Saint Dominique. Homme de l'Évangile

Dominique Collin
Saint
Dominique
Homme de l’Évangile
Sur la route des saints
33

Sur la route des saints
33
Portrait de
saint Dominique,
homme de l’Évangile
Dominique Collin

Dans la même collection (derniers titres parus) :
Lambert Louis Conrardy, n o 22
Alberto Hurtado, n o 23
Ignace de Loyola, François Xavier, Pierre Favre, n o 24
Eustache van Lieshout, n o 25
Marie-Eugénie Milleret, n o 26
Claude La Colombière, Marguerite-Marie Alacoque, n o 27
Joseph Anciaux, n o 28
Anne de Jésus, n o 29
Mgr Óscar Romero, n o 30
Saint Jean Eudes, n o 31
Marie-Martine Bourtonbourt, n o 32
© 2016, Éditions jésuites
Belgique : 7, rue Blondeau, 5000 Namur
France : 14, rue d’Assas, 75006 Paris
Dépôt légal : D.2016, 4323.16
ISBN : 978-2-87356-713-2
Maquette : Jean-Marie Schwartz
Imprimé en Belgique

Préface
A
u fil des pages de ce très beau petit livre du frère Dominique
Collin, se manifestent à la fois la discrétion et
la détermination de Dominique de Guzman, initiateur, il y a
huit siècles, de l’Ordre des Prêcheurs.
Discrétion d’un homme qui, se mettant à l’école de
l’évêque Diègue d’Osma, ne cherche pas à déployer un plan
de fondation établi à l’avance mais se laisse guider par les
circonstances de son temps. Un temps au cœur duquel il
cherche sans cesse à allier sa vive sensibilité pour la faim de
la parole de ses contemporains et son désir de rendre témoignage
à Celui qui est la Parole de vérité. Un temps au cœur
duquel il ne s’agit pas pour lui de maintenir à tout prix une
position établie de l’Église, mais plutôt d’aider cette dernière
à consolider la communion en trouvant pleinement la joie et
la légèreté d’une prédication qui soit vraiment conversation.
Comme prêcheur, Dominique nous est présenté comme un
observateur éclairé des mutations de son temps, de sorte
que, chaque fois que c’est possible, il cherche comment
répondre au mieux aux quêtes de vérité de ses contemporains.
C’est ainsi que, répondant aux événements comme
à autant de « signes des temps », Dominique déploie une
manière évangélique d’être frère de tous, manifeste sa passion
pour la rencontre, exprime le désir d’aller sans cesse
au-delà des frontières de la « chrétienté », exige une étude
rigoureuse qui seule peut assurer que la prédication serve
la liberté.
5

Sa discrétion a la force de sa détermination. C’est ainsi
qu’on le voit envoyer ses premiers frères aux quatre coins de
l’Europe pour aller étudier dans les universités naissantes,
susciter en eux le désir de partir toujours plus loin des centres
établis, choisir vraiment la pauvreté itinérante comme mode
de vie apostolique. Cette détermination se manifeste aussi
dans la ténacité avec laquelle il a voulu initier cet Ordre des
Prêcheurs, demandant au Pape de confirmer son initiative
et de l’appuyer en confiant à cet Ordre des Prêcheurs une
mission universelle de prédication, et appelant ses frères à
confirmer eux-mêmes son intuition par leur prédication itinérante,
leur étude et la fondation de leurs communautés.
Au fond, si Dominique a été un fondateur, ce fut en mettant
en place les conditions qui lui permirent, avant de s’effacer,
de convoquer ses frères à déployer la « sainte prédication »
et à en assurer eux-mêmes la pérennité, à partir de l’unanimité
qu’ils célèbreront et construiront au moyen de leurs
chapitres réguliers et en vivant selon les Constitutions qu’ils
donneront à l’Ordre.
Le dialogue entre les illustrations des neuf manières
de prier de saint Dominique créées par Jacques Noé et les
commentaires du frère Dominique indiquent le lieu où se
conjoignent discrétion et détermination en puisant à une
même source. On a souvent dit que saint Dominique,
contrairement à bien des fondateurs, n’avait pas laissé
d’écrits mais s’était effacé pour laisser à ses frères la tâche
d’offrir à l’Église un Ordre des Prêcheurs. Le présent livre suggère
que le secret de cette attitude tient dans une prière à travers
laquelle Dominique se laissait guider par l’Esprit de sorte
que sa vie de frère prêcheur soit configurée par le mystère de
la vie de son Sauveur. Une prière qui, elle-même, est chemin
d’itinérance pour qui, empruntant les mots du psalmiste,
mendie humblement la grâce de Celui qui s’abaisse pour
6

donner en abondance la vie à l’humanité. Une prière qui met
au cœur du dialogue avec le Seigneur la compassion pour
les pécheurs et pour les pauvres. Une prière qui puise dans
la Parole et dans l’insaisissable mystère de la kénose l’audace
de l’itinérance apostolique et l’amour de l’Église, signe de la
communion promise à tous. Itinérance qui mène le prêcheur
à l’école de Celui qui proclamait à travers villes et villages la
bonne nouvelle du Royaume de Dieu.
Je suis très reconnaissant au frère Dominique et à Jacques
Noé de nous offrir ce livre en cette année où l’Ordre des Prêcheurs
rend grâce pour ses huit siècles d’existence. Non seulement
ces pages donneront l’intuition audacieuse de saint
Dominique, mais elles feront naître aussi au cœur du lecteur
le désir d’avoir à son tour l’audace d’entrer dans l’aventure
de vivre au feu de la Parole et, sans attendre davantage,
d’aller la proclamer.
Fr. Bruno Cadoré,
Maître de l’Ordre des Prêcheurs
O

Avertissement au lecteur
Je ne me sens guère « autorisé » à écrire une « petite vie »
de saint Dominique. Je ne suis ni historien ni biographe. Me
rattachent à Dominique le prénom qui me fut donné par mes
parents et la promesse d’obéissance que je lui fis dans l’ordre
qu’il fonda. Il y a huit siècles, l’Église a voulu reconnaître et
confirmer un ordre de prêcheurs et c’est en s’engageant au
service de la prédication qu’il est encore aujourd’hui l’ordre
de saint Dominique. Et bien que notre époque sécularisée se
méfie à juste titre des sermonneurs ou autres donneurs de
leçons, c’est pourtant comme prêcheur que j’ai le plaisir de
présenter ce portrait de Dominique, homme de l’évangile, predicator
gratiae (prêcheur de la grâce, comme les dominicains le
chantent dans une antienne). Je vous invite à découvrir l’itinéraire
d’un homme passionné dont la vie fut mue par le désir que
« soient manifestées la bonté de Dieu et son humanité » (Tt 3, 4).
N.B. Ce petit portrait de saint Dominique ne prétend pas
être un ouvrage de référence, aussi ai-je jugé superflues les
notes de bas de page. Les ouvrages d’où sont tirées les citations
reproduites dans le texte figurent dans la bibliographie en fin
de volume.

Partie 1
L’itinéraire
de saint Dominique

1
Pour planter le décor
L
’époque dans laquelle a vécu saint Dominique n’est plus
la nôtre.
Il vivait dans ce Moyen Âge qui nous paraît si lointain, si
mystérieux aussi ; pour certains, des siècles d’obscu rantisme,
pour d’autres, la nostalgie d’une chrétienté qui n’a peut-être
jamais été autre chose qu’une chimère ; en fait, une longue
période largement inconnue mais que l’imaginaire collectif
se représente avec ses châteaux forts, ses tournois, ses chevaliers,
ses sorcières et ses bûchers.
Dominique ignorait qu’il vivait au Moyen Âge, cette appellation
relativement dédaigneuse fut donnée par les esprits
cultivés de la « Renaissance » ; les documents de l’époque
qualifient leur temps de « modernes », pour la raison obvie
que l’époque dans laquelle on vit est toujours moderne.
L’historien écrit toujours l’histoire après coup. Toute époque
conserve et innove, mais certaines sont davantage des charnières
que d’autres : c’est le cas du xiii e siècle qui fut à la fois
l’apogée d’un monde et l’amorce d’un autre. C’est pourquoi
il expérimenta des mutations et connut les tensions
qui leur sont inhérentes, dont certaines d’ailleurs peuvent
faire penser aux nôtres : peur de la dissidence religieuse, qui
pouvait aller jusqu’à l’intolérance ; esprit de croisade, qui se
donnait de nouveaux ennemis, intérieurs et extérieurs ; mise
en place d’une politique sécuritaire et répressive, qui allait
bientôt s’appeler l’Inquisition. Bref, à l’image de ces contradictions
dont l’histoire est remplie, on se mettait à favoriser
11

le savoir dans les universités que l’on fondait dans les principales
villes de la chrétienté tandis qu’on se lançait dans une
croisade contre l’hérétique du coin.
Un concept permet de mieux comprendre dans quel
monde culturel, politique et religieux, Dominique va évoluer
: c’est celui de chrétienté (christianitas en latin). Cette
notion, pour ne pas dire, ce programme, s’impose à la fin
du xi e siècle et désigne une utopie de société chrétienne parfaite,
qui avait en vue d’édifier non pas une « civilisation » à
côté d’autres mais d’être la civilisation. La chrétienté se voulait
vouée à l’universel, dépassant les particularismes et les
contingences ; pour ce faire, elle devait nécessairement se
doter d’un principe qui serait, lui aussi, universel ; or deux
pouvoirs se disputaient cette position : l’empereur et le pape.
Il fut dit que l’empereur jouirait de la juridiction universelle
sur le temporel tandis que le pape jouirait de la spirituelle.
Mais le Saint Empire romain germanique sur lequel gouvernait
le premier n’était qu’un empire territorial, morcelé de
surcroît, tandis que le pape entendait affirmer sa suprématie
sur toute la chrétienté, laquelle, par définition, ne connaît
de limites ni de territoires ni de cultures. C’est ainsi que le
partage de la juridiction universelle dégénéra rapidement
en « querelle » entre les deux tenants du titre et que ce fut le
pape qui remporta l’avantage avant que les intérêts nationaux
et puis, plus tard, les divisions religieuses, ne ruinent le
projet même de chrétienté. Donc, en ce début de xiii e siècle,
les papes voient leur pouvoir s’affirmer et s’étendre, les
conciles généraux de la chrétienté avalisent les ambitions
pontificales d’extension géographique mais aussi d’homogénéité
interne puisque la chrétienté est puissamment un
principe d’unification pour ne pas dire d’uniformisation. Il
ne peut y avoir qu’une seule vérité, celle que formule l’Église
catholique (c’est pourquoi, comme nous le verrons, elle va
12

En lecture partielle…

si bien la vocation du théologien prêcheur sinon ce qu’un
autre théologien, protestant celui-là, Gabriel Vahanian, écrivait
il y a quelques années, à savoir que l’Église n’est plus
l’Église si elle « ne s’adresse pas à la question que, demain,
va inévitablement me poser mon fils ».
O
Petite bibliographie
Catherine Aubin, Prier avec son corps à la manière de saint
Dominique, Cerf, Paris, 2005.
Per Bjørn Halvorsen, Saint Dominique. Du cœur aux frontières
de l’Église, Cerf, Paris, 2011.
Alain Quilici, Prier quinze jours avec saint Dominique,
Nouvelle Cité, Montrouge, 1999.
Dominique Racinet, Saint Dominique. Un visage de miséricorde,
Éditions Saint-Augustin, Saint-Maurice, 2015.
Michel Roquebert, Saint Dominique. La légende noire,
Perrin, Paris, 2003.
Marie-Humbert Vicaire, Saint Dominique. La vie apostolique,
Cerf, Paris, 1965.

Table des matières
Préface, par Fr. Bruno Cadoré .......................... 5
Partie 1
L’ITINÉRAIRE DE SAINT DOMINIQUE
1. Pour planter le décor .............................. 11
2. L’intuition de Palencia ............................. 17
3. La rencontre de l’Albigeois ......................... 21
4. Dominique au milieu de la fureur des armes ........... 29
5. Le temps des fondations ........................... 33
6. Audace évangélique ou coup de folie ? . ............... 41
7. Consolidation et expansion de l’ordre des prêcheurs .... 47
8. Dernières années ................................. 55
Partie 2
DOMINIQUE EN PRIÈRE
1. Le secret de Dominique . ........................... 63
2. Les neuf manières de prier . ......................... 69
1. Inclination du corps .................................. 69
2. Prosternation du corps ................................ 75
3. La discipline ........................................ 81
4. L’agenouillement .................................... 87
5. La prière debout ..................................... 93
6. La prière les bras ouverts . .............................. 99
7. La prière les mains levées vers le ciel ..................... 103
8. Prier assis ......................................... 107
9. La prière en marchant . ............................... 113
En guise d’envoi . .................................. 117
Petite bibliographie ................................ 118

Achevé d’imprimer le 21 avril 2016
sur les presses de l’imprimerie Bietlot, à 6060 Gilly (Belgique).

Sur la route des saints
33
Saint Dominique
Saint Dominique a su comprendre les attentes
spirituelles des hommes et des
femmes de ce début du XIII e siècle : en ces
temps de mutations, de violence et d’ignorance,
ils avaient faim que la Parole de Dieu
leur soit prêchée. Il puisait dans la prière la
source de ses élans apostoliques. Il avait neuf
manières de prier dans son corps, gestes que
l’artiste Jacques Noé restitue en neuf « prédications
» en couleurs, associées aux commentaires
de Dominique Collin. Le lecteur
est ainsi invité à approfondir le mystère du
Verbe fait chair afin que notre chair devienne
parole. Un livre dans le cadre du jubilé du
huitième centenaire de l’Ordre des Prêcheurs
(2016).
Préface du frère Bruno Cadoré, Maître de
l’Ordre des Prêcheurs.
ISBN 978-2-87356-713-2
Prix TTC : X,XX €
9 782873 567132