne à la CEDEAO <strong>le</strong> statut de supranationalité;- <strong>le</strong> protoco<strong>le</strong> relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règ<strong>le</strong>ment desconflits, de maintien de la paix et de la sécurité de 1999 qui détail<strong>le</strong> et précise<strong>le</strong>sdits mécanismes;- <strong>le</strong> protoco<strong>le</strong> additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance qui dansson artic<strong>le</strong> 19 expose <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des forces armées (et de sécurité) dans la démocratie.- <strong>le</strong> cadre stratégique de prévention des conflits qui fournit <strong>le</strong> cadre des actionsà réaliser.Les Etats membres de la CEDEAO ont tous signé ces documents et ont ainsiconféré une parfaite légitimité à la CEDEAO en matière de prévention desconflits et donc éga<strong>le</strong>ment dʼédicter des principes à appliquer par <strong>le</strong>s Etatsmembres.Lʼensemb<strong>le</strong> des principes qui forgent <strong>le</strong> creuset commun aux armées ouest africainessont contenus dans ces textes.Ainsi suivant la vision de la CEDEAO, une armée ouest africaine est :- une armée républicaine ;- une armée nationa<strong>le</strong> citoyenne légitime adaptée à ses missions ;- une armée au service de la paix.1. Une armée républicaine- el<strong>le</strong> est aux ordres du pouvoir légitime et légal : lʼEmploi de lʼarmée est une décisionpolitique- el<strong>le</strong> est espectueuse des droits de lʼhomme, du citoyen et des conventions internationa<strong>le</strong>s: <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des forces de défense et forces de sécurité est défini parla loi, <strong>le</strong>ur comportement est juste et la réponse proportionnée à la menace ;- el<strong>le</strong> est apolitique : <strong>le</strong>s militaires ont <strong>le</strong> droit de vote et sont au service de lʼEtat;ils respectent <strong>le</strong> devoir de réserve, ils nʼont p as dʼappartenance syndica<strong>le</strong>,politique ou ethnique.2. Une armée reconnue et adaptée à ses missions- Existence des textes fondateurs assurant la légitimité des armées devant la nationet <strong>le</strong> pouvoir politique et définissant :+ la politique de défense (avec prise en compte spécificités nationa<strong>le</strong>s et définitiondes menaces)+ <strong>le</strong> budget de défense124


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières+ la gestion des carrières des personnels (recrutement / avancement / sanctions/ retraite)+ la coopération des forces de défense avec <strong>le</strong>s forces de sécurité (définitiondes rô<strong>le</strong>s et complémentarités)+ la politique salaria<strong>le</strong>- Personnels formés et en nombre suffisant : Formation militaire et Formationcivique, mora<strong>le</strong> et éthique- Equipements adaptés :+ Pour faire face aux différentes situations (maintien de lʼordre, opérations,interventions humanitaires, catastrophes naturel<strong>le</strong>s, défense du territoire) ;+ Assistance au développement+ Application du juste besoin3. Une armée au service de la paix- à l’echelon régional : Respect des engagements vis-à-vis de la Force enAttente de la CEDEAO, Respect des protoco<strong>le</strong>s et traités signés avec laCEDEAO ;- à l’echelon international : Mise en œuvre de la diplomatie nationa<strong>le</strong> (opérationsUA-ONU)Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAdama MBAYEest diplômé de lʼAcadémieRoya<strong>le</strong> Militaire de Mekhnès,Maroc (1981), de lʼEco<strong>le</strong> dʼEtatmajorde Koulikoro, Mali (1995) ;breveté de lʼUS Army War Col<strong>le</strong> -ge, Carlis<strong>le</strong>, Pennsylvanie (2003),titulaire Master Etudes Stratégiques,(USWAC), Senior MissionLeader Course ( ONU, UA),Senior Leaders Course (CentredʼEtudes Stratégiques de lʼAfri -que).Il a servi 32 années dans lʼarméede terre sénégalaise où il a occupédes postes de responsabilité: chef de corps, commandantde contingent sénégalais et secteurMONUC (2001), chef de division.Actuel<strong>le</strong>ment, il est chefde la division Maintien de la Paixde la CEDEAO.125


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSÉANCE PLÉNIÈRE N° VMercredi 10 novembre 2010 - Après-midiThème de la séance :La réforme du secteur de sécurité (suite)PANEL 7 « DÉFIS POUR L’ÉDUCATION ET LA RECONVERSION DESMEMBRES DES FDS »2.15 Intervention du Général Eric BONNEMAISON, Commandant desÉco<strong>le</strong>s militaires de Coëtquidan - Saint-Cyr, FranceRésumé : The intervention of General Eric BONNEMAISON, Commander of theMilitary Academies of Coetquidan and Saint-Cyr, is entit<strong>le</strong>d „Ethics and deontology:the chal<strong>le</strong>nges of education“. He begins with three conditions for his statement, applicab<strong>le</strong>to a country that tries to rebuild itself after a conflict: the first condition is toaccept the princip<strong>le</strong> of the existence of objective moral values that are ab<strong>le</strong> to unitethe peop<strong>le</strong>. The second condition was already verbalised by President Obama ina speech at Notre Dame University, it is to go beyond the limits of the human beingin his search of the truth of what is good and what is bad. The third condition is tobe to<strong>le</strong>rant and to accept his or her interlocutor to be sincere. The first chal<strong>le</strong>nge henames is to make the entire nation aware of the fact that the princip<strong>le</strong>s of politicalphilosophy and the values that substantiate a human community have to engagethe entire nation. The second chal<strong>le</strong>nge is to offer the civil and military decisionmakersthe conditions of their own success during the reconstruction of their country.The third chal<strong>le</strong>nge is the development of a culture of a moral philosophy insideof the national community and particularly in the matter of the monopoly on vio<strong>le</strong>nce.General BONNEMAISON names three factors that are responsib<strong>le</strong> for therecent developments of questioning the <strong>le</strong>gitimacy of the existing regimes in westernAfrica. First, several countries start to orientate themselves towards a democracyin its european sense. Second, the terrib<strong>le</strong> civil wars during the 1980's and1990's, like for instance in Liberia and Sierra Leone have even cal<strong>le</strong>d the InternationalCriminal Tribunal in action. And third, the <strong>le</strong>gitimacy of national authorities isno longer justified because the state seems to be superfluous.Éthique et déontologie : <strong>le</strong>s défis de la formationPar<strong>le</strong>r de formation à lʼéthique dans une assemblée internationa<strong>le</strong> tel<strong>le</strong> que cel<strong>le</strong>de ce forum ou bien dans un pays qui tente de se reconstruire après un conflit,présuppose trois conditions :La première est quʼon accepte <strong>le</strong> principe quʼil existe des va<strong>le</strong>urs mora<strong>le</strong>s objectivescapab<strong>le</strong>s dʼunir des hommes, par delà la diversité de <strong>le</strong>urs cultures,autour dʼun projet commun. Ce travail, nécessaire et urgent, doit aboutir à lareconnaissance commune de normes mora<strong>le</strong>s universel<strong>le</strong>s. Dans <strong>le</strong> domainede la formation, il sʼagit de mettre à disposition des décideurs de sages principesde philosophie politique.La seconde condition, comme <strong>le</strong> soulignait <strong>le</strong> président Obama dans undiscours à lʼUniversité Notre Dame en mai 2009, est que lʼon sʼefforce dedépasser <strong>le</strong>s limites de lʼhomme dans sa quête de la vérité sur ce qui est bienou ce qui est mal. Il faut parvenir à des certitudes objectives dans une sociétépluraliste. Ce travail au forceps ne peut être initié, alimenté et entretenu, etfina<strong>le</strong>ment aboutir sans lʼengagement résolu des responsab<strong>le</strong>s civils et militaires.Pour cela il convient de <strong>le</strong>s préparer, dans <strong>le</strong> domaine de la formation,par lʼétude des principes et fondements de lʼexercice de lʼautorité.126


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresEt la troisième condition est que chacun fasse preuve de tolérance et considèreson interlocuteur comme étant de bonne foi. La démocratie vit de cettedisposition dʼesprit où lʼon ne diabolise pas, où lʼon nʼagresse pas celui quipense, <strong>pour</strong> des raisons historiques, géographiques, culturel<strong>le</strong>s, religieuses oufamilia<strong>le</strong>s, de manière différente. Cʼest un enjeu essentiel <strong>pour</strong> un pays enreconstruction après une guerre civi<strong>le</strong> qui, bien souvent, nʼa fait que mettre enrelief <strong>le</strong>s différences entre <strong>le</strong>s populations, aiguiser <strong>le</strong>s différences, intenterdes procès dʼintention. Lʼobjectif de la formation vise à doter <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>scivils et militaires des principes de philosophie mora<strong>le</strong> qui <strong>le</strong>ur permettrontde réduire <strong>le</strong>s clivages au sein de la société.Je voudrais articu<strong>le</strong>r mon intervention sur <strong>le</strong> thème des défis qui se posent àun Etat dans <strong>le</strong> domaine de lʼéducation à lʼéthique de ses forces armées et desécurité, en suivant ces trois conditions.Jʼinsisterai particulièrement sur la formation des élites, des décideurs, desresponsab<strong>le</strong>s, des officiers, car tout part dʼeux. La formation à lʼéthique méritecependant de concerner la totalité des cadres militaires car cette disciplineest fondamenta<strong>le</strong> <strong>pour</strong> lʼexercice du métier des armes. Mais el<strong>le</strong> mérite deconcerner lʼensemb<strong>le</strong> des élites dʼun pays : rien ne serait plus malsain quʼunearmée formée à lʼéthique et à la déontologie alors que <strong>le</strong> reste de la nation ne<strong>le</strong> serait pas. El<strong>le</strong> finirait, et cʼest une tentation à laquel<strong>le</strong> el<strong>le</strong> résiste diffici<strong>le</strong>ment,par considérer quʼel<strong>le</strong> est <strong>le</strong> seul corps de lʼEtat doué des va<strong>le</strong>ursnécessaires à la bonne gouvernance ; on ne compte plus <strong>le</strong>s coups dʼétatsmilitaires justifiés par ce prétexte.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARI - Premier défi : faire prendre conscience à toute la nation que <strong>le</strong>sprincipes de philosophie politique et <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs qui fondent unecommunauté humaine engagent toute la nation.En 2004, Le cardinal Ratzinger, futur Benoit XVI, avait demandé à la commissionthéologique internationa<strong>le</strong> (CTI) de se pencher sur la doctrine de laloi naturel<strong>le</strong>. Cette recherche a abouti en 2009, à un document intitulé « A larecherche dʼune éthique universel<strong>le</strong> : nouveau regard sur la loi naturel<strong>le</strong> ». Laquestion centra<strong>le</strong> consistait à savoir sʼil existait des va<strong>le</strong>urs mora<strong>le</strong>s objectivescapab<strong>le</strong>s dʼunir <strong>le</strong>s hommes et de <strong>le</strong>ur procurer paix et bonheur ?Le constat est que, par delà la diversité des cultures, traditions, histoires etreligions, il existe « un patrimoine de va<strong>le</strong>urs mora<strong>le</strong>s commun à tous <strong>le</strong>shommes, quel<strong>le</strong> que soit la manière dont ces va<strong>le</strong>urs sont justifiées à lʼintérieurdʼune vision du monde particulière. »La nature même de lʼhomme, sa place dans lʼUnivers, sa raison dʼêtre conduisentà établir des comportements moraux universels qui permettent de donner un sensà la vie et à la manière dont lʼhumanité sʼinsère dans lʼordre cosmique et métaphysique.Partant de là, toutes <strong>le</strong>s civilisations sont à peu près dʼaccord sur <strong>le</strong> besoinde rechercher une éthique universel<strong>le</strong>, et sur la nécessité dʼaboutir à lareconnaissance commune de normes mora<strong>le</strong>s universel<strong>le</strong>s fondées sur uneapproche rationnel<strong>le</strong> de la réalité. Le respect des droits de lʼhomme nʼest pas uneva<strong>le</strong>ur strictement occidenta<strong>le</strong> qui sʼimposerait aux autres cultures et religions ;ces droits sont une va<strong>le</strong>ur fondamenta<strong>le</strong> et commune à lʼhumanité.Il nʼy a là rien de nouveau. Aristote affirmait déjà que la fin de la politique est <strong>le</strong>bien proprement humain. Le but dʼune politique est la recherche du bonheur, larecherche de la satisfaction de besoins fondamentaux qui consacrent lʼapaisementdes désirs et, par là même, instaurent une notion de durée : <strong>le</strong> plaisir,lʼhonneur, la santé, la richesse, lʼamitié, la vérité et la recherche de lʼabsolu (engrec, theoria) comme <strong>le</strong>s cite Aristote. Le bonheur sʼexprime lorsque lʼétat debien-être est ressenti durab<strong>le</strong>ment, contrairement au plaisir, qui est fugace etqui relève de lʼinstantanéité.127


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLes objectifs dʼune politique doivent être guidés par la satisfaction des quatrebesoins fondamentaux de lʼhomme : sa sécurité, son bien-être, son sentimentde justice et la reconnaissance de son identité.Satisfaire <strong>le</strong> besoin de sécurité signifie que lʼÉtat souverain assure soncontrô<strong>le</strong> civil sur des forces de sécurité représentatives de la nation etcomptab<strong>le</strong>s de la force publique. Cʼest <strong>le</strong> premier enjeu de la reconstitution deforces armées et de sécurité, dans <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s démocraties ou dans <strong>le</strong>s Etatsqui sortent de la guerre civi<strong>le</strong>, comme lʼAfghanistan au début du XXI° sièc<strong>le</strong>.Mais lʼerreur si souvent commise est de se borner à rég<strong>le</strong>r la question delʼorganisation de ces forces ; il faut une véritab<strong>le</strong> culture démocratique chezchacun des agents en tenue, qui commence à lʼéco<strong>le</strong>. Une armée républicaine,cʼest lʼaffaire de deux ou trois générations, sans interruption causéepar un coup dʼEtat ou une guerre civi<strong>le</strong>.Satisfaire <strong>le</strong> bien-être consiste à assurer des soins efficaces à des populationsqui <strong>le</strong>s demandent, garantir lʼéducation et la formation professionnel<strong>le</strong>, développer<strong>le</strong> potentiel humain, <strong>le</strong> préserver et lui donner <strong>le</strong>s moyens de sʼexprimer,et enfin, assurer un niveau de vie décent et réparti équitab<strong>le</strong>ment. On <strong>le</strong> voitdans tous <strong>le</strong>s pays, y compris dans <strong>le</strong>s Etats <strong>le</strong>s plus développés, qui y consacrenttoutes <strong>le</strong>urs ressources, souvent au détriment de <strong>le</strong>ur sécurité.Satisfaire <strong>le</strong> besoin de justice, cʼest disposer dʼun système légal conforme àdes standards et des lois stab<strong>le</strong>s, généra<strong>le</strong>s et éga<strong>le</strong>s, mais aussi dʼun systèmejuridictionnel hiérarchique (couronné par un cadre constitutionnel de la nation)qui vise à lʼexhaustivité. Les tensions entre Flamands et Wallons soulignentcombien lʼinjustice ressentie peut exaspérer <strong>le</strong>s sentiments communautaires, ycompris parmi <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus accueillants et ouverts. Et, dans <strong>le</strong> domainede la justice politique, il sʼagit dʼéviter lʼerreur à laquel<strong>le</strong> nos propres pays se livrentaussi quand ils cherchent à asseoir la culture démocratique dans <strong>le</strong>s paysqui en sont, selon nos normes, dé<strong>pour</strong>vues, cʼest dʼétablir des critères démocratiquesuniversels : la réalité est quʼil faut conforter une démocratie inculturéeet sans imitation servi<strong>le</strong> de lʼOccident, y compris dans ses défauts.Enfin, satisfaire <strong>le</strong> besoin fondamental dʼidentité doit se traduire par la reconnaissancede lʼimportance des différentes identités culturel<strong>le</strong>s et religieuses, parla cohésion dʼune communauté qui ne sape pas <strong>le</strong>s identités et, <strong>pour</strong> finir, parlʼattaque des interprétations et des mythes qui nourrissent <strong>le</strong>s tensions politiques.Tant dʼexemp<strong>le</strong>s à travers <strong>le</strong> monde qui témoignent de ce besoin vital, jusquedans nos guerres de clochers bien gauloises ! Cependant, reconnaissons loya<strong>le</strong>mentque, trop souvent, nous faisons <strong>le</strong> grand écart entre universalisme àlʼoccidental et particularisme non occidental. Le règ<strong>le</strong>ment de ces tensions identitairesnʼauront de solution que peu à peu, par la créativité dʼindividus inventifs,qui seront à <strong>le</strong>ur tour imités, inventions forcément et par définition imprévisib<strong>le</strong>s.Oui, vraiment, lʼobjectif de la sécurité humaine est dʼassouvir ces quatrebesoins fondamentaux. Cʼest vrai dans tout pays, quʼil soit en paix ou quʼil sortede la guerre.Dans ce contexte où la sécurité dépasse très largement <strong>le</strong> strict domaine desforces armées et de sécurité, <strong>le</strong>s relations entre lʼarmée et la Nation et <strong>le</strong>sprincipes de philosophie politique méritent dʼêtre connus et enseignés auxélites militaires tout comme aux responsab<strong>le</strong>s civils.Cette formation a vocation à élargir <strong>le</strong> premier cerc<strong>le</strong> de la communauté militaire<strong>pour</strong> <strong>le</strong> situer au sein de la Cité, comprise dans son sens étymologique. Dans <strong>le</strong>pacte qui lie <strong>le</strong>s hommes dʼune société aspirant à vivre en paix, <strong>le</strong>s notions de défenseet de sécurité trouvent naturel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>ur place. La raison dʼêtre des armées128


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresest de permettre aux autorités politiques dʼemployer la force, si el<strong>le</strong>s lʼestiment nécessaire,<strong>pour</strong> défendre <strong>le</strong>ur pays et ceux quʼel<strong>le</strong>s veu<strong>le</strong>nt aider, et <strong>pour</strong> promouvoir<strong>le</strong>s intérêts nationaux. Le soldat qui <strong>le</strong>s garantit, prolonge lʼautorité dʼun pouvoirdont il tire sa légitimité. Lʼutilisation de la force procède dès lors dʼune volonté politiquequi <strong>le</strong> dépasse. Il est à la fois la flèche de cette politique et il en est éga<strong>le</strong>mentlʼarmure <strong>pour</strong> éviter la dilution même de la notion dʼautorité.Ainsi, <strong>le</strong> principal défi à lʼéducation des questions éthiques et déontologiques estla prise de conscience col<strong>le</strong>ctive dʼune nation, surtout lorsquʼel<strong>le</strong> sort dʼune crisemajeure, que <strong>le</strong>s principes de philosophie politique et <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs qui fondent unecommunauté humaine appartiennent à tous, civils et militaires, adultes et enfants.Partant de là, il est essentiel que <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s civils et militaires exercentp<strong>le</strong>inement <strong>le</strong>ur autorité afin quʼils sʼengagent résolument dans lʼintroductionde ces principes à lʼensemb<strong>le</strong> de la population. Cʼest <strong>le</strong> second défi.II - Deuxième défi : offrir aux responsab<strong>le</strong>s civils et militaires, par l’étudedes principes et des fondements de l’exercice de l’autorité, <strong>le</strong>s conditionsde <strong>le</strong>ur réussite dans la reconstruction de <strong>le</strong>ur pays et la recherched’une éthique universel<strong>le</strong>Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLe président Obama expliquait <strong>le</strong>s oppositions et <strong>le</strong>s difficultés dans la quêtede la vérité au sein dʼune société pluraliste sur <strong>le</strong> mal et <strong>le</strong> bien par <strong>le</strong>s limitesde lʼhomme. La faute, selon lui, en reviendrait au péché originel. Il emprunteces thèmes au théologien protestant Reinhold Niebuhr, spécialiste de lʼéthiquesocia<strong>le</strong>. Même si des différences fondamenta<strong>le</strong>s existent entre <strong>le</strong>s communautés,y compris au sein dʼun Etat au cours de sa phase de réconciliation,el<strong>le</strong>s ne sauraient <strong>pour</strong> autant justifier lʼattentisme et lʼinaction des responsab<strong>le</strong>spolitiques et militaires qui ont la responsabilité dʼœuvrer <strong>pour</strong> dissiper <strong>le</strong>stensions et qui doivent éviter que ces contradictions diverses nuisent davantageencore à la cohésion de la société.Encore faut-il quʼils disposent des ressources mora<strong>le</strong>s, éthiques et déontologiques<strong>pour</strong> exercer <strong>le</strong>ur autorité, surtout quand <strong>le</strong>urs prérogatives <strong>le</strong>s conduisentà devoir assumer <strong>le</strong>urs responsabilités de chef des armées, voire à userde la force armée à des fins politiques <strong>pour</strong> atteindre <strong>le</strong> souverain bien et <strong>le</strong>bonheur de la nation.La voie la plus contrastée <strong>pour</strong> parvenir au bonheur est bien évidemment <strong>le</strong>recours à la force. Le but ultime de la guerre devrait être un état final où lʼonrecherche un bonheur qui, à lʼissue de la guerre, sera supérieur à celui qui prévalaitau début du conflit, sans perdre de vue cependant que lʼhistoire est entachéedʼexemp<strong>le</strong>s où <strong>le</strong>s pires horreurs ont été commises lorsque deshommes ont voulu faire <strong>le</strong> bonheur des autres malgré eux.Il faut donc acquérir <strong>le</strong> bonheur par des voies acceptab<strong>le</strong>s. De nombreux philo -sophes, <strong>le</strong>s grandes religions aussi, estiment que <strong>le</strong>s vertus permettent dʼy accéder.Par exemp<strong>le</strong>, Platon explique que la vertu est la science du bien. La vertutrouve sa source dans <strong>le</strong> monde militaire. Le combattant courageux qui préservaitla vie de ses compagnons dʼarmes par lʼexcel<strong>le</strong>nce de son comportement et quiaccomplissait de hauts faits dʼarmes, était considéré comme un homme vertueux.La guerre étant lʼacte politique <strong>le</strong> plus grave qui soit puisquʼil rompt lʼéquilibredu souverain bien, puisquʼil fracasse la logique même de la vertu, inscrite dansla durée, tournée vers <strong>le</strong> bonheur et marchant sur la voie médiane, il me semb<strong>le</strong>quʼel<strong>le</strong> ne peut se priver de définir une liste de vertus qui dominent toutes<strong>le</strong>s autres, qui donnent un sens au fait que la guerre va bafouer un certainnombre dʼentre el<strong>le</strong>s.129


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineCette liste des vertus est très ancienne. On la trouve dans <strong>le</strong> schéma platonicienet stoïcien des quatre vertus cardina<strong>le</strong>s. On la retrouve aussi chez saintThomas dʼAquin qui fonde sur ces quatre vertus sa mora<strong>le</strong> du bonheur.+ La prudence permet de discerner <strong>le</strong>s causes qui justifient la guerre ou quiau contraire justifient quʼon sʼinterdise dʼy recourir ; et sʼil faut effectuerune opération, qui contraint à employer la force sans jamais perdre de vuelʼobjectif politique ;+ La force, c'est-à-dire dʼune part <strong>le</strong> courage intel<strong>le</strong>ctuel dʼaffronter lʼopinionpublique afin de ne pas être versati<strong>le</strong> ; et dʼautre part la fermeté, ou laténacité, car <strong>le</strong>s opérations de reconstruction dʼun lʼEtat sortant dʼuneguerre civi<strong>le</strong> sont très longues, largement au-delà de la patience desopinions publiques ;+ La justice, parce quʼil faut donner à chacun, rebel<strong>le</strong>, opposant, population,adversaire, ce qui lui est dû et ne jamais être binaire ni exclusif. Le sentimentdʼinjustice dʼune partie des populations et des exclus des processus de paix,de réconciliation ou de reconstruction de lʼEtat exacerbe <strong>le</strong> conflit ;+ La tempérance, <strong>pour</strong> freiner <strong>le</strong>s montées aux extrêmes bruta<strong>le</strong>s, éviter <strong>le</strong>sbrusques changements ou <strong>le</strong>s revirements dʼopinion et de politique.Il me semb<strong>le</strong> que ces quatre vertus mériteraient dʼêtre érigés en principespolitiques de la guerre parce quʼel<strong>le</strong>s donnent un sens à lʼemploi de la force,lʼencadrent et évitent aux responsab<strong>le</strong>s politiques de se laisser aspirer pardes opérations militaires allant à lʼencontre du bien commun et de la paix.Lʼintérêt des vertus cardina<strong>le</strong>s comme principes politiques de la guerre est ausside permettre, non pas de justifier des causes qui conduisent un Etat à entrer dansun conflit, à <strong>le</strong> <strong>pour</strong>suivre ou à <strong>le</strong> terminer, mais, à tout <strong>le</strong> moins, dʼapporter ducrédit aux processus, aux mécanismes, aux débats qui ont conduit à la décision.Pour <strong>le</strong>s militaires, dont la vocation est de permettre à lʼautorité politiquedʼexercer ses pouvoirs, y compris par lʼexpression de la vio<strong>le</strong>nce, la formationà lʼéthique et la déontologie revêt un aspect absolument fondamental.Que ce soit dans la vie militaire ou dans la vie privée, il faut des lignes deconduite éga<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> temps et des dispositions comme des attitudesstab<strong>le</strong>s qui permettent au militaire de discerner puis de choisir <strong>le</strong> bien, surtoutquand des situations peuvent lʼentraîner sur une mauvaise pente.Lʼéthique indique comment se comporter et agir. El<strong>le</strong> est différente de la mora<strong>le</strong>,même si souvent on en fait des synonymes, et el<strong>le</strong> est tout aussi différente dela déontologie. La mora<strong>le</strong> positionne <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs en disant « ceci est bien et ceciest mal ». Lʼéthique facilite <strong>le</strong> travail sur soi-même <strong>pour</strong> faire fructifier <strong>le</strong>s vertusqui nous permettront de mettre nos actes en concordance avec ce qui est jugécomme moral. La déontologie est lʼensemb<strong>le</strong> des obligations que lʼon sʼengageà respecter <strong>pour</strong> garantir une pratique conforme à nos codes éthiques.Prenons un exemp<strong>le</strong> : <strong>le</strong> cinquième commandement du Décalogue énonce :« Tu ne tueras point », qui devrait plus précisément être traduit par « Tu nʼassassineraspas. » La mora<strong>le</strong> nous dit ainsi que commettre un meurtre nʼestpas bien. Lʼéthique vise à acquérir <strong>le</strong>s vertus <strong>pour</strong> ne pas tuer abusivement.Pour un chef, lʼune des vertus à acquérir est par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> sens des responsabilités,<strong>pour</strong> ne pas donner à un subordonné lʼordre de tuer un captif,transformant cette action de tuer en meurtre déguisé par lʼordre dʼune autorité.La déontologie dicte au responsab<strong>le</strong> militaire de ne pas donner dʼordre illéga<strong>le</strong>t au subordonné de ne pas exécuter un ordre contraire aux droits delʼHomme. Mais lʼon pressent bien que dans de tels cas, selon la situation,lʼambiguïté peut conduire au meurtre…`130


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresCette formation doit venir en complément des enseignements concernant <strong>le</strong>statut général des militaires. En France, el<strong>le</strong> sʼappuie sur ce que nous avonsappelé <strong>le</strong> livre vert, qui traite des fondements et principes de lʼexercice dumétier des armes. El<strong>le</strong> recherche plus particulièrement quatre objectifs :Le premier objectif est de cultiver et pratiquer des règ<strong>le</strong>s de conduite quifondent la mise en œuvre résolue dʼune force maîtrisée. Ces règ<strong>le</strong>s sʼappuientsur des consciences fermes et fortes et sur lʼexcel<strong>le</strong>nce professionnel<strong>le</strong> ;Le deuxième objectif est de faire vivre des communautés militaires uniesdans la discipline et la fraternité dʼarmes. Dans ce domaine, la formation viseà de faire comprendre aux responsab<strong>le</strong>s la notion centra<strong>le</strong> de « Philia », diffici<strong>le</strong>à traduire, et qui correspond à lʼamitié comme lien devant tendre <strong>le</strong>s relationsau sein dʼune communauté. Il sʼagit de développer des rapportshumains positifs de confiance et dʼinculquer <strong>le</strong>s vertus qui entretiennent cetteconfiance. Pour <strong>le</strong> chef, il sʼagit plus particulièrement des quatre vertus cardina<strong>le</strong>s: prudence, justice, force et tempérance.Le troisième objectif vise à servir son pays et <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs universel<strong>le</strong>s dans<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s il se reconnaît.Le dernier objectif consiste à cultiver des liens forts avec la communauténationa<strong>le</strong>. Cet objectif est déterminant <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s forces armées et de sécuritéqui sont, lors de la phase de reconstruction post-conflit, encore très fragi<strong>le</strong>s,ont souvent été des acteurs partiaux et brutaux du conflit, et continuent defaire peur à une population qui en a subit <strong>le</strong>s exactions.Lʼensemb<strong>le</strong> de ces études et formations ne doivent surtout pas être lʼapanagedes seuls militaires. Lʼexpérience des Eco<strong>le</strong>s de saint-Cyr Coëtquidan aujourdʼhui,reconnues comme la grande éco<strong>le</strong> du commandement par <strong>le</strong>sgrandes éco<strong>le</strong>s civi<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s administrations et <strong>le</strong>s grandes entreprises qui viennenty former <strong>le</strong>urs cadres et hauts potentiels à la prise de décision en gestionde crise, est que <strong>le</strong>s principes du commandement, lʼéthique des décideurset des responsab<strong>le</strong>s, sont pertinents tant dans un contexte civil que <strong>pour</strong> <strong>le</strong>monde de la vio<strong>le</strong>nce, de la prise de décision en situation comp<strong>le</strong>xe, incertaine,face à de fortes adversités.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARIII - Troisième défi : développer une culture de la philosophie mora<strong>le</strong> ausein de la communauté nationa<strong>le</strong> et tout particulièrement dans <strong>le</strong>soutils régaliens responsab<strong>le</strong>s du monopo<strong>le</strong> de la vio<strong>le</strong>nce.Nous lʼavons dit dans lʼintroduction, la troisième condition <strong>pour</strong> que lʼéducationaux questions éthiques soit efficace, cʼest que chacun fasse preuve de toléranceet considère son interlocuteur comme étant de bonne foi, sans <strong>le</strong>diaboliser ni lui faire de procès dʼintention qui sont <strong>le</strong>s conditions idéa<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>faire échouer <strong>le</strong>s entreprises de réconciliation dans <strong>le</strong>s pays sortant dʼunecrise. Or, la difficulté avec <strong>le</strong> fait de considérer son adversaire comme étantde bonne foi est quʼil sʼagit là dʼun risque considérab<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong>s Etats quisont depuis des générations en guerre civi<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s élites culturel<strong>le</strong>s et religieuses,<strong>le</strong>s classes moyennes et supérieures ont fui ou ont été décimées ;ceux qui ont pris <strong>le</strong> pouvoir sont souvent de seigneurs de la guerre, dé<strong>pour</strong>vusde toute mora<strong>le</strong>, indigne de confiance. Le mensonge, surtout en dehorsdu groupe de référence, y est la règ<strong>le</strong> culturel<strong>le</strong> et non lʼexception. Faireconfiance est donc, en soi, un risque que lʼon veut calculé, en fait incalculab<strong>le</strong>.Pourtant, sans la confiance, rien nʼest possib<strong>le</strong>, sauf la tyrannie, que cesseigneurs de la guerre ont justement instaurée. Lʼobjectif de la formation viseainsi à doter <strong>le</strong>s nouveaux responsab<strong>le</strong>s civils et militaires des principes dephilosophie mora<strong>le</strong>, <strong>pour</strong> rétablir la confiance sur des bases saines, cel<strong>le</strong> dʼunrisque raisonnab<strong>le</strong> en regard de la bonne foi de ses ex-adversaires.131


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineOr, la plupart des guerres civi<strong>le</strong>s, notamment - mais pas seu<strong>le</strong>ment - enAfrique, ont conduit à bafouer tous <strong>le</strong>s principes de cette philosophie. Citonspê<strong>le</strong>-mê<strong>le</strong> : des interprétations historiques qui cristallisent <strong>le</strong>s rancœurs,comme au Rwanda ou au Proche-Orient ; lʼinjustice réel<strong>le</strong> ou ressentie dansla répartition des ressources naturel<strong>le</strong>s et démographiques, tels que lʼenjeu delʼeau au Proche-Orient ou du pétro<strong>le</strong> au Nigeria ; des centaines de millions depauvres, orphelins, chômeurs et il<strong>le</strong>ttrés qui alimentent un réservoir de forcesdésespérées <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s extrémistes et ceux qui profitent du chaos des sociétésdésorganisées ; une explosion démographique qui fragilise <strong>le</strong>s cultures et <strong>le</strong>sautorités traditionnel<strong>le</strong>s, comme au Brésil et dans tant de pays où la populationcroît de façon vertigineuse ; <strong>le</strong>s facilités de pillage des ressources qui provoquentet alimentent la guerre comme en Asie centra<strong>le</strong> ou dans la régiondes Grands Lacs en Afrique centra<strong>le</strong>.Bref, dans bien des guerres civi<strong>le</strong>s, la stigmatisation des intentions de ses adversairesa été un élément déterminant de la politique conduite.Mais un élément est aussi venu frapper comme une étincel<strong>le</strong> : cʼest la remiseen question de la légitimité des régimes en place. Comme sʼil ne suffisait pasde diaboliser ses adversaires, ce sont <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s politiques et militairesauxquels il a été fait, souvent à juste raison, un procès dʼintention.Trois facteurs l’expliquentPremièrement, de nombreux États sʼouvrent à la démocratie sous la formequʼon lui connaît en Occident (é<strong>le</strong>ctions chiffrées, multipartisme, surveillancedes é<strong>le</strong>ctions par des observateurs internationaux, séparation des pouvoirs,distinction entre <strong>le</strong> temporel et <strong>le</strong> spirituel, etc.) ; el<strong>le</strong> conduit <strong>le</strong>s sociétés civi<strong>le</strong>sà exiger davantage des régimes en place, à moins <strong>le</strong>ur pardonner <strong>le</strong>s politiquesde discrimination et dʼexclusion, <strong>le</strong> pillage du patrimoine, la prévaricationet la faillite économique, <strong>le</strong>s mauvaises gouvernances et gestion destensions socia<strong>le</strong>s.Deuxièmement, <strong>le</strong>s situations de guerre civi<strong>le</strong> ont généré des formes devio<strong>le</strong>nce tota<strong>le</strong>ment inadmissib<strong>le</strong>, conduisant dʼail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong> Tribunal pénal internationalà se saisir justement des cas <strong>le</strong>s plus graves de génocide et decrimes contre lʼhumanité. Dʼabord, la vio<strong>le</strong>nce gratuite la plus terrifiante possib<strong>le</strong><strong>pour</strong> faire fuir <strong>le</strong>s populations : <strong>le</strong> Libéria et la Sierre Leone en ont fait laterrib<strong>le</strong> expérience durant <strong>le</strong>s années 1980-1990. Ensuite, la vio<strong>le</strong>nce qui, enlʼabsence de systèmes sécuritaire, judiciaire et pénal, laisse <strong>le</strong> terrain libre àla criminalité et au blanchiment de lʼargent sa<strong>le</strong> : <strong>le</strong>s exemp<strong>le</strong>s sont tel<strong>le</strong>mentnombreux quʼil serait injuste de pointer un pays plus quʼun autre mais citonslʼAfghanistan ou certains États au Nigeria. Mentionnons encore <strong>le</strong>s vio<strong>le</strong>ncesorchestrées par quelques entreprises ou syndicats internationaux qui ont intérêtà ce que lʼÉtat soit faib<strong>le</strong> <strong>pour</strong> faire <strong>le</strong>ur loi sur un territoire abandonné par<strong>le</strong>s pouvoirs régaliens : aujourdʼhui, Gaza en est lʼexpression la plus symboliqueoù <strong>le</strong> Hamas et <strong>le</strong> Fatah jouent <strong>le</strong> jeu troub<strong>le</strong> de la guerre <strong>pour</strong> sʼenrichir.Nʼoublions pas enfin la vio<strong>le</strong>nce entretenue parfois par <strong>le</strong>s diasporas qui profitentde la guerre et attisent <strong>le</strong> conflit sans en subir <strong>le</strong>s affres. Le Liban en estlʼexpression la plus sensib<strong>le</strong> à lʼheure actuel<strong>le</strong>.Et enfin, troisièmement, la légitimité des autorités nationa<strong>le</strong>s ne se justifieplus puisque lʼÉtat nʼapparaît plus nécessaire. Cette légitimité a disparu dansun certain nombre dʼEtats où, aux yeux de <strong>le</strong>urs peup<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s dirigeants ontmaquillé la dictature instaurée sous une démocratie de façade, entretenueselon des canons occidentaux. Dans de nombreux cas aussi, lʼÉtat a cessédʼexercer depuis longtemps sur lʼensemb<strong>le</strong> du territoire, ou alors <strong>pour</strong> récla-132


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresmer et réprimer, guère <strong>pour</strong> subvenir et protéger. Quand il a été remplacé,cʼest par des structures de consensus ou de répression, réfutant bien souventaux responsab<strong>le</strong>s nationaux <strong>le</strong> droit dʼexercer <strong>le</strong>ur souveraineté. Le gouvernementcentral nʼy représente plus rien et sa seu<strong>le</strong> légitimité estdiplomatique, cel<strong>le</strong> que lui reconnaît la communauté internationa<strong>le</strong>.Dans ce contexte, lʼusage de la vio<strong>le</strong>nce dʼÉtat <strong>pour</strong> restaurer ou préserver lʼautoritécentra<strong>le</strong> a bien souvent conduit à liguer <strong>le</strong>s communautés loca<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s milicesou <strong>le</strong>s rébellions, <strong>le</strong>s intérêts privés qui profitaient de la carence de lʼÉtat.Cette formation à la philosophie mora<strong>le</strong> permet de donner <strong>le</strong>s éléments de laforce mora<strong>le</strong> comprise comme une aide à la décision. Il sʼagit ici de développer<strong>le</strong>s vertus qui caractérisent l’action du chef : l’autorité, l’exemplarité,la sollicitude, la responsabilité, la connaissance et l’anticipation.Lʼautorité dʼabord : Ce qui caractérise lʼautorité est quʼel<strong>le</strong> porte sur el<strong>le</strong> <strong>le</strong>sresponsabilités de sa charge. Ces responsabilités peuvent être résumées enquelques verbes, qui sont autant dʼactions : discerner, décider, ordonner, agiret, enfin, contrô<strong>le</strong>r.Dans <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s de formation des officiers de lʼarmée de terre française, ces actionsfont appel à des qualités fondamenta<strong>le</strong>s : Dʼabord, discerner dans la comp<strong>le</strong>xité,parce que si la guerre se caractérise par un trait, cʼest celui de lʼincertitude, dubrouillard dont parlait Clausewitz, de la surprise et du décalage permanent entrece à quoi on sʼattendait et la dure réalité tatouée du signe de la mort.Je reviens par ce chemin à la première vertu cardina<strong>le</strong>, la prudence, que lʼonpeut appe<strong>le</strong>r aussi lʼintelligence de situation : comprendre, avoir la vue dʼensemb<strong>le</strong>même si <strong>le</strong>s données sont incomplètes, et la bonne hauteur de vue dusens des actions et des actes.Ensuite, décider dans lʼincertitude fait appel à une deuxième vertu cardina<strong>le</strong>:la force, la force de caractère en tant que courage <strong>pour</strong> faire un choix, en acceptantdes risques calculés, <strong>pour</strong> prendre des initiatives et <strong>pour</strong> oser avec audace; et puis la force de caractère au sens de la ténacité <strong>pour</strong> persévérer etne jamais renoncer à lʼessentiel qui est de remplir sa mission.Enfin, agir dans lʼadversité fait appel à toutes <strong>le</strong>s vertus : la prudence <strong>pour</strong>décider en conscience ; la force <strong>pour</strong> fédérer <strong>le</strong>s énergies et défaire lʼadversaire; la justice <strong>pour</strong> établir une voie médiane entre convictions et frottements,entre <strong>le</strong> souhaitab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> possib<strong>le</strong>, <strong>pour</strong> trouver <strong>le</strong> juste compromis entre vio<strong>le</strong>nceet compromission ; et enfin la tempérance <strong>pour</strong> commander seshommes même avec une pression énorme et supporter <strong>le</strong>s rigueurs et <strong>le</strong> sortparfois funeste dʼune mission de combat.Lʼexemplarité ensuite, consiste à mettre en accord ses actes avec ses paro<strong>le</strong>s.Je fais ce que je dis qui doit être fait ; je ne me contente pas de lʼénoncer, ou delʼordonner aux autres. Je montre lʼexemp<strong>le</strong>, au besoin en lʼexécutant avant <strong>le</strong>sautres. Pour des responsab<strong>le</strong>s politiques, ce peut être par exemp<strong>le</strong> la lutte contrela corruption, contre <strong>le</strong> népotisme.La sollicitude est une vertu inhérente à lʼexercice de lʼautorité. El<strong>le</strong> correspond,à un mouvement du chef vers son subordonné, dʼun responsab<strong>le</strong> politiquevers <strong>le</strong>s plus vulnérab<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s plus démunis. La sollicitude correspond àune plage de comportement entre deux vices : Dʼun côté, lʼindifférence, qui estlʼexpression de la suffisance, dʼun sentiment de supériorité qui conduit <strong>le</strong>s décideursà ignorer <strong>le</strong>s besoins fondamentaux de la population. Et de lʼautrecôté, la démagogie qui trahit lʼincapacité à se situer dans lʼinégalité de fait quiexiste entre <strong>le</strong> chef et <strong>le</strong> subordonné, entre un responsab<strong>le</strong> et ceux qui lʼontélu, à assumer que derrière sa propre personne, <strong>le</strong> chef est garant de la loi etde lʼordre quʼil représente et dont il a reçu la délégation de pouvoir.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR133


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineBIBLIOGRAPHIELes textes fondateurs que <strong>le</strong>s officiersfrançais sont encouragés à liredans <strong>le</strong>ur scolarité sont <strong>le</strong>s suivants :1. Documents de l’armée deTerre française– Guide <strong>pour</strong> lʼenseignement desprincipes de lʼexercice du métierdesarmes et du code du soldat ;– Livre vert : fondements et principesde lʼexercice du métier des armes ;– Directive relative aux comportementsdans lʼarmée de Terre incluant<strong>le</strong> code du soldat ;– Directive relative aux relations avecla communauté nationa<strong>le</strong> ;– Directives relatives aux comportementsen milieu international ;– Directive relative à la formationmilitaire généra<strong>le</strong>.2. Autres ouvrages :– Le rô<strong>le</strong> social de lʼofficier, MaréchalLyautey– Lʼéthique des décideurs de HenriHude, Presses de la Renaissance– «Toi, ce futur officier», Eric Bonnemaison,éditions Economica.80Le mot cardina<strong>le</strong> vient du latin cardo , « <strong>le</strong> gond ».Cʼest autour de ces vertus que pivotent toutes <strong>le</strong>sautres comme autour dʼun gond.La responsabilité, au-delà du strict aspect juridique qui semb<strong>le</strong> être <strong>le</strong> seulque lʼon retient et mis en évidence par lʼexpression « responsab<strong>le</strong> mais noncoupab<strong>le</strong> », est en premier lieu une mise en harmonie avec la mora<strong>le</strong> delʼaction. El<strong>le</strong> consiste à prendre <strong>le</strong>s devants sans attendre, à ne pas être inhibépar <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong> cours des choses déformera mon intention initia<strong>le</strong>, si bienconçue soit-el<strong>le</strong>. En second lieu, el<strong>le</strong> est une éthique de la puissance : jʼai <strong>le</strong>scapacités <strong>pour</strong> accomplir <strong>le</strong> souverain bien qui est aussi <strong>le</strong> bien commun ?Alors, je me dois dʼagir. Et jʼai reçu de la République des ordres qui engagentbien plus grand que ma petite personne, qui engagent un pays et sonpatrimoine. El<strong>le</strong> attend de moi que jʼexécute <strong>le</strong>s ordres conformément à sesintérêts ? Eh bien, jʼagis en conformité, que cela me plaise ou non.La connaissance, vertu intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>, spéculative, nʼest pas répertoriée parmicel<strong>le</strong>s habituel<strong>le</strong>ment citées. La volonté de se cultiver et de connaître est<strong>pour</strong>tant une vertu fondamenta<strong>le</strong> chez lʼofficier et dʼune manière généra<strong>le</strong> chezcelui qui détient lʼautorité et la compétence. El<strong>le</strong> permet de combattre la paresseintel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>, <strong>le</strong> conformisme, lʼabsence de remise en question de soi-même etde son métier, qui conduisent à la défaite. Une fois acquise, el<strong>le</strong> stimu<strong>le</strong>lʼenthousiasme, la réf<strong>le</strong>xion et lʼimagination, et el<strong>le</strong> permet parfois des actes degénie. Enfin, el<strong>le</strong> est une vertu parce quʼel<strong>le</strong> conduit à discerner <strong>le</strong> bien.Enfin, lʼanticipation, consiste à la fois à chercher à percer <strong>le</strong> brouillard du futuret aussi à prendre <strong>le</strong>s devants sur <strong>le</strong> destin. La première attitude qui chercheà voir loin, relève de la réf<strong>le</strong>xion, et el<strong>le</strong> est indispensab<strong>le</strong>. Mais la seconde estlʼapanage du responsab<strong>le</strong> qui possède une vision, sans doute incomplète etinsatisfaisante mais suffisante de lʼavenir, une véritab<strong>le</strong> volonté dʼaction, quirefuse de se laisser surprendre, et qui agit sur <strong>le</strong> temps et <strong>le</strong>s acteurs. El<strong>le</strong> estintimement liée à la vertu de responsabilité qui est une mise en harmonie avecla mora<strong>le</strong> de lʼaction : el<strong>le</strong> trouve tout son sens ici. Le décideur, parce quʼil sesent responsab<strong>le</strong>, est celui qui agit en premier, par lʼordre donné. Il prend <strong>le</strong>sdevants sur <strong>le</strong>s autres et sur lʼHistoire.Développer ces vertus chez <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s civils et militaires mais pluslargement encore au sein de la jeunesse et <strong>le</strong>ur faire comprendre <strong>le</strong>urimportance, permet in fine de mieux rentrer dans <strong>le</strong>s notions de guerre justeet de guerre limitée en opposition avec <strong>le</strong> concept de guerre tota<strong>le</strong>. Lebonheur <strong>pour</strong> point de mire, <strong>le</strong>s vertus cardina<strong>le</strong>s comme lignes de conduite,comme rails vers ce bonheur, comme gonds 80 sur <strong>le</strong>squels pivotent <strong>le</strong>s décisionset sʼarticu<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s visions politiques, on peut alors ancrer la notion deguerre juste et en particulier <strong>le</strong> droit de la guerre (jus ad bellum) à ces piliersde la paix.En effet, <strong>le</strong> droit de la guerre régit <strong>le</strong>s lois entre deux adversaires qui décidentde faire la guerre comme moyen de parvenir à <strong>le</strong>ur objectif politique. Ilvise à limiter la vio<strong>le</strong>nce et à protéger <strong>le</strong>s droits fondamentaux de la personnehumaine en cas de guerre. Il plonge son regard au cœur du conflit.Mais il ne peut lʼempêcher, tout au plus en contenir <strong>le</strong>s extrémités. Quant auconcept de guerre juste, c'est-à-dire des causes qui semb<strong>le</strong>nt justes à ceuxqui choisissent la vio<strong>le</strong>nce comme ressort, il est victime du fait que, dans unconflit, chacun interprète la situation dans un sens qui lui permet de justifierde son action et des méthodes employées. Jusquʼà un certain point, laguerre juste permet même de mener <strong>le</strong> combat sous ses formes vio<strong>le</strong>ntes<strong>le</strong>s plus extrêmes.Cette formation doit amener à faire comprendre que la guerre ne vise quʼàétablir un rapport de force suffisamment favorab<strong>le</strong> à un moment <strong>pour</strong>permettre la mise en place dʼune paix durab<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong> moment paroxystiquede lʼemploi des armes, <strong>le</strong> chef est celui qui continue par sa force de caractèreà imposer <strong>le</strong> cadre éthique qui fonde la légitimité de lʼaction conduite.134


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresCes défis sont considérab<strong>le</strong>s par lʼamp<strong>le</strong>ur des domaines couverts et lʼenjeu,<strong>pour</strong> des pays qui sortent dʼune crise est de disposer des ressourceshumaines susceptib<strong>le</strong>s de prodiguer ces enseignements. Mais la principa<strong>le</strong>erreur serait de croire que ces champs de compétence et de savoir êtresʼadressent dʼabord et presque seu<strong>le</strong>ment à ceux qui disposent du monopo<strong>le</strong>de la vio<strong>le</strong>nce légitime. Rien ne serait plus dangereux <strong>pour</strong> un pays quʼunefracture éthique entre un peup<strong>le</strong> et ses forces armées et de sécurité.La formation à lʼéthique et à ses principes appliqués au métier militaire, cʼestà-direà la déontologie, dépend aux Eco<strong>le</strong>s de Saint-Cyr Coëtquidan de ladirection des formations dʼélèves et non de la direction généra<strong>le</strong> de lʼenseignementet de la recherche. Il ne sʼagit pas simp<strong>le</strong>ment de souligner <strong>le</strong> lienétroit entre cette discipline et sa primauté dans <strong>le</strong>s enseignements dispensés.Ce positionnement a éga<strong>le</strong>ment une volonté pratique de service dʼunenseignement majeur concernant autant <strong>le</strong>s cadres que <strong>le</strong>s élèves.De manière très concrète, lʼenseignement est présent dans la totalité de laformation dʼun élève, <strong>le</strong> cadre de contact inscrivant chaque action dans unevolonté pédagogique qui permet de donner dʼune part <strong>le</strong>s raisons dʼun choixet dʼautre part <strong>le</strong>s principes qui fondent lʼexercice quotidien de lʼautorité. Cesenseignements distillés au quotidien ne suffisent pas et chaque élève auxéco<strong>le</strong>s sera amené à réfléchir sur trois thématiques - Principes et fondementsde lʼexercice de lʼautorité, relations entre lʼarmée et la Nation et principes dephilosophie politique, <strong>le</strong>s cas de conscience et principes de philosophiemora<strong>le</strong> - durant sa scolarité.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDans <strong>le</strong> cadre de la formation au comportement militaire, <strong>le</strong>s jeunes officiers ontla possibilité de confronter <strong>le</strong>s principes enseignés à la réalité de deux manières :– Par des travaux de groupe sur des cas de conscience réels qui, à unmoment donné et dans un contexte particulier, ont donné lieu à desarbitrages de décideurs ;– Par des mises en situation sur <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s de saint-CyrCoetquidan travail<strong>le</strong>nt afin de vérifier lʼapplication du principe dans unecirconstance.Enfin, <strong>le</strong>s témoignages dʼofficiers en opérations ou dʼofficiers confrontés àdes situations particulières (comme la confrontation avec la mort, parexemp<strong>le</strong>) viennent parachever <strong>le</strong>s enseignements qui sont donnés.ERIC BONNEMAISONest Général de Division de lʼArmée deTerre Française. Au moment de la ré -daction de sa contribution il commande <strong>le</strong>sEco<strong>le</strong>s de Saint Cyr / Coetquidan.En outre, il dirige la col<strong>le</strong>ction «Guerres etGuerriers» aux éditions Economica et estlʼauteur en particulier de « Toi ce futurofficier»135


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine2.16 Intervention du Général Franz-Xaver PFRENGLE, Commandantdes Eco<strong>le</strong>s militaires de l'Armée de terre, Dresde, Al<strong>le</strong>magneThe chal<strong>le</strong>nges of formation and of the integration of soldiers into the civil societyis the main topic of General Franz-Xaver PFRENGLE's contribution. In order toreach a satisfying result, several basic princip<strong>le</strong>s have to be respected. The raisond’être of a state is to assure the welfare of its peop<strong>le</strong>. The state has got to bea democratic state with all its aspects. And the armed forces have to be control<strong>le</strong>dby the government and the parliament. The formation of members of thearmed forces is also influenced by the following factors: The political and strategicsituation of a country, the missions of its armed forces, the traditions, the positionof the armed forces in the country, the national educational system and theeconomic and social conditions. The most important part of the formation shouldalways be the development of the personality and the character. General PFREN-GLE says he prefers to use the term „education“ instead of „formation“, becuaseeducation postulates the respect of the dignity of the individual and the humanrights. He takes the examp<strong>le</strong> of the Bundeswehr that combines military formationand civil education, for examp<strong>le</strong> by entertaining two own universities. The educationacquired by the soldiers is also a gain for the civil society, not only becausethree quarters of the graduates from Bundeswehr universities <strong>le</strong>ave the army after13 years of service and decide to work in civil society. General PFRENGLE endshis intervention with the conclusion that the formation of soldiers always needs toinclude both military and civil aspects.Les défis de la formation et de l’intégration des militairesdans la société civi<strong>le</strong>La première question quʼil convient de se poser au début dʼune interventionportant sur la formation et la réinsertion des militaires est cel<strong>le</strong> de la façon delʼaborder. Faut-il dʼabord réfléchir à lʼaspect de la formation ou faut-il mettre laréinsertion au premier plan et ainsi axer la formation sur <strong>le</strong>s besoins de la réinsertion.Je crois comme tous, quʼil nʼexiste pas de solution parfaite dans lavie, tout blanc ou tout noir, mais que la prise en compte de beaucoup dʼautresaspects, paramètres et questions doit fina<strong>le</strong>ment aboutir à une solution grisequi est un compromis.Dans <strong>le</strong> cadre de mon propos je ne vais pas tenir une approche philosophique.Je vais essayer de vous proposer quelques aspects quelque peu théoriquesmais aussi essentiel<strong>le</strong>ment pratiques que nous auront lʼoccasion dʼapprofondirpendant la discussion.Avant tout, il faut respecter quelques principes de base :Servir en liberté : LʼEco<strong>le</strong> dʼOfficiers deDresde est l'éco<strong>le</strong> centra<strong>le</strong> de formation<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s officiers de l'Armée de Terre al<strong>le</strong>mande.El<strong>le</strong> forme principa<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s élèves officierset <strong>le</strong>s officiers d'état major et <strong>le</strong>s officiersde troupe de l'armée de terre, ainsique <strong>le</strong>s officiers de réserve en stage et descours de formation spécia<strong>le</strong> et el<strong>le</strong> est responsab<strong>le</strong>de lʼéducation civique et mora<strong>le</strong>des élèves-officiers sur la base des lignesdirectrices <strong>pour</strong> lʼ«Innee Führung».En outre, el<strong>le</strong> contribue à l'élaboration desprincipes de la tactique de l'armée fédéra<strong>le</strong>.La raison d’être d’un Etat est dʼassurer <strong>le</strong> bien de son peup<strong>le</strong>. Bien sûr <strong>le</strong>bien matériel, économique et social, mais ces biens doivent être assurés surla base des principes fondamentaux dʼune société qui sont <strong>le</strong> respect desdroits de lʼhomme, la dignité humaine, la liberté, qui inclut la liberté individuel<strong>le</strong>de chaque citoyen, la justice et lʼégalité face à la justice <strong>pour</strong> toutes et tous,et enfin la tolérance.L’Etat est un état démocratique dans tous ses aspects. Il est lʼétat du peup<strong>le</strong><strong>pour</strong> <strong>le</strong> peup<strong>le</strong>. Les décisions sont prises démocratiquement par un par<strong>le</strong>mentélu librement. Les décisions démocratiques prises sur <strong>le</strong> principe de lamajorité sont respectées par chacun dans <strong>le</strong> gouvernement, lʼadministration,la société et lʼéconomie.Les forces armées sont sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> civil du gouvernement et du par<strong>le</strong>mentSi ces principes fondamentaux sont agréés par tous, je peux continuer mesréf<strong>le</strong>xions sur dʼautres aspects.136


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresLes questions de la formation des militaires sont éga<strong>le</strong>ment influencées par<strong>le</strong>s aspects suivants :— La situation politique et stratégique dʼun pays.— Les missions des forces armées.— Les traditions du pays et de ses armées.— La position des forces armées dans <strong>le</strong> pays dans tous ses aspects.— Le système dʼéducation nationa<strong>le</strong>.— Les conditions économiques et socia<strong>le</strong>s.Sʼagissant maintenant de la question de la réinsertion des militaires dans lasociété civi<strong>le</strong>, on peut constater que ce sont essentiel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s mêmes facteursdont il faut tenir en compte.Dans la suite de ma brève intervention, je ferai peu référence au Sénégal. Jeveux surtout vous par<strong>le</strong>r des quelques principes dont il devra être tenu compteet sur <strong>le</strong>squels il convient au moins de réfléchir. De plus, je vais essayer de vousexpliquer en quelques mots comment mon pays tente de répondre aux défisdont nous par<strong>le</strong>rons tout en insistant sur <strong>le</strong> fait que, <strong>le</strong> système al<strong>le</strong>mand, nʼestquʼun exemp<strong>le</strong> qui fonctionne bien dans notre pays depuis plus de 30 ans.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARJe crois que lʼélément <strong>le</strong> plus important dans la formation et en même temps dansla réinsertion, cʼest <strong>le</strong> développement de la personnalité et du caractère par lʼéducationet la formation. Personnel<strong>le</strong>ment, je préfère toujours <strong>le</strong> terme « éducation »à celui de « formation ». Cela doit toujours sʼorienter vers <strong>le</strong> respect de la dignitéet des droits de lʻhomme. Le soldat de nos jours, doit être un soldat du droit et uncombattant <strong>pour</strong> la dignité humaine, la liberté, la pluralité et la tolérance. Le savoirfairemilitaire ne vaut rien sans une mora<strong>le</strong> fondée sur <strong>le</strong>s principes éthiques quisont eux-mêmes fondés sur <strong>le</strong>s quatre vertus cardina<strong>le</strong>s. Et <strong>le</strong> soldat ne doit servirque son pays et son peup<strong>le</strong> et ne jamais se mettre au service dʼune seu<strong>le</strong> personne,dʼun parti politique ou dʼun groupe dʼintérêts. Il doit être un citoyen enuniforme. Si ces conditions ne sont pas respectées à cent <strong>pour</strong> cent, la formationdu militaire sera un échec et sa réinsertion après son service militaire ou plus particulièrementsʼil a servi en opération, sera el<strong>le</strong> aussi un échec.De plus, il est fortement probab<strong>le</strong> que la société en el<strong>le</strong>-même soit un échec.Partant du constat que <strong>le</strong>s principes que je viens de mentionner ont bien étérespectés, on peut se tourner vers dʼautres facteurs comme par exemp<strong>le</strong> :+ Lʼintégration des forces armées dans la société.+ Lʼattractivité du métier militaire.+ Les profits mutuels tirés par la société et <strong>le</strong>s forces armées.De façon généra<strong>le</strong>, il faut éduquer et former <strong>le</strong>s militaires dʼune manière quipermette à lʼétat de disposer dʼun instrument de force qui soit efficace et démocratiqueet qui permette aux militaires de se réinsérer dans la société après<strong>le</strong>ur service militaire. Pour résumer, il faut donc trois choses : une éducationde citoyen, une formation militaire et une formation civi<strong>le</strong>, qui puissent éga<strong>le</strong>mentservir à lʼaccomplissement des missions militaires tout au long de la carrièredans <strong>le</strong>s forces.Cʻest <strong>pour</strong>quoi <strong>le</strong>s forces armées al<strong>le</strong>mandes suivent depuis plusieursdécennies, un système qui intègre dans la formation des militaires, <strong>le</strong>s aspectsdu citoyen, <strong>pour</strong> en faire un citoyen en uniforme, du savoir-faire militaire etune formation à un métier civil au moins équiva<strong>le</strong>nte a cel<strong>le</strong> qui est faite dansla société ou lʼéconomie.En ce qui concerne <strong>le</strong>s militaires du rang, la formation militaire contient des aspectssociaux-politiques, juridiques et éthiques mais el<strong>le</strong> est essentiel<strong>le</strong>ment axée sur137


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineune formation du savoir-faire militaire. Mais dont la mesure de nos intérêts ou besoins,<strong>le</strong>s MDR suivent une formation professionnel<strong>le</strong> ou un approfondissementdes connaissances acquises avant <strong>le</strong>ur service militaire. Cette formation est toujourssubordonnée aux missions et au métier de soldat. Mais cette formation resteparfaitement transposab<strong>le</strong> dans la société ou lʼéconomie civi<strong>le</strong> et permet aux MDRde réussir <strong>le</strong>ur réinsertion après un service de quatre années ou plus.En ce qui concerne <strong>le</strong>s sous officiers, <strong>le</strong> système est relativement identique. Sauf,bien évidemment, la formation militaire qui se situe à un niveau beaucoup plusé<strong>le</strong>vé et qui contient des aspects de commandement avec une très large formationà lʼéthique, et des aspects sociaux-politiques et juridiques. Les sous-officiersapprofondissent en général <strong>le</strong>ur formation professionnel<strong>le</strong>, reçue avant <strong>le</strong> servicemilitaires, en acquérant une maîtrise ou un niveau du technicien juste en dessousdu niveau dʼingénieur et qui est comparab<strong>le</strong> au niveau « bac plus 3 ». Les sous officiersqui quittent <strong>le</strong>s forces armées après huit, douze ou quinze ans de service,reçoivent encore <strong>le</strong>ur solde pendant un certain temps après la fin de <strong>le</strong>ur service.Cela <strong>le</strong>ur permet de remettre à niveau <strong>le</strong>urs savoir-faire professionnels civils oudʼapprofondir davantage <strong>le</strong>s connaissances acquises <strong>pour</strong> trouver plus faci<strong>le</strong>mentun emploi dans une entreprise ou une administration civi<strong>le</strong>.Le cursus de formation des officiers comprend dʼabord une formation militaire debase de six mois. La deuxième étape, dʼune durée de neuf mois, consiste à formerun officier dans toutes <strong>le</strong>s facettes du métier : <strong>le</strong> savoir-faire militaire, la politique,lʼhistoire, <strong>le</strong> droit, la société et <strong>le</strong> commandement. Le fondement de toute cetteéducation est la Constitution de notre pays, notamment dans son premier artic<strong>le</strong>qui définit que la dignité de lʼhomme est intangib<strong>le</strong> et que la démocratie et la libertésont des va<strong>le</strong>urs de base. Ensuite, <strong>le</strong>s élèves-officiers <strong>pour</strong>suivent quatre ans de formationacadémique dans lʼune des deux universités de la Bundeswehr. Ces étudesuniversitaires ont <strong>pour</strong> objectif lʼobtention dʼun Master équiva<strong>le</strong>nt à celui qui est décernédans <strong>le</strong>s universités civi<strong>le</strong>s et il est donc reconnu. La seu<strong>le</strong> différence tient àun système de trimestres qui permet aux universités de la Bundeswehr dʼaccéderau même niveau que <strong>le</strong>s universités civi<strong>le</strong>s mais en quatre ans seu<strong>le</strong>ment.Franz Xaver PFRENGLEGénéral de brigade des Forces fédéra<strong>le</strong>sal<strong>le</strong>mandes (Bundeswehr) il commandeactuel<strong>le</strong>ment lʼEco<strong>le</strong> des Officiers delʼArmée de Terre de Dresden.Après ses études du génie mécanique àlʼuniversité des forces fédéra<strong>le</strong>s à Ham -bourg, notamment dans des Etats-majorde Division (12 e division blindée deSigmaringen) et de Corps dʼarmée (Corpseuropéen de Strasbourg). Chef de corpsdu 12e bataillon du génie lourd et rédacteurau niveau des Etats-majors centrauxdes Armées / du Ministère de la défense ilretourne à Paris <strong>pour</strong> suivre <strong>le</strong>s cours duCentre des hautes études militaires(CHEM) et de lʼInstitut des hautes étudesde la défense nationa<strong>le</strong> (IHEDN).En 2005, il prend <strong>le</strong> poste dʼadjoint augénéral commandant la Brigade Franco-Al<strong>le</strong>mande avant de partir en 2007 auxEtats Unis <strong>pour</strong> suivre <strong>le</strong> stage« dʼInternational Fellow » au Collège delʼArmée de Terre américaine (UnitedStates Army War Col<strong>le</strong>ge, Carlis<strong>le</strong>) et deprendre ensuite <strong>le</strong> commandement delʼEco<strong>le</strong> des Officiers de Dresde.Après <strong>le</strong>s études universitaires, <strong>le</strong>s officiers suivent deux stages militairessupplémentaires au cours desquels ils sont essentiel<strong>le</strong>ment préparés à <strong>le</strong>ur futureaffectation à un poste de commandement de chef de section et de commandantde compagnie dans <strong>le</strong>ur arme.Les trois-quarts des officiers quittent ou doivent quitter <strong>le</strong> service actif après treizeannées de service. Ils reçoivent dans ce cas une bonne partie de <strong>le</strong>ur soldependant encore un certain temps. Cela <strong>le</strong>ur permet dʼapprofondir davantage <strong>le</strong>sconnaissances acquises lors des études académiques, dʼélargir <strong>le</strong>s études audelàde la spécialisation choisie ou de <strong>pour</strong>suivre une formation académiquesupplémentaire jusquʼau doctorat. Avec dʼune part, <strong>le</strong>s connaissances acquisestout au long du service militaire, et plus particulièrement ce qui touche à la maîtrisedu processus décisionnel, au savoir-faire dans <strong>le</strong> commandement et <strong>le</strong> <strong>le</strong>adershipet la capacité à travail<strong>le</strong>r en état-major et en groupe et dʼautre part avec des étudesuniversitaires de très haut niveau – <strong>le</strong>s universités de la Bundeswehr sont classéesparmi <strong>le</strong>s universités dʼélite – <strong>le</strong>s officiers partant nʼont généra<strong>le</strong>ment aucunproblème de réinsertion dans <strong>le</strong> monde du travail civil. Et ceux qui restent dans <strong>le</strong>sforces sont déjà bien préparés <strong>pour</strong> servir jusqu`aux plus hauts niveaux.En conclusion et tout en insistant sur <strong>le</strong> principe, que lʼéducation du citoyen en uniformedoit prévaloir sur la formation en savoir-faire militaires, il convient en premierlieu de réfléchir aux impératifs de la réinsertion avant de définir dans <strong>le</strong> détail <strong>le</strong>contenu de la formation militaire. La formation des militaires doit donc toujourscontenir et des aspects militaires et des aspects civiques.138


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénières2.17 Intervention du professeur Cyril MUSILA, Republique Democratiquedu Congo.Sécurité humaine et démilitarisation en RépubliqueDémocratique du Congo : l’ONG PARECou la « Formu<strong>le</strong> Congolaise de Pacification »Résumé : The contribution of Professor Musila ref<strong>le</strong>cts the experiences of an initiativeof demilitarization which is considered as an alternative to the official process of Disarmament,Demobilization and Reintegration (DDR) in the Democratic Republic ofCongo. The initiative postulates that at the heart of the insecurity in many of easternparts of that country is the issue of weapons held il<strong>le</strong>gally by peop<strong>le</strong> who do not havethe right to do so. These il<strong>le</strong>gal weapons remain an obstac<strong>le</strong> to peace and human security.Because militarizing social relations, where the most mundane disputes aresett<strong>le</strong>d by arms, impedes all forms of dialogue and undermines mutual trust.By removing those arms from the hands of those who behold them, the NGO “Resolutionand Conflict Transformation – PAREC” (Peace Reconciliation), guided byPastor Daniel Ngoy Mulunda, contributes to security and peace. Active since 2001,but operating in demilitarization initiatives since 2005, this NGO proposes itself as analternative and comp<strong>le</strong>ment to the DDR process there, where the <strong>le</strong>ast did only approachvolunteers (insurgents, child soldiers enro<strong>le</strong>d by rebel groups or those ofthem who had joined the regular armed forces). Its particularity is to put at one handin the establishment of a state of trust, so that the holder of weapons can take a voluntaryand anonymous initiative, and secondly in the transformation of killing machinesinto gears serving as tools for life. Because after having exchanged theweapon against money, a bike or clothing, this NGO transforms scrap metal intoagricultural tools (shovels, hoes, rakes, etc.). The butts of guns are carvec into objetsd’art and given back to communities or individuals who had delivered their weapons.This approach to peacemaking, says the Pastor, is an application of the biblicalmessage that weapons that kill will be transformed into objects that sustain life.Cette contribution rend compte des expériences dʼune initiative de démilitarisationqui sʼinscrit en alternative au processus de Démobilisation DésarmementRéinsertion (DDR) en République Démocratique du Congo. Laditeinitiative postu<strong>le</strong> quʼau cœur de lʼinsécurité dans une grande partie de lʼEstde ce pays se trouve la question des armes détenues illéga<strong>le</strong>ment par despersonnes qui nʼen ont pas <strong>le</strong> droit. Ces armes illéga<strong>le</strong>s demeurent un obstac<strong>le</strong>à la paix et de la sécurité humaine. Car en militarisant <strong>le</strong>s rapports sociauxoù <strong>le</strong>s différends <strong>le</strong>s plus banals se règ<strong>le</strong>nt par <strong>le</strong>s armes, el<strong>le</strong>s empêchenttoute forme de dialogue et minent la confiance mutuel<strong>le</strong>.Cʼest donc en <strong>le</strong>s retirant dʼentre <strong>le</strong>s mains de ceux qui <strong>le</strong>s détiennent quelʼONG de résolution et de transformation des conflits PAREC (Paix Réconciliation)du Pasteur Daniel Mulunda Ngoy apporte sa contribution à la sécuritéet à la paix. Active depuis 2001 mais opérationnel<strong>le</strong> dans la démilitarisation depuis2005, cette ONG sʼoffre en alternative et en complément de la démarchede DDR là où ce dernier ne sʼest adressé quʼaux volontaires (rebel<strong>le</strong>s, enfantssoldats enrôlés par <strong>le</strong>s groupes rebel<strong>le</strong>s ou ceux dʼentre eux qui avaientintégré lʼarmée régulière). Sa particularité est à situer dʼune part dans la miseen place dʼun état de confiance <strong>pour</strong> que <strong>le</strong> détenteur de lʼarme puisse effectuerune démarche volontaire et anonyme, et dʼautre part dans la transformationdes engins de la mort en outils dʼentretien de la vie. Car après avoirrécupéré <strong>le</strong>s armes contre de lʼargent, un vélo, des tô<strong>le</strong>s ou des vêtements,cette ONG transforme la ferrail<strong>le</strong> en outils de production agrico<strong>le</strong> (pioches,houes, râteaux, etc.) <strong>le</strong>s crosses de fusils en objet d'art quʼel<strong>le</strong> redonne auxcommunautés ou aux individus qui avaient rendu <strong>le</strong>urs armes. Cette approchede pacification, explique ce Pasteur, est une application du message bibliqueoù <strong>le</strong>s armes qui tuent sont transformées en objets qui nourrissent la vie.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCyril Musila est professeur à lʼinstitutcatholoque et chercheur associé à lʼInstitutFrançais des Relations Internationa<strong>le</strong>s,premier think-tank ou « laboratoire d'idées» français consacré à l'analyse des questionsinternationa<strong>le</strong>s est désormais reconnucomme l'un des tout premiers thinktanks européens, et l'un des plus importantsdans <strong>le</strong> monde.139


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine1. La RDC dans la dynamique des conflits de la région des Grands LacsQuelques repères historiques1959 : Lʼannée 1959 est marquée par la « Révolution socia<strong>le</strong> » des Hutu au Rwandaqui est suivie des premiers massacres des Tutsi. Des Tutsi rwandais sont poussés àlʼexil et des centaines de milliers sont installés dans <strong>le</strong> Kivu, à lʼEst de la République Démocratiquedu Congo.1973 et 1982 : Suite à des tensions de cohabitation inter-ethniques, deux lois contradictoiressont votées concernant la nationalité des populations dʼorigine ou de culturerwandaises installées dans <strong>le</strong> Kivu. La première (1973) accorde la nationalité col<strong>le</strong>ctiveà toutes ces personnes présentes sur <strong>le</strong> territoire congolais à lʼindépendance en 1960.La seconde (1982) annihi<strong>le</strong> la première et ses effets, et établit la naturalisation par unedémarche administrative individuel<strong>le</strong>. Ces deux lois, symbo<strong>le</strong> dʼune vio<strong>le</strong>nce institutionnel<strong>le</strong>,causent des vio<strong>le</strong>nces physiques.1994 : Génocide des Tutsi et Hutu modérés au Rwanda. La fin du génocide seconclut par la défaite de lʼarmée régulière et renversement de régime par la rébellion.Plus dʼun million de réfugiés et fugitifs Hutu rwandais, dont lʼarmée défaite et <strong>le</strong>s milicesauteurs du génocide, sont installés dans des camps de réfugiés au Kivu.1996 : Démantè<strong>le</strong>ment des camps de réfugiés par lʼArmée Patriotique Rwandaise,ancienne rébellion au pouvoir depuis 1994. En effet, <strong>le</strong>s camps de réfugiés étaient devenusune base arrière et des camps dʼentrainement de lʼancienne armée défaite contre<strong>le</strong> nouveau régime au Rwanda.1996-1997 : Dans la foulée du démantè<strong>le</strong>ment des camps de réfugiés, la « PremièreGuerre du Congo » a lieu en RDC. El<strong>le</strong> commence par une rébellion armées des Banyamu<strong>le</strong>ngeet est récupérée par lʼAlliance des Forces Démocratiques <strong>pour</strong> la Libération duCongo (AFDL), une coalition de plusieurs groupes soutenue principa<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong> Rwandaet lʼOuganda et présidée par Laurent-Désiré Kabila. Cette coalition renversa <strong>le</strong> régime duMaréchal Mobutu en place depuis 1965.1998-2003 : Un an après la chute de Mobutu et la prise du pouvoir par Laurent-Désiré Kabila, une « Deuxième Guerre du Congo» éclate à partir du Kivu. El<strong>le</strong> est constituéepar une rébellion des anciens alliés de Laurent-Désiré Kabila. Cette guerre futqualifiée de « première guerre mondia<strong>le</strong> africaine» car el<strong>le</strong> a vu intervenir plusieurs arméesrégulières des Etats africains ainsi que plusieurs groupes armés rebel<strong>le</strong>s nationauxet étrangers.Une décennie d’accumulation des armes entre <strong>le</strong>s mainsdes populations civi<strong>le</strong>sSi <strong>le</strong>s tensions sont présentes assez tôt dans <strong>le</strong> Kivu, cʼest à partir de 1994que <strong>le</strong> processus prolifération des armes et de militarisation des groupes (milices)sʼinstal<strong>le</strong> dans cette région. En effet, dans <strong>le</strong>ur fuite devant lʼavancéedes rebel<strong>le</strong>s de lʼArmée Patriotique Rwandaise, lʼancienne armée et <strong>le</strong>s milicesauteurs du génocide ont emporté tout <strong>le</strong>ur arsenal militaire dans <strong>le</strong> Kivuau su et au vu de la communauté internationa<strong>le</strong> face à un Etat zaïrois danslʼincapacité à la fois dʼaccueillir des flux continus des réfugiés et dʼentreprendrela démilitarisation militaires défaits ainsi que des milices.Lʼinstallation de ces fugitifs et réfugiés dans <strong>le</strong>s mêmes camps entre 1994-1996 a fait du Kivu une « foire » humanitaro-militaire où <strong>le</strong> pillage du bétail, <strong>le</strong>commerce des produits humanitaires destinés aux réfugiés et <strong>le</strong> trafic desarmes ont constitué un marché juteux <strong>pour</strong> des groupes mafieux. Les armesde guerre disponib<strong>le</strong>s circulant à très bas prix et augmentant lʼinsécurité, <strong>le</strong>spopulations civi<strong>le</strong>s du Kivu ont été poussées à sʼarmer afin de se protéger.En particulier <strong>le</strong>s paysans qui, en sʼarmant, espéraient protéger <strong>le</strong>urs récolteset bétails contre <strong>le</strong>s « réfugiés » armés qui étaient en réalité <strong>le</strong>s anciens soldatset milices rwandais. Le démantè<strong>le</strong>ment des camps utilisés en 1996 parces derniers comme base arrière <strong>pour</strong> attaquer <strong>le</strong> Rwanda avait fini de dis-140


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances Plénièresperser toutes ces armes. Ainsi on voyait des armes de guerre vendues à vilprix par des commerçants, des femmes ou des enfants.La coalition de la rébellion dirigée par Laurent-Désiré Kabila entre septembre1996 et mai 1997 appuyée militairement par lʼOuganda et <strong>le</strong> Rwanda embrigadade nombreux enfants et de civils et contribua à introduire dʼautres armes au seindes populations civi<strong>le</strong>s. Et une année plus tard, suite à la volte-face de Laurent-Désiré Kabila, désormais Chef de lʼEtat de la RDC, contre ses anciens alliés ougandaiset rwandais, une nouvel<strong>le</strong> rébellion éclata dans <strong>le</strong> Kivu contre L.D. Kabilaavec <strong>le</strong> soutien de ces derniers. La guerre qui sʼen suivit impliqua une dizainedʼEtats et de tous <strong>le</strong>s groupes armés actifs dans la région des Grands Lacs (desrebel<strong>le</strong>s congolais, burundais, ougandais et rwandais) sans compter la force demaintien de la paix des Nations-Unies au Congo, la MONUC.Lʼenchevêtrement de rébellions et de la guerre ainsi que la présence dʼaussigrand nombre de militaires et de groupes armés contribuèrent à nuire sérieusementà la sécurité des populations et à disséminer <strong>le</strong>s armes de guerre.Différents rapports des organisations humanitaires estiment entre 3 à 4 millionsde morts liés directement ou indirectement à ces vio<strong>le</strong>nces armées,presquʼautant de cas de violations graves de droits humains et de centainesde milliers de cas de viols de femmes.Quant à la vil<strong>le</strong> de Kinshasa, la militarisation des civils a débuté au début des années1990 au cours des pillages et des émeutes urbaines de 1991 et 1993.Outre la mise à sac des entreprises et de tout <strong>le</strong> tissu économique, ces vio<strong>le</strong>ncesont concerné <strong>le</strong>s casernes où des militaires affamés et impayés ont pillé <strong>le</strong>sstocks dʼarmes <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s revendre aux civils. Presquʼau même moment, la guerrecivi<strong>le</strong> du Congo-Brazzavil<strong>le</strong> et plus tard, la chute du Maréchal Mobutu en mai1997 et lʼévanouissement de ses différentes gardes dʼélite dans la vil<strong>le</strong> dans démilitarisationont disséminé <strong>le</strong>s armes parmi <strong>le</strong>s populations civi<strong>le</strong>s. Des tonnesdʼarmes et de munitions ont éga<strong>le</strong>ment été enterrées ou cachées. Les brefs maistrès sanglants combats qui opposèrent des militaires fidè<strong>le</strong>s à Jean-PierreBemba et lʼarmée gouvernementa<strong>le</strong> en 2007 à Kinshasa démontrèrent la fragilitédu contexte sécuritaire de cette vil<strong>le</strong> et la présence dʼimportantes quantitésdʼarmes de guerre faci<strong>le</strong>ment disponib<strong>le</strong>s. Si en terme de résolution du conflit,<strong>le</strong>s accords de paix signés en 2002 ont préconisé <strong>le</strong> retrait des troupes étrangères(alliés de rebel<strong>le</strong>s et du gouvernement) du sol congolais, la démobilisationet <strong>le</strong> désarmement volontaires des combattants <strong>pour</strong> retourner à la vie civi<strong>le</strong> et<strong>le</strong> « brassage » des troupes rebel<strong>le</strong>s afin de constituer une armée nationa<strong>le</strong>, <strong>le</strong>bilan de DDR restait assez mitigé dʼautant que plusieurs combattants démobilisésont été recrutés dans de nouveaux groupes armés. Mais <strong>le</strong> plus préoccupant<strong>pour</strong> la sécurité et la paix restait la question comp<strong>le</strong>xe des groupes armés résiduels(étrangers et locaux) réfractaires aux différents processus de DDR et la disponibilitédes armes en circulation ou enterrées.2. L’alternative complémentaire « Paix Réconciliation » (PAREC)Cʼest devant un tel défi quʼest intervenue lʼONG PAREC, en tant quʼapproche quiprend en compte ces cas non intégrés dans <strong>le</strong>s processus de DDR et <strong>le</strong> niveaude prolifération des armes tout en se préoccupant de procéder différemment<strong>pour</strong> la démilitarisation. Dʼaprès <strong>le</strong>s estimations du Groupe de recherche et dʼinformationsur la paix et la sécurité (GRIP) basé à Bruxel<strong>le</strong>s, plus de 300.000armes seraient détenues par <strong>le</strong>s civils dans lʼEst du Congo et près dʼun millionsur lʼensemb<strong>le</strong> du territoire national. Les opérations de col<strong>le</strong>cte dʼarmes organiséespar lʼONG congolaise PAREC 81 du pasteur méthodiste Daniel Mulundaabordent la paix sous lʼang<strong>le</strong> de démilitarisation, de démobilisation et de réinsertiondes groupes armés dans la confiance et dans une démarche volontaire,et alternative au processus mis en place par lʼONU et lʼEtat.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR81PAREC « Paix et Réconciliation », ProgrammeŒcuménique de Transformation de conflit et deconstruction de la paix. Le PAREC se définitcomme « la formu<strong>le</strong> congolaise de pacification ».141


DEUXIÈME PARTIE – Interventions en Séances PlénièresColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLors dʼun forum de réconciliation organisé <strong>pour</strong> la paix dans <strong>le</strong> Nord-Katangarassemblant <strong>le</strong>s chefs coutumiers ainsi que <strong>le</strong>s chefs de guerre, ces derniers ontété invités par lʼONG PAREC à signer un document par <strong>le</strong>quel ils sʼengageaientà abandonner <strong>le</strong>s armes et <strong>le</strong>s tueries sous la condition que <strong>le</strong> Gouvernement reconnaisse<strong>le</strong>urs grades militaires <strong>pour</strong> ceux qui voulaient intégrer lʼarmée nationa<strong>le</strong>.Cʼest alors que cette ONG a décidé de mettre sur pied la première missionde col<strong>le</strong>cte dʼarmes en janvier 2005 sur la base du principe « échange arme àfeu contre… ». Ceci consiste à échanger une arme à feu contre un kit. La va<strong>le</strong>urou la nature du kit, ne dépassant pas 100$, dépend dʼun milieu à un autre selon<strong>le</strong>s réalités de la vie du coin concerné.Par la persuasion en lançant lʼopération « échange arme à feu contre vélo » <strong>pour</strong>la recherche de la paix, <strong>le</strong> PAREC avait obtenu par la persuasion plus de 9.500armes à feu et des tonnes de munitions dʼentre <strong>le</strong>s mains des civils et des ancienscombattants « maï-maï ». Hommes, femmes, vieillards, enfants et estropiésavaient remis <strong>le</strong>s armes quʼils détenaient afin de faire alliance de paix avec<strong>le</strong> PAREC. Plus de 20.000 combattants « maï-maï » avaient été démobilisés etréinsérés. Dans ce milieu rural où <strong>le</strong> vélo est une vraie richesse et <strong>le</strong> moyen detransport <strong>le</strong> plus efficace et <strong>le</strong> plus accessib<strong>le</strong>, la paix était bien palpab<strong>le</strong>.Ce territoire a été ainsi pacifié, permettant aux paysans de se livrer pacifiquementà <strong>le</strong>urs activités. Mais échanger un vélo contre une arme ne suffitpas, il faut trouver aussi des dividendes de la paix ; il faut désarmer <strong>le</strong>s coeurs.Des armes récupérées, <strong>le</strong> PAREC a fait des objets dʼart afin de promouvoir laculture de la paix (colombe de la paix ou en outils agrico<strong>le</strong>s) selon <strong>le</strong> messagebiblique de paix perpétuel<strong>le</strong> dʼIsaïe 2, 4 : « ils briseront <strong>le</strong>urs épées <strong>pour</strong>en faire des socs et <strong>le</strong>urs lances <strong>pour</strong> en faire des serpes. On ne lèvera pluslʼépée nation contre nation ; on nʼapprendra plus à faire la guerre ».Cyril MUSILAest chercheur associé au programmeAfrique subsaharienne à lʼInstitut Françaisdes Relations Internationa<strong>le</strong>s depuis juin2010. Il est Docteur en Sciences Socia<strong>le</strong>sde lʼEco<strong>le</strong> des Hautes Etudes en SciencesSocia<strong>le</strong>s (Paris), et professeur de Géopolitiquedes conflits africains et de PeaceResearch à lʼUniversité Catholique de Paris.Il est éga<strong>le</strong>ment expert auprès du Program -me Frontières de lʼUnion Africaine et Anciencoordinateur de programme à l'OCDE et àla Commission Economique des Nations-Unies <strong>pour</strong> l'Afrique (UNECA).Son expertise sʼétend sur <strong>le</strong>s thématiquesliées aux conflits et à la sécurité dans la régiondes Grands Lacs, en Afrique centra<strong>le</strong> etorienta<strong>le</strong>, à la reconstruction post-conflit et àla paix, à la coopération économique régiona<strong>le</strong>et aux dynamiques transfrontalières(commerciaux, démographiques…), aux infrastructuresdʼintégration régiona<strong>le</strong> (énergie,transport) et à la gestion des ressources naturel<strong>le</strong>s(minerais, eau, forêts, hydrocarbures)<strong>pour</strong> un développement durab<strong>le</strong>.Après lʼexpérience du Nord-Katanga, dʼautres opérations ont alors été enchainésdans la vil<strong>le</strong> de Kinshasa ou dans <strong>le</strong> Nord et Sud Kivu où la proliférationdʼarmes à feu créent un climat dʼinsécurité permanente. Du 22 novembre 2008au 16 mai 2009, <strong>le</strong> PAREC a organisé lʼopération « Echange arme à feu contre100$ » <strong>pour</strong> col<strong>le</strong>cter des armes à feu dans la vil<strong>le</strong> de Kinshasa. Plus de 12.090armes ramassées ont été présentées au public lors dʼune cérémonie spécia<strong>le</strong>devant <strong>le</strong> gouvernement congolais, <strong>le</strong>s armes ont été remises au Ministre de laDéfense afin dʼen assurer la transformation.Entre mars 2010 et juin 2010, <strong>le</strong> PAREC a lancé lʼopération « Echange arme àfeu contre 50$ » à Goma, dans <strong>le</strong> Nord Kivu, récupérant ainsi plus de 8.000armes remises aux autorités militaires du pays. Dʼautres opérations sont actuel<strong>le</strong>menten cours. Dans la continuité du désarmement ders rebel<strong>le</strong>s rwandais,<strong>le</strong> PAREC a initié un programme de <strong>le</strong>ur éloignement volontaire vers <strong>le</strong> Katanga,à plus de 1000 km des frontières rwando-congolaises, alors que dʼautres, à<strong>le</strong>ur demande, ont été rapatriés dans <strong>le</strong>ur pays dʼorigine en août 2010.Lʼœuvre de cette ONG montre la comp<strong>le</strong>xité de la construction de la paix en tantque tel<strong>le</strong> et lʼimportance de lʼimagination dans ce processus. Basée sur <strong>le</strong> principede la confiance mutuel<strong>le</strong> (<strong>le</strong> rebel<strong>le</strong> ou <strong>le</strong> civil donne son arme au PARECet <strong>le</strong> PAREC ne <strong>le</strong> dénonce pas à la police ou à la justice), de lʼéchange (armecontre vélo, tô<strong>le</strong> ou argent) et de la transformation des forces destructives(arme, mort) en forces de la vie (outils agrico<strong>le</strong>s), la philosophie de la paix développéeet pratiquée par lʼONG PAREC comporte une pédagogie de la paix.Des initiatives passées et en cours <strong>pour</strong>raient en faire une sorte dʼapproche régiona<strong>le</strong>de pacification des Grands Lacs, tant lʼONG contribue à rapatrier dans<strong>le</strong>ur pays dʼorigine <strong>le</strong>s rebel<strong>le</strong>s rwandais démobilisés et démilitarisés.142


TROISIÈME PARTIEInterventions en ateliersATELIERS SUR LES RELATIONS DES FDS AVEC LA NATIONAtelier 1 : Nature et Identité des FDS et <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong>démocratique3.1 Intervention de Richard Pétris, Directeur de l’Eco<strong>le</strong> de la Paix,Grenob<strong>le</strong>, FranceRésumé : Construction of peace – from a purely military approach towards acomprehensive strategy is the tit<strong>le</strong> of the intervention of Richard PETRIS, Directorof the Peace School in Grenob<strong>le</strong>, France. The first part of the intervention isdedicated to the prevention of conflicts. Therefore, one examp<strong>le</strong> from historyshows how conflict prevention can fail, this was true for the Versail<strong>le</strong>s Treaty whichincluded inacceptab<strong>le</strong> conditions for the defeated. But another examp<strong>le</strong> stands fora successful conflict prevention, namely the construction of the post-war Europethat is oriented towards a peaceful coexistence based on economic, social andcultural development. The basic ru<strong>le</strong>s of a peaceful coexistence can also be foundin the basic princip<strong>le</strong>s of the United Nations, the princip<strong>le</strong>s of the EU, and thePeace Culture of the UNESCO. The second part of the intervention treats thetime of military action and the essential civil-military comp<strong>le</strong>mentarity. This i n-cludes, above all, the matter of conflict management and the interaction betweenarmed forces and civilians during the post-conflict reconstruction of a state. Thethird part describes the art of peace, the need for the development a culture ofpeace and the good governance of societies.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCONSTRUIRE LA PAIXDe la stratégie militaire à une stratégie intégra<strong>le</strong>A son jardinier qui lui faisait valoir la centaine d’années quedemande un cèdre du Liban <strong>pour</strong> devenir adulte,<strong>le</strong> maréchal Lyautey rétorqua : « Alors, plantez-<strong>le</strong> cet après-midi ! »LʼEco<strong>le</strong> de la paix, à partir dʼune expérience partagée avec la <strong>Fondation</strong><strong>Char<strong>le</strong>s</strong> Léopold <strong>Mayer</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Progrès de lʼHomme (FPH)+ de recherche et dʼaction sur <strong>le</strong>s thèmes de la responsabilité et de lasolidarité,+ de dialogue et de collaboration avec tous <strong>le</strong>s acteurs concernés, y compris<strong>le</strong>s militaires,+ en tenant compte des besoins de plus en plus aigus en matière deconstruction du vivre ensemb<strong>le</strong> et de prévention des conflits de toutessortes, sʼest forgé une conception de la paix qui nous conduit à privilégier<strong>le</strong>s éléments et concepts suivants :+ la construction de la paix comme processus,+ lʼévolution du besoin de sécurité et de sa nature, et en particulierlʼimportance du acteur humain dans la dynamique du développement etdu progrès,+ lʼimportance dʼune culture de la paix, avec lʼobjectif de plus en plusimpérieux du vivre ensemb<strong>le</strong> à tous <strong>le</strong>s niveaux, du local au global,Richard Petris est <strong>le</strong> directeur de l’Eco<strong>le</strong>de la Paix de Grenob<strong>le</strong>, qui travail<strong>le</strong> à lapromotion dʼune culture de la paix et duvivre ensemb<strong>le</strong>, dans nos quartiersjusquʼaux territoires <strong>le</strong>s plus lointains. El<strong>le</strong>conçoit des outils pédagogiques, développedes animations et des formations,assure des modu<strong>le</strong>s universitaires, organisedes rencontres dʼexperts, des colloques,des expositions, et développe unréseau de partenaires en France et dans<strong>le</strong> monde. Son ambition est dʼassocier tous<strong>le</strong>s acteurs de la société, y compris <strong>le</strong>s entreprises,au développement humain, etdʼimpliquer <strong>le</strong>s jeunes dans cette constructionde lʼavenir.143


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineEl<strong>le</strong> propose, conjointement avec la FPH, une réf<strong>le</strong>xion, sur <strong>le</strong>s deux modesdʼune conférence et dʼateliers dʼapprofondissement, sur <strong>le</strong> thème de laconstruction de la paix, de la culture et de lʼart de la paix, <strong>pour</strong> un public decadres militaires.De lʼobservation et de la prise en compte du temps long de lʼhistoire, il ressortque, <strong>pour</strong> tragique quʼel<strong>le</strong> soit et sans ignorer ce qui ne relève pas de notrepropre héritage culturel et de civilisation, lʼaventure des hommes est néanmoinsorientée vers une recherche de sécurité. Au milieu des vicissitudes decette quête, un constat finit par émerger : <strong>le</strong> fondement dʼune action militaireconforme à la Charte des Nations Unies et au droit des conflits armés est deramener ou de garantir une paix durab<strong>le</strong>. Par conséquent, et contrairement àce que lʼon <strong>pour</strong>rait considérer de prime abord, guerre et paix ne sont pas desdémarches disjointes, mais au contraire des processus qui sʼinterca<strong>le</strong>ntcomme une sorte de continuum dʼaction : lʼentrée en guerre signifie lʼéchecdes tentatives de prévention du conflit ou de la crise en cause, et donc la recherchedu règ<strong>le</strong>ment de cette crise en vue dʼun retour à la paix. Lʼaction militaireest donc un des moyens possib<strong>le</strong>s et qui peut sʼavérer indispensab<strong>le</strong><strong>pour</strong> créer <strong>le</strong>s conditions dʼune paix juste. Cette action sʼarticu<strong>le</strong> par contre nécessairementavec une démarche civi<strong>le</strong>, que nous proposons ici de penser entermes de culture et de pédagogie de la paix.Lʼarticulation entre <strong>le</strong>s acteurs civils et <strong>le</strong>s acteurs militaires des trois temps duconflit - avant, pendant et après- fait donc de plus en plus partie de la comp<strong>le</strong>xitédu monde. Lʼapproche paix, de la construction de la paix, sera toujoursplus globa<strong>le</strong>. A la recherche dʼun vivre ensemb<strong>le</strong> stab<strong>le</strong> et durab<strong>le</strong>, ilnous semb<strong>le</strong> quʼil est temps de penser un art de la paix.1. La prévention du conflitLa sécurité est loin de se cantonner au seul aspect militaire. La notion de sécuriténationa<strong>le</strong> a, peu à peu, été remplacée par cel<strong>le</strong> de sécurité humaine(perspective de lʼindividu) et cel<strong>le</strong> de sécurité globa<strong>le</strong>. Prévenir <strong>le</strong>s conflits etpréserver la paix et la sécurité, au sens <strong>le</strong> plus large, consiste bien davantageen une construction du vivre ensemb<strong>le</strong>, sur un « contrat de gouvernance», malgré <strong>le</strong>s différences et <strong>le</strong>s dissensions, sur <strong>le</strong> long terme, articulant <strong>le</strong>s différentsacteurs civils et militaires, locaux, régionaux et nationaux, quʼen unprocessus de réaction ad hoc aux menaces.Deux précédents historiques donnent une idée, en quelque sorte, des enjeux :+ <strong>le</strong> traité de Versail<strong>le</strong>s, après la première guerre mondia<strong>le</strong>, aujourdʼhuiconsidéré comme ayant montré, <strong>pour</strong> la paix du monde, la nocivité deconditions inacceptab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> <strong>le</strong> vaincu+ la construction européenne, construction dʼun vivre ensemb<strong>le</strong> basé sur<strong>le</strong> développement économique, social et culturel, fait la démonstration,unique dans lʼhistoire, de la formu<strong>le</strong> gagnante : dialogue, coopération etréconciliation.1.1 Quelques grands principes fondateurs du vivre ensemb<strong>le</strong> internationalCes principes fondateurs constituent un horizon de va<strong>le</strong>urs qui encadrent <strong>le</strong>sconflits :+ Principes fondateurs de lʼONU et effort actuel de réforme du systèmeinternational (cf. Stéphane Hessel)+ Principes de lʼUE (cf. Henri Oberdorff sur la construction européenne)144


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers+ Culture de la paix, UNESCO, 1999 : « Le grand défi de cette fin desièc<strong>le</strong> est de nous préparer à gérer la comp<strong>le</strong>xité, à penser globa<strong>le</strong>mentet à voir aussi loin que <strong>le</strong>s pères de la Charte des Nations Unies quandils se sont engagés à préserver <strong>le</strong>s générations futures du fléau de laguerre. Le seul moyen d'honorer cette promesse est de favoriser <strong>le</strong> passaged'une culture de la guerre, qui fut trop longtemps la nôtre, à une culturede la paix.» Federico Mayor, Directeur Général de lʼUNESCO, 1996.1.2 La sécurité, une donnée pluriel<strong>le</strong>En vertu de ces grands principes internationaux reconnus tant par <strong>le</strong>s Etatsque par <strong>le</strong>s organisations internationa<strong>le</strong>s, la sécurité comporte aujourdʼhui diversvo<strong>le</strong>ts : alimentaire, énergétique, environnemental, économique et financier,commercial et concurrentiel. Dès lors, el<strong>le</strong> représente bien, avanttout, un ensemb<strong>le</strong> de va<strong>le</strong>urs et de visions du monde, jusquʼà laisser toute saplace à la batail<strong>le</strong> de lʼintelligence (<strong>Char<strong>le</strong>s</strong>-Philippe David).1.2.1 La sécurité humaine, une approche axée sur <strong>le</strong>s individuset <strong>le</strong>ur sécuritéCette approche est la garantie dʼune stabilité durab<strong>le</strong> des sociétés.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR1.2.2 La sécurité humaine dans un univers international conflictuel :état des lieux des conflits contemporainsLes civils sont devenus <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s victimes des conflits dʼaujourdʼhui. Lemodè<strong>le</strong> de la guerre « classique » étant de plus en plus obsolète, <strong>le</strong>s formesde conflits contemporains mê<strong>le</strong>nt désormais différents types dʼacteurs militaireset paramilitaires, nationaux et transnationaux.1.3 Le vivre ensemb<strong>le</strong> comme soc<strong>le</strong> de la sécurité humaineLa diplomatie préventive peut sʼavérer insuffisante <strong>pour</strong> construire <strong>le</strong> vivreensemb<strong>le</strong>.A contrario, la paix relève de plusieurs grands champs dʼaction qui participentà la stabilisation des sociétés humaines, ce qui réduit <strong>le</strong>s risques de conflits :la Culture et son vo<strong>le</strong>t Education ; la Société ; <strong>le</strong> Pouvoir et la politique en général; lʼEconomie et <strong>le</strong> développement ; lʼEcologie et la relation avec lʼenvironnement.Lʼimplication des acteurs locaux et régionaux est indispensab<strong>le</strong>dans la construction de ce vivre ensemb<strong>le</strong>.Lʼidée sous-jacente est que la paix est bien avant tout un processus relationnel,qui sʼappuie sur <strong>le</strong>s cultures de toutes <strong>le</strong>s parties concernées par un conflit.2. Le temps de l’action militaire et la nécessairecomplémentarité civilo-militaireAu-delà de lʼaction militaire, lʼenjeu du recours à la force consiste à ne pashypothéquer <strong>le</strong>s chances de la paix à restaurer, et à pouvoir dégager <strong>le</strong>sconditions nécessaires à la construction dʼune paix positive. Dans ce cadre,lʼaction civi<strong>le</strong> a notamment <strong>pour</strong> vocation de jouer un rô<strong>le</strong> d'évaluation del'usage de la force : l'objectif commun à atteindre est bien la paix à rétablir, surfond dʼexigence éthique.2.1 Modélisation autour de la notion de conflit : de la gestion à larésolution des conflitsLa gestion des conflits, <strong>pour</strong> pouvoir conduire à la construction dʼune paixpositive, ne doit pas être pensée uniquement en termes militaires. Cel<strong>le</strong>-ci se145


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainedéploie globa<strong>le</strong>ment autour de trois grands modè<strong>le</strong>s, qui agencent de façondifférentes <strong>le</strong> vo<strong>le</strong>t militaire et <strong>le</strong>s vo<strong>le</strong>ts civils, sur un axe qui va de la confrontation(coercition) à la négociation (conciliation politique), en passant par lamédiation (régulation politique) (Patrick Lecomte).2.2 Différents types d’approches globa<strong>le</strong>s de la part des institutions dedéfense+ Lʼapproche globa<strong>le</strong> française (CICDE) : un héritage de lʼhistoire+ Lʼapproche globa<strong>le</strong> par lʼOTAN : la logique dʼune alliance+ Lʼapproche globa<strong>le</strong> par lʼUE : la construction européenne commelaboratoire de paix2.3 La place des civils dans la réf<strong>le</strong>xion sur la sortie de criseLa question qui se pose est cel<strong>le</strong> de la coordination entre <strong>le</strong>s vo<strong>le</strong>ts civils et<strong>le</strong> vo<strong>le</strong>t militaire.Les civils en tant que citoyens : la société civi<strong>le</strong>, notamment à travers <strong>le</strong>sONG prise en compte de dimensions socia<strong>le</strong>sLes autorités civi<strong>le</strong>s : <strong>le</strong>s autorités politiques, notamment des par<strong>le</strong>mentairesou des conseil<strong>le</strong>rs civils qui accompagnent <strong>le</strong>s militaires sur <strong>le</strong> terrain(<strong>le</strong>s POLAD, <strong>pour</strong> « policy advisors »), dans <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> dʼinformation etde vérification des procédures démocratiques.? Importance du politique comme pièce maîtresse de lʼarchitecture delʼEtat de droit? Importance des acteurs économiques dans la reconstructionQuand <strong>le</strong>s armes se sont tues, <strong>le</strong> "faiseur de paix" reprend <strong>le</strong> premier rô<strong>le</strong>,sans <strong>pour</strong> autant que <strong>le</strong> militaire soit absent du processus, à la fois en appuide ses moyens à des fins "civi<strong>le</strong>s" et en posture dissuasive.3. L‘art de la paix : culture de la paix et gouvernance dessociétésLʼenjeu est bien la consolidation de la démarche de paix, en passant de lapaix des armes (soit lʼabsence de conflit) à la paix positive (absence de conflit+ bien-être social, économique et humain) et à lʼart de la paix (soit la constructionde relations pacifiées et solides). La paix ne saurait se concevoir de façondurab<strong>le</strong> sans développement facteur de progrès, ni <strong>le</strong> développement sans lapaix. Lʼart de la gouvernance consiste bien à gérer <strong>le</strong>s transitions et à fairecoopérer ensemb<strong>le</strong> <strong>le</strong>s différents niveaux.2.4 Culture et pédagogie de la paixDans la phase suivant une guerre, <strong>le</strong>s militaires doivent pouvoir jouer un rô<strong>le</strong>en sortant du cadre traditionnel de lʼaction militaire <strong>pour</strong> intégrer un autre registreculturel et tenir compte du contexte géographique et socio-économiquedans <strong>le</strong>quel ils agissent.Une culture de la paix suppose une pédagogie de la paix, qui repose surquelques éléments fondamentaux :+ Des va<strong>le</strong>urs spécifiques : responsabilité, respect et dialogue+ Des dualités à articu<strong>le</strong>r : individu et col<strong>le</strong>ctif ; local et global ; court termeet long terme ; éthique et pratique ; émotion et rationalité ; unité de lapersonne humaine et diversité des cultures+ Une bonne gouvernance se matérialise par un art des sociétés à se146


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersgérer el<strong>le</strong>s-mêmes, à se construire comme communautés et àpréserver lʼéquilibre avec <strong>le</strong>ur environnement extérieur dans un cadreconstitutionnel.+ Un processus dʼapprentissage est nécessaire car « Construire la paix,<strong>pour</strong> des acteurs qui sortent dʼun conflit, cʼest être comme un chasseurqui a un fusil à un coup et qui nʼa jamais appris à tirer. » (Pierre Calame)2.5 Maîtrise de la vio<strong>le</strong>nce : <strong>pour</strong> une coordination efficace des acteurscivils et militairesPour pouvoir ériger une gouvernance stab<strong>le</strong>, basée sur une réel<strong>le</strong> culture dela paix, il importe de gérer au mieux la coordination entre <strong>le</strong>s militaires et <strong>le</strong>scivils en vue de :+ maîtriser la vio<strong>le</strong>nce et développer une volonté de vivre ensemb<strong>le</strong>,+ impulser un processus de développement économique et social+ mettre à lʼécart <strong>le</strong>s affects dans <strong>le</strong>s relations socia<strong>le</strong>s et politiques, afindʼagir de façon raisonnée. (Général Bache<strong>le</strong>t)2.6 Paix, sécurité et formation : <strong>le</strong> potentiel des populations dans laconstruction d’un vivre ensemb<strong>le</strong> stab<strong>le</strong>Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes armées des pays en développement doivent jouer un rô<strong>le</strong> réel dans lʼEtat:<strong>pour</strong> être légitime, une armée doit être perçue comme uti<strong>le</strong> par la population(grande importance du lien armée nation ; lʼarmée comme enfant de la démocratiedans certains Etats comme lʼAl<strong>le</strong>magne, <strong>le</strong> Liban ou la Turquie dʼAtatürk)Dans ce contexte, <strong>le</strong>s médias ont un rô<strong>le</strong> à jouer <strong>pour</strong> forger <strong>le</strong> lien entre lʼarméeet la nation.CONCLUSIONLe défi commun aux acteurs civils et aux acteurs militaires, sous la responsabilitéessentiel<strong>le</strong> des autorités politiques garantes du projet col<strong>le</strong>ctif, nʼestilpas en définitive de pratiquer un art de la paix <strong>pour</strong> gagner ensemb<strong>le</strong> labatail<strong>le</strong> de lʼintelligence ?Richard PETRIS, est Directeur Eco<strong>le</strong> de la Paix à Grenob<strong>le</strong>, France. Anciencadre de la Banque Nationa<strong>le</strong> Paris il a fait <strong>le</strong> choix de se consacrer à lʼéducation<strong>pour</strong> la Paix en lien avec la ligue de lʼenseignement.147


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.2 Intervention du Général (e.r.) Hugues de COURTIVRON, Membre duRéseau international de la FPH, FranceRésumé : The intervention of General (ret.) Hugues de COURTIVRON dealswith a veritab<strong>le</strong> democratic control of the armed forces and sees a social pact,based on law and confidence as its most important e<strong>le</strong>ment. In his introduction,General de COURTIVRON answers the question why a democratic control of thearmed forces was so essential. There is an important need for the civil society tobe assured that their army acts in line with the given mandate. Then he states thatthe types of vio<strong>le</strong>nce are currently changing and that therefore, the need for securitychanges as well. The 21st century so far has been marked by a rapid evolutionof the international relations. But whi<strong>le</strong> the amount of international armedconflicts has reduced significantly, many new incertainties concerning the intranationalconflicts have recently appeared. The basic goals of the United Nationshave also changed: „In a greater freedom: development, security and respect ofhuman rights for everyone“ has been the tit<strong>le</strong> of the report of the Secretary Generalin September 2005. The <strong>le</strong>cturer also analyses the handicaps of democracyregarding security policy. In order to be ab<strong>le</strong> to regulate the <strong>le</strong>vel of future conflicts,it is necessary to make a global approach on human security. It is also necessaryto continue to sensitise the civil society and the media to the questions of security.Finally, General de COURTIVRON states that a global and coordinated approachof a reform of the security sector is needed.Pour un véritab<strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratiquedes forces armées : un pacte social fondésur <strong>le</strong> droit et la confianceIntroduction : Pourquoi <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratique des forces armées estilnécessaire ?Toute démocratie regroupe la communauté des citoyens qui acceptent de vivreen col<strong>le</strong>ctivité selon une organisation quʼils ont définie ensemb<strong>le</strong> sur la basedʼun contrat social, quel<strong>le</strong> que soit la forme adoptée <strong>pour</strong> cette organisation.Cʼest sur la base de ce contrat librement accepté que chaque citoyen peutvivre en harmonie avec ses voisins. Cʼest donc aussi sur <strong>le</strong> respect de cecontrat social que peuvent sʼédifier <strong>le</strong>s bases dʼune sécurité humaine respectueusede tous.Or parmi <strong>le</strong>s institutions qui permettent à la démocratie de fonctionner <strong>le</strong>s forcesarmées sont destinées à protéger <strong>le</strong> pays et ses citoyens contre <strong>le</strong>s menacesqui <strong>pour</strong>raient mettre en danger lʼintégrité du pays, ses institutions, et <strong>le</strong>s citoyensqui <strong>le</strong> composent. Mais cel<strong>le</strong>s-ci sont aussi cel<strong>le</strong>s qui ont <strong>le</strong> pouvoir dela mettre en danger lorsque <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s institutionnel<strong>le</strong>s ne sont pas respectéesou sont détournées de <strong>le</strong>ur objectif de préservation du contrat social.Il est donc essentiel de réfléchir aux moyens qui permettent, dʼune part derenforcer lʼefficacité des forces armées dans lʼexécution de <strong>le</strong>ur mission deprotection, et dʼautre part de permettre aux citoyens de sʼassurer que cesforces armées agissent bien dans <strong>le</strong> cadre du mandat qui <strong>le</strong>ur a été confié.Pour maintenir cet équilibre indispensab<strong>le</strong> entre efficacité de lʼemploi desforces armées et respect des fondements du contrat social qui lie <strong>le</strong>s citoyensentre eux, il est nécessaire dʼétablir des dispositifs de contrô<strong>le</strong> de ces mêmesforces armées par <strong>le</strong>s citoyens ou <strong>le</strong>urs représentants.148


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersMais ces dispositifs de contrô<strong>le</strong> ne peuvent suffire sʼils ne sont pas accompagnésdʼune volonté très forte des chefs militaires de respecter <strong>le</strong>s institutionset <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s du droit en vigueur dans <strong>le</strong> pays, bases même du contratsocial et garantes de la bonne harmonie qui doit régner entre <strong>le</strong>s citoyens.Cette volonté doit être confortée par lʼétablissement indispensab<strong>le</strong> de relationsde confiance entre responsab<strong>le</strong>s militaires et représentants du peup<strong>le</strong>.Après avoir présenté <strong>le</strong>s changements apparus dans la nature des conflits etdans <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des forces armées en ce début du XXI° sièc<strong>le</strong>, on essayera dʼesquisserce qui <strong>pour</strong>rait être une approche globa<strong>le</strong> de la réforme démocratiquedes forces armées, englobant <strong>le</strong>s pouvoirs exécutif et législatif et la sociétécivi<strong>le</strong>, dans une logique de consolidation de la paix. El<strong>le</strong> offre dʼabord un cadredʼintégration <strong>pour</strong> toutes <strong>le</strong>s réformes partiel<strong>le</strong>s au niveau de lʼarmée, de la policeet de la justice, même si <strong>le</strong>ur mise en œuvre ne peut souvent être effectuéeque séquentiel<strong>le</strong>ment 82 .On en déduira un certain nombre de propositions concrètes dont lʼadoptionpermettrait dʼaccroître l’efficacité du secteur de la sécurité dans <strong>le</strong> respectdes principes de gouvernance démocratique. Ces propositions porterontsur <strong>le</strong> niveau national, régional et international. Une partie reprend cel<strong>le</strong>s quiavaient été faites à lʼoccasion du séminaire de Lomé (28/29 mai 2009) organisépar lʼOIF sur « La réforme des systèmes de sécurité et de justice enAfrique francophone ».En effet à tous <strong>le</strong>s niveaux et dans tous <strong>le</strong>s domaines <strong>le</strong>s conditions nécessairesà la prévention des conflits, à <strong>le</strong>ur règ<strong>le</strong>ment quand ils éclatent et àlʼinstauration dʼune paix durab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> monde sont en p<strong>le</strong>ine évolution.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR1 - La vio<strong>le</strong>nce et donc <strong>le</strong>s besoins de sécurité changent11 Des relations internationa<strong>le</strong>s en p<strong>le</strong>ine évolutionA lʼaube du XXI° sièc<strong>le</strong>, lʼévolution des conflits armés mise en évidence par lapremière étude sur ce sujet publiée par <strong>le</strong> Human Security Center, <strong>le</strong> 17 octobre2005, est marquée par deux tendances lourdes :Une nette diminution des conflits armés entre Etats qui s’accompagnede nouvel<strong>le</strong>s incertitudes sur <strong>le</strong>s conflits intra-étatiques. Dans ce type deconflits post-guerre froide, en lʼabsence de règ<strong>le</strong>s démocratiques durab<strong>le</strong>mentétablies, <strong>le</strong>s principaux fauteurs de troub<strong>le</strong> qui apparaissent sont <strong>le</strong>s organisationsarmées, quʼel<strong>le</strong>s soient supposées défendre lʼordre public ou la souveraineténationa<strong>le</strong> (forces de sécurité) ou sʼy opposer.Si bien que dans <strong>le</strong>s pays affaiblis par une pauvreté croissante, et une absenceou un effondrement général dʼinstitutions étatiques capab<strong>le</strong>s de procurerà la population <strong>le</strong>s services minimums nécessaires, <strong>le</strong>s approchestraditionnel<strong>le</strong>s consistant à faire intervenir des forces nationa<strong>le</strong>s ou internationa<strong>le</strong>s<strong>pour</strong> rétablir la sécurité apparaissent soit très insuffisantes, soit inopérantes.En effet lʼemploi de forces armées seu<strong>le</strong>s nʼa jamais permis dedétruire par lui-même <strong>le</strong>s racines originel<strong>le</strong>s de tels conflits, la plupart dutemps liés au sous-développement économique et à la violation des droits delʼhomme. Dans de nombreux cas ces forces, pas ou peu contrôlées par <strong>le</strong>pouvoir politique, participent même à lʼaggravation du conflit.Ces évolutions ont aussi un impact sur <strong>le</strong>s principes qui devraient désormaisrégir <strong>le</strong>s relations internationa<strong>le</strong>s. Ils ont été rappelés récemment encore àlʼoccasion de la présentation du Rapport du Secrétaire Général de lʼONU enseptembre 2005, « Dans une liberté plus grande: développement, sécuritéet respect des droits de l’homme <strong>pour</strong> tous ». Ce rapport marque une82Voir « La réforme du secteur de la sécurité en RépubliqueCentrafricaine : heurts et malheurs de laraison hollistique », Renner Onana, Actes du séminairede Lomé, 28/29 mai 200 sur « La réformedes systèmes de sécurité et de justice en Afriquefrancophone ».149


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineinf<strong>le</strong>xion significative dans <strong>le</strong> contenu des objectifs proposés aux NationsUnies, 60 ans après <strong>le</strong>ur création.Pour justifier <strong>le</strong> projet de réformes des Nations Unies, au lieu de partir de lʼobjectifhistorique de paix et de sécurité internationa<strong>le</strong>, lʼobjectif majeur proposéaux Etats est désormais « la recherche du développement, de la sécurité etdes droits de lʼhomme <strong>pour</strong> tous ».Ainsi lʼobjectif majeur ne vise plus seu<strong>le</strong>ment lʼétablissement de la paix entre<strong>le</strong>s Etats mais dʼabord la satisfaction des droits fondamentaux <strong>pour</strong> chaquemembre de lʼhumanité, seu<strong>le</strong> garante de la paix et de la sécurité internationa<strong>le</strong>s.Et il précise : « …Ce sont <strong>le</strong>s besoins et <strong>le</strong>s espoirs des peup<strong>le</strong>s dumonde qui doivent nous servir de phare. Dans <strong>le</strong> rapport que jʼai publié à lʼoccasiondu millénaire, intitulé ʻNous, <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>sʼ (A/54/2000), jʼai repris <strong>le</strong>s premiersmots de la Charte <strong>pour</strong> bien montrer que si lʼONU rassemb<strong>le</strong> des Étatssouverains, cʼest <strong>pour</strong> répondre aux besoins des peup<strong>le</strong>s quʼel<strong>le</strong> existe et cʼestvers cela que doit tendre son action. Comme je lʼai dit quand jʼai été élu <strong>pour</strong>la première fois il y a huit ans, nous devons à cette fin ʻparfaire <strong>le</strong> triang<strong>le</strong> queforment <strong>le</strong> développement, la liberté et la Paixʼ».De plus il considère que lʼatteinte de cet objectif est soumise à deux conditions.Dʼune part lʼétablissement de la sécurité doit sʼaccompagner dʼunepolitique de développement et de respect des droits de lʼhomme, reconnaissantainsi à ces deux composantes une importance et une légitimité quʼel<strong>le</strong>snʼont acquise que très progressivement dans lʼhistoire des soixante premièresannées de vie de lʼONU. Dʼautre part il souligne que sécurité, développementet droits de lʼhomme sont étroitement interdépendants et quʼon ne peut obtenirlʼun sans réaliser <strong>le</strong>s deux autres.Le rapport de Koffi Annan met aussi en exergue un concept nouveau etessentiel <strong>pour</strong> lʼévolution des conditions de prévention ou de règ<strong>le</strong>ment desconflits, qui concerne la responsabilité de lʼEtat. En affirmant que la responsabilitépremière de lʼEtat est de protéger ses citoyens, il établit ce devoir commela contrepartie incontournab<strong>le</strong> du respect du principe de la souveraineté nationa<strong>le</strong>,règ<strong>le</strong> de droit international considérée jusque là comme intangib<strong>le</strong>.Ainsi <strong>le</strong> principe du respect de la souveraineté nationa<strong>le</strong> établi par <strong>le</strong>Traité de Westphalie de 1648, un des principes fondateurs des relationsinternationa<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>quel s’appuyait <strong>le</strong> fonctionnement des NationsUnies, perdrait une partie de sa légitimité en cas de violation évidentepar un gouvernement de son devoir de protection des citoyens.Une deuxième conséquence importante de cette évolution est la remise encause au moins partiel<strong>le</strong> de la définition wébérienne de lʼEtat comme « <strong>le</strong>détenteur du monopo<strong>le</strong> légitime de lʼusage de la force ». En effet lʼexercice dece monopo<strong>le</strong> ne serait désormais acceptab<strong>le</strong> quʼà la condition sine qua nonque cet usage de la force par lʼEtat soit exclusivement consacré à la protectiondes citoyens.« Simultanément, on assiste à la diminution généra<strong>le</strong> du monopo<strong>le</strong> de lʼEtatsur lʼusage légitime de la force sous la pression de quatre facteurs en partieinterconnectés :83Revisiting the State Monopoly on the LegitimateUse of Force, Alyson Bai<strong>le</strong>s, Ulrich Schneckenerand Herbert Wulf, Policy Paper n°24, DCAF, 2007.+ dʼabord la privatisation des moyens de sécurité,+ la multiplication des interventions internationa<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>s conflits intraet interétatiques,+ la globalisation des échanges et donc des crises,+ enfin la fragilisation et parfois même lʼeffondrement de lʼétat dans sonconcept westphalien » 83 .150


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersLʼEtat voit donc ainsi encadrés et sa raison dʼêtre et son monopo<strong>le</strong> de lʼusagede la force.12 - Une nouvel<strong>le</strong> approche de la conduite des états fondée de plus enplus sur la notion de gouvernance démocratique, cʼest-à-dire sur un modede régulation à plusieurs niveaux, local, national, régional et international, soumisau principe de subsidiarité et respectueux des principes de la démocratiedélibérative, quʼel<strong>le</strong> soit représentative, directe, ou mise en œuvre selondʼautres principes que ceux de la seu<strong>le</strong> démocratie représentative occidenta<strong>le</strong>.13 - Une nouvel<strong>le</strong> conception de la sécurité plaçant la priorité sur la sécuritéhumaine. Cel<strong>le</strong>-ci fait référence à la fois aux droits des citoyens à vivredans un environnement sécuritaire et à lʼexistence dʼune activité politique, socia<strong>le</strong>,religieuse et économique au sein de chaque société à lʼabri de vio<strong>le</strong>ncesorganisées. En ciblant directement <strong>le</strong>s individus, la sécurité humaine englobela sécurité contre la privation économique, la quête <strong>pour</strong> un niveau de vie acceptab<strong>le</strong>et une garantie dʼassurer <strong>le</strong>s droits humains fondamentaux, dont <strong>le</strong>droit à la liberté dʼexpression et dʼassociation. Sa définition est aussi évolutiveque <strong>le</strong>s risques et <strong>le</strong>s menaces auxquels <strong>le</strong> monde doit faire face.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDès lors que <strong>le</strong>s menaces aux frontières qui <strong>pour</strong>raient mettre en péril lʼintégritéterritoria<strong>le</strong> du pays ne sont plus identifiées comme <strong>le</strong>s plus probab<strong>le</strong>s et<strong>le</strong>s plus dangereuses, dès lors que la souveraineté nationa<strong>le</strong> du pays est garantie,en particulier par <strong>le</strong>s instances internationa<strong>le</strong>s, cʼest bien <strong>le</strong> souci de lasécurité humaine qui devient majeur.14 - Le handicap de la démocratie en matière de politique de sécuritéCes évolutions sont rendues dʼautant plus nécessaires par <strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>sses inhérentesde tout système démocratique face au pouvoir des forces de sécurité.Car ses règ<strong>le</strong>s de fonctionnement sont souvent mises à mal, dès lors que lasécurité intérieure ou extérieure est mise en danger. Plusieurs facteurs expliquentcette faib<strong>le</strong>sse :+ dʼabord <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> même de lʼusage de la force par lʼEtat conduitbien souvent <strong>le</strong> pouvoir législatif et la société civi<strong>le</strong> à considérer quʼonest là devant un domaine réservé. Le même raisonnement vaut <strong>pour</strong>lʼattitude de lʼopinion face au comportement des forces internes de sécurité.En cas de bavure ou dʼincident, lʼopinion publique tend à sʼautocensureret hésite à mettre en question <strong>le</strong> comportement desmembres des forces de maintien de lʼordre ; ceux-ci bénéficient, et cʼestnormal, dʼun a priori favorab<strong>le</strong> puisquʼon a du mal à imaginer quʼils<strong>pour</strong>raient enfreindre la loi en tant que représentants de lʼEtat qui en est<strong>le</strong> garant. En conséquence <strong>pour</strong> préserver sa liberté dʼaction, lʼexécutifcherchera toujours la réalisation la plus rapide possib<strong>le</strong> dʼune préconditionindispensab<strong>le</strong>: démontrer à lʼopinion que « la patrie est endanger » ou que « lʼordre public est menacé ».+ lʼopinion publique considère que <strong>le</strong>s questions de sécurité sont réservéesà des spécialistes qui seuls ont <strong>le</strong>s moyens dʼévaluer <strong>le</strong> degré derisques et surtout de menaces <strong>pour</strong> la sécurité nationa<strong>le</strong> ou mondia<strong>le</strong>et <strong>le</strong> niveau des moyens nécessaires <strong>pour</strong> y faire face. Ainsi undeuxième niveau de contrô<strong>le</strong> démocratique est affaibli : lʼexécutif laisseaux experts du renseignement <strong>le</strong> soin de définir <strong>le</strong> niveau de gravitéde la menace et aux experts de la sécurité celui de déterminer <strong>le</strong>smoyens matériels et humains <strong>le</strong>s plus adaptés <strong>pour</strong> y répondre.151


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine+ un dernier facteur tient au souci de laisser <strong>le</strong>s autorités de mise en œuvredes moyens de sécurité, la liberté dʼaction nécessaire au succès de lamission que <strong>le</strong>ur confie lʼexécutif. Ce souci parfaitement légitime et nécessaireest toutefois régulièrement utilisé comme un argument <strong>pour</strong> abandonnertoute forme de contrô<strong>le</strong> démocratique, non pas sur la conduite desopérations el<strong>le</strong>s-mêmes, mais sur <strong>le</strong> respect des règ<strong>le</strong>s démocratiques,des lois et des conventions dans la conduite même de ces opérations.Ainsi, par suite dʼune série de démissions successives, chacun des acteurs dujeu démocratique est conduit, du fait de la sanctuarisation de la responsabilitésécuritaire de lʼEtat, à abandonner aux autres une partie parfois majeurede ses prérogatives.Cet abandon entraîne par inertie une perte progressive des compétences politiqueset techniques nécessaires à lʼexercice de ces responsabilités decontrô<strong>le</strong>. En fait lʼévolution des mentalités et des mœurs, avec la disparitiondu service militaire et <strong>le</strong> développement de comportements individualistes,conduisent à la fois à une individualisation des compétences et à un cloisonnementdes responsabilités. Par voie de conséquence, on assiste à une formede pétrification dʼune situation antérieure à lʼétablissement de la démocratie,dans laquel<strong>le</strong> la guerre et plus largement la sécurité, aurait été un métier tropcompliqué <strong>pour</strong> ne pas être laissé aux militaires et aux autres membres desforces de sécurité.Et de fait on constate, y compris parfois dans certaines démocraties dites avancées,une quasi-absence de centres de recherche indépendants dans <strong>le</strong> domainede la sécurité, un désintérêt du monde universitaire <strong>pour</strong> ces questions,des compétences insuffisantes des par<strong>le</strong>mentaires ou des fonctionnaires par<strong>le</strong>mentairesdans ces domaines. Ces faib<strong>le</strong>sses peuvent être accentuées par uneexpertise insuffisante des personnels civils des ministères en charge de lasécurité au sens large et enfin par une méconnaissance, par <strong>le</strong>s autorités encharge de la sécurité, des règ<strong>le</strong>s démocratiques et du nécessaire dialogue avec<strong>le</strong>s représentants des pouvoirs exécutif, législatif ou de la société civi<strong>le</strong>.15 - Les Etats en sortie de crise ou en transition sont soumis à desremèdes inadaptésCes facteurs compliquent dʼautant plus la situation des Etats ayant récemmentaccédé à lʼindépendance (ex-colonies, ex-bloc de lʼEst) ou sortis récemmentde conflits quʼils sont soumis bien souvent à la mise en œuvre parla communauté internationa<strong>le</strong> de politiques de coopérations inadaptées enmatière de sécurité et de défense. Si bien que <strong>le</strong>s processus de démocratisationdans ces pays sont en général voués à lʼéchec, tout particulièrementdans ce domaine. En particulier, « <strong>le</strong>s expéditions destinées ʻà diffuser la démocratieoccidenta<strong>le</strong>ʼ sont vouées à lʼéchec non par faib<strong>le</strong>sse de la cause,mais par <strong>le</strong> refus mécanique du message venu du dehors. 84 »Ces politiques de coopération sont la plupart du temps fondées sur <strong>le</strong>s méthodestraditionnel<strong>le</strong>s de coopération qui donnent la priorité à la modernisation desmoyens matériels et humains de sécurité et de défense. El<strong>le</strong>s reposent sur unprésupposé qui voudrait que la sécurité soit garantie dès lors que <strong>le</strong>s forces desécurité sont bien équipées et bien entraînées. Or ce système qui montre déjàses limites dans <strong>le</strong>s grandes démocraties sʼavère très insuffisant dans <strong>le</strong>s Etatssortant de crise et souffrant de faib<strong>le</strong>sses institutionnel<strong>le</strong>s structurel<strong>le</strong>s.84« Diplomaties périmées », Bertrand Badie, artic<strong>le</strong>La Croix, 16 août 2010.Ainsi <strong>le</strong>s moyens de coopération utilisés se fondent prioritairement sur <strong>le</strong> déploiementde forces étrangères ainsi que sur lʼéquipement et la formation des152


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersforces de sécurité nationa<strong>le</strong>s. Mais ils ne traitent pas la question de la délimitationde <strong>le</strong>urs cadres dʼaction respectifs sur la base de critères démocratiques: <strong>le</strong>s forces de sécurité deviennent <strong>le</strong> problème et non la solution.Simultanément, des efforts très insuffisants sont consacrés à lʼaméliorationdes compétences des institutions de supervision et de contrô<strong>le</strong>.Qui plus est, <strong>le</strong> traitement des causes économiques, socia<strong>le</strong>s, culturel<strong>le</strong>s delʼinsécurité ne fait pas lʼobjet des mêmes efforts de coopération et dʼinvestissementshumains et financiers, loin sʼen faut. Ces états sont donc confrontésdʼune part à une réforme parcellaire de <strong>le</strong>ur organisation de sécurité et dʼautrepart à lʼabsence de traitement des causes profondes de lʼinsécurité.16 - Le cas des Etats organisés sous un régime non démocratiqueLes nombreux états qui ne se placent ni dans la catégorie des démocraties nidans cel<strong>le</strong> des états en transition représentent une catégorie particulière danslaquel<strong>le</strong> la question de la sécurité intérieure ET extérieure est traitée sur labase des concepts traditionnels :+ organisation centralisée et hiérarchisée, même si <strong>le</strong>s centres de pouvoiret de décision peuvent être multip<strong>le</strong>s ;+ approche étatique et col<strong>le</strong>ctive de la sécurité dans laquel<strong>le</strong> la sécuritédu groupe prime sur la sécurité individuel<strong>le</strong> ;+ exacerbation de la défense du principe de souveraineté nationa<strong>le</strong> et refusde toute interférence de lʼétranger dans <strong>le</strong>s affaires intérieures du pays.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARChacun des Etats qui relèvent de cette catégorie utilise de façon variab<strong>le</strong> toutou partie de ces concepts en fonction de ses spécificités historique, géographiqueet culturel<strong>le</strong>.Plus généra<strong>le</strong>ment, la prise en compte des évolutions en cours évoquéesprécédemment, résulte souvent dans une crispation sur des réf<strong>le</strong>xes nationalistespotentiel<strong>le</strong>ment générateurs de conflit.Ce sont souvent ces mêmes Etats qui sʼassocient activement au refus dʼélargir<strong>le</strong> champ dʼintervention de lʼONU dans <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment des conflits tout ensʼopposant à toute réforme de cette organisation qui conduirait, aussi peu quece soi, à rééquilibrer encore <strong>le</strong>s prérogatives traditionnel<strong>le</strong>s des Etats au profitdʼorganisations internationa<strong>le</strong>s. Dans ce domaine ils peuvent à lʼoccasionlier des alliances de circonstance avec certaines grandes démocraties.En conclusion, depuis la fin des années 90, lʼeffondrement du système bipolaire- qui assurait une sécurité jusque là fondée sur lʼéquilibre de la terreur -nʼa pas permis à la communauté internationa<strong>le</strong> dʼaccéder aux « dividendesde la paix » tant attendus. En faisant ce constat, <strong>le</strong> monde a progressivementpris conscience du fait que lʼobstac<strong>le</strong> majeur à la promotion durab<strong>le</strong> de la paix,de la démocratie et du développement résidait dʼabord dans lʼinsécurité humaine.Mais surtout que cel<strong>le</strong>-ci provenait en premier lieu de lʼexistence desystèmes de sécurité inadaptés et de politiques de réforme de ces systèmestrès insuffisantes.Ces dernières souffrent des caractéristiques suivantes :+ absence de réf<strong>le</strong>xion globa<strong>le</strong> des pays ou des organisations internationa<strong>le</strong>sintervenant dans <strong>le</strong>s pays émergents ou en sortie de crise ; etdonc absence de lien entre politique de restauration de la sécurité etpolitique dʼaide au développement ;153


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine+ absence de dispositif coordonné au niveau des pays donateurs ;+ approche traditionnel<strong>le</strong> des questions de sécurité, centrée sur laréforme des moyens ;+ découplage entre réforme des moyens et réforme des organismes decontrô<strong>le</strong> et de conduite ;+ manque de ressources humaines <strong>pour</strong> renforcer dans ce domaine <strong>le</strong>scapacités des niveaux exécutif, législatif et de la société civi<strong>le</strong> ;+ nombre limité dʼONG intéressées par <strong>le</strong> secteur sécurité et son contrô<strong>le</strong>par la société civi<strong>le</strong> ;+ manque dʼadaptation aux cultures et situations loca<strong>le</strong> 85 .Mais aussi :+ vision archaïque des relations entre états : deuxième guerre en Irak,conflit Géorgie/Russie ;+ vision archaïque de la mise en œuvre dʼune politique de sécurité :intervention israélienne au Liban, puis à Gaza.2 - Régu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> niveau de conflictualité : vers une approchegloba<strong>le</strong> de la sécurité humaineFace à ce constat la question qui se pose désormais nʼest plus tant de faireobstac<strong>le</strong> à la guerre entre Etats mais de chercher en amont par quels moyensil est possib<strong>le</strong> de régu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> niveau de conflictualité dans <strong>le</strong> monde.Il nʼest pas question ici de considérer que <strong>le</strong> risque de guerre aurait définitivementdisparu mais de constater quʼavant de dégénérer en conflits internationaux,<strong>le</strong>s crises sont précédées dʼun certain nombre de signes quʼil doitêtre possib<strong>le</strong> de détecter permettant ainsi à un dispositif de gouvernanceadapté de réagir dans des délais et de manière appropriés.Lʼobjectif serait dʼarriver à établir un monde pacifié, cʼest-à-dire un mondedans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s conflits sont régulés à un niveau suffisamment bas <strong>pour</strong> éviterde conduire à lʼexplosion de la vio<strong>le</strong>nce, mais sans <strong>pour</strong> autant être occultés<strong>pour</strong> ne pas générer de frustration. Comme <strong>le</strong> dit très clairement Jean-François Bayart : « La démocratie libéra<strong>le</strong>, cʼest <strong>le</strong> siff<strong>le</strong>t de la cocotte-minute.Cʼest la possibilité institutionnel<strong>le</strong> de résoudre politiquement des crises quisinon se résolvent par <strong>le</strong> rapport de force social et militaire et donc dans lavio<strong>le</strong>nce. Cʼest ce qui sʼest passé dans la plupart des pays africains depuislʼindépendance : à partir du moment où vous ne laissez pas <strong>le</strong>s conflits vivreune médiation politique par <strong>le</strong> biais de la contestation, des jeux politiques,des manifestations, de la liberté de la presse, la cocotte-minute explose. 86 »Cette vio<strong>le</strong>nce peut-être physique sous forme de conflits armés, émeutesurbaines, atteintes physiques aux biens et aux personnes. Mais el<strong>le</strong> peut aussiêtre socia<strong>le</strong> : ghettoïsation, discrimination, paupérisation.85Voir « Les équivoques de la démocratisation souscontrô<strong>le</strong> international : Le cas du Kosovo (1999-2007) », Odi<strong>le</strong> Perrot, LGDJ, 11 décembre 2007.86« Cautionner la dictature perpétue <strong>le</strong>s conflits »,interview de Jean-François Bayart, La Croix,28 février/1° mars 2009Il sʼagit donc successivement :+ avant <strong>le</strong> conflit de proposer des mesures qui permettent de supprimer<strong>le</strong>s causes susceptib<strong>le</strong>s de transformer <strong>le</strong>s conflits en explosions devio<strong>le</strong>nce ;+ si <strong>le</strong> conflit éclate, de sʼassurer que lʼusage de la force par <strong>le</strong>s forcesde sécurité ne conduit pas un surcroît de vio<strong>le</strong>nce non maîtrisée maisbien à un retour à une situation pacifiée ;154


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers+ enfin après un conflit vio<strong>le</strong>nt de prendre <strong>le</strong>s mesures nécessaires <strong>pour</strong>éradiquer définitivement <strong>le</strong>s causes qui en ont été lʼorigine afindʼassurer une paix durab<strong>le</strong>.Le contrô<strong>le</strong> démocratique des forces armées, en sʼinsérant dans la démarchede réforme du secteur de la sécurité, tente de répondre à ces besoins. Il sʼagitdonc dʼabord dʼune démarche qui implique une analyse globa<strong>le</strong> de la situationde lʼensemb<strong>le</strong> du secteur. Deuxièmement, il relie <strong>le</strong>s mesures visant àaccroître l’efficacité du secteur de la sécurité au principe de la gouvernancedémocratique. Des mesures de RSS visant uniquement à moderniseret professionnaliser <strong>le</strong>s forces armées et de sécurité, sans quʼun contrô<strong>le</strong>civil et démocratique sur ces dernières soit simultanément assuré, ne correspondentdonc pas aux exigences du concept de la RSS. Cette doub<strong>le</strong> tâcheest extrêmement diffici<strong>le</strong>, même <strong>pour</strong> des pays en développement et des étatsen transition désireux de se réformer. Enfin il est indispensab<strong>le</strong> dʼune part deprendre en considération la durée nécessairement très longue <strong>pour</strong> parveniraux changements de mentalité indispensab<strong>le</strong>s à lʼenracinement de cesréformes dans <strong>le</strong>s mentalités et dʼautre part dʼéviter lʼempi<strong>le</strong>ment dʼinitiativesnon coordonnées.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR21 - A conditions préalab<strong>le</strong>s différentes, chances de succès inéga<strong>le</strong>sMême si lʼidée de programmes de RSS est <strong>le</strong> plus souvent suscitée delʼextérieur, un succès durab<strong>le</strong> dans ce domaine si comp<strong>le</strong>xe et si délicat esttributaire de réformes qui doivent pouvoir être initiées et adaptées au planlocal. Les pays en développement stab<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squels un processus dedémocratisation a été ouvert par des é<strong>le</strong>ctions ou une autre forme dʼexercicepacifique du pouvoir présentent un contexte général comparativementfavorab<strong>le</strong>. Cʼest éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> cas <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats en transition, succédant à unrégime autoritaire, qui sʼefforcent de prendre part à des organisationsrégiona<strong>le</strong>s basées sur la démocratie. La situation de départ nʼest pas mauvaisenon plus dans <strong>le</strong>s Etats dʼaprès-guerre, dans <strong>le</strong>squels des missions multinationa<strong>le</strong>sde paix instaurent des conditions généra<strong>le</strong>s visant à unereconstruction et où <strong>le</strong>s acteurs locaux manifestent une certaine disponibilitéaux réformes. Les chances de succès des activités de RSS sont plutôtmaigres en revanche dans des nations agitées par un conflit armé ou connaissant<strong>le</strong> début de la phase de transformation du conflit, ou encore dans desEtats au régime autoritaire ou dans des démocraties intolérantes avec desélites peu disposées à sʼengager sur la voie des réformes.3 - Propositions et recommandationsDans <strong>le</strong> cadre de ce séminaire <strong>le</strong>s propositions qui suivent porteront principa<strong>le</strong>mentsur la conduite des réformes au niveau national et régional ou sousrégionalmais des travaux importants sont en cours ou doivent être entrepris<strong>pour</strong> adapter <strong>le</strong>s institutions internationa<strong>le</strong>s et en particulier lʼONU aux évolutionsactuel<strong>le</strong>s de la conflictualité dans <strong>le</strong> monde. Ces travaux concernent enparticulier la détermination des limites qui <strong>pour</strong>raient être fixées au traditionnelmonopo<strong>le</strong> de la vio<strong>le</strong>nce légitime par <strong>le</strong>s Etats.31 - Cadre général de la RSS au niveau des EtatsLe pacte social qui fonde toute communauté est la base du bien vivreensemb<strong>le</strong>. Il est toujours <strong>le</strong> résultat dʼun processus très long qui conduit à unéquilibre extrêmement fragi<strong>le</strong>, sans cesse menacé ou remis en cause, entre<strong>le</strong> respect de la liberté et de la dignité <strong>pour</strong> chacun, et celui de la sécurité <strong>pour</strong>155


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainetous. Pour être efficace, toute réforme du secteur de la sécurité doit donc seplacer dans la perspective du respect, voire du renforcement de ce pactesocial. Après un conflit ou un changement de régime, la réforme doit êtreabordée de façon globa<strong>le</strong>, cohérente et coordonnée au niveau fonctionnelcomme au niveau géographique.Cʼest la raison <strong>pour</strong> laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s recommandations proposées ne peuvent êtremises en œuvre sans englober une dimension qui touche <strong>le</strong>s autres fonctionset lʼensemb<strong>le</strong> du territoire. Cʼest aussi la raison <strong>pour</strong> laquel<strong>le</strong> el<strong>le</strong>s doiventtenir compte des attentes des pays voisins en matière de sécurité, ce quiimplique quʼel<strong>le</strong>s soient définies dans un cadre régional.La deuxième recommandation est d’agir systématiquement dans la duréequi seu<strong>le</strong> peut permettre de consolider <strong>le</strong>s progrès du bien vivre ensemb<strong>le</strong> etdonc d’obtenir des transformations consolidées et durab<strong>le</strong>s. Il faut dutemps <strong>pour</strong> permettre aux mentalités dʼévoluer à partir des <strong>le</strong>çons apprises,en particulier après de tels échecs.Propositions :+ préparation dʼun cadre qui sʼappuie sur <strong>le</strong>s principes généraux degouvernance démocratique du secteur de la sécurité ;+ définition dʼun processus de réforme de ce secteur global, cohérent etcoordonné ; il nʼest pas possib<strong>le</strong> dʼenvisager une réforme durab<strong>le</strong> dusecteur de la sécurité dans son ensemb<strong>le</strong> si toutes ses composantesne sont pas analysées en même temps. On constate par exemp<strong>le</strong> uneprise en compte croissante des liens étroits entre désarmement,démobilisation, réintégration dans la vie civi<strong>le</strong> et respects des droits delʼhomme dʼune part et état de droit de lʼautre, même sʼil reste encorebeaucoup à faire <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s rendre opérationnels. Lʼapproche de la gouvernancedu secteur de la sécurité doit al<strong>le</strong>r au-delà du niveau de lʼétat<strong>pour</strong> atteindre <strong>le</strong> niveau de la sécurité humaine, des col<strong>le</strong>ctivités loca<strong>le</strong>set des individus. Enfin il sʼagit aussi de traiter <strong>le</strong> problème des acteursnon étatiques (compagnies privées de sécurité et compagnies militairesprivées) et <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> quʼel<strong>le</strong>s peuvent jouer dans <strong>le</strong> processus ;+ recherche dʼun contenu et de principes directeurs de la réforme adaptésaux contextes locaux <strong>pour</strong> pouvoir être durab<strong>le</strong>s ; et selon desprocessus correspondant aux cultures et aux attentes loca<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>permettre <strong>le</strong>ur appropriation par <strong>le</strong>s acteurs et bénéficiaires locaux.Cette approche indispensab<strong>le</strong> est donc fondée sur la nécessité dedévelopper et promouvoir des programmes de réforme et de gouvernanceinsérés dans <strong>le</strong>s contextes spécifiques locaux. Ceci implique lapromotion dʼune méthode selon laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s intervenants extérieurs nesont que des facilitateurs dans <strong>le</strong> processus de réformes qui doiventêtre définies, mises en œuvre et gérées au niveau local et national par<strong>le</strong>s différents responsab<strong>le</strong>s du pays concerné. Ceci implique aussi defournir aux acteurs locaux et nationaux <strong>le</strong>s capacités indispensab<strong>le</strong>s<strong>pour</strong> prendre la responsabilité de <strong>le</strong>ur propre sécurité et de <strong>le</strong>ur propregouvernance ;+ promotion dʼune approche régiona<strong>le</strong> chaque fois que possib<strong>le</strong>. Leconstat du lien étroit entre développement, droit de lʼhomme et sécuritéet du processus de globalisation en cours conduit à privilégier de plusen plus une approche régiona<strong>le</strong>, seu<strong>le</strong> à même dʼassurer la cohérenceindispensab<strong>le</strong> des programmes de réforme et des dispositifs decontrô<strong>le</strong> démocratique mis en place.156


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers32 - Contribuer à la sensibilisation de la Société Civi<strong>le</strong> et des Médiasaux questions de sécurité33 - Donner au pouvoir législatif des capacités de contrô<strong>le</strong> et decontre-pouvoir+ Donner aux députés et aux commissions par<strong>le</strong>mentaires <strong>le</strong>séléments de formation et d’information indispensab<strong>le</strong>s ;+ Etablir et développer un dialogue ouvert entre autorités d’exécutionet pouvoir législatif ;+ Former <strong>le</strong>s fonctionnaires par<strong>le</strong>mentaires travaillant auprès descommissions par<strong>le</strong>mentaires de défense ;34 - Donner au pouvoir exécutif 87 de vraies capacités de pilotage et decontrô<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s forces el<strong>le</strong>s-mêmes, <strong>pour</strong> quʼil puisse garder sa p<strong>le</strong>ineindépendance par rapport au commandement de ces forces.Ainsi il est important que <strong>le</strong>s ministres de tutel<strong>le</strong> ne soient pas des autoritésmilitaires ou policières mais des élus civils 88 .Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR35 - Renforcer la compétence des autorités chargées de la mise enœuvre des moyens de la sécurité (commandants des forces armées,directeurs de la police, des centres pénitentiaires, etc.),36 - Etablir un cadre juridique contraignant <strong>pour</strong> contrô<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s activitéset l’organisation des entreprises militaires et de sécurité privées.37 - Au niveau des régions et des organisations régiona<strong>le</strong>s, il est indispensab<strong>le</strong>de s’appuyer sur <strong>le</strong>s organisations régiona<strong>le</strong>s qui sontactuel<strong>le</strong>ment en train de monter en puissance et de voir <strong>le</strong>ursattributions progressivement renforcées dans <strong>le</strong> domaine ducontrô<strong>le</strong> démocratique des forces de sécurité, tout en respectant<strong>le</strong> principe de subsidiarité. Il est souhaitab<strong>le</strong> en effet dʼadapter auxsituations géopolitiques propres à chaque région <strong>le</strong>s différents processusde réforme. Dans ce domaine on peut citer <strong>le</strong>s progrès considérab<strong>le</strong>sréalisés par lʼUnion Africaine ou lʼUNASUR, qui se construisent àlʼimage de lʼUnion Européenne, et qui sont appelées, comme cette dernière,à jouer un rô<strong>le</strong> croissant dans <strong>le</strong> domaine de la gouvernance etdu contrô<strong>le</strong> démocratique du secteur de la sécurité. Lʼémergencerécente des organisations régiona<strong>le</strong>s en tant quʼinstance politique derégulation dans <strong>le</strong> champ du contrô<strong>le</strong> démocratique des questions desécurité est un phénomène majeur qui permet des arbitrages à unniveau souvent plus acceptab<strong>le</strong> par <strong>le</strong>s pays concernés que <strong>le</strong> niveauonusien. En particulier il permet dʼéviter <strong>le</strong>s blocages politiques au seindu Conseil de Sécurité <strong>pour</strong> des raisons souvent étrangères auproblème local de sécurité concerné.A cet égard, <strong>le</strong> recours au niveau régional chaque fois que possib<strong>le</strong> <strong>pour</strong> r ég<strong>le</strong>r<strong>le</strong>s problèmes de sécurité <strong>pour</strong>rait tout à la fois donner au niveau régional <strong>le</strong>poids politique qui lui est de plus en plus nécessaire, tout en permettantdʼenvisager à terme la réforme du Conseil de Sécurité de lʼONU <strong>pour</strong> <strong>le</strong> rendreplus légitime et plus efficace.Cʼest ainsi quʼil existe un document adapté au contexte des pays africainsdans <strong>le</strong> domaine de lʼarticulation entre, dʼune part, <strong>le</strong>s opérations dedésarmement, démobilisation, reconversion, et dʼautre part la réforme dusecteur de la sécurité.87A condition d’avoir déterminé au préalab<strong>le</strong> si <strong>le</strong>sconditions démocratiques permettant <strong>le</strong> soutien dupouvoir exécutif sont bien remplies.88Cf : « Similarités et différences entre <strong>le</strong>s systèmesde sécurité d’Afrique francophone et anglophone »,Niagalé Bagayoko, Actes du séminaire de Lomé,28/29 mai 2009.157


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineIl faut faciliter éga<strong>le</strong>ment la création de réseaux régionaux dʼexperts juniorsou seniors, intéressés par la réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s questions de sécurité régiona<strong>le</strong>.Ces réseaux servent de réservoir de réf<strong>le</strong>xions et de propositions. Cʼestéga<strong>le</strong>ment dans ces réseaux que peuvent être identifiés <strong>le</strong>s futurs responsab<strong>le</strong>sdes grandes administrations, <strong>le</strong>s collaborateurs de ministres, de membresdes gouvernements ou de députés.38 - Mettre en place des sites de références législatives/juridiques ainsique des réseaux d’experts. A titre dʼexemp<strong>le</strong>, un site Internet sur lalégislation relative aux entreprises de sécurité privées (www.privatesecurityregulation.net)vient dʼêtre mis en place. Un certain nombre dʼONGont pris lʼinitiative de créer des réseaux dʼexperts disponib<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>intervenir au titre du conseil ou <strong>pour</strong> des missions particulières dans <strong>le</strong>domaine de la sécurité. Ces réseaux sont utilisés comme réservoirs deressources <strong>pour</strong> répondre aux besoins qui apparaissent en matière deréforme de la sécurité. Tel est <strong>le</strong> cas du site du Réseau Francophone deRecherches sur <strong>le</strong>s Opérations de Paix (www.operationspaix.net) créépar des universitaires canadiens au début des années 2000.HUGUES DE COURTIVRON,général de Brigade (2S), a servi35 années dans lʼarmée de terrefrançaise où il a occupé des postes deresponsabilité en France et Nouvel<strong>le</strong>-Calédonie, en Al<strong>le</strong>magne, en Bosnie-Herzégovine (FORPRONU) et au Kosovo(KFOR) jusquʼen 2002 . Puis il a étédirecteur régional à Tuzla de la Missionde lʼOSCE en Bosnie-Herzégovine(2003-2004), expert associé chargé desprogrammes de coopération avec laBosnie-Herzégovine au Centre deGenève <strong>pour</strong> <strong>le</strong> Contrô<strong>le</strong> démocratiquedes forces armées (2004-2006) puis chefde projet de la CommissionEuropéenne<strong>pour</strong> <strong>le</strong> soutien au Par<strong>le</strong>ment du Kosovo(2006-2008).ConclusionLʼévolution du contexte international marqué par la mondialisation des questionsde sécurité et lʼébran<strong>le</strong>ment du monopo<strong>le</strong> sécuritaire des Etats conduità une évolution profonde de la nature même des conflits et des moyens <strong>pour</strong><strong>le</strong>s résoudre.Les menaces deviennent plus diffuses et sʼaffranchissent des frontières, tandisque la globalisation offre de nouvel<strong>le</strong>s opportunités de mise en réseau desmoyens de <strong>le</strong>s traiter.Mais surtout il apparaît désormais que <strong>le</strong> traitement de lʼinsécurité et de lavio<strong>le</strong>nce ne peut plus reposer sur lʼusage exclusif de la force qui ne peut quʼentraiter <strong>le</strong>s effets. La nouvel<strong>le</strong> gouvernance mondia<strong>le</strong> doit donc sʼattacher enpriorité au traitement des causes de lʼinsécurité, toujours liées à lʼabsence dedéveloppement économique et au non-respect des droits de lʼhomme.Ce déplacement du centre de gravité des priorités impose que <strong>le</strong> secteur dela sécurité soit contrôlé plus efficacement par un système de représentationdémocratique rénové au niveau international, régional et national. Ce systèmede représentation démocratique rénové redonnerait au politique sa placecentra<strong>le</strong> qui est lʼinstitutionnalisation du conflit, cʼest-à-dire <strong>le</strong> développementnon-vio<strong>le</strong>nt du conflit par <strong>le</strong> débat politique et non pas son occultation. Il permettraità chaque acteur de disposer de la capacité dʼexercer p<strong>le</strong>inement sesattributions : information, contrô<strong>le</strong> et initiative des citoyens à travers la sociétécivi<strong>le</strong> et la représentation législative, direction et pilotage par <strong>le</strong> pouvoir exécutifcivil, mise en œuvre et conseil par <strong>le</strong>s autorités de sécurité chargées ducommandement des moyens.Cette approche rénovée nʼest possib<strong>le</strong> quʼà la condition que chacun ait <strong>le</strong>smoyens et la volonté dʼexercer ses responsabilités.El<strong>le</strong> implique aussi que tout programme de réforme soit étroitement coordonnéavec <strong>le</strong>s programmes de développement et de rétablissement des droits delʼhomme.El<strong>le</strong> implique enfin une approche globa<strong>le</strong> et coordonnée de la réforme du secteurde la sécurité, profondément enracinée dans <strong>le</strong> contexte culturel, historiqueet géographique local, intégrée aux enjeux régionaux et mise en œuvredans la durée par <strong>le</strong>s acteurs locaux eux-mêmes.158


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers3.3 Intervention de Jörg-Dietrich Nackmayr, consultant historien, Al<strong>le</strong>magneRésumé : Dans son intervention intitulée „L'Europe de la défense – <strong>le</strong> long cheminvers une Armée Européenne“, <strong>le</strong> politologue al<strong>le</strong>mand Karl-Dietrich Nackmayr commencepar donner une esquisse de l'histoire récente depuis <strong>le</strong>s années 50 du XX èmesièc<strong>le</strong> afin de démontrer <strong>le</strong>s développements dans <strong>le</strong> domaine de la coopérationmilitaire en Europe. Le résultat de ces développements était qu'aujourd'hui personnene mettrait en doute <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s nations européennes ne <strong>pour</strong>raient plusagir autrement qu'ensemb<strong>le</strong>. Nackmayr nomme deux raisons principa<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>quoi<strong>le</strong>s Etats européens sont tenus à coopérer au début du XXIème sièc<strong>le</strong> : Un seulpays ne <strong>pour</strong>rait aujourd'hui résoudre <strong>le</strong>s problèmes actuels comme <strong>le</strong> changementdu climat, <strong>le</strong> terrorisme, la prolifération d'armes à destruction massive, la sécuritéd'énergies, <strong>le</strong> combat anti-pirates etc. De plus, <strong>le</strong>s budgets militaires en baisse depuisla fin de la guerre froide forcent <strong>le</strong>s Etats membres à augmenter <strong>le</strong> niveau decoopération. Dans la suite, Nackmayr donne quelques exemp<strong>le</strong>s récents <strong>pour</strong>illustrer <strong>le</strong>s derniers développements, comme par exemp<strong>le</strong> l'artic<strong>le</strong> 42 du Traité deLisbonne qui règ<strong>le</strong> l'orientation future de la politique commune de sécurité et de défenseen l'Union européenne. Ou bien éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> concept SAFE (forces arméessynchronisées) élaboré par <strong>le</strong> Par<strong>le</strong>ment européen. Ce concept tient compte duchangement de la nature des missions futures des forces armées. Un exemp<strong>le</strong> enest la mise en avant de la problématique du manque de capacité de transportsaériens. De suite, Nackmayr analyse <strong>le</strong>s problèmes concernant <strong>le</strong>s investissementsdans <strong>le</strong> secteur de défense et <strong>le</strong>s régulations d'echange. Ce sont éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>Par<strong>le</strong>ment européen mais aussi <strong>le</strong> Conseil de l'Europe qui ont adopté un nombrede régulations dans ces domaines. La partie fina<strong>le</strong> de l'intervention est dédiée àl'identité militaire européenne. Cette identité <strong>pour</strong>rait être encadrée par troisévénements importants dans l'histoire européenne, premièrement par <strong>le</strong>s révolutionsnationa<strong>le</strong>s de l'année 1848, deuxièmement par <strong>le</strong> combat contre <strong>le</strong>s régimestotalitaires du XX ème sièc<strong>le</strong> et troisièmement par <strong>le</strong> succès de la réunification del'Europe après la fin de la guerre froide.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREurope of DefenseThe long road towards the European Army“The only thing harder than getting a new idea into the military mindis getting an old one out. “(Liddell Hart, Captain, British military historianand <strong>le</strong>ading inter-war theorist.)Since 1954, when European nations fai<strong>le</strong>d to establish the European DefenseCommunity (EDC), the creation of a European Army has remained on theagenda. The idea lives on in many speeches by the European political elite, butthere has been very litt<strong>le</strong> real progress in this field. It is the European Parliamentthat has made its voice often heard, and from the very beginning it hassupported a stronger military integration. In this sense, the year 2009 was avery successful one on the long road towards a European Army. In February2009, the European Parliament adopted an initiative report (Wogau Report) with483 against 111 votes requesting a new model for further military integration -named the SAFE concept (Synchronized Armed Forces Europe). Only a fewmonths later, the European Parliament and the European Council adopted twodirectives to foster the development of a European common defense market.For those who have not heard about these developments the following artic<strong>le</strong>will be of certain interest. It is my p<strong>le</strong>asure to present both developments toyou, and to end with proposals concerning a European Military Tradition, anothercornerstone for the future European Army.159


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineNowadays nobody seriously doubts the premise that the European nations canonly meet the chal<strong>le</strong>nges of the 21st century by acting together, or as the EUCommission´s President José Manuel Barroso likes to express it: “Swimmingtogether or sinking separately”. This is already the European consensus view inmany policy areas. However, in the area of security policy, being central to Statesovereignty, joint action is only in its infancy. Some peop<strong>le</strong> might think that thejob sharing between NATO and EU might last forever, as in the aphorism:“NATO is for life and EU for a better life.” But the time has come to makeEuropeʼs voice heard, because Europe faces wide-ranging security policy tasks,which notably do not affect all NATO members. It was, among others, the previousBritish Foreign Secretary David Miliband, who c<strong>le</strong>arly expressed this viewpoint.Miliband reiterated his view that nation states can no longer protect theircitizens against global threats and that we now need the European Union forprecisely that purpose. He identified three areas in which European nation statesare too small and global institutions too weak to safeguard the interests of ourpeop<strong>le</strong>: these are climate change, external threats to our security, and thecomp<strong>le</strong>tion of the internal market. The last point in particular became especiallyevident during the last financial crisis, when a strong and uniform Europeanintervention safeguarded all member states from catastrophe.However, what is only considered in the field of economics becomesessential in the field of security and defense. Security and Defense face twomain evolutions in the 21 st century driving the European Member States toalso cooperate militarily :- A sing<strong>le</strong> country alone cannot solve todayʼs chal<strong>le</strong>nges like climatechange, terrorism, proliferation of weapons of mass destruction, energysecurity, the fight against piracy etc.- The shrinking military budgets after the end of cold war are forcing memberstates to increase their <strong>le</strong>vel of cooperation.Overcoming these chal<strong>le</strong>nges will call for closer European cooperation in thesecurity policy sphere, not <strong>le</strong>ast in the work of establishing the industrial andmilitary basis for closer cooperation. We should be aware, that basis consistsof more than just the sum of national resources.The future European Army will not replace NATO, our common Trans-Atlanticsafeguard for territorial defense. It should give Europe the ability to actautonomously when NATO is not involved, and will strengthen Europeʼs voicein the 21st century, when Europeʼs interests are touched. Examp<strong>le</strong>s for bothcases are: The peacekeeping and political integration process in formerYugoslavia and the anti-pirate mission “Atalanta” near Somaliaʼs coast.Twenty-two missions under the European Security and Defense Policy (ESDP)since 2003 - now known as Common Security and Defense Policy (CSDP) -show how large the need for European action is. European soldiers nowadaysare on missions on three continents and oceans. We have the EU Batt<strong>le</strong>group,the Eurocorps, the Franco-German Brigade, the German-Netherlands Corps,and the Multinational Corps Northeast. However, all efforts made so far showonly a relatively slow <strong>le</strong>vel of integration. Europeans c<strong>le</strong>arly understand frommission to mission that the missing interoperability of the armed forces becomesa burden more than an advantage, and that something needs to be done tomeet future chal<strong>le</strong>nges. Without a strong commitment for real synchronizationand unification, Europe will become an object of foreign influence. And indeed,even larger European member States take the European Union to shield theirnational interest. Even if they talk about state sovereignty, they act intergovernmentally,or within a European Union position. Alone, even larger MemberStates have no real say in 21 st century world affairs.160


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersTo me, the answer to this premise does not simply lie in closer cooperation betweenautonomous national armies, but rather in quantum improvements inthe area of joint command structures, equipment and operations.Although security and defense policy remain a Member State matter underthe Lisbon Treaty – the new <strong>le</strong>gal framework of the European Union - progresscould be made within this framework. The Treaty foresees that the EuropeanSecurity and Defense Policy will <strong>le</strong>ad to a common defense agreementfor the EU when the European Council resolves unanimously to do so, andprovides that all member states give their approval through their usual constitutionalprocedures. This possibility was formally laid down in Artic<strong>le</strong> 42 of theTreaty of Lisbon and put into force on 1 December 2009 :1. The common security and defense policy shall be an integral part of thecommon foreign and security policy. It shall provide the Union with an operationalcapacity drawing on civilian and military assets. The Union mayuse them on missions outside the Union for peacekeeping, conflict preventionand strengthening international security in accordance with theprincip<strong>le</strong>s of the United Nations Charter. The performance of these tasksshall be undertaken using capabilities provided by the Member States.2. The common security and defense policy shall include the progressive framingof a common Union defense policy. This will <strong>le</strong>ad to a common defense,when the European Council, acting unanimously, so decides. It shallin that case recommend to the Member States the adoption of such a decisionin accordance with their respective constitutional requirements. Thepolicy of the Union in accordance with this Section shall not prejudice thespecific character of the security and defense policy of certain MemberStates and shall respect the obligations of certain Member States, whichsee their common defense realized in the North Atlantic Treaty Organisation(NATO), under the North Atlantic Treaty and be compatib<strong>le</strong> with thecommon security and defense policy established within that framework.3. Member States shall make civilian and military capabilities availab<strong>le</strong> to theUnion for the imp<strong>le</strong>mentation of the common security and defense policy,to contribute to the objectives defined by the Council. Those MemberStates which together establish multinational forces may also make themavailab<strong>le</strong> to the common security and defense policy. Member States shallundertake progressively to improve their military capabilities. The Agencyin the field of defense capabilities development, research, acquisition andarmaments (hereinafter referred to as ‘the European defense Agency’) shallidentify operational requirements, shall promote measures to satisfy thoserequirements, shall contribute to identifying and, where appropriate, imp<strong>le</strong>mentingany measure needed to strengthen the industrial and technologicalbase of the defense sector, shall participate in defining a Europeancapabilities and armaments policy, and shall assist the Council in evaluatingthe improvement of military capabilities.4. Decisions relating to the common security and defense policy, including thoseinitiating a mission as referred to in this Artic<strong>le</strong>, shall be adopted by the Councilacting unanimously on a proposal from the High Representative of the Unionfor Foreign Affairs and Security Policy or an initiative from a Member State. TheHigh Representative may propose the use of both national resources and Unioninstruments, together with the Commission where appropriate.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR5. The Council may entrust the execution of a task, within the Union framework,to a group of Member States in order to protect the Union's values and serveits interests. The execution of such a task shall be governed by Artic<strong>le</strong> 44.161


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine6. Those Member States whose military capabilities fulfill higher criteria andwhich have made more binding commitments to one another in this areawith a view to the most demanding missions shall establish permanentstructured cooperation within the Union framework. Such cooperation shallbe governed by Artic<strong>le</strong> 46. It shall not affect the provisions of Artic<strong>le</strong> 43.7. If a Member State is the victim of armed aggression on its territory, theother Member States shall have towards it an obligation of aid and assistanceby all the means in their power, in accordance with Artic<strong>le</strong> 51 of theUnited Nations Charter. This shall not prejudice the specific character ofthe security and defense policy of certain Member States. Commitmentsand cooperation in this area shall be consistent with commitments underthe North Atlantic Treaty Organisation, which, for those States which aremembers of it, remains the foundation of their col<strong>le</strong>ctive defense and theforum for its imp<strong>le</strong>mentation.”Additionally, the area of defense has become availab<strong>le</strong> to enhanced co-operation(Art 46), potentially allowing for defense integration that excludes memberstates who have policies of neutrality. This mechanism enab<strong>le</strong>s a minimumnumber of member states to deepen integration within the EU`s institutionalframework, without the necessity of participation by reluctant member states.The Polish government has announced its intention of examining the possibilityof applying this provision in the area of defense during its Presidency of theCouncil of the European Union in the second half of 2011.SAFE conceptThe European Parliament has made its voice heard to support and promotethe idea of the European Army. In order to achieve this goal the membersadopted a resolution in the “Report on the European Security Strategy andESDP” of February 2009, where the European Parliament described a newidea, named SAFE concept (Synchronized Armed Forces). SAFE could becomethe missing link between currently partly interoperab<strong>le</strong> armed forcesand the long-term goal of a future European army.Partly because it has positive associations and also because it is easy toremember, that link could be named SAFE, which stands for SynchronizedArmed Forces Europe. SAFE can broaden the debate along the right lines towardscloser synchronization, bringing in those peop<strong>le</strong> who cannot yetconceive of a European Army. Synchronized Armed Forces Europe would offerneutral Member states and those committed to military alliances, those whoare already practicing closer cooperation and those who are still holding back,sufficient room for maneuver. SAFE should be organized as an opt-in model,based on closer cooperation – or better synchronization. Security and defenseare highly sensitive matters central to national sovereignty. In order to preventforeseeab<strong>le</strong> disputes, the procedure that has already been used successfullyin connection with the European sing<strong>le</strong> currency EURO or Schengen zone offree movement should be employed, creating an open framework that enab<strong>le</strong>sneutral or skeptical Member states to take decisions to become involved onlyin individual aspects of SAFE.The main goal is to improve the dynamic development of cooperation betweennational armed forces so that they become increasingly synchronized. Thevery first step must be to analyse the experience gained in the latest operationsunder UN, EU or NATO mandates, and to quickly put the conclusions intopractice. The broad consensus among the soldiers themselves is demonstratedwhen they repeatedly emphasise the need for standard European ru<strong>le</strong>s of162


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersengagement and joint training in preparation for joint operations. Soldiers whoare deployed together must also be trained together, a princip<strong>le</strong> whose valueis already demonstrated in the EU Batt<strong>le</strong> Groups and the Eurocorps. Whilst itis true that the Member States are already making efforts to standardise theEU Batt<strong>le</strong> Groups, drawing, naturally enough, on past experience in NATO,they are still free to decide what practical form all these activities should take.The fact is that our jointly deployed European soldiers rightly expect their masters,who are at present the Member States, to ensure that operations are carriedout on the basis of a common statute. For it is only when their <strong>le</strong>vels oftraining, ru<strong>le</strong>s of engagement, degrees of operational freedom as well asequipment quality are comparab<strong>le</strong> that European soldiers will be ab<strong>le</strong> to relyon one another fully. A common statute must also include agreements on medicalcare and social security arrangements in the event of death, injury or incapacityfor soldiers and their families. European soldiers regard the unequaltreatment of their comrades during operations as an obstac<strong>le</strong> to their success.The first practical step is a call on Member states to create a European SoldiersStatute for joint operations.This is strongly supported by the European Organisation of Military Associations(EUROMIL). Its Vice President, Col. (ret.) Bernhard Gertz, stated this inan artic<strong>le</strong> “Credo for Social Synchronized Armed Forces Europe” recently:“EUROMIL, therefore supports the initiative of the European Parliament tocall for Synchronized Armed Forces Europe as adopted in the report of the imp<strong>le</strong>mentationof the European Security and Defense Policy. ‘Unity in diversity’requires harmonization and synchronization of defense policies.”Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARThe Synchronized Armed Forces Europe should be built up step by step, in accordancewith the princip<strong>le</strong> of European burden sharing. Only in this way cansynergies be exploited to create those joint capabilities that can never beachieved simply by piecing together the various capabilities covered inadequatelyby the individual Member States.For this reason, the SAFE concept favors opening up military careers in nationalarmed forces to Europeans from any of the Member States. The obviousneed to master an operational language should not present aninsurmountab<strong>le</strong> obstac<strong>le</strong> to opening up careers this way. In a first step, itshould be possib<strong>le</strong> for an Estonian to serve with the French mountain troops,or a Slovenian to fly with the Spanish air force. This open career arrangementwould have the advantage of making it easier to deal with increasing competitionfor suitab<strong>le</strong> recruits by industry and public administration, and to facethe declining birth rates in Europe. The Belgian Army is already open tosoldiers from all EU Member States, and thus stands as a model for all 27 armiesin Europe. The Netherlands and German armed forces recently agreedto allow their reservists to fulfill their military duties in the other countryʼs army.Synchronization is the key toward a step-by-step and increasingly integratedEuropean army. It shall reach a <strong>le</strong>vel of integration where SAFE in the futurecould stand for “Strategic Armed Force Europe”. I am aware of how long it willprobably be before we achieve this goal. If we look back and analyze theintegration of armed forces in Germany after the German Reunification in1871, we will find a blue print for this project on the European <strong>le</strong>vel. Germanarmed forces where united only 50 years after the state reunification in 1871.Even during the First World War four German armies where operating.This might show us - how long this road might be. That we are already walkingon the road towards synchronized armed forces is evident. The EuropeanAir Transport Command (EATC) can be seen in this respect as an earlyexamp<strong>le</strong> for SAFE. It is another nuc<strong>le</strong>us of a future European army. In 2008,163


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainethe European Ministers of Defense declared their intention to establish aEuropean Air Transport F<strong>le</strong>et (which now operating under the name EuropeanAir Transport Command), which fulfills the requirements of the SAFE concept :“Recognizing that EU Member States will be more involved in the near futurein military and civilian operations, and that there is a c<strong>le</strong>ar lack of European militaryairlift capabilities to perform these missions, we intend to developconcrete solutions to better use existing and future military airlift assets usab<strong>le</strong>for meeting national, EU, NATO and other frameworks operational requirements.This is the aim of the European Air Transport F<strong>le</strong>et project (EATF).With this declaration of intent we want to demonstrate our determination andcommitment to address critical European airlift shortfalls. The pooling of someof our assets and the use of contributions in kind will help us to decrease ourdependency on civilian lift and maximize our investment in military airlift assets.The EATF provides an innovative framework for European cooperationthrough mutualisation of services and aircraft such as A400M or C130. Thisinitiative is open to any interested EU Member State. EU Member States’ participationto EATF could take the following form :- to make availab<strong>le</strong> military transport aircraft;- to purchase flying hours;- to provide or exchange flying hours;- to provide and benefit from shared and/or poo<strong>le</strong>d support functions.Gerard Batten,Member of the European Parliamentand founder member of the UK IndependenceParty gave the followingspeech during the debate on SAFE andthe European Security and DefensePolicy: “Madam President, these areown-initiative reports and therefore theymight be dismissed as so much hot air.But we know that such reports are sometimesused as a means of introducingthe policy aspirations of the EU.Mr. von Wogau was once the Chair ofthe Committee on Economic andMonetary Affairs and was instrumentalin bringing about the European sing<strong>le</strong>currency. He is now Chair of the Subcommitteeon Security and Defense,and, when he writes a report saying thatthe European Union needed its ownarmed forces, then we can be confidentthat that is precisely what the EuropeanUnion intends to bring about in duecourse. What are those responsibilitiesexactly? To find out, you will have towait to see if the Lisbon Treaty is fullyratified and brings about ʻa common foreignand security policy, <strong>le</strong>ading to acommon defenseʼ.No one can say that they were notwarned of the EUʼs military aspirations”.The establishment of a future multinational A400M unit by some of EATFmembers will contribute to reinforce the EATF project. Furthermore, the EATFproject will take into account any future contribution of A400M Member Statesfor basing, maintenance and training to partners who do not wish to equipthemselves with such a structure, or who have an interest to join the multinationalA400M unit or who have a potential intention to acquire new A400M.”The memorandum of understanding became a reality. From 1st September2010, around 160 soldiers from the participating Member States are going tooperate about 200 airplanes and helicopters from the airfield in Eindhoven inthe Netherlands. And it will not be long before crews of the new Airbus 400 Mwill fly as joint crews, for examp<strong>le</strong> a French Pilot, a Belgium Co Pilot and aGerman Transport Sergeant. This is a model we knew already in the AirbornWarning and Control System (AWACS) where soldiers from many NATOmember countries serve in the same airplane and unit. Today the EATC coordinatesair transport for French, Dutch, Belgian and German air combat troops.Spain and Luxembourg have shown interest in joining the EATC staff. Theprocess of European integration is slow but the direction is c<strong>le</strong>ar and its progressis hopefully irreversib<strong>le</strong>.Keeping in mind that many observers think that the European Parliament is alame duck, and that Parliamentʼs proposal is not a government decision, Iwould like to bring to your mind a statement by one of the strongest opponentsof further European integration, which may help to understand whysome ideas make their way through history and others do not.164


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersDefense Procurement and Exchange RegulationsAnother successful decision for the future European defense armour marketwas also taken in 2009, when the Council of Europe and the European Parliamentadopted two regulations on defense procurement and the exchangeof military equipment. Both regulations will have the power to shape a moreor <strong>le</strong>ss divided European defense market into a common European market.They will make a vital contribution to the further development of the technologicaland industrial basis for the European Security and defense Policy andare a mi<strong>le</strong>stone for the common European integrated defense market. Theywill increase the competitiveness of the European armaments industry, andprevent the duplication of projects and the inefficient use of resources. Achievingthese aims is in the shared interest of the European taxpayers and thesoldiers in all armed Forces in the Member States.Therefore, the licensing procedure for the transfer of military equipment fromone Member State to another without new notes of authorizations has to beregulated in the new directive. This procedure must be matched by a stipulationthat armaments projects in the future must be opened up to public tendering,respecting internal market ru<strong>le</strong>s. At present, the regrettab<strong>le</strong> standardpractice is to shield national armaments markets from outside competition.Statistics show that over the period between 2000 and 2004 – that is, beforeenlargement – the EU 15 published invitations to tender in the Official Journalof the European Union for only 13% of all defense contracts. The figures forindividual Member States ranged between 2% (Germany) and 24% (France).Derogations, which under Community law are supposed to be the exception,are in practice sadly the ru<strong>le</strong>. The new directives are intended to make derogationsthe exception once again.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARThe new transfer directiveʼs licensing arrangement for transferring defenserelatedproducts from one member state to another, together with defenseproject tendering in keeping with the internal market, will overcome the commonpractice of shielding national defense markets from competition. The twodirectives will promote a European defense equipment market and increasethe competitiveness of the European defense industry, as well as curbing duplicatedefforts and inefficient use of resources. That is how we can realizeour main objective: greater security for our citizens. In future, we intend to useavailab<strong>le</strong> resources more intelligently. And this is essential.Since the 1990s, there has been increasing recognition in the European Unionthat shielding the market has a negative economic impact. The aim is therefore toachieve maximized cost-effectiveness, which will benefit national budgets and increasethe competiveness of the industry, and will ensure that our armed forces aregiven the best possib<strong>le</strong> equipment. One result of the new regulations will be morestandardized European armed forces equipment in the future. This is a positiveside-effect which will produce a degree of interoperability that does not exist at present,neither in NATO forces nor in the European Union Member States forces becauseof the differing weapons systems and materials used.Another argument for a sing<strong>le</strong> European defense market has been the lack ofcompetiveness with the USA. Over the last 20 years, in response to politicaldevelopments around the world, defense spending in Europe has been halved.Falling expenditure on armaments has <strong>le</strong>d to dwindling turnover and cutsin jobs and investment in the areas of research and technology. And, if we arerealistic, an increase in defense spending is unlikely in the near future.In comparison with the USA, Europe spends <strong>le</strong>ss than 50% for defense. Inaddition, the cost of developing new weapons systems has become so prohibitivethat even large European Member States are reluctant to take on the fi-165


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainenancial burden. The changes in structure of armed forces and changes in therange of tasks and operations since end of Cold War, plus the reduction of ordereditems for each of the 27 armies, are forcing Member States to considercloser cooperation. Knowing that the Member States of the European Unionare planning 89 defense projects compared to 29 in the USA, within a morethan 50% smal<strong>le</strong>r defense budget, everybody understands why the process ofcloser cooperation is irreversib<strong>le</strong>.European Military IdentityNo one who knows the inner constitution of armed forces and those who servewith them believes that this will be easy to achieve and will be only positivelyapplauded. In reality, the field of military integration particularly faces hugeresistance from inside the armed forces and from parts of the political elite. Butknowing the process, the structures, and the peop<strong>le</strong> involved, I am optimistic thatthis can be overcome. Even if Liddel Hartʼs famous saying – “The only thingharder than getting a new idea into the military mind is getting an old one out“ -remains a unique truth, the European integration process itself is the main examp<strong>le</strong>that things can be changed, even against enormous resistance.At the end of this artic<strong>le</strong> I would like to focus on another aspect important for thefuture European army. I do not know when this army will be fully operational, butI truly believe that the future will see the 12 stars flying on a blue flag over ourarmed forces equipment, and <strong>le</strong>ad us better as national symbols, national structures,and national security policies can do in the 21st century. But then SAFE(Strategic Armed Force Europe) would need more than equal medical care,social security in case of death, injury and invalidity, social rights, training standards,equipment, operational doctrine, a military headquarter and freedom of action.It would need a core European Military Identity, which could unite our menand women in uniform.This important aspect brings us directly to the European core values. We shouldnever lose sight of the fact that the European Security and Defense Policy mustalways serve our European values, since the task of asserting our identity onthe European and international scene is based on the princip<strong>le</strong>s of liberty,democracy, and respect for human rights, fundamental freedom and the ru<strong>le</strong> oflaw, as laid down in the Treaty on European Union. These princip<strong>le</strong>s are sharedby all the Member States and form the basis for the European Unionʼs actionstoday and in the future. If we defend our values, and these values then <strong>le</strong>ad usto defend our interests, the European Union must have the capacity to act. Thatis the important task that faces us.The successful establishment of the SAFE concept would also need efforts tocreate a European Military Identity. The soldiers of the European Member Statesserving in European missions are not only instruments to achieve stability or dopeacekeeping but are also representatives of the European core values. Duringour joint operations, national traditions, military cultures, and military self-imagescome into direct contact. This promotes the development of a European MilitaryTradition that is something unique and new. This European Military Tradition isimportant for future European Soldier as an instrument of common educationand a common European identity. It is similar to the idea of one of the Germanmilitary reformers, August von Gneisenau, who formulated in 1808, what couldbecome a model for the European armed forces nowadays. He wrote: “It is necessaryand in the stateʼs interest to create a national identity for the peop<strong>le</strong>, ifthey need to defend a nation.” Translated into the 21st century, we would say: “Itis necessary and in Europe’s interest to create a European identity, to defend166


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersthe European Union.” Knowing the European values and being ready to defendthem is essential for all servicemen who are send on missions under the Europeanbanner. But this is not enough.Joint European operations do not necessarily create a European MilitaryTradition. And the sum of different military traditions does not easily create a EuropeanMilitary Tradition, even if we serve under the official European motto,“unity in diversity.” We could ask how a European Military Tradition should lookand how to shape it. To me the European Military Tradition should be based onour common European values as formulated in the treaties, and will combinemilitary, historical, political, and civilian e<strong>le</strong>ments. The fundament of EuropeanMilitary Tradition should be based on common European historical experience.This aspect is nothing new, especially for all German soldiers. From the very beginning,the new German Army after World War II, the Bundeswehr, was focusedon the imp<strong>le</strong>mentation of a European identity for the development andeducation of their citizens in uniform. This aspect is still important.Three main e<strong>le</strong>ments could frame the European identity process: The politicalmovement of the European-wide revolutions from 1848, the fight against totalitarianregimes in the 20th century, and the successful reunification of Europe afterthe end of the Cold War within the overall European integration. Those are coree<strong>le</strong>ments of a common European identity, which is shared by all our peop<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDuring the many national revolutions in 1848 – which all fai<strong>le</strong>d – the idea of thecitizen became lively and could from that moment onwards never be erased fromthe political debate. The long fight during the 20th century against totalitarian regimes,be it fascism or communism, is a common historical experience which isstill remembered. Only 20 years ago, the Berlin wall was opened, and Europe becamewho<strong>le</strong> and free. The enlargement of the European Union with addition ofthe midd<strong>le</strong> and eastern European nations has created the reunified EuropeanUnion. The new Member States add important historical know<strong>le</strong>dge to our Europeanexperience with their generally peaceful freedom fight movements.Next to historical experience, military tradition should be based on individualsacting courageously. Soldiers took responsibility in the past and will also do soin the future during critical political and militarily situations. Their behavior canstand as an examp<strong>le</strong> and convince others to join. I would like to give you anexamp<strong>le</strong> of one who could stand for the European spirit that is necessary to undertakeoperation SAFE.A cousin of Colonel von Stauffenberg, Lieutenant Colonel of the reserve corpsCaesar von Hofacker (born 1896, executed 1944), developed from a monarchistduring World War I into a nationalist, and became a European and freedom fighterwho successfully organized operation Valkyrie in Paris, before the operationfai<strong>le</strong>d in July 1944. He wrote to his wife on 15th July 1940, the following remarkab<strong>le</strong>sentence: “I would, if I would be in charge, proclaim a Monetary and EconomicUnion between France and Germany and constitute an Alliance betweenour two nations in a ceremonious act on the batt<strong>le</strong>field of Verdun.” Hofackerʼsdream became reality in 1984, when German Chancellor Helmut Kohl andFrench President Francois Mitterrand commemorated the death of both WorldWars with a minutes long hand shake on the batt<strong>le</strong>field of Verdun, and in 1993,when the Treaty of Maastricht came into effect.I am personally convinced that we can find many more men and women who arean inspiring examp<strong>le</strong> for the ever more closely united European Union. Their spiritstands as a model for a secure and safe future. Their <strong>le</strong>gacy is important forthe European Military Tradition and is an irreversib<strong>le</strong> part of it. This future is in ourhands, and if we really want , we can do it.Joerg-Dietrich NACKMAYR,a entamé ses études en sciencespolitiques, en philosophie et lʼhistoire.Il sʼengage profondément dans <strong>le</strong>smesures de démocratisation pendant lapériode de transition en RépubliqueDémocratique Al<strong>le</strong>mande (RDA) où ilaccompagne entre autres <strong>le</strong> MinistreprésidentAlfred Gomolka en Meck<strong>le</strong>nbourg-Pomméranie.Dans <strong>le</strong>s années 1999 à 2003 ilreprésente la <strong>Fondation</strong> Konrad Adenaueren Estonie, Lettonie et Lithuanie.Après un phase comme entrepreneurindépendant de conseil<strong>le</strong>r dʼentreprises(Baltic Busines Contact) il retourne àBruxel<strong>le</strong>s en 2005 où il travail<strong>le</strong> dʼaborddans la direction généra<strong>le</strong> de politiqueinterne et à partir de 2007 commeconseil<strong>le</strong>r en matière de politique desécurité au cabinet du président dupar<strong>le</strong>ment européen.Depuis 2009 il vit avec sa famil<strong>le</strong> auKazakhstan où sa femme travail<strong>le</strong>comme diplomate <strong>pour</strong> lʼUnioneuropéenne.167


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineATELIERS SUR LES RELATIONS DES FDS AVEC LA NATIONAtelier 2 : Securite humaine, Relations civilo-militaireset Maintien de l'Ordre3.4 Intervention de Pascal L. SEUDIE, Contrô<strong>le</strong>ur Général de Police,CamerounRésumé : The intervention of Pascal L. SEUDIE, General Control<strong>le</strong>r of the Police in Cameroondeals with „Peacekeeping and Human Security“. He begins with a detai<strong>le</strong>d definitionof public order: The first part is security which assumes the absaence of dangeror a predictab<strong>le</strong> theat. The second part is safety, which consists of the protection and thedefence of the integrity of the national territories, of republican or international institutionsand of their representatives. The third part is the public health system that supposesthe protection of the health of the population. All these e<strong>le</strong>ments represent anessential contribution to the prosperity of a society. Therefore, the maintenance of the publicorder is also a permanent preoccupation of the international community and of thedemocratic states. SEUDIE names the different types of how to maintain the public orderand its princip<strong>le</strong>s. Then he also names the official international institutions that were builtup to maintain the public order, such as the United Nations General Assembly and theSecurity Council, the International Court of Justice and the International Criminal Tribunal.Then he talks of the measures and other specific instruments for the maintain ofpublic order on an i nternational <strong>le</strong>vel, as well as the imp<strong>le</strong>mentation of these measures.SEUDIE closes his intervention with the statement that the African peop<strong>le</strong> suffer from numeroustroub<strong>le</strong>s and that only an enduring peace and security process would enab<strong>le</strong> thecontinent to get out of that situation and to build a better and more human world.MAINTIEN DE L’ORDRE ET SECURITE HUMAINEIntroductionLa notion dʼordre a plusieurs connotations et/ou significations. Il est judicieuxde ne sʼintéresser quʼà lʼordre public, entendu comme un ensemb<strong>le</strong> de Mesuresprises par une Autorité publique, internationa<strong>le</strong> ou nationa<strong>le</strong> habilitée afin de garantir<strong>le</strong> bon fonctionnement des Institutions et des Services et par conséquent,la conduite saine des relations internationa<strong>le</strong>s et socia<strong>le</strong>s. Lʼordre public viseà assurer la paix et la sécurité au sein et entre <strong>le</strong>s Etats afin de favoriser <strong>le</strong>urp<strong>le</strong>in épanouissement ainsi que celui de <strong>le</strong>urs ressortissants.La protection de lʼordre public est une nécessité qui a très vite été cernée par <strong>le</strong>s premièresformes de sociétés organisées et encore avec plus dʼacuité depuis lʼavènementdes sociétés modernes ou Etats démocratiques pris dans un engrenage decoopération et de globalité sur <strong>le</strong> plan de la conduite de <strong>le</strong>urs rapports internationaux.Base de la Communauté internationa<strong>le</strong> ou de lʼEtat qui lʼinstitue et veil<strong>le</strong> à sonrespect, lʼordre public sʼentend enfin comme <strong>le</strong> légitime protecteur de la souverainetéet de lʼintégrité territoria<strong>le</strong> ou diplomatique des Etats ; il est en effet la conditionsine qua non de toute stabilité politique, institutionnel<strong>le</strong> et gouvernementa<strong>le</strong>.Lʼordre public se présente sous plusieurs aspects : politique, administratif, civi<strong>le</strong>t international. Il revêt des composantes dont certaines sont si essentiel<strong>le</strong>squʼel<strong>le</strong>s constituent son essence même. Ce sont :– la sécurité, qui suppose lʼabsence de danger ou de menace prévisib<strong>le</strong>,el<strong>le</strong> consiste en la protection et la défense physiques des Etats, des personneset de <strong>le</strong>urs Biens ;168


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers– la sûreté, qui consiste en la protection et la défense de lʼintégrité des Territoiresnationaux, des Institutions internationa<strong>le</strong>s ou républicaines, despersonnalités qui <strong>le</strong>s incarnent et des Edifices publics;– la salubrité publique, qui suppose la protection de la santé des personnespar lʼexigence du respect dʼun standard minimum de règ<strong>le</strong>s dʼhygiène.Avec lʼavènement du libéralisme économique et de la démocratie, <strong>le</strong> domainede lʼordre public sʼest étendu à lʼesthétique, lʼéconomie, la mora<strong>le</strong> et la politique.Lʼordre public une fois établi, doit être maintenu voire consolidé, afin dʼéviterlʼanarchie et <strong>le</strong>s débordements de tous ordres qui suscitent peur et fatalité ; etfavoriser lʼépanouissement total des individus et de la société. Maintenir lʼordrepublic, cʼest empêché aux uns de porter atteinte à la tranquillité, la sécurité etla quiétude des autres. Il n y a maintien de lʼordre public que lorsque <strong>le</strong>s principesdu permis et du proscrit sont préalab<strong>le</strong>ment définis, catalogués et codifiésdans des Conventions internationa<strong>le</strong>s, des Lois et règ<strong>le</strong>ments nationaux.Le maintien de lʼordre public apparaît en fin de compte comme un souci permanent<strong>pour</strong> la Communauté internationa<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s Etats démocratiques.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes Etats africains au sud du Sahara, tenant compte de <strong>le</strong>ur poly-ethnicité etde la comp<strong>le</strong>xité de <strong>le</strong>ur configuration physique, ne sauraient rester en margede ce truisme. Ayant subi près de trois sièc<strong>le</strong>s dʼesclavage et de traite négrièrequi avaient toute suite cédé <strong>le</strong> pas à lʼimpérialisme et à la colonisationoccidenta<strong>le</strong>, la plupart des Etats africains au sud du Sahara vont accéder à lasouveraineté internationa<strong>le</strong> à lʼaube des années 1960. La charge <strong>le</strong>ur revenaitainsi, non seu<strong>le</strong>ment dʼassurer <strong>le</strong>ur devenir politique, mais aussi et surtout,<strong>le</strong>ur développement social et économique adossé sur un système administratifet diplomatique fiab<strong>le</strong>s et crédib<strong>le</strong>s.Conscients de lʼamp<strong>le</strong>ur de la tâche, <strong>le</strong>s tout premiers dirigeants des jeunesEtats indépendants avaient immédiatement pris à <strong>le</strong>ur compte <strong>le</strong> rétablissementet <strong>le</strong> maintien de lʼordre public afin de jugu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s désordreset <strong>le</strong>s velléités subversives lancinantes, qui menaçaient alors de déstabiliseret dʼengouffrer ces derniers, à peine libérés du joug colonial, dans <strong>le</strong> chaos.Cependant, si tous <strong>le</strong>s efforts déployés visaient et visent encore dʼavantageaujourdʼhui à garantir aux citoyens des conditions <strong>le</strong>ur permettant dʼêtre àlʼabri de tout danger ou toute menace relativement à <strong>le</strong>urs personnes et à<strong>le</strong>urs biens, lʼon peut tout de même se demander si <strong>le</strong> rétablissement de lʼordrepublic, son maintien et/ou sa consolidation par <strong>le</strong>s Autorités habilitées àcet effet, tant sur <strong>le</strong> plan interne des Etats que sur <strong>le</strong> plan international, constituentun gage inébranlab<strong>le</strong> <strong>pour</strong> la sécurité humaine. En dʼautres termes, <strong>le</strong>maintien de lʼordre c'est-à-dire, de la paix socia<strong>le</strong>, de la tranquillité publique àtout prix et à tous <strong>le</strong>s prix ne <strong>pour</strong>rait-il pas constituer un obstac<strong>le</strong> majeur <strong>pour</strong><strong>le</strong>s citoyens quant à lʼexercice de <strong>le</strong>urs libertés publiques et la jouissance de<strong>le</strong>urs droits fondamentaux ? En un mot, quant à la sécurité liée à <strong>le</strong>ur dignité,<strong>le</strong>ur intégrité physique et à <strong>le</strong>urs biens ? En considération de lʼantagonismenotoire existant entre <strong>le</strong>s intérêts en présence, quel<strong>le</strong>s sont ou <strong>pour</strong>raient être<strong>le</strong>s limites nécessaires à apporter aux Mesures de maintien de lʼordre <strong>pour</strong>que la sécurité humaine soit p<strong>le</strong>inement garantie ?Répondre à ces interrogements nous amène à dire : bien que <strong>le</strong> rétablissement,<strong>le</strong> maintien et/ou la consolidation de lʼordre public soit une préoccupationessentiel<strong>le</strong> <strong>pour</strong> la Communauté internationa<strong>le</strong> en général et <strong>le</strong>s Etats africainsau sud du Sahara en particulier (I), il nʼen demeure pas moins vrai que <strong>pour</strong>garantir au mieux la sécurité humaine, lʼordre public doit être limité, tant sur <strong>le</strong>plan international que national, par la soumission de ses Mesures au principede légalité, par <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong> et par la sanction de <strong>le</strong>ur mauvaise application (II).169


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineI - LE MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLIC : UN SOUCI PERMANENTPOUR LES ÉTATS DÉMORATIQUES ET POUR LACOMMUNAUTÉ INTERNATIONALELʼordre public sʼentend différemment sur <strong>le</strong> plan interne aux Etats et sur <strong>le</strong>plan international.Sur <strong>le</strong> plan interne, lʼordre public est un ensemb<strong>le</strong> de Mesures édictées parune Autorité publique ; observées par el<strong>le</strong>, ses subordonnés et/ou ses collaborateursoccasionnels, afin de garantir <strong>le</strong> bon fonctionnement des Servicespublics. Il ambitionne de préserver la stabilité politique dʼun Etat, la sécurité,la sûreté, la tranquillité et la paix socia<strong>le</strong>.Le rétablissement, <strong>le</strong> maintien et/ou la consolidation de lʼordre public apparaissentcomme une donnée essentiel<strong>le</strong> dont lʼabsence conduit à lʼanarchie etremet considérab<strong>le</strong>ment en cause <strong>le</strong>s chances et <strong>le</strong>s efforts de développementet de modernisation de lʼEtat ; ainsi que lʼexercice des Libertés publiqueset la jouissance des Droits fondamentaux.La notion dʼordre public au plan international est polysémique. Si de manièrelarge cette notion renvoie à la salubrité, la tranquillité et la sécurité publiquessur lʼéchiquier international, dans un sens plus restreint, la notion dʼordre publicinternational nʼest plus ni moins quʼun ensemb<strong>le</strong> de Mesures qui ambitionnentde mettre un terme aux actes et/ou actions illicites au sein et entre <strong>le</strong>sEtats tels : <strong>le</strong>s crimes de guerre, <strong>le</strong>s crimes de génocide, <strong>le</strong>s crimes contrelʼhumanité, la torture, lʼesclavage etc.…Il apparait aujourdʼhui que la garantie de la sécurité humaine au sein des Etatspasse inéluctab<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong> maintien dʼun bon ordre au plan international. I<strong>le</strong>st probab<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s pères fondateurs de lʼONU en 1945, avaient bienconscience de cette conditionnalité en inscrivant dans lʼartic<strong>le</strong> 1er de la Chartede San Francisco lʼobligation <strong>pour</strong> lʼOrganisation mondia<strong>le</strong> de prendre desMesures col<strong>le</strong>ctives efficaces en vue de prévenir et dʼécarter <strong>le</strong>s menaces à lapaix et réprimer tous actes dʼagression ou autres de rupture de la paix ; et réaliserpar des moyens pacifiques, conformément aux principes de la justice etdu droit international, lʼajustement ou <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment des différends ou de situationsde caractère international susceptib<strong>le</strong>s de mener à une rupture de la paix.Bref, de lʼordre public international qui garantit par son maintien en tout tempset en toutes circonstances, la sécurité, la stabilité, la tranquillité et la paix.La particularité du maintien de lʼordre public sʼapprécie par rapport à ses caractèreset principes, ses différentes formes et ses acteurs.A - LE MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLIC : UN CONCEPT AUX CARACTÈRESET PRINCIPES MULTIPLESLa volonté dʼéradiquer tout désordre ou troub<strong>le</strong>, encore qualifiée de « maintiende lʼordre public », vise en effet à garantir <strong>le</strong> bon fonctionnement desServices publics nationaux ainsi que la paix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s afinde préserver la tranquillité, la sécurité, la sûreté, la mora<strong>le</strong> et lʼéthique nationa<strong>le</strong>set internationa<strong>le</strong>s.1- Les caractères du maintien de l’ordre publicAvec <strong>le</strong> vaste mouvement de démocratisation des régimes politiques africainsau sud du Sahara, consécutif à la chute du mur de Berlin, lʼon a assisté à desrevendications de tous ordres qui, quelquefois assorties de vio<strong>le</strong>ntes manifestations,meub<strong>le</strong>nt lʼarène politique de ces derniers.Ces revendications et manifestations, bien que souvent fondées dans <strong>le</strong>ur170


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersprincipe, sont aussi souvent mal conduites dans <strong>le</strong>ur forme ; entraînant de cefait des débordements et des désordres. Cʼest dans <strong>le</strong> souci de <strong>le</strong>s contenirque <strong>le</strong>s Autorités compétentes prennent des mesures qui rentrent souvent,malheureusement, en contradiction avec lʼexercice des Droits nationaux ainsique des Libertés publiques et individuel<strong>le</strong>s.Le rétablissement, <strong>le</strong> maintien et/ou la consolidation de lʼordre public visent enprincipe, non pas <strong>le</strong>s atteintes aux Droits des Etats souverains et aux Libertéspubliques des citoyens, mais <strong>le</strong>ur encadrement ou <strong>le</strong>ur limitation afin depréserver lʼintérêt général et garantir la sécurité humaine.Il est donc nécessaire que lʼordre public mis au service de la sécurité humainerevête <strong>le</strong>s caractères suivants :- la perceptibilité, qui exige que <strong>le</strong>s mesures de maintien de lʼordre publicsoient visib<strong>le</strong>s ;- la nécessité, qui demande que <strong>le</strong>s mesures de maintien de lʼordre publicnʼaient autre ambition ou finalité que la préservation de la stabilité politique,gouvernementa<strong>le</strong> et institutionnel<strong>le</strong> ; bref la paix publique nationa<strong>le</strong>ou internationa<strong>le</strong> ;- la soumission au Droit, qui consiste à respecter <strong>le</strong>s Lois et Règ<strong>le</strong>mentsrelatifs à la conscience, lʼintimité et la vie privées des citoyens dʼun Etat ;ainsi que <strong>le</strong>s Conventions, Résolutions et Recommandations internationa<strong>le</strong>sliées au volontarisme et au consensualisme des Etats dans laconduite de <strong>le</strong>urs relations ;- la limitation, qui voudrait que <strong>le</strong>s mesures de maintien de lʼordre public neportent que sur ses composantes essentiel<strong>le</strong>s : la tranquillité; la sécurité;la sûreté ; la salubrité et la moralité.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR2 - Les principes du maintien de l’ordre publicLa nécessité de maintenir lʼordre public est un besoin originel. Sans ordre, lʼonassiste au règne du droit de la force et non de la force du Droit, aux débordementsde tous ordres engendrant peur, fatalité et désolation.Lʼordre public présente en effet un intérêt certain <strong>pour</strong> la Communauté internationa<strong>le</strong>et <strong>pour</strong> tout Etat ; intérêt qui se justifie par la multiplication des Textesrelatifs à son maintien et la nécessité etou la volonté manifeste de la soumissionde ses Mesures au principe de légalité ou de conventionalité.Le maintien de lʼordre public ne peut atteindre <strong>le</strong>s buts quʼil vise que sʼil respecteun ensemb<strong>le</strong> de principes, tantôt liés à ses caractères, tantôt liés à lʼapplicationdes Mesures conventionnel<strong>le</strong>s ou administratives y relatives.a) Les principes liés aux caractères du maintien de l’ordre publicCe sont :- <strong>le</strong> principe du respect de la souveraineté des Etats et des Libertésde <strong>le</strong>urs ressortissants ;- <strong>le</strong> principe de l’équilibre entre <strong>le</strong> maintien de lʼordre public et <strong>le</strong> respectdes Droits nationaux des Etats ainsi que <strong>le</strong>s Libertés publiquesdes citoyens;- <strong>le</strong> principe de l’efficacité des mesures internationa<strong>le</strong>s ou administrativesde maintien de lʼordre;- <strong>le</strong> principe de raisonabilité, qui sous-entend lʼopportunité et la proportionnalitédes mesures prises ;- <strong>le</strong> principe de l’obligation erga omnes, cʼest-à-dire généra<strong>le</strong>.171


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineb) <strong>le</strong>s principes liés à l’application des Mesures internationa<strong>le</strong>s ouadministratives de Maintien de l’ordre publicLa mise en application des Mesures internationa<strong>le</strong>s ou administratives demaintien de lʼordre public nécessite <strong>le</strong> concours de deux principes essentiels :- <strong>le</strong> principe du préalab<strong>le</strong>, qui réserve <strong>le</strong> droit de lʼAutorité compétente,auteur des dites mesures, de procéder à lʼexécution dʼoffice et à certainessanctions ;- et <strong>le</strong> principe du cumul des sanctions, qui réserve la possibilité dela prise des sanctions disciplinaires et judiciaires en maintien de lʼordrepublic sur <strong>le</strong> plan national principa<strong>le</strong>ment.Le maintien de lʼordre public présente en effet une forme graduel<strong>le</strong> dont <strong>le</strong>degré de perception dépend du degré de la situation à contenir et de lʼenvironnementsociopolitique national ou international.B- LES DIFFÉRENTES FORMES DE MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLICAU PLAN INTERNELes Mesures de maintien de lʼordre public épousent la configuration des situationsà combattre et se présentent de manière graduel<strong>le</strong> en trois étapes.1- Le Maintien de l’ordre préventifEncore appelé « maintien de lʼordre en temps normal », il est essentiel<strong>le</strong>mentbasé sur la surveillance et <strong>le</strong> renseignement, qui constituent en effet unemission permanente <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Forces de maintien de lʼordre.2- Le Maintien de l’ordre actifIl intervient en cas de troub<strong>le</strong>s ou menaces de troub<strong>le</strong>. Ici, la situation sansconstituer une crise sérieuse, peut dégénérer à tout moment et se généraliser.3- Le Maintien de l’ordre renforcéIl intervient en cas de rupture du temps normal c'est-à-dire, en cas de dégénérescencede la menace de troub<strong>le</strong>s qui devient grave et généralisée ou localiséeet susceptib<strong>le</strong> dʼébran<strong>le</strong>r la stabilité des Institutions, lʼintégrité et lʼuniténationa<strong>le</strong>s ; la sécurité des personnes et des biens ; voire la sécurité et la paixinternationa<strong>le</strong>s.Les moyens de lʼordre public renforcé obéissent ou doivent obéir aux principesde célérité, d’efficience et d’efficacité.C - LES ACTEURS DU MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLIC1 - Sur <strong>le</strong> plan nationalIls sont de deux catégories :a- Les acteurs formels du maintien de l’ordre publicb- Les acteurs informels du maintien de l’ordre publica- Les acteurs formels du maintien de l’ordre publicLʼon a dʼune part, <strong>le</strong>s Autorités administratives et de lʼautre, <strong>le</strong>s Forces demaintien de lʼordre.—Les Autorités administratives concourant au maintien de l’ordrepublic172


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers— En période norma<strong>le</strong> cʼest-a-dire, cel<strong>le</strong> où lʼon assiste à une absencede menace ou de troub<strong>le</strong>, ce sont : <strong>le</strong> Président de la République, <strong>le</strong>Premier Ministre, <strong>le</strong>s Membres du Gouvernement, <strong>le</strong>s Autorités administrativesdéconcentrées ou décentralisées.— En période de crise, il sʼagit : du Chef de lʼEtat, assisté en la matièrepar une Direction Généra<strong>le</strong> de Défense (DGD) et une DirectionMilitaire de Défense (DMD) ; du Ministre des Forces armées et celuide lʼintérieur ; des Autorités administratives déconcentrées.— Les Forces concourant au maintien de l’Ordre public interneCʼest lʼensemb<strong>le</strong> militaire de moyens humains et matériels mis à la dispositiondes Autorités administratives <strong>pour</strong> assurer lʼexécution des mesuresde maintien de lʼordre public. Ses Forces sont de trois catégories :— <strong>le</strong>s Forces de première catégorie, généra<strong>le</strong>ment employées en périodenorma<strong>le</strong> ou dʼabsence de toute menace ou de troub<strong>le</strong> ;Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR— <strong>le</strong>s Forces de deuxième catégorie, qui interviennent dans des situationsde quasi normalité, c'est-à-dire en cas de menace à lʼordre public ;— <strong>le</strong>s Forces de troisième catégorie, qui sont constituées et équipées<strong>pour</strong> la guerre. El<strong>le</strong>s interviennent dans des situations dʼanormalitéc'est-à-dire, de troub<strong>le</strong> ou de crise grave et généralisé menaçant la stabilitédes Institutions, lʼintégrité et lʼunité nationa<strong>le</strong>. El<strong>le</strong>s interviennentaussi en cas dʼagression armée interne ou étrangère contre la Nation.b- Les acteurs informels du maintien de l’ordre publicA lʼère du libéralisme et de la démocratie, il appert que lʼEtat ne peutplus tout faire seul ; même en matière de sécurité et/ou de maintien delʼordre public.Le climat social, politique et économique délétère qui règne au seindes Etats africains au sud du Sahara réconforte bien ce truisme.Lʼon a en effet observé que la plupart, sinon tous ces Etats, sollicitentde plus en plus <strong>le</strong> concours des Organismes privés de sécurité <strong>pour</strong> assurercertaines missions, qui originel<strong>le</strong>ment, relèvent de <strong>le</strong>urs compétencesexclusives tel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> maintien de lʼordre public. Il sʼagit enlʼoccurrence des Sociétés de gardiennage et des groupes d’autodéfenseplus connus sous <strong>le</strong> nom de Comités de vigilance, à ne pasconfondre avec <strong>le</strong>s milices privées.2 - Sur <strong>le</strong> plan internationalIl sʼagit dʼune part, de lʼAssemblée Généra<strong>le</strong> (AG) et du Conseil de Sécurité(CS) de lʼONU, et dʼautre part, de la Cour Internationa<strong>le</strong> de Justice(CIJ) et dela Cour Péna<strong>le</strong> Internationa<strong>le</strong> (CPI).L’AG et <strong>le</strong> CS de l’ONUCes deux Organes partagent la responsabilitépremière en matière demaintien de la paix et de la sécurité internationa<strong>le</strong>,qui sont <strong>le</strong>s deux composantesessentiel<strong>le</strong>s de lʼordre publicinternational.En ce qui concerne lʼAG, el<strong>le</strong> a commencéà jouer ce rô<strong>le</strong> depuis sa Résolution377(V) dite Résolution Achesondu 09 Novembre 1950, consécutive à laguerre de Corée. Cette Résolution luiréserve la possibilité dʼêtre saisie desactes compromettant lʼordre public internationa<strong>le</strong>t envers <strong>le</strong>squels <strong>le</strong> CS nʼapas encore apporté de solution.Pour ce qui est du CS, il est lʼorganepermanant de lʼONU qui se réunit, etmême dʼurgence, chaque fois que lapaix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s sonten péril. Il est habilité à prendre desActes décisoires et contraignants dans<strong>le</strong> cadre du maintien de lʼordre public international.Au terme de lʼartic<strong>le</strong> 24-1 dela CNU, il a la responsabilité principa<strong>le</strong>en la matière ; et <strong>pour</strong> assurer des actionsrapides et efficaces, il sʼévertue àrég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s différends entre <strong>le</strong>s Etats, soiten conduisant <strong>le</strong>s négociations, la médiation,la conciliation ou lʼarbitrage (cf.art 33-1 CNU). Le CS mène aussi desactions de police en cas dʼagression oude menace dʼagression, soit en <strong>le</strong>s réprimant,soit en <strong>le</strong>s prévenant.173


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLa CIJ et la CPICe sont <strong>le</strong>s instances judiciaires quiprennent activement part au maintiende lʼordre public international.En ce qui concerne la CIJ, el<strong>le</strong> est auterme de la CNU, lʼorgane judiciaireprincipal et est chargé de statuer sur <strong>le</strong>sdifférends entre <strong>le</strong>s Etats conformémentau Droit international en vigueur.Sa compétence se limite aux Etats partiesà la CNU exclusivement ; et <strong>le</strong>sEtats nʼayant pas signé ou ratifié laCharte ne peuvent la saisir quʼau travers<strong>le</strong> soutien de lʼAG ou du CS et àcondition dʼaccepter préalab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>sobligations de règ<strong>le</strong>ment pacifique desdifférends internationaux tel<strong>le</strong>s que poséespar la Charte (cf. art 35-2 Statut)et <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment judiciaire assuré par laCIJ notamment (art 33-1 Statut).Relativement à la CPI, sa création <strong>le</strong> 17Juil<strong>le</strong>t 1998 à Rome et son opérationnalitéeffective depuis <strong>le</strong> 1er Juil<strong>le</strong>t 2002sont venues renforcer la sauvegarde delʼordre public international.En tant quʼInstitution permanente, laCPI est compétente, au terme de lʼartic<strong>le</strong>5-1 du Statut de Rome, <strong>pour</strong> jugertoutes personnes convaincues dʼuncrime grave à portée internationa<strong>le</strong> notamment: <strong>le</strong>s crimes de génocide, deguerre, contre lʼhumanité et <strong>le</strong>s crimesdʼagression dont <strong>le</strong> contenu demeureimprécis jusquʼalors. Lʼétendue duchamp de la compétence personnel<strong>le</strong>de la CPI, bien que salutaire, fait lʼobjetde remises en cause, notamment delʼUnion Africaine, qui estime que celacontribue à fragiliser dʼavantage <strong>le</strong>soc<strong>le</strong> sécuritaire de ses Etats membresdont <strong>le</strong> climat sociopolitique et économiquea longtemps entamé la solidité.II -LE MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLIC : GAGE DE LASÉCURITÉ HUMAINELe maintien de lʼordre public est la finalité de lʼinstitutionnalisation de la Policeinternationa<strong>le</strong> ou administrative. Il vise à préserver lʼharmonie, la paix et lasécurité dans ou entre toutes sociétés politiques. Son contenu contingent etévolutif est fonction des circonstances de temps, de lieu et de lʼenvironnement; il nʼest pas stab<strong>le</strong> et change en fonction des situations, de la conjonctureinternationa<strong>le</strong> et des Régimes politiques.Lʼordre public se ramène en général à trois éléments fondamentaux : la sécurité,la tranquillité et la salubrité publiques, internationa<strong>le</strong>s ou nationa<strong>le</strong>s ;auxquels il faut ajouter la sûreté et <strong>le</strong> respect de la dignité humaine.Lʼordre public est donc si essentiel que son maintien et/ou sa consolidation,souci permanent <strong>pour</strong> la Communauté internationa<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s Etats pris iso<strong>le</strong>ment,concourt à la consolidation de lʼharmonie et de la concorde en <strong>le</strong>ur sein.La grande batail<strong>le</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats, et dʼavantage <strong>pour</strong> la Communauté internationa<strong>le</strong>aujourdʼhui, est la conciliation entre <strong>le</strong>s Mesures de maintien de lʼordrepublic et <strong>le</strong>s Droits nationaux ou individuels. Lʼon se demande en effet, commentprocéder <strong>pour</strong> que <strong>le</strong>s Mesures internationa<strong>le</strong>s ou administratives de maintiende lʼordre public ne constituent pas ou plus, en fonction des circonstances detemps et de lieu, des Mesures plutôt liberticides, mais cel<strong>le</strong>s garantissant lap<strong>le</strong>ine jouissance par <strong>le</strong>s Etats de <strong>le</strong>ur souveraineté, voire une meil<strong>le</strong>ure sécurité<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s individus quant à <strong>le</strong>urs personnes et <strong>le</strong>urs biens ; surtout lorsquelʼon sait combien ces derniers sont vulnérab<strong>le</strong>s en situation de crise.Cet objectif nʼest possib<strong>le</strong> quʼau terme dʼun meil<strong>le</strong>ur encadrement des Mesuresinternationa<strong>le</strong>s et administratives ; encadrement qui passe par <strong>le</strong>ur soumissionau principe de conventionalité ou de légalité, <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong> ainsi quela sanction vigoureuse et rigoureuse de <strong>le</strong>ur mauvaise application.A - L’INDISPENSABLE SOUMISSION DES MESURES NATIONALES DEMAINTIEN DE L’ORDRE PUBLIC AU PRINCIPE DE LEGALITÉLe principe de légalité est un principe selon <strong>le</strong>quel lʼAdministration ne peut etne doit agir quʼen conformité avec <strong>le</strong> Droit. En effet, lʼexercice des prérogativesdoit être compatib<strong>le</strong> avec <strong>le</strong>s différentes Normes constitutionnel<strong>le</strong>s, législativeset règ<strong>le</strong>mentaires voire internationa<strong>le</strong>s (surtout en matière de Droits delʼHomme) et <strong>le</strong>s principes généraux de Droit.Le principe de légalité doit être respecté tant en période norma<strong>le</strong> que de crise.Pour garantir au mieux la sécurité humaine, <strong>le</strong>s Mesures administratives demaintien de lʼordre public doivent en effet être conformes au Droit positif dèsquʼil existe et respecter <strong>le</strong> principe de liberté dans <strong>le</strong> cas contraire.B - L’UTILE CONTRÔLE DES MESURES NATIONALES DE MAINTIEN DEL’ORDRE PUBLICPar la nature des choses, « tout Homme qui dispose du pouvoir est porté àen abuser » et à <strong>le</strong> conserver par tous <strong>le</strong>s moyens. Ce constat est probant enmatière de maintien de lʼordre public en ce sens que <strong>le</strong>s Autorités compétentes,<strong>pour</strong> édicter <strong>le</strong>s mesures consécutives, font très souvent preuve dʼautoritarismeet dʼarbitraire ; portant de ce fait un sérieux coup aux Libertéspubliques et individuel<strong>le</strong>s.Cʼest dans lʼoptique de concilier <strong>le</strong> besoin de maintien de lʼordre public avec<strong>le</strong>s Libertés publiques afin de garantir une meil<strong>le</strong>ure sécurité aux Hommes ence qui concerne <strong>le</strong>urs biens et <strong>le</strong>urs personnes, que des contrô<strong>le</strong>s sont oudoivent être institués. Ces contrô<strong>le</strong>s peuvent être contentieux ou non.174


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers1 - Les contrô<strong>le</strong>s non contentieuxCe sont des recours qui ont lieu devant lʼAdministration qui détient en généralla compétence exclusive dʼassurer la Police administrative dont la finalitéest <strong>le</strong> maintien de lʼordre public.Le but essentiel de lʼinstitution ou de lʼinstitutionnalisation des contrô<strong>le</strong>s est depermettre aux citoyens (qui ne demandent quʼà jouir dʼun standard minimumde sécurité) de saisir ou de sʼadresser à lʼAutorité administrative à lʼeffet de luifaire constater la probab<strong>le</strong> inadéquation entre <strong>le</strong>s mesures prises par el<strong>le</strong> ouses subordonnés <strong>pour</strong> jugu<strong>le</strong>r une situation compromettant lʼordre public et laprotection ou <strong>le</strong> respect des Libertés publiques. Les contrô<strong>le</strong>s dont-il sʼagitsont de deux ordres : <strong>le</strong> recours gracieux et <strong>le</strong> recours hiérarchique.A ceci, il faut adjoindre <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire qui sʼavère très importantà nos jours <strong>pour</strong> la fiabilité des secteurs de sécurité étatiques.2 - <strong>le</strong>s contrô<strong>le</strong>s contentieux ou contrô<strong>le</strong>s juridictionnels des mesuresadministratives de maintien de l’ordre publicLes mesures administratives de maintien de lʼordre public nʼont toute la crédibilitéque lʼon peut <strong>le</strong>ur accorder que si el<strong>le</strong>s sont soumises au contrô<strong>le</strong> juridictionnel.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLe juge apparaît comme <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur protecteur des Libertés publiques dans unEtat en raison de son indépendance vis-à-vis des Autorités administratives,de son impartialité et de sa neutralité de principe; qualités que lʼon retrouverarement chez <strong>le</strong>s Autorités administratives.Les recours exercés contre <strong>le</strong>s mesures administratives de maintien de lʼordrepublic sont beaucoup plus des recours en annulation. Si traditionnel<strong>le</strong>ment,cʼest <strong>le</strong> juge administratif qui est compétent <strong>pour</strong> exercer <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> denécessité ou de proportionnalité, voire d’opportunité des Mesures et desDécisions administratives, <strong>le</strong>s Etats infléchissent ou doivent infléchir à ceprincipe en édictant des Textes particuliers <strong>pour</strong> favoriser aussi lʼinterventiondu juge judiciaire.C - LA NÉCESSAIRE SANCTION DE LA MAUVAISE APPLICATION DESMESURES NATIONALES DE MAINTIEN DE L’ORDRE PUBLICLa mise en application des Mesures administratives de maintien de lʼordrepublic nécessite <strong>le</strong> concours des principes du préalab<strong>le</strong> ou dʼexécution dʼoffice; et du cumul de sanctions qui sont des mécanismes permettant aux Autoritésadministratives et aux Forces compétentes de <strong>le</strong>s faire observer.Lʼon constate néanmoins que dans la mise en application des mesures administrativesde maintien de lʼordre, <strong>le</strong>s Agents administratifs, en lʼoccurrence<strong>le</strong>s Forces de maintien de lʼordre, sont souvent à lʼorigine de nombreuses dérivesqui font perdre au maintien de lʼordre public, toute substance, pertinence,utilité, prégnance ou nécessité ; créant de ce fait un climat dʼhostilité et dʼinsécurité<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s citoyens en ce qui concerne <strong>le</strong>urs personnes et <strong>le</strong>urs biens.Il est donc nécessaire que <strong>le</strong>s sanctions administratives et judiciaires soientprises à lʼencontre des Agents administratifs et de Forces de maintien de lʼordrequi seraient convaincus dʼune mauvaise application des mesures édictées<strong>pour</strong> préserver lʼordre public.◆ LES MESURES ET AUTRES INSTRUMENTS SPÉCIFIQUES DESAUVEGARDE DE L’ORDRE PUBLIC INTERNATIONALLa préservation de lʼordre public international passe inéluctab<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>rétablissement et <strong>le</strong> maintien de la paix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s ; cʼesten effet une obligation erga omnes. Lʼordre public international revêt un intérêt175


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainejuridique certain que <strong>le</strong>s Etats veu<strong>le</strong>nt préserver ; et cʼest <strong>pour</strong> cette raison quʼenplus des principes et autres règ<strong>le</strong>s dégagés par la CNU, des Accords spécifiquesrégissant certaines matières ainsi que des Conventions relatives aux Droits dela personne humaine singulièrement, sont de plus en plus adoptés à nos jours<strong>pour</strong> renforcer la protection du bon ordre dans <strong>le</strong> concert des Nations.Les Accords régissant certaines matières spécifiquesIl sʼagit principa<strong>le</strong>ment du droit des conflits armés et de la problématique dudésarmement.En ce qui concerne <strong>le</strong> droit des conflits armés, plusieurs textes conventionnelsrégissent la matière, notamment :- la Convention de la Haye du 18 Octobre 1907 relative aux Lois etCoutumes de la guerre ainsi que ses protoco<strong>le</strong>s additionnels;- la Convention du 10 Octobre 1980 sur lʼinterdiction ou la limitation delʼemploi de certaines Armes produisant des effets excessifs ;- <strong>le</strong>s 4 Conventions de Genève du 12 Aout 1949 et <strong>le</strong>urs Protoco<strong>le</strong>sadditionnels ;Pour ce qui est du désarmement, sans être exhaustif, lʼon peut citer :- la Convention du 10 Avril 1972 interdisant la conception, la fabrication,lʼacquisition et <strong>le</strong> stockage des Armes bactériologiques ou àtoxine; el<strong>le</strong> exige par ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong>ur destruction ;- la Convention du 10 Décembre 1976 adoptée par lʼAG de lʼONU etinterdisant lʼutilisation des techniques modifiant lʼenvironnement à desfins militaires ou toutes autres fins hosti<strong>le</strong>s ;- la Convention du 17 Décembre 1979 adoptée par lʼAG et interdisant<strong>le</strong>s prises dʼotage ;- la Convention du 15 Décembre 1979 réprimant <strong>le</strong>s attentats terroristesà lʼexplosif ;- la Convention de la Haye du 16 Décembre 1970 réprimant la captureillicite des Aéronefs.Les Conventions liées à la protection des droits fondamentauxEl<strong>le</strong>s sont assez nombreuses ; <strong>le</strong>s plus importantes sont :- la Convention du 9 Décembre 1948, prévenant et réprimant <strong>le</strong> crimede génocide ;- la Convention du 10 Décembre 1984, interdisant la torture et autrespeines ou traitements cruels, inhumains et dégradant;- la Convention du 21 Décembre 1965, interdisant toute forme de discriminationracia<strong>le</strong>.◆ LA MISE EN ŒUVRE DES MESURES DE PROTECTION DEL’ORDRE PUBLIC INTERNATIONALLa communauté internationa<strong>le</strong> ayant comme sujets principaux de droit <strong>le</strong>sEtats souverains, la mise en application des mesures visant à préserver lapaix et la sécurité internationa<strong>le</strong>s est fondamenta<strong>le</strong>ment tributaire à <strong>le</strong>urconsensualisme et à <strong>le</strong>ur volontarisme.Si la CIJ dans son Arrêt du 27 Aout 1952, sur lʼaffaire des ressortissantsaméricains au Maroc, révélait déjà la règ<strong>le</strong> pacta sunt servenda selonlaquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s Traités lient <strong>le</strong>s parties et doivent être exécutées de manièreraisonnab<strong>le</strong> et de bonne foi (règ<strong>le</strong> reprise par la Convention de Vienne de176


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers1969 en son artic<strong>le</strong> 26), lʼon doit dire que lʼexécution dʼun Traité et autres mesuresde protection de lʼordre public international obéit à quelques principesfondamentaux. Ces mesures connaissent souvent certaines limitations liéesaux garanties dont el<strong>le</strong>s sont assorties ainsi que <strong>le</strong>ur soumission à contrô<strong>le</strong>.1- Les principes d’exécution des TraitésNous pouvons mentionner trois principa<strong>le</strong>ment :- <strong>le</strong> principe de la soumission de l’Etat partie à ses engagementsinternationaux;- <strong>le</strong> principe de la primauté des Traités sur <strong>le</strong> Droit interne. Les Traitésrégulièrement ratifiés sʼimposent aux Autorités législatives, judiciaireset administratives de lʼEtat partie;- <strong>le</strong> principe de l’effet indirect envers <strong>le</strong>s citoyens de l’Etat partie.Les Traités ne créent de droits et dʼobligations quʼ à lʼégard des hautesparties contractantes et ne sʼappliquent aux individus que par <strong>le</strong> biaisou <strong>le</strong> relais du droit interne excepter <strong>le</strong>s Traités communautaires ou relatifsaux conditions des Etrangers et des Refugiés.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR2- Les limitations aux obligations conventionnel<strong>le</strong>sCertaines circonstances justifient souvent la non exécution des Traités parlʼEtat partie ou du moins, lʼexonère de cette obligation. Il peut sʼagir :- des restrictions qui résultent des principes généraux de droit telsque lʼexception de force majeure;- ou des restrictions découlant des considérations politiques.3 - Les garanties de mise en œuvre des Mesures de maintien de l’ordrepublic international.Ces garanties passent par la prise en compte des procédés permettant dʼassurerlʼapplication des Traités ainsi que la soumission à contrô<strong>le</strong> des mesuresenvisagées <strong>pour</strong> maintenir lʼordre public international établi.Sʼagissant des procédés garant de la bonne application des Traités, il ressortde la <strong>le</strong>cture combinée des artic<strong>le</strong>s 40, 41 et 42 de la CNU, que la Communautéinternationa<strong>le</strong> peut réagir de manière col<strong>le</strong>ctive par <strong>le</strong> biais de lʼAG oudu CS <strong>pour</strong> adopter des mesures provisoires ou conservatoires et des mesuresnʼimpliquant pas lʼusage de la force. Bien que lʼabsence dʼune autoritésuprême et dʼune Force publique autonome internationa<strong>le</strong> fragilise considérab<strong>le</strong>mentcertaines initiatives de paix et de sécurité internationa<strong>le</strong>s.En ce qui concerne <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> des mesures envisagées sur <strong>le</strong> plan international<strong>pour</strong> maintenir lʼordre public établi, il est <strong>le</strong> fait du juge international,qui une fois saisi, peut retenir la responsabilité dʼun Etat <strong>pour</strong> fait internationa<strong>le</strong>mentillicite en cas de violation ou de mauvaise application dʼun Traité; il nʼadmet lʼexception non adimp<strong>le</strong>ti contractus ou exception de nonexécution que <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Conventions que <strong>le</strong>s parties sont tenues dʼappliquerréciproquement.Une fois la responsabilité retenue, <strong>le</strong> Sujet fautif est tenu à réparation du tortsubi par son fait. Le principe de la réparation tel que défini par la jurisprudenceinternationa<strong>le</strong> (Arrêt CIJ 1980 Aff. des otages américains ; ou CPJI1928 Aff. de Chorzów) revêt deux caractères : la satisfaction et la réparationproprement dite qui comprend <strong>le</strong> dédommagement ou la remise à lʼétat etsʼapplique en cas de préjudice matériel.177


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineIII - CONCLUSION GÉNÉRALELes peup<strong>le</strong>s aspirent à la paix et à la prospérité. Lʼheure nʼest plus au désordre,à lʼanarchie et à lʼiso<strong>le</strong>ment des Etats et des peup<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong> est à lamondialisation pacificatrice et à l’humanitarisme bonifiant.Les Etats Africains ne peuvent jouer <strong>le</strong>ur partition dans <strong>le</strong> concert des Nationscivilisées, que sʼils surmontent <strong>le</strong>s différences négatives et <strong>le</strong>s différends liésaux survivances du passé colonial et à lʼégoïsme national aveug<strong>le</strong> ; causesou facteurs de conflits permanents qui insécurisent <strong>le</strong>urs peup<strong>le</strong>s et paralysent<strong>le</strong>ur développement.Lʼhumanisation des comportements des acteurs principaux, secondaires etrésiduels qui participent à la construction des Nations dans <strong>le</strong> continent Africain,devrait sʼappuyer sur <strong>le</strong>s soc<strong>le</strong>s de la concertation permanente entre<strong>le</strong>s Etats, <strong>le</strong> dialogue politico-diplomatique permanent entre <strong>le</strong>s diversesstructures étatiques, <strong>le</strong> respect des fonctions ou des charges étatiques, lafraternité et lʼapolitisme des Armes, lʼesprit de responsabilité, dʼentreprise etde patriotisme dans toutes <strong>le</strong>s composantes de la Société.Les Pouvoirs publics sont <strong>le</strong>s régulateurs des tensions socia<strong>le</strong>s et <strong>le</strong> <strong>le</strong>vainde la conscience nationa<strong>le</strong> ou sous-régiona<strong>le</strong>. Ils doivent être responsab<strong>le</strong>set dignes, actifs, réactifs et proactifs dans tous <strong>le</strong>s domaines, mais plus particulièrementen matière de sécurité active ou passive, tout en prenantappui sur la gestion intelligente des crises antérieures et des situations conflitogènesou conflictuel<strong>le</strong>s enregistrées ici et là en Afrique et dans <strong>le</strong> monde.Dès que lʼordre public est menacé ou agressé dangereusement, tout naturel<strong>le</strong>ment,lʼEtat développe des mécanismes de défense adaptés aux formeset à la gravité de lʼattaque ou de lʼagression dirigée contre lui. Cʼest dire que<strong>le</strong> Maintien de lʼordre public démocratique doit être éminemment pensé, humaniséet humanisant, républicain, nimbé de visibilité, de lisibilité, de civilité,de crédibilité, de proximité et de convivialité avec <strong>le</strong>s populations, de discipline,dʼautorité et de fermeté mesurées, <strong>le</strong> tout appuyé sur une bonne gouvernancepluriel<strong>le</strong>.La réussite de cette vision repose essentiel<strong>le</strong>ment sur la tenue généra<strong>le</strong> desForces de maintien de lʼordre et de <strong>le</strong>urs Chefs hiérarchiques ; <strong>le</strong>squels doiventse débarrasser des pratiques rétrogrades et nuisib<strong>le</strong>s à lʼépanouissementde la démocratisation qui ont <strong>pour</strong> noms : la culture du tribalisme, delʼethnicité, de lʼadversité, de favoritisme, du népotisme, de la haine, de la barbarie,des vio<strong>le</strong>nces interethniques, triba<strong>le</strong>s ou religieuses, de la corruption,de lʼindiscipline, de lʼimpunité, de lʼanarchie etc.Dans cette perspective, <strong>le</strong>s Forces de maintien de lʼordre doivent apprendreà vivre ensemb<strong>le</strong> avec <strong>le</strong>s populations ; à travail<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong>, à évoluer ensemb<strong>le</strong>sur <strong>le</strong>s théâtres dʼopérations selon <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s prescrites.Le Pouvoir démocratique nʼest ni au bout du fusil ou du canon, ni au bout dela tricherie et des manœuvres antidémocratiques. Il est « dans <strong>le</strong>s Urnes etnon dans la Rue ».Il est bon de rappe<strong>le</strong>r quʼaucune Armée, aucune Gendarmerie, aucune Policene peut plus tirer sur <strong>le</strong>s fou<strong>le</strong>s sans sourcil<strong>le</strong>r, sans être interpellée, blâmée,condamnée et châtiée à la fois par la Communauté Nationa<strong>le</strong> etInternationa<strong>le</strong>.Il est salutaire <strong>pour</strong> la démocratie que <strong>le</strong>s par<strong>le</strong>mentaires Africains se dotentde moyens de conception et surtout de contrô<strong>le</strong> dʼune législation adaptée et178


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersrigoureuse dans <strong>le</strong>s domaines dʼachat, de transfert, de vente, de port dʼarmeset de munitions, de sorte que <strong>le</strong>s services de sécurité remplissent <strong>le</strong>urs missionsde paix et de sécurité sur des bases juridiques solides et complètes<strong>pour</strong> jugu<strong>le</strong>r la circulation et lʼutilisation illéga<strong>le</strong>s de ces engins de la mort,qui écument <strong>le</strong>s Etats Africains et sont à lʼorigine de nombreuses souffranceshumaines indicib<strong>le</strong>s et de la mort des milliers des personnes dans <strong>le</strong> monde.Sans verser dans la course aux Armements, il serait de bon ton et de bonnepolitique de Maintien de lʼOrdre, que chaque Etat ou chaque Sous-région delʼAfrique se dote de capacités institutionnel<strong>le</strong>s, militaires, politico-diplomatiques,budgétaires, éducatives, techniques, mora<strong>le</strong>s et opérationnel<strong>le</strong>s, demanière à être capab<strong>le</strong> de surveil<strong>le</strong>r, de contrô<strong>le</strong>r et de maîtriser ses frontièrescontre <strong>le</strong>s activités « immora<strong>le</strong>s et dangereuses » et toutes <strong>le</strong>s formesdʼagression orientées contre sa sécurité, quʼel<strong>le</strong> soit intérieure ou extérieure.Dans ce contexte, <strong>le</strong>s Forces de lʼordre, sans autre forme de procès, doiventsʼarrimer à lʼévolution de la Société et à lʼavancée démocratique en coursdans la plupart des Etats en Afrique.Pour cela, <strong>le</strong>s Corps dʼEtat de chaque Etat et <strong>le</strong>s Forces socia<strong>le</strong>s doiventêtre sensibilisés à la vigilance permanente, au dialogue social avec <strong>le</strong>sForces de Maintien de lʼordre et au respect de la légalité républicaine.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLa typologie des menaces, quʼel<strong>le</strong>s soient « décisives » ou « latentes », doitguider <strong>le</strong>s capacités des Forces de maintien de lʼordre à contenir, à dissuaderou à réprimer <strong>le</strong>s atteintes et <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s à lʼordre public. Pour cela, ilconviendrait de restructurer et dʼorganiser <strong>le</strong>s Forces de lʼordre, de moderniser<strong>le</strong>urs capacités opérationnel<strong>le</strong>s contre <strong>le</strong>s entorses et <strong>le</strong>s freins à la démocratieen marche en Afrique ; dʼoù la nécessaire accentuation de lacoopération avec <strong>le</strong>s Grandes puissances en la matière. Rentre éga<strong>le</strong>mentdans cette vision, lʼamélioration du cadre et des conditions de travail demême que lʼencadrement général des Forces de maintien de lʼordre.« La Démocratie doit se faire dans la paix, l’unité nationa<strong>le</strong>, la réconciliationnationa<strong>le</strong>, l’ordre et l’enfantement de nouvel<strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs » auxquel<strong>le</strong>sil conviendrait dʼajouter la réhabilitation des va<strong>le</strong>urs humaines etmora<strong>le</strong>s des cultures Africaines, qui <strong>pour</strong>raient, à coup sûr, former <strong>le</strong> nouveausoc<strong>le</strong> de la réconciliation entre « <strong>le</strong> Maintien de l’ordre et la sécuritéhumaine ».Le maintien de lʼordre public est dʼordre situationnel, typologique et environnemental.Les Forces de maintien de lʼordre sont formées, organisées et catégoriséesen fonction de <strong>le</strong>urs missions en matière de défense et desécurité.En régime démocratique, <strong>le</strong>s Forces de lʼordre doivent être formées, équipées,disciplinées, rôdées, recyclées, encadrées en permanence et enchâsséesdans <strong>le</strong> strict respect de la hiérarchie et dʼun profil de carrièrerégulièrement tracé et appliqué afin dʼéviter <strong>le</strong>s dérives et <strong>le</strong>s actes dégradantset/ou inhumains des Hommes de rang. Soucieuses du respect de la légalité,el<strong>le</strong>s doivent faire preuve de professionnalisme en toute situation parla maîtrise tota<strong>le</strong> de <strong>le</strong>urs réactions, de <strong>le</strong>urs moyens logistiques, des techniquesde maintien de lʼordre et de négociations, sans jamais perdre de vueque force doit rester à la loi quel<strong>le</strong> que soit la situation.Il ne serait pas superflu de sensibiliser ou de former, au moins sommairement,<strong>le</strong>s populations et <strong>le</strong>s composantes civi<strong>le</strong>s de la Société aux missionsgénéra<strong>le</strong>s des Forces de maintien de lʼordre dans un Etat démocratique, notammenten matière de défense et de sécurité. Cette politique <strong>pour</strong>rait ser-179


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainevir de <strong>le</strong>vain de la conscience nationa<strong>le</strong> et du sentiment patriotique dans <strong>le</strong>sdiverses couches des populations. Cʼest une véritab<strong>le</strong> approche pédagogiquequʼil faudrait envisager <strong>pour</strong> maîtriser la colonne vertébra<strong>le</strong>, si sensib<strong>le</strong>, de lasécurité intérieure et extérieure de lʼEtat démocratique. La défense, la sécurité,la paix, lʼordre public et lʼenracinement démocratique sont des biens publicsqui doivent être défendus jalousement par lʼensemb<strong>le</strong> de la Nation oudes Nations concernées.Le maintien de lʼordre en démocratie passe éga<strong>le</strong>ment par la sensibilisationdes populations sur lʼobjectif <strong>pour</strong>suivi, la police de proximité, la prévention,la répression mesurée et adaptée aux circonstances du moment et à la gravitéde la situation. Bref, <strong>le</strong>s hommes en uniforme, quels que soient <strong>le</strong>ursgrades et fonctions, doivent être techniquement compétents, mora<strong>le</strong>mentsûrs, physiquement au point et humainement responsab<strong>le</strong>s.En somme, cʼest <strong>le</strong> maintien et/ou la consolidation de lʼordre public, qui soutientet permet la réalisation des efforts de développement économique etsocial au sein dʼun Etat, garantit la stabilité des Institutions, <strong>le</strong> bon fonctionnementdes Services publics, lʼintégrité du territoire, la conduite saine desrelations internationa<strong>le</strong>s, bref, la sécurité et la paix internationa<strong>le</strong>s.Malheureusement, <strong>le</strong> paradoxe veut que <strong>le</strong>s Mesures internationa<strong>le</strong>s ou administrativesde maintien de lʼordre public, selon la nature et la gravité dudanger, entrent souvent en contradiction avec lʼexercice de certains Droitsnationaux des Etats souverains, ainsi que la jouissance de certaines libertéspubliques ou individuel<strong>le</strong>s voire, la jouissance de certains Droits fondamentauxdes citoyens ; contradiction qui relève tantôt de la mauvaise articulationdes Mesures prises <strong>pour</strong> maintenir lʼordre public, tantôt de la mauvaiseapplication desdites Mesures. Ces situations se justifient <strong>le</strong> plus souvent parlʼexcès de zè<strong>le</strong> ; lʼignorance des textes conventionnels, législatifs ou rég<strong>le</strong>mentaires; la course au bilan et aux galons ; lʼabus de droit ou dʼautorité dela part des donneurs dʼordre et des exécutants de ces ordres.Cʼest justement <strong>pour</strong> limiter <strong>le</strong>s effets néfastes des Mesures de maintien delʼordre public interne ou international sur <strong>le</strong>s Droits des Etats et <strong>le</strong>s Libertéspubliques ainsi que <strong>le</strong>s Droits fondamentaux, que lʼon a assisté à la consécrationde <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong> et de la sanction de <strong>le</strong>ur mauvaise application.Toutefois, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> et la sanction ont ceci de particulier quʼils interviennentà posteriori, <strong>le</strong>s Mesures de maintien de lʼordre public bénéficiant du privilègedu préalab<strong>le</strong>, la sécurité humaine ne sʼen trouve pas <strong>pour</strong> autant mieux garantieen raison des dommages souvent irréversib<strong>le</strong>s qui résultent de <strong>le</strong>urapplication.Pour pallier à cet état de fait, lʼinstitution dʼun contrô<strong>le</strong> à priori des mesuresde maintien de lʼordre public <strong>pour</strong>rait constituer un pis - al<strong>le</strong>r ; aussi, <strong>pour</strong>que <strong>le</strong> maintien de lʼOrdre public ne soit plus un danger <strong>pour</strong> la Sécurité humaine,<strong>le</strong>s mesures y relatives doivent non seu<strong>le</strong>ment être opportunes, maisaussi et surtout proportionnel<strong>le</strong>s à la nature et au degré de la situation detroub<strong>le</strong> ou de désordre à jugu<strong>le</strong>r. De plus, <strong>le</strong>s Forces de maintien de lʼordrepublic interne ou international doivent faire preuve de professionnalisme enrespectant de manière scrupu<strong>le</strong>use la Déontologie de <strong>le</strong>ur Corps de rattachementet <strong>le</strong> «Code de conduite international <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Responsab<strong>le</strong>s del’application des Lois »; el<strong>le</strong>s doivent enfin être formées aux Droits delʼHomme ainsi que <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s et principes du Droit international humanitaire; car lʼignorance et lʼinconscience de ces Droits justifient souvent <strong>le</strong>sexactions perpétrées ; de même, <strong>le</strong>s Etats et <strong>le</strong>s citoyens doivent être forméset éduqués au respect des Droits de l’homme et du Droit International180


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersHumanitaire ou de lʼautorité de lʼEtat, des Institutions, des édifices publicset du patrimoine national ou international ; et surtout, être suffisamment aufait des voies de recours <strong>le</strong>ur permettant de revendiquer <strong>le</strong>urs Droits.En définitive, bien articulées, contenues, appliquées et contrôlées, <strong>le</strong>s Mesuresde maintien de lʼordre public constituent un gage de sécurité indéniab<strong>le</strong><strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats et <strong>le</strong>s citoyens ; mal articulées et appliquées, el<strong>le</strong>sconduisent à des dérives autoritaires bref, à des manœuvres liberticides quicréent en fin de compte une insécurité notoire <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats ou <strong>le</strong>s Hommesrelativement à <strong>le</strong>ur souveraineté, <strong>le</strong>ur dignité, <strong>le</strong>ur intégrité, voire <strong>le</strong>urs patrimoinesnationaux ainsi que la jouissance de <strong>le</strong>urs biens. Dʼoù la nécessité<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s différents acteurs du Maintien de lʼOrdre, de se mettre, entre autres,à lʼéco<strong>le</strong> du Droit, de la Sociologie, de lʼAnthropologie, de la Psychologie, delʼhistoire des peup<strong>le</strong>s noirs dʼAfrique et des Techniques dʼintervention en matièrede maintien de lʼordre et de négociation avec <strong>le</strong>s fou<strong>le</strong>s dangereuses oususceptib<strong>le</strong>s de <strong>le</strong> devenir.Les peup<strong>le</strong>s africains souffrent de nombreux maux dont <strong>le</strong>s principauxsont : la pauvreté, la famine, la mal nutrition, la santé précaire etc.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARSeu<strong>le</strong>s la sécurité et la paix durab<strong>le</strong>s peuvent <strong>le</strong>ur permettre de s’ensortir <strong>pour</strong> bâtir un monde meil<strong>le</strong>ur, plus humain et plus agréab<strong>le</strong> à vivre<strong>pour</strong> tous.Léon Pascal SEUDIEest Contrô<strong>le</strong>ur Général de Police retraité.Juriste- Littéraire, il est nanti dʼune Licenceès Lettres, dʼun Certificat dʼEtudes Supérieureset dʼun DES ès Lettres décernéspar la Faculté de Lettres et Sciences Humainesde lʼUniversité de Yaoundé.Sa carrière <strong>le</strong> conduit au sommet de laHiérarchie policière et lui permet dʼoccuperde grands Postes de Commandement,notamment celui dʼInspecteur Général dela Sûreté Nationa<strong>le</strong>.Il a dirigé plusieurs fois lʼEco<strong>le</strong> Nationa<strong>le</strong> Supérieurede Police et dispensé des coursdans des grandes Eco<strong>le</strong>s de Gendarmerieet à lʼENAM de Yaoundé pendant de nombreusesannées.Sur <strong>le</strong> plan international, son long séjourdans <strong>le</strong>s arcanes de lʼOIPC- Interpol, lui apermis dʼêtre tour à tour, Membre du ComitéExécutif, Vice Président, Responsab<strong>le</strong> de lazone Afrique et Conseil<strong>le</strong>r Juridique de lʼOrganisation.181


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.5 Intervention du Commandant Jean S. BIAGUI, Ministère des ForcesArmées, Sénégal.FORCES ARMÉES ET DROITS DE L’HOMME“Si l'humanité a des droits sur l'État, el<strong>le</strong> en a aussi sur l'Homme.El<strong>le</strong> attend de lui notamment qu'il la respecte dans <strong>le</strong>s autres personneshumaines, car toute violation de <strong>le</strong>urs droits méconnaît <strong>le</strong>ssiens” 89Résumé : „Armed Forces and Human Rights“ is the tit<strong>le</strong> of Major Jean S. BIAU-GUI's intervention. He cites Rene-Jean Dupuy who said that National defencehad the objective to assure the security, the integrity of the territory and the livesof peop<strong>le</strong>, and this at any time, in any circumstances and against all forms of aggression.He then names the limits of the judicial capacities of soldiers, also thelimits of international humanitarian rights. Major BIAGUI says that various examp<strong>le</strong>sillustrate that international human right and the corresponding conventionsare difficult to be applied. This has been true for the use of internationally outlawedweapons in several armed conflicts like for examp<strong>le</strong> during the war in Lebanonin 2006, where cluster bombs have been used. Another difficulty is the recentchange of threats and therefore, the change of the types of missions of armedforces. Human rights have to be adapted on this new situation, because theydon't cover all contexts today. A new exigence will be the construction of a peaceculture. This peace culture needs to integrate a comp<strong>le</strong>mentary relation betweenhuman rights and the international humanitarian rights. Major BIAGUI states thatthere is a growing need for a better education in judicial affairs, oriented towardsthe human rights as basic ingredient of the new peace culture. He ends his interventionby calling for a modernisation of human and humanitarian rights, adaptedon the new types of conflict. The education of the members of the armedforces has to be adjusted in the same way.« La défense nationa<strong>le</strong> a <strong>pour</strong> objet dʼassurer en tout temps, en toutes circonstanceset contre toutes <strong>le</strong>s formes dʼagression, la sécurité et lʼintégritédu territoire, ainsi que la vie de la population 90 ». Le rô<strong>le</strong> de toute Armée estdʼassurer la protection du territoire national ainsi quʼun droit essentiel de lapopulation : <strong>le</strong> droit à la vie. Lʼaction militaire repose sur une organisation etsur des capacités opérationnel<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> combattre un adversaire, au besoinjusquʼau sacrifice ultime. Comme l'écrivait Clausewitz, «la guerre est un actede vio<strong>le</strong>nce et il n'y a pas de limite à la manifestation de cette vio<strong>le</strong>nce. Chacundes adversaires fait la loi de l'autre, d'où résulte une action réciproquequi, en tant que concept, doit al<strong>le</strong>r aux extrêmes ».89René-Jean Dupuy « Lʼhumanité dans lʼimaginairedes nations » Julliard, 1991, 283 p.90Artic<strong>le</strong> premier LOI N° 70-23 du 06 juin 1970portant Organisation généra<strong>le</strong> de la Défense.Toutefois, lʼhumanité dispose des droits de lʼhomme et du droit humanitairecomme garde fou contre lʼutilisation indiscriminée de la Force et <strong>pour</strong> prévenirlʼirraisonnab<strong>le</strong> ou modérer lʼinhumain : lʼéventualité de la vio<strong>le</strong>nce armée.Le Droit International Humanitaire (DIH) éga<strong>le</strong>ment appelé droit des conflitsarmés, droit de la guerre ou “jus in bello” est un corpus de règ<strong>le</strong>s, élaboréesau fil des sièc<strong>le</strong>s, qui régit aujourdʼhui <strong>le</strong>s conflits entre États, entre groupesarmés étatiques et non étatiques. Les règ<strong>le</strong>s du DIH reposent sur un équilibredélicat entre <strong>le</strong>s nécessités des opérations militaires légitimes et <strong>le</strong>s exigencesfondamenta<strong>le</strong>s dʼhumanité. Les principa<strong>le</strong>s sources du DIH sont <strong>le</strong> droit internationalcoutumier et <strong>le</strong>s Conventions de Genève de 1949, <strong>le</strong>s protoco<strong>le</strong>particuliers de 1977, la Convention de la haye de 1907 concernant <strong>le</strong>s loi etcoutumes de la guerre ainsi que plusieurs conventions internationa<strong>le</strong>s restreignantou interdisant lʼusage de certaines armes spécifiques.182


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersLes droits de lʼhomme sont ceux qui sont reconnus à lʼindividu, compte tenu desa nature humaine, indépendamment de sa race, son sexe, de son âge, sesorigines, de ses convictions religieuses, de ses opinions politiques. Ces droitsconstatés et reconnus comme des « évidences », ont fait lʼobjet de proclamationou de déclarations et sont érigés aujourdʼhui en normes internationa<strong>le</strong>s.Le droit humanitaire et <strong>le</strong>s droits de lʼhomme forment un code universel.Cependant, <strong>le</strong> droit humanitaire est un droit dʼurgence qui sʼapplique auxconflits armés. Il serait “à priori paradoxal de par<strong>le</strong>r du droit de la vie en droithumanitaire alors que <strong>le</strong> but même de la guerre est de tuer.” 91 Serait-il aussiparadoxa<strong>le</strong> dʼassocier <strong>le</strong>s droits de lʼhomme aux Forces Armées puisque laraison ultime de <strong>le</strong>ur création est de faire la guerre, donc tuer ? Se pose alorsla problématique des garanties de la protection de la vie de la population.Quels sont <strong>le</strong>s instruments dont disposent Forces Armées <strong>pour</strong> accomplir<strong>le</strong>urs missions de protection de la vie de la population ? Quels sont <strong>le</strong>s écartset <strong>le</strong>s convergences entre <strong>le</strong>s principes dʼencadrement juridique de lʼactionmilitaire et la réalité de lʼexercice du métier de militaire ?Malgré lʼadoption avec succès et la ratification par la plupart des pays desquatre conventions de Genève, la protection des populations et de <strong>le</strong>urs droitsse pose encore avec acuité. Le droit sensé encadrer lʼaction militaire connaîtdes limites de temps et dʼespace, <strong>le</strong>s Forces Armées ne sont pas en état deguerre perpétuel<strong>le</strong>, lʼencadrement de <strong>le</strong>ur action par <strong>le</strong> Droit InternationalHumanitaire nʼest pas de fait entière. Par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s conflits ont connu deprofonde mutations qui ont affecté « <strong>le</strong>ur nature <strong>le</strong>ur rationalité et <strong>le</strong>urs modesdʼexpression » 92 depuis la fin de la guerre froide, sortant du cadre de la guerreclassique et de la territorialité qui ont particulièrement marqué la première partiedu vingtième sièc<strong>le</strong>. Ces mutations doivent conduire à une re<strong>le</strong>cture durapport entre <strong>le</strong> militaire et <strong>le</strong> droit qui fonde son action.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARPartant des questions posées, il sʼagit de porter un regard sur lʼenvironnementde lʼaction des Forces Armées sous lʼang<strong>le</strong> du droit utilisab<strong>le</strong> en proposantdes éléments de réponse aux interrogations initia<strong>le</strong>s.Nous essaierons de cerner la portée et la pertinence du Droit InternationalHumanitaire au regard des réalités sécuritaires et des missions élargies desForces Armées.A la suite de cette analyse, nous tenterons de ressortir <strong>le</strong>s liens entre <strong>le</strong>s Droitsde lʼHomme et la mission du militaire essentiels <strong>pour</strong> toute culture de paix.LES LIMITES DES CAPACITÉS JURIDIQUES DES MILITAIRESLes principes fondamentaux du droit international humanitaires, humanité,nécessité militaire, proportionnalité..., ont été érigés <strong>pour</strong> encadrer lʼactionmilitaire. Ses règ<strong>le</strong>s pertinentes constituent lʼélément principal de la formationdes membres des Forces Armées. Cependant ce cadre juridique déjà limité enlui-même (A), nʼest pas objectivement applicab<strong>le</strong> à toutes <strong>le</strong>s opérations(B).• Les limites du droit humanitaireLes règ<strong>le</strong>s du Droit international Humanitaire sont des règ<strong>le</strong>s dʼexception, seuilminimum de protection, comp<strong>le</strong>xes et insuffisamment connues.Le Droit humanitaire est un droit de compromis de portée limitée (1) et dʼap plicationdiffici<strong>le</strong> (2).• Les limites du champ d’application du Droit international humanitaireLe principe du droit des conflits armés couvre deux domaines : <strong>le</strong> droit de etHayes <strong>le</strong> droit de Genève. Le droit de Genève vise à protéger lʼindividu, en91Mohamed el Kouhene « <strong>le</strong>s garanties fondamenta<strong>le</strong>sde la personne en droit humanitaire et droits delʼhomme » Martinus Nijhoff Publishers p110.92Georges Nzongola-Ntalaja « La dynamique desconflits en Afrique Centra<strong>le</strong> Acteur et processus »Communication aux 14 ème Congrès biennal delʼAssociation Africaine de Science Politique,Durban, Afrique du Sud, 26-28 juin 2003 ; 19 èmeCongrès Mondial de lʼAssociation Internationa<strong>le</strong> deScience politique, Durban, 29 juin-4 juil<strong>le</strong>t 2003.93A lʼorigine après un délai dʼun an en temps de paix,ramené à six mois aux termes de lʼart 25 duprotoco<strong>le</strong> II. En période de conflit <strong>le</strong> retrait ne peutse faire quʼaprès la conclusion dʼun traité de paix et<strong>le</strong> rapatriement des personnes protégées par laconvention.183


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainesʼassurant que <strong>le</strong>s personnes qui ont été mises hors de combat ou qui neparticipent pas aux hostilités sont traitées humainement. Le droit de La Hayecherche à restreindre la liberté des belligérants en interdisant <strong>le</strong>s méthodes deguerre qui provoquent des maux superflus. Le droit international humanitairea été, dés son origine, un droit à la frontière de lʼexercice de la guerre et <strong>le</strong>sexigences humanitaires. Conditionné par <strong>le</strong> caractère exceptionnel de lasituation, la protection des droits de lʼhomme nʼest pas tota<strong>le</strong>.La fonction essentiel<strong>le</strong> du droit humanitaire est dʼétablir un seuil minimum deprotection de la personne qui nʼest pas absolue. Le DIH reconnaît que <strong>le</strong>sactions militaires ne concernent que <strong>le</strong>s objectifs militaires. Toutefois, dans lʼincertitudedes combats, des pertes en vie humaines innocentes peuvent êtreenregistrées. Les règ<strong>le</strong>s de droit humanitaire sont assez permissives, adaptéesà une prise en considération de la situation extraordinaire quʼest la guerre.LʼEtat peut émettre des réserves ou interpréter librement <strong>le</strong>s dispositions desconventions et des protoco<strong>le</strong>s qui contiennent des clauses permettant de <strong>le</strong>sdénoncer 93 . La portée du DIH est limitée puisque plusieurs pays nʼont pasratifié toutes <strong>le</strong>s conventions et protoco<strong>le</strong>s 94 .En outre, la question fondamenta<strong>le</strong> de lʼétat de belligérance et de la qualificationdu conflit pose problème. Quand est-ce quʼune situation peut être qualifiéede conflit armé international ou non international ? Quand commence etquand finit <strong>le</strong> conflit armé? Ce sont là des questions fondamenta<strong>le</strong>s, principauxdéfis du droit humanitaire. Cette difficulté a été re<strong>le</strong>vée par <strong>le</strong> TPIY, «... <strong>le</strong>sconflits dans lʼex-Yougoslavie auraient pu être qualifiés à la fois d'internes etd'internationaux ou [de] conflit interne parallè<strong>le</strong> à un conflit international, ou[de] conflit interne qui sʼest internationalisé du fait d'un soutien extérieur, ou[de] conflit international remplacé ultérieurement par un ou plusieurs conflitsinternes, ou quelque combinaison de ces situations.» 95 Que peut-on dire desconflits entre entités ethniques ou religieux (Nigeria) avec intervention desForces Armées ? Les attaques nʼont pas visé des objectifs militaires, el<strong>le</strong>s ontfait des milliers de morts et de victimes innocentes. Quid de la privatisation dela sécurité et des problèmes liés à la nature des personnels des sociétés desécurité et <strong>le</strong> respect des règ<strong>le</strong>s de droit humanitaire ?Le droit humanitaire ne saurait, sans un grand risque <strong>pour</strong> la vie et la libertéindividuel<strong>le</strong>, sʼappliquer à des situations qui ne sont pas assimilab<strong>le</strong>s à la guerre.94Tous <strong>le</strong>s Etats ne sont pas parties aussi bien àtoutes <strong>le</strong>s Conventions de Genève et auxprotoco<strong>le</strong>s additionnels.95Tribunal pénal international <strong>pour</strong> lʼex-Yougoslavie(TPIY), Le Procureur c/Dusko Tadi•, IT-94-1- AR72,Arrêt relatif à l'appel de la défense concernant l'exceptionpréjudiciel<strong>le</strong> d'incompétence (Chambredʼappel), 2 octobre 1995, para. 72.96En principe, <strong>le</strong>s internés doivent, entre autres, êtreinformés des motifs de <strong>le</strong>ur détention et une procéduredevrait <strong>le</strong>ur permettre de contester effectivementcette détention. Les motifs de détentiondoivent être évalués par un organe indépendant etimpartial ayant lʼautorité de libérer <strong>le</strong>s internés si<strong>le</strong>s motifs de <strong>le</strong>ur internement cessent dʼexister.Dʼautres exigences de traitement humain, tels que<strong>le</strong>s contacts avec <strong>le</strong>s membres de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>, doiventéga<strong>le</strong>ment être mis en oeuvre. En tout état decause, nul ne peut être détenu sans que <strong>le</strong>s motifsde sa détention soient reconnusEnfin, lʼinterprétation des règ<strong>le</strong>s de droit humanitaire nʼest pas aisée. Ainsilʼartic<strong>le</strong> 3 commun qui énonce des obligations minima<strong>le</strong>s relatives aux personnesdétenues ne donne pas dʼorientation sur tous <strong>le</strong>s aspects des opérationsliées aux détenus auxquel<strong>le</strong>s il peut sʼappliquer. Une des questions portesur <strong>le</strong>s garanties procédura<strong>le</strong>s en cas dʼinternement, qui est une forme de privationde liberté <strong>pour</strong> des motifs impérieux de sécurité reconnus par <strong>le</strong> droithumanitaire 96 . Toutes ces préoccupations sont sans réponse.• Des difficultés d’application et de sanctionLa mise en œuvre du droit humanitaire qui dépend de lʼengagement desparties contractantes à respecter ses principes reste un défi incontournab<strong>le</strong>.Les Etats Parties aux conventions et aux protoco<strong>le</strong>s ne respectent pastoujours <strong>le</strong>urs obligations conventionnel<strong>le</strong>s de respect et de faire respecter <strong>le</strong>droit humanitaire.Lʼusage des armes nʼest pas toujours conforme au droit de conflits armés aucours desquels il a souvent été reporté des cas dʼattaques indiscriminées contre<strong>le</strong>s moyens de survie des populations, bombardement de ponts (atteinte à la184


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersliberté de circulation), centre de communication/antenne (atteinte aux libertésdʼinformation, dʼexpression, de pensée). La convention dʼOttawa a interditlʼusage des mines, cependant des armes à effets secondaires sont toujoursutilisées (bombes à sous minutions pendant la guerre du Liban en 2006).Des pratiques et des comportements toujours dénoncées montrent un mépriscertain du droit international humanitaire : torture, obstac<strong>le</strong>s délibérés entravers de lʼaction humanitaire par <strong>le</strong>s parties aux conflits. 97 Les conséquencesdramatiques des violations massives des droits de lʼhomme sont <strong>le</strong> fruitdʼabsence des Etats et de la communauté internationa<strong>le</strong> (Cambodge de PolPot, génocide Rwandais) qui aboutit au massacre indiscriminé de populationscivi<strong>le</strong>s innocentes. Veil<strong>le</strong>r au respect et faire respecter <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de droithumanitaire peut sʼavérer diffici<strong>le</strong> dans la pratique, particulièrement dans dessituations de conflits dʼEtats en faillite avec lʼeffondrement des structuresgouvernementa<strong>le</strong>s et lʼabsence dʼinterlocuteurs capab<strong>le</strong>s dʼhonorer <strong>le</strong>ursengagements.Lʼapplication du DIH incombe uniquement aux parties aux conflits armés,étatiques ou non étatiques, ce qui présuppose lʼaccès au droit et la compréhensiondu droit, ainsi quʼune bonne formation et une bonne supervision ducommandement. Certaines armées ont élaboré des codes de conduiteénumérant <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s pertinentes: sʼattaquer uniquement aux combattants ennemisou <strong>le</strong>s objectifs militaires; recueillir et soigner <strong>le</strong>s b<strong>le</strong>ssé sans distinctiondʼappartenance, ne pas tuer ou torturer <strong>le</strong>s prisonniers de guerre, traiterhumainement <strong>le</strong>s civils... Lʼobservation de ces règ<strong>le</strong>s permet de faire la guerreen respectant <strong>le</strong>s principes fondamentaux du DIH. Cependant, lʼenseignementdu droit humanitaire occupe une place secondaire dans <strong>le</strong>s programmesmilitaires. Ces notions de base sont imparfaitement connues de ceux qui doivent<strong>le</strong>s appliquer en particulier <strong>le</strong>s Forces de défense et de sécurité et <strong>le</strong>sgroupes rebel<strong>le</strong>s. Le droit humanitaire existe depuis <strong>le</strong> vingtième sièc<strong>le</strong> maisreste encore largement ignoré du public, surtout en Afrique où la majorité dela population est analphabète.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREnfin, malgré <strong>le</strong>s progrés de la communauté internationa<strong>le</strong> dans la <strong>pour</strong>suitepéna<strong>le</strong> <strong>le</strong> respect du DIH par <strong>le</strong>s parties aux conflits, demeure <strong>le</strong> principal défià re<strong>le</strong>ver. Il faut commencer par prévenir <strong>le</strong>s violations et <strong>le</strong>s abus en faisantjouer <strong>le</strong>s mécanismes prévus dans <strong>le</strong>s traités. Lʼabsence de volonté politiqueest la contrainte majeure quʼil sʼagisse des États ou des acteurs non étatiques.• Mutation des menaces et des engagementsDans un monde globalisé la menace nʼest pas que guerrière. Il nʼy a pasforcément de ligne de front entre bourreau et victime <strong>pour</strong> définir <strong>le</strong>s responsabilitésde violations des droits de lʼhomme et désigner <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s.Les soldats évoluant dans des missions différentes des missionstraditionnel<strong>le</strong>s de combat, sont démunis dans la gestion de situations nonconflictuel<strong>le</strong>s.• Le nouveau di<strong>le</strong>mme : <strong>le</strong>s changements de nature la classification desconflitsLa Cour Internationa<strong>le</strong> de Justice a reconnue la primauté du DIH dans <strong>le</strong>sconflits armés faisant de lui une <strong>le</strong>x specialis, ors <strong>le</strong>s guerres classique sontde plus en plus rares. Depuis <strong>le</strong>s années quatre vingt dix <strong>le</strong> changement dela nature des menaces <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats est une donnée majeure qui a entraîné<strong>le</strong> changement de paradigme sécuritaires.Les postures classiques de défense sont rendues obsolètes par la nature97La liste est longue de rapports des Nations Uniessur <strong>le</strong>s violations des droits de lʼhomme dans <strong>le</strong>sconflits. Le Haut Commissariat des Droits delʼHomme a publié un rapport dʼenquête et dʼévaluationdes violations graves perpétrées au Zaïre puisen RDC entre mars 1993 et juin 2003 montrant lagravité des crimes et des violations des Droits delʼHomme.185


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainedes menaces amplifiées par la globalisation, <strong>le</strong>s mutations technologiqueset <strong>le</strong>s réseaux dʼinformation et de communication. Ces menaces sont trèsdiverses: trafic de drogue, trafic des migrants, traite des personnes, criminalitétransnationa<strong>le</strong> et transfrontalière, prédation des ressources naturel<strong>le</strong>s(minéraux, bois…).Les Forces Armées sont appelées à intervenir dans diverses situations ne re<strong>le</strong>vantpas de conflits armés, notamment dans une série dʼopérations intérieures,notamment la lutte antiémeute, <strong>le</strong>s bouclages et fouil<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s missionsde protection et dʼescortes, la protection dʼitinéraire, la lutte contre <strong>le</strong> grandbanditisme, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de lʼimmigration clandestine entre autres exemp<strong>le</strong>s.Les tâches de maintien de lʼordre publiques auxquel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s militaires doiventfaire face <strong>le</strong>s mettent en contact avec <strong>le</strong>s populations ou des rassemb<strong>le</strong>mentstels que <strong>le</strong>s manifestations, <strong>le</strong>s mouvements de fou<strong>le</strong>s ou même des émeutesavec une faib<strong>le</strong> formation au maintien de lʼordre. Lʼutilisation proportionnel<strong>le</strong>de la force est <strong>le</strong> premier défi <strong>pour</strong> une force dont la caractéristique principa<strong>le</strong>est lʼaptitude à délivrer une puissance meurtrière 98 .Certaines situations de troub<strong>le</strong>s intérieurs sont plus diffici<strong>le</strong>s. Lʼactualité récentede la guerre contre <strong>le</strong>s cartels de drogue ou de trafiquants et passeursdʼimmigrants irréguliers au Mexique, illustre assez bien <strong>le</strong> problème 99 . Uneexplosion de vio<strong>le</strong>nce sans précédent a suivi <strong>le</strong> début des opérations successives,<strong>le</strong>s attentats publics attribués à un cartel dont <strong>le</strong>s revenus dépassent<strong>le</strong> budget national de la défense, font craindre <strong>le</strong> développement dʼun narcoterrorismeet laissent apparaître <strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>sses de lʼEtat.Les militaires doivent saisir <strong>le</strong>s nuances juridiques liées à ces différents typesde situation. Ces faits constituent-il des situations de conflit armé régis par <strong>le</strong>DIH ? Dans <strong>le</strong> cas contraire, quels est <strong>le</strong> droit applicab<strong>le</strong> ? Les militaires sontilsoutillés <strong>pour</strong> identifier <strong>le</strong> droit applicab<strong>le</strong> ? Sʼils ne <strong>le</strong> font pas, <strong>le</strong>s conséquences<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s troupes impliquées peuvent être dramatiques.Cette question fondamenta<strong>le</strong> a été posée dans <strong>le</strong> cas de la guerre contre <strong>le</strong>terrorisme. A lʼévidence <strong>le</strong> droit humanitaire constituerait un cadre appropriédans <strong>le</strong>s zones de combat en Afghanistan, ou en Irak. Toutefois <strong>le</strong>s épisodesdes vols et prisons secrètes de la CIA semb<strong>le</strong>nt indiquer quʼil nʼya pas de réponseuniforme, une difficulté supplémentaire <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s militaires. Les personnesfaites prisonnières dans <strong>le</strong> cadre de la guerre, au sens juridique duterme, doivent bénéficier de la protection du DIH.Le militaire, formé à stopper lʼennemi en utilisant toute la force nécessaire, setrouve cruel<strong>le</strong>ment démuni dans un nouvel environnement qui réclame desméthodes, des comportements et un cadre juridique différents. Ils sont appelésà agir au contact des civils <strong>pour</strong> restaurer lʼordre public ou dans desmissions de maintien de la paix. Cʼest dans ces situations quʼils sont <strong>le</strong> plusaccusés de brutalité, de violation de droits de lʼhomme.98La répression de manifestation avec mortsdʼhomme, utilisation de bal<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s par <strong>le</strong>s forcesde lʼordre est récurrente. Les évènements du 28septembre 2008 en Guinée font suite à ceux de2007.99Le président Felipe Calderon a fait de la luttecontre <strong>le</strong> trafic de stupéfiants un des objectifs <strong>le</strong>splus imporatnt de son mandat. LʼArmée a engagéau fur et à mesure plusieurs milliers de militaireface à plusieurs milliers de membres des cartelsdans ce qui est appelé « guerre » par <strong>le</strong>spolitiques.Le succès des opérations militaires contre <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s menaces dépend delʼinterprétation correcte de la situation et de lʼutilisation de nombreux instrumentsdu droit humanitaire, des droits de lʼhomme et du droit interne. Lʼintégrationdes nouvel<strong>le</strong>s formes de vio<strong>le</strong>nce est un défi juridique <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Arméesobligées de fonder <strong>le</strong>urs actions sur <strong>le</strong> droit.• Des contextes non couverts par <strong>le</strong> droit humanitaireLes Forces Armées sont formées, équipées et entraînées <strong>pour</strong> défendre <strong>le</strong>sEtats contre <strong>le</strong>s ennemis et <strong>le</strong>s agressions extérieures. La défense nationa<strong>le</strong>est articulée dans cette optique, lʼentraînement des militaires ainsi que <strong>le</strong>ur for-186


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersmation reflètent cette réalité. La formation juridique concerne principa<strong>le</strong>ment<strong>le</strong> droit des conflits armés. Depuis <strong>le</strong> 19 ème sièc<strong>le</strong> des règ<strong>le</strong>s de droit coutumieront été forgées <strong>pour</strong> encadrer <strong>le</strong>s conflits armés. Le droit de la guerre et <strong>le</strong>droit international humanitaire peuvent être automatiquement appliqués.Toutefois, <strong>le</strong>s militaires font souvent face aujourdʼhui à une multitude de nouveauxproblèmes sécuritaires issus de tentions internes et de troub<strong>le</strong>s intérieurs.Les cas dʼintervention sont élargis et diversifiés avec la multiplicationde catastrophes naturel<strong>le</strong>s, lʼorganisation des secours et <strong>le</strong>s risques sécuritairesqui y sont liés. Les tensions internes et <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s intérieurs ne relèventpas du droit des conflits armés. El<strong>le</strong>s relèvent des obligations quirésultent des dispositions généra<strong>le</strong>s du droit international des droits delʼhomme. Aux termes de lʼartic<strong>le</strong> 1 du Protoco<strong>le</strong> II de 1977, <strong>le</strong> DIH exclut deson champ « <strong>le</strong>s situations de tensions internes, de troub<strong>le</strong>s intérieurs comme<strong>le</strong>s émeutes, <strong>le</strong>s actes isolés et sporadiques de vio<strong>le</strong>nces et autres actes analoguesqui nʼont pas été considérés comme des conflits armés ». Dans ces situationsqui présentent des risques sérieux de violations des droits delʼhomme, <strong>le</strong>s militaires doivent identifier <strong>le</strong>s limites entre de simp<strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>set tension internes et un conflit armé non international.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes cadres juridiques sont différents de celui des conflits armés, ils sont cons -titués de droit national des instruments internationaux relatifs aux droits delʼhomme. Seu<strong>le</strong> une tel<strong>le</strong> combinaison offre une protection fondamenta<strong>le</strong> auxvictimes des situations ou des troub<strong>le</strong>s intérieurs. Les armées ne doivent doncpas s'en tenir à une formation se limitant au droit des conflits armés àlʼexclusion dʼautres domaines pertinents du droit.VERS UNE NOUVELLE EXIGENCE : LA CULTURE DE LA PAIXLes Armées sont confrontées à des réalités différentes dans un monde qui ne finitpas de muter. Les règ<strong>le</strong>s applicab<strong>le</strong>s aux conflits internationaux et aux guerrescivi<strong>le</strong>s ne semb<strong>le</strong>nt pas adaptées à ces situations. Les besoins de protectiondes populations et <strong>le</strong>s modes dʼopérations de ces fronts intérieurs devraient êtresoumis aux règ<strong>le</strong>s essentiel<strong>le</strong>s des droits de lʼhomme et de la législation nationa<strong>le</strong>.El<strong>le</strong>s complètent <strong>le</strong> Droit international humanitaire et offrent aux militairesun cadre adapté à <strong>le</strong>urs actions (A). Lʼapprentissage des droits de lʼhomme par<strong>le</strong>s forces Armées est indispensab<strong>le</strong> à lʼédification dʼun environnement empreintdʼune culture de la paix (B) favorab<strong>le</strong> à la protection de la personne.• Une complémentarité entre droit humanitaire et droits de l’hommeLes droits de lʼhomme et <strong>le</strong> droit international humanitaire qui ont été développésde manière séparée sont des branches différentes dʼune même discipline.Les champs dʼapplication sʼinterpénètrent (1). Les relations entre <strong>le</strong>s deuxbranches du droit sont marquées par la complémentarité. Leur appropriationpar <strong>le</strong>s Forces Armées et <strong>le</strong>ur mise en œuvre est indispensab<strong>le</strong> <strong>pour</strong> la protectionpratique des droits de toute personne quelque soient <strong>le</strong>s circonstances.Lʼapplication des droits de lʼhomme plus large, permet dʼéviter un vide juridiquedans la protection lʼindividu en dehors des conflits armés (2).• Convergence et interdépendance croissante entre droit de l’homme etDroit International HumanitaireLes droits de lʼHomme et <strong>le</strong> Droit International Humanitaire sont issus de racinesdifférentes et ont connu une évolution parallè<strong>le</strong>. La différenciation entre <strong>le</strong>s deuxdroits sʼestompe de plus en plus dans la pratique. La protection développée par <strong>le</strong>sdeux entités est complémentaire. On note une influence réciproque des deux systèmesdans la protection de lʼindividu même si lʼinteraction entre ces deux en-94Tribunal pénal international <strong>pour</strong> lʼex-Yougoslavie(TPIY), Le Procureur c/Dusko Tadi•, IT-94-1- AR72,Arrêt relatif à l'appel de la défense concernant l'exceptionpréjudiciel<strong>le</strong> d'incompétence (Chambredʼappel), 2 octobre 1995, para. 72.96En principe, <strong>le</strong>s internés doivent, entre autres, êtreinformés des motifs de <strong>le</strong>ur détention et une procéduredevrait <strong>le</strong>ur permettre de contester effectivementcette détention. Les motifs de détentiondoivent être évalués par un organe indépendant etimpartial ayant lʼautorité de libérer <strong>le</strong>s internés si<strong>le</strong>s motifs de <strong>le</strong>ur internement cessent dʼexister.Dʼautres exigences de traitement humain, tels que<strong>le</strong>s contacts avec <strong>le</strong>s membres de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>, doiventéga<strong>le</strong>ment être mis en oeuvre. En tout état decause, nul ne peut être détenu sans que <strong>le</strong>s motifsde sa détention soient reconnus97La liste est longue de rapports des Nations Uniessur <strong>le</strong>s violations des droits de lʼhomme dans <strong>le</strong>sconflits. Le Haut Commissariat des Droits delʼHomme a publié un rapport dʼenquête et dʼévaluationdes violations graves perpétrées au Zaïre puisen RDC entre mars 1993 et juin 2003 montrant lagravité des crimes et des violations des Droits delʼHomme.187


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainesemb<strong>le</strong>s de règ<strong>le</strong>s, notamment la résolution des conflits par lʼapplication du principede la <strong>le</strong>x specialis, fait toujours lʼobjet de débats juridiques.Le droit des droits de l'homme et <strong>le</strong> droit humanitaire font tous deux partie dusystème de protection des droits des individus. Bien que distincts de par <strong>le</strong>urchamp dʼapplication, ils sont proches voisins dans la mesure où tous deux visentà protéger <strong>le</strong>s droits <strong>le</strong>s plus fondamentaux de la personne humaine (savie, sa dignité).Fondés sur la Déclaration universel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s droits de l'homme concourent audéveloppement global de lʼindividu et couvre plusieurs domaines : économique,social, culturel, civil... Droit d'urgence, <strong>le</strong> droit humanitaire s'appliqueuniquement aux situations de conflits armés. Il vise à protéger autant que possib<strong>le</strong>la vie, l'intégrité physique et la dignité de l'individu contre la vio<strong>le</strong>nce etl'arbitraire. Dans lʼesprit, <strong>le</strong>urs actions sʼinscrit aussi bien dans <strong>le</strong> court que <strong>le</strong>plus long terme : rétablir une société civi<strong>le</strong> et restaurer la jouissance des droitscivils et politiques. Les droits de l'homme et <strong>le</strong> droit humanitaire, par <strong>le</strong>urs finalitéset <strong>le</strong>urs modalités d'application distinctes, assurent donc, de manièrecomplémentaire, la protection de la personne humaine.Le droit International Humanitaire est étroitement lié aux droits de lʼhomme. I<strong>le</strong>xiste de nombreuses connexions entre <strong>le</strong>s deux branches du droit dont <strong>le</strong>sdomaines sont différents. Plusieurs droits sont éga<strong>le</strong>ment protégés par <strong>le</strong>sdeux branches de droit qui sʼinfluencent mutuel<strong>le</strong>ment. Le principe de « minimumirréductib<strong>le</strong> » aussi appelé « noyaux durs » concerne <strong>le</strong>s garanties fondamenta<strong>le</strong>set une série de protection que lʼon trouve dans <strong>le</strong>s deux droits. Ilsʼagit notamment de lʼinterdiction du meurtre, de la torture et des traitementsdégradants. La convergence entre <strong>le</strong>s deux droits ainsi consacrée par la doctrinea été matérialisée dans lʼartic<strong>le</strong> 75 du Protoco<strong>le</strong> 1 et 4 instituant <strong>le</strong>s garantiesfondamenta<strong>le</strong>s de la personne humaine. Cette proximité se retrouvedans des conventions régiona<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong>s que la Convention européenne desDroits de lʼHomme et la Convention américaine qui listent une série de droitstota<strong>le</strong>ment incompressib<strong>le</strong>s quel<strong>le</strong>s que soient <strong>le</strong>s circonstances.En outre, <strong>le</strong>s Droits de lʼhomme qui ne sʼefface pas en période de conflit, peuventavoir un impact sur la conduite des opérations militaires. Les dérogationsnʼexcluent pas <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de droit de lʼhomme qui peuvent sʼappliquer. Cʼestainsi que la Cour Européenne des Droits de lʼHomme a imposé des limites àlʼEtat Turc dans ses moyens de lutte contre <strong>le</strong> PKK (lʼaffaire Akdivar et autresc. Turquie).Cette complémentarité se retrouve dans <strong>le</strong>s activités des organes chargés delʼapplication des règ<strong>le</strong>s de droit de lʼhomme et du droit humanitaire dans <strong>le</strong>scontextes de paix ou ceux plus particuliers de vio<strong>le</strong>nce. Ainsi, <strong>le</strong> HautCommissariat aux Droits de lʼhomme aussi bien que <strong>le</strong> CICR, déploient desactivités dans des zones de conflit aussi bien lors des crises internes quedans dʼautres situations de vio<strong>le</strong>nce col<strong>le</strong>ctive. De même, <strong>le</strong>ur action préventiveet éducative est dissuasive et permet dʼéviter <strong>le</strong>s violations des droits delʼhomme. Les différents organes des Nations Unies et <strong>le</strong> CICR œuvrent <strong>pour</strong>la protection des individus, <strong>le</strong> renforcement des capacités et reflètent ce lienétroit entre <strong>le</strong>s droits de l'homme et <strong>le</strong> droit humanitaire.Le respect de la dignité des individus et la protection de <strong>le</strong>urs droits fondamentauxnécessite une complémentarité à tous <strong>le</strong>s niveaux des systèmes deprotection.• Les droits de l’homme adaptés aux besoins nouveauxLes droits humanitaires limités aux conflits confèrent un petit espace à188


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierslʼhomme, tandis que <strong>le</strong>s droits de lʼhomme lui accordent une dimension plusgrande. Les instruments relatifs aux droits de lʼhomme créé <strong>pour</strong> policer <strong>le</strong>srelations entre <strong>le</strong>s gouvernements et <strong>le</strong>s personnes sous <strong>le</strong>ur contrô<strong>le</strong>, neconnaissent pas de limite de temps et dʼespace, ils sont applicab<strong>le</strong>s en touttemps et en toute circonstance. Leur vocation à lʼuniversalité est affirmée parla Charte des Nations Unies qui déclare que «…la reconnaissance de ladignité inhérente à tous <strong>le</strong>s membres de la famil<strong>le</strong> humaine et de <strong>le</strong>urs droitségaux et inaliénab<strong>le</strong>s constitue <strong>le</strong> fondement de la liberté, de la justice et dela paix dans <strong>le</strong> monde,…» 100 . Les droits de lʼhomme sont donc attachés à lapersonne humaine offrant ainsi à tout individu une protection généra<strong>le</strong> etpermanente.De fait, <strong>le</strong>s droits de lʼhomme couvrent <strong>le</strong>s situations de troub<strong>le</strong> intérieur et detension interne. La protection offerte par <strong>le</strong>s instruments du droit internationaldes droits de lʼhomme ne cesse pas. El<strong>le</strong> nʼest limitée que par <strong>le</strong>s clauses quiprévoient quʼil peut être dérogé, en cas de danger public menaçant la vie dela nation, à certaines dispositions quʼimposent <strong>le</strong>s principaux instruments quicorrespondent aux cas de troub<strong>le</strong>s intérieurs. Toutefois, ces dérogations neconcernent aucunement <strong>le</strong>s droits incompressib<strong>le</strong>s tels que <strong>le</strong> droit à la vie.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes mutations dans <strong>le</strong>s contextes dʼengagement rendent nécessaire lʼadaptationet une réponse appropriée aux situations nouvel<strong>le</strong>s. Les situations decrise et de troub<strong>le</strong> intérieur dépendent de la loi et des droits de lʼhomme. Ilparait indispensab<strong>le</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Forces de défense et de sécurité de développerdes mécanismes <strong>pour</strong> améliorer de manière substantiel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s droits desindividus en période de troub<strong>le</strong> intérieur et de tensions internes. La faib<strong>le</strong>ssede la protection juridique internationa<strong>le</strong> ainsi que <strong>le</strong>s possibilités offertes àlʼEtat de déroger à la plupart des droits garantis par <strong>le</strong> droit international desdoits de lʼhomme ne doivent pas se traduire par un vide juridique qui limiteraitde facto <strong>le</strong>s droits de <strong>le</strong> population et compromettrait la construction de lʼEtatde droit.Les normes définissant <strong>le</strong>s droits et obligations de tous (autorités et démembrementsétatiques, entités non étatique et individus) qui sʼimposent à toussont contenues dans <strong>le</strong>s instruments internationaux des droits de lʼhomme, lalégislation nationa<strong>le</strong>. Ces règ<strong>le</strong>s sont opposab<strong>le</strong>s aux parties impliquées dans<strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s intérieurs. Pour <strong>le</strong>ver <strong>le</strong>s incertitudes de la « zone grise juridique»que constituent <strong>le</strong>s situations de troub<strong>le</strong> intérieur, <strong>le</strong>s Forces Armées doiventélaborer des règ<strong>le</strong>s de conduite mais surtout sʼapproprier <strong>le</strong>s droits dont <strong>le</strong>sindividus sont titulaire afin dʼen garantir une complète jouissance.La doctrine, la formation et <strong>le</strong>s ordres donnés dans <strong>le</strong>s opérations intérieuresdoivent tenir compte d'un ensemb<strong>le</strong> d'éléments relatifs aux règ<strong>le</strong>s pertinentesdes droits de lʼhomme.La formation militaire se concentrait principa<strong>le</strong>ment sur la destruction de lacapacité militaire des forces ennemies. Le droit international des droits delʼhomme interdit dʼutiliser la force léta<strong>le</strong>, sauf en dernier recours <strong>pour</strong> protégerdes vies. Les militairess doivent reçoir une formation rigoureuse <strong>pour</strong> comprendre<strong>le</strong>s nuances de lʼescalade de la force <strong>pour</strong> couvrir toutes <strong>le</strong>s situationsde troub<strong>le</strong> intérieur.• Renforcement de la formation juridique : l’éducation aux droits del’homme <strong>pour</strong> une culture de la paixDans <strong>le</strong>s environnements hosti<strong>le</strong>s dʼIrak, <strong>le</strong>s troupes américaines, britanniquesont adapté <strong>le</strong>urs équipements, <strong>le</strong>s modes opératoires et la formationdes personnels. Lʼaptitude opérationnel<strong>le</strong> est un gage de professionnalisme100Premier Considérant de la Déclaration Universel<strong>le</strong>des Droits de lʼHomme189


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineet de réussite mais lʼattitude correcte est devenue <strong>le</strong> plus gros défis à re<strong>le</strong>ver<strong>pour</strong> toutes <strong>le</strong>s armées du monde. Lʼignorance du droit ou des lois par <strong>le</strong>s militaires,peut avoir des conséquences tragiques sur <strong>le</strong>s populations (atteinte àla dignité ou à lʼintégrité physique de civils) ou avoir des conséquencespolitiques énormes (discrédit sur lʼautorité, exacerbation des tentions. Lʼacterépréhensib<strong>le</strong> dʼun soldat rejaillira sur lʼinstitution militaire et peut compromettrela mission.• La réalisation des droits de la populationLa mission principa<strong>le</strong> des Forces Armées est de protéger la « vie de lapopulation ». Cette disposition de la loi sur la Défense Nationa<strong>le</strong> est lʼaffirmationla plus emphatique de la relation étroite entre la mission de protection dela population et <strong>le</strong>s Droits de lʼhomme. Le Droit à la vie est <strong>le</strong> plus fondamentalde tous <strong>le</strong>s droits, la privation de ce droit rend illusoire la réalisation de toutautre droit.Lʼaction quotidienne de toutes <strong>le</strong>s Forces de défense et de Sécurité doitconcourir à construire un environnement saint <strong>pour</strong> permettre à tout individude se développer et de réaliser son potentiel. A ce propos, Koffi Annan ancienSecrétaire général de lʼONU affirmait dans son rapport “Dans une liberté plusgrande Développement, sécurité et respect des droits de lʼhomme <strong>pour</strong> tous”:« la protection et la promotion des va<strong>le</strong>urs universel<strong>le</strong>s que sont la primautédu droit, <strong>le</strong>s droits de lʼhomme et la démocratie constituent une fin en soi.El<strong>le</strong>s sont indispensab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> instaurer un monde de justice et de stabilité,porteur de promesses. Aucun programme de sécurité ni aucun effort dedéveloppement ne peut aboutir sʼil nʼest pas solidement ancré dans <strong>le</strong> respectde la dignité humaine » 101 .Lʼaction des Forces Armées doit être profondément ancrée dans <strong>le</strong>s droits delʼhomme. Les militaires seront dʼautant plus acceptés par <strong>le</strong>s populations que<strong>le</strong>urs droits sont reconnus, acceptés et protégés. Cependant, <strong>le</strong>s ForcesArmées sont marquées par des a priori qui la plus part du temps, quel que soit<strong>le</strong>ur attitude et <strong>le</strong>urs actes, font des Droits de lʼhomme une norme qui <strong>le</strong>ur esthétérogène.La culture des droits de lʼhomme, comme lʼa si bien re<strong>le</strong>vé <strong>le</strong>Président de lʼAIDC, <strong>le</strong> Doyen Amor, ne se décrète pas 102 . Pour <strong>le</strong>s Forces deDéfense et de Sécurité el<strong>le</strong> sʼacquière par la formation. El<strong>le</strong> doit être renforcéepar une éducation systématique aux droits de lʼhomme qui sʼinscrit dans<strong>le</strong> temps au-delà de lʼapprentissage au droit humanitaire.• L’éducation aux droits de l’homme, une démarche éthique101« Dans une liberté plus grande », Nations Unies,New York, 2005, p. 51.102« Les droits fondamentaux », Rapport introductif,Actes des 1ères journées scientifiques du Réseaudroits fondamentaux de lʼAUPELF-UREF », 1997,p.40.103François Vallançon « Les fondements philosophiquesdes droits de lʼhomme » revue Civitasn°8 mars 2003104Les différents rapports de lʼONU traitent de situationsou de violation de droits de lʼhomme. Les militairessont souvent accusés de violation de droitsde lʼhomme. Les connaissent-t-ils vraiment ?Comme <strong>le</strong>s juges, <strong>le</strong>s administrations, <strong>le</strong>s Forces armées aident à attribuerà chacun sa part, comme cʼest lʼoffice propre du droit selon la tradition romaine« sunum cuique tribuere » 103 . La question primaire mais fondamenta<strong>le</strong>ne peut être éludée dans cette réf<strong>le</strong>xion: quel<strong>le</strong> est la réalité de la connaissancedes droits que <strong>le</strong> militaire est censé protéger ? Les membres desForces Armées ont surtout une connaissance académique et limitée desdroits de lʼhomme 104 . Pourtant, lʼinjonction forte des droits de lʼhomme envue dʼune plus grande effectivité trouve un écho favorab<strong>le</strong> dans ce qui faitlʼessence de lʼêtre militaire : sa démarche éthique. Les notions de Libertés,de droits fondamentaux ne <strong>le</strong>ur sont pas extérieures et se réalisent danslʼaccomplissement quotidien de <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong>.A la réf<strong>le</strong>xion, la copu<strong>le</strong> « Droits de lʼHomme et Forces de Défense et deSécurité renvoie à lʼexcel<strong>le</strong>nce de lʼidentité du militaire, membre de la sociétéet porteur de ses va<strong>le</strong>urs. Les normes naissent à partir de va<strong>le</strong>urs cardina<strong>le</strong>sde la société. El<strong>le</strong>s correspondent à une recherche dʼun idéal de per-190


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersfection que la diversité de cadres conceptuels nʼaltère pas. El<strong>le</strong>s sont porteusesde va<strong>le</strong>urs et sont la seu<strong>le</strong> source véritab<strong>le</strong> de lʼacte mora<strong>le</strong> expressionauthentique du devoir que tout homme doit observer. Codifiées ou non,el<strong>le</strong>s sont partie intégrante du tissu de la vie et sont des fondements à partirdesquels tout se construit. Les personnels des Forces de défense et desécurité, sont surtout des centurions dont <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de comportement fontpartie de la réalité objectivement vécue par la société. Leurs normes sont façonnéesde sorte quʼel<strong>le</strong>s représentent la va<strong>le</strong>ur la plus absolue possib<strong>le</strong> dela nation.Ainsi, <strong>le</strong>s obligations positives découlant des droits de lʼhomme trouvent<strong>le</strong>urs racines dans la démarche étique et la mission du militaire. Chaque individua une va<strong>le</strong>ur absolue et inconditionnel<strong>le</strong>, une dignité dont la protectionest indispensab<strong>le</strong> à la réalisation de la sécurité humaine. Lʼéducationaux droits de lʼhomme doit ainsi être systématique et plus large <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s militaires.Par sa résolution 49/184 du 23 décembre 1994, lʼAssemblée généra<strong>le</strong>des Nations Unies a proclamé la période de dix ans commençant <strong>le</strong> 1erjanvier 1995 “Décennies des nations Unies <strong>pour</strong> lʼéducation dans <strong>le</strong> domainedes droits de lʼhomme. ” el<strong>le</strong> rappel<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> préambu<strong>le</strong> que « lʼéducationdans <strong>le</strong> domaine des droits de lʼhomme […] doit être un processus globalétalé sur toute une vie [et que] <strong>pour</strong> parvenir à <strong>le</strong>ur p<strong>le</strong>in épanouissement,<strong>le</strong>s femmes, <strong>le</strong>s hommes et <strong>le</strong>s enfants doivent prendre conscience de lʼensemb<strong>le</strong>de <strong>le</strong>urs droits fondamentaux – civils, culturels, économiques, politiqueset sociaux ». Pour pouvoir protéger efficacement la vie de lapopulation, <strong>le</strong>s militaires doivent connaître <strong>le</strong>s droits dont il sʼagit, ils doiventeux même être formés à ces droits. Lʼapprentissage aux droits de lʼhommetel quʼil est rappelé dans <strong>le</strong> préambu<strong>le</strong> est un droit de lʼhomme du militaire.Une formation aux droits de lʼhomme va <strong>le</strong>ur conférer une plus grande légitimitéaux yeux de la population.Lʼéducation aux droits de lʼhomme est conçue comme un cheminement versla conscience et <strong>le</strong> respect de sa propre dignité et de cel<strong>le</strong> des autres. El<strong>le</strong>apparaît comme un devoir éthique essentiel, peut-être même <strong>le</strong> devoir éthiquepar excel<strong>le</strong>nce du militaire.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCONCLUSIONSLes militaires ont été formés au droit international humanitaire, essentiel<strong>le</strong>mentun droit de la guerre qui connaît des limites. De nouvel<strong>le</strong>s formes deconflits armés constituent des défis <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Forces Armées. Les repèrestraditionnels sont brouillés avec <strong>le</strong>s mutations de la conflictualité. Les guerresne se déclarent pratiquement plus, <strong>le</strong> glissement de lʼétat de crise à celui deconflit armé est souvent <strong>le</strong>nt et insidieux. Par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong> Droit internationalhumanitaire qui demeure muet face aux questions posées par <strong>le</strong>s conflitsasymétriques ne couvre pas dans sa normativité <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s internes.La stratégie à adopter par <strong>le</strong>s Forces Armées <strong>pour</strong> faire face à toutes <strong>le</strong>ssituations doit tendre vers une progression de lʼenseignement traditionnel dudroit humanitaire vers une éducation aux droits de lʼhomme complémentaire,dans la perspective du développement dʼune culture de la paix.Lʼéducation des militaires aux droits de lʼhomme va certainement élargir <strong>le</strong>urscapacités juridiques à protéger <strong>le</strong>s populations et à participer à lʼédificationde sociétés plus stab<strong>le</strong>s. Lʼavènement dʼun Etat de droit requiert une formationde toutes <strong>le</strong>s couches socia<strong>le</strong> et surtout, tous <strong>le</strong>s démembrements delʼEtat à la démocratie, à la tolérance, aux droits de lʼhomme.Commandant Jean S. BIAGUI,Ministère des Forces Armées duSénégal.191


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.6 Intervention du Général de brigade (e.r.) John THOMAS, ancienAttaché de l’Air, RAF, Grande-BretagneCivil-Military Relations in Emergency SituationsRésumé : Partant dʼune expérience de 32 ans de service dans l'armée de l'airbritannique et de plusieurs affectations dans <strong>le</strong> domaine de la politique de sécuritéet des relations internationa<strong>le</strong>s aui sein de l'OTAN, à la mission du Royaume-Uni auprès l'Union européenne et à lʼambassade du Royaume-Uni à Paris, <strong>le</strong>général THOMAS donne un point de vue se situant au niveau de réf<strong>le</strong>xion stratégiqueavec une perspective particulière à partir de l'Europe occidenta<strong>le</strong>. Dansson intervention, il sʼapproche de la question des relations civilo-militaires dans <strong>le</strong>ssituations de crise sous <strong>le</strong>s trois ang<strong>le</strong>s suivants :Tout d'abord, il définit la notion du «civilo-militaire». L'aspect de cette notion quiattire probab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> plus d'attention est la relation entre <strong>le</strong>s militaires et <strong>le</strong>s ONG.Le général Thomas fait valoir <strong>le</strong> fait que, bien quʼétant probab<strong>le</strong>ment lʼélément <strong>le</strong>plus important de la coopération civilo-militaire au niveau tactique et opérationnel,il est loin d'être l'unique aspect important de cette relation.En deuxième lieu, il examine la question de la coopération entre militaires et civils.Selon lui, la coopération peut couvrir une vaste gamme dʼactivités et peutal<strong>le</strong>r, dans la théorie, dʼun extrême à lʼautre, cʼest-à-dire d'un acquiescement àcontrecœur à la présence de l'autre partie sur <strong>le</strong> même théatre dʼopérationsjusquʼá un accord comp<strong>le</strong>t sur la stratégie, la planification et lʼaction, y compris <strong>le</strong>partage des moyens logistiques.Fina<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> général THOMAS explore dans <strong>le</strong> détail <strong>le</strong>s configurations et <strong>le</strong>smoyens de coopération dans <strong>le</strong>s situations « dʼurgence » : catastrophes naturel<strong>le</strong>s(qui peuvent varier entre <strong>le</strong> très local jusquʼà lʼintercontinental), <strong>le</strong>s catastrophestechniques ou accidents industriels (comme celui de Bhopal ou deTchernobyl) ainsi que <strong>le</strong>s conflits et <strong>le</strong>s situations post-conflit.When they arise, the sort of emergency situations implied in the tit<strong>le</strong> are, bydefinition, both unexpected and serious. This e<strong>le</strong>mentary observation is neithernew nor surprising. However, what is surprising is how litt<strong>le</strong> time the civiliansand the military who are likely to be involved in the cooperative deliveryof help in such emergency situations seem to spend getting to know eachother, before they are thrown together in the extreme circumstances of a postconflict or post natural disaster situation. Later, I shall look at some of the reasonswhy this may be so.This Colloquium offers a very important opportunity to examine this subjectaway from the intense pressures of an ongoing operation. Nothing but goodcan result from such discussions between practitioners, academics and politicians.We must, however, expect such discussions to be animated or evenheated from time to time. Such vigorous discussion should be taken as a signof engagement and commitment, which is to be welcomed. But, as we shallsee, civilians and military not only often speak a different language, but alsooften work to significantly different paradigms and priorities. It is therefore necessarynot only to be ab<strong>le</strong> to interpret what is being said, but also to understandthe who<strong>le</strong> cultural framework of the speaker.So, if you are to interpret what I am saying, I suggest that you need to understandmy point of view and my own cultural background. I spent nearly 32years in the UK Royal Air Force. A great deal of that career was spent in internationalrelations policy and delivery, serving in the UK MOD, NATO HQ,the UK mission to the European Union and a large UK embassy in Europe. Iworked at the UK MOD on the theory and doctrine of peacekeeping missions192


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersat the time of the Balkans wars, and at the EU at a time when the EuropeanSecurity and Defence Policy (ESDP) was taking its first operational steps. Myviewpoint is therefore essentially a strategic one and a Western Europeanone, but I believe there are sufficient <strong>le</strong>ssons of general interest to make myview at <strong>le</strong>ast the basis of discussion.The fact that this subject has been se<strong>le</strong>cted for discussion also suggests that itis recognised as one of the fundamental prob<strong>le</strong>ms to be addressed. However,one of the real issues that we need to examine is that the issue of civil-militarycooperation in emergency situations is not really a prob<strong>le</strong>m, but a series of prob<strong>le</strong>mswhich are interlinked in an almost end<strong>le</strong>ss variety of ways. So I would liketo break down these prob<strong>le</strong>ms into the 3 main areas which are implicit in the tit<strong>le</strong>.First, the issue of ‘civil-military’. The aspect of this relationship that hasprobably received the most attention is the military-NGO relationship. Althoughthis e<strong>le</strong>ment of the relationship is indeed very important, and perhapsthe most important at the tactical and operational <strong>le</strong>vel, it is far from being theonly important strand of the relationship.Second, what do we mean when we talk about cooperation?Cooperationcan in theory range from, at one extreme, comp<strong>le</strong>te agreement on strategy,planning and delivery, including sharing logistic assets, to at the other extremelitt<strong>le</strong> more than grudging acquiescence to the presence of the other party. Whyshould the practical aspects of cooperation be so difficult, particularly whenfew would disagree with the premise that effective cooperation will almostcertainly improve outcomes for those everyone is trying to help?Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAnd thirdly, what sort of emergencies are we talking about? Naturaldisasters can range in sca<strong>le</strong> from very local, for examp<strong>le</strong> a localised flash flood,through to intercontinental, such as the Asian tsunami. Man made disasters caninclude industrial accidents, such as Bhopal or Chernobyl, as well as conflict andpost conflict situations in which there may or may not be a belligerent still active.Why is international military involvement almost taken as read in sudden naturaldisasters, such as a flood, but very uncommon in slow acting – but potentiallymore widespread – calamities such as famine or drought?I will examine each of these 3 e<strong>le</strong>ments in turn. I accept this approach is in itselfa somewhat artificial division of an organic who<strong>le</strong>, but will attempt subsequentlyto draw some broader conclusionsWhat do we mean by civil military?To begin to answer this question we need to identify who the actors are on thecivil-military stage. Arguably the most important actors, certainly at the strategic<strong>le</strong>vel, are the (usually civil) political <strong>le</strong>aderships of the counties which are in thegrip of the emergency or those who choose to provide assistance. At one extreme,governments can effectively prevent or severely limit aid being deliveredto their own citizens. The reaction of the Myanmar government after the Tsunamiis a case in point. As I write, Pakistan is refusing UK military help following its devastatingfloods because of a bilateral political spat. Or restrictions on aid can beused as a political weapon in a fight against a perceived enemy, as in Gaza. Governmentscan act alone or via regional or international agencies, such as the UNor the European Union, encouraging or blocking intervention. But the key pointis that governments establish many of the strategic boundaries around what canor cannot be achieved when responding to an emergency.It is also worth making the obvious comment that it is governments which decidewhether or not their military are to be involved in an emergency. The de-193


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainecision is not only whether such forces might deploy, but to what extent, underwhat ru<strong>le</strong>s of engagement (if applicab<strong>le</strong>), for how long and, crucially, whenthey will withdraw. In some countries there is also a decision to be made aboutthe extent to which other government departments might have to pay for militaryhelp, especially in short term natural disaster relief operations. There isof course no guarantee that NGOs will be consulted on any of this in the heatof the moment. Even if such governmental decisions are driven primarily bypurely humanitarian considerations, it would be naïve to imagine that politicsand economics are always entirely absent from the decision making process.Below the heads of government come the various ministries. In the case of theUK, this would normally include as a minimum the Treasury (HMT – the FinanceMinistry), the Department for International Development (DFID), the Foreign andCommonwealth Office (FCO) and the Ministry of Defence. To these must beadded the Home Office (Interior Ministry), especially if the deployment of policeor prison expertise is needed. In the next section, I shall look at how cooperationworks between these various ministries, but suffice to say here they eachhave their own distinct cultures, budgets and other resource constraints.We would also be wise to include the media amongst the civilian actors. Weused to talk about the CNN factor; the phenomenon by which a dispatch from a24 hour TV news reporter could be on the airwaves worldwide in real time, or veryshortly thereafter. But that landscape has now changed dramatically. Firstly, theCNN factor was initially an Anglophone phenomenon, but the arrival especiallyof Al Jazeera, means that instant news is no longer presented from a sing<strong>le</strong> culturalviewpoint. Secondly, portab<strong>le</strong> e<strong>le</strong>ctronic devices and so cal<strong>le</strong>d ʻcitizen journalismʼvia the internet have revolutionised how many in the world receive theirnews. There is a separate issue to be explored, outside the scope of this essay,about immediacy and impact versus accuracy, but suffice to say that the demandsfor constant news does not always allow time for facts to be checked andthat the worst of citizen journalism is litt<strong>le</strong> more than a veneer for prejudice. Ona more positive note, the internet in particular allows the needs of those sufferingto be kept in the public eye and for supporters to be kept engaged by seeinghow aid is being delivered and lives impacted positively.The final major group I want to include amongst the civilians is, of course,those who actually deliver the aid. ʻDelivering the Aidʼ can be taken to includeraising the funding, purchasing and logistics, as well as long term presence inaffected areas; it does not imply only the distribution of aid in the immediateaftermath. These bodies include very large multinational agencies, such asUNHCR, the EU, governmental bodies, such as DFID as well as organisationswhich are comp<strong>le</strong>tely independent of governments, such as the ICRCand Médecins Sans Frontières. Below this highly structured and organised<strong>le</strong>vel, there is a myriad of smal<strong>le</strong>r groupings with varying degrees of organisationalskill, experience, resources and impartiality. Some groupings can beextremely small, with nob<strong>le</strong> intentions, but whose lack of experience and culturalawareness can seriously minimise the value of their contributions.On the other side of this coin, we have ʻthe militaryʼ. Often conveniently amalgamatedinto an apparently homogenous sing<strong>le</strong> entity, the military communityis almost as diverse as the broad civilian one outlined above. Whilst all militarywill wear a uniform, there is no guarantee that they will all speak the samelanguage (even if from the same country), have received the same type of militaryeducation, interpret the words ʻimpartialityʼ and ʻconsentʼ in the sameway or have the same <strong>le</strong>vel of cultural sensitivity.So the list of civil and military actors is a rich and diverse one. There is no guaranteethat all civilians will agree with each other on operation and tactical194


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierspriorities, even if they can all agree that saving as many lives as possib<strong>le</strong> isthe correct immediate response to an emergency. An African Union militarycommander might not agree with a plan suggested by an EU advisory teamfor cultural or practical reasons, such as a straightforward lack of resources.There are also other actors who are not included here for reasons of space.These include high <strong>le</strong>vel quasi political appointees, such as UNSG special representatives,ce<strong>le</strong>brities who act on their own initiative or on behalf of otherorganisations, faith based organisations, multinational and national businessesthat may provide in theatre logistic, rebuilding or security support – albeitas a commercial undertaking.Identifying the main actors is a useful starting point. But the key question isthe extent to which they can cooperate with each other, what impedimentsexist and what can be done to remove them.Cooperation – Essential, desirab<strong>le</strong> or impossib<strong>le</strong>?Civil military cooperation as we understand it today has its roots in the aftermathof the Second World War, especially in Europe. There had been formsof civil military cooperation before, such as the conscripting of civilians to workin munitions factories or on farms during both world wars, and volunteernurses tending the wounded at the front. But such cooperation was often nottrue cooperation, because it was dictated by governments, and even if voluntarytended to be in support of oneʼs own forces.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARHowever, after the Second World War had devastated much of Europeʼs political,social and physical infrastructure, some means had to be devised toset the continent on its feet once again. During the war, the fundamental paradigmwas that governments directed, the military carried out the commandsand civilians did what they could to keep out of the way. When the war ended,cooperation between military and civilians was in practice often the only wayforward. There were large numbers of troops availab<strong>le</strong>, they were relativelyeasy to organise and direct and most civilians had no psychological barriersto cooperating with those who had liberated them. Furthermore, most men ofworking age had direct experience of serving in the military, so there was oftena understanding of and sympathy for the way the military worked. On another<strong>le</strong>vel, the military was often the only group that had the financial and logisticalclout to make things happen.In Western Europe, this paradigm did not change greatly as the Cold War tookhold. Europe faced an existential threat, so cooperation with military prioritieswas not generally questioned. Many government ministers had served in uniform,society was more deferential and European countries were more concernedwith rebuilding their own economies than with famines and floodselsewhere in the world. Governments pumped money into defence related industriesand there was relatively litt<strong>le</strong> dissent between military and civiliansfrom the idea that a strong country was a ʻgood thingʼ. Early NATO CIMIC doctrinewas drafted more on the basis of what civilians could do to help the military,rather than vice versa. Deployment of the military to assist in resolving aninternal natural disaster was not a subject of debate, although the modus operandiwas still that the military effectively took over the operation for a short periodbefore handing command back to the civilian emergency services.But times changed. Improved communications and increasing internationaltravel made the wealthier north more aware of what was happening in theoften impoverished south. A <strong>le</strong>ss deferential society was <strong>le</strong>ss willing to acceptthat governments were infallib<strong>le</strong> in questions of international aid. So the195


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineearly 1970s saw the creation of some powerful new NGOs, such as MédecinsSans Frontières and Actionaid, as well as the significant growth of existingcharities, such as OXFAM and Save The Children. Such NGOs were not,and did not feel themselves to be, either subservient to, or agencies of, nationalgovernments. Much <strong>le</strong>ss did they feel themselves subservient to themilitary. This did not prove to be a particularly serious prob<strong>le</strong>m, as western militariesremained much more focussed on the cold war threat and the 2 groups,NGOs and military, operated in essentially different spheres. Even UN peacekeepingmissions were largely benign and static affairs that did not involvethemselves greatly with local civilian populations or NGOs.However, the Balkans conflict in the 1990s began a period of sudden and profoundchange for the civil-military relationship. It was no longer axiomatic thatthe military were the only ones on the batt<strong>le</strong>field, (in fact it was not even axiomaticthat there was a batt<strong>le</strong>field as such) or that conflict could progress in anessentially circular way from tension through war and back to peace. Most significantly,the military found themselves part of the nation (re)building process,not just in the immediate aftermath, but for many years after conflict hadformally ended. But unlike the situation which existed after the second worldwar, the military no longer had the field essentially to themselves. New paradigmsof cooperation, or at the very <strong>le</strong>ast co-existence, had to be found withthe civilians in theatre who often had different objectives and vastly differentworking practices. This was not necessarily a marriage made in heaven.There are probably very few civilians or military who would disagree with theidea that effective cooperation is a force multiplier and can save lives andmoney. However, translating that general agreement into practical applicationscan prove very difficult. Why should this be? As I mentioned earlier,even defining what would be an acceptab<strong>le</strong> <strong>le</strong>vel of cooperation is not easy.Does it mean comp<strong>le</strong>te agreement on strategy and tactics? Does it imply awillingness to accept direct military help or protection, or merely the indirectbenefits of military protection? What about cost and equipment sharing? Howcan long term NGO developmental goals be made compatib<strong>le</strong> with often muchshorter term military priorities? Or does cooperation have to be reduced to thelowest common denominator of keeping out of each otherʼs way, with all thepotential inefficiencies implied?To begin to understand these difficulties we have to look at the organisationalstructures, the training and the objectives of the civil and military organisations.All militaries have a rigid hierarchical structure, an essentially non participatorysty<strong>le</strong> of decision making, often based on standard operating procedures, andare very task focussed. Great importance is based on training and on a predictab<strong>le</strong>and repeatab<strong>le</strong> response to orders. Military forces are trained to dominateand defeat a situation (or an enemy), whether by kinetic or non kineticmeans. Therefore, substantial numbers of military may arrive quickly at thestart of an emergency, but <strong>le</strong>ave when the initial natural or humanitarian crisisis ʻunder controlʼ Military forces exist because governments have enemies,real or potential, not because they have humanitarian programmes.Modern military service is predicated on mainly short term tours of duty(between 3 months and 1 year in general) in overseas theatres. The individualsoldiers, sailors and airmen are there because someone told them to be there,not necessarily because they want to be there, even if they are in an all volunteerforce. They may arrive with litt<strong>le</strong> cultural awareness and have time to acquirerelatively litt<strong>le</strong>. Even the most committed soldier looks forward to goinghome at the end of his tour of duty. All military interventions are by definition politicalin character, as deployments can be authorised only by governments.196


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersAlmost every one of these points is substantially different from the way NGOsoperate. NGO structures in operational theatres tend to be much flatter and<strong>le</strong>ss hierarchical, process focussed and with a more participatory sty<strong>le</strong> of decisionmaking. F<strong>le</strong>xibility and innovation are highly prized. NGOs base decisionson whether to provide help on humanitarian need alone, subject toadequate security for staff. Unlike the military, NGO staff cannot be compel<strong>le</strong>dto go into harmʼs way in order to comp<strong>le</strong>te a mission. Most NGOs are focussedon long term help and are often in country for many years. Even in thecase of a sudden disaster such as the Haiti earthquake, NGO immediate responseis often in the context of a much longer term pre-existing presence.NGOs build great cultural and linguistic awareness over time, not only by individualsremaining in theatre for extended periods, but also through the useof local staff. NGOs feel answerab<strong>le</strong> to clients and donors, not governmentsand their activities are often resolutely apolitical in character.It is hard to imagine 2 organisations with paradigms which are so different, butwhich yet often purport to have the same aim, and which are tested in potentiallyvery stressful and dangerous situations. Both military and civil practitionershave their own accounts of how difficult and unreasonab<strong>le</strong> the other side can be.It seems self evident that simply hoping that things will work out by relying onad hoc structures created between peop<strong>le</strong> who do not understand the eachotherʼs pressures and priorities is doomed not only to failure, but to repeated failure.Any work to improve mutual understanding and cooperation has to be undertakenat the strategic <strong>le</strong>vel as well as at the operational and tactical.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARI mentioned earlier that misunderstandings and bureaucratic barriers betweenministries even of the same government are both common and unhelpful. Thesame can be true at the multinational <strong>le</strong>vel too. Some examp<strong>le</strong>s from the earlyoperational days of the European Security and Defence Policy (ESDP) will illustratethe point. Although the European Union, primarily through the Commission,had substantial experience of handling foreign aid on behalf ofmember states, the EU as a who<strong>le</strong> had no experience of handling foreign policyor military issues as such until the creation of ESDP following the St Malosummit in 1999. A structure essentially model<strong>le</strong>d on that of NATO, with a flagofficer <strong>le</strong>vel military committee reporting to an ambassador <strong>le</strong>vel Political andSecurity Committee (PSC) was created.A fairly <strong>le</strong>ngthy period of drafting of military committee standard operatingprocedures and crisis management procedures followed. By and large, thePSC was happy to <strong>le</strong>t the military committee get on with this work, which appearedrather administrative in character. For its part the military committeewas quite content to be <strong>le</strong>ft alone to comp<strong>le</strong>te the task. But once ESDP beganto move from theory to practice by mounting its first military operations, the gulfbetween the diplomatic approach, exemplified by the PSC and that of themilitary became quickly apparent. Many difficult PSC discussions on widerforeign policy issues were often postponed to allow de<strong>le</strong>gations to seek furtherguidance from capitals. Often a technique known as ʻconstructive ambiguityʼwas employed, which was essentially a device to allow both sides of a negotiatingdivide to claim that the decision had gone in their favour. There isnothing intrinsically wrong with either technique as a way to make often difficultmultinational diplomacy work.However, the new work to plan military operations did disturb this status quo.The military committee and especially the operation commander did not at allfavour the idea of constructive ambiguity. There was an insistence on clarityat the strategic concept <strong>le</strong>vel, so that orders could be written which were mea-197


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineningful to junior commanders and to troops on the ground. For examp<strong>le</strong>, washot pursuit of groups who opened fire on EU forces permitted? For a diplomat,ʻin some circumstancesʼ might be a good answer, but a section commanderin theatre needs to know ʻyesʼ or ʻnoʼ. It also quickly became c<strong>le</strong>ar thatdeployed EU military forces were not allowed access to EU commission fundingfor infrastructure or other projects, because Commission funding explicitlycould not be used for military purposes. There was an initial reluctance to understandthe importance of command exercises for the military. And the EUCouncil Secretariatʼs suggestion that it should close for a monthʼs summerholidays during the first ESDP military mission also raised military eyebrows.These prob<strong>le</strong>ms were all worked through in time and ESDP has achievedmore than many thought possib<strong>le</strong> in a few short years. But these recol<strong>le</strong>ctionsare worth retelling simply to show that misunderstandings between civiliansand military are not confined so<strong>le</strong>ly to the operational and tactical <strong>le</strong>vels.So What is a Crisis?The term ʻcomp<strong>le</strong>x emergencyʼ has gained widespread currency. ʻComp<strong>le</strong>xʼ isa potentially mis<strong>le</strong>ading term, as all emergencies are to some extent comp<strong>le</strong>x, asthey have overwhelmed, even if only temporarily, the ability of the local authoritiesto cope. Just as the idea of a ʻsmallʼ war is meaning<strong>le</strong>ss to those affectedby it, the concept of a ʻsimp<strong>le</strong>ʼ emergency would be strange to those whose townhas been devastated by, for examp<strong>le</strong>, a flood or an earthquake. What is true isthat some emergencies are unquestionably more comp<strong>le</strong>x than others.Some disasters caused by natural phenomenon are made extremely comp<strong>le</strong>xby their very sca<strong>le</strong>, Haiti, the Asian tsunami and the Pakistan floods would bethree relatively recent examp<strong>le</strong>s. But with the obvious exception of such extremelylarge crises, it tends to be peop<strong>le</strong> and politics that complicate emergencies,rather than natural phenomena.Arguably the first of these modern ʻcomp<strong>le</strong>xʼ emergencies was the succession ofconflicts in the Balkans in the 1990s. The comp<strong>le</strong>xity derived from the explosionof intercommunal hatred triggered when the former Yugoslavia fragmented intoethnocentric entities following the fall of Soviet communism. However, the ethnichatreds re<strong>le</strong>ased by the fall of communism was only the first – albeit the mostvio<strong>le</strong>nt and intractab<strong>le</strong> – layer of comp<strong>le</strong>xity. As the conflict exploded on Europeʼsdoorstep, the international community proved itself, at various times, unwilling,uncomprehending, uncoordinated and even at times incapab<strong>le</strong> of puttinga halt to what we now know as ethnic c<strong>le</strong>ansing. International organisations suchas the UN simply could not keep up with the pace of events on the ground andwere often stal<strong>le</strong>d by either veto or simply lack of consensus. Inadequate mandateswere given to insufficient military forces who did not initially possess thedoctrine or training to deal with peacemaking in a non batt<strong>le</strong>field context.Whilst many <strong>le</strong>ssons were <strong>le</strong>arned from this conflict, especially at the operationaland tactical <strong>le</strong>vel, subsequent experience in post war Iraq and Afghanistansuggests that political decision making still takes too litt<strong>le</strong> account of thecomp<strong>le</strong>xity of post conflict stabilisation and the reconstruction of peaceful civilsociety.We can therefore conclude that a comp<strong>le</strong>x emergency probably contains deepseated conflict at its heart, the engagement of competing national or regional powerinterests, concurrent military and civil engagement on the ground, a great deal ofpropaganda in addition to mainstream media reporting. There re no grounds to believethat emergencies of this nature will become <strong>le</strong>ss comp<strong>le</strong>x in the future.198


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersThe Future‘Prediction is very difficult, especially about the future’.This quotation comes not from a comedian, but from the Danish Nobel prizephysicist Niels Bohr, and serves to remind us that if we make plans or predictionsthat are too dogmatic or inf<strong>le</strong>xib<strong>le</strong>, we will probably paint ourselves intoa difficult corner. But equally, we cannot absolve ourselves from working intelligentlyto correct the errors of the past and present.The end of the Cold War effectively created the need for new peacekeeping/peacemakingdoctrines in an environment which threw military, politicians,diplomats, NGOs and others into the same turbu<strong>le</strong>nt environment. Aswe have seen, these new relationships are still to a large extent being formed,with varying degrees of success. Some of the reasons for this difficulty areeasy to understand. Although we talk glibly about ʻthe militaryʼ, ʻpoliticiansʼ orʻNGOsʼ, these terms are really no more than shorthand for a huge variety ofdifferent tendencies within each group. As an examp<strong>le</strong>, a UK Royal Marinemay have much more in common in terms of cultural background with a UKNGO worker than with, say, with a Bangladeshi infantryman.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARHowever, the fundamental difficulty is not hard to identify. No-one is ab<strong>le</strong> toforecast the nature, sca<strong>le</strong>, location or time of the next crisis in response towhich civilian and military agencies will have to work together. Therefore, notonly is it impossib<strong>le</strong> to formulate hard and fast response plans, it is also equallydifficult to know which countriesʼ military and which civilian agencies will be involved.This would therefore seem to condemn all those who are sent to participatein the resolution of the crisis to a never ending cyc<strong>le</strong> ofmisunderstanding, mismatched systems and processes and competition,when cooperation should be the norm.It would c<strong>le</strong>arly be impossib<strong>le</strong> to attempt to resolve this prob<strong>le</strong>m at an individual<strong>le</strong>vel; there are just too many peop<strong>le</strong> from too many different organisations,further complicated by the fact that individuals often change posts withinor between organisations. If the barriers of misunderstanding are to be brokendown, the effort realistically has to come at the institutional <strong>le</strong>vel, at <strong>le</strong>astbetween those institutions which are most likely to be involved most frequentlyat in greatest numbers. The aim cannot be to turn, for examp<strong>le</strong>, the Pentagoninto an aid agency or the European Commission into a military force, but therehas to be sufficient understanding hard wired into these, and other, organisations,to avoid wasteful duplication and inefficiency. Throwing individuals togetherafter a crisis has begun will not resolve the prob<strong>le</strong>m, even if theseindividuals are experts in their own fields – indeed deep expertise in one areaoften comes at the expense of a broader view.Fortunately, the prob<strong>le</strong>m has been recognised and a number of organisations– even governments – are working on it. NATO has formed a Civil/Militarycoordination centre of excel<strong>le</strong>nce, the UK Foreign Office began running multinationaltab<strong>le</strong> top military/civil exercises over 15 years ago, the Royal UnitedServices Institute (RUSI) in London has a project known as CUSPS, ThePeace Operations Training Institute recognised by, but independent of theUN, has offered peacekeeping training courses since 1995. There also manyacademic papers on the subject. In the UK, a cross-government Post ConflictReconstruction Unit (now renamed the Stabilisation Unit) was created andIraq and Afghanistan acce<strong>le</strong>rated thinking on the Comprehensive Approachdoctrine. Here in West Africa there are a number of peacekeeping trainingfacilities, notably at the Kofi Annan centre in Ghana.199


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineAll these initiatives recognise that for crisis operations involving civilians andmilitary to work successfully, the work of building mutual understanding andcomp<strong>le</strong>mentarity has to be undertaken before the crisis happens, not after.Key peop<strong>le</strong> have to meet regularly to identify and imp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>ssons <strong>le</strong>arned,undertake tab<strong>le</strong> top exercises, identify key points of difference and commonality.The cost of undertaking this work would be minimal compared with themuch greater cost of making the same mistakes again and again. And whenI speak of costs, I am not only talking about financial costs, but also of theprice paid by those who are victims of the crisis. The continuing price of inefficiencyis paid by victims with their health, their future livelihoods and eventheir lives.I began by saying that I was writing this essay from my own perspective, thatof a Western European. Whilst I make no apology for that, I would like to<strong>le</strong>ave you with a final thought about perspectives, or points of view. Sometimesit is difficult for us to imagine that there are different points of view to ourown, or how radically different they can be. But we forget this e<strong>le</strong>mentarypoint at our peril. To most, the United Nations is a neutral supra governmentalorganisation, which does not act at the behest of any sing<strong>le</strong> government ordance to any sing<strong>le</strong> political tune. But that was not how the Iraqi insurgentssaw the UN when then b<strong>le</strong>w up its HQ in Baghdad in 2003. To them, the UNwas a Western stooge which had backed the invasion of their country. Tenwestern aid workers were murdered in Northern Afghanistan in early Augustof 2010. To their employers, families and friends they were non-political aidworkers who were devoting themselves to helping ordinary Afghans. To thosewho kil<strong>le</strong>d them they were Christian proselytisers and American spies. EvenWestern cultural stap<strong>le</strong>s such as democracy, education for all and free speechare far from universally accepted norms.Whether we be military or civilian, we neg<strong>le</strong>ct the ʻother perspectiveʼ at ourperil.John THOMASHe was responsib<strong>le</strong> for the UK Air Forceʼsinternational relations policy and planningassumptions, before moving to Brusselswhere he served successive tours atNATO HQ and with the UK mission to theEuropean Union. His final posting was asUK Defence and Air Attaché at the BritishEmbassy in Paris.200


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersATELIERS SUR LES RELATIONS DES FDS AVEC LA NATIONAtelier 3 : Place de la communication et des médiasdans la consolidation du lien FDS-Nation3.7 Intervention du Général de Brigade Benoît ROYAL, Direction desRessources Humaines Armée de Terre, FranceUn enjeu majeur <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s forces armées : <strong>le</strong>ur légitimitéRésumé : Brigadier General Benoit ROYAL, Director Human Resources of thefrench army, intervened on „The <strong>le</strong>gitimacy of the armed forces“. This <strong>le</strong>gitimacyposes on two key factors: the image of the armed forces inside the nation and thebacking of the military missions by the population. Communication and mediaplay an important ro<strong>le</strong> in all fields of activity that are related to these factors. Thequality of the link between army and nation mainly depends on them.The following part of the intervention treats the ro<strong>le</strong> of media regarding the armedforces, and especially during armed conflicts. One important chapter is dedicatedto the risk and the forms of manipulation and/or disinformation through themedia. General ROYAL states that military missions are won with the public opinion.Therefore it is essential to know how to behave in that existing chal<strong>le</strong>nge ofcommunication. Survey results underline that the support for military missionsgrows when the emotions and perceptions of the peop<strong>le</strong> are touched, when freedomis in danger, when human dignity is threatened. But on the other hand onecan observe that the support of the population for missions abroad has diminishedsignificantly, also depending on the distance of a regional conflict, regard<strong>le</strong>ssof the military intensity. General ROYAL closes his intervention with thestatement that communication has to be realised with the democratic imperatives.Therefore it is important to have cultivate a transparent information policy,the behaviour of the troops has to be control<strong>le</strong>d strictly and misbehaviour needsto be strictly sanctioned.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARI - INTRODUCTION : la légitimité repose sur deux facteurs clésLʼimage renvoyée dans la NationCette image dépend majoritairement de trois éléments :– Le poids de lʼhistoire nationa<strong>le</strong> ;– Le comportement général des armées au sein de la cité ;– Les va<strong>le</strong>urs défendues par <strong>le</strong>s armées (<strong>le</strong>s citoyens doivent y reconnaître<strong>le</strong>urs propres va<strong>le</strong>urs).Lʼadhésion des citoyens aux actions militaires (extérieures et/ou intérieuresEl<strong>le</strong> fluctuera en fonction :- Du rô<strong>le</strong> des armées sur lʼaide aux populations sur <strong>le</strong> territoire national:sécurité des citoyens, aide en cas de catastrophes naturel<strong>le</strong>s,- De la légitimité de <strong>le</strong>urs missions internationa<strong>le</strong>s : résolution ONU,intervention humanitaire, etc.- De <strong>le</strong>urs pertes humaines et de la capacité de résilience du pays.Dans tous ces domaines, <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de la communicationet des médias est essentiel. De celui-ci dépendra en grande partie,la qualité du lien armées-nation.201


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineII - LE ROLE DES MEDIAS- L’impact du « fait médiatique »Aujourdʼhui, lʼimpact du rô<strong>le</strong> des médias nʼest pas uniquement national, il fauttoujours considérer quʼil peut déborder <strong>le</strong>s frontières et devenir international.Leur rô<strong>le</strong> est central dans ce quʼon peut appe<strong>le</strong>r la mondialisation de la vérité.- Les conflits ne se dérou<strong>le</strong>nt plus uniquement dans <strong>le</strong> champ militaire,mais aussi médiatiques, économiques, …)- Le citoyen du monde veut savoir, se forger sa propre opinion, et il lʼaconstruira sur des images et des informationsCette considération influe nécessairement sur la consolidation du lienentre <strong>le</strong>s forces et la Nations, compte tenu du fait que ce lien sera influencé,en bien ou en mal, par tout ce qui sera relayé dans <strong>le</strong> champmédiatique. Lʼimpact en sera démultiplié par la résonnance inévitab<strong>le</strong>que <strong>le</strong>s faits <strong>pour</strong>ront prendre hors des frontières nationa<strong>le</strong>s.Rappels historiquesLe rô<strong>le</strong> des médias dans <strong>le</strong> champ militaire nʼest pas vraiment nouveau.Les Américains estiment que la guerre du Vietnam a été perdueen grande partie parce quʼils ont laissé <strong>le</strong>s journalistes tota<strong>le</strong>ment libresdʼal<strong>le</strong>r sur <strong>le</strong>s lignes de combat et dʼen rapporter ce quʼils voulaient,tout particulièrement des images de morts. Le coup de grâceaurait été donné par la célèbre offensive du Têt (janvier 1968).Militairement gagnée, cette batail<strong>le</strong> sʼest soldée par une défaite médiatiqueaméricaine et par la perte dʼadhésion de la nation à ce conflit.Ce rejet du conflit sʼest aussi accompagné du rejet de ses acteurs, <strong>le</strong>sforces armées américaines.Rappel de deux phénomènes majeurs impactant la communicationLe caporal stratégique : notion développée par <strong>le</strong> Général Krulak commandant<strong>le</strong> corps des « Marines » US en 1999 (the stratégic corporal:<strong>le</strong>adership in the three block war). Aujourdʼhui, bien plus quʼhier, lapremière des bavures sera immédiatement renvoyée au cœur desfoyers français, au cours du journal de 20 H, susceptib<strong>le</strong> de mettre enjeu la stratégie même des actions conduites.Le soldat médiatiqueLes moyens individuels transforment chaque militaire en soldat médiatique,«acteur-témoin» des opérations militaires, source dʼinformationstout azimut. Ce soldat médiatique peut émettre de sa propreinitiative, par envie de partager son expérience vécue et sʼen trouverainsi valorisé. Il peut ainsi être directement sollicité par <strong>le</strong>s médias quilui accordent souvent un haut niveau de crédibilité compte tenu de saposition hors de la chaîne officiel<strong>le</strong> de communication. Il faut savoir sʼenprotéger en opération.- Le risque de manipulation et/ou de désinformation De la part des adversaires : qui utilise la liberté de la presse occidenta<strong>le</strong>,qui joue avec « la marchandisation de lʼinformation » avecdes médias qui se laissent volontairement instrumentalisées au nomde la liberté de lʼinformation.– Exemp<strong>le</strong> 1 : <strong>le</strong> reportage de Paris match après lʼembuscade dʼUsbeenen Afghanistan.202


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers– Exemp<strong>le</strong> 2 : la stratégie des UED. Ce sont <strong>le</strong>s cœurs des opinionspubliques qui sont visées (au sens propre). Ils misent sur la fragilitédu moral, sur lʼaffaiblissement de la capacité de résilience, sur lʼimpactque la mort peut avoir dans lʼinconscient des occidentaux.Chaque mort de plus éloigne <strong>le</strong>s opinions du soutien quʼel<strong>le</strong> apporteaux interventions. De la part nos propres médias : au nom de lʼindépendance de lapresse.III - LES ENJEUX DE LA COMMUNICATIONLa mission se gagne avec l'opinion publique : ce que Carl Von Clausewitzappelait <strong>le</strong> « centre de gravité » de la guerre est passé de la force des armes,au cœur et à lʼesprit des citoyens.– Bien comprendre <strong>le</strong>s ressorts de l’opinion publique Premier constat : la solidarité et <strong>le</strong> consensus dʼantan ont tendance àsʼétio<strong>le</strong>r.La notion de loyauté a traversé une évolution fondamenta<strong>le</strong> : traditionnel<strong>le</strong>ment,une personne était supposée fidè<strong>le</strong> à sa communauténationa<strong>le</strong> dʼorigine. Un Espagnol ou un Suédois était fidè<strong>le</strong> à sonouverain, un Français à sa République, un Américain à sa Constitution.Ce sentiment est maintenant périmé, remplacé par une loyautéenvers une autre communauté : politique, religieuse, ethnique,régiona<strong>le</strong>. Les liens géographiques nationaux sont beaucoup moinsimportants quʼautrefois.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARSelon certains sociologues, lʼeffacement du patriotisme nʼest guèreremplacé par un attachement à une identité supranationa<strong>le</strong> (européenne/africaine) mais par une doub<strong>le</strong> appartenance envers <strong>le</strong> loca<strong>le</strong>t lʼuniversel. En simplifiant, <strong>le</strong> jeune citoyen sʼidentifie à son village, sarégion et comme citoyen du monde. Il combine ainsi <strong>le</strong> local etlʼuniversel. Deuxième constat : lʼévolution du type de conflits armés.La guerre à outrance visant à vaincre des forces ennemies conventionnel<strong>le</strong>sa pratiquement disparue, cédant la place à un défi plus indirectconstitué dʼopérations de guérilla, dʼinsurrections, dʼIntifadas et deterrorisme. Ce nouveau schéma sʼest appliqué aux Français en Algérie,aux Américains au Vietnam et aux Soviétiques en Afghanistan. Il estmaintenant en place <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Israéliens opposés aux Pa<strong>le</strong>stiniens, <strong>pour</strong><strong>le</strong>s forces de la coalition en Irak et dans <strong>le</strong> cadre de la guerre contre <strong>le</strong>terrorisme. Troisième constat : ce qui réunit <strong>le</strong>s citoyens, ce sont dʼabord <strong>le</strong>urssentiments/perceptions.Or ce qui fait réagir <strong>le</strong>s citoyens occidentaux aujourdʼhui touche auxatteintes à la liberté, aux atteintes à la dignité, à <strong>le</strong>urs perceptions dela justice, du droit, etc. En bref : à lʼémotion.Par exemp<strong>le</strong>, depuis 15 ans, <strong>le</strong>s français ont très majoritairement soutenula légitimité de lʼemploi de la force armée, y compris hors des frontières nationa<strong>le</strong>s.Les motifs <strong>le</strong>s plus légitimes sont :203


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine– apporter des secours à la population française : 97% (chiffres 2007);– assurer des missions de sécurité intérieure : 92% ;– apporter une aide humanitaire : 91% ;– préserver la vie des ressortissants français : 91%,– détruire un foyer du terrorisme : 86%.Une autre évolution est plus préoccupante : la légitimité des interventionsextérieures baisse régulièrement. Dans la hiérarchie, nous avonsen tête <strong>le</strong> Kosovo (+Bosnie), puis lʼAfrique (Côte dʼIvoire), à égalité avec<strong>le</strong> Liban puis seu<strong>le</strong>ment lʼAfghanistan. Plus la distance augmente etmoins <strong>le</strong> soutien est fort…. Alors que plus lʼintensité militaire est é<strong>le</strong>vée. La nécessité de « Convaincre <strong>pour</strong> vaincre »Aujourd'hui plus qu'hier, une force militaire qui ne bénéficie pas du soutiende son opinion publique perd sa légitimité. Or obtenir l'adhésiondes populations consiste notamment à <strong>le</strong>ur renvoyer l'image d'uneforce exempte de tout reproche. Le comportement des troupes, lʼimagerenvoyée finit par se substituer aux légitimes raisons de <strong>le</strong>ur déploiement,que ce soit sur <strong>le</strong> territoire national ou à lʼextérieur.Or, où qu'el<strong>le</strong>s se produisent, <strong>le</strong>s dérogations au droit et à la dignitéseront immédiatement relayées par <strong>le</strong>s médias planétaires et influerontdirectement sur <strong>le</strong>s opinions publiques qui ne resteront ni insensib<strong>le</strong>s,ni inactives. Forts de <strong>le</strong>ur légitimité, <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>s exprimeront <strong>le</strong>urdésapprobation dans la rue, dans <strong>le</strong>s médias et, quand ils <strong>le</strong> <strong>pour</strong>rontdans <strong>le</strong>s urnes.Dans une opération extérieure, <strong>le</strong>s populations qui en subissent directement<strong>le</strong>s conséquences, exprimeront <strong>le</strong>ur révolte par un soutien àl'adversaire, aggravant la situation contre laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s forces militairesdéployées cherchent précisément à lutter.Le comportement des troupes au combat, l’éthique des unités déployéessont bien au cœur de la stratégie <strong>pour</strong> convaincre… et vaincre.204


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersIV - CONCLUSION : <strong>le</strong>s obligations des armées• Communiquer <strong>pour</strong> donner du sens et favoriser la compréhensionde la missionLa communication doit sʼexercer dans deux directions essentiel<strong>le</strong>s :– en interne, el<strong>le</strong> répond à lʼindispensab<strong>le</strong> échange qui doit sʼinstaurerentre <strong>le</strong> chef et ses subordonnés et qui contribue à la parfaitecompréhension de lʼesprit de la mission et des ordres reçus.– vers l’extérieur (médias et opinion publique) afin dʼexpliquer en permanencela finalité des décisions prises et des actions conduites.Cette obligation sʼaffirme dʼautant plus en opérations (extérieurescomme intérieures) que <strong>le</strong>s troupes déployées peuvent se considéreren situation de crise permanente, avec des niveaux dʼintensitévariab<strong>le</strong>, et quʼun contexte multinational peut brouil<strong>le</strong>r la perceptionde notre participation.La communication sur ces sujets vise à maîtriser ses propres informations etsi possib<strong>le</strong> <strong>le</strong>urs effets médiatiques.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR• Communiquer par devoir d’information du public : afin de répondreaux attentes de lʼopinion publique nationa<strong>le</strong>, internationa<strong>le</strong> et desmédias.Comme dʼautres pays, la France a fait de lʼaccès à lʼinformation unepriorité démocratique et <strong>le</strong>s armées ont un devoir de communicationvis-à-vis de la communauté nationa<strong>le</strong> dont el<strong>le</strong>s sont lʼémanation etdont el<strong>le</strong>s doivent porter <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs. Lʼinformation du public est dʼautantplus nécessaire que son adhésion est indispensab<strong>le</strong> et que sonopinion est un gage de la légitimité de lʼaction.Ce devoir sʼétend à la communauté internationa<strong>le</strong>, en raison de sonpoids politique dans un environnement caractérisé par la globalisationde lʼinformation.• Communiquer avec des impératifs démocratiques :– De la transparence dans <strong>le</strong>urs informations (équilibre permettantde préserver <strong>le</strong> secret des Operations tout en expliquant encore ettoujours plus) : ouverture vers <strong>le</strong>s médias, dédier des ressources humainesà la communication et lʼinformation, effort de pédagogie permanente.– D’exemplarité dans <strong>le</strong> comportement et de sanction dans <strong>le</strong>s«dérapages » (formation des troupes, éducation, règ<strong>le</strong>s dʼengagement,harmonie internationa<strong>le</strong>) ;– De collaboration de plus en plus étroite avec <strong>le</strong> niveau politique<strong>pour</strong> : Identifier lʼeffet final recherché dans lʼaction militaire ; Accorder lʼéthique militaire et lʼéthique politique.Benoît ROYALest général de brigade dans lʼArmée deTerre française, actuel sous-directeur durecrutement à la Direction des RessourcesHumaines de lʼArmée de Terre. Auparavantil a été chef du Service d'informationset de relations publiques de lʼarmée deTerre (SIRPA-T) pendant trois années.Il appartient aux Troupes de marine, spécialitéartil<strong>le</strong>rie, alternant des séjours outremer(Tahiti, La Réunion, Côte dʼIvoire) eten Métropo<strong>le</strong> (commandant dʼun bataillondʼélèves à lʼEco<strong>le</strong> nationa<strong>le</strong> des sous-officiersde Saint-Maixent). Il a éga<strong>le</strong>mentservi en Europe : Trèves (RFA), Pristina (àlʼétat major de la KFOR, chargé des relationsavec lʼarmée serbe),Mitrovica(commandant du bataillon français de labrigade multinationa<strong>le</strong>nord-est).De 2002 à 2004, il fut <strong>le</strong> rédacteur attitrédes discours du Chef dʼétat Major delʼarmée de Terre, <strong>le</strong> général Thorette. Il estauteur d'un livre sur « l'Éthique du soldatfrançais » édité en 2011.205


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.8 Intervention Lieutenant-colonel Gatta BA, Specialiste en communication,Ministère des Forces Armées, SénégalQUELLE PLACE À LA COMMUNICATIONQUEL RÔLE AUX MÉDIASRésumé : Lieutenant Colonel Gatta BA poses the question „What place for thecommunication – what ro<strong>le</strong> for the media?“. In the first part of his intervention, hementions the fact that after the end of the bipolar political system and the beginningglobalisation, the classical link between defence and nation has been depreciated.He also states that the formerly c<strong>le</strong>arly formulated and representednational positions are being weakened by many different regional political movements,like the so-cal<strong>le</strong>d 'red shirts' or the 'orange revultion“. In history, whi<strong>le</strong>most of the countries were reigned with absolute power, the deciders who wentto war did not have to pay attention to any public opinion, so in these autocraticand totalitarian systems, the nations had an unassaib<strong>le</strong> opinion. This was still truefor the First World War, when the press had to follow the standards set by the governmentsin order to prevent to inform about the critical changes of the publicopinion during the second half of the war. In the second part, Lieutenant ColonelBA analyses the reevaluation of the binomial defence communication – media.He states that the basic difficulty of the media is to fulfill their mission, that is tosay to inform, to explain and to educate the opinion, but also to make profit or at<strong>le</strong>ast to see information as a kind of product that needs to be sold, and that thereforeit needs to be adapted to the opinions and interests of the reader or spectator.Then he explains the impact that media has got in the field of security anddefence. At the end of his intervention, Lieutenant Colonel BA describes the chal<strong>le</strong>ngeof a synergetic defence communication.INTRODUCTIONSi cʼest bien Jean-Jacques Rousseau qui a originel<strong>le</strong>ment consacré la notiondʼopinion, portée plus tard dans <strong>le</strong> sillage de la gestation des sociétés démocratiquespar la montée en puissance des médias ; cʼest en revanchedans <strong>le</strong> cadre typique de lʼémergence de lʼidéologie nationa<strong>le</strong> en Europe aveclʼavènement de la <strong>le</strong>vée en masse quʼil faut voir lʼébauche de la premièreconception du lien unissant <strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécurité à la Nationcomme une réalité organique.Néanmoins, il faut sʼaccorder quʼaprès une tumultueuse évolution historiquequi a culminé par la fin récente des dernières entreprises impéria<strong>le</strong>s, prolongementsanachroniques des idéologies messianiques du XIX ème sièc<strong>le</strong>, etlʼinstauration consécutive dʼun environnement plus proche de la « Paix par laLoi » prophétisée par Raymond Aron, ce sont ces fondements mêmes desdoctrines classiques de Défense nationa<strong>le</strong> qui sont dorénavant soumises àrude épreuve.La DIRPA rencontre la PresseEn effet, sous la doub<strong>le</strong> contrainte dʼun droit international hégémonique etdʼune menace à présent diffuse et protéiforme parce quʼaussi à dimensionéconomique, socia<strong>le</strong> et politique dont lʼaspect fédérateur et global renvoiedʼail<strong>le</strong>urs au vocab<strong>le</strong> Forces de Défense et de Sécurité utilisé ici; il semb<strong>le</strong>raitdésormais plus que jamais impérieux de restaurer la capacité dʼactioncol<strong>le</strong>ctive dépendante de la vigueur de ce lien qui serait aussi vital que <strong>le</strong>milieu et <strong>le</strong>s ressources parmi <strong>le</strong>s invariants de la puissance dʼune Nation.206


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersDans ce contexte particulier, soupeser la force de ce lien et la va<strong>le</strong>ur de sessupports comme nous y sommes conviés aujourdʼhui et qui jadis aurait semblédʼune étrangeté absolue tant il ne pouvait faire lʼobjet dʼaucun doute que<strong>le</strong> sort de la Nation tenait toute entière dans <strong>le</strong> succès de ses armes commelʼa illustré lʼépisode de Valmy <strong>pour</strong> la France révolutionnaire ; induit àreconsidérer prioritairement <strong>le</strong> contenu nouveau de cette dia<strong>le</strong>ctique dans unsens où , respectivement, la communication ressortirait de la stratégie relationnel<strong>le</strong>des Forces de Défense et de Sécurité, <strong>le</strong>s médias symboliseraientgénériquement <strong>le</strong>s vecteurs libres dʼinformation et enfin lʼopinion, <strong>le</strong> parangonemblématique de la nation moderne.De ce point de vue, en tenant compte des limites objectives liées à la prégnancedu contexte démocratique, il nous apparaît que mode<strong>le</strong>r positivement la perceptionpar lʼOpinion des Forces de Défense et de Sécurité, quand la réversibilitédes Médias a souvent été éprouvée dans la pratique face aux enjeux desouveraineté, doit conférer de fait à la Communication de Défense une place depremier ordre dans <strong>le</strong> raffermissement de <strong>le</strong>urs liens organiques.Une tel<strong>le</strong> orientation se justifie par la nouvel<strong>le</strong> mouture des rapports entre<strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécurité et la Nation qui subissent une altérationréciproque de <strong>le</strong>ur identité dʼune part, et de lʼautre par son corollaire lalégitime réévaluation du cadre systémique dʼinteraction du binôme Communication-Médias.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARI - LA NOUVELLE RÉALITÉ DES RAPPORTS ENTRE FORCESDE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ ET LA NATIONLongtemps tenues <strong>pour</strong> consubstantiel<strong>le</strong>s, la Défense et la Nation ont subiune dépréciation de <strong>le</strong>ur lien organique du fait des mutations intervenues dans<strong>le</strong> cadre général de la globalisation et accélérées par la fin de la bipolarisationidéologique de la scène internationa<strong>le</strong>.Ainsi, alors que sous <strong>le</strong> coup du décloisonnement des entités nationa<strong>le</strong>s et delʼavènement de lʼinformation transnationa<strong>le</strong> lʼopinion perdait définitivement soncaractère univoque, <strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécurité el<strong>le</strong>s-mêmes sʼintégraientdans une mouvance atténuant progressivement <strong>le</strong> caractère régaliende <strong>le</strong>ur cœur de métier.A - Une Opinion désormais ubiquitaireLe processus de « dé sanctuarisation » des opinions nationa<strong>le</strong>s universel<strong>le</strong>mentobservé, comparab<strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>ment au phénomène de lʼinternalisation desnormes internationa<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> domaine juridique fonde <strong>le</strong> caractère désormaisubiquitaire de lʼopinion. Lʼactualité lʼillustre régulièrement avec notamment larécente épopée des « chemises rouges » ou encore de la « révolution orange» survenues dans des nations jadis fermées au reste du monde et dont <strong>le</strong>s régimesavaient continué à mésestimer la portée dʼune tel<strong>le</strong> mutation.Cʼest quʼavant de revêtir son caractère ubiquitaire actuel, lʼopinion parangonmoderne de la nation, marquée génétiquement par <strong>le</strong> formidab<strong>le</strong> développementdes médias de masse a semblé se cristalliser définitivement dans <strong>le</strong> creusetnational au point que celui-ci avait fini par en incarner lʼhorizon indépassab<strong>le</strong>.1 - L’opinion sanctuariséeCertes, <strong>le</strong> sentiment dʼappartenance sous <strong>le</strong>s régimes antérieurs à la formulationidéologique de la nation et à lʼexistence réel<strong>le</strong> dʼune opinion a souventété instrumentalisé <strong>pour</strong> donner corps et consistance à la cohésion socia<strong>le</strong>207


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine105La guerre et la censure inséparab<strong>le</strong>s ? Manuel decommunication. Friedrich Ebert Stiftung. 1992106Michel <strong>le</strong> Net. communication publique_ Pratiquedes campagnes dʼinformation. Les études de laDocumentation française. N°4977. 1993-12.107« En 1890, Le Petit Parisien se targue dʼêtre <strong>le</strong>premier quotidien européen à dépasser <strong>le</strong> tiragedʼun million dʼexemplaires » Armand Matellart. Lacommunication-monde. Histoire des idées et desstratégies.P 25. Editions La Découverte/textes àlʼappui.1992.108Gustave Le Bon, Enseignements psychologiquesde la guerre européenne, Ernest Flammarion.Editeur, Paris 1916, p.320.109Armand Matellart. La communication-monde.Histoire des idées et des stratégies. P 73. EditionsLa Découverte/textes à lʼappui.1992110Daniel Bougnoux .la communication contrelʼinformation. P. 49. Etudes. Paris. 1992.111Michael Kunczik. La guerre et la censure inséparab<strong>le</strong>s? Manuel de communication.pp 24.Friedrich Ebert Stiftung. 1992ou aux entreprises impéria<strong>le</strong>s de toute sorte. Mais même dans ce cas dʼespèce,son poids était si inexistant dans la prise de décision et la gestion desévènements que lʼon a pu qualifier ces conflits de « guerres de cabinet ».Ainsi selon Michael Kunczik « jusquʼà lʼépoque napoléonienne la guerre fut unaspect de la diplomatie secrète (…) <strong>le</strong>s guerres étaient déc<strong>le</strong>nchées par desdirigeants qui nʼavaient guère à se soucier de lʼopinion publique, <strong>le</strong> peup<strong>le</strong>était généra<strong>le</strong>ment laissé dans lʼignorance et nʼétait certainement pas délibérémentinformé » 105 .Cʼest en effet à partir de Napoléon assumant que « la force est fondée surlʼopinion. Le gouvernement nʼest rien sʼil nʼa pas lʼopinion » 106 dans <strong>le</strong> contextepostrévolutionnaire français que son incorporation durab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> modè<strong>le</strong>hégémonique de lʼEtat-Nation en devenir sera réalisé.A lʼentame du XX ème sièc<strong>le</strong>, en 1898, cel<strong>le</strong>-ci donnera la mesure de sa capacitéde pression en pesant sur lʼissue de deux grandes crises internationa<strong>le</strong>sau courant de la même année: cel<strong>le</strong> de Fachoda confrontant <strong>le</strong>s ambitionscolonia<strong>le</strong>s britanniques et françaises et plus spectaculairement en provoquantlʼinvasion américaine de Cuba. Dans <strong>le</strong> même temps el<strong>le</strong> maintenait la Francedivisée par lʼaffaire Dreyfus.Ce cadre qui cloisonnera lʼopinion dans sa dimension nationa<strong>le</strong> sera renforcépar <strong>le</strong>s conflits suivants et surtout durant la « seconde guerre de Trente ans(1914-1945) » qui contribuera à lʼaffinement des stratégies de contrô<strong>le</strong> delʼopinion par <strong>le</strong>s gouvernements de lʼépoque face à des médias en p<strong>le</strong>ine expansionmais encore exclusivement nationaux dans <strong>le</strong>ur portée 107 .Aussi en 1916, Gustave Lebon pouvait jauger <strong>le</strong> bien –fondé de la mainmisegouvernementa<strong>le</strong> lors de la Grande Guerre, <strong>le</strong> premier conflit total ignorantla césure entre lʼAvant et lʼArrière et à démontrer <strong>le</strong> caractère capital delʼadhésion des citoyens à la cause nationa<strong>le</strong> en écrivant « Le si<strong>le</strong>nce imposéà la presse paraît avoir eu en partie <strong>pour</strong> cause la crainte, dʼail<strong>le</strong>urs compréhensib<strong>le</strong>,de lʼinfluence quʼaurait pu exercer lʼopinion publique sur <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>mentdes opérations. En 1870, ce fut el<strong>le</strong> qui imposa <strong>le</strong>s actes <strong>le</strong>s plusdésastreux de la campagne : la nomination de Bazaine, lʼabsurde marche deMac-Mahon sur Sedan etc.» 108 .A sa suite à propos de la Seconde guerre mondial, Harold Lasswell, lʼun desplus éminents pères de la communication de masse moderne expliquait ainsicette nécessité nouvel<strong>le</strong> du contingentement de lʼopinion : « pendant la guerre,on a reconnu que la mobilisation des hommes et des moyens nʼétait pas suffisante,il fallait une mobilisation de lʼopinion. Le pouvoir sur lʼopinion ainsi que surla vie et <strong>le</strong>s biens est passé dans <strong>le</strong>s mains officiel<strong>le</strong>s parce que <strong>le</strong> danger quefait courir la liberté est plus grand que celui provoqué par <strong>le</strong>s abus de pouvoir ;En effet, il est évident que la gestion gouvernementa<strong>le</strong> de lʼopinion est un corollaireincontournab<strong>le</strong> de la guerre moderne qui se passe à grande échel<strong>le</strong>. » 109 .Cette conscience nouvel<strong>le</strong> du lien originel forgée dans <strong>le</strong>s épreuves en réactionau développement technologique croissant des vecteurs ne connaîtra sapremière remise en cause quʼavec avec <strong>le</strong> courant de libéralisation médiatiquesurvenu dans <strong>le</strong>s années 1980 avant dʼêtre définitivement consacré parlʼavènement des médias transnationaux la décennie suivante.2 - Le tournantLe catalyseur majeur du tournant remettant en cause <strong>le</strong>s velléités de cantonnementde lʼopinion sera en effet la capacité dʼévitement des chaînes satellitairesamplifiée à quelques années de distance par lʼarrivée dʼinternet avecsa « Toi<strong>le</strong> » mondia<strong>le</strong> en constante sophistication qui va finir par doter lʼopinion208


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersdes instruments dʼune autonomisation toujours plus accrue et plus individualisée.Daniel Bougnoux, professeur à lʼuniversité de Grenob<strong>le</strong> et observateuravisé du phénomène commentait ainsi lʼimpact de la télévision mondialiséesur la cohésion nationa<strong>le</strong> dès ses débuts: « A lʼhorizon des télévisons multichaînes, (…) nous aurons réalisé ce rêve : vivre ensemb<strong>le</strong> séparément » 110 .Déjà la posture de lʼagence Reuter lors de la guerre des Malouines était emblématiquede lʼattitude de ces nouveaux médias transnationaux comme CNNet <strong>le</strong>ur influence renforcée sur <strong>le</strong>s opinions publiques : « lʼagence Reuter nʼapas de position nationa<strong>le</strong>. Dans ce conflit, nous ne tenons plus compte dʼunquelconque intérêt national, quʼil soit argentin ou britannique que nous ne <strong>le</strong>faisons dans dʼautres conflits » 111 .De la sorte sous lʼeffet de lʼaiguillon médiatique émergeait progressivementune opinion imbriquée à lʼopinion internationa<strong>le</strong> et interagissant avec el<strong>le</strong> endehors de toute préoccupation identitaire nationa<strong>le</strong> tandis que sous lʼeffet decette fatalité <strong>le</strong>s Etats se résignaient à devoir partager <strong>le</strong>ur pouvoir dʼaction surlʼopinion avec des acteurs en marge du champ national.La résultante concrète en a été une certaine uniformisation des va<strong>le</strong>urs fondéesur une irrépressib<strong>le</strong> aspiration à lʼinformation érigée en droit et non plus seu<strong>le</strong>mentliée aux vecteurs étatiques ou nationaux.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARA ce stade donc, concurremment à lʼaccession à lʼautonomie dʼorganes dʼinformationtransnationaux indépendants comme CNN par exemp<strong>le</strong> dʼune partet dʼautre part la multiplicité des réseaux permis par la Révolution numériqueet autorisant lʼirruption dʼacteurs privés non nationaux mus selon des intérêtspolitiques, religieux et pan ethniques propres, on pouvait considérer lʼexistencedʼune « opinion sanctuarisée » comme un fait de plus en plus lié aupassé.Dʼune certaine manière, ce trait dominant est éga<strong>le</strong>ment un aspect explicatifdes problèmes dʼintégration des flux migratoires dans <strong>le</strong>urs pays dʼaccueil etde la problématique émergente de la capacité dʼaction des diasporas dans<strong>le</strong>urs zones dʼorigines.Le contexte de la lutte contre <strong>le</strong> terrorisme éclaire crûment cette problématiquede la transposition des lignes de fractures géopolitiques au sein des sociétésdémocratiques en y renforçant <strong>le</strong>s clivages culturels, raciaux et autres.Dʼoù fina<strong>le</strong>ment lʼextrême relativité désormais de la force mobilisatrice despréoccupations ou va<strong>le</strong>urs conçues comme des priorités nationa<strong>le</strong>s y compris<strong>le</strong>s enjeux de défense et de sécurité face à ces sources démultipliées interagissantde diverses manière sur lʼOpinion.Mais cette jonction entre lʼopinion nationa<strong>le</strong> et internationa<strong>le</strong> nʼest pas <strong>le</strong> seultrait de la dépréciation des rapports entre <strong>le</strong>s Forces de Défense et de Sécurité,expression particulière de lʼautorité étatique. Il y aussi concurremment <strong>le</strong>changement dʼéchel<strong>le</strong> du cœur de métier de ces Forces de Défense etSécurité induit par un contexte mouvant.B - Un changement d’échel<strong>le</strong> des postures de Défense et de SécuritéLʼéquation primaire de la Défense et de la Nation selon <strong>le</strong> politologue LesterBrown reposerait sur « lʼhypothèse que la menace principa<strong>le</strong> vient dʼautresnations (et que) <strong>le</strong> souci de sécurité dʼun pays est sans aucun doute aussiancien que lʼEtat-Nation lui-même.» 112 . Tandis que <strong>pour</strong> Hakam Wiberg, la nationa une vie propre et que sa sécurité ne saurait être assimilée uniquementà la sécurité des individus et groupes qui la composent 113 .112L.R Brown. An untraditional view of national security.American Defense Policy. Baltimore.JohnHopkins University Press. 1982.113the Security of small nations : chal<strong>le</strong>nges anddefenses. Journal of peace research .24 (4) 1987.114Le professeur Raoul Girardet décrit plus nettementcette évolution en p<strong>le</strong>ine guerre froide de manièreprémonitoire : « la menace ne peut plus êtreperçue comme el<strong>le</strong> lʼétait encore dans la premièremoitié du XX ème sièc<strong>le</strong> ; cel<strong>le</strong> dʼun Etat-Nation à lafois limitrophe et militairement puissant cherchantà imposer ses ambitions hégémoniques. Nonseu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s formes envisageab<strong>le</strong>s de lʼagressionse sont multipliées allant de tous <strong>le</strong>s aspectsvirtuels à la lutte armée à lʼagression économiqueou à lʼaction politique interne. Mais surtout, <strong>le</strong>sgrands conflits de notre temps semb<strong>le</strong>nt devoirobligatoirement dépasser (…) <strong>le</strong> cadre traditionnelde lʼEtat-nation ;(…) la défense de sa liberté et deson indépendance (…) se trouve nécessairementliée à la présence dʼun système de sécurité dedimension supranationa<strong>le</strong>. (Concédant toutefoisquʼil serait) diffici<strong>le</strong> dans ces conditions de fairejouer, dans toute <strong>le</strong>ur amp<strong>le</strong>ur et dans toute <strong>le</strong>urforce, <strong>le</strong>s mécanismes liés à la traditionnel<strong>le</strong>défense du territoire» ( R.Girardet Problèmescontemporains de Défense nationa<strong>le</strong>.Dalloz.1974).209


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLʼécart entre ces deux postulats illustre <strong>le</strong> glissement conceptuel graduelayant abouti au contexte impactant quasi universel<strong>le</strong>ment la posture de la plupartdes Etats, parmi <strong>le</strong>s plus actifs sur la scène internationa<strong>le</strong> 114 .Une <strong>le</strong>cture actualisée de cette problématique met en lumière une tendanceirrépressib<strong>le</strong> à lʼacception col<strong>le</strong>ctive de la notion de sécurité et à lʼintégrationrégiona<strong>le</strong> en matière de Défense dʼune part et dʼautre part à son corollaireopératoire ; lʼaccent mis sur <strong>le</strong> concept de projection et dʼinteropérabilité quicontribuent grandement à minorer la perception du caractère régalien de cecœur de métier émergent des Forces de défense et de Sécurité.1 - La prégnance de l’exigence de sécurité col<strong>le</strong>ctiveA la suite du ton donné par lʼéconomique préalab<strong>le</strong>ment à lʼintégration politiqueencore téléologique ; la prégnance des exigences de la sécurité col<strong>le</strong>ctivemalgré la fin de la bipolarisation de la scène internationa<strong>le</strong> a accéléré <strong>le</strong>sprocessus dʼintégration en matière de défense et de Sécurité.LʼAlliance Atlantique a connu une dynamique historique et une extension deson champ de compétence sans précédent à travers sa Politique de Partenariat<strong>pour</strong> la Paix (PPP) et la cooptation de nouveaux membres qui lʼa amenéà couvrir une grande partie du glacis eurasiatique de lʼancienne puissancesoviétique. Dans <strong>le</strong> même temps des pays naguère réticents comme la Francesont devenus acteurs à part entière.Ce dynamisme renouvelé nʼa pas bridé la vigueur dʼune Politique Européennede Sécurité et de Défense tendant à faire du vieux continent un acteur majeurdans <strong>le</strong> domaine militaire.En Afrique, lʼexpérience probante de la CEDEAO, dans la partie occidenta<strong>le</strong>du continent a redynamisé <strong>le</strong>s efforts similaires entrepris dans <strong>le</strong>s autres airesdu continent sous lʼégide de lʼunion Africaine. Le résultat palpab<strong>le</strong> étant lamise sur pied dʼétat-major régionaux supervisant des unités modulaires enattente tandis quʼau plan bilatéral des activités conjointes de sécurisationtransfrontalières sʼinstitutionnalisaient progressivement.Mais fait marquant, cette tendance lourde à lʼinterdépendance des Etats promouvantun engagement en coalition ou sous mandat international <strong>pour</strong> <strong>le</strong>sopérations extérieures aura sensib<strong>le</strong>ment impacté <strong>le</strong> concept dʼemploi desforces nationa<strong>le</strong>s formatées prioritairement <strong>pour</strong> la projection.2 - Un concept d’emploi des forces tourné vers la projection115« <strong>le</strong>s Medias, lʼEtat, lʼOpinion : qui manipu<strong>le</strong> qui?»Enseignements de Géopolitique et de stratégie.Collège Interarmées de Défense.116Jean Rouvier. Bien faire lʼHomme. Arméesdʼaujourdʼhui. Septembre 1995.117« Prendre des décisions en temps de guerre, celaéquivaut à faire des prévisions paradoxa<strong>le</strong>s : plusla probabilité d’une action est grande et moins il ya de chances que l’ennemi l’entreprenne.Plus la probabilité d’une action est faib<strong>le</strong> et plus ily a de chances que l’ennemi agisse de cettemanière. C’est une situation de communicationparadoxa<strong>le</strong>» Watzlawick,P., How real is reality ?Confusion, disinformation, communication,New York1976.118Michael Kunczik. La guerre et la censureinséparab<strong>le</strong>s ? Manuel de communication.pp 19.Friedrich Ebert Stiftung. 1992.Facilité par la professionnalisation croissante des armées autrefois fondéessur la conscription (héritage des conceptions antérieures de la défense nationa<strong>le</strong>orientées exclusivement à la préservation du sanctuaire national) et surdes capacités logistiques adaptées <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s puissances nanties et <strong>pour</strong> lʼessentielsur cel<strong>le</strong>s des Nations Unies <strong>pour</strong> <strong>le</strong> reste, cette orientation a vu un déploiementcontinu des troupes des pays de lʼAlliance atlantique auMoyen-Orient depuis la première guerre du golfe et en Centre-Europe.Le même effort a été consenti par certains pays dʼAfrique de lʼouest sur lamême période dans <strong>le</strong> Golfe de Guinée (Liberia, Sierra-Leone, Guinée Bissau,Côte dʼivoire) et à partir du seuil de lʼan 2000 en Afrique Centra<strong>le</strong> (RépubliqueDémocratique du Congo) avant de <strong>le</strong> prolonger par un engagement enconstante croissance en volume en Afrique de lʼEst (Soudan, Somalie).La moindre visibilité de lʼaction lointaine de ces Forces de Défense et de Sécuritéaura été <strong>le</strong> paradoxe permanent dʼune tel<strong>le</strong> posture dont <strong>le</strong> rendementest brouillé par <strong>le</strong>s échos uniquement centrés sur <strong>le</strong>s risques. Rapportée auvécu quotidien de lʼopinion, cette situation a contribué à créer une perception210


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierstronquée des enjeux et à instal<strong>le</strong>r durab<strong>le</strong>ment un décalage artificiel constantentre <strong>le</strong>s options en matière de défense et <strong>le</strong>s préoccupations de cel<strong>le</strong>-ci.De la sorte, solidairement, la conjonction dʼune opinion ubiquitaire parcequʼéclatée sous lʼeffet dʼun décloisonnement accéléré des sociétés porté par<strong>le</strong> développement fulgurant des NTIC, et de Forces de Défense et de Sécuritédont <strong>le</strong> cœur de métier tend à sʼinternationaliser fonde une approche alternativedu binôme Communication-médias <strong>pour</strong> <strong>le</strong> raffermissement derapports de qualité avec la nation.II - LA REEVALUATION DU BINOME COMMUNICATIONDE DEFENSE -MEDIASCertes, il est indéniab<strong>le</strong> que <strong>le</strong> phénomène médiatique après avoir été <strong>le</strong> <strong>le</strong>vainhistorique de lʼopinion demeure un rouage irremplaçab<strong>le</strong> de la participation populairedans <strong>le</strong> cadre étriqué de la démocratie représentative classique. Seu<strong>le</strong>ment,dans <strong>le</strong> champ particulier de la Défense et de la sécurité et où il parait seconstituer en écran sé<strong>le</strong>ctif par rapport à la nation considérée comme cib<strong>le</strong> communicationnel<strong>le</strong>,il semb<strong>le</strong>rait commander une approche réajustée de la posturedes Forces de Défense et de Sécurité envers ce gisement commun.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARDʼoù semb<strong>le</strong>-t-il, lʼacuité dʼune approche moins dépendante de lʼidéal dʼunpartenariat somme toute déséquilibré et risqué dans ses formes habituel<strong>le</strong>sau-delà du jeu de deux logiques intrinsèquement divergentes opposants libéralismesmédiatiques et gestion de lʼinformation <strong>pour</strong> la promotion dʼun authentiqueesprit de défense.A - La logique vulnérante des médiasSʼil ne fait aucun doute que <strong>le</strong>ur liberté a fait désormais des médias un marqueurdémocratique lourd des sociétés contemporaines, force est de reconnaîtreque <strong>le</strong>ur dynamique comporte des germes entropiques spécia<strong>le</strong>mentdans <strong>le</strong> secteur de la défense et de la sécurité.1 - La mécanique médiatiqueCette ambiguïté dont <strong>le</strong>s ressorts sʼapparentent à cel<strong>le</strong> dʼune véritab<strong>le</strong> mécaniquemédiatique est ainsi analysée par <strong>le</strong> colonel Alain Litzellman, chargéde cours de géopolitique au Collège Interarmées de Défense français « <strong>le</strong>urvocation est dʼinformer, dʼexpliquer, dʼéduquer lʼopinion mais la nécessité defaire du profit ou du moins de subsister transforme lʼinformation en une marchandisequʼil convient dʼadapter à ses <strong>le</strong>cteurs, auditeurs ou téléspectateursqui ont des exigences de consommateurs. Or cette demande – comme il <strong>le</strong>concède – nʼest pas toujours compatib<strong>le</strong> avec une orientation philosophiqueou politique » 115 . On serait tenté dʼajouter… philanthropique.De ce seul fait, lʼévénementiel, en particulier, <strong>le</strong> négatif contribue à saturerquotidiennement <strong>le</strong> fronton de lʼinformation écrite, radiodiffusée ou télévisée.Car la course à lʼexclusivité (<strong>le</strong> scoop), <strong>le</strong> stress du temps intimement liés à lacol<strong>le</strong>cte de lʼInformation fournissent un terreau toujours propice à de nombreusesdérives souvent évitab<strong>le</strong>s.Ces traits récurrents peuvent paraître révulsant même dans <strong>le</strong> cadre familierde <strong>le</strong>ur expression hors du champ sensib<strong>le</strong> de lʼinformation de Défense et dela Sécurité comme <strong>le</strong> montre <strong>le</strong>s questionnements du professeur Jean Rouvierqui <strong>pour</strong>raient être ceux de bien de citoyens à propos de cette légitimité119La manœuvre médiatique dans <strong>le</strong>s interventionsoutre-mer. Défense Nationa<strong>le</strong>. Décembre 1989.120Adamas, V. The medias and the falklandsCampaign, Houndmills 1986 P.22.121Michael Kunczik. La guerre et la censureinséparab<strong>le</strong>s ? Manuel de communication.pp 19.Friedrich Ebert Stiftung. 1992.122« la nouvel<strong>le</strong> source de pouvoir national la plusnotoire a été <strong>le</strong>s médias nationaux. C'est-à-dire<strong>le</strong>s grands networks de télévision, et <strong>le</strong>s journauxd’envergure nationa<strong>le</strong> (…) Il existe par exemp<strong>le</strong>une somme considérab<strong>le</strong> d’évidences quisuggèrent que <strong>le</strong> développement du journalismetélévisé a contribué à saper l’autoritégouvernementa<strong>le</strong>. (…) Bref, <strong>le</strong>s informationstélévisés fonctionnent comme une agence«dépatriant »(dispatriating). Un agence quidépeint <strong>le</strong>s conditions dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s sedéveloppe la société comme indésirab<strong>le</strong>s et allantde pis en pis. » (Armand mattelart Lacommunication-monde : histoire des idées et desstratégies. P 129. Editions La Découverte/textes àlʼappui. Paris janvier 1992.)211


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainesocia<strong>le</strong> des médias envers et contre tout « au reste la dénomination Médiasnʼest-el<strong>le</strong> pas à el<strong>le</strong> seu<strong>le</strong> un trompe-lʼœil ? Medias cela signifie moyens decommunication. Or la plupart des médias actuels sont-ils rien dʼautre que desmoyens de domination du pire sur <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur ? (…) sauf exception, <strong>le</strong>s médiasne sont-ils pas devenus une technique au service dʼun ou de plusieurs tête delʼHydre totalitaire, lʼArgent, la Race, la Classe etc. visant non seu<strong>le</strong>ment à mettreen péril la sûreté, la sécurité (…) nʼy pratique-t-on pas inlassab<strong>le</strong>ment ladésinformation, la falsification de lʼhistoire, la langue de bois, <strong>le</strong> lavage de cerveau,(…) <strong>le</strong> viol systématique des pudeurs et des consciences ?» 116 .En fait, si ces préoccupations peuvent porter à débat dans <strong>le</strong>ur dimensionontologique ; au plan historique et stratégique el<strong>le</strong>s se sont <strong>pour</strong> lʼessentielavérées pendant <strong>le</strong>s périodes critiques.2 - L’impact médiatique dans <strong>le</strong> domaine de la sécuritéet de la défenseAinsi peu compatib<strong>le</strong> avec <strong>le</strong> domaine de la sécurité et de la Défense, du faitdʼune capacité dʼinvestigation sʼinsérant à tous <strong>le</strong>s niveaux, mêlant sourcesofficiel<strong>le</strong>s et officieuses, accommodant la déontologie à une éthique plutôtdʼefficacité dans une ambiance concurrentiel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s médias ont en effet parucompromettre la posture sécuritaire de maintes nations en <strong>le</strong>s précipitant dansla crise ou en servant inconsciemment <strong>le</strong>s plans de lʼennemi en interférantdans la communication paradoxa<strong>le</strong> 117 des deux camps.Dans <strong>le</strong> premier cas, immortalisé par Orson Wel<strong>le</strong>s dans « Citizen kane »(1941), <strong>pour</strong> la première fois, la campagne de presse de deux grands journauxconcurrents « qui ne reculèrent devant aucun mensonge » 118 déc<strong>le</strong>nchèrentune hystérie de logique de guerre qui aboutit à lʼinterventionaméricaine à Cuba en 1898.La guerre des Malouines devenu un cas dʼéco<strong>le</strong> de lʼutilisation des relais médiatiquesde lʼadversaire (ici britannique) <strong>pour</strong> manipu<strong>le</strong>r son opinion est illustrativedu second vo<strong>le</strong>t des effets vulnérants des médias. Du fait dʼunegestion déficiente de la communication par lʼArmée britannique, <strong>le</strong>s argentinsavaient réussi à inonder la presse anglaise des <strong>le</strong>urs vues dans <strong>le</strong>s deux sensdu terme : images et thèses. Au point que selon Thierry Garcin « <strong>le</strong> gouvernementeut la maladresse dʼen appe<strong>le</strong>r à lʼopinion (censée) protester contresa radiotélévision-modè<strong>le</strong> évidemment infaillib<strong>le</strong> du journalisme mondial» 119avec la réaction outrée de lʼopinion que lʼon devine…Cette épisode en rappel<strong>le</strong> une autre sur lʼintransigeance professionnel<strong>le</strong> traditionnel<strong>le</strong>sur laquel<strong>le</strong> la presse britannique a bâti sa réputation. Selon <strong>le</strong> témoignagede Lord Halifax, Winston Churchill évoquait la BBC en Conseil deCabinet « avec beaucoup dʼamertume (comme) dʼun ennemi dans nos portes,causant continuel<strong>le</strong>ment des troub<strong>le</strong>s, faisant plus de mal que de bien.» 120Mais lʼévènement resté emblématique de lʼimpact des médias sur <strong>le</strong> sort desarmes reste lʼissue malheureuse de la guerre du Vietnam <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s Etats-UnisdʼAmérique.En effet engagé dans sa première guerre de guérilla, dʼail<strong>le</strong>urs non déclarée,<strong>le</strong> gouvernement américain misa semb<strong>le</strong>-t-il sur la loyauté des médias dansce qui se présentait comme une croisade contre <strong>le</strong> communisme au nom desa Doctrine de Containment.Pour <strong>le</strong> président américain, John F. Kennedy sʼadressant à lʼAmerican NewspaperPublishersʼAssociation <strong>le</strong>s termes du partenariat paraissaient sansambigüité : « En temps de guerre, <strong>le</strong> gouvernement et la presse se sont212


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersdʼordinaire associés dans un effort basé en grande partie sur sur lʼautodisciplinepouvant éviter des révélations à lʼennemi. Chaque journal se demandemaintenant au sujet de chaque évènement : est-ce une information ? Tout ceque je propose, cʼest que vous ajoutiez la question : est-ce dans lʼintérêt dela sécurité nationa<strong>le</strong> ?» 121Mais cet arrangement plus ou moins opératoire sʼavéra être un échec au tournantde lʼoffensive du Têt qui contribua à débrider grandement <strong>le</strong>s médias.Même si <strong>pour</strong> beaucoup, <strong>le</strong> retournement de lʼopinion américaine fut surtout<strong>le</strong> point culminant du travail patient et insidieux du nouveau média quʼest latélévision sur la conscience des citoyens qui ont ingurgité passivement pendantlongtemps <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> des atrocités de la guerre à lʼheure du dîner.Lʼun deux parmi <strong>le</strong>s plus éminents, <strong>le</strong> géopoliticien Samuel P. Huntington allamême jusquʼ à qualifier en 1975 de « dépatriante » cette logique vulnérantedes médias. 122A lʼinverse, la gestion opaque des opérations en Afghanistan par des médiasrusses trop contrôlées aurait fait <strong>le</strong> lit de la rumeur et précipité entre autres facteurs<strong>le</strong> désengagement soviétique de ce pays.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARCʼest là tout <strong>le</strong> paradoxe de situations touchant aux ressorts mêmes de lasouveraineté des nations et fortement dépendant du jeu des médias et dont<strong>le</strong> caractère impérieux des enjeux paraît commander lʼexistence dʼune communicationde Défense plus globa<strong>le</strong> dans sa stratégie et sa finalité.B - Le défi d’une communication de défense synergiqueA nʼen point douter <strong>le</strong> renforcement des liens entre <strong>le</strong>s Forces de Défense et deSécurité et la Nation requiert une Communication rénové et proactive dans saforme aussi bien que dans sa pratique au rebours de sa dimension classique.1 - Les aspects de la communication classiqueA lʼévidence « la stratégie de communication nʼest pas la stratégie mais unestratégie sans communication ne peut-être une stratégie ». Ce précepte de laDoctrine généra<strong>le</strong>ment en usage <strong>pour</strong> pertinente quʼel<strong>le</strong> soit nʼen révè<strong>le</strong> pasmoins <strong>le</strong>s limites objectives et <strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>sses de la posture classique largementsurclassé par <strong>le</strong> phénomène médiatique et sa formidab<strong>le</strong> emprise sur lʼopinion.Dans ses grandes lignes, <strong>le</strong> schéma classique de la communication de défensesuit <strong>le</strong> format habituel de la communication institutionnel<strong>le</strong> (Corporatecomunication) avec la préoccupation centra<strong>le</strong> de valoriser fortement lʼimagedes Forces de Défense et de Sécurité dans ses vo<strong>le</strong>ts internes et externes.Il sʼagit méthodologiquement, après une analyse du contexte national et internationalrapportée aux attentes de citoyens dʼidentifier <strong>le</strong>s enjeux prioritaires.Au rang de ceux-ci, <strong>le</strong>s points récurrents concernent <strong>le</strong> raffermissementde lʼintégration de la Défense dans lʼenvironnement national en suscitantlʼadhésion à la posture des Forces de Défense et de Sécurité.Ensuite, <strong>le</strong>s axes de la communication <strong>pour</strong> une période prédéfinie sont identifiés,fondés sur <strong>le</strong>s thèmes génériques mobilisateurs autour desquels doiventsʼarticu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s messages. Enfin, <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> conforme à cette démarche peut êtredéterminé <strong>pour</strong> une meil<strong>le</strong>ure pénétration de la cib<strong>le</strong>.Un tel schéma unique et centralisateur paraît forcément peu réactif et potentiel<strong>le</strong>mentdécalé des attentes de lʼopinion. De même, <strong>le</strong>s critères dʼefficacitésouvent mis en œuvre <strong>pour</strong> délivrer <strong>le</strong>s actions de communication comme<strong>le</strong>ur lisibilité, <strong>le</strong>ur opportunité, <strong>le</strong>ur acceptabilité, <strong>le</strong>urs caractères significatifs213


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine123Michel Le Net. La communication gouvernementa<strong>le</strong>,Actes du premier symposium international surla communication gouvernementa<strong>le</strong>. Editions delʼinstitut de la Communication socia<strong>le</strong>,paris,1985.124R.Girardet. Problèmes contemporains de Défensenationa<strong>le</strong>. PP 196. Dalloz.1974et contrôlab<strong>le</strong>s sont étroitement liés au mode indirect de <strong>le</strong>ur transmissionpar conséquent aux médias.Cʼest ce qui a dʼail<strong>le</strong>urs conduit à instaurer un partenariat de fait fondé surlʼidéal de relations de confiance certes nécessaires au quotidien dans <strong>le</strong> cadreréduit de la communication de défense classique mais limités objectivementlorsquʼil sʼagit de promouvoir un authentique rapport à lʼopinion.Certes dans <strong>le</strong> contexte démocratique, la participation active et positive desmédias surtout en cas de crise est salutaire mais el<strong>le</strong> est tout aussi illusoireque la posture qui viserait à sʼen abstraire ou prétendre <strong>le</strong>s régenter. En fait<strong>le</strong> vrai défi semb<strong>le</strong>rait résider dans la constitution de capacités non point équiva<strong>le</strong>nteen terme de moyens, ce qui équivaudrait à une confusion des rô<strong>le</strong>smais en terme dʼimpact et dʼancrage dans lʼopinion nationa<strong>le</strong> à tout <strong>le</strong> moins.Or, cela reviendrait dans tous <strong>le</strong>s cas à hisser la communication de Défenseà un palier supérieur et à lʼarticu<strong>le</strong>r à un objectif de même niveau.2 - Esquisse prospective d’une communication synergiqueDe fait, confronté au doub<strong>le</strong> défi de tisser des liens privilégiés avec uneopinion de moins en moins sanctuarisée et de se déployer dans un contexteétroitement dépendant du statut hégémonique des médias, la communicationde défense devrait el<strong>le</strong> aussi changer dʼéchel<strong>le</strong> au plan national sous peinedʼavoir un impact marginal sur son environnement.En effet, <strong>le</strong> décalage est saisissant entre une réalité médiatique investissantla totalité de la sphère nationa<strong>le</strong> et capab<strong>le</strong> dʼen transcender <strong>le</strong> cadre et uneapproche quasi corporatiste et dont <strong>le</strong> degré de formulation <strong>le</strong> plus é<strong>le</strong>vé selimite au seuil stratégique.Puisque <strong>pour</strong> lʼessentiel, la fonction Communication de défense est souventconçue dans sa dimension esthétique et centrée sur <strong>le</strong>s institutions et <strong>le</strong>ursdémembrements concernés dʼoù une certaine fatalité attachée à la place monopolistiquedes médias sur lʼopinion nationa<strong>le</strong>.En terme de stratégie, <strong>le</strong>s références sont récurrentes à propos des notionsdʼidentité et dʼimages à faire coïncider en permanence dans <strong>le</strong>s vo<strong>le</strong>ts interneset externe de la Communication de défense en vue dʼasseoir une sorte delégitimité qui ne serait probab<strong>le</strong>ment que « sui generis » et par conséquentéloignés des attentes en ce qui concerne <strong>le</strong> façonnage de lʼopinion nationa<strong>le</strong>.En fait au-delà des procédés dʼexécution dʼune stratégie sur tout <strong>le</strong> spectrePaix-Crise-Guerre ; cʼest peut-être un pô<strong>le</strong> de communication de Défenseglobal associant lʼensemb<strong>le</strong> des structures militaires et paramilitaires quʼilfaudrait concevoir et animer avec comme soubassement possib<strong>le</strong> ce postulatinspiré des recherches de Michel Le Net, spécialiste de la communicationgouvernementa<strong>le</strong> : « une stratégie de modification comportementa<strong>le</strong> (qui est<strong>le</strong> but de toute Communication) devient optima<strong>le</strong> lorsque <strong>le</strong> système socia<strong>le</strong>st à même de générer lui-même <strong>le</strong>s attitudes prônées par <strong>le</strong>s effets cumulatifsauto-entretenus. Il nʼest alors plus besoin de faire appel aux fonctions decontrô<strong>le</strong>(…) cet état est réalisé lorsque lʼopinion publique atteint <strong>le</strong> point denon-retour (…). Ce point clé est rejoint lorsque lʼensemb<strong>le</strong> des moyens (…)ont atteint par synergie la masse critique qui y conduit. Tel est <strong>le</strong> cas <strong>pour</strong> <strong>le</strong>sattitudes qui intégrées progressivement dans la vie sociéta<strong>le</strong> deviennent unecomposante matériel<strong>le</strong> des mœurs dʼune nation » 123 .Rapportée à la fina<strong>le</strong>ment à la problématique du raffermissement des liensunissant Force de Défense et de Sécurité à la Nation ; cʼest véritab<strong>le</strong>mentdʼune politique de promotion de lʼesprit de Défense quʼil sʼagit de fonder surdes bases pérennes et parce que fiab<strong>le</strong>s.214


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersCel<strong>le</strong>-ci nécessiterait certes un réaménagement institutionnel qui autoriseraitune véritab<strong>le</strong> synergie de lʼensemb<strong>le</strong> des institutions et segments sociauxconcourant à la Défense nationa<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> reléguerait éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s structures préexistantes des Forces de Défenseet de Sécurité dans <strong>le</strong>ur format de communication interne tout en fédérant parconséquent <strong>le</strong>ur communication externe à un niveau national virtuel<strong>le</strong>mentapte à déborder lʼinterface médiatique si nécessaire <strong>pour</strong> créer un environnementpropice à cet esprit de défense par des partenariats intéressant entretous <strong>le</strong>s acteurs de la vie socia<strong>le</strong> intéressés.Agissant en renforcement de la vie démocratique et civique, cette entrepriseviserait au-delà de lʼinformation de lʼopinion proprement dite à assurer saformation <strong>pour</strong> une élévation de sa conscience nationa<strong>le</strong>.Le professeur Raoul Girardet rappel<strong>le</strong> son importance lors du premier conflitmondial : « En 1914, lʼétat-major al<strong>le</strong>mand sʼétait montré très surpris de lʼunanimitédans la volonté de lutte montrée par une nation française que lʼoncroyait cependant très profondément divisée. Beaucoup de ses représentantsétaient convaincus que <strong>le</strong>s déchirements internes de la col<strong>le</strong>ctivité française,politique et idéologique ne lui permettraient pas dʼaffronter lʼépreuve de laguerre. Or sʼil nʼen est rien été, cʼest dʼabord parce que lʼenseignement primaire,tel que lʼavaient fondé la génération de Ju<strong>le</strong>s Ferry et de Paul Bertnʼavait cessé depuis plus de 30 ans dʼinsister sur las va<strong>le</strong>urs considéréescomme sacrées de patriotisme et de défense nationa<strong>le</strong>. » 124 .De plus, cette approche synergique de lʼenjeu de consolidation des liens entre<strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité présenterait lʼavantage dʼéviter certains avatarsde la Communication de défense à lʼinstar de la tentation de la propagandeou de la manipulation typiques des régimes totalitaires et rendue nécessairesjustement par lʼabsence dʼun travail de renforcement de lʼesprit citoyen.Enfin, el<strong>le</strong> serait cohérente avec lʼintégration tendanciel<strong>le</strong> observée universel<strong>le</strong>mentau niveau des autres structures de souveraineté dédiées à la de col<strong>le</strong>cte,au traitement et à lʼexploitation de lʼinformation de sécurité et de défense.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARIV - CONCLUSIONEn conclusion, la problématique de la consolidation du lien entre <strong>le</strong>s Forcesde défense et de sécurité et la Nation paraît poser de façon crucia<strong>le</strong> la questionde la capacité dʼadaptation de cel<strong>le</strong>s-ci face à une société et un environnementen constante mutation afin de conserver <strong>le</strong>ur légitimité et <strong>le</strong>ur raisondʼêtre. Cela, indépendamment du facteur médiatique qui nʼapparaît en sommeque comme <strong>le</strong> révélateur dʼune posture socia<strong>le</strong> virtuel<strong>le</strong>ment anachronique.Certes, <strong>le</strong> changement dʼéchel<strong>le</strong> de <strong>le</strong>ur responsabilité <strong>pour</strong>rait se percevoircomme une preuve éloquente de soup<strong>le</strong>sse mais sʼexerçant à <strong>le</strong>ur détrimentface à une opinion de plus en plus distante parce peu sensibilisée aux enjeuxde la Défense Nationa<strong>le</strong> et mondialisée , il semb<strong>le</strong> incomber aux Forces deDéfense et de sécurité la responsabilité correspondante de se hisser à la hauteurnécessaire à travers une posture communicationnel<strong>le</strong> alternative en vuede jeter <strong>le</strong>s bases dʼun esprit de défense renouvelé apte à fournir justementces repères dont la Nation a besoin <strong>pour</strong> sa cohésion et son ancrage.Cʼest sans doute <strong>le</strong> prix à payer <strong>pour</strong> la pérennité du lien historique entrecel<strong>le</strong>s-ci et la Nation quʼel<strong>le</strong>s sont censées servir.GATTA BAest lieutnant-colonel dʼinfanterie, issu deLʼESM de Saint Cyr. Actuel Adjoint Opérationsau Commandement de la Zone Mili -taire N°4 depuis Mai 2010, il a été notam mentChef de la Division Medias et Stratégie etRédacteur en chef des publications de laDirection de lʼInformation et des Relationspubliques des Armées.Au plan extérieur, <strong>le</strong> Lieutenant colonel BAa occupé <strong>le</strong>s fonctions dʼAdjoint au Chef dela cellu<strong>le</strong> de planification puis de la cellu<strong>le</strong>de coopération civilo-militaire à lʼEtat-majorde la Mission des Nations Unies en Républiquecentrafricaine et au Tchad-MINUR-CAT, Mars 2009 – Mars 2010), dʼOfficierHumanitaire du Bataillon sénégalais auRwanda (MINUAR).Le Colonel BA est éga<strong>le</strong>ment titulaire dʼunDiplôme Supérieur de Journalisme, il possèdeun Doctorat en science politique delʼUniversité Cheikh Anta Diop de Dakar.215


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineATELIERS SUR LA RÉFORME DU SECTEUR DE SÉCURITÉAtelier 4 : Quel modè<strong>le</strong> d’armée <strong>pour</strong> l’Afrique de l’Ouest ?3.9 IntervIntervention du professeur Philippe BIYOYA MAKUTU,Directeur CEPAC et IPRIS, Université de Lubumbashi, RepubliqueDemocratique du CongoRésumé : The intervention of Professor Philippe Biyoya MAKUTU treats the questionwhich archetype to choose for reformed armed forces for western Africa. Inthe beginning, he states that in our times, the threats to a survival of the humanrace has already transformed the notion of security and modernised its doctrinesand and defence policies. Then he names the fact that the western african postcolonialarmies are <strong>le</strong>ss military than politically depending. Also, the post-colonialdevelopment of western africa was marked by inter-state conflicts due to an illogicalpositioning of state borders, neg<strong>le</strong>cting the different ethnic sett<strong>le</strong>ment areas.These difficulties have <strong>le</strong>ad to several armed conflicts in the past. The war of Biafraand the Casamance Region are only two examp<strong>le</strong>s out of many others. ProfessorMAKUTU also states that especially the western african armies shouldrespond to the modern types of conflicts like asymetric, terrorist attacks and thateconomic conflicts will get more and more important. Therefore it was necessaryto form a new type of soldier for the future of the who<strong>le</strong> region. After the end of theclassical threats at state borders and of the bipolar world order, the paradigm ofdeterrence should change towards a paradigm of intervention. Forces of differentcountries should intervene abroad in order to stabilise the international relations.These interventions should reestablish an enduring political and social order.Quel(s) modè<strong>le</strong>(s) d’Armée(s) ? (4)La question du modè<strong>le</strong> dʼArmée en Afrique de lʼOuest est une questiongénéra<strong>le</strong> qui concerne aujourdʼhui <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des armées et surtout la fonction dela guerre dans <strong>le</strong> monde et particulièrement en Afrique. Dans un monde globa<strong>le</strong>t où lʼidéologie du droit de la personne ainsi que <strong>le</strong>s menaces à la surviede lʼespèce humaine deviennent chaque jour plus que prioritaires, <strong>le</strong> combat<strong>pour</strong> la survie aura réussi à transformer la notion de sécurité et renouvelé <strong>le</strong>sdoctrines et politiques de défense 125 .Cette révolution généra<strong>le</strong> des fonctions de la guerre et des missions desforces armées sʼest empiriquement posée en Afrique où à lʼaccession àlʼindépendance des voix sʼétaient <strong>le</strong>vée <strong>pour</strong> conseil<strong>le</strong>r un neutralisme militaireaux jeunes Etats africains <strong>pour</strong> raison de développement, façon de <strong>le</strong>sépargner à lʼépoque des ravages de la guerre froide et où malheureusementlʼévolution des institutions politiques post-colonia<strong>le</strong>s a engendré lʼinterventiondes militaires en politiques. Et comme beaucoup lʼont fait remarquer depuis,lʼintervention de lʼarmée en politique en Afrique aura coïncidé proportionnel<strong>le</strong>mentavec son incapacité à sʼoccuper des problèmes de sécurité et dedéfense des nations, du continent et du monde.Université de LubumbashiLʼAfrique indépendante nʼa pratiquement pas été <strong>le</strong> partenaire des nationsconfrontées au cours dʼune longue période de son histoire politique et diplomatiqueà la guerre froide qui <strong>pour</strong>tant a eu des effets graves et pervers surlʼindépendance africaine. Face à la perspective dʼune guerre nucléaire qui sepréparait et déterminait la politique internationa<strong>le</strong> de lʼépoque, lʼAfrique qui aunom de lʼindépendance et de la souveraineté avait refusé de souscrire auneutralisme militaire et choisit la normalité institutionnel<strong>le</strong> en se dotant dʼarmées,216


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersnʼeut pas une vision globa<strong>le</strong> des menaces à la paix et à la sécurité internationa<strong>le</strong>set sʼillustra dans un non-alignement naïf et non contextualisé, et avantla conclusion du Traité de Non Prolifération des armes nucléaires (TNP), opta<strong>pour</strong> la dénucléarisation et sʼérigea en zone de paix. Et <strong>pour</strong>tant lʼAfrique demeuraitthéoriquement et pratiquement enserrée dans <strong>le</strong> dispositif stratégiqueoccidental et recevait sur ses terres <strong>le</strong>s bases militaires et des contingentsdes armées occidenta<strong>le</strong>s re<strong>le</strong>vant de la zone OTAN.A ce qui aurait pu apparaître à lʼorigine comme une négligence ou uneprécaution stratégique mais qui se révé<strong>le</strong>ra plus tard comme un handicapnaturel et congénital de lʼEtat africain post-colonial allait sʼajouter <strong>le</strong> fait quelʼindépendance africaine nʼentraîna pas une révolution de lʼEtat colonial et decertaines des institutions dont lʼinstitution militaire la plus colonia<strong>le</strong> de toutes.Michel L. Martin dans lʼAfrique sub-saharienne, sécurité, stabilité et développement: bilan et perspectives, qualifie <strong>le</strong>s armées africaines post-colonia<strong>le</strong>s desarmées sous-militaires mais de sur-politisées 127 . Ce qui est caractéristiquegénéra<strong>le</strong> de toute lʼAfrique, <strong>le</strong> serait particulièrement de lʼAfrique de lʼOuest oùlʼintervention de lʼarmée en politique aurait la peau dure, et où dans certainsespaces de cette zone, la militarisation de la politique est aujourdʼhui laconséquence logique du phénomène de lʼeffondrement de lʼEtat. Les cas duLibéria, de la Sierra-Léone, de la Côte dʼIvoire, de la Guinée-Bissau et de la Guinée-Conakrysont encore frais dans <strong>le</strong>s mémoires et p<strong>le</strong>ins de renseignements.Et comme lʼécrit Jean-Jacques Konadje dans ʻʼApproches géopolitiques desconflits Ouest africainsʼʼ, lʼAfrique de lʼOuest est une région qui abrite depuis<strong>le</strong>s années 60 des conflits armés. Si au cours des premières décennies qui ontsuivi <strong>le</strong>s indépendances, cette partie du continent a connu des crises sporadiques,aujourdʼhui après la guerre froide, de nouveaux types de guerres auxcaractéristiques différentes ont émergé … Lʼon est passé des guerres entreEtats aux guerres intestines. Pendant que certaines régions du monde jouissentdes dividendes de la paix de lʼaprès guerre froide, écrit-il, lʼAfrique delʼOuest doit quant à el<strong>le</strong>, re<strong>le</strong>ver dʼautres genres de défis, dont certains revêtantdes formes vio<strong>le</strong>ntes, vont, en certains cas, jusquʼà menacer lʼexistencemême des Etats. Certains de ceux-ci nʼont pas réussi à trouver une résolutionpacifique aux pressions internes, provoquant ainsi des explosions de vio<strong>le</strong>ncequi menaceraient la sécurité de la sous-région. La sous-régionalisation de lʼinstabilitépolitique et de lʼinsécurité conduisit bien entendu à quelques ref<strong>le</strong>xesde sécurité col<strong>le</strong>ctive mieux dʼactions col<strong>le</strong>ctives de sécurité sans perspectivemalheureusement de régionalisation des objectifs, de moyens, sinon despolitiques régiona<strong>le</strong>s de défense ou de la défense régiona<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREt <strong>pour</strong>tant lʼoption dʼune action régiona<strong>le</strong> de maintien de la paix aurait dû êtrepoussée plus loin et rendue plus ambitieuse. Et cette sous-région traditionnel<strong>le</strong>mentprésentée comme <strong>le</strong> havre de paix et de stabilité du continent asombré dans la vio<strong>le</strong>nce 128 .Vasconcelos, directeur de lʼInstitut dʼétudes stratégiques de Lisbonne, estimequant à lui que ʻʼsouvent qualifiée de continent chaotique, lʼAfrique et particulièrementsa partie Ouest est synonyme dʼépidémie, de famine, de vagues derefugiés fuyant la guerre et la sécheresse, de tyrannie ou au mieux, de mauvaisegestion des affaires publiques, du marasme économique qui aggraventdes crises incessantes et lʼimminences de la désintégration étatique...ʻʼLʼAfrique serait ainsi en voie de perdition et ferait face à des nouvel<strong>le</strong>s menacesde sécurité appelant de guerres de nouveau genre sans que ne disparaissentdes menaces et défis militaires traditionnels.LʼAfrique de lʼOuest offrirait ainsi lʼimage du monde où <strong>le</strong> passé, <strong>le</strong> présent et<strong>le</strong> futur se livrent la guerre de façon intermittente et pernicieuse et où <strong>le</strong> pou-125Voir Michael RENNER, Combat <strong>pour</strong> la survie.Dégradation de lʼenvironnement affrontementsocial : <strong>le</strong> nouvel âge de lʼinsécurité, Nouveaux-Horizons 1996.126Lire notre artic<strong>le</strong>, « Les aspects oubliés delʼintégration économique africain», Journal ofOriental and African studies, Volume 7 (1995) quise réfère à lʼartic<strong>le</strong> de Hegba J.A., évolution desarmées africaines (1970).127Voir notre livre, « La question congolaise, 2005,lʼarmée comme obstac<strong>le</strong> à la démocratieafricaine », p.229.128Allusion faite par nous dans la géopolitique delʼinstabilité dans la Région des Grands Lacs, voirHarmattan 2009.217


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainevoir du Chef de lʼEtat <strong>pour</strong>rait bien détruire la cohésion socia<strong>le</strong> et que tout celatrouverait explication dans la série de guerres civi<strong>le</strong>s qui ont éclaté dans certainspays tels que <strong>le</strong> Libéria, la Sierra-Léone, la Guinée-Bissau et la CôtedʼIvoire qui font de cette région de lʼavis du SPRI (1999), la région la plusconflictuel<strong>le</strong> de lʼAfrique qui el<strong>le</strong>-même serait la plus en vue dans la conflictualitémondia<strong>le</strong> et la seu<strong>le</strong> où <strong>le</strong> nombre des conflits armés est à la hausse.La question du type de lʼarmée en Afrique de lʼOuest est donc non seu<strong>le</strong>mentforte de légitimité historique mais bien plus de légitimité stratégique parce quela zone est en proie à des guerres interétatiques et des conflits civils et queces guerres et conflits gagnent désormais en sens et significations. Car <strong>le</strong>problème méthodologique de ce débat du jour ne serait pas à notre avis cel<strong>le</strong>de savoir quel<strong>le</strong> approche, entre la stratégique et la polémologique vaudraitla chandel<strong>le</strong>, mais de dire à quoi servent <strong>le</strong>s guerres en Afrique ? Quel<strong>le</strong> serait<strong>le</strong>ur fonction légitime et quel<strong>le</strong> armée, conçue sur quel modè<strong>le</strong> en serait laréponse. La réaction aux crises appel<strong>le</strong>-t-el<strong>le</strong> une réponse régiona<strong>le</strong>, stratégiqueou polémologique ou des réponses nationa<strong>le</strong>s concertées et coordonnéesaux moyens des armés nationa<strong>le</strong>s décolonisées et professionnaliséesou des armées toujours sous-militarisés mais sur-politisées ?Il importe <strong>pour</strong> mieux répondre à cette série des questions de rappe<strong>le</strong>r que lapréoccupation à ce niveau devrait être avant tout de rendre compte de lʼévolutiondu phénomène guerre dans <strong>le</strong> monde, et dont <strong>le</strong>s conceptions changent.Clausewitz et Linderdoff aujourdʼhui coexistent en rivalisant ; la guerre serait-el<strong>le</strong>toujours la continuation de la politique par dʼautres moyens, c.à.d. une politique,ou la continuation de la guerre par la guerre, soit <strong>le</strong>s conflits éternels.A<strong>le</strong>xandre Ad<strong>le</strong>r, dans ʻʼVers une nouvel<strong>le</strong> théorie de la guerre (Etudes 2002)ʼʼrappel<strong>le</strong> que la grande guerre, de dimension mondia<strong>le</strong>, émerge avec la Révolutionfrançaise. Dix ans après la fin des guerres napoléoniennes, Clausewitzen était <strong>le</strong> théoricien presque accompli. Son axiome de base était quepar sa nature, la grande guerre moderne est portée vers <strong>le</strong>s extrêmes. Sontélos, sa finalité vivante, son accomplissement, cʼest la guerre tota<strong>le</strong>, qui investittour à tour lʼarrière, <strong>le</strong>s forces économiques, <strong>le</strong>s mers libres et <strong>le</strong>s colonieset jusquʼau plus petit des Etats neutres … La guerre nait de la politique,qui sʼy cherche dʼautres moyens ; la guerre, lorsquʼel<strong>le</strong> sʼéteint, y retourne.Au politique dʼoptimiser ce chemin en conservant tout au long du jeu <strong>le</strong>contrô<strong>le</strong> des opérations. Ce mode de raisonnement a subi <strong>le</strong> coup des stratégiesde la guerre nucléaire et de grandes diplomaties de la guerre froide.En effet, la dissuasion nucléaire, on lʼa dit, est venue bou<strong>le</strong>verser la relation dela politique avec la guerre ou vice-versa parce quʼimposant une stratégie indirecte.Le principe de la sanctuarisation qui demeura incomplète, ouvrait <strong>le</strong>champ à de guérillas et à de petites guerres très politiques, qui pouvaient parvenirà faire bascu<strong>le</strong>r dans un scénario ou dans lʼautre des corps expéditionnaires,de plus en plus professionnalisés. Le but de la manœuvre (stratégique)était moins ici de gagner à tout prix, que dʼiso<strong>le</strong>r un adversaire, qui sera peu àpeu ramené dʼune doctrine absolue du conflit au règ<strong>le</strong>ment négocié classique.La guerre froide soutient Ad<strong>le</strong>r, nʼa pas conduit – malgré la puissance nucléaire– à un refou<strong>le</strong>ment comp<strong>le</strong>t de la guerre, ou à sa transformation aboutieen ʻʼguerre politiqueʼʼ menée par des petits groupes, au total inoffensifs, degendarmes et de va<strong>le</strong>urs. Le caractère incomp<strong>le</strong>t de la dissuasion a plutôtconduit à une reprise ʻʼnon clausewienneʼʼ de la guerre, là où cette dissuasionne fonctionnait plus, laissant une bonne partie de lʼhumanité démunie devantla vio<strong>le</strong>nce guerrière. Idée diffici<strong>le</strong> à concevoir parce que nʼentrant pas dans<strong>le</strong> paradigme de la guerre froide ; et <strong>pour</strong>tant, depuis la guerre de Coréejusquʼà cel<strong>le</strong> du Koweït (1950-1990), très peu de conflits classiques sont par-218


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersvenus à épuiser <strong>le</strong>ur potentialité agressive. Ce cyc<strong>le</strong> de guerres atypiques dela guerre de Corée à lʼinsurrection du Sud-Soudan ou la révolte Kurde en Irakaura inauguré la série des conflits interminab<strong>le</strong>s. Désormais, la guerre nʼestplus tota<strong>le</strong> mais de ʻʼbasse intensitéʼʼ ; el<strong>le</strong> déploie ses effets, non plus foudroyantsmais lancinants, sur des durées très longues, sans montées aux extrêmesni mobilisation tota<strong>le</strong> des ressources dʼun peup<strong>le</strong>.Le contexte régional de lʼOuest de lʼAfrique en proie aussi à la menace terroriste(Mali, Niger) et donc intégré dans <strong>le</strong> conflit global, oblige à adapter <strong>le</strong>s défensesnationa<strong>le</strong>s et, ou régiona<strong>le</strong>s aux exigences des guerres asymétriques.Cet effort de réadaptation stratégique ne devrait pas se dispenser préalab<strong>le</strong>mentde lʼanalyse approfondie de menaces, anciennes et nouvel<strong>le</strong>s. Car, dansla mesure où nombre de ceux qui se sont penché particulièrement sur <strong>le</strong>sguerres et <strong>le</strong>s conflits de lʼAfrique de lʼOuest conviennent que ceux-ci nʼont pastoujours des conflictualités classiques.La notion de guerre interétatique, traditionnel<strong>le</strong>ment définie comme cel<strong>le</strong>opposant deux groupes souverains se considérant chacun comme une entitédu droit international absolument indépendant doit sʼinterpréter en fonction ducontexte sociopolitique du lieu. Cʼest en ce sens, apprend-t-on, quʼen Afriquede lʼOuest la guerre interétatique nʼest pas avant tout un instrument depolitique étrangère, soit la continuation de la politique par dʼautres moyens etgérant des menaces contre lʼintégrité du territoire national ; un conflit interétatiqueen Afrique de lʼOuest peut avoir des enjeux territoriaux dûs aux mauvaisdécoupages, largement artificiels et incertains des frontières colonia<strong>le</strong>s,et au sens large, englober <strong>le</strong>s conflits dans <strong>le</strong>squels un des Etats revendiqueun territoire voisin sur <strong>le</strong>quel il peut avoir des droits historiques. On alignedans ce tas, des guerres de libération colonia<strong>le</strong> comme cel<strong>le</strong> de la GuinéeBissau, des guerres de contestation des frontières comme cel<strong>le</strong>s entre <strong>le</strong> Burkinaet <strong>le</strong> Mali, <strong>le</strong> Sénégal avec la Mauritanie, et aussi, des tensions entre <strong>le</strong>Burkina et la Côte dʼIvoire où <strong>le</strong>s guerres civi<strong>le</strong>s passent comme de sous-traitancedes guerres dʼambitions interétatiques, guerres de rivalité ou de <strong>le</strong>adershiprégional. LʼAfrique de lʼOuest aurait aussi connu des guerres dʼorigineidéologique comme cel<strong>le</strong> du Biafra des années 60 parce quʼel<strong>le</strong> aurait eu <strong>pour</strong>fondement la politisation dʼune frange de la population en faveur de la sécessiondu pays entre révolutionnaires et nationalistes ; la guerre de Casamanceau Sénégal serait du même type.On a pu faire observer que <strong>le</strong>s années 1990 auront marqué un tournant décisifdans lʼétude des conflits civils en Afrique de lʼOuest, conflits qui eux aussine justifient pas tous de mêmes conflictualités. La lutte par exemp<strong>le</strong> au Libériaavait pris la forme dʼune révolution radica<strong>le</strong> de la structure du pouvoir,accusé dʼorganiser la domination dʼune ethnie sur <strong>le</strong>s autres. Cʼest la mêmestructure quʼaura présenté <strong>le</strong> conflit ivoirien dont la rébellion avait <strong>pour</strong> but demettre fin aux injustices, <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s occasionnaient une certaine dominationdes populations du Sud sur cel<strong>le</strong>s de la Côte dʼIvoire.Mais comme on peut donc bien <strong>le</strong> constater, la question relative au modè<strong>le</strong> dʼarméequi convienne à une Afrique de lʼOuest foyer régional et systémique delʼinstabilité politique, espace intégré dans <strong>le</strong> champ stratégique du conflit globa<strong>le</strong>t de guerres asymétriques contre <strong>le</strong>s terroristes islamiques, <strong>le</strong>s criminels surfond des guerres civi<strong>le</strong>s aux motivations diversifiées, sʼimpose en plus parceque la Région semb<strong>le</strong> réussir son intégration économique régiona<strong>le</strong> sans quecela ne corresponde ou coïncide avec des efforts dʼintégration diplomatique etstratégique. Cet oubli regrettab<strong>le</strong> dʼune dimension très importante de lʼintégrationéconomique africaine en dépit des orientations en la matière du TraitédʼAbuja portant établissement dʼune Communauté économique africaine, posela question de savoir si <strong>le</strong>s Etats Ouest africains membres de la CEDEAO peu-Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR129Voir Antonin TISSERON, « Guerres urbaines, nouveauxmétiers, nouveaux soldats »219


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineBaudouin Philippe BIYOYAMAKUTUest un Professeur Congolais, Directeur duCentre dʼEtudes Politiques en Afrique Centra<strong>le</strong>(CEPAC) à lʼUniversité de Lubumbashiet Directeur de lʼInstitut Panafricaindes Relations Internationa<strong>le</strong>s et Stratégiques« IPRIS ».Analyste politique réputé et Professeur Ordinaireà lʼUniversité de Lubumbashi etlʼUniversité Protestante au Congo, ancienStagiaire à lʼInstitut de Recherche et duDéveloppement Politique, Université RuhrBochum (RFA). Spécialiste en études stratégiqueset sécurité internationa<strong>le</strong>, en politiqueétrangère des grandes puissances,titulaire des cours de géoplitique et degéostratégie et de sociologie des conflitsdes relations internationa<strong>le</strong>s.vent al<strong>le</strong>r bien loin de lʼexpérience réussie de lʼopération Ecomog dʼautrefois etcompléter lʼapproche de gestion des crises par une approche stratégique régiona<strong>le</strong>dʼune guerre à mener individuel<strong>le</strong>ment ou col<strong>le</strong>ctivement, fut-el<strong>le</strong> uneguerre transnationa<strong>le</strong> ou comme de plus en plus de guerres urbaines, guerresdans <strong>le</strong>s populations qui appel<strong>le</strong>nt à des nouveaux métiers et à des nouveauxsoldats? 129 .Et comme sʼinterroge <strong>pour</strong> lʼarmée française Bruno Lesvez, quel<strong>le</strong>s forcesterrestres face aux enjeux de demain ? ou Comment se préparer à affronter<strong>le</strong>s crises futures ? la réponse est cel<strong>le</strong> quʼapporte Antonin Tisseron : « depuisla fin de la guerre froide, <strong>le</strong>s armées occidenta<strong>le</strong>s ont mené de nombreusesopérations en zone urbaine. Cel<strong>le</strong>s-ci ne sont pas nouvel<strong>le</strong>s, mais <strong>le</strong>ur nombresʼest accru en raison de lʼévolution du contexte géopolitique et de ses répercussionssur lʼutilisation de lʼoutil militaire ». Car, avec la disparition desmenaces étatiques aux frontières et la fin de la bipolarisation du monde, <strong>le</strong>paradigme de la dissuasion a été remplacé par celui de lʼintervention. Lesforces armées interviennent dans un pays étranger <strong>pour</strong> stabiliser <strong>le</strong>s relationsinternationa<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> cadre dʼopération de jeux, <strong>pour</strong> évacuer desressortissants dʼun pays en proie à des troub<strong>le</strong>s internes, ou <strong>pour</strong> renverserdes dirigeants jugés dangereux. Dans ce cadre <strong>pour</strong>suit-il, <strong>le</strong>s armées ont<strong>pour</strong> fonction principa<strong>le</strong> de maîtriser la vio<strong>le</strong>nce. El<strong>le</strong>s doivent rétablir un ordrepolitique et social durab<strong>le</strong>. Lʼintervention dont est question nʼest pas cel<strong>le</strong> africainedans la politique mais bel et bien une intervention militaire. Il sʼagit làdʼune nouvel<strong>le</strong> exigence et de la preuve dʼune volonté africaine de puissance.Ce changement de paradigme militaire ne devrait pas en Afrique et cel<strong>le</strong> àlʼOuest ne concerner que <strong>le</strong> métier de soldat en vil<strong>le</strong> dans son effet mode. Car<strong>le</strong>s questions que soulève lʼévolution du phénomène général de la guerre dans<strong>le</strong> monde, cʼest cel<strong>le</strong> de la comp<strong>le</strong>xité de di<strong>le</strong>mmes quʼel<strong>le</strong> suscite un peucomme dans <strong>le</strong> cadre du développement durab<strong>le</strong>, à savoir si, <strong>le</strong> réchauffementclimatique devrait contraindre à lʼarrêt ou au ra<strong>le</strong>ntissement de lʼeffort industrieldu Nord au profit de celui du Sud pauvre ou à la condamnation de la perspectiveindustriel<strong>le</strong> el<strong>le</strong>-même ? Les armées africaines auraient <strong>le</strong> devoir dʼatteindreà une croissance institutionnel<strong>le</strong> norma<strong>le</strong> et trouver dans la politiqueafricaine la place cardina<strong>le</strong> de <strong>le</strong>ur importance stratégique comme un pouvoir,un vrai pouvoir institutionnel dont dépend la croissance et la grandeur ou nonde lʼEtat africain post-indépendance. LʼAfrique de lʼOuest instruite par <strong>le</strong>s limitesdʼune stratégie dʼintervention et de gestion des crises dans un espace ouvertaux ingérences ou interventions étrangères et minées de lʼintérieur par la gangrènede la pauvreté et de la misère et où la démocratie sert encore de filon quialimente sa dépendance stratégique et parfois diplomatique aurait aujourdʼhui<strong>le</strong> devoir dʼaccomplir sa révolution stratégique en se donnant un nouveauconcept stratégique qui prenne en compte avant tout <strong>le</strong>s menaces de lʼeffondrementdes Etats, <strong>le</strong> devoir de présence-action sur la scène internationa<strong>le</strong>contrairement à la réalité de sa présence-absence, <strong>pour</strong> se guérir des tares accumuléesdepuis <strong>le</strong>s temps mémoriaux des indépendances.Cette révolution devrait certes confirmer lʼévolution vers la gestion des crises à traversla CEDEAO mais on ne devrait pas opter <strong>pour</strong> la défense régiona<strong>le</strong> sans examenpréalab<strong>le</strong> de la capacité régiona<strong>le</strong> des armées nationa<strong>le</strong>s avec son corollaire<strong>le</strong> redimensionnant des stratégies ou politiques de défenses nationa<strong>le</strong>s dans laperspective de régionalisation de la notion du sanctuaire nationa<strong>le</strong>.Il sʼimpose donc à lʼAfrique de lʼOuest de procéder avant tout à un récitgéopolitique du nouveau contexte mondial, africain et régional.220


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers3.10 Intervention du Colonel Birame DIOP, Directeur de AISST, SénégalQuel(s) modè<strong>le</strong>(s) d’Armée(s) (5)Résumé : To the question “What model of Armed Forces”, Colonel Birame DIOPanswers by giving five reasons why this question must be considered. Whi<strong>le</strong> it isundeniab<strong>le</strong> that considerab<strong>le</strong> efforts are being made in most countries of WestAfrica to reform the army and make it more capab<strong>le</strong> to fulfill its tasks under thebest conditions possib<strong>le</strong>, the reality is unfortunately that several West African armiescontinue to be politicized, many of them continue to perpetrate coups d’état,some of them, instead of ensuring the safety of peop<strong>le</strong> and their country are themselvesa source of insecurity and some are even source of recurring crises experiencedby the sub-region. Because they regularly engage abuse and vio<strong>le</strong>nce inrelations with their peop<strong>le</strong>s, they are in bad relationship with their populations.Colonel DIOP is stating that there can not be one type of army that would be re<strong>le</strong>vantin all 15 countries of West Africa. This would be risky to the extent that thecountries of the subregion have different histories, different cultures and differentsocioeconomic and sociopolitical environments.In the first part of his intervention he therefore speaks about the process that heproposes to be followed to achieve a type of army for each of the countries ofWest Africa, which ref<strong>le</strong>cts their security needs ans which he calls a process oftheorizing or conceptualisation of armed forces.In the second part he discusses 15 princip<strong>le</strong>s that he considers to be most importantfor armed forces of West Africa to be professional and ab<strong>le</strong> to fulfill its missionsin a sub-region which is undergoing deep alterations in the areas of politics,economics and social development.In the third part he adresses some key chal<strong>le</strong>nges that can make the imp<strong>le</strong>mentationof this model of West African armed forces difficult.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARPrétexte : Pourquoi sʼintéresser aujourdʼhui à cette question?Les raisons peuvent être multip<strong>le</strong>s, toutefois je ne retiendrai que cinq que jeconsidère comme étant <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>sSʼil est indéniab<strong>le</strong> que des efforts appréciab<strong>le</strong>s sont faits dans la majeure partiedes pays de lʼAfrique de lʼouest <strong>pour</strong> réformer lʼarmée et la rendre plus àmême de remplir ses missions dans <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures conditions possib<strong>le</strong>s, laréalité demeure malheureusement que Plusieurs armées ouest africaines continuent dʼêtre politisées Plusieurs dʼentre el<strong>le</strong>s continuent de perpétrer des coups dʼétats Certaines dʼentre el<strong>le</strong>s, au lieu dʼassurer la sécurité des populations etde <strong>le</strong>urs pays, constituent el<strong>le</strong>s mêmes une source dʼinsécurité. Certaines dʼentre el<strong>le</strong>s sont à lʼorigine des récurrentes crises que vit lasous région A cause des abus et vio<strong>le</strong>nces quʼel<strong>le</strong>s exercent régulièrement sur <strong>le</strong>spopulations <strong>le</strong>urs relations avec ces dernières ne sont pas des meil<strong>le</strong>ures.Mon intention nʼest pas de proposer ici un modè<strong>le</strong> dʼarmée qui serait pertinentdans tous <strong>le</strong>s 15 pays de lʼAfrique de lʼouest. Cette démarche serait hasardeusedans la mesure où <strong>le</strong>s pays de la sous-région ont des histoiresdifférentes, des cultures différentes, des environnements socioéconomiqueset sociopolitiques différents mais surtout des missions différentes.Ma démarche consistera dès lors à, dans une première partie, par<strong>le</strong>r du processusque jʼestime de voir être suivi <strong>pour</strong> aboutir à un modè<strong>le</strong> dʼarmée, dans chacundes pays de lʼAfrique de lʼouest, qui corresponde à <strong>le</strong>urs besoins sécuritaires.African Institute for Security SectorTransformation221


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineJʼappel<strong>le</strong> ce processus un processus de théorisation ou de conceptualisationdʼune armée.Dans une deuxième partie je par<strong>le</strong>rai des 15 principes que je considèrecomme étant <strong>le</strong>s plus importants quʼune armée ouest africaine devraitrespecter <strong>pour</strong> être professionnel<strong>le</strong> et apte à remplir ses missions dans unerégion en p<strong>le</strong>ine mutation sur <strong>le</strong>s plans, politique, économique et social.Dans une troisième partie je par<strong>le</strong>rai de quelques défis majeurs qui peuventrendre diffici<strong>le</strong> la mise en place de ce modè<strong>le</strong> dʼarmée ouest Africain.I - Processus de conceptualisation permettant d’aboutir à unearmée pertinenteLes armées en Afrique de lʼouest, comme la majeure partie des armées ducontinent, ont été héritées des puissances colonia<strong>le</strong>s.El<strong>le</strong>s nʼont pas été créées par <strong>le</strong>s états Africains <strong>pour</strong> répondre à des besoinssécuritaires clairement identifiés.El<strong>le</strong>s ont, au contraire, été mises en place par <strong>le</strong>s puissances colonia<strong>le</strong>s <strong>pour</strong>principa<strong>le</strong>ment réprimer toute velléité de manifestation de mécontentementcontre <strong>le</strong>s régimes en place; Et, aux <strong>le</strong>ndemains des indépendances el<strong>le</strong>s ontété tout simp<strong>le</strong>ment transférées aux jeunes états africains indépendants qui,<strong>pour</strong> plusieurs dʼentre eux, nʼen ont pas fait un très bon usage.En fait, <strong>le</strong> seul choix qui était offert aux pays Africains était dʼadapter cesarmées à <strong>le</strong>urs besoins sécuritaires. Certains lʼont relativement bien réussi,dʼautres moins.Après cinquante années dʼindépendance il sʼagit donc, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s pays dʼAfriqueet plus particulièrement <strong>pour</strong> ceux de lʼAfrique de lʼouest, de <strong>pour</strong>suivre cesefforts dʼadaptation et,à terme, parvenir à faire de sorte que <strong>le</strong>urs arméessoient <strong>le</strong> produit dʼun processus de conceptualisation rigoureux et cohérent dusecteur de sécurité en général.Quel<strong>le</strong>s doivent alors être <strong>le</strong>s différentes étapes de cette théorisation ouconceptualisation, <strong>pour</strong> que <strong>le</strong>s armées ouest africaines soient pertinentes,cohérentes et aptes à p<strong>le</strong>inement jouer <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s autorités civi<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>spopulations attendent dʼel<strong>le</strong>s ?D’abord il s’agit de définir, au niveau de chaque pays une stratégie oupolitique de sécurité nationa<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> consiste à identifier <strong>le</strong>s intérêts dʼunpays, <strong>le</strong>s menaces auxquel<strong>le</strong>s il fait face mais aussi <strong>le</strong>s opportunités quʼilaimerait saisir et dʼétudier ensuite comment avec <strong>le</strong>s différents instrumentsde pouvoir dont <strong>le</strong> pays dispose (DIMEC) prendre en charge ces intérêts,menaces et opportunités.Cette stratégie de sécurité nationa<strong>le</strong> doit être testée (pertinence, réalisme etacceptabilité) avant dʼêtre publiée. El<strong>le</strong> donne des orientations généra<strong>le</strong>s etdéfinit <strong>le</strong>s alliances et partenariats.La deuxième étape de la conceptualisation consiste à mettre en place unconcept de défense nationa<strong>le</strong>. Le concept détermine de manière plusprécise ce quʼil faut faire <strong>pour</strong> prendre en charge <strong>le</strong>s intérêts, <strong>le</strong>s menaces et<strong>le</strong>s opportunités. Cʼest en dʼautres termes la coordination de lʼensemb<strong>le</strong> desactions qui doivent être menées par <strong>le</strong>s différentes composantes de lʼétat <strong>pour</strong>soutenir au mieux la stratégie de sécurité nationa<strong>le</strong>. Il sʼagit de mettre ensynergie toutes <strong>le</strong>s actions possib<strong>le</strong>s et de mobiliser toutes <strong>le</strong>s ressourcesdisponib<strong>le</strong>sau niveau des différents ministères <strong>pour</strong>appuyer efficacement lastratégie de sécurité nationa<strong>le</strong>.222


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersLa troisième étape de la conceptualisation sʼintéresse au comment mettre enœuvre, dans <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures conditions possib<strong>le</strong>s, la stratégie de sécuriténationa<strong>le</strong>. Ce sont tous <strong>le</strong>s principes retenus <strong>pour</strong> cette mise en œuvre quʼonappel<strong>le</strong> la doctrine. Il y a eu des doctrines bien connues a travers <strong>le</strong> mondecomme <strong>le</strong>s doctrines Monroe,Truman et Jdanov.Une doctrine est la base dela stratégie de sécurité nationa<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> comporte un ou plusieurs principes fortsqui portent la politique de sécurité nationa<strong>le</strong> dʼun pays.Dans plusieurs pays la stratégie de sécurité nationa<strong>le</strong>, <strong>le</strong> concept de défensenationa<strong>le</strong> et la doctrine sont consignés dans un même document appelé LivreBlanc.Une fois que ce package est mis en place, <strong>le</strong>s différents ministères sʼyappuient <strong>pour</strong> développer une stratégie généra<strong>le</strong>.Le ministère des forces armées définit une stratégie généra<strong>le</strong> militaire,communément appelée stratégie militaire, ainsi quʼune stratégie génétique.La première lui permet de se fixer des objectifs et de définir <strong>le</strong>s capacités et<strong>le</strong>s voies qui lui permettent de <strong>le</strong>s atteindre et de soutenir <strong>le</strong> pays dans sesobjectifs quʼil sʼest fixé au niveau du concept de défense nationa<strong>le</strong>. Ladeuxième lui permet de procéder à la définition de son organisation, de sonéquipement et deses budgetsCe nʼest que de ce processus que <strong>pour</strong>rait décou<strong>le</strong>r un modè<strong>le</strong> dʼarméepertinent <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s pays dʼAfrique de lʼouest. Toutefois, <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> dʼarmée issude ce processus ne peut être efficace que si <strong>le</strong>s armées, une fois créées,mettent en place <strong>le</strong>s concepts d’emploi, <strong>le</strong>s doctrines d’emploi et <strong>le</strong>s mémentosd’emploi tactiques qui <strong>le</strong>urs permettent de fonctionner norma<strong>le</strong>ment.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARNB : Le processus de conceptualisation, dans ses différentes phases,est basé sur lʼenvironnement social, économique, politique et sécuritairedu moment. Cet environnement étant volatil, ambigu, comp<strong>le</strong>xe et incertain,il convient dès lors de mettre en place des structures même réduiteschargées de lʼévaluer en permanence <strong>pour</strong> apporter <strong>le</strong>sadaptations nécessaires à toutes <strong>le</strong>s stratégies, à tous <strong>le</strong>s concepts età toutes <strong>le</strong>s doctrines citées précédemment.II -Quels principes doivent être respectés par <strong>le</strong>s arméesouest Africaines <strong>pour</strong> être professionnel<strong>le</strong>s ?+ Performances+ Respect des populations (droits humains, droit international humanitaire)+ Bonne Organisation+ F<strong>le</strong>xibilité+ Bonne Education+ Synergie+ Sérieux+ Inclusion+ Contrô<strong>le</strong> objectif+ National+ Responsabilité+ Bonne vision à long terme+ Intégrité+ Bonnes conditions socia<strong>le</strong>s+ Motivation et ModernitéBirame DIOPest un Colonel de lʼArmée de lʼAir sénégalaise,chef du bureau opérations (Air) àlʼEtat-major Général des Armées (EMGA).Il est éga<strong>le</strong>ment directeur de lʼInstitut Africain<strong>pour</strong> la Transformation dans <strong>le</strong> cadredes partenariats <strong>pour</strong> <strong>le</strong> changement démocratique(AISST).223


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineIII - Défis majeurs pouvant rendre la mise en place de ce modè<strong>le</strong>d’armée assez délicate+ Insuffisance des ressources dʼune part et multiplication des prioritésdʼautre part+ Budgets <strong>pour</strong> une large partie dépendants de lʼaide internationa<strong>le</strong> etdonc incertains dans certains cas+ Taux dʼanalphabétisme encore é<strong>le</strong>vés dans la plupart des pays de larégion+ Tensions ethniques encore persistantes+ Tensions politiques+ Problèmes de gouvernance+ Rô<strong>le</strong> de la société civi<strong>le</strong>+ Perception négative quʼont <strong>le</strong>s populations <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s armées+ Etc.224


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersATELIERS SUR LA RÉFORME DU SECTEUR DE SÉCURITÉAtelier 5 : « : Les défis de la formation éthiqueet de la reconversion post-conflit »3.11 Intervention du Général Franz-Xaver PFRENGLE, Commandantdes Eco<strong>le</strong>s militaires de l'Armee de terre, Dresde, Al<strong>le</strong>magneRésumé : In his second intervention, General Franz-Xaver PFRENGLE talks of„ethics and deontology: the chal<strong>le</strong>nges for education“. The first question he raiseson this subject is „why this kind of formation and what place do we have to giveit?“. Does this kind of formation only serve to the accomplishment of military missions?Should one produce „technicians of force and combat“? Three conditionsare set to the answer for the raised questions: The first condition is to accept theobjective moral values that are ab<strong>le</strong> to unite humanity. The second condition impliesto surpass the limits of humankind in its search of the truth of what is right andwhat is wrong. The third is that everyone needs to be to<strong>le</strong>rant. Besides the fourmain virtues (prudence, temperance, force and justice), today's future officers havealso got to have modern virtues such as liberty, courage, fidelity, responsibility, integrityand confidence. German officers have to accomplish a basic six month longmilitary formation, already during this phase, the civic education plays a major ro<strong>le</strong>.The second step takes nine months and consists of the education of the future officers.Military know-how, politics, history, law, society, commandment as well asstudying different cultures and languages is part of the eductaional program duringthat phase. Afterwards, the young officers have the choice to go to the Bundeswehruniversities and study in four years time, ending by an offical Master tit<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREthique et déontologie : <strong>le</strong>s défis de la formation (1)INTRODUCTIONLa première question quʼil convient de se poser au début dʼune interventionqui porte sur <strong>le</strong>s défis de la formation des militaires dans ses aspectsd’éthique et de déontologie est la suivante : « <strong>pour</strong>quoi cette formationet quel<strong>le</strong> place lui donner ? ».+ Sert-el<strong>le</strong> seu<strong>le</strong>ment à lʼaccomplissement de missions militaires ?+ Doit-on produire des « techniciens de la force et du combat » ?+ Doit-on plutôt créer des serviteurs ? Si oui, au service de qui ?+ Permet-el<strong>le</strong> de devenir différent et de faire plus ? Sʼagit-il de remplirses missions militaires en sʼappuyant sur des questions dʼéthique etde mora<strong>le</strong>, de liberté et de droit, de tolérance et de respect enverslʼétat, envers la démocratie et surtout envers chaque individu souscouvert des droits de lʼhomme et de la dignité humaine ?La réponse à ces questions est primordia<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> présuppose trois conditions.La première est quʼon accepte <strong>le</strong> principe quʼil existe des va<strong>le</strong>ursmora<strong>le</strong>s objectives capab<strong>le</strong>s dʼunir <strong>le</strong>s hommes.La seconde implique de dépasser <strong>le</strong>s limitations de lʼhomme danssa quête de la vérité sur ce qui est bien et ce qui est mauvais.La troisième est que chacun fasse preuve de tolérance.225


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineDes défis se posent à un Etat dans <strong>le</strong> domaine de lʼéducation à lʼéthique deses forces armées et de sécurité.Le deuxième défi est dʼoffrir aux responsab<strong>le</strong>s civils et militaires, par lʼétudedes principes et des fondements de lʼexercice de lʼautorité, <strong>le</strong>s conditions de<strong>le</strong>ur réussite dans la recherche dʼune éthique universel<strong>le</strong>.Mais je me propose dʼajouter quelques aspects complémentaires, et jeconcentrerai ma réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s aspects de la formation et plus particulièrement,comme je préfère <strong>le</strong> dire, de lʼéducation des officiers.Un officier doit dʼabord servir son pays, et uniquement son pays. Il doit se mettreau service des droits de lʼhomme, de la dignité humaine, de la liberté, quicomprend la liberté de chaque (de tous <strong>le</strong>s) citoyen(s), de la justice, et dela tolérance. Lʼofficier est un citoyen en uniforme et en tant que citoyen, il estau service de ses compatriotes.Ses compétences ne doivent donc jamais se limiter aux savoir-faire militaires,à ses aptitudes au commandement ou à la maîtrise de systèmes dʼinformationet de commandement. Le développement de sa personnalité et de son caractèreest autrement plus important. Les savoir-faire permettent de gérerune situation, et <strong>le</strong> caractère permet de la maîtriser !Cette formation mora<strong>le</strong> permet de donner <strong>le</strong>s éléments de la force mora<strong>le</strong>comprise comme une aide à la décision. Il sʼagit de développer <strong>le</strong>s vertus quicaractérisent lʼaction du chef : lʼautorité, lʼexemplarité, la sollicitude, la responsabilité,la connaissance et lʼanticipation.Lʼofficier de nos jours doit être un soldat du droit et un combattant <strong>pour</strong> la dignitéhumaine, la liberté, la pluralité et la tolérance. Le savoir-faire militaire nevaut rien sans une mora<strong>le</strong> fondée sur des principes éthiques qui sont euxmêmesfondés sur <strong>le</strong>s quatre vertus cardina<strong>le</strong>s. Et lʼofficier ne doit jamaisservir une seu<strong>le</strong> personne, un parti ou groupe politique ou un groupe dʼintérêts.Il doit seu<strong>le</strong>ment servir son pays et son peup<strong>le</strong> dans un état de droit oùdémocratie et liberté sont des va<strong>le</strong>urs fondamenta<strong>le</strong>s. Il doit donc cultiver desliens forts avec la communauté nationa<strong>le</strong>. Ces aspects sont un des piliers denotre « philosophie du commandement », dont <strong>le</strong> deuxième pilier est <strong>le</strong>«commandement participatif par objectifs » et qui sʼappuie sur la confiancemutuel<strong>le</strong> entre chef et soldats, sur une même conception des droits et desdevoirs et sur une même compréhension de <strong>le</strong>ur définition. La déontologiedicte au responsab<strong>le</strong> militaire de ne pas donner dʼordre illégal et au subordonnéde ne pas exécuter un ordre contraire aux droits de lʼhomme.Nous essayons de prendre en compte tous ces aspects dans lʼéducation et laformation de nos officiers. Cette formation a <strong>pour</strong> objectif la personnalité danstoute son acception, à savoir lʼâme, lʼesprit et <strong>le</strong> corps. En complément desquatre vertus cardina<strong>le</strong>s que sont la prudence, la tempérance, la force et lajustice, lʼélève-officier doit faire siennes dʼautres vertus comme la liberté, <strong>le</strong>courage, la fidélité, la responsabilité, lʼintégrité, la discrétion et la confiance.Ce sont quelques uns des mots clés de tout enseignement.Les officiers suivent dʼabord une formation militaire de base dʼune durée de sixmois. Pendant cette phase ils acquièrent <strong>le</strong>s bases du métier du soldat autant que militaires de rang. Mais lʼéducation civique joue déjà un rô<strong>le</strong> importantet traite de questions politiques, du fonctionnement du système démocratiqueet de la société, du droit et de la justice.La deuxième étape, dʼune durée de neuf mois, consiste dans lʼéducation delʼofficier et comprend tous <strong>le</strong>s aspects : <strong>le</strong>s savoir-faire militaires, la politique,226


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierslʼhistoire, <strong>le</strong> droit, la société, <strong>le</strong> commandement, lʼapprentissage dʼautres cultureset <strong>le</strong>s langues. Le fondement de toute cette éducation est la Constitutionde notre pays, notamment dans son premier artic<strong>le</strong> qui définit que la dignitéde lʼhomme est intangib<strong>le</strong> et que la démocratie et la liberté sont des va<strong>le</strong>ursde base.Ensuite <strong>le</strong>s élèves-officiers suivent quatre ans de formation académique danslʼune des deux universités de la Bundeswehr. Ces études universitaires débouchentsur lʼobtention dʼun Master, reconnu et sont en tous points semblab<strong>le</strong>saux études suivies dans <strong>le</strong>s universités civi<strong>le</strong>s. Avec ces études, nousélargissons <strong>le</strong>s connaissances de nos officiers au-delà du métier militaire.Nous <strong>le</strong>s instruisons dans <strong>le</strong>s processus et approches « non militaires » etnous élargissons <strong>le</strong>ur « horizon intel<strong>le</strong>ctuel » et <strong>le</strong>ur ouverture dʼesprit.Après <strong>le</strong>s études universitaires, <strong>le</strong>s officiers suivent deux autres stages militaires,au cours desquels ils sont essentiel<strong>le</strong>ment préparés à <strong>le</strong>ur future affectationà un poste de commandement de chef de section et de commandant decompagnie dans une unité de <strong>le</strong>ur arme. Cʼest donc plutôt <strong>le</strong> savoir-faire militairequi est au premier plan, mais avec toujours en arrière plan, <strong>le</strong>s principesde base et <strong>le</strong>s quatre vertus cardina<strong>le</strong>s. Ils doivent toujours avoir en tête, quela force, surtout lʼusage de la force léta<strong>le</strong> par <strong>le</strong>s forces armées, doit rester <strong>le</strong>dernier recours et quʼel<strong>le</strong> doit reposer sur la légalité et une légitimité absolue.Toute cette formation et tous <strong>le</strong>s investissements au profit des jeunes officiers– et éga<strong>le</strong>ment des sous-officiers - ne sont rien sans lʼéducation qui se faitpar lʼexemp<strong>le</strong> du chef, surtout par son comportement exemplaire dans <strong>le</strong>sdomaines humains et militaires.Cela passe par <strong>le</strong> respect de la personnalité y compris cel<strong>le</strong> de lʼennemi oude lʼadversaire, par <strong>le</strong> respect des droits de lʼhomme et de la dignité dechacun et par <strong>le</strong> respect dʼautres cultures, religions et traditions ainsi que parla protection de lʼenvironnement et des sources de vie.Vient ensuite, mais seu<strong>le</strong>ment ensuite, la maîtrise du métier militaire proprementdit.Je voudrais citer deux exemp<strong>le</strong>s complètement différents qui viennent enappui de mon propos et qui montrent que lʼapproche que je viens de décriresemb<strong>le</strong> être la bonne : suite à la réunification de notre pays, il a fallu fusionnerdeux systèmes antagonistes. Lʼintégration de la NVA sʼest faite sans heurtet a été une réussite qui a pu servir dʼexemp<strong>le</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong> reste des institutions.De la même façon, en Afghanistan, il est évident que la guerre dont lʼobjectiffinal est la sécurité du peup<strong>le</strong> Afghan, ne peut pas être gagnée par la forcemilitaire seu<strong>le</strong>ment, mais quʼil faut aussi gagner <strong>le</strong>s cœurs.En conclusion, lʼéthique dit comment se comporter, el<strong>le</strong> donne des lignes deconduite et la déontologie est lʼensemb<strong>le</strong> des obligations que lʼon sʼengage àrespecter <strong>pour</strong> garantir une pratique conforme à nos codes éthiques.La formation à ces deux matières revêt donc un aspect fondamental danslʼéducation des officiers mais lʼenjeu va au-delà, car cette compétence ne doitpas sʼadresser exclusivement à ceux qui détiennent <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> de lavio<strong>le</strong>nce légitime.Le sujet est vaste et passionnant et je nʼai pas cherché à me montrer exhaustif.Jʼespère avoir contribué à fournir quelques axes de réf<strong>le</strong>xion en complément deceux amenés par <strong>le</strong>s autres intervenants, et que tous ces éléments réunis <strong>pour</strong>rontnous servir de base <strong>pour</strong> entamer une discussion intense et riche dʼéchanges.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARFranz Xaver PFRENGLEGénéral de brigade des Forces fédéra<strong>le</strong>sal<strong>le</strong>mandes (Bundeswehr) il commandeactuel<strong>le</strong>ment lʼEco<strong>le</strong> des Officiers delʼArmée de Terre de Dresden.Après ses études du génie mécanique àlʼuniversité des forces fédéra<strong>le</strong>s à Ham -bourg, notamment dans des Etats-majorde Division (12 e division blindée deSigmaringen) et de Corps dʼarmée (Corpseuropéen de Strasbourg). Chef de corpsdu 12e bataillon du génie lourd et rédacteurau niveau des Etats-majors centrauxdes Armées / du Ministère de la défense ilretourne à Paris <strong>pour</strong> suivre <strong>le</strong>s cours duCentre des hautes études militaires(CHEM) et de lʼInstitut des hautes étudesde la défense nationa<strong>le</strong> (IHEDN).En 2005, il prend <strong>le</strong> poste dʼadjoint augénéral commandant la Brigade Franco-Al<strong>le</strong>mande avant de partir en 2007 auxEtats Unis <strong>pour</strong> suivre <strong>le</strong> stage« dʼInternational Fellow » au Collège delʼArmée de Terre américaine (UnitedStates Army War Col<strong>le</strong>ge, Carlis<strong>le</strong>) et deprendre ensuite <strong>le</strong> commandement delʼEco<strong>le</strong> des Officiers de Dresde.227


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.12 Intervention de Monsieur Hamadi KONTE, Aumônier miltaire duculte musulman, de l‘Armée de Terre, FranceRésumé : „Defense and security forces in the focus of human security“ is the tit<strong>le</strong>of the intervention of Hamadi KONTE, muslim chaplain of the french army. He analysesthe differences and the common points of universal ethics and the properethics of a sing<strong>le</strong> culture. Ethics were also a critical reasoning of the morality of certainactions. KONTE defines the term of deontology as the totality of obligationsthat the professionals are engaged to respect in order to guarantee a practice thatis conform to the ethical codex. Then he explains the main points of ethics in islam:Every human being is born „pure“, that is to say without any sin. Everybody is responsib<strong>le</strong>for his actions. All human beings should <strong>le</strong>ad a life oriented towards thesemain virtues: goodness, chastity, honesty, humility, compassion, courage, veracity,patience, courtesy and tidiness. In the second part of his intervention, HamadiKONTE explains the conception of war in the islam. This includes the differentmeanings of the word jihad (effort, fight), which doesn't only stand for an armedbatt<strong>le</strong>, bu also for an political, a military, a scientific and even a social batt<strong>le</strong>. Theru<strong>le</strong>s of jihad c<strong>le</strong>arly prohibit attacks on the civil population and the destruction ofpublic goods. The third part of the intervention treats the ro<strong>le</strong> of ethics and deontologyduring the military formation.Éthique et déontologie : <strong>le</strong>s défis de la formation (2)Je voudrais remercier <strong>le</strong>s organisateurs du Forum Europe Afrique sur <strong>le</strong>thème: Les forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Sécurité Humainequi mʼont permis de me retrouver parmi vous <strong>pour</strong> réfléchir ensemb<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>thème éthique et Déontologie <strong>le</strong> défi de la formation, sujet aussi intéressantque préoccupant de nos jours.Si jʼai été choisi <strong>pour</strong> évoquer ce thème ce nʼest sûrement pas <strong>pour</strong> développertous <strong>le</strong>s aspects ? En serais-je capab<strong>le</strong> ? Mais plutôt de part mes fonctionsdʼAumônier de lʼInstitution Militaire dʼapporter mon point de vue et surtoutla pratique de lʼIslam et de ces concepts.Mon intervention portera sur :– La définition des concepts– La conception de la Guerre dans l’Islam– La prise en charge dans la formation des militaires de l’éthique et de ladéontologie– Une ConclusionDéfinitionsLʼéthique (action et règ<strong>le</strong>s) se donne <strong>pour</strong> but dʼindiquer comment <strong>le</strong>s êtres humainsdoivent se comporter, agir et être, entre eux et envers ce qui <strong>le</strong>s entoure.Il existe différentes formes dʼéthique qui se distingue par <strong>le</strong>ur degré de généralité,par <strong>le</strong>ur objet ou par <strong>le</strong>ur fondement culturel.Dans tous <strong>le</strong>s cas, lʼéthique vise à répondre à la question « Comment agir aumieux ! ».Aumônerie Militaire du Cultemusulman de l’Armée françaiseLʼéthique généra<strong>le</strong> établit <strong>le</strong>s critères <strong>pour</strong> agir librement dans une situationpratique et faire <strong>le</strong> choix dʼun comportement dans <strong>le</strong> respect de soi même etdʼautrui. La finalité de lʼéthique fait donc dʼel<strong>le</strong>-même une activité pratique. Ilne sʼagit pas dʼacquérir un savoir <strong>pour</strong> lui-même mais dʼagir avec laconscience dʼune action sociéta<strong>le</strong> responsab<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> est considérée de nos228


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersjours, comme la discipline au fondement de lʼéthique appliquée, de lʼéthiqueindividuel<strong>le</strong>, de lʼéthique socia<strong>le</strong> et des différentes formes dʼéthique spécialiséesqui se confrontent aux problèmes normatifs de <strong>le</strong>ur domaine particulier.Ici la force de défense et de sécurité.Lʼéthique et la recherche du bien par un raisonnement conscient. Les rapportsentre mora<strong>le</strong> et éthique sont délicats.Trois mots reviennent fréquemment dans <strong>le</strong> discours sur lʼaction humaine :Ethique, mora<strong>le</strong>, déontologie et ceux-ci sont parfois pris comme synonymesdʼail<strong>le</strong>urs historiquement <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s deux premiers, ils ont été employés trèssouvent lʼun <strong>pour</strong> lʼautre.Etymologiquement, <strong>le</strong>s mots éthique (dʼorigine Grecque) et mora<strong>le</strong> (dʼoriginelatine) renvoient aux mœurs, à lʼanalyse des mœurs, aux réf<strong>le</strong>xions sur laconduite humaine.Le mot déontologie (du grec Déon deonlos) désigne lui aussi des règ<strong>le</strong>s,devoirs et obligations. Les trois mots renvoient au comportement à lʼactionhumaine, à la prise de décision. Ils concernent ce quʼil faut faire, ce quʼon doitfaire (<strong>le</strong> devoir, <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs), par opposition à ce qui se fait (<strong>le</strong>s mœurs).Ethiques universel<strong>le</strong>s (droit de lʼhomme)Ethiques propres à une cultureForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAujourdʼhui, on emploie <strong>le</strong> terme « éthique » généra<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> qualifier desréf<strong>le</strong>xions théoriques portant sur la va<strong>le</strong>ur des pratiques et sur <strong>le</strong>s conditionsde ces pratiques ; lʼéthique est aussi un raisonnement critique sur la moralitédes actions :Exemp<strong>le</strong> : Comité dʼéthique au sein dʼinstitutions scientifiques ou dʼhôpitaux.Lʼéthique aurait donc ses fondements dans une décision dite rationnel<strong>le</strong> priseà partir dʼun libre dialogue entre des individus conscients des savoirs et de culturesparfois riches de traditions et des codes idéologiques assimilés.La déontologie est lʼensemb<strong>le</strong> des obligations que <strong>le</strong>s professionnels sʼengagentà respecter <strong>pour</strong> garantir une pratique conforme au code dʼéthique de laprofession, lʼArmée, <strong>pour</strong> ce qui nous concerne.Lʼéthique déontologique est une réf<strong>le</strong>xion critique sur <strong>le</strong>s conditions de possibilitéde la mora<strong>le</strong> mettant lʼaccent sur <strong>le</strong> devoir.Notre époque vit un développement de lʼéthique appliquée en rapport avec despréoccupations environnementa<strong>le</strong>s et socia<strong>le</strong>s. Dans <strong>le</strong>s activités professionnel<strong>le</strong>set la gouvernance, la déontologie établit des codes de comportements.+ Ethique des devoirs+ Ethique des droitsI - L’ÉTHIQUE DE L’ISLAMPour lʼIslam tout homme est né « pur » non pas dans <strong>le</strong> péché.Nous sommes responsab<strong>le</strong>s, vis-à-vis de Dieu (Allah <strong>le</strong> Très Haut) chacun<strong>pour</strong> ses actions et nous ne pouvons nous sauver par lʼexpiation dʼun tiers. Ilnous échoit de choisir entre <strong>le</strong> bien et <strong>le</strong> mal et dʼœuvrer <strong>pour</strong> notre salut àtravers la foi, la prière et la charité.229


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLa piété et la vertu ne signifient pas que nous devons abandonner <strong>le</strong>s joies licites.Nous devons plutôt mener une vie active, saine et uti<strong>le</strong> au cours de laquel<strong>le</strong>la bonté, la chasteté, lʼhonnêteté, lʼhumilité, la compassion, <strong>le</strong> courage,la véracité, la patience, la politesse et la propreté jouent un rô<strong>le</strong> prépondérantet où des fautes tel<strong>le</strong>s que la cruauté, lʼimmoralité, la déception, lʼorgueil, lacouardise, lʼavarice, la médisance et lʼinsensibilité sont évitées.LʼIslam empêche <strong>le</strong> luxe, <strong>le</strong> faste et lʼostentation. Quand à la déontologie,nous lʼaborderons dans la conception de la guerre dans lʼIslam.II - LA CONCEPTION DE LA GUERRE DANS L’ISLAM« Combattez dans <strong>le</strong> chemin de Dieu ceux qui vous combattent, ne soyez pastransgresseurs. Dieu nʼaime pas <strong>le</strong>s transgresseurs » (verset 190 sourate Lavache)Ce verset pose <strong>le</strong>s principes de lʼéthique et de la déontologie dans la conceptionde la guerre en Islam.LʼIslam nʼadmet la déclaration de guerre que <strong>pour</strong> repousser une agression et<strong>le</strong> combat nʼa lieu que lorsquʼil est nécessité par un besoin urgent et doit êtrelimité au minimum dans la mesure du possib<strong>le</strong>.Le Prophète Mohamed (sws) disait « la miséricorde nʼest arrachée que descœurs des méchants, ceux qui seront miséricordieux connaîtront la miséricordedu très haut, soyez miséricordieux envers <strong>le</strong>s hommes Dieu sera miséricordieuxenvers vous ».Lʼislam dés son apparition a brandi lʼétendard de la paix en proclamant « Entreztous en paix ».Le mot jihad veut dire lutte, effort.Cʼest lʼeffort fourni, la lutte engagée <strong>pour</strong> <strong>le</strong> bien contre <strong>le</strong> mal. Cʼest la lutte<strong>pour</strong> éradiquer lʼinjustice, lʼoppression, la pauvreté, lʼignorance, <strong>le</strong>s maladies,<strong>le</strong>s fléaux sociaux,…..Le jihad peut être de nature politique, militaire, économique, scientifique, social.Il y a <strong>le</strong> jihad avec la plume, la langue, avec la main, avec des dons.Tout acte de bienfaisance est un jihad.Lʼislam est une religion de paix, mais il ne saurait tolérer lʼinjustice sachantquʼil nʼy a pas de paix sans justice.« Nʼattentez pas à la vie dʼautrui que Dieu a déclaré sacrée sauf <strong>pour</strong> unejuste cause » S.6 V. 151.« Quiconque tue un homme qui lui-même na pas tué, ou qui nʼa pas commisde vio<strong>le</strong>nce sur la terre est considéré comme sʼil avait tué tous <strong>le</strong>s hommes ;celui qui sauve un seul homme est considéré comme sʼil avait sauvé tous <strong>le</strong>shommes » S.5 V.32.Les règ<strong>le</strong>s de jihad interdisent absolument <strong>le</strong>s attaques contre <strong>le</strong>s civils et ladestruction des biens.En islam, il est interdit de tuer des femmes, des enfants ainsi que toute personnene participant pas au combat.Le prophète (spl) avait lʼhabitude de donner <strong>le</strong>s consignes suivantes à ses230


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierstroupes avant de <strong>le</strong>s envoyer en guerre ; « Avancez au nom de Dieu. Ne tuezpas des personnes âgées, ni enfant, ni femme et ne dépassez pas <strong>le</strong>s limites»(Rapporté dans Al Muwatta de lʼImam Malik).Abubakr, premier calife de lʼislam de lʼislam à donné <strong>le</strong>s instructions à lʼarméeenvoyée en Syrie :« Vous al<strong>le</strong>z trouver un groupe de gens qui se sont consacrés à lʼadorationde Dieu (cʼest-à-dire des moines) laissez <strong>le</strong>s à ce quʼils font. »Dans une autre version, nous trouvons : « Je vous conseil<strong>le</strong> de respecter ces10 commandements »– Ne pas détruire dʼhabitations– Nʼégorger de mouton ou de chameaux que <strong>pour</strong> avoir de la nourriture– Ne pas couper <strong>le</strong>s palmiers– Ne pas abuser de la force– Ne pas avoir peur– Ne pas tuer dʼenfants– Ne pas tuer de femmes– Ne pas tuer de vieillards– Ne pas couper dʼarbres fruitiersForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR« Vous al<strong>le</strong>z passer par des gens qui se sont isolés dans des ermitages etadonnés à lʼadoration, laissez <strong>le</strong>s en paix. »En islam existe une éthique, une déontologie, du combat qui se résumecomme suit :Viser <strong>le</strong>s objectifs de la guerre en évitant lʼabus, la trahison, et la vengeanceoutrancière.Préserver lʼenvironnement et éviter <strong>le</strong>s actes de destruction et de sabotagecomme <strong>le</strong> fait dʼincendier <strong>le</strong>s arbres ou dʼabattre <strong>le</strong>s animaux sans nécessité.Epargner <strong>le</strong>s civils, femmes, enfants et vieillards.Être tolérant en matière de religion, respecter <strong>le</strong>s cultes sacrés avec laconsigne de ne pas attaquer et laisser en paix <strong>le</strong>s prêtres, <strong>le</strong>s rabbins tantquʼils ne portent pas <strong>le</strong>s armes et nʼaident pas lʼadversaire contre <strong>le</strong>s musulmans; Epargner <strong>le</strong>urs églises et <strong>le</strong>urs synagogues.III - LA PRISE EN CHARGE DANS LA FORMATION DESMILITAIRES DE L’ÉTHIQUE ET DE LA DÉONTOLOGIEAujourdʼhui <strong>le</strong> principe de lʼéthique et de la déontologie est de plus en plus diffici<strong>le</strong>à appliquer sur <strong>le</strong> théâtre des opérations.La plupart des » guerres » ou « combats » inter états se passent entre despopulations partageant <strong>le</strong> même espace délimité appelé Etat.La force multinationa<strong>le</strong> est présente <strong>pour</strong> sʼinterposer alors que lʼennemi oulʼadversaire nʼest pas forcément identifiab<strong>le</strong> et nʼest même pas réparab<strong>le</strong> dansun espace donné. Il peut être allié ou ennemi en fonction de ses propres intérêts.La mission des forces multinationa<strong>le</strong>s consiste à faire arrêter lʼagression, àempêcher lʼinjuste de commettre lʼinjustice et de protéger <strong>le</strong>s populations.Mais ces missions de guerre sont inséparab<strong>le</strong>s des erreurs et entrainentsouvent des pertes civi<strong>le</strong>s en vies humaines.231


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineLʼéthique et la déontologie sont au cœur de la responsabilité des militaires.Les militaires agissent généra<strong>le</strong>ment au non des Etats et plus particulièrementau nom des Institutions internationa<strong>le</strong>s tels que lʼONU,lʼOTAN, LʼUE ,lʼUA et autres.Ils tirent <strong>le</strong>ur légitimité des Etats,donc des nations et par voie deconséquence des peup<strong>le</strong>s. Cʼest parce que la force quʼils emploient est légitime,quʼil faut absolument <strong>le</strong>s former au code pénal et au droit international.Ils doivent bénéficier dʼune formation et dʼune information solides.Confrontés à des situations particulièrement diffici<strong>le</strong>s, il faut avoir des référencessolides à des va<strong>le</strong>urs <strong>pour</strong> éviter de céder à la tentation de vengeance.Lʼexemp<strong>le</strong> de prise du pont de Verbanja en 1995 est tout à fait symboliquedans lʼaction, <strong>le</strong> capitaine Lecointre voyant son jeune lieutenant b<strong>le</strong>ssé, deuxde ses hommes morts et quelques autres hors de combat, va réussir à trouverla ressource nécessaire <strong>pour</strong> guider ses hommes dans lʼaction et <strong>le</strong>s empêcherde toutes représail<strong>le</strong>s sur des prisonniers serbes.Le désir de vengeance, peut se trouver exacerbé chez un homme confrontéau décès de son frère dʼarme ; <strong>le</strong> mérite du capitaine Lecointre aura été dʼêtresuffisamment fort intérieurement <strong>pour</strong> fixer dans un moment crucial <strong>le</strong>s limitesde ce que la liberté autorisait et de ce que lʼéthique professionnel<strong>le</strong> du soldatfrançais imposait naturel<strong>le</strong>ment.Tout dʼabord une formation en droit international des droits de lʼhomme et endroit du conflit armé est dispensée à tous <strong>le</strong>s militaires lors de <strong>le</strong>ur formationinitia<strong>le</strong> en éco<strong>le</strong>. Lʼéthique du militaire se nourrit de sa culture dʼabord, de sonexpérience aussi. Lʼarmée se doit dʼenseigner <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de conduite à tous,forger des consciences individuel<strong>le</strong>s fortes. C'est la fonction première deséco<strong>le</strong>s de formations.Au-delà des acquis de la formation, la réaction personnel<strong>le</strong> de chacun face à lʼévénementrelève de lʼéthique militaire. Lʼarmée ne transige pas avec ses va<strong>le</strong>urs.A lʼéco<strong>le</strong> Saint Cyr, <strong>le</strong> sujet de la torture est, par exemp<strong>le</strong>, explicitement abordédans <strong>le</strong> cadre du tronc commun de formation généra<strong>le</strong> et approfondi notammentlors du cyc<strong>le</strong> « éthique et déontologie militaire » qui constituent dʼail<strong>le</strong>ursun des pô<strong>le</strong>s dʼexcel<strong>le</strong>nce de la formation dispensée à Coétquidan. La questionest concrètement traitée au travers de témoignages et dʼinterventions.Des études de dossiers thématiques sont éga<strong>le</strong>ment organisées périodiquementsous la forme de tab<strong>le</strong>s rondes. Il importe que <strong>le</strong>s dispositions du droit duconflit armé, soient connues de ceux qui seront et sont chargés de <strong>le</strong>s appliquer.Le code du soldat élaboré <strong>pour</strong> lʼarmée de terre rappel<strong>le</strong> éga<strong>le</strong>ment un certainnombre de principes élémentaires et fondamentaux du métier militaire.Sur ce « code » édité sur un petit carton à conserver dans une poche de treillis,il est notamment écrit Maître de sa force, il respecte lʼadversaire et veil<strong>le</strong>à épargner <strong>le</strong>s populations .De plus, en 2003, un livre b<strong>le</strong>u sur lʼexercice ducommandement a été rédigé. Deux notions y figurent tout particulièrementcel<strong>le</strong> du respect de lʼautre quʼil sʼagisse de celui quʼon commande ou de lʼadversairedu moment et cel<strong>le</strong> de confiance des chefs en <strong>le</strong>urs subordonnés etdes subordonnés en <strong>le</strong>urs chefs.La dignité et <strong>le</strong> respect de la personne humaine sont au cœur du droit desconflits armés.Cette évolution indiscutab<strong>le</strong> ne peut cependant pas faire ignorer que <strong>le</strong>sguerres ne font jamais zéro mort et quʼel<strong>le</strong>s sʼaccompagnent encore souventde drames et de tragédies.Ce qui a changé de nos jours, cʼest la simultanéité de deux facteurs : lʼémergencedes droits de lʼhomme comme un impératif et <strong>le</strong> pouvoir omniprésent232


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersde lʼinformation. Les militaires ne peuvent échapper ni au regard critique de<strong>le</strong>urs concitoyens, ni à lʼopinion publique international informée en temps réel,ou plus tard, un jour ou lʼautre. Parfois cʼest <strong>le</strong> pouvoir judiciaire ou pénal qui<strong>le</strong>s rattrapera.Les forces armées sont donc soumises au durcissement constant des exigenceséthiques imposées par une médiatisation impitoyab<strong>le</strong> des fautes commisesou présumées.Le militaire, dont la motivation et lʼefficacité opérationnel<strong>le</strong> reposent sur lʼadhésionaux ordres reçus, sʼapproprient naturel<strong>le</strong>ment ces va<strong>le</strong>urs repères <strong>pour</strong>en devenir rapidement <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur voire lʼultime défenseur. Mais la société quilʼenvironne évolue plus rapidement voire très différemment. Cependant, ilserait dangereux de prétendre aligner <strong>le</strong>s forces armées sur lʼévolution de lasociété contemporaine.Lʼarmée doit demeurer un soc<strong>le</strong> de stabilité et de sécurité devant <strong>le</strong>s tensionset <strong>le</strong>s crises de toutes sortes.Lʼexemp<strong>le</strong> du militaire français qui, culturel<strong>le</strong>ment noue spontanément descontacts personnels et affectif avec <strong>le</strong>s populations quʼil a <strong>pour</strong> mission deprotéger. Cette capacité dʼempathie et de compassion, toute en son honneur,peut lʼamener à déplacer son action dʼune sphère professionnel<strong>le</strong> à unesphère émotionnel<strong>le</strong> où <strong>le</strong>s gardes fous du professionnalisme cèdent devant<strong>le</strong>s impulsions du cœur.Tout manquement serait une brèche ouverte dans la légitimité de nos forcesarmées. Lʼinstitution militaire, <strong>pour</strong> re<strong>le</strong>ver ses défis majeurs doit dès maintenantrénover son approche de lʼéthique et de la déontologie. Cette démarchesuppose notamment une réorientation des va<strong>le</strong>urs et du référentiel puis <strong>le</strong>srenforcements des actions de formation et des structures de contrô<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAREtablir un référentiel plus accessib<strong>le</strong> à tous par exemp<strong>le</strong> en envisageantun code de déontologie militaire universel regroupant et synthétisant <strong>le</strong>slois et règ<strong>le</strong>ments nationaux et tous <strong>le</strong>s textes internationaux permanents quisʼimposent aux forces armées.A terme ce code devrait devenir la seu<strong>le</strong> référence comportementa<strong>le</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong>smilitaires.Effectivement, lʼunicité et la simplicité de la doctrine déontologique favorisentson application dans <strong>le</strong>s situations comp<strong>le</strong>xes quʼel<strong>le</strong> doit permettre de maitriser.Ensuite, des actions de formations ciblées et <strong>le</strong> renforcement des structuresde contrô<strong>le</strong> existantes seront indispensab<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> garantir et affirmer <strong>le</strong> strictrespect des normes comportementa<strong>le</strong>s par tous <strong>le</strong>s militaires.Les initiations déjà concrétisées par <strong>le</strong> département éthique et déontologiquede lʼéco<strong>le</strong> des officiers de la gendarmerie de Melun et par <strong>le</strong> pô<strong>le</strong> dʼexcel<strong>le</strong>nceétique et déontologie militaire des éco<strong>le</strong>s de Sant-Cyr Coétquidan illustrent lacompréhension de lʼimpérieuse nécessité de doter prioritairement <strong>le</strong>s officiersde contact dʼune formation déontologique très positive. Mais cette démarchemérite dʼêtre approfondie et étendue notamment en formant à lʼidentique <strong>le</strong>ssous-officiers gradés, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s préparer à <strong>le</strong>urs responsabilités de commandementdirect.Au final, <strong>le</strong>s forces armées nʼont pas plus lieu de sʼalarmer que de se féliciterde la vogue éthique et déontologique, mais el<strong>le</strong>s doivent sʼy adapter etrepenser <strong>le</strong>ur positionnement vis-à-vis de citoyens toujours plus intransigeantssouvent friands de révélations médiatiques et parfois de sanctions judiciairesinfâmantes. Il est probab<strong>le</strong>ment temps aussi de développer une vraie culturede la transparence, au sein des forces armées. Cʼest sans doute à ce prix233


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaineque la rénovation et <strong>le</strong> renforcement de la déontologie militaire <strong>pour</strong>rait portertous <strong>le</strong>urs fruits, et conforter aussi bien lʼimage que <strong>le</strong>s militaires ont dʼeuxmêmes,que la légitimité et la confiance dont ils jouissent au sein de la populationmais aussi à lʼétranger.Dans <strong>le</strong>s unités, <strong>le</strong>s cours de formation militaire généra<strong>le</strong> sont bien souvent <strong>le</strong>moment privilégié <strong>pour</strong> expliquer au jeune soldat, Ce qui est lʼhonneur et <strong>le</strong>sens de servir et plus génériquement <strong>pour</strong> réfléchir sur <strong>le</strong> corpus de va<strong>le</strong>urs,fondement de lʼéthique du soldat. En effet, lʼhonneur est bien vu des moteursde la conscience professionnel<strong>le</strong> nécessaire à toute entreprise humaine. Deplus, el<strong>le</strong> donne un sens à sa vocation : amour de la patrie, don de soi sonttoujours des va<strong>le</strong>urs indispensab<strong>le</strong>s à toute armée nationa<strong>le</strong> et prennent <strong>le</strong>urracine dans <strong>le</strong> sens de lʼhonneur. Enfin lʼhonneur permet de fixer <strong>le</strong>s limitesdans lʼaction. Dans la guerre ou dans la crise il permet dʼavoir une consciencejuste de ses actes. Lʼhonneur doit retrouver une place de choix dans laformation où <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de lʼofficier est fondamental.IV - ConclusionIl apparaît, au terme de notre étude et compte-tenu de notre mondedʼaujourdʼhui changeant transparent et exigeant du fait, dʼune part, du combat<strong>pour</strong> <strong>le</strong>s droits de lʼHomme et de la pression médiatique et, dʼautre part de lamondialisation et de la globalisation, lʼimpérieuse nécessité dʼadaptation denos armées en vue de répondre aux espoirs du citoyen du monde en matièrede paix, dʼéquité et de justice. Ce qui implique une nouvel<strong>le</strong> éthique etdéontologie militaire outils indispensab<strong>le</strong> à tous <strong>le</strong>s niveaux. Cette nouvel<strong>le</strong>approche <strong>pour</strong> être efficiente doit prendre une place de premier plan dans noséco<strong>le</strong>s et centres de formation. Aujourdʼhui, lʼimpératif de lʼhumain ne doit enaucun cas, être oublié ou sacrifié. Sʼil faut être sévère et par dessus tout impartia<strong>le</strong>t neutre avec <strong>le</strong>s idées, il faut être tolérant avec <strong>le</strong>s hommes. La viehumaine est sacrée, tout doit être entrepris <strong>pour</strong> la respecter et la sauver.Lʼislam <strong>le</strong> professe depuis maintenant plus de 14 sièc<strong>le</strong>s, donc bien avant laDéclaration Universel<strong>le</strong> des droits de lʼHomme même si de faux musulmans(terroristes islamistes) sʼévertuent à polluer <strong>le</strong> message dʼAllah et la traditiondu prophète Mohamed (psl).Hamadi KONTEest Aumônier militaire du Culte Musulmande lʼArmée de Terre Française. DiplôméDEFA en mai 1988, nanti dʼun BrevetdʼAptitude aux Fonctions de Directeur etdʼune Formation de cadre de lʼinterventionsocia<strong>le</strong>, il a suivi des stages en Animationet communication socia<strong>le</strong>, RéadaptationSocia<strong>le</strong> et Entretien dʼaide.Il est lʼinitiateur et lʼanimateur bénévo<strong>le</strong>dʼun jumelage entre Cléon et <strong>le</strong> village deDondou (Sénégal) et il met en place dechantiers jeunes. De 2001 à 2007 il a étéConseil<strong>le</strong>r Municipal de la vil<strong>le</strong> de Cléon etMembre de la commission Habitat et PolitiqueFoncière à la Communauté dʼAgglomérationdʼElbeuf (76). Avant de devenirAumônier militaire du culte musulman en2007 il a été : Educateur au foyer éducatifMoissons Nouvel<strong>le</strong>s/Evreux et Educateurau centre éducatif à Vernon.234


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers3.13 Intervention du Professeur Thomas R. Elßner, Professeur d’Ethiqueet Aumônier catholique, Centre « Innere Führung », Cob<strong>le</strong>nce,Al<strong>le</strong>magneRésumé : The intervention of Prof. Dr. Thomas ELSSNER treats the „Practiceorientedethics training in the German armed forces“. He starts with the statement„Ethics sells!“ because he states that today, there is a veritab<strong>le</strong> ethics boom goingon in several european countries. The main question for ethics as a part of educationwould be how standards and guidelines that have proved right or have beenaccepted could be imp<strong>le</strong>mented in everyday life. Therefore, ethicists have to elaborateappropriate practices to imp<strong>le</strong>ment norms. The most important task is toput these norms into practice, because it is relatively easy to elaborate theoriesthan to really practice them. The second part of Dr. ELSSNERs intervention is dedicatedto the practical tests of the elaborated theories, for examp<strong>le</strong> the Paganotest which follows five different criterias: The verification of <strong>le</strong>gality, the public eye,the truthfulness test, the golden ru<strong>le</strong> and the categorical imperative. The specificexamp<strong>le</strong>s given for the practical test are Mother Theresa with her work for the Indiansociety and the so-cal<strong>le</strong>d „Skull affair“ in Germany, when German soldiersposed for photographs with skulls in their hands. In his conclusion, ELSSNERstates that it is as important for soldiers to pay as much attention to practice thesetest criteria as they do to preparing themselves physically to deployment.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARÉthique et déontologie : <strong>le</strong>s défis de la formation (3)Forces armées fédéra<strong>le</strong>s : la formation éthique axée sur la pratique1. IntroductionDʼun côte, personne dans la Bundeswehr al<strong>le</strong>mande ne conteste plusaujourdʼhui que lʼéthique joue un rô<strong>le</strong> important dans lʼexercice des fonctionslourdes de responsabilités du métier des armes. Cette conviction est documentéenotamment dans différents règ<strong>le</strong>ments de service de la Bundeswehr. 130Dʼun autre côté, certains Etats européens donnent lʼimpression que lʼéthiqueconnaît actuel<strong>le</strong>ment non seu<strong>le</strong>ment un essor, mais un vrai boom. A cela viennentsʼajouter <strong>le</strong>s soupçons des observateurs critiques qui estiment quelʼéthique fait dans bon nombre de domaines plus ou moins fonction de feuil<strong>le</strong> devigne et qu'il est bien vu dans la vie sociéta<strong>le</strong>, politique et économique de pouvoirrenvoyer à des références éthiques quʼon aura en général choisies par sespropres soins : ethics sell. Cʼest <strong>pour</strong>quoi certaines références éthiques présentéespompeusement dans des brochures sur papier glacé provoquent <strong>le</strong>scepticisme. Ce scepticisme est éga<strong>le</strong>ment nourri par lʼexpérience que la transmissionde lʼéthique est un processus comp<strong>le</strong>xe à ne pas confondre avec un dérou<strong>le</strong>menttechniquement contrôlab<strong>le</strong> et donc exactement calculab<strong>le</strong>. Il convientpar conséquent de se demander objectivement ce que lʼéducation éthique peutapporter – ou ce quʼel<strong>le</strong> ne peut éventuel<strong>le</strong>ment pas apporter. Ensuite, cettequestion se pose encore une fois concrètement <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s forces armées.Face à toute la dynamique et toute la dynamique propre que possèdentaujourdʼhui beaucoup de processus dans pratiquement tous <strong>le</strong>s domaines àlʼéchel<strong>le</strong> mondia<strong>le</strong>, il est donc dʼautant plus uti<strong>le</strong> de tenir compte éga<strong>le</strong>mentdes réf<strong>le</strong>xions éthiques de nos ancêtres, par exemp<strong>le</strong> depuis lʼantiquité, afinde ne pas tomber dans un actionnisme <strong>le</strong> plus souvent aveug<strong>le</strong>. Néanmoins,on ne devrait pas céder à lʼillusion quʼil serait possib<strong>le</strong> de déduire toutsimp<strong>le</strong>ment de ces traditions éthiques des applications pratiques <strong>pour</strong> <strong>le</strong>présent. En revanche, il est vrai – et cʼest un point très essentiel – que cestraditions peuvent fournir un référentiel. 131Aumônerie militaire catholique auCentre « Innere Führung » de Cob<strong>le</strong>nce(Centre des Forces Fédéra<strong>le</strong>sAl<strong>le</strong>mandes <strong>pour</strong> l’Education mora<strong>le</strong>)235


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineUne autre question importante qui se pose dans <strong>le</strong> contexte des réf<strong>le</strong>xionséthiques depuis lʼantiquité est de savoir comment mettre en pratique ou appliquerréel<strong>le</strong>ment au quotidien <strong>le</strong>s directives et normes reconnues comme justes. Enoutre, on comprend aujourdʼhui de plus en plus que la difficulté éprouvée à mettreen pratique la théorie ne tient pas seu<strong>le</strong>ment à lʼinertie humaine ou un scepticismede principe face aux théories, mais quʼel<strong>le</strong> est due au fait que lʼon disposetrès rarement de conditions et préalab<strong>le</strong>s optimaux et idéaux <strong>pour</strong> une mise enœuvre de ce que lʼon a reconnu comme juste du point de vue éthique. 132 Surcette toi<strong>le</strong> de fond, <strong>le</strong>s spécialistes de lʼéthique ont aussi la tâche et la responsabilitéde trouver ou de développer des pratiques adéquates <strong>pour</strong> lʼapplicationde normes, notamment en vue des éthiques professionnel<strong>le</strong>s à mettre en place(par ex. éthique médica<strong>le</strong> et bioéthique) 133 .Enfin, il convient de prendre au sérieux <strong>le</strong>s objections que bon nombre de militairesformu<strong>le</strong>nt souvent à lʼencontre des réf<strong>le</strong>xions éthiques en faisant remarquerquʼil est faci<strong>le</strong> de réfléchir longuement sur des questions dʼéthiquedans une pièce bien chauffée et dans lʼabstrait, mais que <strong>le</strong>s choses se présententtrès différemment en opération, dans la pratique. Ils expliquent quʼenopération, on nʼa pas <strong>le</strong> temps de réfléchir longuement et quʼil faut, dans cescirconstances, souvent agir à la fois rapidement et correctement. Ils ont raisondans la mesure où ce qui a été reconnu comme éthiquement juste doit fairelʼobjet dʼun entraînement constant et sérieux, par action ou par omission, <strong>pour</strong>avoir des conséquences à peu près sensib<strong>le</strong>s dans la pratique. De plus, un te<strong>le</strong>ntraînement est un processus permanent et asymptotique qui dure toute unevie. Lʼéducation éthique exige donc un effort mental et peut mettre en questioncertaines choses dites « évidentes ». Cependant, il ne faut pas confondreefforts mentaux et intel<strong>le</strong>ctuels avec ennui et peine. 1342. Prise de décision individuel<strong>le</strong> – un bref test en pratiqueToutes ces expériences et objections faites et exprimées à maintes reprises pardes militaires de différentes catégories de grades lors des divers stages du Centrede formation mora<strong>le</strong> et civique à Cob<strong>le</strong>nce ont donné lieu au développementdʼun test pratique. Utilisé depuis un an dans <strong>le</strong>s stages, ce test sera présenté cidessous.Pour être comp<strong>le</strong>t, il convient de mentionner que ce test pratique estconstamment évalué au vu de lʼexpérience acquise dans <strong>le</strong>s cours.130Cf. <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>ments interarmées ZDv 10/1, « InnereFührung » (Formation mora<strong>le</strong> et civique) en datedu 28 janvier 2008 et ZDv 10/4 « LebenskundlicherUnterricht » (Cours dʼéthique) du 20 janvier2009.131Cf. Heinrich August Wink<strong>le</strong>r, Aus der Geschichte<strong>le</strong>rnen?, dans : Die Zeit, n° 14/2004.132Cf. Thomas R. Elßner, In der Erprobung. Stärkungethischer Grundlagen in der Bundeswehr, dans :if. Zeitschrift für Innere Führung n° 1 2010, 12.133Cf. Stephan Goertz, Weil Ethik praktisch werdenwill. Philosophisch-theologische Studien zumTheorie-Praxis-Verhältnis, Ratisbonne 2004,14-17.134Mihi crede verum gaudium res severa est (Croismoi,cʼest quelque chose de sérieux que la véritab<strong>le</strong>joie.), Seneca, Ad Lucilium, Epistulae Mora<strong>le</strong>s,Liber Tertium, Epistula 23,4.135Anthony M. Pagano est Associate Professor àlʼUniversity of Illinois à Chicago. Les axes dʼeffortde son travail scientifique sont lʼanalyse coût/efficacité, la gestion des transports et laprivatisation.2.1 Un test pratique selon PaganoToute personne enseignant l'éthique se pose non seu<strong>le</strong>ment la questionimportante des conditions préalab<strong>le</strong>s et des hypothèses dʼarrière-plan de« son » éthique, mais aussi cel<strong>le</strong> de savoir comment il va transmettre lʼéthiquesous des aspects didactiques. A la recherche dʼun modè<strong>le</strong> répondant auxexigences de lʼenseignement <strong>pour</strong> adultes aux différents niveaux de cultureindividuels, cʼest <strong>le</strong> test pratique dʼAnthony M. Pagano 135 qui a retenu lʼattention.Ce test a été légèrement modifié <strong>pour</strong> lʼadapter au groupe cib<strong>le</strong> des militaires.Il est donc plus correct de par<strong>le</strong>r dʼun bref test pratique inspiré dumodè<strong>le</strong> de Pagano et destiné à faciliter la prise de décision individuel<strong>le</strong>.Le bref test pratique comprend 5 critères dʼévaluation, à savoir :- <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de légalité,- <strong>le</strong> feu de lʼopinion publique,- <strong>le</strong> test de bonne foi,- la règ<strong>le</strong> dʼor,- lʼimpératif catégorique. Ces cinq étapes de la prise de décision serontpar la suite présentées en détail et expliquées.236


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers2.2 Le cinq critères d’évaluationLes êtres humains se retrouvent de temps en temps dans des situations qui<strong>le</strong>s obligent à prendre une décision. Où la décision est inévitab<strong>le</strong>. Dans cescas, même lʼinaction apparente est <strong>le</strong> fruit dʼune décision : en effet, lapersonne en question a opté <strong>pour</strong> « agir » dʼune autre manière en renonçantà une action donnée ou à toute démarche active. De tel<strong>le</strong>s situations diffici<strong>le</strong>sse présentent éga<strong>le</strong>ment dans la vie quotidienne des militaires, notamment enopération extérieure. El<strong>le</strong>s risquent dʼêtre aggravées par lʼimpossibilité de faireconfirmer la démarche prévue par lʼéchelon supérieur et par la nécessitéimmédiate de prendre une décision en âme et conscience.2.2.1 Le contrô<strong>le</strong> de légalitéLe contrô<strong>le</strong> de légalité est la première étape du test. Le militaire doit vérifiersi lʼaction quʼil envisage est conforme aux lois ou non. Pour chaque opération,il existe des règ<strong>le</strong>s dʼengagement, norma<strong>le</strong>ment distribuées aux militairessous la forme comprimée de la carte du soldat. Pour agir en accord avec cesrèg<strong>le</strong>s ou avec la carte du soldat, <strong>le</strong>s militaires doivent suivre des cours dedroit ou une initiation aux fondements juridiques et aux principes dʼaction pertinentsavant de partir en opération extérieure. Lʼobjectif des cours de droitest de <strong>le</strong>ur donner une sécurité juridique fondamenta<strong>le</strong> <strong>pour</strong> <strong>le</strong>ur action. Cʼestune vérité bana<strong>le</strong>, mais incontestab<strong>le</strong> que seul celui qui connaît <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>sdʼengagement peut juger de la conformité de principe dʼune action donnée.Cependant, on ne saurait non plus ignorer quʼil est dans la nature du droit delaisser des zones dʼombre.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARSʼagissant du droit international humanitaire, il convient, de plus, de se poserla question suivante : est-ce que lʼaction ou lʼomission envisagées vont profiterà un grand nombre de personnes ? On peut objecter quʼil est diffici<strong>le</strong> derépondre à une tel<strong>le</strong> question. Mais on peut aussi poser la question autrement:est-ce que lʼaction ou lʼomission envisagées vont nuire à un grand nombrede personnes ? Est-ce que, par exemp<strong>le</strong>, une action militaire va porteratteinte à la population civi<strong>le</strong> non impliquée ? Pour mieux illustrer ce propos,prenons un exemp<strong>le</strong> concret : lors de la seconde guerre du Golfe de 1991, <strong>le</strong>gouvernement de lʼIraq a fait mettre à feu des puits de pétro<strong>le</strong> koweïtiens <strong>pour</strong>des raisons, entre autres, militaires, afin de nuire au Koweït, dʼun côté, etd'entraver <strong>le</strong>s opérations militaires des forces alliées, de lʼautre. Les dégâtsécologiques ainsi provoqués étaient considérab<strong>le</strong>s et absolument disproportionnéspar rapport à lʼavantage prétendu, dʼautant plus que lʼattaque contre<strong>le</strong> Koweït était contraire au droit international. Le dégagement de fumée despuits en flammes était si important quʼil a été faci<strong>le</strong> de documenter lʼévénementgrâce à des images satellites.2.2.2 Le feu de l’opinion publiqueFace à lʼévolution rapide des technologies de communication, on peut avancerlʼhypothèse de travail selon laquel<strong>le</strong> il nʼexiste pratiquement plus quelque chosecomme une sphère privée ou personnel<strong>le</strong>. A tout endroit et à tout moment, onpeut aujourdʼhui faire des vidéoclips ou prendre des photos, par exemp<strong>le</strong> avecun téléphone mobi<strong>le</strong>. Personne nʼa plus <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> moment, lʼendroit et<strong>le</strong> comment de lʼutilisation ultérieure de ce matériel, qui peut, de plus, être utilisésoit tel quel, soit après avoir été traité. Devant cette situation, la question quʼilfaut se poser par rapport aux actions envisagées est la suivante : toi en tant quemilitaire, par<strong>le</strong>rais-tu ou agirais-tu ainsi si lʼopinion mondia<strong>le</strong> pouvait tʼentendreou te regarder en direct ? Autrement dit, ton discours et ton action doivent-ils237


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainecraindre la lumière du public ? Dans lʼaffirmative, il conviendra au moins de reconsidérerlʼaction envisagée, voire même de sʼen abstenir. Beaucoup ont portépréjudice à eux-mêmes ou à des tiers par des propos non fondés et irréfléchis.l faut toujours garder à lʼesprit que toute photo prise à nʼimporte quel « recoin »de la planète peut être diffusée en quelques secondes dans <strong>le</strong> monde entier ;parfois cela ne se produit que des années plus tard.2.2.3 Le test de bonne foiCe critère correspond à la question de savoir si je peux confier ce que je compteentreprendre ou omettre à une personne qui mʼest très proche (mon partenaireou conjoint, mon enfant, etc.). Concrètement, el<strong>le</strong> sʼénonce ainsi : est-ce que je<strong>pour</strong>rais dire à ma femme / à mon mari ce que jʼai fait ? Quel<strong>le</strong> serait la réactionde mon fils / de ma fil<strong>le</strong> à mes actes ? Or, nous savons quʼil y a des situationsoù jʼai seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> choix entre un grand et un moindre mal et que, dans bien descas, la solution optima<strong>le</strong> nʼexiste donc pas. Il est alors important que <strong>le</strong> militairepuisse dire rétrospectivement quʼil sʼest sérieusement efforcé de gérer demanière adéquate cette situation très concrète dans ces conditions trèsconcrètes. Les militaires par<strong>le</strong>nt aussi de pouvoir se regarder en face.2.2.4 La règ<strong>le</strong> d’orUn autre critère dʼévaluation est ce que l'on appel<strong>le</strong> la « règ<strong>le</strong> dʼor » : « Ainsi,tout ce que vous vou<strong>le</strong>z que <strong>le</strong>s hommes fassent <strong>pour</strong> vous, faites-<strong>le</strong> vousmêmes<strong>pour</strong> eux : voilà la Loi et <strong>le</strong>s Prophètes » (Mt 7, 12). Rapportée parl'Evangi<strong>le</strong> selon saint Matthieu du Nouveau Testament, cette règ<strong>le</strong> dʼor seretrouve en substance dans beaucoup dʼautres religions (bouddhisme,hindouisme, islam, judaïsme, zoroastrisme, taôisme, etc.).La question-clé associée est la suivante : est-ce que tu voudrais faire toi-même lʼexpériencede ce que tu comptes faire ou omettre de faire à dʼautres personnes? Ledicton dit : ne fais pas à autrui ce que tu n'aimerais pas que l'on te fasse.2.2.5 L’impératif catégoriqueLʼimpératif catégorique dʼEmmanuel Kant (1724-1804) va plus loin que la règ<strong>le</strong>dʼor. Dans son œuvre « Fondements de la métaphysique des mœurs », Kant<strong>le</strong> formu<strong>le</strong> ainsi : « Agis comme si la maxime de ton action devait être érigéepar ta volonté en loi universel<strong>le</strong> de la nature. »Ce critère dʼévaluation exige donc de poser la question suivante : mes principessubjectifs que je suis <strong>pour</strong> atteindre un objectif donné, remplissent-ils <strong>le</strong>sconditions requises <strong>pour</strong> quʼils puissent être érigés en loi universel<strong>le</strong> ? Endʼautres mots : peux-je vouloir que <strong>le</strong>s méthodes de mes actes deviennentuniversel<strong>le</strong>s, par ex. dans <strong>le</strong> droit international humanitaire ?3. Application concrète du test pratiqueAprès lʼénumération et la présentation des critères dʼévaluation du test pratiqueselon Pagano, nous allons maintenant <strong>le</strong>s appliquer et expliquer à lʼaidede deux exemp<strong>le</strong>s concrets :3.1 Mère Teresa1. Contrô<strong>le</strong> de légalité : est-ce quʼil était contraire aux lois en Inde dʼaider àCalcutta des personnes vivant dans la pauvreté absolue et la détresse ?2. Feu de lʼopinion publique : <strong>le</strong>s prestations dʼassistance fournies par MèreTeresa auraient-el<strong>le</strong>s eu à craindre la lumière du public ?238


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliers3. Test de bonne foi : pouvait-el<strong>le</strong> confier ce quʼel<strong>le</strong> faisait à ses consœurs <strong>le</strong>splus proches en dehors de lʼInde ?4. Règ<strong>le</strong> d'or : pouvait-el<strong>le</strong> vouloir que ce quʼel<strong>le</strong> faisait <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s autres soit faitéga<strong>le</strong>ment <strong>pour</strong> el<strong>le</strong> ?5. Impératif catégorique : Mère Teresa pouvait-el<strong>le</strong> vouloir que ses méthodesdʼassistance deviennent universel<strong>le</strong>s en ce qui concerne la prestation dʼassistanceà tous <strong>le</strong>s pauvres de ce monde ?La réponse à toutes ces questions est en fin de compte « oui ». On peutdonc conclure que <strong>le</strong> comportement de Mère Teresa peut être qualifié detrès éthique ou moral.3.2 L'affaire des profanations perpétrées en Afghanistan par desmilitaires al<strong>le</strong>mands ou « affaire des crânes de cadavres»1. Contrô<strong>le</strong> de légalité : est-ce quʼil était contraire aux lois en Al<strong>le</strong>magne dese faire photographier avec des crânes ?2. Feu de lʼopinion publique : est-ce que <strong>le</strong>s militaires auraient posé de tel<strong>le</strong>sorte avec des crânes si <strong>le</strong>s chaînes de télévision avaient pu transmettreces images (dans <strong>le</strong> monde entier) ?3. Test de bonne foi : <strong>le</strong>s militaires auraient-ils pu raconter à <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> laplus proche en Al<strong>le</strong>magne quʼils se sont fait photographier avec des crâneset comment ils lʼont fait ?4. Règ<strong>le</strong> d'or : accepteraient-ils que ce quʼils ont fait avec <strong>le</strong>s crânes dʼautrespersonnes se fasse un jour aussi avec <strong>le</strong>urs crânes à eux ?5. Impératif catégorique : <strong>le</strong>s militaires <strong>pour</strong>raient-ils vouloir que <strong>le</strong>urs métho -des de gestion du stress et de lʼengagement deviennent universel<strong>le</strong>s ?Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAROn peut constater que la réponse à chacune de ces cinq questions ne peutou ne doit pas forcément être un « oui » clair et net.4. CONCLUSIONIl nʼest pas systématiquement nécessaire de répondre à chacune des cinqquestions dʼévaluation par un « oui » <strong>pour</strong> pouvoir juger si oui ou non lʼactionenvisagée dans une situation concrète est éthique ou mora<strong>le</strong>. En effet, lapratique comporte beaucoup de nuances. Ce qui compte fina<strong>le</strong>ment, cʼestque bien des décisions nʼauraient pas été prises comme el<strong>le</strong>s lʼont été si <strong>le</strong>smilitai res concernés avaient appliqué <strong>le</strong> test pratique.Lʼobjectif du bref test pratique consiste à examiner lʼaptitude des actions ouomissions envisagées en très peu de temps à lʼaide de cinq critères. Cependant,il faut admettre qu'un militaire peut se retrouver dans des situations oùil nʼa <strong>le</strong> choix quʼentre un grand et un moindre mal.Ce qui est important, cʼest que tout militaire accorde à lʼapprentissage descritères dʼévaluation mentionnés la même attention quʼà la préparationphysique à un engagement. Cela lui permettra d'acquérir un habitus quilʼaidera à appliquer <strong>le</strong>s techniques apprises dans des situations diffici<strong>le</strong>s. Ildevrait donc non pas attendre la survenue dʼune situation diffici<strong>le</strong> <strong>pour</strong> essayerde se rappe<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s critères d'évaluation cités, mais garder ceux-ci toujours àlʼesprit grâce à un entraînement permanent.Thomas R. ELSSNERest aumônier militaire catholique et maîtrede conférence dans <strong>le</strong> domaine de lʼéthiqueauprès du Centre <strong>pour</strong> la Formation Mora<strong>le</strong>et Civique des Forces Fédéra<strong>le</strong>s Al<strong>le</strong> man -des de Cob<strong>le</strong>nce.Depuis 2009 il est éga<strong>le</strong>ment professeur dethéologie et enseigne lʼexégèse de lʼAncienTestament à lʼuniversité de Val<strong>le</strong>ndar prèsCob<strong>le</strong>nce en Al<strong>le</strong>magne.Il a publié de nombreux ouvrages sur lʼexégèsede lʼAncien Testament et sur lʼéthiquede paix.239


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humaine3.14 Intervention du Docteur Amadou Oury BA, UCAD, SénégalDe la Reconversion et la RéintégrationPost-Conflit des Forces de Défense et de Sécurité :Approche Sénégalo-Al<strong>le</strong>mande à l´exemp<strong>le</strong> de l´œuvrede Wolfgang Borchert « Draußen vor der Tür ».Résumé : Nearly all post-conflict situations put the question of human tragedies,which generate besides the material ruins important physical and mental injuries,affecting a certain contingent of the Defence and Security Forces. The world todayis characterized by frequent armed conflicts, where the capacity of limiting “collateraldamages” and "surgical interventions" does not exclude a big number ofinjured and so cal<strong>le</strong>d "invalid" peop<strong>le</strong>.The context of the fiftieth anniversary of independence is the place to the overviewof this topic from a literary ang<strong>le</strong>, as proposed in the book of the German writerWolfgang Borchert, whose conntribution " draussen vor der Tür" revisits theGerman history of the Second World War.The intervention of Dr. BA discusses firstly the concept of war invalids, secondlyhe adresses issues related to this condition and, thirdly, discusses strategies forretraining and reintegration in Germany and in Senegal.IntroductionLes situations post-conflits posent la question des drames humains, qui àcoté des ruines matériel<strong>le</strong>s engendrent des b<strong>le</strong>ssures physiques et mora<strong>le</strong>s,affectant une certaine frange des forces de défense et de sécurité. Le mondeactuel est <strong>le</strong> théâtre de conflits armés fréquents, dont la précision, connuesous <strong>le</strong> label de « guerre chirurgica<strong>le</strong> » n´en exclut pas <strong>le</strong> nombre de b<strong>le</strong>ssés,dits « invalides ».Le contexte du cinquantenaire des indépendances est <strong>le</strong> lieu de faire <strong>le</strong> survolde ce thème sous un ang<strong>le</strong> littéraire, tel que proposé dans <strong>le</strong> livre de l´auteural<strong>le</strong>mand Wolfgang Borchert, dont l´œuvre, « Draussen vor der Tür », revisitel´histoire de l´Al<strong>le</strong>magne de la Seconde Guerre mondia<strong>le</strong>.On abordera, en ce qui concerne <strong>le</strong>s forces de défenses et de sécurité, premiè -r ement, <strong>le</strong> concept dʼinvalides de guerre, deuxièmement, on par<strong>le</strong>ra desproblèmes liés à cette condition et, troisièmement, on par<strong>le</strong>ra des stratégiesde reconversion et réintégration en Al<strong>le</strong>magne et au Sénégal.I. Invalides de guerreUniversité Cheikh Anta Diop de DakarLes invalides de guerre constituent une partie des forces de défense et desécurité. En effet ils en constituent une frange très vulnérab<strong>le</strong>, car étant b<strong>le</strong>sséset atteints physiquement et psychologiquement. Malgré l´amp<strong>le</strong>ur queconstituent <strong>le</strong>s deux guerres mondia<strong>le</strong>s( 1914- 1918 et 1939-1945), ils n´enreste pas moins que de plus en plus des foyers de tensions existent un peupartout à l´échel<strong>le</strong> mondia<strong>le</strong>, mais plus spécifiquement dans la sous-régionouest-africaine. Ces situations conflictuel<strong>le</strong>s engendrent des destructionsmatériel<strong>le</strong>s mais aussi, à coté des ruines, on a des invalides.Dans la présente œuvre al<strong>le</strong>mande, dont nous par<strong>le</strong>rons au cours de cetartic<strong>le</strong>, la problématique majeure tourne autour du di<strong>le</strong>mme que constitue <strong>le</strong>sinvalides. Il en est de même dans <strong>le</strong>s différents états africains, dans <strong>le</strong>squelsdes situations conflictuel<strong>le</strong>s persistent. Ainsi, au Sénégal, certains invalides240


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en atelierssont regroupés dans une association créee en 1999 dénommée l´ANAMIS(l'Association nationa<strong>le</strong> des anciens militaires invalides du Sénégal). On à uneautre structure créee en 2007, la FIMM 136 (<strong>Fondation</strong> des Invalides et MutilésMilitaires) qui constitue une structure dʼappui et d ´aide aux invalides. Cettefondation a une vocation socia<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> Dispose de ressources provenant desources diverses tel<strong>le</strong>s qu´une dotation initia<strong>le</strong> de l´Etat, de subvention descol<strong>le</strong>ctivités publiques, de la contribution annuel<strong>le</strong> des membres fondateurs,constitués de banque et sociétés de la place, de privés etc. A coté de cesfonda tions, il existe une agence de l´Etat, appelée ARSM (Agence de RéinsertionSocia<strong>le</strong>s des Militaires) située vers la VDN Dakar.II. Les ruines humainesL´œuvre de l´auteur Al<strong>le</strong>mand Wolfgang Borchert pose des questions fondamenta<strong>le</strong>s,en ce qu´el<strong>le</strong> aborde <strong>le</strong> problème des invalides de guerre sous différentsang<strong>le</strong>s. Lʼauteur nous propose la vie d´un héros nommé Beckmann,ex-prisonnier en Russie et b<strong>le</strong>ssé de guerre. De retour en Al<strong>le</strong>magne, Beckmannse cherche, mais ne parvient pas à retrouver son équilibre et tente dese suicider. Malheureusement même <strong>le</strong> f<strong>le</strong>uve (Elbe) dans <strong>le</strong>quel il s´est jeté<strong>le</strong> rejette. L´auteur souligne ainsi symboliquement l´exclusion des invalides detoute insertion socia<strong>le</strong>. Que ce soit de la compassion ou de l´indifférence, <strong>le</strong><strong>le</strong>cteur est appelé à trancher. Wolfgang Borchert préfère situer plutôt <strong>le</strong>sresponsabilités de ces drames humains. Plusieurs franges de la société seretrouvent au banc des accusés : <strong>le</strong>s politiques, la hiérarchie, <strong>le</strong> soldat luimême,mais éga<strong>le</strong>ment la société <strong>pour</strong> laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> soldat combat.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARAinsi un invalide nous dira : «Si un militaire se b<strong>le</strong>sse dans <strong>le</strong> cadre d´uneopération de défense de l´intégrité territoria<strong>le</strong>, c´est la société, je ne dis pasl´Etat, mais la société qui doit <strong>le</strong> prendre en charge. Alors ce qu´on réclame,ce sont de meil<strong>le</strong>ures conditions de prise en charge des invalides» 138Dans la même lancée, Beckmann <strong>le</strong> héros du livre de Borchert reproche àla société son indifférence tota<strong>le</strong> face au problème des invalides de guerre.De retour d´un conflit en Russie, où il a été fait prisonnier pendant 3 ans,Beckmann retrouve à coté de son épouse un autre homme qui porte seshabits et mange à sa tab<strong>le</strong>. Son espoir de trouver un travail et ainsi de seréinsérer dans la société échoue du fait de son invalidité. Ainsi il mène unprocès contre sa société mais aussi contre sa hiérarchie, dans la mesure où,selon lui, c´est lui, en tant qu´ officier, qui a demandé à un soldat, nomméBauer, de ne pas abandonner son poste de combat. Ainsi l´ombre de ce soldat<strong>le</strong> <strong>pour</strong>suit tout <strong>le</strong> temps.«Ich soll weiter<strong>le</strong>ben, wo es einen Menschen gibt, wo es einem Mann mit einemBein gibt, der meinetwegen nur das eine Bein hat? Der nur ein Bein hat, weil eseinen Unteroffizier Beckmann gegeben hat, der gesagt hat: Obergefreiter Bauer,Sie halten ihren Posten bis zu<strong>le</strong>tzt. Ich soll weiter<strong>le</strong>ben, wo es diesen Einbeinigengibt, der immer Beckmann sagt? Unablässig Beckmann! AndauerndBeckmann ! Und er sagt das, als ob er Grab sagt. Als ob er Mord sagt [....] » 139Ainsi la société, la hiérarchie sont mis au banc des accusés de ce roman quel´on appel<strong>le</strong> roman d´après-guerre, dont la popularité dans l´Al<strong>le</strong>magne desannées 1945 ne surprend guère. La comp<strong>le</strong>xité dans la situation des invalidesest accentuée par <strong>le</strong>s différentes responsabilités. Ainsi, en ce quiconcerne <strong>le</strong> problème des invalides de guerre en Afrique et spécifiquement auSénégal, se posent divers problèmes tels que la Réintégration ou la Réinsertiondans <strong>le</strong> milieu socioprofessionnel. A coté de ces difficultés, surgit la di-136Site de la FIMM :Online : http://www.fondation-fimm.org/137Site de l´ARSM, Online : http://arsmsenegal.com/138Weekend Magazine: Semaine du 29 mars au 4avril 2007, p. 25139[Trad.] Je dois continuer de vivre alors qu´il y a unhomme avec une seu<strong>le</strong> jambe à cause de moi?Un homme qui a une seu<strong>le</strong> jambe parce qu´il y aun sous-officier nommé Beckmann qui a dit: SoldatBauer, maintenez votre poste jusqu´à la fin. Jedois continuer de vivre, ou il y a cet invalide, quidit toujours Beckmann? Sans arrêt Beckmann!Continuel<strong>le</strong>ment Beckmann! Et il répète celacomme s´il disait Tombe. Comme s´il disait Mort[....]. Vgl. Wolfgang Borchert. Das Gesamtwerk.Berlin 1974, p. 117241


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité Humainemension humaine du problème, en ce sens que la stabilité psychologique desinvalides est précarisée par l´état d´indigence.Récemment en Al<strong>le</strong>magne un cas a fortement secoué <strong>le</strong>s médias. C´était <strong>le</strong>cas du Soldat Robert Sedtlazek Mül<strong>le</strong>r dont <strong>le</strong>s journaux déploraient la situation.Selon lui ce n´est qu´après la guerre que commence <strong>le</strong> vrai combat dusoldat invalide.Dans <strong>le</strong> cas précis du soldat Mül<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s journaux al<strong>le</strong>mands tel que <strong>le</strong> ZEITtitraient : « L´officier Robert Sedlatzek-Mül<strong>le</strong>r, 32 ans, commandant d´élite, n´aplus <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de son corps » 140Cependant son cas n´a pas été faci<strong>le</strong> à élucider, dans la mesure où <strong>le</strong>sdédommagements, réparations et responsabilités sont diffici<strong>le</strong>s à évaluer etdénombrer. Cependant cette réparation est d´autant plus nécessaire qu´el<strong>le</strong>fait appel à toute la société <strong>pour</strong> qui <strong>le</strong> soldat est en mission. Ceci fait nécessiteune gestion des ressources humaines moderne et adaptée, qui réinsère,réintègre, ou démobilise convenab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s membres de forces de défenseet de sécurité en Afrique. Certes beaucoup de pays ont une avance en la matière.L´exemp<strong>le</strong> du Sénégal nous semb<strong>le</strong> assez innovant, avec la créationde structure qui s´occupent spécifiquement du cas des invalides de guerre. Laréinsertion des forces de défense et de sécurité doit prendre en compte beaucoupd´aspect tels que la situation d´invalidité, la dimension psychologique,l´environnement familial ainsi que l´aspect financier. Le graphique ci-dessousindique <strong>le</strong>s dimensions du problème que doivent résoudre ces structures.140Hauke Friederichs : Deutschlands kranke Krieger.Online:http://www.zeit.de/politik/deutschland/2010-04/Veteranen_traumatisiert.05.03.2011, 15h:15.141Voire: Soldiers, Civilians, and Family MembersReintegration Guide. 1 February 2006. Online:https://www.aeaim.hqusareur.army.mil/library/..142Trad. « „Seigneur: parce que je nʼy peut rien. Ils setuent au fusil. Ils se pendent. Ils se saou<strong>le</strong>nt. Ilss´entretuent, aujourd´hui cent, demain cent mil<strong>le</strong>s.Et moi, je nʼy peut rien. Wolfgang Borchert : DasGesamtwerk. Hamburg Januar 1974, S. 104.143Week-end Magazine: Semaine du 29 marsau 4 Avril 2007, S.16.144Voire: Drucksache 16/10735, DeutscherBundestag. 16. Wahlperiode 31.10.2008. p.2.145Site de l´ARSM, Online : http://arsmsenegal.com/.146FIMM, 1, Rue Amadou Lahsane NDOYE, Ang<strong>le</strong>Bou<strong>le</strong>vard Djily MBAYE. Dakar - Sénégal147Cette association est logée dans <strong>le</strong>s locaux del'Office nationa<strong>le</strong> des Anciens Combattantsdu Sénégal - Avenue Président Lamine Guèyeà Dakar.Source : Soldiers, Civilians, and Family Members Reintegration Guide.1 February 2006. Online: https://www.aeaim.hqusareur.army.mil/library/III Réinsertion et Réintégration des FSDAu vu des différents problèmes que nous avons abordés dans notre exposé,il va sans dire que la réinsertion des invalides devient une question fondamenta<strong>le</strong><strong>pour</strong> <strong>le</strong>s FDS. Considérant <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> qui <strong>le</strong>ur revient en tant que garantde la sécurité des populations dans toute sa dimension, cette réinsertion ouréintégration englobe différents aspects.Dans une brochure de lʼarmée américaine, la réintégration est définie comme tel :«The goals of reintegration are to integrate units and individuals with their families and communities,242


TROISIIÈME PARTIE – Interventions en ateliersgive formal command recognition for the achievements of returning units and individuals, and prepareunits for success with their next mission. The overall reintegration process includes conductingrequired reintegration tasks, conducting formal welcome-home ceremonies, and comp<strong>le</strong>ting asuccessful transition to routine operations. 141 »El<strong>le</strong> fait appel a une organisation approfondie qui contient une dimensionhumaine et humanitaire. Si je reviens à l´œuvre de Wolfgang Borchert, on serend compte que Beckmann, <strong>le</strong> héros du roman, est confronté à cette réalitéde la vie. Beaucoup de soldats qui étaient en mission commandé dans l´Al<strong>le</strong>magnede l´apres-guerre sont revenus sans aucune perspective de se réinsérerdans la vie active. Le résultat de cette situation est une vague de suicidetel<strong>le</strong> que mis en scène par l´auteur Wolfgang Borchert.Beckmann dira: « „Gott: Weil ich es nicht ändern kann. Sie erschießen sich.Sie hängen sich auf. Sie ersaufen sich. Sie ermorden sich, heute Hundert,morgen Hunderttausend. Und ich, ich kann es nicht ändern. “ 142Beckmann, candidat au suicide, souffre psychologiquement et à complètementdémissionné. Si on transpose cette situation décrite dans ce roman al<strong>le</strong>mandaux forces de défenses et de sécurité en Afrique, il y a de fortes similitudes.On peut renvoyer à des cas concrets tel que celui-ci répertorié dans <strong>le</strong> maga -zine Week-end. La difficulté qu´éprouvent ces invalides c´est l´insertion dansla société. Cel<strong>le</strong>-ci s´exprime par <strong>le</strong> manque de communication avec <strong>le</strong> mondeextérieur qui perturbe <strong>le</strong>s relations interpersonnel<strong>le</strong>s, comme <strong>le</strong> cas présentédans <strong>le</strong> magazine Week-end. Le concerné se sent socia<strong>le</strong>ment exclu etdevient fortement susceptib<strong>le</strong>.Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR« À la suite de cette hospitalisation, j´ai eu des problèmes d´ordre psychi -ques. Je suis resté six ans durant <strong>le</strong>squels je ne sortais pas, je ne parlais àpersonne» 143Ces problèmes psychiques sont dus à différents aspects : Premièrement lasituation d´indigence. Cette situation est marquée par une pension d´invaliditéjugée par certains comme très basse par rapport aux besoins d´un invalide.Ceci rend la situation des invalides assez précaire, vu <strong>le</strong>s limites financières.Deuxièmement il y a <strong>le</strong> cas d´exclusion socia<strong>le</strong> qui induit une isolation. Cetteisolation perturbe <strong>le</strong>s rapports sociaux, qui mènent à une lourde dépression.Ayant tiré <strong>le</strong>s conséquences de tous ces problèmes tant au plan social,humain que financier et dans <strong>le</strong> but de résoudre ces problèmes, <strong>le</strong>s Etats sesont organisés. En ce qui concerne l´Al<strong>le</strong>magne, la Bundeswehr a un servicede santé, « Sanitätsdienst », qui garantie <strong>le</strong> traitement des soldats en servicecommandé au plan psychologique et physique et suivant <strong>le</strong>s conditionscorrespondant aux standards actuels de la médecine. Au retour, l´accompagnementpsychologique se fera par des spécialistes de l´Armée al<strong>le</strong>mande,tels que <strong>le</strong> service de psychologie, <strong>le</strong>s services offerts par <strong>le</strong>s églises catholiqueset évangéliques et <strong>le</strong> service social de l´Armée qui soutiennent ainsi<strong>le</strong>s invalides et <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s. 144En ce qui concerne la réinsertion, l´armée al<strong>le</strong>mande a plusieurs modè<strong>le</strong>s.Ainsi <strong>le</strong>s soldats en service commandé, par l´introduction, <strong>le</strong> 18 décembre2007, d´une nouvel<strong>le</strong> loi, EinsatzWVG (Einsatz Weiterverwendungsgesetz),bénéficient d´un traitement financier approprié au degré d´invalidité. Mais engénéral, tous <strong>le</strong>s invalides (au moins 50% de degré d´invalidité) bénéficientde soutien financier <strong>pour</strong> l´acquisition ou la rénovation d´une maison ou d´unappartement appropriée. Entre autres soutiens, on a la garantie de la mobilitépar l´acquisition d´un véhicu<strong>le</strong> approprié ou adaptée. L´armée al<strong>le</strong>mandesoutient aussi fortement <strong>le</strong>s soldats dans <strong>le</strong>ur réintégration ou <strong>le</strong>ur réinsertiondans la société civi<strong>le</strong> en <strong>le</strong>ur offrant une qualification préalab<strong>le</strong>.Bibliographie1) Drucksache 16/10735,Deutscher Bundestag. 16.Wahlperiode 31.10.2008.2) FIMM, 1, Rue AmadouLahsane NDOYE, Ang<strong>le</strong>Bou<strong>le</strong>vard Djily MBAYE Dakar– Sénégal.3) Hauke Friederichs : Deutschlandskranke Krieger. Online:http://www.zeit.de/politik/deutschland/2010-04/Veteranen -traumatisiert.4) Site de l´ARSM, Online :http://arsmsenegal.com/.5) Site de la FIMM : Online :http://www.fondation-fimm.org/.6) Wolfgang Borchert: DasGesamtwerk. Hamburg 1974.7) Weekend Magazine: Semainedu 29 mars au 4 avril 2007.8) Soldiers, Civilians, and FamilyMembers Reintegration Guide.1 February 2006.Online: https://www.aeaim.hqusareur.army.mil/library/.243


Colloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineEn qui ce concerne <strong>le</strong> Sénégal, des fondations et des agences ont été créées<strong>pour</strong> améliorer l´insertion des invalides. L´ARSM, tel que mentionné dans <strong>le</strong>ursite, est une structure de l´Etat qui œuvre dans l´amélioration des conditions devie des soldats, <strong>pour</strong> une meil<strong>le</strong>ure fixation des éléments mobilisab<strong>le</strong>s et lafacilitation de la réinsertion socioéconomique des militaires revenus à la vie civi<strong>le</strong>.« LʼAgence <strong>pour</strong> la Réinsertion socia<strong>le</strong> des Militaires (ARSM) a été créée dans<strong>le</strong> but dʼassister <strong>le</strong> Ministre des Forces Armées dans la conception et la miseen œuvre de la politique de réinsertion des militaires libérés, de dégagementdes cadres et de lutte contre la précarité dans <strong>le</strong>s foyers de militaires surtoutdes retraités. » 145On peut citer aussi la FIMM (<strong>Fondation</strong> des Invalides et des Mutilés Militaires)qui œuvre éga<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> social. 146 El<strong>le</strong> apporte un soutien dans diversdomaines tels quʼune assistance complémentaire en cas de traumatismephysique nécessitant un appareillage spécial, de maladie grave invalidante, desoins médicaux particuliers, notamment en cas de nécessité d'une évacuationsanitaire à l'étranger. Une médiation et une assistance sont apportées auxfamil<strong>le</strong>s en cas de besoin.L´ANAMIS 147 au Sénégal, qui est une association de militaires invalides,regroupe éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s veuves avec <strong>le</strong>urs enfants. C´est une structure qui afait l´objet de beaucoup d´artic<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>s journaux, dans la mesure oùl´association revendique l´amélioration des conditions de vie des militairesinvalides. Cependant el<strong>le</strong> reste une structure à caractère privé.ConclusionAmadou BAest né en 1974 à Dakar. Aprés des étudesde Germanistique à lʼUCAD et a lʼuniversitéde Mannheim/RFA sanctionnées par unDoctorat, <strong>le</strong> Dr. Ba a etudié l' administrationpublique en Speyer/RFA. Depuis 2007 il estenseignant à l' Université Cheikh Anta Diopde Dakar et a fait plusieurs publications surla litterature politique et postcolonia<strong>le</strong> etsur la modernisation de l'administra tion. I<strong>le</strong>nseigne paralél<strong>le</strong>ment au Sénégal et enAl<strong>le</strong>magne.Dans cet artic<strong>le</strong>, j´ai essayé d´aborder la question des invalides de guerre del´Al<strong>le</strong>magne de 1945 et de cel<strong>le</strong> des invalides de guerre dans nos différentsEtats africains. Comparativement, on a essayé dans cet artic<strong>le</strong>, de par<strong>le</strong>r dela situation d´indigence des soldats al<strong>le</strong>mands après la Seconde Guerre mondia<strong>le</strong>.Ainsi Wolfgang Borchert a mis en scène différentes situations tels quel´indigence extrême dans laquel<strong>le</strong> se trouvent ces soldats, l´exclusion socia<strong>le</strong>,qui <strong>le</strong>s pousse au suicide. Cette problématique, dans l´œuvre de Borchert,rappel<strong>le</strong>, cependant, de façon frappante la situation des invalides de guerredans différents Etats africains. Au Sénégal, même si des efforts ont été fournisdans ce sens, la presse fait écho souvent de revendications. La situationprécaire à laquel<strong>le</strong> ces invalides de guerre sont confrontés, la perte de lʼestimede soi, qui peut mener au suicide, la perte de motricité qui mène souvent àl´exclusion et au chômage constituent des chocs psychiques qui mènent auxdifficultés d´intégration.Ainsi <strong>pour</strong> résorber ces problèmes, différentes associations, <strong>Fondation</strong>s etAgences ont été créées au Sénégal <strong>pour</strong> canaliser ses frustrations, fixer <strong>le</strong>sanciens soldats et améliorer <strong>le</strong>ur condition de vie, même si des efforts doiventêtre fournis. Le bénéfice majeur sera <strong>le</strong> maintien du moral des troupes auservice des nations concernées.244


QUATRIÈME PARTIESÉANCE DE CLÔTUREJeudi 11 novembre 2010 - Après-midi5.1 Synthèse génera<strong>le</strong> du Colloque par Madame <strong>le</strong> Professeur AmsatouSow SIDIBE, Présidente de la commission scientifiqueNous commencerons par dire et cʼest ressorti de nos discussions, que <strong>le</strong>thème Forces de Défense et de Sécurité (FDS) au cœur de la sécuritéhumaine est une réalité :Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARLes FDS sont au cœur de la sécurité humaine, qui place lʼhomme au centredes préoccupations et tend à <strong>le</strong> mettre à lʼabri de la violation des droits etlibertés, à lʼabri de la peur et qui participe aux provisions de satisfaction desbesoins des populations. La réf<strong>le</strong>xion menée durant ces quatre bel<strong>le</strong>s journées,quoique diffici<strong>le</strong>, parce que la réf<strong>le</strong>xion était intense, nous a permis de dégager<strong>le</strong>s conclusions suivantes :– Dʼabord sur <strong>le</strong> premier thème : Etat de droit et FDS, il est ressortique concernant <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> démocratique des forces de défense etde sécurité :– Les FDS sont soumises au contrô<strong>le</strong> effectif des institutions civi<strong>le</strong>s enparticulier au contrô<strong>le</strong> par<strong>le</strong>mentaire ;– Il existe un lien de causalité entre <strong>le</strong> comportement des FDS et labonne gouvernance démocratique ;– Ce contrô<strong>le</strong> doit répondre aux normes de gouvernance des secteursde sécurité basés sur la transparence et <strong>le</strong> principe de responsabilité ;– Les FDS ne peuvent sʼériger en arbitre du jeu politique.Relativement à la problématique du maintien de l’ordre et sécurité humainel est ressorti que :Il est possib<strong>le</strong> de faire cohabiter ordre public et liberté fondamenta<strong>le</strong> afin dʼassureret cʼest <strong>le</strong> second point lʼéquilibre entre libertés individuel<strong>le</strong>s et maintiende lʼordre public. Les voies et moyens suivants peuvent être préconisés :– dʼabord, lʼinstauration des stratégies préventives, en particulier <strong>le</strong>sdialogues entre FDS et la population civi<strong>le</strong> ;– ensuite, la formation du personnel chargé du maintien de lʼordre ;– en troisième lieu, <strong>le</strong> renforcement des lois et procédures nationa<strong>le</strong>safin de traduire <strong>le</strong>s obligations internationa<strong>le</strong>s en réalité sur <strong>le</strong> terrain.En tout cas et dans tous <strong>le</strong>s cas de figures, il a été re<strong>le</strong>vé que la responsabilitépersonnel<strong>le</strong> de chaque membre des FDS était engagée même face à unordre manifestement illégal.245


CINQUIÈME PARTIE – Interventions en séance de clôtureColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKARForces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineSur <strong>le</strong> thème numéro 2 : Les relations que <strong>le</strong>s FDS doivent entreteniravec la NationLa réf<strong>le</strong>xion autour des FDS émanation de la nation a montré <strong>le</strong>s fossés deperception qui existent entre <strong>le</strong>s populations civi<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s FDS, perceptionfondée sur des préjugés. Pourtant, la consolidation de la démocratie exige denouveaux rapports entre civils et FDS. Cette dernière, émanation de la nation,dont la composition doit être représentative de la nation, et être à son service,doit concourir à renforcer la cohésion nationa<strong>le</strong>. En retour, <strong>le</strong>s FDS méritentla reconnaissance par <strong>le</strong>s populations et un meil<strong>le</strong>ur traitement par lʼEtat.De nouvel<strong>le</strong>s menaces existent, el<strong>le</strong>s ont <strong>pour</strong> noms, trafic de drogue, terrorisme,traite des êtres humains, risques naturels, circulation dʼarmes légères,etc. Ces nouvel<strong>le</strong>s menaces constituent bien un problème de sécuritéhumaine et face à ces menaces, <strong>le</strong>s FDS de la CEDEAO sont invitées à mieuxcoordonner <strong>le</strong>urs actions <strong>pour</strong> <strong>le</strong> bien-être des populations, des personnes etdes biens.Cette réalité, qui ne doit pas favoriser lʼimpunité dans <strong>le</strong>s situations de postconflits nationa<strong>le</strong> et humanitaire révè<strong>le</strong> que, la mission primaire de lʼarméenʼest pas de gérer des situations dʼurgence et de crises et de mise en œuvreen attendant la mise en place des secours. El<strong>le</strong> a permis dʼétablir un lienétroit entre développement, paix et sécurité des civils. El<strong>le</strong> suppose la néces -sité de raffermir <strong>le</strong>s liens entre forces, cʼest-à-dire, et nous y reviendrons, ceque je veux dire là, cʼest que à la quête <strong>pour</strong> un savoir dans la réalisation dela sécurité humaine, toutes <strong>le</strong>s conclusions ont été que lʼEtat était <strong>le</strong> principalacteur de la réalisation de la sécurité humaine en vertu des conventions desdroits humains et des libertés fondamenta<strong>le</strong>s.La sécurité doit être prise comme un projet qui implique la justice et la permanencedu dialogue entre civils et FDS <strong>pour</strong> lʼAfrique de lʼouest. Il existepeut-être une difficulté de trouver un modè<strong>le</strong> type, lʼaccent a été mis sur lanéces sité dʼavoir une méthodologie <strong>pour</strong> ajuster la construction dʼune arméecapab<strong>le</strong> de répondre aux défis, mais pas seu<strong>le</strong>ment dʼune armée, mais detoutes <strong>le</strong>s forces de défense et de sécurité capab<strong>le</strong>s de répondre aux défis,tant au plan national, régional, quʼinternational. Cette méthodologie doitreposer sur trois principes : <strong>le</strong> principe de théorisation et de conceptualisation,ensuite <strong>le</strong> principe de professionnalisme, ce principe a comme corollairesa capacité à faire face aux défis. Dans tous <strong>le</strong>s cas, une harmonisation desstandards, puisque nous avons vu quʼil nʼy avait pas de standard type, estsouhaitée <strong>pour</strong> permettre aux FDS des différents Etats de la CEDEAO demieux travail<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong> dans une bonne atmosphère. Le droit internationalhumanitaire et la paix, <strong>le</strong> respect de lʼéthique et de la déontologie sont <strong>le</strong>s défisde la formation qui permettent de valoriser <strong>le</strong>s actions des FDS en <strong>le</strong>s rendantplus visib<strong>le</strong>s.Chers Participants, Mesdames et Messieurs,En conclusion du colloque sur <strong>le</strong>s FDS au cœur de la sécurité humaine, ceque je voudrais dire cʼest que la réf<strong>le</strong>xion nʼest certainement pas terminée, <strong>le</strong>cadre de réf<strong>le</strong>xion par exemp<strong>le</strong>, dʼun centre dʼétudes stratégique permettantde regrouper FDS, société civi<strong>le</strong>, universitaires, et acteurs politique permettraitsans doute, de répondre en permanence à la problématique qui nous aregroupée durant ce colloque.246


Forces de Défense et de Sécurité au cœur de la Séurité HumaineColloque International, 8-11 novembre 2010 - DAKAR


P A R T E N A I R E S E T S P O N S O R SContactETAT-MAJOR GÉNÉRAL DES ARMÉESDirection de l’Information et des Relations PubliquesCamp DIAL DIOP - DAKARTél. +221 (33) 889 12 12 or 823 91 99

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!