9 Florent lazare, Flopi l’homme singe etc… a presque autant de noms que de talent. Il est l’auteur pour La Maison Garage d’un des films de la série “ Un air de Césaire” et des animations de “Nous irons voir Pelé sans payer”. Il dessine de très jolies couilles et autres foufounes dans Cosette, participe à, ou créé des programmes pour Arte et France 4, met des costumes à poils ou à plumes et accessoirement est (les happy few reconnaitront) le lauréat du prix du public du Kung Ku Festival 2016. portra it florent
Des poings lazare à la ligne On va dire que j’œuvre dans, au moins, deux secteurs d’activités : l’art et la boxe… La boxe est venue d’abord. J’ai toujours aimé ça. Les films de Bruce Lee et tout ça. J’ai commencé à 14 ans dans mon club de quartier. Française, anglaise, américaine, dans différentes catégories, au final, j’ai été 7 fois champion de France. L’art, lui, est venu un tout petit peu plus tard vers 17 ans. J’étais beaucoup angoissé sur ce que j’allais faire, alors rendezvous au Centre d’Information et d’Orientation du lycée. Là, je passe un test sur un ordinateur… Je me souviens de l’imprimante qui crachait son papier perforé en accordéon. Le résultat tombe… je dois faire artiste. Ah ! Je viens pas du tout de ce milieu. Jusque là, je n’étais que le gars de la classe qui dessinait bien les mecs musclés avec de grosses bites et des nanas à poils (ça, ça n’a pas changé). J’allais pas aux expos, je lisais Spirou et Fluide Glacial… Bon, ben je serai artiste… Après le bac, je suis allé à la fac d’arts plastiques de Saint-Charles (Paris I - Panthéon Sorbonne). C’était un cloaque. Je me suis chié dessus. Il y avait pas d’avenir là. Alors j’ai fait tous les concours d’écoles d’art publiques d’île de France et je me suis fait rétamer partout sauf pour une prépa publique à 1h40 de chez moi… Laisse tomber ! là bas, je suis tombé amoureux de tous les arts d’un coup ! Pour la 1 ère fois de ma vie, j’ai travaillé comme un chien. C’était une période très intense, il y avait en même temps les championnats junior de boxe. Putain, j’ai pas vu une meuf de toute l’année. Le matin, dès 5 heures, je bossais pour l’école. Le soir, c’était entraînement. À l’époque, ma seule idée c’était qu’il fallait que je m’en sorte… que j’ai la Mercedes. Et avec l’art, ça, c’était jouable. À la fin de l’année, j’ai eu tous mes concours et je suis devenu champion de France junior. Après, je suis rentré aux Arts Déco. J’ai adoré, ça m’a transformé ! J’ai pu toucher à tout ! Je frolais l’idée de l’art total… C’était d’ailleurs un des sujet de mon projet de fin d’année. Aujourd’hui je fais aussi bien de la BD, de l’illustration, de la peinture, de l’animation, de la photo que de la musique… En fait ça ne fait pas si longtemps que j’assume l’horizontalité de la pluridisciplinarité. Je me passionne pour la préhistoire. À l’époque, l’homme était et se devait d’être pluridisciplinaire. Il ceuillait, chassait, faisait du feu, peignait des grottes etc. C’est le capitalisme qui a emmené, au XIX ème siècle, la spécialisation… mais bon, faut pas m’allumer là-dessus… ça va finir en exégèse de Mélenchon ;-) Mon projet de fin d’année, jouait avec cette idée d’art total. « Stéphane Fourier ou la grosse saloperie », une expo performance qui se tenait dans deux salles. La première, c’était l’art autour de ce personnage, avec peinture, philosophie, installation, performance. Il y avait un videur qui invitait les gens à se mettre à 4 pattes pour passer dans l’autre salle par un genre de conduit, comme un côlon. Là, c’était les déclinaisons marketing autour du personnage qui était devenu une marque. Il y avait des protège-slip Stéphane Fourier par exemple. À la fin, le personnage était assassiné par son double marketing. Et on vendait les journaux qui racontait l’événement. Ouais, c’était une sorte de critique de la société de consommation. Pour moi, c’est un crime de considérer que l’art est un produit. Walt Disney par exemple est un criminel ! Un artiste se doit d’être politique. dans ce projet, il y avait plus ou moins les prémisses de Pffuit Pffuit Pffuit (une série déglingo de 32 épisodes mélangeant tournage et animation qui raconte les aventures écolos d’un héron partagé entre son corps et sa tête, diffusée sur France 4). Mis à part les personnages à grosse bite, on y retrouve des trucs qui m’habitent, une critique non frontale de la société. Je me souviens d’un slogan d’une manif écologiste « Nous ne défendons pas la nature, nous sommes la nature qui se défend !» Mon slogan à moi c’est «Dans la vie, le plus important, c’est la vie elle-même »… y’a ces idées dans Pffuit Pffuit Pffuit. Pour demain ? J’ai un cahier épais comme ça (8cm entre deux doigts) plein de pulsion d’écriture, de dessins, peintures, de théâtre, de musique. Trop peut être ? Je m’embourbe un peu. Alors faire des boulots de commande, illustrations ou animations ça m’aère un peu. Et je continue la boxe, je donne des cours. Je pratique encore, cela reste un énorme plaisir, encore plus qu’au début car je pensais trop aux médailles et aux titres. Paradoxalement aujourd’hui que je suis plus dans le beau geste, je crois que je suis plus. Je ne sais pas si il y a un lien entre mon art et la boxe… en fait je hais les films sur la boxe. Peut être qu’il y a une part d’amertume. Malgré les succès, je n’ai pas eu la carrière que j’aurai voulu avoir. La boxe c’est un sport qui n’accepte aucun compromis. École d’art et tout ça, au final c’est la boxe qui en a pâti. Et puis, les représentations de la boxe dans les films, ou autres, sont en bien en deça de la réalité. Monter sur un ring, c’est une expérience tellement violente. Les films traitant de la boxe sont bien une preuve ou un symbole de la fragilité d’une œuvre d’art, voire de sa petitesse. On est loin de la réalité, la boxe c’est la réalité,comme la nature… L’art propose juste une illustration de la réalité. Quantité de travail nécessaire ? Plaisir… ? À la réflexion, voilà les lien que je ferais entre mes deux activités. Et puis une petite touche de lucidité aussi…