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la <strong>boîte</strong> <strong>de</strong> pandore<br />
biaise la vision <strong>de</strong> ladite séparation <strong>de</strong> l’Église et <strong>de</strong> l’État et fait du<br />
pluralisme adulé <strong>une</strong> morne neutralité.<br />
Personne ne niera le fait que nous vivons effectivement dans un<br />
environnement séculier. Le patrimoine <strong>de</strong>s Lumières est <strong>de</strong>venu le<br />
bien commun <strong>de</strong> toutes les couches <strong>de</strong> notre société. Ce qui, à la<br />
Révolution française, passait pour <strong>une</strong> rupture, fut rétabli et donna<br />
lieu à <strong>une</strong> nouvelle forme <strong>de</strong> coexistence entre l’Église et l’État.<br />
Non, plutôt que d’être <strong>une</strong> « séparation » — comme on le clame<br />
si souvent à tort —, il s’agissait plutôt d’<strong>une</strong> « distinction » entre<br />
l’Église et l’État, où l’un acceptait la réalité <strong>de</strong> l’autre en s’octroyant<br />
la latitu<strong>de</strong> nécessaire pour accomplir sa propre mission, dans le<br />
respect réciproque. L’image d’un Napoléon qui reçoit la couronne<br />
impériale <strong>de</strong> la main du pape mais s’en coiffe lui-même, a toujours<br />
eu pour moi <strong>une</strong> gran<strong>de</strong> valeur symbolique. S’il acceptait encore<br />
que l’autorité suprême vienne <strong>de</strong> Dieu et lui soit conférée <strong>de</strong>s<br />
mains du vicaire du Christ, il lui appartiendrait désormais d’exercer<br />
lui-même ce pouvoir en cessant d’être un vassal <strong>de</strong> l’Église. C’est<br />
ici aussi que le respect réciproque fut en quelque sorte scellé en<br />
soulignant que chacun se tiendrait désormais à sa place.<br />
Le fait que chacun reste à sa place n’exclut nullement qu’on se<br />
parle. Le dialogue et la concertation ne sont auc<strong>une</strong>ment écartés.<br />
Dans chaque forme <strong>de</strong> société, on trouve <strong>de</strong>s points communs<br />
touchant inévitablement au terrain <strong>de</strong> l’autre, ce qui implique alors<br />
que l’on se parle et que l’on s’écoute. C’est également le cas dans<br />
<strong>une</strong> société élargie où l’Église et l’État agissent conjointement en<br />
s’octroyant mutuellement la liberté <strong>de</strong> mouvement nécessaire et<br />
se rencontrant régulièrement. Personne ne peut le nier. Tout cela<br />
émane d’<strong>une</strong> sécularisation saine avec <strong>de</strong>s forums où l’on peut<br />
discourir et s’écouter l’un l’autre. Et lorsqu’on considère l’histoire<br />
avec un certain recul, force est <strong>de</strong> constater qu’<strong>une</strong> société peut<br />
bien fonctionner là où la « Cité » a ses propres règles et assume la<br />
responsabilité finale du bien-être <strong>de</strong> la société, et lorsqu’elle réserve<br />
un espace à la religion — qui peut avoir son mot à dire. <strong>La</strong> religion<br />
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