You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
TOUT PrèS de chez vous<br />
Dans certains articles de cette page, les noms des personnes ont été volontairement changés pour des<br />
raisons de sécurité.<br />
BOUAKé<br />
29 juin 20<strong>07</strong>-29 juin <strong>2017</strong>. Voilà dix ans que le Fokker 100 (avion<br />
présidentiel ) transportant le PAN guillaume Soro, alors Premier ministre,<br />
et 43 passagers a été attaqué à l’arme lourde à l’atterrissage à<br />
Bouaké. Bilan: trois personnes tuées, plusieurs blessées et traumatisées.<br />
Chose curieuse, on nous apprend qu’aucune victime n’a été<br />
prise en charge par l’Etat jusque-là. L’enquête sur cet “accident”<br />
n'avance pas non plus. Des victimes de cette attaque racontent.<br />
Eddy Image, photographe est l'un des rescapés de cette<br />
attaque meurtrière.<br />
10 ans après l’attaque<br />
du Fokker 100, l’enquête piétine<br />
Après la signature de l’accord<br />
de Ouagadougou en avril<br />
20<strong>07</strong> faisant de Soro Guillaume<br />
le Premier ministre de<br />
Gbagbo Laurent, les responsables<br />
de la rébellion sont divisés. Certains<br />
encouragent le Premier ministre, d’autres<br />
par contre le qualifient de traitre qui aurait<br />
vendu la lutte. Deux mois plus tard, c’est<br />
dans cette ambiance de suspicion que l’attentat<br />
du Fokker 100 est perpétré, le 29 juin<br />
20<strong>07</strong>.<br />
Une journée de sang et de<br />
larmes<br />
« Ce jour-là, nous accompagnions le Premier<br />
ministre Soro à Bouaké pour aller installer<br />
les magistrats afin que les audiences<br />
foraines débutent. C’était en vue de l’election<br />
présidentielle qui a finalement eu lieu<br />
en 2010. Vers 10h30, nous avons embarqué<br />
avec 44 passagers. L’ambiance est bonne<br />
dans l’avion. Quelques instants plus tard,<br />
on nous annonce qu’on va atterrir bientôt.<br />
Il est 11h. Soudain, nous entendons une déflagration.<br />
Dans la cabine passagers où<br />
nous étions, mon collègue et ami intime<br />
nommé Palenfo, s’est effondré. Il saignait<br />
abondamment de la tête. J’ai enlevé mon<br />
tee-shirt pour couvrir sa tête. Mais le teeshirt<br />
était trempé de sang. Mon collègue<br />
avec qui j’étais Soro K., a enlevé son tricot<br />
et en a fait autant. Mais rien à faire. Il saignait<br />
grave. Pour nous, il avait peu de<br />
chance de s’en sortir. J’ai avancé dans la cabine<br />
Vip , j’y ai trouvé Diomandé, un garde<br />
du Premier ministre, sévèrement touché à<br />
la poitrine. Il nous disait de lui trouver de<br />
l’eau à boire et d’enlever ses chaussures. J’ai<br />
vu des corps déchiquetés. C’était horrible!<br />
Nous sommes descendus de l’avion avec<br />
notre ami et nous avons été tous évacués<br />
dans un centre de santé. Là-bas, les médecins<br />
de la Licorne ont prêté main forte à<br />
ceux de Bouaké pour sauver Palenfo L.<br />
Malheureusement, Diomandé est mort.<br />
C’est une journée que je ne peux oublier » ,<br />
raconte Eddy Image, photographe du lieutenant-colonel<br />
Wattao.<br />
Ce jour-là, poursuit-il, c’est Wattao qui a<br />
porté Soro au dos pour le mettre à l’abri<br />
dans un véhicule.<br />
L’enquête piétine, pas de prise<br />
en charge<br />
Après ce drame, place à la prise en charge<br />
des victimes et parents de victimes. « Notre<br />
ami Palenfo L. a eu le soutien personnel de<br />
Soro Guillaume et non de l’Etat. Il a été évacué<br />
en France pour des soins intensifs.<br />
Heureusement, lui qui avait perdu l’usage<br />
de la parole, commence à prononcer<br />
quelques mots. Mais il doit faire une autre<br />
opération chirurgicale. Sa plaie n’est pas<br />
encore totalement guérie après 10 ans.<br />
Soro a assez fait pour lui. Il faut que l’Etat<br />
le prenne en charge », nous dit-il. En réalité,<br />
sans soutien, Palenfo L. est pris en charge<br />
par Eddy Image à présent. Le patient porte<br />
toujours un bonnet pour cacher les cicatrices<br />
et sa plaie à la tête.<br />
Par ailleurs, pour ce qui est de l’enquête ouverte<br />
dans un premier temps par l’Onuci,<br />
les choses n’ont guère bougé. L’onuci a finalement<br />
confié l’enquête à l’Etat de Côte<br />
d’Ivoire. Jusqu’à présent, rien de concret sur<br />
les auteurs de l’attentat.<br />
Pour ce qui est de la prise en charge des 44<br />
victimes de cette attaque, le président de<br />
l’amicale Fokker 100, Siratigui Konaté que<br />
nous avons eu au téléphone a déclaré que<br />
seul le président de l’Assemblée nationale<br />
aurait apporté son soutien. « Il a construit<br />
une maison à chaque famille des défunts. Il<br />
a aidé les autres blessés à se soigner», affirme-t-il.<br />
Pourquoi la commémoration des<br />
10 ans de l’attaque à Abidjan<br />
et non à Bouaké ?<br />
A cette question, Siratigui nous dit que c’est<br />
dû à une succession de manquements.<br />
D’abord, « les plants d’arbres qu’on devait<br />
planter à Bouaké n’étaient pas disponibles.<br />
C’est à Bingerville à Abatta que l’Office national<br />
des parcs et réserves (Oipr) nous a<br />
trouvé un espace et nous a apporté des<br />
plants », nous explique-t-il.<br />
Ensuite, quand le ministre de la Communication<br />
et de la Poste, Bruno Koné dit que le<br />
gouvernement n’a pas été associé à cette<br />
commémoration, Siratigui rétorque que le<br />
ministre des Sports aurait reçu un courrier<br />
ainsi que le préfet de Bouaké. Où est la vérité<br />
?<br />
En somme, le mystère reste entier concernant<br />
cet “accident”.<br />
Koné Sibirinan<br />
6 • ALLO POLICE ! N°<strong>389</strong> du <strong>03</strong> au 09 juillet <strong>2017</strong>