L’ACTUALITE

paris
Le matériel de l’époque de Breitkopf me paraît
assez documenté. Les baroqueux – en particulier
Harnoncourt – ont beaucoup fait évoluer la recherche
en retrouvant des tempos beaucoup plus
près de la réalité, en dépoussiérant une tradition
postromantique. Evidemment, j’en tiens compte
comme, par exemple, au moment de l’Orage
quand survient la tempête. » En musicien de
chambre accompli, il se fondra le lendemain
dans les rangs des vents de l’Orchestre de Paris
pour le juvénile Quintette pour piano et vents en
mi bémol majeur op. 16 : « Je me réjouis de cette
proximité avec de remarquables musiciens, que
je connais pour la plupart. Cela m’inspire dans
mon travail et m’enrichit dans mon approche. »
Actif et serein
S
’il parcourt toujours le monde, il sait trier
le grain de l’ivraie : « En matière d’enregistrements,
il y a aujourd’hui pléthore et je suis de
plus en plus dubitatif sur l’obligation de refaire
ce que d’autres avant moi ont parfaitement réussi.
Je préfère donner du temps au temps et profiter
de mon jardin. Il y a en projet des concertos
pour piano de Carl Philipp Emanuel Bach, mais
à mon âge on peut prendre de la distance. Claustrophobe,
je n’aime pas non plus être enfermé
et participer à des jurys bien que j’aie accepté
en 2017, pour la seconde fois, de présider le
Concours Clara Haskil. » Ce pédagogue capable
de rendre claires par ses explications les partitions
les plus complexes n’entend pas pour
l’heure se consacrer aux master class de piano :
« À Göteborg où je suis premier chef invité de
l’Orchestre depuis de nombreuses années, j’ai
une classe uniquement de musiciens d’orchestre.
Le Curtis Institute de Philadelphie m’a fait des
propositions que j’ai finalement refusées. Cela
me déprime de voir des élèves quitter la salle de
cours dès qu’ils ont reçu leur enseignement, sans
avoir la patience d’écouter les autres. »
Quoi qu’il en soit, l’aventure parisienne de ce
pianiste marqué au sceau de l’évidence et de
l’intelligence se poursuivra pour notre plus
grand bonheur le 7 novembre au Théâtre des
Champs-Élysées dans un programme dont il
a le secret entre Schubert, Beethoven et Schumann
; en mars, on le retrouvera avec les musiciens
de l’Orchestre de Paris dans un cycle
Mozart. Cet orfèvre hors pair saura comme
personne combiner son éloquence souveraine
à une élégance quintessenciée qui était également
celle de ses références : Clara Haskil,
Géza Anda ou Dinu Lipatti. Excusez du peu !
•
Michel Le Naour
septembre/octobre 2016 cadences 17